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Commission d’enquête relative aux coûts passés, présents et futurs de la filière nucléaire, à la durée d’exploitation des réacteurs et à divers aspects économiques et financiers de la production et de la commercialisation de l’électricité nucléaire, dans le périmètre du mix électrique français et européen, ainsi qu’aux conséquences de la fermeture et du démantèlement de réacteurs nucléaires, notamment de la centrale de Fessenheim

Jeudi 20 février 2014

Séance de 11 heures 30

Compte rendu n° 21

Présidence de M. François Brottes Président

– Table ronde d'entreprises prestataires d'EDF : M. Pierre Dambielle, directeur Activités nucléaires de ORTEC, M. Damien Gousy, vice-président du GIP Nord-Ouest, M. Alain Bertaux, président de CICO Centre, M. Michel Dupiech, directeur général adjoint d’ONET Technologies et M. Jean-Claude Lenain, président-directeur général de Mistras Group SA. 2

La table ronde débute à douze heures cinq.

M. le président François Brottes. Vous représentez des entreprises sous-traitantes, qui sont plus souvent des PME que de grands groupes, ou bien le Groupement des industriels prestataires Nord-Ouest (GIP NO).

Comment se positionne votre activité par rapport à la filière nucléaire ? Dépendez-vous uniquement d’elle ? Comment y évoluent les compétences ? Quelles sont, en la matière, les exigences des maîtres d’ouvrage ? Comment sont traités les sous-traitants, sur le plan de la relation à l’acheteur, du contrôle de la protection des salariés et du droit du travail ? Quelles améliorations attendez-vous ? Quelles sont vos interrogations sur l’avenir de la filière ?

Conformément aux dispositions de l’article 6 de l’ordonnance du 17 novembre 1958, je vous demande de prêter le serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité.

(M. Alain Bertaux, M. Pierre Dambielle, M. Michel Dupiech, M. Damien Gousy et M. Jean-Claude Lenain prêtent serment.)

M. Damien Gousy, vice-président du GIP Nord-Ouest. Je suis chargé du volet emplois et compétences d’une association loi de 1901 régionale qui couvre le territoire des centrales nucléaires de Flamanville, Penly, Paluel et Gravelines. Le GIP NO rassemble quatre-vingts entreprises adhérentes, qui interviennent aussi sur d’autres centrales. Il appuie les entreprises dans deux domaines : emploi et compétences ; hygiène, sécurité, radioprotection et environnement.

Pour le volet emplois et compétences, nous assurons la promotion des métiers du nucléaire en travaillant avec les acteurs locaux : maisons de l’emploi, Pôle emploi, conseils régionaux, chambres de commerce et d’industrie. Nous facilitons le lien entre donneurs d’ordre et fournisseurs de services, pour permettre l’embauche, à travers des forums de recrutement, et la formation professionnelle de personnels intervenant dans les sites nucléaires. Les ingénieurs de l’association sont déployés sur les sites, tout comme les ingénieurs hygiène et sécurité, qui jouent un rôle d’appui et de conseil auprès des entreprises.

M. le président François Brottes. Avez-vous suivi la polémique sur la main-d’œuvre qui intervient à Flamanville sur le chantier de l’EPR ?

M. Damien Gousy. Le GIP NO couvre les centrales nucléaires en exploitation. L’EPR n’est donc pas dans son giron. Cependant, nous travaillons avec le responsable de la politique industrielle de l’EPR, que nous souhaitons inclure dans notre double activité. Les compétences requises pour y travailler sont et seront identiques à celles qui sont actuellement « en tension ».

M. le président François Brottes. En plein débat sur la transition énergétique, quelle est l’ambiance dans le groupement ?

M. Damien Gousy. Elle est bonne, car nous profitons d’une dynamique. Il existe dans le nucléaire un vrai projet industriel, des entreprises prêtes à répondre à la demande et des clients qui devraient évoluer. Nous manquons cependant de visibilité. Certains contrats s’échelonnent sur cinq à dix ans, ce qui est rare dans d’autres secteurs industriels et nous pose à moyen terme des problèmes d’organisation logistique et matérielle.

Depuis que je travaille dans le nucléaire, c’est-à-dire depuis dix-sept ans, les relations ont beaucoup évolué, par exemple en ce qui concerne la mise à disposition de moyens d’hébergement pour les prestataires ou la préparation des arrêts de tranche. Les entreprises sont globalement satisfaites de l’exploitant.

M. Alain Bertaux, président de CICO Centre. CICO Centre est une PME de 200 salariés qui intervient dans trois métiers : la tuyauterie industrielle, la chaudronnerie et le contrôle non destructif. Elle a signé la convention collective de la métallurgie et adhéré au Syndicat national de la chaudronnerie, tuyauterie et maintenance industrielle (SNCT).

Elle a commencé à travailler pour EDF dans les années soixante-dix, pendant lesquelles se sont construites les centrales. Depuis 1998, les activités de maintenance ont pris le relais. Nous sommes présents à l’année sur les sites d’exploitation. Par ailleurs, nous réalisons des travaux neufs et intervenons à Flamanville sur l’EPR.

