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N
° 3110

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 8 octobre 2015.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2016 (n° 3096),

PAR Mme Valérie RABAULT,

Rapporteure Générale

Députée

——

ANNEXE N° 15

ÉCOLOGIE, DÉVELOPPEMENT ET MOBILITÉ DURABLES

SÉCURITÉ ET AFFAIRES MARITIMES, PÊCHE ET AQUACULTURE

Rapporteur spécial : M. Jean-Claude BUISINE

Député

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SOMMAIRE

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Pages

INTRODUCTION : L’ADMINISTRATION DE LA MER AU SERVICE DE LA POLITIQUE MARITIME CIVILE DE LA FRANCE 5

I. LE VOLET SÉCURITÉ ET AFFAIRES MARITIMES : UN BUDGET GLOBALEMENT STABILISÉ 10

A. DES CRÉDITS PRÉSERVÉS POUR LES MISSIONS LIÉES À LA SÉCURITÉ ET AU CONTRÔLE DES ACTIVITÉS MARITIMES 10

1. La sécurité des navires 11

a. L’action en tant qu’État du pavillon 12

b. L’action en tant qu’État du port 12

2. Le sauvetage en mer 13

a. Les centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage 13

b. La Société nationale de sauvetage en mer 14

3. La signalisation maritime et la lutte contre les pollutions 15

4. Le dispositif de contrôle et de surveillance des affaires maritimes 15

B. UNE PRIORITÉ TOUJOURS FORTE DONNÉE À L’ENSEIGNEMENT MARITIME 18

1. L’importance du réseau des lycées professionnels maritimes 19

2. L’École nationale supérieure maritime : un enseignement modernisé 20

a. L’unique opérateur du programme en meilleure santé financière 20

b. Les perspectives de développement de l’école 21

3. Les autres dépenses relatives aux gens de mer 22

C. UNE BAISSE CONJONCTURELLE DES CRÉDITS DE L’ACTION FLOTTE DE COMMERCE 22

1. La réduction des compensations d’exonérations de charges sociales 23

2. L’enjeu du développement de la flotte de commerce française 24

II. LE VOLET PÊCHE ET AQUACULTURE DANS L’ATTENTE DES CRÉDITS EUROPÉENS 25

A. UNE DIMINUTION DES CRÉDITS DE L’ACTION GESTION DURABLE DES PÊCHES ET DE L’AQUACULTURE 26

1. La protection et le suivi scientifique de la ressource halieutique 26

a. Les actions d’amélioration de la connaissance des ressources 26

b. Le contrôle des pêches maritimes 27

2. L’amélioration de la performance des filières pêche et aquaculture 28

a. Les interventions économiques cofinancées par l’Union européenne 28

b. Les interventions économiques non cofinancées par l’Union européenne 29

c. Les interventions socio-économiques 29

B. L’ADAPTATION DE LA PÊCHE FRANÇAISE AUX ENJEUX DE PRÉSERVATION DE LA RESSOURCE ET DE PLANIFICATION DES USAGES 29

1. Le renouvellement de la flotte de pêche et la modernisation des navires 30

2. La prévention des conflits d’usages en mer 31

EXAMEN EN COMMISSION 33

ANNEXE : LISTE DES DÉPLACEMENTS ET AUDITIONS DU RAPPORTEUR SPÉCIAL 35

L’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

À cette date, 44 % des réponses étaient parvenues au Rapporteur spécial.

INTRODUCTION : L’ADMINISTRATION DE LA MER AU SERVICE DE LA POLITIQUE MARITIME CIVILE DE LA FRANCE

Le comité interministériel de la mer (CIMER) réuni sous la présidence du Premier ministre le 22 octobre dernier à Boulogne-sur-Mer, a marqué une nouvelle étape dans la construction de la politique maritime de la France.

Après la conférence nationale pour la croissance bleue, organisée par la ministre de l’écologie le 31 août dernier, dont la teneur reste cependant à préciser, ce CIMER est venu confirmer la volonté du Gouvernement de s’engager résolument dans des domaines aussi importants que les énergies marines, l’aquaculture et la pêche, les ressources minérales marines, le transport maritime, l’activité portuaire, et la construction navale.

Ces dernières années, plusieurs rapports et une proposition de loi ont appuyé cette ambition maritime (1), qui passe par le développement d’outils administratifs, juridiques et économiques à la disposition des acteurs du monde maritime, et par le maintien ou le renforcement des moyens financiers alloués aux différents organismes et services publics compétents dans le domaine maritime. De nombreux documents stratégiques ont d’ailleurs été publiés ces dix dernières années, afin de proposer des pistes pour une action publique plus efficace sur le plan maritime (2).

Représentant plus de 225 000 emplois, et dégageant une valeur ajoutée de 16 milliards d’euros – hors tourisme littoral (3) – la mer se présente non seulement comme un secteur économique de première importance en France, mais également comme un domaine ouvrant de réelles perspectives d’avenir, du fait de la superficie des zones maritimes sous souveraineté française, qui s’élève au deuxième rang mondial après les États-Unis, et du potentiel encore inexploité des océans.

Cette politique maritime, qui doit impérativement allier sécurité, croissance économique et protection des milieux marins, trouve en partie sa traduction budgétaire dans les crédits du programme 205.

Ce budget s’inscrit dans les orientations ci-dessus rappelées, et recouvre les crédits que l’État engage dans le but de réguler les marins, leurs navires, les activités maritimes, et les ressources marines.

Plus précisément, le programme 205 se divise en deux volets.

Les crédits du volet Sécurité et affaires maritimes (4) concourent à la mise en œuvre de la politique gouvernementale en matière de sécurité et de sûreté maritimes civiles, d’emploi maritime, de soutien à la flotte de commerce française, de régulation des usages de la mer et d’exploitation raisonnée de la ressource halieutique.

Les crédits du volet Pêche et aquaculture (5) s’inscrivent presque exclusivement dans le cadre de la politique commune des pêches (PCP). Les aides retracées au sein du programme 205 seront donc en majorité cofinancées par le Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche (FEAMP), et répondent aux objectifs de la politique européenne.

Le tableau suivant permet de visualiser l’organisation administrative et les structures concernées par ce projet de budget :


STRUCTURES ADMINISTRATIVES ET OPÉRATIONNELLES CONCERNÉES PAR LE PROGRAMME 205 SÉCURITÉ ET AFFAIRES MARITIMES, PÊCHE ET AQUACULTURE

Pour 2016, les crédits retracés dans le présent rapport spécial sont fixés à 186 millions d’euros en autorisations d’engagement et 183,4 millions d’euros en crédits de paiement, en baisse de 2,9 % pour les autorisations d’engagement et de 4,1 % pour les crédits de paiement, par rapport aux montants demandés pour 2015.

En revanche, la baisse n’est plus que de 1,8 % pour les autorisations d’engagement et de 3,2 % pour les crédits de paiement si l’on reporte les montants demandés pour 2016 aux crédits effectivement votés en loi de finances initiale.

Enfin, les crédits demandés pour 2016 sont sensiblement équivalents à ceux consommés en exécution du budget 2014.

Ces différents éléments témoignent dans leur ensemble d’un tassement des crédits alloués au programme 205, d’année en année. L’examen plus attentif de ces crédits par action permettra de montrer que cette baisse est essentiellement liée à la conjoncture économique et sociale des entreprises d’armement maritime, mais le cœur de métier des affaires maritimes, à savoir la sécurité et la sûreté maritimes, reste relativement préservé.

Le tableau suivant récapitule les crédits du présent projet de budget.

PROJET DE BUDGET POUR 2016 – PROGRAMME 205

(en millions d’euros)

Projet de loi de finances pour 2016

Programme 205

AE

CP

Part des crédits de l’action au sein du programme

Variation (en CP) par rapport au PLF 2015

Action 1

Sécurité et sûreté maritimes

28,2

25,6

15,1 %

– 3,4 %

Action 2

Gens de mer et enseignement maritime

27,8

27,8

15 %

– 7,9 %

Action 3

Flotte de commerce

64,5

64,5

34,7 %

– 7,6 %

Action 4

Action interministérielle de la mer

12

12

6,4 %

+ 17,6 %

Action 5

Soutien au programme

6,7

6,8

3,6 %

+ 4,6 %

Sous-total

139,2

136,7

74,8 %

– 4,5 %

Action 6

Gestion durable des pêches et de l’aquaculture

46,8

46,8

25,2 %

– 2,3 %

TOTAL

186

183,4

100 %

– 4,1 %


Source : commission des finances à partir des PAP pour 2015 et 2016.

