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Mercredi 2 décembre 2015

Séance de 9 heures 30

Compte rendu n° 21

Présidence de M. Jean-Paul Chanteguet, Président

– Débat sur la COP21 et l’après COP21 sous présidence française

Commission
du développement durable et de l’aménagement du territoire

La Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a organisé un débat sur la COP21 et l’après COP21 sous présidence française.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Mes chers collègues, alors que la conférence des Nations Unies a débuté, il m’apparaît important que notre commission se réunisse pour débattre de la COP21 et de l’après COP21.

Je vous propose de valoriser les travaux que nous avons menés depuis deux ans sur le thème de la lutte contre le changement climatique. Je vous demanderai en fin de séance d’approuver la publication d’un rapport dont je vais vous présenter la première partie, et qui contiendra également les comptes rendus des auditions et des tables rondes que nous avons organisées. Nous avons entendu de nombreuses personnalités – dont Gilles Bœuf, ancien président du Museum national d’histoire naturelle, Hervé Le Treut, climatologue, Jean-Marc Jancovici, Pascal Canfin, Jean Jouzel, Stéphane Le Foll, etc. Nous tenons aujourd’hui notre vingt-quatrième réunion, depuis le mois d’octobre 2012, sur le changement climatique, ses conséquences et les moyens utilisés tant pour l’atténuer que pour nous y adapter.

Notre intérêt pour le sujet s’explique par l’aspect multiple de cette problématique, qui embrasse l’ensemble des champs d’intervention de notre commission. Et, en ce jour, nous devions, me semble-t-il, nous rassembler, alors même que se déroulent au Bourget les négociations pour la signature de l’accord de Paris. Par ailleurs, je rappelle que notre Assemblée a voté la semaine dernière une proposition de résolution « pour accéder, au-delà de la COP 21, à une société bas carbone », et que se tiendra salle Victor Hugo, vendredi 4 décembre, et dans l’hémicycle, samedi 5 prochain, le sommet des législateurs de Globe qui réunira des parlementaires de quarante-trois pays ainsi que des assemblées panafricaine, européenne et andine.

Ce matin, l’ensemble des groupes politiques que vous représentez va pouvoir s’exprimer tant sur les enjeux de la COP21 que sur l’action que pourrait mener la France, au-delà de la réunion de Paris, lors de son année de présidence qui démarre le 30 novembre.

Pour ma part, je voudrais présenter les grandes lignes du rapport d’information que nous ferons figurer dans le document, qui rassemblera, comme je viens de vous le dire, les comptes rendus de nos différentes réunions de travail sur le sujet.

Je commencerai par un rappel de l’historique des COP.

En 1988, deux institutions des Nations Unies, l’Organisation météorologique mondiale (OMM) et le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE), créent le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC). Dix-huit mois après sa création, celui-ci publie son premier rapport d’évaluation, qui conduit l’Assemblée Générale des Nations unies à préparer une convention sur le climat. Le 14 juin 1992, le sommet de Rio marque la structuration du régime climatique sous la houlette onusienne. Le 21 mars 1994, la convention-cadre des Nations Unies sur le changement climatique entre en vigueur après la signature de cinquante pays. La première Conférence annuelle des parties (COP) se tient en 1995 à Berlin, et la vingt et unième a donc lieu, en ce moment, à Paris.

Au fil des réunions, une nouvelle géopolitique du climat se met en œuvre, qui se caractérise par la lente montée en puissance du thème de l’adaptation par rapport à celui de l’atténuation. En parallèle, se met en place le dispositif de réduction des émissions liées à la déforestation et à la dégradation des forêts dans les pays en développement (REDD), et de nouveaux pays deviennent incontournables, comme la Chine ou le Brésil. À la COP de Copenhague, en 2009, le problème climatique apparaît pour la première fois moins comme un problème environnemental que comme un problème de « décarbonisation » du capitalisme, mettant en jeu des intérêts économiques concurrentiels énormes et des enjeux énergétiques vitaux. Mais la gouvernance onusienne reste marquée par une gestion apolitique du problème, centrée sur la question de l’approvisionnement continu et bon marché en combustibles fossiles et par une gestion isolée, alors que le climat est inséparable de l’énergie, des modes de développement et de la mondialisation économique et financière. Enfin, elle est handicapée par l’illusion de pouvoir mener l’inévitable transformation industrielle et sociale de manière centralisée. Il devient donc urgent de désenclaver, de repolitiser et de reterritorialiser les négociations climatiques.

Il ressort ensuite de ce rapport d’information l’idée que le passage à un monde décarboné n’est plus négociable.

L’extraordinaire accélération des émissions de gaz à effet de serre provoque, via l’accumulation du gaz carbonique dans l’atmosphère, l’augmentation des températures, l’acidification des océans, la montée des eaux, les inondations, la multiplication des sécheresses et des incendies, la fonte des glaciers, la désertification et toutes sortes d’événements météorologiques extrêmes. Des migrants climatiques commencent à quitter par millions certaines régions devenues submersibles ou incultivables. Selon les experts du GIEC, seules des mesures prises à grande échelle pourraient contenir le réchauffement aux deux degrés au-delà desquels les êtres humains n’auront plus de prise sur un monde largement marqué par l’instabilité et la violence, affectant en premier lieu les régions les plus déshéritées et, au sein de celles-ci, les femmes. La COP21 constitue donc un rendez-vous essentiel pour décider de la survie, non pas de la planète, mais de l’espèce humaine qui la peuple.

À l’origine de ce désastre annoncé, se situe notre modèle de développement, marqué par un recours massif aux énergies fossiles depuis la révolution industrielle mais surtout depuis le milieu du XXe siècle et particulièrement dans les pays développés, dans la mesure où aujourd’hui 80 % de l’énergie est consommée par 20 % de la population. Demain, il deviendra vital, selon les mots de François Hollande, de « renoncer à utiliser 80 % des ressources d’énergies fossiles facilement accessibles, dont nous disposons encore ». En somme, la survie de l’espèce humaine impose de passer à une société bas-carbone. Cette obligation est d’autant moins contestable que les changements dans la composition chimique de l’atmosphère et l’effet de serre anthropique sont irréversibles à l’échelle humaine. En outre, au fil du changement climatique, apparaissent de nouveaux éléments, comme la fonte du permafrost, qui pourrait devenir une cause majeure de réchauffement, puisqu’il contient deux fois plus de carbone que toute l’atmosphère.

En parallèle, la biodiversité subit les effets du changement climatique, qui concourt à la disparition d’espèces animales et végétales et à la destruction d’écosystèmes. Au final, l’empreinte écologique de l’humanité sur la planète croît à une vitesse exponentielle, alors que la population mondiale, de plus de 7 milliards aujourd’hui, devrait atteindre 9,6 milliards en 2050. En 2015, l’Humanité avait, dès le 13 août, consommé toutes les ressources naturelles renouvelables que la planète peut produire en un an… Nous sommes aujourd’hui entrés dans l’ère de l’anthropocène, caractérisée par l’influence prédominante de l’homme sur la planète et par son aptitude à la transformer.

Ce constat d’échec oblige à raisonner autrement. Il ne s’agit pas d’adapter le modèle, mais d’en changer. Demain il ne suffira pas d’inventer de nouvelles régulations, de définir de nouveaux garde-fous ou d’espérer que le progrès technique nous sauve. Il nous faudra trouver d’autres façons de produire, de consommer, de travailler, de financer, d’habiter, de circuler et d’échanger, partir en reconnaissance des tentatives réussies de résilience, combattre l’inertie grâce à des minorités agissantes, entrer en résistance contre tous ceux qui s’obstinent à tirer pour eux les derniers profits du système actuel au détriment du plus grand nombre et, au final, inventer de nouvelles façons d’être au monde. Cette transition sera celle des citoyens, des territoires et des entreprises, dont les initiatives les plus robustes et les plus résilientes devront être repérées et diffusées. Mais elles devront être encouragées par une gouvernance internationale, garante de la réorientation des grands flux financiers.

Je terminerai ma présentation par une courte description des chemins de la transition à suivre vers un modèle plus soutenable.

La transformation du système énergétique est évidemment en première ligne. L’Agence française de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME) affirme que la France pourrait obtenir 100 % de son électricité à partir d’énergies exclusivement renouvelables dès 2050, et que cela ne coûterait pas plus cher que le maintien du nucléaire à 50 % de la production électrique en 2025. Mais il faudra aussi encourager partout l’efficacité et la sobriété énergétique, et mettre en place un modèle décentralisé de l’énergie qui rapproche la production de sa consommation, créant ainsi une appropriation du service et une prise de conscience de sa valeur.

Il faut ensuite donner un prix au carbone, alors qu’aujourd’hui seulement quelque 17 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre sont couvertes par des systèmes de quotas, des taxes ou des normes d’émission. Mais les prix du carbone restent trop bas pour être efficaces. L’idée d’un « corridor de prix » encadrant des niveaux plafond et plancher, appliqué par une avant-garde de pays pourrait enclencher le processus avant que le mécanisme ne puisse s’appliquer à l’ensemble de la planète. À l’intérieur de chaque pays, l’impact de la taxe carbone sur les ménages les plus pauvres devrait être,par ailleurs, compensé via un crédit d’impôt.

Il faut en parallèle arrêter les subventions aux énergies fossiles : 200 milliards de dollars sont versés chaque année par quarante États, selon l’OCDE, 550 milliards de dollars pour le monde entier en comptabilisant les subventions transnationales, selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE) et 5 300 milliards de dollars, selon le Fonds monétaire international (FMI) qui ajoute les subventions camouflées, sous forme de non prise en compte des coûts liés à la pollution.

