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Commission spéciale chargée d’examiner le projet de loi pour la croissance et l’activité

Lundi 12 janvier 2015

Séance de 16 heures

Compte rendu n° 3

Présidence de M. François Brottes, Président

–  Examen, ouvert à la presse, du projet de loi pour la croissance et l’activité (n° 2447) (M. Richard Ferrand, rapporteur général, MM. Christophe Castaner, Laurent Grandguillaume, Denys Robiliard, Gilles Savary, Alain Tourret, Stéphane Travert, et Mmes Cécile Untermaier et Clotilde Valter, rapporteurs thématiques)

–  Présences en réunion

La commission examine le projet de loi pour la croissance et l’activité (n° 2447) (M. Richard Ferrand, rapporteur général, MM. Christophe Castaner, Laurent Grandguillaume, Denys Robiliard, Gilles Savary, Alain Tourret, Stéphane Travert, et Mmes Cécile Untermaier et Clotilde Valter, rapporteurs thématiques).

M. le président François Brottes. Chers collègues, cette commission spéciale commence ses travaux dans un contexte dramatique pour notre pays et pour le monde. Lors de la journée de deuil, la semaine dernière, l’Assemblée nationale réunie autour du président Claude Bartolone a rendu hommage aux victimes des attentats.

Je vous présente mes vœux de bonne année en souhaitant que les travaux de cette commission – dont les sujets, relatifs à la vie quotidienne, intéressent l’ensemble de nos concitoyens – se montrent à la hauteur des enjeux, au terme d’un débat responsable et serein. Le chantier est considérable ; aussi, afin de traiter l’ensemble des articles du texte, nous faudra-t-il doser nos échanges sans toutefois escamoter les confrontations. Je souhaite la bienvenue à M. Emmanuel Macron, ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique ; lors de l’examen du projet de loi en séance, ses collègues seront éventuellement présents à ses côtés, mais c’est lui seul qui accompagnera l’intégralité de nos travaux en commission – qui, rappelons-le, seront retransmis en direct sur le site de l’Assemblée nationale. Enfin, je salue le travail réalisé par le rapporteur général et les rapporteurs thématiques qui ont mené, depuis l’installation de la Commission, plus de 80 auditions.

Sur les 1 758 amendements déclarés recevables, 38 émanent du Gouvernement, 408 – dont les deux tiers sont rédactionnels – des rapporteurs, 195 du groupe SRC, 625 du groupe UMP, 165 du groupe UDI, 164 du groupe écologiste, 93 du groupe RRDP et 70 du groupe GDR. Il y a 791 amendements sur le titre I, 532 sur le titre II, 428 sur le titre III, et 7 amendements sur le titre IV et le titre du projet de loi. Les deux tiers des amendements n’ont été déposés qu’une fois. On dénombre 237 amendements de suppression d’article – qui généralement ne justifient pas d’un long exposé –, et seuls quatre articles du projet de loi ne font l’objet d’aucun amendement.

Pour organiser au mieux nos débats, les services ont déplacé une centaine d’amendements portant articles additionnels afin de regrouper ceux qui abordent des sujets voisins, de les mettre à l’endroit du texte le plus logique et de les affecter au rapporteur thématique le plus pertinent. Ainsi, les amendements qui concernent les autoroutes ont été placés après l’article 5 – sauf les deux qui prévoient la dénonciation des concessions, mis avant cet article. Les amendements touchant de près ou de loin à des problèmes de consommateurs – y compris aux relations avec les banques – se trouvent après l’article 11. Ceux qui se rapportent au financement des entreprises et visent à modifier le code général des impôts sont placés après l’article 35. Ceux qui concernent le financement des entreprises et modifient d’autres textes, après l’article 40. Les amendements relatifs à l’épargne salariale qui tendent à modifier le code de la sécurité sociale ou le code monétaire et financier sont positionnés avant l’article 36. Ceux qui touchent à l’organisation des entreprises se trouvent après l’article 58, et ceux qui se rapportent davantage à la vie des entreprises, après l’article 64. Les amendements concernant le dialogue social dans l’entreprise et la problématique Florange ont été placés après l’article 91 – dont les deux relatifs aux seuils sociaux que M. Jean-Charles Taugourdeau avait un peu audacieusement placés avant l’article 1er. Enfin, ceux qui touchent aux autres domaines sociaux tels que le temps de travail ou la formation sont mis après l’article 94.

J’ai appliqué la jurisprudence constante du Conseil constitutionnel selon laquelle une demande d’habilitation à légiférer par ordonnances ne peut émaner que du Gouvernement. J’ai donc déclaré irrecevables une vingtaine d’amendements qui soit procédaient à l’extension d’une des habilitations demandées, soit en créaient de nouvelles, alors que bien souvent leurs auteurs dénonçaient par ailleurs le nombre trop élevé d’habilitations dans le projet de loi.

Enfin, j’ai saisi le président de la commission des finances de 71 amendements qui me semblaient soulever des questions de recevabilité financière. Le président Gilles Carrez – dont j’ai, comme à l’accoutumée, scrupuleusement suivi l’avis – a jugé irrecevables 41 d’entre eux : les SPE863 de M. Pancher, SPE523 de M. Bricout, SPE770 de M. Huet, SPE1113 et SPE1107 de M. Huyghe, SPE148, SPE329 et SPE161 de M. Houillon, SPE345 de M. Hetzel, SPE182 de M. Houillon, SPE812, SPE815 et SPE828 de M. Huet, SPE678 de M. Saddier, SPE371 et SPE373 de M. Hetzel, SPE1482 M. Decool, SPE492 de M. Tetart, SPE864 de M. Leroy, SPE409 de M. Hetzel, SPE765 de Mme Le Dain, SPE1094 du Rapporteur général, SPE1227 de Mme Berger, SPE809 de M. Hetzel, SPE475 de M. Taugourdeau, SPE736 de M. Caullet, SPE1222 de M. Letchimy, SPE1244, SPE1357 et SPE1429 de M. Fromantin, SPE1030 de M. Fromantin, SPE1075 de M. Fromantin, SPE535 de M. Bonnot, SPE132 de M. Cherpion, SPE467 de M. Hetzel, SPE575 de M. Vercamer, SPE948 de Mme Fraysse, SPE995 de M. Blein, SPE1681 de M. Brottes, SPE1328 et SPE1329 de M. Lambert.

L’audition du ministre – qui a duré plus de quatre heures et où aucune question n’avait été empêchée ou laissée sans réponse – a servi de discussion générale. Par conséquent, après les interventions de ceux de nos collègues qui ont demandé la parole, nous aborderons directement la discussion des amendements.

M. Jean-Frédéric Poisson. Je tiens à remercier le ministre de s’être engagé à participer à l’ensemble des débats. Monsieur le président, plusieurs représentants des groupes vous ont appelé à émettre une protestation quant au temps très limité dont nous disposons pour examiner le texte ; visiblement, notre demande n’a pas réellement été prise en compte !

M. Marc Dolez. Cinq des six groupes de notre assemblée avaient officiellement demandé d’échelonner nos travaux sur deux semaines au moins, afin d’éviter les cadences infernales ; le groupe GDR déplore que ce souhait n’ait pas été pris en considération. Ne pas permettre au Parlement de travailler dans des conditions raisonnables dénote un manque de respect pour notre institution.

Si je me félicite de la participation de M. Emmanuel Macron à l’intégralité de nos travaux, je regrette que le Gouvernement n’ait pas autorisé d’autres ministres à le rejoindre, alors que c’est sur la base du texte qui sera adopté en commission que les débats s’engageront dans l’hémicycle. Il est en particulier dommage que madame la garde des Sceaux ne soit pas présente lors du débat sur la réforme des professions juridiques réglementées.

Enfin, monsieur le président, pour faciliter le dépôt des amendements dans le cadre de l’article 88, il serait préférable de ne pas attendre la fin de nos débats pour mettre en ligne le texte du projet de loi, mais de le faire au fur et à mesure. En effet, le délai entre la fin des travaux de commission et la date retenue pour déposer les amendements est particulièrement restreint.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Il serait intéressant de pouvoir nous servir du dispositif ELIASSE qui permet de suivre les débats sur iPad – solution pratique et moderne.

M. le président François Brottes. Je salue votre modernité, mais ne peux pour l’heure vous garantir, à défaut d’ELIASSE, que l’accès à une liasse ! (Sourires.)

J’ai bien entendu transmis vos préoccupations au Gouvernement, en précisant que nos travaux, au vu du nombre d’amendements éligibles au débat, risquaient de ne pas aboutir avant la fin de la semaine. Pour autant, ne comptez pas sur moi pour court-circuiter nos débats en commission au prétexte de cette échéance ; tous les amendements – dont très peu sont identiques – doivent pouvoir être discutés. Mais il faut aussi, au nom du respect du travail parlementaire, permettre à tous ceux qui le souhaitent de déposer des amendements en vue de la séance. Ne perdons donc pas de temps à nous dire qu’il en manque et avançons !

M. Emmanuel Macron garantit la cohérence du projet de loi au niveau gouvernemental. Si d’autres ministres avaient défilé en commission, on aurait pu reprocher au texte de juxtaposer plusieurs projets distincts. En tout état de cause, le débat en séance permettra d’apporter des compléments sur différentes thématiques.

Monsieur Marc Dolez, mettre le texte en ligne au fur et à mesure me paraît risqué car il s’agirait d’une version provisoire appelée à changer. Ainsi, par exemple, le titre de la loi – qui ouvre toute publication – sera étudié en dernier. Il faudra donc attendre 24 à 48 heures après la fin de nos travaux en commission pour retrouver le texte intégral en ligne.

M. Patrick Hetzel. La semaine dernière, le Gouvernement a déposé une centaine d’amendements dont la moitié a ensuite été retirée. Pourquoi ces retraits ? Le fait qu’il reste encore une petite cinquantaine d’amendements gouvernementaux montre au demeurant que le texte nous a été présenté avec une certaine précipitation.

M. Jean-Louis Roumegas. Le groupe écologiste est également en profond désaccord avec la méthode employée. Aujourd’hui encore, des amendements ont été déposés par le Gouvernement ; il est impossible de travailler sérieusement dans ces conditions, tant en commission que dans l’hémicycle où, en cinquante heures, il nous faudra réformer le code des transports, le code du logement, le droit de l’environnement et les professions réglementées ! Dans ce contexte, les auditions et le débat avec la société ne peuvent pas non plus se dérouler sereinement et les professionnels concernés par le texte que j’ai pu rencontrer dénoncent tous l’absence du dialogue. Pourtant le projet de loi porte sur des questions fondamentales ; loin de se réduire à de petites réformes, il vient bousculer des équilibres profonds qui avaient été âprement négociés dans le passé. Cette loi fait penser à un éléphant dans un magasin de porcelaine ; dans les conditions actuelles, je m’inquiète du résultat de nos débats.

M. Marc Dolez. Si nos travaux se terminent le 18 janvier au soir et que le Gouvernement maintient le début du débat en hémicycle le 26 janvier, nous ne disposerons que de 24 à 36 heures entre la mise en ligne du texte et le dépôt des amendements – conditions de travail déplorables ! Retarder de huit jours le débat en séance permettrait de régler le problème sans toucher au calendrier des travaux en commission.

M. Emmanuel Macron, ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique. Je présente à toutes et à tous mes meilleurs vœux pour l’année qui commence et pour l’aventure qui nous réunit. Je remercie le président de la Commission, le rapporteur général et les rapporteurs thématiques pour le travail qu’ils ont réalisé – notamment durant la période de fêtes – et qui a d’ores et déjà permis d’enrichir et d’améliorer le texte.

Monsieur Jean-Louis Roumegas, la concertation avec les différentes professions a été conduite par le Gouvernement – notamment par Mme Christiane Taubira et moi-même –, mais également par plusieurs parlementaires tels que M. Richard Ferrand dans le cadre de son rapport et Mme Cécile Untermaier dans le cadre de la mission parlementaire qu’elle avait présidée. Vice-présidée par M. Philippe Houillon, cette mission – qui avait réuni plusieurs députés – a permis de longuement auditionner les professionnels concernés. Ces travaux collectifs fournissent une base pour un débat constructif.

La Commission en vient à l’examen des articles.

TITRE Ier

LIBÉRER L’ACTIVITÉ

Chapitre Ier

Mobilité

Article 1er : Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières (A.R.A.F.E.R)

La Commission est saisie de l’amendement SPE862 de M. Bertrand Pancher.

M. Michel Zumkeller. En juin dernier, lors de l’examen du projet de loi portant réforme ferroviaire, les pouvoirs de l’Autorité de régulation des activités ferroviaires
– ARAF – ont été considérablement renforcés – mesure que nous avons saluée. Nous sommes heureux de constater que le champ de compétences de cet organisme, désormais dénommé Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières – ARAFER –, sera élargi aux infrastructures de transport terrestre, mais souhaitons également y ajouter l’activité de régulation des transports fluviaux.

M. le ministre. Le projet de loi franchit déjà une étape importante en matière d’intermodalité en étendant les compétences de l’ARAF au transport routier ; il nous paraît plus prudent de nous y limiter dans un premier temps, mais le Gouvernement s’en remet à la sagesse de l’Assemblée.

M. Gilles Savary, rapporteur thématique. Eu égard à l’inflexion actuellement donnée aux politiques de transport – restées excessivement modales pendant de nombreuses décennies –, la mesure nous semble aller dans le bon sens. Avis favorable.

M. Richard Ferrand, rapporteur général. Également favorable.

La Commission adopte l’amendement SPE862.

Elle examine l’amendement SPE1263 de M. Joël Giraud.

M. Joël Giraud. Cet amendement s’intéresse à l’État en tant qu’autorité organisatrice de transports – AOT – et aux trains d’équilibre du territoire – TET –, difficiles à financer, dont les perspectives sont actuellement évaluées dans le cadre d’une mission confiée à notre collègue Philippe Duron, député du Calvados. Nous proposons que le règlement européen « Obligations de service public » – OSP – entré en vigueur le 3 décembre 2009, qui s’applique à toutes les AOT, soit mis à profit pour permettre à l’État de mener des expérimentations en confiant l’exploitation des lignes TET à toute entreprise ferroviaire détentrice d’une licence ferroviaire en France. Le niveau de dysfonctionnement sur ces lignes atteint actuellement des sommets : sur celle que je prends toutes les semaines, les trains de nuit n’arrivent que le lendemain soir ; le confort et l’innovation laissent également à désirer. Si l’on n’agit pas, on risque à terme de voir ce service ferroviaire longue distance abandonné par manque de voyageurs.

M. le président François Brottes. Je fais miens les arguments de Joël Giraud.

M. le ministre. Les débats sur la réforme ferroviaire ont montré qu’il s’agissait d’un sujet sensible. La date d’ouverture de ce secteur à la concurrence fait l’objet de négociations au niveau communautaire ; dans le projet de quatrième « paquet ferroviaire », elle est fixée à 2019. Vous proposez d’anticiper, mais le Gouvernement préfère, à ce stade, privilégier la stabilité du cadre juridique national. Avis défavorable.

