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N° 3110

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 8 octobre 2015.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2016 (n° 3096),

PAR Mme Valérie RABAULT,

Rapporteure Générale

Députée

——

ANNEXE N° 5

AGRICULTURE, ALIMENTATION, FORÊT
ET AFFAIRES RURALES

SÉCURITÉ ALIMENTAIRE

Rapporteur spécial : M. Éric ALAUZET

Député

____

SOMMAIRE

Pages

INTRODUCTION 5

I. UNE URGENCE : METTRE FIN À LA DIMINUTION DES CRÉDITS BUDGÉTAIRES 7

A. LA CHUTE DES CRÉDITS BUDGÉTAIRES DEPUIS 2009 7

B. LE PROJET DE BUDGET POUR 2016 POURSUIT LA DIMINUTION DES CRÉDITS 9

C. DES INDICATEURS À RÉNOVER 14

II. L’ÉVOLUTION DES RECETTES DE L’ANSES ENTRE 2015 ET 2016 18

A. DE NOUVELLES MISSIONS EN 2015 18

B. LES SUBVENTIONS POUR CHARGE DE SERVICE PUBLIC SONT EN DIMINUTION À PÉRIMÈTRE CONSTANT 19

C. LES RECETTES ISSUES DE LA FISCALITÉ AFFECTÉE, REFLET DE MISSIONS ÉLARGIES, SONT EN LÉGÈRE AUGMENTATION 21

1. L’ANSES est destinataire de taxes affectées 21

2. Le produit des conventions se monte à 12 millions d’euros 22

3. Les autres recettes propres de l’Anses 22

EXAMEN EN COMMISSION 23

ANNEXE : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL 25

L’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

À cette date, 92 % des réponses étaient parvenues au Rapporteur spécial.

INTRODUCTION

La politique de sécurité sanitaire de l’alimentation relève en France de l’action conjuguée de trois ministères, le ministère de l’agriculture, le ministère de l’économie et des comptes publics, le ministère de la santé, et d’organismes scientifiques comme l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) et l’Institut de veille sanitaire (InVs).

L’objectif de la sécurité et de la qualité sanitaires des aliments, des animaux et des végétaux au service de la santé et de la sécurité des consommateurs, dans le respect du bien-être animal et du développement durable des filières agricoles, agroalimentaires et forestières s’inscrit désormais dans le cadre des normes internationales, européennes et nationales en vigueur. Les alertes à gérer, complexes et coûteuses, procèdent parfois des dérives technologiques comme l’abus des emplois des produits phytosanitaires, les résistances aux antibiotiques, les effets nocifs des perturbateurs endocriniens, ou bien encore des conséquences du réchauffement climatique comme l’arrivée de moustiques vecteurs de nouvelles maladies. Cette politique de sécurité alimentaire insérée dans la mondialisation contribue activement à la compétitivité et à l’emploi des filières concernées.

Les administrations porteuses de cette politique sont diverses. La direction générale de la consommation, de la concurrence et de la répression des fraudes (DGCCRF) est responsable de la surveillance globale du marché et plus particulièrement de la sécurité des denrées d’origine végétale, des règles générales et spécifiques d’information du consommateur sur les denrées alimentaires, et des organismes génétiquement modifiés.

La direction générale de l’alimentation (DGAL) intervient sur l’ensemble des aspects qui concernent la production animale (avant abattage) et végétale (avant récolte), notamment l’utilisation des intrants (produits phytosanitaires, matières fertilisantes, médicaments vétérinaires) ainsi que l’hygiène et la sécurité de la production et alimentation animale. En outre, elle intervient sur l’hygiène et la sécurité des denrées d’origine animale, des abattoirs à la transformation et jusqu’à la distribution au consommateur final. Ses missions comprennent également le contrôle sanitaire et zoosanitaire des zones de production de coquillages. La DGAL met en œuvre une mission stratégique de confiance entre les citoyens français, les professionnels de l’agriculture, de l’industrie alimentaire et de la restauration, mais également les associations de consommateurs écologiques ou de défense du bien-être animal. La DGS est compétente pour l’eau potable, les eaux embouteillées et, de façon générale, intervient également en cas de crise sanitaire.

Le Rapporteur spécial souligne que ce secteur est également un secteur symbolique fort, s’agissant de domaines traditionnels d’excellence française, comme l’élevage et l’agriculture. C’est également une politique de haut niveau scientifique, car le programme 206 porte les crédits de l’Anses, chargée de l’évaluation des risques des produits alimentaires.

Outre ce rôle d’expertise, la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d’avenir pour l’agriculture a confié à l’Anses la nouvelle mission d’autoriser les produits phytopharmaceutiques, les matières fertilisantes et les supports de culture.

Autres acteurs essentiels de la chaîne de sécurité alimentaire, les entreprises ont en matière de sécurité des produits une responsabilité de premier rang. La fiabilité de leurs propres auto-contrôles, dits de premier niveau, suppose toutefois que les services de l’État interviennent a posteriori comme l’ont montré diverses affaires récentes dans les abattoirs. L’intensification de la concurrence, les pressions économiques et commerciales pèsent sur les intervenants de la chaîne alimentaire, que ceux-ci soient les producteurs, les transformateurs ou les revendeurs. Les normes européennes rendent obligatoire la présence de vétérinaires et d’auxiliaires dans les abattoirs. Sans la force de contrôle et de dissuasion des services de contrôle d’État, le risque d’une insuffisance de la surveillance et d’une multiplication des cas de fraudes, est toujours possible. La DGAL a fait le choix de faire porter la déflation de ses effectifs, issue de fortes contraintes budgétaires, sur les effectifs départementaux, d’où une forte diminution des contrôles et des suites données à ces contrôles, sévèrement critiquée par le rapport de la Cour des Comptes de février 2014 (1).

La fermeture à titre conservatoire de l’abattoir municipal d’Alès le 14 octobre 2015, a suivi la mise en ligne d’images de mauvais traitements aux animaux diffusées par l’association L214, et la mise en demeure des services de la préfecture du Gard de faire cesser les pratiques non conformes à la réglementation. Suite à la plainte déposée par l’association, le parquet a ouvert une enquête judiciaire le 15 octobre dernier, confiée à la brigade nationale d’enquêtes vétérinaires.

Le Rapporteur spécial, tout en soulignant lutilité du réseau des abattoirs de proximité, à condition que les réglementations protectrices des animaux soient respectées, rappelle que la représentation nationale a réaffirmé dans le code civil (article L. 515-14) (2) que l’animal est un être vivant doué de sensibilité, en application de l’article 2 de la loi n° 2015-177 du 16 février 2015 de modernisation et de simplification du droit.

