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N
° 253

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 10 octobre 2012

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES SUR LE PROJET DE
loi de finances pour 2013
(n° 235),

TOME XIII

ÉGALITÉ DES TERRITOIRES, LOGEMENT ET VILLE

LOGEMENT

PAR M. Daniel GOLDBERG,

Député.

——

Voir le numéro : 251 (annexe 23)

SOMMAIRE

___

Pages

INTRODUCTION 5

I.— LE PLF 2013 PARTICIPE DE LA MOBILISATION EN FAVEUR DE LA PRODUCTION DE 150 000 LOGEMENTS SOCIAUX PAR AN 7

A.— UNE TROP FORTE DEMANDE DE LOGEMENT SOCIAL INSATISFAITE 7

B.— UNE STRATÉGIE FONDÉE SUR LA RESTAURATION D’UNE RELATION CONTRACTUELLE ENTRE L’ÉTAT ET ACTION LOGEMENT 9

C.— UN COUP D’ARRÊT À LA BAISSE DES AIDES À LA PIERRE 12

D.— UNE MOBILISATION ACCRUE DES BAILLEURS SOCIAUX GRÂCE À LA SUPPRESSION DU PRÉLÈVEMENT SUR LEUR POTENTIEL FINANCIER 13

E.— À MOYEN TERME, UN MODÈLE ÉCONOMIQUE DU LOGEMENT SOCIAL QUI RESTE À PRÉCISER 14

II.— L’OUTIL FISCAL AU SERVICE DU DÉVELOPPEMENT DE L’OFFRE DE LOGEMENTS 19

A.— UNE PLACE TRADITIONNELLEMENT IMPORTANTE DANS LA POLITIQUE DU LOGEMENT DONT IL IMPORTE D’ÉVALUER L’IMPACT 19

B.— LE PLF POUR 2013 COMPREND UN VOLET CONSÉQUENT DE MESURES FISCALES EN FAVEUR DU LOGEMENT 20

1. La réforme du régime d’imposition des plus-values immobilières 21

2. Le renforcement de la taxe sur les logements vacants 21

3. La systématisation de la majoration de la taxe foncière des terrains constructibles situés en zones tendues 22

4. L’amplification de la taxe sur les friches commerciales 22

5. La mise en place d’un nouveau dispositif fiscal en faveur de l’investissement locatif 22

6) La réforme des circuits de financement de la politique du logement 23

C.— D’AUTRES PISTES À EXPLORER 23

1. Instituer une contribution de solidarité urbaine 23

2. Favoriser la reconversion de bureaux vacants en logements 24

III.— L’EFFICACITÉ DES AIDES PERSONNELLES AU LOGEMENT À L’ÉPREUVE DE LA CRISE 27

A.— L’AUGMENTATION DES BÉNÉFICIAIRES D’UNE AIDE AU LOGEMENT 27

1. Bilan des prestations versées en 2011 27

2. Le PLF 2013 prévoit une hausse de 4,2 % des prestations d’aide au logement 29

B.— UNE PERTE PROGRESSIVE D’EFFICACITÉ SOCIALE DES AIDES PERSONNELLES AU LOGEMENT 30

1. Un vecteur essentiel de redistribution et de solidarité 30

2. Une efficacité sociale qui s’est détériorée au cours de la dernière décennie 30

IV.— QUELLES PERSPECTIVES POUR LE RÉSEAU DE TRANSPORTS DU GRAND PARIS ? 33

A.— LE FINANCEMENT DE LA SOCIÉTÉ DU GRAND PARIS EN 2013 33

B.— UN ENGAGEMENT CONFIRMÉ EN FAVEUR DU GRAND PARIS EXPRESS DONT IL IMPORTE AUJOURD’HUI DE PRÉCISER LA PORTÉE 34

EXAMEN EN COMMISSION 37

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 39

« Il ne faut pas que soient établis des espaces infranchissables entre ceux qui sont très bien logés et ceux qui sont mal logés »

L’Abbé Pierre à l’Assemblée nationale le 24 janvier 2006

MESDAMES, MESSIEURS,

Alors que nous célébrons cette année le centenaire de la naissance de l’Abbé Pierre, les « espaces infranchissables entre ceux qui sont très bien logés et ceux qui sont mal logés » qu’il redoutait, restent malheureusement, un défi majeur pour notre société.

Notre pays est aujourd’hui confronté à une série de graves difficultés qui peuvent être analysées comme autant de « crises » du logement que les effets de la crise économique viennent accentuer. Pénurie de l’offre dans certaines zones dites « tendues », déficit chronique de logements sociaux, flambée des prix immobiliers, recul de l’activité dans le secteur du bâtiment, augmentation du taux d’effort des ménages pour se loger et situations insupportables de mal-logement : tels sont les principaux défis qu’il faut aujourd’hui relever de manière urgente.

Sans attendre, le Gouvernement a pris une série d’initiatives destinées à enrayer cette évolution et favoriser la construction de 500 000 logements par an, dont 150 000 logements sociaux :

Ÿ publication d’un décret encadrant l’évolution des loyers dans les zones marquées par de fortes tensions du marché locatif et mise en place d’observatoires du logement pour lesquels 5 M€ sont inscrits dans le PLF pour 2013 ;

Ÿ relèvement de 25 % du plafond du livret A et doublement du plafond du LDD dès le 1er octobre 2012 pour mobiliser davantage de financements pour le logement social ;

Ÿ examen du projet de loi relatif à la mobilisation du foncier public en faveur du logement et au renforcement des obligations de production de logement social afin d’accélérer le rythme de construction de logements sociaux ;

Ÿ lancement du chantier de rénovation thermique d’un million de logements par an lors de la conférence environnementale ;

Au-delà de ces premières mesures, le PLF pour 2013 prévoit une série de dispositions fiscales destinées à susciter un « choc d’offre » de logements tandis qu’un coup d’arrêt est donné à la diminution des aides à la pierre, qui s’élèveront à 500 M€ en 2013 (en augmentation de 11 % par rapport à l’année précédente). Grâce au rétablissement d’une relation contractuelle avec Action logement, les aides à la personne seront également en hausse avec une revalorisation sur la base de l’évolution de l’indice de référence des loyers (IRL) pour préserver le pouvoir d’achat des ménages les plus fragiles.

Des efforts importants ont donc été engagés qu’il conviendra d’amplifier au cours des prochains mois pour surmonter ces « crises » du logement que les difficultés économiques actuelles viennent aggraver. Beaucoup reste à faire afin notamment de résorber l’habitat indigne qui représente, dans certains départements comme la Seine-Saint-Denis, un fléau intolérable.

Le projet de budget pour 2013 ne constitue donc qu’une étape supplémentaire dans la mobilisation en faveur du logement à laquelle votre rapporteur est profondément attaché.

I.— LE PLF 2013 PARTICIPE DE LA MOBILISATION EN FAVEUR DE LA PRODUCTION DE 150 000 LOGEMENTS SOCIAUX PAR AN

Produire 500 000 logements par an, dont 150 000 logements sociaux, représente un objectif « ambitieux mais nécessaire » (Jean-Marc Ayrault). La construction de logements sociaux reste en effet très insuffisante pour répondre à la demande, en particulier dans certaines zones dites « tendues ». Dans le but d’accentuer les efforts dans le domaine, le PLF pour 2013 prévoit que les aides en faveur du logement locatif social passeront d’un milliard à 1,45 milliard d’euros, dont 500 millions d’euros de crédits inscrits sur la mission « égalité des territoires, logement et ville », en hausse de 11 % par rapport à 2012.

Ce budget est également marqué par le retour à une relation contractuelle entre l’État et Action logement qui permettra de renforcer les financements accordés aux bailleurs sociaux. Grâce au recours à un emprunt auprès de la Caisse des dépôts et consignations (CDC), ces financements passeront, en effet, à 1,5 Md€ par an, soit 950 M€ d’équivalent-subventions contre 490 M€ en 2012.

Enfin, le PLF 2013 se caractérise par une volonté forte de recentrage des subventions accordées par l’État sur l’offre nouvelle, dans les zones soumises à de fortes tensions sur le marché immobilier.

A.— UNE TROP FORTE DEMANDE DE LOGEMENT SOCIAL INSATISFAITE

Au 31 décembre 2010, le parc social comprenait 4 576 000 logements dont 4 456 000 en métropole et 120 000 dans les départements d’outre-mer, en hausse de 1,6 % par rapport au 31 décembre 2009. Près de la moitié (48 %) de ces logements est propriété des organismes publics (Offices publics de l’habitat – OPH –), 42 % des sociétés anonymes, 7 % des sociétés d’économie mixte (SEM) et 3 % d’autres types d’organismes. Sur la décennie 1999 – 2009, le parc social s’est accru, en moyenne, de 43 000 logements par an France métropolitaine (en 2010, il a augmenté de 70 000 logements).

