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Lundi 13 juin 2016

Séance de 21 heures

Compte rendu n° 62

Présidence de M. Jean-Paul Chanteguet Président

– Suite de l’examen en nouvelle lecture du projet de loi adopté par le Sénat en deuxième lecture, pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages (n° 3748) (Mme Geneviève Gaillard, rapporteure)

Commission
du développement durable et de l’aménagement du territoire

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a poursuivi l’examen en nouvelle lecture, du projet de loi, adopté par le Sénat en deuxième lecture, pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages (n° 3748) (Mme Geneviève Gaillard, rapporteure).

Article 28 (article L. 333-3 du code de l’environnement) : Missions du syndicat mixte d’aménagement et de gestion d’un parc

La Commission examine l’amendement CD108 de la rapporteure.

Mme Geneviève Gaillard, rapporteure. Cet amendement vise à compléter l’alinéa 3 par la phrase suivante : « Le syndicat peut, dans le cadre de cette coordination, présenter des propositions d’harmonisation des schémas de cohérence territoriale. »

Il s’agit de réintroduire dans l’article 28 une disposition supprimée par le Sénat, avec une rédaction plus claire : la formulation de propositions d’harmonisation des SCOT sera une possibilité que les syndicats mixtes de gestion des parcs pourront utiliser, et non une obligation.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 28 ainsi modifié.

Article 29 (article L. 581-14 du code de l’environnement) : Règlements locaux de publicité sur le territoire d’un parc naturel régional (supprimé)

La Commission maintient la suppression de cet article.

Section 2
Établissements publics de coopération environnementale

Article 32 (Intitulé du titre III du livre IV de la première partie et articles L. 1431-1 à L. 1431-8 du code général des collectivités territoriales) : Établissements publics de coopération environnementale

La Commission est saisie de l’amendement CD104 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Cet amendement vise à ce que le champ d’intervention des établissements publics de coopération environnementale (EPCE) soit défini de manière ambitieuse : la préservation de la biodiversité est un objectif essentiel, mais il faut aller plus loin, en menant des actions pour restaurer les milieux naturels dégradés. Cela me paraît la moindre des choses.

La Commission adopte l’amendement.

Elle adopte l’amendement CD73, de modification rédactionnelle, de la rapporteure.

Puis elle adopte l’article 32 modifié.

Article 32 bis AA (article L. 332-3 du code de l’environnement) : Réglementation des activités humaines dans les réserves naturelles créées ou modifiées à compter du 1er juillet 2016

La Commission examine l’amendement CD44 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. L’article 32 bis AA, dans sa rédaction issue des travaux du Sénat en deuxième lecture, crée une obligation de concertation qui, en pratique, est déjà systématiquement respectée. De plus, cette rédaction fait référence à des « utilisateurs habituels des territoires », notion qui n’est pas définie. Je vous propose donc de supprimer cet article.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 32 bis AA est supprimé.

Section 2 bis
Espaces naturels sensibles

Article 32 bis BA (article L. 215-21 du code de l’urbanisme) : Incorporation automatique dans le domaine public des sites « espaces naturels sensibles » acquis par préemption

La Commission adopte l’article 32 bis BA sans modification.

Article 32 sexies : Inscription de la mission des parcs zoologiques dans la loi

La Commission est saisie de l’amendement CD69 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. La rédaction de l’article 32 sexies issue des travaux de l’Assemblée en deuxième lecture n’était déjà pas satisfaisante, puisqu’elle aboutissait, d’une part, à affirmer dans la loi que les parcs zoologiques exercent des missions d’intérêt général – ce dont on ne connaît pas les éventuelles implications, notamment fiscales –, d’autre part, à obliger les parcs zoologiques à présenter chaque année des rapports au ministère de l’environnement, alors qu’ils doivent déjà rendre compte périodiquement à trois administrations différentes.

Enfin, la rédaction issue du Sénat, qui se voulait plus convenable, remplace les mots « parcs zoologiques » par l’expression « établissements destinés à la présentation au public de spécimens vivants », ce qui revient inclure les cirques et leurs ménageries, qui ne sont pas, à mon sens, des établissements préservant la biodiversité.

La Commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 32 sexies est supprimé.

Chapitre II
Mesures foncières et relatives à l’urbanisme

Section 1A
Obligations réelles environnementales

Article 33 A (articles L. 163-1 à L.163-5 [nouveaux] du code de l’environnement) : Obligations de compensation des atteintes à la biodiversité par un maître d’ouvrage

La Commission examine l’amendement CD192 de Mme Laurence Abeille.

