Accueil > Economie : croissance et activité, Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi pour la croissance et l'activité > Les comptes rendus |
La commission poursuit l’examen du projet de loi pour la croissance et l’activité (n° 2447) (M. Richard Ferrand, rapporteur général, MM. Christophe Castaner, Laurent Grandguillaume, Denys Robiliard, Gilles Savary, Alain Tourret, Stéphane Travert, et Mmes Cécile Untermaier et Clotilde Valter, rapporteurs thématiques).
Après l’article 14
La Commission est saisie de l’amendement SPE891 de M. Michel Zumkeller.
M. le président François Brottes. Cet amendement est satisfait par ce que nous avons voté hier.
L’amendement SPE891 est retiré.
Article 15 : Conséquences de l’assouplissement des conditions d’installation des huissiers de justice prévu à l’article 13 bis et modification du périmètre territorial d’exercice de leurs compétences ; instauration d’une limite d’âge.
La Commission examine l’amendement SPE164 de M. Philippe Houillon.
M. Philippe Houillon. Cet amendement tend à supprimer l’article 15.
D’abord, le passage concernant les modalités de la libre installation devrait être revu en conséquence de l’amendement qui a été adopté hier soir. La mention du « lieu d’établissement de son choix » devrait au moins être complétée, par souci de cohérence. Il s’agit là d’une mesure d’ordre sur laquelle nous pouvons tous être d’accord ; il resterait alors à trouver les modalités et le moment de cette réécriture.
Mais l’article concerne aussi la compétence territoriale des huissiers de justice, qu’il a pour objet d’étendre au ressort de la cour d’appel. Or on vient de réformer cette matière, par un texte applicable au 1er janvier 2015, c’est-à-dire il y a seulement quelques jours. Maintenons la compétence départementale instaurée par cette réforme toute récente au lieu de bouleverser à nouveau le système. Dans ce domaine comme dans les autres, un minimum de sécurité juridique est nécessaire, notamment aux professionnels. Vous souhaitez à juste titre les encourager à investir, monsieur le ministre de l’économie : cessez donc de modifier les règles tous les quatre matins ! Laissons les mesures qui viennent d’entrer en vigueur s’appliquer quelque temps ; nous verrons plus tard, dans le cadre des multiples évaluations de l’autorité de la concurrence, s’il y a lieu de les modifier.
Nous défendrons ultérieurement un amendement concernant la date d’entrée en vigueur de la mesure, sur les fondements exposés hier soir. J’ai bien entendu que le ministre était finalement moins généreux que moi s’agissant des délais d’adaptation.
M. Emmanuel Macron, ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique. La visibilité, et plus précisément le fait de prendre en considération le changement intervenu au 1er janvier, sont en effet importants. Nous ne modifions pas les règles à chaque instant, monsieur Houillon. La stabilité n’est pas l’ennemie de la réforme menée au bon rythme. Il est donc possible de tenir compte de votre argument sans supprimer l’article.
L’amendement SPE1863 des rapporteurs devrait ainsi apaiser votre inquiétude puisqu’il ménage un délai avant l’entrée en vigueur de la mesure, garantissant par là même aux professionnels une entière visibilité.
Avis défavorable.
Mme Cécile Untermaier, rapporteure thématique. Vous avez raison, monsieur Houillon, il est nécessaire de tirer les conséquences de ce que nous avons adopté hier soir. Notre amendement, qui procède à une réécriture globale du dispositif d’assouplissement de l’installation des officiers publics ministériels, offre des garanties quant à la préservation du maillage territorial et de l’accès au droit, conformément à notre préoccupation commune. Par cohérence avec cet amendement et pour la clarté de la loi, il convient de modifier les textes régissant la profession d’huissier de justice. Tel est l’objet de nos amendements aux articles 14, 15 et 16.
Ainsi, aux termes de notre amendement SPE1753 à l’article 15, la nomination en qualité d’huissier de justice par le garde des Sceaux ne peut être refusée dans les zones où l’implantation d’offices ou l’association d’huissiers de justice au sein des offices existants apparaissent utiles pour renforcer la proximité et l’offre de services.
Par ailleurs, au nom de la stabilité de la norme, nous avons déposé un amendement SPE1863 auquel le ministre vient de faire allusion, et qui tend à reporter au 1er juillet 2016 les mesures d’extension du périmètre d’exercice des compétences des huissiers de justice en matière de signification des actes et des exploits ou encore de mise à exécution des décisions de justice, ainsi que des actes ou titres en forme exécutoire, puisque le nouveau périmètre est entré en vigueur au 1er janvier dernier.
Avis défavorable.
M. Sébastien Huyghe. Les deux amendements auxquels il vient d’être fait référence me paraissent contradictoires. D’un côté, on donne une compétence nationale aux huissiers de justice, ce qui va favoriser les grandes études puisque les entreprises qui auront besoin de faire appel à un huissier le feront à proximité de leur siège, le plus souvent parisien, au détriment des petites études de province qui risquent de disparaître. De l’autre, dans les zones menacées de désertification, toute personne satisfaisant aux conditions de diplôme pourra s’installer. En d’autres termes, vous tuez les petites études mais vous permettez de les remplacer par des personnes prêtes à prendre le risque de subir le même sort.
Mieux vaut s’en tenir à l’extension de la compétence territoriale qui vient d’entrer en vigueur. Laissons-la vivre trois à cinq ans, puis dressons-en le bilan lorsque nous disposerons d’un recul suffisant.
La Commission rejette l’amendement SPE164.
Puis elle en vient à l’amendement SPE892 de M. Michel Zumkeller.
M. Michel Zumkeller. Cet amendement tend à maintenir la compétence départementale des huissiers.
Au-delà de cette question, le texte doit être appréhendé dans son ensemble. Il permet de créer de nouvelles sociétés par l’association de professionnels du droit et d’experts- comptables. Sans doute souhaitez-vous étendre à d’autres professions cette possibilité. Elle revient en tout cas à libéraliser totalement les capitaux de ces sociétés. Aujourd’hui, une société d’experts comptables peut être détenue par un banquier. En d’autres termes, tout le monde pourra entrer au capital de ces sociétés.
Certes, la loi prévoit que l’on ne peut détenir plus de 33 % des droits de vote au sein d’une société d’experts-comptables si on ne l’est pas soi-même. Mais nous sommes soumis à des directives européennes, et une société créée dans un pays voisin où les conditions d’exercice de la profession d’expert-comptable sont beaucoup plus libéralisées pourrait se trouver entièrement détenue par un établissement financier alors qu’elle compte des huissiers. Telles sont les implications du texte, et peut-être même sa philosophie. Ne nous dites pas que vous n’ouvrez le capital qu’aux experts-comptables : ce faisant, vous permettez à tout le monde de devenir majoritaire dans des sociétés d’exercice des professions juridiques.
Imaginons les conséquences : une société financière qui proposerait des prêts à la consommation pourrait détenir des cabinets d’huissiers. Cela ne vous choque-t-il pas ? N’avez-vous pas l’impression d’un véritable mélange des genres ? Moi si !
Mme Cécile Untermaier, rapporteure thématique. Nous avons fermé ces sociétés aux capitaux extérieurs par un amendement qui viendra ultérieurement en discussion.
M. le président François Brottes. On peut comprendre l’interpellation de notre collègue dans la mesure où le vote n’a pas encore eu lieu.
M. Michel Zumkeller. Nous verrons tout à l’heure, mais je doute que votre amendement suffise dès lors que les capitaux des sociétés d’experts-comptables dépendent d’une directive européenne.
M. le ministre. Je suis sensible à votre esprit de système, monsieur Zumkeller, ainsi qu’à vos inquiétudes concernant l’ouverture du capital, qui devraient être apaisées par l’amendement des rapporteurs auquel le Gouvernement sera favorable. On ne peut pas dire que l’Allemagne, où existe un dispositif analogue à celui proposé par la réforme actuelle, ait renoncé pour autant à toute vertu en la matière. Ne caricaturez donc pas l’esprit de la réforme en faisant craindre le pire. Vous avez d’ailleurs eu l’honnêteté de rappeler le plafonnement des droits de vote et le mécanisme de régulation applicable.
Dans le même esprit de système, je suis défavorable au présent amendement puisqu’il supprime plusieurs alinéas d’un article qui ne traite que des huissiers.
Mme Cécile Untermaier, rapporteure thématique. Rappelons en outre que la compétence nationale, qui existe pour les notaires, ne les a pas fait disparaître du maillage territorial – un enjeu qui nous préoccupe comme vous. Nous avons reporté d’un an et demi, au mois de juillet 2016, l’extension de la compétence des huissiers au ressort de la cour d’appel dans la perspective d’une harmonisation probable avec les autres professions.
Sur le reste, monsieur Zumkeller, le ministre vous a répondu. Nous approuvons votre intervention.
M. Olivier Carré. Un point de méthode. Nous examinons les articles amendement par amendement, soit. Le Gouvernement nous a livré son analyse de la philosophie générale du projet et de la conception des professions réglementées qui le sous-tend. Avec plusieurs de leurs collègues, dont des membres de l’opposition, les rapporteurs ont infléchi le texte après avoir entendu les professionnels, sans en remettre en cause l’économie générale, afin d’éviter des excès qui nous avaient nous-mêmes inquiétés. Je les en félicite. Mais il nous manque un résumé de ces modifications. Il n’est pas trop tard pour le mettre au point, même s’il eût été préférable d’en disposer dès le moment où nous avons abordé les professions réglementées.
M. le président François Brottes. Je vous entends, mon cher collègue, mais, dans un tel inventaire, certaines dispositions risquent d’être oubliées, ce que l’on pourrait nous reprocher. Il suffit qu’au fil de nos échanges, la rapporteure thématique puisse, comme elle l’a fait, annoncer des amendements à venir en s’y référant avec précision.
M. Philippe Vigier. Olivier Carré a raison : nous avons besoin d’une vision globale de l’évolution du texte sur ce point. L’épreuve des faits vous a conduits à le rééquilibrer par rapport à la libéralisation complète de ces professions initialement prévue, ce qui ne fait pas obstacle à la modernité.
À l’appui de l’argumentation de Michel Zumkeller, j’aimerais rappeler les conséquences de telles mesures pour d’autres professions libérales, dont les laboratoires de biologie médicale. Avec les experts-comptables ou les capitaux extérieurs, c’est la culture du résultat qui entre dans ces sociétés. Dans ce secteur, depuis dix ans, de grands monopoles se sont organisés. C’est la réalité du terrain ! Désormais, on va même autoriser des croisements de capitaux avec d’autres pays de l’Union européenne. Nous sommes sous les coups de boutoir de Bruxelles, contre laquelle vos prédécesseurs, monsieur le ministre, ont dû lutter pied à pied, notamment s’agissant des pharmacies. Les professions juridiques doivent rester entre elles. Prenons garde aux ouvertures qui les exposeraient aux risques de financiarisation et de déficit de résultat alors qu’elles sécurisent les usagers.
Madame la rapporteure, votre proposition de report au 1er juillet 2016 témoigne de vos doutes. D’ici à cette date, ces professions juridiques auront évolué, peut-être pour donner le jour à une nouvelle profession unique, en tout cas sans ouverture complète du capital. De la sorte, on saura si vos préconisations concernant les zones juridiquement vides portent leurs fruits.
Je ne suis moi-même pas certain que le ressort de la cour d’appel soit pertinent. Voyez la répartition des cabinets d’huissiers de justice : dans les territoires ruraux, il s’agit de petites structures de trois à six salariés, huit tout au plus ; ailleurs, on trouve des études qui en comptent cinquante à soixante. Un acte notifié par un huissier, c’est 18,53 euros, dont 13 euros de taxes pour l’État et 5 pour l’huissier. Là encore, c’est la réalité du terrain ! Les petites études survivront-elles ? Nous verrons bien si la nouvelle architecture que vous proposez – et nous ne contestons pas la nécessité d’une modernisation – fait la preuve de son efficience.
