Accueil > Travaux en commission > Commission de la défense nationale et des forces armées > Les comptes rendus

Afficher en plus grand
Afficher en plus petit
Voir le compte rendu au format PDF

Commission de la défense nationale et des forces armées

Mercredi 31 octobre 2012

Séance de 9 heures 30

Compte rendu n° 19

Présidence de Mme Patricia Adam, présidente

— Projet de loi de finances pour 2013 :

– Avis sur les crédits de la mission « Défense » : « Soutien et logistique interarmées » (M. Alain Marty, Rapporteur pour avis)

– Avis sur les crédits de la mission « Défense » : « Équipement des forces –dissuasion » (M. Jean-Jacques Bridey, Rapporteur pour avis)

– Avis sur les crédits de la mission « Défense » : « Préparation et emploi des forces : forces terrestres » (M. Joaquim Pueyo, Rapporteur pour avis)

– Avis sur les crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » (Mme Daphna Poznanski-Benhamou, Rapporteure pour avis)

– Amendements examinés par la commission

La séance est ouverte à neuf heures trente.

Mme Patricia Adam, Présidente. Nous continuons l’examen du projet de loi de finances pour 2013 avec l’avis budgétaire relatif à « Soutien et logistique interarmées » de la mission « Défense ».

M. Alain Marty, Rapporteur pour avis. Les crédits que j’ai pour mission de vous présenter sont ceux qui contribuent au soutien et à la logistique interarmées. Cet ensemble de crédits ne correspond pas à un seul et même programme budgétaire au sens de la LOLF. Il est en effet constitué de l’intégralité du programme 212 « Soutien de la politique de défense » et de quatre des sept actions du programme 178 « Préparation et emploi des forces ». L’ensemble de ces dépenses représente 9,7 milliards d’euros en autorisations d’engagement et 8,960 milliards en crédits de paiement.

Dans l’ensemble, cette masse de crédits est stable par rapport à 2012 en autorisations d’engagements, mais connaît une baisse de 154 millions d’euros en crédits de paiement, ce qui représente à peu près 1,7 % de la somme considérée. Ces chiffres disent bien une chose, qui est cohérente avec ce que le ministre a déclaré devant nous : le budget 2013 et un budget d’attente. Dans ses grandes masses, on pourrait y voir une reconduction des équilibres du budget 2012. Bien évidemment, les choix seront opérés l’an prochain, en déclinant sur le plan budgétaire les orientations stratégiques que définira le prochain Livre blanc, ainsi que les objectifs capacitaires et les diverses orientations que fixera la prochaine loi de programmation militaire.

Vous me permettrez d’insister sur quatre points : la poursuite du « projet Balard », les tensions capacitaires qui risquent de découler du sous-financement de certaines infrastructures, le financement du fonctionnement des bases de défense et la gestion du service de santé des armées.

Sur le premier point, je constate que le « projet Balard », qui avait fait l’objet de quelques critiques au sein de notre commission, n’est plus aujourd’hui un élément de polémique. Je tiens à dire que je m’en félicite.

Il s’agit en effet d’un projet important : le regroupement des états-majors et des services centraux sur un seul site parisien, au lieu de quinze sites assez vieillissants pour certains, répond à une véritable demande des armées et des services du ministère, qu’avait bien exprimée devant nous l’amiral Édouard Guillaud. De plus, c’est aussi un projet emblématique de la réforme du ministère, et dans un contexte où les personnels des armées ont dû faire des efforts très conséquents d’adaptation de leur organisation et de leur fonctionnement quotidien, ce projet constitue un grand signal architectural, qui peut avoir une dimension symbolique, on pourrait dire fédératrice, pour l’ensemble de la communauté de Défense.

Je rappelle par ailleurs que le groupement Opale défense, cocontractant avec l’État dans le cadre du partenariat public-privé conclu pour le « projet Balard », n’est pas contrôlé par Bouygues puisque la Caisse des dépôts y détient une minorité de blocage de 34 %.

Le « projet Balard » semble donc être sur de bons rails, et il faut espérer que les obstacles administratifs qui restent – notamment le litige opposant le ministère de la défense à la Ville de Paris – seront bientôt aplanis.

S’agissant des dépenses d’infrastructures, elles représentent une part importante des crédits consacrés au soutien et à la logistique interarmées. Ces dépenses couvrent notamment les investissements nécessaires à l’accueil des nouveaux équipements. Or, comme l’a dit devant nous le secrétaire général pour l’administration (SGA) du ministère, si l’on neutralise l’effet comptable de la procédure d’engagement par « tranches fonctionnelles », on observe une baisse de 160 millions d’euros des crédits consacrés aux infrastructures pour 2013. Cette baisse conduit le ministère à geler plusieurs opérations, pour un total que le SGA estime à 351 millions d’euros pour 2013. Or ce gel fait déjà suite à un gel de différentes opérations en 2012, pour 393 millions d’euros. C’est donc en bonne partie sur les dépenses d’infrastructures que portent les ajustements budgétaires du budget 2013, comme c’était le cas en 2012. On voit bien les dangers de ces reports d’opérations d’infrastructures : si les services nous disent qu’ils n’engendrent pas – pour l’heure – de véritables ruptures dans le maintien en condition opérationnelle des équipements, le risque existe.

Le SGA nous assure que dans l’allocation des moyens restants, la priorité sera donnée, d’une part, aux dépenses concourant à l’amélioration des conditions de vie des unités et à la remise aux normes des installations, et, d’autre part, aux opérations nécessaires à l’accueil de nouveaux équipements. Ainsi, des aménagements sont prévus, par exemple, à Toulon pour l’accueil les sous-marins nucléaires d’attaque (SNA) Barracuda, à Phalsbourg pour l’accueil des hélicoptères NH90, à Orléans-Bricy en vue de la livraison des premiers A400M, ou encore à Clermont-Ferrand en vue de l’accueil de nouveaux véhicules blindés de combat d’infanterie (VBCI). Néanmoins, le sous-calibrage des crédits destinés à la construction d’infrastructures peut parfois créer des difficultés : par exemple, les installations de certaines unités qui recevront des VBCI ne sont pas encore adaptées à ces nouveaux matériels, il en va de même pour l’appontage des frégates FREMM.

J’en viens aux crédits de fonctionnement des bases de défense. Un récent rapport du contrôle général des armées évalue les besoins en la matière à 770 millions d’euros par an. Les dotations des années antérieures étant bien inférieures à ce montant, on a pu constater que les bases de défense connaissaient de sérieuses difficultés de financement courant dès le mois de septembre ou d’octobre de chaque exercice, au point que certaines en étaient conduites à chauffer très peu leurs bâtiments, par souci d’économie ! Pour 2013, il est proposé de fixer cette dotation à 703 millions d’euros, et les fonds disponibles s’élèveront à 720 millions d’euros grâce à 17 millions d’euros de ressources non budgétaires. L’appréciation à porter sur ces crédits nous renvoie en quelque sorte à l’éternel problème du verre à moitié vie ou à moitié plein : indéniablement, la progression de cette enveloppe va dans le bon sens, mais elle ne permet toujours pas de satisfaire les besoins tels que le contrôle général des armées les a évalués.

J’en viens à mon quatrième est dernier point : la gestion du service de santé des armées (SSA). J’ai consacré à ce sujet la partie thématique de mon rapport, conformément aux suggestions que nous a faites le bureau de notre Commission en juillet dernier.

Pourquoi le SSA ? Parce que depuis la parution en octobre 2010 d’un rapport de la Cour des comptes bien connu parmi ceux d’entre nous qui étaient déjà membres de la Commission sous la précédente législature, le SSA s’est engagé dans un processus de réforme ambitieux. Il est donc bon de faire le point des adaptations qui ont été entreprises.

Le SSA, rappelons-le, est un service un peu particulier : c’est un outil militaire dont la vocation première est de pourvoir au soutien sanitaire de nos forces. Ses capacités sont organisées en fonction des objectifs opérationnels assignés à nos forces armées. Ce service, ce sont plus de 16 000 agents et 9 hôpitaux d’instruction des armées (HIA), qui comptent 2 657 lits. Il s’agit donc d’un élément important de l’offre de soins, qui accueille bien entendu des militaires, mais aussi des civils – ceux-ci constituent d’ailleurs aujourd’hui la majorité des patients des HIA. Les soins délivrés aux civils sont remboursés par l’assurance maladie, ce qui représente plus de 500 millions d’euros de recettes.

La principale difficulté dans la gestion de ce service réside dans l’articulation entre, d’une part, l’ouverture de ses hôpitaux aux civils – ouverture nécessaire, tant pour optimiser l’utilisation des équipements que pour offrir aux équipes médicales et chirurgicales un volume d’activité suffisant à garantir le maintien de leur niveau de compétence – et, d’autre part, la vocation militaire de cet outil. L’ouverture aux civils n’est souhaitable que dans la limite où elle ne se fait pas au détriment du service rendu aux forces. Plus encore, la comparaison avec la gestion du secteur hospitalier civil a elle aussi ses limites, or la Cour des comptes a appliqué aux hôpitaux militaires la même grille d’analyse qu’aux hôpitaux civils. Elle n’a pas pris en considération certaines missions purement militaires de ses hôpitaux. À titre d’exemple, ceux-ci ont une mission de formation, non seulement pour les personnels de santé militaires, mais aussi pour les internes civils qui y accomplissent des stages. De même, les hôpitaux militaires constituent un vivier de professionnels qui ont vocation à être projetés en opérations extérieures ; or quand un médecin, un chirurgien, un infirmier anesthésiste ou un infirmier de bloc opératoire est envoyé en opération, c’est tout un bloc opératoire qui n’a plus d’activité, privant l’hôpital de recettes dont il aurait pu bénéficier en traitant une patientèle civile. C’est d’ailleurs pourquoi certains chefs d’établissements, qui souscrivent avec la direction centrale du service des objectifs ambitieux de production de soins, auraient parfois tendance à préférer que leurs praticiens ne soient pas envoyés en opérations extérieures…

Le SSA a pris en compte les remarques de la Cour, et s’est lancé, comme je le disais à l’instant, dans un programme de réforme qui est encore en cours. Il a développé des partenariats nombreux avec les hôpitaux civils, afin de mutualiser des équipements et des personnels, comme j’ai pu le constater lors de mes déplacements au Val-de-Grâce ou à l’hôpital Legouest à Metz.

Ces efforts appellent trois commentaires de ma part :

D’abord, il faut assumer le « coût de possession » d’un outil de soutien sanitaire des forces. On ne peut pas appliquer aux hôpitaux militaires les méthodes de gestion hospitalière de droit commun. Il faut tenir compte des missions régaliennes du SSA, qui ont nécessairement un coût.

Ensuite, il faut aller plus loin dans la déconcentration de la gestion hospitalière. C’est aujourd’hui une direction centrale qui assure la gestion des neuf hôpitaux. À titre d’exemple, un hôpital militaire ne peut pas embaucher une personne en contrat à durée déterminée, pour remplacer un militaire envoyé en opération extérieure, sans l’autorisation de la direction centrale. Cette procédure engendre des délais : il peut arriver que la réponse de la direction centrale soit donnée après le retour du militaire en question ! Il faut plus de souplesse. Les chefs d’établissements demandent des marges de manœuvre dans la gestion de leurs hôpitaux.