Toutefois, en dépit de ces efforts, la France se caractérise par un déficit important de production de logements locatifs sociaux. Compte tenu du taux d’occupation du parc locatif social (96,77 %) – dont le delta correspond en moyenne à une vacance technique nécessaire à son exploitation – et de sa répartition géographique, le parc locatif social ne permet, en effet, pas de répondre à la demande, par ailleurs très importante. On estime aujourd’hui à 1,7 million le nombre de personnes en attente d’un logement social, dont 30 % en Île-de-France. Cette région est suivie par la région Rhône-Alpes (9,7 %), la région Provence-Alpes-Côte d’Azur (7,4 %) et la région Nord-Pas-de-Calais (7,1 %), comme l’illustre le tableau ci-après :

NOMBRE DE DEMANDES DE LOGEMENTS SOCIAUX PAR RÉGION
(JUILLET 2012)

Région

Demandes actives

%

Île-de-France

519 008

29,8 %

Alsace

39 468

2,3 %

Aquitaine

72 625

4,2 %

Auvergne

23 955

1,4 %

Bourgogne

32 228

1,8 %

Bretagne

55 122

3,2 %

Centre

55 844

3,2 %

Champagne-Ardenne

30 648

1,8 %

Franche-Comté

17 967

1,0 %

Languedoc-Roussillon

62 873

3,6 %

Limousin

9 699

0,6 %

Lorraine

35 234

2,0 %

Midi-Pyrénées

49 474

2,8 %

Nord-Pas-de-Calais

122 984

7,1 %

Basse-Normandie

34 929

2,0 %

Haute-Normandie

50 713

2,9 %

Pays de la Loire

94 892

5,4 %

Picardie

42 520

2,4 %

Poitou-Charentes

31 558

1,8 %

Provence-Alpes-Côte d’Azur

129 672

7,4 %

Rhône-Alpes

169 543

9,7 %

Corse

6 356

0,4 %

Total métropole

1 687 312

96,8 %

Guadeloupe

8 906

0,5 %

Guyane

6 437

0,4 %

Martinique

10 452

0,6 %

La Réunion

29 650

1,7 %

Total

1 742 757

100 %

Pour les départements du Rhône et de la Corrèze, ajout des données par enquête spécifique. Ces chiffres résultent de la mise en place, en 2011, du numéro unique d’enregistrement de la demande locative sociale qui permet de connaître de manière plus précise et détaillée les caractéristiques des demandes de logements sociaux sur un territoire. - Source : ministère de l’égalité des territoires et du logement

Sur les 1,7 million de demandeurs, 1,17 million correspondent à une demande externe de ménages qui aujourd’hui éprouvent des difficultés à se loger dans le parc privé, dans des conditions d’hygiène et de sécurité souvent insatisfaisantes.

B.— UNE STRATÉGIE FONDÉE SUR LA RESTAURATION D’UNE RELATION CONTRACTUELLE ENTRE L’ÉTAT ET ACTION LOGEMENT

En 1953, le législateur a généralisé la démarche volontaire de certains employeurs en faveur du logement de leurs salariés, en imposant aux entreprises de contribuer au financement de la construction à hauteur de 1 % de la masse salariale. Cette contribution, dont l’appellation juridique est « Participation des employeurs à l’effort de construction » (PEEC), a conservé le nom de « 1 % Logement » dans le langage commun, alors même que son taux n’est plus que de 0,45 % depuis 1991. Le « 1 % Logement » a été renommé « Action logement » par les partenaires sociaux lors du conseil d’administration de l’Union d’économie sociale du logement (UESL) du 22 juillet 2009 (1).

La loi n° 2009-323 du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et de lutte contre l’exclusion a profondément réformé le dispositif en vue de réorienter l’utilisation des ressources vers les politiques prioritaires dans le domaine du logement et de limiter les coûts de gestion. Désormais, les catégories d’emploi des ressources issues de la PEEC et leurs montants, qui relevaient jusqu’alors d’accords-cadres, appartiennent à l’État dans un cadre législatif et réglementaire, établi après concertation avec les partenaires sociaux. Deux décrets définissent ainsi le régime des emplois d’Action logement et fixent le montant des enveloppes minimales et maximales des ressources d’Action logement qui leur sont consacrées.

Pour la période triennale 2009 – 2011, la somme des enveloppes cibles était de l’ordre de 4 Md€, soit le montant prévisionnel des ressources annuelles d’Action logement (2). Toutefois, en 2011, le niveau des emplois s’est élevé à 3 518 M€, en forte baisse par rapport à 2010, pour un niveau de ressources de 3 543 M€. L’année 2011 est ainsi marquée par une diminution des montants affectés à l’ensemble des catégories d’emplois (les données restent provisoires).

Le tableau ci-après établit un bilan des emplois sur cette période, qui se caractérise par une baisse des aides directes aux particuliers (de l’ordre de 3,8 Md€ de décaissements contre 5,6 Md€ sur la période triennale précédente) avec, notamment, la fin de la distribution des prêts travaux depuis début 2011. En revanche, l’ensemble des aides au logement social et intermédiaire s’affiche en hausse avec près de 3 Md€ d’engagements, dont 1,3 Md€ pour les prêts locatifs sociaux et les prêts logements intermédiaires.

EMPLOIS ET RESSOURCES DE LA PEEC DE 2009 A 2011

LES FLUX FINANCIERS FONDS RÉGLEMENTÉS – ACTION LOGEMENT

(en millions d’euros)

Emplois

2009

2010

2011*

Ressources

2009

2010

2011*

Concours personnes physiques

1 271,8

1 310,6

1 074,1

Collecte

1 565,4

1 539,8

1 568,6

dont :

     

– sous forme de subventions

1 421,6

1 395,3

1 414,2

– Pass Foncier

105,6

502,6

792,8

– sous forme de prêts

143,8

144,5

154,4

– Prêts accession

464,9

428,2

 

Retours de prêts aux personnes morales

742,5

683,3

647,2

– Financements de travaux

     

dont :

     

Concours personnes morales

1 021,6

1 024,7

791,8

– Filiales et autres entreprises liées

212,7

205,0

165,8

dont :

     

– Autres participations

113,8

81,5

80,2

– Fonds propres et quasi-fonds propres :

43,9

121,4

77,9

– Autres personnes morales

416,0

396,8

401,2

– Subventions

237,3

419,9

315,5

Retours de prêts personnes physiques

1 775,7

1 580,3

1 312,3

– Prêts LLS et intermédiaires

558,9

369,2

398,3

dont :

     

Politiques nationales

1 886,9

2 293,9

1 652,3

– Prêts accession

623,4

512,3

490,2

dont :

     

– Prêts travaux

783,4

755,6

608,1

– Associations Foncière Logement

750,0

600,0

400,0

Ressources issues de cessions d’actifs

14,0

117,0

14,9

– PNRU

595,0

1 100,0

615,0

       

– ANAH (+PNRQAD)

490,0

525,0

575,0

       

– GRL

29,5

48,1

53,3

       

Emplois non ventilés

174,1

91,6 nd

         

Total

4 354,5

4 720,8

3 518,1

Total

4 097,6

3 920,4

3 543,0

nd : non disponible - * Chiffres provisoires - Source : ANPEEC – Rapport sur la programmation des emplois de la PEEC annexé au PLF pour 2013.

Pour la période suivante (2012 – 2014), les décrets du 12 mars 2012 relatifs aux « emplois » et aux « enveloppes » annuelles minimales et maximales ont arrêté un cadrage financier d’un montant cible total sur trois ans de 10,8 Md€. Les objectifs fixés étaient notamment de mettre en œuvre les priorités des partenaires sociaux, en particulier l’Accord national interprofessionnel (ANI) pour le logement des jeunes, de développer une offre de logements locatifs économiquement accessibles et d’assurer le financement de la rénovation urbaine, de l’amélioration du parc privé et de la lutte contre l’habitat indigne.

Ce cadrage est appelé à évoluer en fonction de l’accord conclu entre l’État et l’UESL pour la période 2013 – 2015. Cet accord, qui marque le retour à un régime conventionnel, prévoit notamment :

Ÿ Un prélèvement décroissant au bénéfice du fonds national d’aide au logement (FNAL)

L’article 30 (paragraphe IV) du projet de loi de finances pour 2013 prévoit d’affecter une partie des ressources de la PEEC au FNAL, via un prélèvement sur les collecteurs, au prorata de leur collecte, de 400 M€ maximum au titre de 2013, 2014 et 2015 (cf. infra). Ce montant est appelé à diminuer en 2014 et 2015, dans le cadre d’une réforme du financement de la rénovation urbaine qui conduira à établir des sources nouvelles de financement en lieu et place du prélèvement sur le potentiel financier des bailleurs sociaux (cf. infra). Parallèlement, le financement de l’ANAH par l’UESL sera supprimé, l’agence étant financée par d’autres ressources (produit de cession des quotas d’émission de CO2).

Ÿ Une contribution au financement de l’ANRU (3)

Ÿ Une augmentation des prêts et subventions au logement social

Afin d’accompagner les organismes de logement social dans l’atteinte de l’objectif de 150 000 nouveaux logements sociaux, l’accord prévoit qu’Action logement renforce ses aides en faveur du logement locatif social, au travers de prêts et de subventions au logement social, à hauteur de 1,5 Md€ par an sur les trois prochaines années.

Action logement sera en capacité de fournir cet effort grâce au recours à un emprunt auprès de la Caisse des dépôts et consignations (CDC), dont les modalités seront déterminées avec l’UESL. Cet emprunt portera les financements aux bailleurs sociaux à 1,5 Md€ par an, soit 950 M€ d’équivalent-subventions, le double des montants du décret des emplois de mars 2012.