I. UNE URGENCE : METTRE FIN À LA DIMINUTION DES CRÉDITS BUDGÉTAIRES

Le programme 206, qui fait l’objet de ce rapport spécial, retrace au sein de la mission Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales, les actions de la direction générale de l’alimentation (DGAL) et de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) au service de la santé alimentaire. Ce programme a subi ces dernières années de fortes économies budgétaires : le programme 206 ne représente, avec moins de 500 millions d’euros (486,5 millions d’euros) pour 2016, que 0,13 % du budget de l’État pour assurer la sécurité alimentaire de 66 millions de Français (sans compter les exportations de produits alimentaires). Ces économies se sont donc répercutées sur les contrôles et évaluations entreprises par la DGAL, tandis que l’Anses, dont les missions ont été notoirement élargies par la loi du 13 octobre 2014 d’avenir pour l’agriculture, a dû recourir à des sources de financements extérieures en sus de sa subvention pour charge de service public.

A. LA CHUTE DES CRÉDITS BUDGÉTAIRES DEPUIS 2009

Au vu du tableau ci-dessous qui présente l’évolution des crédits du programme 206 de 2009 à 2015 ceux-ci subissent une forte trajectoire descendante pour la sixième année consécutive.

Le Rapporteur spécial constate que la baisse des crédits du programme 206 a atteint 32 % en six ans. Cette pente descendante est totalement contradictoire avec l’importance et la complexité des enjeux de la santé alimentaire. Elle justifie le constat sévère et concomitant de la Cour des Comptes en février 2014 sur l’insuffisance générale des contrôles du ministère de l’agriculture, ainsi que les conclusions alarmantes du rapport Babusiaux de décembre 2014 sur la politique de sécurité sanitaire des aliments (3).

Les conclusions de ces deux récents rapports tendaient à préconiser le renforcement de la veille sanitaire, à partager l’analyse des risques entre les services concernés, à inciter la Commission européenne à améliorer l’analyse menée au plan européen, à accroître l’information sur les résultats des contrôles, et enfin à affirmer l’échelon régional en matière de sécurité des aliments.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS DU PROGRAMME 206 HORS MASSE SALARIALE

(en milliers d’euros)

 

LFI 2009

LFI 2010

LFI 2011

LFI 2012

LFI 2013

LFI 2014

LFI 2015

Évol. CP 2015/2009 en %

 

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Programme 206 - Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation (hors titre 2)

253 157

308 657

253 920

274 706

234 627

239 254

221 001

221 179

227 919

227 919

216 988

216 988

210 604

209 283

– 32

Action 1 - Prévention et gestion des risques inhérents à la production végétale

16 553

19 504

19 846

21 346

20 816

20 816

20 168

20 168

20 678

20 678

22 812

22 812

20 570

20 570

+ 5

Action 02 - Lutte contre les maladies animales et protection des animaux

104 767

105 663

110 058

110 955

111 972

109 792

104 545

104 179

109 492

109 499

98 681

98 681

92 996

90 996

– 14

Action 03 - Prévention et gestion des risques sanitaires liés aux denrées alimentaires

25 644

25 644

19 685

19 971

17 257

17 235

16 016

16 016

14 978

14 978

15 139

15 139

15 428

15 428

– 40

Action 04 - Moyens scientifiques et techniques

54 430

54 430

57 758

57 758

73 497

72 424

71 846

71 790

73 919

73 912

72 335

72 335

74 627

74 006

+ 36

Action 05 - Élimination des farines et des coproduits animaux

30 200

82 330

22 800

40 700

4 000

13 500

4 000

4 000

4 000

4 000

3 200

3 200

2 126

3 426

– 96

Action 06 - Mise en œuvre de la politique de sécurité et de qualité sanitaires de l’alimentation

19 330

18 853

20 807

21 010

1 771

1 771

728

728

665

665

665

665

926

926

– 95

Action 8 - Qualité de l’alimentation et offre alimentaire

2 233

2 233

2 967

2 967

5 317

3 717

3 698

4 298

4 188

4 188

4 156

4 156

3 931

3 931

+ 76

Source : DGAL.

En réponse aux demandes du Rapporteur spécial sur les variations des actions la DGAL a précisé que : « jusqu'en 2010, le programme 206 intégrait des dépenses de fonctionnement courant (téléphone, informatique, mobilier, etc.), des dépenses liées à la gestion immobilière et des dépenses d'investissement (voitures) des services. Hors, avec la réforme territoriale de l'État (création des DDI et des DRAAF), ces frais de fonctionnement courant ont été basculés sur le programme 333 (Moyens mutualisés des administrations déconcentrées) pour ce qui concerne les DDI à compter du 1erjanvier 2011.

Ce transfert explique le différentiel sur l'action 6 à partir de cette date.

Pour ce qui concerne l'action 8, le surcoût constaté en 2011 correspond pour partie au financement de l'observatoire de l'alimentation dont les missions et le périmètre d'actions ont été précisés par décret en 2011 (décret n° 2011-778 du 28/06/11), d'autre part par le financement au titre du plan national de l'alimentation d'appels à projet  lancés en 2010 et financés en 2011 ».

B. LE PROJET DE BUDGET POUR 2016 POURSUIT LA DIMINUTION DES CRÉDITS

Hors fonds de concours, le total des crédits de paiement demandés pour le programme 206 se monte à 486,6 millions d’euros pour 2016 (– 1,9 %). Le total des fonds de concours attendus de l’Union européenne diminue de moitié, de 10,8 millions d’euros en 2015 à 5,4 pour 2016.

PRÉSENTATION DES CRÉDITS DU PROGRAMME 206 PAR TITRE ET CATÉGORIE

(en euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Titre et catégorie

Ouvertes en LFI pour 2015

Demandées
pour 2016

Ouverts en
LFI pour 2015

Demandés pour 2016

Titre 2. Dépenses de personnel

285 515 637

284 495 750

285 515 637

284 495 750

Rémunérations d’activité

179 004 535

177 567 977

179 004 535

177 567 977

Cotisations et contributions sociales

104 833 934

105 509 637

104 833 934

105 509 637

Prestations sociales et allocations diverses

1 677 168

1 418 136

1 677 168

1 418 136

Titre 3. Dépenses de fonctionnement

130 905 550

157 280 065

130 034 550

156 789 143

Dépenses de fonctionnement autres que celles de personnel

67 911 020

83 432 819

67 040 020

82 648 897

Subventions pour charges de service public

62 994 530

73 847 246

62 994 530

74 140 246

Titre 6. Dépenses d’intervention

78 198 082

46 113 543

77 748 082

45 286 693

Transferts aux entreprises

37 854 892

26 564 459

37 404 892

25 907 609

Transferts aux collectivités territoriales

 

100 000

 

100 000

Transferts aux autres collectivités

40 343 190

19 449 084

40 343 190

19 279 084

Titre 7. Dépenses d’opérations financières

1 500 000

 

1 500 000

 

Dotations en fonds propres

1 500 000

 

1 500 000

 

Total hors FDC et ADP prévus

496 119 269

487 889 358

494 798 269

486 571 586

FDC et ADP prévus

10 810 000

 

10 810 000

5 424 481

Total y.c. FDC et ADP prévus

506 929 269

 

505 608 269

491 996 067

Source : projet annuel de performances pour  2016.

