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N
° 2260

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 9 octobre 2014.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2015 (n° 2234),

PAR Mme Valérie RABAULT,

Rapporteure Générale

Députée

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ANNEXE N° 5

AGRICULTURE, ALIMENTATION, FORÊT
ET AFFAIRES RURALES

SÉCURITÉ ALIMENTAIRE

Rapporteur spécial : M. Éric ALAUZET

Député

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SOMMAIRE

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Pages

INTRODUCTION 5

CHAPITRE I : LA LOI D’AVENIR POUR L’AGRICULTURE A RÉORIENTÉ LES MISSIONS DU DISPOSITIF DE LA SÉCURITÉ ALIMENTAIRE 7

A. LA DIRECTION GÉNÉRALE DE L’ALIMENTATION 7

1. Changer les comportements nocifs 8

2. Le suivi des inspections 9

3. La réactivité du système de contrôle 9

B. L’AGENCE NATIONALE DE SÉCURITÉ SANITAIRE DE L’ALIMENTATION, DE L’ENVIRONNEMENT ET DU TRAVAIL (ANSES) 9

1. L’évolution de l’Agence 9

2. De nouvelles missions pour l’Anses en 2015 : les autorisations relatives aux produits phytopharmaceutiques 10

CHAPITRE II : UN BUDGET DONT LA RÉGRESSION SE STABILISE APRÈS LE RAPPORT ALARMANT DE LA COUR DES COMPTES 15

A. LE PROJET DE BUDGET POUR 2015 15

1. Une légère diminution des crédits 15

2. Les missions de sécurité alimentaire 17

a. La prévention et gestion des risques inhérents à la production des végétaux 18

b. La lutte contre les maladies animales et protection des animaux 19

c. La prévention et gestion des risques sanitaires liés aux denrées alimentaires 19

d. Les Actions transversales 20

e. L’Élimination des cadavres et des sous-produits animaux 20

f. Moyens des services de l’alimentation 21

g. Qualité de l’alimentation et offre alimentaire 21

B. UN RAPPORT DE LA COUR DES COMPTES SUR L’INSUFFISANCE DES CONTRÔLES 21

1. Un contrôle dont les principes sont fixés par le droit communautaire 21

2. Un autocontrôle insuffisant des professionnels 22

3. L’affaiblissement des contrôles effectués par le ministère 22

EXAMEN EN COMMISSION 27

ANNEXE : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL 29

L’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

À cette date, 2 % des réponses étaient parvenues au Rapporteur spécial, ce qui ne lui a pas facilité la tâche.

INTRODUCTION

Au niveau national, la politique de sécurité sanitaire de l’alimentation fait intervenir principalement trois administrations relevant respectivement du ministère de la santé, du ministère de l’économie et du ministère de l’agriculture.

La direction générale de la santé (DGS) est compétente pour l’eau potable, les eaux embouteillées et, de façon générale, intervient également en cas de crise sanitaire.

La direction générale de la consommation, de la concurrence et de la répression des fraudes (DGCCRF) est responsable de la surveillance globale du marché et plus particulièrement de la sécurité des denrées d’origine végétale, des règles générales et spécifiques d’information du consommateur sur les denrées alimentaires, des organismes génétiquement modifiés, des exigences en matière de qualité et de composition des denrées alimentaires, des matériaux au contact des denrées alimentaires et, conjointement avec la direction générale de l’alimentation (DGAL), des aliments pour animaux. La DGCCRF exerce ses compétences à tous les stades de la chaîne alimentaire, à l’exclusion de la production primaire.

La direction générale de l’alimentation (DGAL) intervient sur l’ensemble des aspects qui concernent la production animale (avant abattage) et végétale (avant récolte), notamment l’utilisation des intrants (produits phytosanitaires, matières fertilisantes, médicaments vétérinaires) ainsi que l’hygiène et la sécurité de la production et alimentation animale. En outre, elle intervient sur l’hygiène et la sécurité des denrées d’origine animale, de la transformation jusqu’à la distribution au consommateur final. Ses missions comprennent également le contrôle sanitaire et zoosanitaire des zones de production de coquillages.

Le programme 206, qui fait l’objet de ce rapport spécial, retrace les actions de la DGAL et de l’Agence Anses au service de la santé alimentaire au sein de la mission Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales.

Ces contrôles et évaluations sanitaires sont assurés dans des conditions budgétaires exemplaires : le programme 206 représente, avec un peu plus de 500 millions d’euros, 0,13 % du budget de l’État pour assurer la sécurité alimentaire de 66 millions de Français (sans compter les exportations de produits alimentaires).Toutefois, la Cour des comptes a relevé dans son rapport public annuel de 2014 des insuffisances sérieuses dans les contrôles du ministère de l’agriculture qui renforcent les remarques du Rapporteur spécial sur la nécessité de préserver les effectifs.

Le dispositif est organisé autour de deux structures majeures, au contact d’une part des professionnels de l’agriculture et de l’élevage associés à la mission au travers de leurs organisations, et d’autre part du réseau des chercheurs et du monde de la recherche alimentaire. L’évaluation du risque est assurée par une structure de 1 250 personnes environ, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSéS).

La gestion du risque est, elle, opérée par une structure de 4 560 personnes environ, administration centrale et services déconcentrés compris, la Direction générale de l’alimentation (DGAL), au sein de laquelle l’administration centrale représente 200 agents.

Le Rapporteur spécial souligne que les effectifs chargés des missions imparties au programme ont diminué de 19 % de 2005 à 2015 ; le projet de loi de finances pour 2015 met enfin un terme à cette évolution dangereuse avec une augmentation de 60 ETPT qui sera échelonnée entre 2015 et 2016.

En effet l’absence de crise majeure dans le domaine de l’offre alimentaire au cours de l’année 2014, est le fruit d’actions de prévention et de contrôle menées par les administrations responsables avec un effectif restreint. Elle ne doit pas être une incitation à réduire la vigilance, indispensable pour maintenir la confiance des millions de Français qui se nourrissent quotidiennement sur notre territoire, et de ceux qui achètent les produits alimentaires français dans le monde entier. Ces administrations sont le socle d’une réputation internationale méritée de fiabilité de l’offre alimentaire qui doit être renforcée et préservée.

