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N
° 3110

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 8 octobre 2015.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2016 (n° 3096),

PAR Mme Valérie RABAULT,

Rapporteure Générale

Députée

——

ANNEXE N° 17

ÉCOLOGIE, DÉVELOPPEMENT ET MOBILITÉ DURABLES

TRANSPORTS AÉRIENS ET MÉTÉOROLOGIE

CONTRÔLE ET EXPLOITATION AÉRIENS

Rapporteur spécial : M. Jean-Claude FRUTEAU

Député

____

SOMMAIRE

___

Pages

INTRODUCTION 5

I. LE BUDGET ANNEXE CONTRÔLE ET EXPLOITATION AÉRIENS 7

1. Des recettes préservées 8

2. Des charges courantes contenues 12

3. Une dynamique de désendettement et d’investissement 16

4. Le programme 612 Navigation aérienne 19

5. Le programme 614 Transports aériens, surveillance et certification 21

6. Le programme 613 Soutien aux prestations de l’aviation civile 22

II. COMPÉTITIVITÉ DU TRANSPORT AÉRIEN FRANÇAIS : UN EFFORT COLLECTIF 25

1. La croissance mondiale bénéficie insuffisamment à la France 25

2. Les nouvelles formes de concurrence pénalisent le pavillon français 29

3. Contenir la progression des taxes et redevances 33

4. La contribution décisive d’Aéroports de Paris 37

5. Air France : l’indispensable reprise du dialogue social 40

III. LE PROGRAMME 170 MÉTÉOROLOGIE 43

1. La baisse de la subvention pour charges de service public 44

2. Les autres ressources de Météo-France 46

3. La réduction des dépenses préserve la capacité à investir 50

EXAMEN EN COMMISSION 55

LISTE DES AUDITIONS RÉALISÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL 57

L’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires. À cette date, 96,25 % des réponses étaient parvenues au Rapporteur spécial.

INTRODUCTION

En 2016, le budget annexe Contrôle et exploitation aériens confirme que l’activité de la direction générale de l’aviation civile (DGAC) dégage un résultat positif, près de 200 millions d’euros, alors qu’elle a longtemps présenté une perte.

Le budget annexe est ainsi entré dans une dynamique vertueuse de désendettement. La DGAC diminuera son recours à l’emprunt tout en maintenant un niveau élevé d’investissement afin de mettre en œuvre le volet technologique du « Ciel unique européen ». L’amélioration de l’autofinancement permettra même de porter l’encours de dette à 1,117 milliard d’euros, en baisse de 107 millions d’euros, ce qui réduira les charges financières et améliorera encore l’autofinancement.

C’est le fruit d’une stratégie de réduction des coûts de fonctionnement et de diminution des effectifs. Parallèlement, les redevances aéronautiques restent à des niveaux modérés, bien inférieurs aux tarifs pratiqués par nos voisins européens. Les efforts des personnels de la navigation aérienne ont en effet permis de réaliser d’importants gains de productivité pour continuer à garantir la sécurité du transport aérien dans un contexte de croissance du trafic, et en particulier des pointes de trafic.

L’activité de la DGAC contribue ainsi à la compétitivité du transport aérien Français, dans un contexte où tous les acteurs français du secteur ne bénéficient pas suffisamment de la croissance mondiale, pourtant en hausse de 6,5 % avec 3,3 milliards de passagers transportés l’an passé.

Si les commandes massives adressées à Airbus confortent notre industrie aéronautique, le transporteur Air France est dans une situation de fragilité qui peut affecter l’ensemble du secteur. Or un « pavillon national » fort garantit une connectivité directe avec le monde : c’est un facteur d’attractivité du territoire.

Le redressement d’Air France repose d’abord sur la compagnie elle-même : ses personnels ont fait des efforts depuis plusieurs années, dans un contexte de baisse des effectifs, pour améliorer l’efficience et la qualité du service. Cet engagement doit se prolonger dans une diminution plus résolue des coûts, en renouant le dialogue social aujourd’hui gravement fragilisé, afin de donner à l’entreprise les moyens de son développement.

Parallèlement tous les leviers doivent être actionnés pour favoriser la compétitivité du secteur : les taxes et redevances, notamment aéroportuaires, doivent rester modérées ; des gains de productivité doivent permettre de réaliser les investissements nécessaires sans accroître la charge financière ; enfin l’Union européenne doit faire front commun pour obtenir une concurrence loyale de la part des compagnies du Golfe, massivement subventionnées, qui hypothèquent aujourd’hui notre développement vers l’Asie.

Chiffres clés

En 2016, le montant total du budget annexe Contrôle et exploitation aériens (BACEA) s’élèvera à 2 114,7 millions d’euros, contre 2 151 en 2015, en baisse de 36,3 millions d’euros, soit - 1,7 %. Cette diminution globale provient de la baisse du recours à l’emprunt pour financer les investissements maintenus à un niveau élevé, grâce à l’amélioration du solde de la section des opérations courantes du BACEA.

En 2016, le total de la section des opérations courantes s’élèvera à 2 002,1 millions d’euros, en hausse de 18,9 millions d’euros, soit + 0,94 % par rapport à 2015. La section devrait dégager un résultat positif de 199,7 millions d’euros, en hausse de 50 millions d’euros par rapport à 2015.

Alors que le BACEA connaissait un déficit d’exploitation de 21,5 millions d’euros en 2013, l’amélioration de la capacité d’autofinancement permettra de réduire le recours à l’emprunt : 112,6 millions d’euros en 2016 contre 167,9 millions d’euros en 2015 et 267,7 millions d’euros en 2014.

Ce niveau d’emprunt permettra à la DGAC de continuer à investir, à hauteur de 252 millions d’euros en 2016, niveau en léger repli de 5 millions d’euros, mais conforme à la programmation pluriannuelle des principaux programmes d’investissements.

Le moindre recours à l’emprunt en 2016 permettra de poursuivre le désendettement financier du BACEA : l’encours de la dette passera de 1 224 millions d’euros à 1 117, en diminution de 107 millions d’euros, après une baisse de 57 en 2015. Les charges financières diminuent de 19,4 %, passant de 35 à 28 millions d’euros.

Au 31 juillet 2015, les effectifs du BACEA comptaient 10 612 emplois équivalents temps plein travaillé (ETPT), soit 215 de moins que le plafond d’emplois fixé à 10 827. Le schéma d’emploi pour l’année 2016 prévoit 100 nouvelles suppressions d’emplois, ce qui devrait porter le plafond théorique à 10 727 emplois, pour un niveau réel compris entre 10 400 et 10 500 agents. Sur la période 2007-2015 la DGAC aura supprimé 1 136 ETP, soit 10 % de son effectif global

Pour la première fois, en 2016, les dépenses de personnel, y compris les cotisations sociales, diminueront : elles s’établiront à 1 441,6 millions d’euros, en baisse de 3,2 millions d’euros, soit - 0,28 %.

*

Le programme Météorologie de la mission Écologie, développement et mobilités durables, verra en 2015 la subvention pour charges de service public versée à l’établissement Météo-France diminuer de 2 %, à 199,7 millions d’euros. Ces crédits, qui s’ajoutent aux recettes propres de l’établissement, permettront néanmoins à Météo-France de réaliser des investissements qui ne peuvent pas être repoussés, en particulier le renouvellement de radars. Météo-France achèvera en 2016 sa réforme territoriale, qui a porté en quelques années le nombre de ses implantations métropolitaines de 108 à 55. En 2016, le plafond des emplois de l’établissement sera ramené à 3 080 ETPT, en diminution de 78 emplois.

I. LE BUDGET ANNEXE CONTRÔLE ET EXPLOITATION AÉRIENS

Aux termes de l’article 18 de la loi organique relative aux lois de finances, « des budgets annexes peuvent retracer, dans les conditions prévues par une loi de finances, les seules opérations des services de l’État non dotés de la personnalité morale résultant de leur activité de production de biens ou de prestation de services donnant lieu au paiement de redevances, lorsqu’elles sont effectuées à titre principal par lesdits services. [...] »

La direction générale de l’aviation civile (DGAC) du ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie dispose ainsi du budget annexe Contrôle et exploitation aériens (BACEA).

Les recettes proviennent de redevances et de taxes acquittées principalement par les compagnies aériennes. Les dépenses sont réparties entre trois programmes et visent à garantir la sécurité et la sûreté du transport aérien.

La DGAC accompagne ainsi le développement économique du transport aérien en fournissant des services performants, financés directement par les acteurs du secteur, et en prescrivant des normes techniques de sécurité qui découlent par ailleurs largement d’engagements internationaux et européens.

Conformément à l’article 18 de la LOLF, « les budgets annexes sont présentés selon les normes du plan comptable général, en deux sections. La section des opérations courantes retrace les recettes et les dépenses de gestion courante. La section des opérations en capital retrace les recettes et les dépenses afférentes aux opérations d’investissement et aux variations de l’endettement ». Le BACEA est donc présenté à l’équilibre, l’insuffisance de recettes par rapport aux dépenses étant, le cas échéant, compensée par la variation de son endettement.

La section des opérations courantes présente, en recettes, l’ensemble des produits d’exploitation, hors emprunt. Cette section présente, en dépenses, l’ensemble des charges de personnels, de fonctionnement et d’intervention, hors dépenses d’investissement, déclinées dans les trois programmes du budget annexe Contrôle et exploitation aérien. S’y ajoutent les dotations aux provisions, des dotations aux amortissements et les charges financières.

Le solde d’exploitation ainsi que les dotations aux amortissements sont inscrits en recettes de la section des opérations en capital. L’emprunt y est ajouté. En dépenses, cette section comporte les remboursements d’emprunts ainsi que le montant des crédits d’investissement des programmes de la mission.

En 2016, le montant total du BACEA s’élèvera à 2 114,7 millions d’euros, contre 2 151 en 2015, en baisse de 36,3 millions d’euros, soit - 1,7 %. Cette diminution globale provient de la baisse du recours à l’emprunt pour financer des investissements, grâce à l’amélioration du solde de la section des opérations courantes du budget annexe.

En 2016, le total de cette section des opérations courantes devrait s’élever à 2 0002,1 millions d’euros, en hausse de 18,9 millions d’euros et de 0,94 % par rapport à 2015.

La section devrait dégager un résultat positif de 199,7 millions d’euros, en hausse de 50  par rapport à 2015, alors que le BACEA présentait un déficit d’exploitation de 21,5 millions d’euros en 2013.

Cette amélioration de la capacité d’autofinancement, qui conforte les investissements et diminue le besoin de recours à l’emprunt provient de l’effet combiné de deux phénomènes : le dynamisme des recettes, soutenu par la reprise du transport aérien, et par la modération des dépenses, qui contribue à la maîtrise accrue de la dépense publique. Dès lors, la trajectoire de désendettement du BACEA sur le triennal 2015-2017, amorcée dès 2015, est confortée.

1. Des recettes préservées

Les recettes de la section des opérations courantes sont constituées en premier lieu de différentes redevances acquittées par les acteurs du transport aérien en rémunération des services rendus par la direction générale de l’aviation civile. En outre, le budget annexe perçoit l’essentiel de la taxe de l’aviation civile dont l’assiette repose sur le nombre de passagers et sur le fret embarqués en France. L’évolution de ces recettes est donc directement fonction des perspectives du transport aérien.

Ces recettes sont détaillées dans le tableau ci-après.

ÉVOLUTION DES RECETTES DU BUDGET ANNEXE DU CONTRÔLE ET DE L’EXPLOITATION AÉRIENS

(en millions d’euros)

 

2014

2015

2016

Variation

%

Redevance de route

1 135,5

1 276,2

1 297,4

+ 21,2

+ 1,7 %

Autorité de surveillance

13,5

7,4

     

Redevance pour services terminaux de la circulation aérienne

237,8

237,1

231,6

– 5,5

– 2,3 %

Autorité de surveillance

2,6

1,7

     

Redevances outre-mer

42,8

42

40

– 2

– 4,8 %

Produits exceptionnels de navigation aérienne

47,5

       

Redevance Surveillance et certification

32,9

28,2

28,5

+ 0,3

+ 1,1 %

Taxe d’aviation civile

356,4

373,7

393,9

+ 20,2

+ 5,4 %

Retour du Compte d’affectation spéciale Immobilier

3,8

0,7

0

   

Gestion des taxes pour compte de tiers

5,8

6,2

6,4

+ 0,2

+ 3,2 %

Recette diverses

11,8

10

4,3

– 5,7

– 57 %

Total

1 887,9

1 983,2

2 002,1

18,9

1,0 %

Source : direction générale de l’aviation civile.

● Les redevances de navigation aérienne

La DGAC perçoit, pour les services de navigation aérienne, trois redevances définies par les articles R. 134-1 à R. 134-8 du code de l’aviation civile : la redevance de route (RR), la redevance pour services terminaux de la circulation aérienne (RSTCA métropole et outre-mer), et, depuis 2010, la redevance océanique (ROC).

Le montant de la redevance de route n’est pas fixé par la DGAC seule mais s’inscrit dans un cadre fixé au plan européen : l’article R. 134-1 du code de l’aviation civile renvoie en effet à « l’accord multilatéral signé à Bruxelles le 12 février 1981 et aux dispositions du règlement (CE) n° 1794/2006 de la Commission du 6 décembre 2006 ».

La DGAC détermine des prévisions de coûts conformément à un plan de performance, défini pour une période de 5 ans, actuellement pour la période de référence 2015-2019. Puis, sur la base des hypothèses de trafic, elle déduit un coût unitaire, susceptible de révisions par l’application d’ajustements liés à des écarts entre les données réelles et les données prévues dans le plan de performance (en fonction de l’inflation, du trafic et des coûts). Le coût d’une unité de service, c’est-à-dire de l’heure moyenne de trafic contrôlée s’élevait dans la dernière période de référence à 65,80 euros. Il est porté à 67,75 euros dans la nouvelle période de référence. Cette hausse du tarif procurerait un rendement de 14 millions d’euros en 2016. Le rendement total de la redevance de route s’élèverait à 1 297,4 millions d’euros en 2016, en hausse de 21,2 millions d’euros, soit + 1,7 %.

La redevance pour services terminaux de la circulation aérienne, définie à l’article R. 134-3 du code de l’aviation civile, rémunère les fonctions d’approche finale et d’atterrissage, sur les vingt derniers miles nautiques. La DGAC contrôle plus directement la fixation de ses montants : les tarifs ont été diminués et le produit attendu s’élèvera à 231,6 millions d’euros en baisse de 5,5 millions d’euros, soit – 2,3 %.

Compte tenu des prévisions de trafic actualisées, la recette totale de navigation aérienne métropolitaine pour 2016 est estimée à 1 529 millions d’euros.

Pour 2016, les recettes de navigation aérienne outre-mer sont évaluées à environ 40 millions d’euros dont 29 millions d’euros pour la RSTCA outre-mer. Le solde de 11 millions d’euros provient de la redevance océanique qui concerne particulièrement l’espace aérien Français de la zone Pacifique.

Son produit est en baisse de 4,8 % entre 2015 et 2016, certaines compagnies aériennes contournant l’espace aérien de la Polynésie française afin de ne pas acquitter la redevance, comportement facilité par ailleurs par la baisse du prix du kérosène. Le taux de cette redevance océanique a donc été abaissé afin d’atténuer l’intérêt de ces pratiques et d’accroître le rendement de la redevance.

● La taxe de l’aviation civile

La taxe de l’aviation civile (TAC) a été créée par l’article 51 de la loi n° 98-1266 du 30 décembre 1998 de finances pour 1999 et codifiée à l’article 302 bis K du code général des impôts.

Elle est exigible de chaque entreprise de transport aérien public pour chaque vol commercial. Elle est assise sur le nombre de passagers et la masse de fret et de courrier embarqués en France, quelles que soient les conditions tarifaires accordées par le transporteur.

La loi de finances définit une clé de répartition du produit de cette taxe entre le BACEA et le budget général. L’article 92 de la loi n° 2014-1655 du 29 décembre 2014 de finances rectificative pour 2014 a exonéré de la taxe les passagers en correspondance. L’exonération porte sur 50 % du montant dû en 2015, puis sur 100 % du montant à compter du 1er janvier 2016.