Une gestion à court terme des crédits

Ce tableau appelle les remarques suivantes : en premier lieu, la stabilité des dépenses de personnel à 284,49 millions d’euros (285,51 en 2015). Hors crédits de personnel, les crédits de paiement pour 2016 se montent à 202,1 millions d’euros, soit une baisse de 6,3 % de la dotation.

Dans la loi de finances pour 2015, les dépenses de fonctionnement diminuaient de 14,98 % tandis que les dépenses d’intervention augmentaient de 34,65 %.

En sens inverse, le Rapporteur spécial remarque dans le projet de loi de finances pour 2016 une forte progression des dépenses de fonctionnement à 156,78 millions d’euros (+ 20,6 %), avec des dépenses de fonctionnement autres que les dépenses de personnel qui s’élèvent à 82,65 millions d’euros (+ 23 %). Selon la DGAL, ces dépenses consistent principalement en frais d’analyses, tests à l’abattoir et à l’équarrissage. Les subventions pour charges de service public s’élèvent à 74,14 millions d’euros (+ 17,7 %). Les dépenses d’intervention diminuent par contre de 41,7 % à 45,3 millions d’euros, les transferts aux entreprises (25,9 millions d’euros) accusent une baisse de 30,7 % et les transferts aux autres collectivités (19,2 millions d’euros) de 52,3%. Pour 2015, les dépenses de fonctionnement diminuaient de 14,98 %, tandis que les dépenses d’intervention augmentaient de 34,65 %.

En réponse aux questions du Rapporteur spécial, la DGAL a apporté les explications suivantes pour ces différents mouvements de crédits :

« – bascule sur les dépenses de fonctionnement autres que celles de personnel : jusqu’en 2015, l’ensemble des crédits nécessaires à la gestion des foyers de maladies animales étaient traités en tant que transfert aux entreprises. Or il s’avère que seules les indemnisations aux éleveurs entrent dans cette catégorie, et l’autre partie des crédits nécessaires à la gestion de foyers correspond en fait à des frais de prélèvements et d’analyses, soit des dépenses de fonctionnement courant, exécutées en services déconcentrés. La bascule a été réalisée afin de corriger cette erreur, d’améliorer les prévisions et de refléter l’exécution réelle des dépenses observées.

« – bascule sur les dépenses de subvention pour charges de service public : Depuis le PAP 2016, et à l’occasion d’un changement de règles comptables, les crédits alloués aux opérateurs de l’État doivent inclure, outre la subvention pour charge de service public annuelle au titre de l’action 4 du programme pour les moyens de fonctionnement de l’Anses, les montants prévisionnels des dépenses associées à des conventions passées avec l’ONF, le CNPF, le CIRAD, l’ONCFS, l’IFREMER ou encore FranceAgriMer (4). Auparavant, ces crédits étaient enregistrés dans la catégorie "transferts aux autres collectivités".

« La baisse des dépenses d’intervention est aussi marquée par la baisse générale des crédits du programme, à hauteur d’environ 6 millions d’euros en AE et CP. En effet, les dépenses d’indemnisation des éleveurs sont très difficiles à estimer car très variables d’une année sur l’autre. L’année 2014 ayant été une année très "saine" d’un point de vue sanitaire, le budget de la DGAL a été diminué avant que ne survienne la fièvre catarrhale ovine de septembre 2015. »

Quelques créations d’emplois bien nécessaires

Le Rapporteur spécial rappelle le rapport de la modernisation de l’action publique (MAP) de juin 2014 sur la politique de sécurité sanitaire des aliments, qui dressait un bilan inquiétant et concluait au triple impératif de sanctuariser les crédits, préserver les effectifs et d’accroître les contrôles :

« Les baisses fortes et répétées des effectifs des deux ministères responsables (la DGAL et la DGCCRF ont perdu respectivement 12 % et 11 % de leurs effectifs entre 2009 et 2013, après une baisse de 18 % pour la DGCCRF entre 1997 et 2009) ont induit une diminution forte de leurs interventions. L’activité d’inspection et de contrôle effectuée par les 1 900 agents de la DGAL a fléchi de 17 % de 2009 à 2012. Dans le même temps, la DGCCRF enregistrait une baisse de 18 % de ses actions de contrôle en matière de sécurité sanitaire des aliments. Ces diminutions ont concerné aussi bien les contrôles de première mise sur le marché, les inspections des établissements agréés, les contrôles dits “à destinationˮ sur les produits introduits, que les contrôles à la remise directe au consommateur. Les suites données aux contrôles s’en ressentent : sur les cinq années considérées, le nombre de procès-verbaux dressés par la DGCCRF a diminué de 20 %, et celui des suites et injonctions administratives de 12,5 %. Pour la DGAL, les mesures de police administrative (avertissements, mises en demeure et fermetures) restent les plus utilisées (11 719 en 2013) alors que le nombre de procès-verbaux reste limité à 945 en 2013 ».

Le plafond d’emploi du programme 206 diminue de – 14 équivalent-temps plein travaillé (ETPT) en 2016, (4 553, contre 4 567 en 2015, et 5 223 en 2005). Le solde pour 2016 est le produit d’une part de l’impact des créations d’emplois programmées en 2015 et 2016 (60 chaque année) et d’autre part du transfert de 71 ETPT vers le programme 333 Services interministériels départementaux des systèmes d’information de la mission Direction de l’action du Gouvernement.

