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N
° 3110

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 8 octobre 2015.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2016 (n° 3096),

PAR Mme ValÉrie RABAULT,

Rapporteure Générale

Députée

——

ANNEXE N° 31

JUSTICE

Rapporteur spécial : M. Étienne BLANC

Député

____

SYNTHÈSE 7

I. LA JUSTICE : UN BUDGET RÉPUTÉ PRIORITAIRE MAIS NON SOUTENABLE 9

II. LA JUSTICE JUDICIAIRE : DES DOTATIONS INSUFFISANTES 15

A. LES DOTATIONS, QUI STAGNENT, SONT-ELLES RÉALISTES ? 15

1. Quelle adéquation des crédits de personnel prévus aux effectifs annoncés ? 16

a. La diminution des effectifs de magistrats 16

b. Une évolution différenciée des effectifs des greffes 17

2. Frais de justice : la progression non contrôlée des dépenses et des restes à payer 18

a. Une insuffisance chronique de moyens pour les frais de justice et les moyens de fonctionnement courant 18

b. Les frais de justice : un poste de dépenses hors de contrôle 18

c. L’augmentation des restes à payer et des charges à payer de frais de justice 19

d. En 2015, la dérive perdure et les mesures annoncées par le Gouvernement sont insuffisantes 21

3. Les crédits de fonctionnement courant : des dotations chroniquement insuffisantes 22

4. La diminution des crédits d’investissement 24

B. LES PERFORMANCES DES SERVICES JUDICIAIRES 25

1. Les délais de traitement des procédures civiles augmentent 25

2. Améliorer l’exécution des peines et diversifier la réponse pénale 27

3. Développer le recours aux ordonnances pénales et au « plaider-coupable » 28

III. L’ADMINISTRATION PÉNITENTIAIRE : UN BUDGET D’UNE GRANDE RIGIDITÉ 30

A. UN BUDGET EN PROGRESSION 30

1. Des recrutements en hausse depuis 2014 et des mesures catégorielles 31

2. L’augmentation des moyens de fonctionnement et la diminution des investissements 31

B. LA MESURE DE LA PERFORMANCE DE L’ADMINISTRATION PÉNITENTIAIRE 32

1. La surpopulation carcérale a légèrement diminué en 2014 33

2. La sécurité des établissements pénitentiaires se dégrade 34

3. Les aménagements de peines 35

IV. LA PROTECTION JUDICIAIRE DE LA JEUNESSE 37

A. UN BUDGET EN AUGMENTATION AVEC LE PLAN DE LUTTE CONTRE LE TERRORISME 37

1. L’augmentation des emplois et des dépenses de rémunérations 38

2. L’augmentation des moyens de fonctionnement, d’investissement et d’intervention 38

B. LA PRISE EN CHARGE DES MINEURS DÉLINQUANTS 39

1. Les délais de prise en charge 39

2. Un taux de mesures en attente d’exécution qui augmente 40

3. La forte augmentation du nombre de sanctions éducatives 40

V. LE PROGRAMME ACCÈS AU DROIT ET À LA JUSTICE : QUELLE SOLUTION ? 41

A. UNE RÉFORME GLOBALE AU FINANCEMENT INCERTAIN 42

1. Une réforme globale 42

2. Un financement incertain 44

a. Des recettes mieux assurées que les dépenses 44

b. Un calibrage incertain des dépenses 46

B. LES PRINCIPAUX POSTES DE DÉPENSES 49

1. La rétribution des « autres auxiliaires de justice » 49

2. L’aide à l’intervention de l’avocat au cours de la garde à vue 49

3. L’aide à l’intervention de l’avocat au cours d’une audition libre ou d’un défèrement devant le procureur de la République 49

4. Les aides à la médiation 50

5. Les aides aux barreaux dans le cadre d’une contractualisation locale 50

C. LES QUATRE AUTRES ACTIONS D’ACCÈS AU DROIT ET LA JUSTICE 51

1. Le développement de l’accès au droit et du réseau judiciaire de proximité 51

2. L’aide aux victimes 51

3. La médiation familiale et les espaces de rencontre 51

4. L’indemnisation des avoués 51

VI. LE PROGRAMME DE CONDUITE ET PILOTAGE 54

A. LES MOYENS PRÉVUS POUR 2016 54

B. LES PRIORITÉS DE 2016 55

EXAMEN EN COMMISSION 57

ANNEXE : AUDITIONS EFFECTUÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL 59

L’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

Au 10 octobre 2015, 97 % des réponses étaient parvenues au Rapporteur spécial.

SYNTHÈSE

La Justice, dont les crédits de paiement augmentent de 1 % et sont prévus à 7,97 milliards d’euros est présentée cette année encore comme une priorité gouvernementale.

Les annonces gouvernementales portent sur plusieurs points : des créations significatives d’emplois en particulier dans le cadre du plan de lutte contre le terrorisme, une réforme d’ampleur de l’aide juridictionnelle afin d’améliorer l’accès des justiciables, des grands investissements immobiliers notamment dans le domaine pénitentiaire, des grandes réformes et chantiers de réorganisation qui devront dégager des marges de manœuvre : gestion des frais de justice, rationalisation des dépenses de fonctionnement, regroupement de l’administration centrale sur un site.

Dans les faits, depuis 2013, les dotations de personnel ne sont pas en adéquation avec les créations d’emplois annoncées ; l’immobilier pénitentiaire est prioritaire pour les annulations de crédits ; les dotations budgétaires, en particulier celles aux frais de justice, aux moyens de fonctionnement des juridictions, à la santé en prison et à l’aide juridictionnelle ne couvrent pas les besoins.

Le Rapporteur spécial considère toujours que l’amélioration du service public de la justice suppose des réformes d’ampleur afin de :

– remédier à la lenteur de l’institution judiciaire en améliorant ses moyens, notamment informatiques, en développant des procédures non contentieuses de résolution des conflits et en veillant au bon emploi des effectifs ;

– remédier à l’augmentation des dépenses d’aide juridictionnelle en développant des solutions alternatives comme les assurances de protection juridique ;

– lutter contre la surpopulation carcérale en construisant certes de nouvelles places d’enfermement, mais aussi en mettant en œuvre des mesures alternatives à la détention ;

– mieux prendre en charge les problèmes de santé, en particulier psychique, en détention.

I. LA JUSTICE : UN BUDGET RÉPUTÉ PRIORITAIRE MAIS NON SOUTENABLE

La mission Justice correspond au périmètre du ministère régalien de la Justice et comporte six programmes, dont trois programmes « métier » qui concourent respectivement à l’organisation et au fonctionnement des juridictions, des services pénitentiaires, ainsi que de ceux de la protection judiciaire de la jeunesse. Deux programmes transversaux retracent les moyens de la politique d’accès au droit et à la justice, ainsi que les fonctions d’état-major et législatives. Enfin, un programme est dédié au Conseil supérieur de la magistrature.

La dotation demandée pour la mission en 2016 s’élèvera à 8,3 milliards d’euros en autorisations d’engagement (– 10,1 %), la diminution des dotations s’expliquant par l’année de comparaison, 2015, année exceptionnelle de renouvellement de marchés de gestion déléguée d’établissements pénitentiaires. Les crédits de paiement s’élèveront à 7,97 milliards d’euros, en hausse de 1 %, augmentation des moyens qui fait suite à quatre années de progression des dotations.

Pour chacun des programmes, le projet de budget pour 2016 est présenté dans le tableau suivant.

LE PROJET DE BUDGET DE LA JUSTICE EN 2016

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Évolution des crédits de paiement (%)

Numéro et intitulé du programme
et de l’action

LFI 2015

PLF 2016

LFI 2015

PLF 2016

166 – Justice judiciaire

2 994,7

3 119,7

3 064,8

3 086,7

+ 0,7 %

107 – Administration pénitentiaire

4 703,1

3 599,2

3 374,6

3 408,6

+ 1,0 %

182 – Protection judiciaire de la jeunesse

779,9

800,9

777,4

795,6

+ 2,4 %

101 – Accès au droit et à la justice

359,1

366,4

357,7

367,0

+ 2,6 %

310 – Conduite et pilotage de la politique de la justice

354,1

374,7

315,4

310,8

– 1,5 %

335 – Conseil supérieur de la magistrature

3,6

3,5

4,3

4,4

+ 2,5 %

Total

9 194,6

8 264,4

7 894,2

7 973,1

+ 1,0 %

Source : projet annuel de performances.

La progression des dotations en projet de loi de finances initiale pour 2016 constitue une originalité dans un contexte budgétaire extrêmement contraint. La Justice constitue une priorité de l’action gouvernementale, selon les annonces récurrentes du Gouvernement. La part du budget de la Justice dans le budget de l’État en loi de finances initiale a progressé de 2,34 % en 2007 à 2,67 % en 2015 (1).

Les priorités du budget de la Justice sont, selon le Gouvernement et telles que présentées dans le dossier de presse du PLF 2016, d’abord les moyens en personnels.

« Dans un contexte marqué par la poursuite des efforts d’économies, le ministère de la justice bénéficie d’un budget en légère hausse, réaffirmant ainsi la priorité accordée par le Gouvernement à ses missions. »

Cependant, des économies structurelles sont annoncées sur les frais de justice, grâce notamment au déploiement de la plateforme nationale des interceptions judiciaires, à l’ajustement du schéma d’organisation de la médecine légale et à l’optimisation de la politique des achats ainsi que la rationalisation des dépenses de fonctionnement. Également, le Gouvernement annonce que le calendrier des opérations immobilières sera optimisé afin de concentrer les efforts d’investissement du ministère sur les projets les plus prioritaires.

Le Gouvernement affirme que « les 650 créations d’emplois prévues dans le cadre du budget triennal pour mettre en œuvre les réformes du ministère sont complétées par 293 créations supplémentaires au titre de la lutte contre le terrorisme ».

L’exécution du budget de la Justice en 2012, 2013 et 2014 met en évidence l’écart des annonces d’augmentation des effectifs avec la réalité : les créations d’emplois ne sont pas au rendez-vous et les plafonds d’effectifs ne sont pas saturés car les crédits de rémunérations d’activité ne sont pas suffisants au regard des plafonds emplois annoncés. Les investissements immobiliers sont sacrifiés pour satisfaire les besoins de dépenses de personnel et de fonctionnement, inéluctables et prioritaires. Les moyens de fonctionnement de la Justice (frais de justice, moyens de fonctionnement) sont insuffisants comme ceux dévolus à l’aide juridictionnelle, compte tenu du faible niveau des dotations.

La gestion des effectifs et de la masse salariale donne un premier exemple de décalage entre le discours et la réalité.

Dans les faits, le PLF 2016 augmente les plafonds d’emplois (ETPT) de l’ensemble de la mission de 1 339 ETPT correspondant à 943 entrées nettes, compte tenu notamment des schémas d’emplois de 2015 et 2016.

Avant même le cadrage du PLF 2016, le Gouvernement avait annoncé, le 21 janvier 2015, en réponse aux attentats du début de l’année, un renforcement du dispositif de lutte contre le terrorisme intéressant les ministères de l’Intérieur, de la Justice, de la Défense et des Finances, sur la période 2015-2017. Pour le ministère de la Justice, il était question de la création de 950 emplois supplémentaires et de 181 millions de crédits d’investissement, d’équipement et de fonctionnement.

La comparaison du cadrage du PLF 2016 en matière d’effectifs et de masse salariale avec les données des années 2012 à 2015 est éclairante quant à la distorsion des emplois annoncés avec ceux réalisés et avec la masse salariale correspondante.

Sur l’ensemble de la mission, le déficit d’emplois réalisés au regard du plafond d’emplois a été de 1 709 en 2013 et de 1 442 en 2014. Pourtant, la dépense constatée de rémunérations d’activité a toujours pratiquement saturé les crédits ouverts (taux de consommation des crédits de rémunérations d’activité de 99,3 % en exécution 2013 et 99,9 % en exécution 2014). Le coût unitaire de l’ETPT (2) a toujours été supérieur aux prévisions de la LFI : il s’est élevé à 42 157 euros en exécution 2013 pour une prévision de 41 458 euros en LFI 2013 s’agissant du programme Justice judiciaire, et à 42 126 euros en exécution 2014 pour une prévision de 41 589 euros en LFI 2014 s’agissant du même programme Justice judiciaire ; de 32 367 euros en exécution 2013 pour une prévision de 31 717 euros en LFI 2013 pour le programme Administration pénitentiaire, et pour ce même programme de 33 327 euros en exécution 2014 pour une prévision de 32 346 euros en LFI 2014.

La masse salariale prévue par les PLF est donc manifestement sous-calibrée au regard des emplois annoncés.

Aussi bien pour les services judiciaires que pour l’administration pénitentiaire, les ratios de coût unitaire résultant de la LFI 2015 comme du PLF 2016 sont inférieurs aux résultats constatés en 2014. Le coût unitaire de l’ETPT est de 41 064 euros en LFI 2015 et 42 029 euros en PLF 2016 pour les services judiciaires (3) (42 126 euros en exécution 2014) et de 33 154 euros en LFI 2015 et 33 271 euros en PLF 2016 pour l’administration pénitentiaire (33 327 euros en exécution 2014). Les prévisions de masse salariale pour 2015 et 2016 ne sont pas réalistes quand chacun connaît le dynamisme spontané de la masse salariale de l’État et témoigne d’un sous-calibrage des crédits de rémunérations d’activité.

Que valent les annonces de créations d’emplois au regard de ces constatations ?

Le dossier de presse du Gouvernement indique que « les ressources de l’aide aux victimes et de l’aide juridictionnelle continuent d’augmenter en 2016, afin de promouvoir un meilleur accès de tous les citoyens à un service public de la justice de qualité. À ce titre, le plafond de revenus conditionnant l’éligibilité à l’aide juridictionnelle sera relevé pour la première fois depuis 2001 au-delà de son indexation automatique, de 941 à 1 000 euros. Dans le même temps, l’unité de valeur de la rétribution des avocats rémunérés à l’aide juridictionnelle sera revalorisée à 24,20 euros HT (+ 8 %), pour la première fois depuis 2007. L’équilibre financier de la réforme sera assuré sans impact pour le solde budgétaire de l’État par la poursuite de la diversification des sources de financement. »

Cette modification du financement de l’aide juridictionnelle, comme l’augmentation de ses moyens, sont présentées comme une réforme de grande ampleur alors qu’elle apparaît largement comme résultant d’un cadrage budgétaire de dernière minute, peu avant la présentation du projet de loi de finances. Le dossier n’est pas stabilisé et pourrait encore évoluer dans le cours de la discussion budgétaire. Les données chiffrées précises permettant d’apprécier la sincérité de l’équilibre financier de la réforme manquent. On retiendra que cet équilibre repose sur une hypothèse de dépense spontanée de l’action 01 en 2016, en l’absence de réforme, de 381,7 millions d’euros, dont l’adéquation avec la dépense constatée en 2014 (364,5 millions) comme avec le calibrage du PLF 2015 (379,3 millions) est douteuse.

S’agissant du financement de l’aide juridictionnelle comme d’autres postes de dépenses du ministère de la Justice, il est remarquable que le Gouvernement recoure de plus en plus à des expédients qui pèsent sur les justiciables directement ou indirectement, alors qu’il avait supprimé la contribution pour l’aide juridique (CPAJ) au 1er janvier 2014 au motif qu’elle aurait constitué un obstacle à l’accès au droit des justiciables. Le Gouvernement avait allégué que le principal obstacle au droit d’accéder à un juge restait le coût du procès, qui dissuade certains justiciables d’exercer leurs droits. Portant atteinte au principe de gratuité des actes de justice, institué par la loi du 30 décembre 1977, la contribution pour l’aide juridique était, en outre, selon le Gouvernement, de nature à limiter l’accès à la justice des citoyens modestes dont les revenus excèdent de peu les plafonds de l’aide juridictionnelle partielle. Elle constituait, toujours selon le Gouvernement, un frein à la reconnaissance de certains droits, notamment dans les contentieux du travail, de la consommation ou de la famille. Dès le 5 juillet 2012, la garde des sceaux avait considéré, devant la commission des lois de l’Assemblée nationale, que cette contribution limitait l’accès au droit et à la justice des personnes aux revenus modestes.