Le produit affecté au BACEA est préservé au moyen d’une modification de la clé de répartition de la recette. La quotité de la taxe qui revient au BACEA a été augmentée, passant de 80,91 % en 2014 à 85,92 % au 1er avril 2015 puis 93,67 % au 1er janvier 2016.

Pour l’année 2016, le produit est estimé à 393,9 millions d’euros pour la part BACEA, en hausse de 20,2 millions d’euros, soit 5,4 %. La part revenant au budget général sera de 26,8 millions d’euros, en retrait de 60 millions en raison de l’exonération complète des passagers en correspondance.

Une contribution spécifique définie en loi de finances concernant
l’Aéroport de Bâle-Mulhouse

Lors de l’examen de la première partie du projet de loi de finances pour 2016, l’Assemblée nationale a adopté un article 20 bis, nouveau, issu d’un amendement n° I–791 du Gouvernement, qui modifie l’article 302 bis K du code général des impôts relatif à la taxe d’aviation civile afin de mieux tenir compte de la situation particulière de l’Aéroport de Bâle-Mulhouse.

Conformément aux stipulations de la convention franco-suisse du 4 juillet 1949, bien que l’aéroport soit installé en territoire français, la Suisse dispose d’une zone douanière et a la faculté d’accorder des droits de trafic de la même façon que pour les aérodromes situés sur son propre territoire.

En vertu de cette convention, la Suisse estime de longue date que les volumes de passagers, fret et courrier pour lesquels elle accorde des droits n’ont pas à être taxés au titre de la taxe sur l’aviation civile. Les compagnies aériennes de la zone suisse ne paient donc aucune taxe aujourd’hui.

Si les 2 658 600 passagers, en 2013, de la zone suisse de l’aéroport de Bâle-Mulhouse payaient la taxe sur l’aviation civile (7,85 euros par passager), le produit de celle-ci serait de 20,8 millions d’euros, selon des calculs établis par les services de la commission des finances et présentés en séance par la Rapporteure générale Valérie Rabault.

À l’issue de négociations commencées en 2010 et menées aux plus hauts niveaux diplomatiques, sur le cadre juridique applicable à l’aéroport de Bâle-Mulhouse, un accord a été signé le 14 avril 2015. Il prévoit qu’à défaut d’acquitter la taxe d’aviation civile, les compagnies aériennes concernées verseront une compensation financière qui rémunérera les seules missions d’intérêt général assurées par la DGAC dans l’aéroport. Assise sur le nombre de passagers, la compensation financière sera de 6 millions d’euros.

Le Rapporteur spécial se félicite de cet accord qui apporte une recette supplémentaire nette pour le BACEA

● La redevance surveillance et certification

Les activités de surveillance et de certification dans les domaines de la sûreté et de la sécurité sont regroupées au sein de l’action 2 du programme 614 Transports aériens, surveillance et certification de la mission.

Ces prestations correspondent à la surveillance des acteurs de l’aviation civile, à la délivrance d’agréments et d’autorisations, de licences ou de certificats nécessaires aux opérateurs. Elles concernent les constructeurs, les ateliers d’entretien, les compagnies aériennes et les exploitants, les aéroports, les personnels (pilotes, contrôleurs, mécaniciens), les organismes de sûreté et les opérateurs de navigation aérienne.

Ces activités sont financées à partir de redevances pour services rendus créées par l’article 120 de la loi n° 2004-1485 du 30 décembre 2004 de finances rectificative pour 2004 (article L. 611-5 du code de l’aviation civile).

Les prévisions de recettes pour 2016 sont estimées à 28,46 millions d’euros, contre 28,1 en 2015 et 32,8 en 2014.

● Les autres recettes

Les autres recettes de la DGAC inscrites sur la section des opérations courantes devraient s’élever à 10,7 millions d’euros en 2016.

Il s’agit tout d’abord des frais d’assiette et de recouvrement sur les taxes perçues pour le compte de tiers : la taxe d’aéroport, qui finance la mise en œuvre, par les aéroports, de mesures de sûreté et de sécurité, la taxe sur les nuisances sonores aéroportuaires, et la taxe de solidarité, qui constitue une majoration de la taxe d’aviation civile perçue au profit du Fonds de solidarité pour le Développement des Nations-Unies (FSD).

Il s’agit enfin de recettes diverses provenant des ventes de produits fabriqués et de marchandises ainsi que de prestations de services.

2. Des charges courantes contenues

L’ensemble des recettes de la section des opérations courantes sont mises en regard des dépenses inscrites sur cette section afin de constituer le solde de gestion : lorsque ce résultat d’exploitation est positif, le BACEA présente une capacité d’autofinancement des investissements, inscrits en dépenses de la section d’opérations en capital et déclinés dans les trois programmes de la mission.

Le redressement des comptes du BACEA provient donc également de l’effort de diminution des charges par la modernisation constante de la DGAC.

La poursuite de la réduction des effectifs du BACEA

Entre 2007 et 2015, la DGAC a supprimé 1 136 emplois (dont 135 pour l’ENAC), soit 10 % de son effectif global ce qui représente, dans le strict respect des règles de sécurité, un effort de productivité substantiel dans la mesure où le trafic aérien a continué à croître.

La diminution des effectifs n’a pas constitué un obstacle au respect d’objectifs techniques, définis au plan européen, de qualité du service à l’égard des compagnies aériennes et de renforcement de l’activité de surveillance notamment des organismes de formation des pilotes.

Au 31 juillet 2015, les effectifs du BACEA comptaient 10 612 ETPT, soit 215 de moins que ce qui était prévu au plafond d’emplois fixé à 10 827 emplois.

À cette date, 78 suppressions d’emplois avaient été réalisées ou étaient en cours sur les 100 prévues par le schéma d’emplois. Compte tenu d’un certain nombre de sorties prévues dans la seconde partie de l’année en cours, le schéma de 100 suppressions d’emplois devrait être respecté en fin d’exercice.

La répartition des ETPT par catégorie d’emplois et par corps, en 2014 et 2015, est présentée dans le tableau ci-après : on constate que les effectifs poursuivent globalement leur décroissance.

EFFECTIFS DU BUDGET ANNEXE CONTRÔLE ET EXPLOITATION AÉRIENS

 

ETPT
au 1er juillet 2012

ETPT
au 1er juillet 2013

ETPT
au 1er juillet 2014

ETPT
au 1er juillet 2015

Écart 2014 - 2015

Personnels d’encadrement et administratif

3 175,6

2 975,5

2 885,6

2 874,50

– 11,1

Ingénieurs du contrôle de la navigation aérienne

4 116,6

4 085

4 062,3

4 038,30

– 24

Ingénieurs électroniciens des systèmes de sécurité aérienne et techniciens supérieurs des études et de l’exploitation de l’aviation civile

3 123,2

3 096,6

3 061,4

3 029,40

– 32

Ouvriers et personnels navigants

584,7

687,3

668,8

669,90

– 1,1

Totaux

11 000,1

10 844,4

10 678,1

10 612,10

– 66

Source : DGAC.

Le schéma d’emplois 2016 prévoit 100 suppressions d’emplois.

Auditionné par le Rapporteur spécial, le directeur général de l’aviation civile a confirmé que ce schéma d’emploi est pleinement compatible avec le développement des compétences de ses services en matière de contrôle du trafic aérien et de surveillance de la sécurité.

Le schéma limite les suppressions dans les corps techniques qui représentent les cœurs de métier de la DGAC. Compte tenu de l’augmentation de l’activité liée aux missions de sécurité et de sûreté, et de l’accroissement de charge qui en résulte, le remplacement des départs à la retraite des corps techniques de la navigation aérienne est maintenu au taux de 80 %. Le respect de ce taux paraît indispensable pour la réalisation de leurs missions.

La modération puis la diminution des dépenses de rémunération

De 2010 à 2015, la diminution continue des effectifs a seulement eu pour effet de contenir l’évolution haussière des dépenses de personnels. L’effort de pilotage infra-annuel a également permis que les dépenses de personnel affichent une exécution inférieure aux crédits ouverts.

Le tableau ci-après détaille ces deux phénomènes et permet de constater une progression des dépenses de rémunération, sur le budget exécuté, inférieure en moyenne à l’inflation jusqu’en 2014. Mais à compter de 2016, on constate une diminution des dépenses de titre 2, ramenés à 1 141,6 millions d’euros en baisse de 4,3 millions d’euros, soit – 0,29 %.

MONTANT DES RÉMUNÉRATIONS ET CHARGES SOCIALES DU BACEA (TITRE 2)

(en millions d’euros)

Titre 2 (AE = CP)

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

Total inscrit en loi de finances initiales

1 100,5

1 087,5

1 104,7

1 137,1

1 138,7

1 144,9

1 141,6

Progression de la dotation

 

– 1,2 %

+ 1,6 %

+ 2,9 %

+ 0,1 %

+ 0,5 %

– 0,29 %

Total exécuté

1 083,05

1 071,69

1 091,3

1 107,69

1 119,33

   

Progression du budget exécuté %

 

– 1,0%

+ 1,8%

+ 1,5%

+ 1,05%

   

Dans sa note sur l’exécution budgétaire des crédits du BACEA inscrits dans la loi de finances pour 2014, la Cour des comptes a constaté l’absence de diminution des dépenses de rémunération, jusqu’en 2015, malgré la réduction des effectifs de 10 % sur la même période. La Cour a relevé l’augmentation symétrique des dépenses de rémunération liées à l’application de protocoles sociaux, particulièrement en raison du reversement aux agents des gains de performances sous forme de primes négociées dans le cadre du protocole social 2013-2015.

Auditionné par le Rapporteur spécial, le directeur général de l’aviation civile a souligné le caractère équilibré de ces accords, dont le coût est estimé à 27 millions d’euros, compte tenu de l’ensemble des efforts qu’ils contribuent à obtenir de la part des différentes catégories de personnels.

LE COÛT DES MESURES CATÉGORIELLES DÉFINIES PAR PROTOCOLES SOCIAUX

(en million d’euros)

Mesures protocolaires

Exécutées en 2014

Prévision d’exécution 2015

Programmation 2016

Mesures (protocoles antérieurs et 2013-2015)

Coût

Protocole

Coût

Protocole

Coût

Protocole

Revalorisation indemnitaire (accompagnement de la modernisation)

 

Antérieurs
et 2013-2015
(au titre des années 2013 et 2014)

 

Antérieurs et

2013-2015

 

Antérieurs

et
2013-2015

Personnels administratifs

1,4

0,35

0,18

Personnels techniques

10,4

5,92

2,55

Ouvriers

0,4

0,20

0,07

Indemnités tous corps (performance collective et redéploiement)

1,1

1,83

1,42

Mesures statutaires corps administratifs et techniques

0,3

0,80

0,34

Emplois fonctionnels administratif et techniques

 

1,07

0,36

Autres mesures (Personnels navigants et non titulaires)

 

0,17

 

SOUS TOTAL

13,6

10,3

4,9

 

Provision 2016 du futur protocole

       

4,0

 

TOTAL

13,6

 

10,3

 

8,9

 

Source : DGAC

L’accord social 2013-2015 comportait par exemple plusieurs axes majeurs de réformes structurelles : la fermeture de 7 des 10 bureaux régionaux d’information aéronautique (BRIA), la fermeture du contrôle aérien dans 10 aérodromes, la suppression de la majorité des délégations territoriales de la direction de la sécurité de l’aviation civile, la mutualisation au sein de services opérationnels de contrôle aérien et enfin la modernisation des fonctions support adossées à des systèmes d’information reposant sur des technologies matures.

Sur la période du protocole 2013-2015, les effectifs des ingénieurs du contrôle de la navigation aérienne auront ainsi diminué de plus de 56 agents alors que sur cette même période, le trafic a cru de 2 % en 2014 et que la tendance est de 1 à 1,5 % sur 2015.

Le Rapporteur spécial souligne que l’indicateur de hausse moyenne du trafic doit par ailleurs être combiné avec celui des pointes de trafic. Les pointes demandent le plus d’effort de la part des équipes et sollicitent le plus l’ensemble des ressources de la DGAC. Or la massification du tourisme et des vols de loisir a pour effet d’accroître le nombre et l’intensité des pointes de trafic en périodes estivales ou pendant les fêtes. Ainsi, les 20 journées les plus chargées de l’histoire de la navigation aérienne française comptent 11 journées en 2015 et 6 en 2014. De même pour les 20 semaines les plus chargées : 9 semaines sont en 2015 et 7 semaines en 2014.

Ces différents éléments permettent de mesurer les efforts consentis par les personnels. Il a été indiqué au Rapporteur spécial que, dans la continuité du protocole 2013-2015, le prochain protocole social devrait permettre d’expérimenter des modifications des cycles de travail visant à accroître la présence des effectifs pendant les périodes de pointe, les journées supplémentaires étant rattrapées lors des périodes de moindre trafic. Ces évolutions peuvent rendre plus difficile la conciliation entre la vie personnelle et la vie privée : une contrepartie financière pourrait donc être négociée.

Le financement de ces mesures absorbera, en grande partie, les économies réalisées par les schémas d’emplois des années précédentes. Le prochain protocole social permettra également de conforter la poursuite des grandes actions de restructuration et de modernisation. À cet effet, une réserve protocolaire d’un montant de 4 millions d’euros a été constituée en 2016 qui ne fait pas obstacle à la diminution globale des dépenses de personnels.

Le ciblage des économies de fonctionnement

Les dépenses d’exploitation du budget annexe sont constituées aux deux tiers de dépenses opérationnelles directement liées aux prestations de navigation aérienne, donc à des exigences de sécurité et de performance qui les rendent difficilement compressibles.

Parmi ces postes de dépenses obligatoires figurent les coûts de formation liés à des règles statutaires ou réglementaires de maintien de compétences (licence de contrôle et autorisation d’exercice). Ceci est le gage du respect des niveaux de sécurité mais aussi de l’adaptation des agents aux procédures de circulation aérienne en vigueur dans la zone d’exercice de leur contrôle.

De même, le maintien en condition opérationnelle des outils de gestion des flux et du trafic (fluides, télécommunications, entretien des bâtiments) nécessitent, dans le respect des obligations réglementaires, de consacrer des moyens financiers importants.

Les mesures de réduction des dépenses ne peuvent donc s’appliquer que sur des postes de fonctionnement courant, sans porter préjudice à l’exercice des missions incombant à la DGAC.

Le tableau ci-après indique, pour diverses charges d’exploitation, les baisses significatives des dépenses de fonctionnement constatées entre la loi de finances pour 2015 et le projet de loi de finances pour 2016.

ÉVOLUTION DES DÉPENSES DE FONCTIONNEMENT DU BACEA

(en millions d’euros)

Dépenses

Titre

LFI 2015

PLF 2016

Écart

%

Dépenses d’exploitation (T3)

T3

155,7

152,6

– 3,1

– 2,0 %

Subventions diverses (T6)

T6

4,2

4,1

– 0,1

– 2,0 %

Sous total charges de fonctionnement

159,9

156,7

– 3,2

– 2,0 %

Conventions organismes extérieurs (OE)

T3

227,9

221

– 6,9

– 2,0 %

Subvention opérateur ENAC

T3

96,7

94,9

– 1,8

– 2,0 %

Sous total OE et ENAC

324,6

315,9

– 8,7

– 2,7 %

Total

484,5

472,6

– 11,9

– 2,5 %

Source : DGAC.

On constate une diminution globale de 2,5 % de ces dépenses entre 2015 et 2016, ce qui représente une économie de 11,9 millions d’euros.

Les dépenses liées aux conventions avec les organismes extérieurs (Eurocontrol, Météo France, etc.), par nature peu élastiques, se verront néanmoins appliquer un taux de diminution de 2 %. L’effort demandé aux opérateurs de l’État s’applique également à la subvention pour charges de service public versée à l’École Nationale d’Aviation Civile, opérateur rattaché au programme 613 Soutien aux prestations de l’aviation civile.

3. Une dynamique de désendettement et d’investissement

De 2005 à 2014, le DGAC a recouru de façon croissante à l’emprunt. L’emprunt ne permettait pas seulement de financer des dépenses d’investissement mais palliait également un déficit de la section des opérations courantes du BACEA et finançait donc des dépenses de fonctionnement.

