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N
° 1428

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 10 octobre 2013.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2014 (n° 1395),

PAR M. Christian ECKERT,

Rapporteur Général

Député

——

ANNEXE N° 42

SANT
É

AVANCES AUX ORGANISMES DE SÉCURITE SOCIALE

Rapporteur spécial : M. Claude GOASGUEN

Député

____

SOMMAIRE

___

Pages

INTRODUCTION 7

PREMIÈRE PARTIE : LE PROGRAMME PRÉVENTION, SÉCURITÉ SANITAIRE ET OFFRE DE SOINS 9

I. LA LENTE POURSUITE DES RÉFORMES STRUCTURELLES 10

A. LA RÉFORME DE LA SÉCURITÉ SANITAIRE 10

1. L’organisation et les moyens de l’ANSM 10

a. Les structures de l’ANSM 11

b. La prévention des conflits d’intérêts 12

c. Une diminution critique des moyens de l’agence 12

2. La réforme du financement de la Haute Autorité de santé 14

3. Les moyens de l’ANSÉS 16

a. L’activité et les ressources de l’agence 16

b. Le programme immobilier 17

B. LA RÉPONSE AUX URGENCES SANITAIRES 17

1. La mise en œuvre du contrat de performance de l’EPRUS 17

2. La réserve sanitaire 18

C. L’AVENIR DES PLANS DE SANTÉ 19

1. Le plan cancer 20

2. Le plan psychiatrie santé mentale 21

3. Le plan national nutrition santé et le plan obésité 22

4. Le plan national santé environnement 24

5. La prise en charge d’autres maladies chroniques 25

II. L’ORGANISATION ET L’OFFRE DE SOINS 26

A. LA MODERNISATION DE L’OFFRE DE SOINS 26

1. La mise en œuvre du fonds régional d’intervention 26

2. Les moyens financiers et humains des ARS 26

B. LA FORMATION INITIALE ET CONTINUE 27

1. L’indemnisation des stages 28

2. Les crédits de l’École des hautes études en santé publique (EHESP) 29

C. LES SYTÉMES D’INFORMATION DE SANTÉ ET LE DOSSIER MÉDICAL PERSONNEL 29

1. Les ressources de l’ASIP 29

2. L’absence de prise en compte des préconisations du Rapporteur spécial sur le DMP 30

3. Quel avenir pour le DMP ? 32

D. LES AUTRES FINANCEMENTS DE L’ACTION 33

III. LA POLITIQUE DE PRÉVENTION 35

A. LA PERTINENCE ÉCONOMIQUE ET MÉDICALE DE LA PRÉVENTION 35

B. L’INPES : UN RÔLE CENTRAL MALGRÉ DES MOYENS EN BAISSE 38

C. QUELLE ORGANISATION ET QUELLES MISSIONS POUR LA PRÉVENTION DE SANTÉ ? 40

1. La nouvelle stratégie nationale de santé 40

2. Une nécessaire rationalisation des structures 40

DEUXIÈME PARTIE : LE PROGRAMME PROTECTION MALADIE 43

I. LA SUPPRESSION DE LA SUBVENTION AU FONDS CMU 43

II. L’INDEMNISATION DES VICTIMES DE L’AMIANTE 44

III. L’AIDE MÉDICALE DE L’ÉTAT : UN SYSTÈME À BOUT DE SOUFFLE 45

A. L’INEXORABLE HAUSSE DES DÉPENSES 46

1. Une dépense non-évaluée 46

2. L’évolution du nombre de bénéficiaires 47

3. La répartition géographique 48

a. Une répartition géographique inégale 48

b. Le cas spécifique de Mayotte 50

4. La répartition par catégorie de soins 51

5. Le reste à charge pour l’assurance maladie 52

B. L’ABANDON DES MESURES DE CONTRÔLE 53

1. La suppression des instruments mis en place en 2011 53

2. Un contrôle inexistant 54

C. LA NÉCESSAIRE REFONTE DE L’AME 56

TROISIÈME PARTIE : LE COMPTE SPÉCIAL AVANCES AUX ORGANISMES DE SÉCURITÉ SOCIALE 59

EXAMEN EN COMMISSION 61

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL 65

L’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

À cette date, 88,9 % des réponses étaient parvenues au Rapporteur spécial.

INTRODUCTION

Dans un contexte budgétaire contraint, les crédits de la mission Santé semblent bénéficier d’un traitement favorable puisqu’ils sont en légère augmentation dans le projet de loi de finances pour 2014. Cette progression n’est néanmoins qu’apparente et liée à la hausse mécanique des crédits consacrés à l’aide médicale de l’État (AME).

Au-delà de toute approche strictement budgétaire, le Rapporteur spécial regrette la faiblesse des données disponibles. En l’absence de données consolidées et globales, on peut légitimement s’interroger sur le sens de l’autorisation parlementaire. En outre, faute de base, il est difficile voire impossible de contrôler l’utilisation de ces crédits. La globalisation des crédits dédiés aux agences régionales de santé avec les fonds d’intervention régionaux est certes un progrès en gestion, donnant aux directeurs régionaux plus de marges de manœuvre. C’est en revanche un élément de complexification pour le travail parlementaire et surtout un déplacement de son analyse sur un travail a posteriori. Alors que jusque-là il validait les enveloppes consacrées à chaque action spécifique, il accorde désormais une autorisation globale, charge à lui d’examiner dans quelles conditions elle a été ensuite dépensée. Si ce système ne pose pas de problème en tant que tel, il nécessite une évolution importante des pratiques et surtout un renforcement très marqué des informations fournies au Parlement en général, et au Rapporteur spécial en particulier.

Cette limite apparaît criante pour l’aide médicale de l’État. Le sentiment qui domine à la lecture des éléments parcellaires fournis par le ministère est que l’AME ne peut survivre en l’état, et qu’elle ne répond d’ailleurs pas aux objectifs qui ont présidé à sa création. Que l’État se contente d’abonder et de rembourser sans contrôle propre, phénomène sans équivalent, des dépenses enregistrées par les caisses d’assurance maladie n’est pas acceptable dans un système qui veut faire prévaloir la transparence des comptes sociaux. Cela est d’autant plus vrai que les crédits de l’AME font souvent l’objet de tous les fantasmes, ouvrant la porte des débats inutilement polémiques.

De plus on est en droit de se demander les motivations qui pourraient pousser les caisses d’assurance maladie à exercer un véritable contrôle dans la mesure où une loi de finances rectificative finit toujours par abonder le manque, et ce, sans aucune justification. Face à cette inorganisation dans le contrôle et dans le financement, il n’est pas difficile d’imaginer que tous les abus restent possibles et que c’est le mécanisme lui-même de financement et de contrôle qu’il faut remettre en cause.

Le Rapporteur spécial s’est par ailleurs spécifiquement intéressé à la politique de prévention afin de vérifier sa pertinence économique et en termes de santé. Il recommande à ce titre d’en renforcer le pilotage interministériel et de faire de l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (INPES) l’organe central de cette politique.

Plus globalement, il considère que les agences de santé sont encore trop nombreuses, entretenant un éparpillement des compétences et des moyens. Une rationalisation des structures apparaît plus que jamais nécessaire afin de générer des économies d’échelle et de recentrer chaque opérateur sur ses missions centrales.

PREMIÈRE PARTIE : LE PROGRAMME PRÉVENTION, SÉCURITÉ SANITAIRE ET OFFRE DE SOINS

Composé de neuf actions, le programme 204 regroupe les crédits consacrés par le ministère de la Santé à la prévention, à la sécurité sanitaire et au pilotage des stratégies et des politiques de santé publique. Si le rôle de l’État est déterminant pour fixer les grandes orientations en matière de santé publique, la mise en œuvre de ces politiques ne saurait se faire sans les organismes de sécurité sociale. Dès lors nombre d’actions bénéficient de financements croisés, les ressources versées par l’assurance maladie relevant du champ du projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Les crédits du programme devraient diminuent légèrement en 2014, passant de 700 à 693 millions d’euros. Le tableau suivant présente la décomposition de cette évolution par action et par nature de crédits.

CRÉDITS DU PROGRAMME 204

(en millions d’euros)

 

AE

CP

Action

2013

2014

Évolution

2013

2014

Évolution

Pilotage de la politique de santé

85,0

85,9

1,0 %

85,0

85,9

1,1 %

Accès à la santé et éducation à la santé

26,2

25,7

– 1,8 %

26,3

25,7

– 2,4 %

Prévention des risques infectieux

10,0

9,5

– 4,2 %

10,0

9,5

– 4,2 %

Prévention des maladies chroniques

67,0

66,3

– 1,1 %

66,8

66,3

– 0,8 %

Prévention des risques liés à l’environnement, au travail et à l’alimentation

21,6

21,6

– 0,1 %

21,6

21,6

– 0,1 %

Réponse aux alertes et gestion des urgences

20,4

18,3

– 10,4 %

20,4

18,3

– 10,4 %

Qualité, sécurité et gestion des produits de santé

150,4

144,9

– 3,7 %

150,4

144,9

– 3,7 %

Projets régionaux de santé

149,1

130,9

– 12,2 %

149,1

130,9

– 12,2 %

Modernisation de l’offre de soins

170,6

190,3

11,6 %

170,6

190,3

11,6 %

Total programme

700,2

693,4

– 1,0 %

700,2

693,4

– 1,0 %

Source : PAP 2014.

Le périmètre du programme est modifié à la marge sous l’effet de deux mesures :

– le transfert de 870 000 euros en provenance de la dotation globale de fonctionnement des départements au profit de l’action 18 Projets régionaux de santé. Il résulte du désengagement partiel des départements de l’Aveyron et de l’Allier pour le dépistage des cancers et de celui des Pyrénées-Atlantiques en matière de lutte contre la tuberculose ;

– la réforme du financement de la Haute Autorité de santé (HAS) prévue par le projet de loi de financement de la sécurité (cf. infra). Les taxes affectées sont en effet remplacées par une dotation budgétaire.

Sur l’ensemble des actions, la baisse touche uniquement les dépenses de fonctionnement (titre 3) qui passent de 352,4 à 345 millions d’euros alors que les dépenses d’intervention progressent très légèrement de 276 000 euros.

La réduction du titre 3 est la conséquence de la baisse des subventions pour charges de service public versées aux opérateurs relevant de la mission comme le montre le tableau ci-après.

SUBVENTION POUR CHARGE DE SERVICE PUBLIC
VERSÉE AUX OPÉRATEURS PAR LE PROGRAMME 204

(en millions d’euros)

Opérateur

2013

2014

Évolution

ABM (Agence de biomédecine)

15,2

15,1

– 0,7 %

ANSM (Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé)

128,5

123,3

– 4,0 %

ANSÉS (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) (1)

13,7

13,7

0,0 %

AITH (Agence technique de l’information sur l’hospitalisation)

3,4

3,3

– 2,4%

CNG (Centre national de gestion)

3,8

3,7

– 2,6%

EHESP (École des hautes études en santé publique) (2)

10,6

10,4

– 1,9%

EPRUS (Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires)

19,4

17,3

– 10,8%

INCa (Institut national du cancer)

55,7

55,6

– 0,2%

INPES (Institut national de prévention et d’éducation pour la santé)

24,2

24,1

– 0,4%

INVS (Institut de veille sanitaire) (3)

55,6

55,5

– 0,2%

Total

330,1

322,0

– 2,4%

(1) L’ANSÉS reçoit des subventions pour charges de service public de quatre autres programmes ne relevant pas de la mission Santé.

(2) L’EHESP reçoit des subventions pour charges de service public de deux autres programmes ne relevant pas de la mission Santé.

(3) L’INVS reçoit des subventions pour charges de service public de trois autres programmes ne relevant pas de la mission Santé.

Source : PAP 2014.

Le programme 204 regroupe les crédits de l’État consacré à la prévention, à la sécurité sanitaire et à l’offre de soins. La plupart de ces actions relevant de financements croisés entre l’État et l’assurance maladie, le programme ne retrace qu’une partie des ressources affectées à ces politiques.

I. LA LENTE POURSUITE DES RÉFORMES STRUCTURELLES

A. LA RÉFORME DE LA SÉCURITÉ SANITAIRE

1. L’organisation et les moyens de l’ANSM

À la suite de l’affaire du Mediator, le rôle, la place et les moyens de l’agence française de sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé (Afssaps) ont été complètement revus. La nouvelle agence de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) rompt toute dépendance financière vis-à-vis de l’industrie pharmaceutique (1), la subvention pour charge de service public de l’État couvrant tous ses besoins. Dès 2013, le Rapporteur spécial s’interrogeait sur la concordance des nouvelles ressources de l’agence avec ses missions, craignant qu’il ne lui soit difficile de monter en puissance efficacement et dans les délais prévus. L’actualité a par ailleurs montré que les questions de sécurité restent particulièrement prégnantes, nécessitant une forte capacité de réaction des organes de contrôle.

a. Les structures de l’ANSM

La nouvelle organisation de l’agence a conduit à repenser les processus existants sur la base de critères déontologiques, des capacités d’encadrement et des compétences scientifiques ou techniques. Cet objectif a abouti à d’importantes reconfigurations des équipes avec une forte logique de colocalisation. En termes de mobilité, quelque 800 des 1 100 agents ont été invités à se positionner sur les postes reconfigurés. L’Afssaps comprenait par exemple environ 110 instances internes, ce qui était à l’évidence contre-productif et générait d’inévitables cloisonnements et doublons. La nouvelle organisation s’inscrit dans une logique de décloisonnement et de coopération interne aboutie. Désormais l’instruction des dossiers repose sur les compétences internes des directions opérationnelles. Le recours à des expertises externes, s’il n’est pas supprimé, est très fortement limité et encadré par une procédure stricte.

Le directeur général peut en outre s’appuyer sur quatre commissions :

– la commission d’évaluation initiale du rapport entre les bénéfices et les risques des produits de santé ;

– la commission de suivi du rapport entre les bénéfices et les risques des produits de santé ;

– la commission des stupéfiants et psychotropes ;

– la commission de prévention des risques liés à l’utilisation de catégories des produits de santé.

Ces commissions sont composées d’experts ; ne sont plus membres de ces instances les représentants de l’administration ni les représentants de l’industrie pharmaceutique. Ces commissions sont saisies chaque fois que l’instruction d’un dossier nécessite un avis collégial complémentaire à une évaluation interne sur une question spécifique. Le choix des dossiers éligibles pour être présentés en commission repose sur des critères objectifs afin de garantir une harmonisation dans l’évaluation et une équité dans le traitement des dossiers. Les critères définis concernent d’une manière générale les dossiers présentant un enjeu important en termes de santé publique et notamment de sécurité sanitaire.

Concomitamment, l’agence a développé un schéma pluriannuel de la stratégie immobilière (SPSI) avec notamment le projet de regrouper la plupart des services sur le site de Pleyel.

b. La prévention des conflits d’intérêts

La loi n° 2011-2012 du 29 décembre 2011 relative au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé a prévu diverses dispositions visant à prévenir les conflits d’intérêts des experts intervenant auprès des agences sanitaires. Les déclarations publiques d’intérêts sont actuellement publiées sur le site Internet de chaque organisme, dans l’attente du futur site commun prévu par le décret du 9 mai 2012 (2).

La déclaration d’intérêts couvre un champ large puisqu’en 2013 ce sont 8 550 déclarations qui ont été recueillies. Pour l’ANSM, cette obligation concerne plus de 400 personnes, soit 40 % des effectifs. Compte tenu de l’importance du volume, l’agence a créé un service de déontologie de l’expertise placé auprès du directeur général. Il procède notamment à une analyse des risques de conflit d’intérêt aussi bien en interne, dans le cadre notamment des processus de recrutement, qu’en externe en définissant par exemple les activités compatibles avec le mandat de membre d’instances de l’ANSM. Ces personnels doivent en effet s’engager à ne pas avoir ou à se défaire des liens suivants pendant la durée de leur mandat de trois ans :

– percevoir des rémunérations personnelles de la part des entreprises, des établissements ou des organismes dont les activités entrent dans le champ de compétence de l’ANSM ainsi qu’avec les sociétés ou organismes de conseil intervenant dans ces mêmes secteurs ;

– l’exercice de la responsabilité d’investigateur principal d’essais cliniques industriels, c’est-à-dire non académiques et impliquant des produits de santé.

Cet examen est particulièrement important pour ce qui concerne les recrutements mais il est également attentif aux possibles conflits d’intérêts lors d’un départ de l’agence.

c. Une diminution critique des moyens de l’agence

La principale critique formulée contre l’Afssaps portait sur l’externalisation de son expertise. L’ANSM s’inscrit dans une logique totalement inverse, ce qui nécessite de conserver les compétences existantes mais aussi de les renforcer. Lors de sa création, il avait été ainsi annoncé que le plafond d’emplois serait augmenté de 40 postes en 2012 et en 2013. En pratique, ces objectifs n’ont pas été respectés, ce qui n’est pas sans poser de fortes interrogations sur la capacité de l’agence à mener à bien l’ensemble de ses missions. Le tableau ci-après présente l’évolution du plafond d’emplois de l’ANSM.