Il faut ensuite pousser les acteurs publics et privés à désinvestir dans les énergies fossiles. Le mouvement enclenché porte aujourd’hui sur quelque 2 600 milliards de dollars. Il témoigne de la prise de conscience de la part des gestionnaires d’actifs financiers du risque carbone, que les investisseurs sont en droit de voir pris en compte.

Il faut également remettre en cause fondamentalement le système financier tel qu’il s’est développé depuis une trentaine d’années, en interdisant les produits financiers indexés et/ou dérivés des énergies fossiles, en mettant en place la taxe sur les transactions financières au sein de la coopération renforcée européenne portant sur une large assiette, et en dotant la lutte contre le changement climatique de financements pérennes. C’est là qu’intervient la promesse du versement aux pays en développement de 100 milliards de dollars par an, dont une part majoritaire de dons, pour les aider à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre et à s’adapter aux conséquences du réchauffement climatique. Les fonds publics devront évidemment mobiliser de nouvelles ressources et ne pas provenir du transfert de budgets déjà existants et consacrés à d’autres enjeux de l’aide au développement, que l’on diminuerait d’autant.

Enfin, si l’énergie constitue à la fois le cœur de la crise climatique, le moteur de notre développement et donc la politique à réformer en première urgence, les villes, les usines, les campagnes sont autant d’espaces concrets où doivent s’inventer de nouvelles manières d’être au monde, dictées par une politique de sobriété en carbone. Un urbanisme résilient, de nouvelles formes d’économie circulaire, fonctionnelle, sociale et solidaire, une agriculture résiliente au changement climatique et favorable à la biodiversité, la restauration et la protection des puits de carbone que sont les terres, les océans et les forêts, constituent autant de chantiers à développer. Parallèlement, les montagnes et les outre-mer doivent être valorisés comme des réserves de patrimoine et des espaces prioritaires d’innovation en matière de lutte contre le changement climatique.

Enfin, ce combat passe évidemment par la prise en compte des actions des acteurs non étatiques que sont les villes, les territoires, les entreprises et les citoyens, que l’accord de Paris devrait rassembler sous le chapitre de l’Agenda des solutions.

Je conclurai mon propos en rappelant que l’accord de Paris, quel que soit son niveau de réussite, ne sera pas un point d’arrivée mais un point de départ pour la réalisation d’une nouvelle économie bas-carbone. Il convient donc que la France, qui présidera, durant une année, la COP après la réunion de Paris, s’engage à porter un nouveau modèle de développement à l’intérieur de ses propres frontières et au-delà, au sein de l’Union européenne bien sûr mais également avec le plus grand nombre de pays, afin de constituer une sorte d’avant-garde sur la voie de la transition.

Je vais maintenant passer la parole à tous ceux d’entre vous qui souhaiteront s’exprimer. Je précise qu’en raison de la solennité du moment, aucune limitation de parole ne vous sera imposée.

M. Christophe Bouillon. Monsieur le président, il peut sembler étonnant, voire paradoxal, de situer cette démarche au-delà de la COP21 qui vient à peine de s’ouvrir. C’est pourtant cohérent : comme vous venez de le rappeler, la COP21 ne constitue pas un aboutissement, mais bien un point de départ, quasiment « l’année zéro » de la société bas carbone que vous appelez de vos vœux.

Le rapport que vous venez nous présenter est excellent pour plusieurs raisons.

Il est excellent parce qu’il porte l’empreinte de vos convictions, reconnues et appréciées, et met en valeur le travail que notre commission conduit depuis plusieurs mois. En outre, il est conforme à l’exposé des motifs de la résolution que nous avons adoptée la semaine dernière et qui a emporté la conviction de nombreux parlementaires.

Il est excellent parce qu’il constitue une véritable feuille de route pour la justice climatique. Il traite des nombreux enjeux de la COP21, conditions de la réussite d’un accord que nous souhaitons à la fois universel, ambitieux, vérifiable, contraignant, financé et différencié. Et il contient aussi des propositions fortes pour aller au-delà même de cet accord.

J’ai identifié quelques-uns de ces enjeux.

L’atténuation tout d’abord : le fait que 180 États, à l’origine de 95 % des émissions de gaz à effet de serre (GES), aient décidé d’une contribution nationale, montre qu’un pas important a d’ores et déjà été franchi ; la quinzaine d’États signataires du protocole de Kyoto n’en produisaient que 15 %. Mais les engagements pris dans ces contributions ne nous placent pas encore sur la trajectoire d’une limitation du réchauffement à deux degrés Celsius. Nous en sommes encore à trois.

C’est pourquoi la question de l’adaptation est aussi importante. Nous vous avons souvent entendu affirmer avec force que la COP21 ne doit pas être « l’atténuation de l’atténuation ». L’adaptation également s’impose, autrement dit la nécessité d’accompagner et de prendre des mesures fortes en faveur des pays déjà impactés par des dérèglements climatiques : phénomènes météorologiques extrêmes, élévation du niveau de la mer, perte de la biodiversité, déplacements de populations. Il faut donc traiter aussi bien la question de l’adaptation que celle de l’atténuation.

On se souvient de l’intervention émouvante prononcée la semaine dernière par un de nos collègues sur la situation des territoires et des États insulaires que l’on sait menacés de disparition. Ceux-ci ont besoin à la fois de compensations financières et d’un accompagnement technologique, pour ne pas être dépassés par les événements qu’ils vont subir.

Cela étant, le financement est essentiel à la réussite des négociations. Le Fonds vert pour le climat devrait drainer 100 milliards de dollars par an à partir de 2020 ; on n’est pas loin du but, mais il faudra encore progresser. La taxation des transactions financières offre des opportunités de financement qu’il ne faudrait pas négliger.

Le rapport traite également de responsabilité. Vous l’avez dit, le concept d’une responsabilité commune mais différenciée pourrait satisfaire tout le monde. Mais ce n’est pas le cas, dans la mesure où un certain nombre de pays, notamment les pays émergents, considèrent que la responsabilité incombe d’abord aux pays industrialisés. De fait, les experts du GIEC et de nombreux contributeurs situent bien la responsabilité du changement climatique dans le modèle même des pays industrialisés, qu’il ne faudrait pas reproduire dans les pays émergents. Il faut donc plutôt prendre en compte la capacité respective des États, qui elle-même dépend des contextes nationaux.

Autre enjeu essentiel : la question du contrôle et de la vérification de l’application des engagements. Ce qui implique bien évidemment de réfléchir à la nature même de l’organisme qui en sera chargé.

Quel est sera le rôle l’Agenda des solutions ? On voit bien que les contributions nationales ne suffiront pas. Comme aime à l’expliquer notre collègue Arnaud Leroy, les entreprises, les territoires, et la société civile dans son ensemble devraient apporter leur propre contribution. Cela me semble en effet indispensable.

Quelle forme prendra l’accord ? Votre proposition d’une clause de revoyure fait son chemin. Le fait de se retrouver au moins tous les cinq ans aurait un effet cliquet et permettrait, au fur et à mesure, d’élever le niveau d’engagement.

Reste surtout la question du prix du carbone. Monsieur le président, vous avez utilisé toutes les occasions possibles – et même le texte relatif à la transition énergétique pour la croissance verte – pour porter une telle idée. Cette idée est en effet essentielle si l’on a vraiment la volonté de se tourner vers une société bas-carbone.

Je terminerai par trois interrogations : qu’en est-il des transferts de technologie ? Pouvez-vous d’ores et déjà dessiner « l’avant-garde climatique » que vous appelez de vos vœux ? Enfin, ce beau plaidoyer pour le climat n’est-il pas tout, sauf le procès de l’énergie ?

M. Charles-Ange Ginesy. Monsieur le président, je me ferai le porte-parole des Républicains. Comme l’a dit mon collègue, ce rapport d’information porte votre empreinte. Vous avez organisé de très nombreuses auditions de personnalités qualifiées et d’experts, qui nous ont permis d’avancer. Et aujourd’hui, dans le contexte un peu particulier qui est celui de la COP21, vous nous présentez un rapport excellent.

La COP21 trouve son origine en 1988, avec la formation du GIEC et les rapports qui s’en sont suivis. Sur le plan médiatique, encore aujourd’hui, et peut-être davantage aujourd’hui qu’hier, on peut parler d’une crise de conscience. Celle-ci a permis de réveiller et de sensibiliser nos populations à la réalité du réchauffement climatique dans lequel la responsabilité de l’homme est engagée, et à la nécessité de prendre d’urgence certaines mesures.

La COP21 aurait pu être un moment historique, qu’il s’agisse des contributions nationales ou des objectifs de limitation de la hausse des températures. Mais aujourd’hui, nous voyons bien que les deux degrés de hausse maximale des températures qui nous sont annoncés ne seront pas respectés. En effet, si l’on additionne – sans préjuger de ce qui pourra advenir dans les jours qui viennent – toutes les contributions nationales, cette augmentation sera, au minimum, de trois degrés.

En outre, il s’agit d’engagements déclaratifs sans aucune valeur contraignante. Nous voyons bien que les chefs d’État se désengagent en la matière. En réalité, nous n’avons aucune idée sur la nature de l’outil juridique qui naîtra de la COP21.

