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Commission de la défense nationale et des forces armées

Mardi 9 octobre 2012

Séance de 18 heures

Compte rendu n° 6

Présidence de Mme Patricia Adam, présidente

— Audition de M. Jean-Paul Bodin, secrétaire général pour l’administration du ministère de la défense, sur le projet de loi de finances pour 2013

La séance est ouverte à dix-huit heures.

Mme la présidente Patricia Adam. Nous accueillons cet après-midi M. Jean-Paul Bodin, secrétaire général pour l'administration du ministère de la défense. Nous évoquerons avec vous la préparation de la loi de finances pour 2013, mais aussi d’autres sujets, notamment le dossier Balard et le logiciel LOUVOIS.

M. Jean-Paul Bodin, secrétaire général pour l'administration du ministère de la défense. Je commencerai par donner quelques éléments généraux sur le projet de loi de finances pour 2013. Comme M. le ministre vous l’a indiqué, c’est un budget de transition.

Nous entrons en effet dans la première année de la programmation budgétaire 2013-2015. Ce triennal, comme vous le savez, est fortement marqué par l’objectif de redressement des finances publiques : nous devons réaliser d’importantes économies par rapport à l’annuité 2013 du triennal précédent, qui était d’ailleurs déjà en retrait par rapport aux objectifs fixés en 2008. Ces économies, qui s’ajoutent à celles que nous avons déjà dû faire en 2012, toucheront le fonctionnement comme les infrastructures.

Nous prenons également acte de l’écart entre les ressources programmées au titre de la loi de programmation militaire 2009-2014 et celles effectivement affectées : pour la période 2009-2012, il s’élève à 3 milliards d’euros.

C’est enfin un budget de transition vers le nouveau modèle d’armée qui sera proposé par le Livre blanc en cours de préparation : il ne fallait pas préempter les choix qui seront faits par le Conseil de défense et de sécurité nationale au début de l’année 2013.

Ce budget prend en considération les besoins de financement de la loi de programmation militaire 2009-2014, notamment en confirmant la baisse des effectifs. Il concrétise ainsi la participation du ministère de la défense à l’effort de redressement des finances publiques. Néanmoins, vous le savez, l’objectif du ministre est de ne pas compromettre l’activité opérationnelle : en matière d’infrastructures, nous avons ainsi cherché à préserver les dépenses nécessaires à l’accueil de nouveau matériels.

Les montants inscrits dans le projet de loi de finances sont, hors pensions, de 31,4 milliards d’euros pour la mission « Défense », soit un maintien du budget prévu en loi de finances initiale pour 2012, et de 2,9 milliards d’euros pour la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation », soit une diminution de 2,4 %.

Trois programmes sont placés sous la responsabilité du secrétaire général pour l’administration (SGA) : le programme 212 « Soutien de la politique de défense », ainsi que les programmes 167 « Liens entre la nation et son armée » et 169 « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant ».

Le programme 212 vise d’abord à piloter et à coordonner des politiques transverses. Ces sont des missions confiées à des directions fonctionnelles, comme la direction des affaires financières, la direction des ressources humaines, ou encore la direction de la mémoire, du patrimoine et des archives, pour ce qui concerne la politique immobilière. Il permet ensuite de fournir des prestations dans des domaines particuliers, avec par exemple le service d’infrastructure de la défense (SID) ; le service de soutien de l’administration centrale est rattaché au SGA, qui pilote également les systèmes d'information, d'administration et de gestion (SIAG). Nous agissons également dans le domaine de l’action sociale et de la reconversion. Ces crédits permettent enfin l’accompagnement de la réforme du ministère.

Les crédits de ce programme s’élèvent à 3,513 milliards d’euros en autorisations d’engagement, en hausse de 137 millions d’euros, et 2,852 milliards d’euros en crédits de paiement, soit une baisse de 193 millions d’euros en crédits de paiement par rapport à la loi de finance initiale de 2012.

À ces crédits s’ajoutent des recettes exceptionnelles au titre des cessions immobilières ; nous les avons estimées, de façon réaliste croyons-nous, à 200 millions d’euros. Nous avons essayé de tenir compte du calendrier prévisible, mais aussi des projets de loi en cours d’élaboration, qui peuvent entraîner une décote sur certaines parties de ces emprises. Il s’agit essentiellement de cessions parisiennes : nous avons ainsi prévu de céder à la Ville de Paris ou à des investisseurs la caserne de Reuilly ; nous pensons également céder – à la Ville elle-même ou à des investisseurs – une partie de l’ensemble Bellechasse-Penthemont, l’hôtel de l’Artillerie, situé place Saint-Thomas-d’Aquin, et l’immeuble de bureaux Pépinière, proche de la place Saint-Augustin. En 2012, la caserne Lourcine, proche du Val-de-Grâce, a été vendue, notamment au CROUS, afin qu’y soient installés des logements étudiants et un internat d’excellence : une somme de 52 millions d’euros, résultat de cette transaction entre différentes structures publiques, a été versée il y a quelques jours sur le compte d’affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l’État ».

Le plafond d’emploi du programme 212 est de 13 160 équivalents temps plein travaillés (ETPT), soit une augmentation de 54 emplois. Le SGA a en effet reçu des missions transverses auparavant exercées par d’autres structures au sein du ministère : la chaîne « reconversion » et la chaîne sociale, autrefois dispersées, ont ainsi été regroupées.

En 2013, nous prévoyons le transfert de la fonction « ressources humaines » de la direction générale pour l’armement (DGA) vers le service parisien de soutien de l’administration centrale – lui-même résultat d’une fusion, en 2009, entre un établissement de la DGA et un établissement du SGA : nous continuons donc la réforme déjà engagée. Le service transféré emploie aujourd’hui 155 personnes environ et s’occupe de toute la gestion administrative du personnel de la DGA. Son transfert vers le SGA s’accompagnera d’une déflation de 45 emplois, qui devra être réalisée entre 2014 et 2017. Ce sera possible si les systèmes d’informations évoluent comme nous l’espérons.