ÉVOLUTION DES EMPLOIS DE L’ANSM

(en équivalents temps plein)

ETP

2011

2012

LFI 2013

Réajustement 2013

2014

Sous plafond

978

+ 25 (1)

1 003

 

1 003

1 003

1 003

Mesures de gestion

         

+ 6 sur le programme 204

 

Hors plafond

16

 

16

– 10 (2)

6

6

6

Total

994

+ 25

1 019

– 10

1 009

1 015

1 009

Mesures exceptionnelles

         

+ 7 ETPT task force pour résorption retard d’AMM (3 + 4)

 

(1) Plan de renforcement réel, en précisant que la création de 40 emplois en 2012 était inscrite dans la LFI 2012 dont 15 par redéploiement interne à l’agence. La LFI 2012 identifiait également 40 emplois pour 2013.

(2) Réintégration dans le plafond de 10 emplois consacrés à des missions pérennes occupés par personnels en CDI ou fonctionnaires, et précédemment hors plafond.

Source : ANSM.

La suppression de dix emplois en 2013 a généré des tensions très fortes, obligeant à des mesures exceptionnelles pour résorber le retard constaté en matière d’autorisations de mise sur le marché (AMM). Pour 2014, le plafond est maintenu à un niveau équivalent à celui de la loi de finances initiale pour 2013 alors même qu’il s’est avéré insuffisant en exécution. Le projet annuel de performances considère que ce maintien « place l’opérateur au cœur des priorités gouvernementales en 2014 ». Le Rapporteur spécial, au contraire, considère que les choix du projet de loi de finances pour 2014 font peser un risque insupportable sur l’agence. Faute de moyens suffisants, l’agence devra opérer des choix drastiques la conduisant à supprimer certaines activités non réglementaires et à réduire son activité sur le contrôle de la publicité par exemple ou en réduisant le nombre d’inspections. Le non-respect des engagements initiaux risque par ailleurs de mettre en péril la réorganisation structurelle initiée en 2012. Sur un plan qualitatif, si l’agence n’arrive plus à recruter dans de bonnes conditions, elle risque de perdre des compétences précieuses, ce qui nuira nécessairement à ses missions légales.

Cette contrainte sur les personnels apparaît d’autant plus problématique que la subvention pour charge de service public est en nette baisse en 2014.

COMPTE DE RÉSULTAT DE L’ANSM

(en milliers d’euros)

Charges

Compte financier 2012 (1)

Budget prévisionnel 2013

Produits

Compte financier 2012 (1)

Budget prévisionnel 2013

Personnel

75 630

80 574

Ressources de l’État

129 544

124 659

dont charges de pensions civiles

3 590

4 007

– subventions de l’État

129 544

124 659

Fonctionnement

35 852

39 465

– ressources fiscales

0

0

Intervention

18 760

20 963

Autres subventions

89

0

     

Ressources propres et autres

15 779

16 342

Total des charges

130 242

141 002

Total des produits

145 412

141 001

Résultat : bénéfice

15 170

 

Résultat : perte

 

1

Total : équilibre du CR

145 412

141 002

Total : équilibre du CR

145 412

141 002

(1) Voté

Source : PAP 2014.

Le projet annuel de performances considère que cette économie de 5,2 millions d’euros tient compte des « économies attendues […] sur ses dépenses de fonctionnement […] ainsi que du niveau de son fonds de roulement ». Or, ce dernier reste à un niveau mesuré puisqu’il devrait atteindre 36,7 millions d’euros à la fin de l’année 2013. Si un prélèvement sur le fonds n’est pas dommageable par principe, il ne faudrait pas que l’État en tire prétexte pour se désengager et ne pas assumer ses obligations envers l’agence alors même que le Gouvernement met l’accent sur la nécessité de maintenir un haut niveau de contrôle sur les produits de santé.

1. La réforme du financement de la Haute Autorité de santé

Le financement de la Haute Autorité de santé (HAS) repose sur une double dotation de l’État et de l’assurance maladie, complétée par des taxes affectées. Le tableau suivant détaille la répartition de ces ressources en 2012 et 2103.

RESSOURCES DE LA HAS

(en millions d’euros)

 

2012

2013

Produits

Budget primitif

Exécuté

Budget primitif

Subvention État

7 520

7 520

7 200

Subvention AM

21 200

21 200

24 340

Ressources propres

27 300

38 886

15 500

Autres produits

1 247

1 377

1 269

Total

57 267

68 983

48 309

Source : ministère de la Santé.

Les taxes et contributions affectées à la HAS sont, d’une part, des contributions sur les dépenses de promotion des produits de santé (médicaments et dispositifs médicaux) et, d’autre part, des taxes payées par les laboratoires pharmaceutiques et les fabricants de dispositifs dans le cadre de l’inscription ou du renouvellement d’inscription sur les listes de produits de santé pris en charge par l’assurance maladie.

Les taxes affectées à la HAS ont représenté 58 % de ses ressources en 2012. Il apparaissait malsain que le fonctionnement de l’autorité dépende de la taxation sur la publicité des produits de santé alors même qu’elle a vocation à en encadrer les pratiques. Outre la question de la pertinence de cette affectation, le caractère difficilement prévisible du rendement annuel de ces taxes rendait la gestion budgétaire extrêmement compliquée.

Suivant les recommandations du Rapporteur spécial en 2012, le projet de loi de finances et le projet de loi de financement pour 2014 remplacent les taxes affectées par des dotations budgétaires. Cette logique reprend d’ailleurs celle qui avait été retenue lors de la création de l’ANSM. Ces mesures permettront de garantir l’indépendance de la HAS vis-à-vis du secteur des produits de santé, de simplifier l’affectation des taxes qui seront désormais versées à la Caisse nationale de l’assurance maladie (CNAMTS). Elles participent en cela à l’effort de rationalisation déjà engagé puisque, à l’instar de ce qui a été fait pour les taxes payées par les laboratoires au titre des missions de l’ANSM, le recouvrement des taxes sera opéré par les services fiscaux. Le tableau suivant détaille les mouvements de crédits opérés par le PLF et le PLFSS.

NOUVEAU SCHÉMA DE FINANCEMENT DE LA HAS

(en millions d’euros)

 

Taxes

TVA nette

Subvention de l’État

Dotation de l’assurance maladie

Total

HAS

– 30,9

 

10,3

20,6

0,0

État

 

10,3

– 10,3

 

0,0

CNAMTS

30,9

– 10,3

 

– 20,6

0,0

Total

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

Source : étude d’impact du PLFSS 2014.

Le montant des taxes transférées de la HAS vers la CNAMTS est estimé à 30,9 millions d’euros. En contrepartie, la subvention de l’État et la dotation de l’assurance maladie en faveur de la HAS sont respectivement augmentées de 10,3 et 20,6 millions d’euros. Pour compenser la perte de recettes de l’État liée à la hausse de sa subvention envers la HAS, la CNAMTS, qui perçoit la totalité des taxes, lui restitue une fraction de TVA nette qui lui est aujourd’hui affectée pour un montant équivalent, soit 10,3 millions d’euros. En fin de compte, le dispositif est neutre pour l’ensemble des acteurs, il simplifie significativement les mouvements de crédits et renforce l’indépendance de la HAS.

2. Les moyens de l’ANSÉS

a. L’activité et les ressources de l’agence

Créée par l’ordonnance du 7 janvier 2010 (3), l’agence nationale chargée de la sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSÉS) met « en œuvre une expertise scientifique indépendante et pluraliste » et « contribue principalement à assurer la sécurité sanitaire humaine dans les domaines de l’environnement, du travail et de l’alimentation ». L’actuel contrat d’objectifs et de performance, signé en 2012, prévoit une réduction des moyens de l’agence, tant en termes budgétaires qu’en termes de ressources humaines. L’année 2014 confirme cette tendance, ce qui nécessitera de mieux cibler les actions de l’agence mais aussi de poursuivre la rationalisation des structures. Pour autant, les subventions versées par l’État restent au même niveau qu’en 2013, soit un total de 94,7 millions d’euros, dont 13,7 millions d’euros au titre du programme 2014.

En 2013, l’ANSÉS a finalisé son travail sur le bisphénol A et ses dérivés, dans le cadre de ses travaux sur les perturbateurs endocriniens. Elle a participé à l’actualisation des connaissances scientifiques sur les risques liés aux radiofréquences ainsi qu’à l’évaluation des risques liés à la consommation de boissons énergisantes. Elle s’est également intéressée à l’exposition des travailleurs aux bitumes.

Plusieurs textes devraient avoir un impact direct sur l’activité de l’agence en 2014. Dans le cadre de la nouvelle loi sur l’enseignement supérieur et la recherche, l’ANSÉS devra préparer des contrats de site pour ses laboratoires, en lien avec les régions d’accueil. Le projet de loi d’avenir agricole devrait comporter des dispositions relatives à l’évaluation et au suivi des produits phytosanitaires qui relèvent du champ de compétence de l’ANSÉS. De même, l’expérience réussie de la plateforme d’épidémiosurveillance en santé animale mise en place depuis fin 2011 pourrait conduire à consolider et étendre le dispositif par voie législative. Le projet de loi de santé publique devrait quant à lui intégrer une réforme des dispositifs de vigilance, qui concernent l’ANSÉS pour la pharmacovigilance (médicaments vétérinaires), la nutrivigilance et la toxicovigilance (notamment pour les produits chimiques).

Il convient enfin de noter que l’ANSÉS participe activement à la préparation du plan national santé environnement (PNSE 3) et à celle du plan santé travail (PST 3).

b. Le programme immobilier

Actuellement les personnels de l’agence sont répartis sur trois sites : le campus de l’école vétérinaire et deux sites en location, les trois étant situés à Maisons-Alfort. Afin de regrouper les équipes du siège, il a été décidé de construire un immeuble de bureaux sur le campus de l’école vétérinaire à Maisons-Alfort. Ce projet prend place dans le « Grand projet Alfort » qui vise la mise en valeur du site historique de l’école vétérinaire. Cette solution est la plus économique sur le moyen terme et la plus efficiente pour le fonctionnement de l’agence. En effet, elle permet le regroupement sur un même site de plus de 700 personnes assurant les activités du siège (170 personnes), d’évaluation des risques (300 personnes) et les activités de laboratoire de référence et de recherche sur la sécurité sanitaire des aliments et la santé animale (plus de 230 personnes). Ce projet permettra également de renforcer les synergies avec l’école vétérinaire, en mutualisant certains services et en développant les coopérations scientifiques.

Le Gouvernement a autorisé l’agence, en octobre 2010, à engager une procédure d’autorisation d’occupation temporaire du domaine public en location (AOT-L) : il s’agit de la construction d’un immeuble de bureaux par un opérateur privé sur le campus de l’école vétérinaire, dans une logique de type « bail emphytéotique », l’ANSÉS devant verser des loyers. Le conseil d’administration a validé en avril 2012 le choix de l’opérateur Sogeprom à l’issue de la consultation menée selon la procédure de dialogue compétitif.

Les travaux sont actuellement en cours et l’ensemble du gros œuvre devrait être terminé à la fin de l’année. L’opérateur prévoit de livrer le bâtiment fin septembre 2014, ce qui permettra de regrouper l’ensemble des équipes de l’ANSÉS à l’automne 2014.

A. LA RÉPONSE AUX URGENCES SANITAIRES

1. La mise en œuvre du contrat de performance de l’EPRUS

Institué par la loi du 5 mars 2007 (4), l’Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (EPRUS) assure, sous la tutelle du ministère de la Santé, la gestion des moyens de lutte contre les menaces sanitaires graves, tant du point de vue humain (réserve sanitaire) qu’au plan matériel (produits de santé). Il appartient également à l’EPRUS d’acquérir, de fabriquer, d’importer, de stocker et de distribuer des produits et services nécessaires à la protection de la population face aux menaces sanitaires graves. Pour ce faire, il gère les stocks de produits et traitements acquis ou confiés par l’État constitués principalement par des médicaments et des dispositifs médicaux. Il fournit l’expertise logistique nécessaire à la préparation et à la mise en œuvre des plans de réponse aux menaces sanitaires graves. Il gère enfin les matériels de l’État nécessaires à la lutte contre les menaces nucléaire, radiologique, biologique ou chimique (NRBC).

Suite aux différents rapports parlementaires sur la gestion de la pandémie grippale de 2009, un contrat de performance entre l’État et l’établissement a été signé en 2011 et détermine cinq orientations stratégiques pour la période allant de 2011 à 2013. L’année 2014 marque le lancement d’un nouveau contrat de performance, en cours de définition.

L’année 2013 a été marquée par un renforcement des liens entre l’EPRUS et les agences régionales de santé (ARS). L’EPRUS apporte ainsi expertise logistique aux ARS, notamment dans le cadre du plan pandémie grippale et des travaux relatifs à l’organisation d’une campagne de vaccination de grande ampleur ou de la distribution des produits de santé. Il apporte également des solutions techniques pour la gestion des moyens de réponse des établissements de santé.

Par ailleurs l’établissement poursuit la mise en œuvre du programme d’achats pluriannuel des stocks stratégiques, permettant de lisser les acquisitions de produits de santé sur plusieurs exercices et d’optimiser la programmation budgétaire de l’établissement, tout en maintenant le même niveau de protection des populations face aux menaces sanitaires graves. Ce programme s’inscrit notamment dans le cadre de la révision des doctrines d’emploi des produits. Parallèlement, une rationalisation des sites de stockage a été engagée avec la construction d’un site de stockage central dont les travaux ont débuté au cours de l’été 2013 et devraient s’achever dans le courant de l’année 2014.

Le volet logistique est complété par la mise en œuvre du programme de distribution des produits de santé en situation d’urgence en lien avec les ARS. Au plan national, l’EPRUS a procédé à de nombreuses opérations de déstockage pour utilisation (vaccins, antitoxines, etc.), pour contrôle ou pour destruction. Sur le volet international, l’établissement a également participé à une dizaine d’opérations de livraison de dispositifs médicaux et produits de santé (antibiotiques, antidotes, etc.) en application d’une convention passée avec le ministère des Affaires étrangères, dans des situations d’urgence humanitaire y compris dans un contexte de conflit armé.

La dotation pour charges de service public de l’EPRUS apparaît néanmoins en baisse assez nette pour 2014, passant de 19,4 à 17,3 millions d’euros.

2. La réserve sanitaire

L’année 2013 marque la stabilisation du nouveau cadre d’emploi de la réserve sanitaire, dont les évolutions contribuent à améliorer son articulation avec les autres dispositifs territoriaux de mobilisation existants, notamment le plan blanc élargi. Cette stabilisation était accompagnée en pratique d’une phase d’expérimentation pilote menée avec cinq ARS et plusieurs établissements de santé. Ces évolutions ont été formalisées par le décret du 7 janvier 2013 relatif à la préparation et aux réponses aux situations sanitaires exceptionnelles (5). En termes de personnels, la campagne lancée en 2012 s’est prolongée en 2013, ce qui a permis d’accroître sensiblement les effectifs de la réserve sanitaire. Actuellement, l’EPRUS gère plus 8 500 dossiers, candidats et réservistes actifs confondus.

À ce stade, 62 % des réservistes sont issus de professions paramédicales, 27 % du corps médical, les effectifs restants se répartissant entre les professions techniques et administratives. Les professionnels de santé salariés représentent 61 % de l’effectif total.

Le budget de la réserve sanitaire a été stabilisé à 2,6 millions d’euros à partir de 2013. Il vise notamment à assurer le maintien en condition opérationnelle des réservistes, par la gestion de leurs équipements d’intervention, leurs formations individuelles et la rémunération de leurs périodes de formation, conformément à la loi. Cette enveloppe permet également de couvrir les dépenses liées à sa mobilisation.

En 2013, la réserve sanitaire a été sollicitée pour plusieurs missions de renfort sur le territoire national. Dans le cadre du plan grand froid, certains volontaires (médecins et infirmiers retraités) ont participé au renfort du dispositif des maraudes sociales dans les principales agglomérations métropolitaines. La réserve sanitaire a également été mobilisée, de mars à juin, pour faire face à l’épidémie de dengue qui sévit dans la région Guyane ; les réservistes volontaires ont ainsi renforcé les équipes du centre hospitalier de Cayenne. L’EPRUS s’est également préparé durant l’été pour une potentielle intervention en renfort dans le cadre du plan canicule. Enfin, l’établissement est resté en alerte tout au long de l’année s’agissant d’une éventuelle action au Proche-Orient dans le cadre d’une intervention humanitaire.

A. L’AVENIR DES PLANS DE SANTÉ

Dans son rapport spécial sur le projet de loi de finances pour 2013, M. Christian Estrosi rappelait l’intérêt des grands plans de santé, estimant qu’ils permettent, d’une part, de « donner de la visibilité à des sujets souvent techniques et, d’autre part, de structurer l’action de tous les acteurs » (6). En 2012, aucune orientation ne semblait arrêtée en la matière, laissant la plupart des acteurs dans l’expectative alors même que les plans représentent leur principale source de revenus.

Partant du constat qu’il est « souvent difficile de connaître l’ensemble de la programmation nationale », la direction générale de la santé édite un livre des plans de santé publique qui vise à « offrir un panorama de l’ensemble des plans nationaux de santé » (7). Ce document n’a toutefois pas été remis à jour depuis mai 2011 et il n’existe à ce jour aucun document de synthèse sur les différents plans de santé. En outre, plusieurs des plans se sont terminés ou sont en voie de l’être depuis 2011 et aucun document ne donne de perspective d’ensemble à cette politique. Faute d’une approche exhaustive, le Rapporteur spécial a examiné plus spécifiquement cinq plans qui lui paraissent avoir une importance particulière, que ce soit en termes financiers ou en termes de santé.

