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La Commission entend M. Christian Eckert, secrétaire d’État au Budget, sur le projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2014 (n° 2813).
M. le président Gilles Carrez. Mes chers collègues, au cours de notre réunion de ce matin, nous nous intéresserons à la fois au passé – le projet de loi de règlement pour 2014
– et à l’avenir – le débat d’orientation des finances publiques.
Je rappelle qu’en séance publique, contrairement à la pratique observée ces dernières années et à la différence de nos débats en commission, ces deux points feront l’objet d’un examen séparé, respectivement l’après-midi du lundi 6 juillet prochain et le matin du jeudi 9 juillet.
S’agissant du projet de loi de règlement, nous avons débuté nos travaux le jour même de son adoption en Conseil des ministres, le 27 mai dernier, avec l’audition du Premier président de la Cour des comptes, par ailleurs président du Haut Conseil des finances publiques, sur les rapports de la Cour relatifs à la certification des comptes et aux résultats de la gestion budgétaire de l’État de 2014, puis sur l’avis du Haut Conseil relatif au respect de la trajectoire de solde structurel des administrations publiques.
Nous avons poursuivi nos travaux avec un cycle très intéressant de quatre auditions de responsables de programmes et de représentants de la direction du budget, qui s’est achevé ce matin avec le programme Création, dont le rapporteur spécial est Pierre-Alain Muet. Nous avions auparavant abordé, successivement, le programme Innovation pour la transition écologique et énergétique, avec l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie – ADEME –, le rapporteur spécial étant Marc Goua, puis les programmes Gendarmerie nationale et Police nationale, avec Yann Galut comme rapporteur spécial, et, enfin, les programmes Formations supérieures et recherche universitaire et Vie étudiante, dont la responsable est Mme Simone Bonnafous et le rapporteur spécial François André.
Il est toujours très difficile de dégager du temps, en cette période de l’année toujours très chargée : je remercie donc particulièrement les rapporteurs spéciaux et tous les parlementaires qui ont participé à ces auditions. Je souligne une fois encore que la présence des représentants de la direction du budget nous a paru constituer une innovation très intéressante. C’est pourquoi je vous propose de passer l’année prochaine à six ou sept programmes. Ce faisant, nous ne faisons que remplir notre rôle d’évaluation et de contrôle de l’exécution.
Par ailleurs, et comme de coutume, nos rapporteurs spéciaux commenteront chacun les rapports annuels de performances – RAP – qui leur reviennent.
S’agissant des orientations des finances publiques, nous avons de nouveau entendu le Premier président de la Cour des comptes, mercredi dernier : il est venu nous présenter son rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques.
En outre, dans la perspective du débat d’orientation, et conformément à l’article 48 de la loi organique relative aux lois de finances – LOLF –, le Gouvernement a remis hier son Rapport sur l’évolution de l’économie nationale et sur les orientations des finances publiques, qui est le rapport préparatoire à ce débat. Ce document, toujours très intéressant, est à votre disposition dans cette salle.
Nous achevons donc aujourd’hui nos travaux sur le projet de loi de règlement avec M. Christian Eckert, secrétaire d’État chargé du Budget, qui vient nous présenter ce texte et auquel je souhaite la bienvenue en votre nom.
Après l’intervention du secrétaire d’État, la rapporteure générale nous présentera son rapport sur le projet de loi de règlement, puis son rapport d’information préalable au débat d’orientation des finances publiques.
M. Christian Eckert, secrétaire d’État au Budget. Monsieur le président, madame la rapporteure générale, mesdames et messieurs les députés, je tiens tout d’abord à préciser que je suis favorable à ce que la direction du budget et les responsables de programmes puissent être entendus par la commission des Finances. Tout ce qui peut contribuer à améliorer la transparence sur le fonctionnement du budget est bienvenu.
Je suis prêt à évoquer les premiers éléments de l’exécution 2015 et à répondre aux questions que vous pourriez me poser sur le sujet.
Le projet de loi de règlement 2014 soumet à votre approbation les résultats d’exécution définitifs du budget de l’État dont vous connaissez les grandes lignes depuis le mois de janvier et qui ont déjà donné lieu à plusieurs échanges : le 11 février dernier puis les 15 et 22 avril lors de la présentation du programme de stabilité.
C’est néanmoins avec toujours autant de plaisir que je viens devant votre commission vous rendre compte de l’action du Gouvernement.
Notre point de départ est de nous appuyer sur les comptes de l’État qui, pour la neuvième année consécutive, ont été certifiés en toute indépendance par la Cour des comptes : son approbation vous est proposée dans le projet de loi de règlement.
La France, vous le savez, est le seul État de la zone euro à présenter des comptes certifiés : c’est un gage de crédibilité et de qualité de l’information sur les finances de l’État. C’est également la garantie de fiabilité des chiffres que nous vous présentons. Les comptes de l’État, ce sont non seulement les opérations budgétaires bien sûr, les dettes et autres passifs, mais également les actifs détenus par l’État, qui représentent un montant considérable – je ne citerai qu’un seul chiffre : les 50 milliards d’euros de patrimoine immobilier, de bureaux et de terrains propriété de l’État, qui montrent toute l’importance de la politique immobilière à laquelle j’accorde, comme certains parmi vous également, une attention toute particulière.
Il faut saluer l’amélioration continue de la qualité des comptes de l’État que nous constatons depuis 2006, grâce au travail des administrations, notamment de la direction générale des finances publiques – DGFiP. La démarche de qualité comptable est d’ailleurs transversale dans l’ensemble des administrations publiques : les comptes du régime général de la sécurité sociale ont été également certifiés par la Cour ; les comptes d’un nombre croissant d’établissements publics le sont également, par exemple les hôpitaux à partir de cette année, ou encore les universités.
J’en viens maintenant aux résultats obtenus en 2014 sur la maîtrise de la dépense de l’État. Vous les connaissez : je souhaite toutefois les préciser.
Sur le budget de l’État, les indicateurs les plus élémentaires, ceux qui structurent notre gestion budgétaire, ce sont les normes de dépenses : or, à trop vouloir raffiner, l’analyse de la Cour des comptes sur l’exécution des dépenses perd un peu de vue ces fondamentaux.
La norme la plus ancienne a été instituée en 2003 : elle comprend les dépenses de l’État, y compris la charge de la dette et les pensions : sur cette norme, la dépense passe de 368,8 milliards d’euros en 2013 à 364,8 milliards d’euros en 2014. C’est une baisse de 4 milliards d’euros d’exécution à exécution.
Une norme plus récente a été créée en loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 : elle exclut la charge de la dette et les pensions. C’est notre référence permanente pour le pilotage infra-annuel des dépenses. Sur ce périmètre, la dépense passe de 280 milliards d’euros en 2013 à 276,7 milliards d’euros en 2014. C’est, là encore, une baisse de 3,3 milliards d’euros d’exécution à exécution.
Le budget pour 2014 a été construit et voté sur la base de normes de dépenses instituées depuis des années, partagées par tous les gouvernements successifs et confortées par la dernière loi de programmation des finances publiques.
C’est bien sur la base de ces deux normes que le Gouvernement vous a présenté le budget et qu’il l’a exécuté.
C’est également sur la base de ces normes, qui découlent directement des comptes de l’État, que vos collègues députés et vous-mêmes avez pu porter un jugement sur les propositions de l’exécutif et décider du sens de votre vote.
Or, ce que montrent ces normes, c’est une baisse significative de la dépense de l’État en 2014 de plusieurs milliards d’euros.
J’en viens au déficit de l’État : il s’élève à 85,6 milliards d’euros en 2014. Comme cela était prévu dès la loi de finances initiale, il augmente par rapport à 2013 du fait du lancement du nouveau programme d’investissements d’avenir – PIA.
Il faut toutefois savoir que ces dépenses du nouveau PIA consistent en des transferts vers des opérateurs qui, eux-mêmes, les utiliseront pour financer des projets, selon un rythme très étalé dans le temps, sur plusieurs années. Ces dépenses sont donc, en 2014, des transferts internes aux administrations publiques, neutres sur le solde global des administrations publiques : elles n’ont d’ailleurs aucun impact sur la dette et la trésorerie de l’État, puisque les opérateurs déposent immédiatement les fonds reçus auprès de l’État.
Ces versements aux opérateurs du PIA présentent donc un caractère exceptionnel et il est légitime de les retraiter pour effectuer une comparaison pertinente par rapport à 2013. Or, si l’on déduit ces 12 milliards d’euros de dépenses, le déficit ressort à 73,6 milliards d’euros, en baisse par rapport à 2013 où il avait atteint 75 milliards d’euros.
Le déficit de l’ensemble des administrations publiques, quant à lui, est évalué par l’INSEE à 4 % du PIB en 2014, contre 4,1 % en 2013. C’est son niveau le plus bas depuis 2008, grâce notamment à une progression en valeur des dépenses publiques limitée à 0,9 %.
Le déficit structurel, enfin, qui fait l’objet de l’article liminaire du projet de loi, s’établit à 2,1 %. Nous avons atteint dès 2014 l’objectif que la loi de programmation avait fixé pour 2015 : du reste, le Haut Conseil des finances publiques a constaté que le déficit structurel s’est réduit de 0,6 %, ce qui le place à son niveau le plus bas depuis l’an 2000.
Un mot, pour conclure, sur nos perspectives budgétaires. Elles ont été annoncées dans le programme de stabilité en avril dernier : grâce à des économies complémentaires, qui viendront compenser l’effet de l’inflation sur le rendement de certaines mesures d’économies, le déficit public poursuivra sa baisse en 2015 et 2016.
Depuis le début de l’année, nous avons engagé des dépenses nouvelles que nous assumons. Parce qu’il faut assurer la sécurité des Français, il convenait de financer le plan de lutte contre le terrorisme et l’augmentation du budget de la défense en 2016. Parce que l’emploi est notre priorité, nous avons dégagé des moyens supplémentaires pour les contrats aidés et pour l’emploi dans les TPE et les PME.
