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N
° 1428

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 10 octobre 2013.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2014 (n° 1395),

PAR M. Christian ECKERT,

Rapporteur Général

Député

——

ANNEXE N° 11

DÉFENSE

BUDGET OPÉRATIONNEL DE LA DÉFENSE

Rapporteur spécial : M. Jean Launay

Député

____

SOMMAIRE

___

Pages

INTRODUCTION 7

I. DES CRÉDITS STABLES POUR LA DÉFENSE EN 2014 QUI S’INSÈRENT DANS UNE PROGRAMMATION PLURIANNUELLE ALLIANT RENFORCEMENT DES SECTEURS STRATÉGIQUES ET MAÎTRISE DE LA DÉPENSE PUBLIQUE 9

A. UN BUDGET 2014 QUI S’INSCRIT PLEINEMENT DANS LES ORIENTATIONS DU CADRE DÉFINI PAR LA LPM 9

1. Les enseignements de la précédente LPM 10

2. La stabilisation des crédits pour la période 2014-2016 12

3. Des ressources néanmoins amputées de l’inflation 13

B. LE PROVISIONNEMENT DES RECETTES EXCEPTIONNELLES ET LES VENTES D’ACTIFS DES ENTREPRISES DE DÉFENSE : DES MESURES QUI RESTENT À PRÉCISER 14

1. Les recettes attendues sur la période 2014-2019 14

2. La réduction des incertitudes qui pèsent sur la perception des recettes exceptionnelles 15

3. Le programme « excellence des industries technologiques de défense » 16

C. VERS UN NOUVEAU MODÈLE D’ARMÉE 17

1. Quatre principes au cœur du nouveau modèle d’armée définie par la LPM 17

2. Des équipements à la hauteur du nouveau contrat opérationnel des armées 19

a. Format par armées et en interarmées 20

b. Impact sur les grands programmes et effort au profit de l’équipement des forces 22

II. VERS DE NOUVELLES MESURES POUR LA MAÎTRISE DE LA MASSE SALARIALE 25

A. UNE ÉVOLUTION MARQUÉE DE LA MASSE SALARIALE SUR LA PÉRIODE 2009-2014 25

B. DE NOUVELLES RÉDUCTIONS D’EFFECTIFS QUI CONCERNENT PRINCIPALEMENT LES FONCTIONS DE SUPPORT ET D’ENCADREMENT SUR LA PÉRIODE 2014-2019 27

1. Impact humain et financier des réductions d’effectifs 27

2. Une réorganisation des fonctions de pilotage de la masse salariale 29

3. Le repyramidage des emplois civils et militaires 30

C. LES MESURES D’ACCOMPAGNEMENT ASSOCIÉES AUX RESTRUCTURATIONS 31

1. De nouvelles rationalisations de sites 31

2. Un accompagnement des territoires renforcé 33

D. LA RÉFORME DE L’ENVIRONNEMENT INFORMATIQUE DE GESTION DES RESSOURCES HUMAINES APRÈS LE « DÉSASTRE » LOUVOIS 33

1. L’impact financier des dysfonctionnements : un coût important et non stabilisé 33

2. Des perspectives incertaines à ce jour 35

E. LE RENFORCEMENT DE LA FONCTION FINANCIÈRE AU SEIN DU MINISTÈRE 36

III. L’AFFECTATION DES CRÉDITS PROFITE ESSENTIELLEMENT AUX ACTIVITÉS OPÉRATIONNELLES 37

A. UN MAINTIEN GLOBAL DES CRÉDITS SUR LE PROGRAMME 178 37

1. Évolution générale des crédits programme 178 37

2. Évolution des ressources par actions 38

B. MAINTENIR L’ACTIVITÉ DES FORCES : UN OBJECTIF AFFIRMÉ ET DES MOYENS RENFORCÉS 42

1. Des crédits en hausse pour l’entretien programmé des matériels (EPM) 42

2. Évolution des crédits liés à l’EPM par armée 43

3. L’activité opérationnelle : un concept plus pertinent que la disponibilité 44

4. La nécessité de maintenir le nombre de journées d’activité au-dessus de 100 pour l’armée de terre 45

5. Une activité aéronavale sous contrainte pour la marine 46

6. L’activité des forces aériennes pour partie tributaire de la disponibilité des équipements 47

7. Les OPEX constituent un défi majeur pour la disponibilité et l’activité du matériel 48

C. LE MAINTIEN EN CONDITION OPÉRATIONNELLE : UN ENJEU MAJEUR POUR LES PROCHAINES ANNÉES 50

1. Une maintenance de plus en plus coûteuse pour les équipements modernes. 50

2. Une évaluation périodique du coût prévisionnel du MCO est nécessaire 51

D. UNE AFFIRMATION NÉCESSAIRE DES STRUCTURES INTÉGRÉES DE SOUTIEN 51

1. Renforcer la position des structures chargées de la maintenance dans les négociations et le contrôle 52

2. La relation avec le SIAé 54

3. Le processus de « métropolisation » : faire face aux conséquences des OPEX au niveau de l’entretien des matériels 55

E. LA NOUVELLE GESTION DES SURCOÛTS LIÉS AUX OPÉRATIONS EXTÉRIEURES : UN ÉQUILIBRE FRAGILE 56

1. Les engagements militaires de la France en 2013 ont eu un impact budgétaire important 56

2. La provision pour les opérations extérieures devrait être mieux anticipée 57

IV. LA POURSUITE DES RÉFORMES DE STRUCTURE AU SEIN DU MINISTÈRE 59

A. LE PROGRAMME 212 SOUTIEN DE LA POLITIQUE DE DÉFENSE : PROGRAMME CLÉ DANS LA RÉFORME ORGANISATIONNELLE DES ARMÉES 59

1. Un renforcement du SGA nécessaire au pilotage de la réforme du ministère 60

2. La rationalisation progressive des effectifs consacrés au soutien 62

3. Une interrogation persistante sur le prix des carburants 63

4. La diminution des crédits nécessaires pour le fonctionnement courant 64

B. LA POURSUITE DE LA RATIONALISATION DES IMPLANTATIONS MILITAIRES 65

1. La réorganisation des bases de défense 66

2. La montée en puissance du soutien interarmes 67

3. Les cessions immobilières et le projet Balard 67

V. REMARQUES TRANSVERSALES SUR LE CHAMP DE LA MISSION DÉFENSE 68

1. La nécessité de disposer des moyens maritimes adéquats pour la surveillance de l’espace maritime 68

2. Maintenir notre rôle dans le monde par une présence affirmée : le maintien du pré-positionnement des forces 70

3. Une faiblesse persistante dans la coopération européenne 74

EXAMEN EN COMMISSION 77

ANNEXE : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL 79

L’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

À cette date, 61 % des réponses étaient parvenues au Rapporteur spécial.

INTRODUCTION

Le budget 2014 repose sur le principe du maintien d’un effort financier important de la Nation avec la reconduction du budget de la Défense à hauteur de 31,4 milliards d’euros, soit le même niveau qu’en 2012 et 2013. Stabilisé en 2014 à 1,5 % du produit intérieur brut (PIB), hors pensions et hors gendarmerie, l’effort de défense permet de concilier un niveau d’ambition élevé, adapté aux nouveaux besoins de sécurité et aux responsabilités internationales de notre pays, avec la nécessité de redressement des finances publiques. Aux crédits budgétaires, s’ajoute, en 2014, 1,76 milliard d’euros de ressources exceptionnelles, pour aboutir à un total de 31,39 milliards d’euros hors pensions et de 39,25 milliards d’euros avec pensions.

Le budget de la défense pour 2014 s’inscrit pleinement dans les nouvelles orientations stratégiques issues du Livre blanc sur l’avenir de la défense. Ces orientations ont été traduites dans la loi de programmation militaire (LPM) pour la période 2014-2019, présentée le 2 août 2013 en Conseil des ministres et actuellement en discussion au Sénat. Le Rapporteur spécial pense que l’unité de pensée qui relie ces trois étapes doit impérativement se traduire dans les faits : le livre blanc a servi de référence à la rédaction de la LPM tandis que le budget 2014 s’inscrit nécessairement comme la première annuité de la période couverte par la LPM. C’est pourquoi le Rapporteur spécial plaide pour que l’examen de la LPM au Parlement ait lieu avant la fin de l’année 2013. Il est impératif que les armées puissent enfin disposer d’un cadre de référence clair pour les années à venir. En effet, de nombreuses décisions, notamment en matière d’Entretien programmé des matériels (EPM) doivent être anticipées un ou deux ans à l’avance. Il convient donc de ne pas répéter les décalages et les retards qui ont altéré la valeur de la précédente LPM.

Concernant le budget de la mission Défense en 2014, et plus spécifiquement les crédits des programmes 178 Préparation et emploi des forces et 212 Soutien de la politique de défense qui correspondent au périmètre examiné par le Rapporteur spécial, il convient de souligner que le PLF respecte les objectifs fixés par la programmation pluriannuelle, notamment la priorité accordée à l’activité opérationnelle des forces et à l’entretien des matériels. Ainsi, le budget de la défense stabilisé entre 2014 et 2016 augmentera à partir de cette date pour atteindre 32,5 milliards d’euros en 2019.

Le maintien de ce haut niveau de crédits nécessite néanmoins de poursuivre des efforts de rationalisation, en particulier la maîtrise des coûts liés à la masse salariale. Ainsi, une réduction d’effectifs de 7 881 équivalents temps-plein (ETP) sera opérée en 2014, sur les 23 500 ETP qui doivent être supprimés sur la période 2014-2019, conformément aux dispositions de la LPM. Il convient cependant de souligner que les personnels concourant au soutien seront davantage mis à contribution que les personnels militaires engagés dans des unités opérationnelles (deux tiers des efforts porteront ainsi sur les effectifs de soutien et d’états-majors).

Par ailleurs, certains programmes d’équipement ont été décalés ou allongés dans le temps, malgré des crédits supplémentaires consacrés à l’équipement des forces (16,5 milliards d’euros en PLF 2014 contre 16 milliards d’euros en LFI 2013). La priorité est en effet donnée à la cohérence du contrat opérationnel donné aux armées au niveau des équipements et des personnels, ceci afin de permettre le maintien d’un haut niveau d’activité opérationnelle. Des choix stratégiques ont donc été nécessaires pour s’assurer de l’effectivité de la trajectoire retenue.

C’est également dans cette optique que la LPM fixe comme objectif une remontée des taux d’activités pour l’ensemble des armées dès 2016. Pour cela, les crédits consacrés à l’EPM progressent de 500 millions d’euros dès 2014. En outre, cette problématique de l’entretien des matériels, et plus largement du maintien en condition opérationnelle (MCO), a fait l’objet d’une attention particulière du Rapporteur spécial, notamment à travers les auditions des trois responsables des structures intégrées de soutien que sont la structure intégrée de maintien des matériels aéronautiques de défense (SIMMAD), la structure intégrée de maintien des matériels terrestres (SIMMT) et le service de soutien à la flotte (SSF). En effet, pour des matériels de plus en plus élaborés, le coût consacré à l’entretien dépasse parfois le coût d’acquisition. Il est donc essentiel que les structures chargées de maintenir la qualité du matériel soient performantes et disposent de moyens adéquats, faute de quoi l’activité des forces ne pourra être maintenue à un niveau satisfaisant. Le Rapporteur spécial est ainsi convaincu que le rattachement direct de ces structures aux États-majors, et notamment au chef d’état-major des armées (CEMA), doit être maintenu pour permettre une mobilisation des moyens tournée vers l’activité opérationnelle, et non vers la seule disponibilité, concept qui ne rend pas assez compte de la nature des missions demandées aux armées.

En tout état de cause, avec 31,4 milliards d’euros de crédits de paiement en 2014, soit un montant stabilisé au même niveau qu’en lois de finance initiales pour 2012 et 2013, le budget de la défense ne connaît pas de rupture capacitaire majeure. Il convient donc de ne pas céder à l’alarmisme, comme l’ont confirmé l’ensemble des chefs d’états-majors auditionnés par le Rapporteur spécial, sur un prétendu déclin de l’institution. Ce serait oublier que l’ensemble des armées des grands pays occidentaux, à commencer par l’armée américaine, doivent actuellement faire face à une redéfinition de leurs contrats opérationnels.

Si l’armée française doit poursuivre ces efforts de modernisation et de rationalisation des structures de soutien, notamment par l’organisation des bases de défense et la rationalisation des implantations sur le territoire, elle conserve l’ensemble du spectre actuel de ces missions. La cohérence d’ensemble du modèle des armées est donc maintenue dans le PLF 2014 et devra l’être, au-delà, dans la loi de programmation militaire 2014-2019.

I. DES CRÉDITS STABLES POUR LA DÉFENSE EN 2014 QUI S’INSÈRENT DANS UNE PROGRAMMATION PLURIANNUELLE ALLIANT RENFORCEMENT DES SECTEURS STRATÉGIQUES ET MAÎTRISE DE LA DÉPENSE PUBLIQUE

Avec la publication du Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale le 29 avril 2013, la France s'est dotée d'une vision à long terme, adaptée aux évolutions récentes du contexte stratégique et économique, ainsi qu'à des objectifs de défense et sécurité nationale renouvelés ; elle a également défini un nouveau modèle pour ses forces armées, qui sera atteint à l'horizon 2025-2030.

Le budget 2014 s’insère donc comme la première annuité de la loi de programmation 2014-2019. Les ressources programmées (article 3 de la LPM) sur la période 2014-2019 s'élèveront à 190 milliards d’euros courants, soit 179,2 milliards d'euros constants, sur la période de la programmation, dont 183,9 milliards d'euros de crédits budgétaires et 6,1 milliards d'euros de ressources exceptionnelles (5,9 milliards en euros constants).

Durant les trois premières années, le montant total des ressources de la défense sera préservé en valeur au niveau de la loi de finances initiale pour 2013, à 31,4 milliards d’euros. Ce niveau représente un effort substantiel qui place le ministère de la défense parmi les quelques budgets de l’État préservés en dépit de la conjoncture ; ce montant permet de conjuguer souveraineté stratégique et souveraineté budgétaire.

A. UN BUDGET 2014 QUI S’INSCRIT PLEINEMENT DANS LES ORIENTATIONS DU CADRE DÉFINI PAR LA LPM

Malgré la reconduction de ses moyens à 31,4 milliards d’euros, le ministère de la défense est aujourd’hui confronté à un triple défi.

Tout d’abord, celui d’une situation marquée par une réforme en cours visant à procéder à des réductions d’effectifs et à des restructurations et par des équipements vieillissants qui appellent une modernisation indispensable. C’est à ce dernier objectif que correspond l’augmentation de 500 millions d’euros des crédits d’équipement en PLF 2014.

Ensuite, le défi financier de la contribution au redressement des finances publiques, dans un environnement marqué par deux crises financières successives, en 2008 puis en 2010-2011, qui ont rendu obsolètes les prévisions et les hypothèses de la précédente loi de programmation.

Enfin, le défi stratégique de l’adaptation aux évolutions intervenues depuis la parution du Livre blanc de 2008, qui a conduit à un maintien des ambitions de la France et à une redéfinition de ses priorités géostratégiques tenant compte des inflexions nouvelles de la politique étrangère américaine, des révolutions arabes et de la nouvelle problématique de la sécurité sur le continent africain.

LES BUDGETS 2013 ET 2014 PAR GRANDS AGRÉGATS
(STRUCTURE COURANTE ET HORS CAS PENSIONS,
RECETTES EXCEPTIONNELLES COMPRISES)

(en milliards d’euros courants)

Source : Projet de loi de finances 2014.

Dans ce cadre, le budget 2014 de la mission défense maintient les efforts en matière de réduction de la masse salariale (180 millions d’euros de réduction en PLF 2014 par rapport à la LFI 2013) et de diminution des coûts de fonctionnement (100 millions d’euros d’économies supplémentaires), tout en renforçant les crédits d’équipement, d’entretien des matériels et de maintien en condition opérationnelle des personnels militaires et de leurs équipements. Les priorités ainsi définies visent ainsi à fournir un repère stable et pluriannuel aux armées et à corriger la trajectoire devenue irréaliste de la précédente LPM.

1. Les enseignements de la précédente LPM

La LPM 2009-2014 prévoyait une ressource de 161,9 milliards d’euros courants pour la période 2009-2013. Ce montant prenait en compte toutes les ressources disponibles, y compris les ressources exceptionnelles issues de la cession de biens immobiliers et de bandes de fréquences détenues jusqu’alors par le ministère de la défense. En définitive, le ministère a bénéficié de 157,1 milliards d’euros, en retrait de 4,8 milliards d’euros par rapport aux programmations initiales. Les écarts ont porté tant sur les crédits budgétaires que sur les recettes extrabudgétaires. Le bilan d’exécution de la LPM 2009-2013 figure dans le tableau suivant :

BILAN D’EXÉCUTION DE LA LPM 2009-2013

(en milliards d’euros courants, structure courante)

   

Exécution 2009

Exécution 2010

Exécution 2011

Exécution 2012

Exécution 2013

LPM

Crédits budgétaires (hors pension)

29,82

30,35

30,94

32,24

33,22

Recettes exceptionnelles

1,64

1,26

0,57

0,09

-

Plan de relance de l’économie (PRE)

0,99

0,77

-

-

-

Total ressources (hors pension)

32,44

32,38

31,51

32,33

33,22

Exécution puis programmation actualisée

Crédits budgétaires (hors pensions)

31,43

30,27

30,01

30,15

30,11

Recettes exceptionnelles et autres ressources CAS

0,56

0,20

0,22

1,14

1,27

Plan de relance de l’économie (PRE)

0,99

0,77

-

-

-

Total ressources (hors pensions)

32,98

31,24

30,24

31,29

31,38

Écarts à la LPM

Crédits budgétaires (hors pensions)

1,62

– 0,08

– 0,93

– 2,09

– 3,11

 

Recettes exceptionnelles et autres ressources CAS

– 1,08

– 1,06

– 0,35

1,05

1,27

 

Plan de relance de l’économie (PRE)

-

-

-

-

-

 

Total ressources (hors pensions)

0,54

– 1,14

– 1,28

– 1,04

– 1,84

Taux de réalisation de la LPM (constaté puis prévisionnel, toutes ressources)

101,7 %

96,5 %

95,9 %

96,8 %

94,5 %

Source : ministère de la Défense.

Il est essentiel de souligner que les armées ont dû concilier des besoins supérieurs aux besoins programmés avec des ressources inférieures aux ressources prévues sur la LPM 2009-2014. Cet accroissement des besoins a trois causes principales :

– des besoins en masse salariale plus importants que prévus ;

– l’intégration de besoins nouveaux non programmés lors de la construction de la LPM (par exemple les conséquences de la non-exportation du Rafale ou les mesures destinées à pallier le retard de l’A400M) ;

– la réévaluation de certains besoins programmés initialement (cas des opérations d’armement autres que les programmes à effet majeur –PEM– liées par exemple aux urgences opérationnelles et aux opérations extérieures, en Lybie et en Afghanistan notamment).

En matière de ressources, la programmation a dû faire face à trois difficultés principales :

– le décalage d’environ deux ans de la perception des ressources exceptionnelles,

– la réduction des ressources budgétaires, le ministère contribuant à l’effort global de maîtrise de la dépense publique,

– l’évolution des hypothèses d’inflation par rapport à celles qui avaient été retenues pour la construction en euros constants de la loi de programmation.

2. La stabilisation des crédits pour la période 2014-2016

Conformément aux engagements du Président de la République, la somme des ressources budgétaires et exceptionnelles est donc stabilisée en valeur pour 2014 et 2015. Par conséquent, les crédits de paiement de la mission Défense, hors charges de pensions, exprimés en milliards d’euros courants évolueront comme suit :

2014

2015

2016

2017

2018

2019

29,61

29,61

30,13

30,65

31,50

32,36

Ils seront complétés par des ressources exceptionnelles (cf. infra), provenant notamment de cessions, exprimées en milliards d'euros courants qui évolueront comme suit :

2014

2015

2016

2017

2018

2019

1,77

1,77

1,25

0,91

0,28

0,15

Pour les seuls crédits budgétaires prévus en PLF 2014 sur le périmètre du budget général, les crédits sont donc inférieurs de 500 millions d’euros aux plafonds arrêtés par la loi de programmation des finances publiques. Cette baisse représente la participation du ministère à la diminution des dépenses de l’État (- 1,5 milliard d’euros en valeur sur la norme de dépense ; – 4,5 milliards d’euros en tenant compte des redéploiements au profit des priorités gouvernementales). Les ressources exceptionnelles doivent compenser cette diminution.

La ressource budgétaire sera stabilisée en volume dès 2016, puis, à partir de 2018, elle suivra une progression de 1 %, cohérente avec la trajectoire de redressement des comptes publics.

PRÉSENTATION DES CRÉDITS BUDGÉTAIRES PAR PROGRAMME EN 2014
PAR RAPPORT À 2013 (RECETTES EXCEPTIONNELLES INCLUSES)

Source : Direction des affaires financières du ministère de la Défense.

Le Rapporteur spécial souligne néanmoins qu’il existe un risque important lié au cumul des reports de charges sur la mission Défense. En effet, le surgel opéré en 2013 au profit des missions prioritaires de l’État a concerné 340 millions d’euros, auxquels il convient d’ajouter 200 millions d’euros de dérapage de la masse salariale, dû notamment aux dysfonctionnements du système Louvois. Ce sont ainsi 540 millions d’euros qui doivent être dégagés par le ministère de la Défense, potentiellement au détriment des programmes d’équipement. Si l’on considère également que le report de charges s’est élevé à 1,7 milliard à la fin de l’exercice 2012 (200 millions d’euros supplémentaires par rapport à la fin de 2011, portant principalement sur le programme 146 Équipement des forces) – soit environ deux mois de paiement – et qu’il risque d’être encore plus important cette année, le risque de report de charges de 2013 sur 2014 sera vraisemblablement supérieur à 2 milliards d’euros. Il convient dès lors de veiller à ce que les équilibres dessinés par la LPM ne soient pas remis en cause par des restes à payer excessifs.

3. Des ressources néanmoins amputées de l’inflation

La stabilité puis l’augmentation en volume des crédits prévus par la LPM ne tient pas compte de l’inflation. Cependant, pour construire cette trajectoire, le Gouvernement a retenu la chronique d’inflation du programme européen de stabilité.

TRAJECTOIRE D’INFLATION RETENUE POUR LA CONSTRUCTION DE LA LPM

Source : Direction des affaires financières du ministère de la Défense.

Le Livre blanc valorisait la ressource nécessaire à 179 milliards d’euros « 2013 » pour la période 2014-2019. La LPM arrête une trajectoire de ressources en euros courants (190 milliards d’euros) conforme avec cette valorisation. Ce choix permet donc de circonscrire l’impact d’une inflation plus faible qu’anticipé.