M. Gilles Savary, rapporteur thématique. Si j’adhère intellectuellement à cette idée depuis plusieurs années, je considère que les conditions pour la traduire dans les faits ne sont pas réunies. D’une part, Philippe Duron travaille actuellement sur le sujet et élargit son spectre d’investigation et d’étude – et donc de préconisation – aux trains express régionaux
– TER – dont le cadre sera renouvelé. D’autre part, nous nous apprêtons à engager une négociation sociale de grande importance au sein du groupe SNCF et de la filière ferroviaire ; cette première convention collective s’inscrit clairement dans l’ouverture à la concurrence mais il est inutile d’en perturber la mise en œuvre par des décisions hâtives.

M. le rapporteur général. Même avis.

M. Joël Giraud. Je maintiens toutefois mon amendement. Alors que l’ouverture à la concurrence est prévue pour 2019 et que la mission Duron doit rendre ses préconisations dans le courant de l’année 2015, les contrats des TET s’arrêtent en 2016. Anticiper au travers d’une expérimentation éclairerait le débat.

La Commission rejette l’amendement SPE1263.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel SPE41 rectifié des rapporteurs.

La Commission étudie ensuite les amendements identiques SPE220 de M. Jean-Frédéric Poisson et SPE303 de M. Patrick Hetzel.

M. Jean-Frédéric Poisson. Le groupe UMP ne se lasse pas de constater la rapidité et la profondeur de la conversion de la gauche française à la pratique des ordonnances. Ce texte le confirme à nouveau : dix-sept articles prévoient jusqu’à cinquante-six ordonnances, portant sur trente dispositions génériques dont certaines importantes. De surcroît, monsieur le ministre, vous avez déclaré que certaines ordonnances étaient d’ores et déjà prêtes – et pourraient, par conséquent, être soumises au débat parlementaire. C’est pourquoi le groupe UMP dépose une protestation de principe à chaque fois qu’il rencontre le mot « ordonnance » dans le texte.

Par ailleurs, l’étude d’impact note que l’on décidera, le moment venu, de la manière de financer la nouvelle instance prévue à l’article 1er. Faut-il nous attendre – comme le texte entre parenthèses semble suggérer – à une taxe supplémentaire ?

M. Patrick Hetzel. Le recours aux ordonnances – prévu dans beaucoup d’articles de ce texte très large – prive le législateur de la possibilité de débattre. Vos déclarations, monsieur le ministre, comme les échanges avec les professions réglementées, montrent que la plupart de ces ordonnances sont déjà prêtes. Serait-il possible d’en avoir connaissance afin éventuellement de retirer certains amendements si nous sommes rassurés par les projets du Gouvernement ?

M. le président François Brottes. Je comprends l’émoi de Jean-Frédéric Poisson, qui a appartenu à une majorité qui n’a jamais eu recours à la technique des ordonnances…

M. le ministre. Avis défavorable. Au fil du texte et de nos discussions, l’on tâchera d’expliciter les dispositions autant que possible. Beaucoup d’éléments constitutifs de l’ARAFER seront précisés dans la discussion sur les articles à venir ; en l’espèce, il s’agit d’une ordonnance à visée rédactionnelle, qui cherche à assurer la cohérence entre les nouvelles compétences de cette autorité intermodale et le positionnement des dispositions qui la concernent dans le code des transports. Cette ordonnance technique n’est pas encore prête et ne peut être inscrite dans le texte à ce stade ; il n’y a donc aucune confiscation d’information.

M. le rapporteur général. Nous avons veillé à ce que tout ce qui pouvait être soumis à notre examen – en commission ou en séance – le soit. Au fil des débats, on constatera que beaucoup de dispositions initialement envisagées sous forme d’ordonnance figureront finalement dans le texte.

M. Hervé Mariton. Je suis d’autant plus favorable à l’extension des compétences de l’ARAF au secteur routier que j’avais moi-même formulé une proposition similaire il y a quelques années. Parce qu’il amène à aborder beaucoup de questions concrètes, ce projet de loi rencontre nécessairement l’actualité de l’action publique dans ces domaines ; les débats en commission peuvent-ils servir à faire le point sur ces sujets ? Ainsi, l’Autorité de la concurrence a récemment formulé une critique sévère des projets de décrets d’application de la loi portant réforme ferroviaire, interrogeant notamment le rôle de l’ARAF. Aborder la question de l’extension des compétences de cette instance devrait conduire le Gouvernement à répondre aux critiques de l’Autorité – et peut-être à celles à venir du Conseil d’État.

M. Olivier Faure. Monsieur Jean-Frédéric Poisson, vous appartenez à une formation politique qui prévoyait il y a peu de temps encore de gouverner pendant six mois par ordonnances, l’ancien président de l’UMP justifiant cette intention par la rapidité qu’offre ce procédé... Essayons donc de débattre sereinement de ces questions !

M. Jean-Frédéric Poisson. Page 6 de l’étude d’impact, on peut lire : « Les adaptations financières nécessitées par cette réforme (ressources budgétaires, taxes, redevances, etc.) seront étudiées dans le cadre d’un prochain projet de loi de finances. » Monsieur le ministre, envisagez-vous des taxes nouvelles pour financer l’ARAFER ?

M. Jean-Louis Roumegas. Il faut distinguer les ordonnances ayant une portée purement technique de celles qui modifient en profondeur le droit – notamment celui de l’environnement ; le groupe écologiste les appréciera donc de manière nuancée, en fonction de leur contenu. Mais afin de lever les ambiguïtés, le Gouvernement devrait préciser à chaque fois ses intentions.

M. le président François Brottes. En effet, le texte des ordonnances doit être fourni très rapidement pour que l’on mesure la portée de l’habilitation que l’on donne au Gouvernement.

La Commission rejette les amendements SPE220 et 303.

Puis elle examine les amendements identiques SPE866 de M. Bertrand Pancher et SPE1286 de M. Joël Giraud.

M. Michel Zumkeller. L’alinéa 2 de l’article 1er permet de prendre plusieurs mesures par ordonnances, en particulier en matière d’extension des compétences. Il serait intéressant et constructif que l’ARAFER émette un avis sur ces ordonnances.

M. Joël Giraud. Il est indispensable que l’ARAFER puisse formuler des observations sur les conditions d’exercice de ses nouvelles missions. Son avis éclairera le législateur.

M. le ministre. Mon avis est plutôt défavorable. Il s’agit, je l’ai dit, d’une ordonnance rédactionnelle, qui cherche à mettre en cohérence les nouvelles dispositions avec le code des transports dont il faudra changer la structure très rapidement après le vote de la loi. En l’absence de toute disposition de fond, il me paraît inutile que l’ARAFER donne son avis.

Je reviendrai lors d’un amendement suivant sur le financement de l’ARAFER par le biais d’une éventuelle taxe.

M. le rapporteur général. Avis également défavorable. Il s’agit de mettre en place des coordinations dans les différents codes concernés ; la consultation de l’ARAFER en amont paraît donc en effet inutile.

La Commission rejette les amendements SPE866 et SPE1286.

Elle adopte l’amendement rédactionnel SPE42 des rapporteurs.

Puis elle est saisie de l’amendement SPE1308 de M. François-Michel Lambert.

M. Jean-Louis Roumegas. Si nous sommes favorables à l’article 1er qui étend les compétences de l’ARAF au secteur routier interurbain, c’est dans un esprit d’intermodalité et de complémentarité – non de concurrence – entre différents moyens de transport. Notre amendement vise à assurer que les sociétés d’autoroute et les entreprises de transport public routier contribuent au financement de l’ARAFER. Cela nous paraît logique.

M. le ministre. Sur le fond, l’amendement semble légitime ; il serait normal que l’ARAFER soit financée par l’ensemble des secteurs qu’elle régule et non uniquement par le ferroviaire. Néanmoins, pour assurer la cohérence du budget de l’État en tenant compte des engagements pris par ailleurs, ce débat complexe doit plutôt être mené dans le cadre du projet de loi de finances. Les nouvelles compétences de l’ARAFER entrant en vigueur six mois après l’adoption de la loi, nous avons le temps d’aborder ces questions. J’invite donc les auteurs à retirer leur amendement ; à défaut, le Gouvernement y sera défavorable.

M. Jean-Louis Roumegas. Je le maintiens.

M. Gilles Savary, rapporteur thématique. Monsieur Jean-Louis Roumegas, nous pensons comme vous qu’il n’est pas envisageable, alors que l’on ouvre le champ de compétences de l’ARAF, que celle-ci soit financée par le seul secteur ferroviaire – c’est-à-dire par un prélèvement sur la SNCF qui assure 99 % du trafic. Un droit fixe a été instauré par la loi pour que le ressortissant ferroviaire alimente l’ARAF sans passer par le budget de l’État ; il faut en envisager l’extension aux entreprises de transport routier de voyageurs et aux entreprises autoroutières. Reste à déterminer comment répartir équitablement cette cotisation entre l’ensemble des acteurs. C’est pourquoi nous avons déposé l’amendement SPE1673, auquel nous espérons que le ministre ne sera pas totalement opposé.

M. Jean-Louis Roumegas. Monsieur le ministre, le principe que nous proposons d’inscrire dans la loi implique, bien entendu, de modifier le prochain projet de loi de finances, mais il serait bon de le faire figurer dans le texte. Cette mesure de justice va dans le même sens que celle que propose notre rapporteur thématique. Nos deux amendements ne me semblent pas contradictoires, mais complémentaires ; vous devez donc soit rejeter, soit soutenir les deux à la fois.

M. Gilles Savary, rapporteur thématique. Monsieur Jean-Louis Roumegas, nos amendements seraient redondants si vous n’aviez pas oublié de faire contribuer les sociétés d’autoroute. L’amendement SPE1673 me semble donc plus complet, dans la mesure où la loi propose de confier la régulation du secteur autoroutier à l’ARAFER. Vous devriez retirer votre amendement pour vous ranger au mien.

La Commission rejette l’amendement SPE1308.

Elle aborde l’amendement SPE1269 de M. Joël Giraud.

M. Joël Giraud. Afin de tirer les conséquences de la loi du 4 août 2014 portant réforme ferroviaire, cet amendement propose d’éviter la discontinuité dans l’autorité de la présidence de l’ARAFER en prévoyant qu’en cas d’empêchement les fonctions du président soient provisoirement exercées par le vice-président le plus anciennement nommé.

M. le ministre. Favorable.

M. Gilles Savary, rapporteur thématique. Favorable également.

La Commission adopte l’amendement SPE1269.

Puis elle étudie l’amendement SPE1673 des rapporteurs.

M. Gilles Savary, rapporteur thématique. Nous proposons qu’à compter du 1er janvier 2016 un droit fixe dû par les entreprises de transport public routier de personnes et par les concessionnaires d’autoroute alimente le budget de l’ARAFER.

M. le ministre. Je partage votre avis : les missions nouvelles de l’ARAFER exigent que son financement ne soit plus assuré uniquement par le secteur ferroviaire. Mais la cohérence du débat budgétaire justifie de reporter cette discussion à l’examen du projet de loi de finances initial pour 2016 qui interviendra alors que les nouvelles compétences de l’ARAFER ne seront pas encore entrées en vigueur. Ma position est donc la même sur cet amendement que sur celui qui a été défendu par M. Jean-Louis Roumegas : j’en suggère le retrait.

M. Gilles Savary, rapporteur thématique. Bercy pensait pouvoir se satisfaire de la situation actuelle : prélèvement d’un droit fixe sur le ferroviaire et ajustement éventuel par le budget de l’État. Une telle organisation créerait pourtant une insécurité pour l’autorité régulatrice et une pression inutile sur le budget de l’État. Il serait illégitime et contraire au principe d’équité et d’égalité qu’un seul des ressortissants de ce régulateur en assure le fonctionnement. Seul un empêchement rédhibitoire pourrait nous amener à revoir notre position.

M. le rapporteur général. Avis favorable.

M. Hervé Mariton. Le ministre devrait s’opposer plus fermement à cet amendement qui, s’il était adopté, impliquerait l’instauration d’un nouvel impôt – mesure contraire aux engagements pris par l’exécutif.

M. Jean-Frédéric Poisson. Monsieur le ministre, quels arguments vous permettent de considérer que financer l’ARAFER par un prélèvement supplémentaire sur le secteur économique ne s’oppose pas à l’engagement pris par le Président de la République devant les Français il y a quelques semaines ?

M. le président François Brottes. Vous êtes donc d’accord pour que seul le secteur ferroviaire alimente le budget de cette instance ?

M. Jean-Frédéric Poisson. Non : je demande comment le Gouvernement entend financer ses nouvelles activités sinon en instaurant un nouveau prélèvement, contrairement à ses engagements.

M. Gilles Carrez. Si la mesure doit déboucher sur un impôt supplémentaire – quitte à l’appeler droit fixe –, mieux vaut encore la placer ici que dans la loi de finances pour 2016.

M. Jean-Yves Caullet. Il s’agit de répartir une contribution et non d’en créer une nouvelle. On ne peut pas non plus préjuger que le montant global en serait augmenté.

M. Jean-Louis Roumegas. Si cet amendement est adopté, le Gouvernement ne fait pas nécessairement une bonne affaire. En effet, nous posions un principe général dont les modalités pouvaient ensuite être largement discutées d’ici la loi de finances ; au contraire, Gilles Savary propose une disposition plus précise qui laisse moins de place au débat. Néanmoins, nous soutiendrons son amendement, par souci de cohérence.

M. le ministre. Je réitère mon invitation à retirer cet amendement, pour des raisons déjà évoquées. La formulation actuelle des contrats permettrait aux concessionnaires d’autoroute de répercuter ce droit fixe ; il serait plus cohérent et plus protecteur de clore le débat sur ce secteur d’activité avant d’envisager le principe d’un droit fixe. Monsieur Jean-Frédéric Poisson, le Gouvernement entend bien tenir les engagements présidentiels : comme l’a rappelé M. Jean-Yves Caullet, il ne s’agirait que de reventiler des prélèvements existants entre différents acteurs pour que tous les secteurs soient mis à contribution. Mais compte tenu de la complexité technique du sujet et du débat en cours avec les sociétés concessionnaires d’autoroute, je suggère d’attendre la discussion budgétaire.

M. Jean-Paul Chanteguet. Monsieur le ministre, vous suggérez donc de reporter la décision au débat sur la loi de finances pour 2016 afin d’attendre la fin des discussions avec les sociétés concessionnaires d’autoroute ?

M. Hervé Mariton. L’exposé sommaire mentionne un accroissement des ressources financières de l’ARAF ; l’amendement ne propose donc pas une reventilation, mais bien une augmentation de la dépense publique via une augmentation d’impôts. Pouvez-vous éclairer les membres de la Commission sur ce point ?

M. Olivier Faure. Des discussions, vous l’avez dit, sont en cours avec les concessionnaires autoroutiers : c’est un argument que nous avons déjà entendu, notamment lors de la discussion du projet de loi de finances. Nous sommes prêts à suivre le Gouvernement, et l’intérêt de tous est que ces discussions aboutissent pour permettre au contribuable de retrouver son argent, sans déstabiliser des entreprises qui sont utiles au pays. Encore faudrait-il que nous n’entendions pas, semaine après semaine, que les négociations sont en cours – nous avions même adopté, dans la loi de finances rectificative, le principe d’un débat au Parlement avant le 31 décembre 2014 !

D’ici à la séance publique, le Gouvernement pourra-t-il nous dire où en sont les discussions avec les sociétés d’autoroutes, afin de permettre à chacun de se déterminer ?