Ces chiffres ne recouvrent cependant pas l’ensemble de l’effort budgétaire du pays en direction du maritime. Même le regroupement de l’ensemble des missions, programmes ou actions orientés vers la politique maritime ne serait pas exhaustif. La question de l’opportunité d’identifier les moyens affectés en mer par les différents programmes budgétaires ne recueille d’ailleurs pas de consensus au sein du ministère.

Sans compter les programmes budgétaires liés à la recherche maritime, on dénombre au moins seize programmes participant à la politique maritime, dont moins quatre disposent d’indicateurs de performance ou d’activité à connotation maritime. Il s’agit par exemple de la contribution d’État au financement du régime de sécurité sociale des marins du programme 197 Régimes de retraite et de sécurité sociale des marins, ou des aides au secteur portuaire du programme 203 Infrastructures et services de transports.

Le Rapporteur spécial souhaite insister tout particulièrement sur la nécessité d’analyser également l’évolution des dépenses des personnels du programme 205, qui sont retracées au sein de l’action 11 du programme 217 Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables, pour un montant demandé en 2016 de 181,7 millions d’euros.

Sur ce point, le maintien des crédits de fonctionnement des services des affaires maritimes ne permet pas de compenser la diminution des effectifs œuvrant pour le programme 205, ni l’accroissement continue de leur charge de travail, en lien avec la diversification de leur missions. Le Rapporteur spécial a pu se rendre compte, à l’occasion d’un déplacement à la direction interrégionale de la mer du Havre le 29 octobre dernier, que les services sont désormais contraints de reporter certaines missions ou opérations d’un exercice budgétaire sur l’autre, faute de crédits disponibles.

Le Rapporteur spécial observe que les efforts de gestion ont atteint leur limite et que la baisse des dépenses publiques en valeur ne peut plus s’effectuer à périmètre constant. La poursuite des efforts budgétaires ne pourra pas se faire sans une réflexion plus globale sur les missions de l’État dans les domaines de l’écologie, du développement et de la mobilité durables.

LES PERSONNELS œUVRANT POUR LES POLITIQUES DU PROGRAMME
SÉCURITÉ ET AFFAIRES MARITIMES, PÊCHE ET AQUACULTURE

L’ACTION 11 DU PROGRAMME 217

Les personnels œuvrant pour les politiques du programme 205 sont affectés en direction départementale des territoires et de la mer (DDTM), en direction interrégionale de la mer (DIRM) ou en direction de la mer (DM) (6), ainsi qu’en administration centrale et dans deux services à compétence nationale (7).

L’évolution des effectifs du programme 205

(en ETPT)

PLF pour 2013 (8)

PLF pour 2014

PLF pour 2015

PLF pour 2016

Variation 2013-2016

Personnels œuvrant pour les politiques du programme 205

2 959

2 882

2 870

2 834

– 125

Source : commission des finances, à partir des projets annuels de performance.

À l’instar du Rapporteur spécial pour le programme 217 (9), le Rapporteur spécial estime que si le rassemblement sur un seul programme des moyens en personnel de la mission Écologie peut permettre une optimisation de la gestion des emplois et des crédits ainsi qu’une grande souplesse dans la gestion des ressources humaines, il regrette que ce regroupement fasse obstacle à l’exercice de la fongibilité asymétrique et limite la marge d’action des responsables de programme de la mission en la matière.

Le rythme des suppressions d’emplois dans le périmètre des ministères concernés

Les ministères de l’écologie, du développement durable et de l’énergie et du logement, de l’égalité des territoires et de la ruralité partagent de nombreux services si bien que le suivi de l’exécution des schémas d’emploi est globalisé.

Dans ce périmètre, environ 60 % des départs à la retraite n’ont pas été remplacés en 2015 (834 non-remplacements pour 1 420 départs prévus). Le taux de non-remplacement des départs à la retraite a cependant tendance à baisser puisqu’il était de 82 % en 2012 et 75 % en 2013 et 2014.

Si certaines dépenses sont identifiables facilement, d’autres sont beaucoup plus diffuses. Le rapport d’évaluation de la politique maritime, rendu dans le cadre de la démarche d’évaluation de l’action publique lancée en 2013, avait constaté l’absence d’éléments consolidés sur les moyens consacrés à la politique maritime par les différents acteurs publics (10).

C’est pourquoi, un amendement parlementaire au projet de loi de finances pour 2015, rattaché à la mission, avait enrichi la liste des documents de politique transversale figurant à l’article 128 de la loi de finances rectificative pour 2005 (11), avec l’ajout d’une annexe détaillant les moyens alloués à la politique maritime de la France (12).

Le Rapporteur spécial regrette qu’à l’heure actuelle, ce document ne soit toujours pas à la disposition du Parlement. Le travail de rédaction d’une telle annexe est certes long, et impose la mise en place de questionnaires et procédures qu’il conviendra d’actualiser chaque année. Mais il est indispensable que le Parlement puisse obtenir ce document retraçant l’effort financier des personnes publiques en faveur d’une politique par essence transversale comme l’est la politique de la mer.

I. LE VOLET SÉCURITÉ ET AFFAIRES MARITIMES : UN BUDGET GLOBALEMENT STABILISÉ

136,7 millions d’euros sont proposés en crédits de paiement pour 2016 et 139,2 millions d’euros en autorisations d’engagement, sur le volet du programme 205 relatif aux affaires maritimes et à la sécurité.

Ce différentiel entre les autorisations d’engagement et les crédits de paiement est la conséquence de la poursuite des programmes de modernisation qui portent sur les systèmes des centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage (CROSS), sur les établissements de signalisation maritime (ESM) et sur le dispositif de surveillance dans les Terres australes et antarctiques françaises (TAAF).

A. DES CRÉDITS PRÉSERVÉS POUR LES MISSIONS LIÉES À LA SÉCURITÉ ET AU CONTRÔLE DES ACTIVITÉS MARITIMES

Après le naufrage de l’Erika en 1999 et celui du Prestige en 2002, la sécurité maritime est devenu l’objectif principal de la politique maritime de la France, et des efforts budgétaires notables ont été consentis à cette époque (13)

Depuis lors, les missions de préservation de la sécurité en mer, ainsi que de contrôle des activités maritimes et notamment de pêche, font l’objet d’une double contrainte qui explique en grande partie le maintien des crédits budgétaires qui leur sont alloués :

– d’une part le droit international et le droit européen ont élaboré un corpus d’obligations minimales que la France se doit de respecter en matière de contrôle des navires ainsi que dans le domaine du contrôle des pêches ;

– d’autre part la qualité du pavillon français doit se maintenir à un niveau élevé afin que les entreprises contrôlées par des intérêts nationaux puissent continuer à bénéficier de conditions économiques satisfaisantes.

Par ailleurs, les usagers de la mer, plaisanciers ou professionnels, ont des attentes très fortes envers l’administration de la mer, qu’il convient de toujours pouvoir satisfaire, sous peine de soulever des mécontentements qui peuvent parfois s’exprimer de manière brutale.

Pour toutes ces raisons, la sécurité maritime, dans toutes ses composantes, reste une priorité forte qui se traduit par une relative stabilité des crédits qui lui sont consacrés.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS CONSACRÉS À LA SÉCURITÉ MARITIME DEPUIS 2012
– PAR SOUS-ACTIONS –

(en millions d’euros)

Source : réponse au questionnaire budgétaire du Rapporteur spécial.

Nota : l’exercice budgétaire 2015 n’étant pas terminé, les chiffres 2016 sont ceux du début de préparation du projet de loi de finances (PLF), en lieu et place de la loi de finances initiale (LFI).

1. La sécurité des navires

Dans le cadre des conventions internationales, des memoranda auxquels la France adhère et des textes européens qui précisent cette mission, les seize centres de sécurité des navires français (CSN) (et trois services de sécurité maritime outre-mer) ont en charge le contrôle et le suivi des navires de commerce et de pêche.

L’action des centres de sécurité des navires (CSN) repose sur deux piliers : le contrôle par l’État du pavillon des navires immatriculés sous pavillon français ou sous le registre international français, et le contrôle par l’État du port des navires étrangers qui font escale en France.

Le Rapporteur spécial tient à souligner que les CSN sont confrontés, depuis plusieurs années, à une augmentation très importante de leurs missions en quantité et en complexité, en raison notamment de l’application de nouvelles réglementations émanant de l’Organisation maritime internationale et de l’Union européenne (nouvelle certification sociale des navires, inspections obligatoires des navires étrangers, certification ISO).