CHAPITRE I :
LA LOI D’AVENIR POUR L’AGRICULTURE A RÉORIENTÉ LES MISSIONS DU DISPOSITIF DE LA SÉCURITÉ ALIMENTAIRE

La loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt fait de la sécurité alimentaire le premier objectif de la politique agricole :

« La politique en faveur de l’agriculture et de l’alimentation, dans ses dimensions internationales, européenne, nationale et territoriale, a pour finalités : « 1° Dans le cadre de la politique de l’alimentation définie par le Gouvernement, d’assurer à la population l’accès à une alimentation sûre, saine, diversifiée, de bonne qualité et en quantité suffisante, produite dans des conditions économiquement et socialement acceptables par tous, favorisant l’emploi, la protection de l’environnement et des paysages et contribuant à l’atténuation et à l’adaptation aux effets du changement climatique ».

Cette orientation prend un sens particulier avec le projet d’irrigation agricole et de barrage de SIVENS dont les motivations initiales et anciennes ne semblent plus bien s’accorder avec les enjeux actuels. En réaffirmant cet objectif, la loi intègre la sécurité sanitaire de l’alimentation parmi les missions régaliennes de l’État, et détermine les priorités du programme national pour l’alimentation. La traduction des dispositions législatives dans de dispositif de contrôle et d’évaluation sanitaire est analysée ci-dessous.

A. LA DIRECTION GÉNÉRALE DE L’ALIMENTATION

La Direction générale de l’alimentation (DGAL) est l’administration responsable de la gestion du risque. Il lui revient d’assurer la traçabilité de l’ensemble de la chaîne alimentaire, animaux et végétaux, le respect sur le terrain de la réglementation sur les OGM, les contrôles sanitaires dans les exploitations animales – vaccinations, contrôle et décisions sur les animaux malades – ainsi que dans les abattoirs, et enfin les contrôles à l’importation.

L’organisation de liens au plus près du terrain avec les professionnels de l’agriculture et de l’élevage est indispensable à la réussite de sa mission. C’est aussi à elle qu’il revient de préparer la réglementation et d’assurer la transcription et la mise en œuvre de la réglementation européenne.

L’objet premier du travail de la DGAL est la prévention fondée sur l’analyse du risque.

La mise en œuvre de cette loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt aura un impact sur les missions portées par le programme 206, en assurant notamment :

– l’efficacité des contrôles, grâce à la transparence des résultats, en renforçant les pouvoirs de l’administration pour la mise en œuvre par les professionnels des actions correctives prescrites ;

– la prévention de la consommation excessive des antibiotiques et le renforcement de la sécurité sanitaire du médicament vétérinaire, en encadrant les pratiques commerciales et en limitant la prescription des antibiotiques d’importance critique ;

– la maîtrise des produits phytopharmaceutiques, dans la continuité des objectifs fixés par le Ministre de l’agriculture pour le plan Ecophyto, en interdisant toute publicité à destination du grand public, ainsi que pour les professionnels en dehors des points de vente et médias spécialisés, et par la mise en place d’un dispositif de phyto-pharmacovigilance ;

– le transfert des décisions d’autorisation de mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques et des matières fertilisantes de la DGAL à l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses).

1. Changer les comportements nocifs

Le premier objectif de la politique de sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation est de favoriser le changement de pratiques afin de préserver la santé publique et l’environnement. À cette fin, la limitation de l’utilisation des pesticides et des antibiotiques est un enjeu sanitaire majeur. L’évolution de l’indicateur « NODU », associé au plan Ecophyto, témoigne de l’impact des mesures mises en œuvre pour améliorer les pratiques. Dans le cadre du plan Ecoantibio, la mesure de l’exposition des animaux, toutes filières confondues, à la consommation d’antibiotiques d’importance critique est un témoin de l’évolution des pratiques en la matière.

Cet objectif vise également à la promotion de comportements favorables à une alimentation diversifiée et équilibrée. Le programme national pour l’alimentation s’inscrit dans une stratégie gouvernementale interministérielle d’actions qui visent en particulier à renouer le lien entre la production agricole et le citoyen. Il est décliné à travers l’opération « Un fruit pour la récré » qui vise à contribuer à l’éducation des jeunes aux bonnes habitudes alimentaires. Cette action est justifiée à condition que le fruit ne soit pas pollué par des pesticides !

2. Le suivi des inspections

Pour atteindre le deuxième objectif de prévention et de réduction des risques sanitaires à tous les stades de la production, l’attention est portée sur le suivi des non-conformités constatées lors des inspections. L’application de mesures correctives en cas de constat de non-conformité est un élément essentiel de la garantie de salubrité des denrées alimentaires issues de ces établissements et par là même de la sécurité du consommateur. Pourtant la Cour des comptes, dans la dernière partie du rapport de 2014 commenté ci-après, émet de vives critiques sur la qualité des contrôles et la réalité des mesures de suivi en cas d’anomalies.

3. La réactivité du système de contrôle

Enfin, le troisième objectif vise à s’assurer de la réactivité et de l’efficience du système de contrôle sanitaire. La préparation à la gestion d’épizootie, par la réalisation d’exercices d’alerte faisant intervenir tous les acteurs mobilisables sous l’autorité du préfet et la gestion des maladies animales, ainsi que le suivi de la levée des arrêtés préfectoraux de mise sous surveillance en cas de suspicion de maladie, contribuent à cet objectif face au risque de propagation de maladies très contagieuses et aux conséquences socio-économiques considérables. Le suivi du coût unitaire d’une inspection permet quant à lui de vérifier que cette efficacité est obtenue moyennant un coût optimisé.

B. L’AGENCE NATIONALE DE SÉCURITÉ SANITAIRE DE L’ALIMENTATION, DE L’ENVIRONNEMENT ET DU TRAVAIL (ANSES)

1. L’évolution de l’Agence

Dans le domaine de la sécurité alimentaire, l’évaluateur du risque est l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses). L’Anses est issue de la fusion de l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa) et de l’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail (Afsset), intervenue le 1er juillet 2010. Elle a aussi intégré l’Agence nationale du médicament vétérinaire et le Laboratoire de la santé des végétaux, ex-Laboratoire national des végétaux.

L’Anses a pour mission principale la réalisation et la fourniture d’une expertise scientifique indépendante et pluridisciplinaire ; elle fournit l’appui scientifique et technique nécessaire à l’élaboration des politiques de protection de la santé liées à des expositions environnementales, professionnelles ou alimentaires et à la mise en œuvre des mesures de gestion des risques dans ses domaines de compétence. Grâce à l’Anses, le Gouvernement dispose d’une expertise globale des risques sanitaires, qu’ils soient liés aux milieux de vie et de travail, à des produits (qu’il s’agisse de pesticides ou de produits chimiques) ou à l’alimentation.