Le Rapporteur spécial regrette de n’avoir reçu aucun élément sur le plan Alzheimer alors même qu’il avait fait l’objet d’un développement spécifique dans le rapport spécial de l’année dernière.

1. Le plan cancer

Dans son discours du 4 décembre 2012, le Président de la République a annoncé le lancement d’un troisième plan cancer pour les années 2014 à 2018. Préalablement à la définition des nouvelles orientations, le Gouvernement a chargé le professeur Jean-Paul Vernant d’une évaluation du plan précédent. Remis à la ministre de la santé le 30 août dernier, ce document a pris en compte les travaux du Haut Conseil de la santé publique (HCSP) et de l’Agence d’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (AERES). Il a également utilisé le bilan qui a été fait des progrès portés par les agences régionales de santé (ARS). Tous les acteurs de la lutte contre les cancers ont été associés à cette phase préparatoire.

Les principales critiques du rapport Vernant concernent la politique de prévention des risques tabagiques, la participation aux dépistages organisés et la persistance de facteurs d’inégalités, abordées du point de vue de l’impact sur les populations.

De façon concomitante, le rapport final du deuxième plan cancer a été remis au Président de la République. Il note que 60 % des actions ont été réalisées en juin 2013 ou le seront avant la fin de l’année, pour un taux de mobilisation des ressources prévues de 85 %.

Fort de ces éléments, le ministère a confirmé les grandes orientations du prochain plan autour de cinq axes :

– la prévention et du dépistage,

– la recherche,

– les parcours de soins,

– les formations et les pratiques de la cancérologie,

– la vie pendant et après le cancer.

Des groupes de travail ont été constitués au sein du ministère des affaires sociales et de la santé et au sein du ministère de la recherche, tous deux pilotes du programme, l’Institut national du cancer (INCa) assurant une mission spécifique d’assistance à la rédaction du plan. En effet, outre la participation aux groupes de réflexion, c’est à l’INCa qu’il reviendra de mettre en forme le document final. Les fiches-actions élaborées par ces groupes devraient être achevées le 15 novembre prochain de façon que la synthèse et la relecture soient faites par le comité de pilotage avant Noël. Le contenu définitif du plan sera quant à lui présenté lors des journées « cancer » de l’INCa le 4 février 2014.

Le Rapporteur spécial se réjouit de voir ce dossier enfin aboutir tant il était important pour les acteurs de la lutte contre le cancer. Outre les enjeux financiers, le plan cancer constitue en effet un élément fédérateur, de visibilité et de lisibilité de toutes les actions engagées. Néanmoins les perspectives budgétaires proposées par le projet de loi de finances apparaissent en retrait de l’ambition affichée, les crédits et les moyens humains de l’INCa diminuant légèrement. Si l’INCa ne saurait s’abstraire de l’effort commun de contrôle des dépenses, il lui sera certainement difficile de faire plus avec des moyens au mieux constants.

Le tableau suivant présente l’évolution des ressources de l’INCa.

COMPTE DE RÉSULTAT DE L’INCA

(en milliers d’euros)

Charges

Compte financier 2012 (1)

Budget prévisionnel 2013

Produits

Compte financier 2012 (1)

Budget prévisionnel 2013

Personnel

13 207

14 026

Ressources de l’État

53 021

52 753

dont charges de pensions civiles

238

290

–subventions de l’État

53 021

52 753

Fonctionnement

17 411

21 257

– ressources fiscales

0

0

Intervention

67 050

68 726

Autres subventions

47 890

48 334

     

Ressources propres et autres

2 936

2 922

Total des charges

97 668

104 009

Total des produits

103 847

104 009

Résultat : bénéfice

6 179

 

Résultat : perte

 

1

Total : équilibre du CR

103 847

104 009

Total : équilibre du CR

103 847

104 009

(1) Voté

Source : PAP 2014.

En 2014, la subvention de l’État sera réduite de 100 000 euros pour atteindre 55,6 millions d’euros. En termes d’effectifs, le plafond sera ramené à 154 ETP auquel il faut ajouter 10 ETP hors plafond qui correspondent soit à des missions antérieurement exercées par des partenaires de l’INCa, comme la ligue contre le cancer ou Unicancer, soit à des engagements européens déjà contractés.

2. Le plan psychiatrie santé mentale

Le plan psychiatrie et santé mentale 2011-2015 fixe les grandes orientations nationales qui doivent être déclinées opérationnellement par les opérateurs nationaux et par les agences régionales de santé. Plusieurs sujets sont notamment mis en exergue comme la prise en charge, l’accompagnement des patients les plus lourds et le rôle des aidants (familiaux et entourage). Le plan aborde également quatre points qui ne font actuellement pas l’objet de suffisamment d’initiatives :

– les actions de promotion et de prévention de la santé mentale, y compris le repérage précoce des troubles ;

– les actions de déstigmatisation ;

– l’amélioration du système de surveillance national et local en santé mentale ;

– le développement de la recherche et de l’évaluation des pratiques professionnelles.

Le plan est adapté dans chaque territoire par les ARS, ces ajustements devant faire l’objet d’un bilan à la fin du plan, c’est-à-dire en 2016. À ces actions menées au plan local, s’ajoute un soutien financier du ministère de la Santé, dans le cadre du programme 204, aux associations ou sociétés savantes œuvrant dans le champ de la psychiatrie par le biais de conventions d’objectifs. Pour l’année 2013, cette enveloppe de 1,4 million d’euros contribue par exemple à soutenir des associations d’usagers et de familles qui œuvrent notamment pour le développement d’actions au bénéfice des patients (accueil téléphonique, formation à la représentation institutionnelle) ou au bénéfice des familles de patients (accueil téléphonique, conseil juridique…). Le soutien à de pareilles actions d’information sur la maladie mentale participe ainsi à la déstigmatisation des troubles mentaux. Selon les informations transmises au Rapporteur spécial, ce soutien financier aux associations à rayonnement national sera poursuivi en 2014, mais sans que le montant de la subvention ne soit indiqué.

Le ministère fait également valoir que le Gouvernement a indiqué, en février 2013, faire de la santé mentale une priorité de santé publique. Aucune indication budgétaire ne figure cependant dans le projet annuel de performances pour 2014.

3. Le plan national nutrition santé et le plan obésité

Le plan national nutrition santé (PNNS) pour les années 2011 à 2015 s’organise autour de quatre axes centraux et un volet transversal :

– axe 1 : réduire par des actions spécifiques les inégalités sociales de santé dans le champ de la nutrition au sein d’actions générales de prévention ;

– axe 2 : développer l’activité physique et sportive (APS) et limiter la sédentarité ;

– axe 3 : organiser le dépistage et la prise en charge du patient en nutrition et diminuer la prévalence de la dénutrition ;

– axe 4 : valoriser le PNNS comme référence pour les actions en nutrition ainsi que l’implication des parties prenantes ;

Le volet transversal concerne quant à lui la formation, la surveillance, l’évaluation et la recherche.

Le plan obésité (PO) complète le PNNS par l’organisation du dépistage et de la prise en charge des patients et la prise en compte des situations de vulnérabilité.

Par ailleurs, afin de tenir compte des particularités des populations de l’outre-mer, une déclinaison spécifique de deux plans a été élaborée et lancée en février 2012. Elle s’articule autour de trois axes :

– améliorer l’offre alimentaire et favoriser la pratique de l’activité physique et sportive ;

– renforcer la surveillance de l’état nutritionnel et améliorer le dépistage et la prise en charge de l’obésité et des pathologies associées ;

– adapter la communication et renforcer l’éducation nutritionnelle. En effet, dans tous les départements d’outre-mer, la prévalence de l’obésité mais aussi des autres pathologies associées (diabète, hypertension artérielle, maladies cardio-vasculaires) est plus élevée qu’en métropole, notamment chez les femmes enceintes.

Le plan dispose d’un budget de près de 117 millions d’euros pour l’ensemble de la période. Le plan obésité bénéficie pour sa part de 64,6 millions d’euros versés par l’assurance maladie et d’une dotation de l’État de 170 739 euros. La déclinaison des deux plans en outre-mer bénéficie d’une enveloppe totale de 5,54 millions d’euros.

L’année 2013 a notamment été marquée par la mise en œuvre du plan sport, santé, bien-être (PSSBE). En vue d’informer et inciter à la pratique des publics les plus défavorisés, une expérimentation est en cours en Seine-Saint-Denis. Elle repose sur une stratégie fondée sur la participation de la population et des professionnels des secteurs de la santé, du sport, du social et de la jeunesse, ainsi que sur l’implication des élus de la ville pour développer l’activité physique des divers groupes de population d’un quartier en zone urbaine sensible, en lien avec l’atelier santé-ville de la ville de Saint-Denis.

Pour ce qui concerne la nutrition, un projet régional de 18 mois a été lancé dans le Limousin. Il s’agit d’organiser dix conférences sur le thème de la dénutrition à destination des professionnels de santé des établissements de santé, des médecins généralistes, des pharmaciens d’officine, des travailleurs sociaux et du grand public. Par ailleurs un réseau national de centres spécialisés pour les troubles du comportement alimentaire est en cours de création.

Un effort particulier a été apporté à la promotion du plan auprès du grand public. Le site www.mangerbouger.fr a ainsi intégré de nouveaux outils comme La Fabrique à menus en avril 2013 qui a rencontré un franc succès : ce service permet de générer des menus variés, conformes aux repères nutritionnels du PNNS, adaptés aux saisons. Les menus sont par ailleurs adaptés selon des critères définis par l’internaute en tenant compte de son mode de vie (date, période, nombre de personnes…).

Selon les informations transmises au Rapporteur spécial, les crédits versés par l’État à ces deux plans devraient être maintenus en 2014 au même niveau qu’en 2013. Pour ce qui est du programme 204, cela représente une subvention de 1,01 million d’euros, l’essentiel des crédits étant versé par l’intermédiaire de l’INPES et de l’assurance maladie.

4. Le plan national santé environnement

Le deuxième plan national santé environnement (PNSE2) décline de manière opérationnelle les engagements du Grenelle de l’environnement relatifs à la préservation de la santé des populations au regard des dégradations de l’environnement. Pour la période 2009-2013, le plan comporte 58 mesures dont 12 prioritaires visant d’une part à réduire les expositions responsables de pathologies à fort impact sur la santé et, d’autre part, à diminuer et gérer les inégalités environnementales.

Pour la totalité de sa durée, le PNSE2 a été doté d’un budget de 380 millions d’euros versé par les différents ministères, auquel s’ajoutent 124 millions d’euros consacrés à la recherche dans le domaine de la santé et de l’environnement. Par ailleurs, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSÉS) finance également des programmes de recherche sur ces sujets. Il n’y a en revanche pas de dotations de l’assurance maladie affectées spécifiquement à des actions du PNSE2.

En 2013, le ministère chargé de la Santé a consacré à cette politique 5,77 millions d’euros, auxquels s’ajoutent 5,2 millions d’euros destinés à l’ANSÉS.

Le PNSE2 se terminera fin 2013 et ne sera pas immédiatement reconduit. En effet, à l’issue de la conférence environnementale de septembre 2012, il a été décidé de procéder à son évaluation. Les conclusions de la mission confiée notamment à l’Inspection générale des affaires sociales et au Haut Conseil de santé publique devraient être remises à la fin de l’année.

Dans l’élaboration du PNSE 3, une attention particulière sera portée à sa coordination avec les autres plans et notamment avec les nouveaux plans cancer et santé-travail.

Certaines actions du PNSE2 ne sont cependant pas achevées cette année et seront poursuivies en 2014, en particulier en matière de biosurveillance, de refonte du système de toxicovigilance ou de prévention et d’amélioration des connaissances des risques liés au bruit, notamment en direction des jeunes.

Pour financer ces actions, un budget de 6,45 millions d’euros sera maintenu au sein du programme 204 ; les crédits versés à l’ANSÉS à ce titre seront par ailleurs reconduits.

5. La prise en charge d’autres maladies chroniques

En parallèle des plans centrés sur des pathologies ou des risques spécifiques, le ministère a développé un plan d’amélioration de la prise en charge de la douleur entre 2006 et 2010. Dans la continuité de ce plan, la direction générale de l’offre de soins prépare l’élaboration d’un nouveau plan visant à améliorer « la prise en charge des patients algiques dans le cadre d’un parcours de soins ». Trois axes de travail sont actuellement privilégiés :

– améliorer l’évaluation de la douleur et la prise en charge des patients algiques en sensibilisant les acteurs de premiers recours ;

– favoriser l’expression de la douleur pour mieux la repérer. Il s’agit notamment d’améliorer le repérage et la prise en charge des personnes ayant des difficultés de communication ;

– garantir la prise en charge de la douleur plus spécifiquement à domicile ou en établissement médico-social avec une attention particulière au vieillissement de la population.

Depuis 2007, un plan national pour « l’amélioration de la qualité de vie des personnes atteintes de maladies chroniques » était par ailleurs en place. Dans ce cadre, un espace Internet destiné à l’information des patients, de leurs familles et des professionnels de santé, sur la vie avec une maladie chronique a été ainsi créé en 2013. Il devrait intégrer le portail www.sante.gouv en 2014 afin de structurer cet espace et de mieux en définir les contenus. Un programme de formation de patients experts diabétiques et d’actions d’éducation thérapeutique du patient dans les appartements de coordination thérapeutiques a également mis en place cette année.

Le plan s’achevant en 2013, il a fait l’objet d’une évaluation finale par le Haut Conseil de la santé publique, qui estime que le plan est pertinent au regard du nombre de personnes souffrant de maladies chroniques. En effet, les dernières estimations font état d’environ 20 millions de personnes dans cette situation. Le HCSP considère nécessaire d’améliorer la prise en compte de ces maladies en raison de leur coût induit mais aussi de leur retentissement dans la vie quotidienne des malades et de leurs proches.

Le Rapporteur spécial regrette n’avoir reçu aucun élément de perspective sur ces deux plans qui ont pourtant fait la preuve de leur utilité et qui contribuent à l’amélioration quotidienne de la qualité de vie d’un très grand nombre de nos compatriotes.

I. L’ORGANISATION ET L’OFFRE DE SOINS

A. LA MODERNISATION DE L’OFFRE DE SOINS

1. La mise en œuvre du fonds régional d’intervention

Les agences régionales de santé (ARS) ont été créées par la loi « HPST » du 21 juillet 2009 (8). Leur financement est assuré par des contributions des régimes obligatoires d’assurance maladie ainsi que par une subvention de l’État au titre de la mission Solidarité, insertion et égalité des chances. La mission Santé prend quant à elle en charge les dépenses relatives, d’une part, à la sécurité sanitaire et, d’autre part, à la mise en œuvre des politiques de santé publique menées au titre de la prévention, de la promotion et de l’éducation à la santé. Elle finance également les actions des ARS relatives aux formations médicales extrahospitalières.

Depuis 2013 la subvention versée par le ministère de la Santé aux ARS n’apparaît plus comme une dépense de fonctionnement mais comme une dépense d’intervention puisqu’elle transite par les fonds d’intervention régionaux (FIR).

La création des FIR répondait à un objectif de responsabilisation accrue des responsables d’ARS puisqu’ils peuvent réaffecter plus largement les ressources pour tenir compte des spécificités locales. Le Rapporteur spécial avait demandé au ministère « l’état des mouvements intervenus en gestion témoignant d’une utilisation pertinente des pouvoirs de gestion des autorités déconcentrées ». Il souhaitait en effet vérifier que les FIR contribuent effectivement à une optimisation de la gestion des ressources. Malheureusement aucune réponse n’a été apportée sur ce point.

2. Les moyens financiers et humains des ARS

Globalement les ressources des ARS sont en légère augmentation en 2014, comme le montre le tableau ci-après, qui retrace l’évolution des crédits de l’État versés aux ARS.

CRÉDITS DE L’ÉTAT VERSÉS AUX ARS

(en milliers d’euros)

 

LFI 2013

PLF 2014

Action ou programme intéressé ou nature de la dépense

Autorisations d’engagement

Crédit de paiement

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Programme 124 : Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative

591 125

591 125

590 498

590 498

Programme 157 : Handicap et dépendance

575

630

780

780

Programme 162 : Interventions territoriales de l’État

997

1 315

1 125

987

Programme 204 : Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins

117 621

127 000

139 000

139 000

Total

685 434

720 070

731 403

731 265

Source : PLF 2014.

Au-delà de l’évolution positive de leurs ressources, les agences participent à l’effort collectif avec une baisse assez significative de leurs effectifs, comme le montre le tableau suivant.

ÉVOLUTION DES EMPLOIS DES ARS

(en équivalents temps plein)

 

Exécution 2012

LFI 2013

PLF 2014

Emplois (ETP) rémunérés par l’opérateur

8 897

9 038

8 888

Autres emplois (ETPT) en fonction dans l’opérateur

321

*

*

* L’actualisation des données de la réalisation 2012 en ce qui concerne les autres emplois rémunérés par d’autres collectivités ou organismes étant en cours, la prévision 2013 ne peut être renseignée à ce stade.

Source : PLF 2014.