Le texte issu du sommet de Bonn, qui servira de base aux négociations, n’est pas consensuel. Et comme le président Obama l’a clairement exprimé, on sait d’ores et déjà que les États-Unis n’accepteront pas un accord juridiquement contraignant. La rencontre du président Xi Jinping avec le président Hollande n’a rien produit de concret. Certes, le président chinois s’est engagé aux côtés de la France à poursuivre sur la voie d’un accord contraignant et périodiquement révisé. Mais cette promesse, en définitive, reste vide. Peut-on se réjouir de la forme d’un accord avant que le fond n’ait été négocié ?

Du reste, à supposer que l’on parvienne à un accord contraignant, on peut se demander de quels moyens nous disposerions pour l’apprécier et le faire respecter. L’institution d’une clause de revoyure tous les cinq ans ne résout pas le problème d’un éventuel non-respect des engagements nationaux. Un accord juridiquement contraignant n’aura aucun effet s’il n’est pas accompagné d’un mécanisme efficace de contrôle et de sanctions.

Enfin, le financement n’y est pas. Dans son dernier rapport, l’OCDE évalue à 61,8 milliards de dollars les financements collectés en 2014 pour le climat ; mais il s’agit plus d’une valeur de référence pour les pays donateurs que d’une évaluation objective des crédits existants. Le Fonds Vert ne compte pas pour l’instant, car les 9,4 milliards récoltés en 2014 ne représentent rien par rapport à ce que nous pouvons attendre d’un financement pérenne.

À l’évidence, les espoirs que nous fondons de cette COP21 ne sont pas à la hauteur des espérances dont vous faites part dans votre rapport d’information.

Je conclurai en saluant à nouveau la qualité des travaux que nous avons pu réaliser sous votre présidence. Et comme je suis de ceux qui considèrent que chaque jour doit apporter sa bonne nouvelle, je suggérerai que, régulièrement, tout au long de l’année, on prenne des mesures. Vous nous en avez donné l’exemple aujourd’hui en rebondissant à propos des péages d’autoroute : c’est la démonstration de l’importance du travail mené au quotidien. Nous saluons votre détermination. Soyez assurés de notre soutien.

Certes, les Français sont sceptiques sur l’issue de la COP21. Ils sont 85,3 % à ne pas croire qu’elle permettra de prendre un grand virage en matière d’environnement. Mais bien que le sommet de Kyoto n’ait pas été un grand rendez-vous, gageons que celui de Paris apportera sa pierre à l’édifice. Et peut-être contribuerons-nous, ne serait-ce que modestement, à faire progresser les choses.

M. Bertrand Pancher. Monsieur le président, j’ai lu et relu le rapport d’information que vous nous présentez, et que je trouve également de très bonne qualité.

Je crains toutefois que la COP21 ne se termine par une énorme « gueule de bois » de la communauté internationale… Les engagements sont forts, la mobilisation intense. Les déclarations sont belles et les engagements généreux – au moins pour le moment. Mais comme on le dit : « chat échaudé craint l’eau froide ». Depuis bien des années nous avons très souvent constaté, à l’issue de ces conférences internationales, qu’il y a loin de la coupe aux lèvres !

Comment jugerons-nous de la réussite ou de l’échec de la COP21 ? On le fera sur la base de trois ou quatre éléments.

Premier élément : l’accord sera-t-il juridiquement contraignant ou pas ? Si l’on s’en tient à une déclaration de bonnes intentions, avec des clauses de revoyure régulières, c’est mieux que rien. C’est le moyen de savoir d’où l’on part, et de se rendre compte si l’on se dirige vers une augmentation des températures de trois, de quatre, voire cinq degrés. Mais demain ou dans les années qui viennent, cet accord sera-t-il juridiquement contraignant ? Pour le moment, on n’en prend pas le chemin.

Je pense que l’on aurait eu intérêt à revisiter l’accord de Kyoto. Certes, il n’a pas été appliqué. Reste qu’il prévoyait des dispositifs juridiquement contraignants. Certes, des pays s’en sont aussitôt dégagés. Certes, on n’a pas appliqué les sanctions prévues sur le plan international. Malgré tout, nous devrions, selon moi, nous engager vers des formes d’accords juridiquement contraignants. Il en est bien question dans votre rapport d’information ; mais peut-être aurait-il fallu travailler davantage sur ce point ; rien ne dit qu’on aurait pu faire mieux tous ensemble.

Quoi qu’il en soit, il ne faudrait pas que l’on se sépare en se contentant des engagements qui auront été pris. En effet, que risque-t-il de se passer après ? Alors même que protocole de Kyoto prévoyait un dispositif contraignant, les États-Unis n’ont pas hésité à s’en retirer et le Canada à faire exploser ses gaz à effet de serre.

Deuxième élément, que vous examinez en détail dans votre rapport d’information : la mobilisation financière en faveur des pays en développement, qui devrait atteindre 100 milliards d’euros par an d’ici à 2020. Autrement dit rien… si ce n’est du recyclage de moyens existants. Tout le monde dit qu’il ne faut pas s’en inquiéter, on finira bien par payer. Mais personne n’est dupe…

Dans votre rapport, et je trouve que c’est très intéressant, vous insistez sur les moyens de lever ces fonds, et vous en appelez à la communauté internationale comme à la communauté nationale. Je pense notamment à la taxe sur les transactions financières. Regardons d’abord comment, dans nos formations respectives, nous avons défendu cette taxe ! On a fait de grandes déclarations, mais une fois revenus dans nos partis politiques, ce n’était plus la priorité des priorités…

Cela dit, nous verrons, en fin de semaine, ce que cela donnera : quels engagements, et sur la base de quels moyens nouveaux ? Reste que jamais on n’a vu autant d’argent circuler, et je pense que nous devons tous nous mobiliser sur la question des transactions financières.

Troisième élément : le système de régulation. Nous devons reconnaître modestement que c’est d’abord la société civile et les entreprises réunies à l’UNESCO il y a quelques mois qui se sont mobilisées en faveur de la taxation du carbone.

Vous insistez beaucoup sur les mécanismes de taxation du carbone. Encore faudra-t-il qu’à un moment ou un autre, la communauté internationale s’interroge sur leur mise en place. Ce n’est pas le tout de donner un prix au carbone : comment le faire prendre en compte dans les échanges ? Comment faire en sorte qu’un bien carboné revienne beaucoup plus cher à l’achat qu’un bien décarboné ? Comment faire en sorte que l’importation d’un bien carboné soit davantage taxée que celle d’un bien décarboné ? Et en fin de compte, comment mobiliser l’OMC et l’amener à comprendre que le culte du libre-échange, exempté de toute taxe, a maintenant vécu ?

Monsieur le président, votre rapport s’apparente plutôt à un « agenda des solutions », incontestablement utile (Sourires) : oui, il faut davantage taxer les transactions financières si l’on veut contribuer à l’aide au développement ; oui, il faut supprimer partout, à commencer dans notre pays, tous les mécanismes financiers soutenant la production de carbone. Il y a là un ensemble de réflexions tout à fait intéressantes, qui pourraient constituer une feuille de route pour notre pays et toutes nos formations politiques.

J’y vois enfin un appel à changer notre mode de développement, basé sur une consommation exacerbée… La France, vous l’avez rappelé, présidera la COP pendant un an. Ce sera l’occasion de commencer à travailler sur notre modèle de consommation. Si le Président de la République veut y associer l’ensemble des formations politiques, et la nôtre en particulier, nous serons au rendez-vous.

M. Jean-Louis Roumégas. Monsieur le président, n’ayant pas eu l’occasion de suivre vos travaux préparatoires, je découvre avec plaisir votre rapport. Mais plus qu’un rapport, j’y vois une profession de foi en faveur du climat.

J’approuve ce qui a été dit jusqu’à présent, notamment sur la nécessité de disposer d’instruments financiers pour donner corps à la transition que vous appelez de vos vœux. Je tiens cependant à insister sur un aspect à mes yeux insuffisamment abordé : la déforestation, ses causes et les dégâts qu’elle entraîne.

On travaille beaucoup sur les émissions des GES, mais on parle peu de ce phénomène qui va en s’aggravant. On estime aujourd’hui qu’une surface équivalente à celle de la Belgique disparaît tous les ans. Les causes en sont bien connues et sont directement liées au modèle de développement actuel, très compétitif et consumériste.

La forêt disparaît d’abord parce que l’on veut produire de l’huile de palme et développer les agrocarburants. Je tiens d’ailleurs à dénoncer cette fausse solution : pour produire des agrocarburants, et remplacer le pétrole, on détruit la forêt ou on utilise des terres agricoles destinées à l’alimentation. C’est donc une très mauvaise solution – en tout cas quand on ne prend pas sur les déchets agricoles pour les produire.

La forêt est ensuite menacée par les projets de grands barrages, autre fausse bonne idée : pour produire de l’énergie hydraulique, on détruit des forêts. Je le dis d’autant plus vivement qu’en Amazonie, ce sont des entreprises françaises qui construisent ces barrages. Là encore, ce qui peut sembler bon pour le climat a des conséquences dramatiques.

Enfin, il ne faut pas oublier les importations de bois illégaux, dont nous sommes les premiers consommateurs en Europe, mais qui viennent de ces mêmes régions. Nous avons essayé de renforcer la lutte contre ce trafic, mais je crois qu’il faut vraiment aller plus loin.

Au-delà du problème de la déforestation, il y a celui de la survie des peuples de la forêt, qui vivent en harmonie avec elle. Ce sont eux, qui maintiennent un équilibre avec la forêt, qui sont les premières victimes de cette déforestation. On assiste à de véritables génocides et de véritables écocides, en particulier en Amazonie.