Le Rapporteur spécial note avec satisfaction les créations d’emploi, tout en réitérant la nécessité de renforcer les contrôles dans les abattoirs, (290 abattoirs d’animaux de boucherie et de gros gibier traitent chaque année environ 33 millions de têtes et près de 3,5 millions de tonnes de carcasses) en renforçant les sanctions applicables en cas de manquement à la réglementation sanitaire ou protectrice des animaux. Il rappelle que sont très insuffisants les contrôles dans les établissements de remise directe (restaurants, boucheries, traiteurs et poissonneries), où le taux de contrôle n’est que de 7 %. Il souligne que tout le système repose sur un comportement vertueux des professionnels, alors que « la qualité des méthodes d’analyse et l’indépendance des laboratoires choisis par les professionnels ne sont pas, à ce jour, garanties. Par ailleurs, l’obligation de transmettre les résultats d’analyse non conformes ne pèse que sur les professionnels, alors que cette communication est contraire à leurs intérêts » (5).

Les restrictions budgétaires marquent les principales actions du programme

DOTATION DES ACTIONS DU PROGRAMME 206 POUR 2015-2016

(en millions d’euros)

Actions

LFI 2015

PLF 2016

Évolution 2016/2015
(en %)

AE

CP

AE

CP

AE

CP

action 1

Prévention et gestion des risques inhérents à la production des végétaux

22,57

22,57

21,42

20,92

– 1,15

– 1,64

action 2

Lutte contre les maladies animales et protection des animaux

94,76

94,76

87,03

85,61

– 7,73

– 9,15

action 3

Prévention et gestion des risques sanitaires liés aux denrées alimentaires

15,42

15,42

14,5

14,31

– 0,92

– 1,12

action 4

Actions transversales

74,62

74,00

71,85

72,15

– 2,78

– 1,85

action 5

Élimination des cadavres et des sous-produits animaux

2,90

4,20

3,71

4,20

0,81

0,00

action 6

Moyens des services de l’alimentation

0,92

0,92

0,92

0,92

0,01

0,01

action 8

Qualité de l’alimentation et offre alimentaire

3,87

3,87

3,98

3,98

0,11

0,11

TOTAL

215,06

215,73

203,41

202,09

– 5,41

– 6,3

Source : DGAL.

Action 1 : Prévention et gestion des risques inhérents à la production des végétaux

En 2016, les principales évolutions budgétaires concernant cette action correspondent à :

– une diminution de 3 millions d’euros en AE et CP liée à la mise en place du Fonds national agricole de mutualisation sanitaire et environnementale (FMSE), qui se substitue à certaines caisses de solidarités cofinancées par le programme 206. Cette diminution est en partie gagée par une augmentation prévisionnelle du coût de la gestion des foyers en santé des végétaux, de 750 000 euros face au risque Xyllela fastidiosa ; cette protéobactéries Gamma de la famille des Xanthomonadaceae est responsable de la contamination des oliviers des Pouilles en Italie. Certaines souches sont responsables de maladies mortelles ou potentiellement mortelles chez diverses espèces de plantes cultivées comme notamment la vigne, l’olivier et les agrumes, bien que les cas récemment constatés dans le sud de la France et en Corse ne menacent pas les oliviers.

– la mise en œuvre du plan « semences-agriculture durable » pour 700 000 euros en AE et 500 000 euros en CP.

Par ailleurs, et conformément à ce qui avait été prévu dans le triennal (pour 2016), l’ajustement des moyens nécessaires pour les délégations et missions confiées aux organismes à vocation sanitaire FREDON (6) s’élève à 500 000 euros.

Action 2 : Lutte contre les maladies animales et protection des animaux

L’évolution la plus significative est constatée sur les crédits inscrits au titre de la sous-action 20, relative à la gestion des maladies animales hors ESST (7) (- 6,2 millions d’euros). Elle résulte de la diminution des coûts générés par les mesures de gestion des maladies animales et des foyers de celles-ci, sur la base des dépenses effectivement dépensées en 2014, et à la lumière d’une tendance sanitaire relativement favorable.

À ces économies vient s’ajouter l’allégement du dépistage de la tremblante réalisé sur les petits ruminants à l’équarrissage, afin d’aligner le nombre de tests de dépistage au niveau imposé par l’Union européenne, soit une baisse du besoin de 1,2 million d’euros en AE et de 1,1 million d’euros en CP (soit une économie de – 3,5 millions d’euros, compensée en partie par le fait que les co-financements attendus de l’Union européenne en 2016 pour les tests de recherche des EST seront en baisse par rapport à 2015).

Une augmentation des moyens inscrits en PLF 2016 au titre des visites sanitaires (sous-action 24, + 1 million d’euros) s’explique par la mise en œuvre de visites sanitaires pour les élevages de petits ruminants et en apiculture.

Enfin, les moyens dédiés à la protection des animaux sont en hausse de 240 000 euros.

Action 3 : Prévention et gestion des risques sanitaires liés aux denrées alimentaires

La diminution de l’enveloppe budgétaire de l’action 3 porte principalement sur la lutte contre les salmonelles en élevage, compte tenu de l’état sanitaire satisfaisant du cheptel aviaire ainsi que d’une augmentation du co-financement de l’Union européenne (– 800 000 euros).

Action 4 : Actions transversales

La subvention pour charges de service public versée à l’Anses (sous-action 42) est en baisse de 1 million d’euros par rapport à la LFI 2015. Cette baisse s’inscrit dans l’effort collectif imposé aux opérateurs de l’État. Elle est en partie compensée par le transfert de conventions de subventions qui étaient accordées de manière pérenne à l’Anses mais non intégrées à sa subvention (400 000 euros).

La fin du financement du projet de plateforme SPS Export génère une économie de 1,5 million d’euros.

Action 5 : Élimination des cadavres et des sous-produits animaux

L’augmentation des moyens constatés sur cette action (+ 800 000 euros en AE) qui ne recouvre que les crédits alloués au service public de l’équarrissage (sous-action 50), prend en compte le décalage en AE/CP induit par le renouvellement du marché public d’intérêt général, conclu entre FranceAgriMer et les équarisseurs pour la métropole, ainsi que la variabilité du coût des interventions constatée pour les départements d’Outre-mer n’ayant pas conclu un marché local (tous sauf La Réunion).

Action 6 : Moyens des services de l’alimentation

Le montant des crédits programmés sur cette action, qui porte essentiellement sur les moyens consacrés à l’action sanitaire et sociale dans les services déconcentrés, est stable. Ce montant prend notamment en compte les travaux actuellement engagés par le Secrétariat général du Gouvernement en vue d’harmoniser les prestations d’action sociale au sein des directions départementales interministérielles.

Action 8 : Qualité de l’alimentation et offre alimentaire

Les crédits programmés sur cette action sont stables. Ils comprennent notamment le renouvellement de l’appel à projet dans le cadre du Programme national de l’alimentation (CPNA) pour 600 000 euros.