Cette tendance baissière continue est d’autant plus inquiétante que le Gouvernement entend renforcer le rôle des agences dans la déclinaison locale des orientations nationales

A. LA FORMATION INITIALE ET CONTINUE

Les actions de formation initiale des professions médicales et paramédicales sont regroupées au sein de l’action 19 Modernisation de l’offre de soins du programme 204. Les crédits servent à financer :

– les stages des internes de médecine générale auprès de médecins généralistes agréés,

– les stages des internes de médecine générale auprès des médecins spécialistes (gynéco-obstétrique et pédiatrie),

– les stages des internes en stages extrahospitaliers (pédiatrie et gynécologie médicale),

– les stages de sixième semestre des internes de médecine générale (SASPAS),

– les stages accueillant des internes de médecine du travail, de santé publique et les stages des internes en pharmacie en milieu extrahospitalier,

– les honoraires pédagogiques versés aux maîtres de stage accueillant des étudiants et des internes,

– les stages des externes auprès de médecins généralistes agréés ainsi que les indemnités liées à la formation des maîtres de stage de deuxième cycle,

– l’année recherche.

1. L’indemnisation des stages

Les crédits consommés au titre de la formation médicale initiale pour l’exercice 2012 ont représenté 117,62 millions d’euros pour une programmation budgétaire initiale de 124,3 millions d’euros. L’écart constaté s’explique par une montée en charge moins importante que prévu des stages de second cycle pour les externes et des stages de sixième semestre. Ce décalage est principalement dû au manque de maîtres de stage et donc des terrains de stage offerts aux stagiaires.

Pour 2013, les besoins exprimés par les ARS s’élèvent au total pour les deux semestres universitaires au 31 août 2013 à 128,5 millions d’euros, ce qui devrait, sur l’ensemble de l’année, permettre de financer la formation d’un peu plus de 12 000 étudiants.

Le montant de l’enveloppe pour 2014 a été déterminé à partir du nombre d’étudiants susceptibles d’effectuer un stage extrahospitalier sur cet exercice, en tenant compte de l’évolution du numerus clausus établi pour les études médicales. Le projet annuel de performances estime que 13 000 étudiants devraient bénéficier d’un financement de l’État au titre des formations médicales extrahospitalières en 2014.

COÛT DES INDEMNITÉS DES STAGES DE FORMATION MÉDICALE INITIALE

(en millions d’euros)

 

Nombre de stagiaires

Coût total

 

2013

2014

Écart

2013

2014

Écart

Stages extrahospitaliers hors IMG et ambulatoire

461

502

8,9 %

8,8

8,8

0,1 %

Rémunération des internes de médecine générale en stage

3 087

3 511

13,7 %

54,4

61,8

13,7 %

Rémunération des IMG en stage libéral de pédiatrie et/ou gynécologie

444

342

– 23,0 %

7,1

5,5

– 22,0 %

Rémunération des internes (hors MG) en stage extra-hospi (péd, gynéco)

70

60

– 14,3 %

1,3

1,1

– 14,3 %

Rémunération des internes ou résidents en 6ème semestre (SASPAS)

1 243

1 499

20,6 %

22,1

26,6

20,6 %

Rémunération des stagiaires de 2ème cycle

6 785

6 872

1,3 %

3,1

3,1

1,3 %

Total indemnités stagiaires 2014

12 090

12 786

5,8 %

96,8

107,1

10,7 %

Source : PAP 2013 et 2014.

2. Les crédits de l’École des hautes études en santé publique (EHESP)

Établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel, constitué sous la forme d’un grand établissement, l’École des hautes études en santé publique (EHESP) assure la formation des personnels ayant à exercer des fonctions de direction, d’inspection ou de contrôle. Il délivre un enseignement supérieur en matière de santé publique avec un réseau national. Il contribue aux activités de recherche et développe des relations internationales dans l’ensemble de ces domaines, notamment par des échanges avec les autres établissements d’enseignement.

Le contrat d’objectifs et de performance (COP) 2012-2013 se termine en fin d’année et fera l’objet d’une évaluation avant la signature du contrat pour les années 2014 à 2018. Le futur COP devra permettre à l’EHESP de consolider ses activités en concentrant ses ressources sur ses axes forts et sur quelques priorités affichées, en relation avec les missions confiées à l’école par le législateur. L’École devra notamment définir ses axes de recherche prioritaires avec une concentration de ses moyens afin d’atteindre une masse critique. Elle devra également s’attacher à poursuivre l’adaptation de son offre de formation professionnelle et universitaire, à renforcer ses activités de recherche et son action internationale autour des axes prioritaires, tout en poursuivant sa stratégie de développement autour de ses unités mixtes de recherche.

Une attention particulière sera enfin portée à son schéma directeur d’information ainsi qu’à une amélioration de la gestion de son patrimoine immobilier.

Il convient enfin de relever que les comptes de l’école ont été certifiés pour la première fois en 2013 pour l’exercice 2012. Cette validation doit encourager l’école à poursuivre le travail engagé sur la base des recommandations des commissaires aux comptes afin d’assurer la qualité et la fiabilité de ses comptes et d’optimiser son organisation administrative et financière.

Sur le plan budgétaire, les ressources de l’école baissent de 265 000 euros en 2014, la subvention pour charges de service public versée par le programme 2014 étant pour sa part réduite de 200 000 euros. Cette économie sera tirée de la rationalisation des structures de fonctionnement de l’école, son montant ayant été calculé en fonction de sa situation financière actuelle.

A. LES SYTÉMES D’INFORMATION DE SANTÉ ET LE DOSSIER MÉDICAL PERSONNEL

1. Les ressources de l’ASIP

L’Agence nationale des systèmes d’information partagés de santé (ASIP Santé) est financée principalement sur des crédits d’assurance maladie ; elle reçoit en outre une subvention de l’État notamment pour la mise œuvre du répertoire partagé des professionnels de santé (RPPS) et pour l’évolution du système d’information de la veille et sécurité sanitaire.

En 2012, le budget de l’agence a atteint 66,1 millions d’euros dont seulement 600 000 euros versés par l’État alors qu’une subvention de plus d’un milliard d’euros avait été prévue. La suspension des actions de déploiement des usages du dossier médical personnel (DMP) explique l’essentiel de cette sous-consommation.

En 2013, le conseil d’administration a adopté un budget de 52,2 millions d’euros, en raison de l’attente de décisions ministérielles sur le DMP. Pour l’exercice 2013, les principales actions menées par l’ASIP Santé ont porté sur la réforme de la carte de professionnel de santé (CPS) et la simplification administrative de l’identification des professionnels de santé. L’évolution technologique de la carte et de la nature du marché industriel ont conduit l’ASIP Santé à inscrire la CPS et la production des certificats dans la politique publique des missions de production de titres sécurisés. Dans ce cadre, la production des cartes est désormais un monopole de l’Imprimerie nationale.

L’agence accompagne également six régions et cinq grands projets en matière de télémédecine. Mise en service en juillet 2013, la messagerie sécurisée de santé (MSSanté) permet à tous les professionnels de santé d’échanger entre eux par courriel des données de santé à caractère personnel de leurs patients, dans le respect de la réglementation en vigueur. D’autres solutions de messageries sécurisées interopérables seront rendues progressivement intégrées au dispositif à partir de 2013 et en 2014, notamment dans les établissements de santé.

Le Rapporteur spécial ne dispose d’aucune donnée sur le budget de l’agence pour 2014, le montant de la subvention de l’État dépendant très largement des choix relatifs au DMP.

2. L’absence de prise en compte des préconisations du Rapporteur spécial sur le DMP

En 2012, M. Christian Estrosi avait consacré une part importante de son rapport spécial sur le projet de loi de finances pour 2013 à l’examen du dossier médical personnel (DMP). Il avait notamment examiné les conditions dans lesquelles le projet avait été lancé et ses premiers résultats. Il avait également analysé son mode de financement. Avant de formuler des recommandations, il avait par ailleurs comparé le système français à plusieurs exemples étrangers. En conclusion, il avait considéré que « des améliorations doivent être apportées dans la gestion du projet. Un double objectif doit guider cette démarche : rationaliser les pratiques et optimiser le parcours de soins des patients. Leur déclinaison opérationnelle pourrait ainsi s’inscrire autour de trois axes principaux et de huit préconisations ».

PRÉCONISATIONS DU RAPPORTEUR SPÉCIAL
POUR LA MISSION SANTÉ SUR LE DMP EN 2012

1.– Redonner de la cohérence et de la lisibilité au dispositif

– établir un contrat d’objectifs et de performance avec l’ASIP, en lien avec la CNAMTS. Ce contrat définira précisément le contenu définitif du DMP et les voies de convergence avec les autres systèmes informatisés existants ;

– organiser, sous la tutelle du ministère de la Santé, une réunion trimestrielle de suivi du DMP avec tous les acteurs, y compris les représentants des professionnels et des établissements de santé ;

– intégrer le DMP à la réflexion en cours sur le projet européen de dossier partagé ;

2.– Améliorer le pilotage financier et opérationnel pour mieux maîtriser les coûts

– publier un suivi biannuel des dépenses induites par le DMP en lien avec les ARS pour évaluer les coûts induits dans les régions ;

– établir des indicateurs de suivi médico-économique du DMP ;

– associer la Haute Autorité de santé (HAS) en charge de l’amélioration des parcours de soins au suivi qualitatif et économique du projet ;

3.– Renforcer la transparence et le suivi qualitatif

– définir des critères qualitatifs de suivi tant pour les professionnels de santé que pour les patients ;

– en lien avec les agences concernées (ANAP, HAS…), établir un programme de promotion du DMP auprès des patients et des professionnels.

Dans le cadre de la préparation du projet de loi de finances pour 2014, le Rapporteur spécial a demandé au ministère de « faire le point sur le dossier médical personnel, son état d’avancement et ses financements ; de présenter précisément les évolutions intervenues à la suite du rapport de la Cour des comptes de 2012 ; d’indiquer les suites réservées aux recommandations faites par le rapporteur spécial à l’occasion de l’examen du budget pour 2013 ».

La réponse apportée par le ministère trahit une profonde méconnaissance des rôles respectifs des rapporteurs spéciaux et des rapporteurs du projet de loi financement de la sécurité sociale. La réponse ne se réfère en effet qu’aux travaux du rapporteur de la commission des Affaires sociales, sans aucune mention des travaux de M. Estrosi. Le Rapporteur spécial espère qu’il ne s’agit que d’un oubli et non d’un refus de prendre en considération les observations formulées par un représentant de l’opposition. Il serait très regrettable que sur un sujet d’intérêt national, avec de possibles impacts financiers et organisationnels majeurs, le ministère ne parvienne pas à dépasser une logique partisane.

EXTRAIT DE LA RÉPONSE ADRESSÉE
PAR LE MINISTÈRE DE LA SANTÉ AU RAPPORTEUR SPÉCIAL

Les recommandations formulées dans le cadre de la préparation du PLFSS 2013

Le rapporteur de la branche « assurance maladie » pour le PLFSS 2013 (M. Christian Paul), a formulé plusieurs recommandations dans l’hypothèse où les pouvoirs publics prendraient la décision de poursuivre le projet DMP. Le rapporteur, lui-même, ne remettait pas en cause l’intérêt de disposer d’un instrument de partage de l’information médicale au service de la coordination des soins et du parcours de santé du patient, mais considérait qu’il n’en était pas moins nécessaire de relancer une stratégie qui conjugue « un pilotage raisonné et un déploiement confronté aux expériences du terrain ». Selon lui, les difficultés de mise en œuvre du DMP appelaient un véritable recadrage du projet pour :

– en préciser les objectifs en concertation avec les représentants des professionnels et des patients, et en impliquant pleinement la CNAMTS ;

– intégrer au plus vite le dossier pharmaceutique au DMP ;

– garantir sa compatibilité avec les systèmes d’information hospitaliers ;

– mettre au point une messagerie sécurisée ainsi qu’un répertoire des professionnels de santé.

Ces recommandations ont été prises en comptes, comme celles de la Cour des comptes, dans les travaux qui ont été conduits en 2013 pour définir, selon la demande de la ministre des affaires sociales et de la santé, un « DMP de seconde génération ».

3. Quel avenir pour le DMP ?

Selon les éléments transmis au Rapporteur spécial, le secrétariat général des ministères chargés des affaires sociales et la délégation à la stratégie des systèmes d’information de santé (DSSIS) ont conduit d’avril à juin dernier, à la demande de la ministre de la Santé, des travaux pour élaborer des propositions d’orientations stratégiques à présenter à la ministre. Pour mener à bien cette démarche, la DSSIS s’est appuyée sur un « groupe projet » associant notamment des représentants des patients, des médecins et des pharmaciens, des établissements de santé et des ARS.

Un assez large consensus a pu se dégager sur des orientations pragmatiques repositionnant bien le DMP dans un système d’information de santé plus global, comme un outil de la coordination des soins complémentaire à la messagerie sécurisée santé. Cette nouvelle approche pour un « DMP2 » renonce à l’objectif que le ministère considère irréaliste de disposer d’un dossier qui réunirait sur un support unique l’ensemble des informations médicales de chaque Français.

Le ministère fait valoir que ces travaux ont permis de définir des populations à cibler dans une première phase (sans exclure l’ouverture d’un DMP pour toute personne qui en aurait besoin) ; de préciser un socle d’informations à mobiliser en priorité pour l’échange et le partage entre professionnels de santé pour sécuriser la prise en charge du patient ; de revoir totalement les conditions et modalités d’ouverture du DMP, dans la recherche d’une indispensable simplification. Par ailleurs, des propositions pour une nouvelle gouvernance du DMP ont été formulées, en préconisant une association étroite des représentants des professionnels de santé et des patients, et en recherchant la clarification des responsabilités respectives de l’État et de l’assurance maladie.

Au final le Rapporteur spécial a le sentiment que la situation n’a guère évolué en un an alors même que toutes les études montrent l’intérêt d’un système informatisé de santé à portée nationale. L’absence d’orientation nationale claire et forte sur ce sujet favorise par ailleurs l’émergence de projets régionaux ou locaux, c’est-à-dire la multiplication de systèmes non interopérables alors même que le principal objectif du DMP était de mettre un terme à ces pratiques.

Il est désormais urgent de définir un cadre cohérent avec des actions concrètes. Si la phase d’analyse apparaissait légitime, elle aurait d’ores et déjà dû aboutir. Le Rapporteur spécial estime par ailleurs nécessaire la définition d’une stratégie d’ensemble en ce qui concerne les systèmes informatiques de santé. Pour ce faire, la DSSIS ne semble pas disposer du positionnement institutionnel suffisant ; seule une instance dotée d’un poids politique fort sera en mesure de faire aboutir pareil dossier.

A. LES AUTRES FINANCEMENTS DE L’ACTION

Les subventions pour charges de service public du Centre national de gestion (CNG) et de l’Agence technique de l’information et de l’hospitalisation (ATIH) relèvent également de l’action 19.

● Créé en 2005, le CNG prend en charge la gestion du personnel hospitalier (directeur d’hôpital, d’établissement sanitaire et social, directeur de soins, praticien hospitalier…), l’organisation des concours pour ces professions ainsi que pour les attachés d’administration hospitalière, les internes et les praticiens diplômés hors de l’Union européenne. La loi HPST a étendu ses missions en lui confiant notamment la gestion statutaire et le développement des ressources humaines des directeurs de soins, la gestion des personnels en surnombre et la mise en œuvre des contrats d’engagement de service public pour les étudiants ou les internes qui s’engagent à exercer dans des régions en sous-densité hospitalière. Il est également en charge des sept internats de médecine. Aujourd’hui le CNG gère environ 60 000 personnels, organise quelque 20 concours annuels et pilote, en lien avec les conseils des ordres, les 44 commissions nationales d’autorisation d’exercice aux professions de médecin, chirurgien-dentiste, pharmacien et sage-femme.

Ces missions constamment élargies depuis la création du centre seront encore étendues en 2013 avec la prise en charge de la partie hospitalière de la gestion des personnels enseignants et hospitaliers des disciplines médicales, pharmaceutiques et odontologiques, soit 7 000 personnels de plus. Depuis le quatrième trimestre 2012, le CNG prend également en compte le nouveau dispositif de contrat d’engagement de service public relatif à la prise en charge psychiatrique des personnes placées sous main de justice.

En 2012, le Rapporteur spécial s’inquiétait de la diminution des ressources du CNG qui passaient de 5,2 millions d’euros en 2012 à 3,8 millions d’euros en 2013.

Malgré ces nouvelles missions, les moyens étatiques du CNG sont en baisse, la subvention de l’État passant de 5,2 millions en 2012 à 3,8 millions d’euros en 2013. Le tableau suivant détaille l’évolution des ressources de l’opérateur. Selon les éléments transmis au Rapporteur spécial, en exécution, cette baisse devrait conduire à une perte de plus de 5,5 millions d’euros. Elle sera financée par un prélèvement sur le fonds de roulement dont le niveau devrait atteindre 12,15 millions d’euros à la fin de l’année.

COMPTE DE RÉSULTAT DU CENTRE NATIONAL DE GESTION

(en milliers d’euros)

Charges

Compte financier 2012

Budget prévisionnel 2013

Produits

Compte financier 2012

Budget prévisionnel 2013

Personnel

21 575

28 981

Ressources de l’État

3 139

3 686

Fonctionnement

18 083

29 385

     

Intervention

0

0

Autres subventions

22 800

34 197

     

Ressources propres et autres

9 535

14 945

Total des charges

39 658

58 366

Total des produits

35 474

52 828

Résultat : bénéfice

   

Résultat : perte

4 184

5 538

Total équilibre du CR

39 658

58 366

Total équilibre du CR

39 658

58 366

Source : PAP 2014.