Un transfert est également effectué en provenance des armées, à hauteur de 136 emplois, pour constituer un service de maintenance de tous les systèmes d’information de ressources humaines, à Tours, où les trois directions des ressources humaines du personnel militaire vont être regroupées. Ce nouveau service est rattaché au SGA, dont la direction des ressources humaines pilote la création d’un système d’information unique pour l’ensemble du ministère. Ce système est prévu pour 2016.

Si l’on neutralise ces mouvements, le SGA contribue aux réductions d’effectifs à hauteur de 273 emplois.

Les crédits d’investissement au profit des infrastructures représentent 1,280 milliard d’euros en autorisations d’engagement et 820 millions d’euros en crédits de paiement, ce dernier chiffre comprenant les 200 millions d’euros de recettes exceptionnelles déjà évoqués.

La comparaison entre 2012 et 2013 est rendue difficile par la mise en place d’un mécanisme de tranches fonctionnelles, qui permet de mettre en place toutes les autorisations d’engagements nécessaires dès le lancement de l’opération, éventuellement pour plusieurs années. Ce mécanisme sera notamment utilisé pour les travaux importants qui permettront d’accueillir les sous-marins nucléaires d’attaque Barracuda.

Si l’on écarte cette différence, on constate une baisse de 160 millions d’euros des crédits consacrés aux infrastructures. Nous avons, lors de la préparation du projet de loi de finances, eu des discussions avec la direction du budget qui a souhaité que, par réalisme, nous limitions notre estimation des recettes du compte d’affectation spéciale à 200 millions d’euros. Nous pensions pour notre part pouvoir aller jusqu’à 300 millions d’euros.

Compte tenu de cette baisse sensible des crédits, nous avons dû geler des opérations d’infrastructure, à hauteur de 393 millions d’euros pour 2012, et à hauteur de 351 millions d’euros pour 2013. Nous avons travaillé avec l’état-major des armées pour maintenir toutes les opérations en lien avec la condition des personnels – aménagement de bâtiments d’hébergement, par exemple – car ce sont des éléments importants pour le moral des armées. Nous avons aussi maintenu autant que possible les opérations liées à l’arrivée de nouveaux matériels – hélicoptères NH90 au 1er régiment d'hélicoptères de combat de Phalsbourg, A400M sur la base d’Orléans-Bricy, sous-marins d’attaque (SNA) Barracuda à Toulon, Cherbourg et Brest, véhicules blindés de combat d’infanterie (VBCI) à Clermont-Ferrand par exemple, frégates multi-missions (FREMM) à Brest… Nous avons également prévu de remettre en état l’intégralité des installations électriques des ports de Brest et de Toulon : ce sont des travaux très lourds mais tout à fait nécessaires.

Malgré la diminution des crédits, le service des infrastructures ne manque donc pas de travail. Ce sera peut-être une opportunité pour renforcer des compétences techniques que nous sommes presque les seuls à détenir au sein de l’État.

Pour la politique du logement familial, les crédits d’investissement s’élèvent à 45 millions d’euros, complétés par 55 millions d’euros de crédits d’entretien courant. Cela nous permet de maintenir l’adaptation du parc du ministère, qui est en cours de restructuration – depuis 2009, nous avons résilié des conventions et vendu près de 550 logements ; nous en vendrons encore 1 300 environ d’ici à 2016 ; inversement, nous avons réservé de nouveaux logements.

La dotation pour le logement familial est en baisse ; elle sera complétée par un apport de l’établissement public des Fonds de prévoyance militaire et de l’aéronautique, à hauteur de 10 millions d’euros. Ils étaient intervenus pour 18 millions d’euros en 2012. Ces fonds, vous le savez, disposent d’un « trésor de guerre » important, destinés à soutenir le personnel militaire en cas d’accident et d’invalidité : il n’est pas absurde d’utiliser ces fonds au profit de la communauté militaire, et en l’occurrence au profit des cotisants à ces fonds, car ils pourraient, sinon, être préemptés par Bercy.

Les crédits relatifs aux systèmes d’information, d’administration et de gestion (SIAG) s’élèvent à 118  millions d’euros en autorisations d’engagement et 106 millions d’euros en crédits de paiement, soit une baisse de 8 %. La priorité est donnée aux systèmes d’information destinés à la gestion des ressources humaines – j’y reviendrai.

Le ministre a évoqué devant vous la politique de ressources humaines. Je souligne simplement les mesures catégorielles ; au sein d’une enveloppe de 60 millions d’euros, 15 millions d’euros sont prévus pour le personnel civil. Nous discutons également de mesures en faveur du personnel de l’action sociale : nous espérons aboutir, car, compte tenu de leur charge de travail, leurs rémunérations méritent d’être confortées.

En baisse de 20 millions d’euros, le budget de l’action sociale retrouve son niveau de 2009. Nous avons préservé les crédits destinés aux actions en faveur des jeunes enfants et des personnes handicapées, ainsi qu’au soutien aux familles des militaires en opération.

J’en viens à l’accompagnement des restructurations. En matière d’accompagnement social, nous avons prévu environ 100 millions d’euros, soit à peu près les mêmes crédits que l’an dernier, pour les aides au départ des personnels militaires. Les crédits relatifs aux indemnités de départ volontaire pour les ouvriers d’État sont en baisse d’une dizaine de millions d’euros : les départs sont moins nombreux, parce que beaucoup se sont décidés dès le lancement du programme, mais aussi en raison de la loi sur les retraites, donc de l’allongement des durées de service, et de la situation économique. Nous risquons donc de rencontrer des difficultés pour gérer les restructurations.

En matière d’infrastructures, le nouveau plan de stationnement des unités continue de se mettre en place. Ainsi, nous consacrerons 11 millions d’euros à la poursuite de l’installation des groupes de soutien des bases de défense et des centres d’information et de recrutement des forces armées. Des travaux sont conduits à Tours pour accueillir la direction du personnel militaire de la marine et à Orléans pour créer une plate-forme logistique du service de santé.

Nous avons prévu, pour le volet économique de l’accompagnement des restructurations, une dotation de 60 millions d’euros en autorisations d’engagement du Fonds d’accompagnement des restructurations de défense (FRED). Nous commençons maintenant à mettre en œuvre les contrats de redynamisation de sites de défense et les plans locaux de redynamisation. Quarante-quatre contrats sur les cinquante-huit prévus sont déjà signés.