Mme Laurence Abeille. Le présent amendement vise à modifier le dispositif introduit par le Sénat en matière de compensation écologique. En seconde lecture, les députés ont adopté une disposition renforçant l’application du triptyque « éviter, réduire, compenser », en introduisant la question de l’évitement du projet en cas de non-application possible du triptyque. Or les sénateurs ont supprimé cette disposition en séance publique pour la remplacer par une rédaction qui ne nous convient pas, d’où cette proposition de suppression.

Mme la rapporteure. Cet amendement réécrit l’ensemble de l’article 33 A relatif à la compensation, mis à mal par le Sénat – qui, sur ce point, ne partage pas la même philosophie que l’Assemblée nationale. Pour notre part, nous mettons l’accent sur l’importance de la compensation, considérant, par exemple, qu’un projet qui ne peut être compensé ne doit pas être autorisé – alors que le Sénat, à l’opposé, estime que la compensation ne peut empêcher la mise en œuvre d’un projet. Sur le fond, je suis donc en parfait accord avec Mme Laurence Abeille, qui propose de reprendre le texte issu de la deuxième lecture à l’Assemblée.

Toutefois, les derniers débats me conduisent à vous proposer quelques améliorations. Ainsi, je souhaite préciser qu’un projet insatisfaisant n’est pas autorisé « en l’état », de manière à éviter un effet couperet et à laisser une possibilité à un maître d’ouvrage. Cela était sous-entendu dans la version originelle, mais il me semble préférable de l’écrire. Je souhaite également supprimer l’alinéa qui dispose qu’aux termes d’un contrat, les contractants reprennent leur liberté, car chacun comprendra qu’il s’agit d’une disposition inutile. Enfin, à l’alinéa 6, je souhaite éviter une ambiguïté en supprimant le verbe « pouvoir » et en rendant impératif la mise en œuvre de la compensation.

Pour toutes ces raisons, je demande à Mme Laurence Abeille de retirer son amendement au profit de ceux que je vais vous présenter et qui vont dans son sens, et parfois un peu plus loin.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est saisie des amendements identiques CD59 de Mme Viviane Le Dissez et CD87 de la rapporteure.

Mme Viviane Le Dissez. Cet amendement vise à supprimer la dernière phrase de l’alinéa 4 de l’article 33 A et à rétablir l’alinéa 5 dans sa version issue des travaux de l’Assemblée nationale, qui rend à la compensation toute son importance.

Mme la rapporteure. L’amendement CD87 a été défendu.

La Commission adopte les amendements CD59 et CD87.

Elle examine les amendements identiques CD20 de M. Martial Saddier et CD118 de M. Bertrand Pancher.

M. Guillaume Chevrollier. L’amendement CD20 vise à substituer, à l’alinéa 5, au mot « résultats » le mot « moyens ». Les mesures de compensation écologique ne peuvent se traduire par une obligation de résultat lorsqu’elles portent sur des habitats ou des espèces. Les mesures de compensation écologique visent à restaurer un milieu naturel, agricole ou forestier, et si le maître d’ouvrage doit garantir les moyens mis en œuvre pour restaurer ce milieu, il ne peut garantir que la restauration effectuée permette d’atteindre les résultats escomptés. De plus, des aléas climatiques ou naturels peuvent venir modifier le milieu restauré. Il est donc nécessaire de prévoir une obligation de moyens, plutôt qu’une obligation de résultat, pour le maître d’ouvrage.

M. Yannick Favennec. L’amendement CD118 est défendu. Il nous paraît effectivement préférable de prévoir une obligation de moyens plutôt qu’une obligation de résultats.

Mme la rapporteure. Ces amendements sont fondés sur une philosophie tout à fait différente de la nôtre. Pour moi, compenser suppose une obligation de résultats, pas de moyens. Si on se contente d’essayer de compenser, on n’aboutira jamais à une compensation réelle.

L’obligation de moyens correspond, peu ou prou, aux pratiques actuelles ; l’un des apports fondamentaux de ce texte est précisément de rompre avec ces pratiques et d’imposer une obligation de résultat, sans laquelle le projet n’est pas autorisé en l’état. De ce point de vue, le texte est parfaitement cohérent.

