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Commission
du développement durable et de l’aménagement du territoire
La Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a entendu M. Jean-Michel Baylet, ministre de l’aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales.
M. le président Jean-Paul Chanteguet. Mes chers collègues, nous accueillons aujourd’hui M. Jean-Michel Baylet, ministre de l’aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales. Cette audition devait, vous vous en souvenez, avoir lieu le 6 avril dernier, mais nous avions dû la reporter en raison du vote sur la proposition de loi organique de modernisation des règles applicables à l’élection présidentielle.
Notre Commission est, comme son nom l’indique, compétente en matière d’aménagement du territoire – M. Alain Calmette, rapporteur pour avis des crédits de la mission « Politique des territoires », est présent parmi nous cet après-midi. Depuis le début de la législature, la Commission s’est saisie pour avis des projets de loi relatifs à la décentralisation ou à l’organisation des collectivités territoriales.
Nous nous intéressons tout particulièrement à la couverture numérique du territoire, aux zones de revitalisation rurale (ZRR) ou à la prise en considération des ruralités, mais nous sommes conscients de la nécessité d’une approche interministérielle de l’aménagement du territoire.
M. Jean-Michel Baylet, ministre de l’aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je commence par vous présenter toutes mes excuses pour l’annulation de notre premier rendez-vous – mais je n’étais pas le seul coupable !
M. le président Jean-Paul Chanteguet. Je l’étais aussi. (Sourires.)
M. le ministre. Aujourd’hui, nous avons tout notre temps pour travailler tranquillement, de la meilleure des manières, et le ministre de l’aménagement du territoire que je suis est très heureux d’être parmi vous. Je salue également la présence de Mme Sylvia Pinel, à qui j’ai succédé.
Lorsque le Président de la République m’a proposé de rejoindre l’équipe gouvernementale, j’ai poussé les feux pour que soient associés dans un même ministère les collectivités locales et l’aménagement du territoire : le second ne se fera pas sans les premières. Tous les élus, nationaux et locaux, doivent œuvrer ensemble. Certains nourrissent la nostalgie de la puissance et de l’autorité naturelle d’une DATAR qui ne s’embarrassait pas de beaucoup de précautions lorsqu’elle prenait des décisions ; mais les choses ont changé, et notre démocratie s’est apaisée. Non seulement il fallait associer les collectivités et l’aménagement, mais il fallait aussi associer, dans ce même ministère, le rural, le périurbain et l’urbain – la politique de la ville, qui est en réalité une politique des quartiers en difficulté, dépendant du ministère de la ville, de la jeunesse et des sports. Il ne faut pas opposer les uns aux autres : chaque espace rencontre des difficultés, mais les politiques doivent être pensées comme complémentaires. Je tiens à un aménagement partenarial, adapté aux spécificités de chaque territoire.
Certains problèmes sont communs à presque tous les territoires ruraux ; et la réforme territoriale a suscité de grandes inquiétudes chez les élus locaux.
Le premier de ces problèmes, c’est celui des services publics. La ruralité et le périurbain se sentent les grands oubliés des politiques successives : j’entends dire depuis trente ans que les services publics ont déserté nos campagnes. Aucune réponse adéquate n’avait encore été apportée. C’est pourquoi l’une des mesures les plus significatives prises par le comité interministériel aux ruralités (CIR) du 13 mars 2015 est la création, par l’État et les collectivités territoriales, de « maisons de services au public ». Cette politique qui ramène les services publics au plus près de nos concitoyens est appréciée, et porte ses premiers fruits. Mille de ces maisons doivent être créées d’ici à la fin de l’année, dont 500 en partenariat avec La Poste – les plus avantageuses, car elles pérennisent aussi le service postal. De plus, La Poste prend en charge investissements et fonctionnement. On trouve dans ces lieux une grande diversité de services publics : Pôle Emploi, presque systématiquement, la MSA (Mutualité sociale agricole), le Crédit Agricole parfois, GRDF presque toujours, des antennes des sous-préfectures… Dans le Tarn-et-Garonne, nous disposons également d’une antenne du tribunal de Bordeaux. C’est la première fois que l’on trouve le moyen de ramener les services publics en zone rurale comme en zone périurbaine. C’est donc un succès.
Le deuxième problème majeur, c’est l’accès à la santé. Le CIR a également pris des mesures pour favoriser la création de maisons de santé, qui permettent de proposer un véritable service médical de proximité, car elles n’accueillent pas uniquement des médecins, mais aussi des kinésithérapeutes, des infirmières, des dentistes… Je souligne également que 1 700 contrats d’engagement de service public (CESP) doivent être signés avec des étudiants en médecine d’ici à 2017 ; 1 324 l’ont déjà été.
La troisième des grandes préoccupations de nos concitoyens, c’est naturellement l’accès à la téléphonie mobile et au numérique. Les zones blanches sont encore trop nombreuses. Le prochain CIR, qui se tiendra le 20 mai prochain, sans doute en Ardèche, fera le bilan des 67 mesures déjà annoncées mais sera aussi l’occasion d’annonces nouvelles, tant pour le périurbain que pour la ruralité.
S’agissant de la téléphonie, nous rencontrons d’abord le problème de la définition des zones blanches. Aujourd’hui, dans le Tarn-et-Garonne par exemple, il n’y en a officiellement plus ; mais la réalité est tout autre. La « zone grise » s’étend en effet sur 300 mètres autour de la mairie… Mais il est normal que nos concitoyens ne comprennent pas que, dès que l’on a quitté ce périmètre, le téléphone ne marche plus ! J’ai donc demandé à l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) de revoir ses critères. Les CIR ont fixé à la fin de 2016 la date à laquelle on devra recevoir la 2G sur l’ensemble du territoire ; pour la 3G, ce sera mi-2017 – pour la 4G, il faudra attendre plus longtemps, et même bien plus longtemps. (Murmures)
Nous allons mettre en place un guichet unique qui nous permettra de mieux connaître les communes non couvertes. Dans 268 localités, l’État prend en charge la construction d’infrastructures, pour 30 millions d’euros, afin de tenir les engagements pris lors du dernier CIR. L’État financera à 50 %, et même à 75 % dans les zones de montagne, les infrastructures destinées à couvrir 800 zones définies comme stratégiques ; l’appel à projets vient d’être lancé, pour un montant de 42 millions d’euros.
M. Emmanuel Macron, ministre de l’économie, et moi-même avons rencontré tous les opérateurs et nous leur avons clairement dit que la situation actuelle n’était plus tolérable. Tout le monde doit avoir accès à la téléphonie mobile, et le problème ne concerne pas seulement les zones rurales, puisqu’il y a parfois des coupures de téléphone portable tous les 500 mètres dans l’hypercentre parisien !
Quant à la couverture numérique, avec le plan France Très Haut Débit, l’État, les collectivités et les opérateurs s’engagent à investir 20 milliards d’euros d’ici à 2022. Nous renforçons les moyens de l’Agence du numérique, afin d’accélérer les dossiers. Notre objectif est qu’un accord de principe sur le financement soit signé dans tous les départements avant la fin de l’année 2016. La commercialisation des réseaux d’initiative publique commence, et nous souhaitons ardemment que les schémas départementaux d’aménagement numérique (SDAN) soient réalisés dans les meilleures conditions, et dans les meilleurs délais.
Voilà les trois sujets principaux – vous les avez évoqués, monsieur le président, et ce sont aussi ceux dont j’entends parler lors de chacun de mes déplacements.
Je voudrais également insister sur l’importance de notre politique en faveur de la revitalisation des centres-bourgs. Un fonds d’un milliard d’euros a été mis en place lors du dernier CIR ; il comprend 500 millions d’euros destinés à l’investissement, mais aussi 300 millions d’euros spécifiquement destinés à la revitalisation des centres-bourgs et 200 millions d’euros d’abondement de la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR).
Les décisions seront déconcentrées, donc prises au plus près du terrain. Si la procédure d’appel à projets est bonne, elle est aussi longue et demande une ingénierie territoriale importante : ce sont donc les préfets qui sont en train d’arrêter les propositions et de me les transmettre. Ce fonds a beaucoup de succès, il fonctionne très bien.
J’insiste ici – parce que je sais que certains préfets en avaient décidé autrement – sur le fait que les différentes composantes de ce fonds sont cumulables : on peut utiliser DETR, investissement et revitalisation des centres-bourgs. J’ai rappelé cette règle aux préfets par une note écrite.
Il faut aussi nous pencher sur les problèmes des espaces périurbains. Mme Sylvia Pinel, notamment, s’est remarquablement bien occupée de la ruralité ; l’urbain est l’objet de toutes les sollicitudes. Mais le périurbain est si divers qu’il est difficile de le traiter.
Certaines communes périurbaines ont connu un développement harmonieux, avec des maires visionnaires, qui ont su maîtriser l’aménagement de leur espace, apporter des services publics, faire venir des commerces… Dans d’autres, les aménagements ne sont que le résultat de la juxtaposition d’initiatives de promoteurs privés, ce qui crée de graves problèmes.
De plus – je le dis devant M. Gilles Savary, à qui ce sujet est cher – le périurbain d’aujourd’hui n’est plus le périurbain d’hier. Il y a aujourd’hui des communes périurbaines qui sont à cinquante ou soixante kilomètres de la ville-centre.
Je suis en train de préparer une loi relative à la montagne, qui sera débattue au Parlement lors de la session d’automne. Je souhaite qu’elle soit adoptée le plus rapidement possible, idéalement en utilisant la procédure accélérée. Il faudrait pour cela que tout le monde en soit d’accord, et je souhaite un vaste consensus sur les mesures que nous proposerons. J’ai commencé à travailler avec les élus de la montagne et rencontré le président de l’Association nationale des élus de la montagne (ANEM). Nous espérons que la loi sera adoptée avant la fin de l’année.
J’ai également ouvert les discussions en vue de la révision des contrats de plan État-région (CPER), puisqu’il faut les adapter aux nouvelles régions. J’espère avoir bouclé ce dossier avant la fin de la session extraordinaire du mois de juillet. La plateforme que nous avons signée avec les régions est un accord gagnant-gagnant ; l’Association des régions de France (ARF) partage, je crois, cette conviction. Nous travaillons à mettre en œuvre ce pacte et à le financer.
