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N
° 257

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 10 octobre 2012

AVIS

présenté

AU NOM DE LA COMMISSION DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE L’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE sur la loi de finances pour 2013 (n° 235),

TOME VI


ÉCOLOGIE, DÉVELOPPEMENT ET AMÉNAGEMENT DURABLES

TRANSPORTS AÉRIENS

PAR M. Jacques Alain BÉNISTI,

Député.

——

Voir le numéro : 251 (Tome III, annexe 16).

INTRODUCTION 5

I.— LES ORIENTATIONS DU PROJET DE BUDGET ANNEXE POUR 2013 7

A.— LES PRINCIPALES ORIENTATIONS 7

B.— PRIORITÉS, ÉCONOMIES ET RÉORIENTATIONS PAR PROGRAMME 8

1. Le programme 203, actions 11et 14 8

2. Le programme 612 « Navigation aérienne » 8

3. Le programme 613 « Soutien aux prestations de l’aviation civile » 9

4. Le programme 614 « Transports aériens, surveillance et certification » 10

C.— LA SITUATION FINANCIÈRE DES AÉROPORTS 12

1. Aéroports de Paris 12

2. Les aéroports de province 13

II.— UN TRANSPORT AÉRIEN ENTRE CRISE CONJONCTURELLE ET RESTRUCTURATION 17

A.— LA SITUATION DES PRINCIPALES COMPAGNIES AÉRIENNES 17

1. Trafic et résultats financiers en 2011 17

2. L’évolution du secteur en 2012 19

B.— LE GROUPE AIR FRANCE-KLM AU DÉFI DU PLAN TRANSFORM 2015 20

1. La croissance de l’endettement en 2011 20

2. Les résultats financiers du premier semestre de l’exercice 2012 21

3. Le plan Transform 2015 22

C.— LA SITUATION DES COMPAGNIES À BAS COÛT 24

1. Les caractéristiques du marché français 24

2. La position du Gouvernement sur les compagnies à bas coût 25

D.— DISTORSION DE CONCURRENCE ET DISTORSION SOCIALE : DES MENACES DIRECTES SUR LE TRANSPORT AÉRIEN FRANÇAIS 26

1. Distorsion de concurrence, distorsion sociale et fiscalité 26

2. L’inclusion de l’aviation dans le système européen de quotas d’émission de gaz à effet de serre : d’une heureuse initiative à un conflit diplomatique 28

III.— TRANSPORT AÉRIEN ET DÉVELOPPEMENT DURABLE 31

A.— DU GRENELLE DE L’ENVIRONNEMENT À LA CONFÉRENCE SUR L’ENVIRONNEMENT, UNE POLITIQUE MARQUÉE PAR LA CONTINUITÉÉ DES ACTIONS 31

1. La mise en œuvre du Grenelle de l’environnement 32

2. Une politique volontariste en Île-de-France 33

3. Les efforts de recherche des acteurs du secteur de l’aéronautique 34

4. Des résultats depuis 2008 35

5. Responsabiliser les compagnies et les pilotes 36

B.— LA LUTTE CONTRE LES NUISANCES SONORES AÉROPORTUAIRES 37

1. L’ACNUSA, un rôle important avec des moyens limités 38

a) L’établissement des amendes : une remise en ordre nécessaire 39

b) Les vols de nuit 40

2. Nuisances sonores et urbanisme 42

a) L’adaptation des instruments de lutte contre le bruit 43

b) L'optimisation des trajectoires : une solution technique, de nouveaux problèmes 46

c) Le déplacement des aéroports et la coopération entre aéroports : des pistes insuffisamment étudiées 46

TRAVAUX EN COMMISSION 49

I.— AUDITION DE M. FRÉDÉRIC CUVILLIER, MINISTRE DÉLÉGUÉ CHARGÉ DES TRANSPORTS, DE LA MER ET DE LA PÊCHE 49

II.— EXAMEN DES CRÉDITS 69

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 77

MESDAMES, MESSIEURS,

Les crédits pour 2013 de l’aviation civile sont présentés dans un double contexte de crise : une équation budgétaire très tendue, obligeant le Gouvernement à une politique de rigueur qui ne diffère guère sur ce point de l’action de l’ancienne majorité ; parallèlement, l’atonie économique qui frappe les pays occidentaux a de profonds retentissements sur l’activité de l’ensemble de la filière du transport aérien, au moment où les compagnies européennes doivent faire face à des mutations d’ordre structurel.

La plupart des problèmes affectant l’aviation civile, comme la sécurité et la sûreté aériennes ou les questions environnementales comme les nuisances sonores n’ont rien perdu de leur acuité. L’avis budgétaire sur le projet de loi de finances pour 2013 pourrait être quasiment identique à celui de l’an dernier… Toutefois, notre pays et l’Union européenne ambitionnent de prendre la voie d’une société plus sobre en carbone et plus respectueuse de l’environnement. Il importe en conséquence de déterminer si le secteur aérien participe à ce processus, grâce au projet de loi de finances ou à l’action des acteurs économiques.

La situation financière des compagnies aériennes, d’Air France notamment, et les relations entre les aéroports et leurs riverains constituent actuellement les principales préoccupations. Air France conduit un plan de restructuration qui devrait stabiliser son endettement lors de l’exercice fiscal 2012 - 2013 avant de retrouver des marges bénéficiaires en 2015. S’agissant des aéroports, les élus locaux et nationaux sont confrontés à un arbitrage classique, entre un outil économique indéniablement créateur de richesses et d’emplois et les nuisances de toutes sortes qu’il génère auprès des habitants. La plate-forme d’Orly est emblématique de la complexité des arbitrages puisque malgré un diagnostic clair, les responsables politiques ne peuvent parvenir à un consensus.

L’environnement est un défi pour le transport aérien. La prise de conscience, à tous les échelons de nos sociétés, des conséquences du réchauffement climatique le concerne peu puisqu’il ne contribue qu’à hauteur de 2 % des émissions totales de carbone chaque année à travers le monde, d’après le Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat (GIEC). En revanche, la compatibilité entre aéroports et zones urbaines est une problématique en chantier depuis plus de 30 ans, pour lesquelles les solutions apportées, jusqu’ici techniques, mériteraient de faire l’objet d’une réflexion politique plus approfondie, afin d’arriver à un constat partagé.

I.— LES ORIENTATIONS DU PROJET DE BUDGET ANNEXE
POUR 2013

Les moyens financiers des transports aériens sont retracés dans le budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » (BACEA) où sont inscrits depuis 2009 les crédits de la navigation aérienne et des opérations de contrôle et de sécurité ainsi que dans le programme 203, actions 11 et 14, respectivement relatives aux infrastructures de transport et au soutien des lignes pour l’aménagement du territoire.

A.— LES PRINCIPALES ORIENTATIONS

Le projet de budget pour 2013 s’inscrit dans un double contexte de maîtrise de la dépense publique et de ralentissement de l’activité du transport aérien. Afin de contribuer au redressement des comptes publics, les dépenses du programme 203 et du BACEA sont stabilisées en valeur sur la période 2013-2015 par rapport à la loi de finances initiale pour 2012. Le Gouvernement a souhaité que chaque programme du budget annexe contribue aux efforts d’économie.

Les crédits de paiement des opérations courantes du BACEA sont stables si l’on tient compte de l’inflation, à hauteur de 1,868 milliard d’euros (1,808 milliard d’euros en 2012). Pour les opérations en capital, ils passent de 391,9 millions en 2012 à 418,4 millions pour 2013.

La diminution des effectifs s’élèvera à 100 emplois ETP (équivalent temps plein), ce qui permettra de stabiliser les dépenses de personnel par rapport à 2012 (1,3 % d’augmentation, hors du compte d’affectation spéciale « pensions ») tout en maintenant les métiers indispensables à la sécurité et au développement du contrôle du transport aérien.

Les dépenses de fonctionnement de la direction générale de l’aviation civile sont en diminution, passant de 158 millions d’euros en 2012 à 155 millions pour 2013. Les deux tiers des dépenses de fonctionnement sont considérés comme des dépenses opérationnelles relatives à la sécurité, en particulier dans le domaine de la navigation aérienne. Les dépenses liées aux organismes extérieurs sont également maîtrisées, notamment la subvention versée à l’école nationale de l’aviation civile (ENAC), fixée à 99 millions, à comparer à 101 millions d’euros en 2012.

Les réductions représentent un effort notable pour la DGAC. Le développement de nouveaux modes de gestion permettra des économies de fonctionnement sensibles. La DGAC pourra en conséquence consacrer une part importante de ses dépenses à l’investissement pour répondre aux exigences européennes de navigation aérienne avec notamment la création du bloc d’espace aérien fonctionnel en Europe centrale (FABEC). L’autre part des investissements est consacrée au programme européen de recherche et de développement Single European Sky Air Traffic management Research (SESAR), volet technologique du ciel unique européen avec la poursuite du programme « 4Flight » de modernisation du système informatique de contrôle aérien. Le montant des investissements reste soutenu, à hauteur de 195 millions d’euros en 2012 et 2013.

B.— PRIORITÉS, ÉCONOMIES ET RÉORIENTATIONS PAR PROGRAMME

1. Le programme 203, actions 11 et 14

Les crédits du programme 603, pour la part consacrée à l’aviation civile, visent à soutenir le développement des infrastructures aéroportuaires qui demeurent de la compétence de l’État. Ainsi doit-il honorer ses engagements internationaux sur l’aéroport de Bâle-Mulhouse, financer les études et les acquisitions foncières pour Notre-Dame-des-Landes et soutenir les aéroports d’outre-mer. 1,6 million d’euros est prévu au titre des dépenses de fonctionnement en crédits de paiement et 25,2 millions d’euros sont prévus au titre des investissements. Dans le détail, il s’agit :

Action 11, dépenses de fonctionnement (en crédits de paiement) :

– 1,6 million d’euros pour l’entretien d’aéroports relevant de l’État.

Action 11, dépenses d’investissement (en crédits de paiement) :

– 2,9 millions d’euros pour des dépenses de sûreté sur les aéroports relevant de l’État (1 million), des acquisitions foncières pour Bâle-Mulhouse et Notre-Dame-des-Landes (1 million) et le projet de piste longue à Dzaoudzi (0,9 million).

Action 11, dépenses d’intervention (en crédits de paiement)

– 19,4 millions d’euros au titre de la construction de Notre-Dame-des-Landes, de la nouvelle aérogare de Dzaoudzi, de l’extension de l’aéroport de Nouméa, de drainage à Cayenne, de réparation à Lorient et de l’équilibre financier des principaux aéroports en Polynésie française.

Action 14, dépenses de fonctionnement (en crédits de paiement) :

– 16,8 millions d’euros au titre du soutien aux lignes aériennes d’aménagement du territoire (métropole et outre-mer) et 1 million en faveur de la desserte internationale de Strasbourg.

2. Le programme 612 « Navigation aérienne »

Les grandes orientations du projet de budget de la direction des services de la navigation aérienne (DSNA), qui fournit les services du contrôle du trafic aérien, de communication, de surveillance, de navigation et d’information aéronautique, sont pour l’essentiel déterminées par la mise en œuvre du ciel unique européen, avec les projets SESAR et FABEC. Ces deux derniers ont pour objectif de faire face à la croissance du trafic aérien d’ici à 2020, en renforçant la sécurité et la ponctualité, en réduisant l’impact environnemental du trafic aérien et en diminuant les coûts unitaires et donc les tarifs des services rendus aux compagnies aériennes.

La DSNA doit non seulement maintenir en conditions opérationnelles ses systèmes et ses infrastructures mais également les moderniser et les mettre, avant 2015, aux standards européens requis pour le FABEC et pour SESAR. Cette action correspond à un rattrapage des investissements qui, depuis plusieurs années, n’ont pas atteint le niveau nécessaire pour permettre à la DSNA de faire face aux exigences européennes ; les retards pris en matière d’investissements entraînent des signes réels de vétusté des systèmes et font courir des risques d’incidents fragilisant la sécurité.

Dans ce contexte, la DSNA prévoit la montée en puissance de quatre programmes majeurs d’investissement : « 4flight », les communications sol/sol sous IP, la construction et l’équipement des infrastructures de navigation aérienne du nouvel aéroport de Notre-Dame-Des-Landes, qui fait suite à une déclaration d’utilité publique et la mise en œuvre de nouveaux systèmes spécifiques « tours et approches », programme qui doit définir et mettre en œuvre une stratégie de modernisation des systèmes propres aux approches et tours de contrôle. en lien avec la stratégie nationale de réorganisation des espaces inférieurs.

L’évolution du budget en 2013 va imposer à la DSNA non seulement la recherche d’économies dans le domaine des dépenses d’exploitation, mais aussi une nouvelle programmation calendaire de divers investissements, notamment de génie civil. Pour mémoire, elle exploite en métropole et outre-mer un vaste parc d’infrastructures composé de cinq centres de contrôle, de deux centres d’exploitation de systèmes, de plus de 80 tours de contrôle, de quelques bâtiments administratifs et de nombreuses stations de radiocommunication, de radionavigation ou de surveillance isolées.

3. Le programme 613 « Soutien aux prestations de l’aviation civile »

Sur le programme 613 « Soutien aux prestations de l’aviation civile », la réduction prévue sur les dépenses de fonctionnement et d’intervention représente 2 % en 2013, soit 3,3 millions d’euros pour atteindre 24,7 millions d’euros. Cet effort nécessaire pour atteindre l’objectif de la programmation triennale sur la période 2011-2013 est concentré sur les dépenses logistiques. Il s’agit notamment de poursuivre la rationalisation des achats et la mutualisation des marchés.

L’ENAC, rattachée au programme « Soutien aux prestations de l’aviation civile » à partir de 2013, poursuit également une démarche de maîtrise des dépenses de fonctionnement au travers d’une politique de réduction de ses frais. Ainsi, l’école mutualise et professionnalise ses achats en proposant à ses fournisseurs des clauses d’intéressement aux économies d’énergie et en renforçant la mise en concurrence sur les carburants.

Les dépenses d’investissement sont préservées. Hors gestion de la dette, elles progressent de 3,5 millions d’euros par rapport à 2012 pour atteindre 13,4 millions d’euros. Cette orientation a pour objectif la poursuite des grands projets stratégiques de modernisation dans les domaines de la gestion financière et des ressources humaines. Le nouveau système d’information financière (SIF) mis en place en 2011 pour le BACEA est un progiciel de gestion intégrée. Il est l’équivalent du système CHORUS pour la gestion financière du budget général, avec en outre une comptabilité générale, une comptabilité analytique et une comptabilité des immobilisations. Ce système est encore en phase d’ajustement pour un certain nombre de fonctions.

4. Le programme 614 « Transports aériens, surveillance et certification »

L’action 1 relative au développement durable (24,1 millions d’euros) se traduit par un effort particulier de réduction des dépenses de fonctionnement (- 13 % par rapport à 2012) et un renforcement des crédits d’investissement (+ 3 %) afin de permettre la réalisation de deux opérations significatives dans le domaine de la sûreté : la création d’un laboratoire de test et de détection des explosifs et le développement d’une nouvelle application de gestion des titres d’accès dans les zones réservées des aéroports.

L’action 2 « Surveillance et certification » contribue également à l’effort de maîtrise budgétaire. Pour 2013, la dotation est fixée à 24,5 millions d’euros. Il convient de rappeler que sur ce poste, les dépenses de la DSAC concernent majoritairement des dépenses de fonctionnement et peu d’opérations d’investissement. Les efforts d’économie portent principalement sur la réduction des frais de déplacement, l’amélioration des méthodes de surveillance (la DSAC a été certifiée ISO en juin 2012) et la mutualisation des ressources. Néanmoins, les pistes d’économie sont désormais limitées. En effet, les activités de surveillance impliquent par nature des déplacements des agents qui en ont la charge et les économies ne peuvent porter que sur le coût de ces déplacements ; il n’est guère envisageable d’en réduire le volume.

L’action 4 « Enquête de sécurité aérienne » dispose d’un budget modeste (2,9 millions d’euros). Sa mission est dimensionnée par le nombre et la complexité des accidents et incidents graves d’aviation civile, qu’ils surviennent en France ou dans le monde, quand le BEA participe à l’étranger à une enquête en tant que représentant de l’État concepteur, constructeur ou exploitant des aéronefs civils en cause.

CRÉDITS DU BUDGET ANNEXE PAR PROGRAMMES ET ACTIONS :
OPÉRATIONS COURANTES

(en millions d’euros)

 

AP LFI 2012

AP PLF 2013

CP LFI 2012

CP PLF 2013

Programme 613

1 442,8

1 499,1

1 436,0

1 499,1

Ressources humaines

1 118,3

1 148,8

1 117,4

1 148,8

Logistique

28,0

20,0

20,1

20,0

Affaires financières

199,6

233,1

199,6

233,1

Formation aéronautique

98,7

97,1

98,7

97,1

Programme 612

336,6

329,1

333,8

329,1

Gestion

9,9

10,7

9,8

10,7

Centres en route

228,9

228,1

229,5

228,7

Aéroports

53,5

51,7

51,9

50,8

Outre-mer (contrôle aérien)

6,4

6,1

6,7

6,5

Ingénierie technique

23,5

18,2

21,3

18,2

Maintien des compétences

14,3

14,1

14,3

14,1

Programme 614

40,4

40,2

39,0

40,2

Développement durable

18,5

16,5

18,4

16,5

Surveillance et certification

18,1

21,2

17,6

21,2

Enquête

3,7

2,4

2,8

2,4

Total

1 819,9

1 868,4

1 808,8

1 868,4

Source : DGAC

CRÉDITS DU BUDGET ANNEXE PAR PROGRAMMES ET ACTIONS :
OPÉRATIONS EN CAPITAL

 

AP LFI 2012

AP PLF 2013

CP LFI 2012

CP PLF 2013

Programme 613

206,0

238,8

207,1

236,8

Ressources humaines

0,9

0,4

0,6

0,4

Logistique

8,1

13,4

9,5

13,4

Affaires financières

196,8

222,9

196,8

222,9

Programme 612

177,5

170,1

176,0

170,1

Gestion

2,6

1,9

3,0

1,3

Centres en route

111,4

105,5

107,4

112,4

Aéroports

44,8

48,7

42,1

43,7

Outre-mer (contrôle aérien)

9,3

6,1

12,7

6,2

Ingénierie technique

6,6

5,5

6,9

4,0

Maintien des compétences

2,8

2,2

3,8

2,3

Programme 614

9,2

11,5

8,7

11,5

Développement durable

7,3

7,6

6,8

7,6

Surveillance et certification

1,3

3,3

1,3

3,3

Enquête

0,5

0,5

0,5

0,5

Total

392,9

418,4

391,9

418,4

Source : DGAC

C.— LA SITUATION FINANCIÈRE DES AÉROPORTS

Les données relatives à la situation financière des aéroports ne sont pas retracées dans le projet de loi de finances mais dans l’ensemble des documents financiers (compte d’exploitation, bilan) qui les concernent.

1. Aéroports de Paris

Aéroports de Paris (ADP) a poursuivi la croissance de son trafic en 2011 (+ 5,7 %, avec 88,1 millions de passagers) et l’entreprise a enregistré une croissance de son chiffre d’affaires consolidé de 0,9 % grâce à la forte progression des revenus issus des commerces et services, à l’évolution positive des revenus générés par les activités aéronautiques en raison de la hausse du trafic passagers et de l’augmentation de la taxe d’aéroport au 1er janvier 2011, à la poursuite du développement de l’immobilier, et ce, malgré la baisse sensible des revenus issus des autres activités. L’augmentation du résultat opérationnel a permis une hausse de 15,9 % du résultat net, à hauteur de près de 348 millions d’euros.

ÉVOLUTION DU COMPTE DE RÉSULTAT D’ADP

(en millions d’euros)

 

2010

2011

2011/2010

Produit des activités ordinaires (chiffre d’affaires)

2 479,6

2 501,5

0,9 %

Valeur ajoutée

1 778,7

1 825,1

2,6 %

Charges courantes

1 604,7

1 599,1

-0,3 %

Dont charges de personnel

680,6

677,0

-0,5 %

EBITDA

921,9

972,4

5,5 %

Résultat opérationnel courant

556,6

607,3

9,1 %

Résultat opérationnel

557,0

651,5

17,0 %

Résultat financier

-99,6

-98,1

-1,5 %

Impôt sur les résultats

150,1

192,3

28,1 %

Résultat net part du groupe

300,1

347,8

15,9 %

Source : ADP

Le résultat opérationnel s’établit à 651,5 millions d’euros, en hausse de 17 %, en raison de l’indemnité transactionnelle relative au sinistre du terminal 2E de l’aéroport de Roissy, de la plus-value réalisée lors de la cession du groupe Masternaut et de la dépréciation des créances relatives à l’activité d’ADP International en Libye. Le résultat financier se redresse de 1,5 % et le résultat net est de 347,8 millions d’euros, soit une hausse de 15,9 % par rapport à 2010.

Les produits du segment Activités aéronautiques, d’un montant de 1 505 millions d’euros, représentent la part prépondérante du chiffre d’affaires du groupe. Ils progressent de 3,8 % par rapport à 2010, du fait notamment de l’augmentation du trafic et de la hausse des tarifs des redevances aéronautiques au 1er avril 2011. Les produits du segment Commerces et services sont en hausse de 5,1 % par rapport à 2010, notamment grâce aux très bons résultats des points de vente hors taxe bénéficiant d’un chiffre d’affaires par passager en forte hausse (+ 8,9 %). Les produits du segment Immobilier, d’un montant de 241 millions d’euros, progressent de 3,8 %. Le résultat opérationnel courant du segment ressort en augmentation de 6,3 % par rapport à 2010.

Au 31 décembre 2011, l’endettement financier brut du groupe s’établissait à 3 487,7 millions d’euros, soit une hausse de 10,2 % par rapport au 31 décembre 2010. Il se décomposait ainsi :

ENDETTEMENT BRUT D’ADP

(en millions d’euros)

Emprunts et dettes financières

31/12/2010

31/12/2011

Emprunts obligataires

2 181,2

2 722,3

Emprunts bancaires

846,2

612,5

Dettes financières de crédit-bail

0,9

0,0

Dépôts et cautionnement reçus

19,5

15,5

Autres emprunts et dettes assimilées

0,8

3,7

Intérêts courus non échus

82,4

79,3

Comptes courants sur des sociétés non consolidées

0,1

1,5

Concours bancaires courants

7,2

25,9

Emprunts et dettes financières hors dérivés

3 138,3

3 460,7

Instruments financiers dérivés passif

26,2

27,0

Total

3 164,6

3 487,7

Source : ADP

L’évolution de la dette nette (ratio de dettes sur fonds propres) a diminué en un an de plus de 4 points en passant de 65,6 % à 61,3 % :

(en millions d’euros)

 

31/12/ 2010

31/12/2011

Emprunts et dettes financières

3 164,6

3 487,7

Instruments financiers dérivés actifs

125,2

147,6

Trésorerie et équivalents de trésorerie

802,8

1 133,7

Endettement financier net

2 236,6

2 206,5

Source : ADP

2. Les aéroports de province

La situation des principaux aéroports de province est résumée dans les tableaux ci-après.