À la suite des auditions qu’il a conduites, votre rapporteur se félicite de la visibilité qu’instaure cet accord sur le financement, pour une période de trois ans, des aides en faveur du logement locatif social ou celui de la politique de renouvellement urbain. Toutefois, il juge nécessaire, dans le même temps, de veiller à la pérennité financière du réseau, dont les ressources baissent régulièrement en raison de la diminution des retours de prêts, liée des interventions croissantes sous forme de subventions, pour notamment contribuer au financement des politiques nationales. Cette question sera particulièrement sensible à partir de 2016, date à laquelle la soutenabilité du modèle financier d’Action logement ne pourra, d’après M. Philippe Van de Maele, Président du Directoire de l’UESL, supporter un prélèvement supérieur à 500 M€ par an. Plusieurs facteurs doivent en effet être pris en compte, dont un montant prévisionnel des ressources annuelles en baisse (environ 2,5 Md€ contre 3,5 Md€ en 2011) du fait notamment de la diminution des revenus issus des emplois, la nécessité de rembourser le prêt contracté auprès de la CDC et l’épuisement des efforts d’optimisation des coûts de gestion.

C.— UN COUP D’ARRÊT À LA BAISSE DES AIDES À LA PIERRE

La réalisation de ces logements mobilise actuellement trois produits financiers : le PLA-I (prêt locatif aidé d’intégration), le PLUS (prêt locatif à usage social) et le PLS (prêt locatif social). Seules les opérations financées en PLUS ou PLA-I bénéficient d’une subvention de l’État ; le PLS bénéficie, pour sa part, d’une aide de circuit (taux de prêt sur ressources du livret A) et d’aides fiscales (TVA à 7 % pour les opérations agréées à partir du 1er janvier 2012 et exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties – TFPB –). Les logements financés en PLA-I sont destinés à héberger des ménages qui rencontrent des difficultés d’insertion particulières : le niveau des plafonds de ressources qui leur est applicable représente entre 55 % et 60 % du PLUS, selon les catégories et la localisation.

Le PLF pour 2013 prend non seulement en compte un objectif renforcé de production de logement social (150 000 par an au lieu de 120 000 précédemment) mais, en outre, il oriente qualitativement cet effort afin de favoriser la réalisation de logements très sociaux (PLA-I et PLUS). Ainsi, les 150 000 logements sociaux devront se décomposer comme suit :

- 33 000 logements financés par PLA-I

- 69 000 logements financés par PLUS

- 48 000 logements financés par PLS.

Un effort très important sera donc réalisé sur les produits les plus sociaux, les PLA-I, dont les objectifs vont augmenter de près de 50 % entre 2012 et 2013, contre + 25 % pour les PLUS et seulement + 13 % pour les PLS. Il s’agit d’inverser une tendance consistant à privilégier les logements financés par PLS qui n’ouvrent pas droit à une subvention de l’État. Si ces derniers logements répondent indéniablement à des besoins spécifiques, ils ne peuvent venir se substituer à une offre très sociale, destinée aux ménages les plus modestes. Pour atteindre ces objectifs, le programme 135 « Urbanisme, territoires et amélioration de l’habitat » sera doté en 2013 d’une enveloppe d’autorisations d’engagement de 500 M€, en hausse de 50 M€ par rapport à 2012 (+ 11 %).

Cette progression s’accompagne d’un effort de recentrage des subventions accordées par l’État sur l’offre nouvelle, dans les zones géographiques caractérisées par une forte tension du marché locatif. Dans cette perspective, l’enveloppe destinée à la surcharge foncière – qui contribue à l’implantation des logements sociaux dans les zones où ils sont nécessaires, même si les coûts d’achat ou d’aménagement des emprises sont élevés –, sera portée à 214,9 M€, soit une augmentation de 13 % par rapport à 2012. Outre l’offre nouvelle, ces crédits contribueront également au financement des démolitions (3 M€) et des actions d’accompagnement (7 M€).

Enfin, un projet de « super PLA-I » a été évoqué à plusieurs reprises qui témoigne de cette volonté de promouvoir une nouvelle offre à loyer très social. À la suite des auditions qu’il a conduites, votre rapporteur s’interroge sur le périmètre de ce nouveau prêt dans la mesure où les coûts associés sont élevés, sans retombée forcément significative sur les loyers de sortie demandés aux bénéficiaires des logements ainsi financés (4).

D.— UNE MOBILISATION ACCRUE DES BAILLEURS SOCIAUX GRÂCE À LA SUPPRESSION DU PRÉLÈVEMENT SUR LEUR POTENTIEL FINANCIER

La « loi MOLLE » du 25 mars 2009 a institué un prélèvement sur les ressources financières des organismes d’habitations à loyer modéré (Hlm), lorsque ces derniers n’investissaient pas suffisamment. Ce dispositif ayant été censuré par le Conseil constitutionnel (5), il a été réintroduit par la loi de finances rectificative du 20 avril 2009 « en vue d’inciter ces organismes à développer leurs investissements ». À la suite d’une nouvelle réforme intervenue lors de l’adoption de la loi de finances pour 2011, les organismes Hlm et les sociétés d’économie mixte (SEM) sont soumis à un prélèvement assis sur leur potentiel financier (6)PPF –, dont le produit annuel est fixé à 175 M€, et à une majoration de la part variable de la cotisation additionnelle qu’ils versent à la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS), plafonnée à 70 M€ pendant trois ans. Ces deux ressources abondent un fonds géré par la CGLLS qui contribue au développement et à l’amélioration du parc de logements locatifs sociaux appartenant aux organismes Hlm et aux SEM et à la rénovation urbaine.

La suppression de ce dispositif, à compter de 2013, a été confirmée par le Premier ministre lors du Congrès de l’USH, qui s’est tenu à Rennes, en septembre dernier. Elle avait d’ailleurs été inscrite dans le projet de loi relatif à la mobilisation du foncier public en faveur du logement et au renforcement des obligations de production de logement social, les sénateurs à l’initiative de cette mesure estimant en effet que ce prélèvement constituait un frein à la réhabilitation des logements dégradés et à la construction de nouveaux logements (7). De fait, la capacité d’investissement des organismes peut être évaluée à leur potentiel financier (l’excédent de ressources longues mobilisables dans des projets futurs) et à leur autofinancement net (les ressources générées par l’exploitation sur le dernier exercice). En moyenne, les organismes redevables du PPF en 2011 ont versé un montant correspondant à 5,8 % de leur potentiel financier 2010 et 17,4 % de l’autofinancement net 2010, en ce qui concerne les seuls organismes Hlm (hors SEM). Pour 45 d’entre eux, le poids du PPF a représenté plus de 50 % de leur autofinancement net de 2010 et, si l’on se réfère au potentiel financier, il a représenté plus de 10 % du potentiel financier

La suppression de ce dispositif à compter du 1er janvier 2013, qui devrait être inscrite dans le projet de finances rectificative présentée d’ici la fin de l’année, doit permettre aux organismes Hlm de retrouver de plus grandes marges de manœuvre pour contribuer à la réalisation de 150 000 logements sociaux par an. La question de la mutualisation des ressources reste néanmoins posée, comme l’a souligné Mme Marie-Noëlle Lienemann, présidente par intérim de l’Union sociale pour l’habitat (USH), lors du Congrès de l’USH précédemment évoqué. Plusieurs pistes de réflexion ont été lancées, dont la création d’un fonds réunissant des fonds propres des organismes ou la possibilité de déposer les garanties de loyers des 4,5 millions de ménages locataires Hlm auprès de la CDC. Cette orientation est indispensable pour concentrer les efforts là où les besoins sont les plus urgents à satisfaire et parvenir à une relation contractuelle équilibrée avec l’État, au service du logement social.

E.— À MOYEN TERME, UN MODÈLÉ ÉCONOMIQUE DU LOGEMENT SOCIAL QUI RESTE À PRÉCISER

Au-delà de ces évolutions pour 2013, le financement du logement social est confronté à plusieurs défis parmi lesquels la raréfaction de la ressource publique – tant de l’État que des collectivités territoriales –, des mutations sociétales profondes dans un contexte d’aggravation de la crise économique (précarisation des ménages dans certaines zones urbaines très denses, décohabitation, adaptation du parc au vieillissement de la population, etc.), la hausse des coûts de construction (8) ou encore la nécessaire adaptation aux besoins différenciés des territoires. La prise en compte de ces différents paramètres conduit à s’interroger sur l’adaptation du modèle économique actuel du logement social.

Aujourd’hui, le bouclage du plan de financement d’une opération de logement locatif social mobilise les financements directs suivants :

– les subventions de l’État ;

– les subventions des collectivités locales, notamment pour faire face aux surcharges foncières ;

– la PEEC (subventions et prêts d’Action logement) ;

– les prêts de la CDC ;

– les fonds propres des organismes Hlm.