À la suite de la création des métropoles, nous préparons aussi de futurs contrats entre l’État et les métropoles, sur le modèle des CPER. Ils devraient permettre la consolidation de cette récente réforme institutionnelle.
L’aménagement du territoire a besoin de pragmatisme et d’actions concrètes plus que de grands principes énoncés dans une énième loi-cadre. Les 67 mesures issues des deux CIR de 2015 sont, j’ai pu le constater, insuffisamment connues sur le terrain : j’ai donc demandé aux préfets de nommer, dans chaque département, un sous-préfet référent « ruralité », chargé de constituer une commission souple, réunissant le président du conseil général, les parlementaires et différents élus afin de mieux faire circuler l’information.
Je souhaite aussi que les parlementaires soient – comme Mme Sylvia Pinel l’avait prévu – associés à la définition des schémas directeurs immobiliers régionaux (SDIR), et je l’ai rappelé aux préfets.
Je crois au pragmatisme et au partenariat – l’État ne peut pas agir seul, et son rôle doit d’abord être d’encourager les initiatives locales et de fédérer les énergies. Enfin, il faut insister sur l’interdépendance de tous les territoires : je ne crois pas à l’opposition des uns aux autres, mais plutôt à la coopération, à la complémentarité, voire à l’osmose. Chacun doit trouver sa place.
M. le président Jean-Paul Chanteguet. Je donne maintenant la parole aux représentants des groupes.
M. Florent Boudié. Merci, monsieur le ministre, d’être venu vous exprimer devant cette Commission, qui s’est beaucoup impliquée dans la réforme territoriale.
J’aimerais d’abord revenir sur la question des compétences des départements – préservées à 90 %. Mais, sous le double effet de la revalorisation de 2 % de cette allocation et de la crise économique, les dépenses du RSA (revenu de solidarité active) explosent : elles s’élevaient à 10 milliards d’euros en 2015, en hausse de plus de 7 %. L’État a donc décidé la création, à la fin de l’année 2015, d’un fonds d’urgence doté de 50 millions d’euros afin de remédier aux situations les plus urgentes. Il a surtout décidé la recentralisation du RSA dès 2017. Où en sont les discussions entre l’État et les départements ? Selon quelles modalités les transferts de ressources vont-ils s’opérer ? Quel est le calendrier du Gouvernement ? Sur ce sujet délicat, les départements ont besoin de visibilité.
Vous avez vous-même souligné il y a quelques semaines que la réforme de la dotation globale de fonctionnement (DGF) était dans l’impasse : le projet de réforme qui devait être intégré à la loi de finances pour 2016 a été repoussé d’un an. Ce débat est d’autant plus anxiogène qu’il intervient dans un contexte de baisse des dotations. Quelle est, monsieur le ministre, la nouvelle feuille de route du Gouvernement ? Où en sont vos réflexions et les concertations avec les associations d’élus locaux ? Le Gouvernement compte-t-il reprendre cette réforme lors de la prochaine loi de finances, comme il s’y était engagé, ou bien dans le cadre d’une loi spécifique, comme le réclame l’Association des maires de France (AMF) ?
S’agissant enfin de l’avenir des territoires ruraux, y a-t-il une vision d’ensemble ? Bien sûr, cette majorité a produit des avancées significatives, en matière de politique de la ville – qui comprend enfin des secteurs ruraux – ou grâce à la montée en puissance des communes nouvelles. Vous avez cité les efforts considérables que représente l’ouverture de maisons de services au public et de maisons de santé. Mais nos territoires ruraux ont besoin de comprendre le rôle qui leur est réservé dans l’ensemble républicain. Cette vision manque aujourd’hui cruellement. Comment mieux articuler les relations entre les villes et les campagnes, dans une logique horizontale ? Comment éviter que les grandes agglomérations ne tournent le dos à leur périphérie ? Fédérer espaces ruraux et urbains était l’une des ambitions des pôles d’équilibre territoriaux et ruraux (PETR) dont nous avions pris l’initiative ici même, avant que le Sénat ne vide cette idée de sa substance.
Comment reconstruire un scénario d’aménagement du territoire sans céder ni à la fiction trop souvent entretenue de l’égalitarisme ni à la tentation d’une France à plusieurs vitesses ? Comment sortir de la logique de saupoudrage dans laquelle l’État ne cesse de s’enfermer ? La ruralité a besoin, monsieur le ministre, d’une perspective large.
M. Julien Aubert. Merci, monsieur le ministre, d’être venu devant la Commission aujourd’hui. Vous avez utilisé tous les mots qui comptent : coopération, partenariat, gagnant-gagnant, et même osmose. Les mesures que vous avez citées sont intéressantes, mais palliatives : la situation des territoires ruraux continue de s’aggraver, notamment parce que les services publics s’en vont. Le numérique est également un sujet essentiel.
S’agissant de la représentation de l’État dans les territoires ruraux, il y a un problème de tubulure : chaque ministère ou organisme public qui doit revoir son réseau en raison des contraintes budgétaires fait le même raisonnement, mais dans son coin, et les suppressions finissent par se concentrer toutes au même endroit. Une même commune peut voir partir, en quelques années, le tribunal, une caserne de gendarmerie, un bureau de poste… Les citoyens se sentent délaissés, et les entreprises ne viennent plus. Votre ministère doit s’efforcer de coordonner, d’équilibrer ces fermetures.
Vous dites qu’il ne faut pas opposer la ville et la campagne, et vous avez raison, mais il ne faut pas renoncer à trancher et à mettre en place des priorités. Depuis vingt ou trente ans, nous avons déversé des milliards d’euros dans la politique de la ville, et les ruraux se demandent parfois s’ils ne sont pas les oubliés de la République. Continuer la même chose, et continuer une politique de saupoudrage dans les territoires ruraux, ne sert pas à grand-chose.
Vous avez également esquivé le problème de la représentation politique, qui a été altérée pour les territoires ruraux, durant cette législature, par la mise en place de circonscriptions départementales de plus en plus grandes. J’habite un petit village de mille habitants : en quatre ans, nous avons vu disparaître le conseiller départemental, le conseiller régional…
Vous n’avez pas abordé le sujet des normes et des obligations. Il faudrait se pencher sérieusement sur les obligations imposées aux logements sociaux en matière d’accessibilité : les coûts peuvent s’élever à plusieurs centaines de milliers d’euros dans des villages de quelques milliers d’âmes.
Vous avez abordé la question de la revitalisation des centres-bourgs. Mais il faut également évoquer la multiplication des zones commerciales, la concurrence entre les villes qui veulent toutes leur hypermarché, ce qui fait mourir à petit feu les petits commerces des centres-villes.
J’accueille, à titre personnel, votre projet de loi Montagne avec beaucoup d’intérêt. J’espère en particulier que nous pourrons discuter des hôpitaux de montagne, qui sont parfois traités de la même manière que les autres hôpitaux ruraux, alors que les conditions météorologiques et l’activité de nature saisonnière de ces zones justifient que l’on ne leur applique pas la même grille d’analyse.
M. Bertrand Pancher. Merci de cette intervention, monsieur le ministre. Il est important pour notre pays de disposer d’un ministre de l’aménagement du territoire qui soit aussi chargé de la ruralité et des collectivités territoriales : il est dommage que cela n’arrive que tardivement au cours de ce quinquennat. Ne boudons pas malgré tout le plaisir de vous entendre.
Les territoires ruraux ne doivent pas sombrer dans le pessimisme ambiant : les habitants doivent se mobiliser pour compenser les handicaps qui affectent tous ceux qui vivent loin des villes, des transports, des moyens de communication, et pour développer des services. Ils n’ont pas toujours besoin de l’État, même si celui-ci est parfois indispensable : c’est d’abord aux collectivités locales qu’il revient d’agir.
La question des moyens accordés à ces dernières se pose de façon aiguë ; la ponction de 11 milliards d’euros est exorbitante, même si les collectivités locales doivent prendre leur part de l’effort, et même si nous sommes tous responsables de la situation actuelle. La marche est trop haute. Toutes les associations d’élus locaux ont souhaité une révision de la réforme dans le courant de l’année 2017. Je préside moi-même deux collectivités : la ville de Bar-le-Duc réussira à passer le cap ; du côté de la communauté d’agglomération Bar-le-Duc Sud Meuse, ce sera beaucoup plus compliqué. Nous devrons casser des services publics.
Monsieur le ministre, je voudrais vous entendre sur ce sujet. Vous devez nous aider : des efforts sont nécessaires, mais en douceur, et en fonction des capacités des collectivités.
S’agissant des services publics, certains ne peuvent se développer que grâce à l’État. Vous avez très bien parlé de la téléphonie mobile et de la résorption des zones blanches : dans mon département, cinq communes répondent aux critères de la zone blanche, mais 90 ne sont pas du tout ou extrêmement mal couvertes. Concrètement, qu’attendez-vous des réflexions que vous avez lancées ? Avant, les gens ne venaient pas habiter à la campagne parce qu’il n’y avait pas d’école, pas de commerces ; maintenant, parce qu’il n’y a pas le haut débit, pas la téléphonie mobile… (Approbations diverses)
En ce qui concerne les transports, le passage du seuil d’assujettissement des entreprises au versement transport de 11 à 9 salariés est un mauvais coup pour les collectivités engagées dans des services de transport en milieu rural. Il y a une compensation pour cette année, mais aucune promesse pour les années suivantes ; or nous devons nous projeter dans l’avenir.
Un dispositif financier était prévu pour la création de communes nouvelles. Un report du délai au 31 décembre 2016 est-il à l’étude ?
Enfin, où en est-on de la remise à plat des incitations liées au classement en zone prioritaire ?
M. Jacques Krabal. Merci de votre présence, monsieur le ministre. La ruralité, dont votre ministère s’occupe, ce sont des espaces, des natures et des paysages ; c’est aussi une agriculture en crise ancienne, grave et profonde. La ruralité est dès lors elle-même en crise – je ne veux pas parler de déclin, car il y a dans nos communes rurales une hausse démographique. Le fait urbain, la métropolisation, la création des villes-monde étaient présentées il n’y a pas si longtemps comme l’alpha et l’oméga de l’aménagement planétaire : la concentration urbaine était belle alors. Nous payons aujourd’hui le prix fort de ces orientations. Nous devons donc réaffirmer ici que le fait rural, c’est l’identité de la France, comme le dit si bien Fernand Braudel.
