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Commission des Finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Mercredi 3 juillet 2013

Séance de 11 heures

Compte rendu n° 102

Présidence de M. Gilles Carrez, Président

– Audition de M. Henri Emmanuelli, président de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations, et de M. Jean-Pierre Jouyet, directeur général, sur l’activité de la Caisse

– Présences en réunion

La Commission entend, en audition ouverte à la presse, M. Henri Emmanuelli, président de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations, et M. Jean-Pierre Jouyet, directeur général, sur l’activité de la Caisse.

M. le président Gilles Carrez. Nous avons le plaisir de recevoir, pour évoquer la situation de la Caisse des dépôts et consignations, notre collègue Henri Emmanuelli, président de la commission de surveillance, et M. Jean-Pierre Jouyet, directeur général.

Notre Commission reçoit régulièrement les responsables de la Caisse, ce qui est naturel s’agissant d’un établissement placé depuis ses origines – en 1816 – sous la garantie du Parlement.

La réunion de ce matin fait suite à une audition du 14 novembre dernier, plus spécialement consacrée au projet de loi portant création de la Banque publique d’investissement – BPI –, et à une autre du 10 avril, au cours de laquelle nous nous sommes penchés sur les résultats de la Caisse en 2012 et sur les perspectives de financement des collectivités territoriales.

L’actualité des derniers mois a été particulièrement riche, avec la mise en place de la Société de financement local – SFIL – et de la BPI, la dépréciation de plusieurs participations de la Caisse ou encore l’évolution de la collecte de l’épargne réglementée. Vous avez donc souhaité nous rencontrer pour nous exposer les développements récents de l’activité de la Caisse.

M. Henri Emmanuelli, président de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations. Ce sont les règles de gouvernance de la Caisse qui prévoient que le président de la commission de surveillance rend compte solennellement au Parlement une fois par an, puisque l’établissement est placé « de la manière la plus spéciale sous la surveillance et la garantie de l’autorité législative ».

Vous n’ignorez pas que la commission de surveillance est chargée de veiller au respect des missions confiées à la Caisse par la loi et d’assurer sa surveillance et son contrôle, la direction opérationnelle de l’établissement revenant au directeur général, qui est nommé en Conseil des ministres – Montesquieu doit se retourner dans sa tombe… La composition de cette commission a été renouvelée en 2012 ; j’y représente l’Assemblée nationale, avec Marc Goua, ici présent, et Arlette Grosskost ; y siègent également des sénateurs et des personnalités qualifiées.

La commission de surveillance a notamment pour responsabilité de définir le modèle prudentiel de la Caisse – et donc de fixer en conséquence le niveau des fonds propres. Elle décide du programme annuel d’émission d’emprunts. Elle émet un avis sur les orientations stratégiques et sur la stratégie d’investissement de l’établissement public et de ses filiales, ainsi que sur les comptes du groupe et sur le montant de la fraction du résultat de la section générale versée chaque année à l’État. Elle exerce également un droit de regard sur le fonds d’épargne, à travers le comité du fonds d’épargne, présidé comme le comité d’examen des comptes et des risques par Marc Goua. Je préside pour ma part deux autres comités spécialisés : le comité des investissements, chargé d’examiner les projets d’opérations d’un montant supérieur à 150 millions d’euros et le comité des nominations – dont la compétence va bientôt s’étendre aux rémunérations.

Les méthodes de travail de la commission de surveillance ont évolué. Elle formalise désormais ses avis, même si c’est souvent en termes assez vagues. Pour plus de précisions, je vous renvoie au rapport que nous vous avons adressé.

Je ne reviendrai pas en détail sur les comptes de 2012, que nous vous avons présentés le 10 avril, sauf pour donner la mesure de certains enjeux.

L’année a bien sûr été marquée par la création de bpifrance. La Caisse, qui en est actionnaire à 50 %, y a investi 50 % de ses fonds propres. La commission de surveillance a donc veillé à ce que ses intérêts soient préservés au maximum. Cependant, pour assurer aussi l’avenir de bpifrance, il convenait de « nettoyer » quelques comptes avant de les lui apporter. Ainsi le Fonds stratégique d’investissement – FSI –, détenu à 51 % par la Caisse, a-t-il dû intégrer la dépréciation de sa participation dans France Télécom, dont l’État lui avait apporté une partie du capital lors de sa création. Si cette provision pour dépréciation n’avait pas été constituée en 2012, elle aurait en effet dû l’être cette année – au risque de mettre bpifrance en lourde perte dès son premier exercice. Bref, nous avons essayé d’arbitrer entre les intérêts de la Caisse et ceux de bpifrance.

Pour ses activités proprement bancaires, reprises d’OSEO, bpifrance aura, comme toute autre banque, pour modèle prudentiel celui de Bâle III, mais la partie « haut de bilan », c’est-à-dire tout ce qui est investissement en capital, se verra appliquer le modèle prudentiel de la Caisse. La commission de surveillance conservera donc un droit de regard sur l’activité du pôle investissement. Elle vous en rendra compte autant que vous le souhaiterez.

Nous attendons toujours les dernières autorisations qui permettront à bpifrance d’être pleinement installée, du moins du point de vue juridique. Il semble cependant que le mouvement soit lancé sur le terrain, notamment pour ce qui est de la partie investissement, puisqu’on me signale que, déjà, les chargés de mission démarchent systématiquement les entreprises.

Le dossier Transdev aura coûté près de 1,5 milliard d’euros à la Caisse, qui a dû accepter de porter à 60 % sa participation au capital, mais à une condition : que Veolia reprenne la SNCM – ce qui n’est toujours pas fait à ce jour. Les personnels comme les organes délibérants de Corse et de Provence-Alpes-Côte d’Azur n’y sont pas favorables, vous vous en doutez, mais nous avons la ferme volonté de ne pas remettre le doigt dans l’engrenage : nous sommes prêts à envisager des accommodements pour faciliter la recherche d’une solution, non à revenir sur notre position.