M. Bertrand Pancher. Je ne peux vous laisser dire que notre philosophie diffère de la vôtre, Madame la rapporteure : nous ne remettons pas en cause la nécessité de compenser les dommages que des projets liés au développement économique causent à l’environnement. Mais s’il est facile de mesurer les impacts environnementaux du réchauffement climatique et de les compenser par un ajustement du prix du carbone, cela devient beaucoup plus complexe lorsqu’il s’agit d’atteinte à la biodiversité. C’est la raison pour laquelle, tout en souhaitant comme vous la compensation environnementale, nous estimons que, dans ce domaine, une obligation de moyens est plus adaptée.

Mme la rapporteure. Vous souhaitez comme nous la compensation environnementale, mais la pratique actuelle consiste justement à se donner les moyens, un peu de moyens et, au bout du bout, on voit ce que cela donne… L’appréciation des atteintes à la biodiversité et des mesures visant à les compenser peut effectivement être complexe et nécessiter de faire appel à des spécialistes, mais elle est possible. En tout état de cause, il est certain que la mise en œuvre d’une simple obligation de moyens n’est pas suffisante pour garantir une compensation effective.

M. Guillaume Chevrollier. Nos amendements sont inspirés par le bon sens : une obligation de moyens dont s’acquitte celui à laquelle elle incombe vaut mieux qu’une obligation de résultat inatteignable, et qui finit par porter atteinte à l’autorité de la loi.

M. Jean-Yves Caullet. Les maîtres d’ouvrage, qui ne sont pas forcément compétents en la matière, se font conseiller, voire prescrire des mesures de compensation ; quand le résultat recherché n’est pas obtenu, quelle est la responsabilité du conseilleur et du prescripteur éventuels ?

Mme la rapporteure. J’avoue ne pas être en mesure de répondre avec certitude à cette question, mais j’ai tendance à penser que la responsabilité du maître d’œuvre peut être engagée au même titre que celle du maître d’ouvrage. Il n’en est pas moins indispensable de prévoir une obligation de résultat. Sinon, jamais on n’y arrivera.

La Commission rejette les amendements CD20 et CD118.

Elle est saisie de l’amendement CD83 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. À la première phrase de l’alinéa 6 de l’article 33 A, l’expression « peut y satisfaire » risque de créer une ambiguïté sur le caractère impératif de la mise en œuvre de la compensation. Je propose donc de supprimer le verbe « pouvoir » afin d’éviter toute équivoque.

La Commission adopte l’amendement.

Elle examine les amendements identiques CD88 de la rapporteure et CD60 de Mme Viviane Le Dissez.

Mme la rapporteure. L’amendement CD88 vise à prévoir, au début de l’alinéa 9, que les mesures de compensation sont mises en œuvre en priorité sur le site endommagé ou, en tout état de cause, à proximité de celui-ci afin de garantir ses fonctionnalités de manière pérenne. Faute de quoi, les compensations pourraient n’être mises en œuvre que dans des zones très éloignées, où il n’y a pas grand-chose, tandis que d’autres seraient exclusivement consacrées au développement. La compensation ne doit pas être renvoyée à l’extérieur, mais intervenir le plus près possible du site endommagé pour y recréer des habitats et des écosystèmes.

Mme Viviane Le Dissez. L’amendement CD60 a été défendu par la rapporteure.

La Commission adopte les amendements CD88 et CD60.

Elle est saisie de l’amendement CD84 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. L’amendement CD84 vise à supprimer l’alinéa 12 de l’article 33 A. Cette disposition est inutile : lorsqu’un contrat est arrivé à échéance, il va de soi que les contractants retrouvent leur liberté, puisque plus rien ne les lie.

La Commission adopte l’amendement.

Les amendements CD85 et CD86 sont retirés.

La Commission examine l’amendement CD89 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. L’alinéa 20 de l’article 33 A a pour objet de confondre les garanties liées aux compensations avec celles prévues pour la remise en état des carrières après la fin de leur exploitation. Or, s’il existe deux garanties, c’est parce qu’elles n’ont pas le même objectif : l’une vise à la remise en état du site, l’autre à la mise en œuvre des mesures de compensation. Les mesures de compensation ne doivent pas concurrencer ou affaiblir l’obligation de remise en état d’un site. Il est donc nécessaire de supprimer cette disposition pour éviter toute ambiguïté.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 33 A ainsi modifié.