Les effectifs des CSN en inspecteurs de la sécurité des navires sont constants depuis une dizaine d’années : on en compte actuellement 168. Lors du déplacement du Rapporteur spécial le 29 octobre dernier, le chef du centre de sécurité des navires du Havre a insisté sur l’absolue nécessité de maintenir l’expertise du personnel affecté en centre de sécurité.

a. L’action en tant qu’État du pavillon

S’agissant de la mission de contrôle des navires français par l’État du pavillon, depuis 2012 les sociétés de classification habilitées effectuent, pour le compte de l’État, les tâches de mise en service et de délivrance de plusieurs des certificats internationaux aux navires de charge d’un tonnage supérieur à 500 « universal measurement system » (UMS) qui effectuent une navigation internationale.

Trois certifications demeurent toutefois confiées aux inspecteurs de la sécurité des navires :

– la certification relative à la qualité des procédures de sécurité mises en place à bord des navires (certification ISM pour international safety management) ;

– la certification relative aux procédures de sûreté des navires (certification ISPS pour international ship and port security) ;

– la certification sociale des navires, imposée par la convention internationale du travail maritime de 2006.

En ce qui concerne la sécurité des petits navires de charge et de pêche, le suivi est fondé sur le « ciblage » des navires à contrôler en fonction d’un critère d’évaluation qui utilise une dizaine de paramètres comme le type de navire, son âge, sa catégorie de navigation, ses antécédents...

L’ensemble de ces mesures de ciblage des navires à contrôler et de délégation des visites périodiques aux sociétés de classification ont eu pour but, à effectif constant, de permettre aux CSN et à la direction des affaires maritimes de faire face aux obligations nouvelles et de répondre aux obligations existantes afin d’éviter toute source potentielle de contentieux communautaire, donc de sanctions financières.

b. L’action en tant qu’État du port

S’agissant de la mission de contrôle des navires étrangers par l’État du port, un nouveau régime du contrôle des navires a vu le jour au 1er janvier 2011, avec la mise en application de la directive 2009/16/CE sur le contrôle par l’État du port, fondé sur l’utilisation d’un système d’information européen inédit, le système THETIS, géré par l’Agence européenne de sécurité maritime (EMSA).

VISITES AU TITRE DU CONTRÔLE PAR « L’ÉTAT DU PORT » EN 2014

(en nombre de navires)

Mémorandum de Paris

1 321

Mémorandum de l’océan Indien

51

Mémorandum des Caraïbes

41

Source : réponse au questionnaire budgétaire du Rapporteur spécial.

2. Le sauvetage en mer

En l’absence de corps spécialisé, à l’image des garde-côtes américains, le sauvetage en mer est essentiellement réalisé en France par une action interministérielle ainsi que par l’intervention de moyens privés, et notamment par les bénévoles de la Société nationale de sauvetage en mer (SNSM).

La coordination de ces interventions est faite par les centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage (CROSS).

a. Les centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage

Les CROSS constituent des services spécialisés de la direction des affaires maritimes, placés sous l’autorité opérationnelle du préfet maritime.

Pour 2016, les crédits inscrits au PLF au profit de la surveillance maritime s’élèvent à 10,5 millions d’euros en autorisations d’engagement et 8,3 millions d’euros en crédits de paiement, contre respectivement 8,6 et 10 millions d’euros en 2015.

L’augmentation des autorisations d’engagement permettra de lancer trois opérations significatives : le nouveau marché triennal de maintenance des installations radar des trois CROSS de la Manche-mer du Nord, le marché triennal de maintenance du système SPATIONAV (14), enfin, le lancement de la préfiguration d’un nouveau système d’exploitation dérivé de MARYLIN (15).

Depuis 2012, la tendance est à une baisse sensible des crédits. Si ces crédits permettent de développer a minima et de maintenir les systèmes d’informations, le ministère a reconnu que certains matériels radioélectriques (notamment en ondes hectométriques – émission sur longue distance) commençaient à présenter des signes de vieillissement.

Par ailleurs, il convient de mentionner qu’au terme des premières réflexions menées suite à la rationalisation de l’organisation des équipes opérationnelles des CROSS et à la modernisation des systèmes d’information et d’exploitation, quatre ETPT ont été supprimés en 2015.

Le Rapporteur spécial souligne l’importance de ces services spécialisés, qui répondent à cinq grandes missions : la coordination de la recherche et du sauvetage des personnes en détresse en mer, la surveillance de la navigation maritime, la surveillance des pêches maritimes, la surveillance des pollutions, la diffusion des renseignements nautiques, la sûreté maritime.

Lors de son déplacement au Havre, le directeur interrégional de la mer a informé le Rapporteur spécial que 1 500 situations de rapprochements dangereux sont identifiées par le CROSS Gris-Nez dans le détroit du Pas-de-Calais chaque année, soit autant d’accidents et de collisions évitées.

b. La Société nationale de sauvetage en mer

La SNSM est une association « loi 1901 », dont la mission première est de porter assistance aux personnes et aux navires en difficulté. Ce modèle d’une responsabilité régalienne confiée à une association de droit privé qui se compose de plus de 7 000 bénévoles est un modèle unique qu’il convient de préserver. Selon le président de l’association, M. Xavier de la Gorce, si l’État devait reprendre à sa charge ce service, le coût pour les finances publiques serait d’environ 300 millions d’euros.

En 2014, les ressources de l’association se sont élevées à 29,5 millions d’euros. Les ressources privées dons, legs, cotisations, partenariats et ressources propres, dont l’assistance au bien, constituent 72 % des ressources de l’association.

Les subventions publiques de fonctionnement et d’investissement représentent 28 % des ressources. Plus précisément les subventions de fonctionnement représentent 4 millions d’euros, dont un peu plus de 2 millions d’euros proviennent du programme 205. Pour 2016, la dotation est ainsi reconduite à 2,3 millions d’euros.

Le contexte de crise budgétaire et la baisse induite des ressources des collectivités territoriales ainsi que la diminution des dons et legs représentent à l’heure actuelle un vrai risque pour la préservation du modèle économique de l’association. D’autant plus que les bénévoles, de moins en moins issus des métiers de la mer, imposent un effort de formation plus important.

De manière exceptionnelle, l’État a accompagné en 2015 la SNSM dans le renouvellement et l’entretien de sa flotte, avec une convention d’investissement de 1,5 million d’euros, qui permettra l’achat de quatre nouvelles vedettes, dont un canot tout temps, et des interventions techniques majeures sur quatre autres embarcations.

À l’occasion du CIMER du 22 octobre dernier, le Premier ministre a promis au président de la SNSM plus d’un million d’euros supplémentaires à partir de 2016, ainsi qu’un pourcentage pérenne de la future taxe perçue sur l’éolien marin.

3. La signalisation maritime et la lutte contre les pollutions

La sous-action relative à la signalisation maritime recouvre d’une part les crédits dédiés au fonctionnement technique et au fonctionnement courant des agents des services des phares et balises et du service central de l’armement des phares et balises de Quimper, soit 11 millions d’euros en autorisations d’engagement et crédits de paiement pour 2016 ; et d’autre part les crédits de modernisation des établissements de signalisation maritime (ESM) et des moyens nautiques, soit 2,9 millions d’euros en autorisations d’engagement et 2,2 millions d’euros en crédits de paiement pour 2016.

Ces 2,9 millions d’euros de titre 5 sont à comparer aux quelques 10 millions d’euros qui étaient prévus en investissement il y a dix ans. Cette baisse ne peut se poursuivre indéfiniment sous peine d’avoir à engager dans les années à venir des réparations autrement plus coûteuses.

Pour l’année à venir les priorités indiquées par le ministère sont les suivantes : modernisation du parc des ESM (16), poursuite du renouvellement de la flotte de navires baliseurs par transformation de navires, afin de remplacer des unités vieillissantes, et maintien en condition des navires existants. Ces opérations ont ainsi permis, en 2015, de remplacer deux navires obsolètes par un seul, L’Atlantique, basé à Saint-Nazaire.

Enfin, le programme 205 permet le financement de la préparation à la lutte contre les pollutions qui atteignaient les côtes : acquisition des matériels spécialisés de lutte contre les pollutions du littoral, maintien en condition opérationnelle des matériels stockés, maintien des compétences spécifiques nécessaires par le financement de formations et d’exercices d’entraînement.

Les moyens financiers de ce dispositif dit « Polmar-Terre » s’élèvent pour 2016 à 1,6 million d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement, montant en légère baisse par rapport à 2015.

Rappelons qu’en ce qui concerne la lutte en pleine mer, ce sont les moyens de la Marine nationale qui sont mobilisés.

4. Le dispositif de contrôle et de surveillance des affaires maritimes

Le dispositif de contrôle et de surveillance des affaires maritimes (DCS) représente le volet opérationnel de l’action civile de l’État en mer.