M. Richard Ferrand, rapporteur général. Permettez-moi d’apporter une clarification.
On évoque une vision générale : vous connaissez celle du Gouvernement ; celle des rapporteurs ne lui est pas opposée. Le premier objectif est de faciliter l’installation de jeunes et de déverrouiller l’accès à certaines professions. Le deuxième est de rendre les tarifs plus lisibles et plus accessibles, sans porter atteinte à la légitime prospérité de ces professions, qui rendent des services de très grande qualité. Le troisième – nous y reviendrons – est de permettre le développement de l’interprofessionnalité, comprise, dans le respect des règles européennes, comme la possibilité de s’associer dans l’exercice et non comme l’interprofessionnalité capitalistique avec les professions du chiffre. En d’autres termes, les professions du droit entre elles devraient pouvoir s’associer sur tous les plans ; en revanche, nous écartons l’association capitalistique pour les raisons très clairement exprimées par Michel Zumkeller.
La Commission rejette l’amendement SPE892.
Elle est ensuite saisie des amendements identiques SPE159 de M. Philippe Houillon et SPE274 de M. Gilles Lurton.
M. Philippe Houillon. L’amendement SPE159 tend à supprimer les alinéas 2 à 9, qui concernent l’extension de la compétence des huissiers, pour les raisons déjà exposées.
J’ai vu avec quel enthousiasme le ministre insiste néanmoins pour faire passer le texte, alors que le dispositif vient d’être réformé. J’ai entendu qu’un amendement ultérieur des rapporteurs renverrait au 1er juillet 2016 l’entrée en vigueur de la mesure, ce qui ménage un délai d’un an et demi. Alors même que les professionnels viennent de se mettre en état de marche pour le 1er janvier 2015 comme on le leur avait demandé, il n’est guère responsable de leur annoncer une nouvelle formule assortie d’un nouveau délai d’adaptation. Ce n’est pas en désorganisant en permanence les professions que l’on préservera leurs performances. Mais c’est votre politique ; j’imagine donc que la mesure sera adoptée.
C’est avec le même enthousiasme et la même assurance martiale que certains de vos prédécesseurs avaient décrété les trente-cinq heures, monsieur le ministre ; on a vu les conséquences pour le pays. Continuons donc à tout changer sans arrêt ! Faut-il que le ministère de la justice de votre gouvernement ait mal travaillé en décidant et en préparant, dans la concertation, la précédente réforme pour que vous l’écartiez à peine entrée en vigueur !
M. Gilles Lurton. L’amendement SPE274 est identique.
En étendant la compétence territoriale des huissiers au ressort de la cour d’appel, on risque de créer des déserts juridiques, comme pour les barreaux ainsi que nous l’avons dit hier soir. On peut se satisfaire d’avoir moins d’huissiers de justice dans les secteurs les plus ruraux dans la mesure où il n’est jamais très agréable de recourir aux services de cette profession. Il n’empêche que le besoin de proximité en pâtirait.
M. le ministre. D’abord, cette réforme n’est pas une marque d’incohérence ; au contraire, elle poursuit et accélère ce qui a été précédemment entrepris. Ensuite, elle a fait l’objet d’échanges avec les huissiers et, à en croire ceux que nous avons eus dernièrement avec le président de leur chambre nationale, ils ont été satisfaits de ce délai additionnel, dont ils sont immédiatement avertis, ainsi que des aménagements sur les petites créances, auxquels nous reviendrons.
Enfin, il convient de tenir compte de la situation actuelle. Vous craignez un désert, mais le nombre d’études d’huissiers a déjà baissé de 20 % depuis 1980 et a encore diminué au cours des dix dernières années, ainsi que le nombre d’huissiers. Pourquoi, sinon faute de matière ? Voilà pourquoi nous permettons à ces professionnels d’accéder à d’autres actes, d’étendre leur activité et de mieux s’organiser entre eux. Si tout allait bien, nous pourrions ne rien faire, mais tel n’est pas le cas. La désertification est déjà une réalité, au vu de la démographie et de la situation dans certains territoires.
Avis défavorable.
Mme Cécile Untermaier, rapporteure thématique. Même avis.
Les représentants de la Chambre nationale des huissiers de justice, que nous avons entendus le 6 janvier dernier – ce qui est bien normal au moment de modifier le périmètre de leur compétence –, se sont montrés plutôt favorables à l’extension à l’échelon national de leur compétence territoriale pour les activités hors monopole. J’ai confiance en leur capacité à s’organiser au niveau national. En revanche, ils ont demandé un délai pour l’extension de leurs compétences « sous monopole » au ressort de la cour d’appel puisque la dernière modification du périmètre est toute récente, comme l’a rappelé Philippe Houillon. Nous avons donc associé la profession à notre réflexion, elle n’est pas opposée à nos propositions et je doute que celles-ci puissent susciter de virulentes protestations de sa part.
Mme Véronique Louwagie. Le maillage territorial ne figurait pas parmi les objectifs énumérés tout à l’heure par le rapporteur général. Or nous sommes très inquiets des conséquences de la réforme à cet égard. Dans le territoire où je suis élue, une ville de 8 000 habitants où les huissiers sont chargés d’un secteur où vivent 25 000 personnes, ils sont proches des citoyens, les conseillent lorsqu’ils signifient certains actes, et cette proximité est essentielle.
Pour les avoir rencontrés, madame la rapporteure thématique, je doute que tous partagent le point de vue que vous avez recueilli auprès de leurs représentants. La base est vraiment inquiète. Dans des territoires déjà privés de tribunaux et, par suite, de bureaux annexes et d’avocats au cours des dernières années, nous ne voulons pas perdre ces professionnels du droit, les seuls qui aillent vers les habitants – à titre d’exemple, ce sont au contraire les citoyens qui vont vers les notaires. La compétence nationale risque d’entraîner une véritable désertification juridique.
M. Philippe Vigier. J’ajoute que le territoire des cours d’appel ne recoupe pas toujours celui des régions, anciennes ou nouvelles – car, ne l’oublions pas, nous sommes en train d’organiser la nouvelle France des régions. L’Eure-et-Loir dépend du ressort de la cour d’appel de Versailles ; d’autres parties du territoire partagent leur ressort avec d’autres régions. Le périmètre de la cour d’appel variant de 40 kilomètres dans certains cas à 250 kilomètres dans d’autres, les études les mieux organisées, les plus structurées, celles qui disposent des plus gros moyens, risquent d’accaparer les parts de marché au détriment de petites études qui garantissent aux citoyens la proximité du droit.
En somme, oui à l’évolution de la profession, oui à l’évolution du périmètre, mais à condition que les professions aient la capacité et le temps de s’organiser.
M. Philippe Houillon. Selon le ministre, le texte offrirait de nouvelles possibilités aux huissiers, qui sont dans une situation difficile dont témoigne la baisse du nombre d’études. Cet argument laisse perplexe : l’extension du secteur géographique de compétence ne peut qu’entraîner mécaniquement des concentrations ; en outre, pour cette profession comme pour d’autres, les clients, notamment institutionnels, vont suivre le mouvement, ce qui aura des conséquences sur le territoire. Vous êtes persuadé du contraire, monsieur le ministre ; nous évaluerons le moment venu cette loi qui portera votre nom.
M. Jean-Charles Taugourdeau. Monsieur le ministre, je vous ai demandé plusieurs fois quel rapport cette loi pouvait bien entretenir avec la croissance et l’activité. Je commence à comprendre : selon vous, l’activité des huissiers devrait croître avec leur nombre. En réalité, la situation n’est pas bonne pour les huissiers et ce n’est pas en multipliant leur nombre, ni en faisant accéder à la profession des personnes moins bien formées, que nous atteindrons cet objectif.
M. Marc Dolez. Je crains pour ma part les conséquences de la nouvelle carte régionale sur l’administration déconcentrée de l’État, et sur la carte judiciaire en particulier. On nous expliquera bientôt qu’il faut aussi supprimer certaines cours d’appel, ce qui ne fera qu’étendre le ressort territorial des autres et accentuer les phénomènes que l’article 15 nous fait redouter.
Madame la rapporteure thématique, la journée du 6 janvier 2015 devait vraiment être décisive pour qu’une partie des auditions auxquelles vous avez procédé ce jour-là remette en cause les conclusions de notre mission d’information. La manière dont vous venez de présenter vos échanges avec les huissiers me paraît très optimiste. Pour m’en être entretenu avec eux, je puis vous assurer que nombre d’huissiers à travers le pays ne partagent pas le sentiment dont vous faites état. Ils sont au contraire très inquiets – à juste titre, à mon avis.
M. Julien Aubert. Je ne reviens pas sur le diagnostic, qui est partagé. Nous avons tous reçu dans nos circonscriptions les représentants des professions réglementées. Le message d’ensemble était clair : ils sont inquiets de la libéralisation à marche forcée de leur profession. J’ai assisté à une partie des auditions conduites par la rapporteure thématique ; ils étaient alors moins vindicatifs, je peux en témoigner, mais leurs craintes demeuraient et n’ont pu être apaisées sur tous les points.
La rédaction de cette loi me paraît en outre marquée par une forme de parisianisme. Il semble qu’il y ait deux types d’huissiers, comme nous disions hier qu’il existait deux types d’avocats. L’Île-de-France d’une part, les territoires ruraux de l’autre ont chacun leurs problèmes propres.
Monsieur le ministre, nous savons que l’ouverture à la concurrence va détruire des emplois. Si le secteur postal en a perdu, c’est pour cette raison, même si ce n’est pas la seule. Or nous avons des attentes concernant les territoires périphériques, ruraux, dont nous craignons la fragilisation économique. Quel engagement pouvez-vous prendre afin d’éviter ces externalités négatives ? Peut-on faire en sorte que cette loi s’applique dans les métropoles, les régions urbaines, où ces effets seront moins massifs, tout en tenant compte des légitimes attentes et des avertissements de députés de tous bords issus de la ruralité ?
Ne caricaturons pas les positions en présence. Débloquer la croissance du pays, l’UMP n’y a jamais été opposée, mais pas à n’importe quel prix ! Car qu’en sera-t-il une fois que les œufs seront cassés ?
M. Jean-Yves Caullet. Le maillage territorial est une préoccupation partagée qui ne se réduit pas au problème des professions juridiques. Mais, en l’espèce, ce n’est rien de moins qu’une nécessité physique pour que celles-ci accomplissent leurs missions. On ne la fera pas disparaître par un texte ! Ici, nous offrons à ceux qui exercent ces professions la possibilité de s’associer, pour donner un peu d’air à ceux qui y parviendront, afin de maintenir leur présence sur le territoire.
Nous constatons tous la même difficulté. La mutualisation est une tentative pour y remédier, elle n’est pas la cause de cette difficulté qui est tendancielle. On a parlé des laboratoires d’analyse ; il est vrai que la concentration menace le maillage, mais, sans cette mutualisation par une forme de concentration, certains petits laboratoires auraient déjà disparu faute de pouvoir s’adapter aux normes en matière médicale.
C’est une dialectique, j’en conviens ; nous faisons le pari qu’elle sera bénéfique et que la mutualisation permettra aux professionnels de se maintenir au plus près des endroits où les actes sont nécessaires. Si le besoin d’actes ne se fait pas sentir, il sera difficile de conserver un maillage sans activité.
M. Sébastien Huyghe. Vous parlez de donner un peu d’air, mais c’est ce que l’on fait depuis le 1er janvier. Attendons que cette modification ait été évaluée ! Si l’évaluation est satisfaisante et que nous pouvons faire un pas de plus, nous le ferons. Mais sans connaître les conséquences de la départementalisation – et pour cause puisqu’elle n’est appliquée que depuis quinze jours –, ce serait bel et bien incohérent. Nous ne sommes pas a priori défavorables à une évolution et notamment à celle que prévoit le texte, à condition qu’elle tienne compte de la réalité du terrain. Car pour filer la métaphore de l’œuf, une fois que celui-ci est cassé, il est trop tard pour séparer le blanc du jaune.
M. le ministre. Je le répète, le statu quo serait possible si la situation actuelle était satisfaisante, si les huissiers eux-mêmes, lors de nos échanges avec eux, ne s’étaient pas montrés ouverts à l’éventualité d’une extension de leur compétence au ressort de la cour d’appel, si nous ne leur accordions pas pour cela un délai clairement annoncé.