Le Gouvernement a l’an dernier simultanément pris plusieurs mesures de rendement : la revalorisation de la taxe spéciale sur les conventions d’assurance de protection juridique, à hauteur de 25 millions d’euros ; une revalorisation des droits fixes de procédure auxquels sont soumises les décisions des juridictions répressives, permettant de faire contribuer les justiciables au financement de l’aide juridictionnelle à hauteur de 7 millions d’euros ; une revalorisation de la taxe forfaitaire prévue sur les actes effectués par les huissiers de justice, d’un rendement de 11 millions d’euros ; l’augmentation du droit de timbre dû par les parties à l’instance d’appel lorsque la constitution d’avocat est obligatoire devant la cour d’appel, en le portant à 225 euros au lieu de 150 euros pour les appels interjetés à compter du 1er janvier 2015, pour un rendement de 11,5 millions en année pleine.

Ces mesures sont d’un rendement très comparable à celui de la défunte CPAJ (51 millions en 2013) et pèsent directement ou indirectement sur les justiciables. Elles sont aggravées en 2016 par de nouvelles affectations de recettes au financement de l’aide juridictionnelle, pour 25 millions d’euros de plus.

Le Gouvernement affirme enfin, en présentation du budget de la Justice, que « les grands investissements immobiliers pour la construction de nouveaux établissements pénitentiaires et de nouveaux sites judiciaires ainsi que pour la rénovation du parc existant seront poursuivis, répondant aux besoins prioritaires identifiés sur l’ensemble du territoire national. Le chantier de modernisation de la ″Justice du XXIe siècle″ se poursuit en 2016, notamment grâce aux investissements dans les grands projets informatiques et au développement du service d’accueil unique du justiciable, visant à améliorer l’efficacité de la justice. »

Contrairement aux affirmations du Gouvernement, la réalité de la situation des investissements au ministère de la Justice, particulièrement des investissements immobiliers, n’est pas qu’ils sont poursuivis, mais qu’ils sont sacrifiés au fonctionnement courant.

Sur les trois années 2012, 2013 et 2014, les montants des dotations de titre 5 (dépenses d’investissement) qui n’ont pas été consommés ont atteint les sommes astronomiques de 892 millions d’euros pour les autorisations d’engagement et de 358 millions pour les crédits de paiement. Il est à noter que, si la sous-consommation d’AE a été particulièrement élevée (556 millions) en 2012, ce que l’on peut analyser comme une réorientation politique de la part de la majorité élue en 2012, la sous-consommation de CP est, elle, concentrée en 2013 (154 millions) et 2014 (358 millions).

Le Rapporteur spécial fait sienne cette observation de la note d’exécution budgétaire 2013 de la Cour des comptes : « Les annulations et les redéploiements de crédits du titre 5 au profit des dépenses de fonctionnement manifestent un renoncement aux projets à moyen et long terme, au profit de préoccupations de gestion plus immédiates. La Cour estime que le ministère de la justice ne peut durablement sacrifier les crédits d’investissement sans compromettre à terme la mise en œuvre de ses missions. »

La LFI 2015 a été marquée par une augmentation des crédits d’investissement, portés à 539,4 millions d’AE (423,1 millions en LFI 2014) et 566,1 millions de CP (580,1 millions en 2014), essentiellement au profit de l’immobilier pénitentiaire, hors partenariats public privé, avec 429,4 millions d’AE et 361,6 millions de CP. Le même effort se poursuit dans l’affichage du PLF 2016 avec une prévision de 825,1 millions d’AE et de 463,2 millions de CP dont respectivement 578,6 millions d’AE et 293,7 millions de CP sur le programme Administration pénitentiaire. Le PAP indique que ces montants substantiels ont essentiellement pour objet le financement de la suite du programme de construction du triennal 2013-2015 (fin du programme 13 200 et Nouveau Programme Immobilier NPI), les grandes réhabilitations en métropole et en outre-mer, et la programmation de la reconstruction du centre pénitentiaire (CP) de Loos, celle du centre pénitentiaire (CP) de Baumettes 3 (démolition du site historique de Baumettes 1 pour une reconstruction) et celle du centre pénitentiaire (CP) de Gradignan dans le cadre du programme « XXIe siècle », lancé en 2015.

Quelle logique prévaut dans la décision du nouveau gouvernement de 2012 de ne pas reprendre en totalité le projet de « Nouveau programme immobilier », et dans la révision à la baisse de la capacité à terme des établissements pénitentiaires, alors que la même majorité donne à l’administration pénitentiaire la priorité dans les investissements du ministère de la Justice ? Et quelle cohérence y a-t-il à ouvrir des montants considérables d’AE dédiées aux constructions pénitentiaires en LFI pour ne pas les consommer en gestion ?

Quel crédit peut-on accorder cette année encore aux mesures d’économies annoncées sur les frais de justice et les moyens de fonctionnement alors qu’il est établi depuis plusieurs années que les dotations budgétaires sont, pour ces deux postes de dépenses des juridictions judiciaires, très inférieures aux besoins ?

La réalité de la situation de la Justice en France, c’est qu’elle ne peut continuer à fonctionner avec le budget qui lui est dédié. Aussi bien le rapporteur spécial que la Cour des comptes mettent en évidence, depuis 2012, l’absence de soutenabilité du budget de la Justice.

Selon la définition proposée par le site Internet du forum de la performance de la direction du Budget, « la notion de soutenabilité des finances publiques s’intéresse à la capacité d’un État de rester solvable, c’est-à-dire de conserver des marges de manœuvre budgétaires suffisantes pour honorer ses engagements ».

En l’espèce, le budget de la Justice n’est pas soutenable parce que les dépenses obligées sont manifestement supérieures aux moyens alloués. Sans qu’il soit besoin de reproduire la note d’exécution budgétaire que le Rapporteur spécial a consacrée à l’exercice 2014, à laquelle on peut se reporter, l’absence de soutenabilité affecte principalement quatre domaines :

– la masse salariale, dont la progression est forte. La part des dépenses de personnel dans le budget de la mission Justice est passée de 60,8 % des crédits ouverts en LFI 2013 à 62,4 % des crédits prévus en PLF 2016. Elle est le fait principalement de l’effet mécanique du GVT et de mesures catégorielles plus que de l’impact du schéma d’emplois. En même temps, le déficit de consommation d’ETPT au regard des plafonds fixés par les lois de finances successives témoigne d’une régulation budgétaire qui s’exerce sur la masse salariale. La part croissante des rémunérations empêche durablement l’augmentation significative des effectifs. Elle est le premier facteur de rigidification du budget de la Justice ;

– les frais de justice et les moyens de fonctionnement : la situation est caractérisée dans les deux cas par une insuffisance de moyens budgétaires et la constitution de restes à payer croissants. La question des frais de justice n’est pas réglée et ne pourra l’être, sauf à prendre des mesures tendant à préciser les règles de prescription par les ordonnateurs ;

– les dépenses d’investissement, qui sont prioritaires lorsqu’il s’agit d’annuler des crédits. La Cour des comptes observe que la baisse des dépenses d’investissement traduit un renoncement à certains projets structurants. Les engagements non couverts par des crédits de paiement en fin de gestion 2014 comprennent une forte part prise par les partenariats publics privés, dont la charge croissante va augmenter le caractère rigide du budget de la Justice et réduire les marges de manœuvre dans les prochaines années ;

– les dépenses d’aide juridictionnelle sont également toujours en forte augmentation et ce poste budgétaire n’est toujours pas maîtrisé.

II. LA JUSTICE JUDICIAIRE : DES DOTATIONS INSUFFISANTES

Le programme Justice judiciaire est doté de moyens qui ne sont en adéquation ni avec les besoins ni avec les annonces du Gouvernement, sur les principaux postes de dépenses : des effectifs annoncés en hausse alors que la masse salariale prévue ne permet pas de réaliser ces prévisions, des moyens de fonctionnement et de frais de justice manifestement sous dotés.

A. LES DOTATIONS, QUI STAGNENT, SONT-ELLES RÉALISTES ?

Les crédits de paiement inscrits dans le projet de loi de finances pour 2016 sont prévus à 3 086,7 millions d’euros, en augmentation de 0,7 % par rapport aux crédits alloués par la loi de finances pour 2015. Les autorisations d’engagement s’élèveront à 3 119,7 millions d’euros (+ 4,2 %).

Avec 2 176,7 millions d’euros (+ 1,9 %), les crédits de personnel de titre 2 représenteront la majeure partie des dépenses, devant des moyens hors titre 2 s’élevant au total à 910 millions d’euros (– 2 %). 70,5 % des dotations du programme sont affectées aux rémunérations au lieu de 69 % en exécution 2013. La diminution des moyens de fonctionnement est d’autant plus avérée que les crédits de frais de justice incorporent en 2016 une dotation de 23,1 millions qui permettra de prendre en charge le paiement global des cotisations sociales des collaborateurs occasionnels du service public (COSP) pour les prestations de traduction et interprétariat effectuées en 2016, ce qui fait plus que compenser l’augmentation optique des crédits prévus.

L’évolution des crédits du programme Justice judiciaire est retracée dans le tableau suivant.

CRÉDITS DU PROGRAMME JUSTICE JUDICIAIRE

(en millions d’euros)

Numéro et intitulé de l’action/sous action

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

LFI 2015

PLF 2016

Évolution
2015/2016

(%)

LFI 2015

PLF 2016

Évolution
2015/2016

(%)

01 – Traitement et jugement des contentieux civils

927,0

946,7

+ 2,1

927,0

946,7

+ 2,1

02 – Conduite de la politique pénale et jugement des affaires pénales

956,8

1 003,6

+ 4,9

956,8

1 003,6

+ 4,9

03 – Cassation

58,6

48,1

– 17,9

58,6

48,1

– 17,9

05 – Enregistrement des décisions judiciaires

12,2

10,6

– 12,6

12,2

10,6

– 12,6

06 – Soutien

900,8

971,1

+ 7,8

970,9

938,0

+3,4

07 – Formation

110,7

112,8

+ 1,9

110,7

112,8

+ 1,9

08 – Support à l’accès au droit et à la justice

28,6

26,9

– 6,2

28,6

26,9

– 6,2

Total

2 994,7

3 119,7

+ 4,2

3 064,8

3 086,7

+ 0,7

Source : projet annuel de performances.

1. Quelle adéquation des crédits de personnel prévus aux effectifs annoncés ?

Il a déjà été constaté un décalage entre les plafonds d’emplois annoncés et la masse salariale prévue pour les exercices 2013 et 2014.

Le plafond d’ETPT est porté de 2015 à 2016 de 31 641 à 31 743 (+ 102) compte tenu de l’impact des schémas d’emplois de 2015 et 2016 ( + 267 ETPT), de 6 transferts sortants et de 159 suppressions par corrections techniques qui « comprennent l’impact en 2015 des créations d’emplois du plan de lutte antiterrorisme (+ 120 ETPT), le recrutement d’interprètes non titulaires (+ 45 ETPT) et un ajustement à la consommation réelle (– 324 ETPT) ». Ainsi, les créations réelles sont-elles nettement inférieures aux annonces gouvernementales : les 120 créations d’emplois de 2015 et les 105 créations de 2016 sont entièrement absorbées par les suppressions d’emplois non pourvus (225 à comparer à 324). Cette situation confirme le sous-calibrage de la masse salariale au regard des plafonds d’effectifs, précédemment évoqué. Le décret d’avance du 9 avril 2015 a ouvert 28,3 millions de crédits de rémunérations sur le budget de la Justice afin de permettre les recrutements dans le cadre du plan de lutte contre le terrorisme.

Il est prévu, en 2016, 784 primo-recrutements et un solde d’effectifs positifs de 157 personnes.

Dans les faits, et depuis plusieurs années, les effectifs réels de magistrats diminuent alors que ceux des greffiers et fonctionnaires ont évolué de façon différenciée selon les catégories.

Un plafond d’effectifs réels a été constaté le 1er septembre 2009 pour les magistrats. Les statistiques d’effectifs de magistrats, de 2009 à 2016, montrent que les effectifs réels ont diminué. Cette tendance négative est directement en contradiction avec les augmentations des plafonds d’emplois.

a. La diminution des effectifs de magistrats

Le Parlement vote chaque année un plafond d’emplois des magistrats sur le programme Justice judiciaire en augmentation : de 7 896 en 2009 à 9 125 en 2015 et un plafond d’emplois de 9 231 demandé pour 2016.

Or, dans le même temps, le nombre de magistrats réellement en activité ne cesse de diminuer : 8 269 en 2009 et 8 015 en 2015 (correspondant à 7 897 ETPT). Les magistrats en activité représentent 7 919 ETPT pour un plafond de 9 125.

L’écart s’accroît entre les effectifs réels et les plafonds d’emplois, les effectifs réels excédant le plafond d’emplois en 2009 et un déficit de 1 110 magistrats étant constaté en 2015, malgré la présence de magistrats en surnombre dont l’effectif a été porté à une centaine depuis 2011 (96 en 2015). On peut donc considérer que la masse salariale est un indicateur beaucoup plus pertinent que le dénombrement des effectifs, en ETPT ou en entrées/sorties, pour apprécier la politique menée par le Gouvernement. Les annonces de recrutements par augmentation des plafonds d’ETPT n’ont pas grand sens.

ÉTAT DES EFFECTIFS DE MAGISTRATS

(au 1er septembre 2015)

 

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

A. – Magistrats en détachement

215

247

253

252

240

213

204

B. – Magistrats en congé de longue durée

15

19

12

12

13

17

18

C.– Magistrats en congé parental

15

12

13

18

23

18

10

D.– Magistrats en disponibilité

83

83

74

70

73

85

82

E.– Magistrats en activité

8 208

8 187

8 080

7 959

7 916

7 921

7 919

F.– Magistrats maintenus en activité en surnombre

61

71

92

101

92

102

96

G.– Effectifs réels des magistrats en activité (E+F)

8 269

8 258

8 172

8 060

8 008

8 023

8 015

Plafond d’emplois autorisés par la loi de finances initiale

7 896

8 282

8 785

8 927

9 051

9 174

9 125

Source : ministère de la Justice.

b. Une évolution différenciée des effectifs des greffes

Les effectifs réels des greffes judiciaires ont connu, comme ceux des magistrats, également un plafond en 2009 avec (au 1er juillet) 21 212 agents. Ils ont diminué jusqu’à 20 689 agents au 1er juillet 2011 pour remonter à 21 128 agents au 1er juillet 2013, 21 089 agents au 1er juillet 2014 et 21 246 agents au 1er juillet 2015. On peut donc observer globalement une stagnation des effectifs depuis 2009.

Entre 2009 et 2015, l’emploi a évolué de manière nettement différenciée selon les différentes catégories de fonctionnaires des services :

– le nombre des emplois de catégorie A (greffiers en chef désormais appelés « directeurs de greffe ») a progressé depuis 2011 de 3,15 % ;

– les emplois en catégorie B (greffiers et secrétaires administratifs, depuis la création en 2008 d’un corps de secrétaires administratifs DSJ) sont en augmentation : + 12,29 % entre 2011 et 2015 (correspondant à 1 108 emplois supplémentaires) et constituent, à la date de référence, la catégorie la plus importante dans les services judiciaires. Les créations d’emplois de greffiers sont issues d’une part de créations nettes d’emplois, d’autre part de transformations d’emplois de catégorie C. L’objectif fixé à moyen terme, d’atteindre une parité entre le nombre d’emplois de greffiers et celui de magistrats, a été atteint en 2014. Le corps des secrétaires administratifs, créé en 2008 dans les services judiciaires, compte 531 fonctionnaires (soit 132 de plus qu’en 2011, représentant une augmentation de 33 % sur la période). Ces agents sont affectés à des missions administratives. Les greffiers peuvent ainsi recentrer sur leur cœur de métier d’assistance aux magistrats ;

– parallèlement les emplois de catégorie C (adjoints administratifs et techniques) ont diminué d’environ 6 % depuis 2011 (1 106 emplois).

2. Frais de justice : la progression non contrôlée des dépenses et des restes à payer

a. Une insuffisance chronique de moyens pour les frais de justice et les moyens de fonctionnement courant

La présentation budgétaire des crédits relatifs au fonctionnement courant et aux investissements des services judiciaires distingue cinq agrégats qui constituent autant de « briques de budgétisation » : les frais de justice, le fonctionnement courant hors immobilier, les dépenses immobilières de l’occupant, les dépenses immobilières du propriétaire et les crédits d’intervention. Il s’y ajoute la subvention de fonctionnement à l’École nationale de la magistrature (ENM). Les moyens de fonctionnement courant agrègent trois de ces agrégats : le fonctionnement courant hors immobilier, les dépenses immobilières de l’occupant et la subvention à l’ENM.

