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Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République

Lundi 4 novembre 2013

Séance de 17 heures 45

Compte rendu n° 14

Présidence de M. Jean-Frédéric Poisson, Vice-Président

– Examen des crédits de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » (M. Alain Tourret, rapporteur pour avis « Fonction publique ») et avis sur ces crédits

La séance est ouverte à 17 heures 45

Présidence de M. Jean-Frédéric Poisson, vice-président.

À l’issue de l’audition de M. Pierre Moscovici, ministre de l’Économie et des Finances et de Mme Marylise Lebranchu, ministre de la Réforme de l’État, de la Décentralisation et de la Fonction publique (voir le compte rendu de la commission élargie du 4 novembre 2013), la Commission examine, sur le rapport de M. Alain Tourret, rapporteur pour avis « Fonction publique », les crédits de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines ».

Article 67

La Commission examine l’amendement n° II-CL22 de M. François Sauvadet.

M. François Sauvadet. Cet amendement vise à revenir sur la suppression du jour de carence dans les trois fonctions publiques telle qu’elle est proposée aujourd’hui.

Je suis très étonné des indications de la ministre de la Réforme de l’État, de la décentralisation et de la fonction publique sur les taux d’absentéisme observés dans la fonction publique. Je ne sais pas quelle en est la source. Il faut regarder les chiffres récents de la Fondation pour la recherche sur les administrations et les politiques publiques (iFRAP) : il y a deux fois plus d’absentéisme dans la fonction publique – je parle notamment d’absentéisme de courte durée.

Je l’ai indiqué tout à l’heure, lors de la commission élargie, il s’agit de mener une politique de lutte contre l’absentéisme sur deux fronts : d’un côté, la prévention du risque social, c’est-à-dire l’accompagnement dans les mutations qui affectent tout particulièrement la fonction publique ; de l’autre, revenir sur cette décision de suspension du jour de carence, décision qui a été prise sans la moindre concertation avec les collectivités territoriales et sans concertation avec la Fédération hospitalière de France – qui d’ailleurs a regretté et dénoncé cette mesure. J’ai bien entendu la proposition de notre collègue Pascal Terrasse de réaliser une évaluation. J’aurais préféré que l’on donnât le temps à cette mesure d’être appliquée. Quand vous parlez d’une prise en charge du jour de carence dans les entreprises, vous parlez des grandes entreprises. Dans la plupart des autres, s’appliquent trois jours de carence. Le jour de carence dans la fonction publique constituait donc une mesure de justice et d’équité à l’égard de nos compatriotes. Il a conduit un certain nombre de fonctionnaires à ne pas prendre cette journée dans la mesure où – comme vous le savez – le jour de carence a une incidence sur le traitement et la pension.

Je le redis une nouvelle fois devant vous : cette mesure a eu des effets positifs. Si sa suppression coûte moins cher qu’attendu, c’est précisément parce qu’elle a eu des effets positifs. On les a ressentis dans nos collectivités territoriales, dans la fonction publique hospitalière et dans la fonction publique d’État.

Sa suppression est injuste car elle creuse les inégalités entre le secteur public et le secteur privé. Elle ne prend pas en compte les problématiques de l’absentéisme. Cette décision est absurde sur le plan économique et je regrette vraiment qu’elle ait été prise sans concertation.

Je propose que l’on y revienne et que, sereinement, nous établissions un bilan d’ici à un an, à la lumière du rapport que va remettre M. Bernard Pêcheur, dans le cadre d’un dialogue social qui doit se poursuivre autour de cette question. Cela vaut mieux qu’une décision brutale prise comme une contrepartie à une situation – que nous avions d’ailleurs annoncée – qui conduit à ce qu’il n’y ait plus d’évolution de carrière possible faute de moyens financiers.

C’est un cadeau empoisonné qui a été fait à la fonction publique. Un certain nombre de nos compatriotes ne comprennent ni cette décision ni le fait qu’une absence soit indemnisée totalement le premier jour.

M. Alain Tourret, rapporteur pour avis. Je m’oppose à cet amendement présenté par M. Sauvadet. La question qui se pose est la suivante : doit-on être sanctionné quand on est malade ? Le problème posé au fond est : l’arrêt maladie est-il ou non justifié ? Doit-on sanctionner l’agent public dans cette situation ? À l’évidence, non et ce, pour plusieurs raisons.

Premièrement, on établit des comparaisons entre le secteur public et le secteur privé. La question ne tient pas à l’effectif des entreprises mais aux conventions collectives qui trouvent à s’appliquer et aux protections qu’elles accordent ou pas aux salariés. Les conventions sont extrêmement nombreuses. Certaines ne traitent pas de la question du jour de carence et certains secteurs ne sont pas couverts par des conventions collectives. Mais pour l’essentiel, les conventions collectives dans le secteur privé assurent le maintien de la rémunération pour les premiers jours d’arrêt de travail.

Deuxièmement, je me suis procuré les chiffres établis par l’INSEE sur la proportion d’agents qui ont eu des arrêts de travail de courte durée dans les trois fonctions publiques. Globalement, ces chiffres sont restés stables. La proportion d’agents en arrêt est passée de 1,2 % à 1 % dans la fonction publique de l’État, de 0,8 % à 0,7 % dans la fonction publique hospitalière ; elle demeure stable dans la fonction publique territoriale, à 1,1 %.

Cela étant, il y a un véritable problème d’absentéisme en France, dans le secteur privé comme dans le secteur public. Il ne faut pas stigmatiser les agents publics par rapport aux salariés du privé. Ce problème dépasse très largement la question de la journée de carence dans les trois fonctions publiques.

Ce que je propose, c’est qu’il y ait une évaluation réalisée sur les années à venir. Cette évaluation permettra de repenser ce problème si l’on constatait, du seul fait de la suppression de la journée de carence, une augmentation significative de l’absentéisme – ce à quoi je ne crois pas. Voilà pourquoi je ne crois pas utile de faire droit à votre amendement.

M. François Sauvadet. Je souhaiterais simplement demander à M. Tourret d’où il tient ses chiffres. J’ai devant les yeux les chiffres de l’iFRAP. Ce ne sont pas les mêmes ! J’ai des chiffres de mon conseil général. Ce ne sont pas les mêmes !

Mme Karine Berger. On en est à comparer l’INSEE et l’iFRAP…

M. François Sauvadet. Les chiffres fournis par la Fédération hospitalière de France ne sont pas les mêmes !

M. Jean-Frédéric Poisson, président. Si ma fonction de président de séance me conduit à ne pas intervenir dans ce vote, je ne peux qu’exprimer une forme de sympathie à l’égard de cet amendement.

La Commission rejette l’amendement.

Conformément aux conclusions de son rapporteur pour avis, la Commission donne un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines ».

La séance est levée à 18 heures.

——fpfp——

Membres présents ou excusés

Présents. - Mme Marie-Françoise Bechtel, Mme Françoise Descamps-Crosnier, M. Matthias Fekl, M. Jean-Frédéric Poisson, M. François Sauvadet, M. Alain Tourret.

Excusés. - M. Marcel Bonnot, Mme Marietta Karamanli

Assistaient également à la réunion. – Mme Karine Berger, M. Gilles Carrez, Mme Virginie Duby-Muller, Mme Valérie Rabault, M. François Sauvadet, M. Pascal Terrasse.