Les crédits de fonctionnement du ministère sont réduits : comme le ministre vous l’a dit, nous appliquons, comme l’ensemble du Gouvernement, une baisse de 7 %. Nous avons essayé de préserver autant que possible les crédits de soutien des bases de défense, puisque les dotations de 650 millions d’euros prévues en 2012 sont insuffisantes : il faudrait qu’elles atteignent 720 à 730 millions d’euros. Nous avons donc fait porter l’effort sur les structures centrales : les crédits de fonctionnement prévus au programme 212 sont donc réduits de près de 53 millions d’euros, dont près de 14 millions pour les seuls crédits de l’administration centrale.

Le programme 167 « Liens entre la nation et son armée » regroupe les moyens de la direction du service national et ceux destinés aux actions de mémoire, pilotés par la direction de la mémoire, du patrimoine et des archives. Les crédits de paiement sont de 119 millions d’euros, soit une augmentation de 1,15 % ; 102 millions d’euros sont consacrés à la journée défense et citoyenneté (JDC), et 17,2 millions d’euros à la politique de mémoire, en augmentation de 6 millions d’euros.

La direction du service national, maintenant installée à Orléans, a achevé sa réorganisation. Elle compte 370 militaires et 1 070 civils ; une réduction d’une soixantaine d’emplois est prévue pour 2013 et les effectifs doivent se stabiliser, à partir de 2014, autour de 1 370 emplois. L’organisation de la journée défense et citoyenneté donne globalement satisfaction ; le ministre a évoqué devant vous des pistes pour l’améliorer. Elle coûte aujourd’hui environ 154 euros par participant ; nous espérons réduire ce coût à 151 euros en 2013.

L’augmentation des crédits de la politique de mémoire est due à la nécessité de commencer à travailler sur les commémorations, en 2014, de 1944 et de 1914. Nous avons également prévu 1 million d’euros pour le monument aux morts en opérations extérieures, qui doit être érigé à proximité des Invalides.

Le programme 169 « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant » finance les actions en faveur des anciens combattants et victimes de guerre, ainsi que les subventions pour charge de service public de l’Office national des anciens combattants (ONAC) et de l’Institution nationale des Invalides (INI).

Les crédits alloués à la dette viagère sont de 2,3 milliards, en baisse de 3,5 %, en raison de la diminution du nombre de bénéficiaires ; nous avons pris en compte l’évolution du point d’indice : 54 millions d’euros étaient nécessaires pour procéder à l’extension, en année pleine, de l’augmentation de quatre points de la retraite du combattant effective depuis le 1er juillet 2012. Nous avons essayé de mettre l’accent sur les prestations de sécurité sociale en faveur des anciens combattants, en augmentant l’enveloppe de 11 millions d’euros. Les crédits d’action sociale sont de 20,6 millions d’euros, en augmentation de 500 000 euros.

L’ONAC est engagé dans la mise en œuvre d’un contrat d’objectifs et de moyens. Il dégagera une économie de 150 emplois sur la période 2009-2013.

L’INI est également engagé dans la mise en œuvre d’un plan d’établissement pour la période 2009-2013, et d’un contrat d’objectifs et de performance pour la période 2010-2013. Nous avons convaincu Bercy de l’utilité d’un programme important de rénovation des locaux de l’INI : à la suite de différents mouvements au sein de l’Hôtel des Invalides, l’INI disposera de locaux beaucoup plus importants et pourra mettre aux normes les chambres d’accueil de ses pensionnaires, puis rénover ses installations techniques. On parle de ces travaux depuis une bonne dizaine d’années… L’INI financera la première tranche grâce à son fonds de roulement, et nous avons réussi à inscrire 5,5 millions d’euros d’autorisations d’engagement en subventions exceptionnelles, dans le cadre de la programmation triennale à l’horizon 2015.

J’en arrive au dossier Balard. Le projet de regroupement des services centraux du ministère sur ce site a été plusieurs fois présenté devant la Commission : il vise à améliorer la gouvernance du ministère, mais aussi à réduire nos coûts de fonctionnement, notamment en abandonnant une quinzaine d’emprises aujourd’hui réparties dans Paris. C’est aussi un projet architectural.

Il se situe sur deux parcelles, séparées par l’avenue de la porte de Sèvres, l’une aujourd’hui occupée par la cité de l’air, de 8,5 hectares, l’autre de 8 hectares, à l’ouest. Sur cette dernière, nous avions accepté l’inscription dans le PLU, en 2005, d’une servitude pour l’installation d’un garage à bus – avec d’autant moins d’inquiétude que nous envisagions à l’époque de céder ces terrains. Le PLU prévoit aussi la césure en deux de cette parcelle ouest, par une voie qui irait vers Issy-les-Moulineaux, ou le périphérique, en deux parcelles de 5 et 3 hectares.

Sur la parcelle est, la réfection de l’une des tours est achevée ; la gestion en sera confiée dans quelques semaines au groupement Opale-Défense. La tour de la DGA est en réfection. Ces deux opérations ne font pas partie du partenariat public-privé (PPP) Balard ; elles sont financées par des crédits du ministère, car elles ont été lancées avant que le partenariat ne soit engagé.

Le PPP porte sur la réalisation, sur la parcelle de 5 hectares, de bâtiments destinés à accueillir les services du ministère, et sur la réhabilitation d’immeubles de la cité de l’air ; sur les 3 hectares de la « corne ouest », à proximité de la société SAFRAN, des immeubles de bureaux doivent être construits afin d’être loués pour une durée de soixante ans. Cette location intervient dans l’équilibre financier de l’ensemble du projet.

Tous ces éléments ont fait l’objet de discussions avec la Ville de Paris, associée à l’ensemble des commissions qui se sont réunies. Des architectes mandatés par la Ville se sont ainsi prononcés sur ce projet. Mais il existe de toute évidence des distorsions entre le PLU et le projet qui a été élaboré.

Le préfet de Paris a, conformément au code de l’urbanisme, engagé une procédure de déclaration de projet pour, en quelque sorte, mettre le PLU en conformité avec le projet. Une délibération négative de la Ville de Paris est intervenue, ce qui peut se comprendre. Le préfet a néanmoins pris une déclaration de projet, le 17 février 2012, et ensuite accordé le permis de construire pour les différents projets.