M. le ministre. Le Premier ministre a écrit au président Jean-Paul Chanteguet, le 31 décembre dernier.

M. Gilles Carrez. C’est assez tardif !

M. le ministre. Des négociations ont eu lieu entre le Gouvernement et les sociétés concessionnaires d’autoroutes, pour apporter une solution aux problèmes soulevés par l’Autorité de la concurrence et par la Cour des comptes, mais aussi pour répondre au rapport parlementaire remis au Premier ministre quelques semaines plus tôt.

Le souhait du Premier ministre est qu’une discussion avec les parlementaires ait lieu avant toute décision, sur la base des accords tels qu’ils sont en train d’être formalisés, et qu’il soit possible d’amender le texte en prenant en considération l’ensemble du travail mené sur ce sujet. Nous nous en tenons à ce calendrier. Mais nous aurons du mal à y parvenir avant la discussion en séance publique.

J’appelle également votre attention sur le fait que l’économie des contrats existants permet aux sociétés d’autoroutes de répercuter un prélèvement sur l’usager. Si j’adhère à l’esprit de ces amendements, je suis donc réservé sur l’inscription, dans la loi, d’un droit fixe, du moins tant que le cadre juridique n’a pas été revu.

Je renouvelle ma demande de retrait de cet amendement.

M. Jean-Yves Caullet. Si j’ai bien compris, la volonté du Gouvernement est bien que l’ensemble de ceux qui seront concernés par la future ARAFER contribuent à son budget, afin d’éviter toute distorsion. Les sociétés d’autoroutes seront donc, d’une façon ou d’une autre, incluses. Dès lors que le Gouvernement s’y engage, l’argument de la difficulté de calendrier me semble recevable.

M. le ministre. C’est tout à fait cela.

M. Gilles Savary, rapporteur thématique. Une immense compassion pour les sociétés d’autoroutes s’est exprimée ; mais, après avoir mis le nez dans ce dossier avec Jean-Paul Chanteguet, je suis en mesure de vous affirmer que le droit fixe ne leur ferait guère de mal.

Il s’agit en fait, vous l’avez compris, d’étendre une cotisation à deux secteurs nouveaux. Faire croire aux Français que c’est là une augmentation d’impôts serait de la mauvaise polémique politicienne : on augmente la cotisation au budget d’un organe de gouvernance !

M. Hervé Mariton. Vous parlez vous-même d’accroissement des ressources !

M. Gilles Savary, rapporteur thématique. C’est une cotisation, et non un impôt général, vous le comprenez très bien.

J’accepte de retirer l’amendement pour attendre la suite des travaux sur le sujet. Mais je souligne que nous sommes tous d’accord aujourd’hui pour étendre les compétences de l’ARAF, et j’ajoute que la nouvelle Autorité sera beaucoup plus sollicitée qu’elle ne l’était sur les questions ferroviaires : d’une certaine façon, l’ARAF est un prototype, puisque c’est un outil de régulation de la concurrence dans un domaine où il y a peu de concurrence. Avec les cars, il y aura au contraire beaucoup de travail. La question de son budget reviendra donc très vite.

M. le rapporteur général. Il est nécessaire de régler la question des ressources de l’ARAFER de façon équitable. Le Gouvernement ayant pris l’engagement de répondre en séance publique aux questions posées, nous en prenons bonne note, et nous retirons l’amendement.

L’amendement SPE1673 est retiré.

La Commission adopte les amendements rédactionnels des rapporteurs SPE504, SPE43, SPE44 et SPE505.

Elle se saisit ensuite de l’amendement SPE493 des rapporteurs.

M. le rapporteur général. Cet amendement vise à combler un manque en étendant le dispositif des sanctions administratives appliqué dans le domaine ferroviaire aux autres secteurs régulés : il ne peut pas y avoir de régulation sans système de sanction.

M. le ministre. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement SPE493.

Elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel SPE45 des rapporteurs.

Elle adopte l’article 1er ainsi modifié.

Après l’article 1er

La Commission examine l’amendement SPE1333 de Mme Michèle Bonneton.

Mme Michèle Bonneton. Cet amendement vise à associer les usagers des transports aux orientations et décisions de l’ARAFER. Cela permettrait de connaître leur avis, d’entendre leurs demandes... Souvent, l’absence de représentation des usagers et donc de concertation avec eux conduit à des malentendus, voire à des dysfonctionnements.

M. le ministre. Le Gouvernement est évidemment favorable à la consultation des associations de consommateurs et d’usagers. Elles sont aujourd’hui associées aux réflexions des pouvoirs publics, et elles continueront de l’être, le Gouvernement s’y engage.

En revanche, nous ne sommes pas favorables à une remise en cause des équilibres du collège de l’ARAFER tels qu’ils apparaissent dans le projet de loi ; en particulier, nous ne souhaitons pas augmenter sa taille. Avis défavorable.

Mme Michèle Bonneton. De quelle façon les associations seront-elles consultées ?

M. le ministre. Elles le sont d’ores et déjà régulièrement par le ministère des transports, dans le cadre de comités ad hoc. Les orientations politiques de l’ARAFER seront discutées de cette façon : le ministère des transports s’est engagé à ce que les orientations données à l’ARAFER y soient débattues.

Mme Michèle Bonneton. Il me semble que ce n’est pas tout à fait la même chose que d’être directement associé à l’ARAFER !

M. Gilles Savary, rapporteur thématique. Je suis également défavorable à l’amendement. Il faut bien comprendre ce qu’est un régulateur : en France, nous n’avons pas l’habitude de ce type d’autorités indépendantes, quasiment judiciaires – l’ARAFER disposera d’une chambre de règlement des différends et d’une commission des sanctions, composée de magistrats. Le conseil d’administration de SNCF Mobilités comprend des usagers, mais l’ARAFER n’est pas un conseil d’administration. Ce n’est pas non plus une instance socio-professionnelle consultative, à la différence du Conseil national des transports, qui comporte également des usagers. Le futur Haut Comité du transport ferroviaire les accueillera également.

Les usagers pourront être entendus par l’ARAFER, ou demander à l’être. Mais, au plan institutionnel, on ne peut pas envisager que des organisations de consommateurs appartiennent à une telle instance, qui a besoin de neutralité et de recul. C’est une révolution de notre mode de gouvernance : on passe du règne de la connivence et du conflit d’intérêts, y compris au cœur de l’État, à un plus grand contrôle par des autorités indépendantes – dont on constate déjà l’efficacité, par exemple lorsqu’elles font des remarques sur la gestion des autoroutes, puisque c’est bien l’Autorité de la concurrence qui a ouvert le débat sur le sujet.

M. Hervé Mariton. Je partage entièrement l’avis de notre collègue Gilles Savary, mais je ne comprends pas les propos du ministre : il a parlé, je crois, d’orientations données à l’ARAFER.

M. le ministre. Vous avez raison, il faut parler d’orientations politiques générales, et non d’orientations données à l’ARAFER.

M. le président François Brottes. La loi peut se permettre de donner des orientations et des objectifs aux autorités indépendantes.

La Commission rejette l’amendement SPE1333.

Elle se saisit alors de l’amendement SPE1334 de Mme Michèle Bonneton.

Mme Michèle Bonneton. Cet amendement tend à assurer l’indépendance des membres de l’ARAFER face aux pressions, toujours possibles, des groupes d’intérêts. Des suspicions pourraient naître si un ancien membre de l’ARAFER exerçait une activité professionnelle en relation avec les compétences de l’Autorité.

M. le ministre. Avis défavorable. Je suis sensible à votre souci de garantir l’indépendance des membres du collège. Toutefois, l’article L. 2132-8 du code des transports prévoit d’ores et déjà une période de viduité de trois ans. Cette durée nous paraît convenable au regard des règles habituelles en la matière : dix ans, ce serait excessif.

M. Gilles Savary, rapporteur thématique. Même avis. La durée de trois ans est généralement admise dans l’Union européenne pour éviter le conflit d’intérêts et le favoritisme. Une durée de dix ans serait exorbitante : on ne peut pas condamner ainsi la vie professionnelle de quelqu’un – nous nous interdirions, en pratique, de recruter des gens compétents.

M. Julien Aubert. C’est vrai. J’ai été rapporteur de la commission de déontologie de la fonction publique : les règles d’interdiction professionnelle posent déjà de sérieux problèmes. Avec une limite de dix ans, plus aucun professionnel compétent n’acceptera de mettre les pieds à l’Autorité de régulation ! Il faut prêter attention à la question des conflits d’intérêts, mais sans bloquer les carrières. Ne prenons pas de mesures contreproductives.

L’amendement SPE1334 est retiré.

La Commission se saisit alors de l’amendement SPE1270 de M. Joël Giraud.

M. Joël Giraud. Il s’agit d’un amendement d’appel – qui ne pourra pas être adopté en l’état, puisque je m’aperçois avec embarras qu’il comporte une énorme faute d’orthographe...

En matière d’information sur les possibilités de transport, le cas de la France est singulier : alors que la Deutsche Bahn, que Trenitalia, que les CFF suisses informent les usagers sur tous les modes de transport disponibles, afin de faciliter la mobilité, nous ne disposons d’aucun site de ce genre : « voyages-sncf.com » est, au sens de la loi, une agence de voyages, qui ne propose aucune information sur les offres des concurrents de la SNCF. On n’y dispose pas, par exemple, des horaires des trains de nuit entre Paris et l’Italie, ou des trains entre Marseille et Milan, qui sont exploités par d’autres que la SNCF. Pour se renseigner sur un voyage en France, la meilleure solution, c’est d’aller sur le site de la Deutsche Bahn !

Cet amendement vise donc à la mise en place d’une plateforme ouverte. La situation française est aberrante : notre système est phagocyté par des intérêts privés, au point qu’il indique souvent à l’usager l’itinéraire le plus long, de façon à le faire payer le plus cher possible – drôle de façon de lui dire merci.

M. le ministre. Le Gouvernement est favorable au développement de l’open data, pour les raisons que vous avez évoquées, et aussi pour favoriser le développement de l’utilisation en ligne de ces données.

Néanmoins, il nous faut nous montrer prudents. Dans le cadre de la préparation du projet de loi sur le numérique, des travaux sont en cours, notamment sur les conséquences d’une telle mesure pour la SNCF. Pour essayer d’ores et déjà d’avancer dans votre sens, je vous propose de rectifier votre amendement en ajoutant, à l’alinéa 3, le mot « conventionnés » après les mots « l’ensemble des modes de transport public de voyageurs ». Ce serait un début.

M. le président François Brottes. Si je puis me permettre, il serait sans doute plus facile – dans la mesure où il présente des problèmes de rédaction – que l’amendement soit retiré pour être réécrit, puis déposé à nouveau en vue de la séance publique.

M. Joël Giraud. Je me réjouis de la prise en considération par le Gouvernement de cette particularité française qui entrave largement la mobilité. Je me conformerai à vos conseils, monsieur le président.

M. Gilles Savary, rapporteur thématique. Je soutiens la proposition de notre collègue Joël Giraud. L’open data existe maintenant dans le domaine des taxis ; il est temps de faire la même chose pour le secteur ferroviaire, au vu de la masse de données dont la SNCF dispose et qui pourraient améliorer la situation des usagers. Sur la méthode, je me range à l’avis de M. le ministre.

L’amendement SPE1270 est retiré.

L’amendement SPE1271 de M. Joël Giraud est également retiré.

Article 2 : Transport public routier de personnes : libéralisation des services de transport par autocar

La Commission se saisit d’abord de l’amendement SPE1046 de M. André Chassaigne.

Mme Jacqueline Fraysse. Nous proposons de supprimer cet article 2. En effet, nous sommes opposés à l’amplification de la concurrence entre la route et le rail. La croissance du transport par la route que promeut le projet de loi est parfaitement contradictoire avec la défense, urgente et indispensable, de l’environnement, et en particulier avec la diminution de nos émissions de gaz à effet de serre.

De plus, ces dispositions vont accentuer la politique de délaissement du transport ferroviaire qui se met en place au détriment de l’intérêt général comme de l’intérêt des usagers : le transport par la route est moins sûr que le transport ferroviaire.

Il est exact que les tarifs des trains sont trop élevés pour beaucoup de nos concitoyens. Mais on peut s’étonner qu’aucune réflexion ne soit conduite pour les abaisser, ou à tout le moins pour les moduler dans certains cas.

M. le ministre. Je ne répèterai pas ici ce que j’ai dit lors de nos premiers échanges, mais je tiens à répondre aux arguments qui viennent d’être avancés.

L’idée que la route concurrence le rail est fausse, et c’est, historiquement, une erreur française : il y a plutôt une complémentarité des différents moyens de transport, et il faut donc plutôt organiser l’intermodalité. C’est l’une des faiblesses de notre organisation. Le transport par car ne se substituera que de façon très marginale, voire pas du tout, au transport ferroviaire : il se substituera à la voiture individuelle ou au covoiturage, et il permettra à certains, qui ne le pouvaient plus du tout, de se déplacer. In fine, le bilan carbone de ce développement du transport par car ne sera donc pas forcément mauvais.

Dans certains cas, le train, même subventionné, est devenu très peu rentable : lorsque l’on fait rouler, de façon plus souple qu’un train, un autocar, même à demi plein, le bilan carbone est meilleur que lorsqu’on fait rouler de manière régulière un train vide.

L’autocar se substituera aussi, je l’ai dit, à la voiture individuelle et au covoiturage, qui se développe massivement dans notre pays. Ce sera donc une façon d’industrialiser le covoiturage... Le bilan carbone du transport par car sera également meilleur que celui du covoiturage.

Enfin, nous offrons la possibilité à certains de nos concitoyens, qui ne peuvent pas du tout se déplacer aujourd’hui, de le faire. Je serais étonné, madame la députée, que vous préfériez un meilleur bilan carbone à l’impossibilité de déplacement pour les moins favorisés : c’est donc là, je crois, un bon point pour cette réforme.

Nous créons enfin un nouveau secteur d’activité, et donc des emplois.

L’avis du Gouvernement est défavorable.

M. le rapporteur général. Avis défavorable également. Supprimer cet article, ce serait refuser d’apporter des réponses aux problèmes de mobilité qui se posent aujourd’hui. Vos arguments, tant sur la concurrence que sur le bilan carbone, ne sont pas exacts, madame Jacqueline Fraysse. Loin de délaisser le train, nous voulons promouvoir un mode de transport complémentaire ; c’est une façon de renforcer l’offre, alors que la demande de mobilité augmente.

M. Gilles Savary, rapporteur thématique. Vous contestez radicalement, madame Jacqueline Fraysse, la décision d’ouvrir un nouveau mode de transport, alors que la position de ferroviaire a été terriblement dégradée par notre volonté, jusqu’ici, de favoriser un seul mode de transport. Si nous n’avons pas de trains dans nos aéroports, c’est parce que nous avons été corporatistes ! Le fret ferroviaire s’écroule en France, par exemple pour desservir le port du Havre. L’Allemagne, à l’inverse, a toujours voulu être intermodale.

Le secteur ferroviaire aujourd’hui, c’est 13 milliards d’euros de subventions, 44 milliards d’euros de dettes ! Depuis dix ans que des politiques de transfert modal sont menées au niveau européen, notre répartition modale n’a pas bougé d’un iota. En revanche, la route a énormément progressé au plan environnemental, notamment grâce aux normes européennes : aujourd’hui, ses performances sont comparables à celles du train. Faut-il rappeler que 40 % des kilomètres parcourus en TER le sont sur des trains diesel ? L’autocar souffre la comparaison, et il est même plus vertueux.

