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Commission des affaires étrangères

Mercredi 13 mai 2015

Séance de 17 heures

Compte rendu n° 76

Présidence de Mme Odile Saugues, vice- présidente

– Andorre : accord relatif à la gestion commune de la ressource en eau dans le bassin hydrographique des sources de l'Ariège (n° 2489) ; accord portant délimitation de la frontière (n° 2490) ; accord sous forme d'échange de notes verbales relatif à la création d'un bureau à contrôles nationaux juxtaposés à Porta (n° 2491) ; et approbation de la convention dans le domaine de l'enseignement (n° 2648)  – Mme Françoise Imbert, rapporteure.

Andorre : accord relatif à la gestion commune de la ressource en eau dans le bassin hydrographique des sources de l'Ariège (n° 2489) ; accord portant délimitation de la frontière (n° 2490) ; accord sous forme d'échange de notes verbales relatif à la création d'un bureau à contrôles nationaux juxtaposés à Porta (n° 2491) ; et approbation de la convention dans le domaine de l'enseignement (n° 2648) 

La séance est ouverte à dix-sept heures.

Mme la Présidente Odile Saugues. Nous examinons, sur le rapport de Mme Françoise Imbert, quatre accords avec l’Andorre sur la gestion commune de la ressource en eau dans le bassin hydrographique des sources de l'Ariège (n° 2489),  sur la délimitation de la frontière (n° 2490), sur l'approbation de l'accord sous forme d'échange de notes verbales relatif à la création d'un bureau à contrôles nationaux juxtaposés à Porta (n° 2491), et sur l'approbation de la convention dans le domaine de l'enseignement (n° 2648).

Mme Françoise Imbert, rapporteure. Madame la Présidente, mes chers collègues, en 1993, Andorre s’est dotée d’une constitution et a enfin été reconnue comme un État à part entière sur le plan international, emportant un certain nombre de conséquences sur le plan juridique dans les relations avec la France, dont les quatre accords qui nous sont soumis, aujourd’hui, sont une application.

Nous sommes d’abord saisis de trois accords déjà approuvés par le Sénat et ratifiés par l’Andorre qui sont liés à la frontière entre nos deux Etats.

A l’indépendance de la Principauté, en 1993, le tracé de la frontière n’était précisé par aucun texte. Le principe de la délimitation du tracé de la frontière a été introduit, à la demande de la France, dans le traité du 12 septembre 2000, portant rectification de la frontière sur une partie consensuelle qui suivait le cours de l'Ariège.

Ce premier traité a permis à Andorre d’aménager de nouvelles infrastructures routières, ouvertes à la circulation en 2002, afin d’optimiser la fluidité du trafic, de palier les contraintes climatiques du col d’Envalira. Par là-même, le besoin de mettre en place de nouveaux moyens de surveillance et de contrôle compte tenu des risques de contrebande dans cette nouvelle zone est apparu.

Une convention a été conclue le 11 décembre 2001. Elle crée un bureau à contrôles nationaux juxtaposés (BCNJ) pour rassembler les services de contrôles douaniers et policiers sur un site unique sur la commune de Porta, dans le département des Pyrénées Orientales, à un peu plus de 2kms de la frontière andorrane. Les locaux ont été inaugurés fin 2010 et le bureau est en activité depuis 2011.

Le premier accord soumis à approbation consiste en un échange de notes en date du 13 janvier 2011 pour la France et du 10 mars 2011 pour l’Andorre, en application de la convention de 2001, qui ouvre la possibilité de fixer, par arrangement administratif, la délimitation des bureaux et les détails pratiques de fonctionnement. Il s’agit de permettre aux touristes, aux transporteurs et aux professionnels de satisfaire sur un seul et même point à leurs obligations légales et réglementations liées au franchissement de la frontière.

La commission franco-andorrane de délimitation de la frontière s'est, quant à elle, réunie pour la première fois, le 5 juillet 2001 pour fixer un tracé complet. Je précise que dix réunions auront été nécessaires, avec des cartographes des deux délégations, pour aboutir à un accord, et la surface totale contestée de 52,86 hectares a été répartie par moitié entre les deux Parties.