Les dotations prévues en 2016, pour l’ensemble constitué par les frais de justice et les moyens de fonctionnement courant, s’élèvent au total, hors fonds de concours et attribution de produits, à 823,4 millions d’euros en autorisations d’engagement et 788,4 millions en crédits de paiement, dont 360,4 millions en autorisations d’engagement et 325,3 millions en crédits de paiement au titre des moyens de fonctionnement courant, et près de 463 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement au titre des frais de justice.

Les dotations prévues en PLF 2015 s’élevaient au total, hors fonds de concours et attribution de produits, à 802,9 millions d’euros en autorisations d’engagement et 779,5 millions en crédits de paiement dont 352,7 millions en autorisations d’engagement et 329,2 millions en crédits de paiement au titre des moyens de fonctionnement courant, et 449,9 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement au titre des frais de justice.

Si l’on considère que la dotation de frais de justice comprend en 2016 une mesure de périmètre de 23,1 millions, pour le paiement de cotisations sociales de traducteurs et interprètes collaborateurs occasionnels du service public, force est de constater la baisse des dotations prévues en 2016, aussi bien pour les frais de justice (439,9 millions au lieu de 449,9 millions) que pour les moyens de fonctionnement courant (325,3 millions au lieu de 329,2 millions).

Cette diminution des dotations prévues pour 2016 est manifestement irréaliste aussi bien au regard de la consommation des dernières années que des restes à payer.

b. Les frais de justice : un poste de dépenses hors de contrôle

En premier lieu, la consommation des crédits de frais de justice augmente fortement.

Elle s’est élevée en 2012 à 454,5 millions d’euros. Les dotations ouvertes en LFI, insuffisantes, ont dû être abondées en gestion par le décret d’avance du 30 novembre 2012, de 46,1 millions d’euros.

Les dotations prévues en projet de loi de finances pour 2013 s’élevaient à 477 millions. La consommation effective a été de 473,6 millions d’euros.

Les 457,7 millions prévus en projet de loi de finances pour 2014 au titre des frais de justice représentaient des dotations en baisse de 4 % sur les crédits prévus en 2013. La consommation effective a été de 469,7 millions d’euros.

Ainsi, sauf en 2014, les dépenses de frais de justice ont progressé d’une année sur l’autre.

c. L’augmentation des restes à payer et des charges à payer de frais de justice

L’insuffisance des dotations budgétaires au regard des besoins se traduit également par l’augmentation non moins continue des restes à payer, qui correspondent à la différence entre les autorisations d’engagement consommées et les crédits de paiement n’ayant pas été consommés au 31 décembre de chaque année (4) ; et des charges à payer, qui constituent le solde des engagements ayant fait l’objet d’une attestation de service fait, et qui n’ont pas encore été payées. Les restes à payer peuvent nécessiter des ouvertures de crédits de paiement et les charges à payer une consommation effective de crédits de paiement préalablement ouverts.

Les restes à payer étaient de 234,4 millions en 2011, de 377,5 millions en 2012 et de 312,7 millions en 2013. Les chiffres de 2013 ne sont toutefois pas entièrement comparables aux précédents, en raison de la clôture de 141 millions d’autorisations d’engagement intervenue pour cet exercice. En réintégrant ces AE annulées, les restes à payer fin 2013 représentaient 454,1 millions d’euros. La clôture d’AE opérée résultait de modifications de conventions comptables, sans effacer la réalité de la dette.

Les charges à payer de frais de justice, qui correspondent aux mémoires ayant fait l’objet d’une taxation ou d’une certification, n’ayant pas été payées à la fin de l’exercice, se montaient à 118 millions en 2010, 107 millions en 2011, 111 millions en 2012 et 142 millions en 2013.

L’exécution des crédits en 2014 donne des résultats contrastés. Les documents budgétaires ne présentent plus que les restes à payer d’engagements enregistrés dans Chorus, la plus faible partie de l’ensemble. Le PAP 2015 évaluait le montant de l’ensemble (Chorus et hors Chorus) des restes à payer de frais de justice à fin 2014 à 378 millions d’euros à comparer à 312,7 millions de restes à payer fin 2013. Les seuls restes à payer de frais de justice enregistrés dans Chorus représentaient 43 millions fin 2013 et 107,2 millions fin 2014. Enfin, les charges à payer représentaient 159,2 millions d’euros fin 2014 à comparer à 142 millions en 2013.

En modifiant l’évaluation des engagements de frais de justice, faute d’opérer un réel suivi des engagements, le Gouvernement a décidé en fin d’exécution 2013 de renoncer à la prise en compte globale des engagements de frais de justice, pour ne traiter ces dépenses qu’au moment du paiement : Chorus ne matérialise que la demande de paiement, à l’exclusion de tout engagement ou attestation de service fait préalable. L’annulation des autorisations d’engagement a donc eu pour effet d’effacer la prise en compte d’une dette dont la réalité perdure.

Comme l’explique la Cour des comptes, « le ministère de la justice s’est ainsi détourné du projet de suivre les engagements de frais de justice, au profit d’un suivi des mémoires – c’est-à-dire au stade ultime, celui de la demande de paiement ».

L’augmentation des seuls restes à payer enregistrée dans Chorus atteste que la tendance à l’aggravation de la dette constituée par les frais de justice n’est pas démentie. Cette dette apparaît hors de contrôle.

Le rapport conjoint du contrôle général économique et financier (n° CGEFI-15-03-18) et de l’inspection générale des services judiciaires (n° IGSJ-2015-23), réalisé dans le cadre de la revue des dépenses prévues pour 2015 (5), confirme que les frais de justice constituent une dépense à forts enjeux pour lesquels peu d’outils de pilotage existent.

Les seules données fiables et exploitables sont issues de Chorus. Cependant, les outils et restitutions Chorus permettent au mieux d’obtenir des informations par grandes masses de dépenses.

« Il est notamment impossible de distinguer, à partir de ces restitutions :

– les dépenses obligatoires découlant d’une obligation légale des autres ;

– les dépenses courantes et récurrentes des dépenses liées aux affaires exceptionnelles (exemples : « Bugaled Breizh », AZF) ;

– l’origine précise des prescripteurs (distinction siège/parquet, distinction officier de police judiciaire/magistrat…) ;

– l’ensemble des fournisseurs du fait du paiement en régie de près d’un tiers des frais de justice ;

– les dépenses tarifées des dépenses non tarifées ;

– le détail précis des prestations par catégorie (globalisation des dépenses d’interprétariat et de traduction, des dépenses d’analyses toxicologiques et des dépenses d’expertises informatiques…).

Dans ces conditions, la direction des services judiciaires dispose de peu d’éléments chiffrés et se heurte à plusieurs difficultés liées à l’impossibilité de pouvoir évaluer :

– les impacts financiers, en termes d’économies, des pistes d’optimisation en cours de réflexion ;

– l’aspect qualitatif des prestations proposées et réalisées par les prestataires ;

– le contournement par les prescripteurs des éventuels nouveaux marchés négociés en application du principe de la liberté de prescription ;

– le volume des prescriptions n’ayant pas donné lieu à la production d’un mémoire ou le volume des mémoires en instance (le déploiement du portail Chorus pro devrait permettre de pallier ces insuffisances).

Malgré la création, en 2010, d’un bureau dédié au pilotage des frais de justice, composé de 21 agents, et la multiplication des rapports d’inspection et de contrôle à ce sujet, la direction des services judiciaires dispose d’une faible visibilité sur ces dépenses. Depuis, le ministère n’a pas développé d’outil de pilotage qui compense ces difficultés et lui assure une vision plus prospective. »

En définitive, la décision gouvernementale de ne plus tenter de recenser la réalité du montant des engagements a eu pour effet d’en supprimer la plus grande masse des restes à payer en compte, de 454 millions fin 2013 à 107 millions fin 2014.

Cette masse continue d’augmenter : les restes à payer en compte dans Chorus représentaient 43 millions fin 2013, 107,2 millions fin 2014 et sont estimés à 149,2 millions fin 2015 dans le PAP 2016. De même, les charges à payer augmentent, de 142 millions fin 2013 à 159,2 millions fin 2014.

d. En 2015, la dérive perdure et les mesures annoncées par le Gouvernement sont insuffisantes

Les dotations de frais de justice prévues en PLF 2015, de 449,9 millions, et en PLF 2016, de 439,9 millions hors effet de périmètre, ne sont donc pas réalistes au regard de la consommation constatée en 2014 (469,7 millions) et des restes à payer, probablement de plusieurs centaines de millions.

Selon les données transmises au Rapporteur spécial par le ministère de la Justice, les crédits ouverts en 2015 pour les frais de justice s’élèvent en gestion à 493,1 millions en AE et 451,1 millions en CP, après régulation budgétaire et ouvertures au titre du plan de lutte contre le terrorisme. La réserve de précaution initiale atteint 35 millions.

Selon la Chancellerie, « les crédits ouverts devraient être insuffisants pour stabiliser les charges à payer, pour l’essentiel du fait du retard pris dans la mise en œuvre de réformes d’envergure, génératrices d’économies substantielles (plate-forme des interceptions judiciaires et réforme de la médecine légale notamment), qui avaient servi de base à la budgétisation 2015 et dont les effets ne se feront sentir qu’à compter de 2016 ».

Les mesures de limitation du dynamisme budgétaire annoncées par le Gouvernement sont manifestement insuffisantes.

La Cour des comptes a réalisé il y a un an, à la demande de la commission des finances, une enquête de très haute qualité sur les frais de justice depuis 2011.

La Cour des comptes proposait, notamment, de réexaminer la catégorie des frais de justice pour en exclure les dépenses qui se rapportent au fonctionnement courant des juridictions ou à l’exécution des jugements ; d’envisager l’application du droit commun de la comptabilité publique au paiement des dépenses tarifées et certifiées dans un délai raisonnable et de rétablir un délai de forclusion pour le dépôt des mémoires par les prestataires de services ; d’améliorer la connaissance des composantes de la dépense de frais de justice, la budgétisation des frais de justice dans le sens d’une plus grande sincérité, et de tendre vers une comptabilisation effective des engagements des dépenses de frais de justice, afin de garantir le respect de leur caractère limitatif, conformément aux dispositions des articles 8 et 30 de la LOLF.

Face à un tel enjeu, le Gouvernement fait état d’actions tendant à réformer le circuit d’exécution des dépenses sur le plan réglementaire et sur celui des circuits de paiement ainsi que d’actions mises en place pour maîtriser la progression des dépenses : la réactivation du réseau des référents, la mise en place à l’initiative du bureau des frais de justice et de l’optimisation de la dépense d’un groupe de travail sur les outils d’achats à disposition des magistrats, la sensibilisation des chefs de cour à la maîtrise des frais de justice, la formation des régisseurs et des directeurs de greffe et l’amélioration de la tarification des frais de réquisition et du recours aux marchés publics.

On peut s’interroger sur la portée de ces mesures au regard des risques budgétaires du poste des frais de justice. La question des frais de justice n’est pas réglée et ne pourra l’être, sauf à prendre des mesures tendant à préciser les règles de prescription par les ordonnateurs.

3. Les crédits de fonctionnement courant : des dotations chroniquement insuffisantes

La consommation des moyens de fonctionnement hors frais de justice des juridictions a atteint 297,3 millions en 2014, à comparer aux prévisions de la LFI 2014, de 327,2 millions d’euros. Ce résultat apparemment bon doit être nuancé au regard des constatations suivantes. D’abord, comme l’a relevé la Cour des comptes dans sa note d’exécution budgétaire, 6 millions de dépenses de fonctionnement courant ont été différées sur 2015.

Ensuite, les charges à payer de l’année sur les moyens de fonctionnement progressent d’un exercice à l’autre : elles représentaient 16,5 millions fin 2011, 25,7 millions fin 2012, 24,7 millions fin 2013 et 34 millions fin 2014.

La prévision à fin 2015 des charges à payer s’établit à 59,2 millions en l’absence de dégel de la réserve de précaution (hors attributions de produits et fonds de concours) soit + 74 % par rapport à 2014, compte tenu de la prévision de la dépense nette 2015, qui s’élève à 313,7 millions en CP, pour les deux briques de budgétisation des moyens de fonctionnement courant hors dotation à l’ENM. En cas de levée de la totalité de la réserve de précaution, le montant des charges à payer serait ramené à 36,8 millions fin 2015, soit un niveau de charges à payer en légère augmentation par rapport à celui de fin 2014.

Enfin, le montant global cumulé des restes à payer en fin d’exercice progresse également. Il était de 104,9 millions fin 2011, de 120,6 millions fin 2012, de 125,9 millions fin 2013, de 150,3 millions fin 2014 et ce montant est estimé à 173,2 millions à fin 2015 par le PAP 2016.

Les restes à payer des moyens de fonctionnement courant, prévus au 31 décembre 2015, se répartissent entre deux briques de budgétisation, pour le fonctionnement courant hors immobilier à 36,3 millions, pour l’immobilier occupant à 136,8 millions.

Au sein de ces 173,2 millions, les dépenses les plus significatives sont liées aux loyers nouveaux ou renouvelés ces dernières années pour des montants importants.

L’augmentation des prévisions de restes à payer et de charges à payer à fin 2015 résulte de l’insuffisance des dotations budgétaires.

La dotation prévue en PLF 2015 pour les mêmes crédits s’élevait à 352,7 millions d’autorisations d’engagement et à 329,2 millions de crédits de paiement.

La dotation prévue pour 2015 est insuffisante, puisqu’il est manifeste que l’exécution du budget 2015 pour les dépenses de fonctionnement pose problème. La dotation actualisée au 31 juillet 2015, après prise en compte des annulations, des reports et des attributions de produits, a été ramenée à 335,7 millions en AE et de 314,8 millions en CP. Il s’agit des dotations du budget opérationnel du programme (BOP) central, des BOP des cours d’appels et des BOP spécifiques, tels que ceux de la Cour de cassation, de l’École nationale des greffes et du Casier judiciaire national (CJN).

Fin août 2015, la consommation au titre des briques de budgétisation (BB) « Fonctionnement courant hors immobilier » et « Fonctionnement courant dépenses de l’occupant », donc des moyens de fonctionnement courant hors subvention à l’ENM, s’élevait à 202,7 millions en AE et 199,9 millions en CP. Le taux de consommation des CP est supérieur à celui de 2014 à la même période (71 % contre 68 % en 2014). Il est à noter que le taux de consommation dépassait 70 % fin août dans neuf BOP correspondant à vingt-sept cours d’appel : Lyon, Grenoble, Chambéry, Riom, Rennes, Caen, Angers, Aix-en-Provence, Bastia, Bordeaux, Pau, Poitiers, Limoges, Douai, Amiens, Rouen, Fort-de-France, Saint-Pierre et Miquelon, Nancy, Besançon, Colmar, Metz, Saint-Denis de La Réunion (83,2 %), Toulouse, Agen, Montpellier et Nîmes.

Les éléments d’information reçus par le Rapporteur spécial confirment qu’une partie importante des dépenses a été reportée de 2014 sur 2015. Il s’agit essentiellement des fluides et de l’affranchissement ; ces reports de charges à payer devaient être mis en paiement prioritairement en début d’année 2015.

Les prévisions d’exécution en 2015 sont les suivantes concernant les deux briques de budgétisation des moyens de fonctionnement courant hors dotation à l’ENM.

Pour le fonctionnement courant hors immobilier, elle est prévue à 162,1 millions en AE et à 144,5 millions en CP, pour une prévision de PLF 2015 de 144,3 millions en AE et CP, ce qui laisse présumer une dépense contenue grâce à une augmentation des restes à payer d’une vingtaine de millions d’euros.

Pour l’immobilier occupant, la consommation serait de 155,5 millions en AE et 172,2 millions en CP, pour une prévision de 183,8 millions d’AE et de 160,3 millions de CP en PLF 2015. Ces prévisions intègrent le dégel de la réserve de précaution en son intégralité.

Il est à noter que le fonctionnement courant hors immobilier représente moins de la moitié des besoins : 133,5 millions de crédits en 2016 et les dépenses immobilières de l’occupant la majeure part, 159 millions d’euros en 2016. La sous-budgétisation est d’autant moins admissible que ce dernier poste de dépenses (fluides, loyers, nettoyage, gardiennage, entretien courant,…) retrace des coûts prévisibles et incompressibles.

La dotation des moyens de fonctionnement prévue en PLF 2016 est en diminution, de 325,3 millions d’euros. Cette dotation est insuffisante, au regard des consommations constatées comme des montants, toujours croissants, des restes à payer et des charges à payer.