Le train est très sûr, c’est vrai, à condition que nous remettions très vite notre réseau à niveau : n’oublions pas les heures noires que nous avons vécues. Mais le car est également très sûr, en tout cas beaucoup plus sûr que le covoiturage : les chauffeurs sont des professionnels et des règles sociales strictes s’appliquent, sur les temps de pause par exemple.

Nos présidents de région sont tous très attachés au chemin de fer, mais ils ont subrepticement amené jusqu’à 23 % la part des liaisons TER assurée par autocar. Le train coûte cher. Les budgets publics ne le supportent plus. Quant aux voyageurs qui utilisent le TER, ils le trouvent déjà trop cher, alors qu’ils ne payent que 28 % du coût réel.

Nous proposons donc simplement l’ouverture d’un mode de transport moins cher, pour des gens qui ne peuvent presque plus se déplacer, essentiellement sur de longues distances. Il faut simplement veiller à protéger les lignes du service public, ce qui est prévu par le projet de loi.

M. Jean-Yves Caullet. Le train transporte, vite et loin, des voyageurs nombreux. Mais, élu d’un territoire où les lignes de train sont peu nombreuses, je peux témoigner que la seule alternative aujourd’hui, c’est souvent la voiture individuelle. Le projet de loi nous offre l’ouverture d’un nouveau secteur, de façon régulée, afin d’éviter les concurrences mortifères. Il s’agit de créer du transport collectif, meilleur à tous points de vue que le transport individuel. Ces lignes pourraient, il faut le souligner, servir à rabattre des voyageurs vers d’autres modes de transport : la complémentarité est réelle.

M. Jean-Louis Roumegas. Le groupe écologiste n’a pas déposé d’amendement de suppression de cet article. Les risques qui viennent d’être soulignés nous paraissent toutefois bien réels : l’ouverture du secteur du fret a détruit le fret ferroviaire. Nous estimons donc qu’un encadrement strict de ces ouvertures de lignes de car doit être prévu, afin que la concurrence ne détruise pas le service public ferroviaire. Ces nouvelles lignes doivent notamment, à notre sens, proposer un service qui n’existe pas.

Vous mettez en avant l’idée que le car permettra à des publics nouveaux de se déplacer – les jeunes, les étudiants par exemple. Mais nous ne pouvons pas nous dispenser d’une réflexion sur les tarifs de la SNCF, qui viennent encore d’augmenter ! Pourquoi ne pas essayer de développer une offre tarifaire adaptée ? Diriger les plus défavorisés vers des solutions low cost n’est pas l’idéal : passer la nuit dans le car alors qu’il existe un TGV ne me paraît pas idéal. Nous déplorons profondément le développement d’un service public à deux vitesses.

Nous déciderons de notre vote à la fin du débat.

Mme Michèle Bonneton. J’approuve les propos de Jean-Louis Roumegas : l’ouverture du secteur du transport par car se justifie si elle permet de diminuer le nombre de trajets en voiture individuelle ; mais elle ne doit pas conduire à supprimer des lignes locales de train. Sur ces dernières, il y a, c’est vrai, beaucoup d’efforts à faire. Mais ces nouvelles dispositions ne doivent pas leur donner le coup de grâce : ce serait dramatique pour notre pays et pour la transition énergétique.

Mme Jacqueline Fraysse. J’écoute ces réponses avec beaucoup d’intérêt. Je maintiens l’amendement pour le moment.

La Commission rejette l’amendement SPE1046.

Elle examine ensuite les amendements SPE1322 de M. François-Michel Lambert et SPE1533 des rapporteurs.

M. Denis Baupin. Le groupe écologiste ne considère pas l’autocar comme un mode de déplacement forcément anti-écologique : tout dépend des conditions dans lesquelles il est utilisé. La gouvernance du dispositif est donc essentielle.

Nous proposons de modifier le projet de loi pour ne pas laisser l’initiative entièrement au privé et mettre plutôt en place une organisation complémentaire des transports publics existants, notamment ferroviaires, donc une ouverture pilotée et régulée.

Il faut, cela a été dit, une cohérence entre train et car, celui-ci rabattant notamment les voyageurs sur les lignes de train. C’est un élément que nous mentionnons parmi les arguments qui doivent faire accepter, ou non, l’ouverture d’une ligne de car par l’autorité de régulation. Nous pensons également qu’il ne faut pas confier au privé les seules lignes rentables : il nous paraîtrait donc plus cohérent d’organiser l’ouverture du secteur du transport par autocar sous la forme de délégations de service public, afin d’attribuer aux entreprises à la fois des lignes rentables et des lignes moins rentables. Cela nous paraîtrait plus propre à assurer le maillage du territoire que l’ouverture d’une grande concurrence sur quelques itinéraires rentables – c’est l’un des risques de la rédaction actuelle du projet de loi.

Nous souhaitons également que les véhicules qui seront mis en service soient très performants d’un point de vue écologique. Ce doit être l’une des conditions de l’autorisation d’ouverture de ligne nouvelle. Il vaut mieux, c’est vrai, un car rempli qu’un train vide ; mais il vaut mieux un car peu polluant qu’un car diesel ancien.

M. Gilles Savary, rapporteur thématique. Il est clair, monsieur Denis Baupin, que le texte doit proposer une gouvernance, notamment pour l’agrément des lignes, ou à tout le moins prévoir les modalités de leur déclaration.

La rédaction initiale prévoyait que les autorités organisatrices de transports pouvaient saisir l’ARAFER chaque fois qu’une nouvelle ligne risquait de porter une « atteinte essentielle » à l’économie d’une ligne de service public. Les autorités organisatrices concernées, je le souligne, sont nombreuses : régions, mais aussi départements pour les transports par bus interurbain... Nous proposons donc, par l’amendement SPE1533, un mode de déclaration d’ouverture rapide, simple, et propre à sécuriser le service public existant.

Ce projet de loi nous oblige à renverser entièrement nos perspectives intellectuelles : nous continuons aujourd’hui de privilégier le train à tout autre mode de transport, même lorsqu’il est extrêmement déficitaire. Notre sentiment est que, au regard de la conjoncture budgétaire, l’initiative publique trouverait intérêt à n’intervenir qu’en cas de défaillance de l’initiative privée. Oui, l’ouverture du transport par car provoquera des recompositions dans l’offre de transport ; mais cela permettra sans doute d’aller vers un optimum pour l’usager, avec des lignes de service public conventionnées, qui permettront de compenser des manques, avec des services privés parfois. Pour aller de Bordeaux à Lyon, aujourd’hui, il faut prendre l’avion : en train, il faut près de huit heures... Si une ligne privée d’autocar se crée et emprunte l’A89, dite « autoroute des présidents », qui est vide, cela ne pourra qu’améliorer la qualité de service, même si la réduction du temps de trajet n’est pas considérable.

Nous proposons de substituer au périmètre infrarégional prévu par le projet de loi – la taille des futures régions étant très variable, nous risquerions d’aboutir à des inégalités de traitement – un seuil de 100 kilomètres. Selon notre proposition, en deçà de cette distance, les nouvelles lignes font l’objet d’une déclaration auprès de la direction générale des infrastructures, des transports et de la mer – DGITM – du ministère de l’énergie et du développement durable, préalablement à leur ouverture. L’État informe alors l’ensemble des autorités organisatrices de transports concernées. Si celles-ci disposent d’une ligne de service public sur le parcours, elles peuvent saisir l’ARAFER, sous six semaines ; l’ARAFER étudie si l’atteinte substantielle est réelle et rend un avis conforme sous deux mois, ou trois si le dossier est complexe.

Laisser cette décision aux autorités organisatrices n’est pas raisonnable, car certains peuvent être hostiles au car par idéologie, et on aboutirait à des lignes en confettis...

Il ne s’agit pas, monsieur Denis Baupin, d’ouvrir des services conventionnés ; le système envisagé n’est pas celui de la délégation de service public. Il s’agit d’ouvrir un marché. Les autorités organisatrices continuent de pouvoir développer les services conventionnés de leur choix – bus ou train – et peuvent tout aussi bien choisir de ne pas en ouvrir, si l’initiative privée suffit à assurer, à des tarifs convenables, les liaisons nécessaires. Nous regardons seulement si les lignes privées nouvelles portent atteinte au service public existant.

Nous sommes défavorables, vous l’avez compris, à l’amendement SPE1322.

M. le ministre. Je commence par répondre aux arguments développés par M. Denis Baupin, dans cet amendement et d’autres qui lui sont liés.

La philosophie de l’amendement SPE1322 est celle d’une économie administrée. Ce n’est pas l’esprit du texte, même si certaines préoccupations nous sont communes et peuvent être prises en considération, notamment grâce à l’amendement SPE1533.

La limitation à un réseau préalablement défini par l’ARAFER ne nous paraît pas réaliste : notre territoire est vaste, et un tel schéma prédéfini deviendrait rapidement obsolète. Cela entrerait de surcroît en contradiction avec la philosophie du projet de loi. Il nous semble préférable d’essayer de corriger les dommages que l’ouverture de certaines lignes pourrait occasionner plutôt que de limiter les ouvertures en amont.

Quant à l’extension du régime de protection des services publics à toutes les liaisons, infra- et inter-régionales, il me semble qu’elle serait également excessive : nous nous condamnerions à ne changer la situation qu’à la marge. Le seuil kilométrique proposé par les rapporteurs nous paraît donc plus adapté, en tout cas nuirait moins au développement de cette activité que nous voulons créer.

Sur l’interdiction de certaines lignes par les autorités organisatrices pour des motifs non économiques – pour des raisons environnementales, de cohérence intermodale, d’égalité des territoires – je veux dire que l’offre d’autocar ne doit être encadrée a priori que si elle a des conséquences négatives pour un service public existant. C’est également ce que proposent les rapporteurs. La multiplication des critères serait source de complexité et nuirait à l’objectivité des décisions. C’est ce qui me gêne dans votre amendement, monsieur Denis Baupin, à vrai dire : la multiplication des contraintes a priori stériliserait le dispositif proposé.

Le développement d’une mobilité citoyenne respectueuse de l’environnement est une priorité du Gouvernement ; nous investissons d’ailleurs, dans le cadre des plans industriels, pour favoriser la recherche et développement, afin que les constructeurs proposent des autocars moins polluants. Je m’engage à aller plus loin encore dans cette direction.

De façon cohérente, la volonté du Gouvernement, je le répète, est bien de substituer du transport collectif à du transport individuel. Malgré l’excellence de notre système ferroviaire, la France est en retard sur ce point : la part cumulée des transports par train et autocar est de 15 % en France, contre 20 % en Espagne et près de 17 % en Italie. C’est dû au taux de remplissage décevant, hors TGV, de nos trains, et au faible développement des autocars. Le bilan carbone de ceux-ci, je le souligne aussi, n’est pas significativement différent de celui des TER notamment. Il serait donc illogique de prévoir une possible interdiction de cars sur la base d’un critère à l’aune duquel leur utilisation est plutôt positive, en particulier par rapport à l’automobile.

Il nous paraît pleinement justifié, monsieur Denis Baupin, de préciser que l’atteinte doit être substantielle ; il n’y a pas lieu de prohiber les initiatives privées dont l’impact sur le service public serait mineur, ce qui signalerait plutôt une bonne complémentarité entre public et privé. Les conséquences doivent être appréciées, à notre sens, dans leur globalité, et non pour la seule ligne concernée. Les contrats passés par les régions avec la SNCF couvrent de nombreuses lignes entre lesquelles il existe une péréquation. Sur ces deux points, l’amendement SPE1322 nous apparaît excessif.

S’agissant de l’avis de l’ARAFER, il nous semble, contrairement à vous, que l’avis conforme est un point essentiel, garant de la cohérence et de la sécurité juridique de la réforme. Il permettra l’harmonisation des pratiques régionales, et garantira donc l’égalité des territoires. Les régions et les autocars pourront aussi, sur la base de cet avis, éventuellement agir en justice.

Vous souhaitez un régime déclaratif en toutes circonstances. Je suis sensible à votre souci de clarté et de transparence, mais il ne faut pas multiplier les sources de complexité. Il nous paraît préférable de limiter le régime déclaratif au strict nécessaire. La solution proposée par l’amendement SPE1533, qui est de limiter ces déclarations aux liaisons courtes, nous paraît préférable.

Sur l’ouverture des données des sociétés d’autocars, qui rejoint une discussion que nous venons d’avoir, je redis que le Gouvernement est favorable au développement de l’accès libre aux données numériques. Le projet de loi sur le numérique engagera sur ce point des réformes substantielles ; Mme Axelle Lemaire et M. Thierry Mandon feront une large présentation de ce texte, qui fait l’objet d’une vaste concertation, dès cette semaine. Sur le thème précis des données numériques dans le secteur du transport, M. Alain Vidalies a confié un travail à M. Francis Jutand, membre du Conseil national du numérique. Ses conclusions sont attendues à la fin du mois de janvier et nourriront ledit projet de loi. Il nous paraît préférable, pour prendre des mesures, d’attendre d’avoir toutes les cartes en main. Mais la volonté du Gouvernement est bien de favoriser la plus grande ouverture possible des données, donc la transparence et in fine les usagers.

Les normes environnementales, enfin, doivent évidemment être respectées. Il nous paraît néanmoins difficile de faire apparaître ce point dans la loi : les normes d’émission sont harmonisées à l’échelle européenne ; nous risquerions de créer de l’insécurité juridique. Tout nouveau véhicule immatriculé – ce qui sera le cas des nouvelles flottes d’autocars qui vont se constituer – sera de toute façon obligatoirement conforme aux normes les plus récentes.

Pour l’ensemble de ces raisons, l’avis du Gouvernement est défavorable à l’amendement SPE1322, même si nous comprenons certaines de vos préoccupations, auxquelles il nous semble que répond l’amendement qu’a présenté M. Gilles Savary.

La proposition de seuil kilométrique paraît effectivement permettre de mieux prendre en considération la réalité des services publics et de garantir la cohérence territoriale. Elle est très pertinente du point de vue de la concurrence potentielle entre le chemin de fer et la route. Le seuil de 100 kilomètres est d’ailleurs proche de ce qui se fait chez nos voisins, l’Allemagne en particulier ayant retenu comme seuil un trajet de moins d’une heure. Un seuil trop élevé briderait l’efficacité de la réforme et alourdirait la charge de travail de l’ARAFER, qui en serait moins efficace.

Cet amendement nous paraît aussi propre à améliorer le régime de déclaration. Je proposerai tout à l’heure, pour tenir compte sur un point précis des amendements SPE1317 de M. François-Michel Lambert et SPE920 de M. Philippe Vigier, un sous-amendement technique. Il nous paraît en tout cas judicieux de concentrer le régime déclaratif sur les liaisons courtes, ce qui correspond au périmètre des analyses d’impact de l’ARAFER.

Enfin, pour les nouvelles liaisons, il nous semble préférable que la déclaration soit faite directement à l’ARAFER. C’est un ajustement minime.

C’est pourquoi j’émets un avis favorable à l’amendement SPE1533.