Les agents du DCS mettent en œuvre différentes politiques :

– contrôle et surveillance des activités maritimes : les affaires maritimes sont habilitées au titre de l’ensemble des polices spéciales en mer (police des pêches, police de la navigation, de la sécurité des navires, des épaves, police de l’environnement), et agissent pour le compte des différents ministères intéressés ;

– contrôle et surveillance des pêches maritimes : depuis ces dernières années, faisant suite notamment à la montée en puissance de l’Agence européenne de contrôle des pêches (AECP) et compte tenu de l’importance de la réglementation communautaire, la mission de coordination des contrôles des pêches conduite par les DIRM s’est renforcée au regard des objectifs à atteindre et des moyens disponibles, toutes administrations confondues.

Le DCS s’articule autour de deux composantes :

– d’une part, un dispositif hauturier composé de deux patrouilleurs de 46 et de 52 mètres, de trois vedettes régionales d’une trentaine de mètres basées en métropole, ainsi que d’un troisième patrouilleur basé à La Réunion, dédié à la surveillance des TAAF ;

– d’autre part, un réseau d’unités littorales des affaires maritimes (ULAM) qui, à l’échelon départemental à terre et en mer, participe au contrôle des activités maritimes côtières dans leur diversité.

Chaque unité nautique nécessitant d’être armée par un nombre d’agents minimal, déterminé par catégorie de navire, les agents des affaires maritimes, rencontrés au Havre ont insisté sur l’absence totale de marge de manœuvre en termes d’effectifs, pour la réalisation de ces missions de contrôle.

Le DCS mobilisera, en 2016, 9,8 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement.

• Les crédits de fonctionnement, proposés à 3,9 millions d’euros pour 2016, sont essentiellement alloués aux services déconcentrés pour l’entretien des moyens nautiques, les frais de carburant ou de déplacement, et le fonctionnement courant des agents (indemnités de sortie en mer, déplacement et fonctionnement administratifs). Pour ces coûts d’entretien, ce poste bénéficie d’une dotation globale forfaitaire évaluée par catégorie de navires, représentant un socle minimum à effectuer, comme le carénage ou la révision des moteurs et des matériels de sécurité.

Il convient de mentionner aussi les dépenses de fonctionnement du dispositif de contrôle dans les TAAF, qui s’élèvent à 4,4 millions d’euros pour 2016. Actuellement, les moyens concernent en premier lieu l’acquisition des licences d’utilisation d’imagerie satellite dans le cadre de la surveillance des pêches par les satellites « RADARSAT », ainsi que le fonctionnement de l’antenne située à Kerguelen.

• En ce qui concerne les investissements, ils sont là encore réduits au strict minimum, puisqu’à peine plus d’un million d’euros servira en 2016 à l’amélioration et à la modernisation des moyens nautiques.

ÉLÉMENTS BUDGÉTAIRES DE LA DIRM DU HAVRE

Lors de son déplacement au Havre, le rapporteur spécial a pris connaissance de l’évolution des missions, et des crédits alloués à la direction interrégionale de la mer du Havre.

Les chiffres clés de la DIRM :

– 448 agents dont 79 militaires 

– 4 régions administratives sur 1 000 km de littoral ;

– 1 535 aides à la navigation maritime dont 1 181 ESM gérées par les quatre subdivisions des phares et balises + 2 centres de stockages POLMAR

– 5 centres de sécurité des navires

– 2 moyens nautiques (VR Armoise et PAM Thémis)

– 2 centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage (Gris-Nez et Jobourg)

– 5 services de santé des gens de mer

– Fonction d’autorité académique des 3 lycées professionnels maritimes de la façade.

Les différents services dépendant de la DIRM :

Le budget global de la DIRM, lié au programme 205 :

(en euros)

Action

Dotation budgétaire
2014

Dotation budgétaire 2015

Action 1 Sécurité et sûreté maritimes

1 845 000

1 499 000

Action 2 Gens de mer et enseignement maritime

100 000

58 000

Action 4 Action interministérielle en mer

870 000

885 000

Action 5 Soutien au programme

403 000

710 471

Total (hors fonds de concours)

3 218 000

3 152 471

Fonds de concours

754 424

643 743

Total

3 972 242

3 796 214

La baisse des crédits est particulièrement sensible en matière de signalisation maritime et de contrôle des navires :

(en milliers d’euros)

Action

Sous-action

Dotation 2013

Dotation 2014

Dotation 2015

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Sécurité et sûreté maritimes

Signalisation maritime

1 105

1 105

1 115

1 115

854

854

Action

Sous-action

Dotation 2013

Dotation 2014

Dotation 2015

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Sécurité et sûreté maritimes

Contrôle des navires

209

209

210

210

145

145

Source : DIRM Manche Est Mer du Nord (MEMN)

B. UNE PRIORITÉ TOUJOURS FORTE DONNÉE À L’ENSEIGNEMENT MARITIME

En matière d’enseignement maritime, l’État est le garant de la délivrance des titres de formation professionnelle maritime. La profession de marin est en effet très réglementée, et les conditions de qualification des professionnels répondent à des normes internationales strictes.

Plus largement, l’enseignement maritime est un levier important de la politique publique liée à la fois à la sécurité maritime, à l’emploi et à l’insertion professionnelle des jeunes.

L’offre de formation est large, et permet d’accéder à une grande variété de métiers. L’indicateur 2.1 du programme 205, qui correspond au taux des actifs maritimes parmi les anciens élèves des établissements d’enseignement maritime cinq ans après l’obtention de leur diplôme de formation initiale est excellent et s’élève à près de 80 %. Ce chiffre, très sensible à la conjoncture économique et à la situation dans le domaine du transport maritime, implique une constante adaptation de la formation aux attentes des acteurs maritimes.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS BUDGÉTAIRES DE L’ENSEIGNEMENT MARITIME

(en millions d’euros)

 

LFI 2012

LFI 2013

LFI 2014

LFI 2015

LFI 2016

 

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

École nationale supérieure maritime (ENSM)

17,26

17,2

17,56

17,56

21,32

21,32

2,3

2,32

19,02

19,02

Dotation Fonctionnement

17,26

17,26

17,56

17,56

18,32

18,32

18,32

18,32

18,02

18,02

Dotation Bourses

Dotation Embarquements

Dotation Équipement

/

/

/

/

3,00

3,00

3,00

3,00

1,00

1,00

Lycées professionnels maritimes (LPM)

                   

Dotation Fonctionnement

3,41

3,41

3,69

3,69

4,15

4,15

4,53

4,53

4,79

4,79

Dotation Bourses

1,08

1,08

1,05

1,05

1,05

1,05

1,11

1,11

1,20

1,20

Établissements privés

0,86

0,86

0,93

0,93

0,93

0,93

0,97

0,97

0,80

0,80

Formation continue

0,90

0,90

0,90

0,90

0,85

0,85

0,82

0,82

0,82

0,82

TOTAL

28,00

28,00

28,87

28,87

33,50

33,50

34,39

34,39

32,62

32,62

Source : réponse aux questionnaires budgétaires du Rapporteur spécial.

1. L’importance du réseau des lycées professionnels maritimes

La formation secondaire, du CAP au BAC professionnel, est dispensée au sein des douze lycées professionnels maritimes (LPM) métropolitains, et des centres agréés outre-mer.

Ces établissements préparent essentiellement aux métiers de la pêche, mais également à certains métiers du transport maritime : électriciens, mécaniciens, gestionnaires d’entreprise maritime...

Ils sont un formidable outil à la disposition des jeunes, qui permet de se former à des métiers dont les débouchés sont assurés. Lors de son audition, M. Hubert Carré, président du comité national des pêches, a ainsi pu affirmer que « le chômage n’existe pas à la pêche ». Bien au contraire, les conditions de travail difficiles aboutissent bien souvent à ce que les armateurs peinent à recruter, la transmission du métier de génération en génération n’étant plus assurée aujourd’hui.

Les dépenses retracées au sein du programme 205 et relatives aux LPM recouvrent deux actions principales.

Tout d’abord, l’État verse une subvention annuelle afin de prendre en charge les salaires des personnels enseignants, administratifs et de vie scolaire (17). Entre 2012 et 2015, la subvention est passée de 3,4 millions d’euros à 4,5 millions d’euros afin de répondre à l’élargissement de l’offre de formation initiale au sein des douze établissements suite à la réforme du baccalauréat en trois ans et à l’ouverture, en septembre 2014, des six nouvelles classes menant au brevet de technicien supérieur maritime (BTSM).

L’augmentation de la subvention fixée à 4,8 millions d’euros au titre du PLF pour 2016 tient compte de l’ouverture, qui a eu lieu en septembre 2015, de quatre classes de deuxième année de BTSM.