4. La diminution des crédits d’investissement

Les dotations d’investissement des services judiciaires sont de nouveau en baisse de 2015 à 2016 sauf pour les AE qui passent de 61,3 millions d’euros en 2015 à 115,6 millions en 2016 alors que les CP diminuent de 154,8 millions en 2015 à 118,5 millions en 2016.

Ces données présentent un intérêt relatif, compte tenu de la régulation budgétaire. Ainsi, en 2014, la consommation des CP pour les dépenses d’investissement des services judiciaires a représenté 123,6 millions à comparer à 164,9 millions de crédits ouverts.

Encore une fois, les crédits d’investissement sont mobilisés en premier lieu en cas d’annulations et peuvent servir à payer des dépenses de fonctionnement de titre 3.

En gestion, les crédits sont fongibles entre les titres 3 (fonctionnement), 5 (investissement) et 6 (dépenses d’intervention). La fongibilité est interdite à partir de crédits de ces titres vers ceux du titre 2 (personnel). Elle est possible dans l’autre sens, ce que le jargon de la loi organique relative aux lois de finances qualifie de « fongibilité asymétrique ». Les règles de la compatibilité publique n’interdisent en aucune manière un « glissement » des dépenses d’investissement vers les dépenses de fonctionnement, contrairement à ce qui a été affirmé l’an dernier en séance publique à l’Assemblée nationale, lors de l’examen du budget de la Justice.

B. LES PERFORMANCES DES SERVICES JUDICIAIRES

Le dispositif de mesure de la performance a été revu en PLF 2015 sur l’ensemble de la mission. Il a été resserré autour de trois grands objectifs auxquels correspondent treize indicateurs : améliorer la qualité et l’efficacité de la justice ; rendre plus efficaces la réponse pénale, l’exécution et l’aménagement des peines ; moderniser la gestion de la justice.

1. Les délais de traitement des procédures civiles augmentent

Le Rapporteur spécial est particulièrement attentif à la dégradation des délais de traitement des procédures civiles et pénales dont les magistrats, fonctionnaires et justiciables lui font part lorsqu’il se déplace dans les juridictions. Ces observations sont corroborées par les indicateurs de performance qui témoignent d’une augmentation des délais de traitement dans toutes les catégories de juridictions. On peut s’étonner, une fois de plus, que l’information disponible concerne surtout les juridictions civiles et non les juridictions pénales, pour lesquelles la plupart des résultats de 2014 ne sont toujours pas disponibles.

Les délais de traitement des procédures civiles, hors procédures courtes, augmentent à la Cour de cassation et ont atteint 15,5 mois en 2014 au lieu de 15,1 mois en 2012. Les dispositions instaurant la question prioritaire de constitutionnalité (QPC), issues de la réforme constitutionnelle du 23 juillet 2008, entrée en vigueur depuis le 1er janvier 2010, impactent encore la durée des procédures, et ce, bien que le nombre de QPC enregistrées baisse de façon continue depuis 2011.

Les délais de traitement augmentent pour les cours d’appel (12,6 mois en 2012 et 2013 et 12,9 mois en 2014). Les contentieux liés à la crise économique ont entraîné une hausse des appels sur des affaires souvent plus complexes et à forts enjeux économiques, sociaux et politiques (liquidations d’entreprises, plans de licenciement collectif, surendettement des particuliers). On a constaté en 2014 une nouvelle hausse des affaires nouvelles (251 000 soit + 6 000 affaires ou + 3 % par rapport à 2013). L’âge moyen du stock est en hausse : il est passé de 10 mois fin 2011 à 11,1 mois fin 2014. Ainsi, la cour d’appel de Paris affiche la situation la plus emblématique, avec un stock en matière sociale qui représente à lui seul 25 % de l’ensemble des affaires en stock, dont l’âge moyen est de 15,3 mois fin 2014, lequel pèse de façon importante dans l’âge moyen national, tout comme son délai moyen de traitement, qui approche les 22 mois.

Les délais de traitement augmentent également pour les tribunaux de grande instance (TGI) (10,5 mois en 2012 et 2013 et 10,7 mois en 2014), de façon constante et depuis 2008, où ils étaient de 9 mois. Les contentieux les plus lourds, constituant le cœur d’activité des TGI, sont de plus en plus difficiles à traiter de façon satisfaisante, et ce en raison du poids de plus en plus important des contentieux à délai contraint comme celui des hospitalisations sous contrainte et de la rétention des étrangers ainsi que de la réorganisation induite par le déploiement de la nouvelle chaîne pénale ayant amené à donner priorité à l’audiencement pénal au détriment du civil. En 2014, les affaires nouvelles ont atteint leur plus haut niveau avec environ 960 000 affaires, soit 40 000 de plus qu’en 2013, essentiellement sur les affaires de divorce, les ordonnances sur requête en contentieux général et les affaires relevant de la compétence du juge de l’exécution. De ce fait, le nombre d’affaires en stock a augmenté de plus de 40 000 affaires depuis 2012 dont 27 000 en 2014.

Les délais de traitement des affaires relatives aux mineurs connaissent une légère amélioration en 2014 avec un délai de 2,4 mois au lieu de 2,5 en 2013.

Les délais de traitement augmentent dans les conseils de prud’hommes (13,1 mois en 2012, 13,7 mois en 2013 et 15,7 mois en 2014). Toutefois en 2013, le calcul du délai tenait encore compte des procédures courtes, ce qui n’est plus le cas depuis 2015. Le délai 2013 recalculé sans les procédures courtes et de 15,8 mois. La Chancellerie espère une amélioration des délais de traitement à moyen terme.

Enfin, ces délais diminuent dans les tribunaux d’instance (6,6 mois en 2012 et 5,8 mois en 2014). Deux raisons principales expliquent cette orientation positive : une baisse significative des affaires nouvelles, essentiellement en ce qui concerne la tutelle des majeurs, dans la mesure où les tribunaux ont rempli leurs obligations en matière de renouvellement des mesures de protection, dont la date limite était fixée au 31 décembre 2013. Ce renouvellement avait entraîné une mobilisation importante des magistrats et fonctionnaires. La fin de cette période a permis aux tribunaux de réaffecter des effectifs sur le traitement des autres activités. L’amélioration du délai porte exclusivement sur le contentieux des tutelles.

En matière pénale, les délais de traitement ne sont pas disponibles sauf pour la Cour de cassation.

Un autre indicateur de performance retrace le pourcentage des juridictions dépassant de 15 % le délai moyen de traitement (cible) des procédures civiles.

Les délais de traitement des procédures civiles varient selon les juridictions et l’écart s’est réduit, sauf pour les TGI. C’est ainsi que le pourcentage des juridictions dépassant de 15 % le délai moyen de traitement des juridictions civiles est stable de 15 % en 2012 et 2014 pour les cours d’appel. Il est passé de 20 % en 2012 à 18 % en 2013 et 30 % en 2014 pour les TGI, de 28 % en 2012 à 22 % en 2013 et 14 % en 2014 pour les tribunaux d’instance.

Le nombre moyen d’affaires civiles traitées par magistrat du siège augmente, à la Cour de cassation, dans les cours d’appel et dans les TGI. Cet indicateur n’est pas disponible pour les tribunaux d’instance (TI).

Le nombre moyen d’affaires pénales traitées par magistrat du siège et du parquet augmente à la Cour de cassation, dans les cours d’appel et les TGI.

L’indicateur 1.6 de nombre d’affaires traitées par fonctionnaire n’est renseigné que pour la Cour de cassation (civil), les cours d’appel (civil) et les TGI (civil), les données des TI n’étant pas disponibles. Le nombre d’affaires traitées augmente.

D’une manière générale, les délais augmentent pour les procédures civiles compte tenu d’une activité soutenue pour des motifs exogènes à la situation des juridictions, comme la question prioritaire de constitutionnalité à la Cour de cassation, les procédures collectives dans les cours d’appel, les contentieux à délai contraint dans les TGI. Les mêmes facteurs exogènes, en sens inverse (les tutelles), expliquent l’amélioration constatée dans les TI.

Dans un contexte de demande accrue des justiciables, la médiocrité des moyens de fonctionnement et leur raréfaction a un impact certain sur les délais de traitement des procédures par les juridictions.

2. Améliorer l’exécution des peines et diversifier la réponse pénale

Le Rapporteur spécial considère qu’il est nécessaire d’améliorer l’exécution des peines et de diminuer le stock de peines non exécutées, dites « en cours d’exécution ». En même temps, il convient de diversifier la réponse pénale et de développer raisonnablement les alternatives aux poursuites.

Quatre indicateurs de performance ont été retenus pour apprécier le degré de réalisation de l’objectif tendant à rendre plus efficace la réponse pénale, l’exécution et l’aménagement des peines. Or, deux d’entre eux, et c’était déjà le cas dans le PAP 2014, dans le RAP 2013, dans le PAP 2015 et dans le RAP 2014, le taux de mise à exécution des peines et le délai moyen d’exécution des peines ne sont pas renseignés. Depuis deux ans, les documents budgétaires indiquent qu’une réflexion va être menée pour proposer des indicateurs reposant sur des modes de calcul différents. La réflexion perdure, donc.

Le taux d’alternatives aux poursuites, permet de mesurer la part des affaires faisant l’objet d’une mesure alternative réussie ou d’une composition pénale dans l’ensemble des affaires poursuivables.

Le taux varie depuis quelques années entre 43 % et 45 %, et marque un léger tassement de la politique de diversification de la réponse pénale, ce que regrette le Rapporteur spécial.

3. Développer le recours aux ordonnances pénales et au « plaider-coupable »

Le Rapporteur spécial regrette que le bilan de la mise en œuvre des procédures allégées comme les ordonnances pénales ou la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (aussi appelée « plaider-coupable ») soit décevant et que leur utilisation demeure, sinon marginale, du moins si limitée qu’elle ne permet pas réellement de réduire l’encombrement des juridictions et la lenteur des procédures.

L’ordonnance pénale est une procédure simplifiée applicable devant le tribunal de police ou la juridiction de proximité pour toutes les contraventions de police, même commises en état de récidive, à l’exception des contraventions prévues par le code du travail et des contraventions de la cinquième classe commises par les mineurs.

Depuis la loi n° 2011-1862 du 13 décembre 2011 relative à la répartition des contentieux et à l’allégement de certaines procédures juridictionnelles, cette procédure est également applicable devant le tribunal correctionnel notamment pour les délits de vol, de recel, de dégradations, de vente à la sauvette, d’usage de stupéfiants, d’occupation illicites des halls d’immeuble et de port et transport d’armes de catégorie D, ainsi qu’aux délits routiers, y compris le délit de fuite, aux délits en matière de réglementation des transports, aux délits prévus par certains titres du code de commerce lorsqu’aucune peine d’emprisonnement n’est encourue, aux délits de contrefaçon lorsqu’ils sont commis au moyen d’un service de communication en ligne et aux délits en matière de chèques.

Cette procédure n’est applicable que lorsque le prévenu est majeur, que les faits n’ont pas été commis en récidive légale, lorsqu’il résulte de l’enquête de police judiciaire que les faits reprochés au prévenu sont simples et établis, et lorsque les renseignements concernant la personnalité, les charges et les ressources de celui-ci sont suffisants pour permettre la détermination de la peine.

La comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC) est applicable aux personnes physiques majeures et aux personnes morales qui reconnaissent les faits. Depuis la loi du 13 décembre 2011, elle s’applique à tous les délits, exception faite des délits de presse, des délits politiques, des délits dont la procédure est prévue par une loi spéciale et des homicides involontaires. Sont également exclus de cette procédure les délits d’atteintes volontaires et involontaires à l’intégrité des personnes et d’agressions sexuelles prévus aux articles 222-9 à 222-31 du code pénal lorsqu’ils sont punis d’une peine d’emprisonnement d’une durée supérieure à cinq ans.

La procédure de CRPC peut également être mise en œuvre à l’issue d’une information judiciaire, si la personne mise en examen, le procureur de la République et la partie civile ont donné leur accord sur cette orientation.

Cette procédure est largement utilisée dans le cadre du contentieux routier (conduite sous l’empire d’un état alcoolique, sans permis, malgré suspension ou annulation de permis, sans assurance) mais également pour les délits de dégradations, menaces, violences, outrages, port d’arme, atteinte aux biens ainsi que pour les usages de stupéfiants.

Le champ d’application de la CRPC s’est également progressivement élargi à des contentieux plus techniques et notamment en matière de consommation, de droit du travail, droit de l’urbanisme, répression des fraudes, non-respect des règles d’hygiène et de sécurité prévues par le code du travail.

La comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité a pu permettre de diminuer les audiences à juge unique. Du fait du caractère exécutoire de l’ordonnance d’homologation, l’exécution des peines peut être très rapide soit parce que les audiences sont couplées au bureau de l’exécution des peines (BEX), soit parce que l’exécution des peines est réalisée dès le lendemain de l’audience d’homologation.

ORDONNANCES PÉNALES ET CRPC

Année

Poursuites correctionnelles (hors instruction et juridictions pour enfants)

Ordonnances pénales délictuelles

Part des ordonnances pénales dans les poursuites correctionnelles

CRPC

Part des CRPC dans les poursuites correctionnelles

2009

540 654

144 711

26,8 %

77 530

14,3 %

2010

514 699

136 291

26,5 %

78 299

15,2 %

2011

496 517

140 479

28,3 %

50 871

10,2 %

2012

503 300

147 882

29,4 %

61 307

12,2 %

2013

504 430

146 883

29,1 %

65 264

12,9 %

2014

500 353

154 531

30,9 %

65 594

13,1 %

Évol. 2009-2014

– 7,45 %

6,79 %

– 15,40 %

Source : Les Cadres du parquet - système d’information décisionnel pénal (SID pénal).

Les ordonnances pénales représentaient quasiment un tiers (30,9 %) des poursuites correctionnelles en 2014 et les CRPC 13,1 % des poursuites correctionnelles. La part de ces deux modes de poursuite a progressé de 2009 à 2014, passant de 41,1 % à 44 %, mais le nombre de CRPC diminue.

III. L’ADMINISTRATION PÉNITENTIAIRE : UN BUDGET D’UNE GRANDE RIGIDITÉ

Les missions du service public pénitentiaire sont fixées à l’article 2 de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 : « Le service public pénitentiaire participe à l’exécution des décisions pénales. Il contribue à l’insertion ou à la réinsertion des personnes qui lui sont confiées par l’autorité judiciaire, à la prévention de la récidive et à la sécurité publique dans le respect des intérêts de la société, des droits des victimes et des droits des personnes détenues. »

Les objectifs de l’action de l’administration pénitentiaire ont été fixés, pour 2016, dans la perspective de la mise en œuvre de la loi du 15 août 2014 relative à l’individualisation des peines et renforçant l’utilité des sanctions pénales. Ils portent sur les axes stratégiques suivants : favoriser la réinsertion, améliorer les conditions de détention et les conditions de travail des personnels pénitentiaires, renforcer la sécurité.

A. UN BUDGET EN PROGRESSION

Les crédits de paiement du programme 107 Administration pénitentiaire inscrits dans le projet de loi de finances pour 2016 s’élèvent à 3 408,6 millions d’euros (+ 1 % par rapport à 2015), ce qui s’analyse comme un ajustement minimal aux besoins, compte tenu de la grande rigidité des différents postes de dépenses.

Les autorisations d’engagement, sont en forte baisse, à 3 599,2 millions d’euros contre 4 703,1 millions d’euros en 2015 (– 23,5 %). L’écart s’explique dans une large mesure par le fait que des AE avaient été ouvertes exceptionnellement en 2015 en prévision des renouvellements de marchés de gestion déléguée.

CRÉDITS DU PROGRAMME ADMINISTRATION PÉNITENTIAIRE

(en millions d’euros)

Numéro et intitulé de l’action/sous action

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

LFI 2015

PLF 2016

Évolution
2015/2016

(%)

LFI 2015

PLF 2016

Évolution
2015/2016

(%)

01 – Garde et contrôle des personnes placées sous main de justice

2 111,5

2 324,6

+ 10,1

2 046,6

2 043,2

– 0,2

02 – Accueil et accompagnement des personnes placées sous main de justice

2 318,4

990,9

– 57,3

1 060,7

1 087,6

+ 2,5

04 – Soutien et formation

273,2

283,7

+ 3,9

267,2

277,8

+ 4,0

Total

4 703,1

3 599,2

– 23,5

3 374,6

3 408,6

+ 1,0

Source : projet annuel de performances.