Le tableau ci-après détaille le plan de financement moyen d’un logement en 2011 :

AIDES PUBLIQUES MOYENNES – OPÉRATIONS DE LLS FINANCÉES EN 2011

(hors Anru et Foncière)

Plan de financement moyen en €

(logement ordinaire – neuf)

PLA-I

PLUS

PLS

Fonds propres

13 010

19 541

16 029

Emprunts

100 711

105 151

111 471

Aides directes et indirectes

28 581

17 253

8 558

Total TTC

142 302

141 945

136 058

Nombre de logements financés

15 027

41 888

13 905

Source : ministère de l’égalité des territoires et du logement – bilan des logements aidés – année 2011

Des aides indirectes de l’État et des collectivités locales contribuent également à l’équilibre financier d’une opération de logement locatif social (TVA à taux réduit – État –, exonération de TFPB – État et collectivités territoriales –, garanties par les collectivités territoriales des emprunts contractés par les maîtres d’ouvrage), auxquelles s’ajoutent des aides de circuit, correspondant au différentiel entre les taux des prêts de la CDC et les taux du marché.

Votre rapporteur ajoute que cet équilibre repose sur une gestion de long terme du logement (40 ans en moyenne). En outre, il varie en fonction des régions : d’après l’USH, l’emprunt contribue pour 65 % seulement au financement des opérations en Île-de-France (contre 75 % en province), le très haut niveau des coûts de production nécessitant un apport en aides publiques et en fonds propres plus élevé (9). Au total, le modèle économique du logement social implique la coexistence d’aides à la pierre et d’aides à la personne, l’accès à des financements longs et à bas niveau de taux et l’apport d’aides fiscales.

En ce qui concerne les crédits publics, l’État joue un rôle important, en particulier sur le plan fiscal, comme l’illustre le tableau ci-après qui retrace l’évolution de toutes les aides versées pour les logements sociaux agréés une même année (10).

TOTAL DES AIDES PUBLIQUES POUR LA GÉNÉRATION D’OPÉRATIONS
DE LOGEMENTS SOCIAUX AGRÉÉS UNE MÊME ANNÉE

Montant global (M€)

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

Coût total des opérations

5 293

6 445

7 397

9 321

9 601

12 020

15 183

16 137

14 577

Aide de TVA

707

861

989

1 246

1 283

1 606

1 852

1 897

1 752

Aide de TFPB (partie compensée par l’État)

0

137

471

594

612

684

678

727

662

Aide de circuit

426

502

489

862

673

975

494

563

759

Subvention État

446

306

406

452

480

572

700

648

469

Ensemble aides État

1 579

1 806

2 355

3 154

048

3 837

3 724

3 835

3 642

Source : calculs DGALN et infocentre SISAL – ministère de l’égalité des territoires et du logement

Sur le plan budgétaire, l’année 2012 a été marquée par une baisse de 10 % de l’enveloppe dédiée au logement locatif social, pour un objectif identique de production de 120 000 logements. Par rapport à 2010, deuxième année du plan de relance et année historique en nombre de logements financés, la dotation 2012 correspond à une baisse de près de 17 % des objectifs PLS/PLAI (de 93 000 à 77 500 logements) et de près de 30 % de la dotation budgétaire (de 630 M€ à 450 M€).

Cette évolution s’est traduite par une diminution des subventions moyennes de l’État qui fait courir le risque d’un désengagement de certaines collectivités territoriales, alors même qu’elles se sont fortement mobilisées au cours de ces dernières années, avec une augmentation de leur apport en fonds propres de l’ordre de 5 à 9 %, d’après M. Benjamin Dubertret, directeur du Fonds d’épargne de la Caisse des dépôts (CDC).

Au cours de la décennie passée, les bailleurs sociaux ont également augmenté de l’ordre de 6 à 12 % leur apport en fonds propres dans le montage financier d’opérations de logement social. En 2011, cette mobilisation a ainsi représenté un total de 1 968 M€ de fonds propres, pour un rythme de production d’environ 116 000 logements sociaux (11) :

QUANTITÉS DE FONDS PROPRES MOBILISÉS EN 2011
PAR LES ORGANISMES CONSTRUCTEURS

 

PLAI

PLUS

PLS

Total

Nombre de logements financés

23 483

51 542

40 864

115 889

Fonds propres mobilisés par opération (€)

13 010

19 541

16 029

 

Fonds propres totaux mobilisés (M€)

306

1 007

655

1 968

Source : Bilan des logements aidés, années 2011 (hors DOM), ministère de l’Égalité des territoires et du logement

Toutefois, ces fonds propres des organismes Hlm, alimentés pour une large part par leurs résultats d’exploitation sur leur parc amorti, ne peuvent être indéfiniment sollicités. Lors du 73ème congrès de l’USH, qui s’est tenu à Rennes en septembre dernier, sa présidente par intérim, Mme Marie-Noëlle Lienemann, a ainsi estimé que 2 Md€ supplémentaires seraient nécessaires pour passer de 120 000 à 150 000 logements sociaux par an, conformément aux objectifs du Gouvernement. Au-delà de l’estimation précise des moyens financiers supplémentaires nécessaires pour atteindre cet objectif, la question d’une mutualisation équitable des moyens financiers entre organismes – évoquée précédemment – reste posée.

Enfin, la Caisse des dépôts et consignations (CDC) joue un rôle majeur dans le financement du logement social, grâce à la transformation en prêts de longue durée des fonds d’épargne dont elle assure la gestion à partir des dépôts collectés sur des produits d’épargne réglementés : livret A, livret de développement durable (LDD) et livret d’épargne populaire (LEP). Fin 2011, l’encours total des dépôts centralisés des fonds d’épargne atteignait 222,5 Md€, (dont 184,6 Md€ sur le livret A et le LDD). Cette même année, le fonds d’épargne a attribué 22,1 Md€ de prêts dont 15 Md€ pour l’habitat social (constructions, acquisitions et réhabilitations) et la politique de la ville. Le rapport annuel pour 2011 montre qu’au sein de cette enveloppe, 10,3 Md€ ont été consacrés au logement locatif social, contribuant à la construction ou l’acquisition d’environ 96 000 logements et à la réhabilitation de près de 196 000 logements. Du fait de la hausse de l’activité des bailleurs, les montants prêtés ont ainsi triplé depuis 2005. Aujourd’hui, les prêts de la CDC représentent plus de 70 % des plans de financement.

Ces chiffres attestent d’une capacité du fonds d’épargne à financer 120 000 logements sociaux (année 2011), que le relèvement des plafonds du livret A (hausse de 25 % à compter du 1er octobre) et du LDD (doublement effectif depuis le 1er octobre 2012) doit permettre de renforcer. L’objectif de réalisation de 150 000 logements sociaux par an doit, en effet se traduire, par « une hausse de 30 à 40 % de la totalité des financements de la Caisse des Dépôts au logement social, soit près de 100 Md€ en 5 ans » (12). En vue de garantir cet objectif, une piste complémentaire serait d’abaisser le taux de commissionnement des banques sur la collecte du livret A (passage progressif à 0,5 % de la collecte). Le gain de cette diminution profiterait, en effet, aux emprunteurs et aux locataires ainsi qu’au fonds d’épargne en renforçant ses fonds propres, en proportion de l’accroissement de sa taille et de ses missions.

Des marges de manœuvre peuvent être dégagées en explorant simultanément plusieurs pistes : la durée des prêts, le développement des certificats d’énergie et de la vente Hlm pour alimenter les fonds propres, la maîtrise des coûts de construction, etc. L’objectif est de parvenir à une adaptation du modèle économique du logement social à un contexte économique et social en profonde mutation afin d’assurer la production de logements adaptés et abordables pour tous.

Enfin, le Premier ministre a dressé le constat du retrait des investisseurs institutionnels du marché de l’immobilier et souhaité organiser une table ronde afin d’examiner les modalités de leur retour sur ce marché. Il s’agit d’une réflexion essentielle à conduire, à laquelle le Parlement pourrait être utilement associé.

II.— L’OUTIL FISCAL AU SERVICE DU DÉVELOPPEMENT DE L’OFFRE DE LOGEMENTS

Dans son rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques, publié en juillet dernier, la Cour des comptes relève que les dépenses fiscales rattachées à la politique du logement ont augmenté de 49 % entre 2007 et 2011 et représentent désormais, avec 13 Md€, plus du double des crédits budgétaires. La Cour constate également qu’à côté des dépenses budgétaires et fiscales, « la fiscalité du logement constitue, par sa masse financière un important levier d’action de l’État sur le marché immobilier. Le total des prélèvements fiscaux sur le logement s’élève à 55,3 Md€ en 2010, composés des prélèvements spécifiques au logement (taxe foncière, droits de mutation…) et de la part correspondant au logement des prélèvements non spécifiques (TVA…) ».

Traditionnellement important dans la conduite des politiques publiques en faveur du logement, l’outil fiscal est, à nouveau, fortement mobilisé dans le présent projet de loi de finances.

A.— UNE PLACE TRADITIONNELLEMENT IMPORTANTE DANS LA POLITIQUE DU LOGEMENT DONT IL IMPORTE D’ÉVALUER L’IMPACT

Comme indiqué dans le rapport évaluant l’efficacité des dépenses fiscales en faveur du développement et de l’amélioration de l’offre de logements, annexé au PLF 2013, une grande variété de dépenses fiscales participe à la mise en œuvre de la politique du logement : accompagnement de l’effort de construction de logements sociaux, amélioration de l’habitat privé, soutien à l’accession à la propriété. Les leviers fiscaux de la politique du logement sont donc nombreux, permettant d’agir sur des populations ciblées.