Mais il est apparu que la profession est prête à se réorganiser dans les territoires. Nous lui permettons de le faire en se regroupant avec d’autres professionnels, nous lui donnons plus de matière – nous y reviendrons à propos des petites créances. Rappelons que la compétence nationale existe déjà pour des actes hors monopole, comme le recouvrement de créances amiables. Cette réorganisation n’est pas l’ennemie du maillage ; au contraire, elle va permettre à ces professionnels d’être présents sur le territoire, y compris au travers d’autres structures. C’est si nous ne faisons rien que le maillage sera menacé, à cause de l’anémie croissante de la profession.
Il ne faut pas caricaturer ce que nous instaurons ici. Il ne s’agit pas de la pression de l’ouverture à la concurrence. Dans le cas de La Poste cité par M. Aubert, le vrai problème n’est pas l’ouverture à la concurrence mais la transformation des pratiques. Or, précisément, le métier d’huissier est en train de changer – les huissiers le reconnaissent – et ce changement nécessite une réflexion d’ensemble sur la profession, celle-là même que porte la présente réforme. Tel est le sens de la révision du ressort des actes monopolistiques, assortie d’un délai que les huissiers ont accepté lorsque je les ai rencontrés le 10 décembre dernier ; des marges de manœuvre que nous leur donnons s’agissant des petites créances ; de la demande que nous leur adressons de mieux s’organiser avec La Poste – à laquelle je suis aussi attaché que vous, monsieur Aubert –, pour le bien des citoyens, de La Poste et des huissiers eux-mêmes.
M. le rapporteur général. Nous nous préoccupons tous du maillage territorial : personne ici n’a le monopole de la ruralité ni du désir de la préserver. Si les mesures que nous examinons devaient priver nos territoires de ressources dans les domaines dont nous parlons, à l’évidence nous y serions tous opposés.
En réalité, où ces professionnels sont-ils le plus installés ? Il y a un notaire pour 4 500 habitants dans l’Aveyron, contre un pour 17 000 en Seine-Saint-Denis. Quant aux huissiers, leur implantation est plus dense dans le Gard, la Lozère, l’Aveyron ou les Landes qu’ailleurs. Issu du Finistère intérieur, qui n’est pas la partie de la Bretagne la plus prospère ni la plus dense, je suis particulièrement sensible à ces questions. Tel était d’ailleurs l’axe de la mission que m’a confiée le Premier ministre sur les professions du droit.
Ces professions existent et vivent de leur activité. Étendre leur compétence, professionnelle et territoriale, devrait conforter cette activité, voire la développer, bien plutôt que l’amputer. Pourquoi l’extension du territoire de compétence permettrait-elle aux études ou cabinets situés dans les villes les plus importantes de siphonner les autres ? C’est une vision bien sombre !
Mme Véronique Louwagie. Elle est réaliste !
M. le rapporteur général. Pas du tout. Vos angoisses sont légitimes, car le changement est anxiogène ; voilà d’ailleurs pourquoi certains le refusent catégoriquement. Mais le pire n’est jamais sûr.
Je l’ai dit, ce n’est pas là où l’on pourrait s’y attendre que la présence de ces professionnels est la plus dense. Pourquoi ces disparités ? Dans certains des départements que j’ai cités, la clientèle des notaires ne se limite pas à celle du chef-lieu de leur canton d’implantation ou du département. On le constate en discutant avec eux sur le terrain, ainsi qu’avec leurs représentants. Pourquoi ce qui a été efficient pour telle profession deviendrait-il subitement nocif pour telle autre ?
En outre, le maillage territorial n’est pas mis en péril. Madame Louwagie, vous me reprochez de ne pas avoir cité le maillage territorial parmi les objectifs que j’ai évoqués en répondant à Olivier Carré. C’est que ce maillage ne constitue pas un objectif à proprement parler, puisqu’il existe déjà. Tout notre travail consiste en revanche à le préserver en amendant le texte du Gouvernement.
Quoi qu’il en soit, si je ne suis pas certain que le projet de loi déposé à l’Assemblée puisse être qualifié de « parisien », je suis sûr qu’il ne sortira pas de notre hémicycle sans être devenu « provincial » car tous les députés ont les mêmes préoccupations concernant les territoires. Ne suscitons pas les peurs sous prétexte que nous entrons dans une modernité qui doit bénéficier à tous les territoires y compris au monde rural où nous sommes nombreux à habiter !
M. Julien Aubert. Je vous laisse la responsabilité de vos propos sur la modernité. Qui aurait pu croire qu’un gouvernement socialiste nous expliquerait un jour que la mise en concurrence, la libéralisation, et « l’ultralibéralisme sauvage » dont on nous a rebattu les oreilles, sont du côté de la modernité ? C’est le monde à l’envers. Il faut enregistrer ces paroles historiques !
Nous avons des appréhensions parce que nous avons connu certaines expériences malheureuses. L’opposition a déjà eu l’occasion de dénoncer les dégâts économiques que pourraient causer certains textes et de s’entendre répondre que ses craintes n’étaient pas légitimes : au final, les réformes en question ont souvent failli s’écraser sur le mur de la réalité – je pense par exemple à la loi ALUR.
En termes économiques, vous proposez de mettre en concurrence des acteurs qui ne peuvent pas créer de nouveaux services, contrairement à ce qui se produit dans le secteur marchand, et qui ne pourront agir que sur les coûts. Dans ce cadre, je doute sincèrement que les « petits » puissent gagner face aux « gros » comme vous le laissez entendre. Inévitablement les acteurs les moins performants devront, soit baisser leurs marges, soit disparaître. L'Autorité de la concurrence a clairement indiqué que l’émulation devait conduire à une baisse des tarifs. Cela jouera inéluctablement sur la viabilité de certains des acteurs.
Vous semblez le nier, mais pouvez-vous citer un seul exemple d’une mise en concurrence dans le monde qui n’ait eu aucune répercussion sur la viabilité des acteurs les plus faibles ? Nous savons ce que dit la théorie économique : dans un premier temps, les acteurs les plus fragiles vont disparaître, dans un deuxième temps, les plus forts vont se concentrer, et dans un troisième temps l’efficacité de ces derniers va s’accroître. Le problème, pour citer Keynes, est qu’« à long terme, nous serons tous morts ». Je ne m’intéresse en conséquence qu’aux effets qu’aura ce projet de loi d’ici à cinq ou dix ans. Je ne dis pas que vos objectifs ne sont pas louables ; je rappelle seulement que l’enfer est pavé de bonnes intentions.
M. Jean-Louis Bricout. Comme la plupart de mes collègues, j’éprouve une forme d’inquiétude concernant le maillage territorial, mais il me semble que les véritables enjeux en la matière ne se situent pas dans ce projet de loi.
La carte de la démographie médicale montre que tout se joue en fait en termes d’attractivité des territoires : les médecins ne s’installent pas dans les zones rurales où ils seraient certains d’avoir du travail ; ils privilégient les grandes villes où l’on trouve des universités, les territoires qui proposent une certaine qualité de vie, et les zones très touristiques.
M. Philippe Houillon. Je connais la rectitude intellectuelle et la bonne foi de notre rapporteur général, mais peut-être n’est-il pas suffisamment familier du fonctionnement des professions dont nous traitons. Le maillage territorial actuel n’existe en effet que parce que les clients institutionnels sont dans l’obligation de le respecter : les organismes de recouvrement de créances, les banques, les assurances représentent un pourcentage significatif du chiffre d’affaires de métiers dont ils assurent la survie. Aujourd’hui, la postulation et la compétence départementale des huissiers en matière de significations obligent en quelque sorte les institutionnels à assurer le maillage territorial. Si vous changez la règle du jeu, ces derniers voudront nécessairement réduire leurs coûts et ne s’adresser qu’à un professionnel au niveau de la cour d’appel plutôt qu’à cinq au niveau des tribunaux de grande instance. Mécaniquement, cette évolution conduira à des regroupements.
Si, par ailleurs, le ministre de l’économie donnait, un jour ou l’autre, suite aux avis de l’Autorité de la concurrence qui propose de réduire encore pour les notaires le périmètre de l’authentification et, pour les huissiers, celui de la signification, les effets conjugués de ces réformes feraient à coup sûr courir un véritable risque à ces professions.
Je ne prétends pas qu’il ne faut toucher à rien, mais est-il normal de réformer sans disposer d’une étude d’impact digne de ce nom ? Le Gouvernement engage l’avenir d’un secteur économique sans avoir évalué les conséquences de ses réformes : c’est irresponsable ! Monsieur le ministre, comment osez-vous présenter un projet de loi alors que le Conseil d’État considère que l’étude d’impact qui l’accompagne n’est ni faite ni à faire ?
M. le ministre. Monsieur Houillon, après un peu plus de vingt-quatre heures de débats, j’entends que vous reconnaissez finalement la nature économique des réformes qui vous sont proposées et, en conséquence, la légitimité de ma présence devant cette commission spéciale.
Si vos propos concernant l’étude d’impact étaient justifiés, sachez aussi que le Conseil d’État aurait tout simplement refusé d’examiner l’avant-projet de loi : cela n’a pas été le cas.
Enfin, j’ai été très clair dès le début de nos discussions sur la préservation de l’acte authentique et de l’exclusivité de la signification des actes. J’ai toujours dit que le Gouvernement n’avait pas l’intention de modifier le périmètre de ces actes, et qu’il n’entendait pas suivre les préconisations de l’Autorité de la concurrence en la matière. Je répète par ailleurs que ce domaine du droit, constitutif de la sécurité juridique de notre pays, relève tout entier de la garde des Sceaux, et que le Gouvernement est en plein accord sur ce sujet. Il n’est évidemment pas tenu de suivre les avis de l’Autorité de la concurrence. Ces avis ne doivent pas inquiéter qui que ce soit ; ils sont au contraire précieux afin d’améliorer la transparence des décisions. Quoi qu’il en soit, le Gouvernement s’est engagé à ne revenir ni sur l’authenticité des actes dont sont garants les notaires ni sur la signification des actes qui incombe aux huissiers. Ce n’est pas parce que l’Autorité de la concurrence écrit qu’il faut le faire que nous le ferons. Nous ne le ferons pas !
La Commission rejette les amendements SPE159 et SPE274.
L’amendement SPE275 de M. Gilles Lurton est retiré.
La Commission examine, en discussion commune, les deux amendements identiques SPE893 de M. Michel Zumkeller et SPE1150 de Mme Audrey Linkenheld, et l’amendement SPE160 de M. Philippe Houillon.
M. Michel Zumkeller. Mon amendement vise à reporter au 1er janvier 2018 la mise en œuvre d’une mesure qui constitue une évolution majeure du métier d’huissier de justice.
Mme Audrey Linkenheld. Pour un certain nombre de territoires, le double impact de la nouvelle carte départementale et d’une nouvelle loi pourrait être difficile à absorber dans des délais très brefs. Ce sera le cas dans mon département du Nord, qui est le plus peuplé de France : l’adaptation aux nouveaux cantons n’y sera pas simple pour les huissiers de justice – d’autant que la région ne compte qu’une seule cour d’appel.
Nous proposons un report au 1er janvier 2018 de l’entrée en vigueur de la mesure.
M. Philippe Houillon. Mon amendement vise à fixer au 1er juillet 2017 la date d’application de la réforme relative à la compétence territoriale des huissiers.
Monsieur le ministre, mes propos justifient peut-être votre présence, mais vous ne pouvez pas vous contenter de vous en satisfaire sans répondre au fond de mes questions.
M. le ministre. Je suis défavorable aux trois amendements. Les rapporteurs ont déposé un amendement SPE1863 comportant un délai qui me semble plus raisonnable.
Mme Cécile Untermaier, rapporteure thématique. Même avis. L’amendement SPE1863 fixe au 1er juillet 2016 l’entrée en vigueur des dispositions concernées.
M. Julien Aubert. Je ne voudrais pas entamer un débat sur le mot « raisonnable » que vient d’utiliser M. le ministre. En revanche, la rapporteure thématique peut-elle nous expliquer comment la date du 1er juillet 2016 a été fixée ? Qu’en disent les professionnels du secteur ? Estimez-vous que cette date se situera environ un an après la promulgation de la loi ? Si tel est bien le cas, ce délai vous semble-t-il suffisant ?