Les emprunts souscrits auprès de l’Agence France Trésor (AFT) étaient inférieurs à 100 millions d’euros par an jusqu’en 2005 mais ont cru rapidement pour dépasser 200 millions d’euros, atteignant même 282 millions d’euros en 2009.

Le maintien d’un déficit de la section des opérations courantes entre 2007 et 2014 découlait du choix de ne pas augmenter les montants des redevances aéronautiques dans le contexte de récession économique.

En 2012, la DGAC a dû procéder à un allongement de la durée d’amortissement des emprunts contractés à partir de 2011, porté à 12 ans contre 8 ou 10 ans auparavant. La Cour des comptes avait alors évoqué une « spirale de surendettement » et appelé à une maîtrise de la dette du budget annexe.

L’évolution annuelle de l’endettement se mesure par l’écart entre l’amortissement financier, c’est-à-dire le remboursement du capital des emprunts contractés, et les emprunts supplémentaires. La diminution de l’endettement du BACEA à partir de 2015 provient d’une diminution des montants empruntés conjointement à une hausse des remboursements d’emprunts arrivés à maturité.

Le tableau ci-après décrit l’évolution de l’endettement du BACEA depuis 2007.

ÉVOLUTION DE L’ENDETTEMENT DU BACEA DEPUIS 2007

(en millions d’euros)

 

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

LFI
2015

PLF 2016

Emprunts
contractés

103

104

282

251

194

250

248

267

168

112

Remboursements d’emprunts

104

104

108

154

182

197

223

225

225

219

Endettement net
au 31 décembre

878

878

1 052

1 148

1 161

1 214

1 239

1 282

1 224

1 117

Évolution annuelle

– 0,1 %

0,0 %

19,8 %

9,2 %

1,1 %

4,6 %

2,1 %

3,5 %

– 4,5%

– 8,8 %

Source : DGAC.

La modération de l’emprunt provient en premier lieu de l’augmentation de la capacité d’autofinancement. En 2013, le BACEA enregistrait encore un déficit d’exploitation de 21,5 millions d’euros : sur les 248 millions d’euros empruntés en 2013, 21,5 couvraient donc des dépenses de fonctionnement. L’année suivante, la section des opérations courantes enregistre un excédent de 49,7 millions d’euros principalement sous l’effet des mesures d’économie. Cet autofinancement s’est ajouté à un montant d’emprunt en hausse, à 267 millions d’euros, nécessaire à la relance des investissements, ce qui à nouveau conduit à une hausse de l’encours de dette.

À partir de 2015, sous le double effet de la poursuite des économies en gestion et de la hausse de la tarification des services aux prestataires de navigation aérienne, le solde de la section des opérations courantes s’améliore et permet d’accroître l’autofinancement qui passe de 148,9 millions d’euros en 2015 à 199,6 en 2016.

Les nouveaux emprunts souscrits auprès de l’AFT s’élèveront à 112,6 millions d’euros en 2016 contre 167,9  en 2015 en baisse de 55,25 millions d’euros en un an (- 32,9 %).

L’amortissement du capital prend en compte exclusivement les échéances contractuelles de remboursement du principal, y compris celles relatives à une convention d’avance conclue avec l’AFT. Alors que les amortissements étaient stabilisés à 225 millions d’euros depuis 2013, ils diminuent en 2016, portés à 219,6 millions d’euros, en baisse de 5,47 millions d’euros (– 2,43 %).

Il en résulte une diminution des charges financières, enregistrées en dépense sur la section des opérations courantes : elles passent de 35 millions d’euros en 2015 à 28,2 à 2016, en retrait de 6,8 millions d’euros soit 19,4 %.

Le Rapporteur spécial se félicite de ce chaînage vertueux du désendettement : la diminution des charges financières permet d’améliorer le solde du compte des opérations courantes, donc l’autofinancement, ce qui réduit d’autant les besoins de recours à des nouveaux emprunts pour financer l’investissement et contribue à réduire l’encours de la dette.

Après une hausse de 41,8 millions d’euros de la dette du BACEA en 2014, la loi de finances initiale pour 2015 a prévu une diminution de 57,2 millions d’euros. Le projet de loi de finances pour 2016 prévoit une diminution de 107 millions d’euros, en hausse de 85 %.

Au 31 décembre 2016, l’encours de dette du budget annexe s’élèverait ainsi à 1 117,2 millions d’euros, contre 1 224,27 au 31 décembre 2015 et 1 281,46 millions d’euros un an plus tôt. L’encours de la dette diminuera ainsi de 8,8 % en 2016 et de près de 13 % depuis 2014.

Le projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances présente un objectif 5 visant la maîtrise de l’endettement du budget annexe qui comporte un indicateur : le ratio endettement sur recettes d’exploitation. Il a baissé de 5,7 points entre 2014 et 2016 et devrait baisser de 5,9 points en 2016 pour atteindre 55,8 %.

Le graphique ci-après, qui décrit l’évolution de l’encours de dette depuis la loi de finances pour 2005, montre la poursuite de la trajectoire de désendettement initiée par la loi de finances pour 2015 et accentuée en 2016.

ÉVOLUTION DE L’ENDETTEMENT NET AU 31 DÉCEMBRE DE CHAQUE ANNÉE

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Source : ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie.

Le Rapporteur spécial se félicite de ce résultat qui n’est pas seulement dû à une progression des recettes d’exploitation mais également aux efforts d’économies sur les dépenses de fonctionnement.

La poursuite de ces efforts est d’autant plus nécessaire que la DGAC ne bénéficie pas de façon significative d’autres recettes susceptibles de contribuer au désendettement. Depuis 2011, par convention avec le service des domaines, le budget annexe perçoit la totalité des produits de cessions immobilières des biens occupés par la DGAC. L’intégralité de ces recettes est affectée au désendettement. À ce titre, la loi de finances pour 2014 prévoyait 3,8 millions d’euros de produits exceptionnels, mais le projet de loi de finances pour 2015 n’a envisagé qu’une recette de 700 000 euros et aucune recette n’est inscrite à ce titre en 2016 : la DGAC ne dispose en effet pas de biens immobiliers non affectés aux besoins des services susceptibles de procurer un produit significatif.

Ce désendettement conforte la stratégie de la DGAC en matière d’investissements, déclinés ci-après, dans les trois programmes de la mission, et qui représenteront, en 2016, un total de 252 millions d’euros, niveau en léger repli de 5 millions d’euros, mais conforme à la programmation pluriannuelle des principaux programmes d’investissements.

4. Le programme 612 Navigation aérienne

Le programme Navigation aérienne regroupe les activités du service à compétence nationale Direction des services de la navigation aérienne (DSNA) chargé de fournir les services de circulation aérienne, de communication, de navigation et de surveillance ainsi que les services d’information aéronautique aux aéronefs évoluant dans l’espace aérien géré par la France.

La maquette de ce programme est modifiée dans le projet de loi de finances pour 2016 afin de répondre aux remarques de la Cour des comptes formulées lors du contrôle portées sur le pilotage des investissements. La nouvelle maquette doit rendre les documents budgétaires plus lisibles et simplifier la gestion budgétaire tant en prévision qu’en exécution.

Quatre des six actions sont supprimées, l’ensemble étant rassemblé dans deux actions maintenues qui sont les suivantes :

– Action 1 Soutien et prestations externes de la navigation aérienne : elle regroupe les dépenses des services de support, pour le fonctionnement comme pour l’investissement, ainsi que les subventions aux organismes extérieurs. Sur cette action, les dépenses de fonctionnement et d’intervention atteignent 247,3 millions d’euros en 2016, en autorisations d’engagement comme en crédits de paiement, contre 3,4 pour les dépenses d’investissement.

 Action 2 Exploitation et innovation de la navigation aérienne : Elle regroupe en fonctionnement, le maintien en conditions opérationnelles (MCO) des systèmes et en investissement, les grands programmes de la navigation aérienne. Si la maintenance de ces systèmes nécessitera, en 2016, 77,1 millions d’euros en autorisations d’engagement et 72,9 en crédits de paiement, l’essentiel des dépenses provient des investissements, qui s’élèveront à 210 millions d’euros en autorisations d’engagement et 220 en crédits de paiement.

En effet, ce programme porte non seulement les crédits nécessaires au maintien en condition opérationnelle des systèmes actuels ou la modernisation des infrastructures mais également les investissements considérables nécessaires pour assurer la convergence technique au standard européen requis pour le FABEC (bloc d’espace fonctionnel de navigation aérienne au centre de l’Europe) comme pour le programme SESAR (Single European Sky ATM Research), le volet technologique des règlements dits « Ciel unique européen ».

Le financement du déploiement d’un nouveau système complet de gestion du trafic aérien correspond donc à une obligation européenne. Il devrait aussi permettre d’économiser, à terme, des dépenses de maintien en condition opérationnelle, les systèmes actuellement en service étant particulièrement coûteux à cet égard, à hauteur de 90 millions d’euros par an.

Sur le programme 612, l’ensemble des investissements s’élèveront donc à 213,4 millions d’euros en autorisations d’engagement et à 223,4 en crédits de paiement. Ils permettront de poursuivre les travaux relevant de quatre programmes majeurs de modernisation des systèmes techniques qui impactent le budget d’investissement pour les années à venir :

– « 4-FLIGHT » : il s’agit du renouvellement du système informatique de gestion du trafic aérien des centres de contrôle en route et des deux grandes approches de la région parisienne d’ici 2020. Ce programme est la première étape de la mise en œuvre par la France du programme européen SESAR de modernisation des systèmes de navigation aérienne ;

– le programme Communications Sol/Sol sous IP a pour objet de renouveler les réseaux de communications sol-sol. Lancé en 2005 afin de préparer la migration des télécommunications sous Internet Protocol (IP), ce projet qui devait aboutir fin 2014, a à nouveau pris du retard compte tenu des difficultés rencontrées en matière de sûreté informatique et de cyber-sécurité. Il a dû intégrer de nouvelles obligations réglementaires en la matière. La mise en service opérationnelle de l’ensemble des communications (voix et données) sur le nouveau réseau est prévue en 2018 ;

– le programme SESAR mis en œuvre par la Commission Européenne et Eurocontrol, l’Organisation européenne pour la sécurité de la navigation aérienne, conformément aux règlements dits « Ciel unique européen ». Ce programme a pour objectif de développer pour les 30 prochaines années une nouvelle génération du système de gestion du trafic aérien européen sûre et performante, moins coûteuse et respectant les conditions d’un développement durable ;

– le programme SYSAT, « Nouveaux systèmes spécifiques tours et approches », est destiné à moderniser les approches aériennes avec les tours qui ne bénéficieront pas du système 4-FLIGHT. Sa mise en œuvre est prévue 2018 ou 2019 pour les tours et approches de la région parisienne (Charles de Gaulle/le Bourget et Orly) et se poursuivra jusqu’en 2022 pour l’ensemble des autres tours et approches concernées de la métropole.

5. Le programme 614 Transports aériens, surveillance et certification

Ce programme rassemble trois actions disparates et de poids inégaux : l’action Développement durable et régulation vise à réduire les nuisances sonores et les émissions gazeuses ; l’action Surveillance et certification, intervient en matière de sécurité tandis que l’action Enquêtes de sécurité aérienne finance le Bureau d’enquêtes et d’analyses (BEA) qui exerce une mission d’analyse des accidents et incidents graves.

Les crédits de l’action 1 Développement durable et régulation, sont stabilisés à 17,1 millions d’euros, comme en 2015.

Les dépenses de fonctionnement, pour 9,5 millions d’euros, permettent de couvrir les dépenses nécessaires au fonctionnement courant et à l’accomplissement des missions de la direction du transport aérien, du service technique de l’aviation civile et de la gendarmerie du transport aérien. Ces crédits sont en diminution de 2 % mais l’effet est masqué par une mesure de périmètre : depuis le programme 613 sont désormais rattachés à l’action 1 du programme 614 les crédits destinés au fonctionnement de la représentation du ministère chargé des transports auprès de l’ambassade de France aux États-Unis, pour 100 000 euros en autorisations d’engagement comme en crédits de paiement.

Les crédits d’investissement, inchangés à 7,6 millions d’euros, permettent de poursuivre, d’une part le développement de la nouvelle application de gestion des habilitations et titres de circulation pour l’accès en zone réservée des aéroports et, d’autre part, la construction d’un laboratoire de test et de certification des équipements destinés à détecter les explosifs artisanaux liquides : les travaux de construction débutés en 2014 sur le site du service technique de l’aviation civile (STAC) à Biscarosse s’achèveront en 2016. Des études seront engagées en 2016 pour la phase de détection des explosifs solides.

En outre la DGAC versera, en 2016, les contributions qu’elle doit pour les exercices 2014, 2015 et 2016 au titre de sa contribution, à hauteur de 20,5 % au projet des données des dossiers passagers. Ce projet interministériel de bases de données, qui vise à construire le « passenger name record » (PNR) européen, est essentiel pour mieux repérer les déplacements des individus dangereux et améliorer ainsi la sécurité des transports. Le pilotage de ce projet relève du secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale et les différentes contributions sont inscrites sur des programmes relevant des ministères de l’intérieur, de la défense et des finances et des comptes publics au titre de la direction générale des douanes et des droits indirects. La DGAC versera plus de 3 millions d’euros en 2016, inscrits sur les dépenses d’investissement, l’état d’avancement du projet n’ayant pas permis d’apporter les contributions prévues les années précédentes. Le solde, à verser en 2017, devrait s’élever à 1,9 million d’euros.

L’action Surveillance et certification regroupe les dépenses de fonctionnement (hors action sociale) et les dépenses d’investissement de l’ensemble des services de la direction de la sécurité de l’aviation civile (DSAC) (dont Antilles-Guyane et Océan Indien) et des services d’outre-mer (Polynésie française et Nouvelle Calédonie) pour leurs activités liées à la surveillance et à la certification dans les domaines de la sécurité, de la sûreté et de l’environnement. En 2016, la dotation initiale inscrite sur cette action est de 24,3 millions d’euros en autorisations d’engagement et 24,1 en crédits de paiements, en diminution, respectivement de 2,1 et 3,1 millions d’euros par rapport à 2015.

Cette diminution provient des économies de fonctionnement. Les dépenses d’investissement sont maintenues à un niveau inchangé par rapport à 2015, à 4,3 millions d’euros, en autorisations d’engagement comme en crédits de paiements, afin de poursuivre le déploiement d’un nouveau système d’information de la surveillance de l’aviation civile et d’accentuer la rénovation du parc automobile et de certains bâtiments de la DSAC.

Enfin, les crédits de l’action Enquête de sécurité aérienne qui regroupe le budget annuel du Bureau d’Enquêtes et d’Analyses pour la sécurité de l’aviation civile s’élèvent à 2,9 millions d’euros, en baisse de 50 000 euros, soit
– 1,6 %, par rapport à 2015. Le développement de l’activité aérienne au plan mondial et les succès commerciaux des constructeurs aéronautiques français conduisent à une augmentation du nombre d’accidents ou d’incidents graves sur lesquels le BEA est amené à intervenir ou enquêter. Mais outre ses interventions sur des accidents ou des incidents impliquant des aéronefs de construction française, le BEA peut intervenir en raison du soutien apporté par la France dans des situations impliquant d’autres aéronefs, comme lors de l’enquête sur la disparition du Boeing 777 de la compagnie Malaysia Airlines.

Les crédits de fonctionnement couvrent des contrats de maintenance des équipements, la formation des enquêteurs, les équipements de sécurité et la protection des données traitées par les systèmes d’information. Pour près de 550 000 euros, les dépenses d’investissement permettront d’acquérir des matériels de laboratoire et des enregistreurs de vols et de financer un hangar provisoire sur le site du siège du BEA.

6. Le programme 613 Soutien aux prestations de l’aviation civile

Ce programme opère au bénéfice des deux autres programmes de la mission une gestion mutualisée de l’ensemble des ressources humaines et des fonctions de gestions financière et juridique. Il centralise également les moyens de la politique immobilière et le pilotage des systèmes d’information de la mission.

