Accueil > Documents parlementaires > Les rapports législatifs
Version PDF


N
° 3110

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 8 octobre 2015.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2016 (n° 3096),

PAR Mme Valérie RABAULT,

Rapporteure Générale

Députée

——

ANNEXE N° 23

ÉGALITÉ DES TERRITOIRES ET LOGEMENT

Rapporteur spécial : M. Christophe CARESCHE

Député

____

SOMMAIRE

___

Pages

I. UN PROJET DE BUDGET VOLONTAIRE MALGRÉ SES FORTES CONTRAINTES… 6

1. Le budget pour 2016 opère de nouvelles économies pour contrebalancer notamment la consolidation des moyens de l’urgence 6

2. La progression de la contribution de l’État au FNAL serait également tempérée par des mesures de réforme des APL 15

3. Le nouveau renforcement des dotations de l’hébergement masque de vrais progrès dans la stratégie du logement d’abord 20

II. GRÂCE À UNE APPROCHE TOUJOURS PLUS GLOBALE ET PARTENARIALE DE LA POLITIQUE DU LOGEMENT 27

1. Dépenses fiscales et fonds d’épargne sont les principaux leviers financiers à la main de l’État 27

2. Le soutien à la production de logements sociaux reste le deuxième poste financier malgré le rationnement budgétaire 30

a. Des objectifs maintenus à un niveau ambitieux 30

b. Un nouveau fonds qui vise à sécuriser le financement des aides à la pierre et améliorer leur répartition 34

c. Une mobilisation d’Action logement consolidée 36

3. Les autres grandes politiques en faveur du logement conjuguent essentiellement aides fiscales et investissements des partenaires 39

a. Le développement des logements intermédiaires 39

b. L’aide à la rénovation des logements 41

c. Le soutien de l’accession à la propriété 44

4. Mais le projet de loi de finances pour 2016 reste flou sur des points cruciaux 47

a. Une grande incertitude pèse sur les capacités d’intervention de l’ANAH, et plus généralement sur les moyens de la transition énergétique 47

b. La coordination du FNAP avec les dispositifs de mutualisation mis en place par le secteur du logement social reste à définir 49

EXAMEN EN COMMISSION 53

Article 54 : Affectation de recettes au Fonds national d’aide au logement (FNAL) 55

Article 55 : Amélioration de la prise en compte de la situation financière des bénéficiaires d’aides personnelles au logement (APL) 61

Article 56 : Création et financement du Fonds national d’aide à la pierre (FNAP) 75

ANNEXE : LISTE DES AUDITIONS RÉALISÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL 93

L’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

À cette date, seulement 24 % des réponses relatives à la mission Égalité des territoires et logement étaient parvenues au Rapporteur spécial.

Chiffres clés pour 2016

Le budget de la politique du logement, de la prévention de l’exclusion et de l’égalité des territoires devrait s’élever à 18 153,7 millions d'euros en autorisations d’engagement et à 17 893,7 millions d’euros en crédits de paiement, augmentant respectivement de 4 428 millions d’euros et de 4 486,6 millions d’euros par rapport aux prévisions pour 2015.

– Cette forte hausse résulte essentiellement d’une nouvelle mesure de périmètre : en compensation des mesures prises en deuxième étape du Pacte de compétitivité, la troisième aide personnelle au logement (ALF) est transférée des régimes sociaux au FNAL et, par répercussion, au budget de l’État. Cela se traduit par un alourdissement substantiel des prévisions de dépenses du programme 109 Aide à l’accès au logement. Il verrait ainsi ses dotations augmenter de 40,2 %, avec 15 402 millions d’euros en autorisations d’engagement comme en crédits de paiement. Pour mieux maîtriser ces dépenses, le projet de loi de finances propose trois mesures de réforme des aides personnelles au logement (article 55) et des financements complémentaires pour le FNAL (article 54).

– Le programme 177 Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables devait être doté de 1 440,4 millions d’euros en autorisations d’engagement et crédits de paiement, soit une nouvelle progression de 74,4 millions d’euros (+ 5,4 %). Il s’agissait d’assurer des réponses à la hauteur des besoins toujours croissants d’hébergement d’urgence. Cependant, l’engagement des Plans Migrants et Réfugiés au deuxième semestre 2015 a rendu nécessaire de nouveaux renforts budgétaires, non seulement pour boucler l’exercice en cours mais pour assurer le financement en 2016 des dispositifs spécialement mis en place pour un accueil digne de ces victimes de guerre. Le Gouvernement a ainsi ajouté, par amendement, 96 millions d’euros aux crédits du programme en 2016. Parallèlement, le plan de résorption des nuitées hôtelières, lancé cette année, devrait accentuer l’inversion des tendances en faveur de solutions de logements plus adaptés.

– Les crédits du programme 135 Urbanisme, territoires, et amélioration de l’habitat diminueraient globalement à 546,1 millions d'euros d’autorisations d’engagement (– 8,7 % ou – 52,1 millions d’euros par rapport à 2015) mais progresseraient à 286,1 millions s’agissant des crédits de paiement (+ 2,3 % ou + 6,5 millions d’euros). En outre, ceux-ci seront complétés à hauteur de 270 millions d’euros par des fonds de concours du nouveau Fonds national des aides à la pierre (FNAP) créé par l’article 56. La baisse des autorisations d’engagement masque en fait une augmentation nette des aides à la pierre portées par ce programme : non seulement les crédits initialement demandés devaient croître de 24 millions d’euros en autorisations d’engagement par rapport aux dotations votées pour 2015, pour atteindre 400 millions d’euros, mais le Gouvernement a ajouté, par amendement, 100 millions d’euros supplémentaires. Il a également porté les crédits de paiement correspondants à 250 millions d’euros en 2016.

– Le programme 337 Conduite et pilotage des politiques de l’égalité des territoires, du logement et de la ville, qui finance les rémunérations des personnels en charge de la politique du logement et de l’urbanisme serait doté de 765,3 millions d’euros en autorisations d’engagement et crédits de paiement, en décroissance de 1,5 %
(– 11,9 millions d’euros) pour contribuer aux efforts d’économie des services de l’État.

I. UN PROJET DE BUDGET VOLONTAIRE MALGRÉ SES FORTES CONTRAINTES…

1. Le budget pour 2016 opère de nouvelles économies pour contrebalancer notamment la consolidation des moyens de l’urgence

Dans l’absolu, les dotations de la mission Égalité des territoires et logement connaissent une nouvelle hausse de 32,3 % en autorisations de paiement (AE) et de 33,5 % en crédits de paiement (CP). Elles progressent de, respectivement, 4,4 et 4,5 milliards d’euros entre les crédits votés pour 2015 et les prévisions pour 2016. Au total, ces dernières s’élèveraient à 18,2 milliards en AE et 17,9 milliards en CP.

Toutefois, en volume, cette augmentation correspond précisément au nouveau transfert de charges entre la Sécurité sociale et l’État, via le Fonds national d’aide au logement (FNAL). Assurant déjà l’intégralité des dépenses de deux des trois aides personnelles au logement, celui-ci récupérera le financement de la troisième.

Cette opération masque en fait les efforts notables déployés par le Gouvernement, et le ministère en particulier, pour minimiser cette nouvelle pression pour l’État, trouver d’autres économies sur ses dépenses de fonctionnement, tout en consolidant les moyens donnés aux dispositifs répondant aux besoins les plus fondamentaux.

Ainsi, si l’action 1 Aides personnelles du programme 109 Aide à l’accès au logement, qui assure le bouclage financier du FNAL, voit ses dotations augmenter de 40,3 %, passant de 10,97 milliards d’euros en 2015 à 15,39 milliards en 2016, leur progression (+ 4,42 milliards d’euros) serait inférieure à la masse de dépenses transférées (+ 4,69 milliards d’euros) grâce à des mesures de réforme dont les principales sont proposées par l’article 55 du projet de loi de finances (cf. commentaire de l’article 55).

Et si l’on écarte cette action qui recouvre des dépenses de guichet sur lesquelles l’État n’a aucune maîtrise - autrement qu’en modifiant les règles d’accès ou de calcul de ces aides -, on constate que les autres dotations demandées pour la politique de l’hébergement, du logement et de l’égalité des territoires ne croîtraient que d’environ d’une dizaine de millions d’euros et ce, en dépit :

– d’un substantiel nouveau rebasage des crédits de l’action 12 Hébergement et logement adapté du programme 177 Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables (+ 6,2 % soit + 79,8 millions d’euros en AE et CP),

– et d’un renforcement des autorisations d’engagement de l’action 1 Construction locative et amélioration du parc du programme 135 Urbanisme, territoires et amélioration de l’habitat (+ 6,4 % soit 24,2 millions d’euros). Les CP de l’action diminueraient, quant à eux, de 42,2 millions d’euros, soit – 28,7 % entre 2015 et 2016, mais grâce au rattachement d’importants fonds de concours les moyens possibles s’élèveraient en réalité à un niveau total supérieur de 12 millions d’euros par rapport aux prévisions pour 2015.

De fait, à côté de ces évolutions, plusieurs des actions de la mission supportent de nouvelles réductions de leurs crédits.

LES CRÉDITS DU LOGEMENT EN 2015 ET 2016

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

 

LFI 2015

PLF 2016

2016/2015

(en %)

LFI 2015

PLF 2016

2016/2015
(en %)

Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables

1 365,9

1 440,4

+ 5,4

1 365,9

1 440,4

+ 5,4

Prévention de l’exclusion

59,9

60,5

+ 0,9

59,9

60,5

+ 0,9

Hébergement et logement adapté

1 289,9

1 369,7

+ 6,2

1 289,9

1 369,7

+ 6,2

Conduite et animation des politiques de l’hébergement et de l’inclusion sociale

16,1

10,2

– 36,7

16,1

10,2

– 36,7

Aide à l’accès au logement

10 984,3

15 401,9

+ 40,2

10 984,3

15 401,9

+ 40,2

Aides personnelles

10 966,9

15 385,8

+ 40,3

10 966,9

15 385,8

+ 40,3

Information relative au logement et accompagnement des publics en difficultés

8,1

8,0

– 0,8

8,1

8,0

– 0,8

Sécurisation des risques locatifs (libellé modifié)

9,3

8,2

– 11,8

9,3

8,2

– 11,8

Urbanisme, territoires et amélioration de l’habitat

598,2

546,1

– 8,7

279,6

286,1

+ 2,3

Construction locative et amélioration du parc

380,8

405,0

+ 6,4

147,2

105,0

– 28,7

Soutien à l’accession à la propriété

3,9

3,7

– 5,3

3,9

3,7

– 5,3

Lutte contre l’habitat indigne

4,8

4,7

– 2,5

4,8

4,7

– 2,5

Réglementation, politique technique et qualité de la construction

48,9

53,7

+ 9,9

48,9

53,7

+ 9,9

Soutien

14,9

14,1

– 5,4

14,9

14,1

– 5,4

Urbanisme et aménagement

144,9

64,9

– 55,2

59,9

104,9

+ 75,1

Conduite et pilotage des politiques de l’égalité des territoires, du logement et de la ville

777,2

765,3

– 1,5

777,2

765,3

– 1,5

Personnels œuvrant pour les politiques de l’urbanisme, de l’aménagement, du logement et de l’habitat

660,6

650,1

– 1,6

660,6

650,1

– 1,6

Personnels œuvrant au soutien du programme Conduite et pilotage de l’égalité des territoires, du logement et de la ville

116,6

115,2

– 1,2

116,6

115,2

– 1,2

TOTAL

13 725,7

18 153,7

+ 32,3

13 407,1

17 893,7

+ 33,5

Source : projet annuel de performances 2016. Dotations sans attribution de produits ni fonds de concours.

Les fonctions support sont à nouveau les plus touchées.

● L’effort d’économie réel le plus important, en valeur absolue, est encore assuré par le programme 337 Conduite et pilotage des politiques du logement et de l’égalité des territoires qui réunit les crédits de masse salariale du ministère du logement, de l’égalité des territoires et de la ruralité et de ses services déconcentrés, à l’exception de ceux relatifs aux personnels mettant en œuvre les actions du programme 177 qui relèvent du budget du ministère chargé des affaires sociales et mobilisent 44,3 millions d’euros de la mission Solidarité, insertion et égalité des chances. A contrario sont inclus dans les dotations du programme 25,9 millions d’euros pour les personnels contribuant à la rénovation urbaine qui relèvent en réalité du programme 147 Politique de la ville de la mission Politique des territoires.

En gestion, l’ensemble des moyens du programme 337 sont transférés au programme 217 Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables.

En diminuant les dotations du programme 337 de 777,2 à 765,3 millions d’euros, l’économie envisagée s’élèverait à 11,9 millions d’euros en 2016 (- 1,5 % par rapport aux prévisions pour 2015).

Elle résulterait essentiellement d’une diminution du plafond autorisé d’emplois de 307 ETPT (1) entre 2015 et 2016, le diminuant à 12 500 ETPT (réparti entre 10 617 emplois sur la première action du programme et 1 883 sur la deuxième action), poursuivant ainsi les efforts de réduction engagés depuis 2013. L’action 1, qui réunit les emplois mettant en œuvre les politiques des programmes 109 et 135, supporterait la plus forte réduction, en valeur absolue (- 284 ETPT) comme relative (– 2,6 %).

La baisse globale traduirait notamment :

– l’effet en année pleine du schéma d’emplois mis en œuvre en 2015, soit - 106 ETPT (représentant une moindre dépense évaluée à 2,5 millions). Parmi ces mesures, on rappellera la cessation des missions d’assistance technique pour des raisons de solidarité et d’aménagement du territoire (ATESAT) décidée en loi de finances pour 2014 et qui devrait avoir abouti fin 2015. Certains des emplois dédiés auront cependant été redéployés vers le nouveau dispositif de conseil aux territoires ;

– l’effet en année courante du schéma d’emplois prévu pour 2016, soit - 177 ETPT (ou – 5,9 millions d’euros). Il poursuit en particulier la mise en œuvre de l’article 134 de la loi ALUR du 24 mars 2014 (2) qui a mis la fin, à partir de juillet 2015, à la mise à disposition des services de l’État auprès de certaines collectivités territoriales.

En sens inverse, des moyens supplémentaires sont prévus dans les territoires les plus tendus pour assurer notamment une tutelle renforcée des bailleurs sociaux, suivre la réforme des attributions de logements sociaux ou se substituer aux maires des communes carencées selon la loi SRU (3).

● Les autres efforts d’économie à souligner relèvent :

– en premier lieu, de l’action 14 Conduite et animation des politiques de l’hébergement et de l’inclusion sociale, au sein du programme 177, qui finance le pilotage et l’animation du secteur, les fédérations locales des centres sociaux. Ses dotations diminueraient de 5,9 millions d’euros en AE et CP par rapport à la loi de finances (LFI) pour 2015, soit une baisse de 36,7 % les portant à 10,2 millions d’euros. Toutefois, 4,7 millions d’euros du différentiel correspondent au transfert au programme 163 Jeunesse et vie associative des contributions au fonds de coopération de la jeunesse et de l’éducation populaire (FONJEP) – elles-mêmes ramenées à 3,8 millions en 2016 ;

– sont également en très légère diminution les crédits de l’action 2 Information relative au logement et accompagnement des publics en difficulté du programme 109 : la participation de l’État au financement des 79 agences départementales d’information sur le logement (ADIL) et de leur tête de réseau, l’ANIL, baisserait de 0,8 % (– 68 000 euros) mais à 8 millions d’euros en AE. En CP, elle reste fixée à un niveau un peu supérieur à sa consommation en 2014 (7,5 millions). L’utilité et la qualité du service de ces associations sont unanimement reconnues et leur activité ne cesse de croître avec 848 000 consultations en 2014 (843 000 en 2013). Elles sont également fortement impliquées dans le développement du réseau des observatoires locaux des loyers et la diffusion de l’information sur les aides à la rénovation énergétique ;

– de manière générale, les crédits demandés pour le programme 135 Urbanisme, territoires et amélioration de l’habitat baisseraient globalement de 52,1 millions d’euros en AE (– 8,6 %), mais progresseraient de 60,5 millions en CP (+ 12 %) en CP et, dans le détail, seules ses actions 2 Soutien à l’accession à la propriété et 5 Soutien traduiraient de vraies économies.

L’action 2 correspond aux commissions de gestion versées à la Société de gestion du fonds de garantie de l’accession sociale à la propriété (SGFGAS) pour une partie des prêts immobiliers auxquels elle apporte la garantie de l’État, c’est-à-dire essentiellement des différentes formes de « prêts à taux zéro » (PTZ). D’autres commissions sont versées depuis le programme 145 Épargne au titre des prêts conventionnés et de l’épargne-logement et la charge de garantie elle-même, pour l’ensemble des prêts facilitant l’accession sociale à la propriété, relève du programme 114 Appels en garantie de l’État, les deux programmes étant attachés à la mission Engagements financiers de l’État (4). Les prévisions de crédits de l’action 2 baisseraient de 5,3 % ; cela ne représenterait cependant qu’un recul de 205 000 euros en AE et CP. Le Gouvernement escompte une réduction des coûts fixes de la société de gestion avec l’élargissement de ses missions à la gestion et au contrôle de l’épargne-logement. Mais la SGFGAS doit poursuivre ses efforts de rationalisation pour pouvoir faire face aux nouveaux flux de prêts qui devraient suivre les élargissements du PTZ et de l’éco-PTZ prévus aux articles 41 et 42 du projet de loi de finances.

Rappelons que ces dotations (3,7 millions d’euros pour l’action 2 du programme 135 ; environ 0,9 million d’euros pour le programme 145 et 16,9 pour le programme 114) ne sont qu’une faible partie du soutien apporté par l’État aux démarches d’accession sociale à la propriété.

L’action 5 du programme 135 perdrait également 5,4 % de ses dotations
– soit 801 822 euros 
pour s’établir à 14,1 millions d’euros en AE et CP. Elle finance diverses dépenses d’études, de formation, de communication et informatiques. Hors les dépenses de communication, fixées à la hauteur de la consommation de 2014 (0,9 million d’euros), tous les postes diminueraient, y compris les frais des commissions de médiation pour la mise en œuvre du droit au logement (prévisions de 3,7 millions d’euros) malgré la hausse des recours (8 080 recours reçus en moyenne par mois en 2014, soit une augmentation de 6,3 % par rapport à 2013) et des enquêtes sur place.

● Les prévisions de l’action 7 Urbanisme et aménagement du programme 135 apparaissent en forte réduction de 80 millions d’euros en AE (- 55,2 %) par rapport aux dotations pour 2015. Toutefois, les CP progresseraient quant à eux de près de 45 millions d’euros (+ 75,1 %). Les crédits demandés pour 2016 s’élèvent ainsi à 64,9 millions d’euros en AE et 104,9 en CP contre, respectivement 144,9 et 59,9 millions d’euros en 2015.

Cette variation reflète surtout le bouclage du dispositif exceptionnel d’aide aux maires bâtisseurs annoncé par le Premier ministre fin 2014 et mis en place par décret n° 2015-734 du 24 juin 2015.

L’objectif est de soutenir financièrement les communes qui font un effort important pour construire des logements, et ainsi les aider à réaliser les équipements publics et les infrastructures nécessaires à l’accueil de nouveaux habitants.

Cette aide s’élève à environ 2 000 euros par logement construit au-delà d’un certain seuil, défini en pourcentage du parc existant. Elle est versée aux communes depuis le second semestre 2015 sur la base des permis de construire accordés au premier semestre.

Elle est limitée aux communes situées en zone tendue (zone A bis, A et B1) dans lesquelles le potentiel financier par habitant ne dépasse pas un seuil défini par arrêté, sauf pour les communes situées dans le périmètre d’une opération d’intérêt national (OIN) ou ayant contracté un contrat de développement territorial. Environ 1 200 communes y sont éligibles. Les communes carencées qui ne respectent pas les obligations de construction prévues par la loi SRU sont exclues du dispositif.

Dès 2015, l’action 7 du programme 135 a été abondée de 100 millions d’euros en AE et 15 millions d’euros en CP pour doter ce nouveau dispositif. En 2016, 20 millions d’euros d’AE lui seraient encore alloués et, les paiements devant monter en puissance, 60 millions d’euros sont prévus en CP.

Par ailleurs, les 44,9 millions d’euros d’AE et CP initialement votés pour 2015 seraient reconduits en 2016 pour couvrir divers frais comme les contributions aux agences de l’urbanisme ou les missions des architectes-conseils et paysagistes-conseils, les interventions des services centraux ou déconcentrés de l’État dans l’élaboration des documents d’urbanisme et l’observation des territoires, et l’accompagnement des démarches « Ville durable » (ÉcoQuartier et ÉcoCités) et des Ateliers nationales et des territoires... Plus substantiellement, à hauteur de 27,6 millions, elles couvriront les engagements de l’État en matière d’aménagement à travers de grandes opérations d’urbanisme ou des opérations d’intérêt national (OIN) dans le cadre des contrats de projets État-Régions (CPER) 2015-2020. À ce jour, les engagements correspondants devraient représenter de 150,6 à 163,5 millions d’euros sur la période.

Les précédents CPER 2007-2013 ont porté sur 249,1 millions d’euros d’engagements de l’État. Fin 2014, leur taux d’exécution était de 74 %.

● Au-delà des fonctions support, des politiques publiques contribueraient également aux efforts de maîtrise budgétaire.

– Ainsi, l’action 3 Lutte contre l’habitat indigne du programme 135 verrait ses dotations décroître légèrement de 2,5 % (soit seulement – 120 000 d’euros), les crédits demandés s’établissant à 4,7 millions d’euros.

L’essentiel des aides nationales vise à inciter les propriétaires à sortir les logements d’une situation d’indignité en amont des procédures coercitives et est assumé par le budget de l’Agence nationale de l’habitat (ANAH – cf. partie III).

L’action 3 du programme 135 finance, pour sa part, les diagnostics et les travaux d’office engagés par les préfets et les maires en cas d’habitats insalubres ou dangereux. En théorie, les propriétaires défaillants sont censés rembourser les frais engagés, mais le taux de recouvrement reste très faible. On peut donc se demander si les prévisions annoncées sont réalistes quand la consommation a atteint 5,5 millions d’euros en 2014. Mais le ministère escompte que l’astreinte administrative créée par l’article 79 de la loi ALUR à l’encontre des propriétaires bailleurs indélicats les incitera à réaliser les travaux prescrits par les arrêtés de police sans attendre la substitution de l’État ou de la municipalité concernée. Le texte réglementaire qui fixera les conditions de modulation de cette astreinte (jusqu’à 1 000 euros par jour) devrait être publié avant la fin de l’année 2015.

– L’action 3 Garantie des risques locatifs du programme 109 contribue, quant à elle, au financement de la Garantie des risques locatifs (GRL), créée pour faciliter l’accès à un logement à un plus grand nombre de locataires en élargissant les conditions de solvabilité et remobiliser les logements vacants en assurant une plus grande sécurité aux bailleurs privés.

Pour 2016, le projet de loi de finances prévoit 8,2 millions d’euros de dépenses, en baisse de 1,1 million (– 11,8 %) par rapport aux crédits votés pour 2015, mais au niveau des consommations de 2014 (8,3 millions).

Ce dispositif assurantiel permet d’accepter tout locataire dès lors qu’il présente un taux d’effort (5) inférieur à 50 % – quand la norme est à 33 % – sans considérer la nature de son contrat de travail et la stabilité de son revenu. Le locataire est alors dispensé d’apporter une caution. Le surcroît de risque (« sur sinistralité ») par rapport au seuil de sinistralité considéré comme « normal » est intégralement financé soit par Action Logement, soit par l’État. Celui-ci ne rembourse que les excédents de sinistralité constatés au titre des publics « État » (6), Action logement faisant l’avance de la totalité des compensations aux assureurs et assumant la part liée à « son » public (7).

La GRL a bien touché son public, mais peinait à se diffuser ou était utilisée comme une étape de test des locataires avant que les assureurs ne fassent basculer le contrat sur la Garantie contre les loyers impayés (GLI), plus lucrative pour eux et moins chère pour les bailleurs. Pour dépasser ces réticences et supprimer le recours encore majoritaire au cautionnement – pas toujours possible pour les familles modestes –, la loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR) avait prévu la création d’un dispositif universel, la GUL.

Finalement, le Gouvernement a mis en place des solutions plus restreintes :

– la caution locative étudiante (CLE) est désormais ouverte à l’ensemble des étudiants de moins de 28 ans sans caution familiale, amicale ou bancaire (8) contre une cotisation de 1,5 % du loyer (celui-ci ne pouvant être supérieur à 500 euros en province, 600 en Île-de-France et 700 euros à Paris). Un fonds de garantie a été constitué entre le ministère de l’enseignement supérieur, le Cnous et la Caisse des dépôts et consignations (CDC) ;

– par ailleurs, la convention quinquennale signée le 2 décembre 2014 entre l’État et l’UESL-Action logement (9) a prévu qu’à partir du 1er janvier 2016, la GRL sera remplacée par un nouveau dispositif de sécurisation, sans financement de l’État. Celui-ci visera à « sécuriser les salariés entrant dans un emploi par tout contrat de travail, y compris en mission d’intérim, ou par promesse d’embauche, hors DCI confirmé, d’une entreprise du secteur assujetti (secteur privé hors agricole) et entrant dans un logement du parc locatif privé. Il bénéficiera également, par extension, à l’ensemble des jeunes salariés de moins de 30 ans du secteur assujetti, ainsi qu’aux ménages accompagnés dans le cadre de l’intermédiation locative. » L’UESL et État se sont aussi engagés à « étudier les possibilités d’un élargissement ultérieur du dispositif aux personnes en recherche d’emploi effectuant une mobilité géographique de ce fait, en direction d’un bassin d’emploi situé en zone tendue. » Pour les seuls publics visés, le dispositif proposera une garantie remboursable sous forme d’un engagement d’assurer le paiement du loyer et des charges locatives en cas d’impayés du locataire. Il s’appliquera aux seuls logements en location ou en colocation dont le total « loyer plus charges » est inférieur à un plafond mensuel. Une enveloppe de 120 millions d’euros est réservée sur les ressources de la Participation des employeurs à l’effort de construction (PEEC).

La GRL ne prendra donc plus de nouveaux contrats après le 31 décembre 2015 et sera mise en extinction. À terme, le budget de l’État ne devrait plus supporter ces dépenses.

● Si les crédits demandés sont en légère hausse (+ 535 152 euros soit une croissance de + 0,9 %) pour s’élever à 60,5 millions d’euros en 2016 en AE et CP, cela traduirait néanmoins une quasi stabilisation des dépenses de l’action 11 Prévention de l’exclusion du programme 177 après plusieurs années de dérive. Cette action réunit :

– les dépenses d’aide sociale contribuant à éviter les situations de rupture pour des personnes sans domicile fixe âgées ou en situation de handicap par la prise en charge de leurs frais de séjour en établissements d’hébergement, de prestations d’aide-ménagère, de frais de repas, d’aide à domicile ou d’allocations en extinction. Il s’agit d’une compétence résiduelle de l’État, dérogatoire de l’aide sociale décentralisée des départements. Ces dépenses mobiliseront, en 2016 comme en 2015, 40 millions d’euros en AE et CP ;

– le financement des dépenses de fonctionnement des aires d’accueil par l’aide au logement temporaire (dite ALT 2). Cette gestion avait fait l’objet de plusieurs critiques, dont celles de la Cour des comptes. L’aide était jusqu’alors versée à la place créée sans tenir compte de son occupation réelle, alors que, sur les 25 886 places d’accueil existantes (données de 2013), le taux d’occupation moyen est de 55 %. La loi de finances pour 2014 a réformé le régime de l’ALT 2 pour inciter les gestionnaires à développer l’attractivité des aires et ses textes d’application ont été publiés en décembre 2014. Le nouveau régime, prévoyant une part variable proportionnelle au taux d’utilisation effective des places est mis en œuvre depuis le 1er janvier 2015.

On notera que, parallèlement, les dotations consacrées à la réalisation ou à la réhabilitation des aides d’accueil des gens du voyage au sein de l’action 1 Construction locative et amélioration de l’habitat du programme 135 seraient reconduites au même niveau qu’en 2015 à 5 millions d’euros en AE et CP.

Fin 2014, 74 % des places en aires d’accueil prescrites dans les schémas départementaux avaient été financées, ne marquant aucun progrès par rapport à l’exercice précédent. Les objectifs sont néanmoins reconfirmés.

● Si plusieurs actions de la mission baissent ou se stabilisent, une quatrième action progresserait – en sus des trois principaux postes déjà cités, développés dans les parties suivantes –  par l’alourdissement de charges dont l’État peine encore à suivre le rythme.

L’action 4 Réglementation, politique technique et qualité de la construction du programme 135 verrait ses dotations augmenter de 48,9 à 53,7 millions d’euros en AE et CP entre la LFI pour 2015 et les prévisions pour 2016, soit une hausse de 9,9 % (+ 4,8 millions d’euros).

L’action 4 porte le coût des études visant à améliorer la qualité de la construction et ses performances énergétiques (4,8 millions d’euros envisagés), ainsi que le financement des observatoires du logement (4,6 millions d’euros). Une expérimentation a été lancée en 2013 à partir de 17 observatoires des loyers pilotes ; elle s’est poursuivie et consolidée en 2014 et 2015 avec le déploiement de deux puis cinq nouveaux observatoires. La légère réduction des crédits (0,2 million) mise sur l’optimisation des coûts de traitement des données malgré l’obtention de nouvelles sources massives d’information de la Caisse nationale des allocations familiales et de l’ANAH et le lancement de nouvelles structures attendus en 2016. À ce jour néanmoins, seul l’Observatoire des loyers de l’agglomération parisienne (OLAP) est capable de passer à l’étape de l’expérimentation de l’encadrement des loyers.