La ruralité souffre, mais comment pourrait-il en être autrement, quand le chômage y est massif, quand les services publics et les commerces continuent de partir alors que la population des rurbains augmente, quand les transports collectifs sont presque absents et qu’il faut deux voitures pour aller au travail, quand on prend le train pour aller au travail de plus en plus loin – à Château-Thierry, 5 000 personnes se rendent tous les jours à Paris – mais que les infrastructures ferroviaires et routières sont fragilisées, ce qui menace nos PME, quand l’accès à la culture est limité, quand l’accès à l’enseignement supérieur est plus difficile, quand l’eau même est bien plus chère puisque son prix peut atteindre les 9 euros le mètre cube ? La colère du monde rural ne se manifeste pas encore dans la rue, même si des mouvements « Ruralité debout » apparaissent ici ou là. Mais le mécontentement s’exprime dans les urnes : 19 637 communes parmi les plus petites ont mis l’extrême droite en tête de leurs suffrages lors du premier tour des élections régionales.
Certes, l’année 2015 a été riche en annonces et en réalisations, vous l’avez dit. Tout cela est bien. Mais il faut aller plus loin, car ces actions sont encore insuffisantes pour arrêter le déclin et la perte de confiance. Il faut donc manifester une volonté forte d’innovation. Le très haut débit constitue un enjeu majeur pour assurer l’attractivité de nos territoires ruraux. À chaque fois, nous avons entendu les mêmes promesses, et retrouvé les mêmes failles. Les territoires ruraux, auxquels j’entends que vous êtes attentifs, ont été laissés sur le bord de la route. La loi pour une République numérique devait pourtant être un atout pour la ruralité en favorisant le télétravail ou l’accueil de nouvelles entreprises. L’accès à la fibre optique est prioritaire et urgent. L’Aisne, département défavorisé, a figuré parmi les dix départements éligibles au fonds de soutien de l’État. La première tranche d’aménagement numérique s’élève à 150 millions d’euros : 38,4 millions sont versés par l’État, mais après la participation des conseils départemental et régional, il reste 46,7 millions pour les autres collectivités. C’est très injuste : les opérateurs ne demandent rien aux collectivités urbaines, mais les ruraux doivent payer.
Vous avez raison de refuser l’opposition entre territoires urbains et ruraux, mais où est l’égalité territoriale ? Nous avons demandé des réponses au Gouvernement, mais nous les attendons toujours. Ce n’est pas acceptable. Une deuxième tranche est prévue, et les collectivités locales ne pourront pas continuer de payer. Nous demandons votre appui face à cette discrimination forte.
Vous avez évoqué la politique de la ville : je souhaiterais qu’un dispositif similaire aux contrats de ville soit instauré pour la ruralité.
Quel avenir, monsieur le ministre, pour les PETR ?
Si nous voulons éviter la catastrophe politique en 2017, il faut agir vite pour notre ruralité. Monsieur le ministre, comme l’écrivait Jean de La Fontaine, « on tient toujours du lieu dont on vient » : la France vient de la ruralité ; ne l’oublions pas.
M. François-Michel Lambert. Merci, monsieur le ministre, de cette intervention. J’ai pu apprécier votre action lors de votre récente visite à Marseille, où vous avez rencontré les responsables de la métropole Aix-Marseille-Provence. Celle-ci compte 92 communes, dont certaines sont des plus rurales, ne comptant que 200 à 300 habitants : cette métropole est unique par son alliance d’une densité urbaine forte, d’un tissu industriel remarquable et de territoires périurbains et ruraux, qui doivent comprendre la perspective dans laquelle ils pourront s’inscrire.
Au cours des trois années de mise en place de la métropole, un effort important a d’ailleurs été consenti pour convaincre les maires, fortement opposés dans un premier temps, et qui semblent aujourd’hui prêts à aller de l’avant.
L’État, dont vous avez rappelé la volonté d’accompagner la construction de la métropole, va exceptionnellement abonder les budgets de fonctionnement. Élu de la métropole moi-même, je comprends bien qu’elle doit prendre sa part de l’effort ; en contrepartie de l’aide apportée, l’État attend une action, des décisions, un engagement politique, une transformation du territoire. Lors de votre venue à Marseille, vous avez esquissé quelques idées mais vous n’avez pas donné votre vision, la laissant aux bons soins de la gouvernance locale. Pouvez-vous préciser les projets du Gouvernement ? Comment imaginez-vous l’avenir de la métropole Aix-Marseille-Provence, qui doit résoudre les problèmes d’espaces urbains mais aussi ruraux ?
M. Gabriel Serville. Monsieur le ministre, Mme Marylise Lebranchu, alors ministre de la décentralisation, avait en novembre 2015 reconnu que la moyenne des parts figées de la DGF par habitant est trois fois inférieure dans les communes des DOM à ce qu’elle est en métropole. Si les communes de Guyane pourraient se sortir relativement bien de la réforme du mode de calcul de la DGF, l’augmentation programmée des dotations n’est pas à la hauteur des enjeux, notamment au regard de la superficie de la Guyane. En effet, un mécanisme de tunnel empêche les communes de voir leur dotation augmenter de plus de 5 % par an, ce qui fausse le nouveau calcul de la dotation de ruralité.
Ce nouveau calcul inadapté aux spécificités ultramarines ne permettra pas de relever les défis qui se présentent à nous, notamment en termes d’infrastructure. Mme Marylise Lebranchu avait déclaré à ce propos que « chacun s’accordera à reconnaître qu’il y a là une injustice qu’il faut corriger, sinon les élus d’outre-mer ne réussiront pas à rattraper des retards qui sont dommageables au pays tout entier ». Force est de constater que la réforme ne tient pas compte de ces problèmes, alors que les communes de Guyane sont confrontées à une crise financière de plus en plus grave, qui se propage à l’économie locale et a de fortes répercussions sur le climat social. De nombreuses propositions ont pourtant été faites en commission au Sénat. À titre d’exemple, je rappellerai qu’en Guyane, l’État s’exonère du paiement de la taxe foncière sur son domaine forestier et que la dotation superficiaire est plafonnée.
Monsieur le ministre, qu’envisagez-vous pour mettre fin à ces discriminations à l’égard des communes guyanaises ?
M. le président Jean-Paul Chanteguet. Nous écoutons maintenant les questions des députés.
M. Alain Calmette. Il existe, aujourd’hui, parmi les géographes et les universitaires, un débat sur les effets de la métropolisation sur les zones rurales : entraîne-t-elle leur exclusion, ou bien au contraire engendre-t-elle un nouveau développement ? Il y a un peu des deux, bien sûr. Mais il y a surtout des ruralités différentes.
Dans certains espaces, certes peu nombreux, on observe une déprise démographique – dix départements en France continuent de perdre des habitants – et un vieillissement ; éloignés des métropoles, ils ne peuvent profiter du rayonnement de celles-ci. Le prochain CIR ne pourrait-il être l’occasion de se pencher sur ces zones, qui méritent un traitement spécifique ? Ces endroits ont besoin de services publics, d’une présence de l’État plus forte qu’ailleurs. On pourrait imaginer pour eux, et pour eux seuls, des contrats ruraux de développement, à l’image des contrats de ville. Des critères très stricts permettraient d’éviter le saupoudrage et de se concentrer sur quelques zones, rares, en voie de déshérence.
M. Gérard Menuel. Aménagement du territoire, ruralité, collectivités territoriales : c’est tout un programme ! Votre diagnostic m’a paru bien optimiste. La ruralité est malade et les campagnes se désertifient rapidement. C’est un phénomène qui a des causes. Ainsi, le réseau ferroviaire capillaire est complètement abandonné, et on demande aux entreprises de cofinancer sa remise à niveau : c’est une double peine pour les entreprises rurales. Le transport ferroviaire de voyageurs va mal, et l’on voit que les investissements nécessaires aux lignes d’équilibre du territoire n’ont pas été faits. Nous attendons depuis trente ans l’électrification de la ligne Paris-Troyes : il faudrait 230 millions d’euros, dont nous n’avons pas le premier euro. Aujourd’hui, le service est déplorable, avec des retards quotidiens et un matériel hors d’âge.
Vous avez annoncé votre intention de travailler avec les collectivités territoriales, mais après la purge qu’elles ont subie, on ne peut que constater une forte baisse des investissements. Souvent, seuls ceux qui concernent le handicap demeurent. Monsieur le ministre, vous devez peser sur le Gouvernement pour qu’il revienne sur la chute des dotations !
Vous avez évoqué le rôle dans le passé de la DATAR. N’avons-nous pas besoin aujourd’hui d’une réflexion nationale sur l’aménagement du territoire ? Une fracture ne s’ouvre-t-elle pas entre les métropoles et les autres territoires ?
M. Yannick Favennec. La réforme des zones de revitalisation rurale devrait s’appliquer à partir de juillet prochain ; elle prévoit que le classement en ZRR se fera désormais au niveau des EPCI, en usant de critères de densité et de revenus des ménages. Ce nouveau dispositif va entraîner une diminution du nombre de communes classées en ZRR : ainsi, une commune située à trente ou quarante kilomètres d’une ville moyenne, qui devient son chef-lieu intercommunal, perdra ce statut, ce qui aura des conséquences dramatiques pour ces territoires, pour leur économie, pour leurs emplois. Ces communes ne pourront plus, par exemple, compenser les hausses de dépenses des établissements d’accueil de l’enfance.
Dans les départements ruraux de France, le revenu moyen des habitants est beaucoup plus bas que la moyenne nationale ; le dispositif ZRR permet à ces territoires de demeurer viables et habités, parfois organisés autour de centres-bourgs offrant des services à la population, et engagés dans des actions de dynamisation.
Sans contester le principe même des regroupements intercommunaux, dont les avantages sont réels, il faut souligner que les EPCI ne pourront pas compenser les pertes de statut ZRR par certaines communes. Que pensez-vous de ce sujet ?