Enfin, l’État finance les aides aux élèves boursiers, dont la proportion dépasse souvent les 50 % dans l’enseignement maritime secondaire contre environ 36 % dans les établissements d’enseignement gérés par le ministère de l’éducation nationale (18). L’enveloppe demandée à ce titre pour 2016 est fixée à 1,2 million d’euros, en légère augmentation du fait de l’ouverture des classes de BTSM.

2. L’École nationale supérieure maritime : un enseignement modernisé

L’École nationale supérieure maritime (ENSM) a été créée le 1er octobre 2010 (19). Cette école, qui s’inscrit dans une très longue tradition historique remontant aux écoles d’hydrographie mises en place par Colbert en 1681, est plus récemment issue du regroupement des quatre écoles nationales de la marine marchande du Havre, de Marseille, de Nantes et de Saint-Malo. L’établissement a pour objectif principal de former les futurs officiers de la marine marchande ainsi que, de façon plus actuelle, des cadres à l’interface des activités maritimes et terrestres.

a. L’unique opérateur du programme en meilleure santé financière

Alors que les années 2010 à 2013 ont été particulièrement difficiles, l’adoption du projet d’établissement en décembre 2013 a ouvert la voie à une normalisation du fonctionnement de l’ENSM, tant du point de vue pédagogique, qu’administratif et financier.

La subvention pour charges de service public que l’État verse à l’ENSM s’est élevée à 17,3 millions d’euros en 2012 et 2013. Afin de poursuivre le développement de ses nouvelles activités, la subvention a été portée à 18,3 millions d’euros en 2014 et 2015. Ce soutien de l’État a permis un rétablissement de la situation financière de l’établissement, confirmé par l’exercice 2014.

Pour les années 2016-2017, l’objectif pour l’ENSM est de développer ses ressources propres, la subvention étant en légère diminution.

La contribution de l’État à la nouvelle école du Havre qui a été livrée fin mai 2015 s’achèvera en 2016 par un versement d’un million d’euros. Au total, la contribution de l’État à ce projet s’élève à 10 millions d’euros.

b. Les perspectives de développement de l’école

Lors de l’inauguration du nouveau centre havrais de l’ENSM, le 6 octobre dernier, le Président de la République a insisté sur l’importance de la politique d’enseignement et d’innovation maritimes, qui constitue l’un des piliers de l’ambition de la France sur mer.

La commission des titres d’ingénieurs a renouvelé en octobre 2015 la capacité de l’ENSM à délivrer un tel titre, ce qui permet désormais aux élèves de faire reconnaître leurs formations d’officier, de pouvoir s’orienter le cas échéant vers d’autres formations mais aussi de pouvoir se reconvertir professionnellement avec plus de facilité lorsqu’ils décideront de cesser la navigation.

Lors de son audition par le Rapporteur spécial, le directeur de l’ENSM, M. François Marandet, a également beaucoup insisté sur l’ouverture à l’international de l’école, avec la mise en place de cours en anglais, la recherche de partenariats étrangers et la création d’une formation préparant les élèves à embarquer sous pavillon étranger (20).

Cette transformation de l’école a suscité beaucoup de controverses, de conflits et de guerres intestines, notamment en juin dernier où le manque de professeurs était criant et où un tiers des élèves de première année ont redoublé (21). Les représentants des élèves avaient alors écrit à Mme Ségolène Royal, ministre de l’écologie, pour l’alerter et lui demander des moyens supplémentaires. Le déficit en enseignants a même conduit la direction de l’ENSM Marseille à reprogrammer au second semestre les cours qui n’ont pu avoir lieu au premier.

Ce problème fait partie des trois enjeux identifiés par le projet annuel de performances, qui indique que les efforts à venir doivent porter sur :

– le recrutement des enseignants et la mise en place des nouvelles techniques pédagogiques ;

– la stabilité et la lisibilité des cursus de formation, afin de tirer toutes les leçons des difficultés rencontrées dans la mise en œuvre des réformes récentes ;

– la promotion des filières de formation proposées par l’ENSM en lien avec l’ensemble des acteurs et notamment les futurs employeurs.

Le Rapporteur spécial, qui constate une baisse du plafond d’emplois de l’ENSM de 240 à 237 ETPT pour 2016, sera donc très attentif au suivi de ces objectifs et aux conditions dans lesquelles les élèves seront amenés à suivre leur formation en 2016.

3. Les autres dépenses relatives aux gens de mer

Le programme 205 retrace certaines dépenses, modestes, destinées aux gens de mer, et notamment :

– une petite subvention de 130 000 euros pour les associations participant à l’accueil obligatoire des marins en escale dans les ports, et pour l’abondement du fonds destiné aux marins abandonnés ;

– 200 000 euros pour les dépenses de fonctionnement des services de santé des gens de mer (achat de matériel médical, frais de déplacement, paiement des indemnités des jurys d’examen…), et pour le centre de consultations médicales maritimes de Toulouse qui assure un service, permanent et gratuit, de consultations et d’assistance télémédicales pour tout navire français en mer partout dans le monde ;

– 820 000 euros sont versés à l’Agence de services et de paiement (ASP) afin de couvrir la rémunération d’environ 320 stagiaires et de près de 1 260 mois de stage de formation continue.

C. UNE BAISSE CONJONCTURELLE DES CRÉDITS DE L’ACTION FLOTTE DE COMMERCE

Afin de soutenir l’activité de transport maritime, très fortement mondialisée, l’État a mis en place un ensemble d’aides à la flotte française, qui répond aux objectifs de renforcement de la compétitivité économique des entreprises dont le centre de décision est situé sur le territoire français, de soutien à l’emploi français et d’incitation à la modernisation des navires.

Ces crédits, les plus conséquents du programme 205, comprennent :

– la compensation à l’Établissement national des invalides de la marine (ENIM) de l’exonération des charges sociales maladie, vieillesse et accidents du travail pour les marins en application de la loi du 3 mai 2005 sur le registre international français (RIF) ;

– les compensations à l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) et à Pôle emploi des exonérations de charges sociales des marins relatives à la famille et à l’assurance chômage pour les navires à passagers.

Ces aides sont complétées, hors programme 205, par la possibilité pour les entreprises d’opter pour un régime de taxation d’un bénéfice forfaitaire au tonnage en substitution du mode de calcul de droit commun de l’impôt sur les sociétés (22).

Les crédits de l’action incluent enfin le remboursement par l’État à la Compagnie générale maritime et financière (CGMF) des charges spécifiques de retraites et d’accidents du travail des personnels sédentaires de l’ancienne Compagnie générale maritime (CGM). Fixée à 10,9 millions d’euros pour 2016, cette dépense à naturellement vocation à décroître.

1. La réduction des compensations d’exonérations de charges sociales

Comme le montre le tableau ci-dessous, la baisse des crédits de l’action est essentiellement portée par la chute des compensations d’exonérations de charges sociales ENIM et ACOSS.

ÉVOLUTION DES DOTATIONS BUDGÉTAIRES DE L’ACTION
FLOTTE DE COMMERCE
ENTRE 2013 ET 2016

(en millions d’euros)

 

2013

2014

2015

2016 (p)

CGMF

13,05

12,76

11,65

10,87

ENIM (maladie, vieillesse, accidents du travail)

44,05

44,00

44,50

41,18

ACOSS (allocations familiales)

8,57

8,10

7,00

5,80

ASSEDIC

6,48

6,20

6,6

6,60

Total Action 3 Flotte de commerce

72,15

71,06

69,81

64,45

Source : réponse au questionnaire budgétaire du Rapporteur spécial.

Les chiffres proposés pour 2016 intègrent une grande incertitude sur le financement des exonérations de charges, en lien avec les perspectives de poursuite d’activité de deux grandes compagnies de transport à passager, à savoir SNCM et MyFerryLink.

Au-delà de ces deux cas très particuliers, le nombre de marins affiliés à l’ENIM est resté stable depuis dix ans. Il avait progressé régulièrement jusqu’en 2010, jusqu’à atteindre 14 000. En 2014, le nombre de marins affiliés à l’ENIM est de 13 850.

La question du développement de l’emploi maritime français doit cependant toujours faire l’objet d’une grande attention de la part des pouvoirs publics, et des inquiétudes sur l’avenir de la marine marchande française restent présentes.

Ainsi, M. Philippe Martinez, secrétaire général de la CGT, vient d’écrire au Premier ministre, pour l’alerter et lui faire part du souhait des représentants des marins et officiers de le rencontrer « afin d’essayer d’éviter l’hécatombe qui les guette » (23).

Même s’il n’est pas possible de lier directement emploi de marin français et navires battant pavillon national, ces préoccupations ne sont pas sans corrélation avec la volonté de maintenir une flotte de commerce française.