Article 33 BA : Inventaire national des espaces naturels à fort potentiel de gain écologique

La Commission adopte l’article 33 BA sans modification.

Section 1
Obligations de compensation écologique

Article 33 (article L. 132-3 [nouveau] du code de l’environnement) : Possibilité pour le propriétaire d’un immeuble d’y créer une obligation réelle environnementale

La Commission est saisie de l’amendement CD178 de Mme Brigitte Allain.

Mme Laurence Abeille. Cet amendement vise à supprimer l’alinéa 3 de l’article 33, selon lequel « les obligations réelles environnementales peuvent être utilisées à des fins de compensation ». Les obligations réelles environnementales ne peuvent devenir le support du dispositif de compensation, car elles vont engendrer, via le marché de la compensation, des remises en cause du rapport bailleur-preneur – avec une pression pour modifier les clauses du contrat de bail à ferme, pouvant aboutir à un arrangement financier – et du statut du fermage.

Mme la rapporteure. Les obligations réelles environnementales peuvent avoir un rôle de compensation : il s’agit d’une possibilité donnée aux agriculteurs, d’une souplesse, à laquelle il n’y a aucune raison de s’opposer. J’insiste sur le fait qu’elles peuvent être utilisées à des fins de compensation, mais pas obligatoirement : c’est un débat que nous avions déjà eu en deuxième lecture. En aucune manière elles ne peuvent remettre en cause les rapports entre bailleurs et preneurs, dans la mesure où l’accord préalable du preneur à bail est requis.

Cet amendement, très restrictif, ne s’inscrit pas dans la logique du projet de loi et me paraît même contre-productif, dans la mesure où il aboutirait à entraver la mise en œuvre des obligations réelles environnementales. J’y suis donc défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine les amendements identiques CD79 de la rapporteure et CD61 de Mme Viviane Le Dissez.

Mme la rapporteure. Mes deux amendements CD79 et CD80 reviennent sur les modifications apportées par le Sénat, qui a souhaité encadrer strictement la pratique des obligations réelles environnementales. Les ORE font l’objet d’un contrat unilatéral et volontaire : le propriétaire d’une parcelle souhaitant souscrire une telle obligation en a la possibilité, sans que cela mette à mal les servitudes existant sur cette parcelle, notamment en matière de chasse ; en revanche, il faudra que le fermier en soit informé. Les autres servitudes sont maintenues. Les chasseurs craignent que la mise en œuvre des obligations réelles environnementales ne remette en cause l’exercice de leur activité, et les agriculteurs redoutent de ne plus pouvoir exploiter leurs terres comme ils l’entendent.

Ces inquiétudes sont infondées : le droit de propriété est préservé, et le propriétaire d’une terre peut en faire une ORE à la seule condition que le fermier en soit informé et soit d’accord.

Mme Viviane Le Dissez. Effectivement, l’obligation réelle environnementale relève du choix du propriétaire et ne remet pas en cause les servitudes et contrats existant déjà sur son terrain.

M. Philippe Plisson. En dépit des assurances de Mme la rapporteure, nous n’avons pas suffisamment de certitudes quant à la préservation des droits de droits de chasse sur les terrains faisant l’objet d’obligations réelles environnementales. Il semble logique que tous ceux qui étaient parties prenantes sur lesdits terrains, avant que le propriétaire ne décide de mettre en œuvre une ORE, soient consultés, et que leur accord soit requis – à défaut, il est évident que certains vont se trouver lésés. Nous avions pris cette précaution en première lecture, en adoptant un alinéa 7 précisant que le propriétaire d’un fonds ne pouvait souscrire d’obligations réelles environnementales qu’avec l’accord des détenteurs de droits et d’usages, et sous réserve des droits des tiers – mon amendement CD145, qui sera soumis à la discussion dans quelques instants, proposera de rétablir cet alinéa.

M. le président Paul Chanteguet. Nous en reparlerons au moment opportun.

Rappelons que, pour l’heure, les amendements CD79 et CD61 se bornent à proposer de supprimer la dernière phrase de l’alinéa 4, qui prévoit que la durée d’une ORE ne peut être supérieure à quatre-vingt-dix-neuf ans.

La Commission adopte les amendements CD79 et CD61.

La Commission en vient aux amendements identiques CD62 de Mme Viviane Le Dissez, CD80 de la rapporteure et CD191 de Mme Laurence Abeille.