Dans son rapport précité sur la situation et les perspectives des finances publiques, la Cour des comptes met l’accent sur trois dépenses fiscales associées à la politique du logement, dont l’impact financier est conséquent, sans pour autant que leur efficience au regard des objectifs poursuivis n’ait été véritablement évaluée :

Ÿ le crédit d’impôt sur le revenu au titre des intérêts d’emprunts contractés, instauré en 2007 et supprimé en LFI 2011, dont le coût est estimé à 1,5 Md€ d’euros en 2013 (2,1 Md€ en 2012 et 1,8 Md€ en 2011) (13;

Ÿ l’application d’un taux réduit de TVA portant sur les logements achevés depuis plus de deux ans qui représente la dépense la plus élevée avec un chiffrage pour 2013 s’élevant à 5,3 Md€, mais dont le coût reste incertain et qui n’a pas fait l’objet d’une réelle évaluation depuis un rapport de 2002 ;

Ÿ le dispositif « Scellier » de soutien à l’investissement privé locatif (1,1 Md€ en 2011) dont la Cour a souligné qu’il n’existait « aucune information, au plan national, sur le volume et la localisation des réalisations correspondant à des investissements locatifs privés financés grâce aux dépenses fiscales, ni a fortiori sur leur occupation et les loyers pratiqués » (14) alors même que les aides à l’investissement « renforcent la tension sur le foncier ».

Compte tenu des montants engagés, votre rapporteur considère qu’une évaluation approfondie des dépenses fiscales engagées en faveur du logement doit être réalisée afin d’éviter de possibles effets d’aubaine ou de substitution et répondre aux besoins des zones les plus tendues (15). D’après ses estimations, extraites des données fournies par le PAP pour 2013 de la mission « Égalité des territoires, logement et ville », les reliquats au titre des différents dispositifs d’incitation fiscale à l’investissement immobilier locatif par les particuliers (16), pourraient en effet représenter un montant de 1,6 Md€ en 2013.

D’autres dispositifs fiscaux sont inscrits dans le PLF 2013 à hauteur des montants suivants :

– Taux de TVA réduit pour les travaux d’amélioration des logements :

5 330 M€

– Exonération d’IS pour les organismes de construction de logement social :

1 000 M€

– Taux de TVA réduit pour la construction de logements sociaux :

800 M€

– Prêt à taux zéro pour l’accession à la propriété :

1 370 M€

Les mesures inscrites dans le PLF pour 2013 visent à la fois à susciter un « choc d’offre » et à soutenir la construction de logements dans les zones où les besoins sont les plus importants. Au-delà des aménagements qui peuvent y être apportés, votre rapporteur juge indispensable d’accompagner leur mise en œuvre par l’institution d’outils d’évaluation de leurs résultats.

B.— LE PLF POUR 2013 COMPREND UN VOLET CONSÉQUENT DE MESURES FISCALES EN FAVEUR DU LOGEMENT

Le PLF pour 2013 comprend plusieurs mesures fiscales en faveur du logement qui visent notamment à créer un « choc d’offre », en incitant à la mise sur le marché de biens immobiliers et de terrains constructibles.

1. La réforme du régime d’imposition des plus-values immobilières

En complément de la mobilisation du foncier public en faveur du logement (17), l’article 10 du PLF 2013 vise à mobiliser les réserves foncières privées en modifiant le mode actuel de calcul des plus-values immobilières (PVI), qui a un fort effet de rétention sur l’offre immobilière. Deux mesures sont ainsi instituées pour inciter les propriétaires à mettre très vite sur le marché leurs terrains à bâtir :

Ÿ les plus-values sur les terrains à bâtir seront désormais soumises au barème progressif de l’impôt sur le revenu, à compter du 1er janvier 2015. En outre, dès le 1er janvier 2013, l’abattement progressif pour durée de détention qui conduit à l’exonération totale de la plus-value, au bout de trente ans, sera supprimé. Il s’agit ainsi d’encourager la mise sur le marché de terrains fonciers constructibles.

Ÿ un abattement exceptionnel de 20 % sur les plus-values immobilières relatives aux biens immobiliers autres que les terrains à bâtir sera mis en place en 2013. Les conditions d’imposition restent par ailleurs inchangées (exonération de la résidence principale, taxation à 19 % et abattements pour durée de détention).

Votre rapporteur sera attentif au caractère réellement incitatif de ces mesures dont il a proposé d’aménager la période transitoire (le délai de 12 mois entre la signature de la promesse de vente et celle de l’acte authentique peut s’avérer inutilement contraignant).

2. Le renforcement de la taxe sur les logements vacants

Afin d’inciter à la mise en location ou à la vente de logements vides dans les zones « tendues », où la demande est la plus forte, l’article 11 du PLF 2013 renforce la taxe sur les logements vacants (TLV) et étend les zones où elle s’applique. Désormais, la taxe s’appliquera aux logements vacants depuis plus d’un an – contre deux actuellement – et dans les zones d’urbanisation continue de plus de 50 000 habitants où il existe un déséquilibre important entre l’offre et la demande de logement – contre 200 000 habitants aujourd’hui –. Enfin, son taux s’élèvera à 12,5 % la première année d’imposition puis à 25 % à compter de la deuxième.

Votre rapporteur rappelle que le produit de la TLV recouvré au titre d’une année, après déductions des dégrèvements accordés et du prélèvement opéré par l’État pour couvrir les frais de gestion, est versé à l’Agence nationale de l’habitat (ANAH), dans la limite d’un plafond arrêté à 21 M€ par la LFI 2012.

3. La systématisation de la majoration de la taxe foncière des terrains constructibles situés en zones tendues

Afin de libérer du foncier et de permettre la construction de logements, la majoration de la valeur locative des terrains constructibles dans les zones tendues sera renforcée. Les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre n’auront d’ailleurs plus la possibilité, dans les zones tendues, de la moduler, voire d’en exonérer leurs contribuables (article 58 du PLF pour 2013).

4. L’amplification de la taxe sur les friches commerciales

Dans le but de limiter le nombre de surfaces commerciales à l’abandon et de redynamiser les zones urbaines concernées, la taxe sur les friches commerciales s’appliquera, à compter du 1er janvier 2014, au bout de deux ans (contre cinq ans actuellement) et sera portée à 10 % la première année, 15 % la deuxième puis 20 % à compter de la troisième année (article 59 du PLF pour 2013).

5. La mise en place d’un nouveau dispositif fiscal en faveur de l’investissement locatif

Enfin, l’article 57 du PLF pour 2013 institue un nouveau dispositif en faveur de l’investissement locatif intermédiaire, visant à soutenir la création de logements neufs, destinés à la location à des loyers inférieurs au prix du marché, sous condition de ressources des locataires. L’objectif est clairement d’éviter que la part de logements locatifs neufs ne soit prépondérante dans les zones de tension intermédiaire, comme cela avait été le cas avec les dispositifs précédents, en particulier le dispositif Scellier avant son recentrage.

Ce dispositif repose sur le principe d’une réduction d’impôt sur le revenu, fixée à 18 % et répartie sur 9 ans, accordée aux contribuables qui acquièrent ou font construire, du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2016, un logement neuf dans la limite d’un montant plafonné à 300 000 euros. Ce logement devra être loué à usage d’habitation principale pendant une durée d’au moins 9 ans. Il s’agit ainsi de promouvoir une offre abordable pour les classes moyennes, dans les agglomérations en tension (la construction de 40 000 logements dès 2013 est anticipée grâce à ce dispositif).

D’une manière générale, votre rapporteur suggère une certaine vigilance sur ce type de mesure dont le coût affiché lors de sa mise en place (en l’espèce, 35 M€ en 2014 et 145 M€ en 2015) ne reflète pas le coût réellement supporté par les finances publiques pendant toute la durée de son application (cf. supra pour le dispositif « Scellier »). En outre, l’investissement locatif contraint le propriétaire à louer son bien, sous des plafonds de loyer, pendant 9 à 15 ans, tandis que les logements sociaux sont conventionnés pour une période de 15 à 40 ans. Ce type d’aides dispose, en revanche, d’une capacité avérée à exercer un soutien conjoncturel à l’investissement et à l’activité du bâtiment, ce qui se justifie pleinement dans le contexte actuel où la perte de 35 000 emplois dans le secteur a été annoncée par le président de la Fédération française du bâtiment (FFB), M. Didier Ridoret, lors de son audition par votre rapporteur. En réalité, il est aujourd’hui nécessaire de mobiliser une palette diversifiée d’instruments en vue d’apporter une réponse adaptée aux différents besoins de logement qui s’expriment sur notre territoire.

6. La réforme des circuits de financement de la politique du logement

L’article 30 du PLF pour 2013 porte sur l’amélioration de la qualité et de la performance énergétique des logements et la réforme des circuits de financement de la politique du logement. Il affecte, tout d’abord, à l’Agence nationale de l’habitat (ANAH) la totalité des recettes de la vente d’actifs carbone et des enchères sur les quotas de CO2 à compter de 2013. Puis, il institue, pour les années 2013 à 2015 un prélèvement sur la participation des employeurs à l’effort de construction (PEEC) d’un montant annuel de 400 M€ (cf. supra).