Je souhaite également appeler votre attention sur le problème des fermetures de classes dans les écoles situées en ZRR – même si cela relève plutôt des compétences de votre collègue ministre de l’éducation nationale. Dans ma circonscription, une fermeture de classe est ainsi envisagée parce que l’inspection d’académie refuse de tenir compte des enfants de moins de trois ans. Or, dans un arrêt rendu le 14 août 2008 à propos de la décision du tribunal administratif de Pau concernant la fermeture décidée de l’école maternelle de Luz-Saint-Sauveur, dans les Hautes-Pyrénées, le Conseil d’État a confirmé la priorité de la scolarisation des enfants de moins de trois ans sur les territoires classés en ZRR. Le juge administratif du tribunal de Pau a considéré que les critères socio-économiques des ZRR caractérisent un environnement social défavorable, et qu’en conséquence la scolarisation des enfants de moins de trois ans constitue une priorité sociale. Les implantations scolaires de ces zones doivent donc intégrer l’ensemble des enfants scolarisés de moins de trois ans dans leurs effectifs et les prévisions d’effectifs pour les années à venir. Quel est votre avis sur cette question, monsieur le ministre ?
M. Olivier Falorni. Je voudrais revenir sur la réforme de la DGF. Un rapport sur sa seconde mouture devrait être remis dans quelques mois ; j’espère que nous pourrons aboutir à un consensus, et que la réforme s’appliquera en 2017. Cette nouvelle dotation reposera sur trois composantes : une dotation par habitant, similaire dans toutes les communes, une dotation spécifique pour les villes-centres, et une dotation destinée aux communes rurales. Le calcul sera simplifié, mais les détails restent à définir.
Les élus locaux, vous ne l’ignorez pas, s’alarment de la baisse des dotations et de la hausse des charges nouvelles qui leur sont imposées. Ils souhaitent plus de justice pour faire face aux contraintes spécifiques de chaque territoire.
Maintenant que les nouveaux schémas départementaux de coopération intercommunale (SDCI) sont connus, pourriez-vous nous indiquer les pistes de travail retenues pour arriver à un consensus sur la compensation des charges de centralité, sur l’attribution d’une dotation minimale ou encore sur la prise en compte d’un coefficient d’intégration fiscale et d’un effort fiscal ?
M. Gilles Savary. Merci, monsieur le ministre, de cet exposé très complet sur le monde rural que vous connaissez mieux que tout autre pour avoir été président du conseil général de l’un des départements les plus ruraux de France.
Les départements vivent, en matière d’aides directes à l’économie, une période de transition : la clause de compétence générale a pris fin au 1er janvier dernier, mais les régions n’attribuent pas encore ces aides, à la création d’entreprises par exemple. De nombreux dossiers sont en attente. Or les financements attendus sont entrés dans les plans de financement de ces entreprises.
S’agissant des centres-bourgs, la politique gouvernementale est très encourageante, mais nous avons un énorme travail devant nous. Il nous manque un instrument : l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) n’a pas de pendant rural, et il est peu probable que l’État ait les moyens d’en créer un. Envisagez-vous néanmoins un rapprochement avec les entreprises sociales de l’habitat afin de mener des réhabilitations dans ces centres-bourgs ? Cela permettrait de préserver le patrimoine ancien, mais aussi de créer un habitat mixte, à la fois social et classique.
S’agissant enfin des zones périurbaines, je voudrais reprendre ce qu’a dit notre collègue Alain Calmette : une différenciation des politiques rurales est indispensable. En zone périurbaine, nous avons besoin d’une coopération entre métropole et zones rurales périphériques, puisqu’elles vivent en osmose – les unes fournissant globalement la main-d’œuvre et l’autre les emplois. Mais les retombées économiques doivent être partagées.
Nous avons également besoin d’une coordination administrative entre régions, départements, État, inspections académiques et agences régionales de santé, afin d’anticiper les évolutions démographiques : on voit trop souvent des services publics qui se retirent alors que la population augmente, ce qui impose de nouveaux investissements quelques années plus tard.
M. Jean-Marie Sermier. Je ne sais, monsieur le ministre, si ce sont vos origines méridionales ou votre appartenance au parti radical qui vous donnent cet optimisme ; mais il faut une bonne dose de courage pour imaginer une évolution positive de la ruralité. Celle-ci, cela a été dit, souffre, et le vote extrême aux élections en est un indicateur terrifiant.
Les dotations ont baissé de façon très brutale ; pour la ville de Dole et son agglomération, cela représente une perte de 3 millions d’euros entre 2013 et 2016. Il est impossible d’assurer les mêmes services qu’auparavant.
Vous avez dressé une liste de mesures intéressantes, mais qui souvent ne font que reprendre des politiques déjà existantes, et presque toujours avec des crédits en baisse. Le fonds de soutien à l’investissement, doté d’un milliard d’euros, est une très bonne chose, et notamment les fonds spécifiquement destinés aux centres-bourgs. Cela répond à une vraie attente. Pensez-vous pouvoir abonder ce fonds une nouvelle fois en 2016 ?
M. Stéphane Demilly. « Qui veut la peau de la ruralité ? » Tel était le titre, certes un peu provocateur, d’un dossier de la Lettre du cadre territorial. Si je suis conscient que des actions ont été engagées par les différents gouvernements, force est de constater que la ruralité passe souvent au second plan.
Depuis que je suis député, j’interviens régulièrement sur la lutte contre les zones blanches et contre les déserts médicaux. Sur ces deux sujets, je peux reprendre quasiment tel quel le discours que je tenais il y a quinze ans : les enjeux sont toujours les mêmes, et le sentiment d’abandon des habitants de nos campagnes n’a jamais été si fort.
Lorsque les grandes villes sont équipées du très haut débit et bénéficient d’une couverture 4G, nombre de nos villages ne se voient encore proposer qu’une connexion ADSL plus que poussive – insuffisante, par exemple, pour remplir en ligne sa déclaration d’impôts – et un réseau mobile calamiteux – insuffisant pour appeler les services fiscaux et leur signaler que l’on n’arrive pas à déclarer ses impôts en ligne.
Il en va de même pour la santé : nos équipes municipales peinent à trouver des médecins pour faire face aux départs en retraite, et les distances pour accéder aux professions médicales ne cessent de s’allonger.
Sur ces deux sujets, on nous demande de la patience. Mais la patience de nos administrés est épuisée, comme le montrent les douloureux résultats électoraux récents – cela a été dit.
Comment comptez-vous agir, monsieur le ministre, pour que le Gouvernement passe enfin la seconde ?
M. Jean-Louis Bricout. Dans le cadre de l’examen du projet de loi Travail, un amendement tendant à étudier la possibilité de prolonger les emplois d’avenir au-delà de trois ans a été adopté en commission des affaires sociales.
Ces contrats ont souvent permis aux collectivités, notamment rurales, de proposer à des jeunes des emplois durables et à plein-temps, les faisant ainsi accéder à l’autonomie et au droit commun, mais aussi à une formation professionnelle complémentaire. Ils répondent aux besoins des territoires, en particulier dans le secteur de l’animation, en raison de la mise en place des nouvelles activités périscolaires.
Dans le secteur non marchand, il est difficile de consolider ces emplois, notamment pour des raisons financières ; et il est regrettable que l’effort déployé ne puisse pas être concrétisé, alors que ces jeunes sont maintenant formés et opérationnels. À cela s’ajoute un sentiment de frustration pour tous ceux qui auront l’impression d’un retour à la case départ.
La prolongation doit bien sûr s’inscrire dans le cadre d’un véritable projet. Mon amendement proposait plusieurs solutions, parmi lesquelles la prolongation jusqu’à cinq ans avec une aide dégressive au cours des deux dernières années, afin d’éviter une rupture brutale.
Que pensez-vous, monsieur le ministre, de cette proposition ?
S’agissant des centres-bourgs, le dispositif mis en place il y a deux ans fait ses preuves, je le vois dans ma ville. Il présente toutefois un inconvénient majeur : les subventions de droit commun sont souvent fléchées, ce qui impose de remplir de multiples dossiers, et la voirie est souvent exclue. C’est pourtant un aspect majeur de la requalification urbaine.
S’agissant enfin du numérique, lorsque l’on sort d’une logique de service universel pour entrer dans une logique de marchandisation, c’est toujours la ruralité qui trinque : les opérateurs ne s’intéressent qu’au retour financier. Les grandes villes n’ont rien à payer ; mais les contribuables ruraux doivent mettre la main à la poche. C’est extrêmement frustrant.
Je rejoins également ce qu’ont dit mes collègues sur la nécessité de politiques différenciées en fonction des ruralités. Il y a une ruralité subie et une ruralité choisie.
M. Guillaume Chevrollier. Alors que nos territoires ruraux sont frappés par la crise économique et agricole, je tiens à relayer l’exaspération que suscite la fracture numérique parmi les citoyens et les élus locaux. Le Gouvernement annonce moult plans, mais les zones blanches persistent, provoquant un mécontentement légitime dans les 237 communes concernées. Dans de nombreuses autres communes, le réseau demeure nettement insuffisant. Dans ma circonscription, en Mayenne, plus d’une vingtaine de communes sont concernées. Il en résulte une inégalité pesante pour les habitants, à l’heure où la téléphonie et l’accès à internet sont devenus indispensables ; je vous remercie d’apporter à ce problème des solutions concrètes.
D’autre part, alors que les collectivités locales se trouvent dans une situation financière extrêmement difficile, je souhaite me faire l’écho du mécontentement de certains maires concernant la dotation d’équipement aux territoires ruraux. En effet, jamais les élus n’ont été autant incités à engager des travaux pour relancer l’économie et faire diminuer le chômage, mais il est souvent opposé aux demandes de DETR toutes sortes d’arguments justifiant que la dotation est finalement refusée ou n’est accordée que partiellement. Comment pouvez-vous dans ces conditions pousser nos communes à s’endetter, alors que le pays croule déjà sous les dettes ? À preuve, je n’ai jamais reçu des collectivités autant de demandes de contribution au titre de ma réserve parlementaire. De surcroît, les collectivités doivent appliquer les dispositions de la loi NOTRe (loi portant nouvelle organisation territoriale de la République), qui n’ont nullement pour effet de simplifier les choses, loin s’en faut. Les élus, monsieur le ministre, réclament davantage de cohérence afin que la ruralité développe tout son potentiel.