J’aimerais que l’on insiste sur ces aspects et que les États s’engagent, non seulement sur la limitation des émissions de gaz à effet de serre, mais sur la préservation, voire la régénération des massifs forestiers, absolument indispensables pour limiter le taux de carbone – ce sont des « puits » de carbone – et lutter contre les méfaits du réchauffement climatique.

M. Jacques Krabal. Monsieur le président, je voudrais vous remercier d’avoir présenté ce rapport. La commission du développement durable est tout à fait dans son rôle lorsqu’elle contribue à la réflexion qui est menée pour lutter contre le changement climatique, en particulier dans le cadre de la COP21.

Avant d’aller plus loin, n’hésitons pas à dire que cette COP est déjà un premier succès, ne serait-ce que par le nombre d’États représentés. Mais au-delà, tout le monde s’accorde pour souligner l’ampleur de la mobilisation sociale et privée, ce qui n’a pas forcément été le cas dans toutes les COP qui se sont tenues jusqu’à ce jour.

Par le passé, les négociations ont toujours été difficiles, et nous n’aurons jamais un accord parfait, comme l’a prévu Ban Ki-moon. Malgré tout, nous allons vers un compromis qui, de mon point de vue, devrait permettre de mieux lutter contre le dérèglement climatique. C’est en effet un impératif économique et de sécurité qui s’impose à nous tous.

D’une certaine façon, les dégâts du dérèglement climatique, à l’instar des récents attentats, ont entraîné une prise de conscience collective. Comme la lutte contre le terrorisme, la lutte contre le changement climatique est devenue un objectif prioritaire.

Ce rapport comprend une cinquantaine de pages, divisées en chapitres, et aborde de nombreux points, comme les objectifs de long terme, la réduction des émissions de GES, l’adaptation climatique, et bien sûr la problématique du financement, déjà largement évoquée.

Pour ma part, j’insisterai sur la question de la gouvernance. En effet, la COP n’est pas une finalité, comme le président Jean-Paul Chanteguet l’a rappelé. Il faudrait donc mettre en place un suivi des engagements pris à cette occasion. Je pense que notre commission pourrait, au niveau national, devenir le lieu où pourrait être fait le point de l’état d’avancement de la société bas carbone que nous souhaitons. Nous devrions y réfléchir.

On vient d’évoquer les effets de la déforestation ; se pose également la question du changement aquatique, dont on ne parle pas assez non plus, et qui est une des conséquences du changement climatique. Un de nos collègues du Pacifique l’a évoquée hier en séance.

Bien sûr, il est difficile de savoir ce qui risque de se passer. Mais il serait bon de s’intéresser davantage aux systèmes d’alerte précoce, qui ont connu des avancées phénoménales. Car les pays les plus menacés par les catastrophes climatiques sont aussi les plus pauvres et les plus démunis.

Les chiffres sont là : entre 1970 et 2012, 2 millions de personnes sont mortes, et à l’échelle de la planète, les dégâts sont estimés à 2 400 milliards de dollars. Comme on l’a rappelé hier à l’occasion de la présentation du système d’alerte précoce à laquelle participaient, sous l’égide d’Annick Girardin, secrétaire d’État au Développement et à la Francophonie, de nombreux chefs d’État, il faut faire preuve de solidarité pour aider les pays menacés. Parmi, eux, une île dont le point le plus haut culmine à deux mètres au-dessus de la mer… La France est parmi les pays plus qualifiés pour apporter une telle aide. Si l’on pouvait déjà limiter le nombre de morts causés par le dérèglement climatique, ce serait une avancée essentielle sur le plan humain.

D’un point de vue anecdotique, il y a, dans le rapport, tout un passage sur l’économie circulaire et sur la nécessité de changer de paradigmes, dans le monde en général et en France en particulier. Je pense que, sous le contrôle de François-Michel Lambert, président de l’institut de l’économie circulaire, nous avons encore beaucoup de progrès à faire au niveau local, notamment en matière de réglementation : avec lui, nous avons rencontré hier les représentants du recyclage des pièces automobiles.

Aujourd’hui, on doit partout faire bouger les lignes. Je sais que nous en sommes capables. Des initiatives concrètes ont déjà été lancées en marge de la COP21 : électrification de l’Afrique, soutien aux technologies vertes et aux systèmes d’alerte par le biais de CREWS, etc.

Le rôle que jouera la France pendant la COP21, mais aussi au-delà, est majeur. Comme l’a dit François Hollande, nous sommes face à un mur que nous avons nous-mêmes bâti et qui est la résultante de la façon dont nous avons vécu. Mais ce mur n’est pas infranchissable. Je l’ai dit en préambule, la lutte contre le dérèglement climatique est aussi importante que la lutte contre le terrorisme. Et le nombre de migrants doit continuellement nous interpeller.

Je terminerai donc en parodiant Jean de la Fontaine : « En toutes choses, dans le cas du dérèglement climatique comme ailleurs, il faut considérer la fin ». Et en l’occurrence, il s’agit de l’homme sur cette planète, en un mot de l’humanité.

M. Patrice Carvalho. Monsieur le président, je vous félicite pour ce rapport. J’apprécie vos conclusions empreintes d’objectivité, tout en restant très mesurées.

La COP21 s’est ouverte lundi au Bourget en présence de 150 chefs d’État et de gouvernement. Chacun a souhaité que ce sommet débouche positivement – ce qui est mieux que s’ils avaient dit le contraire. Nous sentons bien néanmoins les obstacles à franchir ; ceux dont le développement dépend le plus des énergies carbonées l’ont déjà fait savoir.

Le cinquième rapport du Groupe d’experts intergouvernemental (GIEC), rendu public en novembre 2014, a élaboré quatre scénarios. Le plus probable, en l’état actuel de l’évolution du réchauffement climatique, est le scénario le plus pessimiste. Il table sur une poursuite des émissions de gaz à effet de serre et une hausse des températures de cinq degrés.

Par conséquent, seul un scénario de réduction des GES est en mesure de maintenir la température sous le seuil de deux degrés. C’est un défi de taille car cela implique de réduire nos GES de 10 % par décennie.

Les engagements annoncés par les États parties prenantes de la COP 21 nous situent davantage à trois degrés qu’à deux degrés. Voilà donc un premier obstacle.

Le second obstacle touche au contenu des négociations et ce à quoi nous voulons aboutir.

L’efficacité commanderait que des objectifs contraignants soient fixés ; mais beaucoup n’en veulent pas. Ainsi John Kerry, le secrétaire d’État américain, a déclaré au Financial Time qu’il n’y aurait pas d’objectifs de réduction juridiquement contraignants, comme cela avait été le cas dans le protocole de Kyoto. Il faut reconnaître aux États-Unis une belle constance : ils avaient signé le protocole de Kyoto, mais ne l’avaient jamais ratifié… Ce qu’ils appellent aujourd’hui de leurs vœux, pour le sommet de Paris, c’est une simple déclaration, ce qui ne servirait à rien et ruinerait toute possibilité de limiter le réchauffement climatique sous la barre de deux degrés centigrades.

En réalité, ce sur quoi nous butons réside dans la contradiction existant entre les impérieuses exigences climatiques, qui nous commandent de réduire nos GES, et un mode de production et de développement fondé sur le productivisme, une consommation énergivore et le dumping social, autrement dit la main-d’œuvre à moindre coût. Dans ces conditions, l’envahissement des lois du marché dans toutes les activités humaines rend périlleuse la signature des accords internationaux qui seraient nécessaires.

Pour prendre des engagements communs, il nous faudrait un monde de coopération. Or nous sommes dans un monde de compétition et de concurrence : pour gagner des parts de marché, il faut les arracher à d’autres ; pour vivre un peu mieux, il faut que d’autres vivent moins bien…

Tant que nous ne reconsidérerons pas nos modes de développement et de production, qui n’ont pas seulement consacré le dumping social mais aussi le dumping environnemental, tant que nous ne placerons pas le climat au centre des négociations sur le commerce mondial, nous peinerons à avancer et à trouver des solutions pérennes.

Le troisième obstacle concerne les pays en développement.

Les négociations butent sur l’engagement pris en 2009 à Copenhague par les pays du Nord, de fournir aux pays du Sud 100 milliards de dollars à partir de 2020 afin de les aider à lutter contre le réchauffement climatique et à se développer de manière plus propre. Si cette promesse n’est pas tenue, il y a fort à craindre que les pays du Sud ne signent pas.

Aujourd’hui, les contributions annoncées s’élèvent à environ 10 milliards d’euros. Les pays du Sud sont confrontés non seulement à la question de leur développement sur un mode propre, mais aussi aux problèmes rencontrés en raison des chocs climatiques, chiffrés, selon la Banque mondiale, à 200 milliards de dollars.

L’enjeu est énorme, car si nous sommes aujourd’hui confrontés à l’exode de milliers de personnes fuyant la guerre et la barbarie, nous pourrions être confrontés demain à un flux de réfugiés climatiques. Si on évalue à 22 millions le nombre de personnes ayant dû abandonner leur domicile en 2013 à cause de désastres météorologiques ou hydrologiques, soit trois fois plus que le nombre de personnes déplacées à cause d’un conflit, il pourrait y avoir 250 millions de réfugiés climatiques dans le monde en 2050, selon l’ONU. C’est dire l’urgence.

Voilà les trois obstacles à franchir, ou au moins à réduire, si nous voulons que la COP21 contribue à la préservation de la planète.