TRAFIC PASSAGERS DES PRINCIPAUX AÉROPORTS DE PROVINCE

 

Nombre de passagers totaux

Variation en %

 

2011

2010

2011/2010

tcam (2011/2006)

tcam (2011/2001)

Nice - Côte d'azur

10 437 628

9 603 014

8,7 %

1,0 %

1,5 %

Lyon - Saint Exupéry

8 448 479

7 991 386

5,7 %

4,6 %

3,3 %

Marseille - Provence

7 363 068

7 522 167

-2,1 %

3,8 %

2,2 %

Toulouse - Blagnac

6 988 140

6 405 906

9,1 %

3,2 %

2,9 %

Bâle - Mulhouse

5 048 428

4 129 194

22,3 %

4,7 %

3,6 %

Bordeaux - Mérignac

4 112 575

3 660 042

12,4 %

4,8 %

2,9 %

Nantes - Atlantique

3 260 725

3 047 174

7,0 %

6,3 %

5,1 %

Montpellier - Méditerranée

1 313 276

1 180 448

11,3 %

-0,2 %

-1,6 %

Strasbourg - Entzheim

1 080 046

1 060 705

1,8 %

-11,9 %

-6,5 %

Total

48 052 365

44 600 036

7,7 %

2,8 %

2,2 %

Source : DGAC

CHIFFRE D’AFFAIRES DES PRINCIPAUX AÉROPORTS DE PROVINCE

(en milliers d’euros)

Aéroports

Produits aéronautiques

dont taxe aéroport

produits extra-aéronautiques

Total du chiffre d'affaires

         

Nice - Côte d'azur

115 085

41 864

74 324

189 409

2011/2010

15,6 %

3,8 %

-3,5 %

7,3 %

Lyon – Saint-Exupéry

85 845

32 913

61 000

146 845

2011/2010

6,8 %

12,0 %

3,2 %

5,3 %

Marseille - Provence

59 881

27 852

46 783

106 664

2011/2010

4,5 %

6,6 %

0,6 %

2,7 %

Toulouse - Blagnac

62 700

25 923

42 257

104 957

2011/2010

4,9 %

-0,1 %

12,7 %

7,9 %

Bâle - Mulhouse

46 788

15 791

54 496

101 284

2011/2010

20,1 %

10,6 %

15,1 %

17,4 %

Bordeaux - Mérignac

30 303

14 488

25 357

55 660

2011/2010

7,4 %

8,4 %

7,3 %

7,4 %

Nantes – Atlantique (1)

0

0

0

0

2011/2010

-100,0 %

-100,0 %

-100,0 %

-100,0 %

Montpellier - Méditerranée

13 925

9 307

8 413

22 338

2011/2010

9,6 %

8,6 %

6,6 %

8,4 %

Strasbourg - Entzheim

13 717

7 389

7 961

21 678

2011/2010

6,6 %

-0,8 %

-7,8 %

0,8 %

Total

428 244

175 527

320 591

748 834

2011/2010

2,8 %

-1,4 %

-1,5 %

0,9 %

Répartition 2011

57,2 %

23,4 %

42,8 %

 

(1) Données non transmises -

Source : DGAC

L’endettement global des principaux aéroports de province est en diminution depuis 2009 :

ENDETTEMENT DES PRINCIPAUX AÉROPORTS DE PROVINCE

(en milliers d’euros)

Aéroports

2007

2008

2009

2010

2011

Nice - Côte d'azur

152 165

158 270

169 497

169 417

162 417

Lyon – Saint-Exupéry

142 274

128 436

114 423

99 648

105 346

Marseille - Provence

67 495

60 338

53 184

45 775

33 939

Toulouse - Blagnac

57 884

84 978

123 032

147 835

144 368

Bâle - Mulhouse

103 533

118 951

102 187

111 762

87 544

Bordeaux - Mérignac

32 009

18 640

26 007

25 838

24 957

Nantes - Atlantique

7 001

3 307

0

0

0

Montpellier - Méditerranée

14 014

14 777

15 504

15 772

16 312

Strasbourg - Entzheim

23 557

21 747

20  893

18 886

14 099

Total

599 932

609 444

624 727

634 933

588 982

Source : DGAC

II.— UN TRANSPORT AÉRIEN ENTRE CRISE CONJONCTURELLE ET RESTRUCTURATION

L’année 2011 a été caractérisée par de bons résultats pour la plupart des grandes compagnies aériennes ; l’année 2012, avec une nouvelle phase de crise, oblige certaines d’entre elles, parmi lesquelles Air France, à repenser leur métier.

A.— LA SITUATION DES PRINCIPALES COMPAGNIES AÉRIENNES

1. Trafic et résultats financiers en 2011

Avec une croissance économique mondiale de 3,4 % en 2011, le trafic de passagers s’est élevé à 2,7 milliards de passagers, en progression de 5,6 % par rapport à 2010, selon l’OACI (1). L’élasticité du trafic a donc été supérieure aux taux habituellement enregistrés, grâce à l’émergence d’une nouvelle clientèle en Asie (Inde, Malaisie, Indonésie et Chine) et en Amérique latine. En termes de passagers-kilomètres-transportés (PKT), la hausse est de 6,5 %, plus marquée sur les lignes internationales (5 061 milliards, soit + 7,1 %) que sur les segments intérieurs (+  5,5 %). La demande est restée forte en 2011 malgré les facteurs exogènes rencontrés par le transport aérien (crise de la zone euro, prix élevé du pétrole, instabilité politique dans certaines régions).

85 % du trafic mondial est toujours concentré sur trois grandes zones : par ordre d’importance, il s’agit de l’Asie-Pacifique (1 496 milliards de PKT), l’Amérique du Nord (1 434 milliards de PKT) et l’Europe (1 384 milliards de PKT). Le Moyen-Orient (383 milliards de PKT) et l’Amérique latine (246 milliards de PKT) connaissent de fortes croissances mais ne représentent encore que 13 % des PKT mondiaux ; le poids de l’Afrique, avec 118 milliards de PKT, est de 2 % du trafic mondial.

Les résultats financiers ont été positifs pour les compagnies en 2011 avec, selon l’IATA, un bénéfice net de 7,9 milliards de dollars, principalement pour les compagnies asiatiques (4,9 milliards de dollars) et américaines (1,3 milliard de dollars).

Les compagnies européennes ont connu une augmentation de leur trafic plus forte que celles des autres régions du monde : + 9,5 % de PKT internationaux en 2011. Ce dynamisme, malgré les problèmes économiques de la zone euro, est toutefois trompeur car il est en partie dû à un effet de rattrapage par rapport à 2010, année durant laquelle le trafic a été affecté par l’éruption volcanique en Islande et des épisodes neigeux en fin d’année.

L’ensemble des compagnies européennes membres de l’IATA a toutefois dégagé un bénéfice net (relativement faible) de 500 millions de dollars lors de l’exercice 2011, correspondant à une marge nette de 0,9 %.

Le chiffre d’affaires du groupe Air France/KLM a augmenté de 4,5 % en 2011 mais ses coûts d’exploitation ont augmenté dans le même temps de 6,2 %, en raison du prix du carburant. Le résultat d’exploitation pour l’année 2011 a été négatif avec une perte de 353 millions d’euros (contre un bénéfice de 28 millions en 2010), le résultat net se traduisant par une perte de 809 millions d’euros (contre un bénéfice de 289 millions en 2010).

British Airways et Iberia ont fusionné en 2010 pour former le groupe IAG devenu en 2011 le cinquième groupe européen en termes de passagers derrière Ryanair, Air France/KLM, le groupe Lufthansa et easyJet. IAG a publié un chiffre d’affaires en hausse de 10 % sur l’exercice 2011 avec un résultat opérationnel de 407 millions d’euros. Ce dernier cache cependant deux performances différentes : British Airways a enregistré un profit opérationnel de 505 millions d’euros alors qu’Iberia a enregistré des pertes de 98 millions d’euros.

Le groupe Lufthansa a obtenu un résultat opérationnel de 820 millions d’euros en 2011, soit 20 % de moins qu’en 2010, pour un chiffre d’affaires de 28,7 milliards d’euros. La nouvelle taxe écologique allemande ainsi que le prix élevé du carburant ont affecté les bénéfices du groupe en 2011.

La compagnie à bas coûts easyJet a enregistré une croissance très forte de son chiffre d’affaires et a publié des résultats opérationnels positifs. Son développement se poursuit puisqu’elle a transporté 11,5 % de passagers de plus qu’en 2010. En France, easyJet devient un acteur économique important, qui contribue aux liaisons transversales sur notre territoire et qui conduit une politique active de recrutement.

La compagnie Ryanair a également augmenté son chiffre d’affaires de 20 % à 4,3 milliards d’euros. Le résultat opérationnel est de 594 millions d’euros et le nombre de passagers transportés a augmenté de 5 % malgré la mise au sol de 80 avions durant l’hiver. Les revenus annexes ont augmenté de 11 % et représentent maintenant 21 % du total des bénéfices.

Les compagnies américaines ont affiché des résultats très positifs pour l’année 2011 à l’exception de la compagnie American Airlines. Il s’agit aussi de la seule compagnie qui reste isolée après les fusions de l’ensemble de ses concurrentes. Les compagnies américaines ont enregistré des bénéfices nets de 1,3 milliard de dollars en 2011.

Les compagnies asiatiques ont enregistré 4,9 milliards de dollars de bénéfices nets. Les chiffres d’affaires des compagnies ont tous connu des hausses très marquées. Le développement des marchés domestiques ainsi que la croissance économique de la région explique en partie leurs bons résultats.

Les compagnies du Moyen-Orient ont publié un bénéfice net de 1 milliard de dollars pour l’année 2011. Elles profitent de leur positionnement géographique attractif en servant de plate-forme entre l’Europe et l’Asie mais également des efforts déployés pour attirer des touristes dans leurs pays d’origine. Les compagnies de cette région ont évidemment été affectées par les événements politiques dans les pays arabes, mais elles bénéficient du soutien financier de leurs gouvernements. La baisse de 72 % du bénéfice net de la compagnie Emirates ne l’a ainsi pas empêchée de signer en novembre une commande de 50 avions long-courriers auprès de Boeing.

2. L’évolution du secteur en 2012

En juin 2012, l’IATA évaluait à 3 milliards de dollars les bénéfices pour l’année pour l’ensemble du secteur, correspondant à une marge nette de 0,5 %. Il s’agirait d’une chute de 62 % par rapport aux résultats de l’année 2011. Malgré des volumes de passagers en augmentation et des volumes de fret qui repartent à la hausse, les compagnies font toujours face à un contexte de crise économique dont on ne voit pas l’issue.

Seules les compagnies de la région Asie-Pacifique demeurent profitables grâce à un marché interasiatique très dynamique. L’IATA prévoit un bénéfice de 2 milliards de dollars pour les compagnies de cette région en 2012. Les compagnies américaines qui ont restreint drastiquement leurs capacités ont réussi à restaurer la recette unitaire moyenne et devraient générer 1,4 milliard de dollars de bénéfice en 2012.

Pour les compagnies européennes, l’IATA prévoit des pertes de 1,1 milliard de dollars en 2012, ce qui représente une dégradation par rapport aux résultats de 2011 (-500 millions de dollars). Au premier semestre 2012, la croissance du nombre de PKT est demeurée soutenue (+ 6,4 %), mais en deçà du reste du monde en raison de la crise de la zone euro. Les résultats d’exploitation des principales compagnies sont négatifs malgré des augmentations de chiffres d’affaires.

RÉSULTATS FINANCIERS DU 1er SEMESTRE 2012

(en millions d’euros)

Compagnie

Chiffre d’affaires global

Évolution

2012/2011

Résultat d’exploitation 2012

Résultat d’exploitation 2011

Air France KLM

12 145

5 %

- 663

- 548

IAG

8 532

13 %

- 245

69

Lufthansa Group

14 509

6 %

- 20

114

Ryanair

2 053

10 %

- 33

53

Source : communiqués de presse des compagnies

Les compagnies américaines continuent à publier des résultats d’exploitation positifs pour le premier semestre de l’année. L’Amérique du Nord est la région où la croissance a été la plus faible au premier semestre avec seulement + 1,7 % de PKT mais le taux élevé de remplissage des appareils (82 %) contribue à expliquer la bonne rentabilité des compagnies américaines :

Compagnie

Chiffre d’affaires global (1)

Évolution

2012/2011

Résultat d’exploitation 2012 (1)

Résultat d’exploitation 2011 (1)

American Airlines

12 490

7 %

53

- 309

United Continental

18 541

3 %

304

842

Delta Airlines

18 145

7 %

516

389

Southwest Airlines

8 606

19 %

481

321

(1) En millions de dollars - Source : communiqués de presse des compagnies

Le trafic a augmenté de 7,4 % en Asie lors des six premiers mois de l’année 2012. Le retour de la croissance économique et la livraison d’appareils de nouvelle génération contribuent à rendre profitables les opérations des compagnies de cette région, notamment celles des compagnies japonaises.

Les compagnies du Moyen-Orient ont enregistré la plus forte hausse de trafic pour les six premiers mois de l’année (+ 18,4 %). Elles continuent de se développer fortement avec l’acquisition de nombreux appareils et la prise de participation dans d’autres compagnies. Sur le plan financier, l’IATA prévoit un bénéfice de 400 millions de dollars pour l’ensemble des compagnies de la région en 2012.

La conjoncture économique a donc lourdement frappé les compagnies européennes, obligeant la plupart d’entre elles, comme Lufthansa ou Air France, à mettre en place des plans de restructuration.

B.— LE GROUPE AIR FRANCE-KLM AU DÉFI DU PLAN TRANSFORM 2015

1. La croissance de l’endettement en 2011

Au cours de l’année 2011, le trafic du groupe Air France-KLM a atteint 217,2 milliards de PKT, soit une hausse de 6,9 % par rapport à l’exercice précédent pour une offre en sièges-kilomètres-offerts (SKO) en hausse de 6,6 %. Le coefficient de remplissage du groupe s’est établi à 82 %, en hausse de 0,3 %. Sur l’année 2011, le groupe a transporté un total de 75,8 millions de passagers, soit une hausse de 7,2 %. Le chiffre d'affaires consolidé s’est élevé à 24,36 milliards d’euros, soit une hausse de 4,5 % par rapport à l’année 2010.

Le transport de passagers sur vols réguliers a généré un chiffre d’affaires de 18 milliards d’euros, en hausse de 5,3 %. La part de cette activité dans le chiffre d’affaires total (73,9 %) a peu évolué (+ 0,6 %) par rapport à l’année précédente. Le fret a représenté 12,7 % du chiffre d’affaires total, soit 0,3 % de moins qu’en 2010.

Compte tenu du chiffre d’affaires lié à la maintenance et à d’autres prestations, le résultat d’exploitation d’Air France-KLM pour l’année 2011 s’est traduit par une perte de 353 millions d’euros (contre un gain de 28 millions d’euros pour l’année 2010).

(en millions d’euros)

 

2010

2011

Variation

Chiffre d’affaires

23 310

24 363

+4,5 %

Charges externes

- 14 306

- 15 517

+8,5 %

Frais de personnel

- 7 385

- 7 460

+1,0 %

Impôts et taxes

-175

-191

+9,1 %

Amortissements, dépréciations et provisions

- 1 667

- 1 697

+1,8 %

Autres produits et charges

251

149

- 40,6 %

Résultat d’exploitation

28

-353

- 381

Source : Air France

L’endettement du groupe était au 31 décembre 2011 supérieur à ses capitaux propres consolidés : ces derniers s’élevaient à 6,09 milliards d’euros, alors que les dettes nettes atteignaient 6,52 milliards d’euros, soit une hausse de 7,4 % par rapport au 31 décembre 2010. Le ratio d’endettement est ainsi passé à 1,07 (contre 0,86 au 31 décembre 2010).

2. Les résultats financiers du premier semestre de l’exercice 2012

Au cours du premier semestre de l’exercice 2012, le groupe a enregistré une hausse de 3,9 % de son trafic passager par rapport au premier semestre de l’année 2011. La recette unitaire par PKT a augmenté dans le même temps de 2,7 %. Affecté par la faiblesse du commerce mondial, le trafic cargo s’est replié de 6,5 % pour une offre en baisse de 2,5 %, impliquant un recul du coefficient de remplissage de 2,8 points qui s’établit à 64,5 %.

Le chiffre d’affaires consolidé a enregistré une croissance de 5,2 % sur le premier semestre de l’exercice 2012 par rapport au premier semestre de l’année précédente ; il s’établit à 12,1 milliards d’euros. Sur le semestre, le chiffre d’affaires de l’activité passage a augmenté de 7,7 % et celui de l’activité cargo a diminué de 3,8 %.

Les charges externes du premier semestre de l’exercice en cours s’élèvent à 8,02 milliards d’euros, en augmentation de 6,6 % en raison notamment d’une hausse de 15,1 % des dépenses de carburant (+ 469 millions d’euros). Les charges de personnel ont progressé de 3,9 % pour s’établir à 3,88 milliards d’euros, après 45 millions d’euros de charge de retraite complémentaire chez KLM. Le résultat d’exploitation du semestre est négatif de 663 millions d’euros, en dégradation de 21 % par rapport à celui du premier semestre 2011.

Depuis la clôture de l’exercice 2011, les capitaux propres ont diminué de 1,213 milliard d’euros (– 19,9 %) pour atteindre 4,88 milliards d’euros. Le ratio d’endettement s’établit ainsi à 1,28 à la fin de juin 2012 contre 1,07 au 31 décembre 2011.

3. Le plan Transform 2015

Le plan de redressement d’Air France-KLM fait l’objet d’une attention soutenue de la commission du développement durable de l’Assemblée nationale, qui a entendu M. Alexandre de Juniac, directeur général de la compagnie, le 24 juillet dernier. Votre rapporteur pour avis a également reçu des représentants d’Air France le 11 septembre dernier ainsi que des délégués du syndicat des pilotes de ligne le 26 septembre.

Le constat est simple : alors que le groupe dispose de positions commerciales solides – au premier rang mondial du trafic international et au troisième rang pour le trafic domestique et international – sa dette a été multipliée par trois en quatre ans. Cette situation est due au ralentissement des recettes commerciales d’une part, à des coûts d’exploitation plus élevés de 20 à 30 % que ses principaux concurrents d’autre part. Le plan Transform 2015 consiste à stopper l’hémorragie financière en restaurant le cash flow et en stabilisant la dette à court terme (2012), tout en réorganisant en trois ans la compagnie pour qu’elle retrouve des marges bénéficiaires. La bonne tenue du trafic pendant le second trimestre et pendant l’été favorise pour l’heure cet objectif.

Air France reconnaît que l’essor des compagnies à bas coûts a imposé des références de prix très basses et qu’elle n’a pas su, jusqu’ici, modifier ses grilles tarifaires sur les lignes de court courrier. Elle admet également la nécessité d’adapter son offre sur les vols long courrier et sur le segment des passagers haut de gamme, où les compagnies asiatiques et du Golfe persique proposent de meilleures prestations.

Le plan Transform 2015 ne remet pas en cause le caractère généraliste de la compagnie, qui continuera à opérer sur tous les segments et à utiliser la plate-forme (hub) de Roissy, deuxième zone économique d’Europe, comme l’outil stratégique de son activité. L’apport des réseaux court et moyen courrier est en effet vital pour son segment long courrier. Mais le maintien de ce caractère généraliste ne peut fonctionner que si le groupe redresse sa compétitivité. À court terme, ce plan reporte certains investissements et introduit un blocage des salaires et des avancements. À moyen terme, il doit engager une restructuration industrielle, accompagnée d’un important volet social.

Air France devrait être organisé autour de trois pôles : l’alimentation du hub de Roissy, un pôle régional pour les lignes transversales intérieures et européennes et un pôle autour de la compagnie Transavia, filiale à bas coût appelée à alimenter le segment des loisirs sur les court et moyen courriers. Transavia opérera comme ses concurrentes easyJet ou Ryanair, en utilisant des avions monocouloirs et en effectuant des liaisons point à point avec de courtes rotations au sol. Elle n’a pas vocation à apporter de la clientèle vers les autres segments au départ de Roissy. En d’autres termes, la compagnie fera « glisser » une partie de sa clientèle court courrier du pavillon Air France vers le pavillon Transavia, dont la flotte passera de 9 à 22 appareils.

Les lignes long courrier feront l’objet d’investissements massifs, de l’accueil au sol à la rénovation des cabines (550 millions d’euros à elles seules) en passant par les prestations en vol afin de retrouver un niveau de service au client comparable aux compagnies asiatiques. La clientèle en classe affaires est vitale pour Air France, notamment sur les lignes de l’Atlantique Nord et vers l’Asie où se trouve la majorité des passagers à haute contribution.

Le volet industriel vise également à développer la position d’Air France dans la maintenance des moteurs et des équipements, activité qui réunit 15 000 emplois dans un secteur où la compagnie occupe la deuxième position et qui conserve de prometteuses perspectives de croissance. L’activité de maintenance des avions est en revanche déficitaire et sera restructurée sur les différents sites français et marocains, en coopération avec Royal Air Maroc.

Le volet social du plan Transform 2015 consiste à réviser les accords qui régissent les trois catégories de personnels du groupe (au sol, navigants commerciaux et navigants). L’objectif est un gain de productivité de 20 %. Les personnels navigants et navigants commerciaux ont accepté leurs nouvelles conditions de travail (allongement de leur temps de travail sur moyen courrier, rotations plus courtes sur long courrier avec diminution du barème de nuit). Les négociations avec les personnels au sol se poursuivent actuellement. Ce gain de productivité s’accompagne d’une réduction d’effectifs de 5 122 postes à l’horizon de 2013, sur la base de départs volontaires.

Réorganisation ou restructuration profonde ? La question reste posée. En présentant le plan Transform 2015, le président-directeur général d’Air France a essentiellement rassuré les marchés financiers, satisfaits de constater que le groupe avait la volonté de mettre fin à son hémorragie financière. Mais il lui faut affronter des mutations très lourdes du transport aérien : l’efficacité des compagnies à bas coût, les failles de la réglementation sociale dans l’Union européenne et la montée des compagnies du Golfe persique, qui exercent leur activité avec l’appui des budgets de leurs États d’origine, sont autant de facteurs qui perdureront. L’accord annoncé avec Etihad au début du mois d’octobre montre bien qu’Air France est obligé de modifier sa stratégie commerciale.