M. Philippe Plisson. La loi NOTRe fait suite à la loi sur les métropoles (loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, dite MAPTAM), qui faisait elle-même suite à la loi de réforme des collectivités territoriales ; toutes partageaient l’objectif commun de rationaliser les collectivités pour en améliorer l’efficacité. J’ai activement participé à l’avancement de ces chantiers en qualité de président d’intercommunalité, car je suis convaincu que l’avenir du monde rural passe par le renforcement de l’intercommunalité, laquelle est susceptible de fournir des services identiques à ceux de la commune tout en organisant le développement de l’économie et du tourisme.
En tant que rapporteur de la commission départementale de la coopération intercommunale (CDCI) de la Gironde sur les lois NOTRe et MAPTAM, j’ai défendu les schémas proposés par les préfets concernés, plus ambitieux que les seuils de 5 000 et de 15 000 habitants prévus dans lesdites lois. Las, dans les deux cas, la montagne a accouché d’une souris : les schémas issus des laborieuses tractations politiciennes se rapprochent davantage d’intercommunalités biscornues et minimalistes que de territoires de projets pertinents. Quant à moi, je reste convaincu que l’arrondissement aurait été le meilleur territoire de référence dans tout le pays.
À l’issue de la première consultation des CDCI sur les schémas, ne pensez-vous pas – comme moi – que nous venons une nouvelle fois de manquer une occasion et que le monde rural continuera hélas de regarder passer le train de l’avenir ?
M. Michel Heinrich. Le Gouvernement annonce régulièrement une baisse de 11 milliards des dotations aux collectivités ; en réalité, elle atteindra 28 milliards entre 2014 et 2017, et même 66 milliards sur l’ensemble du mandat municipal – c’est considérable. Êtes-vous conscient que la baisse des dotations atteint des niveaux intolérables, et ce d’autant plus qu’elle se télescope avec la réforme de la DGF ? Cette réforme, précisément, est certes animée par une intention louable, mais la proposition qui nous a été faite l’an dernier était parfaitement aberrante puisqu’elle se fondait sur un diagnostic erroné et, qui plus est, sur une simulation ne portant que sur la seule année 2016.
Sans doute y aura-t-il une réforme de la réforme ; en attendant, est-il raisonnable de faire coïncider la baisse des dotations et la réforme de la DGF ? D’autre part, si réforme de la DGF il y a, vous engagez-vous à la fonder sur des simulations à huit ou dix ans pour lui donner une véritable lisibilité ?
Mme Marie Le Vern. Ma question qui, si elle est d’ordre budgétaire, n’en concerne pas moins la vitalité sociale et économique de nos territoires et de nos communes, a trait à l’une des dernières conséquences néfastes de la suppression de la taxe professionnelle décidée en 2009. En effet, plus de 700 communes ont fait le choix de la fiscalisation de leur contribution syndicale et, depuis cette année, elles ne perçoivent plus de compensation de l’État au titre de la perte de recettes due à la suppression de la taxe professionnelle. Au contraire, les communes qui budgétisent leur contribution sont intégralement compensées, et ce depuis le premier jour.
La situation de ces 700 communes a été traitée à coups d’expédients budgétaires précaires : elles ont bénéficié d’un dispositif de compensation partielle et, surtout, limitée dans le temps. Aujourd’hui, elles n’ont d’autre choix que de reporter cette charge sur la fiscalité, en particulier celle des entreprises en augmentant la cotisation foncière des entreprises (CFE). Au lieu de profiter de la suppression d’une taxe, les entreprises concernées se trouvent donc imposées davantage, au grand désespoir des entrepreneurs mais aussi des maires, car il arrive que lesdites entreprises se délocalisent, parfois à quelques centaines de mètres seulement.
Il en résulte une situation d’iniquité entre les communes, qui craignent le délitement de leur tissu économique. Des arbitrages doivent être pris à Bercy, mais le ministre des finances semble refuser de changer de position. Ces communes, monsieur le ministre, peuvent-elles compter sur votre soutien dans cette négociation, alors que nous entrons dans la période des lettres de cadrage et des conférences budgétaires préalables au projet de loi de finances pour 2017 ?
M. Charles-Ange Ginesy. L’un des errements de la loi NOTRe touche les stations de montagne qui, en 2018, perdront leur dénomination de station de tourisme, ce qui nécessite en retour d’y préserver la qualification des offices de tourisme. Or, ladite loi prévoit le transfert de la compétence touristique aux intercommunalités. Autrement dit, les communes concernées se trouvent dans l’impossibilité de renouveler leur label tourisme.
Je compte sur l’acte II de la loi sur la montagne, que vous venez d’annoncer, pour que soit corrigé ce pan de la loi NOTRe afin que les stations de montagne soient aux commandes de leur propre activité touristique. L’économie des sports d’hiver représente plus de 120 000 emplois et pèse plus de 9 milliards d’euros. Elle doit continuer d’irradier et d’enrichir le monde rural, dont je partage par ailleurs les inquiétudes au sujet de la DGF et de la DETR – les communes de montagne ayant été pénalisées par la répartition des contributions au fonds national de péréquation des ressources intercommunales, le FPIC.
M. Guy Bailliart. Distinguons entre l’abandon et le sentiment d’abandon du milieu rural. Si le sentiment d’abandon est si fort, c’est en raison d’un mouvement de concentration dû au regroupement de petites communes en communes nouvelles – ce qui se traduit par une moindre présence des élus – mais aussi des services de l’État, et même des artisans et professions libérales, qui ont tendance à s’implanter dans des zones d’activités artisanales ou économiques. Soudain, le tissu local est plus lâche. Gardons-nous dès lors de ne pas commettre l’erreur d’oublier, en regroupant les écoles, que certains villages ne vivent plus que de ce seul service !
Le regroupement des syndicats d’eau et d’assainissement est inquiétant. Dans le Calvados, les réseaux ont tous à peu près le même âge : cinquante ou soixante ans. Or, rares sont ceux qui ont été amortis. Lorsqu’il sera nécessaire de les réhabiliter, nous ferons face à un mur, d’autant plus que l’assainissement coûte lui aussi très cher.
Enfin, les services départementaux d’incendie et de secours (SDIS) sont équipés de véhicules différents selon les cas, d’où leur éloignement variable des points d’alimentation en eau. Il semble d’autre part qu’il existe des techniques permettant d’éteindre des incendies en n’utilisant que très peu d’eau, comme c’est le cas en Allemagne ; la méthode utilisée en France, qui consiste à noyer les bâtiments, est-elle vraiment la plus pertinente ?
M. Lionel Tardy. Le Gouvernement s’est engagé à prévoir une exception à la loi NOTRe afin de maintenir les offices de tourisme communaux dans les stations de montagne. Dans quel délai cette mesure sera-t-elle prise, et dans quel véhicule législatif ?
D’autre part, j’ai alerté le ministre de l’agriculture au sujet de l’article D. 125-1 du code forestier, qui prévoit une indemnité annuelle d’occupation de 20 euros par mètre carré ou linéaire pour les réseaux et équipements implantés sous terre sans l’accord écrit des propriétaires ou hors de toute servitude d’utilité publique régulièrement déclarée. Cette disposition peut toucher des réseaux publics communaux issus d’implantations très anciennes, pour lesquelles il est très difficile de retrouver les documents correspondants. Dans ce cas, les communes concernées se trouvent victimes d’une situation dont elles ne sont pas responsables puisqu’elles doivent payer une indemnité dont le montant peut être très élevé. Le Gouvernement étudie-t-il la question ?
Enfin, lors de l’examen de la proposition de loi visant à permettre l’application aux élus locaux des dispositions relatives au droit individuel à la formation, plusieurs d’entre nous avons demandé que soit laissée à tous les maires, y compris ceux de communes de moins de mille habitants, qui en étaient exclus, la possibilité de baisser leur indemnité. Cette proposition sera-t-elle reprise ? Il ne s’agit que l’une des innombrables modifications à apporter pour régler les problèmes posés par la loi NOTRe.
M. Patrick Lebreton. L’aéroport de Pierrefonds est la deuxième plateforme aéroportuaire de l’île de la Réunion. Ouvert au trafic commercial en 1999, cet aéroport est un outil stratégique crucial de développement et d’aménagement de l’ouest et du sud de la Réunion, qui sont les bassins de vie les plus peuplés de l’île – laquelle comptera un million d’habitants dans quinze ans. De plus, il se situe au cœur de la future zone d’activités de Saint-Pierre-Pierrefonds, qui sera un véritable poumon économique.
Or, force est de déplorer que la compagnie régionale, Air Austral – en partie publique – se désengage méthodiquement de cet aéroport, ayant fait chuter le trafic de passagers de près de 45 % depuis 2008 tout en s’efforçant d’empêcher d’autres compagnies de s’y installer. Cet aéroport est désormais en danger de mort imminente, mais la collectivité régionale reste passive.
Je n’attends pas de vous, monsieur le ministre, une solution dès aujourd’hui, mais il me semblait important de vous alerter sur la situation préoccupante de cette infrastructure : l’État doit sauver un aéroport en faveur duquel il s’est fortement engagé financièrement il y a quinze ans à peine. Votre soutien et votre engagement, en effet, seront décisifs dans les mois qui viennent pour appuyer l’ouverture de lignes nouvelles opérées par d’autres compagnies, ou pour y implanter la base de sécurité civile de la zone Sud de l’océan Indien.
M. Jean-Pierre Vigier. Vous avez déjà, monsieur le ministre, répondu avec beaucoup de précision à la question du calendrier de l’acte II de la loi Montagne, que je souhaitais vous poser en tant que membre du comité directeur de l’ANEM. Il reste désormais à respecter cet engagement !
Afin de faire suite aux propos de M. Yannick Favennec, je signale que, pour que les petites communes rurales en ZRR demeurent dans l’intercommunalité, il suffit d’exclure du calcul du zonage les communes de plus de 10 000 habitants, ce qui aurait pour effet de réduire le seuil de densité et de conserver les petites communes au sein de l’EPCI. Cette proposition figurait dans le rapport que M. Alain Calmette et moi-même avons rendu sur les ZRR.