Mme Cécile Untermaier, rapporteure thématique. Je ne vous cache pas que les professions concernées seront d’autant plus satisfaites que la réforme s’appliquera tardivement. Nous proposons qu’elle soit mise en œuvre d’ici à un an et demi : dès lors que nous considérons qu’il est urgent d’agir et que la réforme ne nuit pas à la profession, ce délai permet aux professionnels de s’adapter et de se préparer.
M. le rapporteur général. Le délai « raisonnable » permet à la fois aux professionnels de s’adapter, et à nos concitoyens de constater que les lois que nous votons s’appliquent bel et bien.
Nous entendons si souvent dire que les annonces de réformes ne sont pas suivies d’effets que nous devons prioritairement penser aux citoyens pour lesquels nous faisons la loi avant d’intégrer les divers soucis des professionnels. Procédons ainsi et, de grâce, pas dans l’ordre inverse !
M. Philippe Vigier. Nous ne proposons pas un report sine die mais un délai qui n’est pas si long pour répondre aux divers enjeux de la réforme. Le passage de la compétence départementale à celle du ressort de la cour d’appel, et la réunion de professions juridiques au sein de sociétés, qui va immédiatement entraîner des fusions-absorptions et des réorganisations, demandent du temps. À partir de la publication des décrets d’application de la loi, les divers chantiers nécessaires pourront être menés de front avec la garantie d’être opérationnel le 1er janvier 2018. Il faut du temps pour évaluer chacune des charges, modifier l’organisation humaine, appréhender les parts de marché et, surtout, pour répondre aux attentes du terrain afin d’en finir avec les déserts juridiques.
M. Julien Aubert. Il me semble que le délai proposé par les rapporteurs est dérogatoire par rapport aux ouvertures à la concurrence qui s’étalent en général sur plusieurs années. Je ne connais aucun secteur qui ait été ouvert à la concurrence en une seule année.
Je rappelle aussi que la seule annonce de ce projet de loi a provoqué le blocage de la vente de certaines études ou de certains cabinets car les notaires ou les huissiers attendent de voir à quelle sauce ils seront mangés. Avec un délai aussi bref, ne risquons-nous pas de constater un brutal effet de seuil ? Un délai supplémentaire permettrait aux acteurs de raisonner sur le plus long terme : il leur éviterait de prendre des mauvaises décisions et de céder à des effets de panique. Il garantirait aussi que tous les décrets d’applications auront été pris.
Vous parlez d’urgence. Je constate que le statut de ces professions a parfois plusieurs siècles ; je ne crois pas qu’un délai d’une année supplémentaire changera grand-chose à l’affaire.
Mme Colette Capdevielle. Pour l’application de cette disposition, ne pourrions-nous pas fixer un délai d’un an à compter de la promulgation de la loi : cela serait cohérent avec ce que nous avons déjà retenu pour l’entrée en vigueur du dispositif relatif à la postulation des avocats au ressort de la cour d’appel ?
M. Gilles Lurton. La rapporteure thématique compte un an et demi entre aujourd’hui et le 1er juillet 2016, mais il faudrait plutôt prendre comme point de départ de ce décompte la sortie des décrets d’application, ce qui laisserait un délai extrêmement court. Je crois me souvenir que les représentants des huissiers ont demandé à juste titre que la mise en œuvre de la mesure n’ait pas lieu avant le 1er juillet 2017.
M. Jean-Charles Taugourdeau. Les fonctionnaires du ministère de la justice, les juges et les greffiers, déjà débordés, se remettent à peine de la réforme de la carte judiciaire. Or vous allez leur imposer un surcroît d’activité en engageant une réorganisation. Peut-être serait-il judicieux de leur laisser un peu de temps – cela permettrait aussi à la garde des Sceaux d’analyser le texte ?
M. Denys Robiliard. Les réorganisations inévitables ne s’interrompront pas avec l’entrée en vigueur de la loi. Autant fixer une date qui ne soit pas trop lointaine afin que les choses bougent. Plus vous retarderez l’échéance, plus certains professionnels attendront pour voir ce qui se passera.
Les propos du ministre affirmant que l’avis de l’Autorité de la concurrence sur les significations ne sera pas mis en œuvre sont essentiels. La signification, qui coûte tout de même de 60 à 80 euros, rend en quelque sorte obligatoire le maillage territorial car il faut être sur le terrain pour signifier les actes, et le connaître finement pour être efficace. Il y aura en conséquence une sorte d’arbitrage effectué entre la nécessité de la proximité et la tendance à la concentration, notamment sous l’influence des institutionnels qu’évoquait Philippe Houillon.
M. Arnaud Leroy. Je soutiens la proposition pragmatique de Colette Capdevielle. Cette formulation déjà utilisée a le mérite de la cohérence.
M. le ministre. Le Gouvernement proposera au rapporteur général de modifier son amendement SPE1863 en remplaçant les mots « au 1er juillet 2016 » par les mots : « au premier jour du douzième mois suivant celui de la promulgation de la présente loi ».
M. Julien Aubert. Le « premier jour du douzième mois », cela fait onze mois ! La date du 1er juillet 2016 semblait calculée pour une entrée en vigueur un an après la promulgation de la loi. L’air de rien, alors que vous paraissiez accepter un allongement du délai, vous proposez de le faire passer de douze à onze mois.
M. le rapporteur général. Nous avons déjà adopté cette formulation hier.
M. le président François Brottes. Elle présente l’intérêt de ne pas figer la date de mise en œuvre sans tenir compte de celle de la promulgation.
L’amendement SPE1150 est retiré.
La Commission rejette les amendements SPE893 et SPE160.
Elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel SPE1751 des rapporteurs.
Puis elle est saisie de l’amendement SPE162 de M. Philippe Houillon.
M. Philippe Houillon. La suppression de la postulation au niveau du tribunal de grande instance (TGI) revient sur un monopole accordé aux huissiers. Je souhaitais en conséquence déposer un amendement proposant de les indemniser, mais il a été déclaré irrecevable. Nous sommes saisis à ce stade de l’amendement qui permettait de compléter ce dispositif et prévoyait la remise d’un rapport au Parlement relatif à cette indemnisation.
Nous reviendrons sur ces questions lorsque la loi sera promulguée à une date que les professionnels ne peuvent pas connaître…
M. le président François Brottes. En tout état de cause, la promulgation interviendra plus rapidement si le Conseil constitutionnel n’est pas saisi !
M. Philippe Houillon. Il serait préférable que le Conseil se prononce préalablement pour éviter les questions prioritaires de constitutionnalité (QPC) ultérieures.
M. le président François Brottes. Je sais d’expérience qu’une décision du Conseil constitutionnel avant la promulgation d’une loi ne garantit en rien contre les QPC ! Peut-être avez-vous entendu parler de la « loi Brottes » sur les coupures d’eau ? (Sourires.)
M. le ministre. Avis défavorable. Monsieur Houillon, nous ne supprimons pas une profession ; nous ne supprimons pas un monopole : nous étendons une compétence territoriale au sein d’une même profession. Nous sommes certains qu’il n’y a pas d’indemnisation à prévoir. Nos échanges avec le Conseil d’État n’ont fait que nous conforter sur ce point.
Mme Cécile Untermaier, rapporteure thématique. Avis défavorable. Le décret du 28 août 2014 qui a fait passer la compétence territoriale des huissiers du ressort du TGI au département ne comportait pas de dispositions relatives à une indemnisation. Pour ce qui est des rapports, nous savons qu’ils sont peu lus et, en l’espèce, celui qui est demandé porterait sur un dispositif encore hypothétique.
La Commission rejette l’amendement SPE162.
Elle adopte l’amendement rédactionnel SPE1752 des rapporteurs.
Puis elle en vient à l’amendement SPE1753 des rapporteurs.
Mme Cécile Untermaier, rapporteure thématique. En cohérence avec l’amendement de vos rapporteurs portant article additionnel après l'article 13, le présent amendement vise à préciser que la nomination en qualité d’huissier de justice par le ministre de la justice ne peut être refusée dans les zones où l’implantation d’offices ou l’association d’huissiers de justice au sein des offices existants apparaissent utiles pour renforcer la proximité et l’offre de services.
M. le ministre. Avis favorable.
Mme Véronique Louwagie. Les articles 14, 15 et 16 font référence à des « conditions d’aptitude » des notaires, des huissiers et des commissaires-priseurs judiciaires. Le ministre peut-il nous donner des précisions à ce sujet ? Vise-t-on un niveau de formation, de compétence, de qualification ? Les diplômes existent pour chacune de ces professions mais ils ne sont jamais évoqués ; nous devons savoir s’ils constituent un élément essentiel de l’aptitude. Alors que l’on évoque l’élargissement des champs de compétence, celui des périmètres d’actions, ou encore la pluriactivité, une clarification s’impose.
M. le ministre. Le détail des conditions d’aptitude sera fixé par la voie réglementaire. Les diplômes universitaires sont concernés, de même que la validation de l’expérience professionnelle ou les diplômes professionnels.
La Commission adopte l’amendement SPE1753.
En conséquence, les amendements SPE277, SPE290, SPE670, SPE1159, SPE276, SPE666 et SPE766 tombent.
La Commission examine l’amendement SPE1780 des rapporteurs.
Mme Cécile Untermaier, rapporteure thématique. Il vise à instaurer une limite d’âge pour l’exercice des fonctions d’huissiers de justice. Elle est fixée à 70 ans comme pour les notaires et les autres professions juridiques réglementées.
M. le ministre. Avis favorable.
La Commission adopte l’amendement SPE1780.
Elle est saisie de l’amendement SPE1863 des rapporteurs.
Mme Cécile Untermaier, rapporteure thématique. Il s’agit de l’amendement que le Gouvernement a suggéré de modifier afin que les dispositions étendant la compétence territoriale des huissiers de justice entrent en vigueur « au premier jour du douzième mois suivant celui de la promulgation de la présente loi ». Nous sommes d’accord pour le rectifier dans ce sens.
M. le ministre. Sous cette forme, nous y sommes évidemment favorables.
La Commission adopte l’amendement SPE1863 ainsi rectifié.
L’amendement SPE163 de M. Philippe Houillon est retiré.
La Commission adopte l’amendement rédactionnel SPE1754 des rapporteurs.
Puis elle adopte l’article 15 modifié.
Article 16 : Conséquences de l’assouplissement des conditions d’installation des commissaires-priseurs judiciaires prévus à l’article 13 bis ; modification des règles d’établissement de leurs bureaux annexes ; instauration d’une limite d’âge.
La Commission examine l’amendement de suppression SPE166 de M. Philippe Houillon.
Mme Véronique Louwagie. Le projet de loi vise à libéraliser l’installation des notaires, des huissiers de justice, et des commissaires-priseurs judiciaires. Il est ainsi prévu qu’une cartographie détermine progressivement les zones territoriales dans lesquelles l’implantation d’offices sera libre. Ces mesures sont à notre sens préjudiciables au maillage territorial. Nos territoires ruraux méritent de disposer d’un accès au droit et de bénéficier de l’installation de professionnels compétents.
Par ailleurs, alors que nous adoptons des amendements qui modifient le projet de loi en profondeur, je crains que l’étude d’impact menée sur la version initiale du texte ne soit plus valide.
Ces raisons nous poussent à demander la suppression de l’article.
M. le ministre. Avis défavorable. L’article 16 définit les conditions de libre installation des commissaires-priseurs judiciaires. Actuellement, le numerus clausus et les restrictions à la liberté d’installation ont des conséquences économiques dommageables. Je rappelle que le nombre d’offices décroît continûment depuis plus de dix ans, et que le maillage territorial connaît de fortes disparités régionales.
L’article 16 vise à supprimer les restrictions existantes pour permettre, dans les zones qui en auront besoin, la nomination des commissaires-priseurs judiciaires dans le lieu de leur choix sous réserve de répondre à des « conditions de nationalité, d’aptitude, d’honorabilité, d’expérience et d’assurance ». Ce dispositif, homogène avec celui relatif aux notaires et aux huissiers de justice, permettra de nommer un plus grand nombre de candidats. Il bénéficiera en particulier aux femmes et aux plus jeunes qui sont aujourd’hui trop souvent contraints de demeurer salariés comme le montrent les chiffres. Nous sommes convaincus que cette disposition permettra d’améliorer le maillage territorial.