Selon les années, nous réalisons avec EDF et son environnement 30 % à 40 % de notre chiffre d’affaires, qui se situe entre 24 et 25 millions d’euros. Nous sommes prestataires de rang un, seul ou en groupement. Nous intervenons également en sous-traitance de rang deux, généralement pour de grosses entreprises qui travaillent pour EDF.

M. le président François Brottes. Si vous intervenez en rang un, est-ce en raison de vos compétences ou de vos prix ?

M. Alain Bertaux. Nos qualifications nous permettent de répondre au cahier des charges.

M. le président François Brottes. Comment s’effectue la négociation sur le prix avec EDF ?

M. Alain Bertaux. Il faut se bagarrer. Toute négociation possède un aspect technique, commercial et financier.

M. Pierre Dambielle, directeur Activités nucléaires d’ORTEC. Le groupe ORTEC, basé à Aix-en-Provence, est dédié à la maintenance industrielle. Il emploie 7 000 personnes, qui se répartissent entre une division industrielle, une division études et une division environnement.

Au sein de la division industrielle, le nucléaire emploie 1 500 personnes, qui se partagent de manière égale entre, d’une part, les études, l’assistance à maîtrise d’œuvre, la maîtrise d’ouvrage et le calcul, et, d’autre part, les travaux, qui concernent essentiellement la maintenance des centrales en exploitation. Ceux-ci portent sur la mécanique, la métallurgie et l’électromécanique, notamment la robinetterie, les machines tournantes, les ponts roulants et les activités de soudage. Une autre division traite de la gestion des déchets industriels.

EDF représente 65 % de notre chiffre d’affaires lié au nucléaire, lequel constitue 20 % du chiffre d’affaires de notre groupe. Le lien avec EDF est donc important en termes de positionnement, d’emploi et de capacité de développement, dans la perspective du grand carénage et des activités post-Fukushima.

M. le président François Brottes. Le travail de maintenance est-il fluide ou soumis à des à-coups ? Les contrôles sont-ils pénibles ? Les procédures sont-elles toujours respectées ?

M. Pierre Dambielle. Depuis vingt ans, les contraintes réglementaires en matière de sûreté n’ont cessé de s’alourdir, ce qui suppose, en amont des interventions, une préparation très lourde et, sur le chantier, une organisation opérationnelle des contrôles tant par l’entreprise que par les contrôleurs du client. Une autre partie du travail concerne les retours d’expérience ou analyses, car nous veillons à ce que les écarts constatés dans une centrale ne se reproduisent pas ailleurs.

Les contrôles sont fluides, même s’ils entraînent parfois le blocage de l’activité. Il faut beaucoup plus de temps aujourd’hui qu’il y a vingt ans pour réaliser les mêmes opérations, compte tenu de l’évolution du cadre réglementaire et des progrès intervenus dans l’analyse de la sûreté.

M. le président François Brottes. Quel regard portez-vous sur le fait qu’EDF internalise certaines opérations de maintenance ? N’est-ce pas une manière de prendre votre travail ?

M. Pierre Dambielle. En effet. EDF a recruté beaucoup de personnel au sein de nos entreprises pour constituer l’effectif de ses sections d’intervention. Un grand groupe possède une aura. En outre, il offre des perspectives de carrière et des conditions de rémunération qui n’ont rien à voir avec celles d’une PME.

Dans ce domaine, EDF n’intervient pas brutalement. On nous sollicite, sinon pour nous demander notre accord, du moins pour ne pas agir de manière trop brusque. Il nous serait difficile de débaucher quand nous travaillons en arrêt de tranche pendant cinq à six mois. Nous fixons avec EDF la date à laquelle les salariés sortiront de nos effectifs.

M. le président François Brottes. Où trouvez-vous de nouvelles compétences lorsque vous embauchez à votre tour ?

M. Pierre Dambielle. Dans les bassins d’emploi en tension, où nous nous tournons vers le personnel des métiers de métallurgie, de chaudronnerie ou d’électricité. Nous le « nucléarisons », c’est-à-dire que nous lui faisons suivre un cursus dédié, avant de l’amener au bon niveau, sur le terrain, grâce au compagnonnage. Par ailleurs, depuis trois ans, nous avons créé des passerelles entre certaines branches industrielles en difficulté et notre activité.

M. le président François Brottes. C’est avec un peu d’émotion que je donne la parole à M. Dupiech, car, lorsque j’étais encore lycéen, j’ai été technicien de surface dans l’entreprise Onet. Depuis cette date, les compétences de celle-ci se sont considérablement étendues.

M. Michel Dupiech, directeur général adjoint d’Onet Technologies. Merci pour cette remarque flatteuse…

Issu de l’industrie de la défense et de l’aéronautique, j’ai rejoint il y a dix-huit mois le groupe Onet Technologies, dont je suis directeur adjoint. Cette filiale est détenue à 100 % par le groupe Onet, fondé en 1876 et possédé pour 75 % par la famille Reinier, pour 23 % par les fonds d’investissement de Peugeot et pour 2 % par les salariés. Le groupe réalise un chiffre d’affaires de 1,4 milliard d’euros et emploie 58 000 salariés.