L’évolution des dotations porte la marque de la rigidité du budget : les crédits de personnel de titre 2 sont prévus en PLF 2016 à 2 184,8 millions d’euros (+ 3,2 %) alors que les crédits de fonctionnement, d’investissement et d’intervention hors titre 2 sont ramenés à 1 223,8 millions d’euros (– 2,7%). Les dépenses de personnel représentent 64,1 % du budget de l’administration pénitentiaire en PLF 2016 à comparer à 62,4 % en exécution 2013.

1. Des recrutements en hausse depuis 2014 et des mesures catégorielles

Les dépenses globales de personnel de titre 2 sont donc prévues à 2 184,8 millions d’euros (+ 3,2 %).

Le plafond d’autorisation des emplois (PAE) 2016 du programme 107 étant de 37 823 ETPT au lieu de 36 758 en LFI 2015, l’augmentation nette de 1 065 ETPT. Cette augmentation intègre, comme dans le cas des services judiciaires, l’extension en année pleine du schéma d’emplois 2015 (392 ETPT) et celle des créations d’emplois en 2015 au titre du plan de lutte contre le terrorisme, qui n’étaient pas prévues en LFI 2015 (229 ETPT), soit un total de 621 ETPT, mais, également, la suppression de 218 ETPT au titre « de mesure technique » d’ajustement à la consommation effective. Il s’y ajoute l’impact des schémas d’emplois de 2016, soit 289 ETPT. Comme il a été indiqué supra, la masse salariale paraît insuffisamment dotée au regard des plafonds d’emploi prévus.

Les recrutements représentent en 2016 une augmentation de la masse salariale hors pensions de 18,4 millions au titre du schéma d’emploi 2015 et de 8 millions au titre du schéma d’emplois 2016.

Il s’y ajoute diverses mesures catégorielles (0,7 million) ou générales (1,8 million), le GVT solde (4,2 millions) et des mesures indemnitaires atypiques (11 millions).

Le dynamisme des dépenses de personnel s’explique donc par les deux facteurs, recrutements et mesures catégorielles, alors que l’administration pénitentiaire continue de bénéficier de quelques mesures favorables de rémunérations.

2. L’augmentation des moyens de fonctionnement et la diminution des investissements

Les moyens hors titre 2 de l’administration pénitentiaire sont globalement prévus en baisse à 1 223,8 millions d’euros de crédits de paiement (– 2,7%). L’évolution des crédits est contrastée puisque les moyens de fonctionnement du titre 3 augmentent pour atteindre 820,8 millions (+ 4,3 %) alors que les dépenses d’investissement sont prévues en baisse (293,7 millions, – 18,8%).

Le budget est d’une grande rigidité également pour le fonctionnement et l’investissement, car des besoins de crédits sont prévisibles, aussi bien pour les marchés de gestion déléguée des établissements pénitentiaires que pour les investissements et le fonctionnement des établissements en partenariat public privé (PPP).

C’est ainsi que, sur 1 223 millions de CP, 328,8 millions sont prévus pour financer le fonctionnement des établissements en gestion déléguée. Les contrats de PPP mobilisent pour leur part 169,2 millions d’euros dont 124,3 millions au titre du fonctionnement et 44,9 millions pour l’investissement.

Il est prévu en 2016 également 126,6 millions pour les dépenses de santé des détenus, dont 33,4 millions à la charge des services déconcentrés et 93,2 millions versés à l’ACOSS pour le paiement des cotisations sociales des détenus. Cependant, selon les informations transmises au Rapporteur spécial, la prévision de dépenses pour 2015 s’établit à 37 millions pour 31,8 millions d’euros ouverts en LFI 2015 pour les services déconcentrés et à un montant dû de 98,7 millions au titre du versement à l’ACOSS à comparer à une dotation en LFI de 95 millions. Il apparaît donc que, de nouveau, les dotations affectées aux dépenses de santé des détenus sont inférieures aux besoins.

Il reste (après les dépenses de PPP, la gestion déléguée et la santé des détenus) environ 632 millions d’euros, consacrés essentiellement aux investissements hors PPP (249 millions), aux aménagements de peines, à la sécurisation des sites, aux établissements en gestion publique et au soutien.

Les engagements non couverts par des paiements (restes à payer) de l’administration pénitentiaire vont passer, selon la prévision du PAP 2016, de 3 599 millions au 31 décembre 2014 à 4 700,6 millions au 31 décembre 2015, compte tenu des crédits destinés à l’ensemble des marchés de gestion déléguée, pour 2 772,7 millions, et des crédits relatifs aux opérations immobilières pour le reste.

Ces éléments contribuent à rigidifier le budget et à réduire les marges de manœuvre budgétaires pour l’avenir.

B. LA MESURE DE LA PERFORMANCE DE L’ADMINISTRATION PÉNITENTIAIRE

Comme l’indique la directrice de l’administration pénitentiaire dans sa présentation stratégique, l’administration pénitentiaire est chargée de la mise en œuvre du mandat judiciaire en matière d’exécution des peines. Son efficacité dépend en partie des décisions et des contributions d’autres intervenants. Les politiques en matière d’insertion de l’administration pénitentiaire sont étroitement liées à celles des ministères ou des partenaires extérieurs, en amont ou en aval de son intervention ; l’enseignement en prison est dispensé par des enseignants de l’éducation nationale ; l’organisation et la mise en œuvre de la prise en charge sanitaire des personnes détenues relèvent du service public hospitalier.

Comme pour les services judiciaires, différentes modifications ont été apportées à la maquette du dispositif de performance dans le PAP 2015. Le nombre d’objectifs a été ramené à trois dans le PAP 2015 au lieu de 5 pour le PAP 2014 et le nombre d’indicateurs est passé de quatorze à douze entre ces deux exercices.

Les objectifs de performance retenus sont les suivants : favoriser la réinsertion ; améliorer les conditions de détention des personnes sous main de justice et les conditions de travail des personnels pénitentiaires ; renforcer la sécurité des établissements pénitentiaires.

1. La surpopulation carcérale a légèrement diminué en 2014

Entre 2004 et 2015, le nombre de places réelles dans les établissements pénitentiaires français a été porté de 48 605 à 57 841, ce qui correspond à une hausse de 9 236 places (+ 19 %). Le tableau ci-après fournit le détail de l’évolution capacitaire carcérale française, année par année.

Au 1er janvier 2015, le nombre de personnes détenues était de 66 270, pour une capacité opérationnelle du parc de 57 841 places. Au 1er juillet 2015, le nombre de personnes détenues était de 66 864 pour une capacité opérationnelle du parc de 57 749 places et une densité de 115,7 %.

Un objectif de 63 500 places sous-tendait le budget triennal 2013-2015, qui n’a donc pas été atteint.

L’objectif d’amélioration des conditions de détention est directement en rapport avec l’état de la surpopulation carcérale.

L’indicateur de taux d’occupation des places en maison d’arrêt (MA) se dégrade. Il était de 124 % en 2011, de 134 % en 2013 comme en 2014 et il est prévu à 135 % en 2015 et 132 % en 2016. L’amélioration attendue résulte de l’augmentation du nombre de places et de l’ensemble des mesures destinées à faire diminuer le taux d’occupation, à l’instar du développement des aménagements de peines et de la surveillance électronique de fin de peine, malgré une prévision à la hausse de la population pénale (la projection de la population détenue en MA et quartier maison d’arrêt (QMA) est de 45 429 personnes détenues en 2016 et 46 016 en 2017).

L’indicateur de nombre de détenus par cellule, en moyenne générale, est dégradé : de 1,3 en 2011 à 1,36 en 2013 et 1,35 en 2014. Cet indicateur n’est plus renseigné par catégorie d’établissement. La cible est de 1,29 en 2017.

NOMBRE, EFFECTIFS, CAPACITÉS ET TAUX D’OCCUPATION DES ÉTABLISSEMENTS PÉNITENTIAIRES DEPUIS 2004

Au 1er janvier

Écroués non détenus

Écroués détenus

Capacité théorique

Capacité opérationnelle

Taux d’occupation

Nombre d’établissements pénitentiaires

MA

CD

CP

CSL

EPM

MC

Total

2004

 

59 246

49 256

48 605

121,9%

 

 

 

 

 

 

 

2005

966

58 231

50 717

50 094

116,2%

117

24

29

13

0

5

188

2006

1 178

58 344

51 854

51 252

113,8%

117

24

30

13

0

5

189

2007

2 001

58 402

51 076

50 588

115,4%

116

24

31

13

0

4

189

2008

2 927

61 076

51 489

50 693

120,5%

116

24

31

13

4

4

193

2009

3 926

62 252

52 843

51 997

119,7%

111

23

35

13

6

4

193

2010

5 111

60 978

55 760

54 988

110,9%

106

24

38

12

6

5

191

2011

6 431

60 544

57 383

56 358

107,4%

101

25

40

11

6

6

189

2012

8 993

64 787

58 353

57 236

113,2%

99

25

43

11

6

6

190

2013

10 226

66 572

58 225

56 992

116,8%

98

25

44

11

6

8

190

2014

10 808

67 075

58 583

57 516

116,6%

98

25

44

11

6

6

190

2015

11 021

66 270

58 603

57 841

114,6%

93

25

46

11

6

6

187

Source : Statistique mensuelle (PMJ5).

Définitions :

La capacité d’hébergement théorique d’un établissement pénitentiaire a été définie par la somme des cellules et dortoirs utilisés pour héberger des détenus placés en détention normale, des cellules destinées à l’accueil des entrants, des cellules utilisées pour l’accueil des enfants laissés en détention auprès de leur mère incarcérée, des cellules normalement destinées à la semi-liberté, et des cellules des services médico-psychologiques régionaux.

La capacité opérationnelle correspond à la capacité dont dispose effectivement un établissement. Elle s’analyse comme la capacité d’hébergement dont on déduit les places des quartiers des entrants, les places réservées aux services médico-psychologiques régionaux et les places inutilisables en raison de travaux dans les cellules.

La densité carcérale (ou taux d’occupation) est calculée en rapportant le nombre de personnes écrouées hébergées à la capacité opérationnelle.

MA : maison d’arrêt

CD : centre de détention

CP : centre pénitentiaire

CSL : centre de semi-liberté

EPM : établissement pour mineur

MC : maison centrale

2. La sécurité des établissements pénitentiaires se dégrade

Le taux d’agressions contre un personnel ayant entraîné une interruption temporaire de travail, de 20,4 pour 10 000 en 2011 a diminué à 16,7 pour 10 000 en 2012 et il est remonté à 21,5 en 2013 et à 22 en 2014. La prévision a été relevée de 16,5 en PLF 2014 à 21,2 pour 2015. L’indicateur est l’un des éléments permettant d’apprécier le climat de l’établissement pénitentiaire.

Il est à noter que les agressions de divers types envers les personnels pénitentiaires augmentent et sont passées de 15 028 en 2009 à 19 681 en 2014, 9 896 agressions ont été recensées au premier semestre 2015. Si le nombre d’agression a légèrement diminué entre 2013 et 2014, le nombre de jours d’interruption temporaire de travail a augmenté.

Les agressions entre personnes détenues sont passées de 7 825 en 2010 à 8 861 en 2012 pour diminuer, à 8 560 en 2013 et 8 061 en 2014.

Diverses mesures sont prises pour améliorer la sécurité des établissements pénitentiaires : filins anti-hélicoptères, brouillage des téléphones portables, vidéosurveillance, tunnels d’inspection à rayons X, mise aux normes des miradors, portiques de détection, détecteurs de présence humaine dans les véhicules…

Toutefois, le phénomène de saisies d’objets interdits en détention dans les établissements pénitentiaires, du moins depuis 2007, date à laquelle un mode de recensement a été instauré, s’est accru et a atteint un record en 2014. En effet, le nombre de saisies en détention est passé de 13 852 à 49 280 entre 2007 et 2013 puis à 56 149 en 2014. Les saisies concernent pour moitié les téléphones et accessoires, ensuite les stupéfiants puis l’argent et les armes. La catégorie des téléphones et accessoires se distingue par le caractère exponentiel de la progression du nombre de saisies. En 2014, le nombre de téléphones et accessoires représente plus de 49 % de l’ensemble des objets interdits et saisis alors que, en 2007, il en représentait 35,9 %. De 2007 à 2014, le nombre de téléphones et accessoires saisis a été multiplié par 5,5.

3. Les aménagements de peines

Le développement des aménagements de peine est une des actions majeures menées par l’administration pénitentiaire pour favoriser la réinsertion des personnes condamnées et prévenir la récidive.

Les services pénitentiaires d’insertion et de probation (SPIP) ont pour mission principale la prévention de la récidive. Leurs missions s’orientent autour de trois axes : l’aide à la décision judiciaire dans un souci d’individualisation des mesures et des peines par la réalisation d’enquêtes sur les personnes placées sous-main de justice (PPSMJ) et l’étude des modalités de déroulement des peines ; l’évaluation, le suivi et le contrôle des personnes ; l’insertion des personnes placées sous-main de justice.

Le relèvement à deux ans d’emprisonnement du seuil d’exécution des peines dans le cadre d’un aménagement de peine, qui résulte de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009, a eu pour effet d’accélérer le rythme de développement des aménagements de peine.

La loi du 15 août 2014 relative à l’individualisation des peines et renforçant l’efficacité des sanctions pénales a instauré une nouvelle peine, la contrainte pénale et a consacré la mise en œuvre d’une procédure d’examen obligatoire de la situation de la personne détenue, en vue du prononcé éventuel par le juge de l’application des peines (JAP) d’une mesure de libération sous contrainte. La contrainte pénale constitue une nouvelle peine de milieu ouvert qui s’ajoute aux autres peines et mesures de milieu ouvert.

La population sous la responsabilité de l’administration pénitentiaire au titre d’une mesure ou d’une peine restrictive de liberté est passée de 123 492 personnes au 1er janvier 2004 à 174 108 personnes au 1er janvier 2014, soit une augmentation importante de l’effectif (+ 41 %). Le nombre de personnes suivies en milieu ouvert a augmenté de manière significative jusqu’en 2013 (+ 40 %) pour ensuite diminuer jusqu’à 172 007 personnes au 1er janvier 2015, ce qui s’explique essentiellement, selon les données transmises au Rapporteur spécial, par « une meilleure utilisation de l’application de suivi des personnes par les services ».

Le sursis avec mise à l’épreuve est la mesure la plus courante en milieu ouvert (126 110 personnes au 1er juillet 2015).

La surveillance électronique fixe permet de contrôler que la personne placée sous ce régime respecte les modalités d’une assignation dans un lieu déterminé (en général son domicile) lui ayant été imposée par l’autorité judiciaire selon des horaires définis. Elle ne permet pas la localisation de la personne en dehors de son lieu d’assignation, contrairement à la surveillance électronique mobile qui permet de localiser le porteur du bracelet 24 heures/24 et 7 jours/7 grâce à un dispositif GPS.

Les effectifs des personnes sous écrou placées sous surveillance électronique fixe progressent régulièrement. Le seuil des 5 000 placements simultanés a été atteint pour la première fois en mars 2010, celui des 10 000 en mars 2013. Au 1er juillet 2015, on comptait 10 692 placements sous surveillance électronique fixe.

Le placement sous surveillance électronique mobile (PSEM) est une mesure de sûreté permettant de localiser en permanence la personne placée et de s’assurer ainsi non seulement qu’elle respecte des horaires d’assignation à son domicile, mais également qu’elle ne se rend pas dans certains lieux qui lui sont interdits (zones d’exclusion définies par le magistrat comme le domicile d’une victime). Au 1er juillet 2015, 58 personnes étaient été placées sous surveillance électronique mobile.

L’indicateur de performance affiche un pourcentage de personnes placées sous écrou et condamnées bénéficiant d’un aménagement de peine (placements sous surveillance électronique/placements extérieurs/semi-liberté) de 20 % en 2012, de 22 % en 2013, de 21,4 % en 2014 et une prévision de 23 % en 2015.

IV. LA PROTECTION JUDICIAIRE DE LA JEUNESSE

Le programme 182 Protection judiciaire de la jeunesse retrace les crédits de l’ensemble des questions intéressant la justice des mineurs, tant en ce qui concerne les mineurs délinquants que les mineurs en danger dans le cadre spécifique des dispositions des ordonnances de 1945 et de 1958.