En 2014, la dotation de l’État sera maintenue à un niveau quasi équivalent à celui de 2013 à hauteur de 3,7 millions d’euros, soit une baisse de 100 000 euros, le projet annuel de performances estimant que cette réduction « tient compte du montant des économies attendues du CNG sur ses dépenses de fonctionnement, au vu des comptes financiers de l’établissement ».

● Établissement public administratif créé en 2000, l’ATIH est l’opérateur de référence pour la collecte de données sur l’activité et les coûts des établissements ; il constitue également un centre de production des outils de régulation tarifaire et un pôle de production d’informations sur la performance médicale et économique des établissements.

L’ATIH reçoit une subvention de l’État et de la CNAMTS. Elle dispose en outre de ressources propres tirées de la vente de produits informatiques et de la cession de bases de données. En 2013, la dotation de l’État atteignait 3,4 millions d’euros ; elle sera ramenée à 3,32 millions d’euros en 2014, soit une quasi-stabilisation.

● L’action prend également en charge le financement de l’agence de santé de Wallis et Futuna à hauteur de 25,97 millions d’euros, soit le même montant que l’année dernière. Établissement public national administratif, l’agence a été créée par l’ordonnance du 13 janvier 2000 (9).

Elle regroupe deux hôpitaux et plusieurs dispensaires et prend en charge l’ensemble du système de santé local. Elle ne dispose d’aucune ressource propre ; elle est totalement dépendante des subsides que l’État lui octroie. Il convient également de souligner qu’il n’existe aucun autre système de santé sur le territoire. De ce fait, l’agence assure non seulement l’ensemble des missions d’hospitalisation mais elle élabore également le programme de santé de la zone, assure la mise en œuvre du plan de la médecine, curative et préventive, et veille à la délivrance de médicaments.

I. LA POLITIQUE DE PRÉVENTION

A. LA PERTINENCE ÉCONOMIQUE ET MÉDICALE DE LA PRÉVENTION

Peu d’études scientifiques ont essayé de déterminer l’impact économique et médical de la prévention en matière de santé. L’absence de laboratoires français de recherche en la matière est d’autant plus regrettable que les enjeux financiers sont très conséquents. Une étude américaine d’octobre 2012 (10) montre pourtant que les perspectives de santé sont directement liées à cinq grands déterminants : l’héritage génétique et gestationnel, le contexte social, les conditions environnementales, les choix comportementaux et les soins médicaux. Si les soins occupent une place importante, ils n’apparaissent bien que comme un des éléments sur lesquels les politiques publiques peuvent jouer. Thomas McKeown a ainsi montré que les principaux progrès constatés en matière de santé au Royaume-Uni au cours des 200 dernières années sont davantage liés à des modifications de l’alimentation, aux conditions sanitaires et à la taille des familles qu’à des interventions médicales (11).

Sur l’initiative de l’INPES, un colloque consacré à l’économie de la prévention a été organisé en juin dernier à Paris. À cette occasion, Karine Chevreuil a présenté l’étude de son équipe portant sur l’évaluation en termes de coût-efficacité du remboursement intégral de l’aide au sevrage tabagique en France (12). Elle constate que le tabagisme provoque environ 70 000 décès par an et que les pathologies associées sont à l’origine d’une dépense annuelle comprise entre 12 et 18 milliards d’euros.

L’analyse proposée par cette équipe modélise ce que l’on pourrait attendre de la prise en charge à 100 % du sevrage tabagique par rapport au forfait actuel avec plusieurs scénarios et des variations des paramètres du modèle pour tester sa robustesse. En fin de compte, les réponses dépendent des hypothèses de travail ; elles permettent néanmoins, pour chaque scénario, de déterminer ce qui généralement considéré comme un « coût acceptable » pour gagner une année de vie. L’étude essaie également d’intégrer les conséquences de la poursuite ou de l’arrêt du tabac sur trois maladies importantes, en intégrant le coût de prise en charge de ces maladies ainsi que les coûts évités si le sevrage est effectif.

Cette étude est précieuse car elle permet de disposer de données scientifiques sur l’impact d’une politique de prévention ancienne. Elle permet ainsi aux décideurs de disposer d’indicateurs assez affinés et de vérifier que la prévention réduit concrètement les dépenses de santé induites par la pathologie visée.

De la même manière, une étude de l’Organisation mondiale de la santé a montré la pertinence d’une intervention auprès des collégiens centrée sur l’activité physique et la sédentarité (13). Le projet a été expérimenté en France dans le Bas-Rhin entre 2002 et 2006. Au terme de ces quatre années, l’INPES a constaté une augmentation de l’activité physique de loisirs et une diminution du temps passé devant la télévision. Dans le même temps a été mesurée une prise de poids moindre avec un risque de surpoids diminué de 50 % pour les enfants de poids normal. L’intervention a également mis en évidence la diminution de certains facteurs de risque cardiovasculaire. L’extension de deux ans de l’étude a montré que les effets bénéfiques perdurent deux ans après la fin de l’intervention et sont plus marqués chez les jeunes initialement les plus sédentaires et chez ceux qui sont issus de milieux défavorisés.

Plus généralement, l’étude australienne sur le bilan coût-efficacité de la prévention (14) a montré que les dépenses de prévention nécessitent une durée minimale pour porter leurs fruits avec un rendement maximisé au bout d’une quinzaine d’années. Comme le montre le graphique suivant pour une politique de prévention centrée sur 23 déterminants de santé, dès lors que l’effort financier est maintenu durant les trente premières années avec un engagement annuel de moins en moins important, les gains tirés ont un effet générationnel, c’est-à-dire qu’ils portent sur près de 80 ans.

Le graphique présente trois données : les dépenses liées à la politique de prévention qui décroissent progressivement jusqu’à atteindre un niveau nul après environ 30 à 40 ans ; les gains de santé évalués en années de vie gagnées (15) ; les coûts évités, c’est-à-dire les dépenses de santé évitées par la réduction d’incidence, de durée ou de sévérité des maladies prévenues.

En règle générale, les dépenses évitées et les gains de santé (la morbidité et la mortalité évitées) surviennent dans un délai variable en fonction de la nature de l’intervention : le délai est assez court pour une vaccination en période épidémique, il est en revanche plus long pour la prévention du tabagisme sur les cancers.

B. L’INPES : UN RÔLE CENTRAL MALGRÉ DES MOYENS EN BAISSE

Le tableau suivant présente l’évolution du compte de résultat de l’INPES en isolant notamment la subvention pour charge de service public versée par le programme 204.

COMPTE DE RÉSULTAT DE L’INPES

(en milliers d’euros)

Charges

Compte financier 2012 (1)

Budget prévisionnel 2013

Évolution

Produits

Compte financier 2012 (1)

Budget prévisionnel 2013

Évolution

Personnel

10 563

10 970

3,9 %

Ressources de l’État

33 623

28 283

– 15,9%

dont charges de pensions civiles

339

351

3,5 %

dont subventions de l’État (programme 204)

26 427

22 893

– 13,4 %

Fonctionnement

4 753

4 729

– 0,5 %

dont ressources fiscales

7 196

5 390

– 25,1 %

Intervention

82 688

79 324

– 4,1 %

Autres subventions

64 722

58 211

– 10,1 %

 

 

 

 

Ressources propres et autres

9 943

3 354

– 66,3 %

Total des charges

98 004

95 374

– 2,7 %

Total des produits

108 288

89 848

– 17,0 %

Résultat : bénéfice

10 284

 

 

Résultat : perte

 

5 175

 

Équilibre final

108 288

95 374

– 11,9 %

Total :
équilibre du CR

108 288

95 023

– 12,2 %

(1) voté

Source : PAP 2014.

La subvention de 24,2 millions d’euros prévue en 2013 a été réduite assez significativement en exécution au travers d’un surgel qui a obligé l’institut à puiser dans son fonds de roulement qui est ainsi passé de 24 à moins de 16 millions d’euros. En 2014, la subvention pour charges de service public diminue encore de 100 000 euros, passant à 24,1 millions d’euros. Si cette baisse peut apparaître modérée, elle n’en fait pas moins peser un risque pour l’institut car elle confirme une tendance baissière marquée depuis trois ans. Les marges de manœuvre sont d’ores et déjà très faibles voire nulles, le fonds de roulement ayant déjà été significativement réduit. Par ailleurs, l’assurance maladie pourrait être incitée à procéder à une baisse similaire pour sa propre subvention.

En 2013, la réduction des moyens a conduit à l’annulation de la campagne grand public sur le VIH qui devait être lancée le 1er décembre à l’occasion de la journée mondiale de lutte contre le sida. L’INPES a choisi de concentrer sa campagne sur les hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes et sur les migrants.

L’institut est par ailleurs affectataire de la taxe sur les jeux en ligne et de l’amende que les annonceurs doivent payer s’ils ne font pas figurer la mention « Manger – Bouger » dans leurs publicités. Ces deux ressources semblent aujourd’hui stabilisées et elles ont d’ailleurs été intégrées dans la liste des taxes plafonnées. La tentation pourrait toutefois être grande de considérer que ces produits doivent être uniquement consacrés au domaine d’activité dont ils relèvent. Il s’agit pourtant bien de financer les actions de l’INPES de façon générale dans une logique de fongibilité. Un cloisonnement serait d’une part préjudiciable à l’équilibre financier de l’institut et d’autre part en contradiction avec le principe de financement global de la politique de prévention.

Dans un contexte de raréfaction de la ressource budgétaire, l’INPES est contraint de reporter la baisse des crédits sur ses dépenses de personnel. Les dépenses de fonctionnement ne peuvent pas absorber l’ensemble de la réduction d’autant que des efforts significatifs ont déjà été réalisés. De 145 équivalents temps plein (ETP) en 2012, l’institut devra passer à 129 en 2014 soit une baisse de plus de 11 % en deux ans. Or, dans le même temps ses missions n’ont pas été revues à la baisse. L’achat d’espaces publicitaires à la télévision à des heures de grande écoute reste un poste de dépense très important de l’ordre de 30 millions d’euros par an. Si le développement d’Internet permet de réduire cette facture, il n’en reste pas moins que de telles campagnes restent nécessaires. De plus, les études montrent que pour être efficaces, ces campagnes doivent franchir un seuil minimal ; en d’autres termes il existe pour la prévention, comme pour certaines médications, un effet « dose ».

Le contexte budgétaire impacte également l’action de l’INPES dans les régions. Les pôles régionaux de compétences en éducation pour la santé (EPS) et promotion de la santé (PS) sont des plateformes qui fédèrent les compétences et les ressources présentes en région. Le pôle de compétences d’une région est constitué d’un « porteur du pôle » qui anime le pôle et coordonne l’activité de la plateforme et d’autres membres, appelés « partenaires du pôle » (associations, mutuelles, organismes de sécurité sociale, administrations, collectivités territoriales…) qui contribuent aux missions du pôle par le développement d’activités et de prestations. Cette structuration en pôle présente l’intérêt de proposer une offre de services élargie (plus de compétences sont mises à disposition grâce à la mutualisation du porteur du pôle et ses partenaires), d’améliorer le potentiel de réponses (les organismes constitutifs du pôle sont plus nombreux pour répondre) et de garantir une réponse coordonnée et de meilleure qualité.

Ces pôles reçoivent une aide de l’INPES à hauteur de 6,6 millions d’euros pour l’ensemble du territoire. Cette enveloppe ne couvre néanmoins pas l’ensemble des besoins des pôles qui sont également soutenus par les organismes sociaux ou les acteurs locaux. Or, l’ensemble des acteurs publics procédant à des réductions de leurs engagements, ces pôles se trouvent aujourd’hui dans une situation très contrainte. Trois d’entre eux, les pôles des régions Bretagne, Provence-Alpes-Côte d’Azur et Nord-Pas-de-Calais, sont particulièrement en difficulté.

L’INPES a donc préféré concentrer son action sur les facteurs de risque les plus importants plutôt que de multiplier les initiatives. L’alcool, le tabac, la mauvaise nutrition et la sédentarité sont donc les quatre priorités affichées de l’institut auxquelles s’ajoute un plan spécifique pour la santé mentale. Lors de son audition, la directrice générale de l’INPES a souligné que les efforts de l’institut ont besoin d’être relayés sur le terrain par l’ensemble des acteurs, ce qui nécessite un travail partenarial abouti et surtout la capacité de faire vivre un réseau sur l’ensemble du territoire et avec tous les acteurs.

C. QUELLE ORGANISATION ET QUELLES MISSIONS POUR LA PRÉVENTION DE SANTÉ ?

1. La nouvelle stratégie nationale de santé

Le 23 septembre dernier, la ministre de la Santé a présenté la feuille de route de la nouvelle stratégie nationale de santé. S’appuyant sur les recommandations du rapport des sages (16), la stratégie place la prévention au centre du dispositif. Partageant l’analyse des sages, le ministère relève qu’une « approche uniquement curative ne permet pas de répondre aux enjeux que sont le développement des pathologies chroniques et le vieillissement de la population, les inégalités sociales et territoriales de santé et les contraintes financières ». Une politique efficace de prévention doit privilégier une approche globale avec des actions en termes d’éducation, d’environnement, de travail, de transport, d’urbanisme, de pratiques sportives et de cohésion sociale. Le ministère propose néanmoins de mettre l’accent sur la prévention dans le domaine de la santé avec une meilleure « prise en compte des déterminants de santé qui agissent en amont sur l’évolution de notre état de santé » (17).

Si le Rapporteur spécial se félicite de l’accent mis sur l’intérêt et l’importance de la prévention, il ne peut que regretter que la traduction de ces objectifs soit reportée à une « future loi de santé ». Les arbitrages budgétaires du présent projet de loi montrent que les moyens proposés ne sont pas à la hauteur des ambitions affichées et laissent craindre qu’il ne s’agisse finalement que d’effets d’annonce.

2. Une nécessaire rationalisation des structures

Le Rapporteur spécial estime pour sa part qu’il faut opérer des choix forts et clairs en la matière avec notamment une rationalisation des acteurs. La dispersion actuelle nuit à l’efficacité des actions. Dans son rapport sur la prévention sanitaire d’octobre 2011, la Cour des comptes relève que la prévention se caractérise aujourd’hui par « la dispersion des compétences et des redondances ou ambiguïtés dans leur articulation, sans pilotage d’ensemble clairement établi. Au niveau national interviennent à la fois plusieurs ministères, une multitude d’instances nationales de conseil et d’expertise aux compétences parfois mal coordonnées ainsi que les organismes d’assurance maladie » (18). Le phénomène se retrouve au niveau régional, avec une insuffisante organisation de l’action des associations.

Au sein de l’État, la Création du comité national de santé publique (CNSP) devait permettre de mieux coordonner les actions et les financements des acteurs institutionnels chargés de la mise en œuvre des actions de santé publique. Parallèlement le Gouvernement a cherché à mieux articuler le travail des différents opérateurs en instituant en 2008 un comité d’animation du système d’agences (CASA) regroupant les onze opérateurs nationaux concernés. L’INPES, l’INCa, la HAS et l’INVS ont ainsi conclu des accords-cadres visant à établir ou renforcer leur collaboration dans leurs champs communs de compétences complétés dans certains cas par des plans annuels d’actions communes. Si cette initiative a permis des avancées, la Cour relève que « cette coordination reste cependant empirique, animée grâce à la bonne volonté de chacun, aux nombreuses participations et représentations croisées dans les instances et réunions, aux relations personnelles » (19). Pour améliorer cette situation, la Cour proposait notamment de donner au directeur général de la santé les compétences de délégué interministériel à la prévention sanitaire.

L’actuel Gouvernement reprend l’essentiel de l’analyse sur la dispersion des acteurs puisque la feuille de route de la stratégie nationale de santé de 2013 souligne la nécessité de mieux coordonner les pouvoirs publics par « le biais d’une coordination interministérielle plus efficace […] et par un partenariat entre l’État, les collectivités locales et les organismes de sécurité sociale » (20).

Pour autant aucune proposition concrète n’est actuellement avancée. Le Rapporteur spécial regrette cette frilosité. Pour sa part, il estime que deux grands axes d’effort peuvent être retenus :

– la définition d’une stratégie de prévention pluriannuelle en matière de santé avec une hiérarchisation des priorités qui permettrait ensuite de mieux affecter les moyens disponibles. La mise en œuvre de ces programmes devra faire l’objet d’une évaluation scientifique et budgétaire pour vérifier sur longue période l’impact de la prévention sur l’état de santé de la population ;

– un regroupement des structures existantes afin de dégager des économies d’échelle. L’INPES doit devenir le référent unique de la prévention de santé, c’est-à-dire qu’il lui reviendra de coordonner l’ensemble des actions et de flécher les ressources associées. Il ne pourra bien évidemment pas conduire lui-même l’ensemble des actions qui resteront du domaine de compétence d’organismes spécialisés ; en revanche il pourra utilement les piloter au niveau national et régional. Dans ce cadre la représentation régionale de l’INPES devra être revue, notamment pour redonner sens et efficacité aux pôles régionaux de compétences.

En termes institutionnels, il n’apparaît pas forcément nécessaire de créer une nouvelle structure interministérielle ni de donner pareille compétence au directeur général de la santé, à condition que l’impulsion politique et l’intérêt pour les questions de prévention soient suffisamment forts. Il faut mettre fin à une excessive bureaucratisation du système, lui redonner souplesse et lisibilité. Il appartient au ministre en charge de cette question de fixer un cap et d’en assumer la responsabilité, notamment devant le Parlement.