Ce prélèvement est affecté au Fonds national d’aide au logement (FNAL) chargé de financer l’aide personnalisée au logement (APL), la prime de déménagement, l’allocation de logement (ALS) ainsi que les dépenses du Conseil national de l’habitat. Ce fonds est alimenté par la cotisation des employeurs, des contributions des régimes de prestations familiales et plus marginalement par une fraction de 1,48 % du droit de consommation sur les tabacs. S’y ajoute en 2013 une fraction du prélèvement social sur les revenus du patrimoine, institué par le PLFSS, à hauteur de 448 M€. Son financement est complété par une subvention d’équilibre de l’État qui s’élèvera à 4 876 M€ en 2013 (cf infra).

C.— D’AUTRES PISTES À EXPLORER

Au-delà de ces mesures, votre rapporteur considère que deux pistes supplémentaires pourraient être utilement explorées pour favoriser le développement de l’offre de logements.

1. Instituer une contribution de solidarité urbaine

En premier lieu, votre rapporteur propose d’instituer, à titre expérimental, une contribution de solidarité urbaine (CSU) en Île-de-France.

Cette contribution correspond à un prélèvement, à partir d’un certain seuil, sur les transactions immobilières les plus importantes en montant, à la charge du vendeur. Elle vise à concrétiser l’application d’un principe « ségrégateur/payeur », tout en en confortant les ressources de l’État affectées à la production d’une offre de logements socialement accessibles au plus grand nombre. L’objectif poursuivi est de peser sur le niveau élevé des transactions dans les zones soumises à de fortes tensions et de contrecarrer les phénomènes de ségrégation sociale et de relégation territoriale qu’entraîne la flambée des prix immobiliers dans certaines zones.

La CSU repose sur un seuil de déclenchement, fixé en fonction de l’évolution récente des prix immobiliers. On constate en effet qu’en 2006, le seuil de 7 500 euros au mètre carré correspondait au dernier décile des ventes parisiennes. Début 2011, ce montant représentait le coût moyen du mètre carré, avant qu’il ne progresse encore de 10 % pour atteindre, au 2ème trimestre de l’année 2012, 8 340 € le mètre carré pour les appartements anciens (de 6 600 € le mètre carré dans le 19ème arrondissement à 13 200 € le mètre carré dans le 6ème arrondissement). Par comparaison, dans les départements de la première couronne, ce montant moyen s’élevait à 4 400 € le mètre carré (3 030 € à Aubervilliers ; 9 120 € à Neuilly-sur-seine).

En définitive, l’application de la CSU revient à ne taxer que les ventes de biens immobiliers les plus onéreuses, soit 16 % des ventes franciliennes et moins de la moitié des ventes parisiennes. Sont en effet ciblées les ventes immobilières les plus élevés : pour les deux tiers des mutations taxées (soit 10 % des mutations totales), le prélèvement est inférieur à 2,5 % de la vente effectuée. Il n’atteint 5 % du montant de la transaction que pour les ventes correspondant à des prix supérieurs à 15 000 € le mètre carré. Au total, le montant de la contribution sociale de solidarité est estimé à 375 M€, soit 0,8 % du volume des transactions immobilières en Île-de-France.

Compte tenu du caractère expérimental de cette mesure, une évaluation est nécessaire pendant sa première année d’application afin d’analyser les modalités de son éventuelle extension à l’ensemble du territoire, selon des critères différenciés en fonction de l’évolution des marchés locaux de l’immobilier.

2. Favoriser la reconversion de bureaux vacants en logements

En second lieu, votre rapporteur est favorable à l’instauration d’une taxe annuelle sur les locaux à usage professionnel vacants en Île-de-France.

La pénurie bien connue de logements dans cette région invite, en effet, chacun à se mobiliser pour accroître l’offre de logements disponibles. Or, le nombre de bureaux vacants constitue un frein au développement de cette offre. En Île-de-France, ils représentent 16 % de la surface totale, soit le double de la surface qu’ils occupent sur le reste du territoire, comme l’illustre le tableau ci-dessous :

SURFACE DE LOGEMENTS ET DE BUREAUX COMMENCÉS EN 2010

 

Bureaux

Logements

 

(en m2)

(en %)

(en m2)

(en %)

Paris

17 453

16

88 421

84

Seine-et-Marne

62 596

11

505 600

89

Yvelines

23 882

8

258 411

92

Essonne

66 857

12

481 712

88

Hauts-de-Seine

255 156

40

386 511

60

Seine-Saint-Denis

41 317

11

337 706

89

Val-de-Marne

30 174

9

310 798

91

Val-d’Oise

19 375

6

318 034

94

Île-de-France

516 810

16

2 687 193

84

France entière

2 710 344

8

32 739 753

92

Source : Sitadel2 en dates réelles – ministère de l’égalité des territoires et du logement

Afin d’inciter à la transformation des bureaux laissés volontairement vacants, l’institution d’une taxe est proposée, dont le taux serait différencié selon la localisation du bien et la nature des locaux. L’objectif poursuivi est non seulement de réguler davantage la production de bureaux et de locaux d’activité mais aussi de favoriser la reconversion de bureaux vacants en logements.

Dans le même esprit, votre rapporteur suggère d’exonérer d’impôt, pendant une période déterminée, les plus-values dégagées lors de la cession de bureaux destinés à être transformés en logement. Il s’agit là encore d’encourager la reconversion de bureaux et de locaux d’activité en logements.

III.— L’EFFICACITÉ DES AIDES PERSONNELLES AU LOGEMENT À L’ÉPREUVE DE LA CRISE

Les aides personnelles au logement figurent parmi les aides sociales les plus redistributives. Leur ciblage social est, en effet, très marqué puisque 76 % des ménages locataires bénéficiaires ont des revenus inférieurs au SMIC et 99 % inférieurs à deux fois le SMIC.

Toutefois, en dépit de ce caractère redistributif et du volume important de prestations assurées – en augmentation prévisionnelle de 4,2 % en 2013 –, 2,5 millions de ménages français (0,8 million dans le parc social et 1,7 dans le parc privé) supportent des taux d’effort net, charges comprises, supérieur à 35 % de leurs revenus. Ce constat met en relief l’impact des loyers modérés dans le parc social. Surtout, il illustre une perte de puissance des mécanismes de solvabilisation des ménages par les aides personnelles.

A.— L’AUGMENTATION DES BÉNÉFICIAIRES D’UNE AIDE AU LOGEMENT

Après une forte augmentation sur la période 2007 – 2008 et une certaine stabilité depuis 2009, le nombre de bénéficiaires d’une aide au logement a augmenté entre 2010 et 2011 sous l’effet de la crise économique et l’augmentation du chômage.

1. Bilan des prestations versées en 2011

En 2011, plus de 6,4 millions de ménages ont bénéficié d’une aide personnelle au logement, leur permettant ainsi de réduire, dans le secteur locatif comme dans le secteur de l’accession, leurs dépenses de logement (loyers ou mensualités d’emprunt et charges).

Ce nombre de bénéficiaires (toutes formes d’aides confondues) a augmenté de 1,4 % par rapport à 2010. L’augmentation la plus marquée concerne les bénéficiaires de l’APL (18) (+ 2,2 %) et, dans une moindre mesure, ceux de l’ALS (19) (+ 1,5 %), alors que dans le même temps, le nombre de bénéficiaires de l’ALF (20) a très légèrement diminué (- 0,2 %). Ces augmentations ont été essentiellement remarquées dans le secteur locatif (+ 2,5 % de bénéficiaires en APL par rapport à 2010, et + 2,1 % pour l’ALS).

Le tableau ci-après retrace cette répartition des bénéficiaires d’une aide au logement en 2011 :

BÉNÉFICIAIRES D’UNE AIDE AU LOGEMENT EN 2011

(arrondis en milliers)

APL

ALS

ALF

Ensemble des aides

Locatif hors foyers

2 268

2 023

1 016

5 307

Locatif - foyers

261

296

< 1

557

Total locatif

2 529

2 319

1 016

5 684

Accession

152

69

316

537

Total

2 681

2 388

1 332

6 401

Source : ministère de l’égalité des territoires et du logement

Les locataires – y compris les résidents de foyers – représentent 91,6 % des bénéficiaires. Parmi ceux-ci, les ménages logés dans le parc non conventionné, qui bénéficient de l’allocation logement, sont majoritaires (57,3 %). Par ailleurs, 557 000 ménages hébergés dans des foyers (foyers de personnes âgées, de travailleurs migrants, de jeunes travailleurs, de personnes handicapées, résidences sociales et maisons-relais en APL, résidences universitaires, maisons de retraite, foyers de jeunes travailleurs en ALS) bénéficient d’une aide au logement et représentent 9,5 % des locataires.

Fin 2011, les étudiants représentaient globalement 12,3 % des locataires percevant une aide au logement (723.768 bénéficiaires) et les personnes isolées et les couples sans enfants 58,8 % des bénéficiaires des aides personnelles (soit 3,8 millions personnes). Les personnes âgées de plus de 60 ans constituent une part importante de ces effectifs (environ 18 % des bénéficiaires) tandis que les jeunes de moins de 25 ans non étudiants sont environ 464 000.

Le financement des prestations versées à ces bénéficiaires s’est élevé à 16,3 Md€, hors frais de gestion, dont 5,6 Md€ en provenance du budget de l’État. Ces prestations d’aides personnelles se sont décomposées comme suit :

DÉCOMPOSITION DES PRESTATIONS VERSÉES EN 2011

(en Md€)

APL

ALS

ALF

Ensemble des aides

Locatif

6,8

4,9

3,6

15,4

Accession

0,3

0,1

0,6

1,0

Total

7,1

5,0

4,2

16,4

Source : ministère de l’égalité des territoires et du logement

Sur les 16,4 Md€ d’aides versées, les aides attribuées en allocation logement (ALF et ALS) sont sensiblement plus importantes qu’en APL. Les aides au secteur locatif représentent 94 % des prestations.