Enfin, je crois qu’il faut faire un choix clair entre deux options. La première, c’est le modèle britannique : il consiste à intégrer la médecine militaire au système de santé civil : ainsi, les médecins militaires britanniques travaillent au sein des hôpitaux civils, et les militaires blessés sont pris en charge au sein de ces mêmes hôpitaux. Ce modèle semble convenir, voire plaire, à la Cour des comptes. Je note cependant que les Britanniques ne sont plus à même aujourd’hui de constituer seuls une chaîne de soutien sanitaire complète : ils doivent s’en remettre pour cela à la coopération avec leurs alliés, notamment américains.

La seconde option, c’est celle qui est conforme à nos traditions : disposer d’un outil militaire de soutien sanitaire autonome, propre à fournir à nos troupes un soutien sanitaire au plus près possible des combats. Cela suppose d’assumer le coût de possession de cet outil.

La meilleure option est pour moi la seconde. Elle permet d’offrir à nos militaires un soutien sanitaire fiable et complet. Bien évidemment, cela n’empêche pas le SSA de se réformer, de réduire son coût par une meilleure utilisation de ses équipements et par une plus grande ouverture au système de santé civil.

Au terme de mes réflexions, et en signe de soutien au service de santé des armées, j’émets un avis favorable aux crédits du projet de loi de finance concernant le soutien et la logistique interarmées.

M. Philippe Vitel. Je partage l’analyse que vous avez faite du SSA : l’évolution vers un système civil serait contre-productive. J’aimerais que vous nous précisiez l’avenir de l’hôpital militaire de Djibouti. Par ailleurs, est-ce que vous avez des éléments d’information sur l’éventuel transfert à Bron, régulièrement évoqué, de l’école de formation du personnel paramédical des armées (EPPA), aujourd’hui installée à Toulon ?

M. le Rapporteur pour avis. Les décisions concernant l’hôpital militaire de Djibouti sont déjà prises : il fermera en 2015. Seul sera conservé un centre médical pluridisciplinaire en soutien de nos forces stationnées là-bas.

Aucune décision n’a en revanche été prise sur l’avenir de l’EPPA. L’idée de regrouper toutes les écoles du SSA sur le site de Lyon-Bron est toujours à l’étude, mais rien n’a été décidé car le système tel qu’il est donne aujourd’hui pleinement satisfaction. Il faut rappeler en outre qu’une partie des infirmiers des armées est recrutée après une formation civile ; il s’agit le plus souvent de professionnels qui ont connu le SSA à l’occasion de stages et qui y ont trouvé un cadre de travail correspondant à leurs attentes.

À l’avenir, on devra également s’interroger sur la pertinence de maintenir 9 hôpitaux aux armées sur notre territoire, alors que d’importants travaux d’infrastructure et de renouvellement de matériel, très onéreux, sont à prévoir. Je pense qu’il sera difficile de les conserver tous.

M. Christophe Guilloteau. Vous nous avez parlé tout à l’heure de Balard. Hier en séance publique, la ministre de la justice a dit que le Gouvernement n’entendait plus passer de contrats de partenariat public-privé (PPP). A-t-on une évaluation de la différence entre le coût du PPP conclu pour le projet Balard et le coût qu’aurait eu ce même projet dans le cadre d’une acquisition patrimoniale traditionnelle ? Par ailleurs, quand seront livrés les bâtiments ?

Enfin, je tiens à préciser que je voterai les crédits de ce programme car j’estime que les critiques de la Cour des comptes à l’égard du SSA n’étaient pas loyales.

M. le Rapporteur pour avis. Je ne peux pas parler au nom du Gouvernement…

Le projet Balard continue sous la forme d’un PPP, à la fois pour la construction et le fonctionnement des bâtiments. Le contrat prévoit le versement de 130 millions d’euros chaque année pendant vingt-sept ans.

Concernant le calendrier, le secrétaire général pour l’administration (SGA) nous a indiqué que l’ensemble des bâtiments auront été livrés en 2016.

Le coût total de l’opération avoisine les 4 milliards d’euros. Il est difficile de dire ce qui, de l’acquisition patrimoniale ou du PPP, est le choix le plus économique. Ce dernier présente l’avantage d’étaler les dépenses d’investissement dans le temps.

M. Daniel Boisserie. Je pense, pour ma part, que le PPP est par nature une solution plus onéreuse que l’acquisition patrimoniale : Bouygues n’est pas une entreprise philanthropique !

Est-ce que vous disposez d’éléments sur les différents qui ont opposé la Ville de Paris au ministère sur le site de Balard ? Enfin, pouvez-vous nous préciser le devenir des sites dont la défense se sépare ?

M. le Rapporteur pour avis. Je crois que le SGA, lors de son audition devant notre Commission, a bien expliqué ces différends. L’adaptation du projet au plan local d’urbanisme de la Ville de Paris ne pose pas de véritable problème. La principale difficulté provient d’une servitude attachée à un immeuble qui doit être construit à proximité du ministère, à la place d’un garage de la RATP. Mais je crois que cela est en passe d’être résolu.

Est-ce que le PPP coûte plus cher ? L’acquisition aurait nécessité une mobilisation immédiate des crédits. Le choix du ministère de la défense a été de privilégier le renouvellement des équipements des armées et de lisser sur trente ans le coût de l’opération Balard. C’est sensiblement le même problème que l’on retrouve pour le renouvellement des avions MRTT : le coût de fonctionnement est moins élevé en cas d’acquisition mais cela suppose de pouvoir les acheter ! C’est l’éternel débat autour des PPP.

Concernant le devenir des autres sites parisiens du ministère, il est question qu’un certain nombre d’emprises soient cédés pour un euro symbolique aux municipalités pour y construire des logements sociaux. Cela entraîne nécessairement une décote des sommes que le ministère de la défense attendait de ces ventes, sans que l’on puisse pour l’instant la chiffrer.

M. Daniel Boisserie. Pourquoi ne laisse-t-on pas un pouvoir de décision aux préfets sur ce sujet ?

M. le Rapporteur pour avis. Il s’agit là d’une décision du Gouvernement, que les préfets seront chargés de mettre en œuvre.

Mme la Présidente. Je crois que, dans l’opération Balard, les avenants sont plus importants que le contrat initial.

M. Damien Meslot. Vous nous avez expliqué que les moyens consacrés aux bases de défense étaient en augmentation. La Cour des comptes a publié un rapport très critique à ce sujet. Quel est votre sentiment ?

M. le Rapporteur pour avis. Le rapport de la Cour des comptes est, selon moi, mal venu. Il faut avoir un peu de recul sur le sujet et je crois que le rapport qu’ont publié les sénateurs sur les bases de défense est plus intéressant.

Je pense qu’il faut maintenant stabiliser ce système. La réforme accomplie a été très importante et il faut lui laisser le temps de produire ses effets. C’est en tout cas la volonté exprimée ici même par le ministre de la défense et le chef d’état-major des armées.

M. Francis Hillmeyer. Je vous ai entendu dire que certaines bases ne se chauffaient pas. N’y a-t-il pas des crédits fléchés pour la rénovation des logements ? Où en est l’installation de chauffage à partir d’énergies renouvelables ?

M. le Rapporteur pour avis. Il est certain que la campagne de chauffage dans certaines bases de défense a été faite a minima. Le fonctionnement des bases est très tendu et, même si leur dotation progresse cette année, nous sommes encore assez loin des 770 millions d’euros nécessaires à leur bon fonctionnement.

Le problème de ces bases, ce sont leurs bâtiments, de très grande taille et construits il y a longtemps selon des normes qui ne sont plus celles d’aujourd’hui. Mais il y a un vrai souci d’améliorer la qualité des logements.

Mme Marie Reccalde. Je voudrais évoquer l’avenir de l’hôpital militaire Robert Piqué, dans l’agglomération bordelaise. Il fait l’objet de rumeurs de fermeture qui inquiètent le personnel soignant, les malades mais aussi la population. Il s’inscrit pourtant dans un maillage territorial cohérent de l’offre de soins à l’échelle de l’agglomération bordelaise. Avez-vous des précisions sur ce point ?

M. le Rapporteur pour avis. Je peux comprendre le trouble de la population bordelaise, ces rumeurs venant après le transfert de l’école du service de santé des armées de Bordeaux vers Lyon. Comme je l’ai dit tout à l’heure, je crois qu’il sera difficile de maintenir tous les hôpitaux militaires compte tenu des importants travaux de rénovation qui nécessitent d’y être engagés. Mais, pour le moment, rien n’est décidé.

L’hôpital de Bordeaux a été un des premiers à intégrer un groupement de coopération sanitaire, avec la maison de santé protestante. Il répond, comme vous l’avez souligné, aux besoins de santé de la population, en partenariat avec d’autres établissements de santé, et dans le cadre du schéma régional d’organisation sanitaire.

Plus généralement, les hôpitaux militaires apportent une contribution significative à l’offre de soins ; la contribution de leurs services d’accueil des urgences à la prise en charge des soins non programmés est d’ailleurs importante. Mais cet apport n’est pas suffisamment pris en compte. Cela tient pour une large part à l’organisation administrative du SSA : c’est en effet sa direction centrale qui est compétente pour conclure les accords par lesquels chacun des hôpitaux militaires peut développer des coopérations avec les structures de soins civiles. J’ai d’ailleurs pu constater sur le terrain que les hôpitaux d’instruction des armées n’avaient que des liens ténus avec les agences régionales de santé. Les schémas régionaux d’organisation des soins mentionnent les capacités des hôpitaux militaires, mais sans plus : celles-ci ne sont pas véritablement intégrées à la planification régionale des soins hospitaliers. Pour favoriser la coopération entre les hôpitaux militaires et le système de santé civil, il faudrait que les chefs d’établissements aient plus de marges de manœuvre ; peut-être le nouveau médecin général des armées œuvrera-t-il en ce sens.

M. Philippe Vitel. Le groupe UMP votera ce budget car nous sommes solidaires du SSA face aux critiques de la Cour des comptes.

Conformément aux conclusions du Rapporteur pour avis, la Commission donne un avis favorable à l’adoption des crédits relatifs à « Soutien et logistique interarmées » de la mission « Défense ».

*

* *

Mme Patricia Adam, Présidente. Nous allons maintenant entendre M. Jean-Jacques Bridey, rapporteur pour avis des crédits « Équipement des forces – dissuasion » de la mission « Défense ».

M. Jean-Jacques Bridey, Rapporteur pour avis. Le projet de loi de finances (PLF) pour 2013 intervient dans un contexte particulier avec la rédaction d’un nouveau Livre blanc et la perspective d’une nouvelle loi de programmation militaire à la fin du premier semestre 2013.

Le PLF pour 2013 est un budget de transition qui s’inscrit dans la continuité de l’exercice 2012. En engagement, le projet de budget est prudent : certains programmes sont réduits ou décalés afin de ne pas préjuger des arbitrages capacitaires qui découleront du nouveau Livre blanc. En crédits de paiement, les commandes seront honorées. Concrètement, le projet de budget affiche une certaine stabilité des crédits de paiement entre 2012 et 2013, tandis que le niveau d’engagement diminue, passant de 11,8 milliards d’euros à près de 10 milliards.