B. LE PROVISIONNEMENT DES RECETTES EXCEPTIONNELLES ET LES VENTES D’ACTIFS DES ENTREPRISES DE DÉFENSE : DES MESURES QUI RESTENT À PRÉCISER

1. Les recettes attendues sur la période 2014-2019

La précédente LPM prévoyait un montant de 3,7 milliards d’euros de recettes exceptionnelles sur la période 2009-2014. Près de 3 milliards d’euros auront été perçus jusqu’en 2013 (1,85 % de l’exécution 2009-2013), soit un montant inférieur de 700 millions d’euros par rapport aux prévisions.

L’arbitrage rendu par le Président de la République conduit à retenir sur la période 2014-2019 un montant de ressources exceptionnelles de 6,1 milliards d’euros courants. Ces ressources exceptionnelles seront constituées :

– des produits de cessions de bandes de fréquences à des opérateurs privés, notamment la bande 700 MHz et des 800 MHz (200 millions d’euros) ;

– des redevances versées par les opérateurs privés au titre des cessions de fréquences ;

– d’un nouveau programme d’investissements d’avenir (PIA), dont la partie défense sera consacrée à l’excellence des industries technologiques de défense (1,5 milliard d’euros attribués dès 2014) ;

– de produits de cessions immobilières (610 millions d’euros).

Ces ressources seront éventuellement complétées par une partie de la vente de participations de l'État au capital d'entreprises de défense.

PRÉVISION DES RECETTES EXCEPTIONNELLES

(M€ courants)

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

Somme 14-19

Ressources exceptionnelles

1,3

1,8

1,8

1,2

0,9

0,3

0,2

6,1

Source : Direction des affaires financières du ministère de la Défense.

Ce montant lié aux recettes exceptionnelles représente 3,3 % des ressources totales de la LPM 2014-2019.

2. La réduction des incertitudes qui pèsent sur la perception des recettes exceptionnelles

Par nature, le ministère de la Défense ne contrôle ni les délais ni les montants exacts des ressources exceptionnelles qui doivent compléter les crédits budgétaires dont il dispose, ce qui appelle à une vigilance particulière.

À cet égard, certains éléments, que cela soit les crédits du PIA ou les recettes de fréquences 4G ou immobilières (qui concernent pour l’essentiel les sites cédés dans le cadre du projet Balard), peuvent être considérés comme déjà acquis tant pour leur montant que pour leur calendrier (soit environ 2,4 milliards d’euros).

Le produit de la cession de la bande 700 MHz reste en revanche incertain du fait de la nature même de la ressource (système d’attribution par enchères).

C’est pourquoi le rapport annexé à la LPM prévoit une clause de sauvegarde, permettant de mobiliser, le cas échéant, d’autres ressources exceptionnelles. Peut notamment être cité le produit d’une éventuelle optimisation des participations de l’État dans le secteur de l’armement, au sens large du terme. Enfin, le principe du retour à 100 % des produits des cessions immobilières et de fréquences est réaffirmé et fera l’objet de dispositions législatives lorsque cela sera nécessaire, soit au plus tard le 31 décembre 2014. Par conséquent, le ministère de la défense restera ordonnateur des dépenses sur les CAS « fréquences » et « immobilier » qui reçoivent les recettes de cessions immobilières et de fréquences sur toute la période de la LPM.

Extrait LPM 2014-2019 :

« Dans l’hypothèse où le montant de ces recettes exceptionnelles, ou le calendrier selon lequel les crédits correspondants pourraient être affectés au budget de la défense feraient l’objet d’une modification substantielle, ayant une conséquence significative sur le respect de la programmation, d’autres recettes exceptionnelles seront mobilisées.

Dans l’hypothèse, à l’inverse, où le montant des ressources exceptionnelles disponibles sur la période 2014-2019 excéderait 6,1 Md€, l’excédent, à concurrence de 0,9 Md€ supplémentaires, pourrait bénéficier au ministère de la défense ».

Le Rapporteur spécial prend acte de l’engagement du Gouvernement de permettre aux armées de disposer des ressources qui leur sont garanties par la LPM en temps et en heure. Le respect de cet engagement est crucial pour ne pas aggraver la problématique du report de charges et pour consolider la trajectoire prévue par la LPM. Il est également nécessaire pour préserver la base industrielle et technologique de défense (BITD), alors que les entreprises qui la composent doivent déjà faire face à l’étalement ou au report d’un certain nombre de programmes d’équipement.

3. Le programme « excellence des industries technologiques de défense »

Parmi les ressources exceptionnelles affectées à la mission Défense en 2014, une grande partie est directement issue du programme d’investissement d’avenir (PIA) au bénéfice de l’excellence technologique de l’industrie de défense.

Ce programme interministériel, doté de 12 milliards d’euros, a été annoncé par le Premier ministre le 9 juillet 2013. La partie bénéficiant directement au ministère de la défense représente 1,5 milliard d’euros.

Elle vise notamment à développer la recherche et la technologie dans les domaines des applications défense de l’énergie nucléaire et de l’observation spatiale. Les deux opérateurs que sont le Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) et le Centre national d’études spatiales (CNES) en sont les principaux bénéficiaires :

S’agissant de l’utilisation de l'énergie nucléaire dans le domaine de la Défense, le CEA a pour mission de poursuivre les recherches scientifiques et techniques nécessaires, et de conduire des activités de développement ou de production. Ces activités s’exercent notamment au profit de la dissuasion, garantie fondamentale de la sécurité nationale.

Le CNES a pour mission d’être centre de compétence en France pour la conception et le développement des systèmes spatiaux complexes ou innovants et les activités technologiques liées à l’espace. Il conduit en particulier des activités d’études et développement avec les meilleures sources d’innovations technologiques des industriels et des centres de recherche publics. Il assure un rôle d’animation auprès des laboratoires de recherche français. S’agissant de l’observation spatiale, le CNES contribue fortement aux innovations et développements technologiques des instrumentations optiques des satellites.

Les crédits ouverts au titre de l’action 1 (1,32 milliard d’euros sur 1,5 milliard d’euros au total) seront utilisés pour financer certaines activités conduites par le CEA dans le domaine de la défense. Elles concernent notamment les chaufferies nucléaires des sous-marins d’attaque et du porte-avions Charles de Gaulle, dans le but d’accroître leur disponibilité et de limiter les périodes d’entretien.

Les 172 millions d’euros restants seront ouverts au titre de l’action 2 maîtrise des technologies spatiales. Ils seront principalement utilisés au profit du programme d’imagerie spatiale MUSIS, programme clé de l’action Connaissance et anticipation.

C. VERS UN NOUVEAU MODÈLE D’ARMÉE

Conformément aux orientations de la nouvelle LPM, le budget 2014 et les budgets des années suivants ont pour objectif de faire converger les moyens vers le nouveau modèle d’armée défini par le Livre blanc.

1. Quatre principes au cœur du nouveau modèle d’armée définie par la LPM

Le nouveau modèle d’armée retenu a été défini en cohérence avec une stratégie militaire renouvelée, qui tire les conséquences de l’analyse des menaces susceptibles de porter sur notre pays, du niveau d’ambition défini par le président de la République et du contexte géopolitique marqué notamment par la crise des finances publiques.

Quatre principes essentiels guident cette construction :

– le maintien de l’autonomie stratégique,

– la cohérence avec la diversité du spectre des conflits,

– le principe de différenciation des forces,

– le principe de mutualisation des fonctions transversales, notamment des fonctions soutien.

L’autonomie stratégique.

Il s’agit pour la France de disposer de sa liberté de décision et d’action, d’être en mesure de prendre l’initiative d’opérations qu’elle estimerait nécessaires et de pouvoir s’engager en coalition en jouant un rôle conforme à ses objectifs politiques. Une telle exigence impose de disposer des capacités spécifiques indispensables, en particulier :

● celles qui conditionnent la défense de nos intérêts vitaux,

● celles qui sont nécessaires à la prise d’initiative dans des opérations simples et probables (commandement interarmées, renseignement, ciblage, forces spéciales, moyens de combat au contact de l’adversaire),

● celles qui sont liées à la capacité de fédérer et d’entraîner au sein d’une coalition tout en conservant notre indépendance d’appréciation (moyens de frappes précises dans la profondeur, capacité autonome à « entrer en premier » sur un théâtre d’opérations de guerre, capacité de commandement dans une opération interalliée (1)).

La cohérence du modèle avec la diversité des missions dans lesquelles la France est susceptible d’engager ses forces armées.

Peu de pays disposent des moyens de s’engager sur tout le spectre des conflits. Le Livre blanc décrit un modèle d’armée qui permettra à la France d’être capable de :

● répondre aux menaces d’emploi de la force par des États, y compris lorsque ses intérêts vitaux sont susceptibles d’être menacés ; ceci nécessite l’entretien d’une force de dissuasion et d’une capacité à s’engager dans les opérations de coercition les plus exigeantes, face à des forces étatiques bien équipées ;

● conduire dans la durée les opérations de gestion de crises de tous types, visant à faire cesser les situations de violence, notamment en cas de déstabilisations régionales ou de défaillances d’États ;

● pourvoir à la protection du pays et de ses intérêts de sécurité, face aux risques résultant notamment de la mondialisation (par exemple protection des infrastructures « critiques » contre la cybermenace ou le terrorisme ; actes visant la sécurité des approvisionnements ; risques naturels, sanitaires ou technologiques).

La différenciation des forces

Il s’agit de la possibilité de distinguer les forces en fonction des missions qu’elles sont appelées à remplir (forces de dissuasion, forces de protection, forces de gestion de crise, forces de coercition). Ce principe de spécialisation relative est un principe d’efficience (entraîner et équiper nos unités et nos équipages en fonction des spécificités de chaque mission) et un principe d’économie (ne financer les capacités les plus onéreuses que là où elles sont indispensables) qui permet aussi de favoriser le volume des forces déployables dans les opérations où ce facteur est clé. La différenciation repose notamment sur la définition de moyens lourds, médians ou légers dans chaque armée.

La mutualisation

Ce principe est déjà pour partie en œuvre au sein des armées. Il consiste à affecter un noyau de capacités polyvalentes et rares à plusieurs missions (protection, dissuasion, intervention extérieure). Il aboutit également à appliquer pour les services de renseignement une règle de mise en commun de certains des moyens techniques les plus performants pour leurs missions respectives. Il sera également appliqué au niveau de l’Europe de la défense par la mise en commun de certaines capacités indispensables à l’action. Parmi les domaines de mutualisation possibles, on peut citer l’observation spatiale, le transport aérien et ravitaillement en vol, la surveillance des théâtres d’opérations, la logistique dans les zones de crise et les contributions au déploiement d’un groupe aéronaval.

Ces quatre grands principes d’organisation traduisent un changement d’orientation majeure par rapport aux décisions prises depuis 1996. Avant cette date, nous disposions en effet d’un outil militaire organisé en vue d’un affrontement militaire unique et extrême. À partir de 1996, nous avons conservé un instrument militaire conçu pour des affrontements génériques de haute intensité que nous avons utilisé de manière croissante dans les opérations extérieures.

Ceci a conduit en 2008 à retenir le principe de la polyvalence des forces, qui devaient toutes être capables de s’engager dans l’ensemble des missions dont la diversité commençait à s’imposer comme un fait stratégique majeur. Avec la LPM 2014-2019, qui définit un nouveau modèle opérationnel pour 2025, les principes de polyvalence et de différenciation s’imposent.

2. Des équipements à la hauteur du nouveau contrat opérationnel des armées

Pour construire ce modèle d’armée, la problématique de l’équipement des forces est centrale. Sur la période de programmation militaire 2014-2019, une enveloppe annuelle de 17,1 milliards d’euros en moyenne (soit 102,4 milliards entre 2014 et 2019) est ainsi allouée à l’équipement afin de préserver un haut niveau de compétences, d’assurer la poursuite des programmes en cours et de favoriser la coopération européenne en la matière.

Le budget 2014 reflète cet engagement. En effet, malgré le contexte de réduction des déficits publics, les crédits consacrés à l’investissement et à l’entretien de l’équipement au profit de nos forces progressent, passant de 16 milliards d’euros en 2013 à 16,5 milliards d’euros dans le PLF 2014. L’entretien programmé des matériels et l’infrastructure bénéficient notamment de cet effort significatif : la programmation prévoit d’y consacrer respectivement 20,6 milliards d’euros et 6,1 milliards d’euros entre 2014 et 2019 (cf. infra).

Le secteur des études amont, essentiel au maintien de nos compétences industrielles et à la maîtrise des technologies clés du futur, est lui aussi préservé avec 750 millions d’euros de crédits, soit une hausse de 10 % par rapport à la période couverte par la précédente LPM.

Conformément aux conclusions du Livre blanc, cette progression des crédits d’équipements vise à poursuivre la modernisation des armées et le renouvellement des matériels. Elle accompagne l’application du principe de différenciation, notamment pour les forces terrestres avec le lancement en 2014 du programme SCORPION en vue d’acquérir des véhicules blindés multirôles (VBMR) et des engins blindés de reconnaissance et de combat (EBRC) destinés à équiper les brigades multirôles. Elle donne également du sens au principe de mutualisation au niveau européen, puisque ce projet de loi confirme la poursuite des grands programmes conduits en coopération (A400M, FREMM, NH90, Tigre, MUSIS, FSAF).

Parmi les équipements, l’effort au profit de la dissuasion nucléaire s’élèvera, sur la période de programmation, à environ 23,3 milliards d’euros courants. Les opérations d’équipement conventionnel seront financées à hauteur de 49,2 milliards d’euros sur la période 2014-2019. Celles-ci regroupent :

– les programmes à effet majeur (PEM), auxquels sera consacrée une ressource d’environ 34 milliards d’euros (dont 5,7 milliards d’euros dès le projet de loi de finances pour 2014) ;

– les programmes d’environnement et les équipements d’accompagnement qui complètent la cohérence capacitaire et organique des forces (15,2 milliards d’euros).

Conformément aux objectifs définis dans les annexes de la LPM, Ces crédits permettent de définir les moyens et le format des armées.

a. Format par armées et en interarmées

Forces terrestres

Offrant une capacité opérationnelle de l’ordre de 66 000 hommes projetables, les forces terrestres seront articulées en sept brigades interarmes, fondées sur le principe de différenciation :

– deux brigades aptes à l’entrée en premier et au combat de coercition face à un adversaire équipé de moyens lourds ;

– trois brigades multi-rôles, prioritairement équipées et entraînées pour la gestion de crise ;

– deux brigades légères.

Elles comportent également des unités d’appui et de soutien opérationnel, ainsi que les forces spéciales terrestres.

La poursuite de l’effort de numérisation et une préparation opérationnelle appropriée garantiront la cohérence entre les différentes composantes et leur capacité à se renforcer mutuellement. Ces forces disposeront à l’horizon 2025 d’environ 200 chars lourds, 250 chars médians, 2 700 véhicules blindés multi-rôles et de combat, 140 hélicoptères de reconnaissance et d’attaque, 115 hélicoptères de manœuvre et une trentaine de drones tactiques.

Forces navales

Au-delà des moyens relevant de la dissuasion, les forces navales reposent sur :

– des capacités de combat de premier plan, polyvalentes, mobiles, protégées, disposant de feux précis et puissants, pour les opérations de haute intensité et de gestion de crise majeure (porte-avions, SNA, BPC, frégates de défense aérienne, frégates multi-missions) ;

– des unités de combat n’usant pas prématurément le potentiel des forces lourdes et permettant de préserver un nombre suffisant de moyens, facteur indispensable de la présence en mer (frégates type La Fayette adaptées avec sonar notamment) ;

– des unités légères aptes à la protection des espaces maritimes et des approches métropolitaines et outre-mer (frégates de surveillance, patrouilleurs …).

Les forces navales disposeront ainsi, à l’horizon 2025, de 4 sous-marins nucléaires lanceurs d’engins, de 6 sous-marins nucléaires d’attaque, d'un porte-avions, de 15 frégates de premier rang, d'une quinzaine de patrouilleurs, de 6 frégates de surveillance, de 3 bâtiments de projection et de commandement, d'avions de patrouille maritime, ainsi que d’une capacité de guerre des mines apte à la protection de nos approches et à la projection en opération extérieure.

Dès la période 2014-2019, outre leurs capacités dédiées à la protection de nos approches maritimes et à l’action de l’État en mer, elles connaîtront une transformation importante de leurs capacités de lutte sous la mer, d’action vers la terre et de contrôle des espaces maritimes.

Forces aériennes

Les forces aériennes, outre la mise en œuvre de la composante aéroportée de la dissuasion, disposent des capacités d’entrée en premier, d’appréciation de situation, de frappe dans la profondeur, de projection et d’appui de la manœuvre terrestre adaptées à un conflit majeur, grâce à des flottes d’avions polyvalents du meilleur niveau.

Elles conserveront un nombre d’aéronefs suffisants, en prolongeant des avions plus anciens et spécialisés, notamment pour remplir les missions de gestion de crises ou de protection de l’espace aérien national et de ses approches. La préparation opérationnelle sera différenciée, un effort particulier étant réalisé pour disposer d’un premier cercle de forces employables avec un très haut niveau de réactivité dans tout le spectre des opérations. Cette démarche sera soutenue par une rénovation de l’entraînement et de la formation des pilotes de chasse (projet « Cognac 2016 »).

Les forces aériennes comprendront notamment 225 avions de chasse (air et marine) composés de Rafale (Air et Marine) et de Mirage 2000 prolongés, ainsi qu’une cinquantaine d’avions de transport tactique, 7 avions de détection et de surveillance aérienne (air et marine), 12 avions ravitailleurs multi rôles, 12 drones de surveillance de théâtre, des avions légers de surveillance et de reconnaissance et 8 systèmes sol-air de moyenne portée.

Capacités interarmées

Sur la durée de la LPM, les forces spéciales et les moyens nécessaires au renseignement, stratégiques ou tactiques, verront leurs moyens augmenter, alors que les moyens de communication et les systèmes d’information seront maintenus à un niveau suffisant.

Les principales opérations d’armement sont globalement sauvegardées, mais pourront pour certaines d’entre elles être conduites selon un calendrier et des objectifs de performances adaptés, en tant que de besoin.

b. Impact sur les grands programmes et effort au profit de l’équipement des forces

Pour construire un modèle d’armée répondant aux objectifs fixés par le Livre blanc, il a en effet été nécessaire de procéder à un certain nombre d’ajustements (report, étalement des livraisons, réduction de cible, réduction du contenu physique) sur un nombre important d’équipements.

Par rapport au dernier référentiel de programmation daté de 2012, ces ajustements portent :

● dans le milieu terrestre, en adéquation avec le nouveau contrat opérationnel, sur le programme FELIN (Fantassin à équipement et liaisons intégrés) qui verra sa cible réduite et sur le programme SCORPION qui subira un étalement et une réduction de périmètre et des cibles de certains programmes constitutifs (Rénovation Leclerc). Les livraisons des hélicoptères TIGRE seront également étalées.

● dans le milieu naval, sur les livraisons des sous-marins nucléaires d’attaque BARRACUDA et des frégates multi missions FREMM, les pétroliers ravitailleurs (FLOTLOG), le périmètre de l’opération de rénovation des ATL2 et les livraisons des systèmes de lutte anti-mines futurs (SLAMF).

● dans le milieu aérien, sur les livraisons des principaux appareils de l’armée de l’air et de la marine nationale (A400M, MRTT et RAFALE). Les cibles des systèmes SAMP/T et des missiles ASTER 30 associées seront mis en adéquation avec les nouveaux contrats opérationnels.

Toutefois, les livraisons prévues en 2014 et pour les années suivantes demeurent très significatives. Le Rapporteur spécial a ainsi pu constater que les dirigeants des principales industries composant la base industrielle et technologique de défense n’étaient pas excessivement inquiets quant aux conséquences des reports et étalements de livraisons.

LES PRINCIPALES LIVRAISONS EN 2014 PAR SYSTÈME DE FORCES

Commandement et maîtrise de l’information

• 6 stations de communications tactiques ASTRIDE ;

• 16 kits de numérisation des communications tactiques NUMTACT ;

• 44 sites du réseau RDIP ;

• 26 premiers modules projetables du système d’information des armées (SIA) ;

• le centre de commandement, de détection et de contrôle des opérations aériennes de Lyon, ainsi que 3 radars haute et moyenne altitude du système SCCOA ;

• 15 réseaux navals RIFAN étape 2 ;

• 3 stations sol de communications par satellite SYRACUSE III ;

• 40 stations sol de communications haut débit par satellite COMCEPT ;

• la surveillance de systèmes dans le cadre de la cyberdéfense ;

• le satellite de télécommunications franco-italien SICRAL ;

• 1 avion SDCA (système de détection et de commandement aéroporté) rénové.

Engagement Combat

• 220 armements air-sol modulaires (AASM) ;

• 25 torpilles lourdes MU90 ;

• 11 avions Rafale ;

• 2 avions Rafale marine rétrofîtés au standard F3 ;

• 4 036 derniers équipements FÉLIN ;

• 4 hélicoptères de combat Tigre en version appui destruction ;

• 77 véhicules blindés de combat d’infanterie (VBCI) ;

• 1 frégate multimission (FREMM) ;

• 13 lance-roquettes unitaires (LRU) ;

• 60 missiles de croisière navals (MdCN).

Projection mobilité soutien

• 4 avions de transport A400M ;

• 115 porteurs polyvalents terrestres (PPT) ;

• 5 hélicoptères Cougar rénovés ;

• 1 500 ensembles parachutistes du combattant ;

• 7 hélicoptères NH90 (3 en version navale et 4 en version terrestre).

Protection sauvegarde

• le dernier système de défense sol-air FSAF SAMP/T ;

• 10 missiles Aster 15 ;

• 7 missiles Aster 30 ;

• 300 missiles Mistral rénovés ;

• la transformation d’1 Falcon 50 en avion de surveillance maritime.

Source : Projet de loi de finances 2014.

LES PRINCIPALES COMMANDES EN 2014 PAR SYSTÈMES DE FORCES

Dissuasion

• lancement des travaux de la prochaine version du M51.

Commandement et maîtrise de l’information

• 34 stations tactiques de communication ASTRIDE ;

• 285 stations de communication par satellite haut débit COMCEPT ;

• 66 stations de communication radio HF MELCHIOR ;

• la dernière station sol de communication par satellite SYRACUSE III ;

• 6 réseaux navals RIFAN étape 2 ;

• 33 modules projetables du système d’information des armées (SIA) ;

• la surveillance de systèmes dans le cadre de la cyberdéfense ;

• 609 kits de numérisation des communications tactiques NUMTACT ;

• 1 système d’avion léger de surveillance et de renseignement (ALSA 2R) ;

• 1 système de drone moyenne altitude longue endurance (MALE).

Engagement Combat

• 20 torpilles lourdes ARTÉMIS ;

• retrofit d’hélicoptères Tigre de standard HAP au standard HAD ;

• 1 sous-marin nucléaire d’attaque Barracuda ;

• 19 pods de désignation laser nouvelle génération (PDL NG).