2. Le PLF 2013 prévoit une hausse de 4,2 % des prestations d’aide au logement

Le présent projet de loi de finances prévoit que plus de 17,3 Md€ de prestations seront assurées en 2013 – dont 4,9 Md€ de crédits budgétaires –, contre 16,8 Md€ en 2012, soit une hausse de 4,2 %.

Les aides personnelles au logement continueront à être revalorisées sur la base de l’évolution de l’indice de référence des loyers (IRL) pour préserver le pouvoir d’achat des ménages les plus fragiles, après une année 2012 de sous-indexation (revalorisation de 1 % seulement pour un IRL de 2,2 %, soit une perte de pouvoir d’achat de 1,2 % pour les bénéficiaires). Les modifications affectant les barèmes des aides au logement, en particulier à la baisse, ont en effet des impacts très forts sur les ménages aux ressources limitées.

Si les aides au logement passent de 16,8 Md€ en 2012 à 17,3 Md€ en 2013, elles ne sont toutefois inscrites au budget qu’à hauteur de 4,9 Md€ (5,7 Md€ en 2012). Le reste des aides sera financé, comme chaque année, par une contribution des régimes sociaux – à hauteur de 8,7 Md€ – et les cotisations des employeurs – à hauteur de 2,7 Md€ –, auxquelles s’ajouteront, en 2013, un montant de 600 M€ provenant de la contribution additionnelle sur les revenus du capital, inscrite dans le PLFSS pour 2013, et un montant de 400 M€ provenant de la PEEC (Action logement).

Le tableau ci-après détaille les emplois et les ressources du FNAL prévus en 2013 :

FONDS NATIONAL D’AIDE AU LOGEMENT (FNAL) – PRÉVISIONNEL 2013

 

Montant (en M€)

Charges

12 905

- prestations APL

7 463

- prestations ALS

5 189

- frais de gestion

253

Ressources

12 905

- contribution régimes spéciaux

4 261

- cotisation employeurs

2 749

- prélèvement PEEC

(art.30 du PLF 2013)

400

- fraction du prélèvement social sur le capital

(art.3 du PLFSS 2013)

448

- fraction de 1,48 % du droit de consommation sur les tabacs

(art.38 du PLF 2013)

171

- contribution de l’État

4 876

Source : PAP 2013 de la mission « égalité des territoires, logement et ville »

B.— UNE PERTE PROGRESSIVE D’EFFICACITÉ SOCIALE DES AIDES PERSONNELLES AU LOGEMENT

Les aides dites « à la personne » constituent le principal poste budgétaire de la politique du logement. Ciblées sur les ménages les plus modestes et fonction de leurs ressources, elles ont pour effet de réduire leurs dépenses de logement, qu’ils soient locataires ou accédants à la propriété et de limiter les taux d’effort qu’ils supportent.

En mai dernier, l’inspection générale des affaires sociales (IGAS) et la mission nationale de contrôle et d’audit des organismes de sécurité sociale ont publié un rapport sur l’évaluation des aides personnelles au logement (21). Les conclusions de ce rapport méritent d’être rappelées à plus d’un titre.

1. Un vecteur essentiel de redistribution et de solidarité

Ces conclusions mettent tout d’abord en évidence le caractère éminemment redistributif des aides personnelles au logement, ciblées sur les ménages les plus modestes. Plus de la moitié des ménages allocataires ont, en effet, des ressources inférieures au seuil de pauvreté : seuls 33,7 % des allocataires ont un emploi, 12,4 % sont au chômage et 26,1 % des locataires sont bénéficiaires de minima sociaux.

Le rapport souligne que les aides personnelles au logement constituent la prestation la plus importante entrant dans le revenu après transferts des ménages du premier quintile de revenu. Il s’agit ainsi du principal outil de redistribution du système français de protection sociale : elles permettent en effet de réduire le taux de pauvreté des ménages de 3 points, contre une diminution de 2 points pour les minima sociaux ou les prestations familiales sans conditions de ressources.

L’impact de ces aides sur les taux d’effort des ménages est important puisque, pour l’ensemble des allocataires, le taux d’effort médian passe de 35,8 % avant aide à 19,5 % après versement de l’aide, soit une division par presque deux du taux d’effort. L’aide permet ainsi, pour la moitié des bénéficiaires locataires, de ramener le poids du loyer à un cinquième de leurs revenus. En ajoutant le poids des charges, le taux d’effort médian après aide, s’établit à 30 %, soit la norme maximale communément admise par les bailleurs tant publics que privés, d’un taux d’effort supportable.

2. Une efficacité sociale qui s’est détériorée au cours de la dernière décennie

Toutefois, en dépit de ce caractère redistributif, l’efficacité globale des aides au logement masque des disparités importantes selon la composition familiale et selon le type de logement habité, dans le parc privé ou dans le parc social. Le rapport relève ainsi que la sous-indexation des paramètres du barème des aides, associée à l’appauvrissement des ménages allocataires, a entraîné une augmentation générale du taux d’effort des ménages qui est passé de 16,9 % à 19,5 % entre 2001 et 2010 pour le paiement du seul loyer. Cette augmentation a été particulièrement prononcée pour les bénéficiaires de l’ALS, notamment les personnes isolées et les couples sans enfant dans le parc privé.

La perte d’efficacité des aides personnelles résulte de leur insuffisante articulation avec la réalité des marchés du logement : aujourd’hui, 86,3 % des locataires du parc privé et 51,8 % des locataires du secteur social ont des loyers supérieurs au loyer plafond et supportent intégralement toute augmentation de leur loyer. Mais, si la situation des bénéficiaires d’une APL s’est fortement dégradée dans le parc privé, une tendance similaire s’observe également dans le parc social : si elle se poursuit, l’érosion du pouvoir solvabilisateur de l’APL est susceptible de compromettre la capacité du parc social à remplir ses fonctions.

Le rapport souligne également que certaines modalités de gestion des aides au logement fragilisent les ménages et pénalisent leur reprise d’activité. En outre, ces aides représentent un outil de prévention des expulsions et de traitement des logements non-décents qui est aujourd’hui insuffisamment exploité.

Au terme de cette évaluation, une série de recommandations sont formulées – en particulier, sur les modalités de versement des aides – dont votre rapporteur sera attentif à la prise en compte dans le projet de loi sur l’accès au logement, annoncé pour le printemps prochain.

IV.— QUELLES PERSPECTIVES POUR LE RÉSEAU DE TRANSPORTS DU GRAND PARIS ?

Instituée par la loi du 3 juin 2010, la Société du Grand Paris (SGP) a pour mission principale de « concevoir et d’élaborer le schéma d’ensemble et les projets d’infrastructures composant le réseau de transport public du Grand Paris et d’en assurer la réalisation ».

Auparavant rattachés au programme 147 « Politique de la ville et Grand Paris », les crédits de la SGP sont, dans le PLF pour 2013, transférés vers le programme 135 « Urbanisme, territoires et amélioration de l’habitat ». En outre, ces crédits ne comprennent pas l’inscription d’un montant d’un milliard d’euros au titre de la première tranche de la dotation en capital de la SGP, attendue par de nombreux acteurs, dès 2013. Parce qu’elle n’est pas immédiatement nécessaire, cette dotation sera inscrite ultérieurement, sans que cette décision ne remettre en cause, bien au contraire, l’engagement de l’État qui entend mettre cette période à profit pour préciser l’échéancier financier du projet et son phasage.

A.— LE FINANCEMENT DE LA SOCIÉTÉ DU GRAND PARIS EN 2013

Depuis la loi de finances rectificative de la fin de l’année 2010, la Société du Grand Paris est financée, non pas par une subvention de l’État, mais par des recettes fiscales qui lui sont affectées. Ces taxes sont de trois natures :

Ÿ l’imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux (IFER) s’appliquant au matériel roulant utilisé sur les lignes de transport en commun des voyageurs en Île-de-France instituée par la loi n° 2010-597 du 3 juin 2010 relative au Grand Paris évaluée à 60 M€ pour 2012 ;

Ÿ une part du produit de la taxe sur les locaux à usage de bureaux, les locaux commerciaux, les locaux de stockage et les surfaces de stationnement évaluée à 168 M€ pour 2012 ;

Ÿ la taxe spéciale d’équipement évaluée à 117 M€ pour 2012.

Au total, le produit des ressources fiscales affectées à la SGP devrait s’élever à 345 M€ en 2012. Un produit identique est attendu en 2013, si les plafonds des taxes affectées à la SGP, fixés par l’article 26 du PLF pour 2013, sont maintenus (cet écrêtement a été initialement fixé par l’article 46 de la loi de finances pour 2012).

L’enjeu porte principalement sur la fraction de la taxe sur les bureaux en Île-de-France, qui est affectée à la SGP. Comme cela a été indiqué lors des débats sur la première partie du PLF 2013 en séance publique (22), le projet de budget fixe un plafond à 168 M€ alors que les recettes potentielles dont la SGP peut bénéficier en 2013 au titre de la taxe sur les bureaux s’élève à 193 M€, selon le document consacré aux « Voies et moyens ». Le plafonnement de la fraction de la taxe sur les bureaux en Île-de-France équivaut à une perte de recettes de 25 M€.