Onet Technologies est une entreprise de taille intermédiaire qui travaille principalement dans l’ingénierie, les constructions neuves, la maintenance et la logistique nucléaire. Elle forme 25 000 stagiaires par an dans le domaine nucléaire. Elle produit des études sur la réalisation des systèmes complexes, la maintenance et l’exploitation de centrales nucléaires, en tant que prestataire d’EDF, du CEA et d’Areva. Elle réalise un chiffre d’affaires de 240 millions d’euros et emploie 2 600 collaborateurs. Son ambition est de poursuivre sa croissance dans la filière électronucléaire, où elle recrute 400 personnes par an, ce qui représente 1,8 recrutement par jour travaillé. Ses effectifs connaissent une croissance nette de 6 % par an.

Nous profitons des investissements d’EDF dans la perspective du grand carénage et des mesures post-Fukushima, ce qui nous permet de continuer à embaucher. En 2013, nous avons signé quarante-quatre contrats d’apprentissage et de professionnalisation, et consacré 8 % de notre masse salariale à la formation.

M. le président François Brottes. Il est intéressant qu’un groupe dédié au nettoyage industriel ait pu monter en qualification pour pénétrer dans un secteur aussi délicat que le nucléaire. S’est-il étendu dans d’autres domaines ?

M. Michel Dupiech. Le groupe a commencé dans le secteur de la propreté, qui représente encore la majeure partie de son chiffre d’affaires, lequel atteint 800 millions d’euros. Il possède trois pôles : Propreté et services, Sécurité et Technologies, où il réalise 17 % de son chiffre d’affaires.

Nous sommes présents en amont et en aval du travail d’EDF. Nous réalisons des études et installons des systèmes complexes dans les centrales nucléaires. Nous intervenons dans la perspective du grand carénage et répondons aux appels d’offres consécutifs aux recommandations post-Fukushima. Dans ce domaine où la concurrence est rude, nous avons signé un important contrat en 2013.

Le parc électronucléaire français représente de nombreux emplois industriels. Dans l’ingénierie comme dans la maintenance, on trouve des sociétés anciennes comme de nouveaux entrants. Grâce à notre politique salariale et à notre management, nous n’avons pas de mal à conserver notre personnel. Nous embauchons une cinquantaine d’ingénieurs par an et faisons appel au compagnonnage.

Onet Technologies intervient aux côtés d’EDF pour prolonger la durée de vie du parc électronucléaire, pour pérenniser la compétitivité de la production française d’électricité, dont dépend en partie celle de l’industrie française, et pour maintenir notre niveau actuel d’indépendance énergétique. Notre pays intéresse beaucoup les étrangers. Les Chinois nous sollicitent pour créer des partenariats.

M. le président François Brottes. Quand le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) a été instauré afin de réduire le coût du travail, vos clients vous ont-ils demandé de baisser vos prix ?

M. Michel Dupiech. Une négociation a eu lieu, qui s’est plutôt bien passée.

M. Jean-Claude Lenain, président-directeur général de Mistras Group SA. Mistras Group SA emploie 380 personnes. Les lecteurs des Échos du 22 janvier savent que ses projets de développement créeront encore des emplois. Nous sommes spécialisés dans l’inspection, le contrôle non destructif et la surveillance permanente des installations par l’instrumentation.

L’instrumentation en permanence des plateformes offshore et des réacteurs de raffinerie permet de vérifier l’évolution des défauts de structure dans certaines conditions d’exploitation ou de l’environnement. C’est ainsi que, sur le réacteur d’une unité pétrochimique, nous avons pu étudier la manière dont évoluait une petite fissure au cours des différentes répliques d’un tremblement de terre.

En dehors du nucléaire, nous intervenons dans le pétrole et le gaz, en contrôlant régulièrement les raffineries et les sites pétrochimiques. Nous travaillons aussi dans l’industrie, notamment aéronautique.

Dans le nucléaire, notre activité se situe à trois niveaux. Nous effectuons le contrôle qualité dans la fabrication, par exemple chez Areva. Nous réalisons des études pour EDF, pour qui nous effectuons des contrôles non destructifs pendant les arrêts de tranche. Enfin, depuis le 1er janvier, dans le cadre du contrat de huit ans que nous avons signé avec EDF, nous sommes devenus prestataires de rang un à travers un groupement d’intérêt économique (GIE), ce qui nous permet de nous développer davantage.

Quand nous effectuons un contrôle lors d’un arrêt de tranche, nous exécutons notre mission en respectant les procédures choisies par l’exploitant, en l’occurrence EDF. Nous menons également une activité de recherche et développement (R&D) visant à développer des techniques nouvelles, en lien avec l’évolution de la réglementation. Actuellement, les principales techniques de contrôle non destructif sont la radiographie et la gammagraphie, mais l’évolution de la réglementation, qui impose de nouvelles contraintes, nous incite à en développer d’autres. Nous recourons aussi à de nouveaux matériaux. Des aides de l’Agence nationale de la recherche, du Fonds unique interministériel (FUI) ou d’OSÉO facilitent notre activité de R&D. Nos programmes nucléaires ont reçu le label du pôle nucléaire de Bourgogne.