M. Jacques Kossowski. Merci beaucoup, monsieur le président, et félicitations pour votre rapport d’information.

Avant le début des travaux de la COP21, quelque 170 pays ont listé les engagements qu’ils comptaient prendre en matière de lutte contre les émissions de GES. Et lors de l’ouverture de la Conférence au Bourget, la plupart des chefs d’État ont tenu à les réaffirmer publiquement. Mais même si un accord contraignant devait être signé entre l’ensemble des participants, comment serait-il possible de vérifier in situ que les obligations souscrites par chacun sont bien respectées ? Certes, j’ai entendu Mme Ségolène Royal déclarer que les modes de contrôle feraient partie de l’accord, s’il y en avait un. Mais dans les faits, quels sont les organismes internationaux susceptibles de contrôler les États sans risquer de s’ingérer dans leurs affaires intérieures ? Peut-on faire reposer la surveillance sur les seuls satellites ?

J’ai deux propositions, peut-être un peu utopiques, à vous soumettre, monsieur le président.

Pourquoi ne pas demander que les maires des grandes villes se réunissent une fois par an ? Après tout, ils ont un réel pouvoir en matière d’urbanisme. À cette occasion, ils pourraient refuser telle ou telle construction qui serait néfaste pour l’environnement, par exemple la construction d’une usine risquant d’accroître exagérément les émissions de gaz à effet de serre sur un territoire. Au moins les uns et les autres pourraient-ils communiquer. Aujourd’hui, on attend tout des Chefs d’État. Ces derniers sont élus pour cinq, huit ou dix ans selon les pays. Mais ont-ils vraiment un pouvoir ? Le pouvoir n’est-il pas plutôt dans les mains des maires qui représentent la population ?

Dans le même ordre d’idées, nous aussi, nous avons un pouvoir au sein de cette commission. Ne pourrions-nous pas, à l’échelon national et quels que soient les gouvernements en place, essayer de peser et voir ce qui se fait ? Essayons pour une fois, de partir d’en bas pour essayer de nous faire entendre.

Cela peut paraître utopique. Mais pourquoi ne pas essayer ?

M. Gilles Savary. Monsieur le président, permettez-moi d’abord de vous féliciter pour avoir pris l’initiative de ce rapport, qui honore notre commission et notre Assemblée. C’est une contribution forte de la représentation nationale à la COP21. Autrement, nous aurions été muets.

Ce rapport, en raison de sa qualité, restera à n’en pas douter une référence pour l’avenir. Je suis persuadé qu’on en reparlera dans les années qui viennent, parce que c’est le sens de l’Histoire.

J’ai entendu ce que l’on dit. J’ai lu la presse. Je pense qu’il faut garder la mesure de ce qui est en jeu. Mais ce qui est en jeu bouleverse les mentalités, interpelle les souverainetés nationales, remet en cause les modes de vie. C’est bien pourquoi il ne faut pas trop demander au plan politique, comme l’a fait remarquer mon collègue Jacques Kossowski. Mais il ne faut pas relâcher le volontarisme.

J’observe que par rapport à Kyoto et Copenhague, les pays ont été plus nombreux à se mobiliser et à fournir des contributions. Et surtout, en dix ou quinze ans, le débat fondamental sur le réchauffement climatique et sa composante humaine est maintenant derrière nous. Il y a un consensus pour réagir de façon concrète, parce que les faits s’imposent : Ainsi, par exemple, dans ma région, on ne peut que constater que le vin a gagné un degré en vingt ans et que cette année, les vendanges ont débuté fin août. Et ce ne sont pas là des estimations d’experts, mais des réalités bien concrètes.

Aujourd’hui, de nombreux pays contribuent parce qu’ils sont assaillis de sécheresses, d’inondations, d’orages, de submersions. Comme l’a dit le Président de la République, si l’on ne s’engage pas, ce sera la guerre, avec des migrations fulgurantes. Nous avons déjà bien du mal à faire face aux migrations liées à une guerre classique, une guerre par les armes. La situation est donc grave.

Dans un tel contexte, je voudrais aborder deux questions

D’abord, je m’interroge sur le Fonds vert pour le climat. Personnellement, je doute toujours des politiques de subventionnement. Elles sont morales, elles sont compassionnelles, elles nous exonèrent de bien d’autres devoirs. Mais je ne voudrais pas qu’elles aient le même destin que les politiques d’aide au développement des quarante ou cinquante dernières années. Je suis persuadé que c’est sur le prix du carbone qu’il faut jouer.

D’une part, la taxation du carbone est une subvention versée par le Nord au Sud. Mais il faut faire vite : lorsque le Sud sera un grand producteur de carbone, ce ne sera plus tout à fait le cas. D’autre part, par une modification d’effets relatifs, nous serons amenés à changer notre mode de vie, dans la mesure où un mode de vie carboné serait plus cher qu’un mode de vie qui ne le serait pas.

Je considère que c’est un enjeu absolument considérable. Nous devrons donc mettre en place une gouvernance, sinon une gouvernance générale de la lutte contre le réchauffement climatique, au moins une gouvernance du carbone dans le monde.

J’entends bien qu’il y a une taxe sur les transactions financières (TTF). Mais cette approche morale de la question va inévitablement se heurter à l’égoïsme des nations et à la protection de leurs propres places financières. Nous savons bien que dans un monde concurrentiel, la mise en place d’une taxe financière est une solution certes élégante, mais pas forcément efficace. Cela dit, monsieur le président, vous avez pris la précaution de dire qu’il fallait que cette taxe ait une large base et une faible contribution.

Voilà pourquoi, selon moi, c’est sur le carbone qu’il faut absolument faire porter nos efforts, en conditionnant tout au prix carbone, y compris nos droits de douane et nos échanges internationaux. C’est très important. Si l’on y parvient, on aura fait un bond considérable.

Enfin, si nous voulons substantiellement modifier notre modèle économique, nous allons devoir ouvrir de façon beaucoup plus vigoureuse le chantier de la modification et de la réforme de notre comptabilité économique. Il faut calculer la valeur en intégrant les externalités, et modifier notre mode de calcul de la valeur, en ne se fondant plus sur le PIB matériel d’aujourd’hui. On sera alors sur des bases infiniment plus favorables pour mener ce combat contre le réchauffement climatique.

M. Yannick Favennec. Je voudrais à mon tour vous féliciter, monsieur le président, pour ce rapport et évoquer une question qui me paraît être un enjeu fondamental de l’accord de Paris : la révision des engagements.

En effet, parmi les éléments du succès du rendez-vous de la COP21, la décision des États de se revoir pour réviser régulièrement à la hausse les contributions nationales est cruciale, notamment dans la mesure où il n’y aura pas d’accord possible sur une trajectoire de baisse des émissions mondiales.

Les engagements actuels des États sont de fait insuffisants. Avant l’ouverture de la COP21, les 148 États – dont les 28 États membres de l’Union européenne – ont remis au secrétariat de la convention climat leur « contribution nationale envisagée » à la baisse des émissions de gaz à effet de serre pour l’horizon 2030. Malheureusement, le bilan agrégé des promesses de ces pays, qui totalisent 85 % des émissions globales, est clair : non seulement les engagements pris ne permettront pas de réduire les émissions mondiales d’ici à 2030, mais celles-ci continueront d’augmenter.

Selon le thermomètre des engagements, publié le 9 octobre dernier par la Fondation Nicolas Hulot, les émissions mondiales passeraient ainsi de 49 gigatonnes (GT) d’équivalent CO2 en 2010 aux alentours de 60 gigatonnes en 2030, ce qui nous propulse vers un réchauffement supérieur à trois degrés, autrement dit une catastrophe annoncée.

Selon le PNUE, dans le cadre de la tendance actuelle, sans efforts d’atténuation supplémentaires, les émissions mondiales seraient de l’ordre de 96 gigatonnes en 2030. Alors que, pour être en phase avec l’objectif de deux degrés, il faudrait les avoir ramenées à 42 gigatonnes à cette date pour ensuite les diviser par deux en 2050 et arriver à zéro en 2100.

Autrement dit, les engagements de Paris, qui ne ramènent ces émissions qu’à 60 gigatonnes, ne représentent que le tiers de l’effort qui serait nécessaire d’ici là.

Face au bilan médiocre des contributions nationales et à la gravité des enjeux, il est fondamental de prévoir d’emblée une révision régulière à la hausse de ces contributions. Les efforts d’atténuation des parties signataires à l’accord de Paris doivent devenir plus ambitieux au fil du temps.

M. François de Rugy. Merci pour ce rapport, qui permet d’avoir un débat de qualité.

Je souhaite avoir un message global optimiste. Même si la situation du climat est très difficile, on a beaucoup progressé au fil des différentes conférences. Pour la première fois, la quasi-totalité des États sont venus avec des engagements chiffrés et prêts à s’engager sur un accord, sans avoir le pied sur le frein, comme le faisaient par exemple les États-Unis et la Chine à Copenhague.

Cette conférence n’est pas une fin en soi, au sens où on aurait tout réglé parce qu’on aurait un accord ou parce que tout serait fichu à défaut d’accord ambitieux. Elle est plutôt une étape, qui doit permettre d’aller le plus loin possible et en appellera d’autres.

Quels que soient les résultats de cette conférence, il faudra que chacun agisse là où il le peut, au niveau européen, au niveau national, comme au niveau des collectivités locales. Je rappelle d’ailleurs que les régions ont été désignées, dans la loi de transition énergétique et la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe), comme les collectivités chefs de file pour la mise en œuvre de la politique climat-énergie sur nos territoires.