L’action 4 porte surtout les dépenses de contentieux de l’habitat et de l’urbanisme, et notamment les astreintes dues par l’État au titre du droit au logement (DALO) qui devraient encore s’alourdir. L’enveloppe prévue en 2016 pour faire face aux condamnations DALO est ainsi portée à 39,7 millions d’euros contre 34,4 en 2015. Cette progression reflète avant tout la croissance des recours (plus de 96 000 en 2014) et des effectifs des personnes reconnues prioritaires pour un relogement ou un hébergement. Les services de l’État réussissent pourtant, dans le même temps, à améliorer le pourcentage des relogements : + 3,5 % entre 2013 et 2014 avec 17 365 bénéficiaires logés contre 16 779 en 2013. Le projet annuel de performances annonce de nouveaux progrès en 2015 (10) : après des taux de 61 % en 2013, 72 % en 2014, il escompte atteindre 85 % de cas satisfaits en 2015 – et monter à 90 % en 2016 grâce à la poursuite de la mobilisation des contingents de logements sociaux « réservés » à l’État. Le relogement sur Paris et en Île-de France reste néanmoins difficile.

Les astreintes liquidées sont versées au FNAVDL (Fonds national d’accompagnement vers et dans le logement), géré pour le compte de l’État par la CGLLS (11). Il a été spécifiquement créé pour recueillir ces sommes et les utiliser au financement d’actions favorisant l’accès au logement des personnes en situation vulnérable, reconnues ou non prioritaires au titre du DALO, et les accompagner dans l’apprentissage de la gestion d’un logement. Ce fonds de concours complète les dotations de l’action 12 Hébergement et logement accompagné du programme 177.

2. La progression de la contribution de l’État au FNAL serait également tempérée par des mesures de réforme des APL

(Pour une description des dispositifs et une analyse des évolutions proposées par le projet de loi de finances plus détaillée, on peut se reporter aux commentaires des articles 54 et 55 ci-après.)

Le Fonds national d’aide au logement (FNAL) finance aujourd’hui deux des trois des aides personnelles au logement, l’aide personnalisée au logement (APL) et l’allocation de logement sociale (ALS).

Ces trois aides représentent un des dispositifs centraux de la politique du logement, le plus lourd financièrement avec 18,1 milliards d’euros de dépenses en 2014. Elles sont vitales pour plus de 6,5 millions de ménages aux ressources modestes (effectifs en 2014) qu’elles aident en payant une partie de leurs dépenses de logement.

Si l’on fait abstraction des étudiants, souvent sans revenus mais non sans soutiens, ces aides sont bien concentrées sur les ménages les plus modestes : les locataires représentaient 92,7 % des bénéficiaires fin 2014, dont 60 % sont logés dans le parc non conventionné ; 80 % d’entre eux avaient un revenu inférieur à un SMIC et 99 % à deux SMIC fin 2013. Les ménages composés d’une personne seule ou d’un couple sans enfant représentaient 59,7 % des bénéficiaires fin 2014, avec un effectif de 3,9 millions. On compte aussi un grand nombre de personnes de plus de 60 ans (17,9 % des bénéficiaires, soit 1,9 million). Les jeunes de moins de 25 ans non étudiants étaient environ 455 000.

Avec 747 000 allocataires, les étudiants représentaient, quant à eux, 11,4 % des bénéficiaires.

Selon le projet annuel de performances (12), ces aides permettent de maintenir un taux d’effort médian après aide à 18,8 % en 2014 laissant un reste à vivre plus soutenable – avec toutefois une grande disparité entre parc public (taux moyen de 11,2 %) et le parc privé (à 25,2 %), dont nombre de locataires connaissent une dégradation de leur taux d’effort réel. Les allocations n’en restent pas moins les aides sociales les plus redistributrices du système de solidarité nationale.

Ces aides soutiennent aussi les marchés du logement en solvabilisant les locataires ou accédants les moins aisés. On peut considérer que les 7,7 milliards d’euros d’APL versées aux locataires des bailleurs sociaux sont aussi une forme d’aide financière au secteur en ce qu’ils garantissent un minimum de revenus locatifs.

L’enjeu est donc double pour l’État : il faut à la fois préserver l’efficacité sociale des aides et réussir à contenir, au moins à ralentir l’évolution des dépenses pour le budget général.

Pour assurer le premier objectif, un mécanisme de revalorisation a été mis en place par la loi du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale. Les paramètres représentatifs de la dépense de logement entrant dans le calcul des aides personnelles (13) sont indexés sur l’évolution de l’indice de référence des loyers (IRL) (14) et remis à niveau chaque année. Ce mécanisme est essentiel mais il participe à la dynamique de ces dépenses : étant donnés les volumes concernés, une revalorisation de seulement 1 % représente un coût budgétaire pour l’État d’environ 270 millions d’euros en année pleine (dans le nouveau périmètre). Cela étant, la faiblesse actuelle de l’inflation a conjoncturellement limité son impact.

En revanche, la forte croissance du nombre des allocataires ces dernières années a accéléré la hausse : ils étaient 5,92 millions avant le début de la crise ; ils sont 6,54 millions fin 2014. En conjuguant ces deux paramètres, les dépenses totales sont ainsi passées de 14 494 millions d’euros en 2007 à 17 879 millions en 2014 (hors frais de gestion).

Pour faire face à ses charges (APL et ALS), le FNAL est, aujourd’hui, alimenté par :

– le produit des prélèvements mis à la charge des employeurs en application de l’article L. 834-1 du code de la sécurité sociale : ils se décomposent en une contribution de 0,1 % assise sur les salaires plafonnés, due par tous les employeurs – publics ou privés – et une contribution de 0,5 % sur la part des salaires dépassant le plafond, due par l’ensemble des employeurs occupant au moins 20 salariés, à l’exception de ceux relevant du régime agricole ;

– et une subvention d’équilibre portée par l’action 1 Aides personnelles du programme 109 Aide à l’accès au logement qui assure l’équilibre du fonds.

Cette subvention n’a cessé de s’alourdir, à l’exception des deux derniers exercices grâce à la mobilisation de recettes nouvelles ou exceptionnelles.

CONTRIBUTION DE L’ÉTAT AU FINANCEMENT DES AIDES PERSONNELLES AU LOGEMENT

(en millions d’euros)

 

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

Total État

4 846

5 086

5 496

5 553

5 535

5 734

5 144

5 177 (1)

1,48 % des droits sur les tabacs

139

143

148

153

162

165

-

-

Contribution de solidarité sur les revenus du capital

-

-

-

-

-

-

546

675

Contribution PEEC

-

-

-

-

-

-

400

300

Total employeurs + CSG

9 359

10 093

10 317

10 515

10 880

11 115

11 559

11 727

Total ALF, ALS et APL

14 494

15 472

15 961

16 221

16 578

17 014

17 649

17 879

Part de l’État dans le total (%)

33,4

33

34,4

34,2

33,38

33,7

29,1

29

Source : ministère de l’égalité des territoires et du logement. (1) Sans compter une dette de 95 M€ à l’égard des régimes sociaux.

Or, la LFI pour 2015, afin de compenser l’allégement des cotisations sociales des entreprises prévu par le Pacte de responsabilité et de solidarité, a mis fin au remboursement par les régimes sociaux d’une part des dépenses du FNAL et transféré à la Sécurité sociale des recettes initialement reçues par le fonds. Ces mesures ont non seulement augmenté les charges du FNAL (évaluées à un total de 13,8 milliards d’euros en 2015) mais aussi plus que proportionnellement alourdi le montant de la subvention d’équilibre apportée par le budget général. Seul un nouveau renfort exceptionnel de 300 millions d’euros de la PEEC a permis d’atténuer un peu le supplément de dépenses pour l’État. Selon les prévisions pour 2015, les besoins sur l’action 1 devaient ainsi progresser de 5 880,2 millions d’euros pour atteindre 10 968 millions d’euros.

2016 verra la mise en œuvre d’une deuxième étape du Pacte de responsabilité et de solidarité avec l’extension, à compter du 1er avril 2016, de l’exonération de charges patronales mise en place en 2015 jusqu’à 3,5 SMIC. L’article 21 du projet de loi de finances – voté en première partie – propose en conséquence le transfert du financement de la troisième aide, l’allocation de logement à caractère familial (ALF), du Fonds national des prestations familiales au FNAL dès le 1er janvier 2016. Le montant concerné serait de 4 691 millions d’euros, sans compter l’évolution naturelle de la dépense déjà assumée par le FNAL.

Pour atténuer l’alourdissement des dépenses du programme 109 qui en découlera en 2016, le projet de loi de finances prévoit deux séries de mesures :

– d’abord l’allocation de recettes complémentaires au FNAL : la première recette n’est qu’une solution temporaire (une dernière contribution de 100 millions d’euros de la PEEC) mais la seconde devrait être un renfort durable. Il s’agirait de transférer le produit de la surtaxe sur les plus-values immobilières supérieures à 50 000 euros (15) qui est actuellement affecté, dans la limite d’un plafond de 45 millions d’euros, au financement des aides à la pierre (Se reporter au commentaire de l’article 54).

Le Rapporteur spécial donne un avis favorable à ces projets qui diminuent directement la charge pour le budget général dans la mesure où l’accord conclu le 2 décembre dernier entre l’État et Action logement permettait encore d’affecter un reliquat de 100 millions d’euros aux politiques nationales en 2016 et qu’en réorganisant le dispositif de financement des aides à la pierre, l’article 56 du projet de loi de finances garantit des fonds de concours supérieurs à ceux qui étaient réunis jusqu’alors ;

– plus fondamentalement, la deuxième série de mesures vise à tempérer la tendance haussière des dépenses d’aides au logement : l’article 55 du projet de loi de finances (Se reporter au commentaire de l’article 55) propose des mesures qui devraient réduire certaines prestations : la prise en compte du patrimoine des bénéficiaires dans les ressources retenues pour le calcul des aides, la suppression de l’exonération de l’évaluation forfaitaire de ces ressources pour les moins de 25 ans qui bénéficient d’un contrat de travail autre qu’à durée déterminée et la dégressivité de l’aide pour les niveaux de loyers excessifs.

Les allocations seront par ailleurs arrondies à l’euro inférieur (ce qui minimiserait les dépenses de 40 millions d’euros).

Très réticente à la réforme des aides en accession qui aurait vraisemblablement abouti à empêcher la vente d’au moins 10 000 logements neufs, l’Assemblée nationale avait obtenu le report de sa mise en œuvre en contrepartie de l’identification de nouvelles pistes d’économies sur les aides personnelles au logement. Le groupe de travail parlementaire qui s’est réuni a proposé plusieurs solutions immédiates. L’article 55 en reprend le principe de la valorisation du patrimoine des allocataires dans l’appréciation de leurs ressources. Les deux autres mesures présentées par cet article n’avaient pas été évoquées par le groupe de travail, mais elles visent à corriger ce que le Gouvernement présente comme des inégalités de traitement entre bénéficiaires.

Le Rapporteur spécial soutient ces réformes dans leurs principes fondamentaux d’équité entre allocataires et de lutte contre les ressources non déclarées. Il souhaite cependant y apporter certaines corrections. Notamment :

– la dégressivité de l’aide ne devrait se déclencher qu’à partir d’un niveau de loyer élevé qui tienne compte de la réalité des marchés du logement. Or, en zone 1, en particulier à Paris, se loger à 200 % du loyer-plafond est une situation plutôt ordinaire. Le Rapporteur spécial propose donc de fixer le seuil minimal à 280 % du loyer-plafond applicable ;

– même si le régime actuel permet certaines dérives, la fragilité particulière des travailleurs précaires de moins de 25 ans justifie des aménagements aux règles de droit commun. Le Gouvernement ayant d’ores et déjà le pouvoir réglementaire de corriger les dysfonctionnements, le Rapporteur spécial propose de maintenir l’exception que la loi ouvrait en faveur des jeunes travailleurs ne bénéficiant pas d’un contrat à durée indéterminée.

Le projet de loi évalue à 204 millions d’euros en 2016 et 365 millions à partir de 2017 les économies résultant de ces dispositions, grâce à quoi, la dépense totale des aides personnelles au logement ne progresserait que modérément à 18,19 milliards d’euros en 2016, alors qu’elle s’est établie à 18,1 milliards en 2014. La subvention d’équilibre apportée par l’État s’élèverait dès lors à 15,38 milliards d’euros en 2016, soit une hausse de 4,42 milliards d’euros par rapport aux prévisions pour 2015.

BUDGET DU FNAL POUR 2016

(en millions d’euros)

Charges aux 31.12.2014

Charges

Recettes

Prévisions initiales des recettes en 2015

 

Prestations APL

8 220

Cotisations employeurs

2 657

2 555

Prestations ALS

5 012

Prélèvement sur la PEEC

100

300

Prestations ALF

4 599

Contribution des régimes sociaux

hors FNAL

Frais de gestion

357

Surtaxe sur les plus-values immobilières

45

 

Contribution de l’État

15 386

10 967

env. 18 100

18 188

18 188

non évaluée

Source : rapport annuel de performances pour 2014 et projets annuels de performances pour 2015 et 2016.

Le Rapporteur spécial observe toutefois que ces prévisions sont fondées sur des hypothèses d’évolution des déterminants de la dépense plutôt optimistes, telles que la réduction du nombre de chômeurs dès l’année prochaine, et que l’addition simple des économies attendues des réformes est hasardeuse. En outre, ces prévisions n’intègrent pas les dépenses des réfugiés syriens et irakiens que la France devrait accueillir (cf. ci-après). Les besoins du programme 109 sont donc vraisemblablement sous-évalués et l’action 1, par conséquent, sous-dotée(16)

3. Le nouveau renforcement des dotations de l’hébergement masque de vrais progrès dans la stratégie du logement d’abord

Après les aides personnelles au logement, l’action 12 Hébergement et logement adapté du programme 177 Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables représente le deuxième volume budgétaire de la mission. Elle vise à répondre aux besoins les plus urgents en matière d’hébergement ou à aider la réinsertion des personnes s’étant retrouvées sans logement. Les crédits demandés s’élèvent à 1 369,7 millions d’euros en AE et CP. Ils traduiraient un nouveau rebasage de presque 80 millions d’euros (+ 6,2 %) par rapport aux dotations votées pour 2015.

Face à la croissance exponentielle des besoins d’hébergement depuis le début de la crise, les crédits de l’action 12 doivent être abondés chaque année en cours d’exercice. Mais leur progression résulte aussi de substantiels renforcements budgétaires que l’actuel Gouvernement a activement engagés en adoptant le plan d’urgence pour les sans-abri dès 2012, puis le plan pluriannuel de lutte contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale du 21 janvier 2013.

Ce sont ainsi 31 puis 111 millions d’euros qui ont été mobilisés et, à peu près, reconduits au fil des exercices suivants pour pérenniser des places ou en créer de nouvelles en hébergement comme en logement adapté. Le développement des capacités d’accueil a ainsi connu une nette accélération depuis 2012.

En Île-de-France particulièrement, elles se sont renforcées de plus de 20 000 places pour atteindre un total de 75 000 places (en comptant l’intermédiation locative et les pensions de famille) à fin septembre.

ÉVOLUTION DES CAPACITÉS D’HÉBERGEMENT ET DE LOGEMENTS ACCOMPAGNÉS FINANCÉS PAR LE PROGRAMME 177 ENTRE 2007 ET 2015

(en nombre de places)

 

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

Urgence et stabilisation (hors CHRS)

14 689

15 911

17 535

17 535

18 593

19 766

22 091

28 692

30 537

Hôtel (1)

9 198

10 377

13 025

13 025

13 948

16 235

20 727

25 496

32 300

CHRS

36 184

38 159

39 442

39 442

39 525

39 346

39 142

39 145

40 690

Total hébergement

60 071

64 447

70 002

70 002

72 066

75 347

81 960

93 333

103 527

Maisons-relais

3 799

5 289

7 909

9 909

n.c.

10 269

11 527

12 702

14 038

Intermédiation locative

n.c.

n.c.

n.c.

n.c.

n.c.

n.c.

15 657

18 378

21 643

Résidences sociales, FTM et FJT bénéficiant de l’AGLS

n.c.

n.c.

n.c.

n.c.

n.c.

n.c.

114 737

149 902

174 068

Parc conventionné aidé par l’ALT1

n.c.

n.c.

n.c.

n.c.

n.c.

n.c.

30 000

30 000

30 000

Total logement accompagné

n.c.

n.c.

n.c.

n.c.

n.c.

n.c.

171 921

210 982

239 749

Total

253 881

304 315

343 276

Situation au 1er janvier de chaque exercice. (1) Hors places hivernales. Sources : DGCS et projets annuels de performances.

Le projet de budget pour 2016 réaliserait un effort budgétaire supplémentaire d’une ampleur louable en cette période d’austérité. Il ne vise cependant pas à créer de nouvelles places d’hébergement, mais à consolider les moyens complémentaires débloqués en 2014 : l’apport de 56 millions d’euros par décrets d’avance et le redéploiement de crédits internes ont, notamment, permis de pérenniser 2 000 places hivernales à la sortie de l’hiver 2014-2015 et le Gouvernement espère un ralentissement des dépenses d’urgence grâce à la mise en œuvre d’une stratégie de résorption des nuitées hôtelières.

LES CRÉDITS DE L’ACTION 12 DU PROGRAMME 177 ENTRE 2014 ET 2016

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

 

Exécution 2014

LFI 2015

PLF 2016

2016/15

Exécution 2014

LFI 2015

PLF 2016

2016/15

12. Hébergement et logement adapté

1 387,2

1 289,9

1 369,7

+ 6,2 %

1 386,2

1 289,9

1 369,7

+ 6,2 %

dont veille sociale

109,1

87,8

90

 

109,1

87,8

90

+ 2,2 M€

dont hébergement d’urgence

475,6

383,3

440

 

475,2

383,3

440

+ 56,4 M€

nombre de places financées hors dispositif hivernal

62 837

+ 2 000

   

dont CHRS (1)

622

623

636,3

 

622,7

623

636,3

+ 13 M€

nombre de places financées

40 690

+ 1 480

   

dont dispositifs de logement adapté

179,2

195,4

203,4

 

179,2

195,4

203,4

+ 8 M€

nombre de places financées ou aidées

239 749

+ 7 000

 

(1) Centres d’hébergement et de réinsertion sociale. Sources : DGCS et projets annuels de performances.

● Le Plan triennal pour réduire le recours aux nuitées hôtelières a été présenté par la ministre du logement le 3 février 2015 et son comité de pilotage opérationnel est installé depuis mars. Il prévoit sur trois ans la réorientation, par substitution, de 105 millions d’euros des dépenses hôtelières vers des solutions alternatives pérennes :

– dont 66 millions d’euros (équivalent à 10 000 places d’hôtel) pour créer 13 000 places dans des dispositifs alternatifs (9 000 places en intermédiation locative, 1 500 en pensions de famille ou maisons-relais, 2 500 places d’hébergement dans des centres dédiés aux familles ou des logements sociaux vacants…) ;

– ainsi que solutions alternatives pour 6 000 demandeurs d’asile actuellement hébergés à l’hôtel ;

– et la généralisation d’un accompagnement social renforcé pour les personnes encore hébergées à l’hôtel.

Cette stratégie vise évidemment une meilleure maîtrise des dépenses d’urgence et une meilleure utilisation des crédits en offrant davantage et mieux que des chambres d’hôtel inadaptées et plus onéreuses que tout autre dispositif. Sous la pression des derniers mois, certaines chambres coûtent plus cher qu’un hébergement accompagné. Cependant, l’objectif est aussi de fluidifier l’ensemble du dispositif en ouvrant les possibilités de sortie des structures de première urgence, dans lesquelles certaines personnes restent des années, et, fondamentalement, d’accélérer la réinsertion des bénéficiaires, en particulier des familles.

Des appels à projets ont été lancés, visant particulièrement quatre régions en forte tension dont l’Île-de-France en premier lieu. Les premiers mois de mise en œuvre du Plan ont déjà permis la création de 1 800 places en CHU pour les familles et 1 300 places adaptées – indépendamment des mesures prises pour les Plans engagés en parallèle en faveur des migrants et des réfugiés de guerre. La croissance des places en hôtel marquerait un vrai ralentissement depuis l’été.

● Néanmoins, malgré le rebasage budgétaire initial, les résultats encourageants du Plan de résorption des nuitées et la poursuite des efforts de rationalisation des coûts des structures (17), le Rapporteur spécial craint que les moyens prévus par l’action 12 du programme 177 ne s’avèrent encore une fois insuffisants – bien que dans une moindre mesure que les exercices précédents. En effet, sur les 130 millions d’euros du décret d’avance soumis au Parlement le 6 octobre dernier, environ 115 millions d’euros devaient couvrir la nouvelle dérive des besoins « classiques » de l’hébergement et de la veille sociale par rapport aux crédits votés pour 2015. Ce sont soit des dépenses déjà engagées grâce aux redéploiements provisoires des dotations du programme 177 (11 millions d’euros sur les enveloppes dédiées au logement accompagné et un douzième des crédits des CHRS), soit les prévisions des territoires pour la fin de l’année. La consommation réelle serait alors supérieure d’au moins 25 millions aux prévisions pour 2016. (18)

Le solde des crédits mobilisés correspondait à :

– 13 millions d’euros de dépenses engagées dans le cadre du Plan Migrants lancé en juin pour accompagner les évacuations de campements à Paris ou en Calaisie (19), dont la moitié pour l’Île-de-France. 6 millions d’euros financent les 5 000 places de logement accompagné spécialement créées et 7 millions 1 500 nouvelles places d’hébergement d’urgence réservées. Ces mesures pourraient coûter en année pleine environ 38 millions d’euros totalement imputés sur le programme 177 ;

–  0,9 à 1,5 million d’euros pour le Plan Réfugiés présenté en septembre par le Premier ministre (20). Il s’agit d’extrapolations variant selon le rythme d’arrivée des migrants syriens ou irakiens venant d’Allemagne. À ce jour, ils ne sont encore que quelques centaines. La Direction générale de la cohésion sociale (DGCS) estime à 70 millions d’euros le coût en année pleine pour le seul programme 177 de la prise en charge des prochains migrants (le Président de la République ayant annoncé que 30 784 personnes seraient accueillies par la France sur deux ans) une fois que leur statut de réfugié est reconnu. Toutefois, leur prise en charge pendant le traitement de leur demande d’asile pourrait également être financée sur le programme 177 au lieu du programme 303 Garantie du droit d’asile de la mission Immigration, asile et intégration qui leur est dédié. Le coût final devrait donc être révisé à la hausse.

En tout état de cause, quels soient les arbitrages à venir et les besoins réels qui en découleront, les crédits demandés pour l’action 12 du programme 177 n’intègrent pas les plans Migrants et Réfugiés. Un temps, nombre d’acteurs intervenant dans l’accompagnement des personnes sans domicile ont craint que les mesures prises ne concurrencent l’accueil des sans-abris et personnes vulnérables, en particulier à l’approche de l’hiver. Ils ont pu légitimement s’étonner des 20 000 places vacantes recensées par le gestionnaire de résidences sociales Adoma en vue de l’accueil des « réfugiés », alors qu’ils doivent refuser des demandes d’hébergement tous les jours en raison de la saturation des parcs existants.

En réalité, ces « disponibilités » seraient, pour la plupart, inadaptées aux besoins « classiques » parce qu’elles sont temporaires, qu’elles nécessitent des travaux préalables ou qu’elles sont éloignées des zones où se concentre la demande. C’est aussi le cas des 77 650 logements sociaux qui ont été recensés comme vacants depuis plus de trois mois (notamment grâce aux diagnostics territoriaux partagés du sans-abrisme au mal-logement, dits à 360 °) et dont la présidente du Haut comité pour le logement des personnes défavorisées suggère la mobilisation en faveur des nouveaux arrivants. Le plan Réfugiés pourrait en revanche y trouver des solutions dans la mesure où il a également pour objectif de mieux répartir leur prise en charge sur l’ensemble du territoire national. Ainsi, le relogement durable de ces réfugiés devrait en principe s’effectuer en zones détendues, hors d’Île-de-France en tout état de cause.

Quant aux places ouvertes dans la Région parisienne pour leur premier accueil, elles ne se sont en aucun cas substituées aux actuelles capacités d’hébergement de droit commun.

Enfin, le Premier ministre a annoncé le 16 septembre un abondement de des crédits dédiés à l’hébergement d’urgence et à la veille sociale (sur le programme 177) à hauteur de 250 millions d’euros. Les 130 millions débloqués en octobre en constituaient le premier volet ; un complément de 120 millions d’euros était attendu. Finalement, le Gouvernement vient de déposer un amendement majorant les crédits de 96 millions d’euros se décomposant en 69,9 millions pour le programme 177 et 26,2 millions pour le programme 109 (qui finance les aides personnelles au logement). Certes, les dépenses vont monter en charge au fil des arrivées des réfugiés et elles n’atteindront pas immédiatement les 70 millions d’euros évalués par la DGCS ; en revanche, les frais engagés pour le plan migrants pèseront pleinement sur l’exercice 2016. Dans ces conditions, le Rapporteur spécial se demande si ce complément budgétaire est bien à la hauteur des besoins – même si, parallèlement, 98,7 millions d’euros supplémentaires ont également été débloqués, par amendement du Gouvernement, pour renforcer en 2016 les dispositifs d’accueil des demandeurs d’asile et des réfugiés (sur les programmes 303 et 104 de la mission Immigration, asile et intégration).

● Indépendamment de ces incertitudes sur les moyens qui devront être mobilisés, le Rapporteur spécial note avec satisfaction qu’une dynamique de développement du logement accompagné semble s’être enfin enclenchée sous l’impulsion du Plan de résorption des nuitées hôtelières.

L’insuffisance de logements accessibles est une des raisons majeures des difficultés à sortir du mal-logement ou de l’hébergement. Mais le logement classique n’est pas adapté à tous, ou il peut être nécessaire à certains ménages de passer par des solutions de transition pour regagner leur autonomie en réapprenant à gérer un logement et à en assumer toutes les obligations. Cette dimension est prise en compte dans les différents modes de logement accompagné, ainsi que dans les actions d’« accompagnement vers et dans le logement » que le Gouvernement s’efforce de développer grâce aux cofinancements apportés par l’action 12. Pour les autres ménages, ces dispositifs offrent des opportunités pour sortir de l’hébergement d’urgence vers des solutions plus durables à défaut d’être pérennes.

Selon la stratégie du « Logement d’abord », il ne s’agit pas seulement de permettre un accès plus rapide au logement, mais de privilégier l’orientation des demandeurs d’hébergement vers un logement adapté sans passer par l’étape Hébergement. Déployés dans tous les départements, les SIAO (services intégrés d’accueil et d’intégration) sont chargés de centraliser les demandes, les données sur les offres d’hébergement et de logement adapté et de réguler les orientations. La priorité donnée à l’orientation sur un logement se traduit également dans un des indicateurs de performances de la mission (21) même si les résultats en sont encore très modestes (2 % en 2014 ; toutefois, la proportion d’une orientation vers un hébergement s’élève à 32 %).

Les crédits pour la veille sociale seraient un peu renforcés en 2016 avec 90 millions d’euros en AE et CP contre 87,8 millions en 2015. Le Rapporteur spécial relève cependant qu’ils sont sensiblement inférieurs aux besoins constatés en 2014 (109,1 millions d’euros consommés). Il est probable que ces prévisions soient encore insuffisantes.

Pour leur part, les dotations dédiées aux divers dispositifs de logement accompagné progresseraient de 4 millions d’euros par rapport aux enveloppes votées pour 2015, les portant à 203 millions d’euros en AE et CP. La consommation n’était encore que de 166 millions d’euros en 2014 – hors dépenses d’accompagnement vers et dans le logement.

En 2016, il est prévu de financer :

– pour 37,3 millions d’euros en AE et CP, l’aide au logement temporaire (ALT1) qui participe au subventionnement d’un parc de logements pour accueillir, en urgence et à titre temporaire, des personnes sans ressources et n’ayant pas accès aux aides personnelles au logement. L’aide est financée à parité par l’État et les organismes de protection sociale. Proposant une prise en charge limitée à six mois, cette formule n’est pas encouragée, mais l’ampleur des besoins justifie le maintien d’un parc conventionné de 30 000 logements ;

– pour 65 millions d’euros en AE et CP l’intermédiation locative. Elle aide les associations ou les organismes de logement social à prendre à bail des logements du parc privé et à les sous-louer à un tarif social à des ménages défavorisés, jusqu’à ce qu’ils puissent devenir locataires en titre. La dépense permet de couvrir le différentiel de loyer entre un loyer social et le prix du marché en sous-location, les charges de fonctionnement pour les opérateurs, ainsi que les coûts d’accompagnement social des ménages bénéficiaires. La captation des logements ordinaires est encore lente, mais s’accélère sous l’impulsion du plan de résorption des nuitées hôtelières. Entre 2013 et 2014, les capacités ont augmenté de 3 265 places. 6 000 places supplémentaires sont prévues en 2016, dont une part importante en Île-de-France grâce au dispositif Solibail ; (22)

– pour 86 millions d’euros en AE et CP (+ 6 millions) les maisons-relais, un type particulier de résidences sociales qui repose sur l’association de logements privatifs à des locaux collectifs et sont censées offrir un cadre de vie favorisant la réinsertion sociale. La participation de l’État est affectée à la rémunération de l’hôte, sur la base d’un forfait journalier maintenu à 16 euros par place. Malgré la rareté de logements disponibles en zones tendues, 1 336 nouvelles places étaient offertes fin 2014, portant le parc à 14 038 places. Le plan de résorption en prévoit la création de 1 000 supplémentaires d’ici fin 2016 ;

– pour 15 millions d’euros en AE et CP, l’aide à la gestion locative sociale (AGLS), qui est versée par l’État aux gestionnaires de résidences sociales afin de mettre en œuvre des réponses adaptées aux besoins des populations accueillies. Fin 2014, on décomptait 1 012 résidences sociales offrant plus de 111 548 places, auxquels s’ajoutent 62 520 logements en foyers qui ont vocation à être transformées en résidences sociales ; mais l’attribution de l’AGLS dépend des publics accueillis et des actions mises en œuvre.