Projection mobilité soutien

• 250 PPT ;

• lancement de la réalisation de l’avion multirôle de ravitaillement en vol et de transport (MRTT) ;

• acquisition de 2 avions de transport à très long rayon d’action (TLRA).

Protection sauvegarde

• des patrouilleurs légers.

Source : Projet de loi de finances 2014.

Néanmoins, cet effort conséquent au profit de l’équipement des forces ne pourra être tenu que si les équilibres définis par la LPM sont respectés. Cela passe notamment par une maîtrise accrue des dépenses de personnels.

II. VERS DE NOUVELLES MESURES POUR LA MAÎTRISE DE LA MASSE SALARIALE

La maîtrise des dépenses de titre 2 demeure un enjeu majeur pour le ministère de la Défense. Outre les réductions d’effectifs prévues par la précédente LPM et le travail actuellement mené sur la rationalisation des fonctions soutien, les mesures complémentaires prises par la LPM 2014-2019 et le travail de repyramidage des effectifs devraient permettre une réduction en valeur des dépenses de titre 2 à l’horizon 2015, ce qui représente une rupture majeure après des décennies de progression constante.

A. UNE ÉVOLUTION MARQUÉE DE LA MASSE SALARIALE SUR LA PÉRIODE 2009-2014

Dans le cadre de la LPM 2009-2014, le ministère de la Défense a supprimé 54 000 emplois, hors créations d’emplois, et hors les 1 670 déflations d’emplois réalisées sur la mission Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation. Le ministère de la Défense a d’ailleurs eu tendance à anticiper et dépasser les objectifs fixés par la loi de programmation militaire. Ainsi, l’exécution 2012 montre une nette progression de la déflation des effectifs : le plafond d’emplois pour le périmètre de la mission Défense était fixé à 291 615 EPT, alors que les données relatives à l’exécution 2012 ne font apparaître que 286 215 EPTP consommés, soit un écart de 5 400 postes. De la même manière, en 2013, la déflation des effectifs était fixée à 7 234 ETPT en LFI : au 31 juillet, les réductions d’effectifs dépassent largement cet objectif, atteignant – 7 489 ETPT.

Ces déflations, si elles n’ont pas généré de réduction proportionnelle de la masse salariale mais elles ont contribué à en contenir la croissance. Le rapport d’exécution de la Cour des Comptes, publié en juillet 2012, montre ainsi que les économies de masse salariale nettes des coûts d’accompagnement sont estimées à 5,4 milliards d’euros entre 2008 et 2011. Sur la même période, on relève cependant une augmentation de 1,02 milliard d’euros des dépenses de titre 2. Ainsi, même si la progression des dépenses de titre 2 n’a pu être enrayée, plus de 5 milliards d’euros de dépenses supplémentaires ont pu être évités.

Plusieurs facteurs permettent d’expliquer cet effet ciseau :

– l’absence de prise en compte dans la budgétisation de la LPM 2009-2014 de décisions prises dès 2007 concernant la revalorisation de la condition militaire, qui comprenaient notamment la mise en place d’une nouvelle grille salariale afin de lutter contre le décrochage vis-à-vis du reste de la fonction publique ;

– la tendance au repyramidage des effectifs : le taux de déflation des effectifs a été à peu près inversement proportionnel au niveau hiérarchique et le taux d’encadrement a progressé, passant de 14,59 % en 2007 à plus de 16 % en 2012. Le secrétaire général pour l’administration a justifié cette tendance au regard des éléments suivants : distribution de pécules plus généreux qu’à l’accoutumée pour accompagner les départs (retraites au grade supérieur comme incitation au départ, promotion fonctionnelle pour les civils en vue d’une retraite anticipée), réintégration du commandement intégré de l’OTAN qui a exigé la promotion d’environ 900 officiers de rang supérieur ou encore l’accent mis par le Livre blanc sur la fonction « connaissance et anticipation » (embauche de 700 personnels hautement qualifiés, notamment au profit des services de renseignement) ;

– les mesures générales de revalorisation de la condition militaire qui contiennent notamment les dispositifs d’alignement sur les mesures ayant bénéficié à la gendarmerie nationale (réindexation), des mesures catégorielles (aides-soignants, secrétaires médicaux), plan triennal permettant un accès plus large à la rémunération hors échelle B ;

– le glissement vieillesse technicité (GVT) a été sous-estimé et aggravé par certains facteurs : raccourcissement des carrières télescopé par le relèvement de l’âge de la retraite en cours de mandature, qui a finalement conduit au rallongement des carrières. L’écart avec le GVT solde constaté est ainsi de 50 millions d’euros ;

– les dépenses catégorielles « hors socle » ont continué à progresser alors que le rapport de la Cour des comptes à mi-parcours notait déjà une progression de plus de 40 % sur la période 2008-2011. Ces dépenses sont particulièrement dynamiques à cause des mesures contenues dans les plans d’accompagnement des restructurations ;

– les conséquences financières liées aux dysfonctionnements du système Louvois (voir infra).

Enfin, il convient de souligner que le ministère de la défense assure lui-même le versement des prestations chômage aux anciens militaires qui n’ont pu se reconvertir. Or, la progression générale du chômage a fait progresser ce poste de dépenses qui atteint près de 90 millions d’euros en 2013.

Pour remédier à cette situation, de nouvelles mesures ont été prises comme les réductions d’effectifs prévues par la LPM 2014-2019, ainsi que la réorganisation interne au ministère de la Défense de la fonction RH, qui sera désormais pilotée par une direction unifiée en étroite liaison avec la direction des affaires financières.

B. DE NOUVELLES RÉDUCTIONS D’EFFECTIFS QUI CONCERNENT PRINCIPALEMENT LES FONCTIONS DE SUPPORT ET D’ENCADREMENT SUR LA PÉRIODE 2014-2019

1. Impact humain et financier des réductions d’effectifs

La nouvelle LPM 2014-2019 prévoit une diminution de 23 500 ETP, qui s'ajoutent aux 54 000 postes supprimés d’ici 2015 dans la précédente LPM. À l'issue de cette échéance, le format des forces armées françaises sera de 240 279 militaires et civils, après avoir perdu un quart de leurs effectifs en l’espace de onze années. 

PLAFOND DES EFFECTIFS AUTORISÉS POUR 2014

 

Catégorie d'emplois

PEA 2013

EMRP au 30/06/2013 (1)

PEA 2014

Programme 144 Environnement et prospective de la politique de défense

OFFICIERS

2 744,5

2 773

2 753,5

SOUS-OFFICIERS

1 618,5

1 475

1 616

MDR

108

102

109,5

VOLONTAIRES

4,5

4

4

TOTAL MILITAIRES

4 475,5

4 354

4 483

Niveau A

1 634

1 684

1 666,5

Niveau B

982,5

1 020

990

Niveau C

1 640

1 573

1 620,5

Ouvriers de l'État

88

71

88

TOTAL CIVILS

4 344,5

4 348

4 365

TOTAL PROGRAMME

8 820

8 702

8 848

Programme 178 Préparation et emploi des forces

OFFICIERS

29 599

29 588

28 735

SOUS-OFFICIERS

92 067,5

92 926

89 598,5

MDR

82 655,5

79 337

79 037

VOLONTAIRES

2 683,5

2 071

2 172,5

TOTAL MILITAIRES

207 005,5

203 922

199 543

Niveau A

3 510

3 411

3 443

Niveau B

6 459,5

6 045

6 390

Niveau C

17 140

15 151

16 986

Ouvriers de l'État

16 108

15 820

14 970,5

TOTAL CIVILS

43 217,5

40 428

41 789,5

TOTAL PROGRAMME

250 223

244 350

241 332,5

Programme 146 Équipement des forces

OFFICIERS

1 863

1 965

1 834,5

SOUS-OFFICIERS

1 194,5

1 171

1 194,5

MDR

69

76

68,5

VOLONTAIRES

101

77

101

TOTAL MILITAIRES

3 227,5

3 289

3 198,5

 

Niveau A

3 464,5

3 397

3 439

Niveau B

1 431

1 470

1 409

Niveau C

989,5

906

886,5

Ouvriers de l'État

2 420

2 621

2 165

TOTAL CIVILS

8 305

8 394

7 899,5

TOTAL PROGRAMME

11 532,5

11 683

11 098

Programme 212 Soutien de la politique de défense

OFFICIERS

1 442,5

1 363

1 425,5

SOUS-OFFICIERS

1 762,5

1 543

1 669

MDR

215,5

236

142,5

VOLONTAIRES

43,5

17

39,5

TOTAL MILITAIRES

3 464

3 160

3 276,5

Niveau A

1 977

2 057

1 990,5

Niveau B

2 604

2 807

2 601

Niveau C

3 632,5

3 171

3 583

Ouvriers de l'État

1 482

1 438

1 401,5

TOTAL CIVILS

9 695,5

9 472

9 576

TOTAL PROGRAMME

13 159,5

12 631

12 852,5

TOTAL MISSION DÉFENSE

OFFICIERS

35 649

35 690

34 748,5

SOUS-OFFICIERS

96 643

97 116

94 078

MDR

83 048

79 750

79 357,5

VOLONTAIRES

2 832,5

2 169

2 317

TOTAL MILITAIRES

218 172,5

214 725

210 501

Niveau A

10 585,5

10 549

10 539

Niveau B

11 477

11 342

11 390

Niveau C

23 402

20 801

23 076

Ouvriers de l'État

20 098

19 949

18 625

TOTAL CIVILS

65 562,5

62 641

63 630

TOTAL

283 735

277 366

274 131

Source : ministère de la Défense.

Ainsi, outre les 10 175 postes en 2014 et 2015 supprimés au titre de la précédente réforme, la diminution nette prévue par la LPM atteindra 23 500 ETP. Les réductions d’effectifs représenteront donc 33 675 postes sur la période 2014-2019.

La nouvelle déflation portera d’une part sur les forces de combat à hauteur de 8 000 postes, auxquels s’ajoutera une réduction de 1 100 postes dans les forces pré-positionnées, mais surtout sur les effectifs de soutien (pour environ 14 500 postes), afin de préserver la capacité opérationnelle des armées. Les militaires seront plus touchés que les civils : 26 200 postes militaires contre 7 400 civils pour atteindre les 33 675 suppressions. Ces réductions d’effectifs sont ressenties douloureusement par les militaires en raison des nombreuses restructurations opérées depuis 2008. Elles n’en sont pas moins indispensables pour moderniser l’outil de défense.

Pour 2014, l’objectif de suppression de postes est fixé à – 7 881 EPTE. Celles-ci se concentrent pour l’essentiel sur le programme 178 Préparation et emploi des forces qui représente 88 % du plafond des emplois autorisés de la mission Défense. Ces réductions d’effectifs permettront de réaliser des économies évaluées à 226,8 millions au PLF 2014, dont 201,2 millions d’euros sur le seul programme 178. Les 7 119 postes supprimés sur ce programme résultent de 29 529 départs et 22 410 entrées (dont 14 935 primo recrutements).

En termes financiers, le schéma d’emplois prévu devrait permettre d’économiser 190 millions d’euros en moyenne par an entre 2014 et 2019 sur le titre 2. En prenant comme référentiel de départ l’année 2013, l’économie potentielle réalisée sur la masse salariale atteindra 4,4 milliards d’euros en six ans.

ÉVOLUTION DE LA MASSE SALARIALE DE LA MISSION DÉFENSE
SELON LES HYPOTHÈSES DE LA LPM (HORS PENSIONS)

Source : Ministère de la Défense.

ÉCONOMIES CUMULÉES SUR LA PÉRIODE 2014-2019

 

2014

2015

2016

2017

2018

2019

TOTAL

 

Déflations nettes en ETPE

–7 881

–7 500

–7 397

–7 397

–3 500

0

–33 675

Déflations nettes en ETPT

-3 940,5

-7 690,5

-7 448,5

-7 397

-5 448,5

-1 750

33 675

Valorisation des réductions nettes (prévisions) en M€

–210,95

–224,88

-222,10

-228,24

-176,26

-65,59

1 128,02

TOTAL en cumulé en M€

–210,95

–435,82

–657,93

–886,16

–1 062,43

–1 128,02

-4 381,31

Source : Direction des affaires financières du Ministère de la défense.

2. Une réorganisation des fonctions de pilotage de la masse salariale

Il convient de souligner que, grâce aux progrès accomplis au titre de l’interarmisation, l’architecture administrative du ministère a été profondément modifiée. Les réductions d’effectifs peuvent donc porter essentiellement sur les fonctions soutien, ce qui rompt avec la méthode habituelle de réduction des effectifs.

Une telle maîtrise passe d’abord par un meilleur pilotage de la masse salariale. Les dépenses de titre 2 seront désormais regroupées dans un programme budgétaire unique, outil plus fonctionnel que l’éclatement par programmes en vigueur aujourd’hui. Ces dépenses seront ensuite réparties par Budget opérationnel de programme (BOP). La direction unifiée des ressources humaines (DRH-MD) disposera ainsi d’une autorité renforcée et pourra exercer un pilotage politique plus efficace de la masse salariale, dont les évolutions techniques seront ensuite discutées avec les DRH des armées et la direction financière du ministère. Il ne s’agit donc pas encore à ce stade d’intégrer les différentes DRH d’armées et de services au sein d’une entité unique, selon un mode de fonctionnement hiérarchique.

Cette nouvelle organisation du pilotage de la masse salariale repose sur l’idée de confier les responsabilités du titre 2 aux acteurs disposant des leviers de gestion, que sont les DRH d’armées et de services. C’est pourquoi les effectifs et la masse salariale seront transférés des employeurs vers les gestionnaires, qui deviendront responsables de budget opérationnel de programme sur le périmètre des agents dont ils assurent la gestion. Cette démarche s’est déjà traduite par une première mesure de rationalisation, avec la suppression de la sous-chefferie RH de l’EMA, conséquence de la mise en place d’un lien fonctionnel direct entre la DRH-MD et les DRH relevant notamment du périmètre de l’EMA. Cette formule, nécessaire pour contenir les dépenses de titre 2 après de multiples tentatives infructueuses, a été source d’inquiétudes quant à la perspective de voir les « civils » prendre le pas sur les « militaires » pour définir le format des armées. À cet égard, le Rapporteur spécial rappelle que ce sont bien les états-majors qui conservent la responsabilité de définir, en lien avec le Gouvernement, la politique de recrutement, de formation et de dimensionnement des forces armées, la DRH-MD n’opérant que sur le volet « gestion » des effectifs.

Ainsi, la diminution des dépenses de personnel devrait être visible dès 2015 sous réserve qu’aucun facteur exogène ne vienne perturber les efforts proposés par le ministère.

3. Le repyramidage des emplois civils et militaires

En ce qui concerne la structure des emplois militaires et civils, le repyramidage constaté sur la période 2009-2012 doit être relativisé. Pour le personnel militaire, le poids des officiers dans la population militaire est passé de 15 % en 2009 à 16,5 % en 2012 alors même que les armées et services devaient répondre à une évolution forte des besoins en organisation issus des conclusions du précédent livre blanc et de la loi de programmation militaire.

Le ministère de la Défense s’attache néanmoins à contenir l'évolution de la pyramide des effectifs des armées et services, dans un contexte économique moins favorable qui pèse sur les flux de sorties de l’institution. À cette fin, un dispositif de contingentement des effectifs militaires par grade a été mis en place dès 2012. Cet effort sera poursuivi dans le cadre de la prochaine LPM avec un effort significatif en termes de déflation de la catégorie des officiers dont la proportion sera réduite à 16 % d’ici à 2019, soit le taux d’encadrement de 2010.

Il convient cependant d’être conscient que les périmètres servant de référence au calcul de ce taux sont parfois sujettes à caution. Ainsi, dans le mode de calcul utilisé pour calculer le coefficient d’encadrement de l’armée de terre, sont intégrés à la fois les élèves de polytechnique et les pilotes d’hélicoptère, dont le grade d’officier ne correspond pas toujours à des postes d’encadrement. Par ailleurs, si l’on considère l’armée de terre dans son ensemble, le coefficient d’encadrement est plus proche de 12%, pour un objectif fixé à 16%. Il convient donc d’être vigilant sur le fait de ne pas bloquer trop largement les perspectives de carrière par des critères trop restrictifs.

S’agissant de la structure des emplois civils, un repyramidage sensible des effectifs de catégorie A a été enregistré depuis 2009 notamment sous l'effet du processus de « civilianisation » des fonctions soutien. Toutefois, cette augmentation du poids relatif de la catégorie A ne fait que replacer le personnel civil de la défense dans la moyenne des administrations de l’État. De plus, comme le rappelle un récent rapport de l’Inspection générale des finances et du Contrôle général des armées sur le repyramidage des effectifs et la gestion du titre 2 du ministère de la défense, le phénomène est également lié à l'importance des mesures de requalification, financées par l'intermédiaire du plan catégoriel, et des créations d'emploi dans la fonction « connaissance et anticipation ».

L'émergence de nouveaux métiers et l’élévation de la technicité requise dans les emplois d'administration et de soutien ainsi que les créations d’emploi dans le domaine du renseignement justifient en effet, aux yeux du Rapporteur spécial, la poursuite du renforcement en part relative des catégories A et B au sein de la population civile durant la prochaine LPM.

C. LES MESURES D’ACCOMPAGNEMENT ASSOCIÉES AUX RESTRUCTURATIONS

Les suppressions d’effectifs, les dissolutions de régiments ainsi que la nécessité d’accompagner les personnels militaires dans leur retour à la vie civile, supposent l’existence d’outils et de financement adaptés. En 2014, 195,2 millions d’euros seront consacrés aux mesures d’accompagnement, dont 113,8 millions d’euros au profit du personnel militaire au titre des aides au départ et à la mobilité.

Sur l’ensemble de la période, des outils financiers d’incitation au départ et à la mobilité, selon un plan financé à hauteur de 933 millions d’euros, seront mobilisés. Quatre mesures seront proposées en particulier au personnel militaire : la « promotion fonctionnelle », la pension afférente au grade supérieur, le pécule d’incitation au départ et la « disponibilité rénovée »

1. De nouvelles rationalisations de sites

Jusqu’en 2013, l’adaptation capacitaire des armées s'est traduite par la fermeture de 13 états-majors, de 19 régiments-bataillons, de 12 bases aériennes dont 4 outre-mer, de 4 escadrons de chasse (Mirage F1 et Mirage 2000), ainsi que par le retrait du service actif de 14 bâtiments de la marine nationale et la fermeture de 3 bases aéronavales et établissements de l’aéronautique navale.

Ces restructurations vont se poursuivre dans le cadre de la nouvelle LPM. Elles concerneront en 2014 deux régiments et quatre sites de l’armée de l’air. Il s'agit tout d’abord du 4ème régiment de dragons (RD), installé depuis 2009 sur le camp militaire de Carpiagne, près de Marseille, qui compte 1 000 militaires et civils. Le 1er régiment étranger de cavalerie (REC), composé de 900 légionnaires et installé à Orange depuis 1967, s’installera dans le même temps à Carpiagne.

Concernant les sites de l’armée de l'air, il s’agit de la base aérienne (BA) 116 de Luxeuil-les-Bains, en Haute-Saône, qui va perdre "Servance", son escadron de défense sol-air, soit quelque 200 hommes, et qui va connaître une baisse de l’activité de ses Mirage 2000-5 de défense aérienne. L’activité aérienne permanente de la BA 102 de Dijon sera quant à elle arrêtée. Elle abrite notamment un escadron d’entraînement sur Alpha jet qui sera transféré à Cazaux en Gironde. 350 militaires et 15 civils vont ainsi partir. Par ailleurs, l’emprise du détachement air 277 de Varennes-sur-Allier va être fermée entre l'été 2014 et l'été 2015. 236 personnes y travaillent, dont 98 civils. Enfin, l’unité de commandement de la BA 279 de Châteaudun dans l’Eure-et-Loir sera transformée en un « élément air » rattaché à la BA 123 d’Orléans-Bricy, ce qui représente 100 effectifs en moins.

Ces réductions d’effectifs feront l’objet de mesures d’accompagnement pour un coût total sur la période 2014-2019 de 933 millions d’euros, dont 113,8 millions d’euros dès 2014. Des mesures spécifiques d’aide au départ seront mises en œuvres tant pour le personnel militaire que civil et porteront principalement sur le renforcement de la reconversion pour les militaires, l’incitation financière au départ (1 500 militaires et 400 civils par an), l’incitation à la mobilité, et le reclassement dans les fonctions publiques avec un potentiel de 2 100 par an pour le personnel militaire. Pour les militaires, ces mesures concernent également la promotion fonctionnelle, la pension afférente au grade supérieur (PAGS) et le pécule d’incitation au départ. Pour les civils, le dispositif vise à favoriser la mobilité interne au ministère et vers les autres fonctions publiques et comporte un volet incitatif aux départs volontaires. Parmi ces mesures, on trouve notamment le complément spécifique de restructuration pour les fonctionnaires et les agents non titulaires recrutés pour une durée indéterminée ou encore une indemnité de conversion versée aux ouvriers de l’État.

PROGRAMME D’ACCOMPAGNEMENT DES RESTRUCTURATIONS EN PLF 2014

Mesures

Nombre de bénéficiaires

2014

IDV Ouvriers de l'État

400

30 000 000

IDV Fonctionnaires et agents sur contrat

70

3 150 000

IDV Création d'entreprise

30

472 595

Mobilité du Personnel civil

1 025

24 210 000

Charges sociales

 

769 291

S/Total PAR "hors chômage"

58 601 886

Chômage PAR

 

16 025 925

S/Total PAR "avec chômage"

74 627 811

DISPOSITIF D'AIDE AU DÉPART/Outre-mer et Étranger (DAD/OME)

2 400 000

TOTAL PAR

77 027 811

Source : ministère de la Défense.

2. Un accompagnement des territoires renforcé

En outre, un budget de 150 millions d’euros est prévu pour les mesures d’accompagnement au profit des territoires les plus affectés. Cette somme proviendra pour les deux tiers du fonds pour les restructurations de la défense (Fred), et pour le reste du fonds national d’aménagement et de développement du territoire (FNADT).

L’accompagnement des sites reposera sur les contrats de redynamisation de site de défense (CRSD), élaborés sous l’égide du préfet conjointement avec l'ensemble des collectivités territoriales concernées, par les services de la Datar et de la délégation à l’accompagnement des restructurations (DAR). Un dispositif de prêt participatif de revitalisation (reprise et développement) au bénéfice de PME situées dans les territoires affectés par les restructurations de défense sera également mis en place avec le soutien de BPI France, dans la continuité de l’action actuelle de la société Sofired (Société de financement pour la réforme et le développement chargée d’accompagner les externalisations du ministère), et en association avec le ministère de la Défense.

Enfin, un accompagnement des cessions immobilières est prévu, pour permettre une reconversion des sites par la réalisation de projets d'aménagement urbain ou de développement économique.