Pour ce qui concerne l'action 8, le surcoût constaté en 2011 correspond pour partie au financement de l'observatoire de l'alimentation dont les missions et le périmètre d'actions ont été précisés par décret en 2011 (décret n° 2011-778 du 28/06/11), d'autre part par le financement au titre du plan national de l'alimentation d'appels à projet  lancés en 2010 et financés en 2011.

En conclusion, le Rapporteur spécial estime qu’il conviendrait de maintenir un effort sur les actions de prévention, toujours moins coûteuses que l’action a posteriori, et de conserver une capacité d’intervention en cas de crise. À ce titre, l’exemple de la grippe aviaire aux États-Unis en 2015 en est une illustration : le défaut de mesures préventives a coûté plus de 600 millions d’euros, soit plus que l’ensemble du programme 206, pour quelques centaines d’élevages concernés. Les crédits disponibles sur le programme 206 ont été récemment utilisés pour les alertes de septembre 2015 s’agissant de la fièvre catarrhale ovine.

C. DES INDICATEURS À RÉNOVER

L’objectif n°1 du programme 206 vise à « favoriser le changement de pratiques, tous domaines confondus, afin de préserver la santé publique et l’environnement ». Cette politique est illustrée par les plans Ecophyto et Ecoantibio pour la maîtrise de l’utilisation des produits phytopharmaceutiques et des antibiotiques à usage vétérinaire ainsi que par le programme national de l’alimentation (PNA) pour la promotion de comportements favorables à une alimentation diversifiée et équilibrée, avec l’opération « Un fruit pour la récré ».

Le plan Ecophyto vise à réduire l’utilisation des produits phytopharmaceutiques en France tant en zone agricole qu’en zone non agricole. L’enjeu est non seulement de concilier performance écologique et économique mais aussi de préserver la santé publique. Un indicateur, le « NODU » (nombre de doses unités de pesticides), a été mis en place afin de disposer d’une mesure de l’usage des produits phytopharmaceutiques.

Le Rapporteur spécial remarque en ce qui concerne le plan Ecopphyto, que le nombre des doses unités de pesticide n’a que peu baissé, de 88,4 millions de doses en 2013 à 84 en 2015.

Les recommandations du rapport du député Dominique Potier en faveur d’une nouvelle version du plan Ecophyto (8) ont servi de socle à la rédaction en juin 2015 d’un projet de nouveau plan, soumis à la consultation du public. Dans ce projet de plan Ecophyto II, présenté par le ministre de l’Agriculture le 26 octobre 2015, l’objectif de réduction de 50 % du recours aux produits phytopharmaceutiques en France en dix ans est réaffirmé, avec un découpage de la trajectoire en deux temps. D’abord, à l’horizon 2020, une réduction de 25 % est visée, par la généralisation et l’optimisation des techniques actuellement disponibles. Ensuite, une réduction de 50 % à l’horizon 2025, qui reposera sur des mutations profondes des systèmes de production et des filières, soutenues par des déterminants politiques de moyen et long terme et par les avancées de la science et de la technique. La transition entre ces deux périodes, dans cinq ans, sera l’occasion d’une nouvelle révision du plan, conformément aux exigences de la directive européenne 2009/128 instaurant un cadre d’action communautaire pour parvenir à une utilisation des pesticides compatible avec le développement durable.

Le plan Ecoantibio est un plan de réduction des risques d’antibiorésistance en médecine vétérinaire. Lancé en novembre 2011, il vise une réduction de 25 % de l’utilisation des antibiotiques d’ici fin 2016. À ce titre, une attention particulière est portée au recours aux antibiotiques dits « d’importance critique » en santé animale, car ils constituent souvent la seule alternative pour le traitement de certaines maladies d’origine bactérienne. L’indicateur retenu mesure donc le niveau de traitement de tous les animaux (animaux de rente et de compagnie) aux antibiotiques critiques, à savoir la famille des céphalosporines de troisième et quatrième générations et celle des fluoroquinolones. Son évolution permet de mesurer l’impact des mesures prises dans le cadre du plan Ecoantibio sur une catégorie d’antibiotiques particulièrement sensible.

En réalité, le niveau de traitement des animaux aux antibiotiques critiques baisse lentement, de 4,25 % en 2013 à 3,61 % en 2015, ce qui ne permettra pas d’atteindre la cible de réduction de 25 % d’utilisation des antibiotiques entre 2011 et 2015.

Enfin, le Rapporteur spécial estime que l’indicateur tendant à calculer la promotion de comportements favorables à une alimentation diversifiée et équilibrée par le taux d’élève bénéficiant de l’action « Un fruit à la récré », qui culmine à 13 %, est totalement insuffisant et inadapté concernant la qualité même des aliments (nutriments ou résidus de produits phytosanitaires).

L’objectif n° 2 du programme 206 vise à « Prévenir et réduire les risques sanitaires à tous les stades de la production ». À cette fin, il est choisi de mettre l’accent sur le suivi des non-conformités constatées lors des inspections menées par les services de contrôle du ministère de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt.

En effet, l’accroissement continu des échanges d’animaux, de végétaux et de produits alimentaires à l’échelle européenne et internationale, impose de certifier que les produits commercialisés ou exportés sont propres à la consommation humaine et sont exempts de risques sanitaires.

Le premier indicateur est relatif au taux de recontrôle suite à une mise en demeure prononcée à l’issue d’une inspection initiale durant laquelle une non-conformité majeure a été constatée. Il vise à s’assurer que les services de contrôle, tant dans le domaine de la sécurité sanitaire des aliments que de celle des végétaux, assurent le suivi des inspections non conformes, gage de crédibilité de l’action publique et facteur d’efficacité des contrôles effectués. L’objectif est de vérifier que les professionnels ont effectivement mis en œuvre les mesures correctives demandées.

Le second indicateur, relatif au taux de suivi renforcé des établissements agréés ayant fait l’objet d’une inspection défavorable, permet de cibler les établissements dans le champ de la sécurité sanitaire des aliments titulaires d’un agrément sanitaire, dont les abattoirs, pour lesquels des suites administratives ou pénales données aux inspections ont été engagées. Ces taux ont progressé de 59,4 à 85 % de 2013 à 2015 pour le premier indicateur, et de 77 % à 91 % pour le second indicateur au cours de la même période.

Enfin, le taux de prélèvements de végétaux révélant une non-conformité rend compte des contrôles réalisés par les inspecteurs du programme 206 chez les distributeurs et utilisateurs de produits phytopharmaceutiques. Il s’agit là également de rendre compte du suivi des non-conformités, puisqu’un constat de non-conformité peut aller jusqu’à la destruction de récoltes.