2. L’enjeu du développement de la flotte de commerce française

L’accroissement de la flotte de commerce sous pavillon français ne fait pas partie des principales mesures adoptées lors du dernier CIMER, qui s’est tenu à Boulogne-sur-Mer.

LES PRINCIPALES MESURES CONCERNANT LE TRANSPORT MARITIME ADOPTÉES LORS DU COMITÉ INTERMINISTÉRIEL DE LA MER DU 22 OCTOBRE 2015

• En matière portuaire

– extension de la procédure de simplification douanière en vigueur depuis 2015
(auto liquidation de la TVA due à l’importation) ;

– amélioration du régime de la taxe foncière sur les parcelles appartenant aux ports ;

– facilitation du transport modal fluvial par la réduction des coûts de manutention ;

– financement pour 54 millions d’euros d’investissements portuaires outre-mer ;

– engagement de l’État pour le projet de port de transbordement à Saint-Pierre-et-Miquelon.

• En faveur des armateurs

– prolongation jusqu’au 31 décembre 2016 de l’appel à projets de navires à passagers répondant aux contraintes d’émissions non polluantes ;

– expérimentation au premier semestre 2016, en lien avec la Banque européenne d’investissement, d’un nouveau mécanisme de garantie financière pour faciliter l’accès au crédit des armateurs ;

– mise en place d’un dispositif d’assurance-crédit pour aider les armateurs français à faire construire leurs navires dans les chantiers navals du pays.

Pour autant, la volonté de développer le pavillon français est plus que jamais d’actualité.

En ce qui concerne la réforme de la loi de 1992 (24), le secrétaire d’État chargé des transports, de la mer et de la pêche, M. Alain Vidalies, a demandé que soit retirée de la proposition de loi relative à l’économie bleue (25), la modification de la loi de transition énergétique sur l’extension de protection de pavillon français du brut vers les raffinés. Le texte jetant les bases de la réforme de la loi de 1992 a été adopté en août, mais le décret d’application n’est pas jugé à la hauteur par les armateurs et les syndicats de navigants. Selon ces professionnels, il est trop vague pour permettre de constituer une vraie flotte de transporteurs de raffinés sous pavillon français, ce à quoi la proposition de loi voulait remédier.

Par ailleurs, en ce qui concerne les bateaux de grande plaisance, les agents du registre international français œuvrent toujours afin de convaincre le plus grand nombre de propriétaires d’immatriculer leur navire en France (26).

Le Rapporteur spécial se félicite des efforts entrepris par les acteurs du monde maritime pour stabiliser, voire accroître, la flotte commerciale française. Il regrette toutefois que le Gouvernement ne porte pas d’ambition claire sur ce point.

II. LE VOLET PÊCHE ET AQUACULTURE DANS L’ATTENTE DES CRÉDITS EUROPÉENS

Le volet pêche et aquaculture du programme 205, représente pour 2016 46,8 millions d’euros en autorisation d’engagement et en crédits de paiement, soit 2,5 % de moins qu’en 2015.

Cette dépense était, avant 2013 (27), retracée au sein de l’action 16 du programme 154 Économie et développement durable de l’agriculture, de la pêche et des territoires, de la mission Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales.

L’enveloppe budgétaire de l’action gestion durable des pêches et de l’aquaculture est essentiellement constituée de dépenses d’intervention visant à accompagner les entreprises de pêche face aux évolutions de la ressource et de la réglementation. La politique commune des pêches (PCP) de l’Union européenne a fait l’objet d’une réforme majeure en 2013. Sa mise en œuvre sera possible grâce à un nouvel instrument financier : le fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche (FEAMP), dont le ministère est autorité de gestion. Les crédits de l’action assurent la majeure partie des contreparties financières nationales au FEAMP, malgré une validation encore en cours du programme opérationnel de la France.

Au-delà de l’accompagnement économique à la mise en œuvre de la PCP, le programme finance également l’acquisition de connaissances et des moyens spécifiques au contrôle des pêches.

A. UNE DIMINUTION DES CRÉDITS DE L’ACTION GESTION DURABLE DES PÊCHES ET DE L’AQUACULTURE

Cette action était dotée en 2012 de 60,5 millions d’euros en crédits de paiement. La baisse est donc significative, et touche plus particulièrement les dépenses d’intervention à destination des entreprises, qui passent de 45,4 millions d’euros en 2012 à 37 millions d’euros pour 2016.

Après analyse de l’évolution des crédits entre ces deux années, il apparaît que la baisse constatée est liée à l’absence de plan de sortie de flotte prévue pour 2016. En 2012, 11 millions d’euros en autorisations d’engagement et 13 millions d’euros en crédits de paiement étaient en effet budgétés pour financer la destruction de navires. Ces plans représentaient encore 7 millions d’euros en 2013, et 3,1 millions d’euros en 2014. 515 navires environ ont été sortis de flotte sur la période de programmation 2007-2013. Près de 150 millions d’euros, dont 20 % de fonds européens, ont été consacrés à cette restructuration considérable.

1. La protection et le suivi scientifique de la ressource halieutique

Les crédits dédiés à l’acquisition des connaissances scientifiques et la collecte des données de pêche, au contrôle des pêches, et au financement du système de gestion des fonds européens et de son fonctionnement, représentent 16,5 millions d’euros pour 2016, qui se décomposent ainsi :

(en millions d’euros)

PÊCHE MARITIME ET AQUACULTURE protection de la ressource et suivi scientifique

Autorisations d’engagement

=

crédits de paiement

16,5

Suivi scientifique et statistique

6,8

Contrôle des pêches

6,2

Appui technique

3,5

Source : projet annuel de performances 2016.

a. Les actions d’amélioration de la connaissance des ressources

Les crédits demandés pour cette sous-action visent à assurer le suivi des ressources halieutiques dans les conditions exigées par la réglementation communautaire : collecte de données et expertises scientifiques.

Ces financements sont indispensables aux évaluations et aux études nécessaires à la conduite de la politique des pêches, et à la définition des positions de la France dans les négociations européennes et internationales.

L’ensemble de ces actions répond à des obligations européennes fortes et contraignantes en termes de mise en œuvre pour les États membres, avec des risques de contentieux en cas de manquement.

À ce stade, le Rapporteur spécial souligne avec regret le désengagement de l’Institut français pour l’exploitation de la mer (IFREMER) de sa mission traditionnelle de suivi et d’évaluation de la ressource. Le programme 187 Recherche dans le domaine de la gestion des milieux et des ressources, a d’ailleurs été supprimé en 2015. Les pêcheurs font de plus en plus appel à l’association interprofessionnelle France filière pêche, afin de procéder aux opérations d’évaluation de la ressource. Le programme 205 versera à l’IFREMER 2,6 millions d’euros en 2016, ce qui est toutefois supérieur aux 1,85 million d’euros que le programme a versés en 2015.

DÉCOMPOSITION DU FINANCEMENT DE L’IFREMER PAR L’ÉTAT

Source : projet annuel de performances de la mission Recherche et enseignement supérieur, 2016.

b. Le contrôle des pêches maritimes

Les crédits dédiés au contrôle des pêches maritimes sont relativement sanctuarisés dans la mesure où ils permettent à la France de répondre aux obligations qui lui sont imposées dans le cadre de la PCP. Le souvenir de la condamnation de la France dans l’affaire dite du poisson sous-taille est encore vif, et maintien sous pression l’ensemble des structures qui participent au contrôle des pêches (28).

Depuis 2014, le contrôle des pêches est entré dans le champ du FEAMP et la DPMA est devenue maître d’ouvrage.

3,6 millions d’euros seront nécessaires afin de faire fonctionner et de moderniser les systèmes d’information. Ces derniers sont indispensables pour répondre aux obligations réglementaires : information de consommation des quotas, suivi des contrôles, connaissance scientifique des stocks... À partir de 2015, un plan d’action sur la qualité des données déclaratives est mis en place à la demande de la Commission européenne à la suite d’un audit sur le contrôle des pêches en 2010 et 2011. Ce plan d’action permettra d’éviter une procédure contentieuse.

Enfin, 2,6 millions d’euros serviront au pilotage des actions de contrôle : mise en place de l’obligation de traçabilité, suivi de la nouvelle obligation de débarquement des captures jusque-là rejetées, renforcement des mesures de contrôle des captures sur zones non communautaires aux fins d’importation dans l’UE, ou encore constitution d’instruments de stockage des certificats de captures.

2. L’amélioration de la performance des filières pêche et aquaculture

Pour 2016, le PLF prévoit le versement de 30,3 millions d’euros pour cette sous-action. Toutefois, le Rapporteur spécial tient à rappeler que l’essentiel du soutien fiscal aux entreprises de pêche maritime est assuré par la détaxation du carburant au titre de la taxe intérieure de consommation (TIC). Les documents annexés au PLF n’en proposent pas d’évaluation précise, ce qui est regrettable.