Mme Viviane Le Dissez. Les petites communes du rétro-littoral peinent à concilier développement et préservation en raison de la loi Littoral. Certes, c’est un texte important pour la préservation de nos sites, mais il fait peser de lourdes contraintes sur les citoyens et sur les élus. Une circulaire du 7 décembre dernier apporte quelques éclairages sur son application ; c’est un premier pas très encourageant. Pour autant, la jurisprudence a souvent valeur de loi, ce qui fragilise les projets de ces petites communes et inquiète leurs élus. Cette circulaire ne répond pas à toutes les attentes. De ce point de vue, la collaboration entre les services déconcentrés et les services centraux est utile pour éclairer la population et les élus. De surcroît, tout ce pan de l’aménagement du territoire doit être pensé en tenant compte de l’élévation du niveau de la mer.
L’échelon communal est peut-être le plus propice ; sans doute faut-il encore aller plus loin et envisager d’autres plans que les seuls plans d’urbanisme. Quelles sont, monsieur le ministre, les méthodes permettant aux élus locaux de transformer ces contraintes en atouts ?
M. Jean-Jacques Cottel. Dans ma circonscription se trouve une communauté de communes rurales de taille modeste qui doit cette année faire face à une baisse de dotations d’un montant de 300 000 euros, soit 30 % de son budget. Il est temps de faire une pause : les intercommunalités ont beau mutualiser et faire tout leur possible pour demeurer efficaces et bien gérées, elles ne le peuvent plus dans ces conditions.
D’autre part, il faut donner aux bourgs-centres la possibilité d’être attractifs, car ce sont les moteurs de notre ruralité. De ce point de vue, nous attendons beaucoup de la nouvelle DGF, pour aboutir à un meilleur équilibre sur le territoire. En matière de logement, par exemple, les bourgs-centres peuvent être attractifs – à condition que les logements soient bien isolés. Or, je constate que les bailleurs sociaux publics sollicitent de moins en moins le parc locatif en milieu rural.
Dans ces zones rurales, tous les services publics – scolaires ou médicaux, par exemple – ont leur importance. Je me contenterai d’aborder la question de La Poste, qui souhaite transformer ses bureaux en agences postales. Or, cette méthode ne fonctionne pas toujours, et les élus ont parfois du mal à l’appliquer. N’est-il pas possible de préserver le service postal en milieu rural lorsqu’il ne reste plus que lui ?
Enfin, les communes nouvelles sont-elles une bonne solution et si oui, comment en favoriser la création ? L’incitation financière est inefficace ; comment faire preuve de davantage de pédagogie pour donner envie aux élus d’envisager cette voie ?
Mme Catherine Quéré. Dans le cadre de la réforme territoriale, certaines intercommunalités, en particulier celles de moins de 15 000 habitants, devaient fusionner avec une ou plusieurs autres entités pour constituer des territoires pertinents. En Charente-Maritime, une seule communauté de communes, celle du canton de Gémozac, était concernée. La CDCI a travaillé sur la base d’un schéma proposé par l’État qui visait à unir la communauté de communes de Gémozac à une autre communauté, celle de Charente-Arnoult, dont le tracé est aberrant, et à obliger une petite commune à adhérer à la nouvelle communauté afin d’en préserver la continuité territoriale. Pourtant, tout – l’histoire, la géographie, le bassin de vie, l’économie, l’emploi, les services et les élus – plaidait en faveur de l’union entre les intercommunalités de Gémozac et de Saintes. Or, dans un arrêté du 31 mars 2016, le préfet de Charente-Maritime a au contraire décidé la fusion de l’intercommunalité de Gémozac avec celle de Charente-Arnoult, au détriment – entre autres – de la petite commune de Saint-Romain-de-Benet.
Cette fusion est contraire à l’intérêt des territoires et des habitants de la Saintonge. La communauté d’agglomération de Royan refusait de perdre une commune, laquelle souhaitait y demeurer ; d’autre part, la communauté de Saintes était prête à accueillir Gémozac. Autrement dit, personne n’est satisfait. La rumeur dit qu’une révision de cette mesure est envisageable. Comment, monsieur le ministre, l’État peut-il ne pas revenir sur une telle décision ?
M. Jean-Michel Baylet, ministre de l’aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales. Je vais répondre à toutes les questions dans l’ordre. Mais je regrette la forme de cette audition et je vous conseillerais une autre organisation qui soit plus efficace.
C’est, monsieur Florent Boudié, le gouvernement de M. Michel Rocard qui, pour ne laisser personne au bord du chemin, a créé un revenu de solidarité destiné aux plus démunis : le revenu minimum d’insertion – j’insiste sur ce dernier terme –, à la charge de l’État. En 2004, le gouvernement de M. Jean-Pierre Raffarin a décidé de décentraliser le RMI, devenu ensuite le revenu de solidarité active, le RSA. Au fil du temps, hélas, ce RSA a gagné en volume au point que le reste à charge incombant à certains départements leur est désormais insupportable. C’est pourquoi ces départements ont sollicité la solidarité de l’État, qui a consacré un fonds de 50 millions d’euros à ceux d’entre eux qui rencontrent les difficultés les plus graves – 11 millions sont ainsi accordés au Nord.
D’autre part, l’assemblée des départements de France (ADF) a demandé la recentralisation du RSA. Le Gouvernement y a fait droit, en acceptant l’exigence des départements de conserver les recettes dynamiques que sont les produits des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) et de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE). La discussion s’est alors engagée sur l’année de référence : lors de la décentralisation du RMI, c’est l’année précédente qui avait été retenue. Le Gouvernement a donc proposé de retenir 2016, puisque la recentralisation aura lieu en 2017, mais une délégation de l’ADF, conduite par M. Alain Lambert, a fait de 2014 une exigence impérative. Les négociations se sont alors interrompues, jusqu’à ce que l’ADF constitue une nouvelle délégation conduite par M. Albéric de Montgolfier : nous avons convenu de constituer des groupes de travail composés des directeurs de cabinet du ministre des affaires sociales et du ministre du budget, de mon directeur de cabinet et du directeur de l’ADF. La discussion se poursuit, quoiqu’elle se soit compliquée depuis la décision du Premier ministre d’élargir le RSA au RSA jeune, d’où une charge supplémentaire qui rend la recentralisation nécessaire. Entre-temps, M. Christophe Sirugue a rendu un rapport remarquable prônant la recentralisation et l’obligation d’insertion.
À ce stade, la position du Gouvernement est la suivante : mieux vaut recentraliser le RSA, car l’accumulation des fonds d’urgence coûterait tout aussi cher – le RSA équivalant à 700 millions par an. Cette recentralisation ne saurait toutefois se faire à n’importe quelle condition : la politique d’insertion, abandonnée, doit être relancée. Le rapport de M. Christophe Sirugue met en effet en lumière la nécessité de préserver un « RSA socle » pour les personnes – handicapées par exemple – dont on sait qu’elles ne retourneront pas dans l’emploi et, parallèlement, de déployer un « RSA utile » qui retrouve sa vocation initiale d’insertion sur le marché du travail, étant entendu qu’il faudra l’assortir d’un ticket modérateur visant à éviter tout abus.
L’ADF tenant son assemblée générale le 22 juin, la négociation doit s’achever le 15 juin. Toutefois, elle n’est pas facilitée par les divisions qui existent au sein de la majorité – de droite – de l’ADF, puisque 34 des 60 départements qui la composent ont annoncé leur désaccord avec la recentralisation depuis que le Gouvernement l’a acceptée.
J’en viens à la réforme de la DGF. Elle devait entrer en vigueur en 2016 mais, compte tenu des divergences de points de vue des uns et des autres, elle a été reportée à la loi de finances pour 2017. J’ai, dès mon entrée en fonction, ouvert avec l’ensemble des associations d’élus un dialogue d’abord bilatéral, puis multilatéral, auquel le comité des finances locales a été associé. Chacune a convenu de la nécessité de la réforme, mais toutes ont demandé que l’on se contente en 2017 de la réforme de la péréquation pour n’appliquer celle de la DGF qu’en 2018. Dans le même temps, la commission des finances de l’Assemblée nationale et celle du Sénat ont chacune constitué un groupe de travail transpartisan sur la DGF, avant de les fusionner. J’ai pu constater que l’un comme l’autre acceptait la nécessité de la réforme, mais qu’il existait au moins autant de visions de cette réforme que de parlementaires. Or, in fine, c’est au Parlement qu’il reviendra de voter.
Nous travaillons donc à trouver un consensus, mais je ne vous cache pas que c’est là une tâche extrêmement difficile : entreprendre une telle réforme en année préélectorale ne facilite pas les choses, a fortiori quand les points de vue sont si variés. Au moins pouvons-nous être sûrs que la réforme, si elle aboutit, ne sera pas celle qui était initialement prévue ; je ne peux d’ailleurs pas encore vous en donner la teneur précise. Quant à la loi spécifique que réclament les collectivités, elle n’est pas absurde en soi, mais elle suppose de revoir l’ensemble du mécanisme budgétaire, et la période ne s’y prête guère.
Ma vision prospective de la relation entre les villes et les campagnes est globale : les métropoles urbaines ont leurs propres missions, dont la solidarité avec l’espace périurbain et l’espace rural, y compris en matière d’ingénierie territoriale, comme cela se pratique déjà dans certaines régions ; l’espace périurbain, s’il est lié par nature à l’espace urbain, poursuit son extension ; quant à la ruralité, au sujet de laquelle on m’a reproché mon optimisme alors que le vote en faveur du Front national y progresse, je rappelle qu’elle a été abandonnée pendant dix, voire quinze ans, et que c’est de cette situation dont nous avons hérité ! Peut-être les mesures que nous prenons provoquent-elles chez moi un enthousiasme excessif, mais c’est tout de même la première fois que les services publics, qui avaient disparu du monde rural, s’y implantent de nouveau via les maisons de services au public – un millier d’entre elles ont été créées cette année, autant le seront l’an prochain et elles suscitent un véritable engouement. De même, nous résolvons le problème des maisons de santé. Convenez que les choses ont donc bien changé en quelques années !
Je souhaite la création de nombreux pôles d’équilibre territoriaux et ruraux, car ils ont toute leur place à prendre dans la relation de complémentarité entre l’État, les régions et les intercommunalités.
Nous avons demandé, monsieur Julien Aubert, la réalisation d’un schéma d’accessibilité aux services publics dans chaque département. Ils sont en cours d’élaboration sous la codirection du président du conseil départemental et du préfet. Se pose en effet la question des services publics dont la fermeture est programmée pendant la réalisation de ces schémas ; sans doute les préfets devraient-ils avoir le pouvoir d’expliquer aux services de l’État qu’il convient de suspendre de telles fermetures pendant cette période, sans quoi les schémas en question perdent leur raison d’être.