Sur le plan des autorisations d’engagement, des reports de commandes sont intervenus en 2012 et ont également été décidés pour 2013. J’insiste : le Gouvernement a décidé de décaler des commandes et non de les annuler. Dans l’ensemble, ce sont près de 4,5 milliards d’euros de commandes qui auront été décalées au cours de l’ensemble de la programmation.

S’agissant des crédits de paiement, le PLF pour 2013 s’inscrira dans la continuité de l’effort marqué de la Nation pour financer les acquisitions, mais à un niveau moindre que celui inscrit en programmation. En additionnant les exercices 2011, 2012 et 2013, l’écart cumulé entre les crédits de paiement exécuté s’élève à près de 3,7 milliards d’euros.

De ce point de vue, nous sommes bien face à un budget de transition qui poursuit les orientations adoptées au cours des derniers exercices et honore l’essentiel des engagements antérieurs.

La programmation a été compliquée par la difficulté à percevoir les ressources exceptionnelles issues des cessions de fréquences, ainsi que par certaines projections optimistes. Je pense notamment à l’anticipation d’une exportation du Rafale. Comme vous le savez, l’État s’est engagé à assurer une cadence minimale de production de 11 appareils chaque année. La non-réalisation de contrats exports nous a contraints non pas à en commander davantage, mais à revoir le calendrier de nos commandes, en avançant certaines acquisitions que la programmation avait repoussées. Par ailleurs, des difficultés imprévues sont apparues, tel le retard de l’A400M qui a nécessité des mesures palliatives coûteuses.

Au final, nous constatons que la programmation 2009-2014 était très certainement ambitieuse. La crise budgétaire a révélé qu’elle n’était pas tenable au regard de ce que sont nos ressources réelles. Je souhaite donc que le nouveau Livre blanc fixe des ambitions réalistes.

Je me réjouis de la sanctuarisation de notre dissuasion nucléaire. Sa modernisation se poursuit. Les crédits qui lui sont affectés évoluent fortement chaque année en fonction des investissements qu’elle nécessite. Le niveau de consommation des crédits était relativement contenu jusqu’à présent et devrait s’établir à près de 3,5 milliards d’euros au cours des prochaines années. Sur le plan technique, nos capacités de simulation sont certainement les meilleures au monde : capacités de calculs, simulation laser, radiographie. Les retombées technologiques de ces programmes sont considérables. Les investissements bénéficient quasi exclusivement à nos industriels et alimentent un secteur dual dans lequel nous sommes aujourd’hui en tête de peloton.

Je rappelle que notre dissuasion repose sur deux composantes, toutes deux essentielles avec des capacités maintenues à leur stricte suffisance. Nous devons garder à l’esprit tout l’intérêt de disposer d’une composante aéroportée : elle est souple d’emploi, réversible et permet au Président de la République de disposer d’un maximum d’outils diplomatiques et militaires pour sauvegarder nos intérêts vitaux. J’ajouterai que sa suppression ne permettrait d’économiser qu’entre 50 et 100 millions d’euros selon les années alors même que sa modernisation est réalisée : il s’agirait d’un véritable gâchis. Je soutiens donc fermement le Président de la République dans sa volonté de maintenir nos deux composantes.

Le milieu terrestre est le plus directement touché par les décalages de commandes. Sur les exercices 2012 et 2013, l’armée de terre supportera à elle seule 40 % des reports ou annulations, alors même qu’elle ne consomme que 20 % des crédits de ce programme. Je relève notamment : le décalage de la commande de missiles moyenne portée, le report d’un an du programme Scorpion, le report de la commande de véhicules légers tactiques ou encore l’annulation de la dernière tranche de petits véhicules protégés. Dans le même temps, je relève un certain nombre de progrès : le ministre a confirmé la commande d’une seconde tranche d’hélicoptères NH 90 et des crédits importants ont été débloqués pour la rénovation d’appareils essentiels aux opérations : COUGAR, AMX 10, VAB etc. Dans l’ensemble, je ne constate donc pas de recul mais plutôt une posture d’attente des conclusions du nouveau Livre blanc. Quelles que soient ses orientations, un effort devra être consenti pour moderniser notre armée de terre au cours de la prochaine LPM. En particulier, le programme Scorpion devra être impérativement lancé en 2014, au risque d’un déclassement de notre armée de terre.

Quelques mots sur le milieu maritime qui est également concerné par les restrictions. Celles-ci portent notamment sur le décalage d’un an de la commande d’un sous-marin nucléaire d’attaque (SNA) de type Barracuda et de la rénovation des avions Atlantique 2. Néanmoins, je note avec satisfaction que la marine a pu poursuivre sa modernisation, malgré la réduction de commande des frégates multi missions et le remplacement tardif de la flotte logistique. Le projet d’acquisition d’un second porte-avions n’a pas eu d’actualité au cours de cette programmation et il ne s’agira pas d’une priorité pour la nouvelle.

S’agissant de l’armée de l’air, j’ai relevé à la fois d’intéressantes avancées, avec la poursuite de la modernisation de notre flotte de combat. Elle est également touchée par quelques décalages concernant essentiellement, en 2013, le report du traitement d’obsolescences ou de rénovations concernant notamment les C130 et les Mirage 2000D. Celle des Mirage 2000D est indispensable pour atteindre l’objectif actuel de disposer à l’horizon 2020 d’une flotte polyvalente de 300 avions de combats. Là encore, nous devons attendre les conclusions du nouveau Livre blanc pour calibrer le programme de rénovation. Enfin, nous nous réjouissons tous de la décision du ministre d’acquérir une capacité en avions ravitailleurs. Il s’agit d’une commande indispensable, trop longtemps différée.

J’ajoute dans mon rapport pour avis un développement spécifique sur la question des drones MALE, pour souhaiter l’acquisition d’une capacité francisée à court terme et européenne à plus long terme.

Nous pouvons étirer nos capacités actuelles jusqu’en 2017. À long terme, la France prône le développement d’un drone européen. Pour le moment, les tentatives de coopération avec l’Allemagne ont échoué. Les accords de Lancaster House ont initié un projet franco-britannique auquel les Allemands pourraient se joindre. Entre les deux, nous avons besoin d’une solution intermédiaire, qui repose sur un achat sur étagère de plateformes israéliennes Heron TP ou américaines Predator, sous leur version Reaper, que nous équiperions de charges françaises. Si possible, ce drone devrait être armé, même si cette question soulève des difficultés, certains responsables militaires jugeant qu’il ne s’agit pas d’une priorité et les Américains pouvant se montrer extrêmement réticents à en exporter. À ce stade, cette question reste encore ouverte et nous espérons une décision rapide.

J’ai souhaité enfin proposer un développement thématique sur les enjeux technologiques pour la souveraineté nationale. En bref, j’ai constaté la richesse de notre base technologique et industrielle de défense. Parmi les technologies qu’elle a développées et entretenues, il existe aujourd’hui un cœur indispensable à notre souveraineté, ainsi que l’avait d’ailleurs souligné le Livre blanc de 2008. Pour l’avenir, il s’agit de voir comment notre industrie pourra répondre de façon autonome aux besoins des armées. J’ai également souligné la nécessité de nous intéresser aux technologies qui nous permettront de faire face aux nouvelles menaces ; je pense notamment aux cyberattaques

S’agissant des préconisations, je pense qu’il nous faut renforcer le dispositif de contrôle des investissements étrangers et pérenniser nos dispositifs de soutien à la recherche et aux PME de défense.

En conclusion, nous sommes face à un projet de budget équilibré qui, dans un contexte général difficile, nous permet d’assumer nos engagements et d’assurer la transition vers la nouvelle LPM. C’est pourquoi je vous recommande d’émettre un avis favorable à l’adoption des crédits du programme 146 « Équipement des forces » de la mission « Défense » pour le projet de loi de finances pour 2013.

M. Serge Grouard. Je souhaiterais obtenir quelques précisions : est-il exact que le programme 146 compte environ 10 milliards en autorisations d’engagement (AE) et 11 milliards d’euros en crédits de paiement (CP). Par ailleurs, si le total des crédits d’équipement s’élève à 16 milliards en crédits de paiement, disposez-vous du montant afférent pour les autorisations d’engagement ?

Enfin, confirmez-vous la baisse de 4,5 milliards d’euros sur les crédits de paiement ? S’il est bon de maintenir les crédits de paiement pour l’année prochaine, on crée en revanche un décalage sensible dans les équipements, et je ne vois pas dès lors comment il sera possible de compenser ces 4,5 milliards, alors qu’il est impérieux de maintenir les capacités de nos forces.

M. Jean-Jacques Bridey, Rapporteur pour avis. Pour le programme 146, vos chiffres sont exacts. Le montant des 16 milliards d’euros que vous évoquez porte sur un périmètre plus large que le programme 146 qui nous intéresse présentement. Les 4,5 milliards de décalage couvrent la programmation mais il s’agit essentiellement pour 2012 et 2013 de décalages et non de suppressions de crédits.

M. Serge Grouard. C’est la « bosse » !

M. le Rapporteur pour avis. Je souhaite que ce recalage ne dépasse 2014, sinon, on risque de mettre en difficulté nos armées. Il convient en tout état de cause d’attendre les nouvelles orientations du Livre Blanc.

M. Nicolas Dhuicq. C’est une mauvaise habitude de croire qu’on peut différer éternellement les équipements indispensables. La « bosse » doit être désormais résorbée. Comment l’armée de terre va-t-elle pouvoir remplir ses missions avec des VAB de plus de 40 ans ? Envisage-t-on d’augmenter le budget, ou doit-on se résoudre à une perte de capacité ?

Il existe des interrogations sur le budget consacré aux puces électroniques que l’on doit franciser. On sait que la France ne fabrique pas de telles puces électroniques et chacun sait qu’on peut y installer à l’intérieur à peu près n’importe quoi.

M. le Rapporteur pour avis. Il faut attendre l’élaboration du prochain Livre blanc pour savoir comment la bosse sera résorbée. Le programme Scorpion devra bien sûr être réalisé pour moderniser les capacités de l’armée de terre, mais le nombre d’unités concernées dépendra du nouveau format de l’armée de terre défini par le Livre Blanc. Ce qui compte, c’est qu’aucun équipement ne soit aujourd’hui abandonné. Par ailleurs, la problématique des puces électroniques est abordée dans le rapport, et j’insiste sur le fait qu’il nous faut absolument conserver cette capacité. Nous disposons d’une entreprise près de Grenoble qui en fabrique.

Mme la Présidente. Il s’agit de STMicroelectronic. Elle est la seule entreprise à fabriquer des puces sur le territoire national et nous devons l’aider à y rester.

M. Francis Hillmeyer. Je souhaiterais avoir votre avis sur une éventuelle suppression de la composante aéroportée de notre dissuasion nucléaire, un temps évoquée.

M. le Rapporteur pour avis. Je souhaite que nos forces de dissuasion continuent de reposer sur deux composantes pour une question de crédibilité. Le Président de la République a été très clair sur ce point.