Dans ce contexte, il est du devoir des pouvoirs publics de soutenir, dans le respect des règles de l’Union européenne, une compagnie qui joue un rôle crucial dans l’économie française.

C.— LA SITUATION DES COMPAGNIES À BAS COÛT

Les compagnies à bas coût, dont l’histoire et l’activité étaient résumées dans le rapport pour avis sur le projet de loi de finances pour 2012, jouent un rôle appréciable dans l’économie française. Créatrices de quelques centaines d’emplois chaque année, elles permettent l’accès au transport aérien de segments de clientèle qui, faute de revenus suffisants, ne prenaient pas l’avion auparavant et soutiennent ainsi l’industrie du tourisme. Elles maintiennent un flux important de voyages d’affaires, grâce à des tarifs qui pèsent peu sur les coûts de gestion des PME et assurent enfin la desserte aérienne de nombreuses villes moyennes françaises et européennes, sur des lignes jugées non rentables pour d’autres compagnies.

Ces compagnies ont souvent été psychologiquement considérées comme des intruses par les acteurs classiques du marché français alors que leur modèle économique est devenu depuis les années 80 la norme aux États-Unis, où elles sont florissantes et qu’elles connaissent un essor foudroyant en Asie avec Air Asia ou Lion Air. Il convient plutôt de les considérer comme des entreprises qui jouent un rôle positif dans notre économie, ce qui est heureusement la position des pouvoirs publics. Il convient parallèlement d’être vigilant sur les conditions de travail qu’elles proposent à leurs personnels car certaines, comme Ryanair, sont habiles à exploiter les failles de la réglementation sociale.

1. Les caractéristiques du marché français

L’évolution des transporteurs à bas coût (TBC), présents sur le marché français depuis 1996, est résumée dans le tableau ci-après :

 

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

Nombre de TBC

7

10

18

29

31

35

33

30

28

25

24

23

Liaisons desservies

29

70

88

146

203

294

401

480

478

504

574

590

Les deux TBC leaders en Europe (groupes easyJet et Ryanair) dominent le marché français et ont exploité respectivement chacun 174 et 160 liaisons : easyJet reste en tête avec un peu plus de 47 % du trafic bas coûts touchant la France, soit 13,7 millions de passagers, suivi de Ryanair avec un peu plus de 24 % du trafic, soit environ 7 millions de passagers.

En 2000, ces deux transporteurs formaient 90 % du marché des TBC en France (2 millions de passagers). Leur part a diminué avec l’arrivée de nouveaux concurrents mais demeure considérable, avec 72 % en 2011. Les neuf compagnies qui les suivent représentent 23 % des parts de marché en 2011. Ce sont, par ordre décroissant, Vueling (1,9 million de passagers), Transavia France (1,1 million de passagers), Flybe (0,8 million de passagers), Jet4You et Air Berlin (0,6 million de passagers chacun), Norwegian (0,5 million de passagers), Wizzair (0,4 million de passagers), Pegasus Airlines et Transavia Pays-Bas (0,3 million de passagers chacune).

La part de marché des TBC demeure plus forte sur les lignes internationales que sur les liaisons domestiques. Après avoir été jusqu’en 2005 essentiellement circonscrite à l'intérieur de l’Europe au sens large (Union européenne, Suisse, Norvège et Islande), elle s’est ouverte sur d’autres aires géographiques, vers l’Afrique du Nord et l’Europe balkanique. Globalement, l’activité internationale des TBC en France a progressé de + 14,6 % en 2011 (contre + 3,8 % en 2010) et s’est établie à 25,9 millions de passagers.

L’activité intérieure des TBC a quant à elle progressé moins rapidement (+ 9%) que les liaisons internationales. EasyJet et Ryanair en sont les deux leaders. Ce trafic d’un million de passagers annuels en 2003 a progressé à partir de 2008 pour atteindre 2,9 millions de passagers (+ 9%) en 2011. Majoritairement concentré sur les vols au départ et à l’arrivée de Paris dans un premier temps, ce trafic a vu sa structure profondément modifiée avec le lancement depuis 2008 de nombreuses liaisons transversales.

L’impact de ces compagnies sur les plateformes aéroportuaires est résumé dans le tableau ci-après :

Aéroport

Passagers

Évolution du trafic depuis

2010

Part dans
le trafic total
en
2011

Passagers

internat.
en 2011

Évolution du trafic internat.
depuis

2010

Passagers

intérieurs

en 2011

Évolution du trafic

intérieur

depuis

2010

PARIS-ORLY

6 134 643

10 %

23 %

5 089 955

8 %

1 044 688

19 %

PARIS-CDG

5 324 109

12 %

9 %

4 592 171

11%

731 938

22 %

BEAUVAIS

3 676 889

26 %

100 %

3 625 645

29 %

51244

-59 %

NICE

3 353 416

17 %

32 %

2 389 435

13 %

963 981

30,3 %

BALE-MULHOUSE

2 888 344

28 %

57 %

2 671 405

27 %

216 939

42 %

LYON

1 739 867

22 %

21 %

1 236 415

18 %

503 452

34 %

TOULOUSE

1 577 187

33 %

23 %

791 768

32 %

785 419

34 %

MARSEILLE

1 374 937

- 20 %

19 %

1 118 045

-1 %

256 892

-57 %

BORDEAUX

953 223

32 %

24 %

720 316

36 %

232 907

19 %

NANTES

723 748

10 %

23 %

460 255

28 %

263 493

-13 %

CARCASSONNE

367 855

- 6 %

100 %

367 855

-6 %

-

-

2. La position du Gouvernement sur les compagnies à bas coût

Le ministère des transports, dans sa réponse à votre Rapporteur pour avis, rappelle que « le succès de compagnies dites à bas coûts découle d'une exploitation efficace de leur flotte et de leurs moyens en personnels ainsi que de choix commerciaux, décisions relevant de la responsabilité des dirigeants d'entreprise et non du Gouvernement. L’essor du transport aérien intervenu depuis la libéralisation européenne consécutive à l’adoption en 1992 des règlements communautaires du troisième paquet aérien tient avant tout au dynamisme des acteurs du marché. Pour beaucoup de petits aéroports régionaux cependant, qui en raison de l'étroitesse de leur marché ne disposent pas a priori du potentiel d'attractivité nécessaire, la venue des compagnies à bas coûts passe par la conclusion d'accords destinés à faciliter leur implantation ».

Les autorités françaises affirment leur soutien au développement de nouveaux services aériens au départ des aéroports régionaux et elles estiment qu'il existe pour cela un certain nombre de possibilités. Elles demeurent néanmoins vigilantes pour que les accords passés localement respectent bien les conditions prévues par la réglementation nationale et communautaire et que soient préservées les conditions d'une concurrence équitable. À cet égard, elles ont notamment fait connaître à la Commission européenne, dans le cadre de leur réponse à la consultation sur la révision des lignes directrices de 2005, leur souhait de voir clarifiées au niveau communautaire les pratiques de certaines compagnies liant leur venue à la conclusion de contrats de prestations de service financés par des ressources publiques. Elles ont également appelé l'attention des exploitants d'aéroports et des collectivités propriétaires d'aérodromes sur la nécessité de bien peser les termes de ces accords… La révision des lignes directrices et l'instruction par la Commission européenne de la plainte d'Air France sur les mesures mises en œuvre par des aérodromes locaux devraient permettre de disposer bientôt d'un cadre juridique pérenne.

D.— DISTORSION DE CONCURRENCE ET DISTORSION SOCIALE : DES MENACES DIRECTES SUR LE TRANSPORT AÉRIEN FRANÇAIS

1. Distorsion de concurrence, distorsion sociale et fiscalité

Lors des auditions conduites par votre Rapporteur pour avis, de nombreux acteurs du transport aérien ont insisté sur les handicaps croissants subis par ce secteur en France. À terme, s’ils continuaient de s’accumuler, l’ensemble de la filière (constructeurs, sous-traitants, transporteurs, fournisseurs de prestations connexes, assistance en escale), soit 270 000 emplois dont plusieurs sont hautement qualifiés, pourrait être mise en danger.

Les deux principaux handicaps sont les distorsions de concurrence et les distorsions sociales. La fiscalité que ce secteur acquitte n’a rien de confiscatoire, mais il ne faudrait pas l’alourdir dans les années à venir.

Air France et les compagnies européennes disposent d’un réseau dense vers l’Asie dont les pays connaissent une croissance économique et démographique remarquables. Les vols sont le plus souvent directs, tant vers les capitales que vers les métropoles économiques (Shanghaï, Chengdu, Bengalore, Chennai…). Ce segment subit depuis quelques années la concurrence croissante des compagnies du Golfe persique.

Soucieux de diversifier leurs économies, les États du Golfe ont en effet mis en place des compagnies aériennes qui assurent leur visibilité sur la scène économique internationale et qui font de leur territoire des plateformes de transbordement de passagers et de marchandises. Elles soutiennent également une économie touristique en plein développement. Cette stratégie fonctionne bien grâce à la combinaison de deux facteurs : la position de ces États, à mi-chemin de l’Europe et de l’Asie, et les tarifs attractifs de ces compagnies.

La concurrence est salutaire pour toute économie quand elle s’exerce dans des conditions peu ou prou égales pour chacun des acteurs. Or, il y a une distorsion manifeste entre les compagnies européennes et celles du Golfe. Ces dernières sont en effet pour la plupart en déficit d’exploitation, n’investissent et ne survivent que grâce au produit de la rente pétrolière de leur État. Elles ne paient pas non plus l’utilisation des infrastructures aéroportuaires, contrairement à leurs homologues occidentales.

Cette réalité serait supportable si ces compagnies opéraient sur un segment intérieur ou régional, mais comme elles sont dépourvues de population et d’arrière-pays industriel, elles n’existent qu’en ponctionnant le trafic international assuré antérieurement par d’autres compagnies. Tout créneau supplémentaire qui leur est accordé (parfois au nom d’intérêts diplomatiques bien compris) depuis Londres, Paris ou Francfort, met en péril les compagnies européennes travaillant depuis ces plateformes.

La Commission européenne vient de réaliser la gravité du problème et a émis le 27 septembre dernier plusieurs propositions pour rééquilibrer les conditions de concurrence. Jusqu’à présent, l’Union européenne a trop privilégié l’intérêt du consommateur au détriment des salariés, au risque de détruire des filières économiques. Son attitude nouvelle présente l’avantage d’unir les 27 États membres autour d’un objectif de concurrence plus loyale.

Les distorsions sociales intraeuropéennes constituent un problème classique pour les compagnies françaises. British Airways dispose ainsi d’un avantage comparatif de 17 % par rapport à Air France, s’agissant des charges sociales. Mais le problème s’est accentué avec les compagnies à bas coût dont les avions stationnent non sur un hub mais sur plusieurs bases d’attache, dites bases d’affectation selon un règlement européen de juillet 2012. Une compagnie comme AirMed peut ainsi soumettre ses personnels au droit du travail grec en faisant stationner cinq de ses aéronefs en Grèce, alors que ses employés n’y dorment que quelques jours par mois. La généralisation d’un tel système fait peser un double risque : l’un sur les compagnies, qui ne supportent pas les mêmes coûts d’exploitation ; l’autre crée une pression sur les salariés et leur fait craindre que l’organisation du travail et la protection sociale dans le transport aérien se rapprochent de plus en plus des normes en vigueur dans la marine marchande. En termes moins mesurés, il s’agit de la disparition d’acquis sociaux mais également de la remise en cause de règles de travail conçues pour éviter que la fatigue des personnels navigants soit à l’origine d’accidents.

Si la fiscalité sur les compagnies françaises devait s’aggraver, elle entraverait leur capacité à soutenir la concurrence internationale. Le transport aérien finance déjà intégralement par les taxes de sécurité et de sûreté les missions régaliennes de l’État. Il va devoir s’acquitter des charges du système ETS (achat de carbone) et assure enfin une part de la lutte contre le SIDA au travers de la taxe de solidarité perçue sur les billets d’avion (Unitaid).

Le pourcentage de prélèvements fiscaux (TVA incluse, mais hors des taxes de sécurité et de sûreté) assis sur un billet ne peut donner lieu à un calcul moyen. Il existe en effet une dizaine de tarifs différents sur un même vol, selon que le billet a été acheté à l’avance ou tardivement, en agence ou par internet, qu’il est à titre individuel ou que le passager voyage en groupe. Le taux oscille de 5 à 34 %, avec de nombreuses lignes où il s’établit entre 13 et 18 %. Si les pouvoirs publics veulent maintenir une activité industrielle qui joue un rôle important dans notre économie, il importe qu’ils n’augmentent pas le taux de taxation de ce secteur à faible marge.

2. L’inclusion de l’aviation dans le système européen de quotas d’émission de gaz à effet de serre : d’une heureuse initiative à un conflit diplomatique

La directive européenne 2008/101/CE visant à intégrer les activités aériennes dans le système communautaire d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre (ETS, emission tracking scheme) a été adoptée en 2008. Elle a été transposée en droit français par l’ordonnance n° 2010-1232 du 21 octobre 2010, dont les dispositions ont été ratifiées par la loi n° 2011-12 du 5 janvier 2011. Rappelons que cette directive, entrée en vigueur le 1er janvier 2012, a été négociée avec le soutien actif du Gouvernement français, notre pays estimant que l’inclusion de l’aviation internationale dans le système des droits d’émission est un instrument efficace pour lutter contre le réchauffement climatique.

Pour les compagnies aériennes européennes, le système ETS constitue une charge financière supplémentaire dont elles craignent de devoir répercuter le coût sur le prix des billets, ce qui nuirait à leur compétitivité. Ce point, évoqué par la direction d’Air France et par le SNPL lors de leurs auditions par votre Rapporteur pour avis, n’appelle pas de commentaire particulier, si ce n’est qu’il illustre le classique conflit entre développement économique et environnement.

Cette initiative dégénère depuis le début de l’année en conflit diplomatique : le système s’applique en effet à l’ensemble des compagnies qui décollent ou atterrissent du territoire européen. Les États-Unis, la Chine et la Russie contestent fortement ce système, jugeant que pendant un vol international, leurs aéronefs ne survolent l’Europe que sur 10 à 20 % du trajet, les émissions de gaz se produisant donc majoritairement hors du territoire européen.

Plusieurs pays ont menacé l’Europe de représailles, indiquant qu’ils n’achèteraient plus d’Airbus (Cathay Pacific, à la suite de pressions de Pékin, pourrait annuler la commande de 10 Airbus A380). La commission du commerce du Sénat américain a voté le 31 juillet dernier un projet de loi interdisant aux compagnies aériennes américaines de se conformer à la législation européenne. Au sein de l’Union européenne, la division est patente… Les membres du groupe Conservateurs et Réformistes du Parlement européen jugent « le régime illégal et infructueux, tentant d’imposer des taxes aux pays tiers qui finissent par réduire la compétitivité des compagnies aériennes de l’Union européenne » (Mme Jacqueline Foster, Royaume-Uni). Le Rapporteur de la commission Environnement, M. Peter Liese (Parti Populaire Européen, Allemagne) a admis que le débat en commission avait été houleux et que le Gouvernement allemand préférait négocier avec les pays hostiles à la directive plutôt que de voir le conflit s’envenimer. Il est vrai qu’une mesure qui concerne les compagnies du monde entier doit être négociée au sein de l’OACI (dont l’Union européenne n’est pas membre), Bruxelles n’ayant aucun moyen d’imposer juridiquement une mesure à un pays tiers.

Pour l’heure, la Commission européenne maintient son système, mais Jos Delbeke, directeur pour l’action sur le climat, a réaffirmé que les négociations demeuraient ouvertes avec la Russie, la Chine et les États-Unis et que si un accord était trouvé au sein de l’OACI au plus tard le 1er avril 2013, la directive de l’Union européenne pourrait être modifiée par le Parlement et le Conseil, ajoutant que cet accord devrait « permettre des réductions des émissions de CO2 supérieures à celles induites par la stratégie européenne ».

III.— TRANSPORT AÉRIEN ET DÉVELOPPEMENT DURABLE

Le transport aérien constitue l’exemple pertinent d’un secteur dont le dynamisme est nécessaire à notre économie, mais qui génère des nuisances difficilement supportables pour les riverains des aéroports ou les personnes placées sous les voies aériennes d’approche des aéronefs.

Nul ne peut contester l’importance des compagnies aériennes, des aéroports et de l’ensemble des activités de sous-traitance qui leur sont liées. En règle générale, un million de passagers supplémentaires induit la création de mille emplois directs et indirects. La plateforme de Roissy, seul aéroport d’Europe à disposer de réserves foncières, a été conçue pour accueillir à pleine capacité 80 millions de passagers, ce qui en fait un gisement considérable d’emplois pour les années à venir.

Nul ne peut non plus ignorer la pollution atmosphérique et les nuisances sonores auxquelles sont confrontés les riverains. Le Grenelle de l’environnement a largement traité ces deux questions. Votre Rapporteur pour avis veut insister sur la nécessité de renforcer le rôle de l’Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires (ACNUSA), pièce maîtresse de la lutte contre la pollution par le bruit, qui doit disposer de moyens notamment humains indispensables à l’exercice de ses missions. Comme en 2012, ses crédits seront en stricte stabilisation, limitant ses marges de manœuvre.

Le secteur de l’aviation a accompli des progrès notables dans la lutte contre les nuisances, tant en raison de l’évolution de la législation que des progrès technologiques et des bonnes pratiques mises en œuvre conjointement par les collectivités locales et les professionnels. Il reste néanmoins d’importants dossiers à résoudre, le plus souvent liés au bruit et de nombreuses critiques se font de plus en plus vives sur certains dossiers comme les vols de nuit et l’extension des surfaces de la plateforme d’Orly. La politique de l’aviation civile « gagnerait à être mieux formalisée » et l’État devrait « développer des indicateurs précis et mesurables dans le secteur aérien » d’après le conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD), dans un rapport (n° 007 857 01) mis en ligne le 16 août dernier sur le site du ministère chargé de l’écologie, rappelant ainsi que cette politique est un processus permanent.

A.— DU GRENELLE DE L’ENVIRONNEMENT À LA CONFÉRENCE SUR L’ENVIRONNEMENT, UNE POLITIQUE MARQUÉE PAR LA CONTINUITÉ DES ACTIONS

Mme Delphine Batho, ministre chargée de l’écologie, avait souligné le 11 juillet dernier devant la commission du développement durable de l’Assemblée nationale l’importance des processus qu’avait initiés le Grenelle de l’environnement. Cet hommage indirect à l’action de l’ancienne majorité démontre que l’ensemble des responsables politiques est conscient de la nécessité d’une société et d’une économie plus sobres en émission de carbone et plus respectueuses des équilibres écologiques. La conférence environnementale des 14 et 15 septembre derniers amplifie l’action entreprise sous la précédente législature, avec de nouveaux axes de travail exposés par M. le Président de la République.

Le secteur du transport aérien a fait l’objet d’une série de mesures pour la plupart réglementaires, prises antérieurement et postérieurement aux élections présidentielles et législatives, montrant une continuité de la politique de lutte contre les nuisances.

1. La mise en œuvre du Grenelle de l’environnement

La loi du 3 août 2009 dite Grenelle I a retenu des mesures significatives en matière de transport aérien, avec l’objectif d’une réduction de 50 % de la consommation de carburant et des émissions de CO2 par passager-kilomètre, de 80 % des émissions d’oxyde d’azote et de 50 % du bruit perçu. En matière de navigation aérienne, sont encouragées l’optimisation des procédures d’approche et de décollage des avions, ainsi que la réduction des distances parcourues par les avions comme de leurs temps d’attente et de roulage. La création de nouveaux aéroports est écartée, sauf pour raisons environnementales.

Les principaux textes réglementaires destinés à améliorer la lutte contre les nuisances environnementales de l’aviation ont été ces deux dernières années :

– le décret n° 2011-1948 relatif à la généralisation de la prise en charge à 100 % du plafond, en matière d’insonorisation ;

– l’arrêté du 23 février 2011 sur l’aide à l’insonorisation et à l’augmentation du montant du plafond de l’aide ;

– les restrictions de l’exploitation nocturne à Toulouse – Blagnac (arrêté du 28 mars 2011), à Marseille, (arrêté du 11 avril 2011) et à Paris – Charles de Gaulle (arrêté du 20 septembre 2011) ;

– le décret n° 2011-90 du 24 janvier 2011 et les arrêtés du 26 janvier et du 12 décembre 2011 pour assurer l’insertion de l’aviation dans le système européen de marché de quotas d’émissions de gaz à effet de serre (ETS).

L’arrêté du 27 juillet 2012 réglementant l’utilisation des moyens permettant aux aéronefs de s’alimenter en énergie et en climatisation et chauffage lors de leur escale sur les aérodromes de Roissy, d’Orly et du Bourget entre en vigueur le 28 octobre 2012. L’objet de cet arrêté est de généraliser de bonnes pratiques en rendant obligatoire l’utilisation des moyens de substitution aux moteurs auxiliaires de puissance (en anglais APU) lorsqu’ils existent et en l’absence de moyens de substitution, en fixant des durées maximales d’utilisation des APU avant le départ et à l’arrivée des aéronefs.

En outre, le gestionnaire de la plate-forme est désormais tenu d’informer les compagnies et les assistants en escale de la survenue des pics de pollution, afin que les équipages adaptent au mieux leurs pratiques d’utilisation du moteur APU dans ces circonstances.

L’arrêté impose en outre aux aéroports et aux compagnies de rendre compte annuellement, respectivement, du suivi de leurs équipements de substitution mis à disposition et de leurs pratiques d’utilisation des moteurs APU. Les manquements aux règles fixées par cet arrêté sont passibles de sanctions administratives prononcées par l’ACNUSA, compétente depuis le 1er novembre 2010 en matière de qualité de l’air.

2. Une politique volontariste en Île-de-France

À côté des normes réglementaires, de nombreux acteurs ont souhaité mettre en œuvre une politique de développement durable par voie contractuelle. L’Île de France, première région aéroportuaire de notre pays, constitue à cet égard un exemple significatif.

Aéroports de Paris, la Fédération nationale de l’aviation marchande (FNAM) et la DGAC sont conjointement à l’initiative de l’inscription dans le plan de protection de l’atmosphère (PPA) de la région Île de France d’un engagement collectif pour réduire les émissions des plates-formes aériennes de la région. L’objectif est de réduire les émissions polluantes sur les plates-formes aéroportuaires, notamment en ce qui concerne :

– les émissions pendant le roulage des avions ;

– l’utilisation de moyens de substitution fixes ou mobiles aux APU ;

– la gestion des flottes des véhicules terrestres et engins au sol ;

– les plans de déplacements d’entreprises ;

– l’information sur les transports en commun à destination des voyageurs.