Plus globalement, le Rapporteur spécial regrette que le système de soins français soit avant tout organisé et structuré autour de la maladie et de sa prise en charge, laissant peu ou pas de place à une véritable politique de prévention de la santé alors même qu’elle constitue un gisement d’économies et contribue à l’allongement et la qualité de vie. Aujourd’hui seule l’éducation nationale parvient à toucher l’ensemble d’une classe d’âge avec une politique de prévention efficace. Pour imparfait qu’il soit, le service national était également l’occasion pour tous les jeunes appelés de faire un bilan de santé et ce avant la survenance d’une quelconque maladie. Le Rapporteur spécial regrette la suspension du service national et la faiblesse des crédits alloués à la médecine préventive au sein de l’éducation nationale car ils participent d’un désintérêt coupable envers la prévention. Il est donc primordial que les moyens alloués à l’éducation nationale en la matière soient préservés et surtout que le système en place ne soit pas, à son tour, désorganisé.

DEUXIÈME PARTIE : LE PROGRAMME PROTECTION MALADIE

I. LA SUPPRESSION DE LA SUBVENTION AU FONDS CMU

Créé en 1999, le fonds CMU est un établissement public national à caractère administratif créé chargé du financement et du suivi du dispositif de la CMU complémentaire (CMUc) et, depuis 2005, de celui de l’aide au paiement d’une assurance complémentaire santé (ACS). À sa création, il bénéficiait d’une double dotation de l’État et des organismes complémentaires. À compter de 2005, plusieurs taxes lui ont été affectées mais sans entraîner la disparition de la dotation de l’État. Depuis 2009, la dotation étatique a été ramenée à zéro, sans pour autant être formellement supprimée. La loi de finances initiale et la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 ont achevé cette évolution et modifié le positionnement institutionnel et financier du fonds.

Le tableau suivant présente l’évolution des ressources du fonds depuis sa création.

RÉCAPITULATIF DES COMPTES DU FONDS CMU

(en millions d’euros)

 

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012 (1)

Produits

                         

Dotation de l’État

800

889

1 150

970

1 037

695

346

109

47

0

0

0

0

Taxe alcool

         

386

404

480

349

0

0

0

0

Taxe tabac

           

217

411

372

0

0

0

42

Contribution ACS

         

13

40

65

87

0

0

0

0

Contribution des

organismes complémentaires

247

223

223

245

291

302

492

494

569

1 791

1 856

1 930

2 031

Reprises sur provisions

 

94

159

143

202

22

25

35

28

79

93

10

11

Total produits

1 047

1 206

1 532

1 358

1 530

1 418

1 524

1 595

1 452

1 870

1 949

1 940

2 084

(1) Données provisoires

Source : fonds CMU

En 2013, le Gouvernement ayant constaté que la subvention de l’État est nulle depuis 2009, il a décidé de la supprimer. Dans le même temps, l’article 22 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 a augmenté le montant des versements du fonds CMU aux organismes de sécurité sociale sur la base d’un forfait dont le montant est fixé par décret. Depuis 2009, il était fixé à 370 euros par bénéficiaire, somme portée à 400 euros en 2013. En application du nouvel article L. 862-2 du code de la sécurité sociale, cette somme sera par ailleurs revalorisée au 1er janvier de chaque année « au niveau de l’hypothèse d’inflation retenue dans […] la loi de finances ».

Dès lors que le fonds CMU ne reçoit plus aucune dotation de l’État, il n’est plus considéré comme l’un de ses opérateurs et sa situation financière n’est plus retracée dans le projet annuel de performance. Il relève désormais des opérateurs de l’assurance maladie et figure donc dans l’annexe 8 du projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Le schéma retenu en 2013 apparaît a priori neutre pour les finances du fonds CMU. Cependant le 1er juillet dernier, le Gouvernement a décidé, dans le cadre du plan pauvreté, de revaloriser de 8,3 % le plafond des ressources prises en compte pour bénéficier de la CMUc et de l’ACS. Selon les éléments transmis au Rapporteur spécial, ce relèvement devrait faire entrer dans le dispositif 400 000 nouveaux bénéficiaires pour la CMUc et 350 000 pour l’ACS.

En 2014, cette hausse devrait être couverte par les ressources supplémentaires prévues en 2013 ; cependant l’abondement devait couvrir la revalorisation du remboursement à l’assurance maladie et non le relèvement des barèmes. Dès lors, il appartiendra au Gouvernement de donner au fonds une visibilité pluriannuelle sur ses ressources en couvrant les besoins générés par le relèvement de juillet dernier. L’annexe 8 du PLFSS pour 2014 évalue ce besoin à 120 millions d’euros, mais renvoie les modalités de financement aux lois financières de 2015.

II. L’INDEMNISATION DES VICTIMES DE L’AMIANTE

Le tableau ci-après présente l’évolution du nombre de dossiers déposés et de dossiers traités au titre de l’indemnisation des victimes de l’amiante.

NOMBRE DE DOSSIERS D’INDEMNISATION DES VICTIMES DE L’AMIANTE

Année

2008

2009

2010

2011

2012

Nombre de dossiers déposés

6 563

6 645

6 010

5 508

4 414

Nombre de dossiers traités

7 405

6 180

6 844

7 125

7 567

Source : ministère de la Santé.

Le montant total des dépenses au 31 décembre 2013 est estimé à 530 millions d’euros, dont 515 millions au titre des indemnisations, provisions incluses. Le résultat de l’exercice serait négatif de 297 millions d’euros et le résultat cumulé à fin 2013 serait égal à zéro.

Comme le montre le tableau suivant, les produits du Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante (FIVA) devraient être en diminution en 2013 pour atteindre 233 millions d’euros avec la réduction de la contribution de l’État et de celle de la branche accidents du travail-maladies professionnelles de la sécurité sociale.

COMPTE DE RÉSULTAT DU FIVA

(en millions d’euros)

 

2011

2012

2013 (p)

2014 (p)

Charges

400

481

530

480

Produits

484

433

233

540

dont contribution de la branche AT-MP

340

315

115

435

dont contribution de l’État

48

47

0

0

dont autres produits

97

71

118

105

Résultat net

84

– 48

– 197

60

Résultat cumulé

345

298

1

61

(p) prévisions

Source : PAP 2014.

Ce manque sera compensé en gestion par un prélèvement sur le fonds de roulement dont le montant est actuellement équivalent à un an de fonctionnement.

Les délais de traitement ont été significativement améliorés : en 2012 le fonds a fait plus de 19 200 offres d’indemnisation, réduisant de près de 1 600 dossiers le stock de dossiers pour lesquels aucune offre n’avait été faite. Le fonds se rapproche ainsi du stock incompressible de 4 000 dossiers, ce plancher étant calculé par rapport au flux annuel de dossiers et au fait qu’environ un tiers des dossiers arrivent incomplets. Le délai de traitement reste néanmoins une priorité pour le Gouvernement et le fonds et fera l’objet de stipulations spécifiques dans le prochain contrat d’objectifs et de performance pour les années 2014 et 2015.

III. L’AIDE MÉDICALE DE L’ÉTAT : UN SYSTÈME À BOUT DE SOUFFLE

Entrée en vigueur en janvier 2000, l’aide médicale de l’État (AME) concerne les personnes étrangères résidant en France de façon ininterrompue depuis plus de trois mois mais ne remplissant pas les conditions de régularité du séjour exigées pour le bénéfice de couverture maladie universelle et dont les ressources sont inférieures au plafond de ressources de la CMUc. L’État rembourse aux organismes de sécurité sociale les frais médicaux pour ces personnes, ce qui correspond à plusieurs types de dépenses :

– l’aide médicale de droit commun qui est accordée pour un an renouvelable et qui représente 92 % de la dépense totale ;

– les soins urgents dont l’absence mettrait en jeu le pronostic vital ou pourrait conduire à une altération grave et durable de l’état de santé. Ils sont assurés par les hôpitaux et font l’objet d’une prise en charge forfaitaire de l’État ;

– d’autres dispositifs plus marginaux, comme l’AME humanitaire (en vertu de laquelle le ministre compétent peut admettre pour des soins hospitaliers ponctuels des personnes étrangères ne résidant pas en France), comme les évacuations sanitaires d’étrangers résidant à Mayotte vers La Réunion ou vers la métropole ou comme l’aide médicale pour les personnes gardées à vue.

Pour analyser les crédits relatifs à l’AME, le Rapporteur spécial a été contraint de faire usage des dispositions de l’article 57 de la loi organique relative aux lois de finances, qui lui permettent de procéder « à toutes investigations sur pièces et sur place » (21).Ce type de contrôle, pour exceptionnel qu’il demeure, avait déjà été utilisé par les précédents rapporteurs spéciaux, Gérard Bapt en ayant par exemple fait usage de cette disposition pour avoir accès aux contrats d’achat des vaccins lors de l’épidémie de grippe A (H1N1).

En l’espèce, ni le projet annuel de performances ni les réponses à son questionnaire budgétaire ne comportaient d’indications sur les dépenses prévisionnelles pour 2013. De même, les hypothèses sur lesquelles le projet de loi de finances a été construit n’étaient nulle part explicitées. Le Rapporteur spécial regrette vivement cette absence d’information.

A. L’INEXORABLE HAUSSE DES DÉPENSES

1. Une dépense non-évaluée

Les dépenses d’AME relèvent certes de la mission Santé, mais les documents budgétaires ne retracent que partiellement la réalité de la dépense. En effet, les sommes restant à la charge de l’assurance maladie ne sont pas retracées dans un document de synthèse. De même, il n’est pas possible au Rapporteur spécial de vérifier que tous les patients en situation irrégulière et en-dessous du niveau de ressources de la CMU sont bien pris en charge au titre de l’AMER ; en d’autres termes, il n’est pas en mesure de s’assurer que le système précédent, c’est-à-dire la prise en charge de ces dépenses par les déficits hospitaliers, est totalement révolu. Cette question est particulièrement importante dans certains territoires comme en Guyane ou à Mayotte (cf. infra).

Le tableau ci-après tente de rassembler toutes les dépenses liées à l’AME, qu’elles figurent dans le budget de l’État ou dans celui de la sécurité sociale. Cette approximation, aussi imparfaite soit-elle, montre clairement que les crédits votés chaque année en loi de finances sont très nettement insuffisants.

Le tableau ci-après tente de rassembler toutes les dépenses liées à l’AME, qu’elles figurent dans le budget de l’État ou dans celui de la sécurité sociale. Cette approximation, aussi imparfaite soit-elle, montre clairement que les crédits votés chaque année en loi de finances sont très nettement insuffisants.

ÉVOLUTION DES DÉPENSES AU TITRE DE L’AME

(en millions d’euros)

 

2011

2012

Évolution

2013
(au 30 septembre)

2013 (extrapolation)

Évolution

Total des dépenses d’AME pour l’assurance maladie (1)

700,3

703

0,4 %

613,8

818,4

16,4 %

Dépenses à la charge de l’État

647,4

620,1

– 4,2 %

573,2

764,3

23,2 %

Dépenses prévues en LFI

588

588

0,0 %

588

588

 

Dette de l’État envers la sécurité sociale (2)

21,2

32,6

53,8 %

nc

nc

 

Perte de recettes liée à la réforme de la tarification pour les établissements de santé (3)

nc

79,5

nc

nc

79,5 (1)

 

Total : (1) + (2) + (3)

721,5

815,1

13 %

613,8

897,91

10,1 %

(1) Reconduction de la perte de recettes constatée en 2012.

Source : ministère de la Santé.

La sous-évaluation initiale chronique conduit alors à une mécanique d’abondement en loi de finances rectificative. Les acteurs du système, certains de cet ajustement de fin d’année, n’ont donc aucun intérêt à contenir la dépense puisque les surcoûts sont toujours compensés. Le système entretient donc lui-même sa fuite en avant, déresponsabilisant collectivement et individuellement tous les acteurs.

Plus manifestement, ces données montrent l’absence d’appréhension globale de cette politique pourtant de plus en plus coûteuse. Le Rapporteur spécial condamne très fermement cette absence de prise en compte de la réalité. L’absence de données consolidées conduit en effet à des prises de position dogmatiques et inutilement polémiques. Il serait bien plus constructif de débattre de cette politique, hors de toute posture idéologique, sur la base de chiffres robustes et complets.

Le Rapporteur spécial a néanmoins essayé d’appréhender la réalité et la dynamique de cette dépense au travers de différents indicateurs comme le nombre de bénéficiaires, la répartition géographique ou par catégories de soin et le reste à charge pour l’assurance maladie.

2. L’évolution du nombre de bénéficiaires

Le graphique ci-après présente l’évolution du nombre de bénéficiaires de l’AME depuis 2001.

ÉVOLUTION DE NOMBRE DE BÉNÉFICIAIRES DE L’AME

Source : ministère de la Santé.

Au 31 mars 2013, le nombre de bénéficiaires s’établissait à 264 000 personnes. Compte tenu de leur situation administrative, il est difficile de prévoir l’évolution des volumes, la population concernée ne pouvant faire l’objet d’un suivi statistique abouti. Le ministère fait par ailleurs valoir que le nombre de bénéficiaires reste fortement corrélé à des effets exogènes comme l’évolution de la situation géopolitique internationale. Il relève néanmoins qu’entre le troisième trimestre de 2012 et celui de 2013, le nombre de rejets de demandes d’asile a progressé de 11 %, ce qui a une conséquence directe sur le nombre de bénéficiaires.

3. La répartition géographique

a. Une répartition géographique inégale

La répartition géographique apparaît également très inégale et surtout avec des dynamiques très variables selon les territoires concernés.

EFFECTIFS DES BÉNÉFICIAIRES DE L’AME

Période

Île-de-France

dont Paris

dont Seine-Saint-Denis

Alpes-Maritimes

Bouches-du-Rhône

Guyane

Total

1er trimestre 2011

150 603

63 457

38 987

4 214

7 143

19 282

283 686

en % du total

53,1 %

22,4 %

13,7 %

1,5 %

2,5 %

6,8 %

 

1er trimestre 2012

141 353

52 405

40 347

4 172

7 692

8 870

254 839

en % du total

55,5 %

20,6 %

15,8 %

1,6 %

3,0 %

3,5 %

 

1er trimestre 2013

167 293

54 596

50 292

6 087

9 763

17 497

305 528

en % du total

54,8 %

17,9 %

16,5 %

2,0 %

3,2 %

5,7 %

 

Source : ministère de la Santé.

Ces données apparaissent toutefois insatisfaisantes, comme le montre notamment le rapport de la chambre régionale des comptes de Guyane pour l’hôpital de Saint-Laurent-du-Maroni (22). Il souligne en effet que l’évaluation du nombre d’immigrés fluctue assez significativement selon les organismes. En tout état de cause, il estime la population immigrée en situation irrégulière entre 30 000 et 35 000 personnes quand le nombre de bénéficiaires de l’AME ne serait que de 17 497 personnes. Certes, tous les immigrés en situation irrégulière n’ont pas vocation à recourir au système de santé, mais ces données montrent les potentielles hausses du nombre de bénéficiaires.

Le Rapporteur spécial considère que la situation de la Guyane doit être examinée avec beaucoup plus d’attention, les dépenses affichées étant vraisemblablement en deçà de la réalité. Compte tenu du nombre potentiel de bénéficiaires, on peut légitimement penser que tous n’entrent pas dans le dispositif de l’AME et sont pris en charge par le déficit de l’hôpital local, sans comptabilisation spécifique. Le Rapporteur spécial n’a pu obtenir communication d’aucun chiffre et l’absence d’individualisation des bilans comptables des hôpitaux publics constitue un handicap majeur pour la transparence du dispositif AME.

Dans cette zone, la majorité des bénéficiaires de l’AME sont des ressortissants du Suriname. Or, la France soutient la reconstruction et l’équipement de l’hôpital d’Albina de façon à renforcer la prise en charge interne des patients au Suriname. Ce projet reste toutefois limité à 38 lits spécialisés, ce qui ne saurait couvrir l’ensemble des besoins. Le Rapporteur spécial considère néanmoins que ce type d’initiative doit être privilégié au système d’AME ; il appartient en effet aux États de prendre leurs responsabilités et d’offrir à leurs ressortissants un système de santé adapté à leurs besoins. D’un point de vue financier, ce projet est par ailleurs souhaitable puisqu’il s’inscrit dans une démarche endogène favorable au Suriname quand l’AME n’est qu’un mécanisme de fuite en avant et de gonflement perpétuel de dépenses incompressibles.

Il est plus difficile de déterminer l’origine géographique des bénéficiaires de l’AME ; en application de la loi « informatique et libertés », le ministère est seulement en mesure d’isoler les bénéficiaires ressortissants de pays membres de l’Espace économique européen.