Le dossier Dexia – qui concerne aujourd’hui la Caisse à travers la SFIL – a quant à lui coûté 4 milliards d’euros : 3 milliards à la Caisse elle-même et 1 milliard au fonds d’épargne.

M. Christian Eckert, rapporteur général. Pardonnez-moi, mais pourquoi la Caisse s’est-elle investie dans ce dossier ?

M. le président de la commission de surveillance. C’est un héritage historique, remontant à l’époque du Crédit local de France.

Toujours est-il que, loin d’être assise sur un tas d’or, la Caisse se trouve aujourd’hui plutôt à plaindre…

Elle n’a pas été partie prenante dans l’opération finale de création de la SFIL. Elle n’est entrée qu’à hauteur de 20 % à son capital, avec des actions de préférence qui lui éviteront d’être appelée à participer à une éventuelle recapitalisation. En revanche, elle a accordé à la société un prêt de 12,5 milliards d’euros, financé par émission d’emprunts, ce qui contraint assez fortement un modèle économique jusqu’ici à l’abri de tout endettement. J’ai d’ailleurs été un peu surpris par la présentation que M. Philippe Mills, président-directeur général de la SFIL, a faite de ce prêt devant nous, dans la mesure où il a éludé l’hypothèse d’un remboursement. Or, un amortissement de l’emprunt est bel et bien prévu, et il est impératif que la SFIL honore ses engagements, cette dette n’ayant pas vocation à se muer en dette perpétuelle… Nous devrons donc être très attentifs à la loi de validation qui sera présentée à l’automne pour sécuriser juridiquement les contrats de prêt aux collectivités locales en cours et créer un fonds de soutien pour les collectivités les plus fragiles. Si la SFIL se retrouve en difficulté, c’est en effet la Caisse – aujourd’hui son principal créancier – qui en pâtira.

Cette situation n’obère cependant pas le financement des collectivités locales, qui est assuré par La Banque postale, par les banques commerciales, qui sont revenues sur le marché, et par la SFIL.

S’agissant du fonds d’épargne, l’encours global des dépôts centralisés à la Caisse des dépôts – livret A, livret de développement durable – LDD – et livret d’épargne populaire – s’élève aujourd’hui à 255 milliards d’euros. Pour mémoire, le taux de centralisation est de 65 % pour le livret A et de 70 % pour le LDD.

Destinée à des prêts aux collectivités locales, une enveloppe de 20 milliards annoncée en novembre n’a été débloquée qu’au mois d’avril, en raison de longues discussions entre la direction du Trésor et la Caisse des dépôts – d’où l’entretien que j’avais accordé aux Échos, qui n’a pas fait l’unanimité. À l’origine, le Trésor n’était pas très favorable à la mise en place de cette enveloppe, destinée à des prêts à long terme – soit entre vingt et quarante ans –, au taux du livret A augmenté d’une marge de 130 points de base. On nous a expliqué à l’époque que ce taux était beaucoup trop bon marché, donc très concurrentiel par rapport aux banques commerciales, mais il fait aujourd’hui figure de taux élevé comparé à celui de la Banque européenne d’investissement – BEI –, qui s’établit actuellement à 1 %. Les discussions ont également porté sur le volume de l’enveloppe, sur le champ de ce crédit à long terme… Pourquoi ne pas réfléchir, avec le ministère des Finances, à une inversion des responsabilités ? L’article L. 221-7 du code monétaire et financier dispose que « les emplois du fonds d’épargne sont fixés par le ministre chargé de l’économie », ce qui est logique dans la mesure où l’État garantit ces fonds. Mais la direction du Trésor en a pris argument pour imposer une procédure d’une lourdeur extrême : l’obtention d’un prêt à long terme suppose d’abord une instruction par la direction du développement territorial et du réseau de la Caisse, puis, lorsque la demande parvient au fonds d’épargne, par un comité tripartite composé de représentants de la Caisse, du ministère des Finances et du ministère technique concerné. Cela n’en finit pas et l’on peut s’apercevoir, chemin faisant, que, pour un investissement dans un réseau d’assainissement, par exemple, on a prévu les réfections, mais non l’aménagement d’un réseau neuf… L’ensemble du processus prend trois à quatre mois, et me semble inutilement compliqué. Je suggère que le fonds d’épargne, géré par des personnes compétentes sous le contrôle de la commission de surveillance, ait la libre disposition des fonds, le ministre des Finances n’ayant qu’un droit de veto. Nous aurons sans doute l’occasion d’en rediscuter.

S’agissant toujours du fonds d’épargne, la commission de surveillance donne son avis sur le taux de rémunération, sur la rémunération de la garantie accordée par l’État, etc., mais pas sur les emplois. Il me semble qu’il est temps de combler cette lacune.

Il est question de l’octroi ou de la rétrocession d’une enveloppe financière – qui pourrait s’élever à 25 milliards d’euros – aux banques commerciales distribuant des produits d’épargne réglementée. Une telle opération ne peut à mon sens être mise à exécution qu’accompagnée d’une baisse de la commission que le fonds d’épargne verse à ces banques, baisse qui était d’ailleurs prévue à la page 83 du rapport Camdessus sur la modernisation de la distribution du livret A : il y était même proposé de fixer ce taux de commission sur encours à 0,4 %. Le président de l’Association française des banques prétendant n’en avoir jamais entendu parler, je me suis fait un plaisir de lui envoyer copie de cette page ! Et, en sus de contreparties, il faudrait l’assurance qu’en cas de besoin, on puisse recentraliser.

M. le président Gilles Carrez. Ce serait hors modification du taux de centralisation ?

M. le président de la commission de surveillance. M. Jouyet sera mieux à même que moi de vous répondre, étant au fait de ces négociations – qui ne sont pas encore achevées.