L’objectif n°3 du programme 206 vise à « S’assurer de la réactivité et de l’efficience du système de contrôle sanitaire » dont il rend compte à travers la préparation à la gestion d’épizooties, la gestion des suspicions de foyers de maladies animales ainsi que le suivi du coût d’une inspection.

Le « taux de réalisation d’exercice de gestion d’épizootie majeure » vise à renforcer la préparation et la réactivité des services en cas de crise sanitaire. Quatre maladies particulièrement contagieuses font l’objet d’un plan d’urgence spécifique : la fièvre aphteuse, les pestes porcines (classique et africaine), les pestes aviaires (virus influenza aviaire hautement pathogène et maladie de Newcastle) et la fièvre catarrhale ovine (FCO). La France est aujourd’hui indemne des trois premières affections. La fièvre catarrhale ovine a fait quant à elle sa réapparition en Corse fin 2013, entraînant la mise en œuvre de trois campagnes de vaccination massive. La France continentale demeure cependant indemne, malgré de coûteux épisodes d’alertes dans les Bouches du Rhône (coût de chaque alerte : 400 000 euros) à part un foyer de fièvre à sérotype 8 apparu en septembre 2015 dans l’Allier, qui a entraîné des mesures de vaccination et restriction de circulation des animaux.

La réalisation d’exercices de gestion d’épizootie majeure permet de s’assurer de la préparation des équipes en cas d’apparition d’un danger sanitaire majeur sur le territoire national. Les conséquences socio-économiques de la propagation de telles maladies sont en effet extrêmement lourdes (impact sur les filières concernées, entraves aux échanges intracommunautaires et aux exportations vers les pays tiers, perte du statut « indemne » de la France, etc.) et la réactivité des services lors de la détection d’un premier cas détermine de fait l’extension future de la maladie et ses conséquences potentielles.

Par ailleurs, la gestion des suspicions de maladies animales réglementées est évaluée à travers l’indicateur « Taux de levée des mesures de surveillance en cas de suspicion de maladie ». Celui-ci témoigne de la réactivité des services dans la mise en œuvre des mesures appropriées dès lors qu’une exploitation suspecte a fait l’objet d’un arrêté préfectoral de mise sous surveillance. Il s’agit de mesurer que ceux mis en place dans des troupeaux faisant l’objet d’une suspicion de maladie réglementée ont bien été levés dans les délais préconisés par les instructions relatives à chaque type de maladie suite à l’infirmation ou la confirmation de la suspicion. En effet, la levée des mesures doit dans tous les cas intervenir rapidement : si la suspicion est confirmée, il convient le plus tôt possible de mettre en œuvre les mesures de lutte visant à éradiquer le foyer et empêcher sa diffusion aux autres exploitations ; à l’inverse, si la suspicion n’est pas confirmée, il est important que les mesures de limitations de mouvements des animaux qui pèsent sur l’exploitation soient levées pour ne pas occasionner de pertes d’exploitation qui ne seraient plus justifiées.

Enfin, le « coût d’une inspection », avec une prévision de 1 080 euros en 2016 reflète le coût complet pour l’État, y compris le coût des analyses, d’une activité qui porte la majorité des crédits du programme 206.

II. L’ÉVOLUTION DES RECETTES DE L’ANSES ENTRE 2015 ET 2016

Créée par l’ordonnance n° 2010 du 7 janvier 2010, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) est issue de la fusion de l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments et de l’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail, intervenue le 1er juillet 2010. L’Anses s’appuie sur un réseau de onze laboratoires de référence et de recherche, le plafond d’ETPT voté en loi de finances pour 2015 est de 1 281, soit 1 265 ETP, plus 70 EPPT hors plafonds pour faire face à l’ajustement conjoncturel d’évaluation des dossiers transférés de la DGAL

A. DE NOUVELLES MISSIONS EN 2015

La loi du 13 octobre 2014 d’avenir pour l’agriculture a confié à l’Agence, en sus de sa mission scientifique d’évaluateur du risque sanitaire en matière de bien-être des animaux, de santé des végétaux et de qualité de l’alimentation, un rôle actif d’autorisation des produits phytopharmaceutiques. Dès le mois de juillet 2015, l’Agence a assumé ses nouvelles responsabilités avec la délivrance des autorisations de mise sur le marché des produits phytosanitaires, des adjuvants, des matières fertilisantes et supports de culture, jusqu’alors du ressort du ministère en charge de l’agriculture. Cette nouvelle mission s’accompagne de nouveaux défis : se doter d’une organisation interne efficace visant à concilier l’indépendance de l’expertise scientifique et la gestion des autorisations ; être en mesure de capter les signaux de terrain concernant les effets des produits autorisés. C’est dans ce cadre qu’un dispositif de phytopharmacovigilance, assurant le recueil de toutes les données disponibles sur l’impact de l’utilisation des produits, tant sur la santé humaine que la faune, la flore et les milieux de l’environnement, a été mis en place par l’Agence.

Au-delà de ce dispositif, celle-ci doit continuer à surveiller les effets des pesticides sur la santé humaine par le lancement d’études indépendantes. Les résultats de l’expertise sur les expositions des travailleurs agricoles aux pesticides et les conclusions de l’étude Pesti’home sur les utilisations domestiques des pesticides ont été publiées en 2015, avec une étude d’octobre 2015 sur la toxicité des matériaux retardateurs de flamme, que cette toxicité soit cancérogène ou due à des effets perturbateurs endocriniens.

Des expertises sont notamment attendues concernant la consommation de compléments alimentaires ayant provoqué des effets indésirables signalés dans le cadre du dispositif de nutrivigilance. Le rapport scientifique du réseau national de vigilance et de prévention des pathologies professionnelles, Rnv3p, est prévu pour la fin 2015.

En matière de nutrition, trois études sont en cours : l’étude de l’alimentation totale infantile, afin de mieux connaître les contaminants chimiques auxquels les enfants âgés de moins de trois ans sont exposés par leur alimentation, et la troisième étude nationale des consommations alimentaires (INCA 3) afin de poursuivre, modifier ou renforcer les priorités de la politique nutritionnelle en France. Enfin, dans le cadre de l’Observatoire de la qualité de l’alimentation (Oqali), des résultats sont attendus concernant les allergènes alimentaires.

Afin d’aider les consommateurs à se prémunir contre les risques liés aux nouvelles offres de produits et aux nouveaux modes de consommation, l’Anses publie également plusieurs expertises relatives à l’impact potentiel des champs électromagnétiques et des objets connectés sur la santé des enfants, ou encore aux risques liés à la consommation d’insectes. Par ailleurs, elle a publié une mise à jour de son évaluation des risques sanitaires et environnementaux liés à l’exposition aux nanoparticules d’argent.