L’agence réalise également des évaluations en matière de protection et de bien-être des animaux (étude, prévention et traitement des maladies animales), de protection de la santé des végétaux (évaluation des produits de traitement des cultures) ainsi que sur les propriétés nutritionnelles et fonctionnelles des aliments. Concernant le bien être des animaux, il paraît utile d’évaluer les conséquences du récent amendement adopté au cours de l’examen du projet de loi de modernisation et de simplification du droit et des procédures, qui donne aux animaux le statut d’êtres sensibles.

Pour mener à bien ses missions, l’Anses s’appuie largement sur la communauté scientifique française et internationale, au moyen de partenariats et de conventions de recherche avec les institutions scientifiques, d’appels à candidature et d’appels à projets de recherche.

L’agence a su consolider son positionnement d’acteur scientifique de référence en santé et bien-être animal, santé végétale et sécurité sanitaire des aliments, en renforçant ses publications scientifiques et ses mandats de laboratoire de référence aux niveaux international, européen et national . Elle a développé une forte expertise en épidémiosurveillance et en appui méthodologique aux dispositifs de surveillance. L’agence a par ailleurs contribué à stimuler et à financer l’acquisition de nouvelles connaissances scientifiques sur des enjeux sanitaires où les incertitudes restent nombreuses , au travers du programme national de recherche en environnement santé travail.

Elle a également acquis une place de tout premier plan en Europe dans le cadre de la réglementation Reach, et en matière d’évaluation des substances et produits phytosanitaires, matières fertilisantes et supports de culture, avec une perspective de montée en puissance pour les biocides.

L’Anses est placée sous la tutelle des ministres chargés de l’agriculture, de la consommation, de l’environnement, de la santé et du travail. Afin d’assurer sa gouvernance, une présidence tournante de six mois entre les cinq tutelles a été mise en place. Un contrat d’objectifs et de performance a été signé le 26 février 2013 pour la période 2012-2015 entre l’agence et l’État.

Il faut enfin noter que l’Anses peut être saisie par les associations de consommateurs, les organisations de protection de l’environnement et bien de défense des intérêts des victimes d’accidents du travail ou de maladies professionnelles

2 .De nouvelles missions pour l’Anses en 2015 : les autorisations relatives aux produits phytopharmaceutiques

L’année 2015 sera la première année d’un nouveau triennal budgétaire, après quatre années de fortes restrictions budgétaires et de baisses d’emplois pour l’Anses. Le projet de loi de finances pour 2015 est certes marqué par la poursuite des restrictions budgétaires à périmètre constant, mais il devrait intégrer la prise en charge des nouvelles missions confiées à l’Agence par les articles 51 et suivants de la loi d’avenir pour l’agriculture, qui nécessiteront des emplois et ressources financières nouvelles. Une certaine souplesse au niveau des emplois en CDD devra être instaurée pour prendre en compte des variations conjoncturelles de charge de travail pour l’évaluation des produits phytopharmaceutiques et des biocides, dès lors que ces emplois seront financés par les taxes et redevances adéquates, dont le rapporteur spécial juge essentiel la mise en place, et à condition qu’elles donnent effectivement lieu aux recrutements correspondants.

● Les conséquences du transfert des autorisations de mise sur le marché (AMM) de produits phytopharmaceutiques et matières fertilisantes et supports de culture : le transfert effectif est prévu pour le 1er juillet 2015. Ce transfert ajoute aux fonctions d’expert de l’Agence un rôle actif d’autorisation. Celle-ci a décidé de cloisonner l’évaluation scientifique d’une part et d’organiser d’autre part un processus de décision le plus transparent possible afin d’éviter les conflits d’intérêts et les suspicions éventuelles. Le recrutement d’équipes compétentes sur le terrain, qui aient la pratique des filières agricoles ainsi que des compétences de gestion des liens avec les ONG et les filières, s’est avéré nécessaire dans un contexte de réglementation européenne complexe et de baisse des subventions. Les principales étapes prévues pour les mois à venir sont les suivantes :

– mise à jour de la base des AMM des produits phytopharmaceutiques et des Matières Fertilisantes et Supports de Culture : un travail est en cours entre la DGAL et l’Anses pour garantir, avant le transfert, une parfaite cohérence entre les décisions prises par l’administration et les informations disponibles sur le site Internet E-Phy, sachant que ce site sera repris par l’Anses et modernisé d’ici fin 2015.

– résorption des retards dans le traitement des dossiers : l’Anses s’efforcera de résorber le retard accumulé dans la prise en charge des dossiers d’ici à mi-2015, permettant un retour progressif des délais globaux d’instruction conformes à la réglementation. Cet objectif ne pourra néanmoins être atteint que si l’Anses bénéficie durablement d’une flexibilité sur les effectifs à affecter à l’instruction des dossiers, ce qui renvoie au problème déjà évoqué des plafonds d’emploi.

– élaboration de lignes directrices pour la délivrance des AMM : l’Anses va mettre en place dès l’automne un groupe de travail constitué d’experts en matière de protection des végétaux ayant une bonne expérience terrain pour aider l’agence à préparer des lignes directrices pour la prise de décision. Il s’agira de déterminer les éléments complémentaires à l’évaluation des risques permettant d’alimenter la prise de décision (intérêt agronomique, solutions alternatives, données économiques, aspects juridiques) ; de fixer des repères permettant d’identifier les cas justifiant l’application du principe de précaution ; ou encore de lister les principales mesures de gestion découlant de l’évaluation et définir des critères pour apprécier leur applicabilité. Ces lignes directrices auront vocation d’être soumises à consultation publique avant validation par le comité de suivi qui sera mis en place courant 2015 au sein de l’Anses en application de la loi d’avenir agricole. Ce sujet est extrêmement sensible, il convient donc de prendre les mesures nécessaires à la bonne gestion des controverses qui pourront apparaître.

– organisation interne et moyens à déployer : l’objectif est de concilier une exigence d’efficacité du processus global de traitement des dossiers de demande d’AMM, avec une nécessaire clarté dans le partage des responsabilités entre évaluation et gestion, permettant notamment de garantir l’indépendance de l’évaluation scientifique des dossiers. Cette organisation aura vocation à être opérationnelle au 1er juillet 2015. L’Anses estime les redéploiements en personnel nécessaires pour assurer ses nouvelles missions à + 25 ETP en 2015 et + 10 ETP supplémentaires en 2016, pour partie par création d’emplois et pour partie par redéploiement interne.