Je terminerai en évoquant deux enjeux majeurs pour la Caisse. Comme vous le savez, le résultat du groupe pour 2012 est négatif de 458 millions d’euros. L’année 2013 ne sera guère plus facile, même si un grand « nettoyage » a été fait dans les provisions. Les résultats de la Caisse sont très dépendants des marchés, donc des évolutions du CAC 40, qui sont assez erratiques. Quant au bénéfice net de la rente des notaires, il s’est tari compte tenu du niveau des taux : désormais, la rente ne rapporte plus, mais coûte. Le modèle économique de la Caisse est donc sous contrainte. Il faudra par conséquent rouvrir – c’est en tout cas le souhait de la commission de surveillance – le dossier du versement à l’État, ou contribution volontaire, qui est fixé depuis 2010 à 50 % du résultat consolidé, dans la limite de 75 % du résultat social, après paiement de la contribution représentative de l’impôt sur les sociétés. Ce versement limite considérablement les marges de manœuvre d’un établissement qui ne peut compter que sur lui-même pour reconstituer ses fonds propres, puisqu’il n’a ni conseil d’administration ni actionnaires.

J’ai cru comprendre que le Trésor estimait que la Caisse avait trop de fonds propres, et que, compte tenu des caractéristiques de son modèle prudentiel, les alléger de quelques milliards ne tirerait guère à conséquence. Je n’en suis pas si convaincu : la Caisse des dépôts est un facteur de stabilité dans notre paysage financier et il ne faut rien faire qui puisse menacer cet ancrage. Bref, je proposerais volontiers de revenir sur ce pacte de 2010, qui a un caractère spoliateur. Je ne vois pas pourquoi la Caisse ne serait pas traitée comme les autres entreprises financières.

Le second enjeu que je souhaitais évoquer a trait à ce que concocte la Commission européenne. À la lecture du livre vert intitulé Le Financement à long terme de l’économie européenne, j’ai le sentiment que l’objectif est de limiter la capacité d’action de ce qu’elle appelle les banques de développement nationales, dont la Caisse fait partie, avec la Cassa depositi i prestiti italienne ou la KfW allemande. Je vous écrirai d’ici peu pour vous alerter à ce sujet.

Enfin, un nouveau plan stratégique est en cours de préparation, mais il revient au directeur général de vous en parler.

M. le président Gilles Carrez. Nous vous remercions d’avoir abordé tous les sujets sensibles et d’avoir brossé un panorama sans concession des difficultés que peut rencontrer la Caisse.

M. Jean-Pierre Jouyet, directeur général de la Caisse des dépôts et consignations. Vous l’aurez compris, l’année 2012 a été pour notre groupe une année de transformation. Le président du conseil de surveillance a insisté sur les mauvaises opérations qui ont pesé sur nos résultats. Néanmoins, il y a eu aussi de bonnes choses.

Les fonds d’épargne ont atteint un niveau d’activité inégalé, avec 24 milliards d’euros de prêts. Nos directions régionales se sont mobilisées pour financer les projets d’équipement territoriaux, et nos filiales ont fait preuve d’un dynamisme certain pour continuer à se développer. Je pense à Icade, qui, grâce à son rapprochement avec Silic, dont la Cour d’appel de Paris a confirmé la validité, a vocation à devenir la première foncière de bureaux de France, mais aussi à CNP Assurances, qui a su engager un processus de diversification de ses produits pour améliorer son potentiel de croissance et qui est le premier élément de résultat récurrent de la Caisse, ou encore à la Société nationale immobilière, qui a connu un bon niveau d’activité.

Permettez-moi maintenant de revenir sur deux points évoqués par le président de la commission de surveillance.

Il s’agit en premier lieu des prêts à la SFIL, pour lesquels nous disposons d’une enveloppe de 12,5 milliards d’euros, dont 11 milliards ont été prêtés. Ils correspondent à des refinancements de son stock actuel de créances. Ces prêts doivent être amortis en proportion de la réduction de ce stock. Leur encours doit donc se réduire progressivement, pour peu que les textes législatifs soient adoptés en conséquence à l’automne.

J’en viens à la réforme de l’épargne réglementée envisagée par le Gouvernement. Comme l’a rappelé le président Henri Emmanuelli, celle-ci porterait à la fois sur les éléments du coût des ressources, avec la baisse du commissionnement des banques, et sur la question de la centralisation. Ceci s’inscrit dans une cohérence d’ensemble, puisqu’un relèvement des plafonds du livret A et du LDD a déjà été opéré et que les volumes des prêts ont été décidés pour les années à venir, au bénéfice du logement social et des collectivités locales, mais aussi de bpifrance, au profit de qui un prêt de 10 milliards d’euros des fonds d’épargne pourrait être mobilisé. D’autres emplois pourraient bien sûr être décidés par le Gouvernement, mais nous devons veiller au calendrier, afin que le hiatus entre l’augmentation de la collecte et le versement nécessairement plus lent – comme l’a rappelé le président de la commission de surveillance – des prêts supplémentaires puisse être comblé. C’est ce décalage dans le temps entre les ressources et les emplois que le projet vise à combler. Du point de vue de la Caisse, une telle réforme est envisageable si elle répond à deux critères : ne pas obérer la capacité future de prêts du fonds d’épargne, qui doit rester un outil facilement mobilisable pour apporter des financements, notamment à long terme, en soutien aux priorités identifiées par les pouvoirs publics, et répondre à l’intérêt financier des fonds d’épargne dont la Caisse a la charge. Nous pourrions être favorables, pour des montants significatifs qui ont été évoqués par le président de la commission de surveillance, à une réforme qui comporterait une baisse du commissionnement versé aux banques, un retour de liquidités qui s’adosserait non seulement au livret A et au LDD, mais aussi au livret d’épargne populaire – LEP – et une garantie forte de retour de liquidités vers la Caisse qui prennent en compte l’ensemble des prêts du fonds d’épargne, et pas seulement ceux du logement social, qui restent protégés depuis la loi de modernisation de l’économie. Il faut savoir qu’il s’agit d’un mécanisme de contournement ou de retournement : il y a de facto une baisse du taux de centralisation, qui passerait de 65 % à 59 %.