Vous m’avez reproché le saupoudrage des mesures, mais l’effort de 1 milliard que nous déployons est loin d’être dispersé : 500 millions sont consacrés à l’investissement et 300 millions aux centres-bourgs. Conjuguées avec la DETR existante et la DETR supplémentaire, ces politiques portent leurs fruits et, selon les préfets, ont déjà permis la réalisation de nombreuses opérations qui, sans elles, auraient été abandonnées.
Il est vrai que les cantons ont été agrandis. Vous n’ignorez pas que je n’étais pas moi-même convaincu par cette mesure, mais c’est ainsi : la loi de la République s’applique à tous. Néanmoins, chaque canton est représenté par deux conseillers départementaux, ce qui doit permettre d’en couvrir tout le territoire.
À la demande du Président de la République, je travaille actuellement sur la question des normes et des obligations, au sujet de laquelle j’ai récemment reçu M. Alain Lambert. Je rappelle que le dernier comité interministériel aux ruralités s’est soldé par la suppression de dix-huit normes, et que je m’apprête à proposer d’autres suppressions lors de sa prochaine réunion. Cependant, nous devons collectivement veiller à ne pas ajouter des normes là où d’autres ont été supprimées – car nous avons beau vitupérer contre l’abondance des normes, la tendance à accepter les demandes des lobbies est tenace…
La politique du centre-bourg, monsieur le député, ne se limite pas à en améliorer l’esthétique ; elle s’inscrit dans le traitement non seulement de l’espace public, mais aussi des problématiques commerciales et du logement, comme l’illustre la remarquable opération de revitalisation que votre collègue M. Jacques Lamblin a lancée à Lunéville. Les fonds consacrés aux centres-bourgs servent à financer une action globale, et non pas seulement la modernisation de l’espace public.
Il est vrai, monsieur Charles Ange Ginesy, que se pose la question des hôpitaux ruraux et des écoles rurales en zone de montagne. J’y travaille avec Mme Najat Vallaud-Belkacem, et nous aurons l’occasion d’y revenir lors de la préparation de la nouvelle loi sur la montagne.
J’en viens aux finances des collectivités territoriales, monsieur Bertrand Pancher. En 2012, la situation des finances publiques n’était guère enviable ; l’État a décidé de consentir des efforts et demandé aux collectivités d’y participer, à hauteur de 11 milliards d’euros – et non pas de 28 milliards comme je l’ai entendu – sur trois ans. Nous franchissons actuellement la troisième marche qui est la plus difficile : un effort de 3,7 milliards d’euros est demandé aux collectivités. Les associations d’élus ont demandé un lissage de cet effort ; la question est ouverte et le Président de la République lui-même y répondra lors du prochain congrès des maires. Tout effort abandonné ici devra néanmoins être consenti ailleurs, car nous ne saurions renoncer à la politique de redressement des comptes publics qui, qu’on le veuille ou non, commence à porter ses fruits, puisque notre déficit budgétaire est passé de 7 % du PIB en 2010 à 5,5 % en 2012 et à 3,2 % aujourd’hui. Nous avons réussi à éviter que la dette publique n’atteigne 100 % du PIB, ce qui aurait été catastrophique. L’économie locale ressent les premiers effets de cet effort.
Je suis convaincu que nous pouvons réaliser des économies sans casser les services publics. Les EPCI, qui ont désormais atteint une masse critique suffisante, ont précisément été conçus pour mutualiser de nombreux services et exploiter d’importants gisements d’économies – et non pour ajouter une nouvelle strate administrative.
S’agissant de la téléphonie mobile, la couverture en 2G sera achevée avant la fin de l’année, en 3G d’ici la mi-2017 et en 4G en 2022. J’ai demandé à l’ARCEP de revoir les critères de définition des zones blanches. Songez que, lorsque j’ai été élu député en 1978, un tiers des visites reçues dans ma permanence avait pour objet l’installation du téléphone fixe à domicile ! (Sourires) Aujourd’hui, c’est la téléphonie mobile et l’accès à internet qui sont indispensables, car la plupart des démarches élémentaires – fiscales, bancaires, assurancielles – sont dématérialisées. Nous annoncerons de nouvelles mesures concernant cette priorité lors du prochain CIR.
Le Gouvernement a donné un avis défavorable à la proposition de loi que le Sénat a adoptée pour reporter l’application de la loi NOTRe. Il est vrai que cette réforme complexe a été rapide et que certains problèmes locaux persistent, mais leur règlement ne sera pas plus efficace s’il est reporté. Mieux vaut prendre le taureau par les cornes, d’autant plus que trois élections nationales se dérouleront en 2017. Il nous reste huit mois pour résoudre les questions en suspens ; nous ne gagnerons rien à attendre davantage.
La réforme des ZRR s’imposait, car plusieurs communes ne satisfaisaient plus aux critères de qualification, d’où un vide juridique. MM. Jean-Pierre Vigier et Alain Calmette ont commis un rapport sur le sujet, suite à quoi le Parlement a adopté une réforme fondée sur les principes suivants : le classement en ZRR est établi à l’échelle de l’intercommunalité, sa durée est alignée sur celle du mandat municipal et il est défini selon un double critère de faiblesse de la densité de population et de faiblesse du revenu par habitant. Les bénéfices qui en découlent en termes d’exonération fiscale et sociale sont maintenus même en cas de sortie de la ZRR et, dans l’hypothèse où une commune perdrait les bénéfices liés à ce zonage, les entreprises, quant à elles, les conserveraient.
Cette réforme entrera en vigueur le 1er juillet 2017. Depuis son adoption, les EPCI ont été modifiés ; il faut donc en tenir compte. Je ne pourrai vous faire part des résultats définitifs de nos travaux en la matière que le 1er janvier prochain, lorsque les schémas seront connus. En l’état actuel des schémas départementaux, néanmoins, je peux d’ores et déjà vous assurer que la réforme s’appliquera peu ou prou à périmètre constant : 14 165 communes seront classées en 2017 contre 14 410 aujourd’hui, sachant que 4 070 communes sortiront du dispositif et que 3 839 y entreront, sous réserve des quelques ajustements mineurs qui pourront avoir lieu d’ici là. Autrement dit, le nombre de communes classées connaîtra une très légère baisse de 1,7 %, tandis que la population concernée augmentera de 19 %.
L’exclusion des communes de plus de 10 000 habitants a été suggérée ; vous avez tranché contre. Le Gouvernement n’avait pas d’idée arrêtée sur ce point ; s’il faut rouvrir le débat, qu’il le soit, mais encore faut-il qu’un véhicule législatif adéquat se présente. En l’état actuel des choses, je ne peux que vous présenter la situation telle qu’elle est en application des lois que vous votez.
Porté par votre passion, monsieur Jacques Krabal, vous avez évoqué le mécontentement du monde rural avec quelque excès, compte tenu de toutes les mesures que nous déployons. Il va de soi que je vous recevrai volontiers pour aborder la question numérique.
Il a fallu trois années, monsieur François-Michel Lambert, pour créer la métropole d’Aix-Marseille-Provence – une aventure formidable et peu ordinaire, qui fut loin d’être un long fleuve tranquille. Une métropole, a fortiori de cette taille et avec 92 communes, dont de nombreuses communes rurales, doit avoir une vision globale de son action. Elle doit éviter de se balkaniser en petits projets locaux pour bâtir une vision métropolitaine – que je n’ai pas encore constatée sur place, mais il est vrai que cette structure n’en est qu’à ses balbutiements et qu’une volonté d’aller de l’avant existe. L’État continuera d’abonder son budget ; il lui a déjà consacré deux fois 50 millions d’euros, la première fois au titre de la DGF et la seconde au titre du FPIC. Je regrette d’avoir entendu une élue locale juger ces sommes « guignolesques », car elles ont largement encouragé le lancement de projets structurants en matière de mobilité, de numérique, d’économie circulaire. Il va de soi que nous n’abandonnerons pas cette métropole, à la fois urbaine et rurale.
Il est vrai, monsieur Gabriel Serville, que les parts figées de la DGF sont en moyenne plus faibles outre-mer, mais la réforme, si elle aboutit, sera très favorable à la Guyane car elle favorise les collectivités peu denses – et c’est précisément en quoi elle est juste. Le Gouvernement a d’ores et déjà pris des mesures de renforcement de la péréquation, de soutien à l’investissement et d’atténuation de la baisse des dotations outre-mer.
Je suis convaincu, monsieur Alain Calmette, que la métropolisation a un impact bénéfique sur les zones rurales, car elle produit un effet d’entraînement. Comme les agglomérations, la métropole s’étend de plus en plus loin dans l’espace périurbain. Dix départements perdraient des habitants, dites-vous : nous y prêterons une attention particulière lors du prochain comité interministériel aux ruralités, car étant les plus démunis et enclavés, ils méritent d’être soutenus. Quant à votre idée de contrat de ruralité, elle me semble judicieuse et nous pourrons en reparler.
Je vous accorde, monsieur Gérard Menuel, qu’il reste beaucoup à faire pour les zones rurales mais, encore une fois, c’est ce Gouvernement qui, le premier, s’attaque concrètement aux problèmes de la ruralité, qu’il s’agisse de la santé, de l’enclavement des territoires ou de la couverture numérique. S’agissant des transports, une stratégie nationale logistique vient d’être adoptée après concertation entre l’État, les collectivités et les entreprises, et un montant de 15 milliards d’euros lui est consacré. Les contrats de plan État-région signés en 2015 prévoient un effort important des deux parties – mais aussi des départements – en faveur des infrastructures de transport.
La DATAR était une belle administration ; elle n’est plus d’actualité. L’aménagement du territoire relève désormais des collectivités – raison pour laquelle j’ai souhaité rassembler ces deux compétences dans mon ministère. Nous poursuivons notre réflexion avec les régions, comme l’illustre le pacte État-régions.