Par ailleurs, des indicateurs relatifs aux émissions de polluants atmosphériques locaux seront désormais fournis dans les études et projets soumis soit à l’avis des commissions consultatives de l’environnement des aéroports franciliens, soit à l’avis de l’ACNUSA, en complément des indicateurs relatifs aux émissions de gaz à effet de serre déjà communiqués. Il faut souhaiter que ces nouveaux indicateurs soient établis de manière fiable et que leur publication soit régulière… Cet engagement concerne également les projets de modification de la circulation aérienne en dessous de 3 000 pieds.

3. Les efforts de recherche des acteurs du secteur de l’aéronautique

Les efforts de recherche sont cruciaux car plusieurs dossiers de protection de l’environnement, comme les nuisances sonores lors de vols de nuit, ne font pas l’objet de consensus auprès des responsables politiques. Les progrès technologiques pourraient permettre de résoudre des problèmes là où la politique s’avère pour l’heure impuissante.

Sous l’égide du Conseil pour la recherche aéronautique civile (CORAC) les acteurs français de la recherche aéronautique ont associé leurs efforts pour permettre la réalisation des objectifs du Conseil consultatif pour la recherche aéronautique en Europe (ACARE) qui prévoit une réduction de 50 % des émissions de CO2, de 80 % des émissions de NOx et de 50 % du bruit perçu à l’horizon 2020. Le programme Clean Sky situe ainsi ses ambitions à mi-parcours des objectifs d’ACARE avec une réduction de 20 à 40 % des émissions de CO2, de 40 % des émissions de NOx et de 30 à 50 % du bruit perçu.

Le réseau environnement du CORAC a présenté un programme de recherche destiné à améliorer la compréhension des mécanismes d’interaction entre l’avion et l’atmosphère. Des projets de recherche ont été élaborés afin d’améliorer la connaissance des mécanismes de formation des traînées de condensation et des phénomènes nuageux induits et de leur impact sur le climat. Quatre programmes de recherches impliquant l’industrie, le CNRS, Météo-France et l’Onera ont été lancés, sous la signature du ministre chargé de l’environnement le 23 juin 2011, au Salon du Bourget.

Les carburants durables alternatifs au kérosène apparaissent comme un moyen très prometteur pour découpler la croissance du transport aérien de celle des émissions de carbone, tout en réduisant sa dépendance au pétrole. Rappelons que la consommation mondiale du transport aérien civil est estimée à 215 millions de tonnes de carburant et qu’elle pourrait atteindre, selon les estimations de la DGAC, près de 330 millions de tonnes en 2030 et 600 millions de tonnes en 2050. Toutes les solutions innovantes en matière de carburant aérien doivent être ainsi explorées.

La Commission européenne a établi une feuille de route visant à atteindre en 2020 un objectif de production de deux millions de tonnes de biocarburants pour l’aviation. Cette feuille de route n’a pas reçu à ce jour de déclinaison en France par les pouvoirs publics. De nombreux travaux de recherches ont été menés par le secteur privé et des progrès considérables ont été accomplis ces dernières années malgré les contraintes élevées sur la formulation des carburants dans l’aéronautique. Plusieurs types de biocarburants ont été certifiés pour un usage dans l’aviation de transport ou sont en train de l’être. De nombreux vols de démonstration ont déjà eu lieu et les exemples d’usage de biocarburants aéronautiques en condition d’exploitation commerciale régulière se multiplient.

À plus long terme, l’avion propulsé à l’énergie solaire affranchirait les compagnies des contraintes d’approvisionnement en énergie fossile et abolirait l’ensemble des nuisances générées par ce secteur. Il n’existe malheureusement pas aujourd’hui de programme public de recherche, français ou européen, visant la mise au point d’un avion propulsé grâce à l’énergie solaire.

L’exploit de Bertrand Piccard s’inscrit dans la droite ligne des pionniers de l’aviation, mais de l’aveu même des concepteurs du Solar Impulse, il n’y a aucune chance de voir de rapides retombées de cet aéronef expérimental dans le domaine de l’aviation commerciale. En effet, pour avoir une surface suffisante de panneaux solaires, cet avion est de la taille d’un gros aéronef de ligne et ne transporte qu’une personne (son pilote).

Dans l’aéronautique, la densité énergétique de la source d’énergie nécessaire à la propulsion (carburants, batteries ou autres) est un élément fondamental. Elle représente la quantité d’énergie contenue dans une masse donnée de carburant ou une batterie s’agissant d’énergie électrique. Les sources d’énergies de forte densité (forte puissance, faible masse) sont donc à privilégier pour garantir la plus grande efficacité énergétique, en ce sens qu’elles permettent de proposer une plus grande charge utile, la seule qui soit valorisable économiquement et socialement. L’énergie solaire présente une très faible densité, bien inférieure à celle des piles à combustibles ou des batteries les plus performantes, elles-mêmes plus de cinquante fois moins denses en énergie que le kérosène ou les biocarburants de synthèse équivalents. C’est pourquoi, même les réflexions les plus prospectives n’envisagent pas d’application de l’énergie solaire au transport aérien avant plusieurs décennies.

À l’heure où tous les acteurs français sont mobilisés par la préparation technologique du successeur de l’A320, qui représente aujourd’hui plus du tiers des emplois aéronautiques en France, la propulsion solaire ne constitue pas un axe prioritaire de recherche. Les soutiens publics à l’aéronautique sont aujourd’hui concentrés sur des travaux de recherche dans les domaines qui peuvent avoir une véritable influence sur la compétitivité des futures générations d’aéronefs, à l’horizon de 10 ou 15 ans. L’effort de recherche se concentre essentiellement sur la réduction de la consommation d’énergie fossile par tous les moyens, car c’est un facteur clé de compétitivité des aéronefs : optimisation de la propulsion, biocarburants, aérodynamique, allègement des structures et des systèmes embarqués. Il convient que le gouvernement soutienne cet effort… Alors que la consommation unitaire de carburant des avions de transport a déjà été réduite de 70 % en 60 ans, cette approche doit permettre de réduire la consommation de carburant des avions de transport de 50 % à l’horizon 2020.

4. Des résultats depuis 2008

Il convient de rappeler qu’une ambitieuse politique de réduction des nuisances environnementales était conduite depuis quatre ans, à la suite de la signature le 28 janvier 2008 de la convention quadriennale entre l’ensemble des acteurs du secteur aérien français (État, compagnies aériennes, aéroports et constructeurs aéronautiques). De nombreux engagements ont été tenus, parmi lesquels :

– l’amélioration de la performance environnementale de la navigation aérienne grâce au relèvement général de 300 mètres des altitudes d’arrivée des avions à destination des aéroports franciliens, effectif depuis le 17 novembre 2011 ;

– le renouvellement de la flotte d’Air France en dépit d’un contexte économique dégradé. Ainsi, entre 2008 et 2011, la consommation par passager et par 100 km d’Air France a été réduite de 3,8 % ;

– la réduction de 20,4 % des émissions absolues de carbone des vols intérieurs d’Air France en 2012 par rapport à 2005 ;

– la baisse de 10 % du temps de roulage moyen des avions à Roissy entre 2007 et 2011 ;

– la livraison en 2011-2012 de trois bâtiments d’Aéroports de Paris certifiés haute qualité environnementale (HQE) (comité d’entreprise, bâtiment de liaison entre les terminaux 2A et 2C et terminal S4 à Roissy) ;

– la mise en service début 2011 d’une centrale à biomasse à Roissy.

5. Responsabiliser les compagnies et les pilotes

La protection de l’environnement ne peut se limiter à l’édiction de règles. Elle s’accompagne d’actions d’éducation auprès des professionnels comme des usagers. Dans l’aviation civile, les acteurs sont multiples. Acteur central de la politique de l’environnement, la DGAC travaille sur deux axes :

– au sein de l’École nationale de l’aviation civile, les élèves pilotes sont désormais sensibilisés aux questions d’environnement ;

– avec les compagnies, elle s’efforce d’avoir une approche équilibrée en jouant sur la réglementation ou la taxation (pour moderniser les flottes), tout en sachant que celles-ci ont une totale liberté de gestion. D’après le conseil général de l’environnement et du développement durable, « les possibilités d'action de la DGAC vis-à-vis des compagnies aériennes sont aujourd'hui correctement exploitées ». Les pouvoirs publics manquent en revanche des éléments qui leur permettent d’analyser si les pilotes, dont le rôle est essentiel dans le respect des procédures, respectent bien ces dernières. Ces éléments sont nécessaires car il résulte des auditions conduites par votre Rapporteur pour avis que la DGAC, les associations d’élus et de riverains, les compagnies et les syndicats de pilotes ne font pas la même analyse des manquements aux règles de survol ou d’approche. Les associations d’élus et de riverains, comme celles autour d’Orly, disposent de relevés et de témoignages montrant que les pilotes ne respectent pas toujours les trajectoires d’approche en obtenant de la part des contrôleurs aériens des dérogations. Seule une quantification précise du phénomène permettra de poursuivre les actions pédagogiques auprès des pilotes et des compagnies ou d’accroître les sanctions à leur égard.

B.— LA LUTTE CONTRE LES NUISANCES SONORES AÉROPORTUAIRES

La lutte contre le bruit au voisinage des aéroports repose essentiellement sur trois lois :

– la loi n° 85-696 du 11 juillet 1985 qui, à titre préventif, institue les plans d’exposition au bruit (PEB) et limite l’urbanisation au voisinage des aérodromes ;

– la loi n° 92-1444 du 31 décembre 1992 qui, à titre cette fois curatif, organise un dispositif d’aide aux riverains et institue les plans de gêne sonore (PGS) ;

– la loi n° 99-588 du 12 juillet 1999 qui, au titre de la transparence et de la concertation, crée l’Autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires (ACNUSA), autorité administrative indépendante dans le domaine de l’environnement.

En outre, les deux lois (n° 2009-967 du 3 août 2009 et n° 2010-788 du 12 juillet 2010) dites du Grenelle de l’environnement ont réaffirmé le principe de lutte contre les nuisances sonores liées au trafic aérien :

– maîtrise de l’urbanisation autour des aéroports, aide à l’insonorisation et optimisation des procédures de navigation aérienne ;

– contrainte sur le trafic nocturne (art. 41 de la loi du 3 août 2009 précitée) ;

– renforcement des compétences de l’ACNUSA selon les dispositions des articles 174 et 175 de la loi du 12 juillet 2010 précitée.

Ces dispositifs n’ont évidemment pas mis fin à un débat qui demeure très vif sur les mesures à prendre ou à renforcer pour améliorer la protection des riverains. Votre Rapporteur pour avis a conduit pendant les mois de septembre et d’octobre une série d’auditions avec l’ACNUSA, avec des élus et des représentants d’associations, qui montrent que nombre de problèmes ne sont pas encore résolus. Les élus attendent du gouvernement une volonté politique forte en faveur de la protection de l’environnement et de la qualité de la vie des riverains. La récente annonce d’ADP sur l’extension d’Orly laisse planer le doute sur cette volonté. Dans l’immédiat, votre Rapporteur pour avis demande au gouvernement de prendre une position susceptible de rassurer les habitants des communes autour d’Orly.

1. L’ACNUSA, un rôle important avec des moyens limités

L’ACNUSA est face à une situation très simple pour 2013 : alors que ses missions se sont étendues à la lutte contre la pollution atmosphérique, son budget est maintenu en termes nominaux, ce qui équivaut à une diminution du montant de l’inflation. Son président, M. Victor Haïm, reçu par votre Rapporteur pour avis le 5 septembre dernier, estime que l’Autorité parviendra tout de même à jouer le rôle que lui a confié le législateur et qu’elle pourra peut-être, par un effort de productivité, recruter un technicien supplémentaire pour mesurer la qualité de l’air.

Rappelons qu’une réglementation particulière a été mise en place sur certains aérodromes en vue de minimiser les nuisances sonores. Orly, Roissy, Toulouse-Blagnac, Lyon-Saint Exupéry, Nantes-Atlantique, Nice-Côte d’Azur, Bâle – Mulhouse, Marseille-Provence et Beauvais-Tillé font aujourd’hui l’objet des principales restrictions d’exploitation, pouvant porter sur :

– la limitation du trafic nocturne ;

– celle du nombre annuel de mouvements ;

– le retrait programmé, total ou partiel, des avions les plus bruyants, dits « du chapitre 3 » ;

– l’interdiction des essais moteurs la nuit ;

– la restriction de l’utilisation des inverseurs de poussée ;

– l’obligation de suivre des procédures à moindre bruit ;

– l’obligation pour les compagnies de publier dans leurs manuels d’exploitation, des consignes de conduite machine visant à limiter les nuisances sonores des atterrissages et des décollages.

Il incombe à l’ACNUSA de contrôler le respect de ces mesures de restriction. Des amendes d’un montant maximum de 20 000 euros pour une personne morale (la moyenne se situant entre 12 000 et 15 000 euros) et 1 500 euros pour une personne physique peuvent être prononcées par l’Autorité.

Dans le cadre du Grenelle de l’environnement, les compétences de l’Autorité ont été ensuite sensiblement élargies. La modification de la procédure des sanctions administratives infligées aux compagnies aériennes et la prise en compte de la pollution atmosphérique autour des aéroports nécessite le recrutement de personnels supplémentaires. Le plafond d’emplois de l’Autorité est passé à 12 personnes dès 2009.

L’ACNUSA est actuellement confrontée aux problèmes suivants :

– l’hétérogénéité des procédures et l’insuffisance des amendes pour non respect des règles environnementales ;

– les vols de nuit ;

– l’urbanisation aux abords des aéroports.

a) L’établissement des amendes : une remise en ordre nécessaire

Les amendes pour non respect des règles environnementales sont prévues par l’article L. 6361 du code des transports et par le décret du 27 avril 2010. Ces textes fixent notamment la répartition des missions entre les différents intervenants dans la procédure administrative.

Si l’on se réfère aux deux rapports annuels de l’ACNUSA pour les années 2010 et 2011, il est regrettable que les procédures de constat des manquements soient hétérogènes selon les plateformes et que la DGAC n’y ait pas encore remédié. Les écarts de trajectoires ne sont pas pris en compte de manière similaire mais – et ceci est plus préoccupant – certains services de la DGAC limitent volontairement le nombre de manquements pouvant donner lieu à un procès-verbal. L’ACNUSA a constaté à plusieurs reprises lesdits manquements en se rendant sur les aéroports.

Il est également regrettable que la DGAC ait constitué en 2011 un groupe de travail sur l’établissement des manquements – devant notamment préciser la notion de déviation de trajectoire – alors que c’est elle qui a la charge d’élaborer la réglementation et de déterminer les critères qui en fondent le respect. À la fin de 2011, l’ACNUSA a estimé que la DGAC ne prenait pas ses responsabilités en envisageant de retenir les seules infractions dues à une omission volontaire du commandant de bord alors que la plupart du temps, les déviations de trajectoire ont pour origine une demande ou une autorisation du contrôle aérien et que le relevé des manquements ne saurait être subordonné à un caractère délibéré, comme l’a rappelé le tribunal administratif de Paris dans une décision du 20 octobre 2011.

Qu’il s’agisse des horaires pris en compte dans les manquements à la réglementation environnementale comme du manque de fiabilité des informations sur les dérogations à certaines obligations, l’ACNUSA (comme d’ailleurs certaines compagnies aériennes) reproche à la DGAC une série de dysfonctionnements sur l’application des normes environnementales. Il est toujours possible que deux instances administratives de l’État n’aient pas la même vision de leur mission mais lorsque des désaccords sont notifiés dans des rapports publics, il est de la responsabilité du Gouvernement d’y mettre bon ordre. À défaut, l’on aboutit à une situation insatisfaisante pour les riverains comme pour les compagnies aériennes et les gestionnaires d’aéroports alors que la législation environnementale vise à concilier développement économique et protection des populations.

Le montant des amendes constitue un autre problème : d’un montant moyen de 20 000 euros, elles sont acquittées par les compagnies aériennes. Au regard du chiffre d’affaires généré annuellement par une ligne, leur caractère ponctuel n’est pas dissuasif. Votre Rapporteur pour avis, comme les élus de l’association Villes et Aéroports, considère d’une part qu’il conviendrait de sanctionner avec plus de sévérité les manquements volontaires aux trajectoires d’approche ou aux créneaux horaires de jour et de nuit en portant leur montant de 20 000 à 80 000 euros afin de les rapprocher du coût de prise en charge des passagers. Soumettre d’autre part les pilotes à ces amendes (au même titre que les compagnies) renforcerait leur caractère dissuasif, certains étant tentés de raccourcir des trajectoires pour des raisons de ponctualité. Les réflexions de plusieurs élus de communes riveraines de plateformes – comme celles de l’association Villes et Aéroports – ont été récemment transmises au cabinet de Mme la ministre chargée de l’écologie.

Entendus le 10 octobre dernier sur ce point, les représentants de la DGAC estiment qu’à un niveau de 80 000 euros, les compagnies aériennes contesteraient systématiquement les amendes qui leur seraient portées devant la juridiction administrative, alors qu’elles s’abstiennent d’actions contentieuses actuellement. Par ailleurs, prélever des amendes sur des pilotes étrangers serait difficile ; il suffirait à une compagnie aérienne d’indiquer qu’elle ne l’emploie plus.

b) Les vols de nuit

L’ACNUSA a mis en place le 7 avril 2011 un groupe de travail sur les vols de nuit dont le rapport doit lui permettre de présenter des propositions sur ce sujet sensible. Il s’agit d’établir un état des lieux des plateformes sur lesquelles elle a compétence et de proposer des mesures pour améliorer la situation.

La quantification du problème des vols de nuit est retracée dans le tableau ci-après :

Aéroports

Mouvements totaux en 2010

Vols de nuit en 2010

Part des vols de nuit en %

Évolution des mouvements totaux depuis 2007 en %

Évolution des vols de nuit depuis 2007 en %

Bâle Mulhouse

58 954

7 381

12,5

- 1,5

+ 9,9

Bordeaux

51 339

3 597

7

- 23,9

+ 4,1

Lyon

118 853

8 969

7,5

- 9,2

+ 4,4

Marseille

108 698

11 539

9,5

- 9,1

+ 4,5

Nantes

55 861

4 088

7,3

- 9,2

+ 5,9

Nice

161 355

9 418

5,8

- 15,4

+ 1,8

Paris Charles de Gaulle

499 997

61 255

12,2

- 9,5

- 0,2

Paris Orly

217 821

10 983

5

- 8

+ 16,3

Strasbourg

36 318

865

2,4

- 30,9

- 50,8

Toulouse

92 316

7 342

7,9

- 10,4

- 2,3

Source : ACNUSA, rapport d’activité pour 2011 - Il convient toutefois de lire ces données avec prudence car la notion de vol de nuit n’est pas définie de manière identique par les aéroports.

À la demande des élus et des associations de riverains, les principaux aéroports français ont engagé des réflexions sur les vols de nuit. Les statistiques par tranches horaires montrent en effet une diminution des vols au cœur de la nuit (de 0 heure à 5 heures) mais un développement important des mouvements de 22 heures à minuit et de 5 heures à 6 heures. D’après les médecins spécialistes du sommeil, les heures d’endormissement et de réveil sont des éléments déterminants pour un bon état de santé.

Les trois principaux aéroports enregistrant un trafic de nuit sont Roissy, largement en tête avec cinq fois plus de trafic que Marseille en seconde position, puis Orly, malgré le couvre-feu applicable à cette plateforme.

La part des aéronefs ayant une marge inférieure à 8 EPNdB ou entre 8 et 10 EPNdB est un indicateur des nuisances subies par les riverains car ce type d’appareil ne représente qu’une part réduite des vols de nuit. La plupart des avions de nuit (entre 82 % et 97 % selon les plateformes) dépasse 10 EPNdB. Votre Rapporteur pour avis soutient pleinement les conclusions de l’ACNUSA, qui estime qu’une interdiction de ces aéronefs à court terme est à la fois souhaitable et possible.

Chaque aéroport obéit à une problématique propre, mais celui d’Orly est dans une situation particulière. Comme il bénéficie d’un couvre-feu, la quasi-totalité de son activité nocturne (99,3 %) est concentrée entre 22 heures et minuit. Le plus souvent les vols transportent soit des passagers, soit des passagers et du fret, l’activité cargo concernant plutôt la plateforme de Roissy. Toutefois, les dérogations à ce couvre-feu ont triplé de 2009 à 2010 et même si leur justification est souvent défendable (problèmes météorologiques ou causes techniques), les élus et les riverains souhaitent éviter leur extension et plaident pour demander l’allongement de ce couvre-feu.

L’avenir d’Orly fait l’objet d’une large réflexion au sein d’une commission stratégique mise en place en octobre 2011 et présidée par un préfet, M. André Viau. Les conclusions prévisibles de ce rapport apparaissent décevantes sur de nombreux points. Votre Rapporteur pour avis et l’ensemble des élus locaux sont favorables au maintien, par la loi d’un strict couvre-feu, voire à son allongement et à la limitation, également par un texte de loi, des mouvements annuels d’avion.

Comme l’a rappelé M. Viau, entendu par votre Rapporteur pour avis le 26 septembre dernier, la réflexion sur Orly est inséparable d’un travail d’ensemble sur le système aéroportuaire d’Île-de-France, qui doit concilier deux impératifs : le développement économique de la région, pour laquelle les aéroports constituent un atout, et la qualité de la vie dans un espace densément peuplé. Alors que le rapport Viau n’est pas rendu public, ADP a annoncé une extension de la plateforme sans conduire cette réflexion d’ensemble ! Le Gouvernement, actionnaire majoritaire d’Aéroports de Paris, doit mettre fin à ce projet catastrophique pour les riverains et envisager d’autres solutions, comme une utilisation plus intensive de l’aéroport de Vatry.

Le bilan sur la réduction des nuisances sonores de nuit est donc très mitigé. La principale action se situe à la source même du bruit, mais elle dépend de progrès technologiques qui ne semblent pouvoir être mis en œuvre avant 2025. La réflexion sur le relèvement de l’altitude de transition, nécessaire pour un relèvement des altitudes d’arrivée, n’a pas progressé. Enfin, le débat sur la classification des avions en groupes acoustiques n’a que récemment commencé.

2. Nuisances sonores et urbanisme

La maîtrise des nuisances sonores constitue l'essentiel des préoccupations d'environnement près des grands aéroports et plusieurs moyens peuvent y contribuer : la réduction du bruit à la source des futurs avions, la modernisation des flottes et l'optimisation des procédures de circulation aérienne : création de nouvelles trajectoires, modification de trajectoires, adoption de procédures anti-bruit au nombre desquelles figurent les descentes continues. Des mesures de protection contre une urbanisation non contrôlée, par le biais des plans d’exposition au bruit participent également de la maîtrise des nuisances sonores.