Notre modèle économique est aujourd’hui sous contrainte. La Caisse reste solide, mais nous sommes désormais moins riches, et nous ne pouvons plus tout faire.

Notre structure de bilan s’est déformée depuis quelques années. D’une part, le poids de nos participations stratégiques s’accroît significativement, équivalent à 75 % de nos fonds propres sociaux en 2007, à 100 % en 2009, et qui pourraient en représenter 130 % en 2017 ; les participations stratégiques de la Caisse constituent un facteur de rigidité de notre gestion qui pèse sur nos résultats. D’autre part, nous sommes conduits à nous endetter et à faire davantage appel aux marchés financiers. C’est notamment le cas avec la mise en place de prêts à la SFIL pour un montant maximum de 12,5 milliards.

Aujourd’hui, les besoins en fonds propres générés par notre activité sont juste couverts par notre capital économique. Le modèle économique de la Caisse est donc contraint. Il n’est plus possible d’envisager des opérations structurantes très coûteuses en capital, car cela aurait des incidences sur le niveau de solvabilité de la Caisse – je pense par exemple à des opérations semblables à celle menée au profit de La Poste.

Certes, nous restons l’une des institutions financières les plus appréciées au monde. Nous jouissons d’un fort capital de confiance, d’une véritable expertise humaine et d’une gestion de portefeuille qui nous permet de maintenir de bons résultats. C’est en effet la gestion de portefeuille qui contribue le plus aujourd’hui, avec les résultats de certaines filiales, dont la CNP, à nos bons résultats. On comprend donc que ceux-ci seront plus volatils à l’avenir.

C’est dans ce cadre que nous esquissons de nouvelles orientations stratégiques. La Caisse doit être plus concentrée et plus sélective, et opérer un retour marqué à ses fondamentaux dans un cadre modernisé, à la lumière du débat sur les propositions de réduction des dépenses de l’État. Même si la Caisse n’est pas l’État, elle ne saurait s’affranchir du climat actuel : elle doit donc se moderniser et faire des économies de fonctionnement. Elle doit également dégager des priorités sectorielles, en accompagnement des politiques publiques.

La Caisse des dépôts demeurera bien sûr, aux côtés de bpifrance, un acteur important du financement des entreprises. Elle le demeurera aussi à travers son activité d’investisseur institutionnel, et à travers sa capacité à élaborer des dispositifs de place. Nous allons ainsi lancer prochainement le fonds obligataire à destination des petites et moyennes entreprises et des entreprises de taille intermédiaire.

Le groupe sera plus que jamais un partenaire privilégié des collectivités locales pour accompagner leur développement économique en tant que prêteur, investisseur, opérateur, mais aussi apporteur de solutions d’ingénierie. J’ai eu l’occasion d’en parler avec un certain nombre d’entre vous lors de mes déplacements dans les régions, et je sais que nous sommes attendus sur ce point sur le terrain.

La Caisse doit être reconnue en la matière, tant par la force de frappe de ses expertises que par celle de ses capacités d’investissement. Elle doit être bien davantage qu’un investisseur institutionnel ou une holding financière, et revendiquer son insertion concrète dans l’économie.

Compte tenu du retrait de Dexia, le centre de gravité du groupe a basculé vers le financement des collectivités, à travers la mise en place d’une enveloppe de 20 milliards sur fonds d’épargne, entre 2013 et 2017. Je ne reviens pas sur les procédures complexes décrites par le président Henri Emmanuelli. Nous avons également noué un partenariat avec La Banque postale pour des prêts de court et de moyen terme, et signé un accord avec la BEI pour cofinancer des projets d’investissements prioritaires dans les domaines de l’énergie, du haut débit, de la transition énergétique ou des transports urbains, qui témoignent de notre engagement au plus près des territoires.

Je souhaite également que nous revenions à nos fondamentaux, à savoir nos activités de mandataire et de dépositaire, porteuses de relais de croissance, qu’il s’agisse de nouveaux dépôts, de fiducie ou – comme la Cour des comptes nous y invite – de la gestion des comptes bancaires inactifs et des contrats d’assurance-vie en déshérence, qui représentent près de 4 milliards d’euros. Dans le cadre de la réflexion sur la réforme des retraites, nous pouvons être plus présents sur la gestion d’un certain nombre de régimes, notamment ceux des salariés dont la carrière a été marquée par la pénibilité. Nous devons inventorier les populations, les identifier. Bref, nous sommes à la disposition du Parlement et du Gouvernement. Nous essayons de moderniser à la fois la gestion de nos mandats et celle de nos dépôts. Sur ce point, j’ai bien noté, monsieur le Rapporteur général, que vous engagiez une réflexion en vue du dépôt d’une proposition de loi.

En ce qui concerne les fonds d’épargne, je vous ai dit l’essentiel. La mission du fonds d’épargne a été renforcée – et cela fait des envieux. Nous serons néanmoins attentifs à ce que les intérêts de ce fonds ne soient pas remis en cause.

Quelques mots à présent sur les priorités sectorielles de notre plan stratégique, étant entendu que je ne serai pas exhaustif. La transition énergétique et environnementale sera un axe important de développement, notamment en matière de rénovation énergétique des logements et de promotion des énergies renouvelables. Elle est l’un des axes essentiels de politiques publiques sur lesquels le groupe est en mesure de mobiliser l’ensemble de ses expertises et de ses entités.