Des exonérations de TVA couvrent également la vente par les marins-pêcheurs et armateurs des produits de leur pêche. Cette exonération s’étend aux livraisons de biens destinés à l’avitaillement des navires et aux prestations de service à bord. Le coût de ce dispositif ne dépasse pas 5 millions d’euros.

Enfin, le dispositif d’étalement de la plus-value de cession des navires de pêche ou des parts de copropriété de navires de pêche représente à peine 3 millions d’euros.

a. Les interventions économiques cofinancées par l’Union européenne

Les 20,2 millions d’euros d’interventions programmés pour 2016 sont principalement les contreparties nationales (CPN) des fonds européens pour la pêche. Leur versement est délégué à l’ASP à l’exception des dépenses en maîtrise d’ouvrage, réalisées par la DPMA. Ces contreparties émargent :

– au FEP d’une part, bien que la période de programmation soit achevée ;

– et au FEAMP d’autre part, dont le programme opérationnel de la France devra être validé par la Commission européenne fin 2015 (29).

Rappelons que la France dispose d’une belle enveloppe FEAMP de 588 millions d’euros pour la période 2014-2020, la deuxième en Europe. Elle a fait le choix de déléguer la gestion d’une partie des fonds aux conseils régionaux littoraux. Pour 2016, la répartition envisagée est la suivante : 3,5 millions d’euros pour la part État en cofinancement des mesures déléguées aux régions et 14 millions d’euros pour les contreparties État des mesures nationales.

Enfin, un montant de 2,4 millions d’euros sera dédié au financement national des plans de production et de commercialisation dans le cadre de la mise en œuvre de la nouvelle organisation commune du marché.

b. Les interventions économiques non cofinancées par l’Union européenne

Ces crédits concernent le financement du repeuplement de civelles et les mesures réglementaires obligatoires dans le cadre du plan de gestion anguilles, à hauteur de 2,1 millions d’euros pour 2016. Ils contribuent également au plan interministériel de lutte contre la pollution au chlordécone en Martinique et Guadeloupe, à hauteur de 1 million d’euros en 2016.

c. Les interventions socio-économiques

Pour 2016, 6,5 millions d’euros couvriront la participation de l’État au financement des caisses chômage intempéries (30). Il s’agit d’un mécanisme de garantie financière auxquels peuvent adhérer tous les marins actifs embarqués à bord d’un navire de pêche, afin d’inciter les marins à limiter les sorties par gros temps. L’État verse une subvention d’un montant équivalent à l’épargne du pêcheur, ce qui est, potentiellement, une contrainte lourde pour l’État, même si nombre de marins cotisants est relativement stable depuis plusieurs années.

Une réflexion est en cours pour substituer à ce dispositif un système assurantiel dans le cadre du FEAMP. Néanmoins cette démarche qui devra se faire en concertation avec la profession ne pourra pas aboutir avant 2018.

B. L’ADAPTATION DE LA PÊCHE FRANÇAISE AUX ENJEUX DE PRÉSERVATION DE LA RESSOURCE ET DE PLANIFICATION DES USAGES

Dans ses réponses au questionnaire budgétaire du Rapporteur spécial, le ministère a reconnu que l’évolution à la baisse du budget rendra désormais difficile tout soutien aux secteurs en situation de crise.

Ainsi, alors que les soutiens publics se raréfient, la profession se doit de préparer son futur en créant les conditions qui seront favorables à la rentabilité de ce secteur. Il convient pour cela d’accentuer le renouvellement de la flotte afin de réduire la facture énergétique des navires, d’améliorer leur sélectivité, et de renforcer l’attractivité de la profession. Par ailleurs, les pêcheurs devront à l’avenir composer avec la multiplication des usages de la mer sur la bande littorale, ce qui impose pour l’État d’engager une véritable démarche de planification spatiale.

1. Le renouvellement de la flotte de pêche et la modernisation des navires

À la demande du ministre de l’économie et des finances et du ministre délégué aux transports, à la mer et à la pêche, l’inspection générale des finances et l’inspection générale des affaires maritimes ont rendu début 2015 un important rapport sur le renouvellement de la flotte de pêche.

Le rapport insiste notamment sur la nécessité de mobiliser les professionnels, en particulier grâce à une meilleure connaissance des dispositifs offerts par le secteur bancaire et les investisseurs privés. Cette orientation vers une tutelle et des soutiens moins marqués que par le passé marque un tournant important pour la profession, la rapprochant du fonctionnement de la plupart des autres secteurs économiques.

Le rapport souligne également que la culture entrepreneuriale des pêcheurs, incarnée par le modèle du patron propriétaire embarqué, à la tête d’une société en nom propre, doit évoluer pour mieux répondre aux enjeux d’un secteur très capitalistique.

Par ailleurs, la mobilisation des mesures du FEAMP va favoriser, à moyen terme, le renouvellement de la flotte, en contribuant à l’amélioration de la rentabilité des entreprises (réduction des coûts grâce à l’innovation, la sélectivité, la remotorisation…) et à la structuration de la filière, conduisant à une meilleure valorisation des produits (notamment via les plans de production et de commercialisation mis en œuvre par les organisations de producteurs).

Le comité interministériel de la mer a confirmé la réforme en cours visant à refondre les permis de mise en exploitation (PME) afin de libérer des capacités et encourager le renouvellement de la flotte vieillissante. À côté de l’État, l’association France filière pêche (FFP) joue également un rôle de plus en plus important dans le domaine de la modernisation des navires (31).

Le Rapporteur spécial soutient pleinement ces différentes approches qui devraient favoriser, dans un premier temps, un maintien des navires actuels et une amélioration des marges et permettre aux armements, dans un second temps, de se tourner vers le secteur bancaire et les investisseurs privés pour envisager le renouvellement de l’outil.

2. La prévention des conflits d’usages en mer

La gouvernance de l’espace marin est naturellement complexe : elle peut difficilement s’appuyer, comme à terre, sur une planification de type urbanistique.

En la matière, les fréquents conflits entre les différents utilisateurs de la mer empêche le développement et la croissance des activités maritimes.

Les délais d’adoption des schémas régionaux de développement de l’aquaculture en témoignent : les retards d’élaboration s’expliquent principalement par leur objet même qui est de parvenir à un consensus entre les différents usages du littoral quant à l’utilisation du domaine public maritime et des espaces maritimes.

Les conflits les plus récents sont actuellement ceux qui opposent les installateurs d’éoliennes en mer avec les pêcheurs. Au Tréport par exemple, les représentants des professionnels de la pêche affirment que les deux tiers de la zone délimitée par le promoteur sont fréquentés par les pêcheurs.

L’État doit donc le plus rapidement possible, comme le préconise la Commission européenne, procéder à la délimitation fonctionnelle des espaces maritimes, sans toutefois tomber dans le piège du « cadastrage » terrestre, inapplicable sur la mer.

En cela, le Rapporteur spécial se félicite de l’adoption d’une mesure dédiée à la planification spatiale lors du dernier CIMER. Selon le document de presse publié à l’issue du comité interministériel, l’État s’engage à élaborer un guide méthodologique de planification de l’espace maritime, en concertation avec l’ensemble des usagers de la mer. Sur cette base, la planification sera menée de manière concrète et opérationnelle sur l’ensemble des façades maritimes, par l’intermédiaire des trois conseils maritimes de façade métropolitains.

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EXAMEN EN COMMISSION

Après les auditions de Mme Ségolène Royal, ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie et de M. Alain Vidalies, secrétaire d’État aux transports, à la mer et à la pêche (voir le compte rendu de la commission élargie du 5 novembre 2015 à 15 heures (32)), la commission des finances examine les crédits de la mission Écologie, développement et mobilité durables.

La commission examine l’amendement n° II-CF396 de M. Marc Goua.

M. Marc Goua, rapporteur spécial. Cet amendement vise à rétablir les crédits budgétaires du centre interprofessionnel technique d’études de la pollution atmosphérique (CITEPA) à un niveau identique à celui de la loi de finances initiale pour 2015. Alors que le CITEPA est un acteur majeur de la lutte contre le changement climatique, l’importance des restrictions budgétaires proposées ne lui permettrait plus de réaliser l’intégralité de ses missions. Cette situation, l’année où la France organise la COP 21, serait très regrettable. C’est pourquoi je vous propose de rétablir la dotation du CITEPA en l’augmentant de 140 000 euros.

La commission adopte l’amendement n° II-CF396.