M. Charles de La Verpillière. Serge Grouard a très bien mis en évidence les retards accumulés en matière de commandes d’équipements. Le Rapporteur nous dit qu’il s’agit d’un budget d’attente et qu’il faut attendre le prochain Livre blanc, mais c’est tout l’inverse ! En laissant se creuser la « bosse », nous sommes en fait déjà en train d’écrire le Livre Blanc. Sachant qu’on ne pourra pas réellement la résorber, le risque est de fixer dans le Livre blanc le niveau d’équipement requis au niveau de ce rythme insuffisant d’engagements.

M. le Rapporteur pour avis. La loi de programmation militaire 2009-2014 était très ambitieuse, voire irréaliste au regard de capacités budgétaires déjà limitées. En effet, l’écart s’est creusé de plus d’un milliard par an dès 2011. Aujourd’hui, nous devons assumer aujourd’hui cette ambition initiale. Je souhaite donc que le Livre blanc revienne à plus de réalisme, sans remettre en cause les missions et les capacités de nos armées.

Mme la Présidente. Nous faisons aujourd’hui le bilan de la LPM actuelle. Celle-ci prévoyait pour les trois dernières années de la programmation une hausse des crédits de 1 % qui n’a pas été réalisée. Les crédits de paiement ne correspondent pas aux autorisations d’engagement. Je pense comme membre de la commission du Livre blanc, qu’il faut une LPM plus conforme à ce qu’il est possible de réaliser, par application d’un juste principe de réalité.

M. Charles de La Verpillière. Ce n’est nullement contradictoire avec ce que j’ai dit !

M. Serge Grouard. Je ne suis pas d’accord avec l’analyse de la Présidente et du Rapporteur. La dernière LPM a été réalisée à hauteur de 98 %, ce qui est certainement le meilleur taux d’application depuis très longtemps. Par ailleurs, nos armées ont consenti, par rapport aux autres administrations, un effort plus important de réduction des dépenses et ont réalisé chaque année de lourds efforts d’adaptation. Peut-on continuer à diminuer le format de nos armées dans le monde que nous connaissons tout en maintenant le rang de la France ? Je dis clairement que non ! Si on poursuit la réorganisation des armées, nous allons aboutir à une armée de 2division, à un abaissement du rang de la France et à une rupture capacitaire et technologique. Malgré la qualité de ce rapport parlementaire, ce budget n’est malheureusement pas acceptable en l’état.

M. le Rapporteur pour avis. Ne pas voter ce budget, c’est renier la LPM. Le budget 2013 n’est est en ligne avec celle-ci. On note certes certains recalages, mais ils ont commencé dès 2011 et ne sont donc pas du seul fait de l’actuel Gouvernement. Je souligne que les crédits d’équipement des forces ont été ponctionnés pour alimenter d’autres programmes et qu’il a fallu faire face à certains aléas non anticipés en programmation. Je suis donc en désaccord avec vous et j’estime qu’il faudra une LPM en cohérence avec les possibilités budgétaires.

M. Philippe Meunier. Personne ne peut vous en vouloir d’essayer d’avoir un discours de vérité, mais on comprend cependant à votre propos que le budget d’équipement va désormais devenir une variable d’ajustement et que le ministère de la défense ne constitue pas un budget prioritaire.

M. le Rapporteur pour avis. 10 milliards de crédits de paiement, ce n’est pas rien !

M. Christophe Guilloteau. Je note que c’est la première fois que nous avons un vrai débat sur le fond. Le Rapporteur a insisté sur la composante nucléaire bicéphale : je veux espérer que toutes les composantes de la majorité actuelle partagent bien ce point de vue.

Sur le fond, si le Livre Blanc va montrer un chemin, les militaires attendent en définitive beaucoup plus de la LPM. C’est en effet elle qui déterminera l’armée de demain. Or, je suis très gêné par ce qu’on pourrait qualifier de « grande bosse » et en conséquence, je voterai contre ce budget à titre personnel.

M. Philippe Nauche. Je suis un peu étonné du ton de ces interventions qui relèvent d’un positionnement très tactique, en décalage très net avec les habitudes de notre Commission.

Entre les intentions d’un Livre Blanc, et l’exécution de la LPM, il y a souvent un décalage. Je ne rappellerai pas le « feuilleton » que nous avons vécu en matière de recettes exceptionnelles, mais je tiens à souligner que le problème de la « bosse » s’est constitué très vite. Je n’accepte pas qu’on puisse dire que le budget de la défense serait une variable d’ajustement. Il contribue comme les autres à l’effort général de la diminution des dépenses publiques, alors qu’on lui en demandait parfois plus par le passé. Nous sommes clairement dans la phase d’un budget d’attente ; le vrai moment de vérité sera la LPM et nous aurons alors besoin d’être tous unis. Je note au passage que le domaine de la défense est une des rares politiques industrielles qui n’a pas été mise à mal par le libéralisme de ces dernières années.

M. le Rapporteur pour avis. Il nous faut aujourd’hui envoyer un signal fort. Les crédits de paiement sont au niveau de l’année dernière. Sur les 4,5 milliards de décalage en autorisations d’engagement, 3,6 milliards l’étaient dès cette année. Or, malgré ce chiffre qui nous a été donné par la DGA et qui figure à la page 12 de mon rapport, vous avez voté le budget 2012 ! Nous nous réjouissons tous du lancement du programme des ravitailleurs que vous aviez pourtant décalé pendant quatre ans. Ce n’est pas de la polémique, c’est un pur constat. J’en appelle donc à un vote le plus unanime possible.

Mme la Présidente. Chacun pourra bien sûr développer ses arguments en séance publique.

*

* *

Conformément aux conclusions du Rapporteur pour avis, la Commission donne un avis favorable à l’adoption des crédits relatifs à « Équipement des forces - Dissuasion » de la mission « Défense ».

*

* *

Mme Patricia Adam, Présidente. Nous passons maintenant à M. Joaquim Pueyo, Rapporteur pour avis sur les crédits relatifs à « Préparation et emploi des forces : forces terrestres » de la mission « Défense ».

M. Joaquim Pueyo, Rapporteur pour avis. Madame la Présidente, mes chers collègues, je voudrais vous présenter dans un premier temps les grandes lignes du budget pour 2013 consacré aux forces terrestres et vous faire part de plusieurs points qui ont attiré mon attention lors de mes travaux, mes entretiens et déplacements sur le terrain.

J’évoquerai, ensuite, l’action des forces terrestres sur le territoire national dans le cadre des missions intérieures ou MISSINT, thème auquel j’ai consacré la deuxième partie de mon rapport.

Le budget consacré à la défense en 2013 est un budget de transition dans l’attente des conclusions du prochain Livre blanc et de la nouvelle loi de programmation militaire. Le format de nos armées évoluera à l’aune des conclusions de ces deux exercices, néanmoins je souhaite indiquer, dès à présent, que nos forces terrestres atteignent aujourd’hui un niveau « tout juste suffisant ».

Le projet de loi de finances pour 2013 assurera à l’armée de terre les capacités d’action lui permettant de répondre au contrat opérationnel fixé par le Livre blanc de 2008. L’armée de terre sera encore en mesure de déployer des forces de souveraineté et de présence en plusieurs points du globe, de participer à la protection de la population sur le territoire national au travers des missions intérieures et de contribuer à la stabilité et à la paix dans le monde via les opérations extérieures.

Conformément aux dispositions du Livre blanc de 2008 et à la LPM 2009-2014, le « cœur projetable » de l’armée de terre devrait se situer en 2015 à 70 000 hommes, c’est-à-dire moins que le nombre de places dans le Stade de France, pour une population de plus de 63 millions d’habitants. Descendre en dessous de ce seuil, pour réaliser des économies, est toujours possible. Cependant il me semble que notre outil de défense ne sera alors plus à même de remplir convenablement toutes les missions que nous lui assignons aujourd’hui. Les forces terrestres disposent à présent d’une capacité opérationnelle ramassée et rationalisée. Concernant le format de l’armée de terre, la commission chargée de préparer le Livre blanc devra apporter une réponse à chacune de ces deux questions fondamentales :

– Quelle défense voulons-nous pour notre pays ?

– Quel rang la France souhaite-elle tenir dans le concert des nations ?

Notre effort en matière de défense, notamment au profit des forces terrestres dans les années à venir, conditionnera les réponses à ces deux interrogations.

En 2013, les autorisations d’engagement (AE), hors titre 2, consacrées à l’armée de terre au sein du programme 178 « Préparation et emploi des forces » seront en augmentation de l’ordre de 9 % environ. En revanche les crédits de paiement (CP), hors titre 2, seront pour leur part en diminution de l’ordre de 3,4 % environ. L’augmentation importante des AE correspond notamment à un effort permettant de prendre en compte l’entretien programmé des matériels (EPM) des équipements de nouvelle génération et la remise aux normes des matériels rentrant d’Afghanistan, pour qu’ils puissent être utilisés sur le territoire national.

Néanmoins cette hausse constatée dans le projet de loi de finances pour 2013 ne doit pas masquer les difficultés rencontrées par l’armée de terre dont le poids budgétaire n’a cessé de décroître ces dernières années au sein du programme 146 « Équipement des forces ». L’armée de terre représente, en effet, depuis une dizaine d’années, environ 20 % des crédits d’équipement de nos forces armées. Or il avait été indiqué en 2008 dans le Livre blanc, puis dans la LPM, que les équipements des forces terrestres seraient une priorité. Hélas ceci ne s’est pas traduit dans les faits.

Ces dernières années l’armée de terre a été la première concernée par la contrainte budgétaire exercée sur le ministère de la défense. Jusqu’à présent ce sont, en effet, les crédits des forces terrestres qui ont le plus été touchés pour réaliser des économies. En 2013 l’armée de terre contribuera à nouveau aux efforts d’économie puisque 76 % des économies globales d’équipements de la mission « Défense » concerneront des équipements de l’armée de terre. Nous sommes aujourd’hui dans un contexte contraint, et le budget de la défense pour 2013 est un budget d’attente, mais il nous faudra veiller dans les années à venir à ce que les forces terrestres bénéficient de toute notre attention. Le lancement de la première étape du programme SCORPION, acronyme signifiant « synergie de contact renforcée par la polyvalence et l’infovalorisation », est par exemple reporté d’un an. Ce décalage est certes limité dans le temps, mais il me semble nécessaire, qu’à l’avenir ce programme essentiel pour la régénération des équipements de l’armée de terre ne soit plus décalé. Comme indiqué par Jean-Jacques Bridey précédemment et comme constaté lors de notre déplacement à Carpiagne en septembre dernier, certains véhicules de l’armée de terre, dont les véhicules de l’avant blindé (VAB) et les chars de reconnaissance AMX10-RC, conçus du temps de la guerre froide, auront entre 40 et 50 ans en 2020.

Concernant les effectifs de l’armée de terre, ils connaîtront une accentuation de leur déflation en 2013. Dans le contexte actuel celle-ci ira finalement au-delà de l’objectif initialement fixé par la LPM avec environ 3 713 postes en moins en 2013 – contre 2 888 initialement prévus – soit une diminution de 3,5 % par rapport à 2012. Pour mémoire l’armée de terre jouit d’un rapport coût efficacité incontestable, que ce soit sur le territoire national ou en opération extérieure, puisqu’elle ne représente que 29 % de la masse salariale du ministère de la défense pour 45 % des effectifs.