S’agissant du prix du carbone, la combinaison entre le système de la taxe carbone et celui des échanges de quotas permettra d’avancer. Aujourd’hui, beaucoup d’acteurs réfléchissant à ces questions climatiques depuis longtemps, mais aussi ceux de l’énergie, y compris les grandes compagnies énergétiques et pétrolières, et les grandes institutions financières et économiques mondiales – comme la Banque mondiale ou le FMI – en conviennent : le levier principal, c’est de donner un prix au carbone. Je me réjouis que la France ait repris ce chantier interrompu en 2010, qu’on a appelé la contribution climat-énergie. Même si le démarrage est modeste, le système est enclenché. J’espère que nos collègues continueront sur tous les bancs à lui apporter leur soutien – car j’entends ici ou là, y compris hier, lors de la séance des questions au Gouvernement, certaines remises en cause.

Il faut absolument poursuivre dans cette voie : le processus progressif la rend acceptable par les citoyens et les acteurs économiques. Mais la trajectoire doit en même temps être fixée, sans qu’on puisse en dévier, faute de quoi les acteurs économiques cesseront de faire les investissements nécessaires pour s’adapter et atteindre des objectifs bas carbone.

Enfin, monsieur le président, je signale que, sur la carte du réseau ferré national affiché dans la salle de votre commission, manque une ligne de chemin de fer rouverte – le cas est assez rare – entre Nantes et Châteaubriant. Je vous invite donc à la rectifier…

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Ces cartes ont été installées lorsque cette salle était celle de la Commission de la défense. Si vous souhaitez financer leur remplacement,… (Sourires)

Mme Sophie Errante. Merci pour cette feuille de route, monsieur le président, merci aussi pour les rencontres que vous avez organisées et les échanges que nous avons pu avoir au sein de l’Assemblée, avec, notamment, un collectif de femmes africaines, des étudiants américains ou des représentants des territoires ultramarins.

Comme le disait le Président de la République – propos que vous rappelez justement à la page 22 de votre rapport – « Il s’agit de mettre la France en capacité de porter un nouveau modèle de développement. Car les défis ne se divisent pas… ».

Il y a en effet des raisons d’être optimiste : on partait de très loin. Derrière le charbon et le pétrole, il y a des financements de partis, de gouvernements, ainsi que d’une société et de familles qui en vivent. Il est donc difficile d’imposer un modèle à tout le monde. Il faut avoir cela à l’esprit quand on évoque les gouvernements réticents à des engagements contraignants et comprendre qu’ils sont placés dans des situations parfois très compliquées.

Le Fonds vert n’entrant en application qu’en 2020, que fait-on en attendant, sachant que nos interlocuteurs nous ont déjà alertés sur les dégâts des dérèglements climatiques dont ils sont d’ores et déjà victimes ?

Par ailleurs, qu’attend-on de la COP22 au Maroc ? Quel travail pourrions-nous mener au sein de notre commission, mais aussi du Parlement, pour que la mise en œuvre d’un véritable changement de modèle soit suivie d’effet ? On constate en effet, au travers de la forte participation à la COP de Paris des visiteurs institutionnels et économiques, une envie de donner une réalité à une autre économie, plus transparente et plus durable.

Mme Geneviève Gaillard. Ce rapport, dont je vous félicite, nous convient et est à l’image du travail que nous réalisons dans cette commission depuis longtemps.

Je suis optimiste car nous avançons un peu, mais je crains que les actions ne puissent suivre les paroles. Dans ces négociations internationales, le diable est toujours dans les détails…

À l’époque où le développement durable était traité au sein de la Commission de la production et des échanges, chargée des affaires économiques, on voyait déjà que les parlementaires n’étaient pas tous d’accord sur un certain nombre de sujets, parmi lesquels l’agriculture. Je demande donc si tous nos collègues partagent désormais la même vision de la situation et des actions à mettre en place : c’est la condition indispensable pour avancer.

La question se pose de la même manière au plan international : on a beau entendre les Américains ou les Chinois dire qu’ils sont dans une dynamique, j’attends de voir les financements et les actions qui seront mis en place. On connaît bien les difficultés que nous avons à soutenir une pêche durable, alors que les ressources de la mer s’épuisent ou à lutter contre la déforestation, quand les Chinois poursuivent celle-ci en toute impunité en continuant à utiliser du bois de rose.

Je ne crois pas que, dans une économie de marché capitaliste, on puisse avancer aussi vite que possible. Les intérêts financiers restent toujours les moteurs de l’économie.

Par ailleurs, nous n’aidons pas les pays en développement les plus pauvres, mais ceux dont on sait qu’ils sont capables de rembourser et qui ont déjà engagé une dynamique. Or, dans certains pays très pauvres, certains problèmes tels que la corruption empêchent d’avancer.

Enfin, je suis heureuse que le Président de la République se soit engagé hier sur une somme de 1 milliard d’euros pour le lac Tchad, le fleuve Niger et la grande muraille verte. Mais comment allons-nous nous y prendre ? Je souhaiterais que notre résolution sur la grande muraille verte et les financements que nous allons y consacrer soient approuvés par l’ensemble des parlementaires. Mais je ne suis pas sûre que nous ayons tous demain cette unanimité pour faire en sorte que la lutte contre le changement climatique réussisse et que nos changements de modèles de production et de consommation ne tardent trop à venir.

M. Michel Heinrich. Je voudrais aussi saluer, monsieur le président, la qualité de votre rapport, qui servira sans doute de document de référence, et vous remercier du travail fait depuis plus de deux ans au sein de notre commission dans la perspective de cette COP.

Je regrette que l’énergie soit la grande absente du projet d’accord en discussion. Celui-ci n’évoque pas en effet les grandes perspectives énergétiques ni ne remet en cause l’énergie fossile, pourtant responsable de près de 80 % des émissions de CO2. Il ne présente pas non plus de perspectives chiffrées de développement des énergies renouvelables.

Et accessoirement, le Qatar, l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis refusent toute contrainte en matière d’émissions de CO2

M. François-Michel Lambert. Merci pour ce rapport, qui permet de bien structurer nos travaux.

Je suis néanmoins un peu critique sur votre approche de l’économie circulaire qui, bien plus que la gestion des déchets, est un modèle de développement, recherchant en permanence l’intensification de la productivité des matières et des ressources tout en les préservant. Il s’agit de repenser notre modèle destructeur d’économie linéaire en créant des flux permanents en boucle vertueuse.

L’économie linéaire est toute à la fois destructrice de ressources et responsable d’une grande partie des émissions de CO: 10 % des gaz à effet de serre du monde sont dus à la production des métaux, de l’extraction minière à la fabrication de matières. Je vous invite donc à compléter sur ce point votre rapport, par ailleurs remarquable sur tout ce qui touche à la fiscalité et aux financements. Je vous suggère de lire à cet égard le rapport du club de Rome, qui sera présenté le 15 décembre, réalisé sur cinq pays européens – la Suède, l’Espagne, la Belgique, le Royaume-Uni et la France – et qui montre que par une politique coordonnée sur les énergies renouvelables, l’efficacité énergétique et l’économie circulaire, nous pourrions générer 50 000 emplois nets en France et 1,5 point supplémentaire de PIB, tout en réduisant de 60 % les émissions de gaz à effet de serre. Nous ne devons pas oublier que 10 % de la population mondiale produit 70 % de ceux-ci et que nous faisons partie de ces 10 %.

Mme Marie Le Vern. Merci pour la qualité de ce rapport. Vous insistez sur la nécessité d’adopter des comportements et des activités plus économes en carbone, de même que sur celle de « restaurer la terre et de cultiver au lieu d’exploiter ». La formule est jolie (Sourires).

Je suis élue de Seine-Maritime, qui fait figure de mauvais élève concernant la part de terre agricole convertie au biologique dans la surface agricole utile – moins de 1 %. Même si nous enregistrons une progression du nombre d’exploitations passant à ce mode de culture, nous restons dans la moyenne basse.

Je suis frappée par les difficultés, y compris culturelles, que rencontrent les agriculteurs quand on évoque les méthodes de l’agriculture biologique ou agroécologique, alors que le modèle conventionnel est subventionné, à bout de souffle, et ruine les terres et la santé des paysans sans garantir de revenu digne. On est bien là face à une problématique de développement durable et de conversion de notre société au bas carbone. Je m’interroge donc sur notre capacité à faire évoluer massivement et rapidement les esprits, en dépit des initiatives louables des pouvoirs publics en faveur des méthodes agroécologiques.

Mme Sophie Rohfritsch. Je me joins au concert de louanges qui vous ont été adressées, monsieur le président, pour le travail accompli, grâce aussi aux auditions que nous avons menées ensemble sur le sujet.

Ce rapport pourrait être le plus ambitieux de la COP21, car il se focalise notamment, avec une multitude d’exemples à l’appui, sur l’action de terrain des citoyens et des collectivités locales comme moyen le plus efficace en faveur d’une reconversion de notre modèle, acceptable et mesurable dans ses effets. C’est un beau message d’espoir, auquel je m’associe.

M. Jean-Jacques Cottel. Je vous félicite aussi pour ce rapport très intéressant. Vous parlez d’une nouvelle façon d’être au monde : notre mode de vie, de plus en plus consumériste, est bien à revoir et l’éducation à l’environnement, à ce nouveau modèle, doit être une priorité pour nos jeunes générations.

Pouvez-vous préciser les pratiques agricoles, encore marginales, qu’il serait souhaitable de développer ? Vous paraît-il possible de les mettre en œuvre rapidement ? Comment encourager les acteurs à cette fin ?