L’Anses participe par son expertise aux nouveaux engagements de l’État en matière de santé publique, avec le Plan national santé environnement (PNSE 3). Plusieurs avis et rapports sont attendus au cours de l’année, notamment dans le domaine de la santé environnementale, concernant les perturbateurs endocriniens, la qualité de l’air ambiant et de l’air intérieur, les nanomatériaux, les champs électromagnétiques, les infrasons, ou bien la santé des animaux comme l’état des abeilles.

B. LES SUBVENTIONS POUR CHARGE DE SERVICE PUBLIC SONT EN DIMINUTION À PÉRIMÈTRE CONSTANT

ÉVOLUTION DE LA SUBVENTION POUR CHARGES DE SERVICE PUBLIC DE L’ANSES

(en milliers d’euros)

 

2011 après mise en réserve

2012
après mise en réserve

2013
après mise en réserve

2014
après mise en réserve

2015
après mise en réserve

2016
après mise en réserve

 

Ministère de l’agriculture
Programme 206
Sécurité et qualité sanitaire
de l’alimentation

65 548

64 934

63 395

61 581

61 010

60 228

 

Évolution

 

– 614

– 1 539

– 1 814

– 572

– 782

– 5 320

Source : Anses.

Les subventions pour charges de service public constituent plus des deux tiers des ressources de l’agence : leurs évolutions ont une incidence immédiate sur sa capacité à mener à bien ses missions. Le montant global des SCSP évolue ainsi :

– périmètre constant et hors mise en réserve, les subventions baissent de 1,6 million d’euros : 1 million pour l’agriculture ; 300 000 euros pour les actions de santé et 250 000 pour l’environnement au travail ;

– prise en compte d’un taux de mise en réserve réduit, calculé sur une assiette de référence hors dépenses d’investissement, qui permet de réduire l’impact de la baisse inscrite au PLF de 300 000 euros ;

– réintégration dans les subventions des principales conventions passées, en complément des subventions, avec les ministères. Il s’agit d’une mesure d’ordre général, en application d’une circulaire budgétaire du 20 août 2015. Les montants complémentaires qui apparaissent ainsi en subvention étaient précédemment inscrits sur la ligne « conventions et autres subventions ».

Il s’agit :

– pour le ministère de l’agriculture, de la réintégration, pour un montant de 2, 218 millions d’euros, de conventions avec la DGAL au titre des projets Oqali, tuberculose bovine, virus influenza des porcins et d’une provision pour les autres conventions. Ce montant est d’ores et déjà inscrit dans la notification initiale de la subvention pour 2016 et fait l’objet de l’application de la mise en réserve ;

– pour le ministère de la santé, de la ré-intégration, pour un montant de 615 000 euros de conventions avec la direction générale de la santé (DGS) au titre des projets Oqali, Référeau et Biotox. Ces montants ne sont pas intégrés dans la notification initiale de la subvention pour 2016 et feront donc l’objet d’un arrêté complémentaire en début d’année, comme cela a déjà été fait pour 2015 ;

– des recettes complémentaires au titre des missions nouvelles confiées à l’agence :

● Pour le ministère de la santé, un complément de 131 000 euros au titre du financement du transfert de 2 ETP de l’Institut de veille sanitaire (InVS) à l’Anses au 1er janvier 2016, dans le cadre de la toxicovigilance, auquel s’ajoute un montant de 1,5 million d’euros de transfert des crédits alloués aux CAP-TV (950 000 euros à destination des centres anti-poison) et à la maintenance du système d’information de la toxicovigilance (finançant l’hébergement et le maintien en conditions de ce système d’information par l’AP-HP et le CHU de Nancy). Ces montants seront intégralement dépensés sur 2016 au titre des conventions de financement souscrites,

– 4 ETP (pour atteindre 1 285 en 2016) sont créés en 2016 mais là encore, à périmètre constant, il est plus juste de relever une diminution de 35 ETP par rapport au périmètre de référence en 2015. Les ETP hors plafond se maintiennent à 70,

● Pour le ministère de l’écologie, un complément de 500 000 euros, lié au transfert des autorisations de mise sur le marché des produits biocides.

C. LES RECETTES ISSUES DE LA FISCALITÉ AFFECTÉE, REFLET DE MISSIONS ÉLARGIES, SONT EN LÉGÈRE AUGMENTATION

1. L’ANSES est destinataire de taxes affectées

Il s’agit des taxes assises sur :

– les médicaments vétérinaires : l’Agence nationale du médicament vétérinaire (ANMV) est chargée de l’évaluation des médicaments vétérinaires, du contrôle des établissements pharmaceutiques et de la délivrance des autorisations de mise sur le marché. L’Anses perçoit directement des taxes pour couvrir les coûts des activités de l’ANMV. À ce stade, l’estimation d’exécution à fin 2015 se situe à 7,1 millions d’euros, auxquels devrait venir s’additionner une recette complémentaire d’environ 400 000 euros dans le cadre de l’extension du régime d’autorisation préalable pour la publicité des médicaments contenant des antibiotiques ou bien des médicaments soumis à un plan de gestion des risques, contenant des hormones ou destinés à la lutte contre les dangers sanitaires de première catégorie (décret n° 2015-647 du 10 juin 2015) ;

– les produits phytopharmaceutiques : 11,5 millions d’euros. L’Anses dispose de taxes affectées, destinées à couvrir les coûts supportés par elle pour l’évaluation des substances actives et préparations phytopharmaceutiques, matières fertilisantes et supports de culture, perçues lors des dépôts des demandes par les pétitionnaires ;

– le chiffre d’affaires des produits phytopharmaceutiques. (4,2 millions d’euros de recettes). La loi de finances rectificatives n° 2014-1655 du 29 décembre 2014 a créé l’article L. 253-8-2 du code rural et de la pêche maritime qui institue une taxe, plafonnée à 4,2 millions au bénéfice de l’Anses, sur les ventes des produits phytopharmaceutiques dans le cadre du financement du réseau de phytopharmacovigilance ;

– les produits biocides : 2 millions d’euros. Des redevances « biocides » couvrent les coûts d’instruction des dossiers d’autorisations de mise sur le marché des substances actives et produits biocides. Ces redevances vont monter en puissance grâce au positionnement favorable qu’a pu prendre l’Anses dans ce domaine au niveau européen ;

– les radiofréquences : 2 millions d’euros suite à la reprise par l’agence en 2010 des missions de soutien à la recherche de la Fondation Santé et radiofréquence. L’article 158 de la loi de finances pour 2011 institue une contribution additionnelle à l’imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux applicable aux stations radioélectriques. Le produit de la taxe est affecté à hauteur de 2 millions d’euros à l’Anses. Pour 2016, le dispositif de taxation est maintenu en l’état et finance exclusivement des projets de recherche sur le thème des relations entre radiofréquences et santé.