BÉNÉFICIAIRES DE L’AME RESSORTISSANT DE PAYS
DE L’ESPACE ÉCONOMIQUE EUROPÉEN

(en % du nombre total de bénéficiaires)

 

2009

2010

2011

2012

Ensemble du territoire

7,18 %

7,33 %

5,49 %

5,11 %

Métropole

8,01 %

7,14 %

5,5 %

4,8 %

Source : ministère de la Santé.

b. Le cas spécifique de Mayotte

Le 31 mars 2011, le territoire de Mayotte est devenu le 101e département français, ouvrant la voie au déploiement dans ce territoire de l’ensemble des dispositifs existant sur le reste du territoire. Dans cette logique, l’AME devrait donc être, à moyen terme, mise en place dans cette zone, ce qui devrait entraîner une hausse importante des dépenses. En effet, comme le souligne le rapport d’information sénatorial sur Mayotte, l’immigration clandestine est massive à Mayotte, « la majorité des personnes venant à Mayotte souhait[ant] bénéficier de la qualité du système de santé mahorais, notamment pour les accouchements, et bénéficier, pour leurs enfants, de la nationalité française. Mamoudzou est ainsi qualifiée de « première maternité de France », voire d’Europe ».

Par ailleurs, les sénateurs soulignent que « l’immigration clandestine est source d’une recrudescence de certaines pathologies à Mayotte. Médecins du Monde a ainsi recensé des pathologies de la peau liées à la qualité de l’eau, aux accidents domestiques et à un mauvais accès à la nourriture (avec de nombreux cas de malnutrition). Se pose alors la question de l’accès aux soins des personnes souffrant de ces pathologies. Si, dans le cadre d’une demande d’asile ou d’un séjour régulier, un récépissé permet, pour une période d’un an, l’affiliation à la sécurité sociale en métropole, ce même récépissé dispose d’une validité de trois mois à Mayotte, ce qui nécessite de le renouveler régulièrement, d’où des ruptures fréquentes dans la chaîne des soins » (23) .

En l’absence d’AME, un dispositif dit de « bons roses », a été mis en place. Il permet aux enfants dont les parents n’ont pas les moyens financiers suffisants d’accéder aux soins. Toutefois, leur délivrance se fait de manière aléatoire. Les familles sont parfois confrontées à un refus de renouvellement sans justification.

Les familles doivent par ailleurs participer aux dépenses d’hospitalisation. Pour autant ces sommes restent très mesurées par rapport à la réalité de la dépense qui dès lors est prise en charge par l’assurance maladie et intégrée au déficit des établissements de santé.

Face à cette situation, le Rapporteur spécial a donc interrogé le ministère de la santé afin de connaître d’une part le calendrier envisagé pour le déploiement de l’AME Mayotte et, d’autre part, le montant du déficit des établissements de santé afin d’évaluer grossièrement ce que pourrait représenter la dépense à venir d’AME. Il lui a été seulement indiqué que « l’aide médicale de l’État n’existe pas sur l’île de Mayotte » et « qu’aucun crédit du programme 183 n’est mobilisé dans ce cadre ». Le Rapporteur spécial ne saurait se satisfaire d’une telle réponse qui révèle soit un refus d’anticiper cette dépense inévitable, soit, et ce serait plus grave, une volonté de cacher la réalité de la situation à la représentation nationale.

4. La répartition par catégorie de soins

Le tableau ci-après détaille l’évolution des dépenses des différentes catégories d’AME.

ÉVOLUTION DES DÉPENSES AU TITRE DE L’AME

(en millions d’euros)

 

2011

2012

Évolution

2013 (au 30 septembre)

2013 (extrapolation)

Évolution

Total des dépenses d’AME pour l’assurance maladie

700,3

703

0,4 %

613,8

818,4

16,4 %

dont AME de droit commun

608,8

581,6

– 4,5 %

532,4

709,9

22,1 %

dont soins urgents

90,2

120,1

33,1 %

80,6

107,5

– 10,5 %

dont autres

1,3

1,3

0,0 %

0,8

1,1

– 17,9 %

Dette de l’État envers la sécurité sociale

21,2

32,6

53,8 %

nc

nc

 

Source : ministère de la Santé.

En 2012, la dépense globale n’a progressé que de 0,4 % grâce à la baisse de 4,5 % des dépenses pour l’AME de droit commun, ce qui a permis à l’État de dépenser 27,3 millions d’euros de moins qu’en 2011. En revanche les dépenses pour soins urgents ont très fortement progressé, atteignant 120 millions d’euros. Il convient de rappeler que ce poste de dépense est financé par l’État sur une base forfaitaire fixée à 40 millions d’euros, l’écart restant à la charge de l’assurance maladie. En d’autres termes, la stabilisation des dépenses constatée en 2012 n’est qu’apparente puisque la charge s’est reportée sur l’assurance maladie.

Les difficultés de mise en place du droit de timbre en Guyane expliquent en partie l’évolution des dépenses de soins urgents : entre mars 2011 et mars 2012, les bénéficiaires de l’AME de droit commun ont baissé de 54 % sur ce territoire. Dès la suppression du dispositif, le nombre de ressortissants du régime de droit commun a crû de 97 %, sans toutefois revenir à son niveau antérieur à la mise en place du droit de timbre.

Le tableau suivant détaille la répartition des dépenses de soins urgents, faisant apparaître que la quasi-totalité des frais sont liés aux séjours.

RÉPARTITION DES DÉPENSES DE SOINS URGENTS

(en millions d’euros)

 

Consultations externes

Frais liés aux séjours

IVG

Médicaments

Total

Métropole

1,81

55,02

0,02

0,12

56,97

Outre-mer

0,05

22,98

– 0,02

0,58

23,59

Total

1,86

78,00

0,01

0,70

80,56

Source : CNAM.

Le tableau suivant détaille la répartition de l’AME en distinguant notamment les soins de ville de ceux prodigués à l’hôpital.

RÉPARTITION DES CONSULTATIONS AU TITRE DE L’AME

(en nombre de « consommants »)

 

Résultats 2012

Résultats 2011

Résultats 2010

Résultats 2009

Soins de ville

267 245

256 744

260 576

255 585

Hospitalisation privée

18 555

17 593

17 836

17 888

Hospitalisation publique

65 524

74 724

57 618

38 664

Soins externes à l’hôpital public

104 163

96 023

95 328

96 010

Dépenses non ventilées

7 369

6 145

5 122

3 108

Source : ministère de la Santé.

Si les soins de ville représentent près de 60 % des consultations, les dépenses à l’hôpital constituent en revanche 70 % du total.

5. Le reste à charge pour l’assurance maladie

Il convient de rappeler que la tarification de l’AME a été modifiée pour ce qui concerne les établissements de santé : ils doivent désormais facturer les dépenses non plus « au prix de journée » mais selon les règles de droit commun. Ce changement a un impact direct sur les finances des établissements de santé comme le montre le tableau ci-après.

IMPACT DE LA RÉVISION DE LA TARIFICATION
SUR LES ÉTABLISSEMENTS DE SANTÉ EN 2012

(en euros)

Raison sociale

Montant des recettes perçues avant la réforme

Montant des recettes perçues après la réforme

Perte de recettes

Établissements publics de santé France entière

316 317 643

236 754 384

– 79 563 258,52

dont

     

AP-HP

119 791 127

86 197 797

– 33 593 330

AP-HM

13 770 600

9 117 688

– 4 652 912

CHR de Toulouse

6 146 381

4 265 045

– 1 881 336

CH de Saint-Denis

9 269 545

7 458 500

– 1 811 045

CHU de Bordeaux

4 972 189

3 185 887

– 1 786 303

Hôpitaux universitaires de Strasbourg

4 552 144

3 084 248

– 1 467 895

Centre hospitalier de Cayenne

12 319 124

10 960 446

– 1 358 678

Hospices civils de Lyon

5 964 546

4 685 228

– 1 279 318

CHU de Montpellier

3 622 425

2 415 986

– 1 206 438

CHI de Villeneuve-Saint-Georges

3 113 519

1 929 362

– 1 184 157

CHU de Grenoble

2 752 192

1 612 557

– 1 139 636

CH de Longjumeau

2 851 399

1 742 430

– 1 108 969

CHU de Nice

5 192 709

4 139 878

– 1 052 831

Source : ministère de la Santé.

Outre la perte de recettes, les établissements de santé doivent également supporter le décalage en trésorerie, les remboursements de l’État n’intervenant que postérieurement à l’engagement des frais. Le graphique suivant présente l’évolution de la dette de l’État à l’égard de l’assurance maladie entre décembre 2012 et septembre 2013.

DETTE DE L’ÉTAT À L’ÉGARD DE L’ASSURANCE MALADIE AU TITRE DE L’AME

(en millions d’euros)

Source : CNAM 

À la fin de l’année 2012, le reste à charge pour l’assurance maladie était de près de 40 millions d’euros. Il dépasse 109 millions d’euros en septembre 2013 même si ce montant devrait être réduit avant la fin de l’année. Ce profil de remboursement constitue une contrainte réelle pour la trésorerie de l’assurance maladie ; avec des taux bas et une proximité forte des coûts de trésorerie entre l’État et les organismes de sécurité sociale, ce décalage n’a que des conséquences mesurées ; en revanche il pourrait constituer un facteur fort de rigidité et une source nouvelle de dépense si les taux venaient à remonter et surtout si les conditions d’emprunt des organismes de sécurité sociale se dégradaient.

B. L’ABANDON DES MESURES DE CONTRÔLE

Lors de ses auditions, le Rapporteur spécial a été frappé de constater que le contrôle des dépenses de l’AME est inexistant ou subsidiaire.

1. La suppression des instruments mis en place en 2011

Il relève tout d’abord que l’ensemble des dispositifs instaurés en 2011 ont été supprimés et que depuis aucun outil de suivi ou de contrôle n’a été mis en place.

Face à la hausse constante des dépenses d’AME et à la progression du nombre de bénéficiaires, le précédent Gouvernement avait mis en place plusieurs mesures de contrôle. La loi de finances rectificative du 29 décembre 2010 prévoyait ainsi :

– l’instauration d’un droit annuel forfaitaire de 30 euros conditionnant le bénéfice de l’AME pour les majeurs ;

– la délégation donnée aux caisses d’assurance maladie pour ester en justice aux fins de récupération des indus ;

– la restriction de la définition des ayants droit des demandeurs d’AME, les ascendants et collatéraux devant désormais formuler une demande à titre personnel ;

– la restriction du champ de prise en charge par l’AME des actes, produits et prestations, à ceux exclusivement destinés au traitement ou à la prévention d’une maladie ;

– l’instauration d’une procédure d’agrément préalable pour les soins hospitaliers coûteux programmés ;

– l’instauration d’une condition de stabilité de résidence pour bénéficier des prestations en cours d’année de droit.

La deuxième loi de finances rectificative pour 2012 a supprimé les mesures relatives au droit de timbre, au fonds national de l’aide médicale de l’État et à l’agrément préalable pour soins coûteux. Le Rapporteur spécial condamne avec fermeté ces modifications. Comme il le soulignait dans le cadre de la mission d’information sur l’AME, « l’effort financier que ce paiement nécessite de la part des bénéficiaires de l’AME reste faible par rapport à l’importance des crédits finançant l’AME. Les premières applications de ce dispositif montrent [d’ailleurs] qu’il n’a pas soulevé dans les populations concernées beaucoup de résistance ou de refus. La faiblesse du montant du droit de timbre rend le système parfaitement opérant. Il est accompagné d’une connotation symbolique qui permet d’éviter que des individus en situation irrégulière soient dispensés de tout effort à la participation de leur couverture sociale, qui nécessite également un effort national de solidarité » (24).

Le ministère considère qu’il n’est pas possible de mesurer l’impact de ces dispositifs sur les dépenses, le Rapporteur spécial relève pourtant que le nombre de bénéficiaires a légèrement diminué en 2012, c’est-à-dire après l’entrée en vigueur de ces mesures. Il est regrettable que la suppression de ces outils soit intervenue de façon unilatérale et dogmatique, sans aucune évaluation préalable. Cette méthode trahit un angélisme pernicieux et reflète la démission du Gouvernement sur le sujet ; la majorité préfère ignorer la réalité et renoncer à tout moyen de contrôle.

2. Un contrôle inexistant

Compte tenu de la dynamique de la dépense, le Rapporteur spécial a interrogé le ministère et l’assurance maladie sur les procédures de contrôle et sur les sanctions appliquées ces dernières années. Le ministère de la Santé et l’assurance maladie ont fait valoir en préambule que, par principe, le contrôle de personnes en situation irrégulière reste « empreint d’une difficulté certaine ».

Selon le ministère de la Santé, 160 équivalents temps plein sont affectés au contrôle a priori, c’est-à-dire lors de l’ouverture des droits. Il appartient à ces agents de vérifier que le dossier est complet, c’est-à-dire que le demandeur fournit un justificatif de ressources, d’identité, de stabilité de résidence depuis plus de trois mois et un justificatif d’adresse ou, à défaut, une attestation sur l’honneur. Les caisses primaires d’assurance maladie ont centralisé l’instruction des demandes au sein de pôles de gestion avec une supervision systématique des dossiers. Les équipes sont spécialisées et peuvent mieux détecter les éventuelles anomalies. Par ailleurs, depuis le 1er janvier 2010, les caisses délivrent des cartes sécurisées aux titulaires de l’AME. Ce document non copiable comporte la photographie du bénéficiaire (pour les plus de seize ans).

Ce contrôle a priori se double de vérifications a posteriori. L’ensemble des opérations s’inscrit dans un plan de maîtrise des risques assis sur 26 risques spécifiques. Selon la caisse nationale d’assurance maladie, le taux de maîtrise de ces 26 risques atteint 98 %. Ce taux explique que le nombre de fraudes soit très faible, comme le montre le tableau suivant.

NOMBRE DE FRAUDES SUR L’AME ET ACTIONS MENÉES PAR LES CAISSES

(en euros)

Année

Nombre de fraudes

Nombre de saisines du Parquet

Montant du préjudice subi

Montant du préjudice évité

2013 (1)

20

3

39 461

15 350

2012

41

8

117 112

18 433

2011

31

8

74 771

30 850

2010

20

6

29 769

12 000

2009

48

3

106 325

113 544

2008

33

3

86 764

23 137

(1) Données arrêtées au 31 août.

Source : CNAM.

Il convient de relever que si les caisses primaires peuvent signaler les cas de fraude au parquet, l’assurance maladie ne peut pas déposer plainte car l’article L. 252-4 du code de l’action sociale et des familles, à l’instar de l’article L. 861-5 code de la sécurité sociale en matière de CMU-C, ne le prévoit pas dans la délégation de gestion de l’autorité administrative préfectorale vers l’assurance maladie.

L’assurance maladie peut néanmoins faire usage des pénalités financières prévues par le code de l’action sociale et des familles aux articles L. 162-1-14 et R. 147-6 en cas de faute ou R 147-11 en cas de fraude. Le montant de la pénalité encourue est, en cas de faute, compris entre 0 euro et le plafond mensuel de sécurité sociale, soit 3 086 euros en 2013, et, en cas de fraude, entre 1/10e et quatre fois ce même plafond.

Au vu de ces chiffres, le Rapporteur spécial considère que le contrôle est très insuffisant. L’AME est bien perçue comme une dépense obligatoire de guichet dont a renoncé à contrôler l’évolution. La démission aussi bien des gestionnaires que du payeur final doit impérativement cesser dans les meilleurs délais.

C. LA NÉCESSAIRE REFONTE DE L’AME

L’ensemble des données que le Rapporteur spécial a collecté montre que le système actuel d’AME est totalement à bout de souffle. Des adaptations marginales ne suffiront pas ; il convient de repenser globalement le dispositif en s’interrogeant sur sa philosophie même. Dans une période de contrainte budgétaire forte, on ne peut accepter qu’une telle dépense ne soit ni pilotée ni contrôlée.

Contrairement au Gouvernement, le Rapporteur spécial considère qu’il est primordial de suivre avec précision l’évolution de cette dépense et son contenu. Il estime par ailleurs que de véritables moyens de contrôle adéquats doivent être mis en place.

Fort de ce constat, il appelle donc à un recentrage de l’AME sur les besoins urgents, à l’instar des pratiques de nos voisins européens. Il serait d’ailleurs utile que notre politique en la matière soit, comme pour la politique d’immigration, harmonisée avec celles de nos voisins. Si l’immigration clandestine n’est pas principalement liée à l’attrait de notre système de santé, il n’en reste pas moins que l’AME sécurise ces mouvements illégaux. Par ailleurs, il convient de s’interroger sur la légitimité d’offrir à des étrangers en situation irrégulière le même accès aux soins qu’à des ressortissants nationaux en grande difficulté. Alors que des efforts sont demandés tous les jours à l’ensemble de nos compatriotes, il semble de plus en plus difficile de traiter de la même façon ressortissants nationaux et étrangers en situation irrégulière.

Les dépenses de l’AME devraient donc être concentrées sur trois postes :

– les soins urgents ;

– les mesures prophylaxiques ;

– la prise en charge des grossesses et des soins pour les enfants.

Par ailleurs, la gestion des dépenses de l’AME devrait être regroupée au sein d’une seule caisse d’assurance maladie à compétence nationale. Les caisses locales serviraient uniquement de guichet pour les bénéficiaires mais l’instruction des dossiers, le suivi des données et les opérations de contrôle seraient centralisés. La caisse nationale deviendrait ainsi l’interlocuteur unique des autorités administratives et politiques, mettant un terme à la multiplication des acteurs qui conduit à leur inévitable déresponsabilisation. Cette caisse pourrait par ailleurs agréer un certain nombre de professionnels, établissements de santé, dispensaires ou praticiens libéraux, au titre de l’AME. Le suivi des dépenses s’en trouverait amélioré et pourrait être mieux contrôlé.