Par ailleurs un financement spécifique évalué à 4 millions d’euros serait nécessaire pour la mise en place du dispositif et la mise en œuvre d’une nouvelle mission de surveillance des effets indésirables liés à l’exposition aux pesticides (sur la santé humaine, la faune, la flore…) créée par la loi d’avenir agricole (mission de phytopharmacovigilance). Ce financement, indispensable pour que l’Anses puisse exercer ces nouvelles missions, doit prendre la forme d’une taxe sur le chiffre d’affaires des ventes de produits phytoharmaceutiques plafonnée à 4 millions d’euros. Il est prévu que cette taxe soit créée dans le cadre du prochain PLFR pouR 2014. Là encorefaudra-t-il, comme pour la taxe perçue par l’Anses sur les produits phytosanitaires , que les plafonds d’emploi ne viennent pas obérer la mise en œuvre de ce dispositif.

Le Rapporteur spécial insiste sur le problème crucial des effectifs s’agissant de dossiers très techniques. Alors que la réglementation prévoit des délais limités à 12 mois, voire 18 mois pour l’évaluation réalisée par l’Anses, il n’est pas rare que l’ensemble de la procédure dure trois ans. Il semble que ce retard soit lié à l’insuffisance des moyens humains. L’Anses dispose des moyens financiers, mais le plafond d’emploi bloque les recrutements. En effet le produit de la taxe affectée versée par les entreprises concernées ne serait utilisé qu’à moitié des 12 millions d’euros collectés.

Cette situation est pénalisante, d’abord pour les entreprises qui immobilisent leurs investissements pour un temps plus long, alors que les concurrents peuvent prendre les marchés. Elle pénalise aussi l’Anses et la zone sud de l’Europe puisque l’Anses est référente pour l’ensemble des pays concernés. Elle peut pénaliser les usagers qui n’ont pas ces produits à disposition.

L’exception au plafond d’emploi ou l’application des règles qui régissent les programmes européens ont été suggérés sans succès.

Enfin, il faut indiquer que l’article 75-3 du règlement européen 110-2009 impose aux États membres de prévoir des personnels suffisants et qualifiés pour répondre aux obligations dudit règlement, lequel impose une évaluation. C’est le ministre de l’Agriculture qui est responsable. L’entreprise serait donc fondée à engager une procédure pour manquement. D’ailleurs, la Cour de justice des Communautés européennes a déjà condamné des États membres pour défaut et insuffisance de contrôle.

● L’encadrement des conditions de vente et d’usage des antibiotiques vétérinaires, avec des exigences renforcées en matière de transparence et de prévention des conflits d’intérêts : ces nouvelles dispositions pourraient conduire à d’importants changements dans les circuits de distribution auxquels l’Agence nationale du médicament vétérinaire (ANMV) devra s’adapter. L’ANMV devra par ailleurs contribuer à différentes mesures fixées par la loi, s’agissant du suivi des quantités délivrées d’antibiotiques et de l’encadrement des prescriptions vétérinaires des antibiotiques dits critiques pour la santé humaine.

La surveillance en santé animale, en santé végétale et alimentation : la loi prévoit la refonte par ordonnance du dispositif actuel. Plusieurs missions d’inspection sont en cours pour définir les modalités de cette réforme, qui pourrait s’appuyer sur l’expérience réussie de la plateforme d’épidémiosurveillance en santé animale mise en place depuis fin 2011. L’Anses contribue activement aux réflexions de cette mission.

L’année 2015 verra par ailleurs le projet de loi de santé venir en discussion au Parlement. Il devrait notamment prévoir le transfert du pilotage de la toxico-vigilance de l’InVS à l’Anses. Ce transfert n’aura en tout état de cause pas lieu avant l’année 2016.

Le financement de ces nouvelles missions est prévu par le rehaussement de la taxe affectée due par les pétitionnaires à l’Anses lors du dépôt de dossier de demande d’AMM et par la création d’une taxe sur le chiffre d’affaires des sociétés détentrices d’AMM. Le Rapporteur spécial observe que l’Anses bénéficie déjà d’une taxe fiscale affectée sur les produits phytopharmaceutiques créée par la loi de finances pour 2007 et acquittée par les professionnels de la protection et de l’entretien des plantes (11,9 millions d’euros en 2013) mais, comme le Rapporteur spécial l’a déjà souligné, cette taxe n’est utilisée qu’à 50 % de son montant en raison des plafonds d’emploi.

l

CHAPITRE II : UN BUDGET DONT LA RÉGRESSION SE STABILISE APRÈS LE RAPPORT ALARMANT DE LA COUR DES COMPTES

A. LE PROJET DE BUDGET POUR 2015

Hors fonds de concours, le total des crédits de paiement demandés pour le programme 206 se monte à 501 millions d’euros pour 2015 (– 0,38 %) suivant une baisse de (– 1,26 % en LFI pour 2014). Le total des fonds de concours attendus de l’Union Européenne diminue de (– 23,4 %).

1. Une légère diminution des crédits

PROGRAMME 206 RÉPARTITION DE CP PAR TITRE ET CATÉGORIE

(en euros)

Titres et catégories

Ouverts en LFI pour 2014

Demandés pour 2015

Évolution en %

Titre 2. Dépenses de personnel

286 154 401

285 515 637

– 0,22 %

Rémunérations d’activité

180 955 170

179 004 535

– 1,08 %

Cotisations et contributions sociales

103 504 980

104 833 934

1,28 %

Prestations sociales et allocations diverses

1 694 251

1 677 168

– 1,01 %

Titre 3. Dépenses de fonctionnement

152 953 943

130 034 550

– 14,98 %

Dépenses de fonctionnement autres que celles de personnel

90 559 413

67 040 020

– 25,97 %

Subventions pour charges de service public

62 394 530

62 994 530

0,96 %

Titre 4. Dépenses d’intervention

62 533 811

84 200 304

34,65 %

Transferts aux ménages

500 000

 

– 100,00 %

Transferts aux entreprises

36 883 699

44 180 000

19,78 %

Transferts aux autres collectivités

25 150 112

40 020 304

59,13 %

Titre 7. Dépenses d’opérations financières

1 500 000

1 500 000

0,00 %

Dotations en fonds propres

1 500 000

1 500 000

0,00 %

Total hors FDC et ADP prévus

503 142 155

501 250 491

– 0,38 %

FDC et ADP prévus

14 114 923

10 810 000

– 23,41 %

Total y.c. FDC et ADP prévus

517 257 078

512 060 491

– 1,00 %

Source : projet annuel de performances et commission des Finances.