La Ville de Paris a déposé des recours devant le tribunal administratif. Elle y évoque des éléments de procédure, notamment sur la longueur des voiries, l’absence de consultation d’une commission… Après une analyse juridique du ministère, de la préfecture et du groupement Opale, et dans la mesure où les recours de la Ville ne portent pas sur le permis relatif à la construction des immeubles du ministère mais sur les constructions prévues sur la « corne ouest », j’ai signé, le 20 avril dernier, un avenant de poursuite des travaux de construction du ministère. Le contentieux demeure sur le garage à bus – dont la RATP ne voulait plus en 2008, mais qui permettrait de libérer l’emprise RATP de la Croix-Nivert, où la Ville voudrait construire des logements sociaux. Ces logements nous intéressent d’ailleurs, puisqu’ils seraient proches du nouveau ministère : nous avons indiqué à la Ville de Paris que nous souhaiterions y réserver des logements. Les discussions continuent et différentes solutions sont étudiées, notamment celle, sur l’héliport, d’un garage provisoire au financement duquel le ministère pourrait participer.

Le calendrier des travaux a été légèrement retardé par ce contentieux, mais les autorisations de voirie sont maintenant signées. Les travaux de construction des immeubles du ministère se déroulent donc normalement, et on peut penser que les déménagements commenceront au début de l’année 2015.

Parallèlement, nous avons eu des discussions avec notre partenaire Opale, notamment parce que nous avons trouvé des terrains plus pollués que nous ne le pensions. Un avenant au contrat est en cours de négociation.

L’aménagement de la « corne ouest » est en revanche arrêté : 257 millions d’euros d’autorisations d’engagement ont donc été gelés. Tant qu’il y a un contentieux, le groupement Opale et les assureurs refusent en effet d’intervenir ; si le contentieux n’est pas réglé au mois de mai prochain, la question de l’intervention de l’État se posera.

Quant au logiciel unique à vocation interarmées de la solde (LOUVOIS), c’est un sujet difficile. C’est un projet ancien, piloté par le commissariat de l’armée de terre et repris depuis deux ans par la direction des ressources humaines du ministère parce qu’il a été décidé de l’utiliser pour l’ensemble de la rémunération des personnels militaires du ministère. La bascule des armées dans ce système se fait suivant un calendrier que nous avons aménagé au fil du temps, en fonction des difficultés rencontrées, et normalement après plusieurs mois de tests.

Cette bascule exige un gros travail d’harmonisation et d’adaptation à la réglementation. En effet, avec la bascule du service de santé, nous avons rencontré des difficultés par exemple de prise en compte des gardes hospitalières. La bascule de la marine nous a également permis de découvrir des régimes indemnitaires qui n’étaient pas toujours conformes à la réglementation.

L’armée de terre a basculé avec retard, car nous avions de très grosses inquiétudes. M. le ministre s’est rendu sur le terrain, à Varces, il y a quelques jours ; mais vous vous souvenez certainement qu’une visite de son prédécesseur un an auparavant avait révélé des situations tout à fait similaires. Par exemple, des indemnités, notamment de service en campagne, ne sont pas versées. Il me paraît toutefois difficile d’accuser LOUVOIS du non-paiement d’indemnités dues au titre des années 2009 à 2011 !

Quelles que soient les responsabilités, il faut maintenant traiter ces dossiers. M. le ministre a annoncé un plan la semaine dernière. Nous devons absolument réussir. Des milliers de dossiers doivent être traités. Le centre d’appel est extrêmement sollicité. Il existe, c’est vrai, des problèmes techniques de calculateur, qui sont de notre fait. Il y a aussi des problèmes liés à l’organisation de la fonction RH au sein de l’armée de terre et au fait que celle-ci a été très secouée par la fermeture des centres techniques et administratifs du Commissariat.

Il faudra tirer les leçons de ces errements pour la bascule de l’armée de l’air ; nous avons décidé de la retarder. La gendarmerie basculera en fin de période.

Enfin, nous sommes en train de mettre en place un nouveau système unique pour la paye du personnel civil, ALLIANCE, qui gère à la fois les RH et la paye.

Je suis très attentif, mais nous sommes pressés par le temps : le ministère doit basculer, dès 2017, dans une structure de paye unique pour l’ensemble de l’État, l’opérateur national de paye (ONP). Nous serons d’ailleurs l’un des derniers ministères à le faire. Au préalable, en 2015 et 2016, nous devons mettre en place un système d’information RH unique pour l’ensemble des personnels, civils et militaires, du ministère de la défense.

C’est donc une véritable course d’obstacles. Un audit de la chaîne « soldes » est en cours dans l’armée de terre. Des missions se rendent dans chaque régiment pour traiter les dossiers en souffrance : il n’est assurément pas normal que les indemnités de 2010 et 2011 ne soient pas payées, et le mécontentement des personnels est plus que compréhensible. LOUVOIS fera également l’objet d’un audit,

C’est donc un dossier complexe, dans lequel les responsabilités sont nombreuses. Chacun doit désormais se mettre en ordre de marche pour régler les problèmes qui demeurent.

M. Alain Marty. Merci de ces explications.

Cette commission a toujours considéré l’affectation au budget du ministère de la défense de toutes les recettes issues de la vente d’actifs immobiliers comme une bonne mesure. Quelles seront les conséquences des cessions gratuites décidées par le Gouvernement pour favoriser le logement social ? Quelles parcelles pourraient être concernées ?

Nul ne nie la nécessité de maîtriser les dépenses publiques, mais les auditions que j’ai menées en qualité de rapporteur pour avis pour le soutien et la logistique interarmées montrent de réels problèmes. Ainsi, le fonctionnement des bases de défense semble excessivement difficile : un budget de 770 millions d’euros doit semble-t-il être considéré comme un minimum. Quelle est votre analyse ? Ce montant sera-t-il atteint ?

Mes interlocuteurs ont également souligné que toute baisse du budget destiné au maintien en condition opérationnelle pourrait amener une forte dégradation du fonctionnement de nos armées. Qu’en pensez-vous ?