● Le budget de l’État ne prévoit plus le financement de mesures d’accompagnement « vers et dans le logement » qui s’attachent à favoriser les sorties réussies des structures d’hébergement et de logement temporaires vers le logement grâce à un accompagnement adapté. Depuis 2015, elles reposent entièrement sur les crédits du Fonds national d’accompagnement vers et dans le logement (FNAVDL) lui-même alimenté par les astreintes versées par l’État condamné au titre du DALO (cf. partie I-1 supra). Fin septembre 2015, les crédits disponibles s’élevaient à 15,6 millions d’euros. 39,7 millions d’euros sont inscrits à l’action 4 du programme 135 de la présente mission pour couvrir les liquidations d’astreinte en 2016.

Le Rapporteur spécial observe toutefois un dysfonctionnement dans le processus : en 2014, au lieu de liquider les astreintes spontanément, comme ce fut le cas les premières années, les tribunaux administratifs, en particulier celui de Paris, ne le font plus que sur sollicitation, soit d’un service de l’État, soit du requérant, pour ne procéder qu’à des liquidations définitives. Il en résulte un retard important et un décalage entre les crédits budgétaires prévus en loi de finances et les versements effectifs, et par voie de conséquence, un déficit considérable du FNAVDL qui limite drastiquement les actions qu’il peut engager et crée des difficultés de trésorerie pour les associations concernées.

Le Rapporteur spécial relève, par ailleurs, avec regret que l’appel à projets lancé en mars 2014 pour la création de 10 000 logements accompagnés sur 3 ans grâce au financement du Fonds a reçu très peu d’écho auprès des opérateurs sociaux. En mars 2015, seuls 28 projets avaient été sélectionnés concernant 900 ménages fragiles.

Un rapport de l’Inspection générale des Affaires sociales sur la gestion du Fonds est attendu d’ici la fin de l’année.

II. GRÂCE À UNE APPROCHE TOUJOURS PLUS GLOBALE ET PARTENARIALE DE LA POLITIQUE DU LOGEMENT

1. Dépenses fiscales et fonds d’épargne sont les principaux leviers financiers à la main de l’État

● De nombreuses dépenses fiscales sont rattachées à la mission Égalité des territoires et logement pour soutenir le logement social, la rénovation et la performance énergétique des logements, l’accession à la propriété, l’investissement locatif privé ou les aides aux personnes vulnérables.

Même si elles connaissent un certain recul depuis trois ans, elles constituent, par leur volume de 15 milliards d’euros, le deuxième plus important engagement financier de l’État au service du logement. Si l’on fait abstraction des dépenses d’aides au logement, elles représentent même plus de trois fois l’équivalent des crédits mobilisés par le budget général.

Enfin, si toutes n’ont pas démontré leur efficacité, certaines apparaissent comme un vecteur d’investissement particulièrement influent.

DÉPENSES FISCALES DIRECTEMENT RATTACHABLES À LA POLITIQUE DU LOGEMENT (23)

(en millions d’euros)

 

Évaluation pour 2013

Évaluation pour 2014

Évaluation pour 2015

Évaluation pour 2016

Programme Aide à l’accès au logement

97

98

101

103

Programme Urbanisme, territoires et amélioration de l’habitat

13 998

13 798

13 446

13 464

Programme Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables

1 492

1 572

1 553

1 534

Total

15 587

15 468

15 100

15 101

Sources : projets annuels de performances 2015 et 2016.

Le projet de loi de finances propose de faire évoluer trois de ces dispositifs centraux pour en renforcer l’attractivité : le crédit d’impôt pour la transition énergétique (CITE, à l’article 40) et les remboursements d’impôt sur les sociétés associés au prêt à taux zéro pour l’accession à la propriété (PTZ, à l’article 41) et à l’éco-PTZ pour la rénovation énergétique (à l’article 42). Pour autant, les prévisions de pertes de recettes ne marqueraient pas de progression nette entre 2015 et 2016. De fait, certaines anticipations pour 2015 étaient vraisemblablement trop optimistes ; elles sont parfois révisées à la baisse quand bien même le Gouvernement escompte le développement de ces dispositifs ; et la décrue des dépenses fiscales mises en extinction se poursuit.

L’application d’un taux intermédiaire de TVA pour les travaux d’amélioration, d’aménagement et d’entretien sur les logements (hors travaux de performance énergétique) représenterait encore la première perte de recettes, évaluée à plus de 3,3 milliards d’euros en 2016 comme en 2015. Le CITE et l’application d’un taux de TVA à 5,5 % sur les travaux de performance énergétique montent rapidement en charge, s’établissant, respectivement, à 1,4 et 1,1 milliard en 2016.

Le taux réduit de TVA sur les livraisons à soi-même d’opérations de construction, amélioration ou rénovation de logements sociaux ou d’hébergements coûterait 1,6 milliard d’euros. De même, l’exonération d’impôt sur les sociétés en faveur des bailleurs sociaux atteindra le milliard d’euros en 2016.

On doit citer également le prêt à taux zéro (956 millions) et la réduction d’impôt sur le revenu en faveur de l’investissement locatif dit Scellier, arrêté en 2013 mais qui continue à produire ses effets pour un coût de 810 millions d’euros l’année prochaine.

● La Caisse des dépôts et consignations (CDC) est l’autre instrument majeur de la politique nationale du logement. Via son Fonds d’épargne qui centralise la majeure partie des livrets d’épargne réglementée, elle permet la mobilisation de ressources substantielles par la transformation d’une épargne liquide, susceptible d’être récupérée à tout moment, en prêts à très long terme et à taux bonifiés en faveur des investissements d’intérêt général.

En 2014, 412 milliards d’euros d’épargne ont été collectés par les réseaux bancaires au titre des livrets A, LDD et LEP. La diminution du taux de rémunération du Livret A (à 1,25 %) en cours d’année a été suivie d’une décollecte de 10 milliards d’euros au deuxième semestre 2014 (- 6,1 milliards en net sur l’exercice).

On ne peut encore mesurer l’impact du nouvel abaissement du taux à 0,75 % opéré en août dernier. Cependant, auditionnée par le Rapporteur spécial, la CDC se dit confiante sur les ressources disponibles pour les politiques publiques. Elles restent abondantes et la CDC dispose de marges : grâce à la capitalisation des intérêts de l’année (4,8 milliards d’euros), les encours centralisés sont restés stables à 243,5 milliards d’euros à fin 2014. Par ailleurs, son haut niveau de fonds propres lui a permis de réduire la taille de son portefeuille d’actifs financiers (qui assure la liquidité de l’épargne réglementée) de 99 milliards fin 2013 à 89 milliards fin 2014. Enfin, ultimes recours, l’abaissement des taux de centralisation décidé en juillet 2013, de 65 à 59,5 %, est réversible et la loi prévoit un mécanisme de rappel si le total centralisé des livrets A et LDD passait sous le seuil des 125 % d’encours de prêts.

En revanche, les taux d’intérêt des prêts de la Caisse étant calculés et indexés sur l’évolution des taux de rémunération des livrets d’épargne, la diminution de ces derniers signifie l’allégement des charges d’intérêt pour les emprunteurs, et donc plus de fonds propres pour les bailleurs sociaux.

Le coût de la collecte par les banques est un autre sujet d’actualité. Une baisse de leur commissionnement est en cours de discussion. Les organismes de logement social souhaiteraient qu’une partie des économies que la Caisse en obtiendra soit réinvestie ou utilisée pour améliorer les bonifications de taux de certains investissements. (24)

L’accompagnement du développement et de la rénovation du parc social représente le premier emploi des ressources d’épargne gérées par la CDC. Pour s’adapter au plus près des besoins du secteur, la Caisse des dépôts a encore élargi les possibilités de moduler les différentes caractéristiques de ses prêts et créé deux nouveaux dispositifs en 2014 : le « prêt foncier à 60 ans » pour les opérations en zones tendues et le « prêt relance logement social ». Sur les 167,9 milliards d’encours de prêts sur fonds d’épargne, 86 % concernent le logement social et la ville.

La Caisse des dépôts se mobilise également dans la relance du logement intermédiaire en zones tendues autour de sa filiale, la Société nationale immobilière (cf. II-3-a). Enfin, la reprise de la gestion d’Adoma par la SNI fait désormais de la CDC un acteur important du logement d’insertion et de l’accueil des demandeurs d’asile.

En 2014, elle a ainsi permis d’engager 15,7 milliards d’euros en faveur du logement social, spécifique ou intermédiaire, par des prêts directs ou par le refinancement des banques accordant des prêts bonifiés PLI, PLS ou PLSA. Grâce aux prêts aidés, 122 000 logements ou places d’hébergement ont été construits ou acquis (en progression de 12 % par rapport à 2013) et plus de 274 000 réhabilités (+ 8 %).

Le segment du logement locatif social a été le plus dynamique avec plus de 2 milliards d’euros de prêts supplémentaires signés en 2014 (atteignant un total de 12,9 milliards d’euros). Ces prêts devaient concourir à la production de 102 851 nouveaux logements (contre 91 557 en 2013) et 267 678 réhabilités (contre 244 915). 47 000 d’entre eux ont bénéficié d’une rénovation thermique financée par l’éco-prêt social ou éco-PLS.

La croissance des prêts s’est poursuivie au premier semestre 2015, malgré un ralentissement consécutif à la baisse des agréments en 2014.

2. Le soutien à la production de logements sociaux reste le deuxième poste financier malgré le rationnement budgétaire

a. Des objectifs maintenus à un niveau ambitieux

Alors que l’on constatait depuis 2010 une nette décrue des investissements dans le développement des logements sociaux – hors rénovation urbaine – le Gouvernement a entrepris de relancer la dynamique en mobilisant activement acteurs et moyens dans l’objectif volontariste d’atteindre une production de 150 000 unités par an en 2017.

Cette stratégie a permis de faire remonter de 102 728 à 117 065 entre 2012 et 2013 le total des agréments de logements sociaux délivrés en métropole et hors ANRU. Toutefois, cet effectif est redescendu à 106 414 unités en 2014 – ce chiffre s’élevant néanmoins à près de 120 000 avec les opérations ANRU et outre-mer. Parallèlement, nombre d’opérations programmées ont pris du retard ou ont été annulées, certaines en raison de difficultés à boucler la commercialisation d’opérations mixtes en VEFA (ventes en l’état futur d’achèvement), mais le plus souvent à cause des réticences des nouvelles équipes municipales (qui auront gelé des projets concernant au moins 10 000 logements).

Tirant les conséquences de ce ralentissement des consommations, les objectifs et les moyens de la loi de finances pour 2015 avaient été définis en recul. Les dotations initialement demandées sur l’action 1 du programme 135 pour soutenir, par des subventions dites aides à la pierre, la production de logements sociaux en 2016 marquaient au contraire un rebond de 24 millions d’euros (+ 6,4 %) par rapport aux crédits arrêtés pour 2015 en étant inscrites à hauteur de 400 millions d’euros en AE.

Selon le projet de performances, les CP devaient descendre à 100 millions (– 28,7 % ou – 42,2 millions d’euros), mais en étant complétés à hauteur de 270 millions d’euros par des rattachements de fonds de concours issus du nouveau Fonds national des aides à la pierre (FNAP) créé par l’article 56 du projet de loi de finances (Se reporter au commentaire).

Ces perspectives financières permettaient, d’ores et déjà, d’afficher dans le projet annuel de performances des objectifs de production également revus à la hausse, à 140 000 nouveaux logements, à un niveau affichant les ambitions du Gouvernement de dépasser les difficultés structurelles et conjoncturelles auxquelles se heurte sa politique volontariste – qu’il s’agit de l’indisponibilité du foncier constructible, du difficile montage financier des logements très sociaux ou des mauvaises volontés politiques.

PROGRAMME DE FINANCEMENT DE LOGEMENTS SOCIAUX EN 2016

 

Nombre de logements

Coût total

(en millions d’euros)

 

Réalisé 2014

Prévisions 2015

PLF 2016

PLF 2016

PLUS

57 788

66 000

69 000

 

PLAI

29 734

34 000

35 000

228

PLS

32 543

35 000

36 000

 

Surcharge foncière

     

167

Sous total : offre nouvelle

117 065

135 000

140 000

394

Démolition

447

1 000

1 000

1

Actions d’accompagnement et numéro unique

5

TOTAL

400

Sources : projets annuels de performances 2015 et 2016 et rapport annuel de performances 2014.

● Au regard de l’ampleur des besoins (plus de 1,7 million de demandeurs d’un logement social), le Gouvernement a développé plusieurs approches pour dépasser ces problèmes, conjuguant démarches de conviction, dispositifs incitatifs et, en dernière limite, mesures dissuasives :

– outre le relèvement et l’extension des obligations municipales en matière de logements sociales, la loi du 18 janvier 2013 relative à la mobilisation du foncier public en faveur du logement et au renforcement des obligations SRU avait ouvert la possibilité de céder des terrains du domaine privé de l’État et de ses établissements publics au profit du logement social avec une décote pouvant atteindre 100 % de leur valeur vénale (25). L’avantage est double : les opérations sociales trouvent de nouvelles emprises dans des zones où le foncier disponible est rare et cher ; et leur coût en est fortement réduit. Devant la lenteur de sa mise en œuvre et le développement des réticences locales, la ministre en charge du logement a installé en juillet 2014 la commission nationale de l’aménagement, de l’urbanisme et du foncier (CNAUF) prévue par la loi pour suivre ces projets, qui a permis d’accélérer le processus ;

– en sus du déblocage dès 2013 d’une enveloppe de 20 milliards d’euros de prêts à taux préférentiels auprès du Fonds d’épargne pour soutenir les collectivités territoriales dans leurs investissements dans les politiques de la ville et du logement, en juin dernier, le Gouvernement a lancé un dispositif d’aide aux maires bâtisseurs en zones tendues (cf. partie I-1) mobilisant 100 millions d’euros en AE. 60 millions d’euros de CP ont été budgétés à cet effet pour 2016. Par ailleurs, un Fonds d’aide à l’investissement local est créé par l’article 59 du projet de loi de finances, dont une enveloppe de 500 millions d’euros pourra également soutenir les investissements locaux en faveur du logement ou de l’hébergement ;

– enfin, après avoir demandé aux préfets de convaincre les communes récalcitrantes à combler leur retard au regard de leurs obligations SRU (sur les 1 022 communes assujetties, 221 ont fait l’objet d’un arrêté de carence), et avoir promu, dans un premier temps, une approche partenariale avec la conclusion de « contrats de mixité sociale », le Gouvernement a décidé de durcir le ton. Une liste de 36 communes réfractaires vient d’être publiée. Une seconde liste sera publiée d’ici quelques mois. Les préfets devront s’y montrer fermes en mobilisant les pouvoirs qui leur ont été conférés par la loi ALUR de janvier 2014 : non seulement, ces arrêtés de carence leur permettent de majorer les pénalités de retard jusqu’à cinq fois leurs montants, mais ils pourront préempter et délivrer des permis de construire en lieu et place des maires. Les 36 communes seront en outre les sites d’expérimentation de la future loi « pour une égalité d’accès au logement » qui sera présentée en février 2016 : le texte envisage notamment que, faute de logements sociaux, les préfets imposent de loger des demandeurs dans le parc privé à charge pour la commune de payer l’écart de loyer ; que les communes carencées pourront se voir privées du droit d’attribuer leur contingent…

Les pistes du futur projet de loi Égalité et citoyenneté :

– le renforcement des modalités d’application de la loi SRU : selon un avant-projet, seraient envisagés l’attribution directe par les préfets du contingent communal des communes carencées, la substitution pour la mise en conformité du PLH, la prise en main des permis de construire sans passer par un arrêté de carence, le renforcement des obligations de production de PLAI dans les communes carencées ;

– le recentrage du dispositif SRU sur les territoires les plus tendus, par exemple les seules agglomérations de plus de 50 000 habitants disposant d’une ville principale de plus de 15 000 habitants ; et suppression des possibilités de mutualisation au niveau intercommunal des objectifs triennaux de rattrapage ;

– la réforme des loyers de logements sociaux pour créer des logements à bas loyers dans le parc existant, a priori en zones tendues, indépendamment de la catégorie de leur financement initial - PLUS, PLS – en contrepartie de la possibilité, encadrée, de déroger aux plafonds de loyer dans d’autres secteurs ;

– la réforme des attributions de logement via une politique d’attribution intercommunale, avec des critères communs à tous les réservataires, la mise en place d’une cotation de la demande et la publication des logements disponibles.

● En termes de typologie sociale de logements, les cibles et la répartition des aides à la pierre en 2016 marquent plus que jamais la priorité donnée aux logements les plus sociaux. Les objectifs pour les opérations en PLAI (26) augmentent encore de 1 000 unités pour être portés à 35 000 et leur enveloppe est renforcée de 7 millions d’euros.

Mais le surcoût foncier de ces programmes PLAI en zones tendues fait sortir les nouveaux logements à un niveau de loyer qui n’est plus accessible aux ménages les plus modestes. Le Gouvernement a donc entrepris de faire émerger des logements encore plus sociaux (27) :

– les majorations de pénalités SRU sont ainsi reversées à un fonds dont la mission est de favoriser le développement de ces logements en apportant notamment un complément de subventions aux opérations PLAI. Le Fonds national de développement de l’offre de logements locatifs très sociaux (FNDOLLTS), qui gère actuellement ces ressources, sera absorbé par le FNAP mais elles conserveront leur destination (Se reporter au commentaire de l’article 56). Le Rapporteur spécial constate cependant avec regret que le secteur social peine à se positionner sur les appels à projets pour des « PLAI adaptés » ou « super-PLAI » qui visaient à financer, grâce à ces fonds, 2 000 logements très sociaux en 2014 puis 3 000 en 2015, mais dont les résultats ne représentent aujourd’hui que 942 logements.

– par ailleurs, l’Agenda HLM 2015-2018 a prévu la mutualisation de 300 millions d’euros sur les trois prochaines années pour créer une offre nouvelle de 5 000 « super PLAI HLM » par an, qui doit s’ajouter à la production des PLAI classiques (et n’est donc pas imputée sur l’enveloppe du programme 135).

● Pour marquer plus clairement encore sa volonté d’accélérer le développement et l’amélioration du parc social, le Gouvernement vient enfin de déposer un amendement complétant les dotations du budget général en faveur des aides à la pierre :

– conformément à l’engagement formulé par le Président de la République lors du Congrès de l’Union sociale pour l’habitat (USH) de septembre, un abondement de 150 millions d’euros portera à 250 millions les CP de l’État alloués aux aides à la pierre en 2016. Ce faisant, l’amendement rééquilibre la participation de l’État face à une contribution des bailleurs sociaux qui sera augmentée à 270 millions d’euros par l’article 56 du projet de loi de finances. Le Rapporteur spécial s’en réjouit doublement : non seulement l’amendement renforce les moyens d’action en faveur du logement locatif social, qui bénéficiera d’un total de 520 millions d’euros en 2016, mais il ramène plus de sécurité dans le paiement des sommes dues aux opérateurs sociaux. Au 31 décembre 2014, le solde des engagements antérieurs s’élevait en effet à 1 882 millions d’euros, dont 892 millions de « dettes » directes de l’État (28) ;

– l’amendement va plus loin en augmentant l’enveloppe des engagements possibles de 100 autres millions d’euros.

En revanche, il n’est pas précisé si les objectifs de résultat seront eux-mêmes révisés à la hausse ou si ce rebasage servira à renforcer les montants unitaires des subventions.

b. Un nouveau fonds qui vise à sécuriser le financement des aides à la pierre et améliorer leur répartition

En termes de ressources, les aides à la pierre n’ont jamais été l’aide de l’État au secteur social la plus volumineuse. La production et l’amélioration du parc social bénéficient d’autres soutiens et leviers financiers autrement plus substantiels.

On ne reviendra pas sur les presque 13 milliards d’euros d’épargne réglementée qui ont soutenu en 2014 les investissements des opérateurs par des prêts à taux aidés accordés par la CDC.

Au-delà des économies que permettent ces bonifications d’intérêts (parfois négatives pour la Caisse), il faut aussi rappeler que cette épargne est mobilisée largement et à faible coût en faveur des politiques publiques grâce à l’exonération des intérêts et produits des livrets A, LDD et LEP supportée par l’État pour près d’1 milliard d’euros.

Les organismes de logement social bénéficient aussi d’avantages fiscaux directs conséquents. Que ce soit au titre de leurs parcs, de leur activité courante ou de leurs investissements (taux réduits de TVA, exonérations ou dégrèvement de TFPB, exonérations d’impôt sur les sociétés etc.), ces dépenses fiscales atteignent 3,4 milliards d’euros à la charge de l’État – sans compter les pertes de recettes pour les collectivités locales.

On ne développera pas non plus l’important équivalent-subvention que peut représenter une cession de terrain public (et bientôt d’immeuble) avec décote.

Au demeurant, l’expérience a montré que même avec des montants unitaires diminués, voire ramenés à zéro euro, les aides à la pierre conservent leur effet de levier. De fait, la somme reçue par logement est moins déterminante que l’accès aux autres dispositifs d’aide ouvert par la délivrance de l’agrément ministériel.

Le maintien d’une enveloppe budgétaire dédiée n’en demeure pas moins essentiel. D’abord, pour régler les engagements déjà pris (cf. supra). Ensuite, parce que, même si la part des subventions nationales s’est fortement réduite, leur contribution paraît indispensable au bouclage financier des opérations de logements très sociaux et aux programmes en zones tendues. Enfin, parce que les organismes qui investissent dans ces projets n’ont pas nécessairement les fonds suffisants – alors que d’autres disposent de ressources qu’ils n’ont pas besoin d’utiliser.

Les aides à la pierre sont donc une des clés du modèle financier du logement social, dont il importe de sécuriser le niveau et la régularité.

À la limite, ce paramètre pourrait se résoudre, au moins pendant quelques années, par une simple mutualisation des ressources du secteur. Sa situation financière est saine dans son ensemble et les ressources disponibles aujourd’hui très substantielles : les bailleurs sociaux affichaient une trésorerie de 10 milliards d’euros en 2013. Leurs charges actuelles sont à la hauteur d’un parc de près de 5 millions de logements en développement dynamique, et devraient encore s’alourdir dans les prochaines années avec les nouveaux investissements dans la production mais aussi la rénovation des logements. Mais les dernières analyses de la CDC (29) montrent que les organismes ont, globalement, les capacités d’y faire face.

Le futur Fonds national des aides à la pierre (FNAP), créé par l’article 56 du projet de loi de finances, offre un cadre permettant d’organiser cette mutualisation et de garantir un certain volume de ressources mobilisables. Il se substitue à un fonds de péréquation déjà alimenté par un prélèvement annuel sur les cotisations versées par l’ensemble des bailleurs sociaux à la CGLLS afin de contribuer au financement des aides à la pierre ; la fraction considérée est cependant fortement augmentée, passant de 120 à 270 millions d’euros en 2016, et pourra être révisée en fonction des besoins.

(Pour un commentaire détaillé du dispositif proposé, se reporter au commentaire ci-après.)

Le principe d’une mutualisation de ces capacités financières pour soutenir des investissements d’intérêt général est d’autant plus légitime que celles-ci résultent en grande partie des différentes aides nationales dont bénéficient les acteurs au titre de leurs missions sociales, ainsi que des 8 milliards d’euros aides personnelles au logement qui garantissent une part substantielle de leurs revenus locatifs (19,3 milliards en 2013 pour les organismes étudiés par la CDC).

Le Rapporteur spécial considère néanmoins important qu’au regard de son rôle politique et stratégique central, l’État conserve une large maîtrise de l’utilisation de ces ressources, tant dans la définition des cibles que dans la répartition des moyens. Maintenir une contribution de l’État est indispensable pour préserver sa position. Le renforcement des AE et CP alloués aux aides à la pierre en 2016 est, à ce titre, une heureuse nouvelle. Mais l’est plus encore l’assurance apportée par la ministre lors de son audition du 28 octobre que la contribution de l’État au FNAP serait maintenue en 2017.

D’autant que la création même du FNAP, avec le principe acté par le Gouvernement (cf. commentaire de l’article 56) de la mise à disposition de ce fonds de l’intégralité des CP inscrits sur le budget général, devraient sécuriser les montants promis par l'État.

Nonobstant ces principes, la gouvernance partagée que le nouvel établissement public devrait instaurer est un heureux progrès. Jusqu’alors, l’utilisation des ressources récupérées sur les cotisations des bailleurs sociaux était arrêtée par une commission composée uniquement de représentants de l’État.

S’il n’est pas question de remettre en cause la primauté de l’État dans la définition des priorités politiques et dans les arbitrages qui interviennent inévitablement quand il s’agit de répartir des ressources contraintes, il apparaît très pertinent d’associer à la déclinaison, notamment territoriale, de ces décisions les principales parties prenantes à leur mise en œuvre. Cela étant, l’évolution des rôles que vise cette nouvelle organisation ne se fera pas en un jour.

c. Une mobilisation d’Action logement consolidée

Après deux ans de négociations, le 2 décembre dernier, l’État et le réseau des collecteurs de la participation des employeurs à l’effort de construction (PEEC), dite « 1 % logement », sont parvenus à un accord qui entérine un investissement élevé dans le logement social tout en laissant au mouvement les capacités de poursuivre ses autres actions en faveur du logement des salariés et en préservant l’avenir du modèle financier d’Action logement.

Pour mémoire, le 12 novembre 2012, l’État et Action logement signaient une « lettre d’engagement mutuel » prévoyant le retour à un mode contractuel de gestion de l’emploi des fonds issus de la PEEC et à une moindre ponction du Gouvernement en faveur des politiques publiques en contrepartie du renforcement du soutien du réseau au logement, notamment social. Pour ce faire, le réseau s’était engagé à emprunter auprès du fonds d’épargne de la CDC 1 milliard d’euros par an sur trois ans pour compléter ses ressources propres. Bénéficiant de la garantie de l’État, cet emprunt s’est concrétisé fin 2014 et devrait être étalé jusque sur 2018 dans la limite de l’enveloppe globale de 3 milliards d’euros.

Toutefois, en août 2013, un décret définissait de nouvelles enveloppes consacrées aux emplois de la PEEC pour les années 2013 et 2014 prévoyant que l’État prélève encore au moins 1,2 milliard d’euros par an pour les politiques publiques (via l’ANRU et le FNAL), puis qu’une réduction progressive de cette ponction s’opérerait à compter de 2016. Et si la loi ALUR du 24 mars 2014 a bien prévu la signature d’une convention quinquennale avec l’UESL, elle a surtout donné un cadre juridique à une intégration quasi complète de la PEEC à la sphère publique. L’incertitude sur l’ampleur des prélèvements nationaux et la soutenabilité du modèle économique et financier d’Action logement (notamment sa capacité à rembourser son emprunt) a ainsi duré jusqu’à la signature de la nouvelle convention avec l’État sur les emplois du 1 % pour 2015-2019 le 2 décembre 2014.

Cette convention définit toujours les emplois de la PEEC et les enveloppes minimales et maximales de ressources qui leur sont affectées chaque année pour les cinq ans visés. Toutefois, ces engagements s’inscrivent dans une durée plus longue que les décrets précédents (2-3 ans) et, à l’exception des aides allouées aux politiques nationales, les conditions de ces emplois et les montants finalement mobilisés sont définis par directive de l’UESL.

Fin 2014, les ressources propres du réseau Action logement étaient évaluées (hors emprunt CDC) à près de 1,68 milliard d’euros de collecte nette de la PEEC et 1,49 milliard d’euros de remboursements de prêts. Avec la forte réduction des aides sous forme de prêts au profit du développement des subventions ou des prélèvements de l’État ces dernières années, ces retours devraient continuer à sensiblement diminuer jusqu’en 2019. Selon le tableau financier annexé à la convention, ils ne représenteraient alors plus que 1,13 milliard d’euros. Mais ils remonteraient ensuite doucement grâce au rééquilibrage des modes d’aides prévus par cette convention.

Il est prévu en particulier qu’après 2015, le réseau n’aidera plus le logement locatif social par des subventions mais par des souscriptions de titres, des dotations en fonds propres ou des prêts à taux réduits. Ces aides représenteront néanmoins un niveau élevé d’équivalents-subventions.

La cible indicative totale d’équivalent-subvention pour le logement locatif social et les structures collectives est désormais de 640 millions d’euros en 2015, 530 millions en 2016, 520 millions en 2017, 2018 et 2019. Et même s’il est actionnaire de plusieurs ESH (le nouveau groupe représente ainsi le plus gros opérateur de logement social), le réseau Action logement s’est engagé à ouvrir « de manière équitable » ses aides à tous les types d’opérateurs de logement social dans la mesure où leurs projets correspondent aux types de logements, à la localisation et aux niveaux de loyers définis en priorité par les partenaires sociaux.