Je voudrais également évoquer devant vous un point que j’ai tenu à évoquer lors de tous mes entretiens : l’état d’esprit des hommes et des femmes de l’armée de terre qui ont su s’adapter ces dernières années à de nombreuses réformes et ont connu une importante réduction du format de leur armée - forte de 229 régiments en 1989, elle n’en comptera plus que 80 en 2016. Concernant le moral de nos soldats, deux éléments en particulier ont attiré mon attention. Tout d’abord la question de la diminution du nombre d’avancement au sein du ministère de la défense. Cette diminution devrait surtout concerner les officiers supérieurs. J’ai d’ailleurs relu le rapport de la Cour des comptes qui indique que nous avons un trop fort taux d’encadrement par rapport au nombre de militaires. Un autre point a contribué ces derniers mois à miner le moral de nos soldats : les dysfonctionnements à répétition du nouveau système de paiement des soldes des personnels de l’armée de terre, le système Louvois. Ces erreurs sont difficiles à vivre pour nos militaires et je me félicite que le ministre de la défense se soit personnellement impliqué, ces dernières semaines, dans la résolution de ce grave problème.

Je souhaiterais également attirer votre attention sur la réserve opérationnelle de l’armée de terre, qui est un complément indispensable au bon fonctionnement de nos forces terrestres. Les réservistes sont des militaires à part entière qui exercent leur métier à temps partiel. Ils sont payés et préparés de la même manière que leurs camarades d’active. L’armée de terre compte actuellement 15 950 réservistes. La cible pour 2015 est de 22 000 réservistes, néanmoins plusieurs obstacles empêchent cette montée en puissance. Il serait peut-être bon que la commission travaille sur ce sujet dans les mois à venir. Tout d’abord le budget alloué à la réserve de l’armée de terre est faible, de l’ordre de 37,8 millions d’euros ce qui ne permet de financer que 20,5 jours d’activités par an en moyenne. Par ailleurs un réserviste est attaché à son territoire, où il exerce une activité civile, par conséquent la dissolution ou le transfert d’unité a mécaniquement fait baisser les effectifs des réservistes depuis 2009. En Basse-Normandie, région dans laquelle j’ai mes attaches, il est par exemple difficile de trouver des réservistes, car il n’y a plus de régiments. Enfin la réserve en France, par rapport à d’autres pays, manque de souplesse et de réactivité. Les relations entre le monde de l’entreprise et les armées ne sont pas toujours aisées. Je pense qu’il serait nécessaire de faire évoluer le cadre légal pour favoriser l’activité des réservistes. Ce qui permettrait par ailleurs de renforcer le lien armée nation.

En 2013 l’armée de terre devra faire face à un défi de taille : le retour sur le territoire national de nos soldats avec le retrait d’Afghanistan. Au 1er janvier prochain, ils ne seront plus que 1 400 sur ce théâtre et auront en charge l’aéroport de Kaboul, l’hôpital de KAIA et la formation des soldats de l’armée nationale afghane jusqu’en 2014. Plus généralement, en 2013 les effectifs déployés en OPEX diminueront de façon importante. Ils étaient environ 10 000 hommes début 2009. Ils ne seront plus que 4 000 à la fin du mois de décembre et 3 000  à la mi-2013.

Le retrait d’Afghanistan va mécaniquement conduire à une importante réduction des journées d’activité opérationnelle, point sur lequel j’ai été extrêmement attentif. En 2013 nous atteindrons un seuil d’alerte avec seulement 105 journées de préparation et d’activité opérationnelles, quand la précédente LPM en prévoyait 150. Une baisse plus importante avait été un temps évoquée, et le ministre de la défense s’y est légitimement opposé. Je tiens à saluer cette décision. Les journées de préparation et d’activité opérationnelles sont essentielles pour le bon entraînement de nos troupes et pour le moral de nos soldats. Pour mémoire, l’indemnité de service en campagne (ISC) est la seule prime que touchent nos militaires du rang quand ils ne sont pas en OPEX. Le rythme d’activité des forces terrestres doit rester significatif pour que notre armée de terre puisse demeurer attractive et pour qu’elle puisse rester une armée de premier plan mobilisable à tout moment.

Avec le retrait d’Afghanistan, le territoire national va très prochainement devenir le premier théâtre d’opération de nos armées. Mais tout dépend bien évidemment des conjonctures internationales. C’est pour cette raison que j’ai choisi de consacrer la deuxième partie de mon rapport aux missions intérieures.

Le territoire national, l’armée de terre le connaît bien puisque de façon quotidienne ou récurrente, elle participe à des missions intérieures, apportant ainsi son savoir-faire et ses capacités au service de la population française, en soutien des forces de sécurité intérieure. Les missions intérieures sont des missions opérationnelles menées par les forces terrestres sur le territoire national sous la responsabilité de l’autorité civile et sous commandement militaire. Il est nécessaire de faire une distinction claire entre les coûts de fonctionnement normal et les surcoûts générés par une opération, que ce soit d’ailleurs une MISSINT ou une OPEX. Le budget opérationnel de programme « OPEX MISSINT » prend uniquement en charge les surcoûts. Le reste incombant au BOP « Terre ». Ainsi les différentes contributions financées sur les crédits de l’armée de terre, ont mobilisé en 2011 plus de 17 000 personnels pour un montant de plus de 4,3 millions d’euros au titre des dépenses de fonctionnement.

Dans le cadre des missions intérieures, les forces terrestres peuvent être mobilisées pour des missions d’aide et de secours aux populations. Dans ce cadre, les militaires de l’armée de terre aident les populations à faire face aux conséquences des sinistres de toutes natures, comme à la suite de la tempête Xynthia ou des inondations de Draguignan en 2010. J’ai pu constater sur le terrain, la plus-value apportée par nos forces terrestres auprès des forces de sécurité intérieure, notamment, dans le cadre du plan Héphaïstos de lutte contre les feux de forêt.

L’armée de terre peut également intervenir pour renforcer la sécurité générale sur notre territoire. Dans ce cadre-là des militaires de l’armée de terre sont chaque jour mobilisés au profit du plan Vigipirate, dispositif de prévention et de lutte contre les actions terroristes. Dispositif très apprécié par nos concitoyens.

L’armée de terre se trouve également aux côtés de la gendarmerie nationale, dans un milieu particulièrement hostile – la forêt guyanaise – où elle mobilise environ 285 hommes par jour pour lutter contre l’orpaillage illégal, dans le cadre de l’opération Harpie.

En conclusion, le budget 2013, qui est un budget de transition, dans un contexte contraint, qui fait suite aux décisions prises à la suite du Livre blanc de 2008 et dans le cadre de la précédente LPM, devrait permettre à l’armée de terre de disposer des ressources nécessaires pour mener à bien ses différentes missions en opérations extérieures et en missions intérieures. Néanmoins il nous faudra, dans les années à venir renforcer notre effort de défense – en conformité avec les nouveaux contrats opérationnels définis par le prochain Livre blanc – en se concentrant, à mon avis, sur la régénération des équipements de l’armée de terre (programme SCORPION), sur la disponibilité de nos matériels, et sur un haut niveau de préparation et d’activité pour nos soldats.

Mes chers collègues, je vous invite à émettre un avis favorable à l’adoption des crédits des programmes 178 et 146 consacrés aux forces terrestres.

M. Nicolas Dhuicq. Les politiques vont-ils enfin reprendre le pouvoir ? Notre pays ne fournit pas les efforts suffisants dans ce domaine. Quel choix offrons-nous à nos jeunes ? Allons-nous disposer d’une armée recrutant suffisamment ou bien abandonner nos jeunes à un système d’assistance déshumanisant ?

Dans les unités, nous observons que le moral des officiers est mauvais. Une armée moderne suppose un taux d’encadrement élevé. Elle mérite le respect car elle va au feu. La guerre moderne se fait non plus avec des régiments entiers mais avec des groupes de combat. Existe-t-il une réflexion sur une réorganisation de l’armée de terre vers un contrat plus interarmes et opérationnel ?

M. le Rapporteur pour avis. Les précédentes réformes y ont répondu partiellement et je ne pense pas qu’une nouvelle réforme serait bienvenue ; elle minerait le moral des troupes. De ce point de vue, le programme SCORPION permettra à l’armée de terre de travailler avec un système cohérent et intégré. Il a été décalé mais sera tenu.

Le Livre blanc dressera le bilan des précédentes réformes et nous dira s’il faut ou non une nouvelle réorganisation. Pour ma part, je souhaite une stabilisation du format de l’armée de terre.

M. Michel Voisin. Nous devons nous préoccuper de la proportion importante d’officiers constatée depuis la réforme. La baisse de format des armées n’a pas entraîné une baisse du nombre d’élèves dans les écoles. Nous avons aujourd’hui deux fois plus de généraux qu’au moment de la loi sur la professionnalisation. Il existe donc un engorgement en haut de la pyramide, ce qui crée du mécontentement. Des décisions vont-elles être prises ?

Par ailleurs, avez-vous eu connaissance du plan prospectif à 30 ans ? La programmation est-elle en cohérence avec ce document ?

M. le Rapporteur pour avis. Cela plan est confidentiel et je n’en ai pas eu connaissance.

La nomination d’officiers chaque année permet notamment la promotion de sous-officiers. Il s’agit d’une source de motivation dont nous devons tenir compte.

Le recrutement d’officiers diminue. Il était de 841 en 2009, de 737 en 2011 et devrait être de 715 en 2013. Si le taux de recrutement en interne est stable, il diminue en externe, passant de 163 recrutements en 2010 à 156 en 2011, 143 en 2012, et devrait s’établir à 133 en 2013.

Nous devons également tenir compte de l’allongement de la durée de cotisation pour la retraite qui augmente mécaniquement la masse salariale.

Le dynamisme des corps d’officiers est un choix que nous devons assumer. Il permet un bon déroulement de carrière.

Mme la Présidente. Le plan prospectif est effectivement confidentiel et nous avons eu connaissance dans le cadre des travaux sur le Livre blanc.

Je souhaite que nous travaillions sur la question des écoles après la LPM.

M. Michel Voisin. Y compris des lycées militaires.

M. Christophe Guilloteau. Quel est le coût financier de l’opération Vigipirate ? Combien de personnels mobilise-t-elle ?

M. le Rapporteur pour avis. Elle mobilise environ 800 hommes par jour, essentiellement à Paris, dans les grandes gares et les aéroports. Ils mènent un travail intéressant, en suivant notamment des circuits aléatoires programmés. Le surcoût est de 8 millions d’euros environ. C’est une charge que l’on peut assumer, cette opération permettant à nos militaires, et notamment aux légionnaires, d’être visibles.

Conformément aux conclusions du Rapporteur pour avis, la Commission donne un avis favorable à l’adoption des crédits relatifs à « Préparation et emploi des forces : forces terrestres » de la mission « Défense ».

*

* *

Mme la Présidente. Nous allons maintenant entendre Mme Daphna Poznanski-Benhamou, Rapporteure pour avis des crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation ».