Vous avez évoqué une baisse des investissements. Un gel de 236 millions d’euros a déjà été décidé. Or l’accueil des véhicules blindés de combat d’infanterie (VBCI) et des frégates multi-missions (FREMM) nécessite des aménagements, notamment à Brest et à Toulon, dont certains ont été reportés. Nos équipements fonctionnent, certes, mais de façon dégradée. Avez-vous conscience de ces préoccupations ?

Enfin, le service de santé des armées a fait l’objet d’un sévère rapport thématique de la Cour des comptes. D’importants efforts de réorganisation sont menés ; la possibilité de fermer certains hôpitaux d’instruction des armées a notamment été évoquée. Une aile de l’hôpital Bégin a été rénovée, mais les travaux ont été arrêtés, ce qui fait craindre un abandon. Où en est votre réflexion sur ce sujet ?

Mme Daphna Poznanski-Benhamou. Monsieur le secrétaire général, j’ai eu le plaisir de vous auditionner dans le cadre de mon rapport pour avis sur le budget des anciens combattants. À la suite du rapport Thorette, le ministère de la défense a décidé la construction d’un monument dédié aux soldats morts pour la France en OPEX. Si nous soutenons cette initiative, le coût du monument inscrit dans le projet de loi de finances pour 2013 – un million d’euros – nous paraît élevé. L’association en charge d’un monument dédié aux soldats français morts dans les Balkans, installé à Haudainville, est prête à en faire don et à le faire déplacer à Paris pour le dédier à tous les soldats morts en OPEX. Pourquoi cette solution moins onéreuse n’a-t-elle pas été retenue par le ministère de la défense ? Le million d’euros ainsi économisé pourrait être redéployé en direction des crédits sociaux de l’ONAC pour financer par exemple une augmentation de l’aide différentielle servie aux conjoints survivants à hauteur du seuil de pauvreté.

Pourriez-vous exposer le partage des compétences entre l’hôpital de Percy, qui dépend du service de santé des armées, et l’Institution nationale des Invalides qui dépend du ministre chargé des anciens combattants ? L’essentiel des missions de l’INI est désormais assuré par Percy qui dispose d’équipes plus nombreuses et de plateaux techniques plus performants ; des doublons – par exemple deux piscines – sont également à noter. Comment assurer à l’avenir une meilleure complémentarité entre ces deux entités ?

M. Jean-Paul Bodin. À l’heure actuelle, nous récupérons 100 % du produit de cessions d’immeubles et, tout comme vous, nous espérons que ce système sera maintenu. Les cessions gratuites ou avec décote ne constituent pourtant pas un élément nouveau puisque dans le cadre de la mise en œuvre de l’actuelle loi de programmation militaire, le précédent Président de la République avait décidé que certains immeubles seraient cédés à un euro symbolique aux villes les plus touchées par les restructurations. Pour le ministère de la défense, ces cessions à titre gratuit ont généré des pertes – 94 millions d’euros – mais également des gains, car le fait que des immeubles aient été rapidement repris par les collectivités locales nous a épargné des frais de gardiennage et d’entretien.

Les textes actuellement en élaboration prévoient une décote sur la partie des emprises qui sera dédiée au logement social. C’est dans les grandes villes, et notamment à Paris, que les décotes risquent d’être les plus importantes. La caserne de Reuilly – où le Premier ministre s’est rendu le 7 septembre 2012 pour annoncer sa politique en matière de construction de logements – en fournit un exemple, même si l’on ne sait pas encore quelle surface en sera affectée aux logements sociaux. L’îlot Saint-Germain, dont la ville de Paris pourrait également transformer une partie en logements, en fournit un autre, même si, étant donné l’état de l’immeuble, une telle réutilisation nécessiterait des investissements importants.

Nous sommes prêts à mettre en œuvre les orientations du Gouvernement, et ouverts à la discussion. Cependant, nous entendons également défendre les intérêts des armées, et nous garderons les immeubles dont nous avons besoin.

S’agissant des bases de défense, il est indispensable de donner une marge de manœuvre à leurs commandants en déconcentrant au maximum les crédits. En 2012, ils ont ainsi été autorisés à tirer sur les lignes de crédit au sein du programme 212, notamment pour la réalisation de travaux d’entretien. L’audit commandé par l’État-major des armées – EMA – a évalué le besoin en dotation des bases de défense à 770 millions d’euros ; l’enveloppe est aujourd’hui d’environ 650 millions d’euros, et il a été décidé de la porter à 720 millions d’euros dans le budget 2013, à compléter au besoin en cours d’année par des mesures de redéploiement. Il est toutefois certain qu’avec la dotation actuelle, les difficultés se feront sentir dès le courant du mois d’octobre. Les crédits de maintien en condition opérationnelle – MCO – augmentent dans le budget d’environ 220 millions d’euros, soit de 8 % ; les crédits pour l’entretien programmé du matériel, qui représentent 2,9 milliards d’euros en crédits de paiement, sont également en hausse, suivant le souhait du ministre.

Vous avez évoqué des baisses d’investissements ; sachez que ceux qui concernent l'infrastructure permettant de recevoir les véhicules blindés de combat d’infanterie (VBCI) et les quais de Toulon ont été simplement décalés de 2012 sur 2013, et figurent dans le projet de loi de finances pour 2013.

S’agissant du service de santé, l’hypothèse de suppression d’hôpitaux n’est pas envisagée. L’état de leurs infrastructures nécessite en revanche d’importants travaux dans les dix années à venir, dont la réalisation dépendra des enveloppes qui nous seront allouées. Une tranche de travaux a déjà été effectuée sur l’hôpital de Bégin, et doit normalement reprendre en 2013 ; une autre est en cours sur l’hôpital du Val-de-Grâce.

Nous avons en effet prévu un million d’euros pour la réalisation du monument aux morts en OPEX. Si le monument d’Haudainville que vous évoquez, madame la députée, est celui qui était géré par le Souvenir français, il n’a pas été jugé adapté à l’objectif. Par ailleurs, ce budget comprend, outre la réalisation du monument matériel, la dépense liée à la mise en place de son pendant virtuel, à savoir un répertoire informatisé des noms de tous les soldats honorés, accompagnés de fiches de carrière.