Ces mesures, nous les finançons en dégageant des marges par ailleurs. Certaines ont un impact dès 2015 : c’est par exemple le cas du plan de lutte contre le terrorisme. Ce plan a fait l’objet d’un décret d’avance en début d’année, qui vous a été transmis, ainsi que d’une augmentation de la réserve de précaution ou « surgel », dont la décomposition vous a également été communiquée. Vous avez pu constater que ces dépenses nouvelles étaient entièrement financées par des économies sur les autres ministères.
D’autres mesures auront un impact sur 2016 : c’est le cas de l’augmentation du budget de la défense ou des contrats aidés. Ces dépenses nouvelles, nous les prenons évidemment en compte dans la construction du budget pour 2016. Elles ne modifient donc pas la trajectoire de finances publiques du programme de stabilité. Nous donnerons évidemment plus de détails lors du débat d’orientation des finances publiques prévu le 9 juillet prochain dans votre assemblée.
Voici, monsieur le président, madame la rapporteure générale, mesdames et messieurs les députés, la présentation des résultats obtenus en 2014 et de nos perspectives pour cette année et la suivante.
Je suis à votre disposition pour répondre à toutes vos questions comme je le serai le 9 juillet prochain en séance – et comme je l’aurais été s’il avait été opportun de déposer un projet de loi de finances rectificative. Mais la seule raison qui aurait justifié le dépôt d’un collectif eût été l’augmentation des impôts en 2015 : or, comme vous le savez, il n’en est pas question. C’est par des économies en dépense que le Gouvernement vous propose de poursuivre la réduction du déficit.
La Commission examine, après engagement de la procédure accélérée, le projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2014 (n° 2813) (Mme Valérie Rabault, rapporteure générale).
Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. Je rappelle que la loi de règlement permet de constater que les autorisations votées par le Parlement en loi de finances ont été respectées.
Tous les articles du texte portent exclusivement sur le budget de l’État, à l’exception de l’article liminaire, qui englobe toutes les administrations publiques, y compris la sécurité sociale et les collectivités locales, puisqu’il porte sur le solde public.
La loi de règlement permet donc d’arrêter les comptes de l’État pour 2014 et de voter un article liminaire portant sur le solde, toutes administrations confondues – cet article porte donc sur un périmètre différent de celui des autres articles.
L’article 1er arrête, en comptabilité budgétaire, le montant des recettes nettes, à savoir toutes les recettes encaissées par l’État – dont ont été déduits les remboursements et dégrèvements aux collectivités territoriales –, le montant des dépenses nettes et le solde budgétaire de l’année passée.
L’article 2 vise à rappeler les besoins de financement constatés – la dette échue et la nouvelle à financer en raison du déficit.
L’article 3 présente le résultat de l’État en comptabilité générale.
Les articles 4, 5 et 6 arrêtent le montant des crédits consommés respectivement sur le budget général, les budgets annexes et les comptes spéciaux.
L’article 7 présente le solde du compte spécial Avances aux organismes de sécurité sociale.
L’article 8, enfin, propose un ajustement technique relatif à l’organisation comptable outre-mer.
Je tiens à faire observer que les recettes de 2014 ont été inférieures de quelques 10 milliards d’euros par rapport au niveau prévu en loi de finances initiale – LFI – et de 9 milliards par rapport à 2013 du fait de la baisse des recettes fiscales nettes. La quasi-totalité de la différence – les neuf dixièmes – entre la LFI et l’exécution 2014 résulte de l’évolution spontanée des recettes fiscales, le coût de nouvelles mesures fiscales étant compensé par une moindre consommation budgétaire, et non en créances engagées, du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi – CICE – ; le CICE suit la même logique que l’impôt sur les sociétés : il est étalé sur trois ans.
Quant aux dépenses nettes de l’État, monsieur le président, elles ont bien baissé de 1,9 milliard d’euros de 2013 à 2014, hors dépenses exceptionnelles – 288,6 milliards d’euros en 2014 au lieu de 290,5 milliards en 2013.
M. le président Gilles Carrez. Tout dépend de ce que comprend le chiffre de 288,6 milliards !
Mme la rapporteure générale. J’y viens.
Le chiffre de 1,9 milliard est le résultat d’une économie de l’ordre de 1,7 milliard d’euros sur la charge de la dette et de 1,1 milliard sur d’autres postes du budget général, soit 2,8 milliards auxquels il faut retrancher 900 millions de hausse sur le compte d’affectation spéciale Pensions.
Par rapport à la LFI de 2014, la baisse est plus importante puisqu’elle atteint 6,3 milliards d’euros. Alors que nous avions adopté en LFI un budget de 294,9 milliards hors dépenses exceptionnelles, l’État a dépensé 288,6 milliards. Le chiffre de 6,3 milliards est le résultat d’une baisse de 3,4 milliards de la charge de la dette et de 1 milliard sur les dépenses des missions du budget général ainsi que de 1,9 milliard d’euros de mouvements réglementaires. Je crois donc pouvoir affirmer, sans provoquer de polémiques stériles, que nous nous trouvons bien face à une diminution des dépenses du budget de l’État.
Les dépenses totales de l’État – budget général, budgets annexes, comptes spéciaux et fonds de concours –, y compris les prélèvements sur recettes en faveur de l’Union européenne et des collectivités territoriales, s’élèvent en exécution à 571,2 milliards d’euros contre 586,1 milliards adoptés en LFI.
Une partie de ces dépenses – le Premier président de la Cour des comptes et le secrétaire d’État l’ont rappelé – est sous norme « zéro volume » et sous norme « zéro valeur ». Les dépenses sous norme « zéro volume » s’élèvent à 364,8 milliards contre 370,5 milliards adoptés en LFI. Les dépenses sous norme « zéro valeur » s’élèvent à 276,7 milliards contre 278,4 milliards adoptés en LFI. L’exécution des dépenses sous norme a donc été intégralement respectée.
Si l’addition de ces chiffres ne permet pas d’atteindre le total, c’est que certaines dépenses ne sont pas comprises dans les normes de valeur.
S’agissant de la dette de l’État, si, en 2014, la France avait emprunté au taux de 2013, comme le volume de la dette a augmenté, sa charge aurait augmenté de 3,9 milliards d’euros. Or, la charge a diminué de 1,7 milliard en raison de la baisse du prix de la dette.
Je souhaite, pour conclure, faire trois focus.
Je sais que Charles de Courson souhaite connaître l’exécution réelle des effectifs votés. Précisons tout d’abord qu’en comptabilité privée, les effectifs sont comptés en équivalents temps plein – ETP : un salarié embauché à temps plein le 1er février compte pour 1. Il n’en est pas de même pour l’État : une personne embauchée à temps plein le 1er juillet ne compte que pour 0,5. C’est la raison pour laquelle le focus que je vous présente sur les effectifs de l’État part de l’année 2012. Qu’observe-t-on ? Des effectifs stabilisés par rapport à 2013 et une augmentation de la sous-exécution des plafonds d’emplois de l’ordre de 50 000 agents, possiblement compensée par des emplois contractuels. L’engagement de la baisse du plafond d’emplois, qui a été tenu, n’a pas empêché l’actuelle majorité et le Gouvernement de respecter leurs priorités s’agissant de l’éducation, de la justice ou de la sécurité. Ces trois secteurs souffrent moins que les autres de la sous-exécution globale, dont les facteurs sont multiples : des administrations peuvent freiner l’embauche pour des raisons budgétaires comme rencontrer des difficultés à recruter. Nous transmettrons les chiffres budget par budget aux rapporteurs spéciaux.
Un autre focus porte sur le budget de la défense en raison de l’adoption, au cours de l’exercice 2014, de crédits supplémentaires.
La loi de finances initiale prévoyait 31,4 milliards d’euros de dépenses, répartis entre 29,6 milliards de crédits budgétaires et 1,8 milliard de recettes exceptionnelles composées de 1,5 milliard d’euros de PIA et de 250 millions de cessions immobilières.
Plusieurs mouvements sont intervenus en cours d’année : minoration des crédits budgétaires de 500 millions d’euros compensée à due concurrence par du PIA et ouverture de crédits supplémentaires à hauteur de 1 milliard d’euros en cours d’année.
Le troisième et dernier focus vise l’investissement public via les PIA 1 et 2, dont le montant atteint quelque 47 milliards d’euros – 35 milliards plus 12 milliards. Le nombre des dossiers sélectionnés depuis 2010 s’élève à 1 479 sur près de 5 000 déposés. Depuis la même date, 2 300 entreprises sont concernées par un financement PIA. Le montant des crédits engagés s’élève à 33,6 milliards, celui des crédits contractualisés à 28,1 milliards dont 10,4 milliards ont déjà été décaissés au 31 décembre 2014.
Une partie des 47 milliards est affectée aux universités, notamment sous la forme d’intérêts perçus sur les dotations non consommables des PIA, à hauteur de 3,4 % pour le PIA 1 et de 2,5 % pour le PIA 2. Sur les 10,4 milliards d’euros engagés au total, 3 milliards ont été décaissés en 2014, dont 2 milliards pour la défense.
M. le président Gilles Carrez. Je vous propose de discuter du projet de loi de règlement avant d’en venir au débat d’orientation.
M. le secrétaire d’État. Juste une précision : les emplois contractuels sont comptabilisés dans les effectifs de l’État.
Mme la rapporteure générale. Pas les emplois contractuels hors plafonds des opérateurs.
M. le président Gilles Carrez. Je remercie M. le secrétaire d’État et Mme la rapporteure générale pour la clarté de leur présentation.
À force de raffiner, la Cour des comptes perd le fil, disait M. le secrétaire d’État ; et puisque Mme la rapporteure générale s’est tournée vers moi à plusieurs reprises, je veux expliquer les motifs de nos légères divergences.