Puis, suivant l’avis favorable de M. Marc Goua, M. Jean-Claude Buisine, M. Jean-Claude Fruteau, M. Alain Rodet et M. Olivier Faure, rapporteurs spéciaux, et malgré l’avis défavorable de M. Hervé Mariton, rapporteur spécial, la Commission adopte les crédits de la mission Écologie, développement et mobilité durables modifiés.

La commission adopte ensuite, suivant l’avis favorable de M. Jean-Claude Fruteau, rapporteur spécial, le budget annexe contrôle et exploitation aériens, puis suivant les avis favorables de MM. Marc Goua, Alain Rodet et Olivier Faure, rapporteurs spéciaux, elle adopte les crédits des comptes spéciaux Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale, Aides à l’acquisition de véhicules propres et Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs.

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ANNEXE :
LISTE DES DÉPLACEMENTS ET AUDITIONS
DU RAPPORTEUR SPÉCIAL

Affaires maritimes

– Mme Régine Bréhier, directrice

– Mme Isabelle Tanchou, sous-directrice

Direction des pêches et de l’aquaculture

– M. Frédéric Gueudar-Delahaye, directeur

– Mme Laure Tourjansky, directrice adjointe

École nationale supérieure maritime (ENSM)

– M. François Marendet, directeur général

– M. Philippe Allemandou, directeur général adjoint

Comité national des pêches maritimes et des élevages marins (CNPMEM)

– M. Hubert Carré, directeur général

– M. Pierre-Étienne Brouté, juriste

Direction interrégionale de la mer – Manche-Est Mer-du-Nord (DIRM MEMN)

– M. Jean-Marie Coupu, directeur interrégional

– Mme Audrey Lemesle, secrétaire générale adjointe

– M. Philippe Ledain, chef du service interrégional des phares et balises

– M. Laurent Lusven, responsable de la subdivision des phares et balises du Havre-Ouistreham

– M. Mathieu Fanonnel, chef du centre de sécurité des navires du Havre

Mme Muriel Rouyer, chef du service ressources réglementation économie et formation

– Mme Tania Decastel-Serva, chef du service contrôle sécurité et sûreté maritimes

© Assemblée nationale

1 () Rapport sur la compétitivité des transports et services maritimes - osons la mer, Arnaud Leroy, novembre 2013, suivi de la proposition de loi n° 2964 relative à l’économie bleue ; rapport d’évaluation de la politique maritime, Yves Morin et Jean-Michel Suche, novembre 2014 ; rapport d’information sur les enjeux écologiques, économiques et géopolitiques du changement climatique en arctique et en antarctique, déposé par la commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale, Hervé Gaymard et Noël Mamère, avril 2015.

2 () Rapport Poséidon, 2006, Jean-Luc Pujol, Gilbert Le Lann, Éric Banel ; Livre bleu des engagements du Grenelle II et Livre bleu de la « stratégie nationale de la mer et des océans » (2009).

3 () Ces chiffres sont issus des données économiques maritimes françaises, publiés pour 2011 par l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (IFREMER). Ils se situent toutefois bien en deçà des chiffres cités par le Président de la République lors de son déplacement au Havre le 6 octobre dernier, qui a parlé de 300 000 emplois directs liés à l’économie maritime, hors activités littorales, et 65 milliards d’euros de chiffre d’affaires.

4 () Actions 1 à 5.

5 () Action 6.

(3) Composée d’un effectif moyen de 7-8 agents pour un effectif total de 150 personnes, chaque ULAM est dotée de moyens nautiques (vedette côtière et/ou embarcation légère rapide) et terrestres (véhicules légers et/ou utilitaires et/ou 4x4).

6 () Ou en direction territoriale (DTAM) ou unité territoriale des affaires maritimes (UTAM) outre-mer.

7 () Armement de phares et balises et École nationale de sécurité et d’administration de la mer.

8 () 78,5 ETPT ont été transférés en 2013 sur le programme 217 suite à l’intégration de la direction des pêches maritimes et de l’aquaculture (DPMA) au périmètre du ministère de l’écologie. Les années 2010 à 2013 du tableau ont été retraitées pour conserver un périmètre constant sur la période grâce aux renseignements fournis par la DPMA au Rapporteur spécial, relatifs à l’évolution de ses effectifs.

9 () Rapport spécial de M. Hervé Mariton, Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer, annexe n° 14 au rapport général de Mme Valérie Rabault, PLF pour 2015.

10 () Par exemple, les dépenses fiscales ne sont pas comptées même si certaines d’entre elles sont indiquées pour mémoire dans le programme 205. De même, les contributions des collectivités territoriales ne sont pas évaluées alors que des compétences importantes ont été décentralisées en 1982 et 2004 (aides à la pêche, ports, formation...) et que les collectivités contribuent à la politique maritime souvent bien au-delà de leurs compétences obligatoires.

11 () Loi n° 2005-1720 du 30 décembre 2005.

12 () Amendement n° II-733, de M. David Habib, cosigné par 32 députés de la majorité comme de l’opposition.

13 () Le nombre d’inspecteurs de la sécurité des navires est ainsi passé de 98 à 128 entre 2002 et 2003.

14 () SPATIONAV est un dispositif de surveillance maritime, le plus complet et intégré d’Europe. Il s’appuie notamment sur 19 sémaphores positionnés sur la côte méditerranéenne et 40 sur la façade Atlantique, Manche et mer du Nord, et il permet aux administrations concernées de disposer d’un système intégré offrant une vision globale et en temps réel de la situation au large des côtes françaises.

15 () MARYLIN est un système informatique dont la vocation est de doter les CROSS métropolitains d’outils performants d’aide et de planification de la recherche et du sauvetage en mer.

16 () Mise en place de bouées nouvelle génération ou ampoules à LED par exemple.

17 () Les dépenses de fonctionnement des 12 LPM incombent pour leur part aux régions.

18 () Les boursiers de l’enseignement secondaire représentent 41 % des élèves scolarisés dans les LPM pour l’année scolaire 2014-2015.

19 () Décret n  2010-1129 du 28 septembre 2010.

20 () Dans le même sens également, l’article 19 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 prévoit une affiliation obligatoire à la législation française de sécurité sociale des marins résidant en France et travaillant à bord de navires relevant d’un pavillon étranger hors Espace économique européen.

21 () Source : Le Marin, 29/10/2015.

22 () À ce propos, le décret permettant d’étendre à tous les modes de financement de navires l’exonération de plus-value de cession a été publié le 31 octobre dernier. Ce dispositif, adopté il y a un an dans le cadre de la loi de finances rectificative pour 2014, permet à tout le paquet fiscal autour de la taxe au tonnage de s’appliquer.

23 () Source : Le Marin, article en ligne, publié le 28/10/2015.

24 () Loi n° 92-1443 du 31 décembre 1992 portant réforme du régime pétrolier, qui prévoit l’obligation de disposer d’une capacité minimale de transport maritime sous pavillon national.

25 () Op.cit.

26 () Le 28 octobre, l’Océan Sapphire, un yacht à moteur de 41 mètres de long, est venu rejoindre les rangs des navires de plaisance battant pavillon registre international français, abandonnant celui de l’île de Man. Chaque entrée en flotte est un travail de longue haleine.

27 () La maquette budgétaire a été modifiée suite au transfert de la direction des pêches maritimes et de l’aquaculture (DPMA) au ministère de l’écologie, par le décret n° 2013-665 du 23 juillet 2013 modifiant le décret n° 2008-680 du 9 juillet 2008 portant organisation de l’administration centrale du ministère de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de l’aménagement du territoire.

28 () Dans son arrêt du 12 juillet 2005, la CJCE avait reproché à la France sa persistance à mettre sur le marché du merlu sous taille. Une mauvaise surveillance, un mauvais contrôle des activités de pêche et de débarquement et une absence de sanctions efficaces étaient ainsi pointés du doigt. La condamnation, accompagnée d’une astreinte, avait coûté au ministère de l’agriculture près de 77 millions d’euros.

29 () Lors de son déplacement à Brest le 29 octobre dernier, le commissaire européen pour les affaires maritimes et la pêche, M. Karmenu Vella, a confirmé que le programme opérationnel de la France sera validé et mis en œuvre avant la fin de l’année, afin, a-t-il dit, de créer un levier économique et financier pour les acteurs de la filière.

30 () Prévues par l’article 49 du décret n° 92-335 du 30 mars 1992.

31 () Dans le cadre de l’action de FFP sur réduction de l’impact environnemental de la flotte française, depuis 2012, entre 1 600 et 2 000 navires ont bénéficié d’une aide à l’investissement pour une enveloppe annuelle allant de 13 à 16 millions d’euros.

32 () http://www.assemblee-nationale.fr/14/budget/plf2016/commissions_elargies/