Comme le rappelaient nos collègues Philippe Meunier et Christophe Bouillon dans leur rapport d’information sur les nuisances sonores, déposé sous la XIIIème législature (n° 3592, du 28 juin 2011), 500 000 personnes riveraines d’aéroports sont exposées dans notre pays à un bruit important, dont 300 000 dans la région Île-de-France. Cette situation multiplie les conflits entre associations de riverains et gestionnaires d’aéroports. Les élus comme les associations manifestent leur opposition à tout projet d’extension. Il convient aussi de noter les nuisances apportées par l’aviation de loisir et le trafic d’hélicoptères, dont les rotations, l’usage de créneaux et les approches font l’objet de moins de sanctions que l’aviation commerciale.

La conciliation entre développement du transport aérien et qualité de la vie dans un environnement urbain constitue un débat permanent et sera de plus en plus vif dans les années à venir. Les solutions sont multiples, mais ne peuvent reposer sur les seuls progrès de la technologie. Ces derniers ne pourront porter leurs fruits avant l’apparition de nouvelles motorisations, à l’horizon des années 2020 à 2025 et ils ne peuvent servir de justification à une multiplication des mouvements d’aéronefs. Il existe en réalité deux axes pour résoudre ce problème : le premier combine un faisceau de mesures avec la prévention de l’urbanisme aux abords des aéroports (plans d’exposition au bruit, plans de gêne sonore, optimisation et contrôle des règles aéroportuaires et plus largement la concertation entre les élus et l’ensemble des acteurs économiques et sociaux concernés) ; le second consiste à envisager la fermeture de plateformes en zone densément peuplée et la construction de nouveaux aérodromes reliés par des lignes à grande vitesse vers le centre des villes, comme cela pourrait être le cas pour Orly.

Le troisième axe qui pourrait être exploré, mais qui ne sera pas abordé dans le présent rapport, est le transfert d’une partie du trafic de passagers et de fret sur d’autres modes de transport, ce qui atténuerait la croissance du trafic d’aéronefs. Il s’agit d’une réflexion globale sur l’utilisation de l’ensemble des modes de transport à l’échelle de notre territoire et de l’Union européenne, avec un double objectif de qualité de service rendu aux usagers et d’une diminution des atteintes à l’environnement.

a) L’adaptation des instruments de lutte contre le bruit

Les PEB et PGS, mais également les fonds de compensation des nuisances aéroportuaires (FCNA) forment les principaux instruments juridiques de lutte contre le bruit. Rappelons qu’en application des articles L. 147-1 à L. 147-8 du code de l’urbanisme, le plan d’exposition au bruit (PEB) est un document d’urbanisme fixant les conditions d’utilisation des sols exposés au bruit des aéronefs. Il vise à interdire ou limiter les constructions pour ne pas augmenter les populations soumises aux nuisances. Il anticipe à un horizon de 15 à 20 ans le développement de l’activité aérienne, l’extension des infrastructures et les évolutions des procédures de circulation aérienne.

En vertu de l’article L. 147-2 du code de l’urbanisme, l’obligation d’être dotés d’un PEB s’applique aux aérodromes classés par le code de l’aviation civile en catégorie A, B ou C en fonction du trafic qu’ils accueillent et, à titre complémentaire, à d’autres aérodromes compte tenu de certaines situations locales. Sur les 215 aérodromes soumis à ce dispositif, 187 sont aujourd’hui effectivement dotées d’un PEB. La DGAC a initié en 2012, à la demande de l’ACNUSA, une étude destinée à évaluer leur efficacité. Les premiers résultats recueillis montrent que les interdictions de construire définies par les PEB sont globalement respectées.

Les nouveaux PEB des aéroports d’Orly et de Beauvais - Tillé devraient être approuvés avant la fin de l’année 2012 et les communes et les établissements publics de coopération intercommunale concernés devraient être formellement consultés sur le projet de PEB au Bourget.

La DGAC a travaillé en 2012 sur les PEB dans deux directions :

– afin de répondre au problème des aérodromes accueillant un trafic limité et irrégulier et permettre de doter ces plateformes d’un PEB reflétant au mieux les nuisances sonores effectives, un projet de décret relatif aux modalités d’élaboration des PEB pour cette catégorie d’aérodromes est en préparation. Ce projet a été soumis à une consultation du public (art. L.120-1 du code de l’environnement) via le site du ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie. À la clôture de cette consultation, intervenu en septembre 2012, le texte a été présenté au Conseil d’État ;

– elle a établi en son sein un groupe de travail visant à réviser la classification des aérodromes. Il s’agit de dégager de nouveaux critères déterminant les aérodromes qui devront être dotés d’un PEB.

Le plan de gêne sonore (PGS) délimite pour sa part les zones dans lesquelles les riverains des douze principaux aéroports peuvent bénéficier d’une aide à l’insonorisation de leur logement. L’objectif est curatif : le dispositif concerne les populations déjà installées et ne présente pas un caractère automatique ; il faut demander à bénéficier de ces aides. Les aides accordées permettent le financement d'opérations d’insonorisation de logements, d’établissements d’enseignement ou de locaux sanitaires et sociaux. L’aide est attribuée après avis conforme d'une commission, la commission consultative d’aide aux riverains compétente (CCAR).

En juin 2011, la DGAC, l’ACNUSA et les gestionnaires d’aéroports ont remis à Mme la ministre chargée de l’écologie une étude sur le nombre de logements restant à insonoriser sur les dix grands aéroports nationaux :

 

Mulhouse

Bordeaux

Lyon

Marseille

Nantes

Nice

CDG

Orly

Strasbourg

Toulouse

Total

Logements dans le PGS

700

1 250

1 346

6 020

1 751

4 200

63 200

43 600

900

20 000

147 967

Logements restant à insonoriser

200

400

400

600

1 120

2 440

42 000

16 600

20

12 200

75 960

Source : DGAC

Si les autorisations de travaux se poursuivent au même rythme et à réglementation constante, les aéroports peuvent être classés en trois groupes selon le nombre d’années nécessaires pour isoler phoniquement la totalité des logements :

En moins de 15 ans

Mulhouse, Bordeaux, Lyon, Marseille, Nantes, Orly, Strasbourg

De 15 à 20 ans

Paris CDG

De 20 à 25 ans

Nice, Toulouse

Le financement de la lutte contre le bruit, notamment de l’insonorisation des logements riverains des dix aéroports nationaux précités est assuré par le produit de la taxe sur les nuisances sonores aéroportuaires (TNSA), recouvrée depuis 2005. Elle est fondée sur le principe du pollueur-payeur, les avions les plus taxés étant les plus bruyants. Perçue à chaque décollage d’aéronef de plus de 20 tonnes, la gestion de son produit en est confiée aux exploitants de ces aéroports, après consultation des commissions consultatives d’aide aux riverains. Le taux de prise en charge des travaux était fixé à 80 % de leur montant mais peut désormais être porté à 100 % sous certaines conditions (cf infra décret du 23 décembre 2011).

La réglementation a évolué sous la précédente législature dans le sens d’une meilleure protection des riverains. L’arrêté du 23 février 2011 a modifié les valeurs forfaitaires de l’aide à l’insonorisation en fonction des caractéristiques du logement et de la zone du PGS et a surtout comblé deux lacunes : la prise en compte de travaux spécifiques lourds comme la ventilation mécanique et les travaux d’isolation de toiture par l’extérieur. Des aides complémentaires peuvent être accordés à raison de 1000 euros pour la ventilation et 5000 euros pour l’isolation extérieure. Ces montants soulèvent les réserves de l’ACNUSA car il n’existe pas d’étude sur le coût moyen des travaux précités et de la somme qui resterait à la charge des riverains. Elle a en conséquence demandé à la DGAC qu’une telle étude lui soit fournie.

Le décret du 23 décembre 2011 a étendu au taux de 100 % la prise en charge des travaux pour les riverains qui recourent individuellement ou collectivement à une assistance à maîtrise d’ouvrage sur l’ensemble des opérations, de la conception à la réalisation, ce dispositif étant valide jusqu’au 31 décembre 2013. L’objectif de cette mesure est d’accélérer le rythme d’insonorisation des logements.

Le système du PGS fonctionne de manière globalement satisfaisante, mais il souffre de deux lacunes : il semble qu’il ne soit pas toujours connu des riverains qui pourraient en bénéficier ; aussi la DGAC devrait-elle s’assurer que lesdits riverains ont bien connaissance du dispositif ; par ailleurs, il n’existe aucune évaluation a posteriori de l’adéquation des travaux aux objectifs recherchés. À l’heure où le Gouvernement comme le Parlement s’efforcent de maîtriser les dépenses publiques, il ne serait pas inutile d’analyser si les plafonds d’aides sont suffisants ou insuffisants (certains n’ont pas été relevés depuis 15 ans), s’il faut les adapter aux prix constatés dans nos différentes régions. C’est sur la base d’une telle évaluation que les PGS pourraient voir leurs aires géographiques étendues, comme le souhaitent certains élus locaux.

Les FCNA, mis en place le 1er janvier 2000, ont vu leur régime récemment modifié par l’article 46 de la loi de finances pour 2011 (n° 2010-1657 du 29 décembre 2010). Ils apportent une aide supplémentaire aux communes riveraines des aéroports de Roissy et d’Orly. Alimentés en application de l’article 1648 AC du code général des impôts par une dotation de l’État et par une contribution annuelle dont le montant est librement déterminé par le conseil d’administration d’ADP (qui n’a pas été réévaluée depuis l’an 2000), les ressources des fonds sont ensuite attribuées aux communes dont le territoire se situe en totalité ou en partie dans les PGS des aéroports précités, selon une logique de potentiel fiscal et non de lutte contre les nuisances. Il en résulte un déséquilibre entre les communes riveraines d’Orly et celles de Roissy. Sont en outre aidées prioritairement les communes dont le potentiel fiscal est faible.

Cette péréquation ne correspond pas à l’objectif que les fonds doivent rendre. Des communes dont le potentiel fiscal est élevé reçoivent peu de dotations alors que leur territoire est au contact des pistes et d’autres, comme Villeneuve-le-Roi, qui ont une importante population dans le PGS touchent également peu d’aides. Votre Rapporteur pour avis se prononce plutôt en faveur d’un système où les dotations seraient versées en fonction du nombre d’habitants recensés dans les PGS.

b) L'optimisation des trajectoires : une solution technique, de nouveaux problèmes

Depuis une dizaine d'années, les pilotes disposent de systèmes de gestion de vol plus performants leur permettant d'optimiser les différentes phases de vol. Ceci a permis le développement de nouvelles procédures d'approche aux instruments, dites d'approche lisse ou de descente continue. Ces procédures permettent aux équipages de conduire le vol à l'arrivée d'un aérodrome en évitant les paliers et en réduisant les sollicitations des moteurs qui sont source de bruit. À la fin de 2010, les pouvoirs publics ont présenté un premier bilan de la mise en œuvre de ces procédures sur les dix principales plateformes. Le nombre de vols réalisés selon ces procédures est encore modeste et les résultats obtenus, s'ils sont réels en termes de baisse des nuisances sonores et de consommation de carburant, ne sont pas toujours clairement perçus des populations survolées.

Le recours aux descentes continues ne peut en outre être généralisé à tous les vols pour des raisons de capacité de gestion des atterrissages. Il ne peut aujourd'hui être mis en œuvre que lorsque le trafic n'est pas très dense, la nuit notamment. Cette technique ne saurait donc être considérée comme une solution universelle au problème des nuisances sonores.

Les associations de riverains relèvent de plus en plus fréquemment des manquements au respect des trajectoires et considèrent que les contrôleurs aériens accordent trop souvent les dérogations demandées par les pilotes lors des phases d’atterrissage, au détriment des populations qui se trouvent survolées.

c) Le déplacement des aéroports et la coopération entre aéroports : des pistes insuffisamment étudiées

La plupart des aéroports ont été construits en dehors des villes afin d’épargner aux habitants les nuisances des activités aériennes, mais se retrouvent aujourd’hui entourés de centaines de milliers de riverains, en raison de l’urbanisation autour des plateformes. Les mesures préconisées ou mises en application atténuent ou déplacent les problèmes, mais ne les résolvent pas.

Le Grenelle de l’environnement comme la conférence environnementale des 14 et 15 septembre derniers ainsi que de multiples colloques et rapports de commissions opèrent de remarquables diagnostics sur les nuisances aériennes mais font preuve d’un grand conservatisme quant aux solutions. Aucun rapport, à notre connaissance, ne propose le transfert des plateformes vers des zones peu urbanisées.

La question est pourtant patente en région parisienne, et à un degré moindre en Midi-Pyrénées, avec la plateforme de Toulouse-Blagnac. S’agissant de l’Île de France, la DGAC a prévu que Roissy et Orly pourraient accueillir en 2020 1,35 million de mouvements d’avions. Or Orly est réglementairement limité à 200 000 mouvements par an alors que Roissy enregistre actuellement 600 000 rotations. Il s’agit donc de pouvoir ajouter 550 000 mouvements supplémentaires à moyen terme, ce qui est inadmissible pour les élus et les habitants des communes riveraines. La DGAC, ADP et Air France dissimulent leur volonté de mettre fin aux limitations des rotations sur Orly, en pariant sur une augmentation de trafic qui reste à démontrer. Ce débat est d’autant plus biaisé que l’État ne joue pas pour l’instant son rôle, alors qu’il devrait envisager pour le transport aérien une stratégie à l’horizon de 2035.

Compte tenu des nuisances déjà subies par les populations, notamment celles riveraines d’Orly, l’une des pistes de réflexion consiste à envisager l’arrêt de l’exploitation de cette plateforme pour la transférer en zone moins dense. Ce déplacement géographique s’effectuerait dans le cadre de la desserte aérienne du Grand Paris et devrait comprendre un volet sur des accès à grande vitesse depuis et vers le nouvel aéroport. Mais ce dernier vient d’être remis en cause par le gouvernement.

Cette idée a été défendue sous la XIIIème législature par notre ancien collègue M. Didier Gonzales (proposition de loi n° 3486, déposée le 1er juin 2011) et a suscité quelques controverses, avec par exemple l’opposition du président du conseil général du Val de Marne, qui a rappelé qu’une charte du développement durable avait été adoptée en janvier 2011 par les communes riveraines. La commission pour l’avenir d’Orly, présidée par M. André Viau, ancien préfet, n’a pas encore remis son rapport définitif, mais entendu par votre Rapporteur pour avis, M. Viau a écarté l’idée d’un nouveau site aéroportuaire qui coûterait au minimum 20 milliards d’euros, soit une somme incompatible avec l’état des finances publiques. Aéroports de Paris a annoncé à la mi-octobre le lancement de travaux à Orly, d’un montant d’environ 400 millions d’euros, officiellement destinés à améliorer l’accueil des passagers, mais il est certain qu’ils permettront de recevoir des avions de grande capacité, comme l’Airbus A380. Les élus et les associations de riverains sont fermement opposés à l’idée de subir des nuisances supplémentaires.

Le débat n’est pas clos, d’autant que rares sont les réflexions qui ont porté sur des solutions techniques nouvelles. L’éloignement des pistes des aérogares, qui n’est certes guère prisé par les compagnies, pourrait représenter une solution si elle s’accompagnait de la mise en place de navettes automatiques rapides, à fréquence régulière. Cette idée est rejetée par les professionnels du transport aérien pour lesquels les avions, les pistes et les aérogares doivent être proches, mais elle n’a pas été sérieusement mise à l’étude par la DGAC ou par un organisme indépendant.

La coopération entre aéroports est une autre possibilité. Il s’agit d’intégrer des aéroports disposant de capacités à un schéma régional de desserte aérienne. L’Île de France n’a ainsi pas encore pris la mesure de l’existence de l’aéroport de Vatry, en Champagne, à 150 km du centre de Paris. Conçu il y a vingt ans par le conseil général de la Marne, cette plateforme prévue initialement pour le fret accueille désormais des passagers (sur des vols à bas coût) et dispose de réserves foncières appréciables ainsi que de nombreux créneaux. Il dessert déjà des activités franciliennes, comme le parc d’attraction de Disneyland et la société gestionnaire souhaite vivement que la plateforme soit considérée comme une porte d’entrée de la région parisienne. Elle a indiqué à votre Rapporteur pour avis qu’elle était disponible pour recevoir une part du trafic des aéroports parisiens. Si la desserte plus rapide de cet aéroport pouvait être réalisée (avec un raccordement ferroviaire sur la ligne de TGV Paris-Reims), Vatry pourrait alléger considérablement le trafic d’Orly.

TRAVAUX EN COMMISSION

I.— AUDITION DE M. FRÉDÉRIC CUVILLIER, MINISTRE DÉLÉGUÉ CHARGÉ DES TRANSPORTS, DE LA MER ET DE LA PÊCHE

Au cours de sa réunion du 24 octobre 2012, la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a entendu M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche, sur les crédits « transports » de la mission « Écologie, développement et aménagement durables ».

M. le Président Jean-Paul Chanteguet. Je suis heureux d’accueillir le ministre chargé des transports pour une audition consacrée à l’examen des crédits prévus par le projet de loi de finances pour 2013. Je saisis l’occasion pour l’informer qu’en accord avec Mme Danièle Auroi, présidente de la commission des affaires européennes, nous avons créé un groupe commun de travail sur les questions ferroviaires qui étudiera plus particulièrement le « quatrième paquet ferroviaire ». Notre commission a désigné MM. Yann Capet et Rémi Pauvros pour le groupe Socialiste, M. François-Michel Lambert pour le groupe Écolo, et MM. Jean-Luc Moudenc et Jean-Pierre Vigier pour le groupe UMP.

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué auprès de la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche. Le budget des transports et de la mer que je vous présente s’élève à 8,120 milliards d’euros, soit, hors du soutien aux régimes sociaux et aux retraites, une augmentation de 4 % par rapport à 2012 puisque ce dernier était établi à 7,824 milliards. Cette progression de 300 millions d’euros est due pour l’essentiel à un changement de périmètre en raison du transfert des services de navigation de l’État à Voies navigables de France (VNF) à hauteur de 200 millions d’euros. Elle résulte aussi d’une augmentation de 4 % du budget de l’Agence de financement des infrastructures de transports de France (AFITF) et d’un effort de 45 millions en faveur des « trains d’équilibre du territoire ».

Il s’agit d’un budget responsable, compte tenu de nos contraintes financières, qui répond aux préoccupations des usagers et à l’exigence d’une bonne desserte en transports de l’ensemble du territoire français. Le Gouvernement a souhaité renforcer les moyens de l’AFITF dont la subvention budgétaire diminue certes de 300 millions, mais qui bénéficie de la hausse des redevances domaniales versées par les sociétés concessionnaires d’autoroutes et du produit de l’écotaxe poids lourds pour un montant qui devrait en 2013 être supérieur à 500 millions d’euros.

Puisque nous évoquons les transports terrestres, vous savez, M. le Président, que j’ai œuvré pour que le Parlement soit largement représenté au sein de la commission « Mobilité 21 », qui va évaluer le schéma national des infrastructures de transports (SNIT). Il est important que des parlementaires soient associés à une politique qui vise à éviter la fracture territoriale en aménageant nos espaces géographiques par de bonnes liaisons de transports, dans un domaine qui comporte également de forts enjeux environnementaux. Il appartiendra à cette commission de commencer ses travaux et j’espère qu’elle y associera les Présidents de commissions parlementaires concernées. Les critères de hiérarchisation des projets d’infrastructures devront prendre en compte l’équilibre des territoires, l’optimisation économique des investissements et les enjeux environnementaux.

Les crédits que je présente ne forment pas un budget d’annonces, selon l’expression consacrée ; il s’agit d’un budget réaliste, qui mettra en œuvre des projets financièrement soutenables. La parole de l’État sera ainsi respectée.

Les transports contribuent de plusieurs manières à la compétitivité de nos territoires. Ils soutiennent des filières industrielles entières en assurant les carnets de commande des entreprises. Nous devons notamment assurer le renouvellement de nombreux équipements, comme les matériels roulants. Même si notre budget est marqué par la rigueur, il n’interrompt pas les processus d’investissements prévus par les contrats de plan État-régions comme les quatre lignes à grande vitesse – Europe Sud Atlantique, TGV Est, Bretagne Pays de Loire et contournement de Nîmes et de Montpellier - les opérations portuaires et la modernisation de nos transports maritimes, en créant des hubs portuaires. Comme vous le savez également, le Gouvernement engagera dans quelques jours la réforme ferroviaire que je m’apprête à présenter au Premier ministre.

L’organisation de notre transport ferroviaire est fondée actuellement sur un partage entre la SNCF et RFF qui génère des coûts importants. Nous souhaitons que le système présenté dans quelques jours ou quelques semaines nous permette d’améliorer notre compétitivité et de répondre aux défis ferroviaires de l’avenir. Nous conduisons également une réflexion sur l’avenir du réseau autoroutier concédé. L’objectif est d’arriver à augmenter la puissance du réseau tout en assurant son bon entretien. Donc nous réfléchissons au mode de financement de cette infrastructure.

Nous aspirons également à mettre en place une politique maritime intégrée. C’est une chance pour notre pays d’avoir une vaste façade maritime et de nombreux ports. Peu de pays européens s’engagent dans cette voie, ainsi que je l’ai récemment constaté à Limassol lors d’un conseil des ministres européen informel.

Enfin, dès lors que nous nous allons nous engager dans un troisième volet de décentralisation, nous aurons prochainement à réfléchir sur la répartition des compétences en matière de transports ainsi que sur leur meilleure coordination, tant à l’échelle de petits territoires que dans les régions et entre régions.

Je souhaite rappeler les grandes lignes des crédits dont j’ai la charge.

- Au programme 203, les concours financiers en faveur du transport ferroviaire sont maintenus à hauteur de 2,536 milliards d’euros. Les infrastructures fluviales bénéficieront de 135 millions d’euros. Nous maintenons également les crédits d’entretien pour les routes.

- Au programme 205, doté de 194 millions d’euros, 142 millions sont destinés à la sécurité des affaires maritimes et 52 millions en faveur de la pêche et de l’aquaculture. Il s’agit de crédits en diminution mais il faut mettre en parallèle la création depuis 18 mois de France filière pêche, organisme privé qui vient en accompagnement de notre financement public.

Je précise, s’agissant de la pêche, que j’ai négocié pendant toute la nuit dernière à Luxembourg l’enveloppe européenne dont notre pays pouvait bénéficier et je suis heureux de vous annoncer qu’elle sera plus conforme à la hauteur de la place de la France dans ce secteur, au troisième rang européen. Nous pourrons ainsi répondre aux enjeux de modernisation des moteurs des navires, pour qu’ils soient plus efficaces, moins consommateurs d’énergie, dans une logique de développement durable.

S’agissant de l’aviation civile, notre objectif est de poursuivre le désendettement du budget annexe et de nous engager dans la politique de Ciel unique européen, avec SESAR, et dans le bloc européen d’Europe centrale (FABEC).