D. LA RÉFORME DE L’ENVIRONNEMENT INFORMATIQUE DE GESTION DES RESSOURCES HUMAINES APRÈS LE « DÉSASTRE » LOUVOIS

La réforme du logiciel unique à vocation interarmées de la solde (LOUVOIS) est également une étape essentielle vers une meilleure maîtrise de la masse salariale.

1. L’impact financier des dysfonctionnements : un coût important et non stabilisé

Les dysfonctionnements de Louvois ont perturbé l’ensemble du système de gestion des soldes depuis 2011. En effet, près de 70 000 personnels ont perçu des soldes irrégulières ou n’ont pas été payés du tout. Le stock de trop-perçus atteindrait près de 133 millions d’euros à l’issue de la solde de janvier 2013 selon un rapport conjoint de l’Inspection générale des finances et du Contrôle général des armées publié en mai 2013. À l’inverse, 11 000 soldes à zéro ont été enregistrées à cette même époque. Six mois plus tard, en juin 2013, 1 850 dysfonctionnements étaient toujours enregistrés. Louvois a donc touché 10 % des personnels de l’armée et nécessité en décembre 2012 une rallonge budgétaire de 204 millions d’euros à seule fin de pouvoir payer les soldes des militaires.

À ce jour, le système Louvois est loin d’être stabilisé et fait courir un risque d’insuffisance de 300 millions d’euros sur l’exécution 2013 qui se décompose ainsi :

– conditions de dénouement comptable et budgétaire des opérations de fin 2012 pour environ 50 millions d’euros ;

– lenteur et incertitude de recouvrement des indus pour environ 130 millions d’euros ;

– nouveaux trop-perçus constitués en 2013 au même rythme du fait de la poursuite de la déficience du système, pour environ 10 millions d’euros par mois soit 120 millions en année pleine.

Le Rapporteur spécial s’inquiète vivement de la persistance de problèmes concernant Louvois et considère qu’il n’est pas acceptable que le ministère de la Défense soit le seul employeur public à ne pouvoir rémunérer certains de ses fonctionnaires en temps et en heure.

Cependant, il est nécessaire de souligner que le déploiement de Louvois s’inscrit dans un projet plus général de rationalisation des fonctions RH et solde du ministère de la défense. L’objectif était de faire converger les systèmes d’information et les processus RH des différentes armées et services vers un calculateur unique pour la solde du personnel militaire. Louvois est donc inscrit au centre d’un écosystème reliant, en amont, les SIRH des armées et services (à terme fusionnés dans un SIRH ministériel unique SOURCE), et en aval, CHORUS. Les dysfonctionnements constatés ne sont pas dû, uniquement au logiciel LOUVOIS qui n’est que le révélateur emblématique des problématiques liées à la mise en œuvre d’une solution de solde à l’échelle du ministère. Les origines de ces perturbations sont de natures multiples, ce qui rend les responsabilités particulièrement confuses :

– le calculateur lui-même comporte des anomalies, qui ont été reconnues tant par le ministère de la Défense que par l’architecte du système, la société Steria ;

– le pilotage par la DRH-MD n’était pas adapté à l’ampleur du projet, notamment en raison de son caractère cloisonné : le manque de coordination entre les différents services, directions (notamment commissariats aux armées) et armées de la chaîne RH-solde a affaibli la direction du projet ;

– les risques et les contraintes ont été mal appréciés pour un projet d’une telle ampleur. La Commission de la Défense a relevé quatre contraintes qui ont particulièrement pesé sur la bonne implantation de Louvois : la fermeture des centres de soldes dans le cadre des déflations d’effectifs ont déclenché un phénomène de fuite des compétences ; la dégradation rapide des anciens logiciels ; le mauvais cadencement des réformes qui a exercé une forte pression en termes d’effectifs, de compétences et de temps passé ; et enfin les délais peu adaptés à l’ampleur du projet.

2. Des perspectives incertaines à ce jour

Le ministère de la Défense a pris des mesures d’urgence au profit des administrés et s’est attaché à résoudre les dysfonctionnements structurels du projet.

Pour remédier immédiatement aux erreurs affectant les soldes des militaires, un plan ministériel d’urgence a été institué, afin de corriger les moins-versés. Les services concernés ont vu leurs effectifs renforcés, que ce soient les centres expert ressources humaines (CERH) d’armée ou les services techniques informatiques (service ministériel de service d’information et de fonctionnement/CMIS). Un centre d’appel a également été ouvert au profit des administrés.

Au-delà du traitement des cas individuels, la fiabilisation du système RH-solde impose d’achever l’harmonisation des processus RH (les entrants, les faits générateurs), mais aussi de procéder à :

– une définition claire des responsabilités au sein du projet fragilisé par la multiplicité des acteurs (armée, interarmées, service du Commissariat des armées, Mission SIRH, etc.) ;

– un pilotage unifié du changement ;

– la résolution des difficultés d’interfaçage liée à la variété des SI en place ;

– la mise en place de procédures de contrôle interne (métier, comptable et budgétaire).

Les décisions concernant le maintien de Louvois doivent être prises d’ici la fin de l’année 2013. Trois voies de sorties apparaissent possibles : continuer avec Louvois en concentrant tous les moyens disponibles sur le redressement ; mettre en place un autre progiciel, ce qui prendrait au minimum trois ans ; gérer mois après mois la solde en ramenant l’armée de terre au système antérieur pendant que les erreurs sont corrigées. La troisième option a été écartée par le ministère tandis que la Direction générale des systèmes d’information et de communication devait se prononcer en octobre sur les deux autres.

Le Rapporteur spécial s’inquiète de l’absence de perspectives claires sur ce sujet, qui pousserait notamment des services tels que la gendarmerie nationale ou l’armée de l’air à vouloir sortir du système alors que le service de santé des armées et la Marine y sont déjà entrés. Si de telles défections étaient avérées, cela aboutirait à remettre en cause la cohérence et surtout l’ambition initiale du projet.

E. LE RENFORCEMENT DE LA FONCTION FINANCIÈRE AU SEIN DU MINISTÈRE

La fonction financière du ministère de la défense a fait l’objet d’importantes réformes ces dernières années : en particulier, la clarification de la gouvernance et des processus, le renforcement de l’expertise et de la maîtrise des risques, la rationalisation de l’exécution financière grâce au déploiement de Chorus et la mutualisation des soutiens, permettent d’anticiper une réduction des effectifs de l’ordre de 40 % sur l’exécution financière.

En dépit de ces avancées, l’organisation de la chaîne budgétaire et financière est restée complexe. La coexistence au sein de la fonction financière de trois types d’autorités (organiques, fonctionnelles et budgétaires) génère des lenteurs dans le retraitement de l’information au détriment de l’expertise des facteurs d’évolution et de la solidité financière des dossiers ; elle a également freiné certains chantiers de modernisation, comme l’urbanisation des systèmes d’information ou la dématérialisation.

Le ministre de la Défense a donc décidé, en juin 2013 le lancement d’une nouvelle réforme, qui, tout en poursuivant les chantiers déjà lancés, met l’effort sur la simplification de l’organisation et des processus. Le scénario retenu est celui de la rationalisation du pilotage financier central en renforçant l’autorité fonctionnelle de la direction des affaires financières sur l’ensemble des services financiers du ministère, notamment les services en charge du pilotage budgétaire, du contrôle interne comptable et budgétaire et les services exécutant la dépense publique. Trois principaux axes seront privilégiés.

Le premier est l’ajustement de la répartition des compétences et responsabilités entre les acteurs, à mener pour chacun des exercices financiers : programmation pluriannuelle, préparation du budget et suivi de gestion, suivi du titre 2, contrôle interne, production des comptes… Cet ajustement s’effectuera en conformité avec les prérogatives de la direction des affaires financières et des responsables budgétaires définies dans le décret du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique.

Le deuxième axe concerne les modalités d’application de l’autorité fonctionnelle de la DAF sur les services financiers, qui impliquera une traduction juridique dans les textes d’organisation des services financiers. Cette autorité se traduira par la capacité à donner des instructions à l’ensemble des services financiers sur ses domaines de compétence.

Le dernier axe est celui de la simplification de l’organisation et des processus. Il s’agit en premier lieu d’une nouvelle étape de rationalisation des services exécutant la dépense publique, chantier intégré au programme ministériel de modernisation et de simplification (PMMS) s’appuyant fortement sur la dématérialisation (notamment des factures et de la constatation du service fait). La simplification de l’architecture budgétaire du ministère est un second volet (réduction du nombre de BOP et d’UO). Le dernier volet concerne la revue de l’ensemble des processus financiers, en vue de leur simplification, voire de leur dématérialisation.

III. L’AFFECTATION DES CRÉDITS PROFITE ESSENTIELLEMENT AUX ACTIVITÉS OPÉRATIONNELLES

L’activité opérationnelle, c’est-à-dire la capacité des forces à s’entraîner, à maîtriser les matériels qui sont mis à leur disposition et à pouvoir en disposer quand cela est nécessaire, a été érigée en objectif prioritaire par la nouvelle loi de programmation militaire après avoir connu une évolution à la baisse dans la période récente.

Il s’agit d’une dimension à part entière de la crédibilité du modèle d’armée et de l’une des clés de son efficacité. La LPM prévoit ainsi une hausse des crédits bénéficiant à l’activité et à l’entraînement des forces, afin de maintenir l’activité opérationnelle à un niveau compatible avec les exigences d’une armée professionnelle.

Le programme 178 Préparation et emploi des forces constitue le cœur des activités opérationnelles du ministère de la défense : préparation, mise sur pied et emploi des armées, des directions et des services interarmées. Ainsi, bien que l’acquisition des matériels relève du programme 146 Équipement des forces, le programme 178 en constitue le cadre d’emploi, ce qui recouvre à la fois la préparation des personnels et l’entretien programmé des matériels entrés en service.

A ce titre, ce programme, le plus important sur le plan des effectifs et des moyens budgétaires, est sous l’autorité directe du chef d’état-major des armées (CEMA). Outre ses responsabilités en matière d'emploi opérationnel des armées, le CEMA est ainsi garant de la cohérence dans le choix et la constitution des capacités opérationnelles, et de l’état de préparation des forces.

A. UN MAINTIEN GLOBAL DES CRÉDITS SUR LE PROGRAMME 178

1. Évolution générale des crédits programme 178

Le programme 178 regroupe près de la moitié des crédits et plus des trois quarts des ressources humaines du ministère. Le PLF 2014 consacre la stabilité des ressources affectées au programme 178. Les autorisations d’engagement, s’élevant à 22,6 milliards d’euros, sont en légère baisse de 1,60 % par rapport à 2013, tandis que les crédits de paiement se maintiennent à 22,2 milliards d’euros soit une très légère baisse de 1,02 %.

Le plafond d’emplois du programme atteint 241 332 ETPT, ce qui traduit la poursuite de la baisse des effectifs à hauteur de 8 890 ETPT. Cette évolution se décompose comme suit :

– des suppressions nettes d’emplois à hauteur de – 6 918 ETPT au titre de la diminution des effectifs dans la trajectoire de la nouvelle LPM 2014-2019 ;

– des créations d’emplois à hauteur de + 20 ETPT

– 1 821 ETPT au titre de la correction technique du plafond d’emploi 2014 ;

– des transferts à destination des autres programmes de la mission pour un solde de – 84 ETPT (transfert des RH d’armées vers la DRH-MD, création d’une structure de préfiguration du futur pôle des SIRH, contrôleurs de coût, transfert du SIAé vers le programme 212 au titre de la fonction gestion adminsitrative-paye) ;

– des suppressions d’emplois au titre des externalisations, se matérialisant par des transferts du titre 2 ou titre 3 pour un total de 81 ETPT (soutien de la flotte d’avions-école Xingu, centre national du sport de la défense, fonction de réseau de desserte IP, etc.).

Les dépenses de personnels s’établissent à 15,24 milliards d’euros, contre 15,53 milliards d’euros en LFI 2013, ce qui constitue une légère baisse de 1,84 %. Hors dépenses de pension, les crédits de masse salariale baissent de 2,54 % passant de 9,33 milliards d’euros à 9,09 milliards d’euros.

2. Évolution des ressources par actions

Le programme Défense est organisé autour de 7 actions. Les moyens alloués à ces actions concernent essentiellement des dépenses de personnel (Titre 2) ainsi que des dépenses relatives à l’entretien programmé du matériel (EPM), problématique majeure qui fait l’objet d’un traitement spécifique dans ce rapport.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS DU PROGRAMME 178 PAR ACTION

(en millions d’euros)

Actions

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

LFI 2013

PLF 2014

Variation 2013/2014 (en %)

LFI 2013

PLF 2014

Variation 2013/2014
(en %)

1. Planification des moyens et conduite des opérations

1 612

1 555

–3,54 %

1 605

1 580

–1,56 %

2. Préparation des forces terrestres

7 830

7 565

–3,38 %

7 659

7 520

–1,81 %

3. Préparation des forces navales

4 274

4 605

7,74 %

4 308

4 456

3,44 %

4. Préparation des forces aériennes

4 760

4 444

–6,64 %

4 356

4 332

–0,55 %

5. Logistique et soutien interarmées

3 942

4 059

2,97 %

3 862

3 854

–0,21 %

6. Surcoûts liés aux opérations extérieures

630

450

–28,57 %

630

450

–28,57 %

7. Surcoûts liés aux opérations intérieures

11

11

0,00 %

11

11

0,00 %

Total pour le programme

23 059

22 689

–1,60 %

22 431

22 203

–1,02 %

Source : Projet annuel de performance Défense 2014.

Action 1 : Planification des moyens et conduite des opérations

La finalité de l’action est la planification des moyens concourant à l’emploi des forces et à la conduite des opérations militaires. Pour conserver son autonomie de décision et d’action, la France doit disposer de capacités propres d’appréciation de situation, de commandement et de conduite des opérations ; la conduite des opérations militaires extérieures et des missions intérieures requiert des structures permanentes de commandement interarmées pouvant être utilisées dans un cadre interalliés ou interministériel.

Les crédits de paiement représentent 1,58 milliard d’euros, en baisse de 1,56 % tandis que les autorisations d’engagements connaissent une baisse plus marquée de 3,54 % pour atteindre 1,55 milliard d’euros, ce qui correspond à la réduction programmée des effectifs d’encadrement.

Au sein de cette action, la France maintient ses contributions dans les dispositifs militaires multinationaux, notamment en matière de commandement :

– mise à disposition d’un poste de commandement multinational stratégique, au Mont Valérien, au profit de l’Union européenne ;

– participation à la capacité de réaction rapide « Nato Response Force » (NRF) de l’OTAN, ce qui nécessite l'entretien des certifications obtenues par les états-majors français de niveau tactique (terre, mer, air et forces spéciales), avec 60 millions d’euros de contribution au fonctionnement de l’OTAN et 60 millions d’euros de contribution aux investissements.

– participation à la capacité de réaction rapide de l’Union européenne et son dispositif de groupement tactique 1 500 (Battle Group 1 500).

Action 2 : Préparation des forces terrestres

Cette action, la plus importante de la mission, représente, avec 7 520 millions d’euros en crédits de paiement et 7 564 millions d’euros en autorisations d’engagement, plus du tiers des ressources du programme. Elle regroupe plus de 40 % des dépenses de titre 2, soit 6 342 millions d’euros, et des effectifs du programme.

L’action a pour finalité le maintien de l’aptitude de la composante terrestre à assurer dans un cadre interarmées national ou multinational les missions qui lui sont confiées, au niveau requis, selon le tempo des contrats opérationnels :

– contribuer aux opérations de gestion de crise ou de gestion de conflit régional majeur, participer au maintien d’un dispositif international de consolidation de la paix et conserver la capacité à conduire de façon autonome une opération d’évacuation de ressortissants ;

– constituer le volet terrestre du dispositif de prévention outre-mer et à l’étranger ;

– participer aux opérations de protection sur le territoire national par le renforcement de la sécurité générale ou la suppléance des services publics

Les moyens inscrits sont en baisse de 1,81 % en crédits de paiement et de 3,38 % en autorisations d’engagement par rapport à la LFI 2013. Cette diminution concerne essentiellement les crédits de titre 2 (– 2,82 %), qui comprennent le transfert de 86 postes vers d’autres BOP et la suppression de 2 683 postes au titre de la réforme du ministère.

Action 3 : Préparation des forces navales

Les moyens prévus pour permettre à la marine d’accomplir ses missions représentent environ 20,3 % des crédits du programme, soit 4 456 millions d’euros en crédits de paiement, en hausse de 3,44 %, et 4 605 millions d’euros en autorisations d’engagement, en hausse de 7,8 %. L’augmentation des crédits de paiement et des autorisations d’engagement est principalement consacrée à l’entretien programmé du matériel (cf. infra).

La finalité de l’action est de maintenir l’aptitude de la marine nationale à assurer les missions qui lui sont confiées. La marine nationale contribue à la dissuasion nucléaire par la mise en œuvre des sous-marins nucléaires lanceurs d’engins (SNLE) et de sa composante aéronavale embarquée sur le porte-avions Charles de Gaulle.

Dans le domaine de la fonction stratégique connaissance-anticipation, le milieu aéromaritime permet de s’approcher sans entrave au plus près des zones d’intérêts et de recueillir avec discrétion une information précise en flux continu. Il offre également aux unités de la marine une plus grande liberté d’action dans le cadre de la fonction stratégique intervention.

Le Rapporteur spécial s’est attaché à analyser le risque de rupture capacitaire qui pourrait survenir dans le domaine des patrouilleurs de haute mer, élément indispensable à la surveillance et à la protection de l’espace maritime français (11 millions de km2, soit le deuxième espace maritime au monde). Cette problématique fait l’objet d’un traitement spécifique dans la cinquième partie de ce rapport.

Action 4 : Préparation des forces aériennes

Les moyens prévus pour l’armée de l’air s’inscrivent en légère diminution de 0,5 % par rapport à 2013 en crédits de paiement, avec 4 332 millions d’euros, tandis que les autorisations d’engagement, s’élevant à près de 4 444 millions d’euros, sont en baisse de 6,6 %, essentiellement du fait de l’évolution des moyens dévolus à l’entretien des matériels (cf. infra).

Les dépenses de titre 2 poursuivent leur baisse (– 1,8 %), ce qui reflète l’important effort de réduction d’effectifs réalisé par l’armée de l’air, proportionnellement plus grand que les autres forces armées : sur la période 2008-2015, l’armée de l’air perd ainsi près de 25 % de ses personnels.

La finalité de l’action est de maintenir l’aptitude de l’armée de l’air à assurer les missions qui lui sont confiées. Ces missions s’inscrivent dans le cadre des trois priorités de la stratégie de défense énoncées dans le Livre blanc de la défense et la sécurité nationale de 2013 (protection, dissuasion et intervention).

Au titre de la dissuasion nucléaire, l’armée de l'air assure en permanence la mise en œuvre de la composante aéroportée. Cette mission nucléaire mobilise des avions de combat, de ravitaillement en vol, de surveillance aérienne (système de détection et de commandement aéroporté – SDCA –) et des systèmes de défense sol-air pour sa protection.

L’armée de l'air assure également la protection aérienne du territoire national et des populations grâce à la diversité de ses moyens (moyens de détection, d’identification et autres vecteurs aériens) en surveillant en permanence son espace aérien et ses approches.

Par ailleurs, dans le cadre d’une opération de coercition majeure, l’armée de l’air doit projeter une force d’intervention capable d’entrer en premier sur un théâtre d’engagement non permissif. À ce titre, elle doit déployer un volume d’avions de chasse suffisant pour garantir en continu la protection de la force, pour apprécier la situation tactique et stratégique et enfin pour produire un large spectre d’effets militaires, souvent dans la profondeur et sur des objectifs de portée stratégique, opérative ou tactique.

Action 5 : Logistique et soutien interarmées

Les moyens inscrits sont maintenus en crédits de paiement (– 0,21 %) et progressent nettement (3 %) en autorisations d’engagement. La hausse provient principalement des moyens hors titre 2 alloués aux bases de défense, lesquels passent de 686 millions d’euros en 2012 à 831 millions d’euros en 2014 en autorisations d’engagement, tandis que les crédits de paiement sont stables, pour permettre à ces nouvelles structures de faire face à leurs missions dans de bonnes conditions (voir infra). Toutefois, cette progression est largement due à un facteur technique, la notification de marchés forfaitaires pluriannuels pour le gaz et l’électricité sur la période 2015-2017.

Action 6 : Surcoûts liés aux opérations extérieures

Les crédits affectés aux opérations extérieures sont en baisse de 180 millions d’euros, soit près de –30 %, alors même que la France a connu un pic d’engagement extérieur, notamment dans le cadre de l’opération Serval au Mali. Le redimensionnement de l’enveloppe affectée aux opérations extérieures, dans le cadre de la LPM, appelle des remarques particulières du Rapporteur spécial (voir infra).

B. MAINTENIR L’ACTIVITÉ DES FORCES : UN OBJECTIF AFFIRMÉ ET DES MOYENS RENFORCÉS

1. Des crédits en hausse pour l’entretien programmé des matériels (EPM)

Au titre de la priorité accordée à l’activité opérationnelle par la LPM, l’EPM fait l’objet d’une attention renouvelée. Les efforts consentis en 2014, dans la poursuite de ceux entamés en LFI 2013, se traduisent par une augmentation des crédits de paiement consacrés à l’EPM de 155 millions d’euros (+ 5,5 % à périmètre comparable), pour un total de 3,1 milliards d’euros dans le PLF 2014. Ils intègrent notamment l’augmentation des coûts de maintenance liée à l’arrivée de matériels de nouvelle génération (Tigre, NH90, Rafale, VBCI…).

Sur la période 2014-2019, l’augmentation annuelle moyenne des crédits consacrés à l’EPM sera de 4,3 %.

ÉVOLUTION ET RÉPARTITION DES CRÉDITS D’EPM (Y COMPRIS DISSUASION)

(en millions d’euros courants)

 

LFI 2009

LFI 2010

LFI 2011

LFI 2012

LFI 2013

PLF 2014

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

EMAT

683

602

841

553

545

563

573

603

848

676

763

722

EMM

1 302

1 206

1 632

1 040

1 211

1 217

1 665

1 341

1 350

1 386

1 651

1 503

EMAA

1 577

1 201

1 123

1 104

1 498

1 101

1 333

1 170

1 653

1 246

1 366

1 275

Source : Ministère de la Défense.