Dans la mesure où la dynamique des taxes affectées dans la région francilienne a été supérieure à ce qui était attendu, le maintien du plafonnement a été décidé pour 2013. Mais, le ministre délégué au budget, M. Jérôme Cahuzac, s’est engagé à clarifier la situation au regard des besoins de la SGP, en particulier celui d’affirmer, auprès des investisseurs, sa capacité à rembourser des emprunts à long terme, tout à fait indispensable lors de la mise en œuvre d’un grand projet d’infrastructure.

Votre rapporteur précise qu’il est également nécessaire de s’assurer de la fin effective, à compter de 2014, du prélèvement de 95 M€, réalisé sur les ressources de la SGP, durant sur la période 2011 – 2013 pour financer l’Agence nationale de rénovation urbaine (ANRU) (23).

B.— UN ENGAGEMENT CONFIRMÉ EN FAVEUR DU GRAND PARIS EXPRESS DONT IL IMPORTE AUJOURD’HUI DE PRÉCISER LA PORTÉE

L’engagement de réaliser le projet de métro automatique du Grand Paris Express a été clairement réaffirmé par le Gouvernement à plusieurs reprises au cours de ces dernières semaines.

L’inscription d’une première tranche d’un milliard d’euros pour la dotation en capital de la SGP s’avère aujourd’hui prématurée. Le travail en cours consiste, pour la Société du Grand Paris, à lancer les enquêtes publiques sur les différents tronçons du métro, de manière échelonnée, conformément au calendrier prévu par l’accord État région de janvier 2011. Parallèlement à ces consultations, des études sont en cours de réalisation pour préciser les coûts du projet ainsi que ses modalités de financement afin d’en garantir la mise en œuvre effective : « actualiser et préciser les estimations des coûts du projet, optimiser l’organisation du travail entre les différents établissements et opérateurs qui en ont la charge, ordonner dans le temps la réalisation des futures lignes et de leurs gares et veiller à ce que les travaux d’amélioration des réseaux existants puissent parallèlement être poursuivis et accrus » (24) sont les priorités actuelles.

À l’issue de ces travaux, un plan de financement précis du projet sera établi qui pourra faire appel à une dotation en capital de la SGP, sans qu’il soit nécessaire, comme cela a été rappelé à plusieurs reprises, de l’inscrire dans la loi de programmation pluriannuelle des finances publiques puisqu’il s’agit d’une dotation en capital.

En définitive, votre rapporteur ne doute pas que l’État sera au rendez-vous et respectera son engagement de doter le capital de la SGP, d’un montant d’un milliard d’euros si nécessaire, pour permettre de lever les premiers emprunts destinés à lancer des travaux de réalisation du projet de Grand Paris Express. Il restera naturellement attentif au suivi de ces engagements afin de permettre l’amélioration des transports franciliens. Cette amélioration doit également porter sur le réseau existant, comme l’a démontré la commission d’enquête sur le RER, en mars dernier, dont une des recommandations était de sécuriser des ressources budgétaires au bénéfice des opérations de régénération des lignes du RER(25).

EXAMEN EN COMMISSION

Dans le cadre de la commission élargie, la commission des affaires économiques a examiné pour avis, sur les rapports de MM. Daniel Goldberg (Logement) et François Pupponi (Ville), les crédits de la mission « Égalité des territoires, logement et ville » (voir le compte rendu officiel de la commission élargie du 24 octobre 2012, sur le site internet de l’Assemblée nationale).

*

À l’issue de la commission élargie, la commission des affaires économiques a délibéré sur les crédits de la mission « Égalité des territoires, logement et ville ».

La commission, après avoir recueilli l’avis favorable des deux rapporteurs pour avis, donne un avis favorable à l’adoption des crédits des programmes 109, 135, 147, 177 et 337 de la mission « Égalité des territoires, logement et ville »

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

Action logement – UESL

M. Philippe Van de Maele, président du directoire

Agence nationale de l’habitat (ANAH)

Mme Isabelle Rougier, directrice générale

M. Jean-Luc Hickel, directeur général adjoint

Agence nationale pour l’information sur le logement (ANIL)

M. Bernard Vorms, directeur

Caisse des dépôts et consignations (CDC)

M. Benjamin Dubertret, directeur des fonds d’épargne

Mme Marie-Michèle Cazenave, responsable du pôle affaires publiques

Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS)

Mme Catherine Aubey-Berthelot, directrice générale

Fédération française du bâtiment (FFB)

M. Didier Ridoret, président

M. Loïc Chapeaux, chef du service des études économiques

M. Benoît Vanstavel, responsable des relations parlementaires et institutionnelles

Fédération française des promoteurs immobiliers (FPI)

M. François Payelle, président

M. Jean-Michel Mangeot, délégué général

Fédération nationale de l’immobilier (FNAIM)

M. Jean-François Buet, président élu

Mme Nathalie Ezerzer, directrice juridique

M. Nicolas Thouvenin, directeur général

Mme Isabelle d’Halluin, directrice de la communication

Fondation Abbé Pierre

M. Patrick Doutreligne, délégué général

M. Christophe Robert, délégué général adjoint

Inspection générale des affaires sociales (IGAS)

M. Olivier Veber

Syndicat national des professionnels de l’aménagement et du lotissement (SNAL)

M. Roger Bélier, président

Mme Isabelle Baer, déléguée générale

Société du Grand Paris (SGP)

M. Etienne Guyot, président

M. Pierre-Alain Jeanneney, membre du directoire

M. Julien Seneze, directeur financier

Union sociale pour l’habitat (USH)

Mme Dominique Dujols, directrice des relations institutionnelles et du partenariat

Mme Francine Albert Deltheil, chargée de mission

M. Dominique Hoorens, directeur des études économiques et financières

© Assemblée nationale

1 () Rapport sur la programmation des emplois de la participation des employeurs à l’effort de construction annexé au projet de loi de finances pour 2012.

2 () Abstraction faite des échanges avec l’UESL, qui correspondent aux emplois mutualisés entre collecteurs, les ressources de ces derniers sont essentiellement composés de la collecte (1,6 Md€ en 2011) et des retours de prêts antérieurs (2 Md€ pour les prêts long terme).

3 () Se reporter à l’avis budgétaire de M. François Pupponi sur les crédits inscrits au titre de la politique de la ville dans le PLF 2013.

4 () Une estimation sommaire conduit à un coût de 120 M€ pour la réalisation de 6 000 logements dont le loyer serait diminué de 5 %.

5 () Décision n° 2009-578 DC du 18 mars 2009.

6 () Ce potentiel est alimenté par les loyers des locataires et par les aides des collectivités locales.

7 () Rapport n° 200 de Mme Audrey Linkenheld, Assemblée nationale - 21 septembre 2012.

8 () Selon le Centre d’analyse stratégique (CAS), le logement neuf a vu son prix (foncier, construction, honoraires) augmenter de 5,5 % par an depuis 1990.

9 () USH, Le modèle économique et social du logement social, synthèse du rapport, 2012.

10 () Il ne s’agit pas de l’ensemble des aides d’État en faveur des organismes construisant des logements sociaux ; certaines aides, sans lien avec une opération, ne sont pas recensées, comme, par exemple, l’exonération d’impôt sur les sociétés, dont bénéficie le secteur.

11 () Étude d’impact annexé au projet de loi sur la mobilisation du foncier public en faveur du logement et le renforcement des obligations de production de logement social.

12 () Jean-Pierre Jouyet, directeur général de la CDC, lors du 73ème Congrès de l’USH.

13 () PAP pour 2013 de la mission « Égalité des territoires, logement et ville »

14 () Cour des comptes, rapport public annuel 2012

15 () Rapport du comité d’évaluation des dépenses fiscales et des niches sociales, juin 2011.

16 () Mesures 110251, 130208, 110252, 130214, 130204, 130204, 130209, 13023, 130215 et 130211.

17 () Projet de loi adopté le 10 octobre dernier par l’Assemblée nationale.

18 () L’aide personnalisée au logement est versée aux occupants des logements dits conventionnés, quelles que soient leurs caractéristiques familiales.

19 () L’allocation de logement à caractère social est attribuée, sous condition des ressources, à toute personne qui ne remplit pas les conditions pour bénéficier de l’ALF ou de l’APL.

20 () L’allocation de logement à caractère familial est financée par le Fonds national des prestations familiales (FNPF).

21 () Blanche Guillemot, Olivier Veber, Maxime Guilpain – Évaluation des aides personnelles au logement – mai 2012.

22 () Assemblée nationale, 3ème séance du 19 octobre, PLF 2013 – première partie.

23 () Se reporter à l’avis budgétaire de notre collègue François Pupponi sur les crédits consacrés à la politique de la ville en 2013.

24 () Communiqué de presse de la ministre de l’égalité des territoires et du logement, Grand Paris Express : les engagements de l’État seront tenus, précisés et financés, 2 octobre 2012.

25 () Rapport n°4458, Le défit du RER : placer les usagers au centre du système, commission d’enquête présidée par Daniel Goldberg et dont le rapporteur était Pierre Morange, Assemblée nationale, mars 2012.