En premier lieu, Mme la rapporteure générale n’inclut pas les dépenses exceptionnelles dans le périmètre de 288,6 milliards d’euros soumis à la norme zéro valeur ; or, ces dépenses correspondent aux PIA : le PIA 1, pour plus de 30 milliards, le PIA 2, pour 12 milliards, et l’on commence à parler d’un PIA 3. Comme la Cour des comptes et certains collègues l’ont souligné – notamment lors de l’audition des responsables de l’ADEME –, les PIA engagent des crédits, même si je ne les assimilerai pas, comme le fait la Cour des comptes, à une débudgétisation. Les 47 milliards d’euros dont nous parlons, en tout état de cause, ne tombent pas du ciel : il a bien fallu les emprunter. Aussi, lorsque l’on fait, comme le sens des responsabilités l’exige, la somme de toutes les dépenses, on constate, en exécution, une légère augmentation par rapport à 2013. Si je reconnais volontiers que la dépense de l’État est mieux maîtrisée que par le passé, force est aussi de constater qu’elle a augmenté sur un an en exécution, nécessitant 10 milliards d’euros d’emprunts et générant une hausse de la dette de 71 milliards. Cette évolution est passée quelque peu inaperçue en raison de la diminution de 1,7 milliard de la charge de la dette ; mais ce matin, à la radio, plusieurs journalistes sont tombés de l’armoire, passez-moi l’expression, en découvrant la hausse du niveau de l’endettement. La chose est connue depuis des mois, a déclaré M. Sapin ; mais elle l’est tellement que nous n’y prêtons plus attention, comme nous devons pourtant continuer à le faire.
Je veux donc, monsieur le secrétaire d’État, vous poser deux ou trois questions précises, dont certaines relaient celles de Mme la rapporteure générale. La première concerne les recettes. En cette matière, on est passé d’un excès d’optimisme lors de la LFI à un excès de pessimisme lors de la seconde loi de finances rectificative – LFR –, la première n’ayant apporté aucun correctif. Le produit de l’impôt sur le revenu a ainsi été surévalué au début et sous-évalué à la fin. La Cour des comptes s’interroge, dans une note en bas de page – comme c’est l’usage lorsqu’elle veut éviter de froisser le Gouvernement –, sur d’éventuelles modifications de comportement des agents économiques. À cet égard, les administrations placées sous votre autorité ne devraient-elle pas revoir leurs modes de calcul pour améliorer la fiabilité des prévisions de recettes ? De fait, l’écart entre la LFI et l’exécution n’est pas mince puisqu’il atteint 10,7 milliards d’euros.
Seriez-vous d’accord pour ne comptabiliser, s’agissant des PIA, que les sommes effectivement décaissées, à savoir les dotations consommables et les intérêts versés au titre des dotations non consommables, s’ils ne sont déjà comptabilisés ? Cela me paraîtrait plus sain, dans la mesure où ces décaissements pèsent bien entendu sur les dépenses.
Un autre élément de l’exécution de 2014 m’inquiète. Les efforts consentis pendant des années pour réduire la dette de l’État à l’égard de la sécurité sociale ont conduit le premier à devenir créancier de la seconde à hauteur de près de 500 millions d’euros. Le mouvement s’est à nouveau inversé, si bien que l’État a désormais une dette de plus de 300 millions. Le retour à l’équilibre des comptes sur ce chapitre, monsieur le secrétaire d’État, fait-il partie de vos objectifs ? Il faut savoir que la sécurité sociale assume, pour le compte de l’État, des dépenses de guichets sociaux, telles l’allocation aux adultes handicapés, l’aide médicale de l’État et certaines allocations logement. Puisque ces dépenses excèdent les prévisions initiales, elles contribuent à creuser le déficit de l’État.
Ma dernière question porte sur la régulation budgétaire infra-annuelle : en ce domaine, avez-vous indiqué, les dépenses sont compatibles avec les crédits mis en réserve, lesquels, compte tenu du « gel » et du « surgel », se situent entre 8 et 9 milliards d’euros. Selon la Cour des comptes, le risque pourrait néanmoins atteindre 4,3 milliards hors recettes exceptionnelles – REX – pour la défense – lesquelles représentent 2 milliards –, recettes dont le Président de la République a promis qu’elles seraient remplacées, s’il y a lieu, par des crédits budgétaires. Les questions posées restent les mêmes que sous la précédente législature. Ne risque-t-on pas d’atteindre les limites de la régulation budgétaire infra-annuelle ? En 2014 comme en 2013, 4,3 milliards de crédits ont été annulés – et pas seulement au titre des gels prévus en début d’année, puisqu’une partie de ces sommes ont vocation à être dégelées. Reste que la régulation budgétaire conduit à diminuer l’ensemble des dépenses, y compris d’investissement.
Sur la masse salariale, les auditions ont souvent été éclairantes : même dans un secteur prioritaire comme la police et la gendarmerie, les plafonds d’emplois ne sont pas atteints. Mme la rapporteure générale a avancé plusieurs explications sur ce phénomène mais, plus généralement, on peut se demander si certaines administrations ne sont pas tentées, sous la pression des contrôleurs financiers, de différer l’attribution de certains postes, sachant qu’il est difficile de contenir l’évolution de la masse salariale à effectifs constants, ne serait-ce qu’en raison du glissement vieillesse technicité – GVT –, comme la Cour des comptes ne cesse de le répéter.
M. Dominique Lefebvre. Notre débat se résume à trois sujets simples : l’exactitude des chiffres qui nous sont présentés par le Gouvernement ; l’analyse du solde ; la manière dont celui-ci est construit.
J’ai rarement lu un rapport de la Cour des comptes aussi biaisé et à charge que celui de mai 2015 : j’ai d’ailleurs eu l’occasion de le dire au Premier président. Je veux donc rafraîchir la mémoire de nos collègues de l’opposition. S’ils ont entendu M. Sapin à la radio ce matin, j’ai pour ma part entendu François Fillon qui, spécialiste des déclarations impromptues et tempétueuses, a expliqué qu’une évolution des intérêts de la dette exposerait la France à un risque de défaut ; mais si la charge de la dette est aussi élevée, faut-il le rappeler, c’est parce que la dette elle-même s’est alourdie, au cours des deux quinquennats précédents, de 400 milliards d’abord et de 600 milliards ensuite.
Sur l’évolution de la dépense publique, il existe un chiffre incontestable, que M. le secrétaire d’État pourra confirmer : cette dernière a progressé de 0,9 % en 2014, contre 3,6 % en moyenne annuelle entre 2002 et 2012. On peut estimer, comme la Cour des comptes et l’opposition, que l’effort est insuffisant ; reste que la progression est quatre fois moindre qu’auparavant.
En 2002, nous avions laissé un déficit structurel à 4,2 % du PIB alors que l’actuelle opposition l’avait laissé, en 2012, à 4,4 % ; en deux ans et demi, c’est-à-dire en seulement un demi-quinquennat, nous l’avons ramené à 2,1 %.
Pour en revenir au projet de loi de règlement, le débat sur la réalité du solde n’a guère de sens. En fait il convient d’analyser non seulement le solde global – moins 85,5 milliards d’euros, somme qui creuse d’autant la dette –, mais aussi le solde hors dotations aux PIA, qui accuse quant à lui un déficit de 73 milliards, en recul par rapport à 2013. La Cour des comptes estime qu’il faudrait élargir le périmètre de la norme, ce qui, en bon français, revient à suggérer de réduire davantage encore le rythme d’évolution de la dépense publique, voire de la faire baisser. Si l’on peut préconiser de financer les investissements d’avenir via des économies sur les dépenses courantes, on peut aussi considérer que, dans le contexte actuel, il n’est pas opportun d’exercer une nouvelle pression sur les crédits ministériels. En cette matière, chacun a aimé le projet de loi de finances pour 2015 : chacun aimera aussi, on peut le gager, le projet de loi de finances pour 2016, la diminution des dépenses publiques étant une ascèse à laquelle nous continuerons à nous astreindre.
Personne ne nie que la limitation de la charge de la dette contribue à l’amélioration du solde. N’oublions pas, cependant, que nous pouvons tous être un jour en situation d’assumer la conduite des affaires. Les efforts demandés à nos concitoyens ont pu passer par la hausse des prélèvements obligatoires mais aussi par la baisse du niveau des dépenses, qui a des effets visibles sur le terrain : tous les élus le savent. Je ne sais pas comment les choses se passent au Perreux-sur-Marne, monsieur le président, mais à Cergy-Pontoise, cela fait plusieurs années que la masse salariale progresse de 1 % par an : une telle évolution implique des restructurations de postes budgétaires, des suppressions d’emplois précaires ou de postes en vacation. Minorer les efforts demandés et les résultats obtenus serait donc une faute politique : je l’ai dit à M. Migaud, et je le redis aujourd’hui.
Si le projet de loi de règlement va donc dans le bon sens, ses effets restent fragiles et des risques demeurent : cela nous met dans l’obligation absolue de respecter la trajectoire dans le projet de loi de finances pour 2016. Il nous faudra conjuguer des baisses d’impôts, sur les ménages comme sur les entreprises dans le cadre du pacte de responsabilité, et le maintien du cap sur le solde : cela passe par des efforts, forcément douloureux, de maîtrise de la dépense publique. C’est la constance de ces décisions qui donnera tout son sens à une trajectoire qui ne relève ni d’une politique d’austérité, ni du laisser-aller.
Mme Marie-Christine Dalloz. Entre 2013 et 2014 le déficit s’est incontestablement dégradé, à hauteur de 10 milliards d’euros. D’après M. le secrétaire d’État, qui invoque la transparence, cette dégradation tient en partie à l’impact du PIA. Peut-on dès lors s’accorder sur le fait qu’elle atteint, hors PIA, 5,5 milliards d’euros ?
Le président Carrez a pointé des ajustements excessifs en fin d’année. Par le fait, nous avions demandé au Gouvernement un collectif budgétaire dès l’automne : ce texte nous a finalement été présenté en dernière minute, vers la mi-décembre. Ce vote tardif nous laissait imaginer que le projet de loi de finances rectificative s’apparentait peu ou prou à une loi de règlement ; mais il n’en est rien, loin s’en faut, car les ajustements de fin d’année, justement, ont permis d’afficher un solde moins dégradé que prévu en décembre.