Mme Daphna Poznanski-Benhamou. C’est tout de même cher pour un site Internet, même interactif ! Cette somme me paraît démesurée dans un temps de disette budgétaire, alors que nous essayons tous de trouver des fonds pour aider socialement nos anciens combattants.

M. Jean-Paul Bodin. Nous reviendrons sur cette question, afin de voir si ces moyens peuvent être redéployés vers d’autres lignes de crédit.

S’agissant de l’aide différentielle en faveur des conjoints survivants – portée depuis quelques semaines à 900 euros –, le problème n’est pas tant d’augmenter les crédits que de consolider le régime juridique sur lequel elle repose. Elle est en effet accordée aux conjoints survivants de pensionnés Français sur le critère de résidence en France. On en vient à se demander si d’autres outils d’action sociale dont dispose l’ONAC ne pourraient pas remplacer ce système juridiquement fragile. Si les crédits prévus aujourd’hui dans le budget suffisent à couvrir la dépense, une augmentation pourrait être étudiée. Les associations d’anciens combattants rappellent d’ailleurs que non seulement les conjoints, mais également certains pensionnés eux-mêmes qui ne disposent que de très faibles revenus pourraient profiter d’un dispositif comparable.

Mme la présidente Patricia Adam. Une mission d’information sera prochainement mise en place sur la question des anciens combattants.

M. Jean-Paul Bodin. L’INI et l’hôpital de Percy sont complémentaires : Percy est un hôpital classique ; l’INI une structure plus spécialisée, capable d’accueillir des patients pour de longues durées, et qui a développé un savoir-faire important dans la chirurgie orthopédique et celle des escarres. Les anciens combattants fortement handicapés – notamment les vétérans de la guerre d’Algérie – y font des séjours fréquents, parfois plusieurs fois par an. La complémentarité est également celle des équipes, certains personnels – dont les réanimateurs et les anesthésistes – partageant leur temps entre l'INI et le SSA. Enfin, si l’une relève du service de santé des armées et l’autre du ministère des anciens combattants, les deux dépendent du ministère de la défense, le directeur de l’INI étant d’ailleurs un médecin général du service de santé des armées.

M. Nicolas Dhuicq. Monsieur le secrétaire général, depuis 1995, aucune structure publique n’a dû consentir autant d’efforts que nos armées, et l’on continue à leur en demander. J’imagine l’ampleur des mouvements sociaux si le gel des 30 % des avancements imposé aux militaires était appliqué dans les hôpitaux ou dans l’éducation nationale ! Dans ce contexte, comment les administrations du ministère de la défense peuvent-elles contribuer à l’effort ?

M. Jean-Jacques Candelier. Vous avez déjà évoqué, monsieur le secrétaire général, les problèmes liés au système LOUVOIS ; il s’agit désormais de répondre au mécontentement qu’il suscite et qui ne fait que se renforcer.

Les crédits affectés à l’indemnisation des victimes des essais nucléaires sont disproportionnés par rapport aux dépenses réelles. Malgré l’assouplissement des règles d’indemnisation, les dix millions d’euros prévus dans le budget de cette année ne seront pas dépensés. Quel est votre avis sur cette question, et sur quelle base ce montant a-t-il été établi ?

M. Jean-Paul Bodin. Le ministère connaît en effet des évolutions importantes depuis 1995. En revanche, le gel des 30 % des avancements n’est pas encore décidé ; il fait l’objet de discussions que nous menons avec le ministère de l’économie et des finances, sous l'autorité du Premier ministre. Des mesures en matière d’avancements doivent nécessairement être envisagées puisque nous avons un glissement vieillissement technicité – GVT – positif, notamment pour les officiers, ce qui peut porter préjudice à l’objectif de maîtrise de la dépense de personnel de l’État. Dans quelques jours, nous aurons les conclusions de l’audit de l’Inspection générale des finances et du Contrôle général des armées sur cette question. Cela dit, la loi de programmation militaire prévoyait que la moitié des économies réalisées devait revenir à l’équipement et l’autre au personnel.

Les structures de l’administration du ministère ont elles aussi été profondément réorganisées depuis 1995. On peut citer la création, déjà évoquée, d’un service d’infrastructure en 2005, celles d’un service historique et d’un service du commissariat unique, d'une agence unique de reconversion du personnel militaire, mais également toute une série de réaménagements internes au sein des grandes directions de l’administration centrale. Par ailleurs, cette dernière connaît elle aussi des réductions sensibles d’effectifs : sur l’ensemble de la période 2007-2014, les effectifs des services du SGA devraient ainsi baisser de 25 %. On peut certainement aller plus loin, mais pour qu’elle aboutisse, la réduction du format des structures centrales doit reposer non sur des objectifs chiffrés autoritaires mais sur une analyse du fonctionnement des services. Nous travaillons ainsi actuellement sur la mise en commun des outils, dans le domaine financier et celui des ressources humaines, entre les services du SGA, de l’EMA et de la Direction générale de l’armement – DGA.

En matière d’indemnisation des victimes des essais nucléaires, les bonnes intentions de la loi ont du mal à se concrétiser : sur les quelque six cents dossiers examinés, une dizaine seulement ont reçu une réponse positive, dont trois dossiers de Polynésiens. À l’époque de l’élaboration de la loi, les associations ont fait pression pour qu’aucun représentant du ministère n’entre au comité indépendant d’indemnisation. Outre le président, membre du Conseil d’État, et le vice-président magistrat, il ne comprend que des médecins spécialistes qui examinent chaque dossier en tenant compte des listes de maladies prévues dans la loi, et de l’ensemble du dossier médical de la personne. L’indemnisation intervenant dès qu’on atteint 1 % de probabilité que la maladie soit due aux essais, les réponses positives auraient pu être bien plus fréquentes. Mais il est difficile d’établir des critères objectifs qui permettraient de sortir de ce système sans aller jusqu’à une présomption irréfragable qui conduirait à indemniser tous les cancers.

Mme la présidente Patricia Adam. Les dossiers refusés tenaient-ils compte de l’ajout, à la liste des maladies, du myélome et du lymphome ?