L’accord sur la délimitation de la frontière a été signé à Paris le 6 mars 2012. La Partie française a obtenu dans les Pyrénées-Orientales une partie du Clot des Abelletes et, dans l'Ariège, les prés cadastrés en rive gauche du ruisseau de la Palomera et l’assurance que la frontière suive la ligne de partage des eaux sur tout le reste de son tracé.

Modifiant donc la répartition d’une partie du bassin de l’Ariège, entre la France et l’Andorre, un accord sur la gestion commune de l’eau a été conclu le6 mars 2012 également. En effet, la gestion commune des eaux de l’Ariège, affluent de la Garonne, dont la source se trouve en Andorre, au pied du Puy Nègre, dans les montagnes qui séparent Andorre du département des Pyrénées orientales, est tributaire du tracé de la frontière.

Désormais, l’accord fixe un débit minimal, dit débit réservé, dont la gestion commune doit assurer le respect. L’objectif, pour la France, est de se préserver du risque d’une consommation excessive andorrane à la station touristique du Pas de la Case. Le niveau de ce débit garantit un fonctionnement satisfaisant du cours d’eau sur la partie aval, c’est-à-dire française, ce qui était la demande de la France et qui garantit, également, le bon état écologique du cours d’eau. La gestion commune est confiée à un exploitant de droit andorran siégeant en Andorre.

Par ailleurs, l’Assemblée nationale est saisie pour approbation de la nouvelle convention signée avec Andorre le 11 juillet 2003 dans le domaine de l’enseignement.

Je précise que le système d’enseignement français en Andorre est un marqueur de la présence française et de la cohabitation franco-andorrane. Dès l’année de l’indépendance, une première convention avait été conclue, prolongée par une convention du 24 septembre 2003, entrée en vigueur le 1er septembre 2005 pour une durée de dix ans. Cette dernière vient donc à échéance dans moins de quatre mois.

Le système éducatif français fait partie intégrante du service public d’éducation en Andorre, lui-même composé de trois systèmes éducatifs : l’andorran, l’espagnol et le français. Il rassemble quatorze écoles maternelles et primaires, un collège et un Lycée (le Lycée Comte de Foix) et prend toute sa place dans la promotion des actions éducatives dans le cadre de la francophonie et dans la collaboration de son action en matière culturelle. Ce système éducatif joue aussi un rôle important dans la volonté d’indépendance de la Principauté d’Andorre vis-à-vis de l’Espagne, et notamment de la Catalogne.

L'ensemble du dispositif emploie 338 personnes, dont 248 enseignants pour environ 3 500 élèves, soit le tiers des élèves andorrans. Seuls 5 % des élèves scolarisés dans ces établissements français sont de nationalité française et le système éducatif français est le seul cette année à voir augmenter ses effectifs élèves au primaire. La quasi-totalité des élèves du système éducatif français poursuit des études supérieures hors d’Andorre et se dirige vers l’enseignement supérieur en France. Il faut y rajouter environ 20 % des élèves issus du système andorran. Cela représente environ 500 étudiants andorrans de formation française qui poursuivent leurs études en France.

Le 13 octobre 2011, lors de la réunion de la commission mixte franco-andorrane pour l’enseignement, structure de caractère intergouvernemental prévue par la convention, les autorités françaises et andorranes sont convenues de maintenir le cadre actuel et de constituer un groupe de travail mixte chargé d’examiner les modalités d’amélioration de la convention de 2003. Ses conclusions ont été rendues en mai 2013 et la nouvelle convention a été signée par les deux gouvernements le 11 juillet 2013.

Le rapport présente tous les articles de la convention et ses annexes. Cette nouvelle convention préserve le système actuel et seuls quelques articles diffèrent de la convention de 2003.

Avant d’insister sur deux points, il me semble utile de rappeler que l’article 1er modifié précise que les établissements d’enseignement français dans la principauté d’Andorre contribuent au développement de l’éducation, en y assurant un enseignement français de qualité, dans le respect de l’identité andorrane, et qu’ils dispensent leur enseignement conformément aux principes de gratuité, de laïcité et d’obligation scolaire en vigueur dans les établissements publics scolaires en France.