Enfin le Rapporteur spécial considère que la situation en Guyane et à Mayotte doit faire l’objet d’un examen approfondi et spécifique. Les éléments dont il dispose laissent supposer que les dépenses d’AME ne sont pas contrôlées en Guyane ou, à tout le moins fortement sous-évaluée. Pour ce qui concerne Mayotte, il est à craindre une explosion des dépenses le jour où l’AME entrera en vigueur. Il importe d’anticiper très en amont ce phénomène afin d’ajuster au mieux les dispositifs légaux et réglementaires.

TROISIÈME PARTIE : LE COMPTE SPÉCIAL AVANCES AUX ORGANISMES DE SÉCURITÉ SOCIALE

L’article 53 de la loi de finances initiale pour 2013 a recréé un compte de concours de financiers intitulé Avance aux organismes de sécurité sociale qui retrace les versements à l’ACOSS et les remboursements des avances sur le montant des recettes affectées aux caisses et régimes de sécurité sociale. Ce support permettra d’assurer un suivi budgétaire clair et transparent de la fraction de TVA affectée aux organismes de sécurité sociale. Ce compte permettra également d’assurer une plus grande prévisibilité sur les montants et les dates de versement de la recette affectée.

Les recettes sont constituées, d’une part, de 0,33 % de TVA nette au titre de la compensation des exonérations de charges patronales maintenues par la deuxième loi de finances rectificative pour 2012 et, d’autre part, de 5,88 % de TVA nette.

L’article 39 du projet de loi de finances pour 2014 augmente le versement de l’État à la sécurité sociale pour couvrir les dépenses ou pertes de recettes générées par la révision du quotient familial et la suppression de l’avantage fiscal dont bénéficient les salariés sur la cotisation versée par leurs employeurs au titre des contrats collectifs de santé. Le budget général assure également la compensation de la baisse des cotisations des entreprises à la branche famille. Dans le cadre de la réforme des retraites, le Gouvernement a en effet indiqué que la hausse des cotisations vieillesse sera compensée par une baisse équivalente des cotisations famille de façon à ne pas augmenter le coût du travail. Le besoin de financement atteint donc un total de plus de 3 milliards d’euros, chacune de ces mesures ayant un coût équivalent.

L’article 39 du PLF relève donc les deux taux existants, qui passent respectivement de 5,88 % à 7,87 % pour la compensation générale et de 0,33 % à 0,34 % pour la compensation au titre des heures supplémentaires.

L’équilibre financier du compte de concours financiers est naturellement modifié comme le montre le tableau suivant.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS DU COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS

 

Autorisations d’engagement et crédits de paiement

 

LFI 2013

PLF 2014

Avance à l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) de la fraction de TVA prévue au 3° de l’article L. 241-2 du code de la sécurité sociale

8 803 340 000

11 962 400 000

Avance à l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) de la fraction de TVA affectée aux organismes de sécurité sociale en compensation des exonérations de cotisations sur les heures supplémentaires

500 000 000

516 800 000

Avance à l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) de la fraction de TVA affectée aux organismes de sécurité sociale en compensation de l’exonération de cotisations sociales sur les services à la personne

190 000 000

212 800 000

Source : PAP 2014.

EXAMEN EN COMMISSION

Après l’audition de Mme Marisol Touraine, ministre des Affaires sociales et de la santé, lors de la commission élargie du 7 novembre 2013 à 9 heures 30 (25), la commission des Finances examine les crédits de la mission Santé et ceux du compte spécial Avances aux organismes de sécurité sociale.

Malgré l’avis défavorable du Rapporteur spécial, la Commission adopte les crédits de la mission Santé.

Puis, malgré l’avis défavorable du Rapporteur spécial, elle adopte les crédits du compte spécial Avances aux organismes de sécurité sociale.

La Commission examine ensuite les amendements n° II-CF-43 de
M. Hervé Mariton et les amendements n° II-CF-233, II-CF-234, II-CF-230, II-CF-231 et II-CF-232 de M. Claude Goasguen, Rapporteur spécial, portant article additionnel après l’article 74.

M. Claude Goasguen, Rapporteur spécial. Les trois premiers amendements traitent du même sujet, c'est-à-dire le rétablissement du droit de timbre et de l’agrément préalable. C’est un débat ancien et je ne crois pas que nous arriverons aujourd’hui à un accord.

Les amendements que je vous propose diffèrent légèrement de celui déposé par le groupe UMP dans la mesure où ces derniers affectent le produit du droit de timbre à la sécurité sociale.

Les trois autres amendements s’inscrivent dans une autre logique et j’espère qu’ils seront unanimement soutenus.

Je veux tout d’abord revenir sur la question du contrôle des dépenses relatives à l’aide médicale de l’État (AME). Un de mes collègues a précédemment évoqué le travail de la Chambre régionale des comptes, estimant qu’il était la preuve que le système est bien contrôlé. Pourtant les juridictions financières n’effectuent aucun contrôle a priori, elles interviennent uniquement a posteriori, or ce sont bien les contrôles internes et a priori qui me préoccupent. Je persiste à dire que ces contrôles n’existent pas faute de moyens suffisants au ministère. C’est la raison pour laquelle je souhaite obtenir un rapport qui détaille les mesures de contrôle mises en place par les services de l’État et ceux de l’assurance maladie sur l’AME, en détaillant par catégories de dépenses et par territoire.

Avant de présenter les deux autres amendements, je veux redire les difficultés que j’ai eues pour obtenir des chiffres sur l’AME. Avant mon contrôle sur place, je n’avais rien sur l’exécution pour 2013. Au ministère, on m’a donné des éléments pour le premier trimestre. Suite à un échange de courrier, j’ai finalement obtenu un état de la situation au 30 septembre. Je regrette qu’il ait fallu autant de temps et d’énergie pour avoir ces informations.

Je pense que si nous disposions de telles données, nous pourrions débattre de façon constructive du sujet. Il faut sortir de l’opposition stérile entre une suppression complète de l’AME et un laisser-faire total. Il faut regarder la situation avec réalisme et pragmatisme en répondant aux besoins de ces populations mais sans angélisme. Je pense qu’un renforcement des contrôles participe de cette logique et c’est bien l’esprit de mes amendements.

Concernant la Guyane, je n’ai pas été satisfait des réponses de la ministre. Il y a un grave problème dans ce département, et d’ailleurs les députés guyanais de l’ignorent pas. La population d’immigrés illégaux dans le bassin est bien plus importante que la plupart des estimations. Le problème tient notamment à l’état du système de soins du Suriname. Pour résoudre cette difficulté la France finance d’ailleurs, par l’intermédiaire de l’Agence française développement (AFD), l’hôpital d’Albina qui ne comporte cependant que 38 lits pour le moment. Il faut examiner ce sujet dans le détail. Si le Suriname soigne mieux ses ressortissants, on devrait pouvoir réduire les dépenses d’AME en Guyane et consacrer ces sommes à d’autres actions.

Je veux enfin attirer votre attention sur le cas particulier de Mayotte. J’ai été très choqué de la réponse de la ministre. Mayotte est désormais un département français, certes des dispositions transitoires s’y appliquent, mais constitutionnellement, il a le droit au même traitement juridique et financier que les autres départements. Quand la ministre répond que l’AME n’est pas applicable à Mayotte, j’ai envie d’introduire une question prioritaire de constitutionnalité – QPC – devant le Conseil constitutionnel. Il est en effet évident que tôt ou tard l’AME sera mise en place à Mayotte. Il faut anticiper ce déploiement en regardant comment sont actuellement prises en charge les dépenses de santé des immigrés illégaux. Je regrette que ce sujet ne soit pas mis en perspective dans le projet de loi de finance 2014 : le problème se posera inévitablement et le mieux est de le traiter le plus rapidement possible pour éviter que cela ne devienne un véritable cataclysme financier et politique.

M. Dominique Tian. J’aimerais revenir sur l’amendement du Rapporteur spécial relatif aux contrôles. Il existe bien des contrôles, mais malheureusement les dernières données datent de 2009. En 2009, un Rapport annuel de performance a été présenté au Parlement pour le programme 183. Cette enquête a été faite par les services de l’État auprès de 106 caisses primaires d’assurance maladie (CPAM). Sur 5 % des dossiers de bénéficiaires de l’assurance maladie qui ont été tirés au sort, le taux d’erreur était alors de 49,86 %. Cela veut dire qu’un bénéficiaire sur deux ne devait pas avoir accès à l’AME.

M. Christophe Sirugue. Il me semble qu’il ne faut pas confondre les termes : les erreurs qui peuvent être des erreurs d’orientation des dossiers n’ont rien à voir avec des fraudes. À chaque fois, M. Tian fait la confusion. Je renvoie au rapport que j’avais établi avec M. Claude Goasguen pour le compte du CEC, où nous avions identifié qu’il y avait certes des fraudes, mais qu’elles n’étaient pas supérieures à ce que l’on pouvait observer dans d’autres dispositifs.

Par ailleurs, je vous rappelle qu’en 2012, les contrôles ont conduit à la détection de 41 fraudes pour un préjudice total de 120 000 euros. En ce qui concerne les professionnels de santé, une seule fraude a été détectée lors du contrôle de neuf omnipraticiens. Une procédure ordinale est en cours vis-à-vis du praticien concerné. Il peut donc bien y avoir des fraudes, mais en un nombre raisonnable. De grâce, n’exagérons pas la réalité et ne confondons pas erreurs d’orientation et fraudes. Je trouve très regrettable que certains membres de l’opposition continue de mettre ces arguments en avant alors qu’ils connaissent parfaitement la situation.

M. le Rapporteur spécial. Plutôt que de fraudes, il convient de parler de gestion aléatoire de ces crédits. La gestion est tellement aléatoire que nous avons dû revoir la tarification hospitalière car elle n’était pas conforme à la réalité. Il n’y avait pas de fraude au sens strict mais cela montrait que le système n’était pas piloté.

On a oublié de rappeler que l’État doit à la sécurité sociale 40 millions d’euros. De plus, les soins urgents n’ont pas été comptabilisés dans l’enveloppe évoquée par la ministre. Alors qu’ils sont forfaitairement fixés à 40 millions d’euros, ils atteignent déjà 80 millions d’euros au 30 septembre et nous devrions retrouver les 120 millions d’euros constatés en 2012.

M. Gérard Sebaoun. En 2009, sur 133 plaintes déposées à la CPAM de Paris, seules 13 concernaient des bénéficiaires de l’AME. À la CPAM de Bobigny, le préjudice économique ne représentait que 0,12 % de la dépense AME. Je veux dire à mes collègues qu’il ne faut pas caricaturer ; il faut revenir à plus de sérieux et ne pas agiter ainsi des chiffons rouges.

La Commission rejette l’amendement n° II-CF-43 de M. Hervé Mariton et les amendements n° II-CF-233, II-CF-234, II-CF-230, II-CF-231 et II-CF-232 de M. Claude Goasguen, Rapporteur spécial.

*

* *

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL

Le Rapporteur spécial a successivement entendu :

– pour le fonds CMU, Mme Raphaëlle Verniolle, directrice par intérim et M. Jean-François Chadelat, président d’honneur ;

– pour l’agence nationale des systèmes d’information partagés de santé (ASIP), MM. Michel Gagneux, président et Jean-Yves Robin, directeur ;

– pour l’agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), le Pr. Dominique Maraninchi, directeur général et Mme Béatrice Guéneau-Castilla, directrice générale adjointe ;

– pour l’institut national de prévention et d’éducation pour la santé (INPES), Mme Thanh Le Luong, directrice générale ;

– pour la direction de la Sécurité sociale, M. Thomas Fatome, directeur, M. Jean-Benoît Dujol, sous-directeur de l’accès aux soins, des prestations familiales et des accidents du travail, Mme Jeanne Lanquetot-Moreno, chargée de mission et M. Bruno Morin, rédacteur au bureau de la synthèse financière de la sous-direction du financement de la sécurité sociale ;

– pour la direction générale de la Santé, MM. Christian Poiret, secrétaire général et François Aubart, conseiller médical, le Dr Alain Fontaine, chargé de mission « recherche et politique de santé », Mme Caroline Foedit, chef du bureau du budget, MM. Gérard Gonzalez, directeur de projet du département stratégie ressources de la direction générale de l’Offre de soins (DGOS) et Robert Touret, adjoint au chef de la mission Administration générale de la DGOS, chef du pôle finances ;

– pour la haute autorité de la Santé (HAS), le Pr. Jean-Luc Harousseau, président et M. Jean-Patrick Sales, directeur délégué.

© Assemblée nationale

1 () Loi de financement de la sécurité sociale pour 2012.

2 () Décret n° 2012-745 du 9 mai 2012 relatif à la déclaration publique d’intérêts et à la transparence en matière de santé publique et de sécurité sanitaire.

3 () Ordonnance n° 2010-18 du 7 janvier 2010 portant création d’une agence nationale chargée de la sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail.

4 () Loi n° 2007-294 du 5 mars 2007 relative à la préparation du système de santé à des menaces sanitaires de grande ampleur.

5 () Décret n° 2013–30 du 9 janvier 2013 relatif à la mise en œuvre du règlement sanitaire international.

6 () Rapport de M. Christian Estrosi, n° 251, annexe 42, sur les crédits de la mission Santé, 10 octobre 2012.

7 () Direction générale de la santé, Livre des plans de santé publique, mai 2011, http://www.sante.gouv.fr/IMG/pdf/Livre_des_plans_sante_publique_2011_BD.pdf.

8 () Loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009, portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires.

9 () Ordonnance n° 2000-29 du 13 janvier 2000 portant création d’une agence de santé et extension ou adaptation de certaines dispositions du code de la santé publique aux îles Wallis et Futuna.

10 () J. Michael McGinnis, Pamela Williams-Russo et James R. Knickman, “The Case for more active policy attention to health promotion”, in Health Affairs, 21, n° 2 (20002), pp. 78-93.

11 () T. McKeown, “The Role of Medicine : Dream, Mirage or Nemesis”, in London, Nuffield Provincial Hospital Trust, 1976, cité in « The Case For More… » ; op. cit., p. 79.

12 () K. Chevreuil, Évaluation coût-efficacité du remboursement intégral de l’aide au sevrage tabagique en France, novembre 2012, http://tobaccocontrol.bmj.com/content/early/2012/11/28/tobaccocontrol-2012-050520.full?sid=efcd1766-aa4a-4798-8891-4409bf3882a8.

13 () Organisation mondiale de la santé, Interventions on diet and physical activity : what works, Evidence Tables, 2009.

14 () Assessing Cost-Effectiveness in Prevention, septembre 2010,

http://www.sph.uq.edu.au/docs/BODCE/ACE-P/ACE-Prevention_final_report.pdf.

15 () Les gains de santé sont évalués en DALYs (Disability Adjusted Life Years) c’est-à-dire en années de vie ajustées sur l’incapacité. Il s’agit de la somme des années de vie perdues en raison d’une mortalité prématurée et des années de travail perdues en raison d’une incapacité liée à la pathologie visée.

16 () Un projet global pour la stratégie nationale de santé – 19 recommandations du comité des « sages », comité présidé par Alain Cordier, juin 2013.

17 () Stratégie nationale de santé, feuille de route présentée le 23 septembre 2013

18 () Cour des comptes, La prévention sanitaire, rapport effectué à la demande de la commission des Affaires sociales de l’Assemblée nationale, octobre 2011.

19 () Ibid.

20 () Stratégie nationale…, op. cit.

21 () L’article 57 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances dispose « Les commissions de l’Assemblée nationale et du Sénat chargées des finances suivent et contrôlent l’exécution des lois de finances et procèdent à l’évaluation de toute question relative aux finances publiques. Cette mission est confiée à leur président, à leur rapporteur général ainsi que, dans leurs domaines d’attributions, à leurs rapporteurs spéciaux et chaque année, pour un objet et une durée déterminés, à un ou plusieurs membres d’une de ces commissions obligatoirement désignés par elle à cet effet. À cet effet, ils procèdent à toutes investigations sur pièces et sur place, et à toutes auditions qu’ils jugent utiles. Tous les renseignements et documents d’ordre financier et administratif qu’ils demandent, y compris tout rapport établi par les organismes et services chargés du contrôle de l’administration, réserve faite des sujets à caractère secret concernant la défense nationale et la sécurité intérieure ou extérieure de l’État et du respect du secret de l’instruction et du secret médical, doivent leur être fournis. Les personnes dont l’audition est jugée nécessaire par le président et le rapporteur général de la commission chargée des finances de chaque assemblée ont l’obligation de s’y soumettre. Elles sont déliées du secret professionnel sous les réserves prévues à l’alinéa précédent. »

22 () Chambre régional des comptes de Guyane, Rapport d’observations définitives sur la gestion du Centre hospitalier de l’ouest guyanais (CHOG) de Saint-Laurent-du-Maroni, 28 octobre 2011.

23 () Mayotte : un nouveau département confronté à de lourds défis, apport d'information n° 675 (2011-2012) de MM. Jean-Pierre Sueur, Christian Cointat et Félix Desplan, fait au nom de la commission des lois, déposé le 18 juillet 2012.

24 () Rapport d’information n° 3524 du 9 juin 2011 fait au nom du comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques par MM. Claude Goasguen et Christophe Sirugue.

25 () Le compte rendu de la commission élargie peut être consulté sur le site internet de l’Assemblée nationale à l’adresse : http://www.assemblee-nationale.fr/14/budget/plf2014/commissions_elargies/