Ce renforcement des crédits consacrés à l’EPM, qui a pour finalité de garantir aux forces une disponibilité accrue des matériels qu’ils emploient, est rendu nécessaire par plusieurs facteurs structurels qui participent à la hausse de son coût :

– facteurs économiques : le coût des facteurs (charges, matières premières), en hausse estimée de 17 % sur la période 2014-2019, est plus rapide que celle de l’inflation ;

– facteurs matériels : l'entrée en service d'équipements de haute technologie mais également le maintien en service de matériels anciens (traitement d'obsolescences, accroissement des pannes) ;

– facteurs stratégiques : les activités opérationnelles conduites dans le cadre des OPEX nécessitent un niveau d’EPM plus soutenu ;

– Facteurs réglementaires : modifications des matériels et processus de réparation plus encadrés (amiante, gaz à effet de serre, etc.), déconstructions et éliminations plus réglementées.

2. Évolution des crédits liés à l’EPM par armée

Pour les matériels terrestres, les autorisations d’engagement sont en baisse de 85 millions d’euros mais les crédits de paiement progressent nettement, passant de 675 à 722 millions d’euros. Le fait marquant de l’année 2014 sera l’entrée en vigueur du marché de soutien en service des véhicules blindés de combat d’infanterie (VBCI) qui devrait être notifié en décembre 2013. Hormis ce parc VBCI, les postes de dépenses les plus importants restent le soutien des chars Leclerc (94 millions d’euros, contre 101 en 2013), des VAB, des camions de la gamme RTD ainsi que le soutien des équipements du fantassin FELIN (fantassins à équipements et liaisons intégrés).

Pour les forces navales, les autorisations d’engagement sont en nette progression pour atteindre 1 650 millions d’euros (300 millions d’euros supplémentaires par rapport à la LFI 2013). Les crédits de paiement progressent également, passant de 1 386 à 1 503 millions d’euros. Cette progression des crédits vise notamment à permettre le maintien en condition opérationnelle des équipements de la force océanique stratégique (FOST). Ils servent ainsi à couvrir les arrêts techniques majeurs et les opérations d’entretiens courant des SNLE ainsi que l’entretien de certaines installations à terre de la FOST.

Hors dissuasion, la dotation en autorisations d’engagement pour 2014 inclut 358,5 millions d’euros pour la passation de marchés pluriannuels au profit de :

– l’EPM aéronautique : 168 millions envisagés concernant les flottes ATL2, NH90, les aéronefs destinés à la formation ainsi que des marchés transverses.

– l’EPM naval : 190,5 millions envisagés en 2014 concernant l’entretien des torpilles, les frégates, des bâtiments de projection et de commandement ainsi que de la composante guerre des mines.

Concernant les matériels aéronautiques, l’année 2014 verra également la montée en puissance du soutien du NH 90 (30 millions d’euros contre 13 en 2013) et des Tigre HAD (54 millions d’euros en crédits de paiement et 130 millions en autorisation d’engagement, soit une hausse de 23 millions par rapport à 2013) dans le périmètre du programme 178.

Pour les forces aériennes, enfin, les AE sont en baisse de près de 300 millions d’euros, pour atteindre 1 366 millions, tandis que les CP sont stabilisés autour de 1 275 millions d’euros. Les crédits consacrés à l’entretien programmé des matériels des forces aériennes stratégiques, dans le cadre de la dissuasion nucléaire, sont maintenus à leur niveau de 2013 à 100 millions d’euros. Ceux-ci se répartissent équitablement entre les Mirage 2000N et leurs ravitailleurs C135.

Hors dissuasion, les moyens restant sont alloués à des programmes d’entretien incluant notamment :

– l’entretien des flottes aériennes hors RAFALE, dont les autorisations d’engagement baissent nettement du fait d’une dotation de 286 millions d’euros en 2013 destinée à couvrir les engagements pluriannuels au titre de divers contrats (SOCATA, EADS CASA, etc.). Les parcs concernés contiennent les avions de chasse, de transport tactique (en baisse de plus de 60 %), de support, d’entraînement, les hélicoptères les systèmes de drones (qui chutent de 25 à 10 millions d’euros) et enfin les systèmes d’information et de communication.

– l’entretien du parc de RAFALE : 150 millions en 2013 au titre du contrat RAFALE CARE.

3. L’activité opérationnelle : un concept plus pertinent que la disponibilité

Le Rapporteur spécial se réjouit que le concept d’activité opérationnelle s’impose, dans le cadre de la LPM, face au concept traditionnel de disponibilité des équipements.

À cet égard, les indicateurs représentatifs des activités majeures que sont les jours de préparation opérationnelle de l’armée de terre, les heures de vol des pilotes de chasse de l’armée de l’air et les jours de mer des bâtiments de la marine seront en 2014 à leur niveau de 2013, tel qu’il peut aujourd’hui être anticipé.

Certains points nécessitent néanmoins une attention particulière. C’est le cas dans le domaine de l’activité aéronautique pour les hélicoptères, l’aviation de transport, la patrouille maritime et les avions de chasse de la marine. Sur la période 2014-2015, le projet de LPM prévoit une stabilisation globale de l’activité à un niveau comparable à celui de 2013, soit 15 % en deçà des normes correspondant à une armée professionnelle. L’effet attendu des réformes qui seront engagées dans le domaine du soutien conjugué à l’effort financier consenti au profit de l’EPM sur la période 2014-2019 devraient néanmoins permettre au niveau d’activité de tendre vers les normes d’activité reconnues dans le cadre UE/OTAN à l’horizon 2016.

L’indicateur 5.1 « niveau de réalisation des activités et de l’entraînement » est le plus pertinent pour analyser et prévoir l’activité des matériels dans les différentes armées. En 2014, cet indicateur voit le libellé de son sous-indicateur 5.1.1 revu pour prendre en compte le nouveau référentiel des activités de l’armée de terre : journées de préparation opérationnelle (JPO) à la place de la journée de préparation et d’activités opérationnelles (JPAO) qui comptabilisait les activités de préparation opérationnelles et celles relevant des OPEX et MISSINT.

Il s’agit désormais de ne présenter que les activités liées à la préparation opérationnelle dont le périmètre est exclusivement celui de l’armée de terre (les mises en condition avant projection, les jours consacrés à la préparation opérationnelle générique et les jours de formation individuelle). Le tableau ci-dessous présente le niveau de réalisation des activités et de l’entraînement pour les différentes armées.

INDICATEURS RELATIFS À L’ACTIVITÉ OPÉRATIONNELLE DES FORCES

 

Unité

2012
Réalisation

2013
Prévision PAP 2013

2013
Prévision actualisée

2014
Prévision

Jours d’activités par homme Terre "JPO" (anc "JPAO")

j

(109 JPAO)

83 JPO

(105 JPAO)

83 JPO

(118 JPAO)

83 JPO

Heures de vol par pilote d’hélicoptère Terre

h

1701

172

160

156

Heures de vol par pilote de chasse Air

h

169

160

150

150

Heures de vol par pilote de transport Air

h

265

260

280

230

Heures de vol par pilote d’hélicoptère Air

h

199

195

190

160

Jours de mer par bâtiment Marine

j

89 (98)

88 (97)

88 (97)

86 (94)

Heures de vol par pilote de chasse Marine

h

167 (196)

180 (220)

175 (210)

150 (180)

Heures de vol par pilote d’hélicoptère Marine

h

220

220

202

180

Heures de vol par pilote de patrouille maritime Marine

h

328

350

360

288

Source : projet annuel de performances 2014.

4. La nécessité de maintenir le nombre de journées d’activité au-dessus de 100 pour l’armée de terre

Dans la perspective de la loi de programmation militaire (LPM) 2014-2019, l’armée de terre a proposé de faire mieux correspondre les JPO au périmètre effectivement financé par l’action 2 Préparation des forces terrestres. Ainsi les JPO nouveau modèle, toutes financées par cette action, couvrent la formation, l’instruction et l’entraînement, les MCP (2)et les MCD (3), et représentent le niveau de préparation opérationnelle atteint. Un objectif de 90 JPO nouveau modèle constitue le niveau de préparation opérationnelle requis pour tenir le contrat opérationnel de l’armée de terre dans la durée.

Les JAO pour leur part, couvrant les OPEX et les MISSINT, représentent l’expérience opérationnelle acquise. La somme des deux, correspondant au nombre de JPAO, représente le niveau global d’aptitude opérationnelle de l’armée de terre. La LPM 2009-2014 prévoyait une norme à 150 JPAO. Cet objectif s’inscrivait dans la perspective d’un engagement maximal des forces. Dans les conditions du moment, cette cible a été fixée en 2010 autour de 120 jours puis réévaluée régulièrement pour garantir la capacité d’intervention d’urgence de 5 000 hommes et l’exécution des opérations en cours ou prévisibles.

Les conditions d’engagement des forces et les contraintes financières sur l’entretien programmé des matériels (EPM) et l’activité ont ainsi conduit à ramener la prévision de cette norme à 111 JPAO en 2012 (78 JPO + 33 JAO) et à 105 en 2013 (83 JPO + 22 JAO). La baisse des JAO résulte du désengagement programmé des théâtres majeurs (RCI, Afghanistan, Liban). Elle a été compensée partiellement par un effort en JPO en 2013, au moyen d’un abondement du BOP « Préparation des forces terrestres », permettant ainsi de maintenir le niveau d’aptitude opérationnelle de l’armée de terre à un niveau garantissant strictement la capacité d’intervention d’urgence de 5 000 hommes et l’exécution des opérations en cours ou prévisibles.

Activité aéroterrestre :

Les enseignements des récentes opérations (en particulier HARMATTAN et SERVAL) ont amené l’armée de terre à revoir la cible des heures de vol (HdV) à la hausse, pour permettre leur engagement immédiat en opérations sans préalable supplémentaire, en particulier s’agissant de l’aptitude au vol tactique de jour comme de nuit. Parallèlement, le choix a été fait de ne plus intégrer la simulation dans le mode de calcul des HdV, celles-ci n’offrant pas les mêmes avantages en termes d’entraînement tactique et pour faciliter les comparaisons avec les autres armées. La nouvelle cible est donc de 180 HdV hors simulation, ce qui correspond à la limite basse des normes de l’OTAN.

SYNTHÈSES DES ACTIVITÉS :

Année

JPAO (JPO + JAO)

HdV

Réalisé 2012

109 (77 + 32)

170 (simulation comprise)

Prévision 2013 initiale

105 (83 + 22)

172

Prévision 2014

83 JPO

156

2015 : norme LPM

90 JPO

180

Objectifs fixés LPM 09-14

150 JPAO

180 (simulation comprise)

Objectifs proposés LPM 14-19

90 JPO

180 (hors simulation)

Source : projet annuel de performances 2014.

5. Une activité aéronavale sous contrainte pour la marine

En 2014, le niveau d’activité des bâtiments devrait être proche des prévisions actualisées 2013. Celui des pilotes de chasse de l’aéronavale devrait en revanche connaître une diminution ponctuelle. Pour les hélicoptères, la disponibilité des appareils (en particulier les Panther et les Caïman) ne permettra pas d'atteindre l'activité initialement prévue en 2013.

Pour les avions de patrouille maritime, leur emploi soutenu au Mali conduira à réaliser en 2013 une activité supérieure à la prévision initiale. Cette tendance devrait s’inverser sensiblement en 2014.

Il convient cependant de souligner que la disponibilité technique des navires de surface devra pendre en compte les arrêts techniques majeurs (ATM) prévus sur la période de la future LPM sont :

– SNLE « Terrible » (2018/2019)

– SNA « Emeraude » (2014/2015) puis « Améthyste » (2016/2017)

– PA/CdG (2017/2018) – mi vie

– FASM « Latouche Tréville » (2016)

– FASM « La Motte Picquet » (2016/2017)

– FDA « Chevalier Paul » 2013/2014

– FAA « Cassard » 2014

– FLF « Aconit » 2014

– BPC « Mistral » 2013

– BPC « Dixmude » 2016

6. L’activité des forces aériennes pour partie tributaire de la disponibilité des équipements

L’activité aérienne de l’armée de l’air répond à trois objectifs majeurs :

– la satisfaction des contrats opérationnels ;

– la préparation des forces (toutes armées confondues) ;

– la formation du personnel naviguant.

Les objectifs individuels annuels sont fixés à 180 heures pour les équipages chasse, 400 heures pour les pilotes de transport et 200 heures pour les pilotes hélicoptères (LPM). En 2014, l’effort portera sur l’activité de l’aviation de chasse qui restera à son niveau de 2013. Le maintien de l’équilibre entre préservation des compétences et formation des jeunes équipages sera un enjeu majeur. Les compétences les plus complexes ne seront entretenues que par un socle restreint d’équipages afin de conserver une capacité à remonter en puissance.

 Mesure

Objectifs LPM

Activité moyenne 2012

Prévision actualisée 2013

Prévision

2014

Prévision

2015

Activité moyenne des équipages chasse

(heures de vol/an)

180

169

150

150

180*

Activité moyennes équipages transport

(heures de vol/an)

400

265

280

230

400*

Activités moyennes équipages hélicoptère (heures de vol/an)

200

199

190

160

200*

Besoins activité totale AA en heures de vol

(heures de vol)

 

215 900

214 000

208 600

206 900

Activité totale prévue (financée)

(heures de vol)

 

195 000

185 300

171 600 (prévisions)

171 600 (prévisions)

Activité réellement effectuée

(heures de vol)

 

183 100

     

* la cible 2015 correspond à la norme d’activité prévue en LPM. Il ne s’agit pas d’une prévision.

En 2013, l’engagement au Mali a accru les tensions logistiques et la disponibilité en métropole pour la chasse et l’aviation de transport. Pour les équipages de transport, les prévisions actualisées 2013 tiennent compte de l’opération Serval (+ 20 heures de vol). Cet accroissement masque de grandes disparités de qualification entre les équipages.

Comparaison avec l’Allemagne et le Royaume Uni :

La comparaison des niveaux d’activité doit être maniée avec beaucoup de prudence. En effet, il est difficile de reconstituer des périmètres identiques de calcul et, d’autre part, le volume des missions et de l’entraînement associé fluctue très sensiblement d’un pays à l’autre.

COMPARAISON DES NIVEAUX D’ACTIVITÉ DE L’ARMÉE DE L’AIR
AVEC L’ALLEMAGNE ET LE ROYAUME-UNI

Type d’activité

France

(2012)

Allemagne

(2012)

Royaume-Uni

(2012)

Heures de vol par pilote de chasse

169

125

180

Heures de vol par pilote de transport

265

135

180 à 350

Heures de vol par pilote d'hélicoptère

199

75

environ 200

Source : projet annuel de performances 2014.

Le niveau d’activité des équipages français reste comparable à ceux des équipages de l’armée de l’air britannique. Les Allemands sont à un niveau très inférieur sur le plan de l’activité. Le niveau d’activité atteint par l’armée de l’air française en 2012 est ainsi proche des normes OTAN.

7. Les OPEX constituent un défi majeur pour la disponibilité et l’activité du matériel

Les OPEX pèsent de deux manières sur les activités des forces. En volume, elles déterminent directement le nombre de JAO. Un désengagement des OPEX entraîne une baisse des JAO, qu’il importe de compenser par une hausse relative du nombre de JPO, afin de préserver le niveau global d’aptitude opérationnelle des forces. À l’opposé, une hausse des engagements OPEX entraîne une hausse des JAO, comme observé au 1er semestre 2013 suite au déclenchement de SERVAL, ce qui contribue à garantir le niveau d’entraînement des autres unités si le nombre de JPO est maintenu.

D’autre part, les OPEX provoquent de fortes tensions sur les parcs de matériels, aux dépens de la qualité de la préparation opérationnelle (50 % des rotations en centres d’entraînement se font actuellement en mode dégradé, faute de moyens organiques suffisants). Ainsi, le surcoût prévisionnel 2013 pour les équipements employés par l’armée de Terre dans les opérations extérieures, s’élève à 138 millions d’euros.

Il comprend :

– 52 millions d’euros pour l’entretien programmé des matériels des matériels terrestres ;

– 44,2 millions d’euros pour l’entretien programmé des matériels des matériels aéroterrestres ;

– 27,6 millions d’euros pour les équipements du combattant et les vivres opérationnels ;

– 12,7 millions d’euros pour les munitions ;

– 1,5 millions d’euros pour le carburéacteur.

ENCADRÉ : INCIDENCE DES OPÉRATIONS EXTÉRIEURES SUR L’ACTIVITÉ 2012 ET 2013
DES FORCES AÉRIENNES

 

Activité moyenne 2012

Activité 2012 réalisée en OPEX

Activité 2013 réalisée en OPEX

Chasse

169

16 %

26 %

Transport

265

25 %

44 %

Hélicoptère

199

17 %

16 %

Drone

72

20 %

100 %

Soutien Ops

   

71 %

Après une année 2011 principalement marquée par l’opération Harmattan, l’année 2012 constitue une pause relative dans l’engagement OPEX, avec des taux d’activité en OPEX entre 15 et 20 % pour l’ensemble des flottes, sauf pour le transport, traditionnellement plus employé que les autres flottes, en raison notamment du pré-positionnement à l’étranger d’un nombre important d’appareils. L’incidence des OPEX sur l’activité en 2013, avec la surconsommation engendrée par l’opération Serval, sera bien supérieure.

Toutefois, les OPEX offrent une plus-value inestimable en termes d’amélioration des capacités opérationnelles des armées. En effet, le retour d’expérience permet en particulier de progresser dans les domaines de l’interopérabilité, de la validation et de l’évolution des doctrines, des entraînements, des processus et des équipements. De même, les opérations développent l’aguerrissement du personnel, et donc son efficacité au combat, ainsi que l’amélioration de la transmission des savoir-faire, dans le respect des règles d’engagement.

C. LE MAINTIEN EN CONDITION OPÉRATIONNELLE : UN ENJEU MAJEUR POUR LES PROCHAINES ANNÉES

La disponibilité technique est le résultat de plusieurs facteurs dont les principaux sont les ressources financières allouées, la pérennité des systèmes de soutien et l’organisation du maintien en condition opérationnelle. Si ce critère ne doit pas prendre le pas sur l’évaluation de l’activité opérationnelle des forces, il n’en demeure pas moins une de ses composantes.

1. Une maintenance de plus en plus coûteuse pour les équipements modernes.

On constate depuis plusieurs années une tendance à la baisse de la disponibilité des matériels des armées. La problématique de la maintenance va par conséquent devenir un véritable enjeu de pilotage pour le ministère de la défense au cours des prochaines années. Selon un rapport conjoint du contrôle général des armées et de l’inspection générale des finances, le coût global du maintien en condition opérationnelle (MCO) doit augmenter de 8,7 % entre 2010 et 2014, essentiellement du fait des matériels de la marine et de l’armée de l’air, avec des augmentations respectives de 16 % et 10 %.

Deux facteurs structurels d’augmentation doivent être pris en considération.

En premier lieu, la sophistication croissante des équipements entraîne un coût de maintenance moyen qui oscille entre 45 et 60 % du coût d’achat initial. Pour les avions les plus performants, cela peut aller jusqu’à deux fois le prix d’achat. Ceci est également vrai pour certains matériels de l’armée de Terre (53 millions d’euros ont été nécessaires pour le MCO des 500 VBCI en 2013). Par ailleurs, les besoins de la marine augmenteront également de manière sensible à partir de 2016-2017, en raison du second arrêt technique du porte-avions et de l’entrée en service progressive des frégates multimissions.

Par ailleurs, l’évolution du coût de MCO, en particulier pour le matériel aéronautique, varie tout au long de la durée de vie des matériels. En effet, les premières années de mise en service caractérisées par une faible activité initiale, conjuguée à une fiabilité progressive des équipements (phase d’apprentissage). Cette phase d’apprentissage s’accompagne d’un coût de soutien important lié à la mise en place des moyens de soutien, de la formation des personnels et de l’acquisition de l’expérience indispensable à l’amélioration de la productivité de la maintenance. Puis vient une période de maturité, marquée par un fonctionnement nominal de l’appareil et par des coûts de soutien stabilisés, qui peuvent éventuellement varier à la suite des opérations de rénovation ou de modifications majeures. Enfin, une dernière période dite de « fin de vie » où l’âge de l’aéronef nécessite des efforts supplémentaires de maintenance pour faire face à des pannes plus fréquentes et à des obsolescences. Cette phase se traduit généralement par des coûts de soutien croissants.

Ainsi, le Rapporteur spécial tient à souligner que les reports de livraison des matériels nouveaux augmentent indirectement le coût du soutien en allongeant leur phase d’apprentissage et en obligeant au maintien en service de matériels en fin de vie pour répondre globalement aux contrats opérationnels.

2. Une évaluation périodique du coût prévisionnel du MCO est nécessaire

Il convient dès lors d’être conscients que les choix opérés au travers de la LPM 2014-2019, concernant la réduction de la cadence de livraison de certains équipements (A400M, Tigre, NH90, Rafale), ont un double impact sur le coût du MCO durant cette période (et pour la période post LPM) : allongement de la phase de d’apprentissage des premiers matériels livrés (A400M) et report du retrait de services des matériels anciens.

Ainsi, bien que la disponibilité des matériels paraisse globalement satisfaisante à l’heure actuelle, le Rapporteur spécial souhaite souligner le fait que cette situation pourrait être remise en cause dans les années à venir si les coûts de maintien en condition opérationnelle (opération essentielle à l’entretien du matériel et donc à sa disponibilité) ne sont pas maîtrisés. En effet, les crédits de MCO demandés chaque année en loi de finances, au sein du programme Préparation et emploi des forces, représentent des volumes élevés, de l’ordre de 3,8 milliards d’euros en autorisations d’engagement et 3,3 milliards d’euros en crédits de paiement pour l’année 2013 si l’on inclue la dissuasion. Les moyens alloués sont d’ailleurs en hausse d’environ 7 % par rapport à 2012, ce qui reflète la priorité accordée à cette question par le ministère de la défense.

Il convient donc de procéder à une évaluation régulière, telle qu’elle est prévue par la LPM, des coûts de MCO pour les années à venir afin de procéder aux ajustements nécessaires.

Cet enjeu majeur pour la préservation de l’activité opérationnelle a en outre conduit le Rapporteur spécial à s’intéresser de près aux structures chargées de l’entretien des matériels au sein de chaque armée, à l’heure où des choix cruciaux doivent être pris concernant l’autonomie accordée à ces structures.

D. UNE AFFIRMATION NÉCESSAIRE DES STRUCTURES INTÉGRÉES DE SOUTIEN

Les moyens des services de l’État chargés du maintien en condition opérationnelle, présentés ci-dessous, doivent être renforcés pour relever le défi de la disponibilité.

Ce renforcement doit d’abord permettre d’améliorer la position du ministère de la Défense dans les négociations des contrats d’entretien signés avec les industriels ainsi que d’accroitre sa capacité à contrôler les coûts.

En dehors de la Délégation générale pour l’armement (DGA), trois structures doivent ainsi être l’objet d’une attention particulière. Elles sont présentées dans l’encadré ci-dessous :

La structure intégrée du maintien en condition opérationnelle des matériels terrestres (SIMMT) a été créée en octobre 2010. Elle compte 798 agents en 2012. Elle conçoit, contractualise et pilote la maintenance des équipements et en assure la logistique. La SIMMT a repris les missions de la direction centrale du matériel de l’armée de terre (DCMAT) qu’elle exerce désormais pour l’ensemble des armées et des services du ministère.