Mme la rapporteure. Ces amendements visent à supprimer l’alinéa 5 pour revenir à la version de notre assemblée selon laquelle les ORE ne sont pas forcément des contrats. Il n’y a donc aucun intérêt à préciser que l’obligation réelle cesse de plein droit lorsque la contrepartie prévue au contrat ayant fait naître l’obligation réelle cesse.

La Commission adopte ces amendements.

Elle est saisie de deux autres amendements identiques, CD81 de la rapporteure et CD63 de Mme Viviane Le Dissez.

Mme la rapporteure. Lors des deux premières lectures, le Sénat a essayé d’imposer sa vision d’un contrat qui serait obligatoirement conclu sous forme authentique et exonéré des droits d’enregistrement et des taxes de publicité. Selon les sénateurs, en effet, les règles relatives à la publicité rendraient obligatoire ce type de contrat.

L’Assemblée nationale, au contraire, souhaite offrir un maximum d’ouverture et n’entend pas interdire les contrats sous seing privé.

Je propose donc, par cet amendement, une formulation qui ne rende pas explicitement obligatoire la forme authentique mais qui, dans l’hypothèse où elle serait retenue, conserve l’exonération des droits d’enregistrement et des taxes de publicité.

Nous laissons par ailleurs s’appliquer le droit en vigueur en matière de publicité foncière, notamment les dispositions du code civil. Cela nous paraît beaucoup plus simple et surtout plus ouvert.

La Commission adopte ces amendements.

Elle examine ensuite l’amendement CD145 de M. Philippe Plisson.

M. Philippe Plisson. Cet amendement, comme je l’ai expliqué à l’instant, vise à rétablir l’alinéa 7 dans sa rédaction issue des travaux de l’Assemblée nationale en deuxième lecture. Les détenteurs de droits et d’usages ne doivent pas être lésés. C’est la raison pour laquelle leur accord est nécessaire lorsque le propriétaire décide d’établir des obligations réelles environnementales.

Mme Laurence Abeille. J’aimerais que M. Philippe Plisson nous précise qui sont ces détenteurs de droits et d’usages.

M. Philippe Plisson. Je pense en particulier aux gens qui ont un droit de chasse sur un terrain, droit découlant parfois d’autorisations verbales ou du droit coutumier. Ils doivent être assurés de ne pas le perdre. S’ils ne sont pas associés à la démarche, ils risquent de se retrouver, du jour au lendemain, « Gros-Jean comme devant », alors qu’ils ont parfois installé des équipements onéreux, pour la chasse à la palombe par exemple. Ils doivent avoir la totale certitude de pouvoir maintenir ces activités. Cela me semble marqué au coin du bon sens…

Mme la rapporteure. Je le répète, les obligations réelles environnementales sont individuelles et volontaires. Le propriétaire n’est tenu de signer un contrat qu’avec son fermier, s’il en a un. Il n’y a aucune raison d’impliquer dans la démarche la commune, ainsi que le souhaitaient les sénateurs, ou les détenteurs de droits d’usage, dont celui de chasse, comme le veut M. Philippe Plisson. Cette disposition ne remet absolument pas en cause les dispositions relatives au droit de chasse. Le droit coutumier et autres servitudes ne sont pas remis en cause. Il n’est donc pas utile d’obtenir l’autorisation préalable des associations communales de chasse agréées (ACCA), puisque ce doit est quasiment acquis.

M. Philippe Plisson. Quasiment ?

Mme la rapporteure. Il est acquis, j’enlève l’adverbe ! (Sourires)

Je vous rassure, M. Philippe Plisson : si un propriétaire refuse que son terrain fasse l’objet d’un droit de chasse, des procédures spécifiques sont prévues. Mais ce n’est pas du tout le cas en l’espèce. Si des servitudes et des droits acquis existent déjà, en aucun cas il ne pourra revenir dessus. Avis défavorable donc.

M. Philippe Plisson. Je ne remets pas en cause la bonne foi de la rapporteure quand elle nous dit que les chasseurs peuvent être rassurés. Je la crois sur parole. Simplement, les paroles et les rapporteurs passent et je voudrais avoir des assurances de nature juridique sur le régime des ORE car nous risquons sinon de nous trouver confrontés à des situations catastrophiques.

Mme Laurence Abeille. Votre amendement CD145 vise en fait à rendre obligatoire l’accord préalable des autres détenteurs de droits et d’usages pour l’instauration d’obligations réelles environnementales. Ce faisant, vous mettez ces tierces personnes en position de décideurs alors même que les ORE ne les empêchent nullement d’exercer ces droits et usages. Je suis opposée à ce qu’elles aient un rôle aussi prépondérant.