Le principe du maintien du cadre d’intervention des établissements français a des conséquences budgétaires et c’est donc un engagement important. Je souligne que l'article 3 prévoit que les parties peuvent décider en commun de la création de nouveaux établissements. Les personnels des établissements sont pris en charge sur le budget de l’État français au titre du ministère chargé de l’éducation nationale. 312,5 Equivalents Temps Plein étaient destinés à Andorre à la rentrée 2014, chiffre stable, correspondant à un coût supérieur à 23 millions d’euros. S'agissant du lycée Comte de Foix, l’article 9 précise bien que les frais d'entretien et de fonctionnement sont à la charge du ministère français pour un coût de 250 000 Euros.

Le Gouvernement andorran met à disposition les locaux des écoles primaires, maternelles et élémentaires, en assure l'entretien et participe aux frais de fonctionnement et d'équipement de ces écoles. Il prend en charge environ 28 % des frais. Il prend aussi en charge le salaire des personnels qu’il met à disposition pour les cours de catalan et les sciences humaines et sociales, dont le nombre d’heure selon les niveaux est fixé dans l’annexe II.

Le deuxième point sur lequel je veux insister est que les rédacteurs du nouveau texte ont cherché à faire du système d’enseignement français la pièce majeure d’une coopération éducative plus large.

Dans ce sens, l’article 11 est un article nouveau qui réaffirme le développement de la langue française, dans le cadre scolaire, par des actions éducatives et, hors de ce cadre, par des activités culturelles dans le domaine de la francophonie. Les deux gouvernements encouragent des activités pédagogiques favorisant la participation et l'échange d'enseignants et d'élèves des différents systèmes éducatifs du pays. L'article 8 prévoit la possibilité d’échanges d’enseignants et d’élèves des différents systèmes éducatifs. Les articles 21 à 26 concernent l'information, l'orientation et la mobilité des élèves. La mobilité des élèves entre les systèmes éducatifs est encouragée et des formations communes peuvent être développées, sanctionnées par un double diplôme.

L’enseignement supérieur est particulièrement privilégié. L’article 29 prévoit spécifiquement le renforcement de la coopération en matière d’enseignement supérieur entre la France et la Principauté d’Andorre. Il introduit une référence aux dispositions législatives et réglementaires qui encadrent cette coopération et, en particulier, la mise en place d'éventuels formations et diplômes en partenariat. L’article 15 qui porte sur les structures administratives mises en place introduit la représentation du ministère chargé de l’enseignement supérieur dans la commission mixte franco-andorrane, la compétence de cette dernière s’étendant à toute question relative à la coopération dans le domaine de l’enseignement supérieur.

Toutes ces nouvelles dispositions sont proposées dans la perspective du renforcement de la coopération interuniversitaire avec la création, outre l’Université publique d’Andorre, de nouvelles universités dans la Principauté (Université ouverte de la Salle par exemple). Il existe aujourd’hui deux diplômes de niveau master qui associent l’université publique d’Andorre à des universités françaises et espagnoles : un Master en Tourisme culturel virtuel et un Master international en langue et littérature catalanes.

La Délégation à l’enseignement français et le Lycée Comte de Foix mènent, depuis quelques années, une politique active et incitative avec l’aide des services de l’orientation des académies de Montpellier et de Toulouse et le soutien financier du Ministère de l’Education nationale et celui de la jeunesse et de la représentation du Co-prince français. La convention anticipe, en particulier, sur la mise en place de formations en partenariat co ou bi-diplômantes et sur la conclusion de l’accord de reconnaissance des diplômes en préparation.

Cette nouvelle convention est d’une durée de dix ans, mais elle est cette fois tacitement reconductible. Les améliorations apportées que je vous ai présentées permettent de supposer qu’elle constituera effectivement un cadre pertinent pour l’avenir. Comme vous pouvez le constater, le système d’enseignement français dans la Principauté d’Andorre est significatif de la présence française et de la coopération franco-andorrane.

Sous le bénéfice de ces observations, je vous invite, mes chers collègues, après l’examen de ces trois accords entre la France et la Principauté d’Andorre et une Convention entre la France et cette même Principauté dans le domaine de l’enseignement, à voter les quatre projets de lois en autorisant l’approbation.

Thierry Mariani. Concernant la convention relative à l’enseignement, son article 1er prévoit que le lycée français en Andorre est gratuit pour les élèves. Or, j’ai noté de votre exposé que l’Etat andorran participait à hauteur d’environ 28 % des frais d’entretien. J’en déduis que c’est la France qui assume le reste du financement. Une telle gratuité est rare. Dans ma circonscription, tous les lycées français sont payants pour les élèves. Je souhaiterai avoir confirmation du fait que l’Etat français prend en charge le reste des frais non financés par la principauté.