Les marchés de maintenance qu’elle passe consistent principalement en l’achat de pièces de rechange pour les véhicules militaires mais aussi en achat de prestations de maintenance d’équipements complexes comme les chars Leclerc ou les véhicules blindés de combat d’infanterie (VBCI). Elle a consommé 500 M€ de crédits budgétaires en 2011.

Le service du soutien de la flotte (SSF) a été créé en juin 2000 pour assurer la maîtrise d’ouvrage de la maintenance des bâtiments de surface et des sous-marins de la Marine nationale. Son effectif est de 788 agents en 2012. Il achète des services de réparation et d’entretien de navires pour 840 M€ en 2011.

La structure intégrée de maintien en condition opérationnelle des matériels aéronautiques (SIMMAD) a été créée en décembre 2000, alors que le taux de disponibilité des aéronefs militaires était très dégradé. Elle dispose d’un effectif de 977 agents en 2012. La SIMMAD achète des prestations d’entretien et de réparation pour tous les matériels aéronautiques militaires des trois armées (moteurs, transmissions, et autres sous-systèmes des aéronefs, télémétrie, canons, systèmes de conduite de tir, etc.) pour un montant total de 1,75 Md€ en 2011.

1. Renforcer la position des structures chargées de la maintenance dans les négociations et le contrôle

Il convient d’abord de réfléchir à l’asymétrie d’informations qui existe entre le commanditaire qu’est l’État et les fournisseurs que sont les groupes industriels. En effet, les fournisseurs, qui connaissent les matériels qu’ils ont livrés précédemment, savent dès l’automne (au moment du projet de loi de finances), le montant dont disposera le service pour, par exemple, entretenir les aéronefs de l’armée de terre au cours de l’année à venir. Certains experts ont pu associer cette situation à une forme de « droit de tirage » au profit des industriels, qui ne les inciterait pas à proposer les meilleurs prix mais leur permettrait de caler leurs offres par rapport aux crédits votés. Il est donc important, pour contrebalancer cette situation, d’une part d’encourager les mises en concurrence dans les domaines où cela est possible et, d’autre part, de professionnaliser les services acheteurs du ministère de la défense et de les étoffer.

On constate par exemple que le volume moyen des contrats rapportés au nombre d’agents correspond à 8 millions d’euros par acheteur pour la structure intégrée du maintien en condition opérationnelle des matériels terrestres (SIMMT) (qui compte 66 agents acheteurs) et à 83 millions d’euros pour la structure intégrée du maintien en condition opérationnelle des matériels aéronautiques (SIMMAD) (qui ne compte que 21 agents). Par comparaison, les services acheteurs des ministères allemands, anglais ou américains de la défense sont largement plus étoffés et mieux armés, en termes de capacité d’enquête et d’expertise, que leurs homologues français. Le Rapporteur spécial estime donc nécessaire de renforcer les personnels spécialisés des trois structures intégrées de soutien, afin de renforcer leur poids dans les négociations avec les industriels.

En outre, il faudrait intégrer dans la réflexion le coût global de possession de ces équipements, c'est-à-dire en incluant la maintenance future dans la décision d’achat initiale. L’effort pour renforcer les synergies entre services acheteurs et services de maintenance doit donc être poursuivi et amplifié.

Dans ce cadre, les trois structures que sont la SIMMT, la SIMMAD et le SSF sont de plus en plus associées en amont à l’évaluation du « coût global de possession » des matériels, notamment au niveau de leur contact avec la DGA. Les allers-retours de certains personnels entre la DGA et les structures intégrées renforcent la construction de cette relation entre achat initial et MCO.

Les structures intégrées ont en outre ouvert à la concurrence l’ensemble des marchés d’entretien possibles, à l’exception de ceux relatifs à l’entretien des matériels complexes (matériels utilisant l’énergie nucléaire) et de dissuasion. En tant que principe du code des marchés publics, la question de mettre en concurrence se repose ainsi à chaque renouvellement de contrat en fonction du contexte et du besoin à satisfaire. Ainsi, le SSF a ouvert le MCO des A69, autrefois confié à DCNS sans mise en concurrence, à la concurrence (et emporté par CNN MCO) suite à la transformation de ces navires, devenus moins armés et donc moins complexes.

Le même constat peut être fait en matière aéronautique, à travers les exemples suivants :

– MCO des avions ravitailleurs C135 FR et KC135R (2007) : le contrat de MCO des 14 avions ravitailleurs de l’armée de l’air a été notifié en 2007, après mise en concurrence, à la société Sabena Technics. Le marché précédent avait été notifié en 2002 à la société Air France Industries après négociation sans mise en concurrence.

– Équipements THALES du RAFALE, marché MAESTRO (2011) : ce marché a été notifié pour une durée de 10 ans, avec une tranche ferme de 4 ans. Il globalise tous les équipements « B » des entités Thalès. Ce marché est novateur car ce n’est plus un marché de réparation, c’est un marché de service où l’Etat achète une disponibilité de matériels au site d’emploi.

– Externalisation XINGU (2011) : cette opération a été conduite par la SIMMAD après une étude de faisabilité des états-majors, il s’est agit d’externaliser le MCO de la flotte Xingu Air et Marine, ainsi que des entraineurs. L’Etat investit pour disposer d’une capacité. Le marché est un marché de service, d’acquisition d’heures de vol, pour la formation et la liaison. La procédure de dialogue compétitif a permis de dégager les éléments essentiels à une démarche « gagnant-gagnant » : durée du marché de 15 ans pour maîtriser la fin de vie de la flotte, avec durée de la tranche ferme de 5 ans ; mutualisation air-marine de la flotte ; optimisation du parc mutualisé. Le présent marché remplace 13 marchés de MCO. La Mission Partenariat Public Privé (MPPP) du SGA a validé la rentabilité de l’externalisation.

Le Rapporteur spécial appuie néanmoins l’ensemble des chefs d’état-major sur le fait que ces structures doivent conserver leur indépendance et leur autonomie, notamment par rapport à la DGA, afin de rester un instrument aux mains du CEMA qui doit pouvoir décider de privilégier tel ou tel matériel au regard de ses contraintes opérationnelles. Cette souplesse est nécessaire pour rendre concrète la priorité donnée à l’activité opérationnelle dans le cadre de la LPM. En effet, le regroupement de ces fonctions autour de la DGA pourrait conduire à privilégier la disponibilité générale des matériels plutôt que l’activité opérationnelle.

Enfin, lorsque cela est possible, par exemple dans le cadre de programmes en coopération, il faut chercher à obtenir la mutualisation des efforts de maintenance avec les autres pays qui détiennent le même équipement, ceci afin de réaliser des économies d’échelle, et d’obtenir des prix plus favorables. On peut citer par exemple le cas de l’A 400 M, programme en coopération réunissant sept pays, pour lequel une solution commune de soutien pour tous ces pays a été étudiée même si elle n’a pas abouti. La coopération franco-britannique dans ce domaine peut être une solution d’avenir.

2. La relation avec le SIAé

Le service industriel de l’aéronautique joue également un rôle majeur, notamment en lien avec la SIMMAD, son principal client. Le SIAé bénéficie d’une expertise technique, gage de satisfaction du besoin des forces et garantie d’autonomie de l’Etat dans le domaine du MCO aéronautique, au regard de la concurrence d’une part et de prestations que les fournisseurs privés ne réaliseraient pas (matériels d’ancienne génération, microflottes,…).

Il réalise des prestations que des industriels privés ne réaliseraient pas et répond aux besoins urgents des forces (pas nécessairement dimensionnant d’un point de vue financier). En tant que maître d’ouvrage délégué, la SIMMAD décline les objectifs des états-majors (prévisions d’emploi des aéronefs) en engagements dans des contrats internes ou des lettres de commande passés avec le SIAé (576 millions d’euros en 2012).

La logique industrielle du SIAé consiste à rechercher la prise de compétences sur les matériels nouveaux. Cette logique doit rejoindre celle du ministère de disposer d’une expertise technique sur les matériels qu’il met en œuvre en opération.

L’évolution de la gouvernance du SIAé, sous forme d’un conseil de surveillance permettra de mener les études nécessaires aux prises de décision concernant ces prises de compétence (investissements particuliers, phasage,…). Un rapprochement avec la DGA peut également être envisagé.

3. Le processus de « métropolisation » : faire face aux conséquences des OPEX au niveau de l’entretien des matériels

Le Rapporteur spécial souhaite enfin qu'une attention particulière soit portée à la question de la « métropolisation » des matériels engagés sur les théâtres d’opération extérieurs, qui se pose de manière particulièrement sensible pour la SIMMT et la SIMMAD. Les coûts de réparation générés par les OPEX sont trois à quatre fois plus élevés que ceux générés par les opérations en France. À leur retour en métropole, les matériels sont en général inutilisables car ils ont été mis à l’épreuve dans des conditions extrêmes à plusieurs niveaux :

– vitesse de réparation, de déblocage et de livraison des pièces considérablement accélérée ;

– maintenance effectuée directement sur le théâtre d’opération ;

– surintensité dans l’utilisation des matériels qui implique un niveau d’endommagement plus élevé qu’en utilisation normale.

– environnement naturel plus éprouvant pour le matériel.

Surcoûts générés par l’OPEX SERVAL pour la SIMMT

Si l’engagement au Mali n’a pas encore eu d’impact visible sur la disponibilité globale des parcs, la priorité donnée à cette opération devrait avoir des conséquences, à moyen terme, tant sur la capacité opérationnelle que sur les besoins en ressources.

Les efforts consentis pour la préparation des matériels avant projection et pour le soutien direct des forces (PSP et OPEX) ont mobilisé de nombreuses ressources en hommes et en pièces détachées dédiées initialement à la production du parc de gestion qui alimente le système. À titre d’exemple, en six mois, les 192 VAB qui représentent 6 % du parc de l’armée de Terre, ont nécessité un réapprovisionnement à hauteur de 10 % de la consommation annuelle du parc complet pour une disponibilité de 78 %.

Les opérations en cours de régénération des équipements de retour de PAMIR et de DAMAN (phase dite de « métropolisation ») prennent du retard en raison de la priorité donnée à l’OPEX qui crée une réelle tension sur les approvisionnements.

À plus long terme, l’engagement au MALI devrait également faire apparaître une usure accélérée des équipements en raison de l’intensité des opérations, du fort potentiel consommé et des contraintes environnementales ou climatiques propres à ce théâtre. Cela créera de facto une charge importante de maintenance pour régénérer les parcs lors de leur relève ou de leur désengagement.

Sur le plan budgétaire, les dépenses de maintenance engagées dans le cadre de l’opération se font donc en partie au détriment des activités en métropole : consommation des capacités de maintenance et des approvisionnements notamment pour les autonomies initiales de projection qui sont des réserves de pièces correspondant à une période d’engagement définie pour une force donnée.

Ces dépenses, évaluées entre 10 et 13 M€ par an et engagées en avance sur les ressources programmées hors OPEX, devraient être en partie remboursées par le décret d’avance (DA) OPEX, après identification des surcoûts (coûts supplémentaires par rapport à une activité normale) mais seulement en fin d’année.

Les véhicules avant blindés (VAB), pièces maîtresses du dispositif terrestre lors d’une opération extérieure, sont particulièrement mis à l’épreuve alors que leur parc est vieillissant. Leur remplacement par leur successeur, le Véhicule blindé multirôle (VBMR), a été retardé, ce qui allonge la durée de vie des matériels, leur coût de maintenance et affecte potentiellement leur performance au combat. Selon les estimations de la SIMMT, seuls 10 à 15 millions de crédits supplémentaires par an sur cinq ans seraient nécessaires à la remise en état de ces matériels dans le cadre de la « métropolisation » survenue après l’Afghanistan et le Mali.

Sur l’ensemble du matériel, ce processus pourrait être accompli grâce à une enveloppe de 50 millions d’euros par an sur cinq ans. Face aux économies potentielles générées par l’amélioration du dispositif de « métropolisation », le Rapporteur spécial estime nécessaire de prolonger la réflexion en ce sens.

E. LA NOUVELLE GESTION DES SURCOÛTS LIÉS AUX OPÉRATIONS EXTÉRIEURES : UN ÉQUILIBRE FRAGILE

Si la priorité donnée à l’activité des forces, plutôt qu’à la disponibilité des équipements, est un objectif majeur de la nouvelle LPM, c’est également en raison de la forte sollicitation des armées dans le cadre des opérations extérieures (OPEX).

Le Rapporteur spécial remarque néanmoins une diminution de l’enveloppe annuelle consacrée aux opérations extérieures, qui représente 450 millions d’euros dans la LPM (et donc dans le PLF 2014) contre 630 millions d’euros entre 2008 et 2013. Si cette réduction de l’enveloppe est conforme à un certain nombre de désengagements opérationnels, à commencer par le retrait des forces d’Afghanistan et la réduction du dispositif français au Mali (Serval futur), elle est néanmoins sources d’inquiétudes.

1. Les engagements militaires de la France en 2013 ont eu un impact budgétaire important

On observe ainsi que l’enveloppe de 630 millions d’euros prévus en 2013 au titre des opérations extérieures s’avère largement sous-dimensionnée, bien que, par nature, la décision d’intervenir au Mali dans le cadre de l’opération Serval ne pouvait être anticipée. En 2013, Serval aura concentré la priorité de l’effort en opération extérieure, tant sur le plan des effectifs (47 % du personnel engagé) que des moyens (51 % des dépenses tous théâtres confondus).

Sur le plan financier, les surcoûts de l’opération sont en cours de consolidation mais devraient excéder nettement 500 millions d’euros. Le transport devrait ainsi représenter plus de 20 % du surcoût global 2013 de notre intervention. Par ailleurs, engagés dans des conditions climatiques et de nature de terrain extrêmes, le personnel comme le matériel auront été très fortement sollicités. Il peut ainsi être précisé que des effets de protection adaptés (effets saison chaude) ont dû être distribués aux militaires engagés et ont nécessité des dépenses en entretien programmé du personnel (EPP) similaires à celles qui avaient été engagées en Afghanistan les années passées. Par ailleurs, l’ampleur des moyens engagés (4), l’intensité de l’engagement et les conditions d’emploi du matériel sont à l’origine d’un surcoût important en entretien programmé du matériel (EPM). En effet, les avions et les véhicules déployés ont subi des élongations importantes en raison des fortes chaleurs et des terrains très sablonneux, ce qui a généré des dépenses en EPM et en carburant particulièrement élevées (162 millions d’euros et 67 millions d’euros) ;

2. La provision pour les opérations extérieures devrait être mieux anticipée

Au total, le coût lié aux opérations extérieures devrait atteindre 1,25 milliard d’euros en 2013. Le Rapporteur spécial ne peut donc que constater une nouvelle fois le dépassement de l’enveloppe prévue : depuis 2008, les surcoûts issus des opérations extérieures ont toujours dépassé 850 millions d’euros.

La prévision établie dans le cadre de la LPM au titre des opérations extérieures semble donc très optimiste au regard des tensions actuelles, notamment en Afrique centrale.

SURCOÛTS ANNUELS OPEX 2013

(en millions d’euros)

     

Prévisions 2013

     

Titres 2 et 3

Titre 5

Titre 6

Total

général

Zone

Théâtre

Opération

RCS

Alim.

Fonct.

Sous Total

Europe

Kosovo

TRIDENT

12,1

0,3

22,6

35,0

0,0

0,6

35,6





Afrique

Tchad

EPERVIER

33,5

1,5

71,6

106,6

0,0

0,0

106,6

RCA

BOALI- MICOPAX

14,3

2,2

5,0

21,5

0,0

0,0

21,5

RCI

LICORNE

32,3

3,2

29,5

65,1

0,0

0,0

65,1

 

Mali

SERVAL

160,4

2,0

474,1

636,5

0,0

0,0

636,5

EUTM MALI

5,0

0,0

2,8

7,8

0,0

2,3

10,1

Océan indien

ATALANTE

13,0

0,8

8,7

22,5

0,0

3,0

25,5

Asie

Liban

DAMAN

33,9

2,4

25,3

61,6

0,0

0,0

61,6

Afgha-nistan

PAMIR HERACLES EPIDOTE

44,3

1,6

148,3

194,2

0,0

64,4

258,6

Autres opérations

10,1

7,0

18,6

35,7

0,0

0,5

36,2

Total

359,0

21,0

806,5

1 186,5

0,0

70,9

1 257,3

Source : ministère de la Défense.

Il semble toutefois qu’un compromis ait été trouvé en faveur du ministère de la Défense. Ce compromis résulte du fait qu’à l’avenir, les surcoûts nets non couverts par la dotation de 450 millions d’euros, qui viendraient à être constatés sur le périmètre des opérations extérieures maintenues en 2014, seront financés sur le budget de la mission « Défense ».

En revanche les surcoûts nets, hors titre 5 et nets des remboursements des organisations internationales, non couverts par cette dotation et qui résulteraient d’opérations nouvelles, de déploiements nouveaux ou de renforcements d’une opération existante en 2014, devront faire l’objet d’un financement interministériel.

Si ce compromis est satisfaisant du point de vue du ministère de la Défense, qui ne sera donc pas pénalisé sur ces ressources propres en cas d’OPEX non anticipées, il convient d’être vigilant à ce que les dépassements réguliers de l’enveloppe ne représentent pas un coût supplémentaire global pour les finances publiques, qui serait d’autant plus lourd que les crédits consacrés aux OPEX seraient réduits.

IV. LA POURSUITE DES RÉFORMES DE STRUCTURE AU SEIN DU MINISTÈRE

Le ministère de la défense s’est engagé dans un programme de modernisation et de simplification (PMMS) qui permettra d’atteindre les objectifs capacitaires et la cible de réduction d’effectifs définis par le Livre blanc, dans le cadre financier qui sera arrêté par la loi de programmation militaire d’ici la fin de l’année. Entre 2008 et 2012, les économies de fonctionnement cumulées sont déjà évaluées à environ 600 millions d’euros. Le Rapporteur spécial est conscient des inquiétudes, exprimées à maintes reprises lors des auditions qu’il a menées, concernant les efforts demandés aux armées dans le cadre de la diminution des dépenses de fontionnement. Si les marges actuelles semblent limitées, des réformes en profondeur devraient néanmoins permettre de générer 100 millions d’euros d’économies supplémentaires en 2014.

Le programme 212 Soutien de la politique de la défense constitue le cadre privilégié de ces réformes. Il est doté en PLF 2014 de 3 603 milliards d’euros en autorisations d’engagement et de 3 221 milliards d’euros en crédits de paiement. Il convient cependant de souligner que les crédits d’investissement au profit des infrastructures de la défense augmentent de 15,9 % pour un total de 950 millions d’euros hors dissuasion (1 040 millions d’euros avec dissuasion), dont 206 millions d’euros de recettes exceptionnelles liées aux cessions immobilières attendues et près de 60 millions d’euros de crédits d’investissement au profit du logement familial.

A. LE PROGRAMME 212 SOUTIEN DE LA POLITIQUE DE DÉFENSE : PROGRAMME CLÉ DANS LA RÉFORME ORGANISATIONNELLE DES ARMÉES

Pour mener à bien la réforme du ministère et les réductions d’effectifs qui l’accompagnent, certaines directions fonctionnelles, notamment le secrétariat général pour l’administration (SGA), voient leurs moyens renforcés dans le cadre du projet de loi de finances pour 2014, ce qui explique la progression des crédits, hors titre 2, inscrits sur le programme 212 (1 804 millions d’euros contre 1 629 millions d’euros en loi de finance initiale 2013). Dans le même temps, les crédits de titre 2 sont légèrement inférieurs que l’an passé, en raison des rationalisations d’effectifs, notamment au sein des opérateurs.

En contrepartie, le programme 212 respecte l’objectif gouvernemental de réduction en 2014 des dépenses de fonctionnement malgré l’existence de dépenses incompressibles. Les efforts ont principalement porté sur les fonctions support et les subventions pour charges de service public des opérateurs.

PRÉSENTATION DES CRÉDITS DU PROGRAMME 212
DANS LES LOIS DE FINANCES DE 2012, 2013 ET PLF 2014

Source : projet annuel de performances 2014.

1. Un renforcement du SGA nécessaire au pilotage de la réforme du ministère

Le programme 212, sous la responsabilité du Secrétaire général pour l’Administration (SGA), assure le soutien général du ministère afin de permettre aux armées de se consacrer à leur cœur de métier. Le SGA, dont le budget en 2014 s’établit à 2,74 milliards d’euros hors pensions, bénéfice de moyens budgétaires en augmentation de 6,3 % par rapport à 2013 pour piloter les nouveaux chantiers de fiabilisation des ressources humaines et de réorganisation des fonctions soutien.

Plusieurs missions prioritaires lui sont confiées :

● Conduire l’évolution du ministère :

Le SGA poursuit l'accompagnement de la réduction ministérielle des effectifs, la rationalisation du déploiement des systèmes d'information, l'optimisation des budgets immobiliers, la mise en adéquation de l'offre et de la demande de logements, ainsi que la recherche d’une meilleure efficience de la fonction achats (hors armement). Une attention particulière sera portée sur le soutien de l'administration centrale en vue du regroupement des états-majors, directions et des services centraux à Balard.

● L’évolution de l’organisation et de la gouvernance du ministère de la défense :

Le SGA est particulièrement concerné par deux réformes transverses : la réforme de la fonction financière et celle de la fonction ressources humaines. Pour la fonction financière, l’autorité fonctionnelle de la direction des affaires financières sera renforcée sur l’ensemble des services financiers du ministère, traitant du pilotage budgétaire et de contrôle interne, ainsi que les services exécutants, avec notamment pour objectif d’améliorer la qualité de l’information financière. Pour la fonction ressources humaines, il a été décidé de confier à la direction des ressources humaines du ministère de la défense (DRH-MD) une autorité fonctionnelle renforcée sur l’ensemble de la politique « ressources humaines » du ministère et des organismes centraux chargés de ressources humaines (cf. supra). L’autorité fonctionnelle renforcée de la DRH-MD s’appuiera notamment sur une optimisation des organisations au sein du périmètre de la fonction ressources humaines et sur une redéfinition de l’architecture budgétaire et de gestion des crédits de titre 2 du budget de la Défense.

● Répondre aux besoins en infrastructure

Le SGA prend en compte, sous la responsabilité de la direction de la mémoire, du patrimoine et des archives (DMPA), et en lien avec le service d’infrastructure de la Défense (SID), les modifications du parc immobilier. Le budget 2014 hors titre 2 consacré à l’infrastructure présente un niveau de crédits de paiement de 1,14 milliard d’euros permettant la création ou l’adaptation des infrastructures d’accueil des nouveaux matériels, les nécessaires rénovations ou remises aux normes et le maintien en condition du patrimoine immobilier. Pour la bonne exécution de la programmation, ce budget est complété des ressources issues des cessions immobilières à hauteur de 206 millions d’euros.