Alors que les dépenses de personnel baissent de – 0,22 %, les dépenses de fonctionnement diminuent de 14,98 % et les dépenses d’intervention augmentent de 34,65 %. S’agissant de la baisse des dépenses de fonctionnement autres que celles de personnel, qui frôle le pourcentage de - 26 %, la DGAL évoquent les raisons des économies en dépenses publiques : « les évolutions les plus notables sont liées à l’amélioration sanitaire (moins de frais d’abattage), au renforcement des actions de surveillance des filières pour améliorer la prévention, telle que la création de la visite sanitaire porcine ou l’augmentation des contrôles de résidus de pesticides. D’après la DGAL, un euro investi en prévention permet d’économiser 4 à 5 euros en curatif. Il est heureux que les mesures de dépenses et d’économies subséquentes soient imputées sur le même programme, faute de quoi il n’est pas certain que ces mesures aient pu être en œuvre facilement et rapidement. Noter aussi l’économie liée à l’allégement des tests ESB (près de 10 millions d’euros). » Il faut noter que ces économies importantes, évaluées à 11,7 millions d’euros par la DGAL, se conjuguent à de nouvelles dépenses relatives à des visites sanitaires et des controles qui se montent à 10, 7 millions d’euros . Le Rapporteur spécial souligne que l’administration doit veiller à ce que ces économies n’occasionnent pas d’effets néfastes ni de risques, mais qu’elles sont au contraire conjuguées avec des progrès.

Concernant les dépenses de fonctionnement, la dotation du programme 206 en crédits de fonctionnement s’établit à 67,9 milions d’euros en AE et 67 millions d’euros en CP, soit une baisse de 26 % en AE et en CP par rapport à la LFI 2014. La baisse des crédits de fonctionnement est principalement optique car résultant de mesures de périmètre. En effet un travail réalisé sur l’imputation des dépenses budgétaires a conduit à réimputer des dépenses de fonctionnement en dépenses d’intervention. Il convient cependant de préciser que le programme 206 comporte très peu de dépenses de fonctionnement logistique (seulement 0,9 million d’euros de crédits relatifs à l’action sociale et à la restauration collective). Les dépenses de fonctionnement du programme206 correspondent en fait à des dépenses de fonctionnement technique, principalement les frais d’analyse (plans de surveillance et de contrôle, tests à l’abattoir ou à l’équarrissage, etc.).

La DGAL précise « avoir obtenu l’accord de la direction du budget pour modifier la maquette budgétaire à compter de 2015 afin de rendre les lignes plus « cohérentes et compréhensibles, car certains intitulés globaux ne facilitent ni la compréhension ni le suivi. »

Le Rapporteur spécial rappelle que la Cour des comptes a récemment relevé les effets néfastes des restrictions de crédit. Le sujet des effectifs de la DGAL et du programme 206 est une préoccupation de longue date du Rapporteur spécial. Le tableau ci-dessous rend compte de la baisse des effectifs de 19 % depuis 10 ans.

ÉVOLUTION DES EFFECTIFS DU PROGRAMME 2016

Effectifs (ETPT)

Programme 206 (périmètre courant)

Programme 206 (périmètre constant)

2005

5 223

5 623

2006

5 218

5 590

2007

5 136

5 515

2008

5 012

5 388

2009

5 279

5 280

2010

5 336

5 198

2011

4 742

4 766

2012

4676

4 671

2013

4 579

4 579

2014

4 547

4 547

2015 (PLF)

4 567

4 567

Évolution 2005/2015

– 13 %

– 19 %

Source DGAL.

Concernant le plafond d’emploi de la DGAL pour 2015, celui-ci s’établit à 4 567 ETPT (contre 4 547 ETPT en 2014) : cette augmentation de + 20 ETPT correspond à la première fraction des + 60 ETPT accordés pour 2015, considérant que les recrutements effectifs s’étaleront en 2015 et 2016 selon le ratio + 20 ETPT en 2015 et + 40 ETPT en 2016.

Le Rapporteur spécial remarque que , hors dépenses de personnel , le projet de loi de finances pour 2015 fait apparaitre une diminution de 1,3 million d’euros au regard de la loi de finances initiale pour 2014 (-0,6%) .

2. Les missions de sécurité alimentaire

Pour 2015, la dotation du programme 206 hors crédits de personnel inscrite en projet de loi de finances pour 2015 s’établit à 215,1 millions d’euros en AE et 215,7 millions d’euros en CP, soit des baisses respectives de 1,5 % et 1,2 % par rapport aux données inscrites en projet de loi de finances pour 2014 (218,3 millions d’euros en AE et en CP).

Comme les années passées, la programmation est construite sur la base d’hypothèses relatives à la gestion des risques connues lors de sa réalisation. Les dépenses exceptionnelles liées à des crises sanitaires, à l’émergence de maladies nouvelles, ou la concrétisation de risques contentieux seront traitées par des ouvertures en gestion une fois explorées les capacités de redéploiement interne. Ce programme reste donc fortement soumis aux aléas.

(en euros)

   

PLF 2014

PLF 2015

Évol. 2015/2014

   

AE

CP

AE

CP

% AE

% CP

action 1

Prévention et gestion des risques inhérents à la production des végétaux

22 811 209

22 811 209

22 567 515

22 567 515

– 1,07

– 1,07

action 2

Lutte contre les maladies animales et protection des animaux

99 631 639

98 516 639

94 759 615

94 759 615

– 4,89

– 3,81

action 3

Prévention et gestion des risques sanitaires liés aux denrées alimentaires

15 638 888

15 638 888

15 423 339

15 423 339

– 1,38

– 1,38

action 4

Actions transversales

73 219 658

73 334 658

74 624 370

74 003 370

1,92

0,91

action 5

Élimination des cadavres et des sous-produits animaux

2 200 000

3 200 000

2 900 000

4 200 000

+ 31,82

+ 31,25

action 6

Moyens des services de l’alimentation

664 724

664 724

915 585

915 585

+ 37,74

+ 37,74

action 8

Qualité de l’alimentation et offre alimentaire

4 151 000

4 151 000

3 865 430

3 865 430

– 6,88

– 6,88

TOTAL

218 317 118

218 317 118

215 055 854

215 734 854

– 1,49

– 1,49

Note préliminaire : le projet de loi de finances (PLF) pour 2015 introduit une nouvelle maquette budgétaire. Certains écarts entre PLF 2014 et 2015 peuvent être expliqués par une nouvelle ventilation des crédits inscrits, étant entendu que la nouvelle maquette traduit une répartition des crédits à l’action sensiblement différente sur certains dispositifs.

a. La prévention et gestion des risques inhérents à la production des végétaux

Les principales évolutions budgétaires concernant cette action correspondent, en premier lieu, à une diminution du volume des dotations inscrites au titre du contrôle des pratiques agricoles de la production des végétaux (sous-action 13) dans la mesure où les coûts des observations conduites dans le cadre des réseaux de suivi des effets non-intentionnels des pratiques agricoles sur la biodiversité, et leur analyse, sont dorénavant pris en charge par le budget propre au plan Ecophyto. Cela représente une économie directe sur le programme 206 estimée à 0,7 million d’euros.