S’agissant du NPNRU (nouveau programme de renouvellement urbain), l’objectif global de financement est fixé à 5 milliards d’équivalent-subvention jusqu’en 2019. Au-delà de 2019, l’UESL versera à l’ANRU 500 millions d’euros par an. En contrepartie de ces contributions (sous forme de subventions ou de prêts selon les types d’opérations), Action Logement a obtenu - outre les contreparties en terrains, droits à construire ou réservations - d’intervenir dans la gouvernance du NPNRU aux différents stades de la contractualisation via son implication dans les comités d’engagement et au conseil d’administration de l’ANRU.

 

2015

2016

2017

2018

2019

En millions d’euros

Mini

Maxi

Mini

Maxi

Mini

Maxi

Mini

Maxi

Mini

Maxi

Politiques publiques nationales

NPNRU

 

850

 

850

 

850

 

700

 

500

ANAH

 

50

 

50

 

50

 

-

 

-

ANIL/ADIL

 

9

 

9

 

9

 

9

 

9

FNAL

 

300

 

-

 

-

 

-

 

-

Non défini

 

-

 

100

 

-

 

-

 

-

Enveloppe globale

 

1 209

 

1 009

 

909

 

709

 

509

Prêts à la Foncière Logement

 

200

 

Total 200 sur 2 ans

     

-

 

-

Aides aux personnes morales

Logement locatif social

1 098

1 464

1 074

1 431

1 064

1 418

1 067

1 423

1 075

1 434

Logement intermédiaire

112

160

114

163

116

166

118

169

120

172

Aides aux personnes physiques (fongibles, hors dispositif de sécurisation du logement privé)

Prêts accession et travaux

 

600

 

600

 

600

 

600

 

600

Aides en faveur de la mobilité

                   

GRL puis

nouveau dispositif de sécurisation

 

100

 

120

 

122

 

124

 

126

Aides très sociales

                   

Enveloppe globale

800

1 000

800

1 010

800

1 020

800

1 030

800

1 040

Source : Convention 2015-2019 État-UESL.

Globalement, cette nouvelle répartition respecte la majorité des orientations arrêtées par les partenaires sociaux le 14 mai 2014, à savoir :

– le recentrage des fonds aux réponses aux besoins des entreprises et de leurs salariés, particulièrement les jeunes actifs et les salariés (notamment ceux des PME) accédant à l’emploi, avec une priorité aux zones en tension immobilière et où les difficultés d’accès au logement accentuent les difficultés d’accès à l’emploi ;

– le fléchage des contributions « nationales » sur les enjeux de la rénovation urbaine concourant au logement des salariés.

Selon les projections de la convention 2015-2019, Action logement devrait être en capacité non seulement de rembourser son emprunt auprès de la CDC, mais aussi de retrouver un équilibre positif ressources/emplois à partir de 2021. Toutefois, on peut noter que ces projections supposent une croissance soutenue des recettes futures de la collecte (2,11 milliards d’euros en 2021, 2,48 milliards en 2035 contre 1,84 en 2014 en chiffres bruts) – des hypothèses qui ne peuvent être garanties.

La réorganisation du réseau action logement

Le réseau 1 % logement a déjà été substantiellement réformé par la loi Boutin de 2009, qui a réduit fortement le nombre de ses organismes collecteurs, les comités interprofessionnels du logement (CIL), de 125 en 2009 à 20 en 2012. La loi ALUR de mars 2014 a confirmé l’UESL dans sa position de tête de réseau. Enfin, les partenaires sociaux avaient réaffirmé en mai 2014 leur intention de « poursuivre la rénovation de l’organisation d’Action logement afin d’accroître son efficacité et d’améliorer la lisibilité et sa visibilité vis-à-vis de l’ensemble des parties prenantes. »

Le 9 avril dernier, le conseil d’administration de l’UESL-Action logement a acté les principes d’une nouvelle réforme en profondeur. « Nous passons d’une notion de réseau à une notion de groupe. » a expliqué son président, Bernard Gaud. La nouvelle organisation s’articulera autour de trois entités :

– une structure faîtière qui pilotera l’ensemble, sera l’interlocuteur de l’État et contractualisera avec les collectivités concernées ;

– un pôle unique de services chargé de la collecte et de la distribution des aides aux entreprises, en lien avec les collectivités et les opérateurs locaux de l’habitat. Elle s’appuiera sur 13 délégations régionales, dotées d’un comité régional (CRAL) paritaire, et des antennes locales ;

– et un pôle immobilier regroupant le patrimoine de ses 80 ESH et autres filiales immobilières du réseau (environ 900 000 logements) et chargé de la mise en œuvre de la politique immobilière définie par la tête « tout en respectant l’ancrage local et l’autonomie de gestion de ces [organismes]. » (B. Gaud)

L’AFL est « confortée dans sa mission d’opérateur spécifique d’Action logement pour la mise en œuvre de la mixité sociale dans les quartiers visés par le PNRU et le NPNRU ». Et l’APAGL sera chargée de la gestion du nouveau dispositif de sécurisation.

3. Les autres grandes politiques en faveur du logement conjuguent essentiellement aides fiscales et investissements des partenaires

a. Le développement des logements intermédiaires

La nécessité de développer un segment intermédiaire entre le logement social et le marché privé dit libre est désormais une évidence. En comblant un manque dans le marché actuel du logement, il peut faciliter et fluidifier les parcours résidentiels en zones tendues, mais aussi favoriser la sortie du parc social des ménages en ayant la capacité. Mais cette production n’est pas spontanée et le conventionnement de logements privés limité.

Dans cet objectif, les derniers avatars du dispositif de soutien à l’investissement locatif ont été recentrés sur un produit plus social depuis 2013 : la réduction d’impôt sur le revenu dite « Pinel » (article 199 novovicies du code général des impôts) porte sur des logements neufs soumis à des plafonds de loyer et de ressources des locataires intermédiaires et réservés aux territoires connaissant de fortes tensions en matière de logement. Depuis 2015, les particuliers peuvent choisir entre un engagement de 6, 9 ou 12 ans en contrepartie d’avantages fiscaux modulés selon ces durées (12 %, 18 % ou 21 %). Il permet en outre d’y loger un ascendant ou descendant (qui doit répondre aux conditions de ressources). Enfin, les conditions d’accès au dispositif des sociétés civiles de placement immobilier, qui élargissent encore l’éventail des investissements possibles, ont été alignées sur celles des particuliers.

Les derniers assouplissements semblent d’ores et déjà produire des effets positifs : comme le soulignent les notes de marché de la Fédération des promoteurs immobiliers (FPI) (30), après une forte chute des effectifs en 2013 (35 000), l’investissement privé a redémarré au dernier trimestre 2014, les ventes ayant augmenté de 3,4 % par rapport au dernier trimestre 2013. Ce rebond s’est confirmé au premier trimestre 2015, puisque les ventes ont progressé de 14,4 % par rapport au premier trimestre 2014.

Mais il est également apparu que la condition de mixité plafonnant le quota de logements « Pinel » dans un même programme en réduit quelque peu l’efficacité. Le Rapporteur spécial a donc fait voter en première partie de la loi de finances un amendement supprimant cette contrainte.

Parallèlement, la loi de finances pour 2014 avait créé un nouveau régime fiscal devant favoriser l’investissement intermédiaire des « institutionnels » en zones tendues, associant un taux de TVA intermédiaire et l’exonération pendant 20 ans de la taxe foncière sur les propriétés bâties (article 279-0 bis A du code général des impôts). Mais sa mise en œuvre exigeant des précisions réglementaires qui n’ont été publiées qu’en octobre 2014, il est trop tôt pour en tirer un bilan.

Pour autant, la CDC et sa filiale, la Société nationale immobilière (SNI), ont accentué leur mobilisation dans la relance du logement intermédiaire institutionnel :

– en s’associant avec des assureurs et de grands investisseurs institutionnels, la SNI a créé en 2014 le Fonds pour le logement intermédiaire (FLI), financé par des fonds propres de chaque partie, avec pour objectif la production de 10 000 logements. Le Fonds d’épargne a, de son côté, mis en place un nouveau prêt dit PLI Investisseurs institutionnels permettant de financer ces projets en complétant l’enveloppe du PLI actuel et engagé 190 millions d’euros en 2014 dans un premier prêt accordé au FLI.

– par ailleurs, un groupement constitué de la SNI et sa propre filiale AMPERE Gestion SAS va prendre la gestion de la future « Société pour le logement intermédiaire », un fonds que l’État devrait doter de 1 milliard d’euros pour créer 13 000 logements sur les cinq prochaines années.

Enfin, la SNI compte réaliser elle-même 12 000 autres logements.

b. L’aide à la rénovation des logements

● S’ils prévoient de mobiliser plusieurs milliards d’euros dans les prochaines années pour la rénovation et l’amélioration de la performance énergétique de leurs parcs anciens, les bailleurs sociaux ne sont pas les moins aidés. Ils peuvent mobiliser plusieurs modes de financements : éco-PLS et prêt anti-amiante, dont les taux sont désormais ramenés à 0 % grâce à la baisse du taux de livret A, certificats d’économie d’énergie, aides du fonds européen FEDER nouveau dégrèvement de TFPB.

En outre, la Caisse des dépôts va dégager une enveloppe de 500 millions d’euros sur 2016-2017 grâce à la Banque européenne d’investissement pour accorder de nouveaux prêts à taux fixes et attractifs en faveur de la réhabilitation thermique des logements en complément de l’éco-PLS. L’objectif donné est de 100 000 logements sociaux par an en 2017.

Enfin, le coût de ces opérations est soumis au taux réduit de TVA à 5,5 %. Cette moindre dépense pour les opérateurs atteindrait un total de 1,6 milliard d’euros en 2016.

● S’agissant du parc privé, les subventions de l’Agence nationale de l’habitat (ANAH) ont un fort effet de levier, mais elles ne peuvent bénéficier à tout le monde. Sous l’impulsion du Plan de relance du logement de 2014 et des réflexions autour de la loi sur la transition énergétique, des outils fiscaux de poids ont été donc créés, simplifiés ou renforcés lors des dernières lois de finances :

– l’application du taux réduit de TVA à 5,5 % aux travaux de performance énergétique représenterait une dépense fiscale pour l’État s’alourdissant à 1,1 milliard d’euros ;

– le taux intermédiaire de TVA à 10 % sur les autres travaux de rénovation coûterait encore 3,3 milliards d’euros ;

– la loi de finances pour 2015 a réformé en profondeur le crédit d’impôt développement durable (CIDD), sous le nouvel intitulé de crédit d’impôt pour la transition énergétique (CITE), en portant la déduction d’impôt de 15 à 30 % du montant des travaux ou de l’acquisition d’équipements permettant des économies d’énergie réalisés entre le 1er septembre 2014 et le 31 décembre 2015. Elle a aussi supprimé l’obligation de réaliser un « bouquet de travaux » pour obtenir l’avantage fiscal.

L’article 40 du projet de loi de finances propose de proroger le dispositif d’une nouvelle année tout en faisant évoluer certains paramètres afin de garantir (en limitant les risques d’abus, de cumul avec d’autres formes de soutien public ou en incitant à l’acquisition des matériels les plus performants) l’efficience de la dépense fiscale – évaluée à 1,4 milliard d’euros en 2016.

– l’article 42 propose également de proroger, jusqu’au 31 décembre 2018, l’éco-prêt à taux zéro (éco-PTZ) et vise à adapter ses conditions d’éligibilité aux ménages bénéficiant par ailleurs des aides de l’ANAH pour la réalisation des mêmes travaux. La dernière loi de finances rectificative pour 2014 s’était, auparavant, attachée à lever les difficultés opérationnelles (en particulier le contrôle du respect de l’éco-conditionnalité) qui empêchaient son déploiement.

– enfin, dans le cadre du Plan de revitalisation des centres-bourgs lancé en juin 2014, le Gouvernement a ouvert le prêt à taux zéro (PTZ), par ailleurs renforcé, à l’acquisition, sous condition de rénovation, de logements anciens dans les quartiers centraux des villes moyennes et petites connaissant un rapide dépeuplement. Les communes concernées devaient répondre à trois critères : avoir moins de 10 000 habitants, un taux de vacance supérieur ou égal à 8 % et disposer des équipements de proximité nécessaires pour qu’une rénovation du bâti permette une revitalisation du tissu urbain. 5 920 communes ont été retenues, dont 90 % en zones C. Ce plan doit bénéficier d’une enveloppe de 300 millions d’euros pris sur le futur fonds dédié aux investissements des collectivités (article 59).

Parallèlement, le ministère avait lancé une expérimentation (par appel à manifestation d’intérêt) sur une cinquantaine de communes qui pourraient bénéficier d’opérations de requalification de l’habitat soutenues par une enveloppe de 40 millions d’euros.

Pour aider à la réalisation des objectifs de réhabilitation du parc ancien, le Gouvernement propose aujourd’hui, à l’article 41 du projet de loi de finances, d’étendre l’éligibilité du PTZ à l’achat de logements anciens à rénover dans l’ensemble des communes de la zone C. Les 340 communes des autres zones qui sont actuellement éligibles au PTZ « Réhabilitation » le resteront jusqu’au 31 décembre 2016. En outre, l’emprunteur ne serait plus contraint d’occuper ce logement en tant que résidence principale que durant 6 ans au lieu de 25 ans dans les conditions présentes. Cette réforme se ferait dans un plafond de dépense générationnelle constat de 1 milliard d’euros.

● Quelle que soit l’efficacité de ces multiples aides fiscales, pour les propriétaires occupants aux ressources modestes, les subventions de l’ANAH restent encore le vecteur le plus déterminant pour s’engager dans des travaux de rénovation généralement onéreux.

En 2014, le budget prévisionnel de l’Agence était de 502 millions d’euros d’interventions, complétés par 111 millions d’euros du Fonds d’aide à la rénovation thermique des logements privés appartenant à des propriétaires modestes (FART). Le budget exécuté s’est finalement établi à 537,5 millions d’euros d’aides, complétées par 179,3 millions du FART. Victime du succès de ses nouvelles aides, l’ANAH a dû en effet mobiliser davantage de ressources. De fait, les résultats ont été à la hauteur des investissements avec 74 812 logements rénovés.

Les interventions de l’ANAH en 2014

L’Île-de-France est la première région bénéficiaire avec 11 192 logements (69,5 millions d’euros) ; toutefois, 42 % de l’ensemble des logements rénovés l’ont été en zone rurale ;

Les objectifs en 2014 étaient fixés à 38 000 « passoires thermiques » rénovées. 49 831 logements ont été rénovés au titre du programme Habiter mieux (mobilisant 402 millions d’euros du budget de l’ANAH et 169 M€ du FART) – soit 60 % de plus qu’en 2013 ;

9 150 logements ont été rénovés au titre de la lutte contre l’habitat indigne et les logements très dégradés (pour 133 millions d’euros), parmi lesquels près d’un sur deux a fait des travaux de rénovation énergétique ;

13 258 logements ont été rénovés à l’occasion d’opération de redressement des copropriétés en difficulté (pour 51,7 millions d’euros), dont 30 % ont bénéficié de travaux de rénovation énergétique ;

15 123 logements ont été adaptés à la perte d’autonomie (pour 50 millions d’euros).

Ses interventions bénéficient plus que jamais aux propriétaires occupants (58 770 en 2014) et, parmi eux, la proportion des très modestes s’établit à 73 %.

Les missions de l’Agence nationale de l’habitat (ANAH) ont fortement évolué ces dernières années, recentrées sur quatre grandes priorités : la lutte contre l’habitat indigne et très dégradé, la lutte contre la précarité énergétique, le traitement des copropriétés dégradées et l’adaptation du logement aux besoins des personnes âgées ou handicapées. L’Agence est, en particulier, devenue l’opérateur central de la lutte contre la précarité énergétique, dans le cadre du Plan de rénovation énergétique de l’habitat (PREH) lancé par le Président de la République en janvier 2013. Ses aides sont renforcées par le Programme « Habiter mieux » porté par le FART créé et financé par les investissements d’avenir (2011). Elle est aussi étroitement associée à la mise en œuvre du plan de revitalisation des centres-bourgs.

Mais le décollage du Programme « Habiter mieux » en 2013 et 2014 et l’affaiblissement des recettes de l’Agence ont conduit à un rapide épuisement de ses réserves. 2015 verra en outre l’utilisation des dernières ressources du FART. L’ANAH est ainsi confrontée à une grande incertitude sur ses capacités financières à répondre à des demandes croissantes et au renforcement de ses objectifs sur le Programme « Habiter mieux » (soit un rythme de 50 000 logements en 2015 et 2016). (cf. partie II-4-a)

Le projet annuel de performances reflète cette incertitude : pour la première fois, il n’indique ni les résultats attendus sur l’exercice en cours, ni les prévisions pour l’exercice suivant.

PROGRAMME PRÉVISIONNEL DE L’ANAH EN 2015 ET 2016

 

Nombre de logements

Montants engagés en millions d’euros

 

LFI 2015

2015 réalisation projetée

2016

LFI 2015

2015 réalisation projetée

2016

Lutte contre l’habitat indigne (LHI) hors RHI

12 050

12 050

n.c.

134

n.c.

n.c.

dont propriétaires bailleurs (PB)

3 450

n.c.

n.c.

61

n.c.

n.c.

dont propriétaires occupants (PO)

2 600

n.c.

n.c.

41

n.c.

n.c.

dont copropriétés

6 000

6 000

n.c.

32

n.c.

n.c.

Opérations de résorption de l’habitat insalubre (RHI)

 

12

n.c.

n.c.

Aides aux propriétaires occupants modestes hors HI

37 950

56 000

n.c.

290

n.c.

n.c.

dont rénovation énergétique

22 950

41 000

n.c.

241 (*)

n.c.

n.c.

dont autonomie

15 000

15 000

n.c.

49

n.c.

n.c.

Aides aux propriétaires bailleurs pour la rénovation énergétique

1 900

1 000

n.c.

12

n.c.

n.c.

Copropriétés en difficulté

20 000

15 000

n.c.

16

n.c.

n.c.

Humanisation des centres d’hébergement

 

10

8

n.c.

Ingénierie (dont MOUS insalubrité)

30

n.c.

n.c.

Fonctionnement

20

n.c.

n.c.

TOTAL

76 350

 

n.c.

522

 

n.c.

Sources : ANAH et commission des finances.

(*) Auxquels s’ajoutent des aides complémentaires au titre du FART.

Totaux PB

4 450

 

n.c.

73

 

n.c.

Totaux PO

53 600

 

n.c.

331

 

n.c.

Totaux copropriétés

15 000

 

n.c.

48

 

n.c.

Totaux précarité énerg. (objectif direct ou intégré) PREH

45 000

49 000

n.c.

-

-

-

c. Le soutien de l’accession à la propriété

Au même titre que le développement du parc social et la poursuite des investissements dans la production et l’amélioration du parc privé, le dynamisme de l’accession à la propriété est un enjeu crucial pour la réussite de la politique du logement et la santé du secteur du bâtiment.

Elle est, en effet, une des grandes composantes de la demande privée ; son sensible recul ces dernières années est une des premières causes des baisses des commandes adressées aux entreprises du secteur et des difficultés qu’elles vivent aujourd’hui. L’accession est aussi une des clés pour résoudre la crise du logement que connaît notre pays en ce qu’elle encourage la production de logements neufs, peut permettre la remise en état de logements restés vacants faute de réhabilitation ou aide à libérer des logements sociaux…

L’accession à la propriété est une aspiration forte de nombre de ménages. Mais, outre les incertitudes créées par la crise actuelle, le fort renchérissement de la construction (+ 47 % en 10 ans) a creusé l’écart entre les prix et les capacités des ménages modestes et même moyens. Si une aide universelle – comme elle fut décidée à une époque – est non seulement très coûteuse pour les finances de l’État mais injustifiée, un soutien ciblé sur ces ménages apparaît, en revanche, opportun et efficient pour relancer la demande privée. Le Plan de relance du logement engagé en 2014 a, ainsi, logiquement fait de l’accession sociale à la propriété un des cibles de sa stratégie.

Parmi les dispositifs existants, les aides personnelles en accession permettaient précisément de renforcer la solvabilité des candidats financièrement justes. La nécessité de modérer des dépenses supportées par l’État se comprend, mais la réforme qui avait été adoptée – sous condition – en loi de finances pour 2015 menaçait les projets d’accession de plusieurs milliers de ménages. Son impact aurait été globalement négatif. Le Rapporteur spécial se félicite donc de son abandon, définitivement acté par l’article 55 du projet de loi de finances.

Il n’en reste pas moins que le PTZ (31) constitue le principal dispositif de soutien à l’accession à la propriété depuis 2011. Mais ses réformes successives (sa légitime mise sous conditions de ressources, puis son recentrage sur les logements neufs – hors cadre de la vente du parc social à ses occupants) ont fortement diminué ses flux annuels. Les prêts émis sont alors tombés à 43 167 contrats en 2013 et 47 192 en 2014, quand ils atteignaient près de 352 000 en 2011 et encore 80 000 en 2012 après recentrage.

La loi de finances pour 2015 s’est donc attachée à améliorer l’efficacité du dispositif en relevant le montant d’achat pris en compte et la quotité de prêt, en élargissant les tranches de revenus pour l’ouvrir davantage aux classes moyennes et en allongeant le différé de remboursement pour alléger les mensualités des ménages les plus modestes et augmenter ainsi la solvabilité des candidats à l’accession. Un volet réglementaire a par ailleurs renforcé l’aide dans les zones où son effet de levier est plus important parce que les prix sont plus accessibles. Ainsi, non seulement les plafonds de ressources ont été augmentés en zones B2 et C afin d’élargir le dispositif à davantage de ménages, mais les autres barèmes (seuils de tranches de ressources, profils de remboursement et plafonds d’opération) y ont été améliorés – et diminués en contrepartie en zone A, le Gouvernement partant du constat que les prix y sont de toute façon trop élevés pour les plus modestes. Enfin, l’enveloppe des crédits d’impôts dus par l’État a été portée à 1 milliard d’euros, soit une hausse de près de 22 % par rapport au plafond de 820 millions d’euros qui avait été retenu pour l’année 2014.

Dans son dernier rapport d’information sur l’application des mesures fiscales (32), la Rapporteure générale constatait, d’après les données qui lui avaient été transmises, qu’« après plusieurs années décevantes, la relance du dispositif du PTZ commence à se concrétiser et pourrait ainsi contribuer à mettre un terme à la stagnation des conditions d’accession à la propriété. » Les premiers chiffres disponibles pour 2015 traduisent en effet cette remontée puisqu’en métropole, le nombre de PTZ émis aura connu une progression très sensible de 31,1 % au premier trimestre. Sur l’ensemble du premier semestre 2015, les premières estimations transmises par les banques confirmeraient cette tendance favorable avec une production nouvelle de prêts de 35 % supérieure à celle du premier semestre 2014.

Et si la part des logements anciens dans les PTZ émis reste encore modeste au premier trimestre 2015 (436 prêts, soit un peu moins de 5 % des PTZ émis), les délais requis pour le montage des dossiers, dans un dispositif encore très récent, peuvent expliquer cette situation transitoire. Malgré tout, les premières statistiques montraient que la part des logements anciens a déjà commencé à augmenter cette année. Elles montraient aussi que les aides fiscales accordées dans ces territoires restent d’un coût moyen nettement inférieur aux aides obtenues dans les autres zones.

Comme pour les aides à la rénovation des logements ou aux investissements locatifs, ces mesures de renforcement ont enclenché une réelle reprise des projets individuels. Mais leurs effets sur le marché de la construction et de la réhabilitation ont tardé à se faire sentir, en partie parce que leur montage exige du temps, en partie parce que les volumes s’avèrent moins importants qu’attendus.

Ainsi, sur le premier semestre 2015, la Fédération française du bâtiment a constaté un nouveau recul des demandes de permis de construire de 7,9 % et une baisse des mises en chantier de 5,8 %. À ce rythme, la FFB envisageait début octobre un bilan de seulement 334 000 logements construits en 2015, contre 355 000 en 2014.

Avec un marché des surfaces professionnelles et un investissement public également en berne, un secteur de l’entretien et de l’amélioration des bâtiments ne semblant pas encore décoller, les entreprises du secteur atteindraient leur limite de résistance : 44 600 emplois auraient été perdus dans les six premiers mois de l’année, portant leur nombre total à 106 000 depuis sept ans.

La tendance semble s’être plus nettement inversée ces derniers mois : le rebond des contrats de construction des maisons neuves et des ventes logements neufs par les promoteurs se confirmant, les permis de construire remontent enfin depuis juin (de juillet à septembre + 4,3 % par rapport au trimestre précédent) de même que les logements mis en chantier (+ 0,5 %).

Pour soutenir, et même accentuer, cette tendance, tout en enclenchant une vraie dynamique en matière de rénovation des logements, le Gouvernement a décidé d’aller plus loin en donnant un nouveau coup de pouce à l’accession à la propriété.

Comme dit précédemment, l’article 41 du projet de loi de finances propose ainsi d’élargir l’éligibilité du PTZ à l’acquisition de logements à réhabiliter dans l’ensemble de la zone C (soit 90 % du territoire national). Non seulement le PTZ « réhabilitation » gagnera en simplicité et en visibilité, mais cette nouvelle réforme pourrait utilement conjuguer soutien à la rénovation des logements et relance de l’accession à la propriété, tout en contribuant à lutter contre l’étalement urbain plus nuisible qu’utile dans ces territoires non tendues.

Comme l’a souligné la ministre lors de son audition du 28 octobre, elle s’est attachée à ce que « chaque territoire reçoive une réponse appropriée à ses spécificités. »

4. Mais le projet de loi de finances pour 2016 reste flou sur des points cruciaux

a. Une grande incertitude pèse sur les capacités d’intervention de l’ANAH, et plus généralement sur les moyens de la transition énergétique

L’Agence nationale de l’habitat (ANAH) est le principal opérateur du programme 135, mais elle ne reçoit plus de subvention pour service public depuis plusieurs années.

En 2013, l’attribution du produit des cessions de quota carbone devait presque doubler ses capacités d’intervention et constituer l’essentiel de ses ressources. Les cours se révélant très inférieurs aux attentes, le budget prévisionnel de l’ANAH fut révisé à la baisse, sur la base d’une recette attendue de 220 millions d’euros – qui s’est finalement établie à 215,3 millions d’euros. Il fut aussi nécessaire de prélever 176,2 millions d’euros sur son fonds de roulement pour continuer d’assurer ses missions en 2014.

Malgré cela, au second semestre 2014, pour faire face à la montée en puissance du programme « Habiter mieux » soutenu par le FART, l’Agence a été amenée :

– à prioriser ses aides au profit des seuls propriétaires occupants très modestes ;

– à augmenter son enveloppe d’intervention, tout en obtenant de l’État une ré-augmentation de la capacité d’engagement du FART (33;

– et à accroître, au-delà de ses capacités de paiement sur l’exercice, ses possibilités d’engagement des 502 millions d’euros initialement programmés à 543 millions, dont 537,7 millions auront été consommés.

Enfin, le Conseil d’administration de l’Agence a fixé « de nouvelles modalités de financement pour les travaux de réhabilitation des logements réalisés en auto-réhabilitation accompagnée (ARA) » à compter de 2015 et décidé, par ailleurs, de ne plus verser des aides forfaitaires sur le FART mais au pourcentage des travaux éligibles – ce qui devrait minimiser les sommes engagées.

Au regard des enjeux, des niveaux d’engagement souhaité et de ceux restant à honorer (plus d’1 milliard d’euros en cumulé fin 2013), l’ANAH s’est également vue attribuer de nouvelles ressources pour 2015. Mais la question de leur stabilité dans la durée demeure en suspens.

Au reste, la question immédiate du financement des interventions de l’ANAH en 2015 et 2016 n’est pas davantage réglée.

Aujourd’hui, pour mener à bien ses missions, l’ANAH ne dispose plus que d’un mois de fonds de roulement et ne peut compter que sur les ressources qui lui sont affectées ou promises, à savoir :

– le produit de la cession des quota carbone, qui reste sa principale ressource. Il est limité à un plafond, théorique, de 590 millions d’euros annuels qui avait été calculé sur la base de la vente de 63 tonnes à 9 euros la tonne. Après avoir chuté à un niveau moyen de 4,30 euros la tonne en 2013, ils sont revenus à 8,06 euros en août. Mais les cours varient et les volumes ne sont pas encore au rendez-vous. L’ANAH en espère 280 millions en 2015 ;

– une fraction de la taxe sur les logements vacants. La loi de finances pour 2015 l’avait augmentée de 21 à 61 millions d’euros, mais l’article 14 du projet de loi de finances pour 2016 vient de ramener son plafond à 21 millions ;

– une contribution de 50 millions d’euros d’Action logement ;

– les contributions des énergéticiens au titre des certificats d’économie d’énergie (CEE). Elles ont été portées à 55 millions d’euros à partir de 2014. Mais le secteur est en pleine recomposition et ces recettes pourraient être reportées avec la mise en œuvre des CEE « précarité énergétique » au 1er janvier 2016 ;

– une contribution de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) de 20 millions, promise en 2015 au titre des actions de l’Agence en matière d’adaptation des logements à la dépendance. Mais lors de leur audition, les responsables de l’ANAH ont indiqué aux rapporteurs que cet apport était encore en discussion ;

– la contribution de 20 millions d’euros du nouveau Fonds de financement de la transition énergétique prévue en 2015 mais qui ne sera pas reconduite en 2016 ;

– enfin, l’ANAH devrait recevoir 43 % des astreintes administratives qui seront payées par les propriétaires bailleurs qui ne réalisent pas les travaux prescrits par arrêté de police sur des habitats indignes. Mais le décret nécessaire à l’application de ce régime mis en place par la loi ALUR n’est pas encore publié.