Notre groupe se positionnera également sur la question du numérique, que ce soit sur le développement des réseaux d’infrastructures ou la consignation des données numériques. Le développement des réseaux énergétiques ou numériques est appelé à consolider notre effort en matière d’infrastructures.

Le groupe réaffirmera son rôle d’entraînement et de mobilisation dans la modernisation des politiques du logement. Il en va ainsi du développement des logements intermédiaires avec des co-investisseurs. Il en va de même des solutions innovantes appelées à répondre aux enjeux d’autonomie et de vieillissement de la population en matière d’habitat.

Enfin, en s’appuyant sur ses réseaux internationaux, la Caisse entend être le pivot d’une politique publique destinée à attirer les fonds souverains sur des projets français. Dans la situation difficile que traversent l’Europe et notre pays, les investisseurs souverains représentent une importante capacité de financement. Nous avons déjà conclu avec le Qatar un projet de fonds de 300 millions d’euros. D’autres suivront si la commission de surveillance l’autorise. Nous le souhaitons, car c’est l’un des axes de développement futurs de la Caisse.

Nous serons également très attentifs, monsieur le président Emmanuelli, à ce que le statut européen des banques publiques de développement et leurs spécificités ne soient pas remis en cause.

Encore une fois, nous sommes à un tournant. Nous devons engager la transformation de la Caisse, et adapter son modèle économique et ses modes d’intervention pour dégager de nouvelles marges de manœuvre.

M. le rapporteur général. Quel est le degré d’avancement de la constitution de bpifrance, notamment par rapport aux exigences de Bruxelles ? Y a-t-il bien fusion, comme j’avais cru le comprendre, entre le FSI, CDC Entreprises et FSI Régions ? Nous ressentons là aussi une impression de lourdeur administrative, monsieur Emmanuelli, même si nous sommes conscients que certaines évaluations d’actifs ou procédures d’apport prennent du temps.

Vous avez évoqué la question des emprunts toxiques. La commission d’enquête sur les produits financiers à risque souscrits par les acteurs publics locaux avait envisagé la mise en place d’un fonds destiné à reprendre les prêts toxiques, afin de les loger dans une structure de portage permettant de trouver une solution de façon plus « professionnelle » que ne peuvent le faire certaines collectivités. La Caisse accepterait-elle de contribuer à abonder ce fonds ?

Cette question est liée à celle de la SFIL. M. Philippe Mills, président-directeur général de la SFIL et M. Philippe Wahl, président du directoire de la Banque postale, que nous avons auditionnés, ont tenu devant nous un discours rassurant. Et voilà que quelques jours plus tard, on nous a laissé entendre qu’il était urgent pour la SFIL d’émettre sur les marchés financiers. Quelle appréciation portez-vous sur cette situation ? Je tenais à l’évoquer, car si trop de transparence peut parfois nuire à l’image d’une institution, le manque de transparence peut nuire à la bonne information du Parlement.

J’en viens au fonds d’épargne. Vous avez évoqué l’évolution du taux de centralisation de l’épargne. Ne peut-on lier à cette opération la question des prêts toxiques, que je viens d’évoquer ? Il doit y avoir des contreparties à un apport de liquidités aux organismes bancaires, et pas nécessairement sur les seuls taux de rémunération.

D’autre part, il ne vous aura pas échappé que Le Canard enchaîné se faisait aujourd’hui même l’écho de la question qui se pose sur les comptes bancaires inactifs et les contrats d’assurance-vie en déshérence. Il existe plus de 600 000 comptes de centenaires dans les banques françaises, alors même que la France ne compte que 20 000 centenaires. Le chiffre est tout de même surprenant. Vous avez-vous-même parlé – à l’instar de la Cour des comptes – de plusieurs milliards d’euros. Or, la gestion de ces comptes bancaires inactifs et de ces contrats d’assurance-vie en déshérence est l’une des missions d’origine de la Caisse. Nous devrions d’ailleurs déposer une proposition de loi en ce sens.

J’attire enfin votre attention sur un cas concret. Une copropriété de ma circonscription qui compte 418 logements. La loi a récemment étendu l’accès au prêt à taux zéro – PTZ – à des copropriétés. Le décret qui était nécessaire a été publié il y a quelques mois. Or, cette copropriété cherche toujours – en vain – un prêteur pour financer une opération de rénovation thermique d’un montant de 5,5 millions d’euros. Elle a pourtant vu toutes les banques ! Voilà donc où nous en sommes, alors que le développement durable est une priorité dans notre pays, qu’il est très difficile d’y trouver un emploi et que le caractère social et l’intérêt économique de l’opération sont une évidence ! On marche sur la tête ! J’en profite pour dire à Henri Emmanuelli que j’ai bien compris son message et que j’appuierai sa démarche.

M. le président Gilles Carrez. Je reviens un instant sur la question des prêts toxiques. J’avais retenu des précédentes auditions que tant qu’une solution n’aurait pas été trouvée à la suite de l’arrêt du tribunal de grande instance de Nanterre, il serait très difficile à la SFIL d’émettre dans de bonnes conditions. J’avais d’ailleurs interrogé le président de la commission de surveillance sur ce qui se passerait si aucune solution n’était trouvée d’ici la fin de l’année. Il semble qu’un texte de validation sera présenté à l’automne ; le ministre de l’Économie et des finances m’avait d’ailleurs assuré que la question serait réglée. Mais tout cela prend du temps. Au-delà des 12,5 milliards qu’elle a prêtés, la Caisse ne court-elle pas un risque en tant qu’actionnaire si aucune solution n’est trouvée ? Vous m’aviez assuré que non, monsieur le président. Pouvez-vous nous le confirmer ? La Caisse ne détient que 20 % du capital de la SFIL : il appartient en principe à l’État de régler le problème.