Mme Cécile Untermaier, rapporteure thématique. Avis défavorable. Nous défendrons un amendement SPE1755 visant à préciser que la nomination en qualité de commissaire-priseur judiciaire par le ministre de la justice ne pourra être refusée « dans les zones où l’implantation d’offices de commissaire-priseur judiciaire ou l’association de commissaires-priseurs judiciaires au sein des offices existants apparaissent utiles pour renforcer la proximité et l’offre de services ».
Mme Véronique Louwagie. Monsieur le ministre, vous évoquez ceux qui rejoindront la profession de commissaire-priseur judiciaire ; encore faudra-t-il que les nouveaux entrants veuillent s’installer dans les territoires ruraux ! Si leurs revenus ne permettent plus aux professionnels de vivre « raisonnablement », nous manquerons tout simplement de candidats. La réforme fait donc courir un risque sérieux aux zones rurales
Certes, le nombre d’offices décroît depuis plusieurs années, mais cela s’explique par un phénomène de regroupement qui concerne aussi, par exemple, les professions médicales et paramédicales.
M. Jean-Charles Taugourdeau. Monsieur le ministre, sur le terrain, les professionnels ne se sont jamais plaints auprès de nous. Peut-être votre point de vue est-il une nouvelle fois un peu « parisien » ? Auriez-vous raison, que les difficultés dont vous parlez s’expliqueraient d’abord par le ralentissement de l’activité.
Je vous suggère à nouveau de rencontrer en urgence le ministre du travail qui bloque la création d’emplois en France car il est bien votre pire ennemi. Il faut lui faire comprendre ce que sont vraiment la croissance et l’activité.
Mme Laure de La Raudière. Il est vrai que l’appellation « loi Macron » correspond mieux au contenu du texte que celle de « projet de loi pour la croissance et l'activité » !
Véronique Louwagie a eu raison de souligner que les amendements que nous adoptons modifient profondément le projet de loi initial. Monsieur le ministre, pourriez-vous vous engager à réviser l’étude d’impact avant l’examen du texte par le Sénat ? Je rappelle que l’amélioration des études d’impact constituait l’une des propositions majeures du rapport déposé le 9 octobre dernier par la mission d’information de l’Assemblée nationale sur la simplification législative à laquelle Cécile Untermaier et moi-même avons participé.
M. Jean-Yves Caullet. Madame Louwagie, vous laissez entendre que les professionnels contraints de s’installer en zone rurale ne peuvent plus vivre dignement. Ce n’est pas acceptable. La question du maillage territorial se pose, mais il faut cesser d’imaginer qu’il n’est pas possible de gagner sa vie dans le monde rural. La solution proposée par le texte est bonne pour nos territoires. Les meilleurs professionnels peuvent être choisis pour s’y installer, et vivre de leur travail.
M. Sébastien Huyghe. Monsieur le ministre, vous plaquez une culture économique pure sur une culture juridique qui répond à d’autres ressorts. Vous constatez que le nombre d’offices ministériels diminue, mais les chiffres bruts méritent d’être analysés finement. Vous méconnaissez complètement le fonctionnement des offices qui sont poussés au regroupement, notamment par le ministère de la justice, afin d’éviter les difficultés économiques. Ces regroupements expliquent le recul du nombre d’offices et n’empêchent pas l’existence de bureaux secondaires sur les territoires. Le maillage territorial est donc assuré en même temps que les offices et les études atteignent la taille critique qui leur permet de subsister.
Mme Michèle Bonneton. Les habitants des territoires ruraux doivent avoir accès aux professionnels du droit dans de bonnes conditions. Nous souhaitons que davantage d’études soient mieux réparties sur le territoire et dessinent un maillage suffisamment fin. Les mesures proposées, comme l’élargissement du périmètre d’action des professionnels, conduiront à des concentrations et à la disparition des plus petites études. Vous organisez en quelque sorte cette disparition qui touche en particulier les territoires ruraux.
Pour notre part, nous souhaiterions que la loi aide plutôt les petites structures à s’adapter. Cela nous semble possible à condition de faire preuve d’un peu plus d’imagination et de dynamisme, et de sortir des sentiers battus.
M. le ministre. J’ai déjà montré que les mesures proposées ne sont pas de nature à déstabiliser un maillage territorial qui est par ailleurs déjà largement fragilisé. Elles visent au contraire à permettre à une profession de mieux s’organiser en lui offrant de nouvelles opportunités.
La solide argumentation de M. Huyghe va à l’encontre des volontés de son propre groupe politique qui veut s’opposer aux regroupements des offices de commissaires-priseurs judiciaires. De notre côté, nous ne défendons pas une doctrine sur le sujet, nous nous contentons, compte tenu de la démographie de la profession, de lui offrir une possibilité.
M. Hetzel pourra témoigner qu’en Alsace-Moselle, les huissiers exercent depuis longtemps le métier des commissaires-priseurs judiciaires, et que cela ne se passe pas si mal. Ce n’est qu’un clin d’œil mais, après tout, le système spécifique en vigueur sur ce territoire nous inspire par exemple en matière de limite d’âge.
Madame de La Raudière, je m’engage à faire actualiser l’étude d’impact sur les points qui feront l’objet de modifications dans le cours des débats devant l’Assemblée nationale. Le Gouvernement le doit à la représentation nationale. J’ai voulu que l’étude initiale soit enrichie en faisant appel à des organismes indépendants ou au Commissariat général à la stratégie et à la prospective : le débat doit être ouvert et alimenté par le plus grand nombre possible d’études objectives.
M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Au-delà de l’Alsace-Moselle, je rappelle que les huissiers de justice font d’ores et déjà très fréquemment fonction de commissaires-priseurs judiciaires sur l’ensemble du territoire. Ils exercent en particulier cette mission dans les zones désertées par cette profession.
Les auditions menées lors des travaux de la mission d’information de la commission des Lois sur les professions juridiques réglementées nous ont montré que la profession de commissaire-priseur judiciaire s’est en quelque sorte gelée, qu’elle n’a pas vraiment fait évoluer ses modalités de fonctionnement, et qu’elle a plutôt fermé ses portes aux jeunes générations. Nous assistons en conséquence à un double mouvement : au repli des commissaires-priseurs judiciaires répond le développement des activités des huissiers de justice dans ce secteur.
M. Sébastien Huyghe. Monsieur le ministre, j’ai décrit une situation que vous semblez méconnaître sans que mes propos soit le moins du monde contradictoires avec la position de mon groupe politique qui ne s’oppose pas aux regroupements mais aux conditions dans lesquels vous souhaitez qu’ils aient lieu.
M. Patrick Hetzel. Monsieur le ministre, vous avez raison, les huissiers comme les notaires exercent en Alsace-Moselle la fonction de commissaire-priseur judiciaire. Toutefois nous sommes très loin de vos propositions puisque, sur ce territoire, contrairement à ce que vous souhaitez, il n’est pas question de libre installation. Nous sommes hostiles à l’article 16 car, au final, il dérégule le système.
La Commission rejette l’amendement SPE166.
La Commission examine les amendements identiques SPE348 de M. Patrick Hetzel et SPE625 de M. Gérard Cherpion.
M. le ministre. Avis défavorable. Ces amendements proposent de maintenir à deux le nombre d’offices pouvant être confiés au même titulaire dans le ressort d’une même chambre de discipline, ce qui est contraire aux principes du projet. Les commissaires-priseurs disposent d’une compétence nationale, mais le système ne permet pas, aujourd’hui, un maillage suffisant. C’est précisément ce que nous entendons corriger.
Mme Cécile Untermaier, rapporteure thématique. Nous sommes quant à nous favorables à ces amendements, car, en l’absence d’amendement du Gouvernement encadrant la mesure, la situation ne nous paraît pas satisfaisante. Nous partageons certes la logique d’assouplissement des conditions d’installation, mais celle-ci ne doit pas aboutir à la constitution de gros offices au détriment du maillage territorial et d’une saine concurrence favorisant l’installation des jeunes. L’ordonnance du 26 juin 1816 permet de confier deux offices de commissaire-priseur au même titulaire, sous réserve que leurs sièges soient situés dans le ressort d’une même chambre de discipline ; cette mesure vise à créer des synergies régionales tout en maintenant un contrôle déontologique par la même compagnie régionale et les mêmes parquets généraux. Il nous semble que l’actuelle rédaction du projet de loi favoriserait une concentration sans encadrement de l’activité, qui poserait problème. C’est pourquoi nous sommes favorables aux amendements de suppression.
M. le ministre. La situation actuelle, je le répète, n’est pas satisfaisante. Hyper-concentrés en région parisienne, les commissaires-priseurs sont l’une des professions qui présentent les plus grandes disparités. Si nous ne leur permettons pas de s’organiser sur le territoire, au niveau des cours d’appel ou autre, cette logique de concentration ne fera que s’accroître. Toutefois, afin de tenir compte des observations de la rapporteure thématique, je propose que nous traitions la question en séance sur la base d’un amendement que présentera le Gouvernement et qui répondra à ces craintes, sans supprimer les deux alinéas.
Mme Cécile Untermaier, rapporteure thématique. La mesure doit absolument être encadrée. Sous cette réserve, je souscris à la proposition du ministre.
Les amendements SPE348 et SPE625 sont retirés.
La Commission est saisie de l’amendement SPE1755 des rapporteurs.
Mme Cécile Untermaier, rapporteure thématique. En cohérence avec le vote, hier, de l’article 13 bis, il s’agit d’adapter des dispositions pour la profession de commissaire-priseur judiciaire.
La Commission adopte l’amendement SPE1755.
La Commission examine l’amendement SPE1781 des rapporteurs.
Mme Cécile Untermaier, rapporteure thématique. Le présent amendement vise à instaurer une limite d’âge pour l’exercice des fonctions de commissaire-priseur judiciaire, à 70 ans, comme pour les autres professions juridiques réglementées.
La Commission adopte l’amendement SPE1781.
Puis elle adopte l’amendement rédactionnel SPE1756 des rapporteurs.
La Commission est saisie de trois amendements identiques SPE1758 des rapporteurs, SPE349 de Patrick Hetzel et SPE626 de M. Gérard Cherpion.
Mme Cécile Untermaier, rapporteure thématique. En cohérence avec le maintien d’un régime d’autorisation pour l’ouverture des bureaux secondaires des avocats, nous proposons de supprimer les dispositions de l’article 16 du projet de loi qui substituent un régime déclaratif à l’actuel régime d’autorisation prévalant en cas d’ouverture d’un bureau annexe par un commissaire-priseur judiciaire.
M. le ministre. Dans la continuité de ce que j’ai annoncé au moment de la discussion des amendements SPE348 et SP625, je demande le retrait de ces amendements, afin que nous adoptions en séance une proposition du Gouvernement qui permettra d’encadrer la mesure.
Les amendements SPE1758, SPE349 et SPE 626 sont retirés.
Suivant l’avis défavorable de la rapporteure thématique, la Commission rejette ensuite les deux amendements identiques SPE165 de M. Philippe Houillon et SPE350 de M. Patrick Hetzel.
Puis elle adopte successivement l’amendement rédactionnel SPE1759 et l’amendement de coordination SPE1757 des rapporteurs.
Puis la Commission adopte l’article 16 modifié.
Article 16 bis (nouveau) : Instauration d’une limite d’âge pour l’exercice de la profession de greffier des tribunaux de commerce
La Commission examine l’amendement SPE1776 des rapporteurs.
Mme Cécile Untermaier, rapporteure thématique. Il s’agit d’instaurer une limite d’âge pour l’exercice des fonctions de greffier de tribunal de commerce, à 70 ans. L’entrée en vigueur de cette disposition est fixée au premier jour du douzième mois suivant la promulgation de la loi.
La Commission adopte l’amendement SPE1776.