M. Jean-Yves Caullet. Monsieur le ministre, vous nous avez présenté un budget important, qui à mon sens préserve les capacités d’action du ministère des transports, de la mer et de la pêche, dans un contexte contraint. Pendant longtemps, les fortes attentes de nos concitoyens ne sont pas trouvées en adéquation avec les moyens de celui-ci : je me réjouis donc des choix que vous avez faits, choix qui vont redonner de l’efficacité à l’investissement. Je compte que la nouvelle orientation de vos crédits permettra une meilleure prise en compte des critères qui la favorisent.

J’ai été très sensible au fait que vous remettiez l’industrie au cœur de votre budget : nous avons besoin d’une vision forte pour la filière des transports, dont l’excellence a peut-être par le passé souffert d’être diluée. Or il s’agit d’une filière porteuse d’avenir à long terme, créatrice d’emplois, et dont il faut à mon sens redonner le goût à nos meilleurs étudiants. Il est en effet curieux de constater que ceux-ci soient orientés par exemple dans le domaine de la prospective financière et bancaire, alors que leurs compétences apporteraient sans doute plus à notre pays si elles étaient employées à dessiner les contours des transports de demain.

Concernant la réforme ferroviaire que vous avez évoquée, en lien avec l’acte III de la décentralisation, je forme tous les vœux afin que cette future loi soit mise à profit afin de favoriser une meilleure coordination sur le terrain des autorités organisatrices de transport. Après tout, le voyageur voyage et l’organisation sous-jacente lui importe peu.

Les enjeux européens, que vous avez également mentionnés, concernent d’abord la pêche. Compte tenu des spécificités de notre pays, il s’agit d’un gisement important de performances. Je compte que, grâce à votre action et à la négociation que vous avez conduite la nuit dernière à Luxembourg, et qui a débouché sur l'accord du Conseil Agriculture et Pêche, la place de la France sera sur ce terrain désormais mieux défendue.

M. Martial Saddier. Avec 4 milliards d’euros, le budget de votre ministère accuse une baisse des crédits demandés de 3,4 %. Les commissaires UMP s’inquiètent de cette nouvelle orientation qui sacrifie la capacité d’investissement aux moyens de fonctionnement. Or, l’impact des nouveaux projets irrigue les territoires, et nous savons que, bien souvent, retarder leur mise en œuvre signe leur disparition.

Vous avez insisté sur la concertation. Or la commission chargée d’examiner le contenu du SNIT ne comprend aucun député du groupe UMP, ni aucun membre de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire. Je m’interroge d’ailleurs sur la saisine de son président : a-t-elle seulement eu lieu ?

S’agissant de la taxe poids lourds, vous prévoyez une mise en place à compter du mois de juillet 2013 : ce délai permettra-t-il d’alimenter, au moyen de son produit, les caisses de l’AFITF à la hauteur prévue dans le projet de loi de finances ? Permettez-moi d’en douter.

Le « bleu budgétaire » ne contient aucune ligne de crédit consacrée au troisième appel à projet relatif aux transports en commun en site propre (TCSP), ce qui paraît préoccupant.

S’agissant des grands projets d’infrastructures, pourriez-vous nous donner votre vision de la ligne Lyon-Turin, du canal Seine-Nord-Europe, et du projet, porté par l’Italie, de percement d’un second tunnel sous le Mont-Blanc ?

Les assises du ferroviaire ont révélé un manque alarmant de financement des principaux opérateurs nationaux, évalué à 1 milliard d’euros pour RFF et à 2 milliards pour la SNCF : quelles solutions proposez-vous pour le combler ?

La sécurité aérienne doit constituer l’un des piliers de votre politique ; savez-vous qu’il n’est plus nécessaire de justifier de son identité pour emprunter un vol intérieur ?

Enfin, le modèle économique des low-cost menace celui d’Air France : or l’existence d’une compagnie aérienne nationale constitue un élément central de notre compétitivité industrielle. Comment envisagez-vous dans ces conditions l’avenir du groupe Air France-KLM ?

M. Stéphane Demilly. Je vous interroge, monsieur le ministre, avant de rejoindre la gare du Nord et de tenter de regagner ma circonscription avant que les effets de la grève qui a été annoncée ne se fassent sentir. (Sourires)

L’Agence française pour l'information multimodale (AFIMB) a vu le jour, dans une optique louable de concertation avec les acteurs des transports, dans le sillage du Grenelle de l’environnement : cependant, quelle peut être son utilité réelle ? N’a-t-on pas affaire-là à un organisme budgétivore, qui produit un service dédié insuffisant ? À force de créer des opérateurs dont la mission consiste à diagnostiquer et à observer, nous finirons un jour par créer un observatoire des observatoires. (Sourires)

Les propos de votre directeur-adjoint de cabinet, M. François Poupard, à propos du canal Seine-Nord Europe à grand gabarit, a suscité une réelle inquiétude, tout comme votre réponse, tout à l’heure, lors de la séance de questions au Gouvernement, à la question posée par notre collègue Jean-Jacques Cottel. « Nous n’avons pas dit que nous ne ferons pas » : tels ont été mots que vous avez en effet employés. Votre approche du dossier me paraît « hémiplégique » : vous êtes obnubilés par les coûts, sans voir les nombreux avantages, notamment à long terme, de ce projet pour notre pays. Cessez donc de regarder ce dossier avec des lunettes à demi-foyer.

S’agissant des affaires maritimes, la flotte française reste majoritairement motorisée au pétrole et au gaz. Or les capitaux français représentent une part infime de ce secteur industriel dominé, par des filiales étrangères. Je trouve cela inquiétant.

M. Patrice Carvalho. En matière ferroviaire, la situation est compliquée du fait de la scission entre la SNCF et RFF, opérée il y a quelques années, conduisant au délaissement complet de certains abords de voies ferrées et faisant apparaître de considérables besoins d’investissement et de rénovation. Le présent projet de budget ne répond pas à cette nécessité et n’est pas à la hauteur des besoins.

En matière de ferroutage, il faudrait que l’État s’engage de manière à désengorger nos autoroutes, aujourd’hui complètement bloquées, et à faire admettre l’idée, auprès des transporteurs routiers, que nous avons besoin d’autres pratiques pour ce qui concerne le transport des marchandises.

Nous avons aussi besoin d’un maillage routier beaucoup plus serré, de sorte que toutes les parties du territoire soient facilement accessibles.

Je suis également d’avis que ne pas construire le canal Seine Nord-Europe serait une erreur pour l’avenir des régions concernées. La problématique est la même que lors de la construction du tunnel sous la Manche : c’est la présence de l’infrastructure qui créera le besoin. Il s’agit là de territoires fortement industrialisés, confrontés à la nécessité d’assurer l’approvisionnement régulier de grandes usines et dont les entreprises risquent de souffrir à l’avenir du fait de la taxe sur le fioul ou de la taxe à l’essieu. Ne pas mettre en place une solution de transport moins coûteuse nous expose à un manque à gagner important, de nature à fragiliser le tissu économique local.

M. François-Michel Lambert. Dans le cadre de la politique de réduction des émissions de gaz à effet de serre, le budget conforte les interventions de l’État en faveur du développement des modes de transport alternatifs à la route, tant pour les personnes que pour les marchandises.

Il y a un engagement pour revenir aux enjeux du quotidien, celui de nos concitoyens qui rencontrent chaque matin des difficultés pour se rendre à leur travail.

Le Président de la SNCF fait néanmoins part de risques sérieux sur les « trains d’équilibre », les Intercités, face à des trains Corail de quarante ans d’âge moyen. Il évalue l’investissement nécessaire à 3,5 milliards d’euros sur dix ans, pour revenir sur les manques constatés depuis le début des années 2000. Il va jusqu’à évoquer la possibilité de mobiliser les TGV de première génération : tout ceci dénote une nation incapable de redevenir industrielle et plutôt dans le recyclage des matériels que dans la projection vers l’avenir.

S’agissant des TER, les investissements indiqués sont de 3 milliards d’euros sur dix ans – soit 6,5 milliards en cumulé. Il y a donc, là aussi, une intervention complémentaire à déterminer.

En amont, la question du réseau ferroviaire lui-même est posée. Enfin, on commence à comprendre l’urgence de sauver tout le ferroviaire ne relevant pas des lignes à grande vitesse ! Lorsque que celles-ci ont commencé à se bâtir, le reste du réseau n’a cessé de se déconstruire.

Ce qui nous inquiète le plus est le devenir de la dette de RFF, qu’on s’attend à voir atteindre 50 milliards d’euros prochainement. Comment l’État compte-t-il aborder cette question ? Des propositions novatrices sont sur la table, présentées par le président de la SNCF : sont-elles opportunes ? Des arbitrages doivent être faits : ils doivent d’abord être au service des besoins du quotidien et non servir l’intérêt de RFF, de Bouygues ou d’autres grandes entreprises.

La déconstruction des trains représente un enjeu très important auquel nous sommes confrontés. On peut l’approcher de manière comptable, ou de manière intelligente à travers la mise en place d’une véritable filière industrielle, dans une logique d’économie circulaire.

Quant aux capacités de l’AFIFT, je doute qu’elles soient suffisantes au regard des 245 milliards d’euros à mobiliser dans le cadre du schéma national des infrastructures de transport. Comment envisagez-vous de remédier à ce manque de moyens ?

M. Olivier Falorni. Je souhaiterais aborder trois questions importantes.

La première porte sur le projet de tronçon d’autoroute A831, qui rapprochera Fontenay-le-Comte et Rochefort, en reliant le marais poitevin à La Rochelle. Ce projet est essentiel pour nos territoires, en particulier du fait de la connexion avec l’A10. Le chantier contribuera à vivifier le tissu économique local, grâce à la création d’emplois, au développement du tourisme et aux facilités apportées au transport de marchandises.

Très attendu, ce projet est néanmoins une Arlésienne. Une commission a été récemment installée, chargée d’établir un nouveau schéma national des infrastructures de transport et dont le rapport devrait être remis courant avril 2013. La presse régionale s’est fait récemment l’écho de votre engagement à financer ce projet : pourriez-vous nous le confirmer, ce qui ne pourrait que contribuer à réjouir nombre d’acteurs locaux ?

Ma deuxième question concerne la sécurité maritime. Le golfe de Gascogne ne possède plus de remorqueur de haute mer, depuis que l’Abeille-Languedoc a quitté le port de La Rochelle pour être redéployé dans le Pas-de-Calais. Le remorqueur d’intervention Abeille-Bourbon, basé à Brest, ne saurait à lui seul assister des navires dans la large zone du golfe : une telle décision est donc dangereuse et prise au détriment de la sécurité. Il est plus nécessaire que jamais de conserver un remorqueur de haute mer sur la façade atlantique : qu’en pensez-vous et pouvons-nous espérer un réexamen de ce problème ?

Ma troisième question concerne la création des parcs naturels marins. L’Agence des aires marines protégées est un établissement public, dont l’une des premières missions est l’appui aux politiques publiques de création et de gestion de telles aires marines. Outre les quatre parcs existants, cinq missions d’étude sont actuellement en cours, dont celle intéressant la création du parc naturel marin de l’estuaire de la Gironde et des pertuis charentais. Le dossier est clos, les commissaires-enquêteurs ont rendu un avis favorable et le décret de création du parc serait soumis à votre signature. Compte tenu des moyens financiers requis pour rédiger le plan de gestion du parc, dans les trois ans suivant sa création, et des recrutements à opérer pour assurer le fonctionnement de cet outil essentiel pour un développement durable du milieu marin, je souhaiterais connaître votre position sur ce dossier.

M. Jacques Alain Bénisti, rapporteur pour avis sur les transports aériens. Ma première question concerne les Fonds de compensation des nuisances aéroportuaires (FCNA), institués au bénéfice des communes riveraines des aéroports de Roissy et d’Orly. Ces fonds sont alimentés par une dotation de l’État et par une contribution volontaire d’Aéroports de Paris. Les aides des FCNA sont ensuite attribuées aux communes situées en totalité ou en partie dans la zone couverte par un plan de gêne sonore, selon un critère de potentiel fiscal - et non de nuisance. Le résultat est paradoxal, puisque certaines communes riveraines des pistes ne reçoivent aucune aide – ou très peu.

Le dispositif de lutte contre les nuisances sonores est fondé sur l’aide aux populations qui les subissent et non sur le potentiel fiscal de leur commune de résidence ; seuls les FCNA font exception à ce principe. Est-il en conséquence envisageable de réformer ce système et d’attribuer donc les aides en fonction du nombre de personnes relevant d’un plan de gêne sonore ?

Ma deuxième question porte sur les trajectoires d’approche des aéroports. Ces trajectoires ont théoriquement fait l’objet d’optimisations au cours des dernières années, afin de diminuer le bruit subi par les riverains et les consommations de carburant quand les aéronefs s’apprêtent à atterrir. Selon les services de votre ministère, qui ont présenté un premier bilan en 2010, les résultats sont encore modestes.

Le problème principal, d’ailleurs relevé par l’Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires (ACNUSA), est qu’il existe de notables différences de perception entre la direction générale de l’aviation civile (DGAC), d’une part, et les associations d’élus et de riverains, d’autre part, quant au non-respect de ces trajectoires d’approche. Il arrive ainsi que des pilotes « coupent » certaines trajectoires pour atterrir plus rapidement ; surtout, les contrôleurs accorderaient très facilement des dérogations aux pilotes qui les demandent, ce qui amplifie les nuisances au-dessus des zones urbanisées. D’après la DGAC, le phénomène serait marginal ; d’après les associations de riverains, qui disposent d’instruments de mesure, il serait au contraire de plus en plus pratiqué…

Plutôt que de se perdre en de vains débats sur la parole des uns ou des autres, pourriez-vous envisager de constituer une commission réunissant des représentants de la DGAC, de l’ACNUSA, des élus locaux et des associations ? Cette commission étudierait le phénomène - avec un droit d’accès aux tours de contrôle - pour en évaluer l’ampleur et en comprendre les raisons.

Ma troisième question porte sur l’aéroport d’Orly. Aéroports de Paris (ADP) a annoncé un programme d’investissements dépassant les 450 millions €, présenté comme une amélioration des services rendus aux passagers. À mon sens, ADP et l’État, qui en est l’actionnaire majoritaire, avancent masqués sur ce dossier : comment croire que l’installation de six pontons pour gros porteurs – très certainement, des Airbus A 380 – ne donnera pas le signal d’une demande de déplafonnement des mouvements d’avion et des vols de nuit ? Les élus locaux et les riverains s’opposent ferment à ce projet. Le Gouvernement est-il, de son côté, prêt à le geler afin de conduire une étude sérieuse sur l’avenir du transport aérien en Île-de-France ? Il serait très important d’envisager le déplacement des pistes à 50 km des infrastructures, moyennant une liaison par métro automatique rapide : le concept existe aux États-Unis et au Japon, il fonctionne parfaitement… et il permettrait d’éviter des nuisances affectant aujourd’hui près de cinq millions d’habitants.

M. Rémi Pauvros, rapporteur pour avis sur les transports terrestres. Je constate avec satisfaction que même si le budget des transports ne figure pas parmi les ministères prioritaires, il reste presque constant si l’on exclut la réduction de la subvention de l’AFITF, ce qui constitue un acte politique fort.

S’agissant de l’AFITF, il faut élargir le sujet. L’AFITF sera le bras armé de la politique qui résultera du travail de la commission « mobilité 21 » et de la révision du SNIT. Mais il sera difficile de rassembler les financements suffisants par rapport aux ambitions légitimes qui découleront du nouveau schéma. Où en est la réflexion sur l’évolution éventuelle des ressources de l’AFITF ? La fiscalité peut-elle être revue ? Où en sont, en particulier, les relations entre l’État et les sociétés concessionnaires d’autoroutes ? Qu’en est-il de la mobilisation des crédits européens, notamment en faveur du projet de canal Seine-Nord-Europe pour lequel seulement 6 % du financement a été obtenu au niveau européen ? La possibilité de réaliser de larges infrastructures passe nécessairement par le recours aux fonds européens, qu’il s’agisse du budget, des project bonds ou des prêts de la BEI.

Sur les TET, soit nous choisissons de les « subir » comme une nécessité en se contentant, comme on le fait depuis plusieurs années, d’adopter des mesures d’accompagnement minimum, soit nous prenons, et c’est ce que je souhaite, le temps de réfléchir à une stratégie commerciale. Celle-ci permettrait d’offrir aux territoires concernés, qui sont souvent les plus délaissés, et à une population, qui en a besoin, une offre tarifaire beaucoup plus intéressante que celle des TGV. Il faut porter un nouveau projet, une nouvelle démarche, pour répondre à leurs attentes.

Sur l’évolution des relations entre la SNCF et RFF, au-delà de la question de la dette de RFF, il existe une volonté manifeste des dirigeants des deux entreprises de mener rapidement à bien des coopérations. Avant de résoudre les problèmes institutionnels et juridiques, ne faut-il pas porter de grands projets, notamment les démarches visant à rendre plus présentable le réseau ferroviaire, en termes d’aménagement, de propreté, d’abords, de paysages ?

M. Jean-Christophe Fromantin, rapporteur pour avis sur les transports maritimes. Je voudrais souligner combien stratégiques sont les affaires maritimes : la géographie offre à notre pays des façades maritimes diverses et la seconde zone économique exclusive du monde. C’est un avantage de premier ordre dans notre combat pour la compétitivité et pour une évolution positive dans la mondialisation. J’aurai trois questions à vous soumettre, assez différentes mais finalement liées aux enjeux du commerce international.

En premier lieu, j’ai constaté la progression rapide du trafic des conteneurs. Or nos avantages géographiques ne font pas tout, puisque la moitié du flux destiné à la France lui échappe au profit des nations d’Europe du Nord. Cette contradiction est patente : même si les volumes repartent à la hausse, nous perdons des parts de marché. Mes travaux préparatoires m’ont conduit à rencontrer plusieurs directeurs de grands ports maritimes. Tous ont évoqué un décalage entre les ambitions portuaires et la relation avec l’hinterland. Pour Le Havre, c’est la relation avec Paris et sa région qui pose problème. Marseille et le site de Fos déplorent une connexion insuffisante au réseau autoroutier. Le port de La Rochelle a pris l’initiative de devenir lui-même opérateur ferroviaire pour étendre sa zone de chalandise au centre et à l’est du pays, mais il souffre de la vétusté des lignes de fret ferroviaire. Quels sont vos objectifs dans ce nécessaire accompagnement dans la relation avec l’hinterland, que je considère comme la suite logique de la réforme portuaire ?

Ma deuxième question a trait à l’enseignement supérieur maritime. L’école nationale supérieure de la marine marchande (ENSM) a été formée en 2010 par le regroupement des quatre écoles de Marseille, Nantes, Saint-Malo et Le Havre : une gouvernance unifiée pour quatre sites. Vous avez démissionné le directeur et le président il y a quelques semaines. C’est un geste politique fort, mais comment l’interpréter ? Est-ce la sanction d’une mauvaise gestion ? Est-ce le préalable à une réorientation stratégique ? Voulez-vous spécialiser les sites par métier ou par zone géographique ? J’attends votre éclairage avec intérêt : ces choix seront déterminants pour notre compétitivité maritime future.

Enfin, ma troisième question concerne le lien entre gouvernance portuaire et décentralisation prochaine, particulièrement dans le cadre marseillais à la suite de la métropolisation annoncée du territoire. Auriez-vous des précisions à nous communiquer ?

M. Jean-Louis Bricout. Sans vouloir anticiper sur la révision du SNIT, quelle est la situation et quelles sont les perspectives de financement pour la RN2 ? Cet axe a fait l’objet de plusieurs décisions d’aménagement depuis plus de vingt ans, ce qui prouve son caractère structurant, crucial pour le département de l’Aisne qui connaît une situation difficile.

Concernant le canal de la Sambre à l’Oise et les conditions de sa remise en navigation prévue prochainement, pouvez-vous nous rassurer sur les intentions de Voies Navigables de France, et sur le fait que VNF ne se déchargera pas sur les collectivités territoriales ?

M. David Douillet. Je rejoins les interrogations exprimées par mes collègues sur le canal Seine-Nord-Europe, priorité économique et qui doit être une priorité dans les investissements.

En matière aérienne, quelle coopération peut-on imaginer entre Aéroports de Paris et Air France ? ADP reçoit peu ou pas de subventions, verse chaque année des dividendes à l’État grâce à ses recettes commerciales, et veut s’affirmer comme la référence commerciale en matière d’aérogares en Europe. Le trafic aérien a été en hausse en 2010-2011, la société se porte bien. En revanche, la situation d’Air France est problématique, comme le montrent ses résultats financiers du premier semestre 2012. Quelle relation serait-il possible d’établir entre les gains d’ADP et les pertes d’Air France ?

Mme Sophie Rohfritsch. Je souhaite connaître les intentions du Gouvernement sur le grand contournement Ouest de Strasbourg, dossier d’autoroute concédée dont la déclaration d’utilité publique est toujours valable, et qui permettrait d’achever la liaison Nord-Sud du territoire alsacien. Ce contournement est très attendu par l’ensemble des acteurs économiques. Pour quelles raisons est-il différé ? Il est difficile de croire que ce retard est dû seulement à l’impossibilité pour Vinci, premier attributaire du marché, de trouver le financement nécessaire de 100 millions d’euros. Si c’est le cas, il faut faire appel au deuxième candidat !

Mme Catherine Quéré. Je me félicite de ce que le programme 203 s’inscrive clairement dans la transition énergétique et environnementale, en poursuivant le double objectif de développer les alternatives à la route et d’améliorer la desserte et la compétitivité des territoires.

Le projet d’électrification de la ligne ferroviaire Niort-Saintes-Royan est un enjeu économique, social et environnemental pour la région Poitou-Charentes, la Charente-Maritime et les autres collectivités locales concernées. La solution proposée est la plus rapide pour rejoindre l’Atlantique et permettrait d’atteindre tous les objectifs : faire baisser drastiquement le trafic sur l’A10 et la pollution atmosphérique, et prendre en compte la fragilité des territoires ruraux. D’autres itinéraires pourraient être envisagés.

Les trains Corail doivent disparaître en 2016. Que deviendront les centres de maintenance de ces trains ? À Saintes, 400 emplois sont en jeu.

M. Jean-Marie Sermier. Le TGV Lyria traverse le département du Jura en direction de la Suisse : 74 % de cette ligne appartiennent à la SNCF et 36 % à son homologue suisse. Mais on constate que de plus en plus de trains passent soit par le Nord, via Belfort et Bâle, soit par le Sud, via Genève. Y a-t-il une volonté politique de maintenir le TGV Lyria ? M. Guillaume Pepy a indiqué qu’il n’y aurait pas de remise en cause avant 2015, mais que se passera-t-il ensuite ?