M. le président François Brottes. Je regrette que l’on évoque peu, dans nos débats, le développement du covoiturage, et le succès phénoménal de Blablacar, par exemple.

M. Gilles Savary, rapporteur thématique. L’intérêt du seuil kilométrique est de permettre, sur une ligne de bus longue, de protéger le cabotage. Les régions pourront donc faire valoir l’existence d’une ligne de moins de 100 kilomètres qui pourrait être mise en danger par l’ouverture d’une ligne longue de 300 kilomètres. On pourra empêcher l’ouverture d’une ligne de car si tel ou tel point est déjà desservi, par un bus ou un train.

M. Jean-Frédéric Poisson. J’ai précisé lors de la discussion générale que le groupe UMP s’opposerait à ce projet de loi, sans pour autant s’interdire d’en approuver certaines dispositions. Nous nous apprêtons, si les amendements ne le modifient pas de façon substantielle, à voter cet article : nous sommes favorables à l’ouverture du transport par car, qu’il vienne en substitution ou en complément du transport par train. Nous sommes aussi favorables à une régulation.

J’aimerais être certain que votre projet de loi tient compte de la situation spécifique de l’Île-de-France. Plusieurs élus franciliens dans cette salle connaissent les particularités franciliennes. L’expertise a-t-elle été conduite à son terme sur ce sujet ?

Plusieurs amendements font référence à des autorités organisatrices de transports. Mais j’appelle votre attention sur le fait que les transports à la demande, par exemple, ne sont pas codifiés. Or, certaines agglomérations ou communautés de communes se sont dotées de compétences dans le domaine du transport, et elles peuvent parfaitement passer avec des opérateurs privés de toutes sortes des conventions pour déployer, par exemple, des systèmes de transport à la demande qui entrent dans le champ défini ici, celui de « services réguliers non urbains ». Le projet de loi laisse de côté, je crois, le cas des établissements publics de coopération intercommunale – EPCI – qui ne sont pas encore autorités organisatrices de transports et qui, en Île-de-France par exemple, sont en relation tant avec le conseil régional qu’avec le Syndicat des transports d’Île-de-France – STIF. Il n’est pas possible de laisser perdurer ce vide juridique, mais, si nous décidons de légiférer, il faudra veiller à maintenir toute la souplesse nécessaire et à laisser toute sa place à l’expérimentation.

M. Jean-Louis Bricout. En matière de mobilité, l’information numérique sur les transports joue un rôle essentiel. Il faudrait pouvoir l’intégrer dans l’un ou l’autre des amendements.

M. Gilles Lurton. Si j’approuve l’amendement du rapporteur qui vise à mettre en place un régime déclaratif, je trouve que le seuil de 100 kilomètres est trop bas : compte tenu des propos entendus lors des auditions, je m’attendais plutôt à 150 ou 200 kilomètres.

M. Denis Baupin. Rassurez-vous, monsieur le président, je suis très favorable au covoiturage, et encore plus aux autocars bien remplis. Pour avoir mené à Paris une politique en faveur des autobus et du covoiturage, je pense que nous pouvons trouver un terrain d’entente. En revanche, je ne suis pas d’accord avec le ministre quand il explique que notre amendement plaide pour une forme d’économie administrée – ce qui, de sa part, ne ressemble pas à un compliment… En l’occurrence, nous défendons un service public des transports, orientation que nous n’avons pas intérêt à dénigrer.

Puisque les actuels usagers du train utiliseront aussi les futurs autocars, il faut une politique coordonnée en matière de tarification, d’information et d’horaires de correspondance, quels que soient les acteurs. C’est ce que font les autorités organisatrices, tel le STIF qui, en Île-de-France, est même passé à un tarif unique sur tout le territoire régional. La coordination entre ces différents modes de transport est essentielle, notamment pour les usagers, et nous aurions tort de penser que le libre marché apportera une réponse optimale.

Si le Gouvernement souhaite répondre aux besoins de mobilité tout en réduisant les impacts environnementaux des transports, il est contreproductif de refuser d’intégrer ce critère parmi ceux qui seront pris en compte par l’autorité de régulation. Il ne s’agit pas de considérer a priori que l’autocar sera est plus polluant que le rail. Pour ma part, je pense que cela dépend des conditions dans lesquelles on l’utilise. Et, inversement, si l’on pense que l’autocar est moins polluant dans tous les cas, pourquoi refuser de retenir ce critère ? De même, si le Gouvernement cherche à promouvoir les véhicules moins polluants, comme vous le prétendez, monsieur le ministre, pourquoi ne pas profiter de ce dispositif pour demander aux compagnies d’en utiliser ? Il serait pertinent d’imposer cette condition alors que nous sommes en train d’adopter la loi sur la transition énergétique et que nous nous préparons à accueillir la conférence sur le climat.

Monsieur le rapporteur, il ne nous avait pas échappé qu’il ne s’agit pas de délégation de service public, et c’est même ce qui nous incite à vouloir modifier la logique : il nous paraît pertinent de retenir celle qui prévaut pour les autorités organisatrices de transports
– AOT –, mais à l’échelle nationale. En l’absence d’AOT au niveau national, qui va organiser un dispositif cohérent avec celui du transport par rail ? Il faudrait une autorité organisatrice de transports intérieurs pour l’ensemble du territoire national. Peut-être pourra-t-on en créer une dans le cadre d’une nouvelle loi d'orientation pour les transports intérieurs ? Quoi qu’il en soit, ce genre d’autorité fait défaut à l’heure actuelle.

Nous maintenons cet amendement. Si nous voulons que le système d’autocars puisse répondre aux besoins de mobilité de nos concitoyens et aux enjeux de cohérence écologique et de réduction des émissions de gaz à effet de serre, il faut qu’il soit plus organisé. L’amendement du rapporteur n’est pas satisfaisant car, passé le seuil des 100 kilomètres, il n’y a plus aucune régulation.

M. le président François Brottes. Si j’ai bien compris, le ministre suggérait au rapporteur de prendre en compte les remarques de nos collègues François-Michel Lambert et Philippe Vigier et de donner le rôle de régulateur à l'ARAFER. Monsieur le rapporteur, intégrez-vous ces suggestions dans votre amendement ?

M. Gilles Savary, rapporteur thématique. Je n’y vois aucun inconvénient. Si l’État ne veut pas recevoir les déclarations lui-même, elles seront adressées à l’ARAFER qui a une vision globale et intermodale avec le ferroviaire. À cet égard, la parole du ministre a beaucoup plus d’autorité que la mienne.

Monsieur Jean-Frédéric Poisson, le seuil des 100 kilomètres peut être discuté et, en Île-de-France, il sera fixé par décret après avis de l’ARAFER. Refusant d’opposer le rail à la route, nous nous situons dans une approche de mobilité globale et intermodale. En Île-de-France, voulons-nous que des cars aillent directement de la grande périphérie aux aéroports ou aux gares sans passer par Paris ? Telle est la question.

Nous voulons améliorer les transports en comblant notre grand retard sur ces questions. Comment on y parvenir avec le plus de souplesse possible ? Un amendement à venir propose que ces nouvelles liaisons par car s’inscrivent résolument dans une approche intermodale, que les gares routières soient connectées aux gares maritimes, aux gares ferroviaires et aux aéroports. Nous voulons offrir un bouquet de mobilités aux usagers, sans chercher à protéger absolument un train qu’ils ne prennent pas au détriment d’un car qu’ils pourraient prendre. Le texte prévoit donc un régime un peu particulier pour l’Île-de-France.

En toute logique, monsieur Denis Baupin, vous auriez dû voter pour l’amendement de Jacqueline Fraysse. Si nous accédons à votre demande de délégations de service public alors qu’elles ne sont interdites à aucune collectivité territoriale ou AOT, nous ne changeons pas de système : aucune ligne ne sera créée par un entrepreneur routier. C’est l’aboutissement de votre détour technique. Or nous voulons permettre à des entreprises d’ouvrir des lignes de cars dont nous verrons bien comment elles s’articuleront avec les lignes de service public. Il ne sera jamais interdit à une AOT de poursuivre l’exploitation de lignes de service public de cars ou de trains, ou même d’en créer de nouvelles. Quoi qu’il en soit, j’accepte la proposition du Gouvernement.

La Commission rejette l'amendement SPE1322.

M. le président François Brottes. L’amendement SPE 1533 est modifié comme suit, à la demande du Gouvernement et avec l’accord du rapporteur thématique : à l’alinéa 3, les mots « autorité administrative de l’État » sont remplacés par les mots « Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières ».

La Commission adopte l’amendement SPE1533 ainsi rectifié.

En conséquence, les amendements SPE1047, SPE1311, SPE1307, SPE1310, SPE1323, SPE868, SPE1274, SPE271, SPE869, SPE1276, SPE872, SPE1278, SPE1277, SPE1313, SPE1314, SPE875, SPE1295, SPE876, SPE1048, SPE1049, SPE1315, SPE1275, SPE1050, SPE270, SPE1268, SPE920, SPE1317, SPE1316, SPE47, SPE1282, SPE1281, SPE1280, SPE69, SPE48, SPE1279, SPE923, SPE1283, SPE1284 tombent.

M. le ministre. Pour être complet, je souhaitais apporter une réponse complémentaire sur l’Île-de-France. Selon la philosophie de l’amendement des rapporteurs, l’ARAFER donnera son avis à partir d’un certain seuil kilométrique fixé par décret. Les modalités de régulation sont donc prévues et le STIF reste le seul opérateur des mobilités, conformément à la loi de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles. Compte tenu de la cohérence d’ensemble du dispositif, le STIF restera l’AOT compétente : le texte actuel ne propose pas de constituer une AOT spécifique de la même façon que la loi sur les métropoles avait décidé que le STIF occuperait cette fonction.

M. Jean-Frédéric Poisson. En Île-de-France, il y a d’autres EPCI que la métropole de Paris. Celle-ci n’épuisera l’intégralité de la compétence en matière de transports ni sur le territoire régional ni sur le sien, en particulier quand il s’agit de transports ne dépendant pas du STIF. En dehors des transports scolaires et périurbains réguliers, le STIF n’a plus d’autre compétence que celle de décider de conduire tel ou tel projet. À ce moment-là, les EPCI qui ne sont pas AOT pourront prendre le relais pour déployer des systèmes alternatifs ou complémentaires. Je voudrais cependant être sûr que cette mécanique ne sera pas handicapée ou remise en cause par le présent texte.

La Commission adopte l'amendement rédactionnel SPE49 des rapporteurs.

La Commission est saisie de l'amendement SPE 1318 de M. François-Michel Lambert.

M. Denis Baupin. Les usagers des différents modes de transport sont les mêmes, et ils ont besoin d’informations coordonnées. Si nous voulons que nos concitoyens privilégient les transports collectifs, nous devons faire en sorte qu’ils aient accès à des informations fiables et cohérentes, qu’ils sachent à quoi s’en tenir en matière de mobilité quel que soit le mode de transport utilisé. Tel est l’objet de cet amendement.

M. le ministre. Monsieur Denis Baupin, je partage votre souci du service public tout en constatant qu’il ne s’étend pas à la totalité des transports et du territoire. Il faut lui trouver sa juste place.

Quant à cet amendement, il relève de la même philosophie que celui proposé par M. Joël Giraud sur la SNCF. Le Gouvernement est favorable au développement du partage d’informations en ligne mais considère que cette disposition doit être envisagée dans le cadre de la loi sur le numérique. Je vous propose deux solutions : retirer votre amendement pour que votre préoccupation soit prise en compte dans le cadre d’une ambition plus large sur le partage des données en ligne, c'est-à-dire dans le projet de loi sur le numérique ; le modifier pour remplacer les entreprises mentionnées au 1) de l’article L. 3111-17 par les « entreprises de transports publics de voyageurs conventionnées », ce qui en réduit le champ mais sécurise le dispositif.

M. Gilles Savary, rapporteur thématique. Cet amendement est extrêmement intéressant, mais il ne peut être dissocié de celui de notre collègue Joël Giraud. Je suggère donc que cette proposition soit, elle aussi, examinée lors du rendez-vous promis par le Gouvernement sur l’open data dans les transports. Le Gouvernement doit s’engager sur un projet de données ouvertes généralisé à tous les modes de transport : il serait paradoxal de l’exiger des autocaristes, à bon escient, et de le refuser pour la SNCF, qui est le plus gros producteur et détenteur de données des transports terrestres en France.

M. le président François Brottes. Monsieur le ministre, êtes-vous sensible aux appels à la clarté du rapporteur thématique ?

M. le ministre. J’y suis pleinement sensible. Parlant sous votre contrôle, monsieur le président, je propose de prendre le même engagement que précédemment pour l’amendement de M. Joël Giraud : sous-amender en séance et avoir une approche plus large dans le cadre du projet de loi sur le numérique, afin d’aller au-delà des transports conventionnés.

M. le président François Brottes. J’imagine, monsieur Denis Baupin, que vous retirez votre amendement ?

M. Denis Baupin. Non, mais je suis d’accord pour le modifier dans le sens proposé par le ministre. S’il propose de le sous-amender, c’est donc qu’il envisage de l’approuver, ce dont je le remercie… Ce qui sera acquis en commission permettra de faire avancer le débat en séance. Si nécessaire, il pourra toujours être amendé et complété en séance par le Gouvernement ou d’autres.

M. le président François Brottes. Il me semble que le rapporteur thématique avait une objection de forme…

M. Gilles Savary, rapporteur thématique. De fond ! Monsieur Denis Baupin, vous proposiez que les autocaristes mettent leurs données à disposition. Or, si j’ai bien compris, vous êtes maintenant d’accord pour ne le demander qu’aux entreprises d’autocars conventionnées. Pour ma part, je pense que la mesure doit s’appliquer aussi aux entreprises privées et à la SNCF. Pourquoi les entreprises conventionnées par les régions ou les départements devraient-elles fournir leurs données tandis les futures lignes privées en seraient dispensées ? Je ne comprends pas votre position et, très amicalement, je me demande si vous mesurez bien la portée très restrictive de la proposition du ministre.

M. le président François Brottes. Je crains que le rapporteur thématique n’ait raison.

M. Hervé Mariton. C’est l’occasion de reprendre le débat un peu avorté de tout à l’heure. Le rapporteur thématique a absolument raison : le ministre invoque pudiquement la sécurité juridique, mais s’agit-il de cela ou de la protection des intérêts commerciaux de la SNCF ? Il faut ouvrir l’accès à l’ensemble des données et je ne vois pas ce qui pourrait y faire obstacle au nom de la sécurité juridique, qu’il y ait convention ou non, qu’il s’agisse du transport par autocar ou par train. On peut comprendre que la SNCF ne le souhaite pas pour ses activités concurrentielles, mais cela ne correspond pas nécessairement à l’intérêt général dont nous sommes garants.

M. le président François Brottes. Monsieur Denis Baupin, ce débat vous a-t-il convaincu de la nécessité d’approfondir le débat en séance pour n’oublier personne dans le dispositif ?

M. Denis Baupin. Oui, mais je note les différences d’appréciation très importantes entre le rapporteur thématique et le ministre sur la politique d’open data.