Les crédits du programme sont les plus élevés du budget annexe : 1 536,3 millions d’euros en autorisations d’engagement en 2016, en retrait de 22 millions d’euros par rapport à 2015, soit – 1,4 %, avec la même évolution en crédits de paiement, mais pour un montant inférieur de 400 000 euros.

Le principal poste du programme est constitué par les rémunérations et charges sociales de l’ensemble du BACEA. Elles représentent 74,2 % des dépenses du programme : 1 141 millions d’euros en autorisations d’engagement comme en crédits de paiement, en diminution de 3,2 millions d’euros par rapport à 2015 (– 0,28 %).

Le budget d’investissement (hors gestion de la dette et hors ENAC) s’élèvera à 16,7 millions d’euros, en autorisations d’engagement comme en crédits de paiement, ce qui reconduit les montants inscrits en 2015. La réduction est permise par l’arrivée à maturité des grands projets stratégiques de modernisation dans les domaines de la gestion financière et des ressources humaines. Le nouveau système d’information financière (SIF) initié en 2011 est un progiciel de gestion intégrée équivalent au système CHORUS utilisé pour le budget général mais qui comporte, outre une comptabilité générale, une comptabilité analytique et une comptabilité des immobilisations. Le système d’information pour les ressources humaines est en phase de préconception.

Les crédits inscrits pour 2016 permettent en outre la poursuite d’une opération de réfection lourde du siège de la direction de l’aviation civile en Nouvelle Calédonie pour un montant de 300 000 euros en autorisations d’engagement et de 1,3 million d’euros en crédits de paiement.

Les dépenses de fonctionnement et d’intervention diminuent de 800 000 euros en autorisations d’engagement comme en crédits de paiement, soit – 2 %, en raison du renforcement de la coordination et de l’intégration des fonctions achats ainsi que de la mutualisation des marchés. Des économies peuvent être constatées dans les dépenses d’utilisation des bâtiments et des véhicules : une démarche de maîtrise des coûts des déplacements professionnels semble porter ses fruits.

La subvention pour charges de service public de l’ENAC

Depuis 2013, c’est également sur ce programme qu’est imputée la subvention versée annuellement à l’école nationale de l’aviation civile (ENAC), unique opérateur de la mission.

Créée en 1949 et localisée depuis 1968 sur un espace de 20 hectares à Toulouse, l’ENAC, établissement public à caractère administratif, est placée sous la tutelle du ministère chargé des transports. Sa mission principale est de répondre aux besoins de formations initiales et continues de la DGAC en particulier pour ses personnels techniques : ingénieurs ENAC, ingénieurs du contrôle de la navigation aérienne, ingénieurs électroniciens des systèmes de la sécurité aérienne, techniciens supérieurs des études et de l’exploitation de l’aviation civile.

Mais, au-delà des besoins de formation de la DGAC, l’ENAC forme également à la plupart des métiers du transport aérien et accompagne ainsi les besoins de formation de l’ensemble des acteurs publics et privés de ce domaine. L’école rassemble aujourd’hui 2 000 élèves répartis dans 25 programmes de formation (ingénieur, pilote de ligne, contrôleur aérien, etc.). Elle accueille également 7 500 stagiaires qui participent chaque année à plus de 400 sessions de stages de formation continue ou de perfectionnement. Ses activités internationales et sa dizaine de laboratoires de recherche conduisent en outre l’école à accueillir chaque année plusieurs centaines d’élèves et de stagiaires étrangers.

La subvention pour charge de service public inscrite au programme 613 s’élèvera, en 2016, à 93 millions d’euros, en baisse 1,9 million d’euros par rapport à 2015, soit – 2 %, conformément à la règle établie pour tous les opérateurs de l’État. L’ENAC percevra également 1,3 million d’euros du programme 612 et 456 000 euros du programme 614, l’addition de ces deux montants étant stable par rapport à 2015. Au total, l’ENAC percevra 94,9 millions d’euros en autorisations d’engagement comme en crédits de paiement.

En 2015, les ressources propres de l’établissement devraient atteindre 34,8 millions d’euros, dont 11,9 millions au titre des droits de formation initiale, 5,1 pour la formation continue, 1,6 pour la taxe d’apprentissage. Sous réserve de maintien de ce niveau de ressources propres, la subvention pour charges de service public représentera 68,4 % du budget de l’établissement.

La subvention d’exploitation atteindra 88,4 millions d’euros en 2016, en hausse de 1,6 %. Dans cet ensemble la subvention de personnel est stable à 76,7 millions d’euros, l’économie de 1,7 million d’euros au titre de l’application du schéma d’emploi étant compensée par l’effet du glissement vieillesse technicité solde positif à hauteur du même montant. En effet, conformément au cadre fixé dans le triennal 2015-2017, l’ENAC réduit le nombre de ses emplois sous plafond qui passent ainsi de 828 ETPT en 2015 à 812 en 2016. Parmi ces emplois sous plafond, les emplois subventionnés par la DGAC passent de 818 ETPT en 2015 à 802 (– 2 %) en 2016, alors que les emplois financés par des ressources propres sont stabilisés à 10 ETPT.

La subvention de fonctionnement est en hausse de 800 000 euros, portée à 11,7 millions d’euros, pour compenser de mesures techniques de couverture d’amortissements au compte de résultat.

Enfin la subvention d’investissement est portée à 6,46 millions d’euros, contre 8,3 millions en 2015, en retrait de 22 %. Cette enveloppe devrait permettre de financer les projets d’investissement prioritaires de l’établissement par ailleurs engagé dans une démarche de recherche de financements additionnels dans le cadre des contrats de Plan État-Région.

II. COMPÉTITIVITÉ DU TRANSPORT AÉRIEN FRANÇAIS : UN EFFORT COLLECTIF

Le secteur du transport aérien représente près de 2 % du produit intérieur brut en France, et atteint 3,2 % en tenant compte des constructeurs aéronautiques. Ce secteur est un atout pour notre pays et le fruit de plus d’un siècle d’investissements et d’innovation dans un domaine où la France a été pionnière.

Or ce secteur est aujourd’hui fragile, selon un constat dressé de manière concordante, en 2013 dans un rapport établi par M. Claude Abraham pour le Centre d’analyses stratégique, Les compagnies aériennes européennes sont-elles mortelles ? Perspective à 20 ans et, en octobre 2014, par le groupe de travail sur la compétitivité du transport aérien français présidé par le député Bruno Le Roux qui a remis un rapport au ministre chargé des transports.

Au regard du contexte de croissance mondiale du transport aérien, le Rapporteur spécial estime que les difficultés peuvent être surmontées.

L’action résolue des pouvoirs publics doit pouvoir contribuer à améliorer la situation des acteurs français au regard de leurs concurrents, en garantissant le cadre d’une concurrence loyale. Tous les acteurs doivent contribuer à alléger les charges qui pèsent sur le secteur, tout en continuant à investir. Mais les clés du redressement résident dans la compagnie Air France elle-même, qui doit renouer le dialogue social afin de capitaliser sur les efforts déjà accomplis.

1. La croissance mondiale bénéficie insuffisamment à la France

Selon l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI) 3,3 milliards de passagers ont été transportés en 2014, en hausse de 6,5 %. Le trafic a atteint 6 145 milliards de passagers-kilomètres transportés (PKT), contre 3 038 en 2000, soit un doublement en 14 ans. Le taux de croissance annuel moyen s’établit à 5,2 %, à raison de 5,6 % pour le trafic international et 4,5 % pour le trafic intérieur.

La région Asie/Pacifique, qui représentait 24 % du trafic en 2000, affiche pour la période 2000-2014 un taux de croissance de 7,1 % : elle représente 32 % du trafic en 2014.

Avec 1 660 milliard de PKT et 872 millions de passagers en 2014, l’Europe, Russie et Turquie comprises, représente 27 % du trafic mondial. Elle a connu entre 2000 et 2014 un taux de croissance de 5,3 %, un peu supérieur à la moyenne. La croissance est plus faible en Amérique du Nord, qui croît de 2 %, puisque le marché est depuis longtemps plus mature que dans les autres régions.

Le transport aérien en France a enregistré en 2014 une hausse de 2,9 % du nombre de passagers, favorisée par la légère baisse du prix du transport aérien
(– 0,2 %), et un contexte économique favorable au niveau mondial.

Le trafic a été affecté par la grève des pilotes d’Air France survenue en septembre 2014 mais la hausse constatée en 2014 reste supérieure à la croissance annuelle moyenne de 2,6 % entre 2000 et 2014.

NOMBRE DE PASSAGERS TRANSPORTÉS EN FRANCE EN 2014

(en millions d’euros)

 

2014

ÉVOLUTION / 2013

Intérieur Métropole

23,8

– 2,3 %

Métropole-outremer

3,8

– 0,5 %

Métropole-international

112,7

+ 4,2 %

dont Union européenne

63,7

+ 5,3 %

Total

140,3

+ 2,9 %

Source : direction générale de l’aviation civile

Comme le montre le tableau ci-avant, cette croissance est uniquement due au trafic international, compte tenu de la baisse du trafic intérieur français entre son point haut, atteint en 2000 (26,9 millions de passagers) jusqu’à son étiage de 2010 (21,7 millions) : c’est principalement la conséquence de la mise en service des TGV Méditerranée, en 2001, et Est, en 2007.

La part des liaisons intérieures radiales, depuis le « hub » de Paris-Charles-de-Gaulle, est passée de 19,1 % du trafic total de l’hexagone en 2002 à 11,5 % en 2014. La part des lignes transversales est passée de 5,3 % à 5,4 %, favorisée par les compagnies à bas coûts et les bases régionales d’Air France. En 2013, ce trafic a augmenté de 2,1 % mais il a diminué de 2,3 % en 2014, à nouveau en raison de la grève de septembre 2014. La part des lignes vers l’Union européenne est passée de 39,7 % à 45,4 %, tirées par le développement des compagnies à bas coûts.

Cette situation est confirmée par les résultats du premier semestre 2015. La croissance du nombre de passagers au premier semestre est estimée à 2,4 %. Le trafic intérieur est en légère baisse (– 0,4 %), mais on relève une augmentation significative du trafic international (+ 3,2 %) : les hausses notables sont enregistrées vers l’Inde (+ 24,1 %), la Chine (+ 12,5 %) et l’Union européenne (+ 5,5 %), mais le conflit Ukrainien entraîne une baisse vers la Russie (– 18,1 %).

Eurocontrol prévoit pour 2015 une progression des mouvements de 1,3 % pour la France et de 1,5 % pour l’Europe. Pour 2016, une augmentation de 3 % est prévue en Europe, dont 2,9 % pour la France. Les croissances les plus fortes seront toujours dans l’est de la zone européenne, dont 6,6 % en Turquie.

En 2015, la croissance du trafic de passagers serait de l’ordre de 3 % en France, la hausse modérée des mouvements étant combinée à la part croissante dans ces mouvements d’avions transportant un plus grand nombre de passager.

Le trafic aérien mondial devrait croître globalement de 6,7 % en 2015, avec des hausses de 12,9 % au Moyen-Orient, de 8,1 % dans la zone Asie-Pacifique.

● La fragilisation d’Air France : un risque pour l’économie française

Le chiffre d’affaires du groupe Air France- KLM s’élève à 24,9 milliards d’euros en 2014, en baisse de 2,4 % par rapport à l’année 2013.

Air France enregistre une croissance continue de ses activités de services de maintenance d’aéronefs, qui emploient 8 300 salariés en France, pour 1,4 milliard d’euros de chiffre d’affaires en 2014, qui la placent au second rang mondial du secteur : cette activité de service bénéficie donc de la croissance globale du secteur.

Mais les postes de l’activité de transport sont en retrait : dont les activités de passagers réguliers (18,7 milliards d’euros de chiffres d’affaires en 2014, en baisse de 2,51 %) et de fret (2,6 milliards d’euros de chiffres d’affaires en 2014, en baisse de 6,5 %). L’ensemble de l’activité de transport aérien est en baisse de 2,95 %, pour un chiffre d’affaires de 22,25 milliards d’euros.

Au regard de ses charges, la stagnation de l’activité du groupe tout au long de la décennie 2000 a entraîné des pertes d’exploitation récurrentes et croissantes et une envolée de la dette, qui atteint 5,4 milliards d’euros en 2014. Ces résultats se sont progressivement améliorés. En 2014, on constate une perte de 198 millions d’euros, contre 1 827 millions d’euros en 2013.

Si le groupe n’a pas de problèmes de liquidités en raison de son niveau de trésorerie et des lignes de crédit disponibles à court terme, la situation financière freine son développement. Afin de baisser ses coûts, la compagnie a renoncé à renouveler une partie de sa flotte et a commencé à la réduire tout en continuant de perdre de parts de marché.

Les parts de marché d’Air France représentent 44,8 % en nombre de passagers en 2014 contre 46,6 % en 2013. Elles ont diminué de 1,5 point sur le réseau intérieur, de 1,1 point sur les liaisons dans l’Union européenne et de 1,3 point sur les liaisons internationales.

Air France emploie plus de 55 000 salariés en France et son activité induit plus de 300 000 emplois sur le territoire national. Hors avions et carburant, 68 % des achats du groupe sont effectués en France, pour 1,9 milliard d’euros. Les retombées économiques ont été estimées, en 2013, à 26 milliards d’euros, soit 1,4 % du produit intérieur brut.

55 % des passagers transportés sont étrangers et Air France contribue à hauteur de 1,7 milliard d’euros à la balance des paiements : le « pavillon français » est l’expression de notre savoir-faire et véhicule l’image de la France dans le monde. Son rôle est crucial pour la desserte et l’attractivité du territoire, particulièrement au regard du développement du tourisme, qui est un des objectifs stratégiques d’augmentation de l’activité et de l’emploi dans notre pays.

Tous les pays qui ont connu une disparition de leur pavillon national, ou une absorption par une autre compagnie (tels la Suisse ou l’Italie) ont constaté une diminution de la « connectivité » de leurs grands centres aéroportuaires, leurs « hubs » : la connexion aux principales destinations mondiales, et donc aux courants d’affaires, a diminué, nécessitant de recourir à des correspondances via des hubs étrangers. Ceci constitue un handicap de long terme pour la compétitivité économique.

Au contraire, le développement des plates-formes aéroportuaires est un multiplicateur d’emplois, l’augmentation d’un million de passagers permettant la création de 1 000 emplois directs et 4 000 emplois totaux. L’avenir du pavillon français et donc indissociable de celui des aéroports français, puisqu’Air France est le principal contributeur de leur chiffre d’affaires.

● Airbus : principal bénéficiaire Français de la croissance mondiale

La hausse globale du trafic aérien mondial garantit des débouchés aux constructeurs. La hausse des commandes provient également de la nécessité pour les compagnies aériennes de renouveler et de diversifier leurs flottes pour améliorer la qualité de services et leurs performances en matière de développement durable.

Le groupe Airbus en bénéficie particulièrement au titre des activités d’aéronautique civile de sa division Airbus (1) dont le centre de gravité se trouve en France : 93 % des près de 139 000 salariés du groupe en 2014 se trouvent en Europe, et près de 52 000 (37 %) en France. La participation de l’État français s’élève à 10,9 % du capital.

La division de l’aéronautique civil présente un chiffre d’affaires de 42,3 milliards d’euros en 2014. Elle emploie près de 74 000 salariés. Les commandes adressées au groupe en 2014 atteignent 150 milliards d’euros, pour près de 1 500 aéronefs, déclinés entre le transport de passager, monocouloirs ou gros porteurs, et les avions cargos. 629 unités ont été livrées en 2014. Le carnet de commande atteint 803 milliards d’euros et représente plus de dix années d’activité. Il est six fois plus élevé qu’en 2000.

Le groupe Airbus a donc pu investir dans les dépenses de recherche et développement qui sont passées de 1,3 milliard d’euros en 2000 à 3,4 milliards d’euros en 2014 ce qui constitue sa meilleure garantie de croissance à l’avenir.