M. le président de la commission de surveillance. Je rappelle que nous avons des actions de préférence, qui font que la Caisse ne serait pas concernée par une éventuelle recapitalisation. Cela étant, il faut lever une ambiguïté : il n’est pas question que la SFIL attende une loi de validation pour émettre. Elle va d’ailleurs le faire dans les semaines qui viennent.

M. le directeur général. Dès lors que le Gouvernement affiche des intentions claires, les investisseurs le prendront en compte sans attendre un éventuel projet de loi. Simplement, il faut que les intentions et le schéma soient clairs. Si l’opération a été retardée, c’est parce qu’aucune contrepartie ne semblait proposée à la multiplication des contentieux.

M. le président Gilles Carrez. Il est certain que le nombre des contentieux augmente.

M. le directeur général. Mais si les intentions du Gouvernement sur la manière de traiter ce sujet – en stock comme en flux – sont claires, les investisseurs – qui sont rationnels et bien informés – le prendront en compte.

M. le président de la commission de surveillance. Une décision vient d’être rendue par le tribunal de grande instance de Paris dans une affaire opposant le département de la Seine-Saint-Denis au Crédit agricole. Le premier a été débouté au motif que le conseil général était en mesure de comprendre les informations qui lui étaient délivrées. Bref, c’est l’inverse de la décision rendue en février par le tribunal de grande instance de Nanterre, qui ne donnait d’ailleurs pas raison au département. Mais je le répète, la SFIL n’attendra pas la loi de validation pour émettre.

M. le rapporteur général. À gauche comme à droite, les avis sur l’opportunité d’une loi de validation sont partagés. Le Gouvernement a publié un communiqué, que les investisseurs ont vu. Encore faut-il être sûr que la loi soit votée, car ce n’est pas le Gouvernement qui vote les lois. Si l’on fait allusion à la mise en place d’un fonds ou à une méthodologie pour traiter la question des emprunts toxiques, il faut avancer en même temps sur les deux fronts – la loi de validation et le traitement des difficultés. J’en ai parlé récemment avec vous-même, monsieur le directeur général, mais aussi avec M. Wahl.

M. le président de la commission de surveillance. Certes, mais je ne comprends pas le lien que vous semblez établir entre la loi de validation et l’émission par la SFIL.

M. Thierry Mandon. La décision du tribunal de grande instance de Paris n’est pas inverse à celle rendue par celui de Nanterre en février, monsieur Emmanuelli. Au contraire, elle reprend en partie ses motivations à savoir que les services du conseil général avaient tous les éléments pour appréhender la situation. La décision rendue en février l’a principalement été au motif que l’information délivrée par la banque avait été insuffisante.

M. Marc Goua. Sur la SFIL, il y a une garantie du Trésor, quasiment une caution. Il ne s’agit pas d’une garantie à première demande comme je l’avais souhaité, mais c’est tout de même une garantie.

Le jugement du tribunal de grande instance de Paris confirme en effet celui du tribunal de grande instance de Nanterre, mais il s’agit cette fois-ci de swaps. En ce qui concerne le taux effectif global, la jurisprudence est d’ailleurs constante depuis l’origine – et je pense qu’elle sera confirmée.

M. le rapporteur général. Mettons les choses au clair : je n’ai pas dit qu’il fallait attendre une loi de validation pour que la SFIL émette. Cela posé, le Gouvernement annonce un projet de loi de validation. J’en prends acte. Mais il faudrait qu’il s’accompagne d’un travail approfondi sur la gestion des prêts toxiques aux collectivités, notamment les plus fragiles – qui ne pourront pas honorer leurs engagements et ne sont pas toujours celles que l’on croit.

M. le directeur général Nous savons tous que l’émission sur les marchés est indispensable pour assurer la pérennité du dispositif de financement des collectivités locales, et que pour qu’elle émette, il faut que les investisseurs aient des repères, donc que les annonces du Gouvernement – sous les réserves que vous avez faites – leur permettent de disposer d’un cadre. Bien entendu, c’est le Parlement qui vote la loi, monsieur le rapporteur général. Nous verrons bien comment les titres de la SFIL se négocieront sur les marchés.

Il est important de rappeler que dans l’accord qui a été passé, la Caisse n’est intervenue que sous la forme de prêts et d’actions de préférence. Elle n’a donc pas vocation à être un actionnaire de référence de la SFIL, et donc à être dans le fonds. Mais cela ne joue pas sur les émissions de la SFIL : les marchés ont bien pris en compte que l’État était actionnaire de référence au sens de la loi bancaire. C’est ce qui permet à la SFIL d’aller sur les marchés dans de bonnes conditions et à des taux intéressants.

M. Laurent Grandguillaume. Le développement du numérique à très haut débit est essentiel pour l’avenir. Compte tenu des engagements qui ont été pris, où le groupe en est-il dans ce domaine ?

bpifrance va investir dans l’économie sociale et solidaire. Un effort important est nécessaire compte tenu du nombre d’emplois que compte ce secteur, qui emploie près de 10% des salariés et mérite donc de bénéficier d’un véritable soutien de la part de la Caisse et de la BPI.

Je souhaite également vous interroger sur les partenariats public-privé. Selon un rapport de la Cour des comptes publié en octobre 2011, il est important d’élever une « muraille de Chine » entre les filiales de la Caisse des dépôts qui peuvent intervenir dans des missions de conseil et les prestations de services des filiales, afin d’éviter tout mélange des genres. Des décisions ont-elles été prises à la suite de ce rapport ?

En ce qui concerne le périmètre de consolidation du groupe, de quels outils de vérification sur les politiques d’optimisation fiscale des entreprises dans lesquelles elle a des participations la Caisse dispose-t-elle ? A-t-elle des relations avec l’Agence des participations de l’État sur ce sujet ?

M. Éric Alauzet. J’observe que nous ne disposons pas à ce stade du rapport social et environnemental, qui devrait être annexé aux documents que vous nous avez remis.