M. Jean-Paul Bodin. Il y a en effet environ soixante-dix dossiers en cours de révision, à la fois en raison des maladies ajoutées et du redécoupage des zones géographiques concernées. Il y a également un problème de dialogue avec les associations : très peu de dossiers arrivent de Polynésie, alors qu’ils nous avaient été annoncés.

M. Damien Meslot. Monsieur le secrétaire général, j’ai été surpris de vous entendre dire que la diminution des crédits était une opportunité. Je pense pour ma part que c’était une calamité ; je suis particulièrement chagriné par la baisse de 2,4 % – ou 4,4 % si l’on tient compte de l’inflation – du budget des anciens combattants.

En parlant des livraisons de matériels, vous n’avez pas évoqué celles des lance-roquettes unitaires – LRU – dont treize devaient être livrées en 2013, et treize autres programmées. Ces livraisons sont-elles annulées ou reportées, ou bien ne les avez-vous simplement pas citées ?

M. Christophe Guilloteau. Le ministre de la défense a annoncé hier, en visite à la base aérienne de Bricy, qu’il y aurait une redéfinition du nombre des bases de défense, qui sont aujourd’hui soixante. Auriez-vous des éléments de réponse à nous donner sur le sujet ?

Pour revenir au budget des anciens combattants, pourquoi ne pas avoir fait un petit effort sur leur retraite ? Ce n’est pas l’argent, mais la reconnaissance qu’ils demandent, et c’était important pour eux.

Enfin, vous ne pourrez peut-être pas me répondre, mais avez-vous une estimation de l’économie que représentera pour la défense française le retour de nos troupes d’Afghanistan, une fois achevé ?

M. Alain Chrétien. Les pupilles de la Nation constituent un sujet d’interrogation récurrent depuis longtemps. Quelle est votre position sur le décret unique qui permettrait une égalisation du traitement des victimes civiles, notamment en relation avec les décrets de 2000 et de 2004 ?

L’Association pour la reconversion civile des officiers et des sous-officiers – ARCO – devra-t-elle céder ses missions à un organe interne du ministère de la défense ? Certes, il s’agit d’un doublon, mais cette association a des résultats très positifs depuis de nombreuses années. Surtout, est-ce le moment de prendre cette décision, sachant que près de 8 000 personnes vont quitter l’armée l’année prochaine et devront se reconvertir ?

M. Jean-Paul Bodin. Si la baisse des crédits peut être vue comme une opportunité, c’est parce qu’elle a obligé le service d’infrastructure à se consacrer à des travaux à haute technicité – notamment maritimes et portuaires – qui nécessitent un savoir-faire important que nous avions quelque peu perdu. On peut citer le dragage de boues dans le port de Toulon, ou les chantiers de l’Île Longue. Les immeubles de bureaux peuvent être construits par n’importe quel prestataire extérieur ; le service d’infrastructure du ministère de la défense n’est utile que s’il possède un savoir-faire particulier nécessaire à la réalisation d’installations militaires.

La baisse du budget des anciens combattants de 2,4 % représente un ajustement qui correspond à la diminution de leur nombre. La tendance, ancienne, est une conséquence du phénomène naturel de vieillissement de la population.

S’agissant des LRU, j’ai parlé non de livraison de matériels, mais de travaux d’infrastructure qui y sont liés ; or, à ma connaissance, l’arrivée de ce type de matériel n’en nécessite pas. Concernant le LRU en tant que tel, je vous suggère de poser la question au délégué général pour l’armement.

Je ne sais pas si le ministre de la défense a dit que le nombre des bases de défense allait être revu…

M. Christophe Guilloteau. Si l’on en croit la dépêche AFP, il aurait dit que leur nombre « n’[était] pas figé dans le marbre ».

M. Jean-Paul Bodin. Il n’y en aura certainement pas plus, mais y en aura-t-il moins ? La carte peut être revue en fonction des préconisations du contrat opérationnel qui sortira du Livre blanc, mais les possibilités de regroupement sont limitées à la fois en termes de distance – une élongation d’une heure et demie entre deux structures d’une base est déjà difficile à gérer – et en termes d’effectifs, les bases étant déjà suffisamment lourdes. Celle de Tour réunit aujourd’hui 4 600 personnes et en réunira à 6 800 d’ici à deux ans. Celle de Bourges-Avord, qui se trouve à proximité, représente également près de 6 000 personnes. Faut-il faire une base de défense unique de 12 000 personnes ? La création de très grosses bases n’est possible que là où, comme à Brest ou à Toulon, le fonctionnement antérieur facilite le rapprochement ; elle peut être problématique dès lors qu’il s’agit de réunir des structures interarmées aux cultures différentes. Il faut donc veiller à ne pas déstabiliser le dispositif.

À ma connaissance, on n’a pas encore de chiffre consolidé au niveau de l’ensemble du ministère concernant les économies liées au retour d’Afghanistan. Le chef d’État-major des armées – CEMA – pourra vous donner plus de précisions.

Je suis incapable de répondre de façon précise à la question sur les pupilles de la Nation. Afin d’éviter les inexactitudes, je préfère vous adresser des éléments de réponse. Je vous prie de m’en excuser.

La direction des affaires juridiques – DAJ – nous a alertés sur la situation juridique problématique par rapport à l’ARCO, l’administration pouvant être soupçonnée de gestion de fait de l’organisme. L’action de l’ARCO a été utile, mais ce dispositif ne peut pas être maintenu. Le suivi des militaires en reconversion sera à l’avenir assuré par l’agence de reconversion qui travaillait avec l’association.

M. Alain Chrétien. Le recours à la procédure de délégation de service public – DSP – n’aurait-il pas permis de régler les problèmes juridiques en permettant à l’ARCO de continuer son travail ?

M. Jean-Paul Bodin. Je vérifierai ce point.

M. Philippe Nauche. Je ne doute pas de votre volonté de résoudre les problèmes liés à LOUVOIS ; mais certains militaires et leurs familles sont aujourd’hui dans une situation très compliquée. Au niveau local, les responsables des bases de défense ont-ils la possibilité de se mettre en relation avec les banques ou de générer des crédits d’avance ?

S’agissant des emprises qui seraient cédées avec une forte décote, en particulier en région parisienne, avez-vous d’ores et déjà un accord avec les potentiels acheteurs sur la quantité de logements sociaux qu’il serait possible de réserver ? Pour nombre de familles de militaires qui se retrouvent nommés à Paris, arriver à se loger est en effet très difficile tant le rapport entre la solde et le prix des loyers est parfois disproportionné.