Avec l’augmentation de l’activité de l’ANAH souhaitée par le Gouvernement (notamment s’agissant des 50 000 « passoires thermiques »), l’équilibre budgétaire n’est plus assuré dès 2015. L’augmentation du cours de quota carbone (à 7,31 euros la tonne en moyenne annuelle depuis le début de l’année) ne couvrira qu’une partie des besoins supplémentaires. De même en 2016, si les perspectives de rendement de sa source principale de recettes sont plus favorables, les incertitudes persistent sur les autres ressources de l’ANAH. Selon ses responsables, il pourrait manquer entre 38 et 70 millions d’euros pour boucler ses prévisions de dépenses.

Quant au FART, il n’est aujourd’hui possible d’y redéployer que 50 millions d’euros. Face à des besoins estimés à un minimum de 107 millions en 2016, il manquerait donc 57 millions d’euros pour financer le programme Habiter mieux jusqu’à la fin de l’année. La question de sa poursuite en 2017 reste entière.

Or, ces incertitudes sur l’avenir et la limitation des capacités d’intervention présentes obligent les responsables publics à refuser ou reporter le traitement de nombreux projets de rénovation. (34) Elles freinent la mise en œuvre du PREH et soulèvent des interrogations sur la réalisation des objectifs nationaux de performance énergétique.

Le crédit d’impôt pour la transition énergétique, l’éco-PTZ ou le taux réduit de TVA pour les travaux d’amélioration de la qualité énergétique des logements sont des outils puissants qu’il est bienvenu de prolonger, mais l’aide qu’ils apportent laisse des restes à payer qui peuvent apparaître encore trop lourds pour des ménages aux ressources moyennes.

Le Rapporteur spécial ne peut donc que réjouir d’entendre la ministre confirmer, lors de son audition du 28 octobre, la création d’un micro-crédit pour aider les ménages les plus modestes à payer ces restes à charge.

b. La coordination du FNAP avec les dispositifs de mutualisation mis en place par le secteur du logement social reste à définir

Comme dit précédemment, le projet de loi de finances propose de sécuriser le financement des aides à la pierre et d’améliorer leur répartition par la création du Fonds national d’aide à la pierre (FNAP). Celui-ci institutionnalise un dispositif qui mutualisait déjà une partie des ressources des bailleurs sociaux.

L’article 56 porte en outre leur contribution obligatoire à 270 millions d’euros en 2016 – un montant qui semble soutenable. Mais elle pourrait être augmentée à l’avenir. Or, s’il est légitime d’accélérer la circulation des ressources du secteur, il ne faudrait pas que cette ponction casse la dynamique de mutualisation volontaire que le mouvement USH (Union sociale de l’habitat) s’efforce de mettre en place depuis deux ans.

Ainsi, le Pacte d’objectifs et de moyens en faveur du logement, signé en juillet 2013 entre l’État et l’USH, a-t-il créé un système de circulation des ressources des bailleurs sociaux membres de l’organisation au bénéfice de ceux d’entre eux qui investissent le plus. Cette démarche correspondait à un engagement impératif donné par le secteur au Gouvernement en contrepartie de l’arrêt du prélèvement sur le potentiel financier des organismes de logements sociaux (cf. commentaire sur l’article 56) ; elle ne s’est réellement concrétisée qu’à la fin de l’année 2014.

Néanmoins, ce premier dispositif (censé réunir jusqu’à 250 millions d’euros par an pour soutenir la production) aurait d’ores et déjà permis de répartir 225 millions d’euros d’aides brutes sur – ou au titre de – ce même exercice.

Le fonctionnement du dispositif de mutualisation USH

C’est à l’issue d’une année d’activité que les fédérations calculent pour chacun de leurs organismes adhérents les montants des « droits » dont il peut bénéficier en fonction de ses investissements de l’année.

Le montant total des contributions à appeler est alors calculé en additionnant l’ensemble de ces « droits ».

Les contributions sont ensuite réparties entre les organismes du mouvement USH selon des critères financiers préétablis (patrimoine, loyers, cotisations à la CGLLS), « reconnus et équitables » selon l’Union.

Enfin, pour chaque organisme est calculée la somme à percevoir ou à verser au compte de mutualisation ouvert par le mouvement auprès de la CDC.

Au surplus, l’Agenda HLM 2016-2018, défini le 24 septembre 2014 entre le Premier ministre et l’USH, a prévu de consolider et élargir ce système de mutualisation :

– il a prolongé le premier dispositif jusqu’aux investissements réalisés en 2017 ;

– il a ouvert un volet supplémentaire d’environ 250 millions d’euros par an sur trois ans pour accompagner les investissements de réhabilitation et les démolitions de patrimoine réalisés à compter de 2015 (avec effet sur 2016) ;

– enfin, il a rajouté 100 millions d’euros par an sur trois ans, également à compter de 2016, pour améliorer l’offre de logements à loyers très modérés.

Cela signifierait que le mouvement USH mobiliserait jusqu’à 250 millions en 2015, 600 millions en 2016 et 2017 et 350 millions d’euros en 2018.

Or, le projet de création du FNAP ne prévoit aucune coordination avec ces engagements financiers, ni en termes de critères de répartition, ni en termes de niveau de prélèvements.

Le Rapporteur spécial considère, pour sa part, qu’il serait au moins pertinent de voir comment se met en place la deuxième étape du dispositif avant d’envisager une nouvelle hausse du prélèvement en faveur du FNAP.

*

* *

EXAMEN EN COMMISSION

Après l’audition de Mme Sylvia Pinel, ministre du logement, de l’égalité des territoires et de la ruralité (voir le compte rendu de la commission élargie du 28 octobre 2015 à 16 heures 15 (35)), la commission des finances examine les crédits de la mission Égalité des territoires et logement (M. Christophe Caresche, rapporteur spécial).

La commission étudie d’abord l’amendement n° II-146 du Gouvernement.

M. Christophe Caresche, rapporteur spécial. Je suis favorable à cet amendement, qui met en œuvre l’engagement pris par le Président de la République que l’État contribue directement, avec 250 millions d’euros de crédits de paiement, à la constitution du Fonds national des aides à la pierre (FNAP).

M. Jean-Louis Dumont. Cette inscription de crédits budgétaires, annoncée par le Président de la République après la transmission du projet de loi de finances au Conseil d’État, est évidemment très importante. Mais sera-t-elle durable et effective ? Car on sait bien qu’il arrive parfois qu’en exécution, « Bercy » – et je pense ici à la haute administration, pas au ministre – dispose, au travers de la régulation budgétaire, d’une panoplie étendue de moyens pour que de tels engagements ne se concrétisent pas. L’État doit jouer son rôle pour que 120 000 nouveaux logements sociaux soient produits l’année prochaine.

Mme Véronique Louwagie. D’où proviennent ces montants supplémentaires ?

M. le rapporteur spécial. L’État a pris l’engagement de verser les crédits budgétaires dédiés dès l’instant où le FNAP aura été créé. Ils ne seront pas touchés par des mesures de gel.

M. Dominique Lefebvre, président. Par définition, la « durabilité » des crédits se heurte au principe d’annualité budgétaire et les crédits adoptés en loi de finances ne constituent qu’une autorisation – et jamais une obligation – de dépenser.

M. Daniel Goldberg, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Il s’agit d’une très bonne nouvelle pour l’objectif de sécurisation des aides à la pierre. De ce fait, les moyens dont le FNAP disposera en 2016 seront supérieurs à ceux inscrits dans le projet annuel de performances et il faudra donc demander à la ministre à quelle fin ils seront utilisés. Peut-être pour verser des subventions supplémentaires permettant de baisser les loyers des logements financés en PLAI (prêt logement aidé d’intégration).

La commission adopte l’amendement n° II-146.

Elle examine ensuite l’amendement n° II-147 du Gouvernement.

M. le rapporteur spécial. L’amendement abonde les crédits de la mission à hauteur de 96 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement afin de permettre à la France de mettre en œuvre les décisions du Conseil européen du mois dernier sur la relocalisation des demandeurs d’asile et d’accueillir dignement les 30 784 réfugiés annoncés par le Président de la République. Avis favorable.

Mme Marie-Christine Dalloz. Voici de nouveau des amendements déposés très tardivement par le Gouvernement, alors qu’il savait depuis longtemps que des crédits supplémentaires étaient nécessaires. Cela veut d’ailleurs dire que le projet de loi de finances n’était pas sincère.

M. le rapporteur spécial. Il n’était pas facile d’anticiper les situations d’urgence résultant de l’afflux de demandeurs d’asile.

La commission adopte l’amendement n° II-147, puis, suivant l’avis favorable du rapporteur spécial, elle adopte les crédits de la mission Égalité des territoires et logement, modifiés.

*

* *

Article 54
Affectation de recettes au Fonds national d’aide au logement (FNAL)

Texte du projet de loi :

I. - Le IV de l’article 43 de la loi n° 2012-1509 du 29 décembre 2012 de finances pour 2013 est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa :

a) Le nombre : « 300 » est remplacé par le nombre : « 100 » ;

b) Les mots : « par an en 2014 et en 2015 » sont remplacés par les mots : « en 2016 » ;

2° Au second alinéa, les mots : « par quart au plus tard les 16 mars, 16 juin, 16 septembre et 16 décembre » sont remplacés par les mots : « avant le 30 juin ».

II. - Le troisième alinéa du I de l’article 1609 nonies G du code général des impôts est remplacé par les dispositions suivantes :

« Le produit de la taxe est affecté au fonds mentionné à l'article L. 351-6 du code de la construction et de l'habitation, dans la limite du plafond prévu au I de l'article 46 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012 ».

III. - Après le b de l’article L. 351-7 code de la construction et de l’habitation, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« c) Le produit de la taxe prévue à l'article 1609 nonies G du code général des impôts ».

V. - Les dispositions du II et du III entrent en vigueur le 1er janvier 2016.

Observations et décisions de la Commission :

Le présent article vise à alléger la charge des dépenses incombant à l’État au titre des aides personnelles au logement en mobilisant une dernière fois les ressources de la participation des employeurs à l’effort de construction (PEEC) et, plus durablement, en réaffectant une taxe au Fonds national d’aide au logement.

I. LE DISPOSITIF EXISTANT

Le Fonds national d’aide au logement (FNAL) finance jusqu’à présent l’aide personnalisée au logement (APL) et l’allocation de logement sociale (ALS), deux des trois aides personnelles au logement qui visent à améliorer la solvabilité des ménages locataires ou accédants aux ressources modestes par la prise en charge d’une part de leurs dépenses de logement.

La troisième aide, l’allocation de logement à caractère familial (ALF), est encore financée par le Fonds national des prestations familiales.

À la suite des réformes successives qui sont intervenues ces dernières années, le FNAL est alimenté, en principe, par :

– le produit des prélèvements mis à la charge des employeurs en application de l’article L. 834-1 du code de la sécurité sociale : ils se décomposent en une contribution de 0,1 % assise sur les salaires plafonnés, due par tous les employeurs – publics ou privés – et une contribution de 0,5 % sur la part des salaires dépassant le plafond, due par l’ensemble des employeurs occupant au moins 20 salariés, à l’exception de ceux relevant du régime agricole ;

– et une subvention d’équilibre portée par l’action 1 Aides personnelles du programme 109 Aide à l’accès au logement qui assure l’équilibre du fonds.

En 2015, nonobstant l’évolution des dépenses elles-mêmes, cette subvention devait fortement s’alourdir à la suite de diverses mesures et des allégements de charges patronales accordés jusqu’à 1,5 SMIC induites par le Pacte de responsabilité et de solidarité :

– pour compenser l’allégement des cotisations familiales, la loi de finances pour 2015 a supprimé le remboursement par les régimes sociaux de leur part des dépenses d’APL ;

– le produit du prélèvement de solidarité sur les revenus du patrimoine et les produits de placement (défini à l’article 1600-0 S du code général des impôts), dont le FNAL percevait une fraction, est désormais intégralement versé à l’assurance maladie ;

– et la cotisation finançant le FNAL a été ramenée de 0,5 % à 0,1 % sur les salaires plafonnés.

Même en anticipant un ralentissement de la progression des dépenses grâce aux économies que le projet annuel de performances escomptait des mesures de réforme portant sur les aides personnelles au logement (un recentrage des aides en accession sur les ménages subissant une perte substantielle de leurs ressources et l’instauration d’un nouveau régime d’indexation des paramètres de ressources en location), ces transferts de charges et pertes de recettes étaient évalués à 5,7 milliards d’euros de besoins de financement supplémentaires pris en charge par le budget de l’État.

Il a donc été décidé d’alléger cette facture par une contribution de la participation des employeurs à l’effort de construction (PEEC) de 300 millions sur l’exercice 2015.

Toutefois, ce devait être la troisième et dernière année que les ressources du « 1 % logement » participaient au financement du FNAL. Celui-ci ne constitue pas une des catégories d’emploi de la PEEC définies par l’article L. 313-3 modifié du code de la construction et de l’habitat ; et la lettre d’engagement mutuel signée le 12 novembre 2012 entre l’État et l’Union des employeurs et des salariés pour le logement (UESL) supposait son arrêt en 2016. Ni la loi de finances pour 2013 qui l’a mis en place, ni la loi de finances pour 2015 ne prévoyaient sa prolongation au-delà de 2015. Enfin, la nouvelle convention passée entre l’État et Action logement le 2 décembre 2014, qui fixe les emplois de la PEEC sur la période 2015-2019, entérinait le prélèvement de 300 millions d’euros en faveur du FNAL en 2015, mais ne prévoyait rien à compter de 2016.

En tout état de cause, cette contribution devait permettre de ramener la subvention d’équilibre apportée par l’État à 10 967 millions d’euros en 2015 selon les prévisions initiales.

II. LE DISPOSITIF ENVISAGÉ

L’article 54 propose des solutions pour alléger les charges transférées au budget de l’État par l’article 21 du présent projet de loi de finances.

En effet, le projet de loi de financement de la sécurité sociale étend, à compter du 1er avril 2016, l’exonération de charges patronales mise en place en 2015 jusqu’à 3,5 SMIC. Cette mesure diminuera les ressources de la CNAF de 3,1 milliards d’euros en 2016 et de 4 milliards en année pleine.

En compensation, et pour simplifier les circuits de financement, l’article 21 du projet de loi de finances met à la charge du FNAL, et par suite du budget de l’État, le coût de l’ALF et de la prime de déménagement afférente dès le 1er janvier 2016. Le montant concerné serait de 4 691 millions d’euros, qui se décomposent en deux parties : le coût des prestations (4,6 milliards d’euros) d’une part et les frais de gestion induits d’autre part (commission fixée à 2 % des prestations, soit 92 millions d’euros). Ces allocations, comme l’APL et l’ALS, restent néanmoins gérées par la caisse nationale des allocations familiales et la caisse centrale de la mutualité sociale agricole.

Pour atténuer l’alourdissement des dépenses du programme 109 qui en découlera en 2016, le projet de loi de finances prévoit deux séries de mesures :

– La première vise à tempérer la tendance haussière des dépenses d’aides au logement : l’article 55 du projet de loi de finances (cf. commentaire ci-après) propose, certes, l’abrogation de la réforme des APL en accession votée en loi de finances pour 2015, annulant les économies qui en étaient attendues (19 millions d’euros en 2016 et 91 millions par an à partir de 2017 selon l’évaluation préalable de l’article), mais aussi des mesures qui devraient réduire certaines prestations.

Le projet de loi évalue ainsi à 204 millions d’euros en 2016 et 365 millions à partir de 2017 les économies résultant de trois dispositions envisagées : la prise en compte du patrimoine des bénéficiaires dans les ressources prises en compte pour le calcul des aides, la suppression de l’exonération de l’évaluation forfaitaire de ces ressources pour les moins de 25 ans qui bénéficient d’un contrat de travail autre qu’à durée déterminée et la dégressivité de l’aide pour les niveaux de loyers excessifs.

Les allocations seront par ailleurs arrondies à l’euro inférieur.

Selon les projections du projet annuel de performances – qui se fondent cependant sur des hypothèses d’évolution des déterminants de la dépense plutôt optimistes –, la dépense totale des aides personnelles au logement ne progresserait que modérément à 18,19 milliards d’euros en 2016 alors qu’elle s’est établie à 18,1 milliards en 2014.

Il n’en reste pas moins que la subvention d’équilibre apportée par l’État passerait, d’après les hypothèses du projet annuel de performances, de 10,97 milliards d’euros selon les prévisions initiales pour 2015 à 15,38 milliards d’euros en 2016, soit une hausse de 4,42 milliards d’euros.

– Une deuxième série de mesures propose donc d’allouer des recettes complémentaires au FNAL : la première n’est qu’une solution temporaire mais la seconde devrait être un renfort durable.

Le I du présent article organise ainsi la reconduction de la contribution de la PEEC au FNAL à hauteur de 100 millions d’euros sur 2016, en modifiant en ce sens l’article 43 de la loi de finances pour 2013 qui l’avait instaurée.

Le 2° du I précise que le versement sera effectué en une fois, avant le 30 juin, contrairement au dispositif précédent qui prévoyait un étalement sur les quatre trimestres de l’année. Renforcée dans son rôle de tête de réseau par la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové (dite loi ALUR), l’UESL a pu en effet entreprendre l’agrégation de ses comptes et de ceux des collecteurs du « 1 % logement » assurant une meilleure visibilité de la situation financière globale du réseau.

Certes, cette reconduction revient sur le principe d’une fin de la contribution au FNAL, qu’Action logement conteste dans la mesure où elle ne s’inscrit pas dans la philosophie de la PEEC en ne concourant pas directement à la production de logements pour les salariés.

En revanche, elle ne menacerait pas l’équilibre financier d’Action logement, ni ses capacités à investir dans le logement et à rembourser l’emprunt de 1 milliard par an sur trois ans qu’elle a contracté auprès de la Caisse des dépôts. En effet, la convention passée le 2 décembre 2014 entre l’UESL et l’État prévoyait bien une diminution progressive des contributions annuelles aux politiques nationales afin de préserver les équilibres futurs du mouvement, mais laissait dans l’enveloppe dédiée en 2016 à ces politiques publiques (soit un total de 1 009 millions d’euros) 100 millions d’euros sans affectation à la date de sa signature.

La proposition d’affecter ces 100 millions au FNAL a tout de même fait l’objet d’une concertation avec l’UESL, dans le respect du cadre contractuel de gestion des fonds de la PEEC que la loi ALUR a réinstauré. Et le projet de loi de finances limite cette opération au seul exercice 2016.

Dans ces conditions et considérant la nécessité de limiter l’augmentation des dépenses incombant à l’État, le Rapporteur spécial est favorable à cette contribution.

Les II et III du présent article réaffectent, quant à eux, le produit de la surtaxe sur les plus-values immobilières supérieures à 50 000 euros (définie à l’article 1609 nonies G du code général des impôts) au profit du FNAL.

Cette taxe a été créée par la loi de finances rectificative du 28 décembre 2012 et ses recettes ont été affectées, dans la limite théorique d’un plafond, au fonds de péréquation mentionné à l’article L. 452-1-1 du code de la construction et de l’habitation.

Celui-ci a été, pour sa part, créé par la loi n° 2009-323 du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion ; ses ressources complètent les subventions à la production de logements sociaux, dites « aides à la pierre », financées par le programme 135 de la présente mission.

Pour contribuer aux efforts d’économie de l’État, la loi de finances pour 2015 avait ramené le plafond de la part annuelle de la surtaxe versée au Fonds de péréquation de 120 à 45 millions d’euros. Cela étant, si ses recettes ont atteint 79 millions d’euros fin 2013, les produits constatés depuis lors n’ont jamais rejoint la limite annuelle des 45 millions. Au 30 septembre 2015, ils s’établissaient à 40,2 millions d’euros.

La rédaction actuelle de l’article 1609 nonies G du code général des impôts, limite en tout état de cause l’affectation de ces recettes au fonds de péréquation aux cessions intervenues jusqu’au 31 décembre 2015. Parallèlement, l’article 56 du projet de loi de finances pour 2016 (cf. commentaire ci-après) propose la création d’un nouveau fonds national des aides à la pierre qui se substituera au fonds de péréquation – supprimé en conséquence. Pour ce nouveau fonds il est prévu un mode de financement qui permettra de se dispenser du complément de la surtaxe sur les plus-values immobilières.

En revanche, même limité à 45 millions d’euros, le transfert de cette taxe au FNAL viendra opportunément alléger la charge finale pour le budget de l’État. On peut aussi observer que si ces ressources ne contribueront plus directement à la production de logements sociaux, elles participeront à un dispositif qui solvabilise une grande partie de leurs locataires (qui représentaient 2,8 millions de bénéficiaires sur les 6,5 millions de ménages percevant l’une des aides personnelles au logement en 2014), et, par suite, est une des conditions de la stabilité financière des opérations.

Le II du présent article prévoit donc que les recettes de la surtaxe soient affectées au FNAL à compter du 1er janvier 2016, et sans limitation dans la durée, tout en confirmant l’application du plafonnement fixé par le I de l’article 46 de la loi de finances pour 2012 déjà en vigueur.

Par coordination, le III inscrit leur produit dans la liste des recettes du Fonds national d’aide au logement définie à l’article L. 351-7 du code de la construction et de l’habitation dès le 1er janvier 2016.

*

* *

La commission adopte l’article 54, sans modification.

*

* *

Article 55
Amélioration de la prise en compte de la situation financière des bénéficiaires d’aides personnelles au logement (APL)

Texte du projet de loi :

I. - L’article 93 de la loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015 est abrogé.

II. - L’article L. 351-3 du code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :

1° Au 2, les mots : « Les ressources du demandeur » sont remplacés par les mots : « Les ressources et la valeur en capital du patrimoine du demandeur » et après les mots : « à son foyer ; » sont insérés les mots : « la détermination et les conditions de prise en compte des ressources et de la valeur du patrimoine sont définies par décret ; »

2° Au premier alinéa du 3, les mots : « d’un plafond » sont remplacés par les mots : « de plafonds » ;

3° Le deuxième alinéa du 3 est supprimé ;

III. - Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa du 1° du I de l’article L. 542-2, les mots : « compte tenu de leurs ressources » sont remplacés par les mots : « compte tenu de leurs ressources et de la valeur en capital de leur patrimoine » et cet alinéa est complété par le membre de phrase suivant : « la détermination et les conditions de prise en compte des ressources et de la valeur du patrimoine sont définies par décret ; »

2° L’article L. 542-5-1 est abrogé ;

3° À l’article L. 755-21 :

a) Au premier alinéa, après les mots : « à l’article L. 751-1 », sont insérés les mots : « , à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin » ;

b) Au dernier alinéa, la référence : « L. 542-5-1 » est supprimée et après les mots : « dans ces départements », sont insérés les mots : « et dans ces collectivités » ;

4° À l’article L. 831-4 :

a) Au premier alinéa, les mots : « des ressources de l’allocataire » sont remplacés par les mots : « des ressources et de la valeur en capital du patrimoine de l’allocataire » et l’alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :

« La détermination et les conditions de prise en compte des ressources et de la valeur du patrimoine sont définies par décret en Conseil d’État. » ;

b) Le deuxième alinéa est supprimé ;

c) Au dernier alinéa, les mots : « du cinquième alinéa de l'article 6 de la loi n° 89-475 du 10 juillet 1989 relative à l'accueil par des particuliers, à leur domicile, à titre onéreux, de personnes âgées ou handicapées adultes, » sont remplacés par les mots : « de l’article L. 442-1 du code de l’action sociale et des familles ».

IV. - Le 1° du II, le 1° du III et le a du 4° du III entrent en vigueur le 1er octobre 2016 et s’appliquent aux prestations dues à compter de cette date.

Le 2° du II entre en vigueur le 1er juillet 2016 et s’applique aux prestations dues à compter de cette date.

Le 3° du II, les 2° et 3° du III et les b et c du 4° du III entrent en vigueur le 1er janvier 2016.

Observations et décisions de la Commission :

Le présent article propose d’abroger la réforme des aides personnelles en accession adoptée en loi de finances pour 2015, avant sa mise en œuvre en 2016, et de mettre en œuvre des réformes plus ciblées des aides personnelles au logement afin de contenir l’augmentation de ces dépenses, largement financées par le budget de l’État.

I. LE DISPOSITIF EXISTANT

Il existe trois catégories d’aides personnelles au logement :

– l’allocation de logement familiale (ALF) relevant de l’article L. 542-1 du code de la sécurité sociale ;

– l’allocation de logement sociale (ALS), qui relève également du code de la sécurité sociale (article L. 831-1) ;

– et l’aide personnalisée au logement (APL), régie par le code de la construction et de l’habitation (art. L. 351-1 et suivants du CCH).

Elles aident à solvabiliser les ménages, locataires ou accédants, aux revenus modestes par la prise en charge d’une part de leurs dépenses de logement (loyers, charges locatives ou mensualités d’emprunt), réduisant ainsi leur taux d’effort. Elles sont modulées en fonction de leurs ressources et de leur composition familiale, ainsi que du montant des charges assumées dans la limite de plafonds dépendant de la taille de la famille et de la zone géographique où se situe le logement. Les dispositifs prévoient enfin un ajustement des aides lorsque les revenus viennent à diminuer en période de chômage, de séparation, de décès ou de longue maladie.

En 2015, l’APL et l’ALS sont financées par le Fonds national d’aide au logement (FNAL) cependant que l’ALF relève encore du Fonds national des prestations familiales (FNPF). À compter de 2016, les trois aides seront prises en charge par le FNAL dont l’équilibre financier est assuré par une subvention du budget de l’État. Cette subvention s’est élevée à 5,177 milliards d’euros en 2014 ; elle a été évaluée à 10,967 milliards en 2015 avec la cessation des remboursements par les régimes sociaux (cf. commentaire de l’article 54). Enfin, le projet annuel de performances prévoit une dépense pour l’État de 15,386 milliards d’euros en 2016.

Cet alourdissement de la charge pour l’État des aides personnelles au logement résulte d’abord d’une nouvelle répartition des circuits financiers entre l’État et la Sécurité sociale (cf. commentaire susvisé). Il n’en reste pas moins que ces prestations connaissent également une croissance très dynamique, par la conjugaison :

– d’une forte augmentation du nombre des bénéficiaires depuis 2007, traduisant un appauvrissement d’une partie des ménages français en cette période de crise. Ils ont encore progressé de 6,495 millions en 2013 à 6,539 en 2014 ;

– et du mécanisme de revalorisation mis en place par la loi du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale. Les paramètres représentatifs de la dépense de logement entrant dans le calcul des aides personnelles (36) sont indexés sur l’évolution de l’indice de référence des loyers (IRL) (37) et remis à niveau chaque année. Étant donnés les volumes concernés, une revalorisation de 1 % représenterait un surcoût budgétaire pour l’État d’environ 270 millions d’euros en année pleine (dans le nouveau périmètre).

Selon les « Comptes du logement », les dépenses d’aides personnelles au logement seraient passées de 13,9 milliards d’euros en 2004 à 17,7 milliards en 2014 (hors frais de gestion ou 18,1 milliards au total).

La nécessité de contenir l’évolution des dépenses de l’État a conduit à plafonner le mécanisme d’actualisation à 1 % en 2012, puis à décaler du 1er janvier au 1er octobre la date de la revalorisation des paramètres de calcul des aides à partir de l’exercice 2014. Enfin, en 2015, un nouveau régime d’indexation des paramètres de ressources en location est mis en place : ils restent actualisés au 1er janvier de l’année, mais le paramètre R0 du barème locatif (hors foyers), qui détermine l’abattement forfaitaire pratiqué sur les revenus pris en compte dans le calcul des aides personnelles, passe d’une indexation sur l’évolution du revenu de solidarité active (RSA) socle – plus avantageuse pour les allocataires – à une indexation sur l’évolution de l’indice des prix à la consommation hors tabac de l’année N-2, en cohérence avec l’année prise en compte pour les revenus des ménages.

Mais, quelle que soit l’efficacité de ces mesures, les moindres dépenses qu’elles ont permises ne suffisent pas à contenir la croissance des aides personnelles au logement et de la charge consécutive pour le budget de l’État. Et il n’existe plus guère de possibilités d’agir globalement sur leurs déterminants. Le projet annuel de performances pour 2016 annonce l’arrondissement à l’euro inférieur des allocations (au lieu du cent d’euro le plus proche) comme une mesure de simplification, qui amènerait tout de même 40 millions d’euros d’économie. Mais aller plus loin n’est pas envisageable, sauf à dégrader l’efficacité des aides à limiter le taux d’effort des bénéficiaires comme ce serait le cas avec une nouvelle sous-indexation.

Étant donné l’important enjeu de ralentissement de ces dépenses, le Gouvernement a proposé en loi de finances pour 2015 un recentrage des dispositifs d’APL et d’ALS en accession sur une fonction de sécurisation des ménages : elles ne seraient désormais attribuées qu’en cas de chute de leurs revenus de plus de 30 % par rapport à ceux évalués au moment où ils ont signé leur prêt immobilier. Malgré ses réticences face au risque d’éviction de plusieurs milliers d’opérations d’accession à la propriété, le Parlement a voté cette réforme comme gage de futures économies de long terme sur les prestations, mais en obtenant le report de sa mise en œuvre à l’exercice 2016 pour étudier dans l’année d’autres voies de réforme.