Quant aux recettes issues de la lutte contre la fraude fiscale, je me permets de citer le rapport de la Cour des comptes : « Les premiers efforts accomplis […] doivent être amplifiés et l’analyse des écarts de 2013 poursuivie afin d’apprécier dans quelle mesure l’alourdissement prolongé de la fiscalité a pu, dans un contexte de croissance faible, modifier le comportement des agents économiques. » Quel jugement portez-vous sur cette analyse ? Vous avez tiré les leçons de votre coupable optimisme sur les recettes de 2013 ; mais il vous faut aussi les tirer, en 2014, sur l’élasticité des recettes par rapport à la croissance du PIB.
La réserve de précaution serait-elle par ailleurs devenue un outil de pilotage ? C’est le sentiment que l’on a, cependant que le montant des annulations de crédits, hors charge de la dette, s’est établi en 2014 – comme en 2013 – à 4,333 milliards d’euros.
Je crains par ailleurs que certaines entreprises ne sollicitent le CICE au titre de deux années, 2014 et 2015. Comment mesurez-vous l’impact budgétaire d’un recours au dispositif enfin conforme aux attentes, voire plus soutenu compte tenu des retards accumulés ?
Sur l’objectif de limiter la progression de la masse salariale à 1 %, je prendrai un chiffre de nature à vous irriter, monsieur le secrétaire d’État – et je vous prie par avance de m’en excuser. Entre 2008 et 2012, l’économie annuelle moyenne sur la masse salariale s’élevait à 841 millions d’euros, contre 228 millions aujourd’hui.
M. Charles de Courson. L’analyse du projet de loi de règlement comme des comptes nationaux nous conduit à plusieurs constats. En premier lieu, les dépenses publiques – qui incluent les crédits d’impôts – continuent de croître deux fois plus vite que le PIB en valeur.
À en croire le Gouvernement, l’ensemble des dépenses publiques ont augmenté de 0,9 % en 2013, ce qui est vrai hors crédits d’impôt : si l’on inclut ces derniers, la progression s’établit en réalité à 1,6 %, contre une croissance du PIB de 0,8 % en valeur. Autrement dit les dépenses publiques croissent deux fois plus vite que le PIB. L’an dernier, le différentiel était de 0,7 % : 1,8 % de progression des dépenses contre 1,1 % de croissance. Bref, il ne faut pas s’étonner que le poids des dépenses publiques continue d’augmenter : hors crédits d’impôt, celles-ci passent de 56,2 % du PIB en 2013 à 56,3 % en 2014, et de 57 % à 57,5 % si l’on inclut les crédits d’impôt.
Je ne suis pas sectaire, M. le secrétaire d’État le sait. Des efforts ont été consentis, mais ils demeurent notoirement insuffisants.
Sur les prélèvements obligatoires aussi, les chiffres parlent d’eux-mêmes. Hors crédits d’impôt, ils passent de 44,7 % à 44,9 % du PIB – soit à peu près 4 milliards d’euros supplémentaires de pression fiscale –, et de 45,5 % à 46,1 % en incluant les crédits d’impôt. Il est donc faux de dire que les impôts baissent : je ne cesse de le répéter depuis vingt-deux ans que je siège dans cette commission. L’actuel Gouvernement ne fait que freiner l’augmentation de la pression fiscale, sans inverser la courbe.
Pour couronner le tout, les déficits publics sont ramenés de 4,1 % en 2013 à 4 % en 2014, soit une diminution de 0,1 % seulement, qui au demeurant tient entièrement à la stabilisation des comptes de la sécurité sociale et, surtout, à la réduction du déficit des collectivités locales de 8,5 milliards en 2013 à 4,5 milliards en 2014 – en d’autres termes de moins 0,4 % du PIB à moins 0,2 %. Le gain de 0,2 point, obtenu par conséquent grâce aux administrations publiques locales, s’explique d’ailleurs par la chute des investissements, elle-même liée au cycle électoral et, dans une moindre mesure, à la réduction des aides.
Pour ce qui est de l’État et de ses administrations publiques centrales – APUC –, le déficit augmente, passant de 68,7 milliards d’euros en 2013 à 71,8 milliards en 2014, soit une progression de 3,1 milliards. Globalement, pour l’ensemble des dépenses, le gain n’est guère que de 1,6 milliard, sachant que le déficit, pour la sécurité sociale, est réduit de 600 millions seulement ; d’où une réduction des déficits limitée à 0,1 %. C’est dire la gravité de la situation !
Je remercie notre rapporteure générale d’avoir calculé l’évolution des effectifs de l’État et de ses opérateurs, comme nous le demandions depuis des années. La baisse était de 17 200 en 2013 et de 5 000 en 2014 – lorsque la droite était aux affaires, le nombre de postes supprimés par an était de 30 000. Monsieur le secrétaire d’État, si d’un côté je vous félicite de ne pas pourvoir les postes qui sont ouverts et de vous être converti à la baisse, de l’autre je ne peux que regretter que vous ne soyez pas assez dur avec vos collègues. Allez au-delà : une réduction de 5 000 postes, ce n’est pas suffisant compte tenu de l’état de nos finances publiques – même si vous faites croire à nos collègues de la majorité que vous stabilisez les effectifs. Fermez les vannes !
Enfin, je m’interroge sur l’écart croissant qui existe entre le déficit effectif de nos finances publiques et le déficit structurel. Sachant qu’en 2014 le déficit effectif était de 4 % et le déficit structurel de 2,1 %, l’écart est de 1,9 %, contre 0,7 % en 2011, 1,2 % en 2012, et 1,5 % en 2013. Si la théorie des cycles économiques était encore valable, il devrait y avoir une inversion. Or, ce n’est pas du tout ce que l’on constate. Je le répète, pour la quinzième fois au moins ici…
Ces concepts sont devenus totalement inopérationnels. Pire, les gouvernements successifs, l’actuel comme les précédents, ne cessent de faire croire à ceux qui n’y comprennent rien – il faut reconnaître que la distinction entre le déficit structurel et le déficit conjoncturel n’est pas évidente – que la croissance potentielle sera de l’ordre de 2 %, voire 2,5 %.
Mes chers collègues, je vous recommande de lire l’excellent ouvrage qui vient de paraître sur la croissance zéro. Vous verrez que son auteur dynamite toutes ces croyances qui ont conduit le pays à lui faire croire qu’il était plus riche qu’il ne l’est en réalité.
M. Alain Fauré. Monsieur de Courson, quel est ce micro accroché à votre boutonnière qui vous rend si dithyrambique ce matin ?
M. Charles de Courson. Une chaîne de télévision a demandé à me suivre aujourd’hui et a obtenu l’autorisation de venir en commission.
Mme Eva Sas. Comme Dominique Lefebvre, je considère qu’il n’est pas judicieux de minorer l’effort national consenti en matière de dépenses publiques, s’agissant notamment du traitement du PIA qui est au cœur de nos débats.
Dès 2010, date de son lancement, le programme d’investissements d’avenir a été traité séparément. Dans la loi de finances pour 2010, il était question de la stabilisation des dépenses de l’État en volume hors plan de relance. Comme l’a dit très judicieusement M. Eckert, les décaissements sont faits sur une année et dépensés sur plusieurs années. On ne peut donc inclure le PIA dans la norme de dépenses ou le traiter de la même façon que les dépenses sous norme. Or, je crains, monsieur de Courson, que ce ne soit ce que vous venez de faire en agrégeant toutes les dépenses publiques. Il faut séparer les investissements d’avenir, comme l’ont souhaité ceux qui ont lancé ce programme en 2010.
Cela étant, comme le souligne la Cour des comptes, des questions se posent s’agissant de la débudgétisation de certaines dépenses – la rénovation thermique, la défense – et de leur transfert vers le PIA, et nous devons engager un débat sur ce point. Mais il ne faut pas jeter le bébé avec l’eau du bain : ce n’est pas en incluant totalement les investissements d’avenir dans les dépenses sous norme que nous aurons une bonne gestion et une vision juste de l’évolution des dépenses publiques car il s’agit de dépenses pluriannuelles.
Par ailleurs, je suis inquiète quand j’entends M. le secrétaire d’État dire que l’effort en faveur des contrats aidés que nous soutenons totalement sera compensé par des économies sur d’autres missions. Comme vous le savez, le budget de l’écologie a déjà beaucoup souffert au cours des années précédentes puisque ses crédits ont été redéployés vers d’autres ministères, notamment vers celui de la Défense. Les responsables de l’ADEME que nous avons auditionnés nous ont clairement indiqué que les projets pour l’écologie en matière d’investissements d’avenir ne manquaient pas – cet argument avait été avancé pour justifier le redéploiement des crédits. Il n’y a donc plus matière à redéployer des crédits vers d’autres missions. Pouvez-vous rassurer les écologistes qui s’inquiètent de l’évolution des budgets de la mission Écologie ?
M. le secrétaire d’État. Tout d’abord, je vous prie de bien vouloir m’excuser si je ne réponds pas à chacune de vos questions qui sont toutes pertinentes, intéressantes et légitimes.
Madame Dalloz, vous avez dit que le déficit aurait explosé, hors PIA. Je ne sais pas comment vous lisez les tableaux. En 2013, le solde budgétaire était de 74,9 milliards. En 2014, il est de 85,6 milliards, dont 12 milliards au titre du PIA. Si on exclut le PIA – la question vient d’être évoquée par Mme Sas – c’est-à-dire si l’on retranche 12 milliards de 85,6 milliards, il reste 73,6 milliards. En 2014, le déficit a donc baissé de 1,3 milliard par rapport à 2013.
Oui, la dette de l’État à l’égard de la sécurité sociale a légèrement augmenté, mais moins que l’année dernière. Certes, ce n’est pas totalement rassurant, mais les montants restent relativement faibles. 300 millions, c’est beaucoup et c’est néanmoins peu comparé au volume des dépenses de la sécurité sociale et de l’État.
Cela dit, vous avez raison de soulever cette question, qui pose le problème des compensations nécessaires entre les budgets de l’État et de la sécurité sociale. Ce sujet est un souci permanent de la commission des Affaires sociales – que je fréquente peut-être un peu moins que la vôtre – et de la ministre des Affaires sociales et de la santé. Ces questions sont complexes parce que certaines recettes qui ont été transférées ont parfois, deux ou trois ans plus tard, un dynamisme bien différent que ce qui avait été initialement prévu.