Mme Daphna Poznanski-Benhamou, Rapporteure pour avis. Les crédits de la mission « Anciens Combattants, mémoire et liens avec la Nation » sont répartis en trois programmes : le programme 167 « Liens entre la Nation et son armée », qui promeut l’esprit de défense et de citoyenneté au sein de la population et qui inclut sa dimension mémorielle ; le programme 169 « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant », qui témoigne de la reconnaissance de la Nation à l’égard des anciens combattants et des victimes de guerre ; le programme 158, « Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la Seconde Guerre mondiale ».

La maquette budgétaire a beaucoup évolué au cours de ces dernières années puisque les politiques culturelles et muséographiques ainsi que les actions de communication sont rattachées depuis 2009 au programme 212 « Soutien de la politique de défense » de la mission « Défense ». Je le regrette car cela nous prive d’une mission où seraient regroupées toutes les actions dédiées à la mémoire combattante et au lien armée nation.

Le programme 167 finance tout d’abord l’organisation de la nouvelle Journée défense et citoyenneté (JDC) par la direction du service national (DSN) du ministère de la défense, à laquelle plus de 750 000 jeunes participent chaque année. Ses crédits pour 2013 s’élèvent à 102 millions d’euros en crédits de paiement, soit une baisse de 3,7 % par rapport à 2012. Cette baisse s’explique par l’importante réforme de l’organisation de la DSN entreprise depuis 2009, qui se traduit par la création de cinq établissements du service national et le transfert de la fonction archives au service historique de la défense. Au total, ce sont 849 emplois qui seront supprimés d’ici 2014, dont 37 l’année prochaine. La JDC s’est recentrée sur sa mission fondamentale de sensibilisation des jeunes aux nouveaux enjeux de la défense et de la sécurité nationale, tout en intégrant un module d’information sur le nouveau service civique. Je souhaiterais qu’en plus des tests de détection de l’illettrisme existants, il soit procédé à des tests de « numératie », c’est-à-dire que l’on puisse vérifier la capacité de compter. Je déplore que ces tests soient toujours à l’étude au ministère de l’Éducation nationale et qu’ils ne doivent pas voir le jour avant 2014. Il serait judicieux de faire vérifier si de tels tests ont été validés par d’autres pays de l’Union européenne, et dans l’affirmative, de s’en inspirer afin de combler notre retard. Par ailleurs, il apparaît que la pré-sensibilisation à la JDC qui devrait être effectuée en classes de troisième est première est peu effectuée. Je souhaite qu’elle devienne réellement effective et il me semble que l’enseignement d’une morale laïque promise par le ministre de l’Éducation nationale soit un cadre approprié pour le faire.

Les crédits consacrés à la politique de mémoire augmentent de manière assez spectaculaire l’année prochaine : ils passent de 12 à 17 millions d’euros en crédits de paiements.

Cette augmentation permet de préparer une année 2014 exceptionnelle sur le plan commémoratif puisque le 70e anniversaire du débarquement sera commémoré aux côtés du centenaire de la Grande Guerre. Un groupement d’intérêt public (GIP) a été créé au printemps dernier pour préparer le cycle de commémoration de la Grande Guerre à partir de 2014. Son conseil d’administration est présidé par le général Elrick Irsatorza – ancien chef d’état-major de l’armée de terre – et il regroupe 7 ministères, des établissements publics et plusieurs associations. Je souhaite que ce GIP puisse continuer à travailler sereinement et que les financements attendus lui soient versés selon le calendrier initial (2 millions d’euros sont prévus cette année par le programme 167).

Le projet de loi de finances pour 2013 prévoit qu’1 million d’euros soit consacré à l’érection d’un monument national d’hommage aux morts en opérations extérieures (OPEX). Je soutiens totalement cette initiative. Néanmoins, je suis étonnée par le coût de ce monument et la longueur de la procédure – le monument ne devrait être inauguré qu’en 2014, alors que le ministère y travaille depuis déjà un an…

J’ai été par ailleurs très étonnée d’apprendre que le Gouvernement avait versé 3 millions d’euros à la Fondation pour la mémoire de la guerre d’Algérie. Créée par loi du 23 février 2005, son activité s’est réduite en 2012 à l’organisation de deux colloques et elle a été particulièrement discrète durant cette année du cinquantenaire de l’indépendance. Je souhaite que le ministre délégué dissolve cette fondation, dont les résultats ne sont pas à la hauteur des espérances, et récupère ces 3 millions d’euros pour abonder les crédits sociaux de l’ONAC.

Les crédits du programme 169 « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant » représentent l’essentiel des crédits de cette mission : ils s’établissent à 2,8 milliards d’euros pour 2013. Ils suivent une trajectoire annuelle de baisse, (– 2,7 % cette année) conformément à la nouvelle programmation triennale des finances publiques. Comme cette baisse suit de près celle du nombre de bénéficiaires – 15 000 pensions militaires d’invalidité et 60 000 retraites du combattant en moins chaque année – les prestations versées ne baissent pas et, pour certaines d’entre elles, ont augmenté ces dernières années.

Malgré cette diminution des effectifs, les crédits inscrits dans le projet de loi de finances pour 2013 pour la retraite du combattant sont en hausse de 19,3 millions d’euros (+ 2,4 %) pour prendre en compte le coût, estimé à 54 millions d’euros, de l’extension en année pleine de l’augmentation de 4 points de l’indice de retraite entrée en vigueur au 1er juillet 2012. Les crédits consacrés à la retraite du combattant s’élèveront par conséquent à 822 millions d’euros en 2013. Avec un indice de 48 points, le montant de la retraite du combattant s’élève à 665,76 euros ; cette retraite était servie, au 31 décembre 2011, à plus d’1,2 million de personnes.

Aucune mesure nouvelle n’est prise cette année pour la revaloriser ou en étendre le bénéfice car la priorité est de tenir les engagements du précédent Gouvernement sur le financement en année pleine des 48 points, financement qui n’avait pas été budgété.

Pour répondre aux difficultés financières que pouvaient rencontrer les veuves d’anciens combattants, l’Office national des anciens combattants (ONAC) a créé en 2007 l’aide différentielle aux conjoints survivants. Celle-ci doit leur permettre d’atteindre un niveau minimum de ressources. Ce minimum était fixé à 550 euros lors de son entrée en vigueur en 2007 et a été porté à 900 euros depuis le 1er avril 2012. Cette aide bénéficie aujourd’hui à un peu plus de 5 000 personnes, pour un montant moyen de 104 euros. L’objectif est de rapprocher son montant du plafond du seuil de pauvreté, soit 964 euros. Je souhaite que son bénéfice puisse être étendu, à l’avenir, aux veuves des conjoints survivants résidant hors de France, aujourd’hui exclues de ce dispositif.

Je sais que nombre d’entre vous souhaite voir le bénéfice de cette aide étendue aux anciens combattants les plus démunis. La difficulté tient à son financement : 5 000 anciens combattants pourraient bénéficier d’une telle prestation, selon l’étude remise l’année dernière par le Gouvernement au Parlement, voire plus de 70 000 si on prend en compte les combattants de nos anciennes colonies. Le financement d’une telle mesure est très compliqué cette année. C’est pourquoi je préfère que l’effort soit concentré, pour le moment, sur les veuves. Je précise que l’ONAC verse déjà chaque année plus de 5 millions d’euros d’aide sociale aux anciens combattants en France et 1 million à l’étranger.

Je me suis intéressée à l’Institution nationale des Invalides (INI) et bon nombre de mes questions sont demeurées sans réponse. J’ai le sentiment que l’INI, malgré un savoir-faire de qualité dans des domaines pointus comme la chirurgie orthopédique ou celle des escarres, n’a pas totalement achevé sa mue et trouvé sa place dans la nouvelle organisation de l’offre de soins. La gestation du contrat d’objectifs et de moyens a été difficile, du fait des divergences d’appréciation entre le ministère chargé des Anciens combattants et le ministère de la Santé, qui le financent à parts égales. J’attends avec impatience les résultats de l’audit que doit mener cette année la Cour des Comptes sur cette vénérable institution. Si la maison des pensionnaires accomplit une mission qu’elle seule peut remplir, le centre médico-chirurgical a encore des progrès à faire en termes d’optimisation de son fonctionnement et de mutualisation avec l’hôpital de Percy.

Les crédits dédiés aux victimes des essais nucléaires, 10 millions d’euros, sont reconduits pour 2013. Le Comité d’indemnisation s’est réuni trente fois entre la date de sa première réunion, le 20 septembre 2010, et le 6 septembre 2012. Durant cette période, 772 dossiers ont été reçus et seules 7 indemnisations ont été accordées pour un montant total de 290 000 euros.

Compte tenu du faible succès du dispositif, le Gouvernement a assoupli les critères d’attribution de l’indemnisation par le décret du 30 avril 2012. Celui-ci étend, d’une part, le périmètre géographique des zones de l’atoll de Hao et de celles de l’île de Tahiti, dans lesquelles le demandeur doit avoir résidé ou séjourné pour pouvoir bénéficier du régime d’indemnisation, et élargit d’autre part la liste des dix-huit maladies radio-induites au cancer du sein chez l’homme, ainsi qu’à trois nouvelles pathologies (lymphomes, myélomes et myélodysplasies). De nouveaux dossiers, correspondant à ces critères assouplis, devraient être déposés dans les mois qui viennent.

J’en viens maintenant au programme 158, qui indemnise les victimes de la Seconde Guerre mondiale : orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites (décret du 13 juillet 2000) ; orphelins dont les parents ont été victimes d’actes de barbarie ; victimes de spoliations intervenues du fait de législations antisémites (décret du 10 septembre 1999).

Le programme dispose pour 2013 de 110 millions d’euros de crédits de paiement.

Les orphelins couverts par les décrets de 2000 et 2004 peuvent bénéficier d’un capital de 27 000 euros ou d’une rente mensuelle de 500 euros. 36 millions sont inscrits en 2013 pour les orphelins de parents victimes de persécutions antisémites, pour près de 6 000 personnes percevant une rente. 53 millions sont inscrits pour les orphelins de parents victimes d’actes de barbarie, ce qui correspond au versement de 8 000 rentes.

Les victimes de spoliations sont indemnisées par les services du Premier ministre, après instruction de leur dossier par la Commission d’indemnisation des victimes de spoliation (CIVS). Depuis le début de ses travaux et jusqu’au 31 juillet 2012, la Commission a reçu plus de 23 000 requêtes. Après le pic atteint en 2002, leur nombre ne cesse de baisser : 104 en moyenne chaque mois en 2004, 84 en 2007, 46 en 2011 et 37 sur les 6 premiers mois de l’année 2012. Au 31 juillet 2012, plus de 477 millions d’euros ont été alloués à 44 033 bénéficiaires sur les crédits de ce programme.

Après douze années de travaux, la CIVS a en grande partie rempli sa mission. Sauf exception, pratiquement plus aucun dossier ne concerne directement une personne spoliée à l’âge adulte et très peu concernent désormais des enfants victimes de la Shoah ou des survivants de la Shoah. Beaucoup de demandes nouvelles concernent des requérants qui n’ont pas connu les personnes spoliées et qui n’ont avec elles qu’une parenté lointaine.