Article 17 : Assouplissement des conditions d’installation des officiers publics et/ou ministériels
La Commission est saisie de quatre amendements de suppression de l’article 17 SPE1760 du rapporteur général, SPE23 de M. Julien Aubert, SPE177 de M. Philippe Houillon et SPE363 de M. Patrick Hetzel.
Mme Cécile Untermaier, rapporteure thématique. Sans grande surprise, nous vous proposons de supprimer cet article, puisque nous avons enrichi le texte par l’article 13 bis adopté hier.
La Commission adopte les amendements SPE1760, SPE23, SPE177 et SPE363.
En conséquence, l’article 17 est supprimé.
Les amendements SPE734, SPE712, SPE628, SPE894, SPE895, SPE214, SPE354, SPE1063, SPE167, SPE352, SPE760, SPE168, SPE353, SPE601, SPE170, SPE356, SPE788, SPE169, SPE355, SPE675, SPE791, SPE1120, SPE278, SPE1161, SPE781, SPE171, SPE357, SPE896, SPE676, SPE797, SPE1122, SPE172, SPE358, SPE602, SPE173, SPE359, SPE603, SPE897, SPE898, SPE899, SPE174, SPE360, SPE6, SPE175, SPE900, SPE215, SPE361, SPE176, SPE362, SPE604, SPE901, SPE902, SPE216, SPE903, SPE792, SPE904 et SPE833 deviennent sans objet.
Article 17 bis (nouveau) : Assouplissement des conditions d’installation des avocats au Conseil d’État et à la Cour de cassation
La Commission est saisie de l’amendement SPE1761 des rapporteurs.
Mme Cécile Untermaier, rapporteure thématique. Le présent amendement vise à étendre à la profession d’avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation l’assouplissement des conditions d’installation des autres officiers ministériels à laquelle procède l’article 13 bis du projet de loi.
En 2013, la juridiction suprême de l’ordre judiciaire a jugé près de 28 719 affaires et s’est prononcée sur 333 questions prioritaires de constitutionnalité (QPC), tandis que la juridiction suprême de l’ordre administratif a jugé 10 143 affaires et a traité 157 QPC. Au total, ce sont donc près de 40 000 pourvois qui ont été soutenus devant les cours suprêmes l’an passé.
Or le nombre d’offices ministériels d’avocats au Conseil d’État et à la Cour de cassation reste fixé à soixante depuis 1817 et ce, malgré la suppression du numerus clausus par un décret du 23 avril 2009 qui a permis au garde des Sceaux de créer davantage d’offices. Jusqu’à présent, cette faculté n’a pas été utilisée par le ministre.
Un décret du 5 juin 2013 a par ailleurs porté de trois à quatre le nombre maximal d’associés au sein d’une société civile professionnelle d’avocats aux conseils. À ce jour, un seul office a fait usage de cette faculté.
Face au relatif malthusianisme qui caractérise la profession d’avocat aux conseils, les rapporteurs estiment nécessaire d’assouplir les conditions d’installation de ces officiers ministériels.
Il s’agit ainsi, tout d’abord, de confier à l’Autorité de la concurrence une compétence nouvelle et complémentaire de celle qui lui serait reconnue pour les notaires, huissiers de justice et commissaires-priseurs judiciaires, consistant à formuler, tous les deux ans, des recommandations qui, rendues publiques, viseraient à améliorer l’accès aux offices d’avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation dans la perspective de développer de façon progressive le nombre de ces offices.
Il s’agit ensuite d’imposer au garde des Sceaux la création d’offices d’avocat aux conseils, dans la limite des besoins identifiés par l’Autorité de la concurrence, en vertu du nouvel article L. 462‑11 du code de commerce.
Il convient également de permettre au garde des Sceaux de créer des offices si, dans un délai de six mois suivant la publication des recommandations de l’Autorité de la concurrence, il constate un nombre insuffisant de demandes de création d’office ou d’association au sein des offices existants au regard des besoins identifiés.
Il faut, enfin, assortir l’ensemble du dispositif d’un mécanisme d’indemnisation du préjudice patrimonial causé aux offices existants, mécanisme qui reposerait sur les titulaires des offices nouvellement créés, principe retenu pour les autres professions juridiques réglementées.
M. le ministre. Sagesse.
Mme Colette Capdevielle. Je félicite la rapporteure thématique pour cet amendement opportun, le statut de ces professionnels ne se justifiant plus aujourd’hui. Cette profession, dont nous avons longuement auditionné les représentants, a été complètement oubliée du rapport de l’Inspection générale des finances et ne figure pas non plus dans le projet de loi. Depuis 1817, le nombre des offices ministériels d’avocats au Conseil d’État et à la Cour de cassation est resté fixé à soixante. La proposition n° 2 du rapport de Cécile Untermaier tend à supprimer la charge d’officier ministériel des avocats aux conseils, et donc leur droit de représentation, en contrepartie d’une indemnisation, tout en maintenant un barreau spécialisé et en prévoyant un concours spécifique augmentant le nombre de ces avocats dans les limites d’un numerus clausus susceptible d’être révisé. Cet amendement est un pas de géant, même si nous pourrions aller plus loin à l’avenir.
M. Philippe Houillon. Je me réjouis de constater que l’avis n’a pas changé sur cette conclusion de la mission propre à la rapporteure thématique.
Le premier président de la Cour de cassation, dans son discours à l’occasion de la rentrée solennelle de la Cour, lundi, a indiqué que la politique de la Cour de cassation tendait à diminuer substantiellement les pourvois. Une évaluation devrait donc être conduite – il est du reste toujours préférable de procéder à une évaluation avant de prendre une décision plutôt que de prendre une décision avant de procéder à une évaluation – ; cela n’a pas été le cas. Le premier président de la Cour de cassation a également insisté sur la spécialisation et la compétence des avocats au Conseil, en soulignant qu’il ne souhaitait pas voir bouleverser l’ordre des choses.
Par ailleurs, l’amendement demande à l’Autorité de la concurrence un avis sur la liberté d’installation des avocats au Conseil. Ce n’est pas à une autorité administrative de prendre une décision de fond. Comme pour les autres professions, il appartient au Gouvernement, en l’occurrence au garde des Sceaux, de prendre une décision politique sur le principe même de la liberté d’installation.
Enfin, la seconde partie de l’amendement, concernant l’indemnisation, porte celle-ci à la charge des nouveaux entrants éventuels. L’amendement duplique ainsi le système retenu pour les autres professions, alors que les situations n’ont rien à voir. Il existe dans les autres professions une sectorisation géographique : une étude de notaire créée à tel endroit peut porter préjudice aux études déjà installées dans ce secteur. Mais pour la présente catégorie de professionnels, il existe une juridiction unique, à Paris, et les études sont toutes installées dans la capitale. Par conséquent, le même raisonnement ne peut trouver à s’appliquer. La création d’un office ne porte pas atteinte à « la valeur patrimoniale d’un office antérieurement créé » mais à celle de tous les offices antérieurement créés, puisque tous exercent au même endroit, auprès de la même juridiction. Ce texte est donc inapplicable. L’indemnisation devrait être déduite de la responsabilité de l’État du fait de la loi. Pour des raisons de fond comme de forme, je ne souhaite pas que cet amendement soit adopté.
M. Alain Tourret. Les avocats au Conseil d’État et à la Cour de cassation participent de manière exceptionnelle et remarquable aux arrêts de ces deux juridictions. Si leur nombre n’est pas multiplié, ils ont en revanche diversifié leurs champs d’intervention : ils interviennent aujourd’hui auprès des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel, ainsi que dans le cadre des arbitrages, et pour les multiples consultations qui leur sont demandées, tant leur compétence est reconnue.
Les auteurs de l’amendement ont considéré que cette catégorie ne pouvait rester à l’écart de l’action menée, avec le présent projet de loi, au sujet des autres professions. Il est nécessaire d’augmenter le nombre de charges, et il ne me paraît pas possible d’accepter toutes les interventions de ces professionnels devant d’autres juridictions.
Enfin, je crois que Philippe Houillon a raison au sujet de l’indemnisation : la situation de ces avocats n’est pas comparable, notamment du fait de l’absence de ressort territorial. Ce serait à l’État de pourvoir à l’indemnisation, non au nouvel entrant.
M. Julien Aubert. S’il n’y a pas besoin d’indemnisation, puisque j’ai cru comprendre, en écoutant Philippe Houillon, qu’il n’y aurait pas d’impact sur tel ou tel cabinet mais sur l’ensemble des cabinets, je ne vois pas pourquoi l’État interviendrait.
La rapporteure thématique nous a expliqué que le nombre croissant de pourvois montrait que le filtrage était insuffisant. Or, en augmentant le nombre d’avocats, on améliorera l’accès à ces juridictions et on augmentera donc le volume d’activité ; je ne comprends donc pas comment le déblocage de ce quasi-monopole permettrait de mieux filtrer l’accès aux juridictions suprêmes. Avez-vous anticipé l’impact d’une telle mesure sur l’engorgement de ces juridictions ? Quel est, au fond, l’objectif ? Est-il d’améliorer l’accès au Conseil d’État et à la Cour de cassation ? De faire baisser les honoraires ?
M. Philippe Houillon. Le nombre de soixante études ne dit pas tout. Les textes réglementaires ont récemment porté à 240 le nombre maximal d’avocats. Or cette capacité n’est pas intégralement remplie à ce jour. Un dispositif répondant à la demande existe déjà, et il ne reste qu’à remplir les cases.
Le filtre, monsieur Aubert, est plus important quand interviennent des avocats au Conseil, car le taux de cassation est alors très supérieur.
M. Jean-Yves Caullet. La présence d’avocats peut en effet être en soi un filtre pour éviter les engorgements.
J’ai été frappé par le niveau sonore extrêmement bas de notre Commission après l’exposé de la rapporteure thématique. Je veux y voir le respect que nous avons pour l’ensemble des professions juridiques réglementées, plutôt qu’une forme de révérence craintive qui préviendrait toute évolution sur le présent sujet, et je félicite nos rapporteurs pour l’avancée proposée.
Notre système judiciaire présente l’aspect d’une pyramide. Il est important que les mêmes règles régissent l’ensemble de l’édifice ; or plus l’on s’élève dans une pyramide, plus l’espace se réduit et mieux on se connaît. Nous avons souhaité donner de l’oxygène à ces professions : comme vous le savez, plus on s’élève en altitude, plus le manque d’oxygène peut faire encourir des risques graves…
M. le rapporteur général. Nous devons faire ce pas pour indiquer notre volonté d’ouvrir cet îlot. L’avis de sagesse du Gouvernement est de bon augure pour avancer dans la bonne direction.
M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Je salue le travail de Cécile Untermaier sur ce chantier, qu’il n’était pas évident d’ouvrir, les représentants de cet ordre et les chefs de juridiction nous ayant bien fait comprendre, en audition, qu’ils n’étaient pas très favorables à ce que les choses évoluent. Je pense que cette profession ne peut pas ne pas évoluer au moment où nous faisons avancer l’ensemble des organisations juridictionnelles et l’accès au droit.
La qualité et la compétence de ces avocats aux Conseils doivent être soulignées. Il ne faut pas non plus oublier qu’ils bénéficient, dans leur travail, d’un appui très important d’autorités universitaires et d’avocats. Ce qui nous a conduit à nous interroger, c’est le fait que ces avocats aux Conseils ont, ces dernières années, pris une place de plus en plus grande devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d’appel, passant auprès des avocats, de tous les barreaux, pour de redoutables concurrents, recevant davantage l’attention des magistrats.
Je m’étonne par ailleurs d’entendre dire que nous souhaiterions réduire la saisine de la Cour de cassation. Et ce d’autant plus que l’on compare notre système avec la Cour suprême de Karlsruhe, en Allemagne, par exemple. Compte tenu des spécificités françaises, ces comparaisons n’ont pas de sens.
Enfin, comment peut-on considérer qu’il n’y a pas besoin de davantage de représentation devant les deux juridictions, alors que le nombre des dossiers augmente, de manière légitime puisque les rapports individuels tendent à se judiciariser de plus en plus, et que les processus d’application jurisprudentielle sont de plus en plus subtils, au point de rendre une harmonisation absolument nécessaire ? Sans parler des QPC, pour lesquelles le Conseil d’État et la Cour de cassation jouent un rôle très important, et qui n’en sont qu’à leur début.