En parallèle, le plan de contrôle des résidus de produits phytosanitaires dans les productions primaires végétales est complété par la mise en œuvre d’un plan de surveillance. Les frais d’analyses de recherche de résidus pour ce nouveau plan peuvent être estimés à 0,4 million d’euros. Sont en outre programmés pour les analyses de recherche de contaminants environnementaux dans les productions végétales, 100 000 euros supplémentaires.

Ces évolutions traduisent également l’ajustement des moyens nécessaires pour les délégations et missions confiées aux organismes à vocation sanitaire FREDON (1) (+ 0,6 million d’euros). Les montants inscrits en PLF 2015 tiennent compte de la nécessité de renforcer les dispositions visant à prévenir et lutter contre les organismes nuisibles aux végétaux, accroissant de fait le volume de nouvelles missions confiées aux FREDON.

b. La lutte contre les maladies animales et protection des animaux

L’évolution la plus significative est constatée sur les crédits inscrits au titre de la sous-action 20 relative à la gestion des maladies animales hors ESST (2) qui diminuent (- 6,4 millions d’euros). Elle résulte du rééquilibrage conséquent des coûts générés par les mesures de gestion des maladies animales et des foyers de maladies animales, sur la base des dépenses effectivement engagées en 2013, et à la lumière d’une tendance sanitaire relativement favorable

À ces économies vient s’ajouter la levée de l’obligation de dépistage de l’encéphalopathie spongiforme bovine (ESB) à l’abattoir pour les animaux sains et nés après le 31 décembre 2001, faisant diminuer de 6,9 millions d’euros les montants inscrits en PLF 2015 sur le dispositif de lutte contre les ESST (sous-action 21).

Une augmentation des moyens inscrits en PLF 2015 au titre des visites sanitaires (sous-action 24 : + 4 millions d’euros) s’explique par la prise en compte des coûts réels de la réalisation des visites sanitaires bovines, aviaires et porcines telles qu’elles doivent être mises en œuvre pour répondre aux objectifs prioritaires définis par la Direction générale de l’alimentation (DGAL).

Enfin, les moyens inscrits en PLF 2015 au titre des plans de surveillances et des plans de contrôle de l’alimentation animale et du médicament vétérinaire (sous-action 29) sont en augmentation de 1,1 million d’euros, afin de prendre en compte l’évolution à la hausse, ces dernières années, du coût des analyses (augmentation du coût moyen, recours à des analyses plus performantes…).

c. La prévention et gestion des risques sanitaires liés aux denrées alimentaires

La diminution de l’enveloppe budgétaire concernant cette action s’explique principalement par les modifications de la maquette budgétaire et de périmètre des actions 3 et 4 (transfert, vers l’action 4, des sous-actions 32 relative au service d’inspection vétérinaire et phytosanitaire aux frontières et 36 relative à la Brigade nationale d’enquêtes vétérinaires et phytosanitaires). À périmètre constant, il s’agit en fait d’une augmentation de 1,4 million d’euros de l’enveloppe budgétaire consacrée à la prévention et à la gestion des risques sanitaires liés aux denrées alimentaires . Certaines dépenses évoluent en fonction de la consommation effectivement constatée au cours de l’exercice 2013, elles sont liées :

 à la blanchisserie et aux analyses de recherche de trichines (sous-action 31, +0,7 million d’euros)

– aux analyses des lots contrôlés à l’importation (sous-action 32, +0,2 million d’euros)

– aux actions de lutte contre les salmonelles en élevage (sous-action 33, +0,4 million d’euros)

– aux moyens accordés à la Brigade nationale d’enquêtes vétérinaires et phytosanitaires, dont la montée en puissance est une priorité ministérielle (sous-action 36, + 0,1 million d’euros).

d. Les actions transversales

L’augmentation de l’enveloppe budgétaire concernant cette action s’explique principalement par les modifications de la maquette budgétaire et de périmètre des actions 3 et 4 (cf. ci-dessus).

La subvention pour charge de service public versée à l’Anses (sous-action 42) est en légère diminution par rapport au PLF 2014, mais elle est maintenue par rapport à la LFI 2014, à hauteur de 62,9 millions d’euros.

Le montant des crédits de la sous-action 44 relative au système d’information de l’alimentation est en augmentation, notamment en AE (+ 1 million d’euros par rapport au PLF 2014) ; cet ajustement correspond à la mobilisation des crédits jugée nécessaire en regard de l’évolution de la maturité du projet « RESYTAL ». Les crédits affectés à la sous-action 45 contrats de plan État-région (CPER) sont en nette diminution dans la mesure où le PLF 2015 traduit l’arrêt des CPER amorcé en 2013.

e. L’élimination des cadavres et des sous-produits animaux

L’augmentation des moyens constatés sur cette action qui ne recouvre que les crédits alloués au service public de l’équarrissage (sous-action 50), prend en compte le léger décalage en AE / CP induit par le renouvellement du marché public d’intérêt général, ainsi que la variabilité du coût des interventions constatée pour les départements d’Outre-mer n’ayant pas conclu un marché local (tous sauf Réunion).

La fermeture de la décharge de la Trompeuse à la Martinique, ainsi que les surcoûts induits par les contraintes liées aux installations classées à La Réunion sont aussi prises en compte.

f. Moyens des services de l’alimentation

Les crédits programmés sur cette action portent essentiellement sur les moyens consacrés à l’action sanitaire et sociale dans les services déconcentrés. Ils ont été ajustés au regard de la consommation effectivement constatée (+ 0,25 million d’euros). Ce montant prend également en compte les travaux actuellement engagés par le Secrétariat général du gouvernement en vue d’harmoniser les prestations d’action sociale au sein des Directions départementales interministérielles.

g. Qualité de l’alimentation et offre alimentaire

Une légère diminution des crédits programmés sur cette action est enregistrée (– 0,7 million d’euros).