Dans ce domaine, Mistras Group SA intervient principalement à travers sa filiale Ascot, située à la fois à Chalon-sur-Saône et au Creusot. Celle-ci est présente lors de la fabrication et intervient dans les centrales lors des arrêts de tranche.

Ascot poursuit un important programme de création d’emplois, mais, faute de trouver du personnel qualifié sur le marché, nous embauchons du personnel sans qualification, essentiellement des jeunes, que nous envoyons dans notre institut de formation de Chalon. J’ai d’ailleurs décidé de développer ce centre et de l’ouvrir à d’autres acteurs du monde nucléaire. Selon le niveau des acteurs, il faut douze à vingt-quatre mois pour les former au contrôle non destructif.

C’est pourquoi il nous est indispensable d’avoir une certaine visibilité sur l’évolution du secteur. À cet égard, nous regrettons qu’une PME n’ait pas accès au même niveau d’information qu’un grand groupe.

Depuis 2013, j’ai lancé un programme de création d’emplois sur trois ans, car il faut recruter, former et innover pour faire évoluer les compétences, en particulier dans le nucléaire, qui représente 20 % de notre activité.

M. le président François Brottes. Vos clients formulent-ils certaines exigences en matière de confidentialité ou de protection contre l’espionnage ?

N’est-il pas gênant que le droit du travail interdise au donneur d’ordre de contrôler l’exécution du travail par les sous-traitants à l’intérieur d’une centrale ?

Enfin, êtes-vous présent sur le marché international du nucléaire, ce qui vous amènerait à travailler avec d’autres sociétés qu’EDF ?

M. Denis Baupin, rapporteur. Le secteur du nucléaire promet d’être très actif, notamment parce qu’il faudra mettre en œuvre les préconisations post-Fukushima. Des chantiers s’annoncent dans presque toutes les centrales. Les entreprises sous-traitantes seront-elles assez nombreuses pour prendre le relais d’EDF ou faudra-t-il faire appel à des entreprises étrangères ?

Quelles difficultés rencontrez-vous dans la gestion des ressources humaines, par exemple pour conserver votre personnel ou organiser la transmission des compétences ?

Les salariés des sous-traitants, qui effectuent 80 % des activités dosantes, sont-ils suffisamment protégés par le cadre réglementaire ? Certains ne risquent-ils pas de contourner les contrôles, au mépris de leur santé ?

Mme Frédérique Massat. En tant que sous-traitants, avez-vous la possibilité de bénéficier des formations proposées en interne par EDF dans le domaine nucléaire ?

Dans vos rapports avec l’opérateur, avez-vous constaté une évolution des conditions de la prestation ? Il semblerait en effet, d’après les témoignages de certains techniciens sous-traitants, que la durée des arrêts de tranche ait été raccourcie, induisant des accélérations de cadence : alors que, il y a vingt ans, ils duraient trois mois, ces arrêts ne seraient plus aujourd’hui que de trois semaines en moyenne, si bien que les techniciens se voient parfois contraints de travailler le week-end et d’enchaîner les semaines sans prendre de repos, en dépit de la règle des quarante-huit heures de travail hebdomadaires.

Enfin, si vous avez déploré un manque de visibilité sur les perspectives d’embauche dans votre secteur, pourriez-vous cependant nous indiquer à quel niveau elles se situent, compte tenu du grand carénage à venir ?

M. Michel Sordi. Quelles sont vos attentes en termes de volume d’activité et de création d’emplois, en vue du grand carénage dont on dit qu’il représente un coût de 55 milliards d’euros ?

Les conditions d’intervention de vos salariés chez EDF vous paraissent-elles bonnes ?

Enfin, que vous inspire le projet de fermeture anticipée de la centrale nucléaire de Fessenheim ?

M. Damien Gousy. Le GIP NO n’est pas seul dans son domaine : il existe quatre autres associations régionales, intervenant sur les quatre autres territoires français et disposant exactement des mêmes prérogatives et du même mode de fonctionnement que nous.

Je pourrai aussi vous fournir des réponses sur le volet formation, car je dirige le SIFOP, centre de formation spécialisé dans le domaine nucléaire et filiale de la chambre de commerce et d’industrie Nord de France. Celle-ci est d’ailleurs la seule à avoir investi dans la formation en ce domaine.

M. le président François Brottes. Ce centre rapporte-t-il beaucoup à la chambre de commerce ?

M. Damien Gousy. La chambre de commerce est aujourd’hui actionnaire majoritaire à 60 % de la SAS que je dirige. Les deux autres actionnaires en détiennent chacun 20 % des parts : il s’agit d’entreprises de formation ou intervenant sur les sites nucléaires.

M. le président François Brottes. Encore une fois, combien cela rapporte-t-il ?

M. Damien Gousy. Notre chiffre d’affaires est aujourd’hui d’environ 2 millions d’euros. Notre activité reste localisée dans la région Nord-Pas-de-Calais. De fait, le monde de la formation continue – quel qu’en soit le domaine et a fortiori dans le domaine nucléaire – ne rapporte qu’une marge d’environ 7 à 8 %.