Le nombre d’offices n’a pas évolué depuis 1817. S’il est possible, depuis 2009, d’augmenter ce nombre, il ne s’est rien passé depuis cette date. De même, la possibilité d’augmenter le nombre d’avocats dans les études ne s’est traduite que par l’augmentation d’un seul conseiller. Ces grands corps ont manifestement des difficultés à évoluer. De même, les engagements pris par un précédent gouvernement, sous une autre législature, d’augmenter de mille les effectifs du notariat se sont traduits par une diminution d’une dizaine de notaires. Le législateur doit donc intervenir. Dans ce cadre, il semble rendre nécessaire de dédier un diplôme spécifique à l’exercice de cette profession.
Enfin, les propos de Philippe Houillon sur l’indemnisation sont pertinents. La compétence nationale de cette catégorie professionnelle la distingue des autres, et peut-être n’avons-nous pas complètement achevé notre travail sur ce point. Nous aurions intérêt à bien affiner le dispositif, car vous voyez le problème si, à la suite de contestations, c’est au Conseil d’État ou à la Cour de cassation qu’il appartient de procéder aux arbitrages.
M. Jean-Charles Taugourdeau. Depuis les possibilités ouvertes il y a cinq ans, il ne s’est rien passé. Or il n’y a plus d’activité : les cabinets ne se développent pas, ils ont moins d’associés, moins de salariés, ils ne prennent pas de stagiaires, tout le monde sert les boulons. Il faut, monsieur le ministre, développer l’économie, la production des TPE-PME, qui créent la richesse : c’est ainsi que les cabinets pourront avoir des dossiers.
Mme Véronique Louwagie. Serait-il possible d’avoir une étude d’impact sur l’indemnisation, avant que le texte passe au Sénat ?
La Commission adopte l’amendement SPE1761.
M. le président François Brottes. Je vous informe qu’à partir de demain Anne-Yvonne Le Dain siègera dans notre Commission à la place d’Olivier Faure.
La Commission est saisie de l’amendement SPE402 de M. Patrick Hetzel.
M. Patrick Hetzel. Il s’agit de traiter plus explicitement le sujet de l’implantation.
Suivant l’avis défavorable de la rapporteure thématique, la Commission rejette l’amendement SPE402.
La Commission examine ensuite les deux amendements identiques SPE837 de M. Guénhaël Huet et SPE1124 de M. Sébastien Huyghe.
Mme Véronique Louwagie. Il est important de prendre en considération les spécificités des trois départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, au plan à la fois des dénominations et des compétences. Un grand nombre de compétences y sont en effet dévolues aux notaires.
M. le ministre. L’adoption de ces amendements conduirait à un système très binaire, avec, d’un côté, un concours et, de l’autre, une libre installation procédant de l’article adopté hier. Je m’engage à travailler, d’ici à la séance, aux moyens de conserver ces spécificités, et je demande donc à ce stade le retrait des amendements.
Les amendements SPE837 et SPE1124 sont retirés.
Article 18 : Développement de l’exercice des professions de notaire, d’huissier de justice, de commissaire-priseur judiciaire et de greffier des tribunaux de commerce en qualité de salarié
La Commission examine les trois amendements de suppression SPE178 de M. Philippe Houillon, SPE366 de M. Patrick Hetzel et SPE1193 de M. Marc Dolez.
M. Julien Aubert. L’article 18 vise à supprimer les dispositions législatives actuelles qui limitent pour les professions réglementées le nombre de salariés pouvant être employés par étude ou par office. L’objectif est-il d’augmenter la taille des études ou offices, ou bien d’en augmenter le nombre ? Ne serait-il pas plus judicieux de maintenir une limite et d’uniformiser le nombre de professionnels salariés ? Le risque, en procédant à un véritable big bang – libéralisation de l’installation, fusion de certaines professions, augmentation du nombre des études ou offices, augmentation du nombre de personnes y travaillant, modification des règles d’exercice… –, c’est de créer des externalités négatives contraires aux intentions de cette loi. Il s’agit donc d’un amendement d’appel, invitant le ministre à nous présenter la philosophie du Gouvernement.
M. Patrick Hetzel. Je me permets de revenir sur le sujet précédent, car il existe dans les trois départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, depuis les lois de 1924, une très forte cohérence juridique, et il est de tradition constante, depuis cette date, de ne pas procéder à un détricotage de ces dispositions de droit local de manière isolée.
M. Marc Dolez. Il n’y a pas de raison de modifier un dispositif s’agissant des notaires, qui vient tout juste d’être refondu par le législateur, le 1er mars dernier. Il vaut mieux laisser cette refonte entrer pleinement en application, avant de procéder à une nouvelle modification.
M. le ministre. Nous souhaitons lever des contraintes hétérogènes entre les différentes professions et garantir la liberté de s’organiser à ceux qui le souhaitent, alors même que, par les dispositions votées hier, nous avons offert des possibilités de créer des offices. Néanmoins, sensible à la crainte que les offices pourraient chercher à devenir trop gros, ou qu’il n’y ait pas assez d’associés, je vous propose, au lieu de supprimer l’article, d’adopter l’amendement que vont présenter les rapporteurs et qui consiste à restaurer une homogénéité entre les différentes professions, avec une règle d’un sur quatre. Ce serait une réforme équilibrée. Je demande donc le retrait de ces amendements.
Mme Cécile Untermaier, rapporteure thématique. Nous présenterons en effet un amendement qui répond aux inquiétudes exprimées par nos collègues et que nous partageons.
M. Philippe Vigier. Les rapporteurs ont bien compris que ces dispositions allaient provoquer l’effet inverse de celui escompté. Nous avons pour notre part déposé un amendement prenant en considération le chiffre d’affaires, comme cela existe dans certaines professions libérales. Où sont les jeunes, dans cette affaire ?
Les amendements SPE178, SPE366 et SPE1193 sont retirés.
La Commission examine l’amendement SPE1909 des rapporteurs.
M. le rapporteur général. Il nous a paru utile de procéder à une réécriture globale de l’article 18 qui propose de supprimer la règle d’« un pour deux » qui régit depuis peu l’exercice de la profession de notaire en tant que salarié, ainsi que la règle d’« un pour un » qui prévaut pour l’exercice en qualité de salarié des professions d’huissier de justice, de commissaire-priseur judiciaire et de greffier des tribunaux de commerce.
Nous ne sommes pas convaincus que la faculté de recourir de façon illimitée au salariat favorise l’accès, notamment des femmes et des jeunes, à des professions dont la vocation première est de s’exercer dans un cadre libéral – nous renvoyons à cet égard au rapport de l’inspection générale des finances, ainsi qu’à ce que nous avons voté dans de précédents articles.
C’est pourquoi nous proposons d’appliquer une règle d’« un pour quatre » : une personne titulaire d’un office notarial ne peut pas employer plus de quatre notaires salariés.
Nous souhaitons, de même, que toute clause de non-concurrence soit réputée non écrite. Si nous voulons aider à l’association et à l’installation, il ne convient pas de « ficeler » ce salariat et de le priver du droit à l’installation. La même règle s’appliquerait aux commissaires-priseurs et aux huissiers de justice, mais pas aux personnes physiques titulaires d’un greffe de tribunal de commerce.
M. le ministre. Avis favorable.
M. Michel Zumkeller. Nous partageons la volonté de créer de nouveaux postes de notaires, mais ce n’est pas de cette façon que vous y parviendrez. Votre critère n’a pas de sens : un pour quatre dans une petite ville de province et un pour quatre à Paris, cela n’a rien à voir. Il faut se baser sur l’activité des cabinets, telle que mesurée par le chiffre d’affaires, avec des pondérations selon les territoires. Vous créerez de cette façon bien plus de postes.
M. Philippe Houillon. J’ai retiré mon amendement précédent pour me rallier à celui-ci. Il serait bon d’adopter la même règle pour les administrateurs et mandataires judiciaires.
M. Philippe Vigier. De l’audace, monsieur le ministre ! Si vous souhaitez que les jeunes entrent dans le métier, « un pour quatre » n’est pas le bon critère car les effectifs se placeront d’emblée au niveau du plafond, tandis que si vous adoptez un « panier » assis sur le chiffre d’affaires, comme cela se fait déjà pour les pharmacies d’officine, par exemple, vous êtes sûrs que cette assiette se répartira de façon identique sur le territoire ; ce sera une vraie stimulation. Je rappelle qu’il n’existe pas de grille salariale pour les notaires salariés et que ceux-ci sont souvent très mal rémunérés.
M. Guénhaël Huet. Il convient de trouver un équilibre. Je ne suis pas persuadé que permettre à un notaire d’employer quatre notaires salariés plutôt que deux représente un progrès : le rapporteur général ne nous a donné aucune explication précise quant à son choix. Pourquoi a-t-il retenu le chiffre quatre ? Pourquoi ne pas autoriser trois ou cinq notaires salariés par étude ? Nous avons l’impression que ce choix a été fait à l’aveuglette.
De plus, alors que la règle n’autorisant que deux notaires salariés par office n’a pas encore une année d’existence, elle se trouverait déjà modifiée, ce qui pose un vrai problème de stabilité juridique. Arrêtons de modifier sans cesse les règles !
Mme Sophie Errante. Monsieur Zumkeller, le chiffre d’affaires n’est pas un critère pertinent, car il n’est pas nécessairement révélateur de la bonne santé d’une entreprise. Les charges fixes n’étant pas les mêmes sur tout le territoire, je ne suis pas favorable à son introduction comme critère.
Mme Véronique Louwagie. Monsieur le rapporteur général, vous avez rappelé au début de cette séance que les objectifs essentiels à vos yeux sont l’installation des jeunes et l’ouverture.
La difficulté est de trouver la juste mesure. Or autoriser quatre notaires salariés pourrait engendrer une concentration importante, la moyenne étant, dans le secteur des services, de dix salariés par professionnel. Votre réécriture de l’article 18 risque donc de susciter l’émergence d’offices notariaux de cinquante collaborateurs !
Il convient de réfléchir à plusieurs indicateurs : l’activité de l’office en est un. Or le chiffre d’affaires est un élément qui traduit l’activité, même s’il ne traduit pas nécessairement la bonne santé financière d’un office.
Cette réécriture de l’article 18 ne correspond pas aux objectifs que vous avez-vous-même fixés, monsieur le rapporteur général, et auxquels j’acquiesce.
M. Philippe Gosselin. Cet amendement a assurément le mérite de tenter de faire la synthèse des propositions des uns ou des autres. Je m’interroge toutefois sur les critères proposés.
Que son chiffre d’affaires ne révèle pas la bonne santé d’un office, c’est évident. Mais pourquoi avoir fixé le nombre de notaires salariés par étude à quatre ? Pourquoi pas trois, cinq ou six ?
De plus, cet article ajoute à l’instabilité juridique, puisqu’il tend à modifier des règles très récentes. Le manque de fiabilité et de stabilité juridiques risque de freiner la dynamique que le texte cherche par ailleurs à enclencher, ce qui serait contraire à l’effet recherché.
M. le rapporteur général. D’aucuns nous ont reproché à plusieurs reprises de créer des usines à gaz. Or voilà qu’on nous propose une tuyauterie directement reliée au chiffre d’affaires pour conditionner le recrutement de notaires salariés.
Cette nouvelle rédaction de l’article 18 ne vise nullement à imposer le recrutement de quatre notaires salariés. Il permet seulement au titulaire d’un office, qui juge utile ou nécessaire de recruter des notaires salariés, de le faire dans la limite de quatre.
Y aurait-il un paradoxe, comme je l’ai entendu, à faciliter l’installation tout en augmentant le nombre autorisé de notaires salariés par office ? Le paradoxe n’est qu’apparent. Nous avons en effet successivement voté la liberté d’installation régulée et la suppression des clercs habilités : limiter à quatre le nombre de notaires salariés offrira à ces salariés la possibilité d’acquérir une expérience professionnelle tout en permettant aux offices de fonctionner, dès l’instant que les clercs habilités n’exerceront plus sous cette qualité.
J’ajoute que l’interdiction de la clause de non-concurrence permettra d’éviter que soit bridée la capacité des salariés à s’installer.