Par ailleurs, l’ensemble des États européens qui avaient ouvert une procédure similaire, ont d’ores et déjà clôturé définitivement les opérations d’indemnisation (Autriche, Hongrie, Belgique, Bulgarie).

C’est pourquoi j’estime qu’il est temps de fixer une date de forclusion à ce dispositif, le 31 décembre 2014. La fixation d’une date de forclusion n’emporterait pas la fin immédiate du dispositif pour ne pas priver les bénéficiaires potentiels de la possibilité de faire valoir leurs droits. Compte tenu de la dispersion géographique des bénéficiaires, le délai suffisamment long prévu permettrait le dépôt d’ultimes requêtes et l’instruction des requêtes en cours. L’annonce du dispositif de forclusion devrait s’accompagner d’une campagne d’information sur le plan national et international. S’il n’est pas possible de déposer un amendement aujourd’hui – la loi de finances ne peut porter que sur les crédits de l’année à venir – j’en déposerai un le moment venu.

En résumé, je dirai que ce projet de budget préserve l’essentiel et que les droits du monde combattant sont maintenus. Je me réjouis que, dans un contexte particulièrement difficile, ce budget n’ait pas été une « variable d’ajustement » et qu’un effort important soit consacré à la mémoire et à la solidarité.

En conclusion, Madame la Présidente, mes chers collègues, je vous demande de donner un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » pour l’année 2013.

M. Jean-Jacques Candelier. Je déplore que le budget 2013 ne réponde pas aux préoccupations récurrentes du monde combattant : il se contente de reconduire le dispositif actuel, de maintenir les droits en leur état. La moyenne d’âge des anciens combattants et de leurs ayants droit est aujourd’hui supérieure à 75 ans : va-t-on attendre vingt-cinq ans pour faire enfin droit à leurs demandes ? En effet, avec 60 000 bénéficiaires de pensions en moins chaque année, on pourrait leur donner satisfaction à budget constant. Il en va du respect de la nation envers ceux qui se sont sacrifiés pour défendre ses valeurs. Pour toutes ces raisons je voterai contre les crédits consacrés aux anciens combattants.

Mme la Rapporteure pour avis. Le budget baisse pour tenir compte de la baisse des effectifs des bénéficiaires.

M. Daniel Boisserie. Notre collègue Jean-Jacques Candelier déplore un simple « maintien des droits », mais dans le contexte budgétaire actuel, maintenir les droits des anciens combattants n’est déjà pas si mal ! On ne peut pas demande toujours plus, comme le font certaines associations.

Certains efforts seraient néanmoins légitimes ; je pense notamment au cas des veuves de grands invalides, dont la pension s’établit en moyenne à 500 euros. J’entends bien que pour chaque augmentation de droits, il faut trouver des recettes à due concurrence. C’est possible dans ce cas : certains grands invalides emploient tout ou partie de leur indemnité à acheter des logements, dont la valeur est parfois très élevée, mais qui bénéficient d’une exemption d’impôt de solidarité sur la fortune (ISF). On pourrait rendre ces biens imposables à l’ISF pour dégager des ressources nécessaires à l’amélioration de la condition des veuves.

Mme la Rapporteure pour avis. La situation des veuves des plus grands invalides est le premier problème sur lequel je me suis penchée. Mais il ressort de mes auditions que nous ne disposons pas de données statistiques suffisamment précises. Il faudra poursuivre nos travaux d’investigation sur ce point.

M. Daniel Boisserie. Nous pourrions déposer en séance publique un amendement tendant à ce que le Gouvernement nous présente un rapport sur le sujet.

M. Nicolas Dhuicq. Vous avez souligné le faible taux de recours au mécanisme d’indemnisation des victimes de dommages corporels liés à des essais nucléaires. Un confrère interniste m’a indiqué que la population concernée étant relativement jeune, elle est plutôt en bonne santé, ce qui peut expliquer que l’on ne découvre pas un nombre élevé de pathologies. Le faible niveau de dépenses constaté peut s’expliquer ainsi par l’état de santé de la population, plutôt que par des difficultés d’accès au droit.

Mme la Rapporteure pour avis. Les médecins disent d’ailleurs que la prévalence des cancers est moins élevée parmi ces personnes que dans l’ensemble de la population ! Il faudra toutefois observer l’impact de l’assouplissement des critères d’indemnisation opéré par le nouveau décret.

La commission en vient à l’examen des amendements.

Article 46 : État B – Mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation »

La commission examine l’amendement DF 1 présenté par M. Christophe Guilloteau.

M. Christophe Guilloteau. Cet amendement a pour objet de revaloriser de deux points l’indice de la retraite du combattant. Je ne peux pas me satisfaire de l’argument selon lequel une telle revalorisation n’est pas budgétée : l’amendement prévoit la compensation de la charge supplémentaire. Depuis cinq ans, nous avons revalorisé régulièrement cet indice ; il serait regrettable de rompre ce mouvement. Pour le monde combattant, il ne s’agit pas seulement d’une question financière : c’est avant tout une affaire de reconnaissance. Toutes les associations vous le diront, y compris celles qui sont plus proches du groupe majoritaire que du nôtre. En outre, l’entrée en vigueur de la mesure le 1er juillet a pour effet de limiter son coût pour l’exercice 2013.

Mme la Rapporteure pour avis. Mon avis est défavorable. L’augmentation de deux points de l’indice votée l’an dernier entraine déjà une dépense supplémentaire de 54 millions d’euros en année pleine dans le budget 2013. Il est impossible d’aller plus loin dans l’état actuel de nos finances publiques.

M. Bernard Deflesselles. C’est un vrai débat, qu’il ne faut pas escamoter. L’indice de la retraite du combattant était gelé depuis 1979 : c’est la précédente majorité qui l’a porté en cinq ans de 33 à 48 – et vous la fustigiez alors parce que selon vous, nous n’en faisions pas assez ! En refusant de poursuivre ce mouvement de rattrapage progressif, vous brisez un cercle vertueux. Vous en expliquerez les raisons au monde combattant.

Suivant l’avis défavorable de la Rapporteure pour avis, la commission rejette l’amendement DF 1.

La commission examine ensuite l’amendement DF 7 de M. Candelier.

M. Jean-Jacques Candelier. L’amendement est défendu.

Mme la Rapporteure pour avis. Cet amendement propose d’attribuer la carte du combattant à tous ceux qui ont 120 jours de présence en Algérie à condition d’être arrivés avant le 2 juillet 1962. Cette mesure bénéficierait à environ 8 000 personnes : 6 000 appelés du contingent et 2 000 militaires de carrière pour un coût estimé à un peu plus de 5 millions d’euros. Je sais qu’il s’agit d’une revendication forte, portée par de nombreuses associations d’anciens combattants. Vous savez aussi, mes chers collègues, que nos marges de manœuvre budgétaires sont très limitées et qu’il n’est pas possible de dégager les 5 millions d’euros nécessaires. Cette année, l’effort porte principalement sur le financement de la retraite du combattant et l’effort de mémoire. J’espère que cette demande pourra trouver satisfaction dans le prochain budget.

Mme la Présidente. Je rappelle que lors de son audition, le ministre a exprimé sa volonté de travailler sur cette question et qu’il n’était pas du tout opposé à une évolution pour les prochaines années.

Suivant l’avis défavorable de la Rapporteure pour avis, la commission rejette l’amendement DF 7, puis examine l’amendement DF 3 de M. Candelier.

M. Jean-Jacques Candelier. L’amendement est défendu.

Mme la Rapporteure pour avis. Cet amendement propose d’augmenter le plafond de la rente mutualiste d’un demi-point. Aujourd’hui, un peu plus de 400 000 personnes, soit moins du tiers des anciens combattants, ont souscrit à cette rente et cela entraîne une dépense pour l’État de 250 millions d’euros chaque année. Je ne crois vraiment pas prioritaire d’aller au-delà pour le moment.

Mme la Présidente. Je tiens à rappeler que cette rente mutualiste est une retraite par capitalisation.

Suivant l’avis défavorable de la Rapporteure pour avis, la commission rejette l’amendement DF 3, puis examine l’amendement DF 4 de M. Candelier.

M. Jean-Jacques Candelier. L’amendement est défendu.

Mme la Rapporteure pour avis. Cet amendement vise à créer une aide différentielle au profit des anciens combattants les plus démunis. Dans le rapport qu’il avait remis au Parlement à sa demande, l’année dernière, le Gouvernement, avait estimé à 5 000 le nombre d’anciens combattants concernés par la mise en place d’un tel dispositif, pour un coût de 4,5 millions d’euros. La difficulté, soulignée par ce même rapport et qui explique sans doute l’absence de mise en œuvre de ce dispositif, est que, potentiellement, sont concernés les anciens combattants vivant à l’étranger, soit plus de 70 000 personnes dont 58 000 ex-cristallisés. Je vous rappelle que chaque année l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONAC-VG) attribue 5 millions d’euros d’aide sociale à 13 000 anciens combattants. Ces crédits d’action sociale ont été abondés de 500 000 euros cette année. Il n’est pas possible, pour le moment, d’aller au-delà.

Suivant l’avis défavorable de la Rapporteure pour avis, la commission rejette l’amendement DF 4, puis examine l’amendement DF 5 de M. Candelier.

M. Jean-Jacques Candelier. L’amendement est défendu.

Mme la Rapporteure pour avis. Cet amendement vise à porter le plafond de ressources de l’ADCS à 964 euros, soit le seuil européen de pauvreté. C’est une demande légitime et le ministre délégué a rappelé devant nous qu’atteindre le seuil de pauvreté était un objectif que le Gouvernement poursuivait. Mais il est très difficile d’aller au-delà pour le moment.

Mme la Présidente. Les crédits sociaux y pourvoient pour l’instant.

M. Jean-Jacques Candelier. Mme la Présidente, il faudra rapidement établir une feuille de route pour la XIVe législature en ce qui concerne le budget des anciens combattants. Pour le moment il n’y a pas de programme. On se limite au maintien des droits.

Suivant l’avis défavorable de la Rapporteure pour avis, la commission rejette l’amendement DF 5, puis examine l’amendement DF 11 de M. Candelier.

M. Jean-Jacques Candelier. L’amendement est défendu.

Mme la Rapporteure pour avis. Cet amendement vise à abonder de 1,9 million d’euros les crédits dédiés à l’aide aux conjoints survivants. L’aide au conjoint survivant de l’ONAC bénéficiait à 4 671 personnes au 30 juin 2012 et les crédits inscrits pour 2013 sont de l’ordre de 5 millions d’euros, soit la dépense constatée ces dernières années. Il existe effectivement, compte tenu de l’augmentation du plafond à 900 euros au 1er avril dernier – non budgétée par le précédent Gouvernement – un risque de dépassement de cette enveloppe. L’ONAC réfléchit actuellement avec le secrétariat général pour l’administration du ministère de la défense au redéploiement de crédits pour l’aide sociale.

M. Jean-Jacques Candelier. L’ONAC a besoin d’argent pour répondre aux demandes.

Mme la Rapporteure pour avis. La création d’un groupe de travail sur le sujet est en cours. Mais je partage votre inquiétude.

Suivant l’avis défavorable de la Rapporteure pour avis, la commission rejette l’amendement DF 11, puis examine l’amendement DF 6 de M. Candelier.