II. LE DISPOSITIF ENVISAGÉ

Un groupe de travail, dont le Rapporteur spécial a fait partie, s’est à cet effet constitué à l’Assemblée nationale. Il a rendu ses premières conclusions le 26 mai 2015, présentant des pistes d’économie à court terme tout en considérant nécessaire de poursuivre l’exploration de réformes plus ambitieuses pour l’efficience sociale des aides.

Le présent article 55 s’inspire en partie des propositions du groupe de travail dans la mesure où il renonce à des mesures non ciblées qui toucheraient majoritairement les ménages les plus modestes et propose d’annuler la réforme des aides en accession. Il retient par ailleurs la préconisation du groupe de prendre en compte le patrimoine des ménages dans le calcul des allocations.

En revanche, au grand regret du Rapporteur spécial, aucune réforme n’est entreprise s’agissant du régime d’attribution des aides personnelles au logement aux étudiants et des effets d’aubaine qu’il favorise.

L’article 55 va toutefois plus loin que les conclusions du groupe de travail en proposant deux autres modalités de réforme des prestations : la dégressivité de l’aide pour les niveaux de loyers excessifs et la suppression de l’exonération de l’évaluation forfaitaire des ressources pour les travailleurs moins de 25 ans ne bénéficiant pas d’un contrat à durée déterminée.

*

Le I du présent article abroge (38) l’article 93 de la loi de finances pour 2015 qui modifiait les articles L. 352-2 du code de la construction et de l’habitation ou CCH (s’agissant de l’APL), L. 542-2 (relatif à l’ALF) et L. 831-1 du code de la sécurité sociale ou CSS (pour l’ALS) afin d’instaurer, à partir de l’année prochaine, de nouvelles conditions pour bénéficier des aides personnelles en accession. Cela représenterait une moindre économie de 19 millions d’euros en 2016, 91 millions en 2017 et 156 millions en 2018 selon l’évaluation préalable. Pour autant, le Rapporteur spécial soutient ce renoncement à une réforme qui aurait écarté de l’accession à la propriété des ménages actuellement susceptibles d’y parvenir grâce au complément de solvabilité que leur apportent les allocations. Cette éviction, que certains estimaient à environ 10 000 ménages, aurait particulièrement touché les opérations dans la construction neuve en raison de leur coût d’entrée plus élevé.

Toutefois, le Rapporteur spécial trouverait pertinent que soient étudiés les éventuels effets d’aubaine que pourraient offrir les paramètres de calcul des aides en accession aux tranches de revenus autorisées les plus élevées. Il observe en effet que les aides en accession ne couvrent pas seulement des dépenses irrécupérables, mais servent à financer des investissements qui peuvent être valorisés ultérieurement. On peut notamment s’interroger sur la légitimité du versement d’une aide si le ménage répond aux critères d’endettement d’une banque sans que l’allocation soit prise en compte.

Cela étant, la prise en compte du patrimoine dans les ressources servant au calcul de l’aide devrait corriger certaines situations trop avantageuses par rapport à la philosophie du dispositif.

Cette évolution est proposée par le 1° du II, leet le a du 4° du III du présent article. Il est prévu d’ajouter aux articles L. 351-3 du CCH (APL), L. 542-2 (ALF) et L. 831-4 du CSS (ALS) la référence à la « valeur en capital du patrimoine » des ménages sollicitant ou percevant déjà une aide personnelle au logement après la mention de leurs « ressources » dans les dispositions définissant les éléments fondamentaux du calcul de la prestation.

Dans son principe, il s’agit d’une mesure de cohérence dans un dispositif dont la finalité est d’aider les plus modestes, et même une mesure d’équité entre allocataires des aides personnelles au logement qui peuvent aujourd’hui bénéficier du même degré d’aide tout en ayant des capacités financières réelles différentes. En effet, aujourd’hui, seuls sont considérés les revenus nets catégoriels retenus pour l’établissement de l’impôt sur le revenu (cf. les articles R. 351-5 du CCH, D. 542-10 et R. 831-6 du CSS). Or, un ménage peut disposer d’autres ressources potentiellement mobilisables : une épargne, un bien immobilier pouvant être mis en location, une résidence secondaire…

Le régime du revenu de solidarité active (RSA) intègre déjà dans les ressources servant au calcul de la prestation le patrimoine du foyer, y compris la « valeur en capital des biens non productifs de revenu » (cf. articles L. 262-3 et L. 132-1 du code de l’action sociale et des familles). L’idée sous-jacente est alors que le prétendant à ce minimum social pourrait se procurer des ressources en louant, voire en vendant ce patrimoine. Sont donc ainsi retenus dans le décompte non seulement les loyers d’un immeuble ou les revenus des capitaux placés, mais les capitaux eux-mêmes (livrets d’épargne réglementée, compte ou plan d’épargne logement…) et la valeur locative d’un logement, local ou terrain non loué, ainsi que les ressources exceptionnelles issues d’une vente d’une maison, d’un héritage, de gains aux jeux etc. L’article R. 132-1 du code de l’action sociale et des familles, applicable au RSA aux termes de l’article R. 262-6 du même code, précise que « les biens non productifs de revenu, à l’exclusion de ceux constituant l’habitation principale du demandeur, sont considérés comme procurant un revenu annuel égal à 50 % de leur valeur locative s’il s’agit d’immeubles bâtis, à 80 % de cette valeur s’il s’agit de terrains non bâtis et à 3 % du montant des capitaux. »

Auditionnés par le Rapporteur spécial, les services ministériels en charge du logement indiquent que l’identification et la valorisation du patrimoine retenu s’inspireront du régime du RSA. Plutôt que de définir des seuils patrimoniaux au-delà desquels les ménages concernés ne percevraient plus d’aides, l’intégration de revenus théoriques dans l’appréciation de leurs ressources permet, en particulier, une progressivité de l’impact. Néanmoins, le présent article se contente de renvoyer « la détermination et les conditions de prise en compte des ressources et de la valeur du patrimoine » à des décrets, simples (pour l’APL et l’ALF) ou en Conseil d’État (pour l’ALS), sans assurance sur les paramètres qui seront finalement retenus une fois que le Parlement aura validé le principe de ces évolutions.

Si le renvoi est légitime, le Rapporteur spécial déplore que le Parlement ne soit pas plus informé sur les modalités concrètes de la réforme des aides personnelles au logement. Sur cette évolution sensible, comme sur les deux autres modalités, les rapporteurs du texte n’ont pu obtenir, malgré leurs demandes réitérées, le détail des décrets annoncés parce que toutes les options des futurs dispositifs n’ont pas encore été arbitrées. Et même si les principales hypothèses de calcul retenues par les évaluations budgétaires leur ont été présentées (les règles du RSA s’agissant de la prise en compte du patrimoine), ils n’ont pu disposer des projections réalisées qui leur auraient permis de mieux appréhender les impacts pour les allocataires. L’évaluation préalable de l’article indique seulement que la première réforme proposée concernerait principalement les 10 % de bénéficiaires des aides personnelles au logement qui ont patrimoine supérieur à 30 000 euros, dont 4 % qui ont un patrimoine supérieur à 75 000 euros et 2 % qui ont un patrimoine supérieur à 150 000 euros.

Or, s’il semble inacceptable au groupe de travail, dans le contexte budgétaire que connaît notre pays, de soutenir les dépenses de logement de ménages qui détiendraient un patrimoine immobilier qu’ils pourraient occuper ou mieux utiliser, s’il faut questionner un étalonnage des prestations qui donneraient à certains allocataires les capacités d’acquérir une résidence secondaire, il faudrait tout autant éviter la pénalisation de ceux qui sont contraints à une mobilité professionnelle temporaire, en instance de séparation ou dont le bien n’est pas, ou difficilement, louable ou cessible, notamment parce qu’il est détenu en nue-propriété ou en indivision familiale à la suite d’un héritage (39). En conséquence, le Rapporteur spécial soutient le principe de la prise en compte du patrimoine dans l’évaluation des ressources des demandeurs et allocataires des aides au logement, mais demande au Gouvernement une approche nuancée des situations.

On relèvera que selon son évaluation préalable, cette réforme pourrait dégager 33 millions d’euros d’économies dès 2016, même si elle n’est mise en œuvre qu’à partir du 1er octobre comme le propose le premier alinéa du IV de l’article 55 - le temps d’établir les textes réglementaires et de procéder à une nouvelle évaluation de toutes les situations financières, y compris pour les allocataires qui ont un droit en cours, précise l’évaluation préalable du projet. Le texte indique en effet qu’elle « [s’appliquera] aux prestations dues à compter de cette date ». Les économies s’élèveront à 133 millions d’euros en année pleine.

La deuxième grande réforme des aides personnelles au logement proposée par le présent article résulte de la modification apportée par le 2° du II qui remplace, à l’article 351-3 du CCH relatif à l’APL, les mots : « d’un plafond » par les mots : « de plafonds » appliqués au montant du loyer, de la redevance ou de la mensualité de remboursement de prêt retenu dans le calcul de l’allocation. De fait, les articles L. 542-5 (pour l’ALF) et L. 831-4 du CSS (pour l’ALS) ouvrent déjà la possibilité de fixer plusieurs plafonds pour la prise en compte de ces éléments. Mais aujourd’hui, les textes réglementaires applicables aux trois aides (R. 351-17-5 du CCH et D. 542-5 du CSS) ne prévoient qu’un unique plafond de loyer - ou de mensualité - variant selon la zone géographique et le nombre de personnes à charge du ménage. La réforme porterait donc sur les trois dispositifs.

Schématiquement, l’aide correspond à la somme du loyer réel, retenu dans la limite du plafond applicable, et du forfait de charges dont on soustrait la participation personnelle du ménage à la dépense ou le loyer minimal à sa charge. Ces derniers sont pondérés en fonction de la taille de la famille mais augmentent avec ses revenus, diminuant d’autant l’aide finale. Un coefficient est en outre appliqué à la formule pour l’aide en accession. Selon ces calculs, la partie des dépenses de logement dépassant le total du forfait de charges et du plafond de loyer - ou de mensualité - est entièrement payée par le ménage quelles que soient ses ressources.

Le Gouvernement annonce, dans l’exposé des motifs de l’article 55, son intention d’instaurer une diminution progressive des trois aides personnelles au logement au-delà d’un second plafond de loyer supérieur. Et l’évaluation préalable précise que cette dégressivité irait jusqu’à la suppression de l’aide si le loyer dépasse un troisième plafond encore plus élevé. Interrogé par le Rapporteur spécial, le Gouvernement a indiqué avoir travaillé sur différentes hypothèses dont un premier seuil calé à 200 % du loyer plafond et le deuxième à 400 voire 500 %. L’évaluation préalable de l’article dénombre 106 000 allocataires de l’ALF ayant un loyer supérieur à 200 % du loyer plafond, 350 000 en ALS et 17 000 en APL.

Le Gouvernement dit viser à nouveau une plus grande équité entre les bénéficiaires des aides, avec l’idée sous-jacente que si certains assument des charges d’un montant particulièrement élevé par rapport aux revenus qu’ils déclarent, c’est que leur situation financière réelle est plus favorable. À l’évidence, cette mesure cible en particulier certains étudiants dont les familles sont capables de payer des loyers hors de proportion.

L’évaluation préalable de l’article évoque un autre cas de figure : en sus des ménages dont le loyer par mètre carré est très élevé, seraient également concernés ceux qui seraient en sous-occupation de leur logement, avec des loyers manifestement trop élevés pour la taille de la famille. À l’instar du premier, les deuxième et troisième plafonds varieraient vraisemblablement selon le nombre des personnes à charge. Une telle évolution pourrait aider à convaincre des personnes occupant un logement social devenu trop grand après le départ de leurs enfants à solliciter un logement plus petit, contribuant à améliorer la mobilité sur les logements familiaux dans le parc social. Toutefois, un tel scenario ne serait vertueux que dans la mesure où un autre logement adapté est accessible à ces ménages – ce qui paraît plus compliqué dans le secteur privé.

En tout état de cause, il est assez probable que nombre des ménages assumant des loyers aussi élevés bénéficient de ressources plus larges que celles prises en compte dans le calcul des aides. Autrement, la charge serait insoutenable ou la location ne leur aurait pas été accordée. Il est aussi probable dans ces cas-là que l’aide aurait été moindre si son calcul s’était calé sur la réalité. La prise en compte de leur patrimoine ou la dégressivité de l’aide devrait rétablir une plus grande égalité de situation entre bénéficiaires des allocations, et alléger les dépenses du FNAL.

Même si les évaluations données par le projet de loi de finances additionnent des économies qui pourraient concerner les mêmes ménages et peut-être se neutraliser en partie, elles sont estimées à 62 millions d’euros en 2016 pour une entrée en vigueur prévue au 1er juillet et applicable aux dossiers en cours (deuxième alinéa du IV) et à 123 millions d’euros en année pleine.

Autant de raisons qui convainquent le Rapporteur spécial de soutenir le principe d’une dégressivité de l’aide pour les niveaux de loyers excessifs. Ce durcissement peut en outre contribuer à minimiser l’effet inflationniste des aides dont le montant, quand il est connu d’avance par les bailleurs, favorise la surenchère des prix.

Toutefois, cette réforme pourrait s’avérer illégitimement pénalisante pour certains cas : les locataires touchés par une diminution importante de leurs revenus ou en instance de séparation, soit à des moments où les aides sont plus que jamais nécessaires et le maintien dans un logement menacé. Comme l’évaluation préalable l’admet, les petits ménages du parc privé en zone 1 seraient les plus affectés. Or, ceux-ci se trouvent en concurrence sur un marché des petites surfaces très tendu et par suite très cher. Ces ménages n’ont pas nécessairement le choix entre les loyers face à une offre limitée. Ainsi, le plafond de loyer applicable à une personne isolée en zone 1 s’établit aujourd’hui à 292,85. Sachant qu’au 1er janvier 2015, l’OLAP relevait un loyer moyen de 17,90 euros le mètre carré à Paris et sa petite couronne, 200 % de ce loyer plafond correspondrait à un logement d’environ 33 mètres carrés, et même plus petit en réalité car les loyers des petites surfaces sont proportionnellement plus élevés. Il ne s’agit pas de situations hors normes.

Le Rapporteur spécial demande donc au Gouvernement de tenir compte dans les nouvelles règles – qui seront définies par voie réglementaire – des situations de rupture qui modifient la situation financière des allocataires ; il propose par ailleurs de définir par amendement un seuil minimal pour le deuxième plafond plus pertinent que les 200 % suggérés par l’évaluation préalable de l’article. Il est apparu que le niveau retenu par les projections d’économie du ministère du logement s’établissait plutôt à 280 % des loyers-plafonds en zone 1 et 240 % en zones 2 et 3 ou à 280 % pour toutes les zones mais avec une pente de dégressivité linéaire plus marquée (40). Ce pourrait être le seuil minimal à partir duquel seulement les aides seraient écrêtées, sachant qu’à Paris, 10 % des allocataires sans personne à charge payent des loyers compris entre 200 et 300 % du loyer-plafond et 4,5 % des loyers compris entre 300 et 450 %.

Enfin, la troisième grande mesure de réforme est portée par les 3° du II, 2° et b du 4° du III de l’article 55 qui proposent de supprimer aux articles L. 351-3 du CCH (APL), L. 542-5-1 du CSS (ALF) et L. 831-4 du même code (ALS) les dispositions énonçant, dans les mêmes termes, que la prise en compte des ressources dans le calcul des aides « peut faire l’objet de dispositions spécifiques, lorsque le demandeur est âgé de moins de vingt-cinq ans, et qu’il bénéficie d’un contrat autre qu’un contrat à durée déterminée. » Et ce, dès le 1er janvier 2016 en vertu du dernier alinéa de l’article. (41)

Si la loi définit les éléments fondamentaux retenus dans le calcul des aides, il revient aux textes réglementaires de préciser les modalités selon lesquelles ils sont pris en compte.

C’est ainsi que les articles R. 351-5 du CCH pour l’APL, D. 542-10 du CSS pour l’ALF et R. 831-6 du CSS pour l’ALS posent le principe général que sont retenues les ressources réelles perçues pendant l'année civile de référence qui est l'avant-dernière année précédant la période de paiement de l’aide (dite A-2).

Ensuite, les articles R. 351-7 du CCH, D. 542-9 et R. 831-5 du CSS aménagent un dispositif d’évaluation forfaitaire pour les ménages dont l’un des membres perçoit une rémunération mensuelle (hors RSA ou allocation pour adulte handicapé) lors de l’ouverture du droit, mais dont le total des ressources en A-2 est au plus égal à 1 015 fois le salaire minimum de croissance horaire en vigueur ladite année. Le mécanisme est reconduit lors du premier renouvellement des droits si les ressources ont déjà fait l’objet d’une évaluation forfaitaire. Il est également appliqué lorsqu’un ménage déjà bénéficiaire d’une aide personnelle au logement n’a pas disposé de ressources imposables en A-2. Le forfait de ressources représente alors 12 fois la rémunération mensuelle perçue par l’intéressé le mois civil précédant l’ouverture du droit ou le mois de novembre précédant son renouvellement, ou 1 500 fois le salaire minimum de croissance horaire en vigueur s’il s’agit d’un employeur ou d’un travailleur indépendant. Le dispositif vise ainsi à corriger le biais que représente le calcul des prestations sur des montants constatés en A-2 alors qu’un ménage a pu retrouver une activité professionnelle suffisamment rémunérée après une période difficile, et à déterminer des niveaux d’aide plus en rapport avec la réalité de sa situation financière au moment où il perçoit les allocations.

Toutefois, il existe deux dérogations à ce mécanisme : en premier lieu, les demandeurs ou allocataires qui poursuivent leurs études et dont les ressources en A-2 sont inférieures à un montant fixé par décret se voient appliquer un plancher de ressources variant selon qu’ils sont boursiers ou non (Cf. article R. 351-7-2 du CCH et D. 542-10 du CSS).

Enfin, les articles instituant le dispositif d’évaluation forfaitaire des ressources prévoient dans le même temps qu’il ne s’applique pas aux jeunes de moins de 25 ans qui exercent une activité professionnelle, salariée ou non, mais perçoivent une rémunération mensuelle nette inférieure à un montant déterminé par arrêté (42) au cours du mois civil précédant l’ouverture du droit ou du mois de novembre précédant son renouvellement. Cela revient à retenir pour eux les ressources réelles en A-2 même si elles sont très inférieures aux revenus présents comme c’est souvent le cas pour des demandeurs de moins de vingt-cinq ans qui n’ont encore pas ou peu travaillé. Cela aboutit vraisemblablement à accorder à la plupart des dossiers des allocations supérieures à celles qu’ils auraient obtenues dans le régime d’évaluation forfaitaire.

Force est donc de constater une certaine iniquité de traitement entre ces jeunes travailleurs (qui seraient 147 000 fin 2014) et d’autres, plus âgés, ayant également subi la précarité de travaux intermittents ou des périodes de chômage durable. Il peut aussi paraître déplacé de verser des aides personnelles au logement à des jeunes qui seraient aujourd’hui engagés dans une carrière offrant des perspectives d’évolution plus rémunératrice, sans en tenir compte, sur le seul critère de l’âge.

En outre, il est apparu que, contrairement à la limite posée par les dispositions législatives précitées (aux articles L. 351-3 du CCH, L. 542-5-1 et L. 831-4 du CSS), la nature du contrat n’est pas prise en compte. Interrogée, la Caisse nationale des allocations familiales a indiqué que les textes réglementaires et leur application ne retiennent que la notion d’activité salariée et un seuil de salaire mensuel fiscal net pour déterminer si le jeune travailleur échappe au processus d’évaluation forfaitaire, sans considérer le caractère précaire ou non de leur situation. Les travailleurs indépendants sont systématiquement exonérés et des jeunes sous contrats à durée indéterminée peuvent l’être aussi.

Revenir sur cette exception exige néanmoins de la prudence car l’exonération concerne par définition une tranche d’âge particulièrement exposée aux difficultés d’emploi qui compte nombre de personnes précaires et/ou avec des rémunérations potentiellement très variables. Certes, si les allocataires se retrouvent au chômage, leurs prestations sont recalculées ; mais rien n’est prévu en cas de forte variation des revenus indépendamment d’une perte d’emploi. Appliquer le régime de l’évaluation forfaitaire en l’état actuel de ses règles peut aussi aboutir à minimiser l’aide à laquelle ces jeunes travailleurs précaires pourraient normalement prétendre si elle est réalisée à partir d’un mois de revenus plus élevés que la moyenne de leurs gains mensuels. D’après les chiffres indiqués par le projet annuel de performances, la perte annuelle moyenne serait de 740 euros par individu.

Or, le Rapporteur spécial constate que les dispositions dont l’article 55 propose la suppression ouvrent seulement la possibilité de définir des règles dérogatoires. Le Gouvernement n’est pas obligé de les prévoir ; il peut d’ores et déjà supprimer les dispositifs existants, ou s’en tenir à une correction des dysfonctionnements. Il a toute latitude pour faire évoluer les règles. Il y une dizaine d’années par exemple, le gouvernement appliquait un mécanisme d’évaluation forfaitaire moins sévère (en multipliant par 9 au lieu de 12 la base mensuelle et en permettant sa révision tous les quatre mois si les revenus baissaient d’au moins 10 %). A contrario, supprimer les dispositions législatives en question ferait disparaître toute marge d’adaptation en faveur d’une population statistiquement plus fragile – ce que le Rapporteur spécial trouverait regrettable.

L’évaluation préalable annonce 109 millions d’euros d’économies grâce à la suppression pure et simple du traitement différencié des jeunes travailleurs. Le Rapporteur spécial propose néanmoins d’amender l’article afin de conserver cette possibilité d’adapter les règles pour protéger une population souvent fragile, tout en soutenant le Gouvernement dans sa démarche de correction des excès des actuelles dérogations.

On relèvera enfin que le présent article prévoit quelques autres évolutions :

– en modifiant l’article L. 755-21 du CSS, le 3° du III vise à étendre l’attribution et les règles de calcul de l’ALF à Saint-Barthélemy et Saint-Martin dans les mêmes conditions que les départements d’outre-mer mentionnés à l’article L. 751-1 du même code. Il supprime également la référence à l’article L. 542-5-1 qui permet de déroger aux modalités communes de prise en compte des ressources dans le calcul de l’aide en faveur des jeunes travailleurs et dont l’article 55 propose la disparition (cf. supra). Les dispositions relatives à l’APL et à l’ALS étaient déjà applicables à l’ensemble de ces collectivités ultramarines en vertu des articles L. 351-2 du CCH et L. 831-1 du CSS ;

– le c du 4 ° du III propose, pour sa part, d’adapter la rédaction du dernier alinéa de l’article L. 831-4 du CSS (qui définit les paramètres du calcul de l’ALS) à l’insertion de la loi n° 89-475 du 10 juillet 1989 relative à l’accueil par des particuliers, à leur domicile, à titre onéreux d’adultes âgés ou handicapés dans le code de l’action sociale et des familles. L’article renverra désormais à l’article L. 442-1 de ce code la détermination du contrat que ces adultes doivent passer avec leurs accueillants pour être assimilés à des locataires et prétendre à l’ALS.

Cette seconde modification n’appelle pas de commentaire particulier.

Par contre, il est apparu que la publication récente de la loi n° 2015-1268 du 14 octobre 2015 d'actualisation du droit des outre-mer rend inutile la précédente disposition. En modifiant l’article L. 751-1 du CSS pour appliquer à Saint-Barthélemy et Saint-Martin le même régime de sécurité sociale, y compris le régime d’allocation de logement familiale, que dans les quatre départements d’outre-mer initialement visés, l’article 7 de cette loi a une portée plus large.

Le Rapporteur spécial porte donc un amendement qui supprime la modification du 3° du III qui pourrait être source de confusion.

*

* *

La commission examine d’abord l’amendement n° II-CF82 du rapporteur spécial.

M. le rapporteur spécial. Je propose, par cet amendement, de porter à 280 % du loyer-plafond le seuil minimal de loyer pour l’application de la dégressivité de l’aide. Daniel Goldberg a déposé en commission des affaires économiques un amendement qui proposera quant à lui un seuil à 300 %. Nous souhaitons éviter de toucher excessivement les locataires du parc privé en zones tendues dont les loyers moyens atteignent facilement les 200 % du loyer-plafond.

Mme Marie-Christine Dalloz. L’amendement concerne donc essentiellement Paris. Au regard des 123 millions d’euros d’économies attendus de la mesure proposée par le Gouvernement, quel serait le coût de cet amendement ?

M. Razzy Hammadi. Par mon amendement n° II-CF8, je suggère – plutôt que d’instaurer des seuils, comme le proposent nos collègues, qui peuvent créer de mauvaises surprises – d’exclure des réformes proposées à l’article 55 les allocataires n’ayant pas de patrimoine générant des revenus qui résident dans les zones tendues, qui sont déjà définies par la loi.

M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. J’ai déposé un amendement très proche de celui du rapporteur spécial. Nos amendements prévoient ce seuil pour l’ensemble des zones. Je ne suis pas sûr, en effet, que le Gouvernement n’envisage pas des seuils différents pour les zones moins tendues. Or, les loyers-plafonds varient selon les zones. Pourquoi faudrait-il protéger davantage les zones tendues ?

M. le rapporteur spécial. Avec un seuil à 280 %, l’économie attendue par le Gouvernement en année pleine serait réalisée, car c’est précisément l’une des hypothèses qu’il retient dans son calcul.

M. Dominique Lefebvre, président. La discussion en séance publique des amendements, y compris peut-être d’amendements du Gouvernement, permettra de progresser sur cette question.

La commission adopte l’amendement n° II-CF82.

Elle examine ensuite l’amendement n° II-CF83 du rapporteur spécial.

M. le rapporteur spécial. Il ne paraît pas nécessaire de modifier la loi s’agissant des jeunes travailleurs de moins de 25 ans, car elle n’ouvre actuellement qu’une simple possibilité de les aider. Je trouve pertinent, au contraire, de conserver cette potentialité d’ajustement des règles.

M. François Pupponi. En outre, des effets non évalués risquent de s’exercer sur d’autres dispositifs, de telle sorte qu’il faut continuer de permettre au pouvoir réglementaire de corriger lui-même les dérives éventuelles du dispositif.

Mme Marie-Christine Dalloz. Pourquoi établir une différence entre les jeunes en CDI et ceux dont les CDD sont renouvelés ?

M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. J’ai déposé en commission des affaires économiques un amendement identique à celui du rapporteur spécial. Le Gouvernement souhaite supprimer les dispositifs particuliers s’adressant aux jeunes de moins de 25 ans qui ne sont pas en CDI, mais nous préférons maintenir ouverte cette possibilité de prévoir de telles dérogations en faveur des jeunes en situation de précarité. À l’issue d’un CDD de quatre mois, un jeune bénéficie d’allocations de chômage mais ce sont ses ressources de l’année n, et non celles de l’année n–2, souvent inexistantes, qui seront prises en compte. La ministre a rappelé les engagements du Gouvernement à cet égard. L’évaluation forfaitaire n’est pas un problème pour un jeune qui a une situation pérenne, mais nous devons prévoir les cas où le CDD n’est pas renouvelé.

La commission adopte l’amendement n° II-CF83.

Elle examine ensuite l’amendement n° II-CF84 du rapporteur spécial.

M. le rapporteur spécial. L’amendement procède à une clarification des dispositions relatives à l’outre-mer.

La commission adopte l’amendement n° II-CF84.

Elle examine ensuite l’amendement n° II-CF8 de M. Razzy Hammadi.

M. Razzy Hammadi. Les simulations effectuées par le Gouvernement sur les plafonds seront bientôt connues et nous devons nous efforcer de communiquer clairement sur cette mesure afin d’être compris du plus grand nombre en attendant un dispositif stabilisé. Des députés siégeant sur tous les bancs de notre Assemblée se sont exprimés en ce sens.

M. le rapporteur spécial. Je vous propose de retirer votre amendement pour que l’ensemble du dispositif puisse être débattu en Séance.

M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. J’entends évidemment la préoccupation exprimée par Razzy Hammadi mais son amendement écarterait de la réforme les propriétaires d’une résidence secondaire, qui ne produit pas de revenus, dès lors qu’ils résident en zone tendue. Il faut surtout prendre garde aux situations particulières, comme celle d’un bien, situé en zone tendue ou non, hérité en indivision, ne générant aucun revenu et ne pouvant être vendu.

Mme Véronique Louwagie. Que recouvre exactement le terme de « patrimoine » employé par l’amendement ?

M. François Pupponi. Dans le souci d’éviter des effets pervers et la pénalisation de certaines personnes, nous allons approfondir la question de concert avec le Gouvernement. Mais je rappelle que la prise en compte du patrimoine dans l’assiette des ressources devrait se caler sur les règles du RSA (revenu de solidarité active). Il faut conserver une logique d’ensemble pour les minima sociaux.

La commission rejette l’amendement n° II-CF8, puis elle adopte l’article 55, modifié.

*

* *

Article additionnel après l’article 55 : Affectation à l’Agence nationale de l’habitat de la totalité du produit des astreintes administratives en matière de lutte contre l’habitat indigne

La commission examine l’amendement n° II-CL14 de Mme Nathalie Appéré.

M. Marcel Rogemont. L’amendement propose d’affecter à l’Agence nationale de l’habitat la totalité du produit des astreintes administratives en matière de lutte contre l’habitat indigne.

M. Dominique Lefebvre, président. Le rapporteur spécial m’a fait savoir qu’il était défavorable à cet amendement afin de préserver la part des astreintes affectées au budget de l’État.

La commission adopte l’amendement n° II-CL14.

*

* *

Article 56
Création et financement du Fonds national d’aide à la pierre (FNAP)

Texte du projet de loi :

I. - Le code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :

A. - Au quatrième alinéa de l’article L. 302-9-1, la référence : « L. 302-9-3 » est remplacée par la référence : « L. 435-1 ».