Par ailleurs, j’ai assisté en Franche-Comté à une réunion organisée par la Caisse sur sa contribution à différents projets d’investissement des collectivités locales dans une dizaine de domaines – transports, logement, assainissement… J’ai été très surpris de ne pas y voir figurer les équipements énergétiques, à l’heure où l’on parle tant de la transition énergétique. Je vous ai d’ailleurs adressé un courrier à ce sujet. J’aimerais avoir une explication.

M. le président Gilles Carrez. Le directeur général l’a évoquée comme une priorité à la fin de son intervention. Vous pouvez donc être rassuré.

M. Thomas Thévenoud. Je vous sais comme moi attaché à la restauration de qualité, monsieur Emmanuelli. L’État a-t-il vocation à faire des hamburgers ? Pouvez-vous nous rappeler dans quelles conditions Qualium Investissement, filiale de la Caisse, a acquis l’enseigne de restauration rapide Quick en 2007 ? Quelle est aujourd’hui la rentabilité de cette enseigne ? Et quelle est la stratégie du groupe vis-à-vis de cette acquisition ?

M. Pascal Cherki. Votre très grande proximité avec le Président de la République vous permet-elle d’avoir avec lui des discussions stratégiques sur la politique industrielle, monsieur Jouyet ? Prenons l’exemple de la transition énergétique. Si nous n’œuvrons pas, sur l’énergie photovoltaïque ou les éoliennes, à la constitution d’un marché et d’un environnement favorable et à l’utilisation des leviers publics, comme l’a toujours fait l’État, je crains que le résultat ne soit pas à la hauteur des espérances. Cette réflexion existe-t-elle ? L’État est-il un actionnaire actif dans les entreprises où il est présent ?

M. Dominique Lefebvre. Le soutien que j’apporte à la politique du Gouvernement devrait m’éviter d’être confondu dans le rapport de la Caisse avec mon homonyme de droite Frédéric Lefebvre, monsieur le président du conseil de surveillance…

Plus sérieusement, je suis de ceux qui plaident pour que le système de l’épargne réglementée – et son attractivité pour les épargnants – soient préservés, avec le maintien d’un régime totalement défiscalisé. Tenir cette position face aux autres acteurs du financement de l’économie suppose d’assurer en permanence la bonne orientation de cette épargne réglementée vers le financement de l’économie. Le groupe Caisse des dépôts a une filiale d’assurance-vie, la CNP. Quelle est votre position sur le rapport Dynamiser l’épargne financière des ménages pour financer l’investissement et la compétitivité, que j’ai rédigé avec Karine Berger ? En contrepartie du maintien de cette épargne fléchée vers un emploi par les fonds d’épargne et la puissance publique à travers la Caisse des dépôts, nous proposons de mieux mobiliser les encours de l’assurance-vie et de mobiliser les contrats les plus importants au service du financement de l’économie sous peine de perdre les avantages – notamment fiscaux – qui y sont associés. Ces propositions recueillent-elles votre assentiment ?

M. le président de la commission de surveillance. Je ne puis que conseiller à M. Thévenoud – qui ne peut déjà plus aller chez McDonald’s – de délaisser Quick pour aller faire un tour dans les restaurants du groupe Frères Blanc, qui appartient également à Qualium Investissement.

En ce qui concerne la SFIL, il n’est ni dans l’intérêt de la Caisse, ni dans celui de l’État de laisser dire que la SFIL n’émettra que si la loi de validation est votée. Au-delà des annonces, il y a aussi les commentaires qui sont faits par les uns et les autres. Nous devons donc y veiller tout particulièrement. La SFIL va émettre dans les jours qui viennent, sans attendre de validation législative. Tout devrait bien se passer. Le taux dépendra bien sûr beaucoup de la garantie qui sera apportée par l’État.

S’agissant des contreparties, je partage l’avis du rapporteur général. Il faut des contreparties et une baisse du commissionnement. On parle d’un point, mais pourquoi pas un peu plus ?

En ce qui concerne les comptes bancaires inactifs et les contrats d’assurance-vie en déshérence, monsieur le rapporteur général, un processus est en cours, fortement aidé par la Cour des comptes. Il faudra régler cette question, car sur le plan juridique, il s’agit tout de même d’une spoliation.

J’ai bien noté le problème rencontré par la copropriété que vous avez évoquée, qui souhaite financer une rénovation thermique et ne trouve pas de prêteur. Je m’enquerrai auprès du fonds d’épargne des raisons de cette situation, que j’avoue ne pas comprendre.

M. le directeur général. Le mécanisme de refinancement par le fonds d’épargne des banques, qui existait auparavant pour répondre à de tels besoins, a disparu. Il serait bon de restimuler ce type de dispositif à l’occasion des discussions qui ont lieu sur la réallocation de l’épargne réglementée et qu’il fasse partie des emplois de cette épargne par les banques.

M. le président de la commission de surveillance. Il faut néanmoins veiller à ce que le processus ne soit pas bloqué par un refus des banques.

M. le directeur général. Il faut que le contrat soit clair. C’est au Trésor d’y veiller.

M. le président de la commission de surveillance. M. Cherki nous a posé une question à la fois aimable et pernicieuse, qui revenait à s’interroger sur ce que fait la Caisse face au défi de la reconstruction de l’appareil de production…

M. Pascal Cherki. Il s’agit plutôt de savoir si l’État fait montre dans ses relations avec la Caisse d’une véritable volonté stratégique sur ce sujet ?

M. le président de la commission de surveillance. À titre personnel, je pense que la Caisse des dépôts a vocation à participer à toutes les grandes missions d’intérêt général. Une question a été posée sur le numérique : il y a des progrès à faire dans ce domaine.