C’est dans ce cadre que seront également conduits, en 2014, les investissements principaux accompagnant la montée en puissance des programmes HNG, VBCI, SCORPION, A400 M, RAFALE, MRTT. Des opérations importantes seront engagées dans les bases navales de Brest et de Toulon pour l’accueil des frégates FREMM et des sous-marins Barracuda, ainsi que pour la rénovation des réseaux électriques très anciens et inadaptés aux navires de nouvelle génération. Les investissements porteront aussi sur les chaussées aéronautiques. L’effort est maintenu par ailleurs sur les espaces d’entraînement de l’armée de terre, sur l’aide au logement du personnel civil et militaire, de même que sur la rénovation des hôpitaux des armées (plus de 30 millions d’euros au profit de la rénovation de l’hôpital Bégin).

● Poursuivre la rationalisation des systèmes d’information d’administration et de gestion

Le SGA définit la politique des systèmes d’information d’administration et de gestion (SIAG), fondée notamment sur la transformation des métiers d'administration et de gestion, sur la rationalisation du parc des applications informatiques indispensables et structurantes pour le bon fonctionnement du ministère et sur le développement de systèmes d'information logistique (SIL) qui participent au développement des structures intégrées de soutien logistique.

En 2014, le budget alloué aux SIAG (action 5) augmente de 26 millions d’euros par rapport au montant inscrit en loi de finances 2013. Ce complément de ressources est destiné à accentuer l’effort de transformation des principaux métiers du ministère, en particulier dans le domaine des ressources humaines et du soutien. Il permet également d’assumer les surcoûts des systèmes d’information de la chaîne RH-solde et notamment de poursuivre la résolution des difficultés liées à la mise en exploitation du système d’informations Louvois.

2. La rationalisation progressive des effectifs consacrés au soutien

La rationalisation des effectifs et des fonctions soutien s’organisent autour de la réforme du contrôle général des armées et de la montée en puissance du commissariat général aux armées.

a. Le contrôle général des armées (CGA)

Le CGA assiste le ministre de la défense pour sa gestion en vérifiant, dans tous les organismes soumis à son autorité ou à sa tutelle, l'observation des lois, règlements et instructions ministérielles ainsi que l'opportunité des décisions et l'efficacité des résultats au regard des objectifs fixés et du bon emploi des deniers publics.

Pour le PLF 2014, l’action 11 du programme 212, consacrée notamment au CGA, représente 385,57 millions d’euros (dont 117,06 millions d’euros de CAS Pensions). Le tableau ci-dessous présente une estimation des dépenses de personnel de 2013 et 2014 pour le CGA.

 

LFI 2013

PLF 2014

Titre 2 (en M€)

Hors CAS « Pensions »

15,84

15,63

CAS « Pensions »

9,71

9,56

Total

25,56

25,22

Source : contrôle général des armées.

PLAFOND D’EMPLOIS AUTORISÉ (PEA)

 

2013

2014*

2015*

Emplois autorisés

(en postes)

200

195

185

*prévisions qui dépendent du soutien mutualisé qui sera mis en place à Balard.

De 2014 à 2015, le CGA prévoit en outre, dans le cadre du regroupement à Balard des administrations centrales et de la mise en œuvre de la réforme globale du ministère, le transfert ou la suppression d’environ une quinzaine de postes (principalement de soutien).

b. Le service du commissariat aux armées (SCA)

Le SCA poursuit sa transformation tout en consolidant ses nouvelles expertises. Le service poursuit une très importante rationalisation, correspondant à une déflation de 40 % de ses effectifs historiques et au passage de 93 établissements à 34 d’ici à 2014. En 2013, la cible en organisation s’est établie à 4 595 ETP (1 489 militaires, 3 106 civils). L’évolution du périmètre du service liée aux transferts a été de – 119 ETP (résultant principalement du transfert du Centre de développement informatique du commissariat des armées vers la DIRISI le 1er janvier 2013). Pour 2014, la déflation actuellement programmée du SCA est de 128 postes. Elle devrait principalement viser des fonctions logistiques, notamment au travers de la fermeture de l’ELOCA de Bergerac. Par ailleurs, le périmètre en organisation du service sera modifié en 2014 du fait des transferts liés à la création de l’école du commissariat des armées (ECA) à Salon de Provence. Son effectif prévisionnel est de 85 postes (élèves inclus).

Il faut par ailleurs souligner le fait que les trois corps de commissaires de l’armée de terre, de la marine et de l’air ont été dissous au 1er janvier 2013. Les officiers membres de ces corps ont intégré le corps des commissaires des armées, corps de direction et de conception exerçant ses fonctions dans tous les domaines liés à l’AGSC. Du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2015, un dispositif spécifique permettra aux commissaires de l’armement, de l’armée de terre, de la marine, du SSA et du SEA, ainsi qu’aux officiers des bases de l’air et aux officiers du cadre spécial, d’intégrer le corps des commissaires des armées sur demande agréée par le ministre de la défense, après avis d’une commission. D'autres voies donneront accès aux corps des officiers spécialistes de l'armée de terre (COSAT), à celui des officiers logisticiens des essences (OLE), à celui des officiers spécialisés de la marine (OSM).

En outre, les missions du SCA vont évoluer en appui des bases de défense. Ainsi, l’établissement d’une autorité hiérarchique du SCA sur les groupements de soutien des bases de défense devrait permettre de renforcer les synergies en matière d’achat, de restauration, d’habillement ou d’équipements légers, pour l’ensemble des bases de défense.

3. Une interrogation persistante sur le prix des carburants

Le prix des carburants représente un facteur exogène contraignant pour les dépenses de fonctionnement des armées. Jusqu’en 2012, les cours constatés ont toujours été supérieurs aux hypothèses de construction budgétaire. Le début de l’année 2013 constitue une exception, les cours se situant à un niveau inférieur aux prévisions :

Cours du Brent constatés

2011

2012

1er semestre 2013

 

Baril en $

111,3

111,45

107,6

 

Parité € / $

1,39

1,28

1,31

 

Baril en €

80,0

87,07

82,1

 

Source : projet annuel de performances 2014.

Il en ressort une surconsommation des crédits alloués à cette action que la réduction de l’enveloppe prévue en 2014 ne prend pas en considération.

COMPARAISON DES RESSOURCES ET DES CONSOMMATIONS CARBURANTS OPÉRATIONNELS :

Carburants opérationnels (M€)

2011

2012

2013

2014

Ressources actions 2, 3 et 4

(hors OPEX)

430,3

525

565,6

511,29

Ressource initiale action 6

20,4

24

25

25

Attribution de produits

0,5

0

   

Décret d’avance OPEX

90

33,6

   

Clause de sauvegarde

0

58,3

   

Total ressource

541,2

640,9

   

Consommation actions 2, 3 et 4 et 6 (avec surcouts OPEX)

595,3

632,6

   

Atténuations de dépenses

–53,9

-2,8

   

Total dépense

541,4

629,5

   

Solde de gestion

-0,2

11,4

   

Source : projet annuel de performances 2014.

Les dépenses de carburants opérationnels sont estimées 2014 à 511,29 millions d’euros. Le tableau, ci-dessous, intègre les dépenses de carburants prévues dans le PAP 2014 :

BOP D'ARMÉES

Dépenses prévues en PAP 2014 (M€)

Action 02

TERRE

57 997 603

Action 03

MARINE

144 470 000

Action 04

AIR

308 820 000

TOTAL ARMÉES

511 287 603

Source : projet annuel de performances 2014.

Ce facteur de risque pour l’équilibre budgétaire du ministère doit être pris en considération.

4. La diminution des crédits nécessaires pour le fonctionnement courant

La reconfiguration de la carte militaire se poursuit, permettant de réduire la dispersion des implantations militaires, de favoriser les rapprochements entre unités devant opérer de manière conjointe, de générer des économies de fonctionnement et de participer à l’amélioration de la condition du personnel et de leur famille au travers d’une meilleure insertion sur le territoire. Les axes principaux de cette réforme sont :

– la professionnalisation des soutiens,

– la mutualisation des entités de services internes au sein de centres de service partagé, notamment en matière d’achats, de finances ou de ressources humaines,

– l’allégement des échelons de commandement et le recentrage de chaque entité sur son cœur de métier.

Grâce à ces réformes, les dépenses de fonctionnement courant, qui recouvrent les dépenses diverses de vie courante, les charges de soutien des structures ou encore les frais généraux, devraient connaître une nouvelle évolution à la baisse. À la suite de la création de la chaîne interarmées du soutien (OIAS) et des bases de défense (BdD), ces crédits de fonctionnement courant ont en grande partie été transférés par les armées au BOP « Soutien ». Le PLF 2014 répartit ainsi les dépenses de fonctionnement au sein de deux opérations stratégiques (OS) :

– « Activités opérationnelles » qui regroupe les dépenses d’activité, d’entraînement et de préparation opérationnelle des armées et services. Plus de la moitié de ces dépenses correspond à l’achat de carburant opérationnel dont le montant est susceptible d’évoluer fortement selon les hypothèses de construction budgétaire (prix du baril et parité euro/$). Cette OS porte également les crédits d’alimentation ;

– « Fonctionnement et activités spécifiques » qui regroupe les dépenses de fonctionnement proprement dites incluant aussi des dépenses de recrutement et de mise en formation.

Le projet de loi de finances 2014 prévoit une baisse de la dotation d’environ 90 millions d’euros sur les crédits de fonctionnement par rapport à la LFI 2013. La diminution constatée porte essentiellement sur le carburant opérationnel (54 millions d’euros), d’une part, et sur l’indemnité compensatrice SNCF (10 millions d’euros), d’autre part, ainsi que sur les dépenses de communication, d’alimentation, de transport, les frais de mutation et de déplacement. À titre d’exemple, la Délégation à l’information et à la communication sera réorganisée, avec une baisse de 33 % des personnels spécialisés.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS DE FONCTIONNEMENT (FAS ET AOP)

(en millions d’euros)

 

LFI 2012

LFI 2013

PLF2014

Armée de terre

425,45

372,24

361,54

Marine nationale

347,68

351,80

323,82

Armée de l'air

506,83

476,32

451,10

Total programme 178

2 293,59

2 314,26

2 206,49

Source : ministère de la défense

B. LA POURSUITE DE LA RATIONALISATION DES IMPLANTATIONS MILITAIRES

La réduction des dépenses de fonctionnement et de soutien s’opère également à travers la réorganisation fonctionnelle et territoriale du ministère de la défense, notamment autour de la montée en puissance des bases de défense.

1. La réorganisation des bases de défense

Une BdD correspond à une aire géographique au sein de laquelle les formations militaires bénéficient de soutiens mutualisés et coordonnés. Les commandants de base de défense assurent la responsabilité de l’administration générale et du soutien commun délivrés par les groupements de soutien de bases de défense (GSBdD). Ils assurent, en outre, la coordination locale des soutiens délivrés par les directions et services du ministère à ces formations et organismes (santé, essences, systèmes d'information et de communication, infrastructure...). Depuis le 1er janvier 2011, les bases de défense sont au nombre de 60 (51 métropole et 9 outre-mer et étranger). Elles rassemblent des formations et des unités de tailles et d’activités variées (régiment, école, état-major, centres de la DGA et organismes du SGA, etc.).

Contrairement aux précédentes réorganisations, conçues de façon organique et verticale, cette nouvelle organisation interarmées du soutien (OIAS) crée une chaîne horizontale interarmées destinée à regrouper près de 30 000 personnes à terme, dont une grande majorité de spécialistes, militaires et civils. Au regard de la nouvelle organisation de l’EMA, le sous-chef d’état-major « soutien » est le commandant interarmées du soutien (COMIAS). Dans ce cadre :

● Il exerce une autorité directe sur les commandants de base de défense (Com BdD) et les échelons intermédiaires expérimentaux. Il arbitre les décisions dans le domaine de l’administration générale et du soutien commun (AGSC) ;

● Il coordonne l’action des services interarmées (le service de santé des armées, le service des essences des armées, la direction interarmées des réseaux d’infrastructure et des systèmes d’information, le nouveau service du commissariat des armées, et le futur service interarmées des munitions).

D’ici janvier 2014, l’organisation interarmées de soutien passera sous le contrôle d’une autorité unique, le commissariat des armées, tandis que des conventions d’objectifs seront proposées aux prestataires privés.

Il convient cependant de souligner que la mise en place de cette organisation interarmées des soutiens n’est pas terminée et demeure très complexe pour les formations soutenues et les agents : l’embasement de certaines formations ou services (DGA, DRM) n’est pas finalisé, certaines bases de défense regroupent moins de 2 000 agents (pour un objectif moyen de 30 000) et le rôle des commandants de base de défense font l’objet d’interrogations récurrentes.

2. La montée en puissance du soutien interarmes

Cette rationalisation induite par la réorganisation autour des bases de défense concerne également les services d’appui aux armées.

Le service de santé des armées concentre ainsi son activité logistique sur Orléans (fermeture de 2 sites en 2009 et d’un troisième fin 2013). Il a regroupé ses 4 centres de recherche à Brétigny au sein de l’institut de recherche biomédicale des armées et fusionné ses 2 écoles de médecine à Lyon. Par ailleurs, il a créé 55 Centres médicaux des armées et 14 Centres médicaux interarmées outre-mer (en lieu et place des 357 services médicaux d’unités en janvier 2011).

Le service des essences des armées (SEA) a achevé sa réforme. Il a fermé 18 dépôts de carburants, rationalisé sa fonction support avec une réduction de 30 % des moyens, dissout ses directions régionales et concentré son activité autour d’une direction des établissements à Nancy et d’une base logistique à Chalon-sur-Saône, tout en reprenant l’activité pétrolière de la marine nationale. Il a diminué ses effectifs de 113 ETP tout en augmentant sa capacité de projection de 40 %.

Le service du commissariat des armées (SCA) aura fermé, sur la période 2010-2014, 32 organismes de tailles variables répartis sur 40 sites, et créé 15 organismes principaux. Au total, les réductions de postes sont de 1 164 ETP pour une cible fin 2015 de 1 900 ETP supprimés.

Le service interarmées des munitions (SIMu), né également de la réforme, a procédé à la dissolution de 3 dépôts (1 en 2013 et 2 en 2014), regroupé les fonctions de commandement au travers de 7 établissements principaux en métropole supervisant 17 dépôts et 5 coordinations zonales pour 9 dépôts outre-mer et à l’étranger. Il a réduit ses effectifs de 165 ETP.

3. Les cessions immobilières et le projet Balard

Comme pour les autres ministères, les recettes issues des cessions immobilières du ministère de la défense sont comptabilisées au sein du compte d’affectation spécial (CAS) relatif à la gestion du patrimoine immobilier de l’État. Toutefois, le ministère de la défense bénéficie de manière spécifique d’un taux de retour de 100 % de ces recettes jusqu’à la fin de l’année 2014, en application de l’article 47 modifié de la LFI 2006.

Le ministère a obtenu que cette dérogation soit prolongée sur la période 2014-2019 dans la mesure où les cessions en question (sites parisiens pour l’essentiel) étaient intégrées dans la précédente LPM et faisaient déjà l’objet d’une dérogation. Il s’agit donc d’une décision neutre pour les finances publiques.

Ces cessions s’inscrivent également dans le cadre de la réinstallation des états-majors sur le site de Balard. Le montant total du contrat, c'est-à-dire le cumul des redevances sur vingt-sept années d'exploitation, de 2014 à 2041, est évalué à 3 500 millions d’euros constants hors taxe (valeur décembre 2010). La redevance annuelle moyenne en euros constants que devra payer le ministère de 2014 à 2041 s'élèvera à 130 millions d’euros HT, conformément à l’évaluation préalable réalisée en 2009. Les ressources nécessaires au financement de cette redevance, dans la durée, sont assurées sans abondement, par redéploiement :

– des crédits de fonctionnement et d’investissement correspondant aux dépenses actuelles de soutien de l’administration centrale et d’entretien de ses locaux (65 millions d’euros par an) ;

– des loyers acquittés pour la DGA à Bagneux (16 millions d’euros par an) ;

– des dépenses de personnel hors pensions correspondant aux activités de soutien de l’administration centrale (34 millions d’euros par an) ;

– des loyers budgétaires des emprises parisiennes du ministère, hors Balard, pouvant être affectés au financement de l’opération (13 millions d’euros par an) ;

– de la dotation dont bénéficiera le ministère au titre du mécanisme interministériel de compensation du surcoût de la TVA sur les prestations externalisées (10 millions d’euros par an).

Le Rapporteur spécial souhaite également qu’une attention particulière soit portée à l’avenir de l’hôtel de la Marine. En effet, les partenariats pouvant être conclus pour préserver ce bâtiment historique n’ont, jusqu’à présent, pas abouti à des solutions concrètes.

V. REMARQUES TRANSVERSALES SUR LE CHAMP DE LA MISSION DÉFENSE

1. La nécessité de disposer des moyens maritimes adéquats pour la surveillance de l’espace maritime

Le Rapporteur spécial souhaite souligner le caractère essentiel de la rapide mise à disposition de la Marine nationale des moyens lui permettant de couvrir efficacement l’ensemble des missions qui lui sont confiées (lutte contre les différents trafics, lutte contre la piraterie, surveillance de la pêche illégale, surveillance des 11 millions de km2 que constitue l’espace maritime français).

Il convient ainsi de rappeler que la Convention de Montego Bay, signée en 1982, a défini des zones économiques exclusives (ZEE) qui s'étendent jusqu'à 200 nautiques du littoral et accordent aux pays côtiers un monopole pour l'exploitation de toutes les ressources qui s'y trouvent. Préserver et tirer parti de ce considérable gisement de croissance économique exige toutefois des capacités importantes de surveillance et d'intervention sans lesquelles de précieuses ressources risquent d'être pillées, commet l’ont souligné plusieurs rapports parlementaires.

Or, un exercice réaliste de notre souveraineté nécessite une couverture complète et permanente de la ZEE pour des missions nombreuses et diverses : assistance aux bateaux de pêche, sécurité du commerce maritime, stabilité régionale, soutien aux îles isolées, aide humanitaire, lutte contre les trafics illicites et l'immigration clandestine, protection de l'environnement et des réserves halieutiques.

Dans ce cadre, il convient de rappeler que les P400 et les Batral de la Marine nationale qui assurent, depuis près de trente ans, la surveillance de l'immense domaine maritime français sont progressivement désarmés créant une carence importante. Les bâtiments de transport légers (Batral) seront ainsi tous retirés du service actif d'ici 2016.

Concrètement, la France ne dispose plus que de six frégates de surveillance, hors métropole, pour assurer cette couverture. Cela correspond à une frégate pour près de 2 millions de km2 à surveiller (soit 4 fois la superficie de la métropole). Dans ces conditions, on peut regretter que le programme de bâtiments de surveillance et d'intervention maritime (BATSIMAR) soit, pour le moment, repoussé à la prochaine décennie. Des ruptures capacitaires commencent déjà à poindre du fait du retrait de certains P400 et une rupture totale est à craindre en 2018. En remplacement des P400, la marine souhaite des navires simples, robustes et plus lourds, afin d’accroître leur autonomie et leur tenue en mer et embarquer un hélicoptère. Le premier modèle en expérimentation de ce type est L’Adroit de DCNS. Polyvalent, il dispose de nombreux capteurs, d’un canon de 20 mm et peut embarquer un hélicoptère, un drone de surveillance et des embarcations commando. Son acquisition par la Marine n’est cependant pas actée à ce jour.

À défaut de renforcer les équipements de cette envergure, il convient au moins de prendre les trois bâtiments multimissions (B2M), programme de navires de type supply ship dont le premier devrait être mis en service en 2015, sur des crédits budgétaires de la mission Défense. D'une longueur comprise entre 60 et 80 mètres pour un déplacement avoisinant les 2 000 tonnes, le B2M dispose de qualités nautiques (tenue à la mer et manœuvrabilité) et d'endurance adaptées à des missions de longue durée dans des conditions parfois difficiles. Ils peuvent donc remplacer les BATSIMAR pendant la période de la LPM. L'appel à candidature pour ce navire conçu aux normes civiles a été lancé par la DGA en juillet 2012 pour un marché qui devrait également comprendre leur maintien en condition opérationnelle pendant 6 ans. Les B2M doivent a priori faire l’objet d'un financement interministériel car, bien qu’armés par la Marine, ils réaliseront également des missions dévolues à d'autres ministères dans le cadre de la fonction garde-côtes. Les B2M seront notamment affectés en Nouvelle-Calédonie, aux Antilles, à la Réunion et en Polynésie.

Cependant, le Rapporteur spécial a été alerté sur le fait qu’en raison des réductions globales de crédits touchant l’ensemble des missions de l’État, un certain nombre de ministères ne serait vraisemblablement pas en mesure de payer leur part pour acquérir et développer les B2M. Il souhaite par conséquent disposer rapidement des éléments assurant que ce besoin opérationnel est bien pris en considération dans les négociations interministérielles. À défaut, il semble qu’une inscription des crédits nécessaires à l’acquisition de ces matériels sur les crédits budgétaires propres du ministère de la Défense serait légitime au regard de l’importance de l’enjeu pour la surveillance de notre espace maritime et la protection de nos territoires d’outre-mer.

2. Maintenir notre rôle dans le monde par une présence affirmée : le maintien du pré-positionnement des forces

Le dispositif de prépositionnement des forces a été validé tant par le livre blanc de 2008 que par celui de 2013. Ce schéma maintient la co-localisation auprès des organisations régionales africaines (instruments de sécurité de l’Union africaine) et accompagne la renégociation des accords de défense initiée en 2010. Toutefois, il s’est déjà traduit par une réduction de 28 % du personnel militaire (PM) affecté aux forces de présence (FP), en fixant la cible 2014 à hauteur de 3 800 PM pour les pôles Gabon/Sénégal et EAU/République de Djibouti.

Le coût global du dispositif de présence stabilisé au format actuel est évalué à 430 millions d’euros. La variation du format depuis 2010 a amené une diminution des coûts calculés de près de 90 millions d’euros (coût global pour 2009 et 2010 estimés à 517 millions d’euros).

Le nouveau livre blanc va conduire à une nouvelle adaptation du dispositif de présence français et à une réduction supplémentaire des effectifs vers une cible 2019 de l’ordre de 3 300 PM. Il garantit toutefois le maintien des cinq priorités stratégiques pour la France :

– protection du territoire national et des ressortissants français (P1),

– sécurité de l’Europe et de l’espace nord-atlantique (P2),

– stabilisation du voisinage de l’Europe, qui comprend notamment les approches orientales du territoire européen, la Méditerranée et l’Afrique (P3),

– mise en œuvre de nos accords de défense au Proche-Orient et dans le Golfe Arabo-Persique (P4),

– contribution à la paix et à la sécurité dans le monde, notamment dans l’Océan Indien, en Asie, dans le Pacifique et en Amérique latine (P5).