Concernant les fermetures de classes en ZRR, monsieur Yannick Favennec, je confirme la volonté que la ministre de l’éducation nationale et moi-même avons de créer les conditions les plus favorables aux écoles dans toutes les zones rurales. J’ignorais cet arrêt du Conseil d’État – dont les décisions sont parfois mystérieuses – (Sourires) et je conviens que la fermeture d’une classe en milieu rural est parfois dramatique, mais chacun doit consentir les efforts nécessaires pour que les écoles rurales soient préservées. Il existe, dans certains villages, des écoles où dix enfants seulement sont scolarisés – et ce alors même que les enfants de certains conseillers municipaux sont scolarisés ailleurs ! En clair, chacun doit contribuer à un effort global et structurant, qu’il s’agisse des commerces, des écoles, des collectivités ; l’État ne peut pas tout.
La réforme de la DGF est très ambitieuse, monsieur Olivier Falorni, car la répartition de sa croissance future n’est pas modifiée – contrairement aux réformes précédentes. Il faut davantage tenir compte des charges de centralité, car les villes-centre ont souvent des taux d’imposition plus élevés que les autres ; l’intercommunalité devrait permettre de résoudre le problème. Les associations de collectivités demandent la prise en compte du critère d’effort fiscal ; le comité des finances locales s’est saisi de ce sujet complexe.
S’agissant des compétences économiques des départements et des régions, monsieur Gilles Savary, l’année 2016 est une année de transition pour les structures d’aide au développement. Les régions et les intercommunalités disposent de plus de six mois pour régler les problèmes en suspens – la Normandie et les Pays de la Loire l’ont déjà fait – sachant que les aides déjà engagées ne sont pas affectées. Je sais que le président de votre grande région s’inquiète beaucoup à ce sujet, mais je suis convaincu qu’un peu de bonne volonté et de détermination suffira à lever ses doutes. D’autre part, il est possible de signer des conventions avec les régions sur les aides à l’agriculture et à la pêche, de même que des délégations sont envisageables avec les EPCI concernant l’immobilier d’entreprise. Quant à la coordination administrative dans l’espace périurbain, elle se fait de la meilleure des manières autour des préfets de région et de département.
Oui, monsieur Jean-Marie Sermier, nous avons demandé le renouvellement du fonds de soutien à l’investissement – doté d’un milliard d’euros – et nous avons de bonnes chances d’aboutir.
La ruralité n’est pas reléguée au second plan, monsieur Stéphane Demilly. Voici quinze ans que vous tirez la sonnette d’alarme concernant les déserts médicaux et les zones blanches, dites-vous : je n’ai pas souvenir que les premiers étaient une notion répandue à l’époque, ni que les secondes aient même existé puisque la téléphonie mobile n’en était qu’à ses balbutiements. (Murmures)
Nous ne pourrons pas prolonger les emplois d’avenir, monsieur Jean-Louis Bricout : ce dispositif ne doit pas servir aux collectivités à profiter de l’aide de l’État pour financer des emplois sans lendemain, mais à recruter des jeunes pour les garder s’ils donnent satisfaction, conformément à la volonté du législateur – quelles que soient les majorités.
En matière numérique, l’État aurait, il est vrai, dû être plus prudent. La répartition des fréquences – je n’aurai pas la désobligeance de rappeler sous quelle majorité elle a été décidée – n’a pas été assez rigoureuse. Elle s’est faite sans souci de l’aménagement du territoire et les opérateurs, qui sont de grandes entreprises multinationales, ont ciblé les zones les plus rentables – c’est-à-dire les villes – en délaissant les autres territoires, où le rattrapage échoit désormais aux collectivités et à l’État. Nous n’en serions pas là si l’attribution des fréquences avait été mieux cadrée et plus prospective.
Plusieurs députés. Exactement !
M. Jean-Michel Baylet, ministre de l’aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales. Monsieur Guillaume Chevrollier, je n’ai pas eu connaissance de difficultés concernant les demandes de DETR, même si je conviens que le désengagement progressif de l’État a considérablement compliqué l’ingénierie territoriale pour les petites communes. C’est pourquoi les départements doivent apporter leur concours dans les zones rurales et les métropoles dans les autres zones.
Comme vous, monsieur Philippe Plisson, je crois à l’intercommunalité. Il me semble difficile, en l’espèce, de critiquer l’État au sujet du découpage intercommunal car le préfet a mis au point un schéma cohérent ; ce sont les élus qui, ici et là, ont conclu des ententes sur le dos de deux communautés de communes qui, de ce fait, se trouvent plongées dans une situation incohérente, en dépit des intentions du préfet. J’ai reçu leurs élus pour envisager les solutions possibles, même si le problème est complexe.
Monsieur Michel Heinrich, je conviens que le téléscopage entre la baisse des dotations et la réforme de la DGF n’est pas des plus opportuns. En revanche, nous disposons de simulations, même si un horizon de quinze ans semble quelque peu ambitieux.
Après mûre réflexion, monsieur Charles Ange Ginesy, j’ai compris le sens de votre démarche concernant les offices de tourisme des stations de montagne. J’accepte que nous recherchions une solution, par exemple dans la loi Montagne, à condition qu’elle ne dépasse pas le cadre des seules stations de montagne. Ailleurs, il est logique que le tourisme relève des compétences de l’intercommunalité.
Les intercommunalités, avec l’appui des régions, conduisent parfois de bons projets de zones logistiques, monsieur Guy Bailliart, et je n’ai pas le sentiment que le regroupement des artisans soit si dramatique – sauf dans certaines zones bien connues.
Quant aux syndicats d’eau et d’assainissement, le président de conseil général que j’ai été pendant trente ans les a toujours aidés, soit pour les créer soit pour les agrandir. Or, certains sollicitaient notre appui au motif qu’ils n’avaient pas amorti le fonctionnement du réseau, et pour cause – plus malins que les autres, ils avaient cru bon de pratiquer les tarifs les moins élevés du département, d’où la situation calamiteuse de l’infrastructure. Ceux-là ne sont pas de bons gestionnaires ; selon moi, il faudrait d’ailleurs constituer des syndicats départementaux, comme c’est le cas dans le secteur de l’énergie et, de plus en plus souvent, dans celui de la collecte et du traitement des déchets ménagers, car tous ces petits syndicats qui prolifèrent sont parfois bizarrement gérés.
La question des réseaux souterrains se pose, monsieur Lionel Tardy, et nous allons y prêter attention.
Quant à l’indemnité des maires, je rappelle que la proposition de loi adoptée par le Sénat fixait à 3 500 habitants le seuil de population des communes au-delà duquel les maires étaient autorisés à la réduire. L’Assemblée a abaissé ce seuil à 1 000 habitants, ce qu’a confirmé la commission mixte paritaire, à la demande de l’AMF. Depuis, parce que quelques maires de communes de moins de 1 000 habitants se sont plaints, l’AMF a changé d’avis et souhaite supprimer ce seuil. Si le Parlement souhaite procéder ainsi en adoptant une proposition de loi, qu’il le fasse ; en l’état, la loi est ce qu’elle est et je ne saurais donner instruction aux préfets de fermer les yeux – comme me l’ont demandé certains parlementaires – si certains maires décident de ne pas l’appliquer. Le Parlement a la main sur cette question ; je me contenterai de souhaiter que la baisse de l’indemnité du maire ne puisse être décidée qu’à sa propre initiative, et non à celle du conseil municipal, pour éviter toute pression indue.
L’aéroport de Pierrefonds, monsieur Patrick Lebreton, n’est pas visé par le CPER, mais je vous répondrai plus précisément après m’en être entretenu avec le secrétaire d’État chargé des transports.
Comme toutes les autres lois, madame Viviane Le Dissez, la loi Littoral est faite pour être appliquée. On voudrait çà et là combler des dents creuses lorsque le littoral est construit, mais c’est impossible et je m’en félicite : on préserve ainsi nos côtes, qui sont déjà suffisamment bétonnées.
Monsieur Jean-Jacques Cottel, s’agissant du service postal dans les petites communes, la meilleure solution consiste à implanter les maisons de services au public dans les locaux de La Poste : on garantit ainsi la pérennité du service en faisant financer l’investissement par La Poste, les coûts de fonctionnement étant partagés entre les différents services. D’autre part, monsieur le député, nous continuerons d’encourager la création de communes nouvelles.
Enfin, madame Catherine Quéré, j’ai saisi le préfet concernant la question des intercommunalités de Charente-Maritime que vous soulevez – et dont le président du Sénat lui-même s’est mêlé. Nous sommes en bonne voie pour lever la difficulté que vous évoquez.
M. le président Jean-Paul Chanteguet. Je vous remercie, monsieur le ministre. (Applaudissements)
Je ne sais pas si la forme retenue pour l’audition n’est pas la bonne, bien que ce soit le schéma habituel, mais je constate qu’elle vous aura permis de vous exprimer longuement. (Sourires)
M. Jean-Michel Baylet, ministre de l’aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales. Je retire donc la remarque que j’avais faite.
——fpfp——
Membres présents ou excusés
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire
Réunion du mardi 10 mai 2016 à 17 h 15
Présents. - Mme Sylviane Alaux, M. Yves Albarello, M. Julien Aubert, M. Guy Bailliart, M. Sylvain Berrios, M. Florent Boudié, M. Jean-Louis Bricout, M. Alain Calmette, M. Jean-Paul Chanteguet, M. Jean-Jacques Cottel, Mme Karine Daniel, M. Stéphane Demilly, M. Olivier Falorni, M. Yannick Favennec, M. Charles-Ange Ginesy, M. Michel Heinrich, M. Jacques Krabal, Mme Valérie Lacroute, M. François-Michel Lambert, Mme Viviane Le Dissez, Mme Marie Le Vern, Mme Martine Lignières-Cassou, M. Gérard Menuel, M. Bertrand Pancher, M. Philippe Plisson, M. Christophe Priou, Mme Catherine Quéré, M. Gilles Savary, M. Jean-Marie Sermier, M. Gabriel Serville, M. Thomas Thévenoud, M. Jean-Pierre Vigier
Excusés. - Mme Chantal Berthelot, M. Christophe Bouillon, M. Julien Dive, M. Philippe Duron, M. Christian Jacob, M. Jacques Kossowski, M. Napole Polutélé, M. Gilbert Sauvan
Assistaient également à la réunion. - M. Patrick Lebreton, Mme Sylvia Pinel, M. Lionel Tardy