B. UN RAPPORT DE LA COUR DES COMPTES SUR L’INSUFFISANCE DES CONTRÔLES

En février 2014 la Cour des comptes a, dans son rapport public annuel, regretté que les contrôles réalisés par le ministère de l’Agriculture au titre de la sécurité sanitaire soient peu nombreux et que les non-conformités soient rarement sanctionnées (3).

1. Un contrôle dont les principes sont fixés par le droit communautaire

En 2012, le nombre d’établissements relevant de la compétence de la direction générale de l’alimentation (DGAL) s’élevait à près de 506 000 :

– 24 064 établissements agréés ;

– 110 271 établissements de restauration collective (dont 4 034 cuisines centrales agréées) ;

– 371 631 établissements de remise directe (dont 200 763 restaurants commerciaux, 110 337 établissements de métiers de bouche, 26 853 grandes et moyennes surfaces, 33 678 marchés). »

« Cette politique est largement encadrée par le droit communautaire. Avec le « Paquet hygiène2 », ensemble de 6 règlements du Parlement européen et du Conseil adoptés de 2002 à 2006, la politique de sécurité sanitaire de l’alimentation a évolué en Europe en confiant aux professionnels, qu’ils soient éleveurs, agriculteurs, responsables d’établissements agroalimentaires ou de restauration, la responsabilité première de l’hygiène et de la sécurité sanitaire des denrées. Le rôle de l’État a évolué vers un contrôle de second niveau, s’appuyant sur un meilleur ciblage des contrôles. »

En ce qui concerne la sécurité sanitaire des végétaux par exemple, les contrôles s’exercent prioritairement sur les exploitations agricoles qui bénéficient d’aides de la PAC. Les autres exploitations, arboriculteurs ou maraîchers, ne sont quasiment pas contrôles hormis des prélèvements ciblés par végétal et par régions demandés par la DGAL, qui a réalisé 675 prélèvements en 2012 contre 717 en 2011 et 2010, soit un taux de contrôle de 0,2 % d’après la Cour des Comptes.

La Cour estime que les contrôles sont également insuffisants sur l’exposition des consommateurs à certaines substances chimiques dans les aliments tels que le cadmium, les additifs, le mercure, le déoxynivalénol et les sulfites ou bien dans les zones à risque comme les installations classées pour la protection de l’environnement.

2. Un autocontrôle insuffisant des professionnels

Les professionnels ont l’obligation de mettre en place un système de maîtrise préventif de la sécurité sanitaire des aliments reposant sur la mise en œuvre de bonnes pratiques d’hygiène (formation du personnel, plan de nettoyage et désinfection, maîtrise des températures, etc.), un système qui identifie, évalue et maîtrise les dangers significatifs au regard de la sécurité des aliments, dit HACCP (Hazard Analysis Critical Control Points ou analyse de danger - points critiques pour leur maîtrise), et un système de traçabilité permettant notamment la gestion des produits non conformes.

« Les autocontrôles, qui prennent notamment la forme de prélèvements analysés en laboratoire, doivent permettre aux professionnels de vérifier l’efficacité du dispositif de maîtrise des dangers mis en place, et de garantir la sécurité des consommateurs. Or la qualité des méthodes d’analyse et l’indépendance des laboratoires choisis par les professionnels ne sont pas, à ces jours, garanties.

Par ailleurs, l’obligation de transmettre des résultats d’analyse non conformes ne pèse aujourd’hui que sur les professionnels, alors même que cette communication est contraire à leurs intérêts. Dans les établissements (agréés ou non), le nombre de contrôles a diminué de 17 % entre 2009 et 2012. Parmi les établissements agréés, 7 % n’ont pas fait l’objet d’un contrôle entre 2009 et 2012. Si le taux de contrôle est important dans les abattoirs, il est en revanche nettement plus faible pour les établissements de remise directe (7 %) que sont les restaurants, boucheries, traiteurs ou poissonneries. « Enfin le Code rural et de la pêche maritime prévoit la possibilité d’obliger les laboratoires à transmettre les résultats non–conformes si ceux-ci présentent un risque pour la santé publique mais les arrêtés d’application prévus n’ont pas été pris ».

3. L’affaiblissement des contrôles effectués par le ministère

« Dans un contexte général de déflation des effectifs, la direction générale de l’alimentation fait face depuis 2009 à de fortes contraintes pesant sur ses effectifs et son budget. Elle a fait le choix de faire porter leur diminution quasi exclusivement sur l’échelon départemental (– 6,8 % entre 2009 et 2012, soit une diminution de plus de 300 équivalents temps plein travaillés [ETPT]), chargé des inspections dans les élevages, dans les abattoirs et dans les autres établissements (remise directe, établissements agréés).

Alors que les textes européens rendent obligatoires la présence de vétérinaires et auxiliaires en abattoir (notamment sur la chaîne d’abattage) et définissent précisément les tâches à effectuer dans le cadre des contrôles officiels, la France ne parvient pas à se conformer à ces exigences, notamment dans les abattoirs de volaille.

Le marché intérieur interdit tout contrôle intra-européen aux frontières intérieures de l’Union sur les produits européens. Or les différences dans les cultures administratives en matière de contrôle selon les États membres ne permettent pas d’assurer une totale maîtrise de la sécurité sanitaire des aliments commercialisés au sein de l’Union européenne. »

En dépit de taux d’anomalies élevés pour la viande de boucherie (17 %) le lait cru ou traité (21 %) ou les produits à base de viande (25 %), les « contrôles à destination » réalisés par les services déconcentrés de la DGAL, sont très peu nombreux . Ces controles ont pour objet de vérifier, par sondage non discriminatoire, que les produits d’origine animale introduits sur le territoire national en provenance d’un État membre respectent la réglementation européenne. Pour la période 2010-2011, 311 interventions ont été réalisées pour 3 422 établissements enregistrés en tant que premiers destinataires en France, ce qui représente une baisse de plus de 20 % par rapport à l’année précédente. Par ailleurs, seuls 8,5 % des contrôles ont donné lieu à des suites et 2,6 % à une saisie/destruction de produits. Seules cinq réexpéditions sur les neuf demandées ont été effectives.