M. le président François Brottes. Ce n’était pas ma question…

M. Denis Baupin. C’est important néanmoins car, comme le disait quelqu’un que vous connaissez bien, « quand il y a un flou, c’est qu’il y a un loup »... En renvoyant les questions à plus tard, on court le risque qu’elles ne soient pas tranchées dans le sens prévu par le rapporteur thématique au moment où il attire notre attention. Je vais retirer mon amendement, mais en espérant qu’elles le seront en faveur des usagers, c'est-à-dire que l’obligation de communiquer les données concernera l’ensemble des acteurs du transport et de la mobilité.

L'amendement SPE1318 est retiré.

M. le président François Brottes. Certes, les débats doivent avancer le plus loin possible en commission mais, si nous risquons de ne pas être exhaustifs, il vaut mieux les reporter à la discussion en séance, qui n’est pas très éloignée. Monsieur le ministre, vous avez été interpellé. Peut-être souhaitez-vous répondre ?

M. le ministre. Soyez rassuré, monsieur Denis Baupin : il n’y pas ni flou, ni « loup », ni divergence entre le rapporteur thématique et moi-même. Je partage sa préoccupation et je souhaite que nous mettions à profit les jours qui viennent pour présenter en séance les propositions les plus ambitieuses possible.

Monsieur Hervé Mariton, l’argument de sécurité juridique est valable pour les acteurs privés comme pour la SNCF, et les questions d’intérêt patrimonial se posent pour les uns comme pour les autres. Nos services doivent donc réaliser une véritable expertise. Ouvrir de manière excessive les données publiques pourrait conduire à une forme d’expropriation, alors que les investissements effectués justifieraient des indemnisations. À ce stade, c’est ce que nous voulons éviter.

Dans le domaine du transport ferroviaire de voyageurs, nombre de compétiteurs européens – en particulier la Deutsche Bahn – mettent en ligne beaucoup plus d’informations que la SNCF, comme l’a souligné M. Joël Giraud. Ma conviction personnelle est qu’il faut aller dans cette direction. Qu’il s’agisse du transport par autocar ou par train, je pense, comme le rapporteur Gilles Savary, que le développement de l’information en ligne permet d’accroître le service à l’usager et l’innovation dans le secteur. J’y suis favorable. Je n’ai pas de pudeur en la matière mais je pense qu’il faut prendre quelques précautions techniques. J’espère que nous pourrons lever les doutes dans le laps de temps qui nous sépare de la séance. En tout cas, je m’engage à apporter toutes les réponses utiles venant de mes services, de ceux de Mme Ségolène Royal ou de M. Alain Vidalies et des opérateurs concernés, afin que les propositions soient les plus ambitieuses possible.

M. Joël Giraud. Je voudrais souligner l’intérêt de la position du ministre. La SNCF, comme tous les opérateurs ferroviaires, déclare des horaires à l’Union internationale des chemins de fer. Dans ce système, certains comme la Deutsche Bahn jouent le jeu de la mobilité sur leur territoire de manière intelligente, tandis que d’autres, comme la SNCF, ne le font pas. Il en sera de même pour les futures lignes d’autocars. Une personne se rendant d’un point A à un point B doit savoir quels modes de transport sont à sa disposition, donc avoir accès à l’ensemble des données. Il faut retravailler ces amendements afin d’aboutir à un système ouvert où les informations ne relèveront pas du « confidentiel défense »…

M. Jean-Louis Bricout. Il serait bon de préciser aussi dans la loi que les données fournies par les opérateurs mentionnent si le trajet est accessible aux personnes en situation de handicap qui veulent emprunter différents types de transport.

M. le président François Brottes. La question de l’accessibilité est posée par les amendements qui suivent. Le rapporteur a bien compris qu’il devait travailler avec Denis Baupin et Joël Giraud sur les amendements qui viendront en séance.

La Commission examine, en discussion commune, les amendements SPE1319 et SPE1320 de M. Denis Baupin.

M. Denis Baupin. Le ministre et le rapporteur thématique ont longuement parlé de rendre accessible la mobilité à ceux qui n’ont pas les moyens de se déplacer par le rail ou par la voiture. Encore faut-il que cet objectif soit atteint et que la politique tarifaire n’exclue pas toute une partie de la population.

L’amendement SPE1319 vise à ce que la politique tarifaire soit définie avec l’autorité régulatrice, qu’elle prévoie un quota minimum de billets à tarif largement inférieur à celui du transport ferroviaire et qu’elle favorise les personnes à mobilité réduite. Sur ce dernier point, j’adhère aux propos de notre collègue Jean-Louis Bricout.

Dans le cas, très hypothétique, où cet amendement ne serait pas adopté, notre amendement SPE1320 constitue une solution de repli, ne comportant pas de quota minimum de billets à tarif réduit.

M. le président François Brottes. Je me permets d’observer que les parlementaires n’ont pas forcément à voter des dispositions qui relèvent du décret… Pour modifier un chiffre qui figure une loi, il faut trouver, vous le savez très bien car vous êtes un parlementaire aguerri, un nouveau véhicule législatif, ce qui peut prendre trois ans !

M. le ministre. L’administration des prix prévue par le présent amendement entre en contradiction avec le principe d’ouverture du marché défendu par le projet de loi. En outre, elle soulève des difficultés juridiques car elle contraint le principe constitutionnel de liberté d’entreprendre, qui impose notamment que les restrictions tarifaires soient proportionnées à l’objectif poursuivi, ce qui ne paraît pas être le cas.

Il existe déjà des règles exigeantes en matière d’accessibilité, un principe de traitement non discriminatoire et, pour les trajets de longue distance, une assistance spécifique incluant la gratuité du transport pour les accompagnants nécessaires.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable à ces deux amendements. Je suis cependant sensible à la préoccupation – également exprimée par M. Jean-Louis Bricout – de mieux prendre en compte l’accessibilité. Peut-être devrait-on imposer, au minimum, la transparence des informations fournies aux usagers, afin que ceux en situation de handicap ne soient pas victimes de l’intermodalité à venir. Notre discussion, en tout cas, me conduit à vous inviter à travailler collectivement à améliorer le dispositif dans le sens de la transparence plutôt que dans celui de la modulation tarifaire.

M. Gilles Savary, rapporteur thématique. Monsieur Denis Baupin, nous devons absolument réussir à nous placer en dehors du cadre du transport conventionné. Nous n’avons pas à contrôler les prix : les gens choisiront en fonction des prix et des services proposés. Vous avez raison d’être attaché au service public des transports, dont le rôle, défini dans un cahier des charges, est de répondre à des exigences spécifiques. Les départements et les régions disposeront encore de la faculté de créer des lignes de service public, en arguant du fait que le privé n’assure pas cette mission. C’est tout le sens du service public dans une économie de liberté, depuis la Révolution française. Il n’est pas plus question de fixer les prix des transports privés que celui des restaurants privés. En revanche, on fixe celui des cantines. Ces nouvelles lignes offriront de nouveaux services, dont certains seront utiles et d’autres non ; certains vivront et d’autres mourront.

S’agissant des personnes à mobilité réduite, les directives européennes qui encadrent les droits des passagers constituent des prescriptions pour l’ensemble des acteurs, qu’ils soient publics ou privés. La loi française peut les renforcer, mais nous ne pouvons pas ouvrir des services de bus hors norme, que ce soit en matière de motorisation ou d’accueil de publics fragiles. Avis défavorable.

M. Denis Baupin. Je n’ai toujours pas compris quelle était l’autorité organisatrice pour des liaisons comme Bordeaux-Lyon… Pour l’heure, il n’y en a pas, ni, par conséquent, de possibilité de délégation de service public. L’argument du rapporteur thématique n’est valable que pour des trajets qui se situent à l’intérieur des régions et des départements, en vertu de dispositifs existants.

J’ai bien compris la logique sous-jacente, mais nous n’y adhérons pas : nous défendons une logique de transports collectifs de service public. Nous avons un problème de désaccord et non d’incompréhension. Nous craignons notamment que ces services d’autocars ne remplissent pas les objectifs de mobilité que nous voulons leur assigner, notamment en ce qui concerne la sobriété énergétique et l’accessibilité aux personnes les plus en difficulté – sans pour autant, je le répète, être opposés aux autocars.

S’agissant de l’argumentaire du ministre, je peux comprendre que la question de la proportionnalité des restrictions tarifaires aux objectifs poursuivis puisse être évoquée pour le premier amendement mais pas pour le second. Je maintiens donc ces amendements.

M. Gilles Savary, rapporteur thématique. Monsieur Denis Baupin, vous n’avez pas de chance car il existe de nombreuses AOT sur la liaison Bordeaux-Lyon : l’État pourrait faire un chemin de fer de qualité en investissant des milliards d’euros ; les régions Limousin et Auvergne, ainsi que les départements traversés, peuvent agir. Des services publics de bus ou de trains pourraient couvrir tout le trajet mais le service public est défaillant. Qui en sort gagnant ? Le covoiturage et les compagnies aériennes low cost. Le Bordelais que je suis, pour aller à Lyon, prend l’avion.

M. le ministre. Monsieur Denis Baupin, soyez pleinement rassuré : il existe une AOT qui s’appelle l’État ; la direction générale des infrastructures, des transports et de la mer
– DGITM – peut signer une délégation de service public pour l’ouverture d’une ligne.

La Commission rejette successivement les amendements SPE1319 et SPE 1320.

Elle adopte ensuite l'amendement rédactionnel SPE50 des rapporteurs.

Puis elle en vient à l'amendement SPE1321 de M. Denis Baupin.

M. Denis Baupin. Cet amendement aurait pu aussi être défendu par Alexis Bachelay ou Philippe Goujon puisque nous y avons travaillé ensemble, en qualité de membres du Club des parlementaires pour le vélo. À la faveur de la création de services de transports publics supplémentaires, nous souhaitons que soit pensée l’intermodalité entre les autocars et les modes de déplacement doux. Nous présenterons d’autres amendements concernant les gares.

M. le président François Brottes. Comptez-vous le vélo électrique dans les modes de déplacement doux ?

M. Denis Baupin. Les vélos à assistance électrique – qui ne sont pas des scooters – peuvent être considérés comme tels.

M. le président François Brottes. Comme il y a des débats sur la puissance, je me permets de poser la question au spécialiste que vous êtes…

M. Denis Baupin. Je suis pour les vélos à assistance électrique, à condition que l’alimentation se fasse à partir d’énergies renouvelables.

M. le ministre. Le Gouvernement est favorable à une bonne prise en compte de l’utilisation du vélo, en particulier en lien avec les gares routières dont il sera question à l’article 4. Je n’ai pas d’opposition de fond à cet amendement, mais je suggère de le retirer pour le représenter à cet endroit du texte.

M. Gilles Savary, rapporteur thématique. Nous devons penser à l’intermodalité en permanence, et dans tous les domaines de la mobilité. Je m’en remets à la sagesse de la Commission.

M. Jean-Yves Caullet. Il faut aussi prendre en compte cette problématique dans l’open data, pour qu’il n’y ait pas d’interruption dans un trajet qui commence par un transport compatible avec le vélo.

M. le président François Brottes. Denis Baupin ne pourra pas rattacher cet amendement à l’article où vous lui avez donné rendez-vous. Pour que cet amendement soit adopté, il vaut mieux qu’il soit soumis au vote maintenant, à charge pour le Gouvernement de le déplacer en séance.

La Commission adopte l'amendement SPE1321.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels SPE51 et SPE52 des rapporteurs.

Elle en vient ensuite à l'amendement SPE497 des rapporteurs.

M. Gilles Savary, rapporteur thématique. Cet amendement vise à faciliter le travail de l’ARAFER en lui donnant une base juridique pour procéder à des expertises et recueillir des données. Il s’agit de faire en sorte qu’elle puisse disposer de toutes les informations nécessaires pour que le secteur des services réguliers non urbains de transport routier de personnes soit le plus transparent possible. Elle pourra ainsi élaborer des analyses et nous informer via ses rapports réguliers.

M. le ministre. Avis favorable. Il s’agit d’un pouvoir classique des régulateurs, dont dispose notamment l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes
– ARCEP.

La Commission adopte l'amendement SPE497.

La Commission examine, en discussion commune, les amendements SPE926 de M. Bertrand Pancher et SPE1272 de M. Joël Giraud.

M. Michel Zumkeller. Nous souhaitons que les sanctions applicables dans le domaine ferroviaire le soient également dans le domaine routier, nouvelle activité de l’ARAFER.

M. Joël Giraud. Mon amendement va dans le même sens mais il me semble satisfait par l’amendement SPE497, qui dispose que : « Les manquements à ces dispositions sont sanctionnés dans les conditions prévues à la section 2 du chapitre V du titre III du livre 1er de la deuxième partie. »

M. Gilles Savary, rapporteur thématique. Je pense que ces amendements sont en effet satisfaits par l’amendement SPE497 que nous venons d’adopter.

Les amendements SPE926 et SPE1272 sont retirés.

La Commission adopte successivement les amendements rédactionnels SPE70, SPE53 et SPE54 des rapporteurs.

Puis elle adopte l’article 2 ainsi modifié.

Article 3 : Transport par autocar : dispositions de coordination

La Commission adopte l'amendement rédactionnel SPE55 des rapporteurs.

Puis elle examine l'amendement SPE1461 des rapporteurs.

M. Gilles Savary, rapporteur thématique. Il s’agit d’un amendement de coordination qui vise à mettre en cohérence le dispositif pénal et administratif de sanctions applicables aux services réguliers par autocar avec celui des autres services de transport routier libéralisés.

La Commission adopte l'amendement SPE1461.

Puis elle adopte l’article 3 ainsi modifié.

Article 3 bis (nouveau) : Habilitation à légiférer par ordonnance pour permettre la réalisation du projet « Charles-de-Gaulle Express »

La Commission examine l'amendement SPE1683 du Gouvernement.

M. le ministre. Il s’agit de donner au Gouvernement une habilitation à légiférer par ordonnance pour toute mesure permettant la réalisation du projet « Charles-de-Gaulle Express » – CDG Express. C’est un projet déterminant pour améliorer les conditions d’accès à l’aéroport de Roissy Charles-de-Gaulle et soutenir le développement économique durable de notre pays, tout particulièrement de la région d’Île-de-France.

Suite à l’abandon de la procédure de concession de CDG Express engagée en 2006, le projet est désormais relancé sous la forme d’un nouveau montage. Dans son avis du 1er octobre 2014, le Conseil d’État a confirmé la faisabilité juridique dudit montage, sous réserve d’une disposition législative modifiant les règles applicables pour confier directement à une société dédiée, filiale commune de SNCF Réseau et de la société anonyme Aéroports de Paris, la mission de réaliser l’infrastructure.

Cette disposition législative devant être compatible avec les règles du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, elle doit au préalable recueillir un avis favorable de la Commission européenne. Compte tenu des délais contraints, en cas notamment d’une candidature à l’organisation des Jeux olympiques ou d’une exposition universelle, une habilitation à légiférer par ordonnance permettra d’adopter plus rapidement, dès l’obtention de l’avis de la Commission européenne, l’ordonnance qui mettra en œuvre ces modalités de réalisation. En tout état de cause, le Parlement sera amené, lors de l’examen du projet de loi de ratification, à valider le montage de ladite ordonnance. Tel est l’objet de l’amendement du Gouvernement.

M. le président François Brottes. Je rappelle qu’une ordonnance implique deux rendez-vous avec le Parlement : pour l’habilitation et pour la ratification.