Dans ce cadre, les forces de présence contribuent directement à la P1 au profit de nos quelque 200 000 ressortissants en Afrique, à la P3 par la capacité de réactivité aux crises qu’elles donnent à la France et en participant également à la formation de 50 000 Africains par an, et à la P4 et à la P5 par le biais de notre clause de sécurité avec Djibouti et de notre présence aux EAU.

Cela a conduit à maintenir en place, moyennant quelques évolutions, les dispositifs suivants.

a. Eléments Français au Sénégal (EFS)

Avec un peu plus de 300 personnes, les EFS constituent un outil de prévention et de coopération sur la façade occidentale du continent africain, ainsi qu’un point d’appui opérationnel pour les interventions. L’expérience de ces deux premières années (2011-2013) a mis en évidence la pertinence d’un pôle de coopération opérationnel au Sénégal par :

● les capacités d’accueil et de soutien offertes aux forces (déploiement de Serval)

● la dynamique et l’effet d’entraînement suscité chez nos partenaires africains (MISMA).

Des études sont actuellement en cours pour l’évolution de différentes emprises, en particulier celle du site de Senghor, impacté par la construction de l’aéroport Blaise Diagne.

b. Opération LICORNE

La mise en œuvre de l’accord de partenariat de défense, signé le 26 janvier 2012, constitue le point de départ d’une relation militaire bilatérale rénovée entre la France et la Côte-d’Ivoire. La mission principale de la force Licorne est de défendre nos intérêts nationaux, en particulier de protéger nos ressortissants, de participer et concourir à des opérations dans la région, ainsi qu’à leur soutien, mais aussi d’accompagner la réforme de l’armée ivoirienne. Regroupée sur le camp de Port-Bouët à Abidjan, la force Licorne, armée par plus de 450 personnes depuis début 2012, comprend principalement :

● un PC COMANFOR ;

● un groupement tactique interarmes et une unité de soutien ;

● divers détachements, dont 1 hélicoptère Fennec.

À moyen terme, cette force pourrait évoluer en cohérence avec le Livre blanc, dans le cadre de la révision du schéma d’ensemble du dispositif de présence en Afrique.

c. Forces Françaises au Gabon (FFG)

La présence des forces françaises au Gabon s'appuie sur un accord de partenariat de défense signé en février 2010. Elles constituent un outil de prévention et d’action sur la façade occidentale du continent africain ainsi qu’un point d’appui pour les interventions. Elles font en outre partie du dispositif d’aguerrissement de nos forces armées. Les FFG sont chargées de la planification et de l'intervention dans une zone de responsabilité permanente (ZRP) recouvrant la communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) et la communauté économique des Etats d'Afrique Centrale (CEEAC).

Les FFG (plus de 900 personnes) sont commandées par un général commandant de la force (COMFOR), disposant d'un état-major interarmées (EMIA) et le 6ème bataillon d'infanterie de marine (BIMa). Les forces sont réparties sur trois sites, Libreville, Port Gentil et Douala (Cameroun) avec notamment :

● Le 6ème BIMa articulé autour de deux unités de combat ; Le DETAIR qui dispose de deux avions de transport tactique (ATA) et d'un hélicoptère Fennec, à Libreville ;

● La mission logistique de Douala (MISLOG).

À moyen terme, les FFG devraient voir leur organisation évoluer, en cohérence avec les orientations du nouveau livre blanc, dans le cadre de la révision du schéma d’ensemble du dispositif de présence en Afrique. Le Rapporteur spécial note que ces éléments sont indispensables pour maintenir notre réactivité face aux tensions qui s’aggravent dans la Région, notamment en République Centrafricaine.

d. Éléments français au Tchad (EFT)- EPERVIER

Situé à la confluence de zones de crise (Soudan, Sahel, Libye, République centrafricaine), le Tchad occupe une position centrale sur le continent africain. Le dispositif Epervier a succédé en février 1986 à l’opération Manta, lancée en 1983. Déployé à la demande des autorités tchadiennes, en protection contre la Libye, il repose sur une logique de coopération (5). La force Epervier, forte de près de 1 000 hommes déployés principalement à Ndjamena (camp Kossei), Abéché et sur une base avancée à Faya-Largeau, a pour missions :

● la protection des ressortissants (plans RESEVAC et capacité d’accueil de renforts stratégiques) et des intérêts français ;

● la participation et le soutien aux opérations dans la région ;

● l’aide à la réorganisation des forces de défense et de sécurité.

Considérée par les autorités tchadiennes comme un élément de stabilité au regard de la situation sécuritaire régionale, l’évolution de ce dispositif militaire français devrait faire l'objet de discussions dans le cadre d'une éventuelle révision de l'accord de coopération liant la France et le Tchad. Le Rapporteur spécial plaide pour le maintien d’un dispositif important, au regard des tensions mentionnées ci-dessus.

e. Forces françaises de Djibouti (FFDj)

Le dispositif français à Djibouti, doté de 2 200 hommes, constitue notre base opérationnelle avancée (BOA) en Afrique orientale. Le dispositif contribue à une expertise de théâtre en Afrique de l’Est, à la mise en œuvre d’accords bilatéraux ainsi qu’à l’accompagnement de la montée en puissance des capacités collectives africaines de prévention et de gestion des crises. Les moyens terrestres et aériens ont le niveau suffisant pour participer à la défense du territoire (accords- défense aérienne).

Conformément aux termes du traité de coopération en matière de défense entre la France et Djibouti, la rétrocession de l’hôpital Bouffard en l’état est prévue en 2015. L’avenir de cette structure reste suspendu aux décisions de la République de Djibouti, ce qui mérite une attention particulière. À moyen terme, l’organisation des FFDj devrait évoluer, en cohérence avec le futur livre blanc, dans la révision du schéma d’ensemble du dispositif de présence. Les effectifs sur place doivent ainsi être réduits dans les prochaines années.

f. Opération SERVAL et présence au Mali

Depuis le 5 avril 2013, les moyens affectés à l’opération SERVAL sont en diminution. La France a apporté son soutien à la MISMA (6), puis aux Nations-Unies (MINUSMA (7)), tout en poursuivant la neutralisation des groupes armés dans le nord du pays. Les effectifs militaires français présents au Mali ont décru jusqu’à atteindre, cet été, un palier de 3 200 hommes. La présence française devrait progressivement décroître en fonction du processus politique malien (élections législatives prévues à l’automne 2013) et de l’appropriation de la sécurité par les forces maliennes et onusiennes, pour atteindre un millier d’hommes à terme.

Outre la force SERVAL, les effectifs français au Mali comprennent l’engagement français au profit de la mission EUTM-Mali (8) (100 h), les détachements de liaison et d’appui au profit de la MINUSMA (environ 150 h). Les matériels engagés dans l’opération Serval proviennent pour partie du dispositif pré positionné en Afrique et, pour le reste, ont été mis en place depuis la France par transport stratégique (aérien et maritime) ou de façon autonome pour les avions.

Le dispositif SERVAL comprend :

● Un état-major opératif à Bamako ;

● Une composante terrestre avec : GTIA avec capacité blindé (1 200 personnels) et une capacité aéromobile (Gazelle, Puma, Caracal et Tigre).

● Une composante aérienne avec :

– des avions de chasse prépositionnés au Tchad et renforcés depuis la métropole, actuellement déployés à Bamako (Mirage 2000D) ;

– un plot drone (Harfang) au Niger ;

– des avions de transport (C130, C160, CN235) utilisant les capacités prépositionnées en Afrique de l’Ouest et Centrale ainsi qu’un renfort de métropole.

● Une composante de forces spéciales.

À terme (probablement début 2014) la force SERVAL au Mali comprendra un unique « groupement désert ». Conformément à l’OP.18 de la résolution 2100 du Conseil de sécurité des Nations-Unies autorisant le déploiement de la MINUSMA, la France est autorisée « dans la limite de ses capacités et dans ses zones de déploiement, à user de tous les moyens nécessaires pour intervenir en soutien de la MINUSMA en cas de danger grave et imminent ». Dans ce cadre, le Rapporteur spécial estime nécessaire de mener une réflexion sur ce qui peut être transféré, le cas échéant, du champ des OPEX à celui des FP, notamment au Mali.

3. Une faiblesse persistante dans la coopération européenne

La question du développement des capacités militaires en Europe est primordiale. En effet, comme l’a rappelé le ministre de la Défense Jean Yves le Drian « à l’heure où des contraintes budgétaires grèvent les budgets de défense de tous les Etats membres, il est vital d’organiser des interdépendances capacitaires ». Il s’agit en effet de l’application concrète du principe de « Pooling and Sharing », qui est le pendant, pour l’Union européenne, de la « smart défense » décidée au niveau de l’OTAN.

Il convient d’emblée de souligner que les investissements réalisés en coopération représentent déjà 30 % du total de nos investissements dans l’armement, hors force de dissuasion. Ces crédits, qui s’élèvent à environ 1,5 milliard d’euros, inscrits au programme 146 (Équipement des forces) du budget du ministère de la défense, témoignent de la réalité de cette coopération. Celle-ci est principalement confiée à l’Organisation conjointe pour la conduite des programmes d’armement en Europe (OCCAr) et, pour le reste, à la NAHEMA, l’agence de l’OTAN chargée de la conduite du programme d’hélicoptères NH90. La coopération est donc déjà une réalité et un atout sur le plan industriel.

C’est également un avantage sur le plan opérationnel. La coopération facilite en effet l’interopérabilité à l’heure où les opérations interarmées, internationales et combinées se multiplient. À cet égard, la coopération favorise notre accès aux matériels de forte capacité, lesquels sont nécessaires pour jouer un rôle d’entraînement sur la scène internationale. L’A400M, malgré des difficultés certaines, en constitue un exemple intéressant. La coopération exige toutefois des concessions et provoque parfois des frustrations, notamment quand il s’agit des spécifications opérationnelles. L’exemple du NH 90, dont il a existé jusqu’à 24 versions pour 17 pays, est là pour nous rappeler qu’une coopération efficace nécessite la réunion de trois conditions primordiales :

– Partager une même volonté politique et une même vision stratégique,

– Harmoniser les besoins opérationnels et garantir un montage industriel pertinent,

– Disposer de structures de concertation et de mise en œuvre efficaces pour traiter les projets.

Il faut néanmoins garder à l’esprit que les « grandes multinationales de la coopération » peuvent apparaître séduisantes mais sont souvent hasardeuses : le cas du NH90 l’illustre parfaitement. Il est donc temps de relancer des coopérations renforcées entre un nombre restreint d’États, sur le modèle des accords de Lancaster House avec le Royaume-Uni. En effet, d’autres pays, tels que l’Allemagne, ou l’Italie dans le domaine des missiles sol-air Aster 15 et 30, seraient susceptibles d’être intéressés par des coopérations plus poussées.

Cette vision stratégique doit reposer sur une analyse commune des besoins en équipement. En matière de drones par exemple, l’ambition européenne peut apparaître insuffisante. Le Rapporteur spécial pense qu’il est impératif de monter un projet économique viable avec nos partenaires européens, notamment en matière de drones armés du futur, faute de quoi nous continuerons de dépendre des matériels américains ou israéliens. Cela répond donc à un intérêt de souveraineté pour l’ensemble des pays européens.

De la même manière, l’intérêt des pays européens à coopérer dans le domaine du renseignement satellitaire est évident. Il existe des formes de mutualisation qui méritent d’être encouragées : ainsi l’Allemagne et l’Italie disposent de systèmes de radars performants, que nous pouvons utiliser, alors que nous sommes pratiquement les seuls en Europe à disposer de capacités d’observation de très haute résolution depuis l’espace, notamment grâce aux satellites Helios ou Cosmo-Skymed. Il existe donc un intérêt commun à mutualiser ces compétences.

Enfin, il est regrettable de constater que les coopérations se déroulant dans le cadre de l’AED soient en diminution en raison des difficultés financières de la plupart des pays européens. Ainsi, seuls deux accords de coopération technique impliquant la France ont été signés en 2011 (pour une réalisation effective en 2012). Si la situation s’est légèrement améliorée en 2012, puisque la France a signé dix nouveaux accords dans le cadre de l’AED, il est toutefois probable que la coopération en Europe restera faible au cours des prochaines années. Or, l’AED est le meilleur vecteur pour porter une approche multilatérale, reposant sur le volontariat des États membres et sur des appels d’offres permettant de désigner les meilleurs laboratoires ou industriels capables de mener à bien le projet au moindre coût. Mais son budget global est limité : environ 30 millions d’euros en 2013, dont seulement 8 millions d’euros consacrés aux études. Par conséquent, la majeure partie de ses crédits finance des actions de soutien et de formation. Il faudrait certainement renforcer les moyens de l’Agence, ce qui n’est a priori pas souhaité par les Britanniques, si l’on souhaite qu’elle puisse jouer pleinement son rôle sur le plan des équipements.

En outre, il serait souhaitable que les États délèguent davantage de responsabilités à l’OCCAr dans la gestion des programmes. À titre d’exemple, dans la réalisation d’un programme, l’OCCAr ne peut augmenter aucun poste de dépense à l’intérieur d’un programme sans l’autorisation des États, même si le montant global de l’enveloppe reste identique. Revenir sur cette interdiction – jusqu’à un certain niveau financier fixé pour chaque programme et à la condition de ne pas en augmenter le coût total – permettrait d’accélérer la prise de décision et constituerait donc une avancée. Dans le cadre des programmes nationaux, la DGA dispose d’ailleurs de cette faculté vis-à-vis des états-majors. Ainsi, puisque l’OCCAr est chargée de la gestion du programme, elle devrait être seule responsable de la conduite des relations contractuelles avec l’industriel, à charge pour lui de rentre compte aux États de son action.

EXAMEN EN COMMISSION

Après l’audition de M. Jean-Yves Le Drian, ministre de la Défense, lors de la commission élargie du 23 octobre 2013 à 16 h 15 (9) sur les crédits de la mission Défense, la commission des Finances examine les crédits de cette mission.

La Commission examine l’amendement n° II-CF 6 de MM. Launay et Cornut-Gentille, Rapporteurs spéciaux.

M. Jean Launay, Rapporteur spécial : Je vous remercie. Nous avons trouvé un accord, avec M. Cornut-Gentille, sur un point précis qui n’est certes pas très significatif au point de vue de la masse financière du budget de la Défense mais qui n’en a pas moins son importance. Nous avons remarqué que les élèves de l’École Polytechnique, qui bénéficient du statut militaire, ont droit à des études gratuites et rémunérées – 880 euros par mois auxquels s’ajoutent 200 euros d’aide personnalisée au logement –, ce qui représente 18 millions d’euros par an, supportés par la Nation et inscrits au budget de la Défense. Or, de moins en moins d’élèves de l’École intègrent à leur sortie la fonction publique d’État et les armées. Ainsi, s’ils choisissent de ne pas intégrer un corps d’État à leur sortie, les élèves peuvent suivre une formation complémentaire dispensée par un organisme agréé par l’école qui les exonère complètement du coût de rachat de la scolarité. Par contre, ceux qui intègrent un corps d’État – environ un quart des élèves – doivent ensuite travailler dix ans pour l’État ou bien rembourser la « pantoufle », de l’ordre de 50 000 euros. Nous considérons que cette situation est injuste et anormale : ceux qui choisissent de travailler pour l’État sont pénalisés par rapport à ceux qui rejoignent d’emblée le secteur privé. L’obligation de servir l’État doit être rappelée. Une réforme devait être engagée en 2013, mais puisque ni le calendrier ni les mesures qui pourraient corriger cet état de fait ne sont à ce jour connus, nous avons souhaité déposer cet amendement « d’appel » afin de relancer le débat sur cette question. Nous suggérons donc la diminution de 500 000 euros sur la subvention pour charges de service de l’École Polytechnique, et souhaitons porter ce débat en séance. Pour cela, je me déclare pour un vote favorable à cet amendement.

M. François Cornut-Gentille, Rapporteur spécial : Pour aller dans le sens de M. Launay, nous souhaitons attirer l’attention sur l’évolution de l’École Polytechnique, à tous points de vue, y compris financier. Nous nous apercevons qu’alors que le Gouvernement demande des efforts à tous ses opérateurs, dont les dotations stagnent ou baissent, celles de l’X progressent toujours. Les rapports rendus par la Cour des comptes sur l’École polytechnique n’ont pas été suivis d’explications claires de la part de l’École. Nous avons évidemment une pleine confiance dans cette grande École, mais nous avons également le droit de lui poser un certain nombre de questions : faut-il notamment maintenir la tutelle de la direction générale de l’armement – DGA –, quand la plupart des polytechniciens vont sur les marchés financiers ? Quel est le rôle de Polytechnique pour la formation militaire ? Il est temps selon nous d’ouvrir une réflexion sur l’École, en particulier sur son recrutement et les débouchés choisis par les élèves qui délaissent tant l’armée que l’industrie. C’est là le sens de notre amendement, au-delà du point précis soulevé par M. Launay.

Mme Patricia Adam, Présidente de la commission de la Défense et des forces armées. Nous avons effectivement soulevé ce problème dans le cadre de différentes auditions. Un point mérite d’être souligné : les élèves de Polytechnique représentent 1 000 officiers qui sont comptabilisés au budget de la Défense. Or, à l’heure où les armées doivent baisser leur taux d’encadrement, et par conséquent réduire le nombre d’officiers, le fait que les officiers de Polytechnique soient sanctuarisés pose question.

Mme Catherine Coutelle. Madame la Présidente, en élargissant au-delà de Polytechnique, ne pourrions-nous pas organiser une mission sur la formation des militaires, en incluant toutes les écoles ? Nous n’allons pas lancer le débat ce soir, mais il serait sans doute intéressant d’aller voir de plus près comment sont aujourd’hui formés les militaires français.

M. Jean-Yves Le Déaut. L’amendement est juste, et je signalerais à M. Cornut Gentille que dans la nouvelle loi sur l’enseignement supérieur, la co-tutelle a été instituée, ce qui a d’ailleurs suscité beaucoup de réactions, non seulement de la part de Polytechnique mais aussi de toutes les écoles concernées. En ce qui concerne le caractère juste de l’amendement, dès lors que les étudiants poursuivent leurs études dans une école spécialisée, ils doivent avoir le droit de racheter leurs études. Toutefois, nous notons qu’il s’agit là d’un amendement d’appel. Il serait injuste qu’au moment où des rapprochements entre de nombreuses écoles et universités s’opèrent sur le plateau de Saclay, seul Polytechnique soit pénalisée, alors que cette école a la part la plus élevée d’ingénieurs qui effectuent ensuite un doctorat, ce qui devrait être un exemple à suivre. Il n’en reste pas moins que la question mérite d’être soulevée et que le Gouvernement devra y apporter une réponse.

L’amendement n° II-CF 6 est adopté à l’unanimité.

Puis, suivant l’avis favorable du Rapporteur spécial pour les crédits relatifs au Budget opérationnel de la défense, et malgré l’avis défavorable du Rapporteur spécial pour les crédits relatifs à la Préparation de l’avenir, la Commission adopte les crédits de la mission Défense.

ANNEXE :
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL

Chefs d’état-majors :

– Amiral Edouard Guillaud, chef d’état-major des armées (CEMA) ;

– Amiral Bernard Rogel, chef d’état-major de la Marine (CEMM) ;

– Général Denis Mercier, chef d’état-major de l’armée de l’air (CEMAA)

– Général Bertrand Ract-Madoux, chef de l’état-major de l’armée de terre ;

Ministère de la Défense

– M. Sébastien Dessillons, conseiller pour les affaires industrielles au cabinet de M. Jean-Yves Le Drian ;

– Mme Christine Mounau-Guy, conseillère politique et parlementaire au cabinet de M. Jean-Yves Le Drian, M. Hugo Richard, conseiller politique et parlementaire au cabinet de M. Jean-Yves Le Drian ;

– M. Hugues Bied-Charreton, directeur des affaires financières, ministère de la Défense ;

– M. Jean-Paul Bodin, secrétaire général pour l’administration (SGA).

Structure intégrée de maintien en condition opérationnelle des matériels aéronautiques de la Défense (SIMMAD)

– Général Guy Girier, directeur central ;

– Colonel Berthon Jean-Denis, chef de la sous-direction de la comptabilité et du budget ;

– Capitaine de vaisseau Marboeuf Yann, chef de la division de la stratégie, des méthodes et de la réglementation ;

Service de Maintenance Industrielle Terrestre (SIMMT)

– Général Jean-Yves Dominguez, directeur central ;

– Colonel Bruno Lacarriere, chef du bureau stratégie et modernisation du MCO-T;

– Commissaire-colonel Jean-Philippe Laporte, sous-directeur budget, finance et comptabilité.

Groupe THALES

– M. Patrice Caine, Directeur général ;

– Mme Isabelle Caputo, directeur des relations parlementaires ;

– M. Jean-Marie Faugère, conseiller défense du groupe.

Délégation générale à l’armement (DGA)

– M. Laurent Collet-Billon, délégué général pour l’armement.

Direction centrale du service de soutien de la flotte (SSF)

– M. François Pintard, directeur central ;

– M. Bernard Lobet, capitaine de corvette ;

– M. Rémi Coppens, capitaine de corvette.

Etat-major de l’armée de terre (CEMAT)

– Général Bertrand Ract-Madoux, chef de l’état-major de l’armée de terre ;

– Colonel Patrice Quevilly ;

– Lieutenant-colonel Franck Boudet ;

– M. Pierre Chareyron, Lieutenant-colonel, chargé des relations avec le parlement.

© Assemblée nationale

1 () Nos armées seront en mesure de déployer des systèmes de commandement de théâtre d’opérations et de coordination logistique de théâtre dans les différents milieux pour des opérations de niveau division ou équivalent. Dans le cadre d’un engagement majeur, notamment au sein de l’OTAN, les armées conserveront la capacité de mettre sur pied des commandements de composante terrestre, maritime et aérienne du niveau d’un corps d’armée ou équivalent.

2 () Mise en condition avant projection.

3 () Missions de courte durée.

4 () En mars, le dispositif français a compté 438 véhicules majeurs et 30 hélicoptères de l’armée de terre. L’opération devrait en outre générer en 2013 une suractivité importante pour les aéronefs déployés par l’armée de l’air et la marine.

5 () Accord de coopération militaire technique de 1976, protocole additionnel de 1990 relatif au stationnement des troupes, conclu pour une durée indéterminée et modifié le 10 juin 1998.

6 () Mission internationale de soutien au Mali

7 () Mission multidimensionnelle intégrée des nations unies pour la stabilisation du Mali

8 () European union training mission in Mali

9 () Le compte rendu de la commission élargie peut être consulté sur le site internet de l’Assemblée nationale à l’adresse : http://www.assemblee-nationale.fr/14/budget/plf2014/commissions_elargies/cr/c005.asp