La direction de la protection judiciaire de la jeunesse (DPJJ) disposait en mars 2015 de deux réseaux : le secteur public (SP) constitué de 220 établissements et services relevant directement du ministère de la justice ; le secteur associatif habilité (SAH) constitué de 1 079 établissements et services (dont 248 financés exclusivement par l’État) habilités et contrôlés par le ministère de la justice.

En 2016, la DPJJ poursuivra son objectif de conforter la concertation entre les institutions intervenant dans le cadre de la justice des mineurs, que ce soit en matière civile ou pénale. La DPJJ met l’accent sur l’individualisation de la prise en charge et sa cohérence avec le parcours éducatif de l’adolescent. L’individualisation de la prise en charge suppose d’améliorer la capacité d’adapter la réponse éducative aux évolutions de la situation du jeune et de sa famille. Il s’agit de privilégier la cohérence du parcours éducatif du jeune. L’objectif est la prévention de la récidive ou de la réitération et plus largement la réinsertion.

Les crédits du programme sont prévus en augmentation en 2016 de 2,4 %, essentiellement du fait de créations d’emplois consécutives à la mise en œuvre du plan de lutte contre le terrorisme, ce qui se traduit par une hausse des dépenses de personnel de 2,9 %, alors que les moyens de fonctionnement et les investissements augmentent également, dans une moindre proportion, de 1,6 %.

A. UN BUDGET EN AUGMENTATION AVEC LE PLAN DE LUTTE CONTRE LE TERRORISME

Les crédits de paiement du programme 182 Protection judiciaire de la jeunesse inscrits dans le projet de loi de finances pour 2016 s’élèvent à 795,6 millions d’euros (+ 2,4 %), les dépenses de personnel de titre 2 sont en hausse de 2,9 % et les autres dépenses (fonctionnement, investissement et interventions) de 1,6 %.

Les autorisations d’engagement connaissent elles aussi une légère augmentation (+ 2,7 %), passant de 779,9 millions d’euros en 2015 à 800,9 millions d’euros en 2016.

CRÉDITS DU PROGRAMME PROTECTION JUDICIAIRE DE LA JEUNESSE

(en millions d’euros)

Numéro et intitulé de l’action/sous action

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

LFI 2015

PLF 2016

Évolution
2015/2016

(%)

LFI 2015

PLF 2016

Évolution
2015/2016

(%)

01 – Mise en œuvre des décisions judiciaires

651,9

667,5

+ 2,4

652,4

663,5

+ 1,7

03 – Soutien

98,0

102,4

– 4,5

97,6

101,1

+ 3,5

04 – Formation

30,0

31,0

+ 3,6

27,4

31,0

+ 13,4

Total

779,9

800,9

+ 2,7

777,4

795,6

+ 2,4

Source : projet annuel de performances.

1. L’augmentation des emplois et des dépenses de rémunérations

Le plafond d’autorisation d’emplois du programme pour 2016 augmente une nouvelle fois, de 196 ETPT. La mise en œuvre du plan de lutte contre le terrorisme explique l’essentiel des créations d’ETPT.

Le schéma d’emplois du programme 182 s’établit à + 60 ETP, dont 6 psychologues au titre du plan de lutte contre le terrorisme, sachant que 163 emplois avaient déjà été créés en gestion sur l’exercice 2015. La création des 169 emplois au titre du plan de lutte contre le terrorisme en 2015 et 2016 se décompose de la manière suivante : 10 coordonnateurs appartenant à la mission de veille et d’information, positionnés à l’administration centrale et en direction interrégionale (personnels d’encadrement : directeurs de service ou attachés), 59 référents laïcité et citoyenneté affectés en direction territoriale (personnels d’encadrement : chefs de service éducatif ou professeurs techniques ou psychologues), 82 psychologues (dont 76 en 2015, 6 en 2016) et 18 éducateurs dédiés à la prise en charge des mesures renforcées d’accompagnement, affectés dans les services PJJ.

La masse salariale hors contributions au CAS Pensions augmentera de 8,5 millions alors que le socle de masse salariale de 2015 est révisé à la baisse. Le schéma d’emploi explique l’essentiel de la hausse (4,7 millions). Les mesures catégorielles en représentent une part faible estimée à 800 000 euros pour 2015.

Le plafond d’emplois passe de 8 183 ETPT réalisés en exécution 2013 et 8 312 en réalisation 2014 à 8 567 ETPT en LFI 2015 et 8 763 en PLF 2016.

2. L’augmentation des moyens de fonctionnement, d’investissement et d’intervention

Les crédits hors titre 2 (fonctionnement, investissement et interventions), sont prévus à 322 millions d’euros à comparer à 317,1 millions ouverts en loi de finances initiale pour 2015 (+ 1,6 %).

La présentation des crédits dans le projet annuel de performances, au-delà de la répartition par titres et par actions, retient cinq blocs de dépenses, correspondant aux « briques de budgétisation » du programme.

Les dotations du secteur associatif habilité (SAH) représentent 224 millions en AE et CP sur les 327,3 millions d’AE et les 322 millions de CP du programme.

Ces crédits correspondent aux prestations réalisées par les établissements et services du secteur habilité justice à la demande des juges des enfants, des juges d’instruction et des magistrats du parquet. Le prix de ces prestations intègre toutes les charges pour chaque type de prise en charge : dépenses de fonctionnement, des frais de siège, de personnel, d’investissement, de provisions et de charges financières.

Les dotations au secteur public en 2016 sont de 103,3 millions d’AE et de 98,1 millions de CP.

Il est à noter que les crédits d’intervention progressent fortement de 2015 (1,7 million) à 2016 (6,1 millions). Ils sont abondés en 2016 de 2,5 millions en AE et CP dédiés au fonds national de financement de la protection de l’enfance pour la prise en charge des mineurs isolés étrangers, et ce, afin de contribuer au financement par l’État des évaluations pour la détermination de la minorité des jeunes concernés et de 2,2 millions en AE et CP destinés à la rémunération des stagiaires de la formation professionnelle dépendant de la PJJ (par transfert du programme 103 Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi).

B. LA PRISE EN CHARGE DES MINEURS DÉLINQUANTS

Le volume de prise en charge des mineurs par la protection judiciaire de la jeunesse est en diminution depuis dix ans : 159 000 mineurs avaient été pris en charge (à titre civil ou pénal) en 2002 et 137 000 en 2013.

Les effectifs pris en charge par le secteur public sont restés stables (95 000 en 2003 et 2013) quand ceux confiés au secteur associatif ont diminué, ils représentaient 63 000 mineurs en 2003 et 48 000 en 2013.

1. Les délais de prise en charge

Les délais de prise en charge pour des mesures de milieu ouvert en matière pénale diminuent et restent supérieurs à l’objectif de dix jours retenus pour 2014. Les délais moyens ont été de 13 jours en 2011 et de onze jours en 2012 et 2013, de 12 jours en 2014. Il est à noter que l’ordonnance du 2 février 1945 relative aux mineurs délinquants prescrit de ramener à cinq jours la prise en charge de certaines mesures pénales à compter du 1er janvier 2014.

2. Un taux de mesures en attente d’exécution qui augmente

Le taux de mesures en attente d’exécution, qui se situait autour de 4 % sur la période 2008-2012, est remonté à 5 % depuis 2013.

Le délai moyen annuel de prise en charge de l’ensemble des mesures pénales atteignait 28 jours en 2002 et 21 jours en 2012. Il a diminué à 20 jours en 2013 et 18,5 jours en 2014. Cette moyenne recouvre des délais très variables, selon la catégorie de mesures : le délai moyen pour un placement, qui doit souvent être réalisé dans des délais particulièrement brefs, était de 5 jours en 2002 et de 2,5 jours en 2012, il est remonté à 4,2 jours en 2014. Par opposition, une peine à exécuter en milieu ouvert, comme un travail d’intérêt général (TIG) ou une réparation, demande au service éducatif une préparation (définition du TIG ou de la réparation à faire réaliser par un mineur particulier, identification de la personne publique ou association où sera exécutée la mesure). Le délai de 55 jours en 2002 a été ramené à 36 jours en 2012 et 32 jours en 2014.

3. La forte augmentation du nombre de sanctions éducatives

En France, les mineurs capables de discernement sont pénalement responsables, leur responsabilité pénale étant atténuée en fonction de leur âge. Les sanctions éducatives qui peuvent leur être imposées sont décidées suivant les cas par le juge des enfants, le tribunal pour enfants ou la cour d’assises des mineurs. Elles doivent rechercher le relèvement éducatif et moral du mineur.

Les éducateurs de la protection judiciaire de la jeunesse interviennent dans la mise en œuvre de certaines sanctions éducatives.

3 144 sanctions éducatives ont été suivies par les services du secteur public de la PJJ en 2014 (à comparer à 3 537 en 2013) contre 930 en 2007. Elles sont donc en forte progression constante sur l’ensemble de la période, sauf de 2013 à 2014. Les stages de formation civique sont les sanctions les plus fréquentes (68 % du total) suivies par les réparations (27 % du total des sanctions éducatives en 2013 et 15 % en 2007).

La durée des aides et réparations a été ramenée de 6 mois en 2007 à 5 mois en 2013.

Les mineurs sujets de ces sanctions éducatives sont âgés pour moitié de 16 à 17 ans, 29 % ont entre 13 et 15 ans, 20 % étant âgés en fin d’année de 18 ans et plus.

V. LE PROGRAMME ACCÈS AU DROIT ET À LA JUSTICE : QUELLE SOLUTION ?

La politique publique en matière d’accès au droit et à la justice doit permettre à toute personne qui le souhaite d’avoir connaissance de ses droits et de les faire valoir, quelle que soit sa situation sociale et où qu’elle se situe sur le territoire. La loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 sur l’aide juridique, modifiée et complétée par la loi du 18 décembre 1998 relative à l’accès au droit et à la résolution amiable des conflits, constitue le socle de cette politique dont le programme 101 met en œuvre ses différentes composantes.

L’aide juridictionnelle totale ou partielle consiste en la prise en charge par l’État de tout ou partie des frais relatifs à un procès (rétribution d’avocat, rétribution d’huissier de justice, frais d’expertise, etc.) ou à une transaction (rétribution de l’avocat). Le coût de l’aide juridictionnelle est élevé, de l’ordre de 400 millions d’euros, et son financement a fait, depuis de nombreuses années, l’objet de réformes importantes destinées à en limiter la charge directe pour l’État : mise en place en 2011 d’une contribution pour l’aide juridique (CPAJ) affectée directement au Conseil national des barreaux (CNB) et supprimée en 2014 et nouvelles affectations de recettes en 2015 affectées directement au CNB, pour le financement de l’aide juridictionnelle, d’un montant de 43 millions d’euros.

Le calibrage du budget 2016 traduit la mise en œuvre d’une réforme importante dont le coût estimé donne lieu à l’affectation supplémentaire de 25 millions nouveaux au CNB (68 millions au total).

L’action 01 Aide juridictionnelle du programme est dotée de 336,7 millions en PLF 2016, auxquels s’ajoutent 68 millions de ressources extrabudgétaires (63 millions de taxes affectées et 5 millions de prélèvements sur la trésorerie des caisses des règlements pécuniaires des avocats – CARPA) pour aboutir à une somme de ressources de 404,7 millions.

Au sein de l’action 01, la principale dépense est celle de l’aide juridictionnelle stricto sensu (6), avec une prévision de dépenses de 310,5 millions en PLF 2016. Il s’y ajoute les aides aux interventions non juridictionnelles des avocats (63,8 millions), les aides à la médiation (3 millions) et les aides accordées aux barreaux dans le cadre de la contractualisation locale (27,4 millions).

Le programme Accès au droit et à la justice ouvre des crédits pour quatre autres catégories distinctes de dépenses correspondant aux actions 02 à 05 : le développement de l’accès au droit et du réseau judiciaire de proximité (7 millions), l’aide aux victimes (20 millions), la médiation familiale et les espaces de rencontre (3,25 millions). L’indemnisation des avoués ne fait pas l’objet d’une dotation en PLF 2016.

Les crédits de paiement du programme 101, de montant quasi-équivalent aux autorisations d’engagement, inscrits dans le projet de loi de finances pour 2016 s’élèvent à près de 367 millions d’euros, en hausse de 2,6 % par rapport à 2015.

Le programme retrace presque exclusivement des crédits d’intervention et quelques moyens de fonctionnement.

CRÉDITS DU PROGRAMME ACCÈS AU DROIT ET À LA JUSTICE (CP)

(en millions d’euros)

 

LFI 2014

Exécution 2014

LFI 2015

PLF 2016

Évolution
2015/2016
(%)

01. Aide juridictionnelle

345,4

360,5

332,4

336,7

+ 1,31

02 Développement de l’accès au droit et du réseau judiciaire de proximité

5,5

4,8

5,2

7,0

+ 35,49

03. Aide aux victimes

13,8

12,9

16,9

20,0

+ 18,04

04. Médiation familiale et espaces de rencontre

3,3

3,4

3,3

3,3

– 0,41

05 Indemnisation des avoués

   

0

0

0

Total

368,0

381,6

357,7

367,0

+ 2,58

Source : documents budgétaires.

A. UNE RÉFORME GLOBALE AU FINANCEMENT INCERTAIN

Le Gouvernement engage une réforme globale dont le financement est incertain, moins en ce qui concerne les recettes que les dépenses. Cette réforme est engagée après concertation, toutefois la concertation n’est pas terminée et il est probable que l’équilibre du dispositif proposé va évoluer au gré de la discussion budgétaire.

1. Une réforme globale

Après une large concertation engagée en décembre 2014 avec les professionnels du droit, le secteur associatif, ainsi que des magistrats et greffiers en chef issus de juridictions de taille différente, le ministère engage une réforme importante ayant pour objectif affiché de mieux répondre à la demande de droit, mieux rétribuer le travail des acteurs et tendre vers une meilleure gouvernance et une gestion optimisée de l’aide juridictionnelle. Les évolutions portent sur les points suivants.

La révision et la restructuration du barème de rétribution des missions rassemblées dans un document unique doit apporter clarification, cohérence, une meilleure pondération de la rétribution des procédures, pour refléter la charge effective de chacune d’elles, et la rétribution de nouvelles missions comme la médiation.

La suppression de la modulation géographique des unités de valeur (par catégorisation des barreaux en dix groupes) et l’adoption d’une unité de valeur unique, dont le montant de 24,20 euros au lieu de 22,50 euros, sera supérieur au montant moyen pondéré des unités de valeur modulées actuelles, représente un coût estimé à 20 millions en année pleine et 5 millions en 2016.

Le relèvement du seuil d’admission à l’aide juridictionnelle totale applicable à une personne seule, de 941 euros actuellement à 1 000 euros, a pour but de porter le nombre de bénéficiaires de 888 000 personnes environ en 2015 à 990 000 personnes en 2016 (coût estimé à 28 millions en année pleine et 7 millions en 2016). La réforme concomitante de la grille d’admission à l’aide juridictionnelle partielle est présentée comme une mesure de simplification avec la réduction du nombre de tranches.

Ces deux ensembles de mesures, la réforme du barème et celle de la grille d’admission à l’aide juridictionnelle partielle, sont conçus pour générer également des économies à hauteur de 33 millions en année pleine et de 8 millions en 2016. Ces économies de 33 millions en année pleine comprennent une part relativement minime d’aide juridictionnelle partielle : 0,25 million en 2016 et 1 million en année pleine 2017. Tout le reste (7,75 millions en 2016 et 32 millions en année pleine) provient des économies de barème, notamment en matière de garde à vue et pour certaines procédures comme le divorce par consentement mutuel avec le même avocat, selon les précisions obtenues par le Rapporteur spécial.

On peut s’interroger sur l’effectivité des économies prévues, en considération du fait qu’elles devraient peser principalement sur les rémunérations des avocats, qui ont déjà manifesté leur hostilité au prélèvement de 5 millions d’euros prévu sur la trésorerie des CARPA.

La réforme prévoit également l’allocation selon un mode contractuel d’une partie des ressources financières consacrées à l’assistance des justiciables. Au niveau de chaque barreau, il sera possible :

– de mettre en œuvre des actions organisationnelles ou de formation afin de renforcer la qualité des interventions effectuées par les avocats du barreau ;

– de prendre en compte les contraintes locales sur la réalisation des missions, l’engagement particulier des avocats de barreaux en faveur des plus démunis, la technicité de certains contentieux, la volonté de mettre l’accent sur tel ou tel type de contentieux ;

– le cas échéant, d’adapter la rétribution versée à l’avocat en application du barème, selon des critères définis en considération des spécificités locales (forfaitisation ou ajustement du nombre d’unités de valeur).