Le groupe Airbus possède 50 sites industriels sur l’ensemble du territoire français. Les sites du bassin Toulousain emploient 27 200 personnes et contribuent à la ré-industrialisation de départements tels que l’Ariège et le Lot. On compte également 9 200 emplois autour de Marignane, 9 000 dans le bassin parisien et près de 6 000 autour de Nantes et Saint-Nazaire, qui sont en fort développement. L’activité du groupe représente 12 milliards d’euros de commandes à 9 300 sous-traitants et 1,5 milliard d’euros d’investissements. Les approvisionnements du groupe en France s’élèvent à 12,5 milliards d’euros.

La stratégie d’Airbus se fonde sur le développement incrémental de la famille des avions existants, par le développement de technologies moteurs, de nouveaux systèmes et de matériaux. Pour les différentes catégories d’aéronefs, Airbus a développé des modèles dits néo qui permettent aux compagnies aériennes d’accroître les capacités par avion, en réponse aux enjeux de saturation de certains espaces aériens et pour diminuer les coûts unitaires de transport.

2. Les nouvelles formes de concurrence pénalisent le pavillon français

Depuis le début de la décennie 2000, Air France a été confrontée à la double concurrence, d’une part des compagnies à bas coût pour les activités de moyen-courrier, et d’autre part des nouveaux transporteurs du Golfe, pour les activités de long-courrier vers les zones de forte croissance.

● Le secteur à bas coût contribue à la croissance et est mieux régulé

Les transporteurs relevant d’une activité à bas coûts se distinguent des transporteurs traditionnels par leurs mode d’exploitation des avions et les services proposés aux passagers: homogénéité de la flotte, forte utilisation des avions, liaisons point à point sans correspondance, utilisation d’aéroports secondaires, non attribution de sièges, restrictions pour les bagages…

Les parts de marché des deux premiers transporteurs à bas coûts représentent 68 % du trafic de cette catégorie en France en 2014. Ils opèrent chacun plus de 200 liaisons: le groupe easyJet capte 46 % du trafic à bas coûts touchant la France soit 17,3 millions de passagers, suivi de Ryanair pour 22 % soit 8,4 millions de passagers. Treize autres compagnies se partagent l’essentiel du reste du marché, dont Transavia France, filiale d’Air France (2,7 millions de passagers) et Transavia Pays-Bas, également du groupe Air France (300 000 passagers).

Les parts de marché de ces transporteurs sont plus fortes sur le moyen-courrier international que sur les lignes intérieures. L’activité internationale de l’ensemble des transporteurs à bas coût est soutenue, entre 2013 et 2014, pour de nombreux aéroports comme Rennes (+ 81 %), Strasbourg (+ 77 %), Dole (+ 49 %), Chambéry (+ 48 %), Bordeaux (+ 35 %), Bastia (+ 33 %), Brest (+ 30 %), Ajaccio (+ 27 %) et Nantes (+ 26 %). Les transporteurs à bas coûts contribuent ainsi au développement de nouveaux services aériens au départ des aéroports régionaux ce qui améliore la desserte aérienne du territoire.

Mais les accords passés par certaines compagnies avec les collectivités territoriales peuvent enfreindre les réglementations nationale et communautaire visant à préserver une concurrence équitable. Certaines compagnies à bas coûts lient par exemple leur venue à la conclusion de contrats de prestations de service financés par des ressources publiques. Les exploitants d’aéroports et les collectivités propriétaires d’aérodromes n’ont pas toujours bien pesé les termes de ces accords.

Aussi la Commission européenne a détaillé de nouvelles lignes directrices sur les aides d’État aux aéroports et aux compagnies aériennes, publiées le 4 avril 2014 à l’issue d’un processus de révision et de consultation qui a pris plusieurs années. Les aides au démarrage pour le lancement de nouvelles liaisons sont autorisées mais dans des conditions très restrictives et limitées dans le temps.

Parallèlement, le 23 juillet 2014, la Commission européenne a pris à l’encontre des aéroports de Pau, d’Angoulême et de Nîmes des décisions ordonnant le recouvrement d’aides d’État illégales consenties aux compagnies Ryanair et Transavia Hollande. De nouvelles décisions sont attendues en 2015 sur les aides accordées à Ryanair par les aéroports de Beauvais, Carcassonne et La Rochelle. À l’issue de cette phase, une vingtaine de cas resteront encore sous le coup d’une plainte déposée par Air France contre Ryanair et 27 aéroports français et donc susceptibles d’investigations ultérieures de la Commission européenne.

Ce nouveau contexte devrait conduire les aéroports à mieux gérer leur activité envers les compagnies à bas coût, ce qui évitera des distorsions de concurrence mais également le développement, à coups de subventions, de courants de trafic non pérennes et d’infrastructures non rentables dans des zones relativement bien desservies par ailleurs. Une vigilance particulière est également nécessaire en matière de détournement du droit par certaines compagnies, à des fins d’optimisation sociale.

Après avoir fortement contribué aux pertes de parts de marché d’Air France, ce secteur pourrait contribuer à son redressement. Malgré la grève de septembre 2014 dont un des enjeux concernait les projets de développement de Transavia, un accord quadripartite entre Air France, Transavia et les syndicats de pilotes de lignes des deux compagnies, a été signé le 10 décembre 2014 qui permet de détacher les pilotes d’Air France auprès de Transavia. Ceci devrait permettre la poursuite du développement de Transavia France, dont la flotte devrait atteindre 37 avions en 2017.

● Le défi de la concurrence des transporteurs du Golfe

Alors que la demande sur les lignes internationales croît de 6,3 % en 2014, la plus forte croissance est enregistrée par les transporteurs du Golfe avec un taux de 11,8 %. Une étude du groupe Air France-KLM estime qu’entre 2008 et 2014, la part de marché des compagnies du Golfe entre l’Europe d’une part, l’Inde et l’Asie du Sud-Est d’autre part, a crû de 22 à 34 %, tandis que celle des compagnies européennes a chuté de 38 à 27 %.

Le poids des trois principales compagnies du Golfe (Emirates, Qatar Airways et Etihad Airways) et des aéroports des Émirats Arabes Unis (Dubaï et Abou Dhabi) et du Qatar (Doha) dans le transport aérien mondial découle d’un choix stratégique, par les pays du Golfe, du transport aérien comme instrument de croissance. Ils bénéficient en effet d’un positionnement géographique très favorable, pour la mise en correspondance, via leurs « hubs » respectifs, de nombreuses villes d’Europe avec l’Asie, l’Afrique de l’est, l’Océan indien et l’Océanie : ceci représente entre 75 et 80 % des passagers transportés par ces compagnies depuis la France ou vers elle et détourne les trafics directs, au détriment des compagnies européennes en général et d’Air France en particulier.

Comme le montre le tableau ci-après, deux de ces trois transporteurs connaissent une forte croissance de leurs chiffres d’affaires, qui se combine avec une amélioration continue de leurs résultats d’exploitation.

RÉSULTATS FINANCIERS DES PRINCIPALES COMPAGNIES DU MOYEN-ORIENT

(en millions d’euros)

Compagnie

Chiffres d’affaires en 2014

Évolution du chiffre d’affaire 2015- 2014

Résultat expl.

2014

Résultat expl.

2013

Résultat expl.

2012

Emirates

24 177

24 177

+ 7,5%

1 604

1 160

773

Etihad Airways

7 600

7 600

+ 26,7 %

Non déclaré

979

753

El Al

2 081

– 1 %

349

349

314

Source : communiqués de presse des compagnies.

Ces bons résultats leur permettent de poursuivre leurs stratégies de développement. La compagnie Emirates a par exemple acquis 140 unités de l’A 380, le plus gros porteur d’Airbus, ce qui représente la moitié de l’ensemble de la flotte des A 380.

Or la concurrence des compagnies du Golfe peut difficilement être qualifiée de loyale. Les compagnies américaines American Airlines, Delta Air Lines, et United Airlines ont rendu public, début mars 2015, un rapport sur les aides d’État perçues par les compagnies du Golfe, réalisé au terme d’une enquête de deux ans, résumé dans le tableau ci-après.

QUANTIFICATION DES INTERVENTIONS PUBLIQUES REÇUES PAR LES TROIS COMPAGNIES DU GOLFE DEPUIS DIX ANS, SELON LES COMPAGNIES AMÉRICAINES

QATAR AIRWAYS

ETIHAD AIRWAYS

EMIRATES

17,5 milliards d’euros, dont :

18 milliards d’euros, dont :

6,8 milliards d’euros, dont :

- 8,4 sous forme de prêts du gouvernement et d’avances d’actionnaires, sans obligation de remboursement

- 6,6 sous forme de prêts du gouvernement sans obligation de remboursement

- 2,4 de subventions sous la forme d’acquisition de biens et services en provenance d’autres entreprises détenues par le gouvernement (mais l’opacité des comptes permet de réévaluer le niveau jusqu’à 11 milliards de dollars)

- 6,8 de subventions par des garanties d’État sur des prêts

- 6,3 d’injection de capitaux et 0,75 de dons en numéraires du gouvernement

- 0,61 d’exemptions de taxes d’aéroports

- 0,5 d’exemptions de taxes d’aéroport

- 2,4 du gouvernement pour compenser des pertes sur des instruments de couverture du carburant

- 0,45 de terrains mis à disposition à titre gratuit

- 3,5 de financements additionnels de la part du gouvernement en 2014

- 2 d’infrastructures aéroportuaires subventionnées

Il en ressort que les compagnies du Golfe ont bénéficié, depuis 2004, d’environ 42 milliards de dollars d’aides de la part des États qui les contrôlent, sous plusieurs formes : injection de capitaux publics, prêts et avances non remboursables, garanties d’État, exemptions de taxes, subventions, facilités sur le coût du carburant…

Les États du Golfe ne sont pas membres de l’organisation mondiale du commerce (OMC). Contrairement aux compagnies européennes et américaines, les règles qui subordonnent la légalité des aides d’État à une analyse faite sur le fondement de l’investisseur avisé en économie de marché ne leur sont donc pas applicables. Aucun recours devant l’organisme de règlement des différends de l’OMC ne peut être introduit par la France.

La France promeut, au plan européen, une stratégie visant à limiter l’octroi de nouveaux droits de trafic aux pays du Golfe dans le but de donner à la Commission européenne un levier de négociation globale avec ces États.

Le secrétaire d’État chargé des transports, M. Alain Vidalies a proposé à la Commission européenne, avec son homologue allemand, de négocier, au niveau européen, un accord aérien organisant une ouverture progressive du marché du transport aérien européen aux compagnies du Golfe, en contrepartie de garanties d’une concurrence loyale. Présentée au Conseil Transports du 13 mars 2015, cette stratégie a reçu le soutien de plusieurs États-membres. La Commission européenne devrait donc présenter, d’ici la fin de l’année, dans son « paquet aviation », une demande d’autorisation d’ouvrir des négociations avec les pays du Golfe. Le mandat de négociation serait finalisé au premier semestre 2016, lors de la présidence néerlandaise de l’Union européenne.

Le Rapporteur spécial se félicite de cette initiative et invite le Gouvernement au suivi le plus attentif des démarches conduites par la Commission européenne.

Les représentants de la direction d’Air France ont cependant signalé au Rapporteur spécial un risque d’affaiblissement de cette stratégie par l’attribution au Qatar, en mai 2015, de services supplémentaires vers la France, en réponse à une demande formulée dès 2013. Qatar Airways pourra ainsi desservir Nice, à raison de cinq fréquences hebdomadaires, complétées à l’été 2016 par la desserte de l’aéroport de Lyon également à raison de cinq fréquences hebdomadaires.

Le directeur général de l’aviation civile a fait valoir le nombre limité de fréquences et la volonté de favoriser une desserte équilibrée du territoire national en répondant à la demande des deux aéroports concernés. L’accord à titre extra-bilatéral traduirait le caractère exceptionnel de cette décision et doit se lire dans le contexte plus global d’accords stratégique, à différents niveaux, avec le Qatar.

Le Rapporteur spécial invite donc à ne pas aller au-delà de cette exception afin de consolider le front commun des États européens qui vise à obtenir une clarification du cadre concurrentiel.

3. Contenir la progression des taxes et redevances

Le secteur du transport aérien doit acquitter en France un grand nombre de contributions, applicables à toutes les compagnies desservant le territoire national mais qui pèsent plus particulièrement sur la compétitivité de celles qui ont, en France, une part substantielle de leur activité :

– des redevances aéronautiques et la taxe de l’aviation civile pour financer les missions de régulation assurées par l’État ;

– des redevances aéroportuaires pour financer l’utilisation des infrastructures ;

– la taxe dite d’aéroport, qui finance les missions de sécurité et de sûreté confiées aux exploitants d’aéroports ;

– la taxe sur les nuisances sonores aéroportuaires qui vise à compenser en partie le coût des externalités ;

– la taxe de solidarité, majoration de la taxe d’aviation civile perçue du profit du Fonds de solidarité pour le développement.

La question est donc posée des allégements susceptibles d’améliorer la compétitivité du secteur aérien français.

Selon les données figurant dans le rapport précité remis par Bruno Le Roux, sur le montant total de 1,5 milliard d’euros prélevés en 2013 au titre des trois principales taxes (taxe de l’aviation civile, taxe d’aéroport et taxe de solidarité) la contribution du pavillon français représente 57 % de ces sommes, soit 850 millions d’euros.

Depuis la présentation de ce rapport, et conformément à une de ses préconisations, la taxe de l’aviation civile a été réformée : le trafic de correspondance bénéficie depuis le 1er avril 2015 de l’exonération partielle, qui sera totale au 1er janvier 2016, précédemment décrite par le Rapporteur spécial.

Selon les informations fournies au Rapporteur spécial par les représentants de la direction d’Air France, il en résulte une diminution de la charge fiscale de 40 millions d’euros pour le pavillon français qui réalise l’essentiel des vols en correspondance sur le hub de Paris. Le BACEA ayant bénéficié d’une compensation de la baisse du rendement de la taxe par un accroissement de la part qui lui est attribuée, le coût est, au final, assumé par le budget général de l’État.

● Les tarifs des redevances aéronautiques peuvent rester modérés

Le Rapporteur spécial a souhaité s’assurer auprès de la direction générale de l’aviation civile que les niveaux des redevances aériennes ne constituent pas un frein à la compétitivité du secteur aérien français.

Au contraire, il apparaît que les redevances aéronautiques pratiquées en France sont les moins onéreuses parmi les grands acteurs européens du transport aérien. La compétitivité des tarifs est avérée, comme le montre, concernant la seule redevance de route, la comparaison figurant dans le tableau ci-après. Par rapport aux pays limitrophes, l’écart moyen est de 12,78 % en 2014.

COMPARAISON DE TARIFS UNITAIRES DE REDEVANCE DE ROUTE (2009-2014)

Année

2009

2010

2011

2012

2013

2014

Belgique - Luxembourg

75,90

76,46

76,44

73,77

67,83

70,88

Allemagne

67,02

68,86

71,84

74,19

76,50

74,29

France

61,33

64,97

66,93

64,49

64,61

65,25

Royaume Uni

73,38

68,85

78,63

79,54

90,50

87,02

Suisse

71,23

74,92

90,84

99,13

98,43

100,97

Espagne

83,98

83,98

77,68

71,70

71,69

71,69

Italie

65,85

68,51

70,36

78,55

78,83

77,81

Moyenne Pays limitrophes

72,58

72,33

75,08

76,51

79,43

78,03

Écart France-Pays limitrophes

– 11,24

– 7,36

– 8,16

– 12,03

– 14,82

– 12,78

Source : direction générale de l’aviation civile. Montants en euros, écart en %

Le tableau suivant présente en outre, pour 2012, une comparaison des coûts moyens des redevances, qui tiennent compte des différentes catégories de redevances aéronautiques.

ÉVOLUTION DES COÛTS MOYENS DES REDEVANCES AÉRONAUTIQUES

(en euros)

État

2009

2010

2011

2012

Comparaison Coût moyen 2012
France /autres pays

Espagne

324,26

220,39

207,43

194,00

58,6 %

Belgique

176,76

174,50

180,56

185,65

51,8 %

Allemagne

158,58

167,58

175,91

186,08

52,1 %

France

119,42

119,14

120,62

122,34

0,0 %

Italie

140,43

140,02

144,17

143,22

17,1 %

Pays-Bas

201,20

215,14

217,05

256,91

110,0 %

MUAC

195,70

202,22

189,29

229,87

87,9 %

Royaume -Uni

128,86

130,40

131,47

149,30

22,0 %

Suisse

148,24

166,08

184,05

197,46

61,4 %

Le MUAC (Maastricht Upper Area Control Centre) opère le contrôle aérien sur une zone transfrontalière au profit de la Belgique, du Luxembourg, des Pays-Bas et de l’Allemagne.