Vous avez évoqué, à juste titre, le transfert d’une partie des aides publiques au logement. Pour compenser les exonérations de charges, nous avons en effet repris dans le budget de l’État une partie des dépenses supportées par la sécurité sociale. Il n’est pas exclu d’ailleurs que nous poursuivions ce type de mouvement, car compte tenu des nouveaux allégements de charges prévus, nous devrons à nouveau compenser certaines baisses de ressources de la sécurité sociale. Peut-être serait-il plus simple que l’ensemble des dépenses concernant par exemple l’aide personnalisée au logement soient incluses dans un seul budget, celui de l’État – c’est le mouvement qui est en train de se confirmer, pour ne pas dire de s’achever – plutôt que de les laisser à cheval sur deux budgets, avec les difficultés législatives que cela peut entraîner car lorsque l’on veut procéder à des modifications, il faut toucher les deux budgets. Mais cette question technique est notre affaire…
La régulation budgétaire est-elle utile ? En fait-on trop ou pas assez ? Certains d’entre vous ont évoqué le poids que Bercy peut avoir dans la consommation des crédits. Je pense que c’est nécessaire. Certains disent haut et fort, sur tous les tons et un peu partout, qu’il faut réduire la dépense. Mais ce sont les mêmes qui demandent une augmentation du nombre des militaires et des policiers parce que la situation est dangereuse. D’autres encore souhaitent qu’il y ait davantage d’enseignants parce que la jeunesse est l’avenir de notre pays. Une parenthèse pour aborder la question des effectifs : vous avez tous certainement vu les augmentations prévues dans la loi de programmation militaire ; ceux qui stigmatisent l’accroissement de la masse salariale en cours ou à venir ne doivent pas oublier que les militaires sont aussi payés par le budget du ministère de la Défense.
On me dit que le budget de la défense est prioritaire, qu’il faut le sanctuariser. Mais, l’écologie est aussi la priorité des priorités, à l’aube de la COP 21. De même, la culture, souffrirait de ne pas être sanctuarisée, car c’est un secteur qui est encore plus important en période de crise qu’en temps ordinaire. La santé est, elle aussi, prioritaire. Il existe ainsi un médicament, certes très cher – pour la seule année 2014, il a représenté un coût supplémentaire de 650 millions – mais extrêmement efficace puisqu’il permet de guérir 100 000 personnes de l’hépatite C, maladie grave voire mortelle. Je vous appelle donc à faire preuve d’un peu de mesure dans vos analyses puisque vous avez tous des priorités – parfois différentes, et c’est légitime.
La régulation budgétaire infra-annuelle est un outil essentiel pour pouvoir contraindre un certain nombre de ministères. Vous dites que des emplois ne sont pas pourvus probablement par crainte ou décision des ministères. Ce n’est pas le cas : ce ne sont pas les ministères qui freinent les recrutements. Bien au contraire, quand ils ont leur schéma d’emplois, ils se précipitent pour pourvoir les emplois.
Quant à la masse salariale, elle progresse depuis des années, quels que soient les effectifs. Un rapport, rédigé il y a plusieurs années par M. François Cornut-Gentille et moi-même, montrait l’impact de la révision générale des politiques publiques – RGPP – sur la masse salariale – malgré nos différences, notre travail en commun a été reconnu comme étant plutôt de qualité. Le Gouvernement a gelé le point d’indice, et a quasiment supprimé, en tout cas réduit au maximum, ce que l’on appelle les mesures catégorielles. Bien sûr, ce qui résulte d’accords antérieurs n’est pas remis en cause, mais il n’y a pas de nouvelles mesures catégorielles, à l’exception de la revalorisation de l’indemnité journalière d’absence temporaire – IJAT – qui concerne les services de police, actuellement soumis à des contraintes assez particulières. J’ajoute qu’une négociation salariale a lieu dans l’ensemble de la fonction publique. Marylise Lebranchu a fait un certain nombre de propositions qui sont aujourd’hui sur la table. Bien entendu, il faudra en attendre l’issue.
Bien sûr, nos services tirent les enseignements du comportement des contribuables. Ils le font beaucoup sur la TVA – son taux a un impact très important sur nos recettes – et sur l’impôt sur le revenu. Et chaque année, nous vous transmettons des données sur le départ et le retour de contribuables fiscalement domiciliés à l’étranger. Je pense que, comme nous, vous n’avez pas noté d’évolution significative.
Vous me demandez si les prévisions de recettes sont surestimées ou non. Nous avons pris le parti d’être assez prudents en la matière, ce qui n’était pas nécessairement le cas auparavant. Peut-être sommes-nous allés un peu trop loin au mois d’août dernier. Mais il est toujours facile de porter un regard a posteriori. Souvenez-vous : au mois d’août dernier, le taux d’inflation était voisin de zéro et la croissance était très faible. Certains avis très autorisés, la Cour des comptes par exemple, estimaient que la prévision de croissance du Gouvernement de 1 % était très optimiste. Aujourd’hui, ce sont les mêmes qui nous disent que nous devrions les revoir à la hausse – c’est facile de le dire après. Pour faire taire les rumeurs qui commencent à circuler ici ou là, sachez que nous restons sur une base prudente de 1 % car, au vu des premiers éléments dont nous disposons, nous ne voyons pas apparaître de recettes supplémentaires par rapport à nos prévisions. Si la croissance semble se confirmer à un niveau un peu supérieur au 1 % comme initialement prévu, l’écart par rapport à la trajectoire de recettes que nous avons transmise au moment du programme de stabilité n’est pas significatif. Les rentrées de TVA sont très légèrement supérieures – de l’ordre de quelques centaines de millions, ce qui n’est rien comparé à 150 milliards. Quant aux recettes de l’impôt sur le revenu, elles ne sont bien évidemment pas encore connues puisque nous sortons tout juste de la période déclarative. Nous n’avons donc pas de « cagnotte », nous n’attendons pas des recettes supplémentaires.
Madame Sas, vous vous inquiétez des économies qui devront être faites pour couvrir un certain nombre de dépenses supplémentaires. Je veux, là aussi, faire taire cette rumeur selon laquelle pour couvrir des dépenses supplémentaires le Gouvernement procède à chaque fois à une diminution proportionnelle des autres budgets. Non, nous ne nous livrons pas systématiquement à des réductions de dépenses proportionnelles : nous procédons à une analyse précise, budget par budget, nature de dépense par nature de dépense, de ce qui peut être supporté et de ce qui peut être mis à contribution. Par exemple, il est évident que nous ne prenons pas en compte les dépenses de masse salariale : elles sont généralement calculées au plus juste pour parvenir au bon niveau en fin d’année. Imaginez la claque que prendrait le budget de l’éducation nationale si l’on procédait à des restrictions strictement proportionnelles ! Nous regardons quelles sont les dépenses pilotables, quelles sont celles qui le sont moins, celles qui ont une progression naturelle. Il est bien évident qu’en période de crise les prestations en faveur des plus démunis, les aides au logement, etc. ont tendance à augmenter. Nous en tenons compte lorsque nous faisons la répartition, en cours d’année, de l’effort supplémentaire que doivent supporter les budgets.
Vous dites que le budget de l’écologie a été le principal contributeur de la réduction des dépenses publiques. Je viens de rencontrer successivement dix-sept ministres : tous ont commencé la discussion en me disant que c’était leur budget qui avait « trinqué » le plus ces dernières années et que la situation devenait insupportable. Match nul, balle au centre…
M. de Courson nous parle de croissance spontanée des prélèvements plus rapide que le PIB. Deux des orateurs de poids de cette assemblée qui ne sont pas les plus proches de la majorité actuelle ont néanmoins reconnu que la réduction de la dépense, en tout cas le ralentissement considérable de sa progression, est inédit depuis plusieurs années. Il n’y a donc pas de ce côté de mouvement considérable à attendre. Soyons clairs : la dépense publique, ce n’est pas de l’argent qui va dans un puits sans fond, des billets que l’on brûle. Ce sont parfois des prestations, parfois des salaires qui eux-mêmes reviennent dans l’économie. Vous savez tous que la consommation intérieure en France est, peut-être plus que dans d’autres pays, un moteur de la croissance et de l’activité. Il est facile de dire qu’il suffit de réduire la dépense publique, mais une réduction trop brutale de la dépense publique peut avoir un effet récessif.
Notre politique est plutôt équilibrée. Elle consiste à bien maîtriser la dépense publique sans pour autant aboutir à des effets récessifs trop importants. Quand je dis que 40 milliards sont consacrés au logement en France sous forme de prestations, d’aide à la pierre ou de crédit d’impôt, on me répond qu’il faudrait faire davantage. Je ne peux pas réduire la dépense publique sans courir le risque d’un effet récessif sur certains secteurs.
Mme Christine Pires Beaune. Je tiens à remercier Mme la rapporteure générale et M. le secrétaire d’État pour la clarté de leur présentation. Je crois que l’effort de pédagogie de Valérie Rabault est reconnu par tous ici.
Hier encore, au Comité des finances locales – CFL –, certains dénonçaient l’attitude de l’État qui baisse les dotations aux collectivités locales, ce qui est vrai, alors qu’il ne réduit ses dépenses qu’en tendance. Or vos présentations de ce matin montrent qu’il s’agit bien d’une baisse de la dépense publique hors PIA, et je m’en réjouis car la dépense publique est effectivement élevée en France.
Les retraitements comptables sont habituels. Le retraitement comptable du PIA ne diffère pas de celui des années précédentes. Il existe un principe comptable, celui de la permanence des méthodes, qui permet la comparaison d’un exercice à l’autre. Il faudrait s’y tenir.
L’objectif du PIA est bien de favoriser l’innovation transversale, c’est-à-dire toute l’innovation, quel que soit le champ où elle s’exerce. Si j’insiste sur ce point, c’est pour dire que le PIA est une bonne dépense, qui a en outre un important effet de levier.