Alors qu’on assiste, depuis des années, à une disparition programmée des personnels civils, ne pourrait-on pas leur confier une partie des tâches promises à l’externalisation ? Cette solution intermédiaire permettrait de leur redonner une véritable perspective.

M. Jacques Lamblin. Vous avez déjà répondu avec précision aux questions concernant le dysfonctionnement du logiciel LOUVOIS. Je me joins à M. Philippe Nauche pour appeler à tenir compte de la dimension humaine du problème. En attendant que le problème technique soit réglé, ne pourrait-on pas mettre en place un dispositif transitoire pour les personnels militaires qui sont dans l’attente de sommes importantes dont on est certain qu’elles sont dues ?

Vous avez dit que l’ONAC devrait quitter les Invalides ; cette perspective est-elle vécue avec bonheur par l’Office, et au-delà par les anciens combattants ? Vous avez également précisé que le déménagement coûterait trois millions d’euros ; sans avoir d’idée précise sur la dimension de ce service, cette somme me paraît élevée. Est-il urgent de le faire en cette période de disette budgétaire ?

M. Jean-Paul Bodin. Pour pallier les dysfonctionnements de LOUVOIS, il faudrait en effet utiliser les dispositifs liés à l’action sociale. Je ne comprends pas pourquoi, alors que certaines indemnités dues au titre de l’année 2009 ne sont toujours pas payées en 2012, Par ailleurs, à côté du problème des sommes non versées, nous avons, depuis quelques jours, celui des sommes trop versées, certaines indemnités ayant été payées deux fois. Certaines personnes auront également un problème de situation fiscale, devant déclarer des sommes qui ne correspondent pas à la réalité de leurs revenus. J’espère que le fait que l’affaire prenne de l’ampleur permettra à tous de se mobiliser à la recherche de solutions.

Les quantités de logements qu’on pourrait réserver dans le cadre de la cession d’emprises font partie des discussions. Nous nous préparons, avec le cabinet du ministre, à saisir la Ville de Paris d’une demande de réservation sur la caserne de Reuilly et sur d’autres sites parisiens, sachant que 75 % du personnel du ministère peuvent prétendre aux logements sociaux. Cette démarche n’a rien de nouveau : sur les 50 000 logements de notre parc, 10 000 relèvent du droit privé, une dizaine de milliers sont des logements dits de fonction, mais le reste résulte des conventions de réservation passées principalement avec des bailleurs sociaux.

S’agissant des externalisations, on pourrait en effet « civilianiser » certaines fonctions de soutien. Ce sujet, sur la table depuis le début de la réforme, fait l’objet de discussions complexes avec les États-majors qui doivent parvenir à la fois à organiser une deuxième carrière pour les militaires et à avoir une réserve de personnels qu’on puisse projeter en opération. On peut sans difficultés augmenter le pourcentage de personnels civils sur certaines fonctions comme l’alimentation ou la maintenance, mais aussi le nombre de civils qui occupent des postes de responsabilité dans les bases de défense. Le ministre nous a demandé d’ouvrir un chantier avec les organisations syndicales sur la mobilité du personnel civil, le projet étant d’ouvrir des postes de responsabilité aux civils sous réserve qu’ils ne les occupent pas pendant une trop longue période. Mais les discussions ont bloqué dans le passé lorsque les organisations syndicales ont posé la question des emplois que cette mobilité pourrait concerner, la liste de postes se révélant difficile à construire. Le fait que le ministre ait annoncé, lors de la présentation du budget aux organisations syndicales, que ce sujet était pour lui prioritaire, permettra de dépasser ce blocage.

À côté des externalisations et à la demande des syndicats, nous avons développé – par exemple dans l’alimentation qui représente un nombre substantiel d’emplois au sein du ministère – un mécanisme de régie rationalisée qui consiste à conserver la fonction en interne, mais à remettre à plat toute l’organisation du travail. Mis en oeuvre à titre expérimental sur cinq sites, ce mécanisme a permis de dégager des économies. Certes, l’externalisation en génère plus encore – notamment au niveau des rémunérations, en cas de transfert de personnels aux partenaires privés – mais la régie rationalisée est déjà un pas en avant. À la fin du mois d’octobre, nous présenterons aux organisations syndicales un bilan comparé des externalisations et de la régie rationalisée.

Concernant l’ONAC, il y a malentendu : il ne quitte pas les Invalides, mais afin de permettre la réalisation de travaux de rénovation à l’INI, il se déplace dans des bâtiments qui étaient occupés par la direction régionale de la gendarmerie et qu’il faut réorganiser étant donné leur état. Sortir l’ONAC des Invalides n'a pas été envisagé, et ce déplacement même n’a été accepté qu'après discussion par son conseil d’administration.

Mme la présidente Patricia Adam. Monsieur le secrétaire général, je vous remercie.

La séance est levée à vingt heures.

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Membres présents ou excusés

Présents. – Mme Patricia Adam, M. François André, M. Nicolas Bays, M. Daniel Boisserie, M. Jean-Jacques Bridey, M. Jean-Jacques Candelier, Mme Nathalie Chabanne, M. Guy Chambefort, M. Alain Chrétien, Mme Catherine Coutelle, M. Nicolas Dhuicq, M. Jean-Pierre Fougerat, Mme Geneviève Gosselin, M. Christophe Guilloteau, M. Marc Laffineur, M. Jacques Lamblin, M. Charles de La Verpillière, M. Gilbert Le Bris, M. Alain Marty, M. Damien Meslot, M. Jacques Moignard, M. Philippe Nauche, Mme Sylvie Pichot, Mme Émilienne Poumirol, Mme Daphna Poznanski-Benhamou, M. Joaquim Pueyo, Mme Marie Récalde, M. Eduardo Rihan Cypel, M. Philippe Vitel

Excusés. –  M. Ibrahim Aboubacar, M. Claude Bartolone, M. Philippe Briand, M. Yves Foulon, M. Francis Hillmeyer, M. Éric Jalton, M. Bruno Le Roux, M. François de Rugy