M. le président François Brottes. Chez vous, les entreprises paient donc deux fois : une fois pour leur cotisation et une autre pour la formation…

M. Damien Gousy. On peut en effet le voir ainsi.

Pour répondre à Mme Massat, je dirai qu’il est vrai que les agents d’EDF bénéficient d’un cursus de formation : les nouveaux embauchés arrivant au sein de la division de la production nucléaire (DPN) fréquentent une académie durant plusieurs semaines. Quant aux prestataires d’EDF, ils bénéficient eux aussi d’une formation académique, mais qui, d’une part, n’est pas aussi longue, puisque les métiers de base sont différents, et qui, d’autre part, est beaucoup plus centrée sur la sûreté nucléaire, la sécurité, l’incendie, l’environnement et la radioprotection. Depuis un an et demi, nous avons cependant la volonté de renforcer ce dispositif.

J’anime, pour ma part, un réseau regroupant des entreprises intervenantes et la vingtaine d’organismes de formation qui existent en France – parmi lesquels figure Techman, centre de formation du groupe Onet –, afin de diffuser de nouvelles formations en cours d’évolution. Ces « habilitations nucléaires », ainsi qu’on les nomme communément, visent tout intervenant entrant dans cette industrie. Le renforcement de la réglementation applicable aux formations depuis l’arrêté sur les installations nucléaires de base (INB) de février 2012 a en effet induit un enrichissement du contenu des formations ainsi que la prise en compte des retours d’expérience de terrain de l’exploitant. C’est la première fois, depuis que les formations existent dans les centrales nucléaires, que les besoins des entreprises fournisseurs de services sont véritablement pris en considération : le fait que les entreprises aient été totalement associées au projet, de même que les organismes de formation, constitue une véritable avancée.

Si les formations sont renforcées, c’est qu’elles sont désormais ciblées par activité, alors qu’elles étaient jusqu’ici centrées sur nos différents domaines d’intervention : la sécurité, la radioprotection et la sûreté. Des formations spécifiques sont désormais imposées aux entreprises préalablement à leur intervention chez EDF, dans le cadre du processus de qualification évoqué la semaine dernière par M. Dutheil.

La participation des salariés des entreprises prestataires aux formations dont bénéficient les agents d’EDF pose, quant à elle, un problème juridique : on ne peut en effet mélanger des prestataires et des salariés EDF dans le cadre d’une formation unique sans se trouver à la limite du prêt de main-d’œuvre. En revanche, le cursus que nous sommes en train de concevoir avec la DPN, que nous offrirons à partir de septembre prochain, sera de facto proposé aux agents d’EDF. Ce sont donc ces derniers qui bénéficieront des fruits du groupe de travail que nous animons depuis deux ans et l’académie EDF s’en trouvera ainsi renforcée.

M. le président François Brottes. J’ose espérer que ce dispositif est bordé juridiquement…

M. Damien Gousy. Il l’est.

M. le président François Brottes. Créez-vous des groupements d’achat pour que les petites entreprises du secteur puissent être référencées chez le grand client ?

M. Damien Gousy. Ce n’est pas l’objet de notre association, qui œuvre dans deux domaines : l’emploi et les compétences, la valorisation des métiers et la formation, d’une part, et la radioprotection et la sécurité, d’autre part. Les associations n’ont d’ailleurs aucun but commercial.

M. Alain Bertaux. C’est essentiellement par l’intermédiaire de la commission nucléaire du SNCT, qui se réunit tous les trimestres depuis sa création en 2011, que nous avons été informés des projets de grand carénage. En collaboration avec le groupe de travail créé en 2012 pour résoudre les problèmes de ressources d’EDF, nous avons estimé que, par comparaison avec la charge nécessaire dans un contexte de maintenance normale des sites, le volume de travaux nécessaires dans les métiers de tuyauteurs-soudeurs et de chaudronniers allait être multiplié par 1,7 pour la décennie à venir. Le groupe de travail en a conclu que, dans ces métiers, l’industrie française avait des ressources suffisantes pour y faire face en favorisant les passerelles entre les industries et en proposant des formations au fil des ans. Lorsque l’on planifie cette hausse d’activité dans la durée, en fonction de la géographie des sites concernés et selon notre connaissance actuelle des arrêts de tranche, le chiffre tend plutôt vers 1,5 que vers 1,7.

Cependant, nous ne serons en mesure de nous adapter que sous réserve de disposer d’une certaine visibilité. Car la formation aux métiers de tuyauteur-soudeur et de chaudronnier ne se prépare pas en un stage de trois à douze mois, mais peut durer jusqu’à dix ans. C’est d’ailleurs tant en termes de planification de travaux qu’en termes techniques que nous avons besoin d’y voir plus clair : il nous faut connaître le niveau de compétences requis et sur quel site nucléaire, mais aussi savoir quel sera le volume d’activité, si celle-ci s’appuiera sur un modèle d’organisation en 2×8 ou en 3×8, et enfin, comment seront gérées les périodes creuses. Telles sont en tout cas les conclusions du rapport que nous avons établi sur la courbe de charge à venir.