Les contentieux communautaires dont vous nous aviez parlé l’année dernière ont-ils des conséquences sur le budget de 2014 ? Peut-être est-ce le cas de celui concernant les organismes de placement collectif en valeurs mobilières – OPCVM.
M. Olivier Carré. Nul besoin loi d’une loi de finances rectificative, dites-vous. Je rappelle que la loi dite « Macron » comporte un certain nombre de mesures fiscales, dont certaines se traduisent d’ailleurs par une hausse marginale de recettes. Je m’en étais étonné au regard de la doctrine, partagée par les deux majorités successives, sur le nécessaire recentrage de l’ensemble des discussions relatives à toutes les mesures fiscales au sein d’une loi de finances, rectificative ou non. Faut-il voir dans ces entorses une manœuvre habile ou une différence de point de vue entre les étages de Bercy ?
Regardons les dépenses de personnel. Entre 2009 et 2011, elles sont passées de 119,2 milliards d’euros à 117,7 milliards d’euros, sous l’effet de la mesure de non-remplacement d’un départ à la retraite sur deux. En exécution budgétaire, ces dépenses ont augmenté de façon sensible en 2012, puis d’environ 1 % par an au cours des années suivantes. Je vous l’accorde, monsieur le secrétaire d’État, il est particulièrement difficile de résister – comme vous le faites, a priori – aux pressions de ministères qui réclament tous un renforcement de leurs effectifs. Tout en soulignant vos efforts, je tenais à rappeler que la tendance s’est inversée d’une législature à l’autre.
En ce qui concerne les recettes, je veux bien qu’elles soient parfaitement conformes aux prévisions mais, dans l’exécution des soldes, on constate que les chiffres observés jusqu’en avril ont été annonciateurs de ceux de l’année entière. L’an dernier, vous nous aviez déjà expliqué que les situations mensuelles du budget de l’État ne permettaient pas de prédire les évolutions annuelles, alors que les écarts observés au début de l’année s’étaient retrouvés en fin d’exercice. En l’occurrence, nous remarquons un léger recul des perceptions de TVA nettes, sachant qu’il y a des transferts. Seules les recettes de l’impôt sur le revenu augmentent. Pour le reste, nous pourrions avoir à nous poser des questions sur les recettes à un moment donné de l’année. Cela étant, mes chers collègues, je reconnais qu’exécuter un budget par temps d’inflation zéro et de croissance faible est un exercice redoutable pour ceux qui ont cette charge.
Pour terminer, j’aimerais avoir des éclaircissements sur le PIA. Pour atteindre le montant de 302,8 milliards d’euros, il est prévu de faire 11,123 milliards d’euros de dépenses d’investissement. Or, dans l’argumentaire et dans le document budgétaire que vous nous avez remis sur le projet de loi de règlement, il est indiqué que 9,2 milliards d’euros ont été décaissés pour les dépenses d’investissement hors PIA. Est-ce que cela signifie, comme je le suppose, que l’effet PIA est de l’ordre de 2 milliards d’euros ?
Cette analyse est compatible avec la manière de traiter le PIA, qui n’est pas simple : ce n’est même pas une comptabilité d’engagement puisque se rajoutent des dépenses non consommables et des intérêts. Nous avons quasiment trois ou quatre types de dépenses sur le plan comptable et sur le plan de l’impact en termes de dette.
Pour ma part, je vois 2 milliards d’euros – et non pas 11 milliards d’euros – de dépenses d’investissement pour le PIA. Cette différence correspond à l’évolution d’autres dépenses. Mon propos n’est pas de dénoncer une gabegie généralisée car je sais que le budget est difficile à tenir dans les circonstances actuelles. En revanche, j’aimerais avoir une explication technique.
Par la magie des chiffres, 11 milliards d’euros se baladent : en valeur absolue, on voit à peu près le même montant partout, sauf qu’il ne correspond pas toujours à la même chose. Même en me plaçant dans votre logique – un solde général d’exécution qui est passé de -74 milliards d’euros à -85 milliards d’euros dont il faut retrancher 11 milliards d’euros de dépenses exceptionnelles – je ne m’y retrouve pas.
M. Romain Colas. Monsieur le secrétaire d’État, vous avez fait preuve d’une grande mansuétude à l’égard de l’opposition lorsque vous avez répondu aux questions concernant le ralentissement du rythme des économies liées aux dépenses de personnel. Que ce soit dans l’hémicycle, en commission ou dans les médias, nos collègues de l’opposition passent leur vie à réclamer des postes dans la police, la gendarmerie, l’administration pénitentiaire ou la justice. D’ailleurs, il s’agit bien souvent de réparer ce qu’ils ont cassé avec la fameuse RGPP, qui n’avait rien d’une révision générale des politiques publiques mais qui représentait plutôt une régression généralisée de la puissance publique, due à des frappes aveugles qui ont déstructuré bien des services publics, comme nous l’avons particulièrement constaté dans nos territoires.
Le Gouvernement et sa majorité ont des priorités qu’ils assument tout en concourant, comme l’a excellemment précisé le président Carrez au début de son intervention, à une meilleure maîtrise de la dépense publique. Quant à nos collègues de l’opposition, ils ne réclament des suppressions de poste que dans l’éducation nationale. Contrairement à nous, ils pensent qu’avec quarante ou quarante-cinq enfants par classe, on augmentera le niveau scolaire dans ce pays.
Quitte à sortir un peu du cadre, j’aimerais vous interroger, monsieur le secrétaire d’État, sur une information publiée par un quotidien du matin : la hausse de 50 milliards d’euros de la dette publique au cours du premier trimestre de cette année. Cette évolution est logique puisque l’Agence France Trésor – AFT – emprunte plutôt en début d’exercice, notamment pour profiter de la faiblesse actuelle des taux d’intérêt. Pourriez-vous nous donner des précisions sur la levée des emprunts prévue pour l’année 2015 ?
Mme Véronique Louwagie. Monsieur le secrétaire d’État, le Gouvernement s’est réjoui des résultats de la lutte contre la fraude, qui ont été présentés il y a quelques jours, et vous nous annoncez aujourd’hui que le montant des redressements a atteint 19,3 milliards d’euros en 2014 contre 18 milliards d’euros l’année précédente. Mais qu’en est-il des montants effectivement encaissés ? Au vu des documents, ils sont pratiquement équivalents d’une année sur l’autre : 10,1 milliards d’euros en 2013, et 10,4 milliards d’euros en 2014. Finalement, ces chiffres en demi-teinte contrastent avec les propos que vous avez tenus sur les résultats de la lutte contre la fraude.
Nous pouvons nous réjouir des progrès de la lutte contre la fraude, qui résultent sans doute de contrôles supplémentaires, et de coopération et de partenariats renforcés entre les ministères, avec les territoires ou à l’échelle internationale. Nous pouvons aussi penser que ces chiffres traduisent une augmentation importante des fraudes liées aux contrefaçons de produits ou de documents, à la TVA sur les ventes en ligne, ou à l’emploi de salariés détachés à l’étranger. Quoi qu’il en soit, le bilan apparaît plus en demi-teinte que ne laissaient espérer les propos que vous avez pu tenir.
En second lieu, je voudrais vous interroger sur la dette publique qui, selon l’INSEE, a augmenté de 51,6 milliards d’euros au premier trimestre 2015. Elle atteint 97,5 % du PIB alors que le ratio d’endettement a été fixé à 96,3 % pour 2015. L’an dernier, l’objectif était de contenir la dette à 95 % du PIB ; elle a finalement atteint 95,6 %. À ce dérapage trimestriel, il faut ajouter l’absence de précisions sur le financement des nouvelles mesures, relevée par mes collègues. Vous indiquez qu’elles sont financées grâce aux marges dégagées et aux économies effectuées dans certains ministères, sans plus de détail. Tous ces éléments plaident pour la présentation d’un projet de loi de finances rectificative.
M. Michel Ménard. Monsieur le secrétaire d’État, pourriez-vous nous préciser quel montant des recettes découle de la lutte contre la fraude fiscale ? Comment a évolué ce montant par rapport aux trois années précédentes ? Quelles sont vos prévisions pour 2015 dans ce domaine ? Y a-t-il des progrès envisagés, espérés ?
M. le secrétaire d’État. Je remercie M. Colas et Mme Louwagie de m’avoir interrogé sur le niveau de la dette publique. Au concours des lanceurs d’alerte, nous commençons à être assez forts dans ce pays. Dans des articles et des interventions, on nous parle d’une explosion de la dette. C’est n’importe quoi !
L’INSEE a donné l’état de la dette à fin mars, et nous sommes maintenant en juillet. Traditionnellement, une part importante de dette est souscrite dans les premiers mois de l’année. C’est encore plus vrai cette année car l’AFT – dont il faut saluer le travail – a profité des taux particulièrement bas constatés au premier trimestre. Résultat : à la fin mars, c’est-à-dire en trois mois, nous avons réalisé plus de la moitié des émissions programmées sur toute l’année 2015.
Pourquoi les chiffres de l’INSEE ont-ils déclenché cet effroi que les uns et les autres relaient à l’envi ? La vigilance n’est jamais condamnable mais je vais vous fournir quelques chiffres qui montrent que nous-mêmes nous n’en manquons pas. Les taux d’intérêt que nous avons retenus pour définir la trajectoire de nos finances publiques sont les suivants : 1,20 % pour 2015 ; 2,10 % pour 2016 ; 3 % pour 2017 ; 3,5 % pour 2018. Nul ne peut contester que nos prévisions sont très prudentes : la France bénéficie actuellement de taux largement inférieurs à celui de 1,20 % que nous avons prévu pour cette année. D’aucuns estiment d’ailleurs que nous sommes excessivement prudents, mais il peut se passer des choses, y compris en Grèce.
Ma revue de presse du jour m’incite à penser que nous jouons à nous faire peur. Sans prétendre que nous sommes à l’abri de difficultés, j’affirme que, sauf événement vraiment exceptionnel, nous maintenons notre objectif d’endettement à 96,3 % du PIB pour 2015.