Les crédits existants dédiés à la contractualisation, crédits dédiés aux protocoles et conventions (7,8 millions en PLF 2015) et ceux de la modulation géographique (19 millions) seront abondés d’une enveloppe supplémentaire de 16 millions en 2016 et 25 millions en année pleine, pour généraliser et étendre les protocoles et conventions aux barreaux non signataires tout en étendant le périmètre à de nouveaux contentieux (par exemple, les hospitalisations sans consentement, les dossiers relevant de la compétence des tribunaux des affaires de sécurité sociale).

Afin de développer le recours aux modes de règlement alternatifs des litiges, un nouveau volet de l’aide juridique ouvre la possibilité de rétribuer l’avocat et le médiateur assistant une partie bénéficiaire de l’aide juridictionnelle dans le cadre d’une médiation judiciaire ou d’une médiation conventionnelle donnant lieu à un accord homologué et, en cas d’injonction, à rencontrer un médiateur. Le coût prévisible est de 3 millions d’euros en 2016 et 8 millions en 2017.

Enfin, sur l’action 02, il est prévu 2 millions pour le développement des consultations juridiques préalables à la saisine du juge, afin d’analyser le bien-fondé de la demande du justiciable, de faciliter, le cas échéant, l’instruction de sa demande d’aide juridictionnelle et de proposer, si nécessaire, une orientation vers d’autres intervenants, notamment vers un médiateur. Le dispositif de consultations sera mis en œuvre dans le cadre d’une convention entre les conseils départementaux de l’accès au droit (CDAD) et les tribunaux de grande instance.

Le coût global net de l’ensemble de la réforme est de 25 millions en 2016 et 50 millions en 2017.

Le Rapporteur spécial considère que l’accès au droit peut être assuré par des orientations autres que celles qui consistent à augmenter les dépenses budgétaires et les taxes affectées. Il est depuis longtemps convaincu de l’intérêt à mettre en œuvre une politique de développement des contrats de protection juridique.

2. Un financement incertain

L’équilibre financier des moyens affectés à l’accès au droit à partir de 2016 ne semble pas certainement assuré, les incertitudes étant plus élevées pour les dépenses que pour les ressources.

a. Des recettes mieux assurées que les dépenses

Le financement prévu de l’aide à l’accès au droit en 2016 doit bénéficier de moyens de deux ordres : 68 millions de recettes extrabudgétaires affectées au CNB, prévues par l’article 15 du projet de loi de finances, dont le commentaire est paru dans le tome II du rapport général sur le PLF 2016 (7).

L’article 35 de la loi de finances pour 2015 avait déjà prévu, pour 2015, un ensemble de recettes extrabudgétaires permettant d’affecter de nouveaux moyens à l’aide juridictionnelle, pour 43 millions d’euros :

– il ajoutait une fraction supplémentaire de 2,6 points au taux de la taxe sur les conventions d’assurance qui pèse actuellement sur les assurances de protection juridique au taux de 9 %. Le produit correspondant a été affecté dans la limite de 25 millions d’euros par an au CNB ;

– il prévoyait une augmentation des droits forfaitaires de procédure perçus à l’occasion des décisions des juridictions répressives, permettant l’affectation au CNB de 7 millions d’euros ;

– il prévoyait une augmentation des actes des huissiers, permettant l’affectation à la même structure d’une enveloppe complémentaire de 11 millions d’euros.

Les 68 millions de recettes extrabudgétaires se décomposent, d’une part, en un accroissement de la taxe sur les contrats d’assurance de protection juridique déjà majorés l’an dernier pour un rendement de 25 millions en 2015 (+ 10 millions) et de la taxe forfaitaire sur les actes d’huissier déjà majorée l’an dernier pour un rendement de 11 millions en 2015 (+ 10 millions) et, d’autre part, une contribution de la profession d’avocat par le biais de la mobilisation des produits financiers des CARPA (+ 5 millions). Cela étant, le dispositif prévu a évolué peu avant le dépôt du projet de loi de finances puisque les amendes pénales font l’objet d’une affectation au CNB pour 28 millions alors que la taxe forfaitaire sur les actes d’huissier et les droits fixes de procédure, dont une fraction était également, depuis la LFI pour 2015, affectée au CNB (pour 7 millions), sont réaffectés au budget général de l’État, pour 18 millions.

En définitive, la recette extrabudgétaire prévue pour 2016 doit s’élever à 68 millions pour le CNB dont 28 millions par affectation d’une fraction du produit des amendes pénales, 35 millions de taxe sur les contrats d’assurance de protection juridique et 5 millions de la trésorerie des CARPA.

Il s’y ajoute, des dotations budgétaires, pour l’action 01, permettant une prévision de dépenses de 287 millions pour la rémunération des avocats par les CARPA et de 23,4 millions pour celle des autres auxiliaires de justice (310,5 millions pour l’aide juridictionnelle stricto sensu), et de 94,3 millions pour les autres postes de dépenses de l’action 01. Les actions 02 à 04 portent une part mineure des crédits prévus sur le programme, 30,25 millions d’euros.

Ces recettes peuvent être considérées comme réalistes, quoique susceptibles d’évoluer pendant la discussion budgétaire.

b. Un calibrage incertain des dépenses

Les prévisions de dépenses sont déjà rendues aléatoires par la mise en œuvre habituelle d’amendements de réduction de crédits pendant la discussion budgétaire, la mise en réserve de précaution puis les annulations, qui tendent à diminuer les moyens prévus par le PLF et réduire les crédits effectivement disponibles.

Les prévisions de dépenses sont par nature plus incertaines, surtout à l’examen des paramètres de dépenses et des gestions passées (2014) ou en cours (2015).

C’est ainsi que de 2012 à 2014, la consommation des crédits du programme 101 a connu une forte augmentation et s’est élevée à 381,7 millions d’euros en 2014 au lieu de 337,9 millions d’euros en 2013 (+ 13 %) et 311,1 millions d’euros pour les crédits de paiement en exécution 2012. Le taux de consommation est très élevé.

Il est à noter, qu’en 2013, la consommation des crédits avait été contenue dans l’enveloppe ouverte par la LFI, alors que ce n’est pas le cas en 2014, le dépassement s’élevant à 3,7 %. Ce dépassement est dû au versement de 32 millions d’euros au Fonds d’indemnisation des avoués, crédits ouverts à hauteur de 15,9 millions par un décret d’avance du 2 décembre 2014 et par la mobilisation de la réserve de précaution. Les dépenses d’aide juridictionnelle stricto sensu, de 273,3 millions d’euros, ont été inférieures en 2014 aux montants ouverts en LFI (287,9 millions) mais très supérieures aux dépenses de 2013 (257,5 millions). Ce résultat est d’autant moins satisfaisant qu’il intègre un reliquat de recettes de contribution à l’aide juridictionnelle, non budgété en LFI 2014, de 27 millions d’euros, et la dépense effective a excédé les 300 millions d’euros.

La dépense d’aide juridictionnelle est donc toujours en forte augmentation et ce poste budgétaire n’est toujours pas maîtrisé. Symétriquement, les dépenses dites discrétionnaires ont été toutes en 2014 d’un montant inférieur aux dotations de la LFI : associations d’aide aux victimes, soutien aux associations d’accès au droit, assistance aux détenus, aides à la garde à vue.

Le Rapporteur spécial s’interrogeait l’an dernier sur le caractère réaliste du calibrage budgétaire du PLF 2015. En effet, la ressource dédiée au seul financement de l’aide juridictionnelle par la rétribution des avocats s’élevait à 272,3 millions d’euros (229,3 de dotation budgétaire et 43 de ressources affectées au Conseil national des barreaux). Cette dotation était exactement identique au calibrage de la LFI 2014, compte tenu de 11,2 millions d’euros d’économies non constatées sur la démodulation (272,3 = 261,1+ 11,2).

Le calibrage de la ressource correspondait en PLF 2015 au financement prévisionnel de 756 600 missions au coût unitaire de 360 euros TTC, dans l’hypothèse d’une stabilité des délais de paiement et du volant de trésorerie des CARPA en fin d’année. On peut s’interroger sur le caractère réaliste de ce calibrage, qui repose sur un coût unitaire équivalent à celui constaté en 2013, pour un nombre de missions nettement inférieur (788 383 en 2013). Il est à noter qu’en 2014 791 448 missions avaient été financées pour un coût unitaire de 359,41 euros. Le défaut de financement semble donc résulter davantage de la sous-estimation du nombre de missions que d’un coût unitaire moyen apparemment stable.

La gestion 2015 est également problématique. La réserve de précaution, portée à 8 % en 2015, n’a pas été répartie de manière uniforme entre les quatre briques de budgétisation du programme 101. Les actions 01 Aide juridictionnelle et 05 Fonds d’indemnisation des avoués ont supporté une réserve au taux standard de 8 %. Les actions 02 Développement de l’accès au droit et du réseau judiciaire de proximité et 04 Médiation familiale et espaces de rencontre n’ont pas subi de mise en réserve. L’action 03 Aides aux victimes a supporté le complément de la réserve de précaution, ce qui correspond à un taux de 11,6 % en autorisations d’engagement (AE) et de 11,9 % en crédits de paiement (CP).

Deux décrets d’avance et d’annulation ont diminué de 6,5 millions les dotations de l’action 01 et de 0,8 million celles du Fonds d’indemnisation des avoués. Le projet annuel de performances pour 2016 précise que le socle du calibrage budgétaire pour 2016 est de 381,7 millions pour l’action 01, montant attendu en l’absence de réforme.

La dépense constatée d’aide juridictionnelle lato sensu de l’action 01 a été de 370,6 millions en 2013, 364,5 millions en 2014 et était prévue à 379,3 millions par le PLF 2015, montant ramené à 375,4 millions en LFI.

Une autre ligne de dépenses permet également d’apprécier le dynamisme de l’aide juridictionnelle : celle des versements effectifs des CARPA au titre de la rétribution des avocats. Ils se sont élevés à 248,8 millions pour 775 069 missions en 2010, 259,7 millions pour 745 533 missions en 2011, 277,4 millions pour 780 921 missions en 2012, 282,4 millions pour 788 383 missions en 2013 et 284,5 millions pour 791 448 missions en 2014.

Les paiements des CARPA augmentent comme le nombre de missions correspondantes alors que les admissions à l’aide juridictionnelle semblent marquer un palier depuis 2013. Les dépenses constatées ne sont donc pas exactement corrélées aux admissions.

Il existe donc un doute sérieux sur la détermination du socle budgétaire retenu pour l’action 01 en 2016, 381,7 millions d’euros, comme sur l’effectivité des économies annoncées.

DEMANDES D’AIDE JURIDICTIONNELLE

(en nombre de dossiers)

 

2009

2010

2011

2012

2013

2014

Demande

1 057 777

1 068 927

1 032 577

1 065 721

1 080 203

1 056 497

Évolution

+ 1,8 %

+ 1,1 %

- 3,4 %

+ 3,2 %

+ 1,4 %

– 2,2%

Acceptation

901 630

912 191

882 607

915 563

919 625

896 786

Évolution

+ 1,3 %

+ 1,2 %

- 3,2 %

+ 3,7 %

+ 0,4 %

– 2,5%

Taux d’acceptation

85,2

85,3

85,5

85,9

85,1

84,9

Source : ministère de la Justice.

Un dernier facteur d’incertitude pèse sur le cadrage du budget 2016. La loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, dite « Loi Macron », comporte en différents articles (42, 50, 51, 57, 58, et 63) des dispositions intéressant les avocats. Elles ont toutes été déclarées conformes à la Constitution lorsqu’elles étaient déférées au Conseil constitutionnel sauf le paragraphe III de l’article 50, qui visait à instituer une contribution à l’accès au droit et à la justice.

Le I de l’article 50 prévoit d’organiser un mécanisme de péréquation qui, assis sur les tarifs proportionnels applicables aux transactions portant sur des biens ou droits immobiliers d’une valeur supérieure à un seuil fixé par arrêté, opérerait non seulement une redistribution interne aux professions juridiques et judiciaires concernées (en assurant la viabilité économique et financière des offices amenés à réaliser majoritairement des actes peu, voire pas rémunérateurs) mais aussi une redistribution externe à ces professions, en abondant, au niveau national, un fonds interprofessionnel destiné à financer l’aide juridictionnelle, l’accès au droit et les maisons de justice et du droit.

Le III de l’article 50 prévoyait de surcroît l’institution, à compter du 1er janvier 2016, d’une contribution annuelle dénommée « contribution à l’accès au droit et à la justice », destinée à assurer le financement du fonds interprofessionnel de l’accès au droit et à la justice.

Cette contribution devait être due par les personnes physiques ou morales titulaires d’un office de commissaire-priseur judiciaire, de greffier de tribunal de commerce, d’huissier de justice ou de notaire ou exerçant à titre libéral l’activité d’administrateur judiciaire ou de mandataire judiciaire, d’avocat, pour les droits et émoluments perçus en matière de saisie immobilière, de partage, de licitation et de sûretés judiciaires.

La contribution à l’accès au droit et à la justice était assise sur la valeur hors taxes de tout bien ou sur le montant hors taxes de tout droit, pour lequel le tarif est fixé proportionnellement à ceux-ci, et qui est supérieur à un seuil de 300 000 euros. Le taux de la contribution devait fixer par arrêté conjoint du ministre de la justice et du ministre chargé du budget entre 0,05 et 0,2 %.

Le Conseil constitutionnel a jugé (considérant 48 de sa décision 2015-715 DC), « d’une part, que les prestations faisant l’objet d’un tarif proportionnel sont déterminées par le pouvoir réglementaire et, d’autre part, que le seuil de 300 000 euros peut être modifié par arrêté ; que, par suite, en habilitant le pouvoir réglementaire à fixer les règles concernant l’assiette de la taxe contestée, le législateur a méconnu l’étendue de sa compétence ».

Le projet de loi de finances pour 2016 pourrait comporter, si un amendement était adopté à cette fin, une disposition rétablissant le régime de la contribution à l’accès au droit et à la justice en précisant, comme il se doit, son assiette, son taux et ses modalités de recouvrement. Il s’agirait alors de créer une nouvelle ressource qui, dans sa définition par la loi du 6 août 2015, était destinée à participer au moins partiellement au financement de l’aide juridictionnelle.

B. LES PRINCIPAUX POSTES DE DÉPENSES

1. La rétribution des « autres auxiliaires de justice »

La dotation destinée à la rétribution des autres auxiliaires de justice et des avocats au Conseil d’État et des traducteurs s’élèvera à 23,4 millions d’euros en 2016, à comparer à 25 millions en PLF 2015.

2. L’aide à l’intervention de l’avocat au cours de la garde à vue

Les aides à l’intervention de l’avocat au cours d’une garde à vue, d’une retenue douanière ou d’une retenue d’une personne étrangère pour vérification de son droit de séjour ou de circulation, en matière de médiation et de composition pénales, au cours d’une procédure disciplinaire ou d’une mesure d’isolement concernant un détenu représentent au total 42,5 millions en 2016, à comparer à 50 millions en projet de loi de finances pour 2015.

De 2010 et 2014, le nombre de gardes à vue a notablement diminué : 523 069 en 2010, 453 817 en 2011, 380 375 en 2012, 365 368 en 2013 et 364 368 en 2014 (hors délits routiers et hors départements d’outre-mer).

En 2014, les avocats ont reçu 46,2 millions d’euros d’aide au titre de leurs interventions lors d’une garde à vue, soit une diminution de 1,6 % par rapport à 2013. Les CARPA ont versé aux avocats 27,9 millions d’euros au 31 juillet 2015, soit une diminution de 3,3 % par rapport aux sept premiers mois de 2014. La prévision de versements sur l’ensemble de 2015 se situe autour de 46 millions.

3. L’aide à l’intervention de l’avocat au cours d’une audition libre ou d’un défèrement devant le procureur de la République

La loi n° 2014-535 du 27 mai 2014 portant transposition de la directive 2012/13/UE du Parlement européen et du Conseil, du 22 mai 2012, relative au droit à l’information dans le cadre des procédures pénales, dispose qu’une personne entendue librement bénéficie du droit d’être assistée par un avocat choisi par elle ou désigné d’office, à sa demande, par le bâtonnier de l’ordre des avocats. La loi précise que les frais d’assistance ne sont pas à la charge de la personne entendue si elle remplit les conditions d’accès à l’aide juridictionnelle.