B. - Les articles L. 302-9-3 et L. 302-9-4 sont abrogés.

C. - Le septième alinéa de l’article L. 351-3 est supprimé.

D. - Au titre III du Livre IV, il est ajouté un chapitre V ainsi rédigé :

« Chapitre V : Fonds national des aides à la pierre

« Art. L. 435-1. - I. - Le fonds national des aides à la pierre est chargé de contribuer, sur le territoire de la France métropolitaine, au financement des opérations de développement, d’amélioration et de démolition du parc de logements locatifs sociaux appartenant aux organismes d'habitations à loyer modéré, aux sociétés d'économie mixte mentionnées à l'article L. 481-1 et aux organismes bénéficiant de l'agrément relatif à la maîtrise d'ouvrage prévu à l'article L. 365-2.

« Il peut contribuer, à titre accessoire, au financement d’autres opérations conduites par des personnes morales pouvant bénéficier, en application des titres I, II et III du livre III, de prêts et subventions pour la construction, l'acquisition et l'amélioration des logements locatifs aidés.

« Il peut financer des actions d’ingénierie ayant pour objectif de promouvoir l’accès au logement des personnes et familles défavorisées et le développement, la gestion du système mentionné à l’article L. 441-2-1 et les procédures applicables au dépôt et au renouvellement des demandes d'attribution de logements sociaux.

« Il peut financer, à titre accessoire, des actions d’accompagnement visant à moderniser le secteur du logement social autres que celles financées par le fonds mentionné à l’avant-dernier alinéa de l’article L. 452-1.

« II. - Les ressources du fonds sont constituées par :

« 1° Une fraction des cotisations mentionnées aux articles L. 452-4 et L. 452-4-1. Pour 2016, cette fraction est fixée à 270 M€ ;

« 2° La majoration du prélèvement prévue au deuxième alinéa de l’article L. 302-9-1, qui est exclusivement destinée au financement de la réalisation de logements locatifs sociaux à destination des ménages mentionnés au II de l'article L. 301-1.

« Elles peuvent être complétées par :

« 1° Des subventions et contributions de l'État, des collectivités territoriales et de toutes autres personnes publiques et privées ;

« 2° D'une manière générale, toutes les recettes autorisées par les lois et règlements.

« III. - Le fonds est un établissement public à caractère administratif qui sera créé par décret en Conseil d'État. »

E. - L’article L. 452-1-1 est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, les mots : « dont les ressources proviennent de la taxe prévue à l’article 1609 nonies G du code général des impôts et d’une fraction des cotisations mentionnées aux articles L. 452-4 et L. 452-4-1. Ce fonds » sont remplacés par les mots : « qui » ;

2° Le deuxième alinéa est supprimé.

F. - Au dernier alinéa de l’article L. 452-4, le taux de : « 1,5 % » est remplacé par le taux : « 3 % ».

II. - A. - Les dispositions du E du I entrent en vigueur le 1er janvier 2016.

B. - Les dispositions de l’article L. 435-1 du code de la construction et de l’habitation, à l’exception de son II, entrent en vigueur à la date de publication du décret mentionné à cet article et au plus tard le 1er juillet 2016.

C. - Les dispositions des A, B, C du I et du II de l’article L. 435-1 du code de la construction et de l’habitation entrent en vigueur un mois après la publication du décret prévu à cet article et au plus tard le 1er août 2016.

À la date d’entrée en vigueur mentionnée à l’alinéa précédent, l’article L. 452-1-1 du code de la construction et de l’habitation est abrogé et les biens, droits et obligations des fonds prévus à l’article L. 302-9-3 du code de la construction et de l’habitation et au premier alinéa de l’article L. 452-1-1 du code de la construction et de l’habitation dans sa rédaction en vigueur à la date de promulgation de la présente loi sont transférés par la Caisse de garantie du logement locatif social au fonds mentionné à l’article L. 435-1 du même code.

Observations et décisions de la Commission :

Le présent article vise à réformer le financement des subventions nationales soutenant le développement (dites aides à la pierre) et l’amélioration du logement locatif social en créant un fonds susceptible de le sécuriser et d’améliorer la distribution de ces aides aux territoires qui ont le plus de besoins.

I. LE DISPOSITIF EXISTANT

Les aides à la pierre sont les subventions à la production de logements locatifs sociaux ou de logements-foyers conventionnés financées par le budget de l’État.

Celles qui sont directement concernées par le présent article relèvent de l’action 1 Construction locative et amélioration du parc de la présente mission Égalité des territoires et logement qui apportent un concours financier aux opérations en métropole et hors programme de rénovation urbaine. Les subventions en faveur de l’outre-mer ou des programmes de renouvellement urbain sont pris en charge par les budgets de la mission Outre-mer ou de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU), opérateur de la mission Politique des territoires.

Les lois de finances définissent une dotation annuelle en autorisations d’engagement (AE) à répartir entre les projets recevant l’agrément du ministère en charge du logement mentionné à l’article R. 331-3 du code de la construction et de l’habitation (CCH) en fonction des objectifs et des enveloppes arrêtés pour l’exercice. La contrainte financière pesant sur le budget de l’État a amené le Gouvernement à, non seulement, réduire les crédits totaux dédiés, mais également à concentrer davantage leur attribution sur les opérations prioritaires et les territoires les plus tendus. Ainsi, la dotation globale du budget général aux aides à la pierre est descendue de 500 millions d’euros en 2013 à 450 millions en 2014 et à 375 millions en 2015 – partant aussi du constat de la large sous-consommation des crédits l’an dernier, où seuls 385 millions d’euros auront été engagés. Le projet annuel de performances annonce néanmoins une dotation remontant à 400 millions d’euros pour 2016. Parallèlement, les enveloppes sont essentiellement consacrées au soutien des opérations de développement des logements les plus sociaux (ceux qui bénéficient d’un prêt locatif aidé (dit PLAI) sur fonds d’épargne de la Caisse des dépôts et consignations) et aux subventions pour « surcharge foncière » qui peuvent compléter tous les types de prêts au développement des logements sociaux et logements-foyers conventionnés (prêt locatif à usage social, dit PLUS, et prêt locatif social ou PLS) quand le projet financé est réalisé en zone tendue où le foncier est cher. Depuis 2015, les opérations en PLUS ne bénéficient plus d’aucun euro de subvention de l’État (43) – l’essentiel de l’aide nationale venant, rappelons-le, des bonifications d’intérêt accordées à ces prêts et des importants dégrèvements, exonérations ou allégements fiscaux dont bénéficient les programmes ou les organismes de logement social au titre de leur mission d’intérêt général (qui sont évalués à 3,4 milliards d’euros en 2015).

La contrainte budgétaire s’est plus particulièrement faite sentir sur les crédits de paiement (CP). Les dotations du budget général dédiées au développement du logement social sont complétées depuis plusieurs années par des fonds de concours. La loi n° 2009-323 du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion a ainsi créé un fonds de péréquation (mentionné à l’article L. 452-1-1 du CCH) dans le double but d’organiser une mutualisation des ressources « dormantes » du secteur locatif social pour les réinvestir dans de nouveaux logements et d’alléger les dépenses de l’État tout en maintenant un objectif élevé de production nouvelle.

Géré pour le compte de l’État, le fonds de péréquation est hébergé par la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS), sans toutefois faire partie de son budget. Il peut contribuer au financement des opérations de rénovation urbaine (44) et, plus substantiellement, complète les crédits de paiement inscrits au programme 135 Urbanisme, territoires et amélioration de l’habitat de la mission Égalité des territoires et logement pour les aides à la pierre (45). S’ils n’ont représenté qu’une dizaine de millions en 2011, ce sont près de 80 millions d’euros qui auront renforcé les crédits de paiement du budget général en 2012, 128 millions en 2013 et environ 335 millions en 2014 (rattrapant les retards des précédents rattachements de fonds). Les prévisions pour 2015 s’établissaient à 216 millions d’euros rattachés et le projet annuel de performances annonce que 270 millions d’euros de fonds de concours compléteront les 100 millions d’euros inscrits dans le projet de loi de finances pour financer les aides à la pierre en 2016.

Le fonds de péréquation était initialement alimenté par un prélèvement sur le potentiel financier (la richesse accumulée) des organismes d’habitations à loyer modéré, créé par la même loi de 2009, de 175 millions d’euros à répartir chaque année, complété :

– par un prélèvement de 70 millions d’euros sur la cotisation additionnelle (portant sur l’autofinancement net, soit la richesse produite) versée par ces mêmes acteurs à la CGLLS (article L. 452-4-1 du CCH).

On rappellera que la Caisse est un établissement public à caractère administratif créé par la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains dite « SRU » et qu’elle a pour missions principales de garantir les prêts accordés par la Caisse des dépôts et consignations aux opérateurs de logement locatif social et de contribuer à la prévention des difficultés financières et à l’éventuel redressement de ces mêmes organismes. Pour ce faire, elle perçoit deux cotisations annuelles des bailleurs sociaux, dont les paramètres de calcul sont adaptés, à la hausse ou à la baisse, selon les prévisions des besoins ;

– et par une fraction du produit de la surtaxe sur les plus-values immobilières supérieures à 50 000 euros (définie à l’article 1609 nonies du code général des impôts), créée par la loi de finances rectificative du 28 décembre 2012 et plafonnée à 45 millions d’euros par la loi de finances pour 2015.

Le prélèvement sur le potentiel financier a été abandonné en 2013, avant même sa liquidation au titre de l’exercice, en contrepartie de l’engagement des organismes de logements sociaux fédérés par l’Union sociale pour l’habitat à mettre en place un dispositif propre de mutualisation de leurs ressources pour soutenir les organismes qui investissent. Son principe a été formalisé par la signature du Pacte d’objectifs et de moyens pour la mise en œuvre du plan d’investissement pour le logement le 8 juillet 2013 – mais le dispositif n’a été concrètement lancé qu’en fin d’année 2014 (46).

Le prélèvement annuel de 70 millions d’euros sur la cotisation additionnelle a, quant à lui, été maintenu en 2013 et pour les exercices suivants. Le fonds de péréquation a par ailleurs reçu, successivement, deux versements exceptionnels correspondant aux résultats excédentaires de la CGLLS de 2012 (78 millions d’euros) et de 2014 (15 millions d’euros) (47), ainsi qu’un reliquat de 10 millions d’euros résultant de la fusion de la MIILOS et de l’ANPEEC (48) en 2015.

Cependant, la nécessité d’alléger les charges budgétaires pour l’État a conduit le Gouvernement à renforcer le complément apporté par le fonds de péréquation aux dotations du programme 135. La loi de finances pour 2015 a ainsi porté le prélèvement sur les recettes de la CGLLS de 70 à 120 millions d’euros par an de 2015 à 2017 – et élargi son assiette aux deux cotisations annuelles versées par les bailleurs sociaux à la Caisse, pour plus de souplesse et de sécurité.

La cotisation additionnelle est en effet assise sur le nombre de logements locatifs et l’autofinancement net des organismes. Celui-ci, après avoir baissé en 2013 (– 35 % par rapport à 2012), est remonté en 2014 (+ 27,5 %) selon les données de la CGLLS. Représentant un total de 1 879 millions d’euros fin 2014, il est substantiel mais varie en fonction des arbitrages financiers des bailleurs sociaux. Correspondant aux loyers et redevances du dernier exercice clos, l’assiette de la première cotisation est plus stable et a même tendance à croître avec le développement et l’amélioration du parc.

II. LE DISPOSITIF ENVISAGÉ

Le présent article vise à réformer le financement des subventions nationales au développement et à l’amélioration des logements locatifs sociaux en créant un « fonds national des aides à la pierre » (FNAP) qui se substituera, notamment, à l’actuel fonds de péréquation. Il s’agit, à la fois, de pérenniser ses ressources, et par suite de sécuriser le financement des aides à la pierre, et d’organiser une gouvernance partagée pour leur programmation en associant représentants de l’État, collectivités territoriales et bailleurs sociaux au sein du conseil d’administration du nouvel établissement public administratif à caractère national.

Le principe de ce nouveau fonds, ses missions, l’origine de ses ressources et son statut font l’objet d’un nouvel article L. 435-1 inséré au code de la construction et de l’habitation (CCH) par le D du I de l’article. Auparavant, les A, B, et C du I tirent les conséquences de la création du FNAP et de sa substitution au fonds de péréquation précité et au fonds national de développement d’une offre de logements locatifs très sociaux (FNDOLLTS) mentionné à l’article L. 302-9-3 du CCH.

Ce dernier a été créé en 2013 pour recevoir les majorations de pénalités versées par les communes qui n’ont pas atteint leurs objectifs triennaux de rattrapage de leurs obligations en logements sociaux et sont déclarées en état de carence. (49) Ces fonds sont explicitement réservés au financement de logements locatifs sociaux « à destination des ménages mentionnés au II de l’article L. 301-1 » du CCH, à savoir « toute personne ou famille éprouvant des difficultés particulières, en raison notamment de l'inadaptation de ses ressources ou de ses conditions d'existence, » auxquelles la loi DALO (50) reconnaît le droit à une aide de la collectivité pour accéder à un logement ou s'y maintenir.

Le FNDOLLTS est actuellement géré par la CGLLS pour le compte de l’État avec donc pour mission de contribuer à la construction, à l’acquisition ou à l’amélioration de logements locatifs à destination de ménages très modestes, dits « PLAI adaptés ». Il vient notamment compléter les subventions accordées aux opérations PLAI au titre du programme 135 du budget général pour permettre la production de logements à loyers inférieurs de 20 % aux plafonds des APL. Des appels à projets successifs ont été lancés en 2013, 2014 et 2015.

En modifiant l’article L. 302-9-1 du CCH qui définit les conditions et modalités du calcul des majorations de prélèvement SRU, ainsi que leur affectation, le A du I prévoit de transférer leur versement du FNDOLLTS au nouveau FNAP qui l’absorbera.

Le B du I abroge en conséquence l’article L. 302-9-3 et le L. 302-9-4 du CCH qui organisait la gestion du FNOLLTS.

Le C du I supprime par la même occasion une disposition (l’article L. 351-3 du CCH) qui ouvrait la possibilité de prévoir des règles particulières relatives aux « dépenses accessoires » (les charges locatives notamment) retenues forfaitairement dans le calcul de l’aide personnalisée au logement (APL) pour les logements ayant bénéficié d’une subvention du FNDOLLTS. Elle ne s’est jamais concrétisée ; le forfait de droit commun, variant suivant la situation familiale du ménage concerné, s’applique de la même façon à tous les types de logements conventionnés aux aides personnelles au logement.

Le D du I présente enfin les principes fondamentaux du futur FNAP. Ils sont énoncés dans un nouvel article L. 435-1, lui-même constituant le dispositif d’un nouveau chapitre V au titre III Dispositions financières du Livre IV Habitations à loyer modéré du code de la construction et de l’habitation.

Les quatre alinéas du I de ce nouvel article définissent les missions du futur fonds. Il reste un instrument de financement aux champs d’intervention plus larges que ceux du fonds de péréquation (précisés dans l’actuelle version du L. 452-1-1 du CCH), mais recoupant ceux des aides à la pierre du programme 135 :

– À titre principal, le fonds national des aides à la pierre contribuera au financement des opérations de développement, d’amélioration et de démolition du parc de logements locatifs sociaux appartenant aux organismes d’habitation à loyer modéré (listés au titre II du Livre IV du CCH, avec le statut d’offices publics de l’habitat, de sociétés anonymes ou de sociétés coopératives), ainsi qu’aux sociétés d’économie mixte gérant des logements conventionnés à l’APL (visés à l’article L. 481-1 du CCH) et aux organismes visés à l’article L. 365-2 qui ont reçu l’agrément du ministre chargé du logement pour leur maîtrise d’ouvrage d’opérations de production de logements ou de structures d'hébergement en faveur des publics prioritaires DALO.

Le périmètre reste limité au territoire métropolitain. Toutefois, le premier alinéa ne précise pas si les opérations de démolition relevant du périmètre de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) seront exclues - comme elles le sont aujourd’hui des financements du programme 135. Le projet annuel de performances consacrerait, à ce titre, en 2016 une enveloppe d’1 million d’euros pour 1 000 logements. Rappelons que le fonds de péréquation pouvait contribuer à la rénovation urbaine et que l’exposé des motifs de l’article 56 indique que le FNAP reprend aussi bien les ressources que les missions des deux fonds qu’il absorbera ;

– « À titre accessoire », le FNAP pourra aussi contribuer au financement d’autres opérations conduites par des personnes morales pouvant bénéficier de prêts et subventions pour la construction, l’acquisition et l’amélioration des logements locatifs aidés en application des titres I, II et III du Livre III du CCH. Si ces projets ne seront pas prioritaires, leur champ est potentiellement vaste car il englobe autant les opérations financées par des prêts bonifiés sur fonds d’épargne, que par des aides d’Action logement ou de l’ANAH, entre autres dispositifs, et les personnes morales concernées seraient essentiellement des collectivités locales, mais pourraient être aussi des établissements publics, voire des entreprises privées développant du logement pour leurs salariés. Enfin, la référence à « d’autres opérations » reste floue sur le type d’opération qui pourrait ainsi recevoir des fonds du FNAP. Mais le ministère affirme s’en tenir aux opérations déjà financées par l’action 1 du programme 135, soit essentiellement des opérations de construction de logements mises en œuvre par d’autres types de bailleurs, dont des collectivités locales. En 2014, près de 8 millions d’euros ont soutenu la production d’environ 6 000 logements ;

– Le FNAP pourra également financer des actions d’ingénierie ayant pour objectif de promouvoir l’accès au logement des personnes et familles défavorisées. Le texte de l’article ne cite que des dépenses d’ingénierie sans préciser leur cadre juridique ; l’évaluation préalable l’explicite en évoquant les dépenses de maîtrise d’œuvre urbaine et sociale (MOUS) au sens large (ingénierie sociale et accompagnement) déjà prises en charge par le programme 135, mais sans s’y limiter. Les services ministériels ont confirmé que l’éventail des actions possibles est ouvert ;

– À l’instar encore des dotations de l’action 1 du programme 135, le nouveau fonds pourra financer le développement et la gestion du système national d’enregistrement de la demande de logement social (article L.441-2-1 du CCH), dont la subvention versée au GIP SNE, ainsi que les procédures applicables au dépôt et au renouvellement des demandes via le numéro unique.

Le projet annuel de performances prévoit une enveloppe maximale de 5 millions d’euros en 2016 pour ces deux derniers ensembles de dépenses ;

– Enfin, le FNAP pourrait assurer une nouvelle dépense, certes accessoire, mais jusqu’alors ignorée du budget général : les actions d’accompagnement visant à moderniser le secteur du logement social, mais autres que celles financées par le Fonds de soutien à l’innovation (FSI cf. l’article L. 452-1 du CCH) (51) qui a été doté de 5 millions d’euros par la CGLLS dès 2014 pour financer les actions de recherche et développement, de professionnalisation et de structuration des bailleurs sociaux. Le ministère assure qu’il s’agirait d’actions ponctuelles, telles que le financement du prestataire accompagnant la réforme des attributions et que l’enveloppe ne dépasse pas aujourd’hui 0,5 million d’euros par an.

Le Rapporteur spécial note que sur la plupart des points, le texte fondateur du FNAP reste vague. Il paraît néanmoins peu vraisemblable que ces dépenses priment sur le financement des aides à la pierre nationales, qui reste l’objectif premier du nouveau fonds. Le ministère précise que le total des dépenses hors aides à la pierre ne dépasserait pas 5,5 millions d’euros en 2016 et affirme que les ressources et, par suite, les dépenses du FNAP seront encadrées par les montants des crédits budgétaires et de la contribution des bailleurs sociaux soumis au Parlement lors des discussions des projets de loi de finances.

À ces quatre axes, s’ajoute la mission reprise du FNDOLLTS. En citant la majoration du prélèvement SRU (prévue à l’article L. 302-9-1 du CCH) parmi les ressources ordinaires du futur FNAP, le 2° du II de l’article L. 435-1 rappelle que ces ressources sont « exclusivement » destinées au financement de la réalisation de logements locatifs sociaux à destination des publics DALO. L’affirmation de ce principe et son rappel explicite dans le projet de décret qui a été communiqué au Rapporteur spécial permettent d’affirmer que ces fonds ne seront pas fongibles avec les autres ressources du FNAP. Même si leur utilisation pourra varier selon les priorités données par le conseil d’administration du fonds et les projets présentés, ils conserveront leur destination spécifique.

La sécurisation de ce ciblage est essentielle même s’il ne porte que sur quelques dizaines de millions d’euros (environ 13 millions reçus dans l’année ; 23 millions disponibles d’ici fin 2015). Car, même en ayant préservé une contribution élevée d’aides nationales aux programmes de logements en PLAI, le fort renchérissement des coûts de production depuis dix ans (+ 47 % pour l’ensemble du secteur du bâtiment) a fait que les nouveaux logements sont produits à un niveau de loyer devenu inaccessible aux ménages les plus modestes. Il apparaît aujourd’hui indispensable de renforcer les soutiens financiers publics pour faire baisser certains loyers.

En conséquence, les premières missions du FNAP reposeront sur sa principale ressource : le prélèvement sur les deux cotisations versées par les organismes de logement social à la CGLLS (définies aux articles L. 454-4 et L. 452-4-1 du CCH) qui est, aujourd’hui, affecté au fonds de péréquation. Le 1° du II de l’article L. 435-1 prévoit cependant que cette fraction, actuellement fixée à 120 millions d’euros, sera portée à 270 millions d’euros en 2016. L’évaluation préalable de l’article 56 évoque la possibilité qu’elle soit encore augmentée en 2017, jusqu’à 400 millions d’euros.

Pour ce faire, le F du III du nouvel article L. 435-1 double la limite maximale du taux de la première cotisation (mentionnée à l’article L. 452-4 du CCH) de 1,5 % à 3 %.

Auditionnée par le Rapporteur spécial, la CGLLS qui gère elle-même la liquidation de ces deux cotisations, confirme que, selon ses projections, ce nouveau plafond devrait permettre de lever des fonds suffisants pour faire face à l’alourdissement du prélèvement de 150 millions d’euros l’an prochain – et même atteindre les 400 millions qui pourraient être envisagés en 2017 – et couvrir ses autres besoins budgétaires.

En sus du versement dû au fonds de péréquation, la CGLLS verse tous les ans diverses contributions à l’ANRU (30 millions d’euros), au Fonds de soutien à l’innovation ainsi qu’aux fédérations et associations de bailleurs sociaux et de locataires (18,4 millions en 2014) et ses activités d’aides aux opérateurs sociaux sont assez stables, mobilisant environ 65 millions d’euros en 2012, 68,3 en 2013 et 60 millions d’euros l’an dernier. Avec ses frais de fonctionnement, la Caisse a évalué son budget en 2015 à 230 millions d’euros ; il devrait monter à 380 millions en 2016.

Le supplément de prélèvement ne diminuera pas les capacités d’intervention de la CGLLS. Les cotisations appelées sont adaptées à ses besoins : en 2014, elles se sont élevées à 78,7 millions d’euros pour la première cotisation et 93,8 millions pour la contribution additionnelle ; en 2015, la première a produit 104 millions d’euros et la seconde devrait être établie à au moins 126 millions. L’année prochaine, il sera nécessaire de les accroître de 150 millions, mais leurs assiettes l’autorisent.

Jusqu’alors, ces perceptions régulières ont permis à la Caisse de renouveler sa trésorerie chaque année et de disposer d’un fonds de roulement important, qui s’élèverait à 498 millions d’euros en fin d’exercice 2015. Même le nouveau prélèvement de 100 millions d’euros qu’organise l’article 14 du projet de loi de finances – voté en première lecture – pour renforcer le budget général de 2016 la laissera à un niveau de solvabilité confortablement supérieur aux exigences de Bâle II, à 14 % (selon les chiffres de 2014) au lieu de 8 %. Sans avoir besoin d’augmenter ses fonds propres, la CGLLS dispose encore de marges substantielles pour accueillir de nouvelles garanties d’emprunt, d’autant que, avec l’aval de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, un arrêté du 27 juillet 2015 l’a exemptée, jusqu’en 2029, des limites d’un plafond prudentiel des grands risques (52) dont certains groupes de bailleurs sociaux commençaient à se rapprocher.

De fait, la Caisse n’a connu jusqu’à présent qu’une faible sinistralité : en 23 ans, seule une quinzaine d’organismes ont rencontré des difficultés à assurer leurs remboursements, sans jamais dépasser l’équivalent d’une annuité. Le total a atteint 5,5 millions d’euros, mais la résolution de ces difficultés – grâce aux dispositifs d’aide mis en place par la CGLLS – a réduit la perte finale à 800 000 euros de valorisation comptable négative.

Néanmoins, le risque financier n’est plus inexistant car les encours de prêts garantis par la CGLLS s’alourdissent : ils ont encore progressé de 2 850 millions d’euros à 2 865 millions entre 2013 et 2014.

Par la voix de l’Union sociale pour l’habitat (USH), les bailleurs sociaux ont exprimé leurs craintes face à la montée des menaces pour les organismes et la Caisse. Avec le moindre engagement en garantie des collectivités territoriales (la CGLLS ne pouvant être sollicitée qu’en cas de refus des premières), les organismes devront plus que jamais recourir à la garantie de la Caisse. Par ailleurs, certaines évolutions contribueraient à diminuer ou à fragiliser les revenus des bailleurs sociaux : avec la paupérisation de leurs locataires, les impayés de loyers tendent à progresser et certains OLS font face à des vacances croissantes. Enfin, le nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU) fragiliserait la situation des organismes impliqués en raison de leurs capacités financières limitées, de la pauvreté de leurs bases territoriales et de la diminution de la quotité d’équivalent-subvention des aides nationales aux opérateurs sociaux - qui était de 100 % dans le PNRU.

Pour la Caisse, cela représentera un accroissement accéléré des encours totaux et des grands risques, et des risques de sinistres plus probables alors que certaines assiettes de cotisations se dégraderaient. Interrogée sur ces perspectives, la CGLLS ne peut dire comment la situation évoluera. Elle considère que, même exemptée du ratio prudentiel réglementaire, son encours de grands risques doit rester dans des proportions raisonnables. Cela étant, au regard de son niveau de ressources, de la relative stabilité de ses interventions et de sa connaissance du secteur, la Caisse déclare de pas avoir identifié de menace immédiate ou à court terme pour ses capacités d’aides et de garantie.

Quant aux bailleurs sociaux, s’ils s’élèvent contre le futur prélèvement de 270 millions d’euros, le Rapporteur spécial n’a pas eu connaissance de difficulté technique particulière posée par une telle contribution en 2016 ou sur les années suivantes.

D’abord, individuellement, le renforcement de leurs cotisations ne peut mettre les organismes en danger financier grâce à des mécanismes de calcul protecteurs :

– la première cotisation, assise sur les loyers, est modulée en fonction de la réalité des revenus des organismes ; la deuxième, assise sur le nombre de logements et l’autofinancement net des organismes, est nulle s’il n’y a pas d’autofinancement ;

– enfin, les organismes bénéficiant des aides de la CGLLS sont exemptés de cotisations.

Cet alourdissement viendra évidemment diminuer les résultats financiers des organismes et donc leurs capacités d’investissement, mais cela devrait rester marginal. En effet, si elle n’est pas exempte de tensions, la situation financière du secteur est globalement saine, comme l’a confirmé l’étude Analyse rétrospective et prospective de la situation financière des bailleurs sociaux publiée le 16 septembre 2015 par la Caisse des dépôts et consignations (53).

Avec le vieillissement d’une partie de leur parc et son extension sous l’effet d’une production soutenue depuis dix ans, les charges d’exploitation et d’investissement (en rénovation et en développement) se sont accrues, mais les ressources ont crû au même rythme (représentant 19,3 milliards d’euros en 2013 sur le périmètre étudié par la CDC) assurant une bonne stabilité financière. Malgré une progression d’un total bilan de 136 milliards d’euros en 2008 à 198 milliards en 2013, la dette des bailleurs ne représentait plus que 62 % de celui-ci en 2013, contre 67 % en 2008, alors qu’en sens inverse, leurs fonds propres et provisions se sont consolidés à 33 % du total bilan, contre 29 % en 2008. Le secteur dégage régulièrement un excédent financier, qui s’élevait à 5,9 milliards d’euros en 2013, et les bailleurs sociaux affichaient une trésorerie (de long terme et de court terme) de 10 milliards.

Les projections réalisées par la Caisse des dépôts montrent que les organismes sont, globalement, en mesure de faire face à un rythme d’investissements ambitieux, pour répondre aux grands enjeux de production et de réhabilitation, sur les deux prochaines décennies. Comme les résultats antérieurs ont été soutenus par un niveau d’aides publiques important et un contexte conjoncturel de taux d’intérêt bas, qui ont allégé la charge de la dette, les capacités futures dépendront aussi de l’état de ces paramètres. Il n’en reste pas moins que les ressources actuelles sont substantielles et qu’il existe de réelles marges d’adaptation à de nouvelles solutions de financement.

Individuellement, le rapport endettement sur fonds propres s’étant réduit (en moyenne), si les ressources propres venaient à s’amoindrir, l’équilibre financier pourrait toujours évoluer un peu, si nécessaire, pour maintenir un niveau soutenu d’investissement ; l’offre, très diversifiée, des prêts de la Caisse des dépôts le permet.