Chacun se prévaut ici d’une expérience de terrain. Lorsqu’une étude sera parvenue à quatre notaires salariés, ou bien les plus brillants se verront proposer une association ou bien ils s’installeront. C’est une expérience que les avocats connaissent bien.
Ce dispositif global répond à la fois à la nécessité de favoriser l’acquisition d’une expérience professionnelle, de collaborer au développement des offices et de pallier les conséquences de la suppression des clercs habilités tout en créant un vivier pour de futures associations ou de futures installations.
La Commission adopte l’amendement SPE1909.
L’article 18 est ainsi rédigé.
En conséquence, les amendements identiques SPE30, SPE99, SPE285, SPE364, SPE611, SPE662, SPE717 et SPE1095 ainsi que les amendements identiques SPE207, SPE365 et SPE629 et l’amendement SPE1664 tombent.
Après l’article 18
Suivant l’avis défavorable du rapporteur général, la Commission rejette l’amendement SPE367 de M. Patrick Hetzel.
Puis elle examine l’amendement SPE907 de M. Michel Zumkeller.
M. Michel Zumkeller. Je regrette votre attitude sur nos propositions. Que vous refusiez de prendre en compte le chiffre d’affaires, soit, mais il est possible de travailler sur le critère de l’activité. Ne pas l’introduire est une erreur collective.
L’article 18 tel qu’il a été voté ne favorisera pas l’installation de nouveaux notaires : au contraire, il aura l’effet contraire en augmentant le nombre de notaires salariés car les offices en emploieront le nombre maximal.
Vous ne pouvez pas à la fois nous reprocher une attitude conservatrice et rejeter toutes nos propositions. Les professions étaient prêtes à adopter celle-ci : c’est un point de rupture entre nous. Nous regrettons que vous fermiez le débat sur le sujet.
Je regrette également que le ministre se soit si peu exprimé sur une question que je croyais importante à ses yeux. Nous sommes très déçus.
M. le rapporteur général. Mes chers collègues, l’adoption de l’amendement SPE1909 a permis de passer d’un nombre illimité de notaires salariés, prévu dans la rédaction initiale, à un salariat contingenté : ce n’est pas une mince avancée !
Je le répète : lorsqu’un notaire salarié compétent formulera l’envie de s’installer, l’étude qui l’emploie souhaitera l’associer plutôt que de le laisser partir.
Le critère du chiffre d’affaires n’est pas bon : écartons-le.
Si, d’ici à la séance publique, vous trouvez un moyen d’améliorer encore le texte sur ce point, je n’y suis pas opposé. Prenez garde, toutefois, à ne pas aboutir, vous aussi, à l’effet contraire à celui que vous recherchez !
Je laisse le débat ouvert sur ce point.
M. Philippe Vigier. Monsieur le rapporteur général, je prendrai pour exemple le secteur de la biologie médicale, dans lequel est entré l’ultraminoritariat. Pour être cogérant, il suffit d’avoir 1 % des parts. Depuis dix ans, on a assisté à l’explosion du nombre des associés ultraminoritaires. La profession a accompagné au départ cette évolution avant de souhaiter le retour à des participations plus importantes. Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé, vous le confirmera.
Nous vous mettons en garde : l’article 18, tel qu’il est désormais rédigé, aura le même effet.
Nous vous demandons simplement de prendre en considération, d’ici à la séance publique, les nouveaux critères que nous vous proposons.
Mme Véronique Louwagie. Les instances des professionnels concernés ont-elles été contactées sur la nouvelle rédaction de l’article 18 ? Quels ont été leurs réactions ?
M. le rapporteur général. Monsieur Vigier, s’il nous est possible d’améliorer encore la rédaction de l’article 18 d’ici à la séance publique, sans que cela entraîne la création d’une usine à gaz, sachez que je n’y suis pas opposé.
Madame Louwagie, nous avons abordé la question avec les professionnels : ils étaient plus ouverts aux propositions du ministre qu’aux nôtres. Vous auriez donc été encore plus effrayée !
M. le ministre. Je suis sensible à votre volonté commune de trouver un point d’équilibre sans créer un plafond de verre.
S’il est possible, sans prendre le risque de créer une usine à gaz, d’améliorer le texte en prenant en considération des critères alternatifs ou cumulatifs selon les situations, dans une approche qui tienne compte de la réalité économique des offices, cela permettra sans aucun doute de résoudre globalement le problème.
Peut-être pourriez-vous travailler ensemble sur le sujet d’ici à la séance publique.
M. le président François Brottes. Monsieur le rapporteur général, rassurez-moi : ce contingentement ne conduira pas les notaires à renvoyer des collaborateurs surnuméraires…
M. le rapporteur général. Non, monsieur le président, puisque la nouvelle rédaction de l’article 18 va au-delà du nombre, actuellement autorisé, de notaires salariés par office.
M. Michel Zumkeller. Je retire l’amendement.
L’amendement SPE907 est retiré.
Article 19 : Facilitation de l’accès du public aux données du registre national du commerce et des sociétés
La Commission spéciale examine les amendements identiques SPE179 de M. Philippe Houillon et SPE368 de M. Patrick Hetzel tendant à supprimer l’article 19.
M. Philippe Houillon. L’article 19 prévoit d’habiliter le Gouvernement à prendre par ordonnance des mesures relevant de la loi.
Monsieur le ministre, pour la troisième fois, je vous demande de nous communiquer le texte des ordonnances. Jusqu’à présent, il ne nous a été transmis pour aucun article.
M. le ministre. Le texte de l’ordonnance visé par l’article 19 étant déjà rédigé, le Gouvernement a décidé de l’intégrer au projet de loi – tel est l’objet de son amendement SPE1803.
M. Philippe Houillon. J’en prends bonne note.
Par ailleurs, cet article propose d’habiliter le Gouvernement à modifier les conditions dans lesquelles l’Institut national de la propriété intellectuelle (INPI) centralise le registre national du commerce et des sociétés (RNCS), de façon que chacun puisse y accéder : ce serait la fin du système Infogreffe, alimenté par les bases locales, au profit d’un système public.
Or l’obligation pour les greffiers de transférer à une base de données nationale, qui serait ainsi créée, les données actuellement détenues dans leurs bases, ne sera pas sans poser un problème de propriété intellectuelle et donc d’indemnisation. Les greffes jouissent en effet de la propriété intellectuelle de ces bases de données.
M. Patrick Hetzel. Les parlementaires ne sont jamais favorables ex abrupto au recours aux ordonnances. J’observe par ailleurs avec amusement que la gauche se rallie désormais à un tel recours, alors qu’elle a longtemps voué les ordonnances aux gémonies.
Le Gouvernement nous a à plusieurs reprises déclaré qu’il nous communiquerait les textes des ordonnances : or nous les attendons toujours ! Par respect pour le travail parlementaire et pour lever toutes réserves de forme comme de fond, il serait utile que le Gouvernement nous les communique enfin.
M. le ministre. Je vous confirme que l’amendement du Gouvernement SPE1803 répond à votre préoccupation puisqu’il vise à remplacer l’habilitation donnée au Gouvernement par des dispositions inscrites directement dans le projet de loi, en vue de favoriser la diffusion et la réutilisation des informations légales d’entreprises contenues dans le RNCS.
Alors que ces informations sont déjà, aujourd’hui, des données publiques, les greffiers des tribunaux de commerce, qui sont une première fois rémunérés pour les collecter, perçoivent une seconde rémunération pour les diffuser.
La réforme ne pose donc aucun problème de propriété intellectuelle ni, a fortiori, d’indemnisation – l’analyse juridique de la question a été conduite. Les greffiers continueront d’être rémunérés pour alimenter l’INPI et de disposer de ces données pour les commercialiser après les avoir retraitées. Il convient de simplifier la diffusion de ces données brutes, d’ores et déjà centralisées par l’INPI et qui sont publiques, conformément à notre volonté commune, affirmée au commencement de nos débats, de favoriser l’accès de tous aux données publiques.
Tel est l’esprit dans lequel nous conduisons cette réforme.
J’émets donc un avis défavorable aux amendements de suppression de l’article 19 et considère, monsieur le président, avoir défendu l’amendement gouvernemental SPE1803.
Mme Cécile Untermaier, rapporteure thématique. Avis défavorable aux amendements de suppression.
Mme Audrey Linkenheld. Des chefs d’entreprise m’ont alerté sur les problèmes de propriété intellectuelle que leur posaient les informations disponibles sur Infogreffe. C’est pourquoi certains choisissent de verser des pénalités plutôt que de faire des déclarations complètes, de crainte que leurs concurrents ne disposent d’informations, y compris personnelles, qu’ils ne souhaitent pas rendre publiques.
Quelles sont les données concernées par le transfert visé à l’article 19 ?
M. le ministre. La réforme consiste non pas à rendre publiques de nouvelles données mais à modifier les modalités de leur transfert à l’INPI et à confier à cet organisme une nouvelle mission de diffusion gratuite de ces données. La réforme ne règle donc en rien le problème que vous évoquez.
Il est vrai que certaines entreprises, confrontées notamment à un marché réduit – un ou deux concurrents –, ne souhaitent pas rendre publiques les informations qu’elles jugent sensibles. C’est un problème d’intelligence économique qui concerne le secret des affaires – M. Jean-Frédéric Poisson a déposé un amendement sur le sujet – et sur lequel nous travaillons par ailleurs.
M. le président François Brottes. Il ne serait pas incongru que le rapporteur général de la Commission spéciale soit porteur du travail réalisé par Jean-Jacques Urvoas sur le secret des affaires.
Mme Bernadette Laclais. J’ai déposé un amendement sur la question de l’intelligence économique : vos propos me rassurent, monsieur le ministre.
Il faut savoir en effet que des entreprises font le choix de s’acquitter d’une amende plutôt que de livrer les informations légales auprès des tribunaux de commerce, ce qui crée des inégalités entre les territoires, les parquets ne réagissant pas tous de la même façon.
La Commission spéciale rejette les amendements SPE179 et SPE368.
Puis, suivant l’avis favorable de la rapporteure thématique, elle adopte l’amendement SPE1803 du Gouvernement.
L’article 19 est ainsi rédigé.
En conséquence, l’amendement SPE849 de M. Jean-Frédéric Poisson tombe.
La réunion s’achève à treize heures.
Membres présents ou excusés
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi pour la croissance et l'activité
Réunion du jeudi 15 janvier 2015 à 9 h 45
Présents. - M. Julien Aubert, Mme Karine Berger, M. Yves Blein, Mme Michèle Bonneton, Mme Brigitte Bourguignon, M. Jean-Louis Bricout, M. Jean-Jacques Bridey, M. François Brottes, Mme Colette Capdevielle, M. Christophe Caresche, M. Olivier Carré, M. Christophe Castaner, M. Jean-Yves Caullet, M. Gérard Cherpion, M. Marc Dolez, Mme Françoise Dumas, Mme Corinne Erhel, Mme Sophie Errante, M. Richard Ferrand, M. Jean-Patrick Gille, M. Joël Giraud, M. Philippe Gosselin, M. Laurent Grandguillaume, M. Jean Grellier, M. Patrick Hetzel, M. Philippe Houillon, M. Guénhaël Huet, M. Sébastien Huyghe, Mme Bernadette Laclais, Mme Laure de La Raudière, M. Jean-Yves Le Bouillonnec, M. Dominique Lefebvre, M. Arnaud Leroy, Mme Audrey Linkenheld, Mme Véronique Louwagie, M. Gilles Lurton, Mme Martine Pinville, Mme Elisabeth Pochon, M. Denys Robiliard, M. Jean-Louis Roumegas, M. Gilles Savary, M. Christophe Sirugue, M. Jean-Charles Taugourdeau, M. Alain Tourret, M. Stéphane Travert, Mme Cécile Untermaier, Mme Clotilde Valter, M. Francis Vercamer, M. Philippe Vigier, M. Philippe Vitel, M. Michel Zumkeller
Excusés. - M. Jean-Luc Laurent, Mme Sandrine Mazetier
Assistaient également à la réunion. - M. Denis Baupin, M. Hervé Mariton
——fpfp——