Dans 35 départements, aucun contrôle à destination  n’a été enregistré alors qu’on y recense des établissements premiers destinataires.

La Cour des comptes précise qu’il n’existe plus d’instruction fixant les orientations de ces contrôles au niveau national.

Le Rapporteur spécial souligne l’alerte émise par la Cour des comptes : « En conséquence, la libre circulation, conjuguée à la faiblesse des contrôles lorsque ces derniers sont possibles, peut avoir comme conséquence une perte de contrôle sur la qualité des denrées mises sur le marché national. »

Le coût des contrôles pourrait être réduit par une plus grande mise en concurrence des laboratoires chargés d’analyser, pour le compte du ministère de l’agriculture, les prélèvements effectués à l’occasion des contrôles.

Au-delà, la France pourrait mieux utiliser les possibilités prévues par les textes européens pour répercuter sur les professionnels le coût des inspections, qu’il s’agisse de la redevance à l’importation ou des redevances sanitaires d’abattage et de découpage.

En effet, l’article 27 du règlement CE n° 882/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 précise que les États membres peuvent percevoir des redevances ou des taxes pour couvrir les coûts occasionnés par les contrôles officiels. Ce même article précise que certaines activités, définies à l’annexe IV (dont les abattoirs et les ateliers de découpe), doivent obligatoirement être soumises à cette taxe à un taux qui ne peut être inférieur à un minimum fixé dans cette même annexe.

Ce n’est qu’en 2013 que les tarifs de ces redevances ont été fixés aux niveaux minimaux définis par le règlement cité ci-dessus. Au surplus, cette hausse a été compensée par la mise en place d’une modulation des tarifs en fonction du classement des abattoirs. En effet, la grande majorité des abattoirs (69 % des abattoirs de volailles et 74 % des abattoirs d’ongulés domestiques) bénéficie d’une modulation favorable du tarif de la redevance (bonus), qui leur permet de payer un tarif inférieur au tarif plancher défini par la réglementation européenne.

De ce fait, le coût des inspections est insuffisamment répercuté sur les professionnels : en 2012, le produit des redevances sanitaires d’abattage et de découpage a été de 48 millions d’euros alors que les seules dépenses de personnel d’inspection dans les abattoirs s’élevaient à 71,2 millions d’euros.

S’agissant des importations, alors que la réglementation européenne prévoit la couverture des frais des contrôles aux frontières par une redevance, la direction de la concurrence ne respecterait cette obligation que depuis janvier 2014 alors que la direction générale de l’alimentation (DGAL) l’applique depuis plusieurs années en collaboration avec la direction générale des douanes et des droits indirects.

À la lecture du rapport de la Cour des Comptes, le Rapporteur spécial souhaiterait avoir des réponses précises sur :

– l’adéquation des moyens aux objectifs , notamment en ce qui concerne l’efficience des contrôles,

– la réalité des coordinations et coopérations entre différents ministères, notamment en région suite aux différentes réorganisations,

– la stratégie de recherche mise en place concernant l’exposition des consommateurs aux « substances chimiques » et l’identification des « zones à risque »,

– la fiabilité des autocontrôles organisés par la profession et surtout de leur communication à l’administration,

– l’évolution du nombre de contrôles réalisés par l’administration qui sont en baisse sensible, leur ciblage et leur standardisation, car les résultats sont très hétérogènes d’un territoire à l’autre ;

– les suites données après signalisation (cf. l’affaire Spanghero),

– la mise en place des dispositifs pour assurer le financement des contrôles.

Il souhaite également avoir des informations sur les sujets suivants :

Financement des contrôles par les professionnels

Comment le Gouvernement compte–t-il utiliser les leviers réglementaires utiles au financement part les professionnels des actions de contrôle et assurer que ces moyens seront réellement traduits en moyens humains opérationnels ?

Bien être animal

Evaluation des conséquences du récent amendement adopté par le Parlement qui donne aux animaux le statut d’êtres sensibles ?

Produits phytosanitaires et phytopharmaceutiques

En raison de l’importance croissante de la question santé-environnementale et de l’impact sur la santé de nombre de produits phytosanitaires, quelles mesures le Gouvernement peut-il envisager afin de gérer les inévitables controverses à venir ?

Pour terminer, un sujet de réflexion : Affectation des économies budgétaires

Des mesures de prévention sont développées pour éviter des soins ou des mesures curatives coûteuses , notamment chez les animaux malades ou les plantes impropres à la consommation du fait de la présence de résidus de pesticides. Dans le cas précis, les économies réalisées seraient 5 fois supérieures aux dépenses engagées. Ces dispositifs ont été d’autant plus faciles à mettre en œuvre que recettes et dépenses sont affectées au même programme. Malheureusement, c’est loin d’être la règle et des affectations comptables plus dynamiques devraient permettre à l’État d’être plus économe, plus efficace et plus écologique .

*

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EXAMEN EN COMMISSION

Après l’audition de Monsieur Stéphane Le Foll, ministre de l’Agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt (voir le compte rendu de la commission élargie du 4 novembre 2014 à 9 heures 30 (4)), la commission des Finances examine les crédits de la mission Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales, sur le rapport de M. Charles de Courson sur les Politiques de l’agriculture et de M. Éric Alauzet sur la Sécurité alimentaire, rapporteurs spéciaux.

Après que Mme Marie-Christine Dalloz, présidente, ait rappelé que M. Éric Alauzet donnait un avis favorable à l’adoption des crédits, et malgré l’avis défavorable de M. Charles de Courson, elle adopte les crédits de la mission Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales, ainsi que le compte d’affectation spéciale Développement agricole et rural.

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ANNEXE : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL

Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses)

– M. Marc Mortureux, directeur général ;

– Mme Alima Marie, directrice de l’information, de la communication et du dialogue avec la Société ;

– M. Martial Mettendorff, directeur général adjoint ressources.

Direction générale de l’alimentation (DGAL)

– M. Patrick Dehaumont, directeur général de l’alimentation ;

– Mme Laurence Delva, sous-directrice du pilotage des ressources et des actions transversales.

© Assemblée nationale

1 () Fédérations Régionales de Défense contre les Organismes Nuisibles.

2 () Encéphalopathies Spongiformes Subaigües Transmissibles .

3 () http://www.ccomptes.fr/content/download/64916/1553286/file/2_1_1_securite_sanitaire_alimentation_Tome_I.pdf.

4 () http://www.assemblee-nationale.fr/14/budget/plf2015/commissions_elargies/cr