M. Philippe Duron. Je remercie le ministre chargé des transports de défendre le budget de l’AFITF. Il a indiqué que, bien entendu, les membres de la commission « mobilité 21 » informeront et travailleront en bonne intelligence avec les commissions parlementaires.

Le rapport de 2005 de l’École fédérale polytechnique de Lausanne, qui avait révélé l’état grave du réseau ferroviaire français, avait causé un choc. Son second rapport, qui vient d’être présenté, constate un ralentissement du vieillissement mais des problèmes encore non réglés, et formule des propositions. Il va falloir répondre à plusieurs problèmes, celui du dimensionnement du réseau structurant, celui des caténaires… Vous demandez à RFF de présenter un plan ; quelles en seront les priorités ?

M. Yannick Favennec. J’associe Thierry Benoît, député d’Ille-et-Vilaine, à cette question sur la sécurisation et la modernisation de la RN 12. Cet axe historique relie Paris à la Bretagne par Alençon, Mayenne, Ernée et Fougères. Il revêt pour le nord de la Mayenne un intérêt majeur en termes de développement économique, d’attractivité touristique et de désenclavement. À la demande des élus locaux et des acteurs économiques, les services de l’État ont étudié un phasage des travaux pour accélérer le contournement routier des agglomérations et le traitement des zones accidentogènes. Votre prédécesseur s’était engagé sur une mise à deux fois deux voies de ce tronçon avec, en priorité, le contournement de Saint-Denis-sur-Sarthon et d’Ernée. Je souhaiterais avoir confirmation des promesses faites par le Gouvernement Fillon, et disposer d’un calendrier pour le programme de modernisation des itinéraires routiers 2015-2020.

M. le Ministre. On s’est beaucoup engagé, et beaucoup en lieu et place du Gouvernement suivant !

M. Yannick Favennec. Je compte sur la continuité de l’État.

Mme Laurence Abeille. La commission « Mobilité 21 » mise en place pour reprendre l’ensemble de la « liste à la Prévert » du SNIT, soit 245 milliards d’euros, est une initiative intéressante : enfin, à la réflexion autour des moyens de transports, on adjoint une analyse des besoins de mobilité et d’aménagement des territoires. Il faut effectivement penser la mobilité et non simplement faire couler du béton. Comment relier cet impératif de mobilité aux grands projets du SNIT ? Quelles articulations avec le remaillage nécessaire de nos territoires ?

M. Michel Lesage. Le financement des pôles d’échanges multimodaux (PEM) autour des projets de LGV, en particulier autour de la liaison Paris/Brest, nécessite 20 à 30 millions d’euros. Cela représente 400 millions d’euros pour les onze communes et intercommunalités concernées. Les participations apparaissent faibles : 10 % pour les CPER, 10 % pour RFF, 10 % pour la SNCF, soit un reste à charge pour les collectivités de plus de 50 %. Par exemple, à Saint-Brieuc, c’est 55 % du financement qu’il faut apporter. Ce sont des montants colossaux pour des villes moyennes. Est-il possible de faire évoluer les plans de financement ?

Mme Sophie Errante. Concilier transport et développement durable permet de réduire les émissions de gaz à effet de serre, réaliser des économies d’énergie et améliorer la qualité de l’air. Pour accéder aux services publics et à leur lieu de travail, les habitants des zones périurbaines – comme les entreprises – doivent privilégier le véhicule personnel au détriment des transports collectifs, en dépit d’une politique volontariste des collectivités. Il est capital de développer les réseaux de transport durables pour resserrer les liens entre les mondes urbain et rural. Je me réjouis de la création d’une commission « Mobilité 21 ». Quelle place fera-t-elle au monde périurbain ?

M. Olivier Marleix. Je partage la surprise de Martial Saddier quant au retard de l’inscription des crédits de l’écotaxe au budget de l’AFITF. Elle était supposée effective au 1er juillet. Sera-t-on prêt, les 4 000 points de tarification équipés, les 800 000 boîtiers distribués ? Je rappelle que c’est aussi une ressource pour les collectivités territoriales.

Je m’interroge également sur l’A 154 qui doit relier Nonancourt et Allaines. Ce chaînon manquant du contournement du bassin parisien a fait l’objet d’une décision de mise en concession par le précédent Gouvernement. Vos services poursuivent la concertation. Je voudrais signifier combien ce projet est soutenu en Eure-et-Loir, où le conseil général s’est prononcé avec 25 voix sur 29. J’ai bien compris que vous devez arbitrer entre différents dossiers, mais pourriez-vous indiquer que vous ne formulez aucune opposition de principe à l’idée d’une concession ?

M. Gilles Savary. Le SNIT a consisté à tout promettre et à ne rien choisir. Je peux comprendre que la tâche du Gouvernement soit désormais délicate puisqu’il lui faut désormais trancher. Or, il est prévu une importante participation des collectivités territoriales dans le financement des infrastructures, et il se dégage l’impression que seul l’État n’aurait pas les moyens d’honorer ses engagements. Je suis vice-président d’une grande collectivité dont la contribution à la LGV Tours/Bordeaux constitue le premier poste d’endettement. Il n’est pas possible d’engager toutes les finances locales dans des compétences nationales. Les plans de financement devraient être posés sur la table assez vite pour arrêter ce jeu de poker menteur.

M. Jacques Krabal. Les lignes de fret ferroviaire comme Reims/Meaux/Paris font-elles partie des priorités ? Je m’associe également à la demande concernant la RN 2. Vous parliez de pistes cyclables : quels sont les projets que vous souhaitez mener à bien, allez-vous soutenir les entreprises qui mettraient des bicyclettes à disposition de leurs salariés ? En ce qui concerne les grosses infrastructures cyclables, l’axe Paris/Strasbourg en bordure de Marne est-il toujours d’actualité ?

M. Guillaume Chevrollier. Nous évoluons dans un environnement budgétaire extrêmement contraint. Dans ce contexte, quelles sont les possibilités de financement des équipements routiers en milieu rural – soit 80 % de notre territoire ? On parle beaucoup des grands projets d’envergure nationale, mais que reste-t-il pour les projets locaux pilotés par l’État ? En Mayenne, la RN 162 devrait être portée à deux fois deux voies : quels moyens pour ce dossier dont les études remontent à 1997 ?

M. Yann Capet. Monsieur le ministre, vous avez évoqué la politique maritime intégrée. On relève dans le programme 205 une première évolution avec l’adjonction des crédits de la pêche et de l’aquaculture au budget des affaires maritimes. S’agit-il d’une première étape vers une intégration plus systématique ?

En ce qui concerne la compétitivité portuaire, qui - cela a été dit - dépend largement de l’hinterland et du raccordement aux grands corridors, je souhaite attirer votre attention sur les ports proches des frontières de Schengen qui subissent les coûts de la sûreté et de la sécurité. Calais supporte ainsi une charge annuelle de 13 millions d’euros, ce qui s’avèrera vite rédhibitoire.

M. Jean-Jacques Cottel. Vous avez évoqué l’acte III de la décentralisation, incluant une clarification des compétences des collectivités territoriales et des autorités organisatrices des transports (AOT). Ne serait-ce pas un moment approprié pour revoir l’économie du « versement transport », généralisé à toutes les AOT ? On constate en effet des difficultés dans certains départements, pour ce qui concerne notamment le transport scolaire. Une telle révision rendrait plus aisé l’équilibrage des budgets régionaux et départementaux.

M. Philippe Noguès. Se déplacer aujourd’hui est certes un plaisir, mais souvent aussi une obligation. Je voudrais d’abord redire mon attachement au service public et ma dénonciation d’une logique purement comptable dans les transports, portant atteinte à l’égalité d’accès des citoyens à des transports efficaces et adaptés à leurs besoins de mobilité. À ce titre, la SNCF joue un rôle essentiel dans le désenclavement des territoires.

Je voudrais aussi évoquer la question, insuffisamment discutée, de la tarification sociale des transports. À ce titre, si de nombreuses politiques sociales existent au niveau régional pour les TER, on ne trouve aucun équivalent pour le TGV : or les TGV permettent de connecter tous les territoires aux grandes métropoles françaises et européennes. Tous nos concitoyens n’ont pas, aujourd’hui, les moyens de se payer un billet de TGV : ne pourrait-on envisager, à l’avenir, une politique de tarification sociale du TGV, à destination notamment des demandeurs d’emploi, des bénéficiaires du RSA ou des étudiants boursiers ?

M. Philippe Bies. Je souhaite vous interroger sur l’achèvement de la branche Est de la LGV Rhin-Rhône. Les moyens mobilisés par l’AFITF, tels que présentés dans le projet de performances annexé au projet de loi de finances pour 2013, ne font pas apparaître la prise en charge des études et procédures préalables à la réalisation de la deuxième phase de cette branche Est de la LGV. La réalisation de ces études est naturellement déterminante pour le bon déroulement du projet et il convient, à mon sens, de les engager le plus rapidement possible. Ceci apparaît d’autant plus justifié que les collectivités territoriales ont très fortement contribué à la mise en œuvre de la grande vitesse dans le grand Est, qu’il s’agisse de l’axe Rhin-Rhône ou de la LGV est-européenne. Pourriez-vous nous donner quelques éléments d’information sur l’état d’avancement de ce projet ?

M. le Ministre. Pour ce qui concerne le choix des projets dans le cadre du schéma national des infrastructures de transport, les critères retenus seront notamment la rentabilité, l’impact environnemental, la plus-value en termes d’aménagement du territoire, etc.

La structuration de la filière transport est effectivement un sujet important. Le projet Railenium dans le Valenciennois est en train de se concrétiser. Des difficultés de recrutement et de fidélisation des salariés ont été signalées par des constructeurs comme Alstom et Bombardier : il y a une véritable réflexion à mener sur le développement de l’emploi dans ces filières.

L’acte III de la décentralisation fera naturellement l’objet d’une concertation approfondie avec les parlementaires. Si la région doit être identifiée comme chef de file, les autres collectivités doivent voir leurs compétences réaffirmées et consolidées : c’est le cas des départements ou des agglomérations, pour les politiques de mobilité et la mise en place d’un réseau de transport durable. Les relations entre les différents échelons ne doivent pas s’établir sur un registre contraint, mais être nourries par un dialogue et un échange entre les différentes autorités organisatrices de transport.

En réponse à monsieur Martial Saddier, je confirme que le Gouvernement ne réduit pas les efforts d’investissement au profit du fonctionnement : le budget de l’AFITF augmente de 4 %, nous poursuivons les quatre LGV et un plan de modernisation du rail a été lancé, à hauteur de 2 milliards d’euros. Alors que nous étions jusqu’à présent sur une simple logique de ralentissement du vieillissement de l’infrastructure « rail », j’ai récemment demandé à RFF de lancer un plan vigoureux de modernisation et d’amélioration de la qualité du réseau.

Le contournement de Nîmes et de Montpellier, décidé par le précédent Gouvernement, sera bien réalisé et je serais heureux que puisse cesser cette petite musique, entendue ici ou là, selon laquelle le présent Gouvernement arrêterait ou ajournerait tous les projets : ce qui pourra être engagé le sera, dans la mesure toutefois des impasses budgétaires dont nous avons hérité et auxquelles nous sommes désormais confrontés.

S’agissant de la participation de toutes les sensibilités aux travaux du SNIT, l’opposition y sera représentée par le sénateur Louis Nègre (UMP) et votre collègue Bertrand Pancher (UDI), dont je ne sache pas qu’il appartienne à la majorité.

S’agissant de la taxe poids lourds, l’ancienne majorité a eu la délicatesse de publier un décret le 6 mai dernier : c’est dire la confiance placée en nous quant à la pleine application de cette écotaxe… Nous sommes actuellement en phase de concertation et nous la mettrons ensuite en œuvre. Mais face à un dispositif d’une telle complexité, il n’est pas sérieux de mettre en doute notre intention d’aboutir.

En ce qui concerne le Mont-Blanc, je confirme qu’il n’y aura pas de percement d’un second tunnel routier sous les Alpes. Pour la liaison Lyon-Turin, un sommet doit avoir lieu en décembre prochain, à l’ordre du jour duquel figure la date de lancement des travaux. Mais comme le projet intervient dans le cadre d’un traité, il convient que les calendriers et les procédures de mobilisation des moyens — notamment, des financements européens — puissent être coordonnés.

À Orly, que les pontons en construction soient ou non appelés à accueillir des A 380, il n’y a aucune raison de geler les projets en cours.

S’agissant des contrôles d’identité pour l’accès à bord d’un avion, tout dépend du point de savoir si l’on se situe dans ou hors espace Schengen : au sein de cet espace, il n’y a pas nécessairement de contrôles. Par ailleurs, se pose aussi la question de la présence ou non de bagages suivant leur propriétaire. Le contrôle dépend donc éminemment des situations au regard de ces deux critères.

Monsieur Stéphane Demilly, je ne souhaite pas que le canal Seine-Nord Europe devienne un nouveau canal de Panama, comme il en existe le risque. Sans perdre de temps, nous sommes aujourd’hui dans une phase d’expertise et en train d’optimiser les financements extérieurs. Toute agitation non nécessaire ne peut qu’être de nature à fragiliser le projet.

Le précédent Gouvernement n’a mobilisé que 6 % de financements européens : cinq mois après notre arrivée aux responsabilités, qu’on ne vienne donc pas nous reprocher de renoncer à un projet dans lequel l’ancienne majorité n’avait pas mis toutes ses forces ! Lorsque le ministre Jean-Louis Borloo a signé, en 2007, la candidature de la France à l’appel de fonds européens, il a délibérément privilégié d’autres projets. Sans sombrer dans la polémique, j’estime que les reproches qui nous sont adressés sont injustes.

M. Martial Saddier. Nous posons des questions !

M. le Ministre. J’y réponds.

Pour que le projet aboutisse, il faut qu’il soit crédible et soutenable. Le candidat François Hollande avait affirmé, dans le contexte particulier propre aux campagnes électorales, que 97 % des financements étaient assurés : ce n’était malheureusement pas exact. Le dialogue compétitif en cours ne nous met pas en situation de conclure : l’entreprise Bouygues, qui ne passe pas pour un soutien inconditionnel du Gouvernement, l’affirme elle-même.

Chacun doit donc savoir raison garder et une polémique infondée ne peut que contribuer à « torpiller » le projet. J’ai reçu les représentants de la Commission européenne : ils m’ont fait part de leurs inquiétudes quant à la crédibilité du projet. Notre volonté de faire du fluvial un moyen de transport important est intacte, mais il faut envisager son développement dans la responsabilité : je ne serai pas le ministre qui éludera ses responsabilités, pas non plus celui qui assumera les erreurs des autres.

En 2011, on ne pouvait pas affirmer que 97 % de financements étaient mobilisés ou sous-estimer la crise et la difficulté des acteurs privés à lever 2 milliards d’euros sur les marchés financiers. Aucun homme politique responsable, ni vous, ni moi, ne peut aujourd’hui prétendre envoyer cette facture à l’État. Je vous enverrai donc le courrier de monsieur Borloo…

M. Patrice Carvalho. Ce qu’on veut, c’est une volonté politique !

M. le Ministre. Elle existe.

M. Stéphane Demilly. Mais 300 millions d’euros ont déjà été dépensés.

M. le Ministre. L’impasse est de 2 milliards d’euros qui manquent !

Les collectivités auront à se mobiliser en même temps que l’État, il faudra relancer la mobilisation des financements extérieurs et réexaminer la pertinence du montage juridique autour d’un partenariat public-privé (PPP) compte tenu de la situation : c’est la seule manière d’apporter des solutions.

M. le Président Jean-Paul Chanteguet. Je remercie le ministre de nous apporter ces précisions et ces informations chiffrées.

M. le Ministre. Merci de votre soutien et de votre mobilisation cat il ne faut laisser subsister aucun doute auprès de nos voisins et des instances européennes.

Effectivement, monsieur Patrice Carvalho, les crédits destinés à RFF restent constants, il est important de maintenir la capacité de l’AFITF, le plan Rail et la réforme ferroviaire s’imprègnent de ce constat tout à fait partagé.

Je réponds à monsieur Olivier Falorni s’agissant du projet de liaison autoroutière A 831-A 10 : l’appel public à la concurrence a été lancé en février 2012. La procédure suit donc son cours. Le calendrier doit faire l’objet d’un examen attentif : il fait donc partie des projets qui avancent et il faut l’annoncer aux populations.

Les parcs naturels marins doivent s’intégrer dans une réflexion à développer sur le rythme de création, l’utilité de chacun des projets, et les modalités, notamment liées au financement de l’agence des aires marines protégées, de mise en œuvre, dans une perspective interministérielle qui appellera une réponse commune des ministres concernés.

Monsieur François-Michel Lambert, ne doutez-pas de la volonté du Gouvernement de favoriser le report modal. Force est de constater que cette volonté, lorsqu’elle s’est exprimée dans le Grenelle de l’environnement et dans le plan pour le fret, n’a débouché que sur une dynamique négative puisqu’en matière de fret notamment, la part du non routier continue de chuter. Je souhaite que cette tendance s’inverse.

S’agissant des trains d’équilibre du territoire (TET), nous allons annoncer en effet prochainement une modernisation du matériel roulant, qui répondra aux attentes respectives de l’industrie et de nos concitoyens.

La dette de RFF a motivé plusieurs interrogations, dont certaines n’étaient pas les plus légitimes, et auxquelles je me réserve de répondre lorsque le Gouvernement aura annoncé sa réforme du ferroviaire.

Monsieur Jean-Christophe Fromantin, rapporteur pour avis des crédits demandés au titre des affaires maritimes, m’a interrogé sur le lien entre développement portuaire et liaison avec l’hinterland, et j’ai déjà répondu notamment en citant l’exemple du Havre. La question de la métropolisation des ports sera traitée dans le cadre de la préparation de l’acte III de la décentralisation : j’estime que le Parlement, tout autant que les collectivités locales concernées, devront prendre une part active à ce débat. L’enseignement maritime mérite d’évoluer : si les quatre sites actuels doivent être préservés voire spécialisés, des états généraux et un débat public doivent permettre de redéfinir les missions de la formation maritime et les réponses à apporter aux défis du secteur.

Monsieur Jacques Alain Bénisti, rapporteur pour avis des crédits des transports aériens, a souhaité mettre l’accent dans ses questions sur les nuisances sonores. Il a appelé plus particulièrement mon attention sur les moyens à la disposition du Fonds de compensation des nuisances aéroportuaires (FCNA). Ceux-ci restent garantis, mais si, à enveloppe constante, les collectivités locales concernées souhaitent modifier la clé de répartition actuelle, pourquoi pas lancer un débat ? Si c’est une possibilité d’aboutir à un nouveau partage, faisons-le.

M. Jacques Alain Bénisti, rapporteur pour avis. C’est une question de justice.

M. le Ministre. Peut-être.

Le contrôle des trajectoires bénéficie de moyens d’information via la DGAC, et grâce au logiciel Vitrail, qui sont à votre disposition. En revanche, la création d’une Xème commission, telle que vous la suggérez, serait-elle de nature à faire avancer ce dossier ? Je reste là-aussi sceptique. Cette question, comme celle de la domanialité portuaire et aéroportuaire, doit faire l’objet d’une concertation.

Monsieur Rémi Pauvros m’a interrogé sur les TET : ils doivent constituer une priorité, nous y reviendrons. S’agissant des relations RFF-SNCF, il faut une meilleure organisation, cela me paraît évident. L’année 2013 verra le financement de l’AFITF considérablement amélioré, et je le souhaite le plus radieux possible.

Le SNIT a évalué tous les projets qu’il a recensé à 245 milliards d’euros : il faut savoir raison garder ! Même dans l’hypothèse, hautement improbable, qui verrait l’État capable d’assumer pleinement sa part de leur financement, les collectivités locales ne pourraient lui emboîter le pas, comme l’a relevé justement Gilles Savary. Leur part de cofinancement s’élèverait dans cette hypothèse à 90 milliards d’euros : l’insoutenabilité de ce schéma saute aux yeux ! Il faut s’interroger et redéfinir les priorités ainsi que les chantiers prioritaires. Aucune étude n’a été lancée : la commission que j’ai mise en place va s’y atteler et doit pouvoir travailler sereinement.

Le dossier de la RN 2 a été traité par un rapport du conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD) et des aménagements ont été intégrés dans le programme de modernisation des itinéraires routiers (PDMI). Il demeure que cette route reste très accidentogène, et que la sécurité doit rester un critère de premier rang des investissements routiers.

Le canal Seine-Nord-Europe implique que s’engagent de façon concertée et cohérente l’État, Voies navigables de France et l’ensemble des collectivités locales concernées. Difficile d’improviser devant vous une clé de répartition entre ces trois catégories d’acteurs ! Une convention existe.

Madame Sophie Rohfristch, je ne peux répondre en lieu et place des dirigeants de Vinci, mais je constate que cette société n’a pas répondu à la deuxième relance de la part du ministère des transports, et qu’une troisième aurait été illégale. Quant à la deuxième offre, les services auraient pu l’étudier si elle avait été jugée recevable, ce qui n’a pas été le cas, pas plus d’ailleurs que pour la troisième. Je constate donc qu’il n’y a pas de réponse privée à la proposition de partenariat public-privé s’agissant du contournement Ouest de Strasbourg. J’ai eu, par presse interposée, un échange à ce sujet avec le président de la région, qui m’imputait la responsabilité de cette situation dont j’ai hérité. Or la seule chose qui à mon sens puisse être reprochée au Gouvernement actuel – alors que le précédent a orchestré cette procédure de A à Z - est d’avoir repoussé l’échéance prévue de façon à laisser à Vinci la possibilité de répondre. Le débat politique implique le respect et la reconnaissance de la responsabilité de chacun.

Madame Catherine Quéré, des études concernant l’électrification du réseau en étoile autour de Saintes sont en cours, parce que Dominique Bussereau, président du conseil général de Charente maritime, a donné un accord sur un nouveau tracé, qui ferait l’objet d’un cofinancement entre les deux conseils généraux concernés, et auquel la région s’associerait.

Monsieur David Douillet, votre suggestion de rapprocher ADP et Air France est une opération qui paraît juridiquement impossible. Comme vous l’avez rappelé, Air France détient une dette de 6 milliards d’euros, et son déficit d’exploitation pour l’année 2012 avoisine le milliard. Le modèle économique du low cost pose effectivement problème : il faudra regarder, dans le cadre de discussions tarifaires, s’il n’existe pas des situations où certaines compagnies pratiquent un dumping social déguisé. La stratégie de la compagnie Air France reste de renouer avec la compétitivité et un niveau de service, dans un contexte compliqué, mais dans lequel le dialogue social très poussé permet d’envisager une issue favorable, à horizon 2014, notamment grâce à une nouvelle organisation régionale et un défi relevé par les partenaires sociaux.