2. Le produit des conventions se monte à 12 millions d’euros

Cette rubrique comprend les conventions de recherche, d’études ou de travaux conclues majoritairement avec l’Union européenne, l’État, des établissements publics administratifs, des établissements publics de recherche et des collectivités locales.

3. Les autres recettes propres de l’Anses

L’agence réalise, dans le cadre de ses missions, des activités qualifiées de prestations, selon un catalogue de tarifs mis à jour chaque année. La prévision de recettes pour 2016 s’élève à 3,1 millions d’euros et recouvre :

– pour l’essentiel, les prestations tarifaires des laboratoires dans le cadre de leurs missions de laboratoires de référence (2,7 millions d’euros). Il s’agit notamment de la réalisation d’analyses dans le cadre des plans de surveillance et de contrôle des pouvoirs publics, ou bien le contrôle qualité de lots de vaccins dans le domaine vétérinaire ;

– les redevances perçues de l’Agence européenne du médicament (EMA) au titre des travaux pour des médicaments vétérinaires, estimées à 400 000 euros.

Au total, les recettes de l’Anses progressent de 2,55 millions d’euros au titre des missions nouvelles (toxicovigilance, biocides, médicaments vétérinaires), dans la mesure où la baisse des subventions est compensée, pour une bonne partie, par la croissance des recettes de taxes affectées et des conventions hors ministères.

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EXAMEN EN COMMISSION

Après l’audition de M. Stéphane Le Foll, ministre de l’Agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt (voir le compte rendu de la commission élargie du 28 octobre 2015 à 21 heures (9)), la commission des Finances examine les crédits de la mission Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales, sur le rapport de M. Charles de Courson (sur les Politiques de l’agriculture) et de M. Éric Alauzet (sur la Sécurité alimentaire), rapporteurs spéciaux.

La commission examine l’amendement n° II-CF134 de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial. Cet amendement propose de compléter les crédits consacrés aux mesures agroenvironnementales et climatiques, qui sont cofinancées à 75 % par l’Union européenne. Les autorisations d’engagement inscrites pour 2016 sont insuffisantes pour respecter le montant annuel moyen de 60 millions d’euros de contrepartie nationale. Il est donc proposé de les augmenter de 15 millions et d’augmenter les crédits de paiement de 7 millions d’euros.

La commission adopte l’amendement n° II-CF134.

Puis elle examine l’amendement n° II-CF131 de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial. Cet amendement propose d’accroître de 10 millions d’euros les autorisations d’engagement et les crédits de paiement consacrés aux assurances climatiques, cofinancées à hauteur de 75 % par des fonds européens. En effet, les chambres d’agriculture estiment que l’enveloppe prévue par l’Union européenne est insuffisante pour prendre en charge à la fois les primes d’assurance récolte et les programmes du fonds de mutualisation sanitaire et environnemental. Il est donc proposé de la compléter par des crédits budgétaires.

La commission adopte l’amendement n° II-CF131.

Puis elle examine l’amendement n° II-CF133 de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial. Cet amendement propose d’accroître de 8 millions d’euros les autorisations d’engagement et les crédits de paiement pour porter les crédits consacrés au fonds d’allégement des charges (FAC) à leur niveau de 2012.

La commission adopte l’amendement n° II-CF133 et l’amendement II-CF132 de M. Charles de Courson devient sans objet.

Malgré l’avis défavorable de M. Charles de Courson, rapporteur spécial, et suivant l’avis favorable de M. Éric Alauzet, rapporteur spécial, la commission adopte les crédits de la mission Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales modifiés, ainsi que les crédits du compte spécial Développement agricole et rural.

Puis elle examine les amendements n° II-CF77 à II-CF79 de M. Charles de Courson, portant articles additionnels avant l’article 48.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial. Ces amendements sont des amendements d’appel proposant de modifier le dispositif de la déduction pour aléas. J’ai compris que le ministre souhaitait que ce débat ait lieu lors de la discussion de la prochaine loi de finances rectificative. Il s’agit d’un dossier important pour nos agriculteurs mais, à ce stade, je me propose de les retirer.

Les amendements n° II-CF77 à II-CF79 sont retirés.

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ANNEXE :
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES
PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL

Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses)

– Mme Caroline Gardette, directrice générale adjointe, ressources ; Mme Solenne Chardigny, chef de cabinet auprès du directeur général et Mme Charlotte Grastilleur, Directrice adjointe, santé, alimentation à la Direction de l’évaluation des risques

Direction générale de l’alimentation

– M. Patrick Dehaumont, directeur général de l’alimentation ; M. Benjamin Genton, adjoint de Mme Laurence Delva, sous-directrice du pilotage des ressources et des actions transversales et Mme Virginie Jorissen, sous directrice des affaires budgétaires et comptables de SAFSL

Déplacement au marché d’intérêt national de Rungis

– Mme Catherine Collinet, directrice de la brigade nationale d’enquête vétérinaire et M. Patrick Dehaumont, directeur général de l’alimentation

© Assemblée nationale

1 () Cour des comptes, rapport public annuel, « La sécurité sanitaire de l’alimentation : l’insuffisance des contrôles du ministère de l’agriculture » (février 2014).

2 () Article 515-14 du code civil, créé par l’article 2 de la loi n°2015-177 du 16 février 2015 : « Les animaux sont des êtres vivants doués de sensibilité. Sous réserve des lois qui les protègent, les animaux sont soumis au régime des biens. »

3 () Marion Guillou, Christian Babusiaux, La politique de sécurité sanitaire des aliments, rapports aux ministres, juin 2014.

4 () ONF : Office national des forêts ; CNPF : Centre national de la propriété forestière ; CIRAD : Centre de coopération international en recherche agronomique pour le développement ; ONCFS : Office national de la chasse et de la faune sauvage ; IFREMER : Institut français pour l’exploitation de la mer.

5 () Cour des comptes, op. cit.

6 () Fédérations régionales de défense contre les organismes nuisibles.

7 () Encéphalopathies spongiformes subaigües transmissibles.

8 () Dominique Potier, Pesticides et agro-écologie : les champs du possible, rapport au Premier ministre, novembre 2014.

9 () http://www.assemblee-nationale.fr/14/budget/plf2016/commissions_elargies/