Monsieur Carré, vous nous dites que les lois de finances devraient avoir le monopole des mesures fiscales. Si vous adoptiez une motion en ce sens, j’en serais le premier satisfait ! Pour des tas de raisons, je souhaite que nous ayons la plupart du temps le monopole des dispositions fiscales. J’observe, monsieur Carré, que ce sont plutôt des allégements de fiscalité qui sont inclus dans les textes, à mon corps défendant.
M. le président Gilles Carrez. La baisse de la TVA sur la restauration a été adoptée dans le cadre d’un texte sur le tourisme !
M. le secrétaire d’État. Bien sûr, monsieur le président, c’est pourquoi je précise que c’est à mon corps défendant ! S’agissant des alourdissements de fiscalité – il y en a vraiment très peu – nous verrons ce que le Conseil constitutionnel, saisi de textes qui en comportent, en dira.
Un projet de loi de finances rectificative est-il nécessaire ? Le débat revient tous les ans, et je ne partage pas le point de vue de M. Carré et de Mme Louwagie. On ne peut pas imaginer que les choses restent figées du 1er janvier d’une année jusqu’au vote la loi de finances suivante. Des mesures nouvelles sont prises en cours d’année et, si ce n’était pas le cas, on reprocherait au Gouvernement son immobilisme et son manque de réactivité. Madame Louwagie, vous déplorez un manque d’information. Or, tous les décrets d’avance vous sont communiqués, qu’il s’agisse de dépenses nouvelles ou d’économies supplémentaires. C’est d’ailleurs une obligation qui s’impose à nous.
Mme Pires Beaune nous interroge sur les contentieux communautaires. Pour ceux qui ont trait aux OPCVM, nous avons dépensé les 800 millions d’euros prévus. Sur le précompte mobilier, nous n’avons pas constaté de dépenses, contrairement à ce que nous avions prévu. Quant au contentieux relatif aux communications électroniques, nous l’avons gagné : nous n’aurons donc rien à payer. À ceux qui auraient la mémoire courte, je rappelle que le dossier agricole est l’un des plus lourds en la matière : il a été liquidé pour un milliard d’euros, dont le paiement sera échelonné sur trois années budgétaires, en accord avec la Commission européenne.
M. le président Gilles Carrez. Il y a aussi les prélèvements sociaux, au titre des revenus du patrimoine des non-résidents.
M. le secrétaire d’État. Nous sommes en train de travailler sur ce sujet, pour tirer les conséquences de l’arrêt de Ruyter rendu le 26 février dernier par la Cour de justice de l’Union européenne. Nous reviendrons vers vous pour vous préciser les modalités d’éventuels remboursements, et aussi pour vous soumettre la manière dont nous entendons régler la question pour l’avenir.
Enfin, en ce qui concerne la fraude, Mme Louwagie considère qu’il faut s’attacher davantage au taux de recouvrement qu’aux notifications. Mais ce taux est très difficile à calculer car une procédure de recouvrement peut s’étaler sur plusieurs années. N’oublions pas que le taux de recouvrement est généralement plus faible chez les fraudeurs – certains sont des spécialistes, d’autres s’arrangent pour disparaître – que chez les gens honnêtes. De mémoire, il est en moyenne de l’ordre de 50 %.
Les dossiers continuent à arriver au service de traitement des déclarations rectificatives pour les avoirs détenus à l’étranger – STDR –, au rythme d’environ 900 tous les quinze jours. Nous avons structuré notre administration de façon un peu différente, et nous avons créé sept centres décentralisés pour traiter les affaires les moins complexes et volumineuses. Nous avons du travail pour un moment, et des droits à percevoir sur quelques années.
J’ajoute que ces rentrées contribuent à un accroissement de l’assiette : le contribuable s’acquitte de droits et de pénalités, mais ces avoirs révélés donnent lieu à une hausse de ses impôts ultérieurs et souvent au paiement de l’impôt de solidarité sur la fortune
– ISF. Au vu des volumes financiers en cause, on peut penser qu’une partie significative de ces dossiers contribue à une amélioration des recettes de l’ISF que, ce n’est pas un scoop, le Gouvernement ne propose pas de supprimer, contrairement à ce que d’aucuns prétendaient sur les ondes ce matin.
La Commission en vient à l’examen des articles du projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2014.
M. le président Gilles Carrez. Nous en venons à l’examen des articles du projet de loi de règlement.
Nous n’avons pas d’amendement à examiner.
Je vous propose donc de mettre aux voix les articles successifs puis l’ensemble du texte.
Article liminaire : Solde structurel et solde effectif de l’ensemble des administrations publiques de l’année 2014
La Commission adopte l’article sans modification.
Article 1er : Résultats du budget de l’année 2014
La Commission adopte l’article sans modification.
Article 2 : Tableau de financement de l’année 2014
La Commission adopte l’article sans modification.
Article 3 : Résultat de l’exercice 2014 – Affectation au bilan et approbation du bilan et de l’annexe
La Commission adopte l’article sans modification.
Article 4 : Budget général – Dispositions relatives aux autorisations d’engagement et aux crédits de paiement
La Commission adopte l’article sans modification.
Article 5 : Budgets annexes – Dispositions relatives aux autorisations d’engagement et aux crédits de paiement
La Commission adopte l’article sans modification.
Article 6 : Comptes spéciaux – Dispositions relatives aux autorisations d’engagement, aux crédits de paiement et aux découverts autorisés – Affectation des soldes
La Commission adopte l’article sans modification.
Article 7 : Règlement du compte spécial Avances aux organismes de sécurité sociale clos au 31 décembre 2014
La Commission adopte l’article sans modification.
Article 8 : Modification de l’article 60 de la loi de finances pour 1963
(n° 63-156 du 23 février 1963)
La Commission adopte l’article sans modification.
Enfin, elle adopte le projet de loi sans modification.
La Commission procède à l’examen d’un rapport d’information préalable au débat d’orientation des finances publiques (Mme Valérie Rabault, rapporteure générale).
Mme la rapporteure générale. Monsieur le secrétaire d’État, je me permets tout d’abord de vous rappeler publiquement la date du 1er juillet qui figurait à l’article 108 de la seconde loi de finances rectificative pour 2014 : notre assemblée avait souhaité avoir, à cette date, un bilan du manque à gagner pour l’État résultant de toutes les conventions fiscales qui nous lient à d’autres pays, permettant à certains d’entre eux de ne pas payer d’impôt, notamment sur des plus-values immobilières.
Sur le débat d’orientation des finances publiques pour 2015, je vous propose une présentation des recettes et des dépenses adoptées pour l’ensemble du périmètre des administrations publiques.
Nous avons établi le tableau sur les premiers éléments de l’exécution 2015, en jonglant avec des données de l’INSEE et d’autres qui émanent de Bercy, pour ne rien perdre. Dans les recettes de l’État, la vente des fréquences était estimée à 2,1 milliards d’euros en loi de finances initiale pour 2015, ce qui nous paraît un peu compromis. Dans les recettes supplémentaires, 1,2 milliard d’euros devraient tomber dans les caisses de l’État du fait de condamnations de deux industriels par l’Autorité de la concurrence.
Dans les dépenses, le budget OPEX avait été estimé à 400 millions d’euros. Il devrait atteindre environ 1 milliard d’euros. Les nouvelles dépenses annoncées par le Gouvernement représentent 1,1 milliard d’euros hors mesures déjà financées par des redéploiements de crédits. Ce montant ne comprend pas les 2 milliards d’euros de crédits budgétaires supplémentaires accordés pour 2015 à la défense en substitution du produit de la vente des fréquences hertziennes. Comme nous l’avions indiqué lors de la présentation du pacte de stabilité, la faiblesse de l’inflation fait disparaître certaines économies, ce qui a conduit le Gouvernement à prendre de nouvelles mesures d’économies pour 1,9 milliard d’euros sur l’État se répartissant entre 700 millions d’annulation de crédits budgétaires et 1,2 milliard d’économies sur la charge de la dette.
Voilà les premiers éléments dont nous avons connaissance à ce stade et que nous avons réintégrés, sachant que l’INSEE table sur une légère augmentation des recettes nettes de l’État par rapport à celles que nous avons adoptées.
Dans mon rapport, un tableau réunira les chiffres à fin avril, que vous nous avez remis, monsieur le secrétaire d’État. L’impôt sur le revenu net connaît une évolution positive, alors que l’impôt sur les sociétés baisse par rapport à l’an dernier – et nous aimerions avoir votre analyse sur ce point. Nous constatons aussi une légère baisse de la TVA, sachant qu’il faut toujours être très prudent : les quatre premiers mois ne sont pas forcément le reflet de l’année entière.
Nous avons tenté de mesurer les risques pesant sur l’exécution budgétaire. Comme je l’ai rappelé, un décret d’annulation a été pris en juin dernier pour annuler 700 millions d’euros de crédits. Après cette annulation, il reste encore potentiellement 4 milliards d’euros d’économie à réaliser pour tenir la trajectoire des finances publiques en 2015 : en effet, à ce jour, nous ne savons pas comment seront financés les 2 milliards d’euros de crédits budgétaires supplémentaires accordés à la défense en substitut des recettes exceptionnelles prévues pour 2015 ; 800 millions d’euros au titre des annonces réalisées depuis janvier non couvertes par le décret d’avance de mars dernier ou des redéploiements de crédits ; 1 milliard d’euros pour les administrations de sécurité sociale, au titre de la compensation des effets de l’inflation sur les efforts à réaliser pour tenir la trajectoire des finances publiques ; 500 millions d’euros pour les organismes divers d’administration centrale, toujours au titre des effets de l’inflation.
À cela, il faut ajouter les conséquences possibles du référendum en Grèce : baisse de la valeur des obligations grecques détenues par l’État et la Banque de France ; risque, certes limité, d’une remontée des taux.