L’aide juridique prend également en charge l’intervention de l’avocat en cas de défèrement devant le procureur de la République (article 8 de la loi n° 2014-535 du 27 mai 2014), en matière de médiation et de composition pénales, ou au cours d’une procédure disciplinaire ou d’une mesure d’isolement concernant un détenu.

21,4 millions sont prévus pour ces deux types d’interventions en 2016.

4. Les aides à la médiation

Comme précédemment indiqué, il s’agit d’un nouveau volet de l’aide juridique qui consiste à rétribuer les avocats et les médiateurs intervenant lors d’une médiation judiciaire, lorsque la juridiction compétente est saisie pour la première fois aux fins d’homologation d’un accord intervenu à l’issue d’une médiation ou en cas d’injonction à rencontrer un médiateur. Les crédits prévus en 2016 sont de 3 millions et le coût en année pleine de ce nouveau dispositif est estimé à 8 millions.

5. Les aides aux barreaux dans le cadre d’une contractualisation locale

La réforme engagée prévoit la mise en place d’un dispositif de contractualisation entre les barreaux et les juridictions élargies, systématisée à l’ensemble de barreaux, et étendu à tout le domaine juridictionnel ou non-juridictionnel.

Le contenu de chaque convention sera défini localement en fonction des priorités et des contraintes identifiées par les acteurs de l’aide juridique.

Ce nouveau dispositif remplace deux dispositifs préexistants reposants sur, d’une part, les protocoles conclus avec une quarantaine de barreaux et relatifs à l’amélioration de la défense en matière pénale et, d’autre part, les subventions versées à une soixantaine de barreaux pour l’organisation matérielle de l’assistance auprès des personnes placées en garde à vue.

Le coût des aides accordées par voie contractuelle est estimé à 27,4 millions et tient compte du redéploiement du coût des dispositifs préexistants (6,6 millions), de la compensation à due concurrence de la suppression de la modulation géographique actuelle de l’UV (4,8 millions la première année) et d’une mesure nouvelle de 16 millions pour le développement de la contractualisation.

C. LES QUATRE AUTRES ACTIONS D’ACCÈS AU DROIT ET LA JUSTICE

1. Le développement de l’accès au droit et du réseau judiciaire de proximité

Cette action vise à mettre en œuvre une politique d’accès au droit tournée vers l’ensemble des citoyens, à partir de structures et de dispositifs mis en place dans un cadre partenarial.

Elle s’appuie sur 100 conseils départementaux de l’accès au droit (CDAD) constitués en groupements d’intérêt public (GIP). Les CDAD proposent un accès au droit généraliste assuré par les professionnels du droit (avocats, notaires, huissiers, etc.) qui assurent des consultations juridiques gratuites.

Un réseau judiciaire de proximité constitué de 137 maisons de justice et du droit (MJD) existait en juillet 2015, complété par environ 1 200 lieux d’accès au droit, dont 154 en établissements pénitentiaires. Les MJD assurent une présence judiciaire de proximité et concourent à la prévention de la délinquance, à l’aide aux victimes et à l’accès au droit.

Cette action sera dotée de 7 millions d’euros en 2016.

2. L’aide aux victimes

La politique d’aide aux victimes vise à apporter un soutien matériel et psychologique aux victimes, le plus rapidement possible après les faits, à les accompagner jusqu’au terme du parcours judiciaire en les aidant à organiser plus facilement la défense de leurs intérêts et à accomplir les démarches pour leur indemnisation.

L’action sera dotée, en 2016, de crédits d’intervention d’un montant de 20 millions d’euros, en augmentation de 18 %.

3. La médiation familiale et les espaces de rencontre

Cette action repose sur la volonté de développer une résolution amiable des conflits dans le domaine familial et vise à assurer le maintien des liens entre parents et enfants grâce à l’intervention d’un réseau d’associations de médiation familiale et d’espaces de rencontre. Les crédits d’intervention pour 2016, d’un montant de 3,2 millions d’euros, sont stables depuis plusieurs années.

4. L’indemnisation des avoués

L’indemnisation des avoués ne donne pas lieu à proposition d’ouverture de crédits dans le PLF 2016.

Le Fonds d’indemnisation de la profession d’avoués (FIDA) a été créé par la loi du 25 janvier 2011 portant réforme de la représentation devant les cours d’appel pour assurer le financement des indemnités dues aux avoués dont l’office a été supprimé. L’équilibre financier du Fonds est assuré par l’affectation d’un droit de timbre perçu sur les parties à l’appel. La gestion comptable et financière du FIDA est assurée par la Caisse des dépôts et consignations (CDC), qui a consenti successivement trois avances afin de permettre le règlement des indemnisations lors des exercices 2012 à 2014, pour un total de 397 millions d’euros.

Toutefois le constat d’un important déséquilibre financier à compter de la fin 2014 a conduit à la réalisation, au premier semestre 2014, d’un audit de l’IGSJ, qui a permis de mieux en comprendre les causes de ce déséquilibre :

– un surcoût des indemnisations versées ayant atteint près de 130 millions ;

– un contentieux important (de l’ordre de 13,9 millions sur les requêtes déposées) ;

– un rendement du produit du « droit avoué » inférieur de moitié aux prévisions (23 millions par an au lieu de 41,5 millions).

En conséquence, une ouverture de crédit, par le décret d’avance du 2 décembre 2014 a permis de contribuer au financement d’une subvention d’équilibre de 32,2 millions d’euros, versée au FIDA afin de lui permettre d’honorer l’annuité 2014 des remboursements des trois avances faites par la CDC d’un montant total de 43 millions d’euros.

D’autre part, la LFI 2015 a prévu une augmentation de 150 euros à 225 euros du droit de timbre en appel et un allongement de trois ans de sa durée de perception (jusqu’à fin 2026), ce qui permet de prévoir une recette de 31 millions en 2015 et 32 millions par an à partir de 2016.

Parallèlement, l’échéancier de remboursement des avances accordées par la Caisse des dépôts a été renégocié, en tenant compte à la fois de l’allongement de la durée de perception du droit de timbre et de la baisse des taux d’intérêt constatée sur le marché monétaire. Cette renégociation a abouti à la signature d’une nouvelle convention de crédit avec la CDC le 10 août 2015. Elle remplace les trois conventions précédentes, allonge l’échéancier de remboursement de trois ans au taux de 2,55 % contre un taux moyen de 2,75 % auparavant et décale d’un mois l’échéance annuelle. L’annuité de remboursement est ainsi ramenée de 42,8 millions à 33 millions d’euros en 2015 puis 32,3 millions les années suivantes.

Au total, compte tenu de la trésorerie de 4 millions du FIDA au 31 décembre 2014, l’ensemble de ces dispositions doit, selon les indications données au Rapporteur spécial, permettre d’assurer un retour à l’équilibre du FIDA en 2015 sans recourir à une nouvelle subvention de l’État.

Dans le même temps, le 2 avril 2015, la cour d’appel de Paris a rendu seize arrêts concernant vingt anciens avoués ou SCP. Au total, quinze des vingt décisions sont favorables au FIDA. Cela permet de prévoir le recouvrement, en 2015, de 1,15 million d’indemnités versées à la suite de la première instance (dont 0,8 million d’euros recouvert au 31 août 2015). En revanche 2,11 millions restent acquis aux anciens avoués dans cinq dossiers. Sur ces dossiers, le FIDA va se pourvoir en cassation.

L’analyse juridique de ces premières décisions permet en outre d’espérer que, tant dans les dossiers restant à juger en première instance que dans ceux restant à juger en appel, le FIDA obtienne des décisions favorables, sous réserve que la cour d’appel de Paris confirme sa jurisprudence. En effet, les dossiers ou les jugements de première instance défavorables au FIDA qui ont été confirmés concernent tous des SCP qui avaient refusé l’indemnisation proposée par la commission. Il n’y a qu’une dizaine d’autres SCP dans ce cas qui, pour le moment, n’ont pas introduit de contentieux, sauf en référé pour se faire verser l’offre de la commission.

De ce fait, la prévision de dépenses n’intègre plus aucun versement aux ex-avoués au titre du contentieux en 2015 et les années suivantes et 3,3 millions supplémentaires sont susceptibles d’être recouvrés au vu des prochaines décisions de la cour d’appel à compter de 2016.

Les 0,8 million de crédits ouverts en LFI 2015 à ce titre ont ainsi fait l’objet d’une annulation dans le cadre du décret d’annulation du 9 juin 2015.

VI. LE PROGRAMME DE CONDUITE ET PILOTAGE

Le programme 310 Conduite et pilotage de la politique de la justice regroupe les moyens de l’état-major, des directions et des services dont les compétences d’intérêt commun pour le ministère doivent être mutualisées. Ses crédits sont retracés en six actions : État-major, Activité normative, Évaluation, contrôle, études et recherche, Gestion de l’administration centrale, Action informatique ministérielle et Action sociale ministérielle.

Les objectifs et les priorités sont inchangés. Le programme poursuit un double objectif : améliorer la qualité des prestations de soutien, notamment dans les domaines de la gestion des ressources humaines et des projets informatiques et prendre une part active à la modernisation de l’organisation et du fonctionnement du ministère.

Les deux priorités inchangées reposent sur l’action du secrétariat général, qui contribue à mettre en œuvre la politique de remise à niveau du parc immobilier pénitentiaire et judiciaire.

La seconde priorité s’inscrit dans le cadre de la politique de modernisation de l’action publique menée par le Gouvernement : le ministère s’est engagé dans un ambitieux programme de modernisation informatique.

A. LES MOYENS PRÉVUS POUR 2016

Les autorisations d’engagement, d’un montant de 374,7 millions d’euros en 2016, sont prévues en hausse de 5,8 %.

Les crédits de paiement du programme 310 Conduite et pilotage de la politique de la justice sont proposés en 2016 à 310,8 millions d’euros (– 1,5 % par rapport à 2015).

CRÉDITS DU PROGRAMME CONDUITE ET PILOTAGE DE LA POLITIQUE DE LA JUSTICE

(en millions d’euros)

Numéro et intitulé de l’action/sous action

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

LFI 2015

PLF 2016

Évolution
2015/2016

(%)

LFI 2015

PLF 2016

Évolution
2015/2016

(%)

01 – État-major

9,8

10,3

+ 5,0

9,8

10,3

+ 5,0

02 – Activité normative

22,5

23,3

+ 3,7

22,5

23,3

+ 3,7

03 – Évaluation, contrôle, études et recherche

16

16,5

+ 2,7

16

16,5

+ 2,7

04 – Gestion de l’administration centrale

156,2

95,6

– 38,8

118,5

113,7

– 4,0

09 – Action informatique ministérielle

113,8

194,0

+ 70,6

112,9

111,9

– 0,8

07 – Action sociale ministérielle

35,8

35,0

– 2,2

35,8

35,0

– 2,2

Total

354,1

374,7

+ 5,8

315,4

310,8

– 1,5

Source : projet annuel de performances.

Les dépenses de personnels de titre 2 représentent 44 % des crédits prévus en 2016, soit 137,2 millions, elles augmentent de 4,4 %. Dans le cadre de la modernisation et de l’optimisation de l’organisation du ministère de la Justice, le schéma d’emploi prévu au PLF 2016 sur le programme Conduite et pilotage de la politique de la justice prévoit la suppression de 24 emplois, en fait de 36 ETPT, compte tenu de 12 transferts entrants.

L’augmentation de 5,8 millions des dépenses de personnel, alors que les emplois diminuent, mérite quelques explications. La contribution d’équilibre au CAS Pensions en constitue la plus grande part, 3,4 millions, et des rétablissements de crédits pour 2,3 millions.

B. LES PRIORITÉS DE 2016

L’année 2016 sera marquée au plan immobilier par deux dossiers importants.

Les implantations immobilières de l’administration centrale comprennent actuellement neuf sites parisiens dont sept sites en location (Madeleine, Saint-Fiacre, Renard, Michelet-Javel, Thoreton, Rivoli et Saint-Fargeau) et deux sites propriétés de l’État (13, place Vendôme et Halévy) ainsi que des sites en province où sont implantées les neuf plateformes interrégionales du secrétariat général chargées d’apporter leur soutien aux juridictions et aux services déconcentrés.

L’aboutissement de l’opération « Chancellerie 2015 », qui se concrétise d’une part par le regroupement des services centraux du secrétariat général, des directions des services judiciaires, de l’administration pénitentiaire et de la protection judiciaire de la jeunesse dans le parc du Millénaire (19arrondissement de Paris, Millénaire 3), devrait se traduire par des déménagements s’effectuant d’août 2015 à février 2016.

Cette opération permet la libération dès 2015 de trois sites (Renard, Saint-Fiacre et Rivoli). Les services de la protection judiciaire de la jeunesse, les services comptables du secrétariat général et ceux du contrôle budgétaire restent sur le site Michelet en 2015 et rejoindront le Millénaire 3 en février 2016. Le site Michelet sera libéré en 2016.

La relocalisation des directions normatives (direction des affaires criminelles et des grâces et direction des affaires civiles et du sceau) sur le site historique de Vendôme doit suivre. Le transfert du secrétariat général et de la direction des services judiciaires (DSJ) du site Vendôme vers le site du Millénaire 3, permet l’installation de la direction des affaires civiles et du sceau (DACS) sur le site Vendôme et la libération du site Madeleine le 31 décembre 2015.

Le ministère poursuit également son ambitieux programme de modernisation informatique (194 millions d’AE et 113,7 millions de CP en 2016), avec notamment :

– le développement de PORTALIS pour la chaîne civile, qui est un élément essentiel du chantier pour la « Justice du XXIe siècle » ;

– la généralisation de GENESIS pour l’administration pénitentiaire dont la fin de déploiement est prévue pour mi-2016 ;

– la plate-forme nationale d’interceptions judiciaires (PNIJ) dont le déploiement est engagé ;

– le partage d’informations dans le cadre des procédures pénales entre forces de l’ordre et juridictions et l’extension du système d’information de la chaîne pénale, CASSIOPEE, aux cours d’appel ;

– la modernisation du casier judiciaire ; la réalisation de la pré-liquidation de la paye dans le système d’information RH du ministère, HARMONIE ;

– l’aide à l’évaluation des politiques judiciaires et la mise à disposition des données avec la mise en place d’un système d’information décisionnel.

Le programme 310 porte également les crédits d’action sociale du ministère (35 millions en AE et CP). La priorité que constitue l’action sociale a été réaffirmée. Les crédits qui lui sont affectés permettent notamment de poursuivre une politique de logement social active dans le contexte du déménagement des services centraux au Millénaire et à horizon 2017 du tribunal de grande instance de Paris aux Batignolles, et de développer l’offre de restauration collective.

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EXAMEN EN COMMISSION

Après l’audition de Mme Christiane Taubira, ministre de la justice (voir le compte rendu de la commission élargie du 21 octobre 2015 à 21 heures (8)), la commission des finances examine les crédits de la mission Justice (M. Étienne Blanc, rapporteur spécial).

Malgré l’avis défavorable du Rapporteur spécial, la commission adopte les crédits de la mission Justice.

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ANNEXE : AUDITIONS EFFECTUÉES
PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL

– M. Bertrand Louvel, Premier président de la Cour de cassation

– Conseil national des barreaux (CNB) – MM. Jean-Bernard Thomas, Vice-président, Roland Rodriguez, vice-président ; Yves Tamet, Président de la commission Accès au droit et à la Justice et Jacques-Édouard Briand, conseiller relations avec les pouvoirs publics au CNB

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1 () Ratio Crédits Justice LFI/Dépenses budget général LFI 2015.

2 () Ratio Rémunérations d’activité/ETPT prévus ou réalisés.

3 () Ratio Rémunérations d’activité/Plafond d’ETPT.

4 () Crédits de paiement précédemment ouverts et non consommés ou à ouvrir.

5 () Transmis au président de la commission des Finances, M. Gilles Carrez, le 8 juin 2015.

6 () L’aide juridictionnelle stricto sensu correspond, selon les documents budgétaires, à la somme des fonds servant à la rétribution des avocats par les CARPA (287,1 millions de dotation en PLF 2016) et à celle des autres auxiliaires de justice (23,4 millions de dotation en PLF 2016).

7 () Rapport général, tome II, volume 1 n° 3110, du 8 octobre 2015, pages 345 à 363.

8 () http://www.assemblee-nationale.fr/14/budget/plf2016/commissions_elargies/