Par ailleurs, pouvez-vous apporter des précisions sur le nouvel accès au foncier que vous proposez, alors qu’on connaît dans certains secteurs une course au foncier effrénée, notamment dans le domaine agricole ? Il faut impérativement poursuivre le travail dans ce domaine.

Mme Valérie Lacroute. Je vous félicite aussi pour ce rapport et pour nous donner l’occasion de nous exprimer sur la COP21, notamment sur des initiatives locales, telles que l’idée de Jacques Kossowski de réunir les maires des grandes villes. Cette COP peut être l’occasion d’élaborer une sorte de boîte à outils pour les collectivités. J’espère que nous n’accoucherons pas d’une souris.

La COP21 sera aussi le rendez-vous des entreprises, qui jouent un rôle important. Le développement économique repose à la fois sur l’efficacité économique et la préservation de l’environnement. Cette position est désormais partagée par nombre d’entreprises, qui considèrent que le prix de l’inaction serait, à terme, plus élevé que celui de l’action.

La COP21 parviendra-t-elle à généraliser les mécanismes de tarification des émissions de carbone ? Aujourd’hui, les entreprises demandent un « signal prix » fort, permettant d’orienter les investissements vers des technologies économes en énergie, afin de préserver notre planète. Il est important que l’ensemble des pays adoptent les mêmes mécanismes pour que les entreprises les plus vertueuses ne se trouvent pas concurrencées par celles se délocalisant vers des pays dont la législation serait beaucoup moins contraignante.

Deuxièmement, il importe de promouvoir un mix énergétique mettant l’accent sur les sources d’énergie qui ne produisent pas de gaz à effet de serre. Je pense, bien sûr, au photovoltaïque, à l’éolien, à la biomasse, mais aussi au nucléaire – je rappelle que le GIEC fait figurer ce dernier parmi les sources d’énergie non carbonées. Je m’arrêterai là…

M. François-Michel Lambert. Cela vaut mieux !

Mme Françoise Dubois. La déforestation est une catastrophe mondiale aux conséquences irréversibles. Elle décime notamment les peuples autochtones, qui sont les premiers protecteurs et garants de la biodiversité. Il faut aussi considérer à cet égard le déplacement, voire la disparition, de toute une faune indispensable au bon fonctionnement de la nature.

L’être humain ne décide pas du milieu d’habitation des espèces. Les scientifiques essaient de sensibiliser les responsables, mais ne font, hélas ! que constater les dégâts. Les enjeux économiques et les intérêts financiers sont considérables. Reste que cette déforestation à outrance a, peut-être, été un des vecteurs importants du dérèglement que nous vivons aujourd’hui.

M. Laurent Furst. Merci, monsieur le président, de nous permettre d’avoir ces débats dans le calme, la sérénité et l’amitié.

La COP21 peut être appréhendée à deux niveaux différents : la recherche d’un consensus sur un objectif, mais aussi la construction d’une conscience mondiale, qui s’élabore réunion après réunion. En cela, la contribution de cette COP est importante, comme le seront les suivantes et le furent les précédentes : l’échec de Copenhague, lui-même, a été un élément constitutif de cette prise de conscience.

Je note, par ailleurs, que l’on ne parle plus de la notion de « peak oil » – « pic pétrolier » –, en raison du développement des gaz de schiste, des pétroles bituminés et des nouveaux gisements découverts au large des côtes et en Arctique. On croyait hier que le problème se réglerait par lui-même, puisqu’il n’y aurait plus de pétrole. Désormais, on est entré dans une logique simple : l’homme doit renoncer à consommer de l’énergie fossile, non du fait de la nature, mais du choix qu’il opère.

Si les pays occidentaux sont peut-être culturellement et économiquement armés et pourront financer leur transition énergétique, les six septièmes de l’humanité ne pourront se développer que s’ils ont accès à une énergie peu chère. Or, on voit mal l’humanité en croissance renoncer à la consommation. Dès lors le problème est devenu mondial et ne se pose pas dans les seuls pays occidentaux, et encore moins en France où d’ailleurs nous émettons moins de GES que bien d’autres nations. Comment faire en sorte, de ce fait, que la consommation d’énergie fossile soit dépassée technologiquement pour les pays du Sud ? C’est bien dans le développement de technologies nouvelles et leur diffusion à faible coût dans ces pays que l’on trouvera les solutions au problème des gaz à effet de serre, pour que l’homme renonce enfin à consommer ce que la nature lui offre pourtant à profusion.

Ces questions me semblent relever de trois domaines : climatique, économique et éthique. À cet égard, il est un indicateur que j’aimerais connaître : quelle quantité d’émissions de CO2 chaque homme de la planète peut-il émettre pour qu’on ne dégrade pas le climat – ce qui devrait constituer l’objectif de tous les habitants du monde ?

M. le président Jean-Paul Chanteguet. La réponse est : deux tonnes par habitant et par an…

Mme Sabine Buis. Je voudrais aussi m’associer aux louanges qui vous ont été adressées, monsieur le président. Plus qu’un rapport, c’est une véritable feuille de route, voire d’une profession de foi. Je suis heureuse que nous puissions nous retrouver sur ces propositions.

Mais pouvons-nous nous en contenter ? Comment aller plus loin ? Nous sommes tous d’accord pour faire des questions du prix carbone et du financement nos priorités, mais aussi pour explorer peut-être d’autres pistes, comme celle de l’économie circulaire. Dès lors, comment pouvons-nous faire pour, en tant que membres de cette commission, parler d’une seule voix au sujet de ce rapport pour avoir du poids politiquement et, au-delà de la COP21, défendre plus largement les ambitions que nous avons ?

M. Jacques Alain Bénisti. Je souhaite aussi vous féliciter, monsieur le président, car votre rapport est courageux : il place nos dirigeants devant un bon nombre de contradictions. Ainsi, quand vous parlez de densification raisonnée et de la nécessité d’un rapprochement domicile-travail, c’est du bon sens, mais on aimerait que vous soyez davantage entendu dans les hautes sphères !

Plusieurs députés. Oui !

M. Jacques Alain Bénisti. L’imposition des opérations d’intérêt national (OIN) entraîne, par exemple, une surdensification des logements, notamment dans les territoires de la petite couronne, déjà totalement saturés en logements et en circulation, ce qui aggrave l’effet de serre et va à contresens des préconisations de la COP21.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Merci à tous.

Je poursuis avec vous un objectif : faire en sorte que notre commission ait une véritable existence, que ce soit au travers les textes qu’elle examine ou des sujets qu’elle aborde ou dont elle se saisit, de ses réflexions et de ses propositions. Il est vrai que nous pouvons avoir quelquefois le sentiment de ne pas trouver toute notre place, mais certains sujets nous permettent de dialoguer ensemble et de faire avancer la réflexion.

Je me suis posé la question de savoir comment notre commission pouvait être associée à la préparation de la COP21 et je me suis très vite rendu compte que la gouvernance climatique est par essence onusienne – autrement dit, ce sont les diplomaties qui sont chargées de la préparer. Reste que s’il y a un accord, celui-ci devra être ratifié par tous les parlements du monde – et pour ce qui nous concerne, d’abord par l’Union européenne, puis par les parlements des États membres.

La position de la France est tout à fait particulière, puisqu’elle accueille la COP. Elle aura un statut de facilitateur jusqu’aux 11 ou au 12 décembre, puis d’acteur en pleine responsabilité, qui devra prendre des initiatives, sachant qu’elle va présider la COP pendant un an – Laurent Fabius en assume la présidence depuis le 30 novembre, et jusqu’à la fin 2016. C’est la raison pour laquelle nous avons déposé cette proposition de résolution et formulé nos demandes sous forme d’actions à prendre après la COP21.

La gouvernance climatique onusienne, au bout de vingt-trois ans, s’essouffle selon moi, même si nous ne devons pas négliger les progrès accomplis. J’en cite toujours trois : elle aura permis aux pays en développement de s’exprimer – d’ailleurs, depuis le début, ils se sont regroupés au travers du G77 ou d’un groupement des pays les plus vulnérables – ; elle aura permis à la société civile de faire de même ; elle aura permis d’acter, comme l’a fait la conférence de Copenhague, la nécessité de mettre en place des politiques évitant de dépasser le seuil d’augmentation de deux degrés par rapport à l’ère préindustrielle. Autrement dit, son bilan est loin d’être négatif.

Reste que les émissions de gaz à effet de serre continuent à augmenter. Nous sommes face à une urgence climatique car ces gaz ne disparaissent pas au bout d’un an : nous avons créé un stock très important, qui continuera à exister pendant des dizaines ou des milliers d’années. Même si demain nous ne produisions plus de GES, nous serions confrontés à une augmentation de la température. L’emballement qui pourrait se produire présente donc un risque particulièrement important.

Si nous voulons rester en dessous des deux degrés, il faudra rehausser les engagements pris par les différents pays. Dans la mesure où l’accord de Paris serait mis en œuvre à partir de 2020, la première révision se ferait en 2025, mais ce sera peut-être déjà trop tard. Il faudrait que la première révision intervienne avant 2020. Ce qui se passera dans les cinq ans qui viennent est particulièrement important.