M. le président François Brottes. Pourrez-vous nous le transmettre ?

M. Alain Bertaux. Je m’en enquerrai auprès du SNCT.

Quant à l’évolution dans le temps des durées d’arrêt, le « temps métal » – celui réellement passé à accomplir le geste professionnel – est très faible par rapport à notre durée d’intervention, et la relation entre durée d’arrêt et durée d’intervention sur le site n’est pas nécessairement linéaire. Cela dit, les sous-traitants que nous sommes exercent des métiers où le geste technique est important, et nous n’agissons le plus souvent qu’en fin d’intervention, si bien que nous subissons des décalages dans nos horaires et emplois du temps, ainsi que des astreintes. S’ils restent dans les limites légales, ils exigent tout de même des entreprises et de nos compagnons présents sur le terrain qu’ils s’organisent de façon très réactive.

Enfin, je compléterai le propos de M. Gousy sur la formation : si nous avons essentiellement évoqué jusqu’ici les formations d’habilitation et de qualification, notre groupe a racheté une petite entreprise offrant une formation aux métiers. Car, s’il importe qu’une entreprise connaisse les règles d’intervention nucléaire, la formation aux métiers reste primordiale. Elle nous permettra d’ailleurs d’éviter de recourir à de la main-d’œuvre étrangère pour faire face à nos besoins.

M. le président François Brottes. Les conseillers d’orientation de l’éducation nationale remplissent-ils correctement leur mission en orientant les élèves vers vos métiers ? Avez-vous l’occasion de rencontrer des jeunes attirés par vos filières ?

M. Alain Bertaux. Nous n’en croisions plus jusqu’à ce que les choses changent, il y a cinq ou six ans. Nous commençons d’ailleurs aussi à rencontrer des personnes attirées par notre industrie, parce qu’ils savent qu’elle est susceptible d’embaucher dans la décennie à venir. Il conviendrait cependant de valoriser davantage ces métiers, car c’est toujours de façon péjorative que l’on parle des sous-traitants du secteur comme de « nomades du nucléaire », alors que l’on trouve dans toutes nos entreprises des compagnons dévoués et compétents.

M. Damien Gousy. C’est précisément le rôle des associations prestataires que d’aviser les conseillers d’information et d’orientation et de rendre nos métiers les plus attractifs possible – raison pour laquelle nous organisons des rencontres avec les personnels de l’éducation nationale, ainsi que des journées d’investigation et de visites de centrales.

M. Pierre Dambielle. Lorsque nous sommes confrontés à un problème de confidentialité, nos ingénieurs vont travailler dans les locaux d’EDF. Toutefois, cela ne représente qu’une faible part de nos activités d’ingénierie et d’études de réalisation.

En ce qui concerne les injonctions prononcées par l’ASN, nous sommes dotés au sein de nos entreprises de notre propre inspection du travail, qui peut s’entendre avec l’ASN pour réaliser des audits de terrain. En cas de signalement, l’inspecteur du travail ne fait aucune différence, dans ses rapports, entre EDF et les entreprises exécutantes. Nous recevons alors un courrier nous enjoignant de prendre les mesures consécutives aux constats réalisés.

En ce qui concerne la courbe de charge pour 2015, nous sommes confrontés à un grand manque de visibilité. On nous a parlé des pics d’activité qu’impliquera le grand carénage, mais nous avons beaucoup de mal à appréhender la prestation qui pourra nous être confiée et la manière dont le volume global d’activité sera réparti entre les différentes entreprises. Compte tenu de ces difficultés, nous avons tous embauché en 2013, suivant en cela la démarche d’EDF. Cela étant, les contrats, qui restent en cours de négociation, tardent à se concrétiser. Or une entreprise ne peut continuer à embaucher sans savoir comment s’organiser tant sur le plan économique qu’en termes de métiers et de régions concernées. Les formations constituant un investissement lourd, les entreprises ont besoin de s’assurer de la pérennité des besoins.

S’agissant de l’éventuel recours à des entreprises étrangères, EDF a souvent exprimé des doutes quant à la capacité industrielle des entreprises françaises à réaliser les travaux nécessaires dans un contexte de pics de charge importants. Le président du groupe ORTEC, André Einaudi, a donc pris le fanion en créant un club de France des entreprises nucléaires, équipe informelle réunissant tous les corps d’État, afin de faire preuve de volontarisme et de démontrer à notre client EDF la capacité des entreprises françaises à embaucher et à développer l’emploi national. Encore faut-il – une nouvelle fois – que nous disposions d’une réelle visibilité.

Parce qu’EDF nous l’a demandé, notre groupe comprend des entreprises étrangères. Or, si les ouvriers étrangers sont aussi compétents que les Français, nous entrons vite en conflit avec eux en raison de problèmes linguistiques et culturels – tenant certes à des différences de culture nationale, mais aussi de culture de la sûreté.

En matière de formation, le groupe ORTEC, comme toutes les entreprises présentes à cette table ronde, a créé sa propre école réservée à ses métiers spécifiques, qu’il ne retrouvait pas dans les centres de formation classiques. Notre but n’est bien sûr pas de faire de la formation notre métier principal. EDF met à notre disposition ses académies des métiers ainsi que ses centres de formation de Tricastin et de Bugey, afin que nos propres salariés puissent manipuler les différents équipements.