M. Jean-Jacques Candelier. L’amendement est défendu.

Mme la Rapporteure pour avis. Cet amendement propose d’augmenter la valeur du point de pension militaire d’invalidité (PMI) pour qu’il tienne compte des primes versées aux fonctionnaires. Je tiens à préciser que depuis le 1er janvier 2010, l’indice des traitements de la fonction publique de l’INSEE, qui servait jusque-là au calcul de la valeur du point PMI, a été remplacé par l’indice de traitement brut-grille indiciaire (ITB-GI), calculé par l’INSEE et la direction générale de l’administration et de la fonction publique. À chaque publication, trimestrielle, de la nouvelle valeur de cet indice, un arrêté est pris pour revaloriser à due concurrence la valeur du point PMI.

La procédure de fixation du rapport constant est aujourd’hui très claire et je ne crois pas utile de la faire à nouveau évoluer : ce qui compte dans l’indice de référence ITB-GI, c’est son évolution, pas le montant qui y est attaché, car c’est bien l’évolution qui est répercutée sur l’évolution du point PMI.

Je ne suis pas sûre que l’évolution des primes des fonctionnaires, sujet très complexe, connaisse une pente croissante et régulière. En revanche, l’indice ITB-GI a augmenté de 0,73 % en moyenne en 2009 et de 0,27 % au premier trimestre 2012, alors que l’indice des prix à la consommation baissait de 0,3 % au mois de septembre 2012.

Suivant l’avis défavorable de la Rapporteure pour avis, la commission rejette l’amendement DF 6, puis examine l’amendement DF 8 de M. Candelier.

M. Jean-Jacques Candelier. L’amendement est défendu.

Mme la Rapporteure pour avis. Cet amendement propose d’accorder une reconnaissance de l’État, sur le modèle des décrets de 2000 et 2004 aux enfants de parents morts pour la France pendant la Résistance. Vous le savez, le précédent Gouvernement, suite aux travaux de la commission Hardouin, avait travaillé à la préparation d’un décret unique pour ne laisser personne de côté. Selon les hypothèses les plus restrictives, le coût annuel du dispositif est évalué à plus de 100 millions d’euros par an.

Vous comprendrez qu’au moment où on demande un effort supplémentaire à tous les budgets pour contribuer à la réduction des dépenses publiques, il n’est pas question d’étendre les dispositifs d’indemnisation existants à de nouvelles catégories de victimes.

Suivant l’avis défavorable de la Rapporteure pour avis, la commission rejette l’amendement DF 8.

Après l’article 62

La commission examine l’amendement DF 9 de M. Candelier.

M. Jean-Jacques Candelier. L’amendement est défendu.

Mme la Rapporteure pour avis. Cet amendement demande que le Gouvernement remette au Parlement une étude sur l’extension du bénéfice de la campagne double à tous les anciens d’Algérie en instaurant une « rétroactivité totale ». Je pense que nous disposons déjà de tous les éléments d’information.

Compte tenu des règles de prescription quadriennale, le supplément de pension serait accordé sur les quatre dernières années en plus de l’année en cours à la date de la demande. L’extension de périmètre pourrait ainsi bénéficier à environ 5 500 ayants droit et ayants cause. Le surcoût maximum de l’extension du bénéfice de la campagne double est estimé (sur la base des proportions d’effectifs bénéficiaires identifiées dans les études sur le dispositif du décret du 29 juillet 2010) à 2,4 millions d’euros, compte tenu des rappels sur la période de prescription ; le surcoût annuel stricto sensu s'élevant à 600 000 euros.

Je rappelle enfin que la section du contentieux du Conseil d’État par sa décision du 9 mai 2011, a validé le dispositif relatif à l’attribution de la campagne double.

Suivant l’avis défavorable de la Rapporteure pour avis, la commission rejette l’amendement DF 9.

Après l’article 62

La Commission examine l’amendement DF 10 de M. Candelier.

M. Jean-Jacques Candelier. L’amendement est défendu.

Mme la Rapporteure pour avis. Cet amendement demande que le Gouvernement remette un rapport d’information sur les modalités de rattrapage de la valeur du point PMI, question qui a déjà été évoquée.

Suivant l’avis défavorable de la Rapporteure pour avis, la commission rejette l’amendement DF 10.

M. Christophe Guilloteau. Le groupe UMP votera contre ce projet de budget. Onze amendements vous ont été soumis aujourd’hui et aucun n’a été adopté. La plupart venaient pourtant de la FNACA qui est réputée vous être plutôt proche. Ses membres liront certainement avec gourmandise le compte rendu de notre réunion, y voyant comment ils sont traités par la nouvelle majorité.

Mme la Présidente. Nous laissons au ministre le soin de trancher ces questions dans l’hémicycle.

M. Philippe Nauche. Il ne me semble pas de bon ton d’affecter de la sorte une étiquette politique à une organisation d’anciens combattants, d’autant que cela ne se vérifie pas nécessairement sur le terrain.

Conformément aux conclusions de sa Rapporteure pour avis, la Commission émet un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation.

*

* *

La séance est levée à douze heures trente

*

* *

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION

« Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation »

Amendement n° DF1 présenté par M. Christophe Guilloteau et les commissaires membres du groupe UMP

Article 46

État B

Modifier ainsi les autorisations d’engagement et les crédits de paiement :

(en euros)

    Programmes

    +

    -

    Liens entre la nation et son armée

      Dont titre 2

0

0

9 000 000

0

    Mémoire, reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant

      Dont titre 2

9 000 000

0

0

0

    Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale

      Dont titre 2

0

0

0

0

    TOTAUX

9 000 000

9 000 000

    SOLDE

    0

Amendement n° DF3 présenté par M. Jean-Jacques Candelier

Article 46

État B

Modifier ainsi les autorisations d’engagement et les crédits de paiement :

(En euros)

Programmes

+

-

Liens entre la Nation et son armée

dont titre 2

 

2 500 000

Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant

2 500 000

 

Indemnisation des victimes de persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale

   

TOTAUX

2 500 000

2 500 000

SOLDE

0

Amendement n° DF4 présenté par M. Jean-Jacques Candelier

Article 46

État B

Modifier ainsi les autorisations d’engagement et les crédits de paiement :

(En euros)

Programmes

+

-

Liens entre la Nation et son armée

dont titre 2

 

5 000 000

Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant

5 000 000

 

Indemnisation des victimes de persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale

   

TOTAUX

5 000 000

5 000 000

SOLDE

0

 

Amendement n° DF5 présenté par M. Jean-Jacques Candelier

Article 46

État B

Modifier ainsi les autorisations d’engagement et les crédits de paiement :

(En euros)

Programmes

+

-

Liens entre la Nation et son armée

dont titre 2

 

7 000 000

Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant

7 000000

 

Indemnisation des victimes de persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale

   

TOTAUX

7 000 000

7 000 000

SOLDE

0

 

Amendement n° DF6 présenté par M. Jean-Jacques Candelier

Article 46

État B

Modifier ainsi les autorisations d’engagement et les crédits de paiement :

(En euros)

Programmes

+

-

Liens entre la Nation et son armée

dont titre 2

 

5 000 000

Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant

5 000 000

 

Indemnisation des victimes de persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale

   

TOTAUX

5 000 000

5 000 000

SOLDE

0

 

Amendement n° DF7 présenté par M. Jean-Jacques Candelier

Article 46

État B

Modifier ainsi les autorisations d’engagement et les crédits de paiement :

(En euros)

Programmes

+

-

Liens entre la Nation et son armée

dont titre 2

 

4 600 000

Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant

4 600 000

 

Indemnisation des victimes de persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale

   

TOTAUX

4 600 000

4 600 000

SOLDE

0

 

Amendement n° DF8 présenté par M. Jean-Jacques Candelier

Article 46

État B

Modifier ainsi les autorisations d’engagement et les crédits de paiement :

(En euros)

Programmes

+

-

Liens entre la Nation et son armée

dont titre 2

 

10 000 000

Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant

   

Indemnisation des victimes de persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale

10 000 000

 

TOTAUX

10 000 000

10 000 000

SOLDE

0

 

Amendement n° DF9 présenté par M. Jean-Jacques Candelier

Après l’article 62

Insérer l’article suivant :

Le Gouvernement doit déposer un rapport d’information avant le 1er janvier 2013 sur l’opportunité et les modalités de modification du décret n° 2010-890 du 29 juillet 2010 portant attribution du bénéfice de la campagne double aux anciens combattants d’Afrique du Nord afin que soit réellement attribué le bénéfice de la campagne double à l’ensemble des anciens combattants d’Afrique du Nord.

Amendement n° DF10 présenté par M. Jean-Jacques Candelier

Après l’article 62

Insérer l’article suivant :

Le Gouvernement doit déposer un rapport d’information avant le 1er janvier 2013 sur les modalités de rattrapage de la valeur du point de pension militaire d’invalidité qui ne respecte plus le rapport constant défini par les lois de 1948, 1951 et 1953.

Amendement n° DF11 présenté par M. Jean-Jacques Candelier

Article 46

État B

Modifier ainsi les autorisations d’engagement et les crédits de paiement :

(En euros)

Programmes

+

-

Liens entre la Nation et son armée

dont titre 2

 

1 970 000

Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant

1 970 000

 

Indemnisation des victimes de persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale

   

TOTAUX

1 970 000

1 970 000

SOLDE

0

 

*

* *

Membres présents ou excusés

Présents. – Mme Patricia Adam, M. François André, M. Olivier Audibert Troin, M. Jean-Pierre Barbier, M. Nicolas Bays, M. Daniel Boisserie, M. Jean-Jacques Bridey, M. Jean-Jacques Candelier, Mme Nathalie Chabanne, M. Guy Chambefort, M. Alain Chrétien, M. Jean-David Ciot, M. Bernard Deflesselles, M. Lucien Degauchy, M. Nicolas Dhuicq, Mme Marianne Dubois, M. Jean-Pierre Fougerat, M. Yves Foulon, Mme Geneviève Gosselin, M. Jean-Claude Gouget, M. Serge Grouard, Mme Edith Gueugneau, M. Christophe Guilloteau, M. Francis Hillmeyer, Mme Danièle Hoffman-Rispal, M. Patrick Labaune, M. Charles de La Verpillière, M. Christophe Léonard, M. Jean-Pierre Maggi, M. Alain Marleix, M. Alain Marty, M. Damien Meslot, M. Philippe Meunier, M. Jacques Moignard, M. Philippe Nauche, Mme Sylvie Pichot, Mme Émilienne Poumirol, Mme Daphna Poznanski-Benhamou, M. Joaquim Pueyo, Mme Marie Récalde, M. Gwendal Rouillard, M. Jean-Michel Villaumé, M. Philippe Vitel, M. Michel Voisin

Excusés. – M. Ibrahim Aboubacar, M. Claude Bartolone, M. Philippe Briand, Mme Catherine Coutelle, M. Richard Ferrand, M. Sauveur Gandolfi-Scheit, M. Éric Jalton, M. Bruno Le Roux, M. Maurice Leroy, M. Eduardo Rihan Cypel, M. François de Rugy