M. Gilles Savary, rapporteur thématique. Avis enthousiaste !

M. Denis Baupin. Il est totalement « dingue », si je puis me permettre, qu’on découvre au détour d’un amendement du Gouvernement une demande d’habilitation à légiférer par ordonnance sur un projet tel que celui-là, dont on n’a même pas le détail !

Monsieur Christophe Caresche, ma réaction ne doit pas vous surprendre car vous connaissez ma position sur CDG Express. Depuis des années, au sein du Conseil de Paris, nous sommes en désaccord profond sur le sujet : on va utiliser des sillons de service public pour créer des liaisons express entre l’aéroport et la ville, alors qu’il existe une ligne de RER et que l’argent public devrait servir à développer d’autres services.

Les échecs successifs de ce projet tiennent au fait qu’il a été fondé sur des hypothèses totalement fantaisistes, notamment en ce qui concerne la croissance du transport aérien et ses conséquences. Il va mobiliser de l’argent public alors qu’il s’agit d’un transport pour privilégiés, dont rien ne prouve au demeurant qu’il sera rentable. D’un côté, on propose des autocars à ceux qui n’ont pas les moyens d’utiliser les transports publics – j’y suis plutôt favorable – ; de l’autre, on crée un transport pour privilégiés en utilisant des sillons qui devraient être réservés au service public.

Au-delà de mon désaccord sur le fond, je trouve la méthode assez stupéfiante. Le projet de candidature aux Jeux olympiques ne me paraît pas particulièrement consensuel ; celui d’une exposition universelle l’est davantage, mais une telle manifestation ne durerait que quelques semaines. Le projet me paraît donc totalement déraisonnable.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Tout d’abord, je suis surpris que notre collègue évoque le caractère inopiné de ce projet qui était en débat avant même celui du Grand Paris. Dans un premier temps, il a été intégré dans le dispositif avant d’en être écarté parce qu’il y avait des problèmes de temporalité.

Ensuite, je pense que l’on aurait tort de considérer que le RER peut assurer la liaison entre l’aéroport Charles-de-Gaulle et Paris – tous ceux qui ont fait l’expérience peuvent témoigner que ce n’est pas le cas – notamment parce qu’il y a trois terminaux à Roissy.

Enfin, nous devons régler le problème du lien direct entre les aéroports et le cœur de la capitale. Dans le cadre du Grand Paris Express, il est prévu de prolonger la ligne de métro 14 vers Villejuif et Orly. Pour Roissy, deuxième aéroport européen, il faut envisager des dispositifs spécifiques. L’ordonnance répond au besoin d’aller vite, au moins pour enclencher le dispositif.

M. Jean-Yves Caullet. Je n’ai pas le privilège d’être un élu de la région d’Île-de-France, mais je me préoccupe de la desserte des aéroports internationaux, car ils intéressent aussi les provinciaux. Il est question d’une habilitation pour agir et permettre la réalisation d’une infrastructure ferroviaire, ce qui ne cadre pas avec ce que j’ai entendu sur l’utilisation des sillons existants. Monsieur le ministre, pouvez-vous nous confirmer qu’il s’agit bien de la réalisation d’une infrastructure nouvelle ?

M. Jean-Louis Costes. Je voulais simplement dire que, pour notre part, nous sommes favorables à cet amendement.

M. le ministre. Les analyses effectuées ont toujours confirmé que le réseau occupera en partie des sillons existants, même si je ne peux pas vous donner le pourcentage et le kilométrage précis. Je vais essayer de vous apporter cette réponse dans les meilleurs délais.

Monsieur Denis Baupin, je reconnais votre constance car vous défendez la même position depuis sept ans. Qu’il s’agisse d’une ordonnance ou d’une loi, je crains par conséquent que votre point de vue ne soit identique... Le recours à l’ordonnance ne relève pas de l’improvisation : il vise seulement à compresser les délais sans purger les débats car, comme l’a rappelé le président, cette ordonnance devra de toute façon être ratifiée par le Parlement – et, en cas de désaccord, elle fera l’objet d’un vote négatif.

M. Denis Baupin. Certains des territoires traversés, notamment la Seine-Saint-Denis, ont un important déficit de transports collectifs. Leurs habitants verront passer de nouveaux trains qui ne s’arrêteront pas chez eux car ils seront destinés à desservir les aéroports. Le message qui leur est adressé est déplorable !

Quant à la question de Jean-Yves Caullet, elle me paraît tout à fait pertinente. Dans sa rédaction actuelle, le texte fait état de la réalisation d’une infrastructure ferroviaire, non d’une liaison qui utiliserait les infrastructures existantes. Or je ne vois pas comment on pourrait construire une nouvelle infrastructure sur l’ensemble du trajet, notamment dans Paris, et la réponse du ministre laisse penser qu’il s’agit d’utiliser les infrastructures existantes. Va-t-on créer de nouveaux rails jusqu’à la gare de l’Est ?

M. le ministre. Comme je le disais en réponse à M. Caullet, il est évident que ces tracés utiliseront pour partie des sillons existants. Le pourcentage dépendra du tracé définitif qui, à ma connaissance, n’est pas arrêté.

Pour vous faire part de ma science récente en la matière, il y aura huit kilomètres de voies nouvelles à Mitry-Claye entre le RER B et l’aéroport, quatre nouveaux ponts, un tunnel sous les pistes et des aménagements de quais à la gare de l’Est et à Magenta. Cela relève d’une déclaration publique – DUP – de 2008 et ne revêt donc aucun caractère nouveau.

Vous avez, par ailleurs, exprimé votre inquiétude au regard des financements publics. Il n’y a pas de concours public prévu : les 760 millions d’euros seront financés autrement, l’État étant concédant et la RATP, la SNCF, Aéroports de Paris, etc., étant partenaires. Tout cela est connu également. Il n’y aura donc pas d’argent public ajouté pour cette opération, sauf si l’on décidait que les usagers devaient utiliser gratuitement cette infrastructure...

M. Denis Baupin. Qu’il me soit permis de faire part de ma surprise : à ma connaissance, la RATP, la SNCF et Aéroports de Paris ne sont pas des entités totalement privées ! Et lorsqu’il y aura utilisation de voies ferroviaires existantes, ce sera bien un manque à gagner ou une disponibilité moindre des actifs publics. Enfin, s’il n’y a vraiment rien de nouveau, pourquoi déposer un amendement visant à recourir à la procédure de l’ordonnance ? La vérité, c’est que les dispositifs mis en place jusqu’à présent ont tous échoué parce que la rentabilité n’est pas au rendez-vous, et c’est bien pourquoi le privé s’est retiré du dispositif. Il faudra, à un moment ou à un autre, éponger le déficit avec de l’argent public, comme pour Orlyval.

M. Christophe Caresche. À ma connaissance, le plan « CDG Express » n’est pas nouveau et a déjà été validé par la majorité du conseil régional. Il s’agit maintenant d’assurer sa réalisation et, pour cela, il faut que l’État ait la possibilité de concéder cette infrastructure. Je ne vois donc pas de raison de ne pas voter l’amendement.

La Commission adopte l’amendement SPE1683.

Article 3 ter (nouveau) : Rapport de l’Agence de l’environnement et de maîtrise de l’énergie sur l’impact du transport par autocar sur l’environnement

Elle examine ensuite les amendements identiques SPE221de M. Jean-Frédéric Poisson et SPE304 de M. Patrick Hetzel.

Mme Véronique Louwagie. Il est important d’évaluer toutes les conséquences sur l’environnement du développement du transport interurbain par autocar, que nous avons décidé tout à l’heure. Or, il ressort de l’étude d’impact que l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie – ADEME – n’a même pas été consultée. C’est pourquoi nous proposons qu’un rapport lui soit demandé sur ce sujet, à rendre public dans un délai d’un an après la promulgation de la loi. Ce serait cohérent, me semble-t-il, avec la loi sur la transition énergétique et l’intérêt affiché par le Gouvernement pour ces questions.

M. Patrick Hetzel. Je note avec intérêt, monsieur le ministre, que vous avez commandé aujourd’hui des études d’évaluation de la présente loi à des organismes indépendants, alors même que nous en commençons seulement l’examen. J’aurais donc peine à comprendre que vous refusiez nos amendements.

M. le ministre. Il ne s’agit pas, monsieur Patrick Hetzel, d’une annonce faite aujourd’hui. C’est au cours de la période de suspension des travaux parlementaires que j’avais, en complément de l’étude d’impact, demandé une évaluation à France Stratégie, nouveau nom du Commissariat général à la stratégie et à la prospective rattaché au Premier ministre, lequel a désigné une commission temporaire d’évaluation composée d’experts indépendants ; ce sont l’installation et la composition de cette commission qui viennent d’être rendues publiques. J’ai, par ailleurs, demandé à plusieurs groupes d’experts connus sur la place de Paris d’apporter tous éléments paraissant nécessaires et utiles au débat.

Les deux amendements rejoignent notre propre sensibilité aux conséquences environnementales du projet. Nous avions refusé ceux, déposés par M. Denis Baupin, qui tendaient à intégrer dans l’avis de l’ARAFER des critères environnementaux, car cela aurait eu pour effet de compliquer et de ralentir les choses. En revanche, le Gouvernement est favorable à votre demande de rapport.

M. Gilles Savary, rapporteur thématique. Enfoncer une porte ouverte ne fait pas mal à l’épaule… (Sourires). Il existe au sein de l’ADEME un département « mobilité et transports », qui produit régulièrement des rapports dont l’intérêt spécifique vient de leur caractère intermodal. À défaut d’être vraiment utiles, donc, ces amendements me sont plutôt sympathiques, et je ne m’opposerai pas à leur adoption.

Mme Véronique Louwagie. Je constate une divergence de points de vue entre le Gouvernement et le rapporteur thématique, et fais observer que le bilan carbone est quelque chose qui se mesure. Ce que nous demandons à connaître, c’est l’impact des évolutions prévues – car il y en aura bien un, sauf à considérer que vous ne croyez pas vous-mêmes au développement du transport par autocar.

M. Jean-Louis Roumegas. Ces amendements mettent en évidence les carences de l’étude d’impact en ce qui concerne le report modal : rien n’y est dit, contrairement à ce qu’affirme le ministre, sur les taux de fréquentation, le covoiturage ou les transports régionaux. Les résultats ne risquent d’être connus que lorsque le mal sera fait

M. le président François Brottes. Sachant que certaines études d’impact confinent à la science-fiction, il faut aussi s’en méfier…

La Commission adopte les amendements SPE221 et SPE304.

Article 3 quater (nouveau) : Rapport du Gouvernement sur l’impact du développement du transport par autocar sur l’industrie automobile

Elle examine ensuite l’amendement SPE222 de M. Jean-Frédéric Poisson

M. Gilles Lurton. L’étude d’impact s’illustre par sa pauvreté : elle évoque les conséquences du projet pour les particuliers, pour les entreprises, pour les administrations, mais pas pour les industriels et constructeurs automobiles français. Nous demandons, pour combler cette lacune, que le Gouvernement remette un rapport au Parlement sur le sujet, notamment sur l’emploi dans la filière.

M. le président François Brottes. Il est vrai que ce ne serait pas inutile.

M. le ministre. On peut faire dire n’importe quoi aux études d’impact ; je serais prêt à recruter dès demain quelqu’un susceptible d’en réaliser une qui soit fiable sur les conséquences de la création d’un nouveau secteur d’activité !

Les études d’impact les plus fiables sont les comparaisons. Il ressort des études faites en Allemagne et en Espagne sur les transports collectifs que la complémentarité entre le train et le car est réelle et que l’effet de substitution portera plutôt sur le véhicule individuel ou le covoiturage. Je mentirais si je prétendais que ces études sont scientifiquement irréfutables, mais j’ignore qui pourrait produire des données et des modèles qui le soient, s’agissant de changements à attendre dans le comportement des acteurs économiques. Si nous attendions, pour agir, de lever toutes les incertitudes sur tous les sujets, nous nous condamnerions à l’immobilisme. Prévoir des rapports d’évaluation a posteriori, des clauses de rendez-vous réguliers, me paraît une meilleure formule que multiplier les études d’impact.

Si votre préoccupation environnementale me semble fondée, je suis plutôt défavorable, quoique mollement, à l’amendement, car l’impact sur la filière automobile sera sans doute très relatif.

M. Gilles Savary, rapporteur thématique. Comme le démontre l’exposé sommaire lui-même, on voit mal quel éclairage nouveau un tel rapport pourrait apporter. Je suis donc tout aussi « mollement » défavorable à l’amendement que le ministre.

M. Jean-Frédéric Poisson. Comme le disait le physicien Niels Bohr, la prédiction est chose difficile, surtout lorsqu’elle porte sur le futur. (Sourires.) Il ne s’agit cependant pas, en l’espèce, de mirer des boules de cristal, mais de réaliser une étude d’impact a posteriori, un an après la mise en œuvre de la décision que nous avons prise en adoptant les articles 2 et 3. Les grandes entreprises ne manquent tout de même pas de prospectivistes, de stratèges qui tentent d’avoir une image de l’avenir, et si les contours en sont parfois incertains, il est intéressant d’en débattre. J’ai bien retenu, monsieur le ministre, que votre opposition à l’amendement était assortie d’un adverbe, et vous invite à changer celui-ci en négation, ce qui nous permettra de progresser.

La Commission adopte l’amendement SPE222.

Après l’article 3.

La Commission examine ensuite l’amendement SPE498 de M. Jean-Marie Tetart.

M. Jean-Marie Tetart. Nous avons reconnu dès le début l’intérêt du recours au bus pour les longues distances ainsi que pour les déplacements quotidiens entre zones urbaines et rurales, mais, pour cet aspect, le succès ne sera au rendez-vous que si les bus circulent correctement aux moments de congestion du trafic. Six expériences de voies réservées aux transports en commun, taxis, véhicules propres ou en covoiturage, ont déjà été menées, mais il faut dépasser le stade de l’expérimentation, et c’est pourquoi je demande que soit réalisé, dans un délai d’un an, un rapport sur la mise en œuvre de ce type de solution, qui a fait ses preuves dans un certain nombre d’agglomérations comme, par exemple, Madrid.

M. le ministre. L’esprit de facilité consisterait à consentir à toute demande de rapport en considérant que ce sera une façon peu coûteuse d’être consensuel… Mon état d’esprit est plutôt d’être consensuel sur l’accessoire et de rester ferme sur le fond : la multiplication des rapports tous azimuts provoquerait la thrombose des administrations !

Le Gouvernement est favorable à la création de voies de circulation dédiées pour certaines catégories d’usagers lorsque cela est bénéfique à la communauté. L’État est déjà en négociation avec la Ville de Paris et le STIF pour dégager sept voies d’ici 2020, et la desserte des aéroports selon ce principe sera assurée dès 2015. Mieux vaut, cependant, avoir ce débat avec les interlocuteurs concernés, notamment les concessionnaires d’autoroutes, et l’inscrire dans la loi le cas échéant, que de commander un énième rapport. Comme vous pouvez le constater, je ne suis pas fondamentalement opposé à votre amendement, et un refus serait quelque peu ridicule.

M. le président François Brottes. Il me semble me souvenir que dans la loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové – ALUR –, la question est traitée à l’échelon territorial, qui paraît plus pertinent que l’échelon national.