Monsieur Philippe Duron, le nouveau rapport de l’École polytechnique de Lausanne démontre en effet qu’il reste beaucoup à faire concernant notre réseau ferroviaire. C’est pour cette raison qu’avant de s’occuper du fret ou du voyageur, il faut que nous nous assurions un haut niveau de qualité du réseau, en matière de signalisation et d’organisation, en lien avec la recherche et le développement.

Je réponds à monsieur Yannick Favennec sur la RN 12. Compte tenu de mon passé de Mayennais, je ne pouvais rester insensible à la situation d’Ernée et de Saint-Denis-sur-Sarthon : il existe un problème relatif au tracé, qui impacte la biodiversité de zones humides, que je vais examiner. J’espère seulement que mon prédécesseur n’a pas pris d’engagement relatif au PDMI 2015-2020… Le maire d’Alençon m’a par ailleurs interpellé sur ce dossier, sur lequel j’ai également été interrogé au Sénat.

Au-delà des grands projets d’infrastructures, j’ai attiré l’attention des services du ministère sur les « petits » ouvrages de proximité qui peuvent être réalisés rapidement – j’ai vu le cas à Marseille récemment – pour relier des ronds-points ou des tronçons routiers qui pour l’instant ne mènent nulle part, notamment parce qu’ils ont été construits avec des fins de crédit, sans garantir leur programmation jusqu’à leur jonction avec les réseaux existants. Cela insupporte, à raison, nos concitoyens.

Pour répondre à monsieur Olivier Marleix : nous ne décalerons pas, nous, l’écotaxe poids-lourds, dont l’application était prévue pour 2012 : elle entrera en vigueur en juillet 2013, et drainera vers les collectivités locales environ 200 millions d’euros de financement.

Je suis d’accord avec monsieur Michel Lesage : il faut regarder la question du financement des pôles d’échange multimodaux (PEM). La négociation aura lieu dans le cadre de la prochaine génération des contrats de projets État-régions.

Je partage l’intérêt de monsieur Jacques Krabal pour le développement du vélo : le ministère a mis au point un plan vélo, et un délégué interministériel au vélo a été nommé. Une concertation avec le ministère de l’intérieur doit permettre d’améliorer l’insertion de ce mode de déplacement doux dans notre offre de transport, ainsi que l’évolution de la réglementation que son développement nécessite.

Monsieur Jean-Jacques Cottel m’a interrogé sur l’évolution du « versement transport » : il fait l’objet d’une mission du CGEDD, et sera traité dans le volet accompagnement des financements dans le cadre de la nouvelle phase de la décentralisation.

Je partage la volonté de monsieur Yann Capet concernant la sécurité portuaire : une initiative parlementaire avait vu le jour au Sénat sur ce sujet, me semble-t-il, et elle pourrait utilement être reprise par les députés.

S’agissant des concessions, je n’ai aucune approche idéologique : je me soucie d’abord de l’efficacité et de la légalité de l’action de l’État, dans le souci de l’inscrire dans le temps, et en évitant les solutions dangereuses pour l’avenir.

La question courte de Laurence Abeille appelle une réponse brève : le ministère des transports n’est plus un ministère de grandes infrastructures ; aujourd’hui, il est devenu le ministère des mobilités, ce qui implique un dialogue avec tous les acteurs concernés.

Une dernière précision : le dernier appel à projets concernant TCSP peut être financé par redéploiement budgétaire, et surtout, il peut ne pas concerner uniquement que des projets en site propre. Il doit porter sur la réalité des mobilités aujourd’hui.

Monsieur le président Jean-Paul Chanteguet. Je remercie le ministre chargé des transports d’avoir répondu aux interrogations de tous nos collègues.

II.— EXAMEN DES CRÉDITS

La commission a examiné pour avis, au cours de sa réunion du 24 octobre 2012, les crédits de la mission « Écologie, développement et aménagement durables » relatifs aux transports, sur les rapports pour avis de MM. Rémi Pauvros, Jacques Alain Bénisti et Jean-Christophe Fromantin.

M. Jean-Christophe Fromantin, rapporteur pour avis pour les affaires maritimes. L’analyse de ce budget ne fait apparaître ni inflexion ni modification.

En ce qui concerne le programme 205, la première action relative à la sécurité et à la sûreté maritimes renvoie à une préoccupation largement évoquée par les directeurs de port : alors que nous connaissons une situation délicate en termes de compétitivité, le surcroît de précaution et de réglementation que s’assigne la France finit par grever notre compétitivité. L’ambition d’exemplarité est une bonne chose, mais son décalage avec la moyenne des ports européens les favorise à notre détriment. Je rappelle qu’Anvers attire la moitié du trafic de conteneurs destiné à la France. Il y a donc des parts de marché à conquérir.

L’action n° 02 relative aux gens de mer, reçoit une dotation quasi-équivalente à celle de l’année dernière. Je suivrai attentivement les choix ministériels sur la formation. La France compte 300 000 emplois dans les filières maritimes : conforter et renforcer cette position requiert des investissements forts dans le domaine de l’enseignement. Ce budget ne contient pas de ligne directrice sur ce point. Or développer le secteur nécessitera de prendre des décisions. J’ai appris la création, à Marseille, d’un cursus sur la sûreté maritime, en partenariat avec Euromed. Je salue l’initiative qui comble une lacune, car aucun programme ne permettait jusqu’à présent de former en France les « aiguilleurs de la mer ». Mais c’est une initiative locale. Je crois que l’État doit instiller une cohérence nationale entre les différents sites de l’enseignement supérieur maritime et leurs activités.

La flotte de commerce, qui bénéficie de l’action n° 03, porte également un enjeu stratégique de compétitivité. Il faut soutenir le pavillon français. À cet égard, tous auront noté la récente implication du fonds stratégique d’investissement dans la restructuration de l’armateur CMA-CGM basé à Marseille. Il reste beaucoup à faire et beaucoup d’orientations à prendre ; j’espère que le ministre pourra nous en dire plus dans les mois qui viennent.

Les actions nos 04 et 05 sur l’action interministérielle de la mer et sur le soutien au programme représentent des sommes de faible ampleur, de sorte que les pourcentages d’évolution ne sont guère significatifs. Nous sommes dans la continuité.

En ce qui concerne le programme 203, la part réservée au maritime se limite à 58 millions d’euros. Les treize ports qui relèvent de l’État se partagent cette dotation, qui demeure stable depuis 2010. Je suis tout de même frappé de constater que les projets stratégiques français sont dressés pour cinq ans, quand les autorités de Rotterdam s’engagent sur un horizon de trente ans. Une vision européenne – voire plus – sur le rapport de nos ports au commerce international et à la mondialisation ne peut se limiter à cinq ans : c’est un enjeu bien plus fort, qui exige une approche bien plus large. Est-ce que nos ports ont une vocation régionale, nationale, spécialisée ? Nous avons la chance de disposer d’infrastructures en Méditerranée, où le potentiel lié à la croissance asiatique est évident, et sur l’Atlantique, où Le Havre et Dunkerque souffrent de la concurrence d’Anvers et Rotterdam. Il faut construire une vision globale, et le rôle de l’Assemblée nationale est d’interpeller le Gouvernement en ce sens.

Ce budget s’inscrit dans la continuité du passé récent. La réforme portuaire de 2008 a été digérée ; il est temps de former un nouveau projet pour notre compétitivité maritime. Pour ma part, si je déplore l’absence de signes forts dans ce projet de loi de finances, je ne reprocherai pas à l’exécutif de prendre un peu de temps pour arrêter des décisions si lourdes. Je m’abstiendrai donc.

M. Jacques Alain Bénisti, Rapporteur pour avis des crédits de l’aviation civile : Quelques rapides commentaires sur les crédits de l’aviation civile pour 2013 ainsi que sur les principales questions, notamment environnementales, liées au transport aérien…

Les crédits sont répartis au sein du programme 203 de la mission ministérielle, pour la gestion des aéroports qui demeurent de la compétence de l’État et au sein des programmes 612, 613 et 614 du budget annexe « contrôle et exploitation aériens ». Ils sont marqués par la continuité. Chacun connaît le contexte de maîtrise de la dépense publique qui s’applique au PLF pour 2013.

Les crédits du programme 203 assurent essentiellement des investissements dans des aéroports d’outre-mer et les études ainsi que les acquisitions foncières du futur aéroport de Notre-Dame-des-Landes. Sont également prévues une aide à la réhabilitation de l’aéroport de Lorient et l’extension de plateformes appartenant à l’État à Lyon-Saint-Exupéry.

S’agissant du budget annexe, les crédits de paiement sont stables, compte tenu de l’inflation, à hauteur de 1,868 milliard d’euros. Pour les opérations en capital, ils s’élèveront à 418,4 millions pour 2013. Le Gouvernement diminue les effectifs d’une centaine d’emplois administratifs et de gestion afin de stabiliser les dépenses de personnel. L’objectif est de maintenir les postes techniques indispensables à la sécurité et au développement du contrôle du transport aérien.

Cette priorité accordée aux postes techniques se retrouve dans chaque programme. Commençons par le programme 612 « navigation aérienne », qui se concentre sur le volet technologique de la mise en place du « Ciel unique européen ». La DSNA doit non seulement maintenir en conditions opérationnelles ses systèmes et ses infrastructures mais également les moderniser et les mettre, avant 2015, aux standards européens. À défaut, il y a un risque réel de vétusté des systèmes et font courir des risques d’incidents fragilisant la sécurité. En contrepartie, le ministère doit rechercher des économies en différant des opérations de génie civil. Pour mémoire, il exploite en métropole et outre-mer un vaste parc d’infrastructures composé de cinq centres de contrôle, de deux centres d’exploitation de systèmes, de plus de 80 tours de contrôle, de quelques bâtiments administratifs et de nombreuses stations de radiocommunication, de radionavigation ou de surveillance isolées.

Le programme 613 « Soutien aux prestations de l’aviation civile » est caractérisé en premier lieu par la bonne maîtrise du budget de l’école nationale de l’aviation civile, qui réussit année après année à se financer grâce à des recettes commerciales. En second lieu, le ministère poursuit les efforts de modernisation de ses systèmes de gestion financière.

Le programme 614 « Transports aériens, surveillance et certification » poursuit essentiellement la politique de renforcement de la sûreté, avec la création d’un laboratoire de test et de détection des explosifs et le développement d’une nouvelle application de gestion des titres d’accès dans les zones réservées des aéroports.

Comme je l’ai indiqué au début de mon intervention, les crédits du budget annexe n’appellent pas de commentaire particulier. Ils obéissent à une logique de prestations de services financés par des taxes acquittées par les compagnies aériennes et par les aéroports et ressemblent à ce titre à ceux présentés les années précédentes. Les principaux problèmes, que j’évoque dans mon rapport pour avis, sont largement « hors budget » et concernent la politique aéroportuaire et les nuisances aériennes, principalement celles liées au bruit.

Les élus comme les habitants des communes riveraines attendaient beaucoup du Grenelle de l’environnement. Le bilan n’est certes pas négatif, avec les arrêtés d’aide à l’insonorisation des habitations, les restrictions de vols de nuit à Orly, Marseille et Toulouse, mais il n’y a pas eu de remise à plat d’une politique déjà ancienne. L’élément positif est l’amplification du rôle de l’Autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires, l’ACNUSA, qui accomplit un solide travail en relevant les incohérences de mesures et d’évaluation sur le bruit sur les plateformes, ce qui oblige l’administration à revoir ses procédures. Ses compétences viennent de s’étendre à la mesure des substances polluantes, et il faut espérer que malgré la stricte stabilisation de ses crédits, l’ACNUSA parvienne à recruter un ingénieur chargé de ces mesures.

La politique de lutte contre le bruit comprend deux grands problèmes, avec en premier lieu les vols de nuit : trois aéroports, Roissy, Marseille et Orly enregistrent annuellement plus de 10 000 mouvements nocturnes ; d’autres comme Lyon et Nice, s’approchent de ce seuil. L’ACNUSA a mis en place en 2011 un groupe de travail à la demande des élus et des associations de riverains. Outre le fait, quelque peu étrange, que ces vols ne sont pas comptabilisés de la même manière selon les plateformes, l’ACNUSA, malgré un travail considérable, n’a pu proposer au printemps 2012 les mesures pour améliorer la situation, faute de consensus au sein du groupe de travail. La situation reste donc en l’état, avec un problème croissant puisque le nombre de vols de nuit augmente.

En second lieu, les trajectoires et les amendes pour non respect de trajectoires : depuis 2008, une série de mesures ont été prises pour relever les plafonds d’altitude et modifier les trajectoires d’approche pour minorer les nuisances au-dessus des zones très urbanisées. L’ACNUSA comme les associations de riverains ont constaté de nombreux manquements, mais leur résultat n’est pas le même que celui de la direction générale de l’aviation civile. Qu’il y ait divergence entre administration et riverains n’est pas une surprise, mais les aéroports, la DGAC et l’ACNUSA quantifient le phénomène différemment. Je souligne ce point dans mon rapport pour avis en espérant que le gouvernement y mette bon ordre.

Non seulement nous constatons des manquements aux trajectoires, mais les tours de contrôle accordent de plus en plus de dérogations à ces trajectoires, à la demande des pilotes ou des compagnies. Ces dérogations nous semblent plus graves que les manquements car ainsi, c’est l’administration qui affaiblit le dispositif de protection contre les nuisances. C’est pour cette raison que de nombreux élus militent en faveur d’un relèvement des amendes pour qu’elles soient dissuasives.

J’en termine avec le bruit pour noter que les plans de gêne sonore et les plans d’exposition au bruit débouchent globalement sur de bons résultats, avec un chiffre d’insonorisation de logements en nette augmentation. En revanche, les deux fonds de compensation des nuisances sonores sur Roissy et Orly doivent sans nul doute être réformés. Je n’y reviens pas, ayant posé une question sur ce sujet à M. le ministre. En revanche, je demeure surpris par l’absence de planification à long terme de notre politique aéroportuaire qui prenne en compte globalement les perspectives de trafic, les capacités pour y faire face, la desserte par transports publics des plateformes depuis les villes, l’environnement, la coordination avec les autres modes de transports pour ne plus recourir à l’avion, le cas échéant. Autour d’Orly, la situation devient de plus en plus difficile pour 5 millions de personnes. Aussi je souhaite que le Gouvernement mette à l’étude une solution consistant à déplacer les pistes à plusieurs dizaines de kilomètres et à les relier à l’aérogare par un système de navettes automatiques.

C’est en raison des incohérences sur la politique aéroportuaire que je donne en conclusion un avis défavorable sur les crédits de l’aviation civile.

M. Rémi Pauvros, rapporteur pour avis sur les transports terrestres. Dans le projet de loi de finances, le budget des transports terrestres est maintenu par rapport à 2012 et exprime la volonté d’honorer les engagements pris durant la précédente législature, d’entretenir et de mettre à niveau le réseau, et de participer à la transition énergétique et environnementale de notre pays.

Le budget proposé pour les transports terrestres donne la priorité à l’entretien et à la rénovation du réseau existant, plutôt qu’à l’engagement dans de nouveaux projets d’infrastructures, compte tenu de l’état sérieux dans lequel se trouve le réseau.

Ce budget est certes soumis à l’effort national, mais il est important de souligner que les crédits ferroviaires sont préservés et stabilisés, à hauteur de 2,536 milliards d’euros), et que la dotation pour l’entretien routier progresse de 8 %. 80 % des crédits du programme sont consacrés à l’action n° 10 « Infrastructures de transports collectifs et ferroviaires ».

Si les crédits ferroviaires sont stables, l’enveloppe ne permet ni de porter l’avenir de RFF, ni d’engager de nouveaux chantiers.

Les crédits de paiement sont préservés grâce à la possibilité de réduire cette année de 300 millions d’euros la subvention d’équilibre de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF), du fait de l’entrée en vigueur de l’écotaxe poids lourds, dont on mesure bien qu’elle ne sera pas facile à mettre en place, mais dont les recettes sont estimées à plus de 400 millions d’euros pour le second semestre 2013 et à plus de 800 millions d’euros en 2014. Les moyens de l’AFITF augmenteront ainsi de 4 %.

Le choix budgétaire de stabilisation globale des crédits a pour corollaire la mise en route d’un chantier de grande envergure : celui du schéma national des infrastructures de transport revu et corrigé par la commission « mobilité 21 ». Ce chantier est celui d’une véritable redéfinition des priorités qui seront les nôtres durant les années à venir. Le rapport de la commission est attendu pour le printemps 2013.

En tant que rapporteur pour avis, je souhaite attirer l’attention de la commission sur deux dispositifs qui concernent soit l’aménagement du territoire, soit le développement durable, qui sont des priorités du gouvernement.

Le premier dispositif est le compte d’affectation spéciale « Services nationaux de transport conventionné de voyageurs », avec le relèvement du plafond de la taxe sur le résultat des entreprises ferroviaires, taxe sur les bénéfices de la SNCF. Ce relèvement permet d’augmenter de 45 millions les moyens consacrés par l’État à la pérennisation des TET sans peser davantage sur les finances de l’État. Il a été opéré par la première partie du projet de loi de finances, approuvée hier en séance publique.

Le second dispositif est le compte d’affectation spéciale « Aides à l’acquisition de véhicules propres » dont les crédits bénéficient d’une hausse de 20,8 % par rapport à 2012. Ses recettes proviennent de la taxe additionnelle à la taxe sur les certificats d’immatriculation. Le produit de cette taxe va passer de 234 millions d’euros en 2012 à 403,6 millions en 2013 grâce à la prorogation et au durcissement du malus automobile opérés par la première partie du projet de loi de finances. Il finance deux aides : l’aide à l’acquisition des véhicules propres, pour 402 millions d’euros, et l’aide au retrait de véhicules polluants, pour 1,6 million d’euros.

Dans le contexte de ce budget de respect des engagements pris, de mise à niveau du réseau, et tenant compte des préoccupations liées au développement durable, je propose d’approuver ces crédits et d’ouvrir, à cette occasion, plusieurs pistes de réflexion.

Au cours de l’année 2013 seront posées un certain nombre de questions essentielles sur l’avenir du transport dans sa globalité et de la mobilité, avec d’abord la question de l’avenir de l’AFITF, qui sera lié au premier bilan de l’application de l’écotaxe poids lourds. D’autre part, 2013 sera une année qui permettra d’y voir plus clair sur les financements européens pour les grands projets d’infrastructures sur notre territoire que sont le canal Seine Nord, le Grand Paris ou les LGV.

S’agissant de la participation des sociétés autoroutières à l’effort général, j’indique que j’ai auditionné des représentants de ces sociétés et constaté que leurs relations avec l’État sont extrêmement tendues. L’augmentation de la TAT de 198 millions d’euros ne les facilité pas, mais la situation financière des concessionnaires est particulièrement intéressante. Ces sociétés ont généré en 2011 un chiffre d’affaires de 8,45 milliards d’euros, avec un résultat net positif de 1,94 milliard et des investissements de 1,75 milliard. Fin 2011, leur endettement était de 31,1 milliards d’euros. Il faudra à étudier la proposition des concessionnaires, canaliser dans les prochaines années 6 milliards d’euros de leurs investissements vers les « petits bouts », compte tenu du retour que l’État pourra en tirer ensuite en termes fiscaux. Les problèmes juridiques liés à la demande d’allongement des concessions doivent être étudiés avec soin, mais cette proposition mérite d’être travaillée.

Comment envisager la participation de l’État au programme de rénovation des trains Intercités ? On est à l’heure du rendez-vous. Soit on considère qu’il y a une quasi-obligation de participer parce qu’on ne peut pas faire autrement, soit on considère qu’il y a là une offre commerciale nouvelle à développer, car les TET ont une place à occuper entre les TGV et les TER. C’est la possibilité d’offrir à nos concitoyens un service extrêmement important, notamment en termes d’équilibre des territoires.

2013 sera aussi le moment de constater les résultats de la politique en faveur des véhicules « propres », de relancer les travaux sur la pérennité du fret - la réflexion de notre Assemblée sur ce sujet va être relancée par la table ronde organisée par notre commission le 14 novembre prochain -, de poursuivre les travaux de prospective, sur les outils comme VNF et sur un éventuel rapprochement entre RFF et la SNCF, et enfin de travailler un peu plus - les crédits consacrés à la recherche en la matière sont très faibles – sur ce qu’on peut appeler les « trains HQE », c’est-à-dire sur la manière de rendre le système ferroviaire plus respectueux de l’environnement.

Le budget des transports est important, il tient compte des engagements pris précédemment et essaye d’y répondre, notamment pour permettre à RFF de maintenir le rythme de rénovation de 1 000 kilomètres de voies par an. J’invite donc la commission à se prononcer en faveur de ces crédits.

À l’issue de la discussion, suivant l’avis de M. Rémi Pauvros, rapporteur pour avis, et contrairement à l’avis de M. Jacques Alain Bénisti, rapporteur pour avis, M. Jean-Christophe Fromantin, rapporteur pour avis sur les affaires maritimes s’abstenant, la commission a émis un avis favorable à l’adoption des crédits des programmes 203, 205, 207 et 217 de la mission « Écologie, développement et aménagement durables » pour 2013.

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

Mercredi 5 septembre

– M. François Bacchetta, PDG d’easyJet France, M. Reginald Otten, responsable des affaires publiques et Mme Audrey Herblin, consultante.

– M. Victor Haïm, président de l’ACNUSA, Mme Ghislaine Esquiague, secrétaire générale et M. Éric Girard-Reydet, secrétaire général depuis le 15 septembre 2012.

Mardi 11 septembre

– M. Jean-Pierre Blazy, député (SRC, Val d’Oise) et maire de Gonesse, président de l’association Villes et Aéroports.

– M. Pierre Graff, président-directeur général d’Aéroports de Paris et Mme Stéphanie Arnoux, chargée des relations avec le Parlement.

– M. Bertrand Lebel, directeur adjoint de l’organisation et du développement durable d’Air France et Mme Patricia Manent, chargée des relations avec le Parlement.

Mercredi 26 septembre

– M. Yves Deshayes, président du Syndicat national des pilotes de ligne (SNPL), M. Romain Dinh, chargé des affaires internationales et Mme Sabine Johnson, chargée des affaires juridiques.

– M. André Viau, président de la commission sur l’avenir d’Orly.

– M. René-Paul Savary, sénateur (UMP), président du conseil général de la Marne, sur la plateforme de Vatry.

Mercredi 10 octobre

– M. Francis Massé, secrétaire général de la DGAC, Mme Michelle Desjardins, adjointe au secrétaire général et M. Pascal Luciani, sous-directeur en charge du développement durable.

– M. Gérard Bouthier et M. Michel Van Hoegarden, président et trésorier de l’association AVEVY, Mme Évelyne Gourner, membre de l’association Elan-Savigny Environnement et M. Remy Jourdan, membre de l’Association des élus riverains d’Orly.

© Assemblée nationale

1 () Organisation de l’Aviation Civile Internationale