Source : direction générale de l’aviation civile.

On constate à nouveau que les coûts sont moins élevés en France que pour tous les espaces aériens de nos voisins européens.

Aussi, la modération des tarifs des redevances aéronautiques française constitue un avantage compétitif pour le pavillon français qui, comparativement à ses principaux concurrents mondiaux, utilise beaucoup plus l’espace aérien français.

La révision récente du tarif de la redevance de route, justifiée par les nouvelles obligations de qualité de service définies au plan européen, a conduit la DGAC à porter le tarif de l’heure moyenne de vol contrôlé à 67,75 euros pour la nouvelle période de référence, ce qui a pu susciter des inquiétudes.

Mais la DGAC a baissé en contrepartie, à hauteur de 3 %, les tarifs de la redevance pour services terminaux de la circulation aérienne, structurellement plus élevés en France en raison de la présence de nombreux aérodromes de petite taille, qui ne bénéficient pas d’économies d’échelles.

Or la RSTCA est payée par les compagnies aériennes qui desservent le territoire, alors que la redevance de route est également appliquée en cas de simple survol : la baisse de la RSTCA bénéficie donc plus au pavillon français alors que la hausse de la redevance de route touchera également ses concurrents. À nouveau, l’équilibre est favorable au pavillon français.

La modération des tarifs s’explique en partie par des niveaux de rémunération des personnels du contrôle aérien. Toutes catégories confondues, le coût moyen du personnel du contrôle aérien français est inférieur à celui de nos principaux partenaires, comme le montre le graphique ci-après. Le rapport s’établit ainsi du simple au double entre le coût constaté en France et celui des Pays-Bas.

COÛT MOYEN DU PERSONNEL DU CONTRÔLE AÉRIEN EN 2013

Source : direction générale de l’aviation civile.

Le Rapporteur spécial se félicite de ces constats et invite la DGAC à poursuivre ses efforts pour réaliser des gains de productivité tout en mettant en œuvre le volet technologique du « Ciel unique européen » qui exige d’accroître les dépenses d’investissement : c’est à ce prix qu’elle pourra, à l’avenir, limiter la hausse des redevances aériennes.

● Des ajustements à apporter aux taxes d’aéroport et de solidarité

La taxe d’aéroport, définie à l’article 1609 quatervicies du code général des impôts, finance les missions de sécurité et de sûreté confiées aux exploitants d’aéroports. Elle est perçue auprès des principales entreprises de transport aérien public. Une majoration de la taxe bénéficie aux plus petits aéroports, dont les ressources ne couvriraient pas les coûts.

Les montants de la taxe d’aéroport ont progressé fortement afin de financer les nouveaux équipements et services imposés par la réglementation sur la sûreté en particulier au regard du risque terroriste. Le produit total s’élèvera à 958 millions d’euros en 2015, dont 108 au titre de la majoration.

Le dynamisme de la taxe inquiète les intervenants du secteur aérien. Ils préconisent d’élargir l’assiette, aujourd’hui restreinte aux seules entreprises de transport aérien public, à l’aviation d’affaires, aux assistants en escale, aux hôtels et aux boutiques des zones aéroportuaires, qui bénéficient des retombées de transports aériens sécurisés.

La réforme de l’assiette de la taxe paraît d’autant plus opportune au Rapporteur spécial que son produit ne couvre pas aujourd’hui l’ensemble des coûts occasionnés. Pour l’année 2015, l’ensemble des coûts de sécurité et de sûreté à la charge des exploitants d’aéroports devraient s’élever à environ 979 millions d’euros, en hausse de 2,6 % par rapport à 2014 (2). Or le produit total estimé de la taxe est inférieur 21 millions d’euros à ce montant. L’addition des déficits constatés les années antérieures aboutit à un déficit cumulé de 97 millions d’euros fin 2015 dont 68 pour Aéroports de Paris et 29 pour les autres aéroports.

Des interrogations persistantes concernent également la taxe de solidarité, instituée par l’article 22 de la loi n°2005-1720 du 30 décembre 2005 de finances rectificative pour 2005. Son produit est attribué au FSD à hauteur de 210 millions d’euros par an afin de financer les objectifs du Millénaire pour le développement. Le reliquat, le cas échéant, est affecté au budget général (3).

Si l’impact paraissait initialement symbolique (une majoration de 1 euro par billet, hors premières et classes affaires) le nouveau contexte concurrentiel conduit à envisager d’autres pistes : l’assiette pourrait être élargie au mode de transport concurrent sur les lignes intérieures et européennes, le ferroviaire à grande vitesse ; d’autres secteurs économiques pourraient être mis à contribution, tels la banque ou l’industrie pétrolière, qui, tout autant que le transport aérien, présentent des liens avec les objectifs que cette taxe vise à financer.

4. La contribution décisive d’Aéroports de Paris

La compétitivité des transporteurs français dépend aussi de celle des aéroports français : leur offre de service de qualité contribue à l’attractivité de compagnies qui opèrent majoritairement à partir de la France et ont particulièrement recours, pour les vols en correspondance, au hub de Paris Charles-de-Gaulle et Orly.

Mais le niveau des redevances aéroportuaires et leur évolution ont fait naître des demandes de « rééquilibrage de la chaîne de valeur » entre les aéroports et les compagnies aériennes.

Le Rapporteur spécial relève que la faible rentabilité des grandes compagnies aériennes traditionnelles ne doit pas faire surestimer celle des grands aéroports. Les redevances aéroportuaires permettent de financer des investissements coûteux indispensables aux compagnies aériennes elles-mêmes.

II existe cependant des marges de manœuvre. Le groupe Aéroports de la Côte d’Azur a ainsi annoncé en juin 2015 une baisse des redevances aéronautiques pendant 10 ans pour l’aviation commerciale régulière à l’aéroport de Nice.

Le niveau des redevances payées par les compagnies aériennes utilisant les infrastructures dont la compagnie Aéroports de Paris (ADP) est propriétaire est défini à partir d’un contrat de régulation économique d’ADP signé avec l’État.

Négocié en 2015, le nouveau contrat de régulation économique 2016-2020 (CRE3) prévoit une hausse de ces redevances, limitée à l’inflation en 2016 mais qui pourra atteindre 1,25 % au-dessus de l’inflation les années suivantes. Il s’agit d’une modération en tendance des redevances aéroportuaires à Paris-Charles-de-Gaulle par rapport aux hausses annuelles de 3,3 % constatées entre 2009 et 2014.

Auditionnée par le Rapporteur spécial, la direction d’ADP a souligné que ce niveau de redevances est inférieur aux montants demandés dans de nombreux autres aéroports européens : il est, en valeur absolue, deux fois moindre qu’à Londres, et sa croissance est moindre qu’à Francfort et Madrid.

Cependant, le 23 avril 2015, la commission consultative aéroportuaire, a rendu, sur la saisine du secrétaire d’État chargé des transports, un avis dans le cadre de la préparation de ce contrat de régulation économique. Cet avis proposait de fixer les plafonds tarifaires annuels à hauteur de l’inflation (+ ou - 0,3 %) et d’instaurer un mécanisme de contribution financière des activités commerciales d’ADP afin d’aboutir, in fine à une évolution des redevances aéroportuaires en dessous de l’inflation (– 0,7 % à – 1 %).

Dans son avis, la commission consultative aéroportuaire soulignait qu’une baisse du niveau des redevances pourrait améliorer la compétitivité d’ADP et donc accroître le trafic et les recettes.

La direction d’ADP a fait valoir au Rapporteur spécial que la hausse modérée des redevances se double d’une évolution de la structure tarifaire qui sera favorable aux transporteurs français : la part des redevances assises sur le passager aérien est diminuée alors que sont accentuées des redevances assises sur les mouvements, ce qui est favorable à un transporteur comme Air France qui possède des avions gros porteurs ; de même, les redevances d’atterrissage augmentent pour les petits porteurs et diminuent pour les gros porteurs, ce qui devrait favoriser l’activité long-courrier d’Air France.

S’y ajoutent des modulations tarifaires, par exemple un abattement sur la redevance passager applicable au trafic « origine-destination » en croissance au-delà d’un certain seuil, ce qui devrait à nouveau favoriser Air France. La tarification de certaines redevances accessoires est simplifiée par ailleurs. ADP pourra se voir appliquer des malus si elle ne répond pas aux critères de qualité du service mais, contrairement au précédent contrat, elle ne pourra plus prétendre à des bonus si les indicateurs de qualité dépassent les cibles définies au contrat.

Surtout, les compagnies aériennes, bénéficieront de contreparties importantes en termes d’investissements, à hauteur de 3 milliards d’euros en cinq ans. Ces nouveaux investissements, décrits dans l’encadré ci-après, devraient logiquement bénéficier en premier lieu au pavillon français.

Les investissements prévus par Aéroport de Paris entre 2016 et 2020

Aéroports de Paris va investir massivement dans le maintien de son patrimoine à hauteur de 1 milliard d’euros. Pour Paris-Orly, le budget est presque multiplié par trois par rapport au précédent contrat de régulation économique.

ADP entend poursuivre la logique « One Roof » pour remédier au handicap structurel d’éclatement des terminaux avec la réalisation de trois projets : la jonction entre les terminaux Sud et Ouest de Paris-Orly, et pour Paris-Charles de Gaulle, la jonction des terminaux 2B et 2D et celle des satellites internationaux du Terminal 1. Ces investissements, de l’ordre de 670 millions d’euros devraient apporter des gains en capacité suffisants pour répondre à la hausse de trafic, améliorer la flexibilité et la robustesse opérationnelles ainsi que la qualité de service. Ils devraient également diminuer les coûts d’exploitation pour l’entreprise comme pour les compagnies.

ADP entend par ailleurs renforcer la compétitivité de la plate-forme de correspondance et des différents processus d’accès aéroportuaire. Des investissements de près 650 millions d’euros concerneront par exemple les trieurs bagages Hall L et Hall M, les aires de gros porteurs, le déploiement des mires de guidage, le réaménagement de l’ensemble 2E-2F, la rénovation des salons et des mesures de soutien aux transporteurs pour les comptoirs d’auto-enregistrement.

La desserte devrait par ailleurs être améliorée avec la relance du projet CDG Express, l’amélioration des accès routiers ouest et du réseau secondaire de Paris-CDG, la création d’une base arrière taxis et la réhabilitation du parking P0 à Paris-Orly.

Le nouveau contrat de régulation économique ne remet pas en cause le système de « caisse aménagée » d’Aéroport de Paris dans lequel les activités commerciales et immobilières, très rentables, ne sont pas retenues pour définir la rentabilité du capital employé, qui sert à déterminer le niveau de redevance. L’instauration d’une « caisse unique » a donc été proposée.

La direction d’Aéroport de Paris a fait valoir que les prises en compte distinctes des activités aéroportuaires et commerciales a eu l’effet vertueux d’inciter ADP à développer les zones commerciales, qui contribuent à la qualité de l’accueil : les surfaces commerciales ont progressé de 68 % depuis 2006 et la dépense moyenne par passager est passée de 9 euros en 2006 à 19,8 en 2015.

L’apport des ressources commerciales dans le périmètre du contrat de régulation présenterait une risque de moindre sélectivité dans les choix d’investissements aéroportuaires, et donc de gaspillage d’une ressource rare, par ailleurs utile pour l’État actionnaire.

Le Rapporteur spécial relève que l’effet défavorable de l’absence d’une « caisse unique » sur le niveau des redevances n’est pas établi : l’aéroport d’Amsterdam Schiphol scinde, comme ADP, les recettes commerciales et aéroportuaires, mais présente par ailleurs les tarifs de redevances les plus faibles d’Europe.

Le Rapporteur spécial forme le vœu que l’équilibre global favorable à la fois à Aéroport de Paris et aux compagnies aériennes soit respecté et même amélioré tout au long de la mise en œuvre du contrat de régulation. Le Rapporteur spécial relève que le contrat fixe de simples plafonds de hausse. En cas de forte croissance du trafic et donc de recettes plus élevées qu’anticipé pour ADP, il conviendra d’en faire bénéficier les transporteurs en diminuant les redevances à due concurrence.

5. Air France : l’indispensable reprise du dialogue social

Le chiffre d’affaires du groupe Air France/KLM a diminué de 2,4 % en 2014 avec une rechute du résultat d’exploitation, passé d’un excédent de 130 millions d’euros à un déficit de même niveau.

Mais sans la grève de ses pilotes en septembre 2014, la compagnie a indiqué qu’elle aurait dégagé un bénéfice d’exploitation de 296 millions d’euros en 2014, supérieur au résultat de 2013. De même un bénéfice d’exploitation significatif est attendu en 2015 et l’objectif de ramener la dette à environ 4,4 milliards d’euros serait atteint, ce qui équivaut à une baisse d’un milliard par rapport à fin 2014.

Au-delà des facteurs conjoncturels tels la baisse du prix du carburant et une forte demande à l’été 2015, le redressement des comptes provient des effets du plan Transform 2015 initié en 2012.

Des gains de productivité significatifs ont été obtenus, à des niveaux différents selon les catégories de personnels, entraînant la mise en œuvre d’un premier plan de départs volontaires, complété à deux reprises, et dont les effets s’étendent jusque fin 2015, pour près de 7 000 personnels au total. Les baisses d’effectifs et la réorganisation de nombreuses procédures de travail ont permis de réduire les charges d’exploitation, mais la direction d’Air France a indiqué que les coûts unitaires des personnels demeurent supérieurs à ceux des principaux homologues européens.

Le simple retour à l’équilibre ne constitue pas un objectif suffisant car Air France doit dégager des financements significatifs pour pouvoir investir.

Si l’amélioration de l’environnement, réglementaire et concurrentiel auquel Air France est confronté peut l’aider à relever ce défi, le Rapporteur spécial constate que la marge de manœuvre principale réside dans la compagnie elle-même et dans ses salariés.

Fin 2014, la direction d’Air France a présenté un plan Perform 2020 qui prévoyait, à rémunération inchangée, une augmentation du temps de vol annuel des pilotes et personnels navigants commerciaux, afin de réduire les coûts unitaires de 8,5 % et de parvenir à un résultat d’exploitation de 740 millions d’euros en 2017. Ce plan comportait des plans de départs volontaires mais également des départs contraints sur des secteurs ciblés où l’écart de coûts menace la pérennité de l’activité. Il devait permettre de financer l’arrivée de nouveaux avions et un développement du réseau long-courrier par des ouvertures de lignes à partir de 2017.

Or les négociations avec les organisations syndicales de pilotes et de personnels navigants commerciaux n’ont pas abouti. Un plan alternatif a été présenté lors du comité central d’entreprise du 5 octobre 2015 en marge duquel sont survenues des violences physiques, unanimement condamnées.

La direction d’Air France a indiqué au rapporteur que les mesures mises en œuvre dès 2016 aboutiront à une contraction de l’offre de 2 à 3 % avec la fermeture de certaines lignes long-courrier, parallèlement à la sortie de flotte des avions les plus anciens. Mais les choix ont été opérés de façon à ne pas éviter la perte de clientèle : le lien à ces destinations est maintenu par les partenariats commerciaux. L’adaptation de l’offre passe aussi par une plus forte saisonnalisation et des réductions de fréquences sur des lignes couvrant à peine leurs coûts variables.

Il devrait en résulter un sureffectif estimé à 2 900 personnes dont environ 300 pilotes, 900 personnels navigants commerciaux et 1 700 personnels au sol ce qui devrait occasionner de nouveaux départs volontaires ou contraints.

L’annulation des commandes d’avions supplémentaires économiserait 1,4 milliard d’euros mais la direction de la compagnie a convenu que ceci ne constitue pas un scénario viable à long terme : l’amélioration de la compétitivité doit être adossée à des objectifs stratégiques de développement.