M. Gilles Savary, rapporteur thématique. L’amendement est pertinent : il s’agit d’une des solutions-clés pour éviter la congestion de l’accès aux centres-villes. J’observe cependant que le même rapport a été demandé à l’article 14 quater dont notre assemblée a enrichi le projet de loi sur la transition énergétique, actuellement transmis au Sénat : « Dans un délai d'un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport évaluant l’opportunité de réserver, sur les autoroutes et les routes nationales comportant au moins trois voies et traversant ou menant vers une métropole, une de ces voies aux transports en commun, aux taxis, à l’autopartage et au covoiturage lorsque le véhicule est occupé par au moins trois personnes. Le rapport évalue notamment l’impact qu’une telle mesure est susceptible de produire en termes de décongestion de ces routes selon les heures de la journée. »

Je souhaite donc le retrait de l’amendement, car il est inutile d’avoir deux rapports sur le même sujet.

M. Jean-Marie Tetart. Soit, mais j’insiste pour que des instructions précises, homogènes et volontaristes soient données dans les services déconcentrés afin d’éviter que certains ne se cantonnent dans des attitudes timorées.

M. Denis Baupin. Le ministre a dit qu’il préférait l’action aux rapports, je l’invite donc à se prononcer favorablement, tout à l’heure, sur notre amendement SPE1335 qui vise à promouvoir ce dispositif dans le cadre de la négociation avec les concessionnaires les autoroutes.

L’amendement SPE498 est retiré.

Article 4 : Gares routières de voyageurs : habilitation à légiférer par ordonnance

La Commission examine l’amendement SPE1435 de M. Jean-Louis Roumegas, tendant à supprimer l’article.

Mme Michèle Bonneton. Cet article qui a trait aux gares routières aborde des sujets importants, aussi bien pour les usagers que pour les communes, les EPCI ou les finances publiques, comme l’aménagement, l’exploitation par des personnes de droit public ou privé, l’accès à ces gares, les règles applicables en matière de police, etc. Or, le Gouvernement propose de légiférer par voie d’ordonnance, ce qui revient à court-circuiter la représentation nationale, et donc, in fine, la voix des usagers et des citoyens. En conséquence, nous demandons la suppression de l’article.

M. le ministre. La réforme du cadre juridique applicable aux gares routières est indispensable pour tirer toutes les conséquences du développement attendu des transports collectifs routiers. L’article 4 détaille l’objet de l’habilitation demandée par le Gouvernement, qui a commencé le recensement des gares routières afin d’identifier l’ensemble des situations, lesquelles sont très variées, notamment en ce qui concerne l’articulation des compétences. Ce sont ces éléments techniques qui nous conduisent à recourir à la procédure d’habilitation, mais l’ordonnance, une fois prise, fera l’objet d’une ratification en toute transparence.

M. Gilles Savary, rapporteur thématique. Il s’agit, comme toujours lorsqu’il s’agit de gares, d’une question très compliquée, qui n’a même pas pu être réglée en intramodal à l’occasion de la loi du 4 août 2014 portant réforme ferroviaire, et qui l’est encore plus en intermodal. Il faudra faire vite afin d’éviter que des files d’autocar ne transforment chaussées et trottoirs en gares routières informelles.

Je comprends les objections de Michèle Bonneton et son souci de transparence. Il existe aujourd’hui quelques gares routières privées, dont il faut ménager l’accès sans pour autant décourager les investisseurs d’en construire de nouvelles. Il faut surtout veiller à ce que Réseau ferré de France – RFF – et la SNCF ne vendent pas leurs actifs dans des conditions qui empêcheraient de construire une gare routière au voisinage d’une gare ferroviaire de façon à favoriser l’intermodalité. Il faut aussi prendre en compte la desserte des aéroports, presque totalement ignorés par la SNCF qui n’a pas compris que les autres modes de transport pouvaient être complémentaires plutôt que concurrents du rail.

Comme vous, madame Michèle Bonneton, j’ai peu de goût pour les ordonnances, mais il faut que le Gouvernement travaille très vite, sans quoi la multiplication des cars créera des problèmes urbains insolubles. C’est la raison pour laquelle je ne voterai pas votre amendement de suppression.

Mme Michèle Bonneton. J’entends bien ces bonnes intentions, mais de graves questions demeurent, parmi lesquelles celle du devenir des actifs de RFF et de la SNCF. Nous avons vu tout à l’heure que les accès aux aéroports, par exemple, pourraient coûter cher et être réservés aux plus riches. Vous nous dites, monsieur le ministre, que des travaux de recensement sont en cours, mais cela illustre la précipitation dans laquelle le projet de loi a été élaboré et présenté au Parlement. Vous faites valoir également que l’ordonnance sera ratifiée en toute transparence, mais nous ne pourrons pas la modifier.

M. le président François Brottes. Il est toujours possible, néanmoins, de refuser de la ratifier.

M. Jean-Frédéric Poisson. En parlant des ventes d’actifs, le rapporteur avait-il à l’esprit l’article 49 et les aéroports de Nice et de Lyon ?

La Commission rejette l’amendement SPE1435.

Elle examine ensuite l’amendement SPE1327 de M. François-Michel Lambert

M. Denis Baupin. S’il s’agit de simplifier les choses, inscrivons-les directement dans la loi : le Gouvernement pourra ainsi nous dire dès maintenant de quelle façon il souhaite que l’ARAFER gère les gares routières.

M. le président François Brottes. La question relève davantage du décret que de la loi.

M. le ministre. Nous ne pouvons inscrire dans la loi tous les éléments susceptibles de couvrir l’ensemble des situations, ni préempter tel ou tel mode de régulation. Comme l’a souligné le rapporteur thématique, il faut travailler au plus vite et encadrer le travail relatif aux gares routières et à la compétence de l’ARAFER, mais il n’est matériellement pas possible de l’inscrire aujourd’hui dans le projet de loi en discussion.

La Commission rejette l’amendement SPE1327.

Elle examine ensuite l’amendement SPE1267 de M. Joël Giraud

M. Joël Giraud. L’Autorité de la concurrence elle-même a souligné l’infinie variété des gares routières. Si l’on rédige une ordonnance sur le modèle de celle de 1945, nombre d’entre elles risquent de se trouver hors champ : je pense notamment aux parkings-relais qui se trouvent aux limites des agglomérations, et qui peuvent être très utiles en tant que haltes routières, sans pour autant constituer des gares routières au sens classique. Je propose que, lorsqu’une gare routière se trouve « orpheline » d’autorité de rattachement, les autorités organisatrices de la mobilité reçoivent compétence pour la création, l’aménagement et l’exploitation des gares routières de voyageurs.

M. le ministre. Dans l’attente d’un état des lieux précis, il n’apparaît pas opportun de choisir a priori une solution en termes d’organisation, mais vous avez l’engagement du Gouvernement qu’il n’y aura pas de gare « orpheline ».

L’amendement SPE1267 est retiré.

La Commission examine ensuite les amendements identiques SPE931 de M. Bertrand Pancher et SPE1285 de M. Joël Giraud.

M. Michel Zumkeller. Dans la logique de l’amendement précédent, nous souhaitons que l’ARAFER puisse émettre un avis sur les ordonnances qui vont déterminer ses nouvelles compétences en matière de gares routières.

Suivant l’avis du rapporteur thématique, la Commission adopte les amendements SPE931 et SPE1285.

Elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel SPE56 des rapporteurs.

La Commission examine l’amendement SPE1301 de M. Jacques Krabal.

M. Joël Giraud. Il s’agit de modifier la rédaction de l’alinéa 2 de façon que l’usage du vélo soit pris en compte.

M. le ministre. Le Gouvernement y est favorable, mais préfère les amendements SPE1300 du même auteur et SPE1324 de M. Baupin.

L’amendement SPE1301 est retiré.

La Commission examine l’amendement SPE1324 de M. Denis Baupin.

M. Denis Baupin. Je suis heureux de défendre un amendement auquel le ministre s’est d’ores et déjà dit favorable.

Suivant l’avis du rapporteur thématique, la Commission adopte l’amendement SPE1324.

Elle adopte également l’amendement SPE1300 de M. Jacques Krabal.

Elle examine ensuite l’amendement SPE1299 de M. Jacques Krabal.

M. Joël Giraud. Il s’agit préciser le champ de l’habilitation prévue à cet article pour tenir compte de l’intermodalité avec les modes de déplacement doux.

M. le ministre. Avis favorable.

Suivant l’avis du rapporteur thématique, la Commission adopte l’amendement SPE1299.

Elle examine ensuite l’amendement SPE1273 de M. Joël Giraud.

M. Joël Giraud. Il s’agit de préciser que l’ordonnance donnera à l’ARAFER le pouvoir de préciser les règles d’accès aux gares plutôt que celui d’édicter elle-même ces règles.

M. le ministre. Avis favorable.

Suivant l’avis du rapporteur thématique, la Commission adopte l’amendement SPE1273.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel SPE57 des rapporteurs.

Elle examine ensuite l’amendement SPE935 de M. Bertrand Pancher.

M. Michel Zumkeller. Cet amendement précise les missions de l’ARAFER en matière de gares routières de voyageurs. Il permet à l’ARAFER de prononcer des sanctions en cas de non-respect des règles d’accès à ces gares.

M. le ministre. Avis favorable.

Suivant l’avis du rapporteur thématique, la Commission adopte l’amendement SPE935.

Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements SPE1325 de M. Denis Baupin et SPE1302 de M. Jacques Krabal.

M. Denis Baupin. Cet amendement, dans le droit fil du précédent, confie à l’ARAFER la responsabilité de la mise en œuvre de l’accessibilité des gares aux cyclistes.

M. Joël Giraud. Il s’agit d’inclure cet élément dans le champ de l’habilitation.

M. le ministre. Le Gouvernement est favorable à l’esprit de ces amendements presque identiques, mais préfère le second, car il semble difficile de confier à l’ARAFER, comme le propose M. Denis Baupin, une compétence en matière de sécurité de l’accessibilité, dans la mesure où elle ne dispose pas du réseau d’enquêteurs locaux qui serait nécessaire.

L’amendement SPE1325 est retiré.

Suivant l’avis du rapporteur thématique, la Commission adopte l’amendement SPE1302.

Elle examine ensuite les amendements identiques SPE1303 de M. Jacques Krabal et SPE1326 de M. Denis Baupin.

M. Joël Giraud. Il s’agit d’encourager la pratique du vélo en prévoyant des aménagements simplifiant son stationnement.

M. Denis Baupin. Cet amendement est à peu près identique à celui que nous avons adopté pour les gares ferroviaires.

M. le ministre. Comme je l’ai dit précédemment, nous ne souhaitons pas surcharger l’ARAFER de nouvelles responsabilités, mais je ne voudrais pas créer de distorsion entre gares routières et gares ferroviaires. Le point soulevé par M. Denis Baupin me plonge donc dans le doute…

M. Gilles Savary, rapporteur thématique. Les gares routières ne sont pas décisives en la matière, car le train a un emport bien supérieur. Il me semble qu’un amendement plus complet serait nécessaire.

M. Jean-Frédéric Poisson. Je crains que cela ne soit du domaine réglementaire.

M. Denis Baupin. L’argument selon lequel on peut plus facilement transporter un vélo dans un train que dans un car conduit précisément à aménager davantage encore les gares routières que les gares ferroviaires. Nous avions travaillé avec l’ancien ministre des transports, M. Frédéric Cuvillier, dans le cadre de la réforme ferroviaire, à un amendement visant à prévoir, en coordination avec les collectivités territoriales, des équipements d’accueil des vélos aux alentours dans les gares. C’est le même état d’esprit qui nous anime pour les gares routières : si l’on veut que les gens qui n’ont pas de voiture puissent prendre le car, il faut qu’ils soient sûrs de pouvoir déposer leur vélo à la gare routière en toute sécurité. C’est l’une des conditions d’une vraie complémentarité intermodale.

M. le président François Brottes. J’adhère à votre argumentation, monsieur Denis Baupin.

M. le ministre. Je suis sensible au problème soulevé. Il faudra trouver une rédaction qui permette de le régler de façon proportionnée.

M. le président François Brottes. Peut-on l’espérer d’ici l’examen du texte en séance publique ?

M. Gilles Savary, rapporteur thématique. Je donne acte à Denis Baupin de ses arguments très convaincants, et reconnais que certains aspects des choses m’avaient échappé. Il serait regrettable de multiplier les investissements coûteux à quelques centaines de mètres d’intervalle, alors que nous souhaitons créer des gares routières à proximité immédiate avec les gares ferroviaires. C’est sur les sites intermodaux qu’il faudrait agir : aux Pays-Bas, par exemple, le système est intermodal partout. Je puis donc accepter l’amendement, mais je pense que sa rédaction mériterait d’être affinée.

M. Jean-Marie Tetart. Je ne conçois pas que l’on puisse encourager des liaisons par bus sans prévoir d’équipements pour parquer les vélos ; quant à la quantité, elle dépend du trafic, et il faut donc prévoir quelque chose d’évolutif. Ensuite, il restera à établir des plans de déplacements urbains déclinant toutes les possibilités de connexion entre tous les modes de transport, y compris entre le vélo et le bus.

M. le président François Brottes. Je constate que chacun est tombé d’accord, mais je suggérerai, au risque de sortir de ma fonction, le retrait de l’amendement, qui entre trop dans le détail, et le dépôt d’un nouvel amendement, plus concis, en séance, puisque le ministre a pris l’engagement d’y réserver un accueil favorable.

M. Denis Baupin. Nous y travaillerons.

Les amendements SPE1303 ET SPE1326 sont retirés.

La Commission adopte l’article 4 ainsi modifié.

Membres présents ou excusés

Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi pour la croissance et l'activité

Réunion du lundi 12 janvier 2015 à 16 heures

Présents. - M. Julien Aubert, M. Luc Belot, Mme Karine Berger, Mme Michèle Bonneton, M. Jean-Louis Bricout, M. François Brottes, Mme Colette Capdevielle, M. Christophe Caresche, M. Christophe Castaner, M. Jean-Yves Caullet, M. Jean-Paul Chanteguet, M. Gérard Cherpion, M. Jean-Louis Costes, M. Marc Dolez, Mme Corinne Erhel, M. Olivier Faure, M. Richard Ferrand, Mme Jacqueline Fraysse, M. Jean-Patrick Gille, M. Joël Giraud, M. Jean Grellier, M. Patrick Hetzel, M. Philippe Houillon, M. Jean-Luc Laurent, M. Jean-Yves Le Bouillonnec, M. Dominique Lefebvre, M. Arnaud Leroy, Mme Audrey Linkenheld, Mme Véronique Louwagie, M. Gilles Lurton, Mme Sandrine Mazetier, Mme Martine Pinville, Mme Elisabeth Pochon, M. Jean-Frédéric Poisson, M. Denys Robiliard, M. Jean-Louis Roumegas, M. Gilles Savary, M. Jean-Marie Tetart, M. Stéphane Travert, Mme Cécile Untermaier, Mme Clotilde Valter, M. Jean-Luc Warsmann, M. Michel Zumkeller

Excusés. - M. Bernard Gérard, M. Jean-Charles Taugourdeau, M. Philippe Vigier

Assistaient également à la réunion. - M. Denis Baupin, M. Gilles Carrez, Mme Arlette Grosskost, M. Serge Letchimy, M. Hervé Mariton

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