Certes, les arrêts de tranche sont plus courts et nos salariés doivent parfois travailler le week-end et faire des heures supplémentaires. Mais la situation a bien changé depuis trente ans ; nous veillons scrupuleusement à respecter les règles de temps de travail et à ne pas faire travailler nos salariés plus de six jours consécutifs. Il est vrai que certains d’entre eux doivent travailler le week-end, mais cela fait partie de notre prestation de services. S’ajoute à cela un important effet de saisonnalité : le nombre d’heures à fournir n’est pas le même en hiver et en été, et nous devons pratiquer des modulations.

Quant à nos perspectives d’embauche, elles sont liées au besoin de visibilité dont j’ai déjà parlé. En 2013, notre groupe a choisi d’embaucher 100 personnes, afin notamment d’assumer le renouvellement consécutif aux départs à la retraite. Nous avons également diminué la part d’intérimaires que nous employions pour parvenir à un solde d’embauche quasi nul. Nous tablons sur des prévisions d’embauche de 100 salariés par an.

L’industrie nucléaire est plutôt un secteur où l’on s’intéresse à l’homme et où l’on veille aux conditions de travail opérationnelles des différents acteurs. En ce qui concerne les « nomades du nucléaire », il existe aujourd’hui des organisations de suivi de la dosimétrie. Et s’il est vrai que 80 % de la dosimétrie concerne les salariés des entreprises sous-traitantes, les débits de dose reçus restent cependant extrêmement faibles : 90 % de mes employés sont exposés à moins d’un millisievert par an et seuls cinq à six cas isolés par an se voient exposés à sept ou huit millisieverts.

Quant à la fermeture de Fessenheim, elle conduirait évidemment mon groupe à perdre des contrats, puisque nous y sommes installés. Il m’est en revanche difficile d’extrapoler sur les conséquences globales de cette décision.

M. le président François Brottes. La sous-traitance semble donc mieux considérée que par le passé et les conditions de travail sont sans doute moins rigoureuses qu’auparavant.

M. Pierre Dambielle. Une charte sociale a d’ailleurs été conclue avec EDF, notamment pour veiller au sort des « grands déplacés », c’est-à-dire de ceux de nos salariés qui sont envoyés en grand déplacement sur différents sites, en fonction des arrêts de tranche.

M. Alain Bertaux. Nous passons désormais souvent, pour recruter, par l’intermédiaire des sociétés d’intérim. Pendant six mois, les personnels reçoivent des formations d’habilitation, puis nous assurons leur formation technique avant de les placer sur nos chantiers en comptant les embaucher en contrat à durée indéterminée au bout d’un semestre. Or, sur les dix intérimaires que nous avons voulu recruter au cours de la dernière période, huit ont préféré rester en intérim : l’intervention des intérimaires est en effet limitée à certaines zones peu dosantes, mais ils peuvent tout de même bénéficier de certains des avantages dont profitent les salariés en CDI qui, eux, interviennent en zone dosante. Je rejoins néanmoins M. Dambielle lorsqu’il dit que les doses en question restent très faibles par rapport aux seuils en vigueur – qu’ils soient nationaux, édictés par EDF, ou internes à nos entreprises.

M. Michel Dupiech. Onet Technologies dispose de 110 formateurs, dont 50 permanents, de vingt-cinq salles de formation réparties sur huit sites en France, de huit chantiers-écoles en prévention des risques, de sept chantiers-écoles en qualité sûreté des prestataires, de deux chantiers-écoles amiante et d’un atelier de formation en robinetterie, auxquels sont associées plusieurs certifications. Le volet formation est donc très important pour nous : nous formons 25 000 stagiaires par an.

Sur le marché nucléaire français, nous intervenons en ingénierie, de l’amont vers l’aval, dans l’intégration de systèmes complexes. L’ingénierie française étant très performante et notre savoir-faire très recherché, nous cultivons cette force. De nombreux étrangers viennent donc nous trouver dans l’intention d’établir des partenariats. Nous en avons, quant à nous, conclu avec de grandes écoles d’ingénieurs, dont nous prenons en stage certains étudiants, et nous continuerons à entretenir ce type de relations afin d’améliorer nos compétences dans le cadre du grand carénage et de l’après Fukushima.

Pour développer l’activité dans nos métiers, il importera que nous soyons ouverts à l’international tout en préservant nos emplois en France. Nous pourrions ainsi nous appuyer sur un système de front office en faisant travailler chez nous un maximum d’ingénieurs et en faisant appliquer l’installation des systèmes dans les pays concernés. Ainsi la propriété intellectuelle resterait-elle chez nous.