M. le directeur général. S’agissant de bpifrance, tout – enseignes, équipes, dispositif juridique – devrait être opérationnel le 12 juillet prochain, monsieur le rapporteur général. Les discussions avec Bruxelles ne devraient pas ralentir le processus, mais nous devons faire montre d’une grande vigilance sur les modalités d’intervention sur lesquels insistait le président Emmanuelli, puisque nous devons nous comporter en investisseur avisé, ainsi que sur notre communication, tout ce qui peut être dit étant écouté attentivement par les autorités européennes. Néanmoins, la décision devrait être prise en temps voulu.

Je crois vous avoir répondu en ce qui concerne les copropriétés dégradées.

J’en viens à la Caisse et aux fonds de compensation. La Caisse est un partenaire important des collectivités, à travers les prêts sur fonds d’épargne, ses investissements comme opérateurs et le partenariat établi avec La Banque postale sur les prêts. Pour autant, elle ne peut pas tout faire. Il n’est ainsi pas dans sa vocation d’intervenir sous forme de subventions.

Le président Emmanuelli vous a parfaitement répondu sur les comptes en déshérence. Nous sommes prêts à jouer tout notre rôle en ce domaine ; nous attendons donc avec intérêt votre proposition de loi.

Nous avons récemment participé à une réunion avec l’Agence française de développement – AFD – sur l’optimisation fiscale, monsieur Grandguillaume. Nous y avons évoqué les politiques à mettre en œuvre et la liste des pays sur lesquels une vigilance accrue
– voire une interdiction – s’impose. Quant à la Caisse elle-même, tous les revenus de ses placements sont taxés selon les règles fiscales françaises. Ceci étant, il nous arrive de travailler avec des fonds de fonds. Sachez cependant que nous faisons le maximum pour recenser leur localisation.

J’en viens au plan d’investissement pour le numérique. Les 20 milliards prévus pour les collectivités pourront être mobilisés dès que les projets seront finalisés par le fonds pour la société numérique. Il ne nous manque qu’une clarification des objectifs avec les pouvoirs publics. Les fonds sont là.

bpifrance a vocation à intervenir dans le secteur de l’économie sociale et solidaire. Mais les entreprises qui la financent, l’essentiel des projets et les subventions aux associations qui interviennent dans ce secteur resteront de la responsabilité de la Caisse, notamment de la direction du développement territorial et du réseau. La séparation est claire.

La transition énergétique est l’une des priorités de la Caisse, monsieur Alauzet. Cela va de la valorisation thermique des bâtiments publics à la valorisation des déchets et aux réseaux d’eau ou de chaleur, ou encore aux usines de biomasse. Nous devons être plus visibles et plus clairs sur cet engagement. Je suis très surpris qu’il ait pu être oublié lors de la réunion locale à laquelle vous avez assisté. Cela montre que nous avons besoin d’adapter notre organisation en matière de relais d’information et de communication.

Les fonds gérés par Qualium Investissement ont en effet racheté le groupe Quick en 2007, monsieur Thévenoud. Les performances ont été en baisse ces dernières années. Qualium et le nouveau management de Quick ont fait un effort de gestion important, et les résultats sont en voie d’amélioration.

Je me demande tous les jours si ma proximité avec le Président de la République est un avantage ou un inconvénient pour la Caisse des dépôts, monsieur Cherki. C’est parfois l’un et parfois l’autre ; sachez cependant que ce n’est pas aussi facile qu’on pourrait le croire !

Le rôle de bpifrance est d’être un actionnaire actif dans les entreprises. Celui de la Caisse sera de mettre ses propres actions en synergie avec celles de bpifrance, pour favoriser l’émergence de filières industrielles, notamment en finançant des projets réalisés par des entreprises aidées par bpifrance. Un certain nombre de filières – aéronautique, automobile, aluminium – vont ainsi être soutenues. Et puisque vous me parlez des échanges que je peux avoir avec le Président de la République, je pense – comme le président de la commission de surveillance – que nous devrions envisager la constitution ou le développement de fonds de retournement, notamment dans le domaine industriel. Nous essayons de faire le maximum en faveur du développement industriel – c’est un sujet auquel je suis particulièrement attaché. Nous sommes alertés à chaque dossier important dans ce domaine, et ils donnent lieu à des échanges stratégiques, y compris avec le ministre du redressement productif.

Nous sommes favorables à la mobilisation de l’assurance-vie au profit du financement de l’économie, monsieur Lefebvre. Mais comme vous le savez, il faut aussi adapter les contraintes réglementaires qui pèsent sur les compagnies d’assurance, et notamment tout ce qui a trait à la directive Solvabilité II. Une gamme de produits d’assurance-vie plus risqués et plus orientés vers le développement économique nous paraît constituer une perspective prometteuse.

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Membres présents ou excusés

Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Réunion du mercredi 3 juillet 2013 à 11 h 15

Présents. - M. Éric Alauzet, M. Guillaume Bachelay, M. Dominique Baert, M. Xavier Bertrand, M. Gilles Carrez, M. Yves Censi, M. Pascal Cherki, M. Alain Claeys, M. Charles de Courson, Mme Marie-Christine Dalloz, M. Jean-Louis Dumont, M. Christian Eckert, M. Henri Emmanuelli, M. Marc Francina, M. Claude Goasguen, M. Marc Goua, M. Laurent Grandguillaume, M. Jean-François Lamour, M. Jean Launay, M. Dominique Lefebvre, M. Marc Le Fur, M. Jean-François Mancel, M. Thierry Mandon, M. Nicolas Sansu, Mme Eva Sas, M. Gérard Terrier, M. Thomas Thévenoud, M. Laurent Wauquiez

Excusés. - Mme Karine Berger, M. Étienne Blanc, M. Christophe Castaner, M. Jean-Claude Fruteau, Mme Annick Girardin, M. Jean-Pierre Gorges, Mme Arlette Grosskost, M. Patrick Lebreton, Mme Sandrine Mazetier, M. Thierry Robert, Mme Hélène Vainqueur-Christophe, M. Michel Vergnier

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