Collectivement, tous les organismes n’investissent pas dans les mêmes proportions, et n’ont pas besoin de le faire. La création du FNAP et le renforcement de la participation financière des organismes poussent seulement un peu plus loin la logique de mutualisation qui a fondé la mise en place du fonds de péréquation.

La question n’est pas tant de savoir si le secteur peut supporter ces prélèvements annuels de 270, voire 400 millions d’euros. Il le peut vraisemblablement et, fondamentalement, ces ressources reviennent au secteur du logement social, mais en étant réparties en fonction des besoins prioritaires.

L’enjeu est plutôt de décider quel est le niveau stratégique d’implication financière de l’État et d’éviter que ce nouveau circuit ne minimise au final la mobilisation financière en faveur du parc social.

Sur le premier point, la pertinence d’une instance stratégique nationale n’est pas contestable. S’il convient d’améliorer le développement des projets au plus près des besoins des territoires, la répartition des importantes ressources nationales qu’ils mobilisent exige une définition des priorités politiques, sociales et géographiques et une capacité d’arbitrage globale.

Opérationnellement, ces dernières années ont montré que même en diminuant les montants individuels des aides à la pierre (à 0 euro sur un programme financé en PLUS depuis 2015), l’État garde la main sur l’orientation territoriale et sociale de la production nouvelle par l’agrément qu’il accorde aux opérations et qui donne accès à des soutiens financiers et fiscaux autrement plus conséquents.

Au demeurant, l’enveloppe budgétaire ouvrant 400 millions d’euros d’engagements possibles reste un levier d’impulsion influent, même si son poids relatif dans les moyens financiers mobilisés a diminué. L’étude précitée ne dit pas quelle proportion de subventions directes est nécessaire, à côté des autres modalités d’aides publiques, pour assurer la pérennité du modèle de financement du logement locatif social. Mais elles restent, à l’évidence, déterminantes pour la production de logements à loyer très social dans la mesure où les dépenses fiscales ne varient pas selon la typologie du logement produit et qu’une meilleure bonification de taux ne suffit pas pour équilibrer le montage financier de ces opérations.

Il est moins crucial en revanche que les crédits de paiement correspondants aient le budget de l’État pour origine. En cette période d’indispensable rationalisation des moyens publics, le Rapporteur spécial considère plutôt vertueux d’aller chercher les capacités financières là où elles se trouvent dès lors qu’il s’agit de ressources en grande partie dégagées grâce aux multiples aides publiques qui sont accordées aux organismes et qu’elles sont encore insuffisamment mobilisées pour l’intérêt général.

Le Rapporteur spécial approuve donc le principe d’un fonds qui organise la mutualisation obligatoire d’une partie des ressources du secteur social et tend à penser qu’un prélèvement de 270 millions d’euros annuels reste soutenable, d’autant qu’il revient en totalité aux bailleurs s’engageant dans les investissements considérés comme les plus utiles.

Par contre, la perspective de porter ce prélèvement à 400 millions d’euros l’année suivante, bien que techniquement envisageable, lui semble plus discutable. Il faut en effet éviter deux écueils :

casser la dynamique de mutualisation interne et volontaire que les organismes fédérés par l’USH se sont attachés à construire depuis deux ans après le Pacte d’objectifs et de moyens signé en juillet 2013, puis l’Agenda HLM 2016-2018. Le premier dispositif (qui devait réunir jusqu’à 250 millions d’euros par an pour soutenir la production) commence seulement à donner ses premiers résultats, plutôt encourageants avec près de 225 millions d’euros d’aides brutes à fin 2014. Il serait opportun de voir comment se met en place la deuxième étape du dispositif (qui monterait jusqu’à 600 millions d’euros par an et étendrait les aides aux programmes de réhabilitation) avant d’envisager une nouvelle hausse du prélèvement en faveur du FNAP ;

arriver à ce qu’au total les moyens mobilisés pour soutenir les importants efforts d’investissement demandés aux bailleurs sociaux soient moindres que ce que l’on pouvait espérer de la coexistence des deux systèmes de mutualisation parce que le nouveau dispositif de financement des aides à la pierre nationales se substituerait aux flux prévus pour le circuit « USH ». En effet, l’addition des deux contributions pourrait représenter jusqu’à 2 fois 3 % des revenus locatifs et sembler excessive à certains opérateurs.

C’est aussi la raison pour laquelle le Rapporteur spécial se réjouit qu’après l’annonce, faite par le Président de la République lors du congrès de l’USH le 24 septembre, la contribution de l’État soit substantiellement renforcée. Les crédits de paiement du programme 135 de la présente mission seront ainsi portés de 100 à 250 millions d’euros en 2016. Avec les 270 millions du FNAP, 520 millions d’euros seront ainsi réunis pour financer les engagements passés et à venir en faveur du logement social.

Il n’en reste pas moins que 270 millions d’euros assurent déjà une base supérieure aux fonds réunis jusqu’alors et que le principe posé d’un prélèvement annuel pour alimenter le fonds et la possibilité de l’accroître selon les besoins sécurisent davantage le modèle de financement du secteur - qui est le premier grand enjeu de la réforme proposée.

Dans ces conditions, le transfert, organisé par l’article 54 du projet de loi de finances (cf. commentaire précédent) et par le 1° du E du présent article, du produit de la surtaxe sur les plus-values immobilières prévu à l’article 1609 nonies G du code général des impôts au fonds national des aides au logement (FNAL) représente, certes, un manque à gagner de 45 millions d’euros pour le financement direct du logement social, mais il permet d’alléger les charges immédiates de l’État. Et l’on peut observer que les 8 milliards d’euros d’aides personnelles au logement financées par le FNAL bénéficient également au secteur social en contribuant à sécuriser ses revenus locatifs.

Au demeurant, le FNAP pourrait recevoir d’autres ressources : selon le II du nouvel article L. 435-1, il pourrait s’agir de subventions et contributions de l’État, de collectivités territoriales ou de toutes autres personnes publiques et privées (sans que l’article ne précise qu’il se limiterait aux personnes morales) et « d’une manière générale, toutes les recettes autorisées par les lois et règlements ». Les possibilités sont largement ouvertes. On peut s’interroger sur la légitimité de contributions des collectivités qui bénéficieraient à d’autres collectivités (hors le cas des pénalités SRU), mais dans la mesure où le texte ne crée pas d’obligation pour celles-ci, le Rapporteur spécial ne propose pas de revenir sur cette hypothèse très théorique.

Quant aux contributions de l’État, l’énoncé du projet d’article comme celui du projet de décret sont peu explicites mais le ministère a précisé que le bon fonctionnement du nouveau dispositif suppose que les dotations dédiées du budget général soient mises à la disposition du FNAP afin qu’il puisse se prononcer sur la totalité de la programmation des dépenses. En 2016, le programme 135 versera donc ses crédits disponibles au fonds dès sa création ; ensuite, le conseil d’administration, selon un calendrier, un montant et une programmation qu’il fixera, décidera du rattachement de crédits au programme 135 par fonds de concours – sans distinction selon l’origine des crédits reversés.

L’autre grand enjeu de la réforme est en effet l’annonce de la mise en place d’une gouvernance partagée.

Le III du nouvel article L. 435-1 précise que le FNAP sera un établissement public à caractère administratif créé par décret en Conseil d’État et constitué au plus tard le 1er juillet 2016 (alinéa 23 de l’article 56).

L’actuel fonds de péréquation n’est qu’un véhicule financier ; une commission composée « majoritairement » (article L. 452-2-1 du CCH) mais, en pratique, exclusivement de représentants de l’État arrête les emplois de ses ressources, sans associer à ce niveau stratégique les autres grands acteurs de la politique du logement social.

La nouvelle structure disposera d’un conseil d’administration composé selon le projet de décret :

– de cinq représentants de l’État ;

– de cinq représentants d’organismes intervenant dans la politique du logement social (USH, fédération des entreprises publiques locales…) ;

– de deux représentants des collectivités locales et de leurs groupements ;

– et de trois personnalités qualifiées désignées pour leurs compétences dans le domaine du logement par le ministre chargé du logement. Le président du conseil d’administration, dont l’avis sera prépondérant en cas de partage égal des voix et qui dirigera l’établissement public, sera désigné parmi ces personnalités.

La représentation des différentes parties prenantes sera objectivement plus équilibrée.

L’évaluation préalable de l’article 56 affirme que l’autonomie du futur établissement permettra de « garantir le libre emploi des fonds qui lui seront confiés en faveur de la politique du logement, l’État n’ayant plus que la charge de la mise en œuvre des décisions du FNAP ». Le projet de décret donnera tout de même le dernier mot aux ministres en charge du logement, du budget et de l’économie puisqu’il prévoit que ceux-ci pourront s’opposer, de façon motivée, aux délibérations du conseil d’administration (54) et qu’à défaut d’approbation par ce dernier de la délibération modifiée (a priori par l’État), elle pourra être rendue exécutoire par décision conjointe des ministres de tutelle.

Ces modalités tempèrent fortement l’autonomie annoncée du conseil d’administration. La personnalité choisie pour présider sera aussi déterminante. Il sera nécessaire d’observer comment le fonds fonctionnera réellement. Il n’en reste pas moins que le nouveau dispositif organise la participation directe des bailleurs sociaux et des collectivités territoriales aux décisions qui seront prises concernant « le montant et la répartition des dépenses » allouées au financement des opérations et actions touchant le secteur social « selon une nomenclature qu’il aura fixée par délibération », ainsi qu’à celles portant sur les orientations et modalités d’utilisation et de répartition des dépenses en faveur des logements très sociaux.

Comme l’indique l’évaluation préalable de l’article, il s’agira notamment de fixer les montants individuels moyens des subventions par catégories d’emplois. Selon les précisions données par le ministère, le conseil d’administration ne définira pas lui-même leur répartition, mais se prononcera sur la programmation des aides à la pierre proposée par l’État, qui détermine les objectifs en nombre et en types de logement et les moyens attribués à chaque territoire. La mise en œuvre de cette programmation sera déléguée à l’État mais le conseil d’administration en examinera ensuite l’exécution.

Ce processus assurera que les enveloppes arrêtées par le conseil d’administration correspondront aux enveloppes et objectifs globaux soumis au Parlement par le projet annuel de performances.

En associant les organismes de logement social et les collectivités, la nouvelle structure leur garantit bien un droit de regard sur l’usage des ressources prélevées sur le secteur et leur ouvre la possibilité d’influer sur la définition et la réalisation des priorités de la politique du logement ; le dispositif pourrait contribuer à améliorer sa « territorialisation ». Mais si les objectifs sont louables, leur mise en œuvre n’est pas encore assurée. Elle dépendra beaucoup de l’implication que les collectivités et les bailleurs sociaux montreront dans le futur FNAP.

On notera enfin que le II de l’article 56 définit les diverses échéances de mise en œuvre de la réforme, en particulier :

– la mise en œuvre du FNAP se fera dès la publication du décret de sa création et au plus tard le 1er août 2016 ;

– le transfert des majorations de pénalités SRU au FNAP et la suppression des articles définissant le FNDOLLTS s’opèreront dans le mois suivant la publication du décret et au plus tard le 1er août 2016 ;

– l’abrogation de l’article qui confiait la gestion du fonds de péréquation et du FNDOLLTS à la CGLLS (L. 452-1-1 du CCH) (55) et le transfert de tous leurs biens, droits et obligations au FNAP s’effectueront dès l’entrée en vigueur des étapes précédentes et donc au plus tard le 1er août ;

– la suppression du versement du produit de la surtaxe sur les plus-values immobilières (transféré au FNAL) et l’annulation du prélèvement de 120 millions initialement prévu en 2016, proposées au E du présent article, seront effectifs dès le 1er janvier 2016.

La commission examine l’amendement n° II-AC5 de suppression de M. Marcel Rogemont.

M. Marcel Rogemont. La mise en place du FNAP est un démembrement de l’action de l’État. Les 150 millions d’euros de crédits résultant de l’amendement du Gouvernement que nous venons d’examiner serviront-ils à apurer une partie de la dette de l’État dans ce secteur ?

M. Dominique Lefebvre, président. Le rapporteur spécial m’a fait savoir qu’il était défavorable à cet amendement.

La commission rejette l’amendement n° II-AC5.

Elle en vient à l’amendement n° II-AC6 de M. Marcel Rogemont.

M. Marcel Rogemont. Nous proposons le report de la mise en application de cet article fin d’engager le dialogue et de renforcer la gouvernance du futur fonds. Si une collectivité territoriale veut accorder des aides à la pierre, elle le fera directement, et non via le FNAP, où elle ne disposera d’aucun pouvoir de décision. En réalité, les collectivités territoriales ne sont introduites dans le dispositif que pour réduire le rôle des organismes d’HLM alors qu’on est en train d’enterrer les modalités actuelles de financement du logement social.

M. Dominique Lefebvre, président. Le rapporteur spécial m’a fait savoir qu’il était défavorable à cet amendement qui revient, de fait, à supprimer la réforme proposée.

Mme Marie-Christine Dalloz. Je ne comprends pas si l’amendement demande un rapport ou s’il souhaite le report de la mesure ?

M. Dominique Lefebvre, président. En droit, cet amendement aurait le même effet que le précédent.

M. Jean-Louis Dumont. La négociation est encore en cours. Le dispositif proposé va permettre à Bercy, c’est-à-dire en fait au Trésor et à la direction du budget, de siphonner l’argent des organismes HLM, qui n’auront plus de pouvoir de décision. Il faut introduire de la clarté et de la responsabilité. Les organismes HLM l’ont fait en mutualisant leurs moyens et ils payent 70 % du fonctionnement du système national d’enregistrement qui permet de mesurer précisément les besoins en logements sociaux. Le Gouvernement peut exiger des organismes HLM qu’ils produisent des logements neufs en zones tendues. Mais il tente de masquer maladroitement le fait que Bercy vient prendre ces fonds et les gérer pour en faire tout autre chose, ce que nous ne souhaitons pas. Il faut dire clairement si le Gouvernement ne veut plus financer les aides à la pierre.

La commission rejette l’amendement n° II-AC6.

Elle en vient à l’amendement n° II-AC8 de M. Marcel Rogemont.

M. Marcel Rogemont. Nous nous opposons au détournement de l’intention première des aides à la pierre, qui est de financer de l’investissement, et non pas du fonctionnement, normalement pris en charge par le budget de l’État.

M. Dominique Lefebvre, président. Le rapporteur spécial m’a fait savoir que le projet de décret d’application répondra à la plupart des préoccupations exprimées par cet amendement et que les dépenses de fonctionnement listées par l’article 56 sont déjà prises en charge au titre des aides à la pierre.

La commission rejette l’amendement n° II-AC8.

Elle en vient à l’amendement n° II-AC10 de M. Marcel Rogemont.

M. Dominique Lefebvre, président. Le rapporteur spécial m’a fait savoir qu’il était défavorable à cet amendement.

La commission rejette l’amendement n° II-AC10.

Enfin, elle adopte l’article, sans modification.

*

* *

Après l’article 56

La commission examine l’amendement n° II-AC9 de M. Marcel Rogemont.

M. Marcel Rogemont. L’amendement vise à permettre de déduire de l’autofinancement qui sert de base à la cotisation des organismes HLM à la Caisse de garantie du logement locatif social les soldes nets reçus par un organisme HLM au titre de la mutualisation financière entre organisme afin de le laisser bénéficier du plein effet de ce dispositif incitatif à la construction et à la réhabilitation de logements sociaux.

M. Dominique Lefebvre, président. Le rapporteur spécial m’a fait savoir qu’il était défavorable à cet amendement.

La commission rejette l’amendement n° II-AC9.

*

* *

ANNEXE :
LISTE DES AUDITIONS
RÉALISÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL

Ministère du logement, de l’égalité des territoires et de la ruralité

– M. Paul Delduc, directeur général de l’aménagement, du logement et de la nature (DGALN) ;

– M. Laurent Girometti, directeur de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages (DHUP) ;

– Mme Clémentine Pesret, sous-directrice du financement et de l'économie du logement et de l'aménagement.

Ministère des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes – Direction générale de la cohésion sociale

– Mme Katia Julienne, adjointe au directeur général de la cohésion sociale ;

– Mme Aurore Caullet, chef du bureau Budget et performances.

Délégué interministériel pour l’hébergement et l’accès au logement des personnes sans-abri ou mal logées (DIHAL)

– M. Sylvain Mathieu, délégué interministériel pour l’hébergement et l’accès au logement des personnes sans-abri ou mal logées.

Agence nationale pour l’amélioration de l’habitat (ANAH)

– Mme Blanche Guillemot, directrice générale ;

– M. Jacques Berger, directeur général adjoint en charge des fonctions support et de la direction administrative.

Caisse de garantie des risques locatifs sociaux (CGLLS)

– M. Jean-Michel Fiétier, secrétaire général

Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU)

– M. Nicolas Grivel, directeur général ;

– M. Laurent Doré, directeur des affaires financières et administratives et directeur de l’animation et de l’appui aux acteurs de la rénovation urbaine ;

– Mme Anne Peyricot, directrice des relations institutionnelles.

Caisse des dépôts et consignations (CDC)

– Mme Odile Renaud-Basso, directrice générale adjointe de la Caisse des dépôts et directrice des Fonds d’épargne ;

– M. Josselin Kalifa, directeur des prêts et de l’habitat à la direction des Fonds d’épargne ;

– Mme Brigitte Laurent, responsable du pôle Affaires publiques.

Union des entreprises et des salariés pour le logement (UESL)

– M. Bernard Gaud, président du conseil d’administration ;

– M. Jean-Baptiste Dolci, vice-président du conseil de surveillance ;

– M. Bruno Arbouet, directeur général.

Cour des comptes – rapporteurs du Logement en Île-de-France

– Mme Anne Froment-Meurice, présidente de chambre maintenue ;

– M. Philippe Baccou, conseiller maître ;

– M. Jean-Marie Sepulchre, conseiller maître.

Institut des politiques publiques (IPP)

– M. Antoine Bozio, directeur ;

– M. Julien Grenet ;

– Mme Lucile Romanello.

Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE)

– Mme Sandrine Levasseur, économiste.

Union sociale pour l’habitat (USH)

– M. Frédéric Paul, délégué général ;

– Mme Marianne Louis, secrétaire générale ;

– M. Dominique Hoorens, directeur des études économiques et financières ;

– Mme Francine Albert, conseillère pour les relations avec le Parlement.

Samu social

– M. Éric Pliez, président ;

– Mme Christine Laconde, directrice générale.

Fédération française du bâtiment (FFB)

– M. Jacques Chanut, président ;

– M. Benoît Vanstavel, directeur des relations parlementaires et institutionnelles ;

– M. Bernard Coloos, directeur des affaires économiques, financières et internationales.

Table ronde Fédération nationale de l’immobilier (FNAIM) et Syndicat national des professionnels de l’immobilier (SNPI)

– M. Jean-François Buet, président de la FNAIM ;

– M. Alain Duffoux, président du SNPI.

Chambre Nationale des Conseils Experts en Immobilier Patrimonial (CNCEIP, anciennement FMIL)

– M. Michel Gonnet, président ;

– M. Etienne Sumonja, directeur général.

Table-ronde Fédération des promoteurs immobiliers (FPI) / Bouygues Immobilier / Kaufman & Broad / Nexity

– Mme Alexandra François-Cuxac, présidente de la FPI ;

– M. Jean-Michel Mangeot, délégué général de la FPI ;

– M. François Bertière, président-directeur général de BI ;

– M. Bernard Chanteux, son directeur chargé des relations institutionnelles ;

– M. Nordine Hachemi, president-directeur général de KB ;

– M. Alain Dinin, président-directeur général de Nexity ;

– M. Jean-Philippe Ruggieri, son directeur général Immobilier résidentiel.

© Assemblée nationale

1 () Équivalent temps plein travaillé.

2 () Loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové.

3 () Loi n° 200-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains.

4 () Pour un commentaire de cette mission se reporter au rapport spécial n°24 de Victorin Lurel.

5 () Rapport entre le montant du loyer, des charges et des taxes locatives nets des aides personnelles au logement et le montant des ressources.

6 () Soit les statuts non précaires au taux d’effort supérieur à 28 % mais au plus égal à 50 % ou les locataires précaires autres que ceux pris en charge par l’UESL.

7 () Soit les salariés des entreprises du secteur privé non agricole au taux d’effort compris entre 28 % et 50 % ou hors contrat à durée indéterminée stabilisé, ou, si leur situation est précaire, les jeunes de moins de 30 ans en recherche ou en situation d’emploi et les étudiants boursiers.

8 () Elle est également ouverte aux doctorants ou post doctorants de nationalité étrangère, avec un doctorat obtenu depuis moins de 6 ans, occupant un poste de chercheur non titulaire dans un laboratoire de recherche.

9 () Union des employeurs et des salariés pour le logement, tête de réseau des collecteurs de la participation des employeurs à l’effort de construction (PEEC) dite « 1 % logement ».

10 () Indicateur 1.3 du programme 135 Part des personnes auxquelles une offre de logement adaptée a été faite dans le cadre de la mise en œuvre du droit au logement opposable.

11 () Caisse de garantie des risques locatifs sociaux. Pour une présentation, se reporter au commentaire de l’article 56.

12 () Indicateur 1.1 Taux d’effort net médian des ménages en locatif ordinaire ou en accession selon la configuration familiale et le type de parc du programme 109.

13 () Cela concerne les plafonds de loyers, les plafonds de mensualités pour les nouveaux accédants, le montant forfaitaire des charges, les équivalences de loyer et de charges locatives en foyer et le terme constant de la participation personnelle du ménage.

14 () Défini à l’article 17 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989.

15 () Cf. article 1609 nonies G du code général des impôts.

16 () Le Gouvernement a finalement déposé un amendement qui complètera les dotations de l’action 1 à hauteur de 26,2 millions d’euros pour le versement d’aides personnelles au logement aux réfugiés qui seront hébergés en logement social, résidence sociale ou en intermédiation locative.

17 () Dont les bénéfices apparaissent très progressivement dans les indicateurs de performances 2.1 Suivi de la contractualisation pluriannuelle entre les opérateurs locaux et l’État et 2.2 Écarts-types des coûts moyens régionaux d’une place en CHRS du programme.

18 () La DGCS a par ailleurs indiqué au Rapporteur spécial que la prochaine loi de finances rectificative sera amenée à liquider une dette d’environ 46 millions d’euros courant depuis la fin de l’exercice 2014 sur les dépenses d’ALT1 (aide au logement temporaire).

19 () Le plan « Répondre au défi des migrations : respecter les droits – faire respecter le droit » a été présenté en conseil des ministres le 17 juin 2015.

20 () Pour la présentation et l’analyse de l’ensemble des mesures exceptionnelles prises pour accueillir, accompagner et favoriser l’insertion de ces victimes de guerre, se reporter au rapport spécial n°30 de Laurent Grandguillaume.

21 () Indicateur 1.2 Proportion des personnes hébergés ou logées suite à une demande adressée au SIAO, du programme 177.

22 () Lors de son audition du 28 octobre, la ministre a annoncé qu’une prime de 1 000 euros serait versée par l’ANAH aux propriétaires offrant leur logement à l’intermédiation locative.

23 () Dépenses fiscales principalement rattachables aux programmes, sur impôts d’État ou sur impôts locaux, prises en charge par l’État. Hors dépenses fiscales subsidiaires ne répondant pas spécifiquement aux finalités des programmes.

24 () Lors de son audition du 28 octobre, la ministre a annoncé que les 200 millions d’euros d’économies dégagées par cette baisse servira à renforcer les bonifications de prêts.

25 () Cette possibilité sera étendue aux terrains militaires et aux immeubles à réhabiliter.

26 () On distingue trois types de logements sociaux, soumis à des niveaux de conventionnement différents, en fonction du prêt sur Fonds d’épargne de la Caisse des dépôts et consignations qui les finance à titre principal : ils sont en grande majorité réalisées à l’aide de prêts locatifs à usage social (PLUS). Depuis le 1er avril 2000, la construction et l’acquisition-amélioration de logements très sociaux sont exclusivement réalisées à l’aide de prêts locatifs aidés très sociaux, dits d’intégration (PLAI). Les prêts locatifs sociaux (PLS) financent quant à eux des structures dédiées (personnes âgées, étudiants, saisonniers) ou des logements locatifs intermédiaires pour lesquels le plafond de revenu des ménages est supérieur de 30 % au plafond des logements PLUS. Les loyers des logements financés en PLS sont alors limités à 150 % de ceux du PLUS sans possibilité d’application de marges locales de dépassement.

27 () Environ 20 % en-dessous des loyers pratiqués dans le parc social.

28 () Ces restes à payer correspondent à des engagements dont le paiement s’échelonne, en moyenne, sur 8 ans. L’essentiel des CP de l’exercice couvrent des engagements antérieurs.

29 () Cf. L’étude Analyse et perspective de la situation financière des bailleurs sociaux publiée le 16 septembre 2015.

30 () Fédération des promoteurs immobiliers, Le marché du logement, notes de marché quatrième trimestre 2014 et premier trimestre 2015.

31 () Il est accordé sans intérêt, le manque à gagner étant compensé pour les établissements prêteurs sous forme de crédit d’impôt sur les sociétés.

32 () Rapport n°303 du 22 juillet 2015.

33 () En 2013, 135 millions d’euros avaient été transférés du FART au fonds de soutien à la rénovation énergétique de l’habitat (FSREH). Fin 2014, 90 millions d’euros lui ont été restitués du FSREH. L’enveloppe du FART s’établit ainsi à 455 millions d’euros sur la période 2010-2015.

34 () Lors de son audition du 28 octobre, la ministre a indiqué que 70 millions d’euros supplémentaires ont été accordés à l’ANAH pour atteindre l’objectif des 50 000 logements rénovés, mais n’a rien précisé pour 2016.

35 () http://www.assemblee-nationale.fr/14/budget/plf2016/commissions_elargies/

36 () Cela concerne les plafonds de loyers, les plafonds de mensualités pour les nouveaux accédants, le montant forfaitaire des charges, les équivalences de loyer et de charges locatives en foyer et le terme constant de la participation personnelle du ménage.

37 () Défini à l’article 17 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989.

38 () Dès l’entrée en vigueur de la présente loi de finances.

39 () Le cas de l’indivision serait traité dans le régime du RSA. Mais il apparaitrait que ce dispositif soit lui-même en cours d’ajustement sur ces questions de patrimoine.

40 () La première option emporterait une baisse des aides pour 2,5 % des allocataires et sa suppression pour 0,3 %.

41 () En pratique, la suppression de l’avantage visé se traduirait par l’application des règles de droit commun lors des ouvertures ou des renouvellements des droits s’opérant à compter du 1er janvier prochain.

42 ()Au 1er janvier 2013, le seuil était fixé à 1 273,52 euros pour une personne seule, 1 910,29 euros pour un couple, ou sils sont employeurs ou travailleurs indépendants.

43 () Comme cela a toujours été le cas des opérations en PLS.

44 () Opérations auxquelles la CGLLS contribue elle-même à hauteur de 30 millions d’euros par an.

45 () Le financement des opérations de logements sociaux s’étale sur plusieurs années. Au 3  décembre 2014, les restes à payer s’élevaient ainsi à 1,88 milliard d’euros. L’essentiel des crédits de paiement correspondants est consacré à la couverture des engagements antérieurs.

46 () Les membres de l’USH ont adopté la convention définissant son régime pour 2014 à 2016 le 22 août 2014 ; elle a été approuvée par arrêté du 12 septembre 2014.

47 () Cf. les lois de finances rectificatives de novembre 2013 et novembre 2014.

48 () Respectivement Mission interministérielle d’inspection du logement social et Agence nationale pour la participation des employeurs à l’effort de construction dont la réunion, décidée par la loi ALUR du 24 mars 2014, a créé l’agence nationale de contrôle du logement social (ANCOLS).

49 () La loi n° 2013-61 du 18 janvier 2013 relative à la mobilisation du foncier public et au renforcement des obligations de production de logement social a renforcé les obligations des communes en logements sociaux définies par l’article 55 de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbain, dite SRU : non seulement de nouvelles communes sont concernées, mais pour les plus anciennes, le taux minimal a été porté de 20 à 25 %. La loi de 2013 a également fixé à 2025 l’échéance assignée aux communes pour rejoindre le taux obligatoire et accéléré le rythme pour y parvenir. Enfin, elle a ouvert la possibilité au préfet de multiplier jusqu’à cinq la majoration de prélèvement sur les communes faisant l’objet d’un arrêté de carence. Le prélèvement est affecté en priorité aux intercommunalités et établissements publics fonciers de leur territoire, la majoration au FNDOLLTS.

50 () Loi n°2007-290 du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale.

51 () Le FSI a été créé au sein de la CGLLS par la loi n°2014-366 du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové.

52 () Auparavant, la CGLLS devait veiller à ce que l’ensemble de ses engagements pondérés sur un même organisme ou un même groupe de bailleurs sociaux ne dépasse pas 25 % de ses fonds propres. Il ne s’agit cependant que d’une solution temporaire car en 2029 la Caisse sera à nouveau soumise à cette limite prudentielle et cette échéance exigera d’être revenue à un niveau compatible.

53 () Elle a porté sur les seuls ESH (entreprises sociales de l’habitat) et OPH (offices publics de l’habitat) mais qui détiennent 80 % du nombre total de logements sociaux (près de 4,2 millions).

54 () Conformément au droit commun défini par les articles 176 et 177 du décret n°2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique.

55 () L’article L. 452-1-1 du CCH mentionne aussi la gestion par la CGLLS du fonds national d’accompagnement vers et dans le logement (FNAVDL) mais sa disparition ne pose pas de problème car ce point est également précisé à l’article L. 300-2.