Françoise Imbert. Je vous confirme que l’enseignement français en Andorre est gratuit et que cela constitue donc une charge pour le budget de l’Etat français, sous réserve de la participation de la Principauté aux frais d’entretiens des écoles et de sa prise en charge de certains enseignements. C’est le système actuel qui est reconduit par la nouvelle convention.

Thierry Mariani. Je constate que dans ma circonscription, malheureusement, aucun lycée français n’est gratuit. Il est vrai que la proximité géographique que nous avons avec l’Andorre n’est pas la même qu’avec certains Etats où je suis élu. Néanmoins, Andorre n’en reste pas moins un Etat étranger, nous venons d’ailleurs de redéfinir les frontières franco-andorranes. La prise en charge par l’Etat français des coûts est-elle assumée par le ministère de l’Education nationale ou bien par l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger ?

Françoise Imbert. Les crédits correspondants sont logés dans le budget du ministère de l’Education nationale. C’est effectivement un ca de figure spécifique.

François Loncle. Je tiens tout d’abord à féliciter Françoise Imbert pour son rapport. Je souhaite poser une question relative au calendrier de l’accord sur la rectification de la frontière franco-andorrane. La décision date d’un traité de 2000, il y a 15 ans donc. L’accord gouvernemental date lui de mars 2012 et nous en discutons en 2015. Comment expliquer ces délais ? S’agissait-il d’occuper les personnes qui travaillaient à cette question ?

Françoise Imbert. Les négociations de l’accord ont duré 10 ans, ce qui est long effectivement. Les conséquences sur le bassin hydrographique étaient importantes pour la France.

Michel Terrot. La principauté d’Andorre est coprésidée par le chef de l’Etat et l’évêque d’Urgell, nous traitons donc avec la moitié de nous-mêmes dans ces accords. Ces accords ont l’air de considérer Andorre comme un Etat totalement indépendant, ce qui ne semble pas être la réalité de l’exercice partagée de l’ « imperium » comme dirait Jacques Myard s’il était présent. Andorre est-il véritablement un Etat indépendant ? Comment contracter avec un Etat indépendant que nous coprésidons ?

Françoise Imbert. Le 14 mars 1993 Andorre s’est dotée d’une constitution, adoptée par référendum, qui est entrée en vigueur le 4 mai 1993 après avoir été signée par les coprinces, l’évêque d’Urgell et le Président de la République française. La Principauté est bien un Etat indépendant, un Etat à part entière reconnu comme tel depuis cette date.

Suivant l’avis de la rapporteure, la commission adopte à l’unanimité sans modification les projets de loi (n° 2489 ; n° 2490 ; n° 2491 et n° 2648).

Thierry Mariani. Dans ma circonscription, de nombreux accords binationaux concernant la non double imposition sont en suspens Notamment dans toutes les ex républiques socialistes soviétiques, comme au Tadjikistan ou en Moldavie. On attend toujours ces accords de non double imposition. Cette attente bloque les entreprises françaises. Apparemment, le ministère des finances ne pourrait réaliser que 3 conventions de non double imposition par an. Je souhaiterais que le secrétariat de la Commission puisse se renseigner pour savoir si cette assertion est exacte.

La séance est levée à dix-sept heures vingt.

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Membres présents ou excusés

Commission des affaires étrangères

Réunion du mercredi 13 mai 2015 à 17 heures

Présents. - M. Hervé Gaymard, Mme Françoise Imbert, M. François Loncle, Mme Odile Saugues, M. Michel Terrot

Excusés. - M. Kader Arif, M. Jean-Paul Bacquet, M. Patrick Balkany, M. Alain Bocquet, M. Gwenegan Bui, M. Guy-Michel Chauveau, Mme Pascale Crozon, M. Jean-Paul Dupré, Mme Valérie Fourneyron, Mme Élisabeth Guigou, M. Meyer Habib, M. Pierre Lellouche, M. Pierre Lequiller, M. Lionnel Luca, M. Patrice Martin-Lalande, M. Jean-Claude Mignon, M. Jean-Luc Reitzer, M. François Rochebloine, M. René Rouquet, M. Boinali Said, M. Michel Vauzelle