La COP21 marquera une étape déterminante : nous sommes passés du système « top-down » au système « bottom-up ». Le protocole de Kyoto, ratifié en 2005, a marqué la gouvernance climatique et les engagements pris pour la première période ont normalement été mis en œuvre entre 2008 et 2012. Il avait fixé des objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre aux pays industrialisés et aux anciens pays du bloc de l’Est. Il était contraignant politiquement et moralement, mais aussi juridiquement – un peu –, dans la mesure où on avait prévu des mécanismes de sanctions, selon lesquels les pays qui ne respectent pas leurs engagements seront pénalisés dans le cadre de la deuxième période – par une augmentation de 30 % de leurs objectifs de réduction. Mais que s’est-il passé ? Le Canada et le Japon, constatant rapidement qu’ils ne tiendraient pas leurs engagements, se sont aussitôt retirés du protocole. Je ne crois donc pas que l’accord de Paris puisse être un texte juridiquement coercitif, qui se traduirait par d’éventuelles sanctions à l’égard des États-Unis ou de la Chine. Reste qu’il sera contraignant politiquement, sans doute aussi moralement – même si je regrette bien sûr qu’il ne le soit pas aussi juridiquement.

N’oublions pas que les engagements sont pris, non par la communauté internationale, mais par les pays eux-mêmes, certains étant d’ailleurs forts et d’autres en retrait.

Le dispositif « bottom-up » consiste à demander aujourd’hui aux pays les engagements qu’ils veulent prendre à l’horizon 2030. Autrement dit, nous sommes dans une logique radicalement différente. Or 183 pays – représentant 95 % des émissions de gaz à effet de serre – sur 196 ont fait des propositions, ce qui est un véritable succès.

Mais certains de ces pays, qui se sont engagés sur des INDC – Intended Nationally Determined Contribution, autrement dit des contributions décidées au niveau national – ont conditionné leur engagement au soutien financier de la communauté internationale – c’est le cas de nombreux pays en développement. Par ailleurs, certains États n’ont pas pris d’engagement, ou s’ils en ont pris, ils sont particulièrement limités. Il serait naïf de penser que tous les pays ont le même intérêt à lutter contre le réchauffement climatique. Les intérêts des pays producteurs de pétrole par exemple n’ont rien à voir avec ceux des pays dits vulnérables : il est vrai à cet égard que les engagements de l’Arabie saoudite ou du Qatar sont pour le moins a minima. Reste que 183 pays ont déposé leurs INDC.

Bien sûr, nous irons, hélas, au-delà d’une augmentation de deux degrés. Nous sommes à un point de rupture concernant la gouvernance climatique, d’autant qu’il y a un fait nouveau fondamental : la décision, à Lima, de mettre en place l’agenda des solutions, qui recense de manière non exhaustive toutes les initiatives prises dans le monde par les collectivités territoriales, par les territoires, par les entreprises, par les filières industrielles, par les citoyens. Pour moi, il constitue un élément devant permettre l’instauration d’une nouvelle gouvernance climatique, plus équilibrée, dans la mesure où ce sont, à l’évidence, les acteurs non étatiques qui permettront de mettre en œuvre une véritable politique de lutte contre le réchauffement climatique. La COP21 a, de fait, montré la mobilisation des citoyens, des entreprises, des territoires et des collectivités. Celles-ci, et notamment les communes, sont organisées et il existe plusieurs associations internationales les regroupant.

Le point 16 de notre proposition de résolution préconise d’ailleurs que soit institutionnalisé l’agenda des solutions par la création d’un conseil à cet effet, composé de représentants des différentes initiatives pour le climat et de la société civile, d’experts, de représentants de gouvernements nationaux et d’organisations internationales, dont les travaux seraient coordonnés par un haut représentant pour l’action climat. C’est là une proposition à mes yeux particulièrement forte, sachant que l’après-COP21 doit conduire à des initiatives nouvelles, notamment de la France.

Le chiffre de 100 milliards de dollars évoqué à Copenhague ne correspond pas au financement du Fonds vert, aujourd’hui doté d’environ 10 milliards. Ce fonds vient d’ailleurs de décider de financer un certain nombre de projets, qui concernent souvent les énergies renouvelables.

La France a demandé à l’OCDE de faire un bilan des financements climatiques mobilisés aujourd’hui, privés ou publics. Le chiffre avancé, qui est de l’ordre de 60 milliards d’euros, fait l’objet d’un débat. Pour passer de 60 à 100 milliards, la marche est relativement haute ; reste que les banques – la Banque mondiale, la Banque africaine de développement ou la Banque asiatique de développement – se sont engagées à augmenter leur financement.

Même si demain nous arrivions aux 100 milliards d’euros, rappelons que les moyens consacrés à l’adaptation doivent être beaucoup plus importants. Ils mobilisent pour l’heure seulement 17 % des 60 milliards que j’évoquais ; il faut bien davantage, et surtout sous forme de dons, alors qu’ils sont généralement mobilisés sous formes de prêts. Cela peut se comprendre pour l’atténuation ; mais pour l’adaptation, nous avons besoin de dons. La Fondation Nicolas Hulot considère d’ailleurs que sur les 100 milliards, 30 devraient être consacrés à l’adaptation ; nous en sommes loin.

Nous avons la possibilité de mettre en place des financements innovants, qui ont été identifiés par Pascal Canfin et Alain Grandjean ; mais, au-delà de la taxe sur les transactions financières, il y a un autre outil utile : la vente aux enchères des quotas de carbone sur le marché européen. Le problème est que ce marché ETS ne fonctionne pas – le prix de la tonne de carbone fluctuant entre 5 et 8 euros, alors qu’il devrait être plutôt de 15 à 20 euros. Si demain on mettait en place une nouvelle gouvernance permettant d’avoir un prix du carbone sur ce marché, qui concerne 11 500 entreprises, cela permettrait, dans le cadre de la vente aux enchères, de mobiliser des moyens financiers non négligeables – sur quinze ans, la somme estimée est de 230 à 350 milliards d’euros, dont une partie pourrait être affectée au climat, en particulier au financement de l’aide internationale.

La France va modifier le régime de l’Agence française de développement (AFD), qui va être adossée à la Caisse des dépôts et consignations, ce qui devrait lui permettre de disposer d’une structure financière plus importante et d’emprunter davantage sur les marchés financiers. Derrière cette capacité d’emprunt accrue se profile une augmentation de notre aide au développement et de l’aide internationale au climat sous forme de prêts – ce qui n’est pas suffisant et suppose de trouver d’autres moyens financiers.

Pour ce qui est du développement de l’agriculture biologique, nous n’atteignons effectivement pas les objectifs fixés. Dans la loi sur le Grenelle de l’environnement, l’objectif était que 20 % de la surface agricole utile soit en agriculture biologique en 2020, contre seulement 4 % aujourd’hui… Nous en sommes loin. Nous proposons, dans notre proposition de résolution, de demander à l’Union européenne qu’elle prenne mieux en compte, au moment de la révision de la politique agricole commune (PAC), les enjeux climatiques et environnementaux, ce qui permettrait de réorienter cette politique.

J’ai, en outre, bien noté les remarques de notre collègue François-Michel Lambert sur l’économie circulaire et nous sommes prêts bien entendu à entendre ses propositions.

Mme Sophie Errante. Dans le cadre du Parlement des enfants, nous allons faire travailler les enfants sur la question du changement climatique. Sommes-nous autorisés à échanger avec eux sur ce rapport et la proposition de résolution ?

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Oui, dans la mesure où vous nous autorisez à publier le rapport ! (Sourires)

(Le président Jean-Paul Chanteguet interroge la Commission)

Puisqu’il n’y a pas d’objection, le rapport sera donc publié. Je vous remercie.

——fpfp——

Membres présents ou excusés

Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Réunion du mercredi 2 décembre 2015 à 9 h 30

Présents. - M. Guy Bailliart, M. Serge Bardy, Mme Catherine Beaubatie, M. Jacques Alain Bénisti, M. Sylvain Berrios, M. Florent Boudié, M. Christophe Bouillon, M. Jean-Louis Bricout, Mme Sabine Buis, M. Vincent Burroni, M. Alain Calmette, M. Patrice Carvalho, M. Jean-Paul Chanteguet, M. Luc Chatel, M. Alain Chrétien, M. Jean-Jacques Cottel, M. Stéphane Demilly, M. David Douillet, Mme Françoise Dubois, M. Philippe Duron, Mme Sophie Errante, M. Olivier Falorni, M. Yannick Favennec, M. Jean-Marc Fournel, M. Jean-Christophe Fromantin, M. Laurent Furst, Mme Geneviève Gaillard, M. Alain Gest, M. Charles-Ange Ginesy, M. Michel Heinrich, M. Jacques Kossowski, Mme Valérie Lacroute, M. Michel Lesage, Mme Marie Le Vern, M. Gérard Menuel, M. Yves Nicolin, M. Bertrand Pancher, M. Rémi Pauvros, Mme Catherine Quéré, Mme Sophie Rohfritsch, Mme Barbara Romagnan, M. Jean-Louis Roumégas, M. François de Rugy, M. Gilles Savary, M. Jean-Marie Sermier, Mme Suzanne Tallard, M. Thomas Thévenoud, M. Jean-Pierre Vigier

Excusés. - Mme Sylviane Alaux, M. Yves Albarello, Mme Chantal Berthelot, M. Jean-Pierre Blazy, M. Yann Capet, M. Jean-Yves Caullet, M. Guillaume Chevrollier, M. Stéphane Claireaux, Mme Florence Delaunay, M. Christian Jacob, M. Alain Leboeuf, Mme Viviane Le Dissez, Mme Martine Lignières-Cassou, M. Franck Marlin, M. Philippe Martin, M. Philippe Plisson, M. Napole Polutélé, M. Martial Saddier, M. Gilbert Sauvan, M. Guy Teissier

Assistaient également à la réunion. - Mme Laurence Abeille, M. Dino Cinieri, M. Jacques Krabal, M. François-Michel Lambert, M. Lionel Tardy