Le plan alternatif devant être mis en œuvre en deux temps, en 2016 puis en 2017, ce phasage laisserait le temps à la reprise de la négociation sociale autour du projet Perform 2020, ce qui permettrait de moduler les mesures finalement mises en œuvre en 2017.

Le Rapporteur spécial souligne qu’Air France bénéficie d’atouts considérables et que les efforts de ses personnels montrent leurs résultats. La performance opérationnelle s’améliore, ce que mesure par exemple la ponctualité des départs ou la diminution de la consommation de carburant par passager. La mobilisation des personnels pour améliorer le service aux clients a permis de faire passer Air France, entre 2013 et 2014, de la 40e à la 25e place dans le classement de satisfaction Skytrax, ce qui en constitue la plus forte progression. Air France déploie de nouvelles cabines dans ses vols long-courriers qui répondent mieux aux besoins, pour les différentes catégories de passagers.

Tous ces éléments montrent qu’Air France dispose, dans ses personnels, de potentiels d’engagement importants qui doivent permettre d’améliorer les parts de marché, dans un secteur où la qualité de relation-client est essentielle.

Aussi, le Rapporteur spécial invite la direction d’Air France et les représentants des différentes catégories de personnels à revenir à la table des négociations.

Le dialogue social doit pouvoir se renouer, loin des polémiques, lorsque la sérénité et les bonnes volontés réciproques auront remplacé le contexte actuel, marqué par une attention médiatique excessive.

S’il est illusoire d’attendre de l’État, qui n’est qu’un actionnaire parmi d’autres du groupe Air France, le moindre apport financier, la puissance publique doit en revanche veiller à ce que l’entreprise donne toute sa chance au dialogue social.

III. LE PROGRAMME 170 MÉTÉOROLOGIE

Les attributions de l’État en matière de prévision et de recherche météorologiques et climatiques ont été confiées par le décret n° 93-861 du 18 juin 1993 à l’établissement public administratif Météo-France, héritier de la direction de la météorologie nationale.

Alors que la météorologie est parfois réduite à l’image convenue d’une activité de confort pour organiser les loisirs, son développement répond à de forts besoins opérationnels, tels la sécurité des personnes et des biens face aux catastrophes naturelles (tempêtes, inondations, cyclones…), les prévisions nécessaires aux nombreux pans « météo-sensibles » de l’activité économique (énergie, agriculture, tourisme…), particulièrement la météorologie de l’aviation, essentielle pour la sécurité des vols et l’optimisation du trafic, et enfin l’appui aux forces armées.

Le programme 170 Météorologies, de la mission Écologie, développement et mobilités durables, comporte l’ensemble des crédits finançant ces compétences. Il s’agit d’une subvention pour charges de services public et donc de crédits de titre 3 : 199,7 millions d’euros sont inscrits pour 2016, en autorisations d’engagement comme en crédits de paiement, contre 203,7 en 2015, en baisse de 4 millions d’euros (– 2 %), après une baisse de 4,9 millions d’euros en 2015, soit (– 2,3 %).

Dans le champ de la mission Écologie, développement et mobilités durables, s’y ajoutent 3,88 millions d’euros, en autorisations d’engagement comme en crédits de paiement, inscrits sur le programme 181 Prévention des risques, à l’action 10 Prévention des risques naturels et hydrauliques : cette dotation, inchangée par rapport à 2015, finance un programme pluriannuel de modernisation des moyens d’observation de la pluie afin de mieux prévoir les crues, les risques côtiers et l’impact du changement climatique sur les hydro-systèmes.

Météo-France est liée à l’État par un contrat d’objectifs et de performance conclu en 2012 et dont 2016 est la dernière année d’application.

Ces orientations stratégiques mettent l’accent sur les missions de sécurité pour améliorer l’appui à la puissance publique dans les domaines de la prévention, l’anticipation et la gestion des risques. Météo-France est invitée à être un prestataire de référence du « Ciel unique européen » en renforçant la compétitivité économique des services rendus à l’aviation civile et en accroissant leur pertinence et leur performance grâce à un programme spécifique de recherche et développement. Le contrat d’objectifs et de performance prévoie également le développement des services climatiques pour répondre aux besoins des politiques d’adaptation au changement climatique. Un plan d’investissement vise à poursuivre la modernisation des systèmes d’observation et des systèmes d’informations, gage d’efficacité et de fiabilité des prévisions. Enfin l’établissement doit achever la réforme de son organisation territoriale qui vise à réduire le réseau de ses implantations départementales pour concentrer les moyens au sein d’entités dotées d’une taille critique.

1. La baisse de la subvention pour charges de service public

Le programme 170 est structuré en deux actions :

– l’action 1 Observation et prévision météorologique correspond à la mission principale de l’opérateur Météo-France et mobilise l’ensemble des infrastructures et des moyens techniques (systèmes d’observation, supercalculateur, systèmes de production et de diffusion, réseau territorial, etc.) et l’essentiel des compétences dont il dispose ;

– l’action 2 Recherche dans le domaine météorologique comprend toutes les activités de Météo-France destinées à l’amélioration des techniques d’observation, de la connaissance et de la modélisation de l’atmosphère et de ses interactions avec les autres milieux et les activités humaines, à des fins de prévision météorologique, d’étude et de production de scénarios climatiques. Ces travaux s’inscrivent dans la stratégie nationale de recherche et dans le périmètre thématique de l’Alliance pour les sciences de l’environnement (ALLENVI) dont Météo-France est un membre fondateur.

Sur la dotation de 199,7 millions d’euros inscrite au projet de loi de finances pour 2016, 177,8 millions d’euros sont affectés à l’action 1, soit 89 % de l’ensemble, contre 21,9 pour l’action 2, soit 11 % de l’ensemble.

Pour chacune des deux actions, les montants diminuent de 2 % en 2015, comme l’indique le tableau ci-après.

PRÉSENTATION PAR ACTION DES CRÉDITS DEMANDÉS

(en millions d’euros, AE CP)

Numéro et intitulé de l’action

2014

2015

2016

Variation 2015 - 2016

%

01. Observation et prévision météorologique

185,6

181,3

177,8

– 3,5

– 2 %

02. Recherche dans le domaine météorologique

22,9

22,4

21,9

– 0,5

– 2 %

Ensemble du programme

208,6

203,7

199,7

– 4

– 2 %

Sources : projet annuel de performance.

Sur deux exercices budgétaires, on constate une diminution de la subvention pour charges de services publics de 8,9 millions d’euros, soit – 4,3 %.

Pour 2016, la diminution de 2 % n’est pas exclusive de diminutions supplémentaires opérées en gestion, comme elles ont pu être constatées au cours des précédents exercices.

Auditionnée par le Rapporteur spécial, la direction de Météo-France a relevé que le budget présenté est systématiquement amputé d’une réserve qui s’élève à environ 4 millions d’euros, rarement restituée, ce qui diminue d’autant les moyens disponibles.

Pour 2015, les crédits initialement inscrits au projet de loi de finances ont tout d’abord été diminués lors de l’examen de la loi de finances initiale, sous l’effet de deux amendements du Gouvernement. Puis, en exécution, deux mises en réserves successives et deux décrets d’annulation de crédits ont ramené les montants effectivement disponibles en exécution à 196,7 millions d’euros, comme le détaille le tableau ci-après.

LES MOUVEMENTS DE CRÉDITS SUR L’EXERCICE 2015 DU PROGRAMME 170

Programme 170

AE=CP

Projet de loi de finances pour 2015

205,78

Amendement n° II-20

– 1,79

Amendement n° II-255

– 0,23

Loi de finances initiale pour 2016

203,76

Réserve de précaution initiale

– 4,6

Augmentation de la mise en réserve

– 1,1

Réserve nette

– 5,7

Répartition initiale des crédits et des emplois

199,15

Annulation de crédits, décret n°2015-402 du 9 avril 2015

– 1,1

Annulation de crédits, décret n°2015-639 du 9 juin 2015

– 1,36

Solde

196,7

Écart entre la loi de finances initiale et l’exécution

– 7,06

en %

– 3,47 %

Source : ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie.

Par rapport au montant de 196,7 millions d’euros de crédits effectivement disponibles en 2015, et hors dégel peu probable en fin de gestion, la dotation de 199,7 millions d’euros, inscrite en loi de finances est donc en hausse apparente de 1,52 %. Mais la direction de l’établissement a indiqué n’avoir aucune visibilité sur les montants qui seront effectivement disponibles, en raison des décisions éventuelles de mise en réserve ou d’annulations de crédits.

● Un prélèvement nécessaire sur le fonds de roulement de l’établissement

Pour 2016, Météo-France bénéficiera, en tout ou partie des 199,7 millions d’euros inscrits sur le programme 170, mais également de deux autres ressources de l’État : 3,8 millions d’euros, déjà mentionnés, au titre du programme 181 Prévention des risques, ainsi que 42,5 millions d’euros (montant inchangé par rapport à 2015) provenant de l’action 7 Développement des satellites de météorologie du programme 193 Recherche spatiale de la mission Recherche et enseignement supérieur. Ces crédits correspondent à la contribution française aux programmes de satellites météorologiques développés par l’Organisation européenne pour l’exploitation des satellites météorologiques (EUMETSAT), au sein de laquelle Météo- France représente la France.

Les crédits inscrits sur le budget général s’élèveront donc à 246 millions d’euros en 2016.

En 2015, les montants effectivement versés à ce titre ont permis de couvrir 62,7 % des charges de l’établissement, comme l’indique le tableau ci-dessous, qui présente l’équilibre du compte de résultat de Météo-France figurant au budget initial de 2015.

L’ÉQUILIBRE DU COMPTE DE RÉSULTAT DE L’ÉTABLISSEMENT EN 2015

(en millions d’euros)

Total des ressources de l’État

241,9

Ressources propres

143

Total des produits

384,9

Total des charges

385,9

Solde

– 1

Le compte de résultat présente un solde négatif de 1 million d’euro qui a nécessité d’opérer un prélèvement sur le fonds de roulement.

Les prélèvements sur le fonds de roulement sont récurrents depuis deux ans. Fin 2014, l’établissement a prélevé 5,7 millions d’euros, ce qui a ramené le niveau du fonds de roulement à environ 38 millions d’euros. Fin 2015, un nouveau prélèvement d’environ 2,7 millions d’euros sera nécessaire pour équilibrer le budget de l’exercice et pour compléter parallèlement le financement d’investissements.

Auditionnée par le Rapporteur spécial, la direction de Météo-France a indiqué qu’un nouveau prélèvement à hauteur de 5 millions d’euros pourra être nécessaire en 2016. Le niveau du fonds de roulement s’établirait alors à 30 millions d’euros.

L’utilisation du fonds de roulement permet ainsi maintenir les investissements jugés essentiels par l’opérateur, à hauteur d’environ 20 millions d’euros par an.

Au regard du niveau de fonds de roulement et de la nécessité de préserver un niveau élevé d’investissements pour maintenir la qualité du service rendu, le Rapporteur spécial constate qu’il paraît difficile de continuer à assurer l’équilibre de fin de gestion par des prélèvements sur ce fonds.

2. Les autres ressources de Météo-France

Au mieux, une stabilité des dotations budgétaires sur la mission Écologie, développement et mobilités durables peut être attendue dans le cadre du renouvellement du contrat d’objectifs et de performances à partir de 2017.

Il revient donc à l’établissement Météo-France de poursuivre la diversification de ses ressources.

● La redevance pour services aéronautiques

Les ressources propres proviennent en premier lieu de la part météorologique des redevances de navigation aérienne attribuées à Météo-France aux termes d’une convention cadre liant l’établissement à la direction générale de l’aviation civile, établie en 2013 pour une durée de 5 ans.

Conformément aux règlements communautaires dits « Ciel unique européen », cette convention précise les conditions dans lesquelles Météo-France assure le rôle de prestataire de services météorologiques à la navigation aérienne. À ce titre, l’établissement a perçu 85,5 millions d’euros en 2015, soit 23 % de l’ensemble de ses ressources.

Les montants prévus pour 2016 ne sont pas précisés dans les documents budgétaires annexés au projet de loi de finances. Ils sont censés compenser à l’euro près les dépenses engagées au titre des services rendus aux compagnies aériennes. Ces dépenses couvrent également des investissements tels l’installation récente, à Nice, d’un nouveau radar permettant d’améliorer la détection des cisaillements de vents.

Il a été indiqué au Rapporteur spécial que ces montants pourront être renégociés par la DGAC en 2016. Si cette ressource est essentielle pour l’établissement, elle n’est pas susceptible d’être particulièrement dynamique, dans un contexte de nécessaire modération des niveaux des redevances acquittées par les compagnies aériennes. Ceci pourrait donc limiter, à terme, les montants d’investissements consacrés à ce secteur par Météo-France.

Par ailleurs, Météo-France bénéficie de financements par des tiers, principalement l’Union Européenne, au titre de différents contrats de recherche, pour des montants qui atteindraient 8 millions d’euros en 2016.

D’autres recettes peuvent provenir de la participation de collectivités territoriales au fonctionnement de réseaux d’observation locaux.

Enfin ponctuellement, Météo-France bénéficie de retour provenant du compte d’affectation spéciale Gestion du Patrimoine immobilier de l’État, liés à des cessions antérieures de biens ayant appartenus à l’établissement. Une somme de 5,5 millions d’euros doit faire l’objet de plusieurs versements étalés sur la période 2015-2017.

● Les ressources commerciales

Les ressources commerciales de Météo-France proviennent de services rendus au grand public et de services offerts aux professionnels. L’établissement offre ces services directement ou en s’appuyant sur quatre filiales commerciales : Météo France International (MFI), Météorage, PREDICT Services et Météo France Régie.

Dans un contexte désormais concurrentiel, l’établissement et ses filiales demeurent compétitifs, comme l’attestent les niveaux de leurs parts de marché.

Le tableau ci-après présente une estimation globale de la situation du marché national des services météorologiques fin 2014 et précise les parts de marché de Météo-France et de ses filiales pour les marchés des services destinés aux deux catégories de publics. Le total des recettes s’est alors élevé à 31,8 millions d’euros pour le seul établissement Météo-France.

LES PARTS DE MARCHÉ DE MÉTÉO-FRANCE PAR CATÉGORIES DE SERVICES EN 2014

(en millions d’euros)

 

Ensemble du marché des services météo

Services au grand public

Services aux professionnels

Taille du marché

64,6

25

39,6

Chiffre d’affaires de
Météo-France

31,8

12,5

19,3

Parts de marché
de Météo-France

49 %

50 %

49 %

Chiffre d’affaires de
Météo-France et ses filiales

37,7

12,5

25,2

Parts de marché
de Météo-France et ses filiales

58 %

50 %

64 %

Source : ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie.

● Le marché des services au grand public

Météo-France est confrontée depuis la fin de la décennie 2000 à l’érosion des recettes commerciales des services rendus au grand public

Les services audiotel ont longtemps représenté une part prépondérante des recettes commerciales de l’établissement, mais l’évolution du recours à ce type de services d’information est désormais structurellement en baisse. Le nombre d’appels des services audiotel de Météo-France en 2014 a été inférieur à 4 millions, contre plus de 40 millions par an à la fin des années 1990. L’érosion a été particulièrement marquée au cours de l’année 2014 : la recette de 7,7 millions d’euros était en baisse de près de 27 % par rapport à l’année précédente. Pour 2016, l’établissement retient l’hypothèse de la poursuite d’une érosion rapide, bien que le recours à ce type de service demeure très sensible aux situations météorologiques observées.

Parallèlement, Météo-France perçoit des recettes publicitaires liées aux consultations du site internet meteofrance.com, qui bénéficie d’un nombre de visiteurs uniques par jour proche de 1,3 million, soit la première audience sur l’internet fixe. Fin 2014, on compte également 8,6 millions de téléchargements d’application sur téléphonie mobile, soit une progression de plus de 2 millions de téléchargements en un an. Les applications de Météo-France, tous supports confondus, ont fait l’objet de plus de 300 millions de visites durant l’année 2014.

La publicité a généré 4,5 millions d’euros de recettes en 2014, en retrait de 500 000 euros, soit près de 10 % par rapport 2013, en raison du recul général du marché publicitaire.