Si le « non » l’emporte, le montant des dividendes versés par la Banque de France au budget de l’État – 1,3 milliard d’euros en 2014 – pourrait être affecté, car les résultats de la banque centrale pâtiraient de la baisse de la valeur de ses obligations grecques. En outre, la France a accordé un prêt direct de 11 milliards d’euros à la Grèce, et elle participe au Fonds européen de stabilité financière – FESF – à hauteur de 31,4 milliards d’euros. La situation grecque pourrait donc avoir des conséquences sur le budget de la France.
En cas de victoire du « oui » au référendum, la dette grecque sera sans doute restructurée mais l’opération sera sans conséquence sur le budget de la France, en tout cas en 2015.
M. le président Gilles Carrez. Au cas où le « non » l’emporterait, il pourrait y avoir aussi un impact sur l’impôt sur les sociétés : la Banque de France verse environ 2 milliards d’euros par an à ce titre, et le cinquième acompte est bien payé sur l’exercice même. Je signale l’existence du mécanisme.
Mme la rapporteure générale. Il s’agit de faire une liste des risques possibles, ce qui ne veut pas dire qu’ils vont se réaliser.
Avec certains collègues de la commission des Finances, j’ai participé la semaine dernière à un séminaire de l’Organisation de coopération et de développement économiques
– OCDE – sur la croissance en Europe. Le graphique sur l’investissement en Europe qui figurera dans mon rapport traduit évidemment la vision de l’OCDE. Il montre que l’investissement public et privé a baissé dans tous les pays depuis 2008, et qu’il a été relancé dans certains d’entre eux depuis 2011, mais pas en France ni en Italie. En France, la courbe a baissé légèrement en 2014 et en 2015. Les perspectives d’investissement public dépendent très largement des collectivités locales, et les effets se mesureront moins dans le budget qu’en termes de création de richesse et de croissance.
Enfin, je voudrais poser la question de l’évolution du pouvoir d’achat. Nous avons prévu un tableau récapitulant les conséquences des mesures fiscales et sociales intervenues en 2014 pour les ménages, ventilés par décile de niveau de vie. Il comprend différentes colonnes : mesures en matière d’impôt sur le revenu, en matière de fiscalité locale, en matière de contribution sociale généralisée – CSG –, et enfin impact cumulé. Les contribuables, en effet, tirent tout du même porte-monnaie… Comme vous le voyez, ce tableau est vide. Monsieur le secrétaire d’État, je réitère donc la demande que j’ai formulée la semaine dernière lors de ma visite à Bercy : nous aimerions pouvoir remplir ce tableau et ainsi obtenir une vision consolidée des prélèvements sur les ménages dans notre pays. J’espère que vos services nous fourniront ces chiffres.
M. le secrétaire d’État. Nous pouvons remplir la première colonne, qui concerne l’impôt sur le revenu. Pour le reste, ce sera extrêmement difficile, vous le savez, madame la rapporteure générale : ces différents impôts ne sont tous pas gérés par les mêmes services, ni en utilisant les mêmes référentiels. Certains chiffres ne pourront être obtenus que par sondages. Quant à la fiscalité locale, elle pose encore d’autres problèmes. En additionnant toutes ces imprécisions, on obtiendra surtout une marge d’erreur très importante… Nous vous avons communiqué une note méthodologique qui reprend ce que nous sommes capables de faire. Mais il sera, en tout état de cause, quasiment impossible d’obtenir des chiffres fiables.
Quant à la présentation de l’exécution de la loi de finances que vous avez faite, elle comporte une erreur : le solde nominal inscrit dans la loi de finances n’était pas de 4,3 %, mais de 4,1 %. Le chiffre que vous avez cité était celui retenu par le projet de loi.
J’aurais d’autres remarques à faire, mais il est tard et je ne m’attarderai que sur deux points.
La vente de fréquences devait rapporter 2 milliards d’euros, affectés à un compte d’affectation spéciale qui comportait également 2 milliards d’euros de dépenses : ce compte était ainsi équilibré. Dans la mesure où les recettes ne sont plus assurées, les dépenses deviendront des dépenses budgétaires.
Mais le sort de ces recettes n’est pas encore certain. Les choses progressent. Pour la vente, une modification législative est nécessaire : elle devrait être effectuée par une proposition de loi dont on me dit qu’elle devrait être discutée très prochainement au Parlement. Les cahiers des charges sont en cours de rédaction. S’il ne devait pas y avoir d’autres perturbations dans le secteur de la téléphonie, il n’est donc pas impossible que nous finissions par percevoir ces recettes en 2015, ou au premier semestre 2016. Le plus probable, c’est donc un décalage de quelques mois, pas davantage.
Quant à la Grèce, nous devons à cette heure rester extrêmement prudents : la situation évolue d’heure en heure. L’Eurogroupe doit se réunir en fin d’après-midi. Y aura-t-il même un référendum ? Ce n’est pas sûr.
Nous avons accordé à la Grèce des prêts bilatéraux pour 11 milliards d’euros, et nous sommes engagés via le Fonds européen de stabilité financière pour 29 milliards : on arrive bien à la quarantaine de milliards habituellement citée. Un défaut grec sur cette dette n’est absolument pas certain ; et s’il devait avoir lieu, son impact budgétaire en 2015 serait faible, voire nul : les échéances sont très lointaines, à partir de 2020 me semble-t-il.
Bien sûr, il pourrait y avoir des conséquences pour les banques, comme l’a signalé le président Carrez. Elles sont difficilement quantifiables aujourd’hui.
Il est vrai que nous rencontrerions une difficulté si Eurostat, le comptable européen, demandait une requalification de nos créances ; cela n’affecterait d’ailleurs pas que notre pays. Mais ce serait là un problème comptable, pas budgétaire, en tout cas pas pour le moment.
Je redouterais plutôt les conséquences sur la confiance des investisseurs étrangers dans l’Europe, et donc sur la croissance. Que vont penser les Chinois, les Américains si le problème grec n’est pas traité correctement ?
Vous connaissez la position de la France : tout est fait, en ce moment même, pour qu’un accord intervienne. C’est difficile, mais pas hors de portée.
M. Alain Fauré. Vous avez parlé du défaitisme ambiant, monsieur le secrétaire d’État, mais il faut aussi parler des bonnes nouvelles : la croissance est plus forte que prévue, et pourrait atteindre 1,5 % en 2015. Si tel devait être le cas, quelles seraient les conséquences pour les recettes de l’État ?
M. Olivier Carré. S’agissant des investissements en France, il ne faut pas prendre seulement en considération les gains : je serais intéressé par un calcul de l’incidence fiscale de la diminution des investissements en termes de valeur ajoutée, de moindres rentrées de charges en raison de la baisse des constructions… Bien sûr, cela reposerait nécessairement sur une extrapolation, mais ce serait instructif. Cette remarque s’adresse d’ailleurs plus à la Commission qu’à M. le secrétaire d’État.
Quant à la Grèce, je propose aussi que nous fassions une très courte mission parlementaire – transpartisane – sur la situation grecque, afin de rassembler, en quelques pages, les données essentielles. Je ne veux pas que nous collions à tout prix à l’actualité mais cela nous éclairerait. Tout n’est pas très clair – des questions vont se poser, comme l’a fait remarquer M. le secrétaire d’État, sur le calcul de la dette.
M. le président Gilles Carrez. Lors d’une réunion à l’Élysée à laquelle Valérie Rabault et moi-même assistions, hier, M. Sapin s’est engagé à nous transmettre tous les chiffres dont nous pourrions avoir besoin : nous ferons donc ce travail que vous demandez.
M. le secrétaire d’État. Je répète en tout cas qu’il n’y aura pas de conséquences avant le projet de loi de finances pour 2016.
M. le président Gilles Carrez. Merci, monsieur le secrétaire d’État.
Quant au rapport d’information en vue du débat d’orientation des finances publiques, comme je l’ai dit tout à l’heure, il faudra corriger la coquille sur le chiffre du solde nominal.
Ce qui nous rappelle d’ailleurs qu’aujourd’hui, nous ne sommes ni à 4,3 %, ni à 4,1 %, mais à 3,8 %, ce que tout le monde a oublié ! Et pourquoi l’a-t-on oublié ? Parce que ce chiffre figure dans le programme de stabilité, dont nous n’avons pas débattu en séance publique !
La Commission autorise la publication du rapport d’information de la rapporteure générale préalable au débat d’orientation des finances publiques.
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Membres présents ou excusés
Commission des Finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire
Réunion du mercredi 1er juillet 2015 à 10 heures
Présents. - M. Éric Alauzet, M. François André, M. Jean-Marie Beffara, Mme Karine Berger, M. Étienne Blanc, M. Jean-Claude Buisine, M. Christophe Caresche, M. Olivier Carré, M. Gilles Carrez, M. Gaby Charroux, M. Jérôme Chartier, M. Pascal Cherki, M. Alain Claeys, M. Romain Colas, M. François Cornut-Gentille, M. Charles de Courson, Mme Marie-Christine Dalloz, M. Jean-Louis Dumont, M. Henri Emmanuelli, M. Olivier Faure, M. Alain Fauré, Mme Aurélie Filippetti, M. Marc Francina, M. Yann Galut, M. Claude Goasguen, M. Marc Goua, M. Laurent Grandguillaume, Mme Arlette Grosskost, M. Razzy Hammadi, M. Régis Juanico, M. Jean-François Lamour, M. Jean Lassalle, M. Dominique Lefebvre, Mme Véronique Louwagie, M. Jean-François Mancel, M. Patrick Ollier, Mme Christine Pires Beaune, Mme Valérie Rabault, Mme Monique Rabin, Mme Eva Sas, M. Michel Vergnier
Excusés. - M. Guillaume Bachelay, M. Dominique Baert, M. Jean-Claude Fruteau, M. Jean-Louis Gagnaire, M. Jean-Pierre Gorges, M. David Habib, M. Yves Jégo, M. Jean Launay, M. Patrick Lebreton, M. Marc Le Fur, M. Victorin Lurel, M. Thierry Robert, M. Camille de Rocca Serra, M. Philippe Vigier, M. Laurent Wauquiez, M. Éric Woerth
Assistaient également à la réunion. - M. Gérard Bapt, M. Guillaume Chevrollier, M. Michel Ménard
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