En ce qui concerne la cadence des arrêts de tranche, nous gérons nos interventions dans la maintenance nucléaire en intégrant des contraintes sous forme de plannings sur le chemin critique d’arrêt. Et, bien que nous soyons en activité en 3×8, sept jours sur sept, ce ne sont pas toujours les mêmes personnes qui interviennent, car nous disposons d’un volet de sous-traitance tel que nous parvenons à absorber la charge. Le personnel ne subit donc aucune contrainte physique. Nous gérons également toutes les co-activités effectuées dans des environnements restreints, y compris les environnements irradiants, subaquatiques et confinés : Onet Technologies emploie notamment seize plongeurs qualifiés intervenant dans des piscines de stockage du combustible. Cette activité est parfaitement contrôlée et, à ce jour, il n’y a jamais eu d’accident.

S’agissant enfin de nos perspectives de recrutement, nous embauchons 1,8 personne par jour et comptons maintenir ce rythme dans la mesure où nous prévoyons une croissance organique de 6 à 8 % dans les prochaines années, dans le cadre du grand carénage post-Fukushima.

M. Jean-Claude Lenain. J’ai indiqué tout à l’heure que nous œuvrions, dans le domaine de la recherche-développement, à l’élaboration de nouvelles techniques de contrôle non destructif, qui nous permettent d’effectuer des contrôles en marche et donc de réduire le nombre de contrôles effectués pendant les arrêts de tranche. Nous développons également des techniques à distance permettant de réduire l’exposition du personnel à l’irradiation.

S’agissant des ressources humaines, le rapporteur nous a demandé tout à l’heure si nous serions en mesure de répondre à la demande, compte tenu du plan de charge à venir, ou s’il nous faudrait faire appel à des acteurs étrangers. Or, ces derniers frappant à notre porte, il est évident qu’ils entreront si nous ne sommes pas en mesure de disposer des ressources nécessaires pour répondre à la demande d’EDF. Il est donc essentiel que nous disposions d’une certaine visibilité : plus tôt nous connaîtrons ce plan de charge et la part de marché qui nous sera attribuée, mieux ce sera, d’autant que, si certains contrôles nous sont demandés directement par EDF, d’autres le sont par les chaudronniers. Il nous faudra donc attendre qu’EDF passe des contrats avec ses sous-traitants pour que nous passions les nôtres avec ces derniers.

Ainsi que je l’ai déjà souligné, nous sommes effectivement confrontés à des problèmes de recrutement. Aujourd’hui, ce sont plutôt des jeunes que nous embauchons. Comme nous devons ensuite les former, il faut compter douze à vingt-quatre mois pour qu’ils soient opérationnels. Afin de les attirer vers nos métiers, nous avons demandé à chaque adhérent du pôle nucléaire de Bourgogne, dont je suis le vice-président et où je représente les ETI, d’intervenir dans les écoles de tous niveaux – secondaire, BTS, DUT ou écoles d’ingénieurs – pour y présenter les différents métiers du nucléaire, notamment les métiers de contrôle.

M. Alain Bertaux. Je souhaiterais compléter mon propos en soulignant que, dans certaines régions, le déficit de médecins du travail compétents pour assurer le suivi médical renforcé applicable en matière de dosimétrie risque de bloquer certaines de nos interventions.

M. Damien Gousy. En effet, malgré la réforme, tous les services de médecine du travail ne sont pas encore spécifiquement habilités dans le domaine nucléaire pour faire passer les visites médicales renforcées que doivent régulièrement effectuer nos salariés avant toute intervention. Les entreprises ont donc des difficultés à faire passer en temps et en heure ces visites – qui sont forcément chronophages mais néanmoins indispensables à la délivrance d’habilitations nucléaires.

M. le président François Brottes. J’interrogerai le Gouvernement sur ce point.

M. Damien Gousy. Je souhaiterais in fine vous fournir deux exemples illustrant le travail fourni par les associations en matière de reclassement. À la suite de la fermeture de la raffinerie des Flandres Total à Dunkerque ainsi que de celle de Petroplus, nombre de salariés ont pu être reclassés dans le secteur nucléaire, notamment du fait de la proximité des centrales. En effet, pour intense qu’elle soit, avec ses huit usines Seveso II et la centrale de Gravelines, la vie industrielle de la région de Dunkerque connaît des hauts et des bas. Or, depuis une quinzaine d’années, lorsque l’activité est au plus bas, c’est systématiquement vers le nucléaire que l’on s’oriente pour reclasser les salariés.

M. le président François Brottes. Je vous remercie beaucoup pour cet échange.

La table ronde s’achève à treize heures quinze.

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Membres présents ou excusés

Commission d'enquête relative aux coûts passés, présents et futurs de la filière nucléaire, à la durée d'exploitation des réacteurs et à divers aspects économiques et financiers de la production et de la commercialisation de l'électricité nucléaire

Réunion du jeudi 20 février 2014 à 11 h 30

Présents. - M. Bernard Accoyer, M. Christian Bataille, Mme Marie-Noëlle Battistel, M. Denis Baupin, M. Yves Blein, M. François Brottes, Mme Sabine Buis, Mme Françoise Dubois, M. Jean-Pierre Gorges, Mme Frédérique Massat, M. Patrice Prat, M. Michel Sordi

Excusés. - M. Philippe Baumel, Mme Sandrine Hurel, Mme Sylvie Pichot, M. Franck Reynier