Aussi, pour 2016, Météo-France anticipe que les recettes commerciales du secteur « grand public » atteindront au mieux 10 millions d’euros essentiellement portées par les recettes sur supports mobiles. Ceci nécessitera de publier fréquemment des applications rénovées et d’améliorer la visibilité de la marque Météo-France sur les différents supports digitaux.

● Le marché des services aux professionnels

Les recettes commerciales provenant des professionnels se sont élevées, en 2014, pour l’établissement Météo-France, à 19,3 millions d’euros, en baisse d’environ 5 % par rapport à 2013. Ceci tiendrait à la fois de l’atonie du marché, les entreprises réduisant leurs dépenses compte tenu du contexte économique, et de la pression concurrentielle qui a pesé sur les prix de vente.

Auditionnée par le Rapporteur spécial, la direction de Météo-France a décrit la réussite de la stratégie des offres destinées au secteur de l’assainissement ainsi que la recherche de nouveaux secteurs de croissance, tels l’énergie, les activités off-shore, l’assurance ou l’assistance aux grands événements sportifs. Elle a fait état de la reprise à la concurrence de plusieurs clients sur le secteur des transports et des médias. Météo-France a ainsi remporté récemment plusieurs appels d’offre importants, avec la SNCF, les autoroutiers nationaux, ERDF ou d’autres grands opérateurs publics ou privés.

Météo-France a pour volonté, au cours des prochaines années, de poursuivre une stratégie de diversification de ses prestations dans le domaine concurrentiel et de capitaliser sur la multiplication des usages de l’information météorologique et sur le développement du marché de la météo-sensibilité. Cette stratégie doit s’appuyer sur le développement de produits et services de plus en plus orientés vers l’activité des bénéficiaires. L’établissement fournit ainsi une information enrichie et s’appuie sur des prévisionnistes conseils qui proposent une véritable « aide à la décision ».

Les résultats obtenus au cours des douze derniers mois ont été présentés comme très encourageants et permettent d’envisager en 2015 et en 2016 une croissance en valeur de l’activité pour les secteurs professionnels, alors même que les tensions sur les prix se traduisent par une érosion des recettes lors des renouvellements de marchés.

3. La réduction des dépenses préserve la capacité à investir

La contraction de l’ensemble des ressources oblige l’établissement à diminuer de façon continue ses charges courantes, afin de maintenir sa capacité d’investissement dans les équipements de haute technologie.

Ainsi, alors que le compte financier pour 2014 présente un montant total de charge de 386,1 millions d’euros, le budget initial pour 2015 présente des charges totales en baisse de 150 000 euros, ramenée à 385,9 millions d’euros. Mais l’investissement augmente parallèlement, passant de 19,1 à 20,9 millions d’euros.

Pour 2016, la majorité des crédits d’investissement concerneront des projets de modernisation des réseaux d’observation et des moyens de calcul intensif, avec, en particulier, la poursuite du renouvellement des équipements de stockage des informations.

L’effort principal porte sur les dépenses de fonctionnement : les économies proviennent de la réorganisation territoriale de Météo-France avec la fermeture de 53 centres départementaux entre 2011 et 2016 : 43 centres ont d’ores et déjà fermés, 3 fermeront d’ici la fin de l’année 2015 et 7 seront fermés en 2016. Ce mouvement contribue à la réduction continue des effectifs, qui permet de contenir les dépenses de personnel.

Alors que l’établissement employait 3 541 agents en 2009, le projet de loi de finances pour 2016 présente un plafond d’emplois de 3 080 emplois équivalents temps plein travaillé ce qui représente une baisse de 461 emplois en 7 ans, et au total une diminution des effectifs de 13 %.

En 2016, 78 ETPT seront supprimés, après 85 emplois en 2015, selon la répartition décrite dans le tableau ci-dessous.

ÉVOLUTION DU PLAFOND D’EMPLOI (EN ETPT) ENTRE 2015 ET 2016 PAR CATÉGORIES

Catégories d’emplois

2015

2016

Évolution 2015-2016

%

Catégorie I "Cadres supérieurs"

Directeurs, agent comptable, administrateurs civils, ingénieurs ponts, eaux et forêts, directeurs de recherche

173

166

– 7

– 4,05 %

Catégorie II "Ingénieurs"

Chargés de recherche, ingénieurs des travaux de la météorologie (ITM), professeurs certifiés, personnels militaires, ITM de cadre territorial

810

796

– 14

– 1,73 %

Catégorie III "Techniciens supérieurs"

Techniciens supérieurs de la Météorologie, aides techniciens de la météorologie, personnels techniques territoriaux de catégorie B ou équivalents, techniciens supérieurs des études et d’exploitation de l’aviation civile

1 613

1 564

– 49

– 3,04 %

Catégorie IV "Administratifs et Ouvriers"

Personnels administratifs de catégories A, B et C, personnels médico-sociaux, ouvriers d’État, personnels territoriaux administratifs et ouvriers

562

554

– 8

– 1,42 %

TOTAL

3 158

3 080

– 78

– 2,47 %

Source : ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie.

Cette réduction continue des effectifs est rendu possible par les fermetures d’implantations locales et s’est accompagnée d’une réorganisation technique dans le domaine de la prévision. Elle a conduit à une réduction substantielle du nombre des postes de catégorie III et, parallèlement, à une diminution plus modérée des autres catégories d’emploi.

En outre, depuis 2014, Météo-France a engagé une mutualisation progressive des fonctions « support » de gestion des ressources humaines, finances, comptabilité, logistique, marchés et communication. Cette démarche va aboutir en 2016 avec la mutualisation complète des fonctions administratives sur le site de Toulouse qui est, par ailleurs, la principale implantation technique et regroupe près de 1 200 agents.

Jusqu’en 2014, la baisse continue des effectifs ne s’était pas traduite par une diminution des dépenses de rémunération, principalement en raison de l’augmentation régulière des taux de cotisation au compte d’affectation spéciale Pensions, passé de 62,47 % à 74,60 % entre 2009 et 2013.

En 2014, la stabilité du taux des cotisations sociales a permis que la baisse des effectifs se traduise par une diminution de la masse salariale de 2,72 millions d’euros, soit – 1,02 %. Ce mouvement s’accentue en 2015 avec une baisse de 5,8 millions d’euros et une baisse de 6,3 millions d’euros en 2016, comme le détaille le tableau suivant.

ÉVOLUTION DE LA MASSE SALARIALE DE MÉTÉO FRANCE

(en millions d’euros)

Année

Crédits de personnel

Évolution

(%)

2010

254,7

   

2011

261,9

+ 7,2

+ 2,8

2012

264,7

+ 2,8

+ 1,1

2013

268,8

+ 4,1

+ 1,5

2014

266,1

– 2,7

– 1,0

2015

260,3

– 5,8

– 2,2

2016

254

– 6,3

– 2,4

Source : projets et rapports annuels de performance.

L’accélération du mouvement de diminution des crédits de personnels ne se traduit pas pour autant par une diminution du coût moyen des emplois, qui augmentera, pour chaque catégorie, en 2016, principalement sous l’effet du déroulement de carrière des agents fonctionnaires.

ÉVOLUTION DU COÛT DES EMPLOIS PAR CATÉGORIES D’EMPLOIS

(en euros)

 

Coût total annuel moyen charges comprises en 2014

Coût total annuel moyen charges comprises en 2015, Prévision

Variation

%

Cadres supérieurs

137 597

139 185

+ 1 588

+ 1,15%

Ingénieurs

83 130

84 109

979

+ 1,18%

Techniciens supérieurs

64 557

66 289

+ 1 732

+ 2,68%

Administratifs et ouvriers d’État

59 315

61 546

+ 2 231

+ 3,76%

Source : Ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie

La révision des implantations territoriales

Le resserrement du réseau territorial de Météo-France par une réduction des implantations de 108 à 55 a été décidé par le conseil de modernisation des politiques publiques le 12 décembre 2007 et s’achèvera en 2016.

Ce resserrement dans des centres de plus grande taille est permis par les modèles numériques qui donnent des résultats très supérieurs au passé au point de faire gagner un jour de fiabilité tous les dix ans. Il s’est accompagné de la mise en place, en 2012, d’une nouvelle organisation de la prévision météorologique, avec le passage à une « prévision amont » organisée sur deux niveaux (national, interrégional) et non trois comme précédemment. Le troisième niveau, à l’échelon territorial, se concentre dorénavant sur la prévision conseil répondant aux besoins des utilisateurs.

Les choix de fermetures d’implantations ont été guidés, d’une part, par des éléments techniques relatifs à l’activité de chaque centre et à la reprise de leurs activités après fermeture, d’autre part, par les contraintes de mobilité pour les agents concernés.

Un projet dénommé « Accompagnement individuel de la réorganisation territoriale » a été mis en place en avril 2009. Des entretiens individuels ont visés à apprécier les contraintes des agents concernés par les fermetures et à construire de nouveaux parcours professionnels. À l’été 2014, la totalité des agents concernés par les fermetures 2012, 2013 et 2014 avaient trouvé une solution acceptable et près de la moitié des agents des centres fermant en 2015 et 2016 disposaient déjà de solutions. La direction de Météo-France a indiqué au Rapporteur spécial que, concernant 2016, un tiers des agents des centres amenés à être fermés n’avaient pas encore accepté une solution, qui peut consister en un déplacement ou en un télétravail.

Ce nouveau maillage ne doit pas fragiliser la mission d’appui localisé aux autorités civiles, même en cas de moindre proximité des centres de Météo-France. Des webconférences ou des extranets permettent par exemple d’apporter les informations nécessaires aux préfets, aux services de la sécurité civile et aux collectivités territoriales.

Le réseau territorial de Météo-France demeure dense, au regard des réseaux établis par certains de nos partenaires : l’Allemagne compte 6 centres régionaux, et ce format est en cours de réduction à 2 grands centres (pour 2 300 agents), le Royaume-Uni compte un seul centre (pour 1 800 agents), l’Espagne une quinzaine.

● La nécessité de continuer à investir

L’activité météorologique suppose un ensemble d’infrastructures lourdes : réseau d’observation, moyens de calcul, équipes de recherche… Météo-France va donc être amenée à engager de nouveaux investissements importants à partir de 2017 et 2018.

C’est un des principaux enjeux de la négociation, courant 2016, du nouveau contrat d’objectifs et de performance.

Ces investissements devront ainsi permettre de poursuivre le renouvellement des radars hydrométéorologiques, essentiels pour être avertis de la survenue de pluies intenses et de crues rapides potentiellement dévastatrices.

De même, le supercalculateur actuel provient d’une succession de montées de version majeures d’un équipement initialement mis en place en 1993-1994. Le coût actuel s’élève à 7,2 millions d’euros par an, dans un marché qui lie Météo-France à Bull jusqu’en 2020. Un changement complet sera nécessaire en 2020, au terme d’appels d’offre qui devront être lancés en 2018. Le nouveau produit devrait être significativement plus coûteux que l’ancien, en raison des besoins de stockage d’informations supplémentaires qui accompagnent l’augmentation de la puissance de calcul.

Météo-France dispose également, en propre, d’une école de la météorologie, intégrée aux services météorologiques, contrairement aux autres pays européens, qui ont recours au système universitaire. La direction de Météo-France considère qu’il s’agit d’un atout qui permet de bénéficier de techniciens et d’ingénieurs immédiatement opérationnels. Ce système nécessite donc de préserver les moyens de formation de l’établissement.

Le Rapporteur spécial souligne l’importance des investissements dans un secteur crucial tant en matière de sécurité publique, de navigation aérienne ou maritime, ou de défense nationale. Selon une évaluation présentée au Rapporteure spécial par la direction de Météo-France, à partir de données fournies par l’Organisation météorologique mondiale des Nations Unies, un rapport de 1 à 5 peut être établi entre l’investissement consenti en matière d’équipement météorologique et le bénéfice obtenu pour l’ensemble des acteurs économiques et sociaux.

Le Rapporteur spécial considère donc que la priorité doit être accordée au renouvellement des équipements lourds et des infrastructures de pointe, et à leur maintenance, qui constituent la garantie du maintien, au plus haut niveau, des capacités de Météo-France à répondre à ses missions.

*

* *

EXAMEN EN COMMISSION

Après les auditions de Mme Ségolène Royal, ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie et de M. Alain Vidalies, secrétaire d’État aux transports, à la mer et à la pêche (voir le compte rendu de la commission élargie du 5 novembre 2015 à 15 heures (4)), la commission des finances examine les crédits de la mission Écologie, développement et mobilité durables.

La commission examine l’amendement n° II-CF396 de M. Marc Goua.

M. Marc Goua, rapporteur spécial. Cet amendement vise à rétablir les crédits budgétaires du centre interprofessionnel technique d’études de la pollution atmosphérique (CITEPA) à un niveau identique à celui de la loi de finances initiale pour 2015. Alors que le CITEPA est un acteur majeur de la lutte contre le changement climatique, l’importance des restrictions budgétaires proposées ne lui permettrait plus de réaliser l’intégralité de ses missions. Cette situation, l’année où la France organise la COP 21, serait très regrettable. C’est pourquoi je vous propose de rétablir la dotation du CITEPA en l’augmentant de 140 000 euros.

La commission adopte l’amendement n° II-CF396.

Puis, suivant l’avis favorable de M. Marc Goua, M. Jean-Claude Buisine, M. Jean-Claude Fruteau, M. Alain Rodet et M. Olivier Faure, rapporteurs spéciaux, et malgré l’avis défavorable de M. Hervé Mariton, rapporteur spécial, la Commission adopte les crédits de la mission Écologie, développement et mobilité durables modifiés.

La commission adopte ensuite, suivant l’avis favorable de M. Jean-Claude Fruteau, rapporteur spécial, le budget annexe contrôle et exploitation aériens, puis suivant les avis favorables de MM. Marc Goua, Alain Rodet et Olivier Faure, rapporteurs spéciaux, elle adopte les crédits des comptes spéciaux Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale, Aides à l’acquisition de véhicules propres et Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs.

*

* *

LISTE DES AUDITIONS RÉALISÉES
PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL

– Météo-France : M. François Bolard, secrétaire général, M. Jean-François Stranart, chef du département des affaires budgétaires

– Syndicat national des pilotes de ligne : France Alpa, M. Érick Derivry, Président, Mme Sandrine Johnson, Secrétaire générale, M. Arthur Bonhême, cabinet Cominst, Conseil.

– Aéroports de Paris* : M. Augustin de Romanet, président-directeur général, M. Edward Arkwright, directeur général adjoint finances, stratégie et administration, et M. Khaled Klaa, chargé des relations parlementaires.

– Direction générale de l’aviation civile : M. Patrick Gandil, directeur général, Mme Marie-Claire Dissler, Secrétaire générale, M. Pierre-Yves Bissauge, Adjoint au directeur du transport aérien, M. Christophe Bigand, Sous-directeur finances à la direction des services de la navigation aérienne, M. Philippe Bassot, Sous-directeur des finances et du contrôle de gestion au secrétariat général.

– Air France* : M. Pierre-Olivier Bandet, directeur général adjoint cabinet de la Présidence et affaires Publiques, M. Marc Verspyck, directeur général adjoint économie-finances, Mme Patricia Manent, directrice adjointe des affaires publiques.

– Airbus Group France* : Mme Anne-Sophie de la Bigne, directrice affaires civiles à la direction des affaires publiques France, Mme Cécile Ha-Minh-Tu, directrice des relations institutionnelles, chargée des relations avec les territoires, Mme Annick Perrimond-du Breuil, directrice des relations avec le Parlement.

Ce représentant d’intérêts a procédé à son inscription sur le registre de l’Assemblée nationale, s’engageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de l’Assemblée nationale.

© Assemblée nationale

1 () Le groupe comporte également une division pour les secteurs de la défense et du spatial, et une division pour les hélicoptères.

2 () Ces coûts sont rendus dynamiques par le début de la mise en œuvre du nouveau standard 3 pour les systèmes de détection des explosifs lors du contrôle des bagages de soute.

3 () 12 millions d’euros seront ainsi reversés au budget de l’État en 2015 et ce montant pourrait atteindre 20 millions d’euros en 2016.

4 () http://www.assemblee-nationale.fr/14/budget/plf2016/commissions_elargies/