M. Gilles Savary. Il me semble qu’un propriétaire qui ne voudrait pas que l’on chasse sur son terrain peut le clôturer.

Mme la rapporteure. Il y a des règles pour le faire.

M. Gilles Savary. L’obligation réelle environnementale est-elle du même ordre : est-ce un acte unilatéral ? Imaginons qu’un propriétaire veuille préserver les canards d’une mare où est pratiquée la chasse à la tonne : comment gérer le conflit d’intérêts ?

Mme la rapporteure. Il ne peut y avoir de conflit d’intérêts, puisque le propriétaire ne peut pas revenir sur les engagements qui ont été pris. Il ne s’agit pas de réguler le droit de chasse.

M. Gilles Savary. C’est du droit de propriété que je parle. Les obligations réelles environnementales découlent-elles du droit de propriété ? Procèdent-elles d’un acte unilatéral qu’emporte la jouissance pleine et entière du droit de propriété ?

Mme la rapporteure. Le droit de propriété n’est pas non plus modifié. Les obligations réelles environnementales relèvent de démarches individuelles et volontaires : le propriétaire reste propriétaire de son bien, sur lequel sont maintenus les droits et servitudes existants. Simplement, s’il prend une décision telle que la modification du mode de culture, il doit en avertir son fermier et contracter avec lui. Cela ne remet aucunement en cause le droit de chasse et la réglementation qui s’y rattache. Pour interdire la chasse sur son terrain, il faut respecter toute une procédure ; nous n’y touchons pas.

M. Florent Boudié. Pardonnez-moi, Madame la rapporteure, mais je crois que vous ne répondez pas à la question que nous posons. Quelle est la nature juridique des ORE ? S’apparentent-elles à une mesure d’ordre public s’imposant aux tiers ? Reviennent-elles sur les droits acquis ?

Mme la rapporteure. Les ORE ne reviennent pas sur les droits acquis. Sur le plan juridique, elles constituent une servitude. Je l’ai déjà dit et redit.

M. Florent Boudié. Les servitudes peuvent donc continuer de s’exercer.

Mme la rapporteure. C’est le principe de base…

M. Florent Boudié. Il semblerait pertinent de sous-amender l’amendement de M. Philippe Plisson. Je conçois que les termes de’« accord préalable » puissent être perçus comme un droit de veto, Madame Abeille. Ne pourrait-on les remplacer par les termes « en tenant compte de l’avis » ? C’est une solution à laquelle notre commission a eu recours à plusieurs reprises en matière de droit de l’environnement, y compris sur le sujet de la participation du public.

Mme la rapporteure. « Tenir compte », qu’est-ce que cela signifie ? Cela n’a aucune portée juridique. J’ai bien compris que vous ne vouliez pas des ORE ; c’est pourtant une disposition extrêmement importante car elle permet de faire progresser la préservation de l’environnement en zone rurale, mais également en zone urbaine. Si les propriétaires d’un bien immobilier urbain désirant souscrire une ORE doivent avoir l’accord de la commune et de l’intercommunalité, ils ne pourront jamais avancer. Une ORE ne remet pas en cause un droit de passage, par exemple. C’est exactement la même chose pour le droit de chasse.

M. Florent Boudié. Je reprends l’exemple évoqué par Gilles Savary : les intérêts d’un propriétaire qui voudrait, dans le cadre d’une ORE, protéger une espèce en particulier, entreraient bien en conflit avec les intérêts de ceux qui détiennent un droit de chasse sur son bien. Comment réguler ce conflit ? La question de la nature juridique de l’ORE se pose bel et bien.

M. Jean-Yves Caullet. Il faut distinguer deux catégories de droits.

Le texte établit clairement qu’un propriétaire ayant conclu un bail, notamment agricole, ne peut léser le preneur du fait de sa volonté unilatérale. Il doit en aller de même pour n’importe quel contrat : un propriétaire doit recueillir l’accord préalable des contractants dès lors que l’une de ses décisions va à l’encontre d’un contrat qu’il a lui-même signé. S’il choisit de grever son bien d’une ORE, il ne peut par exemple empêcher des personnes de cueillir des champignons sur son terrain si ce droit fait l’objet d’un contrat.

Par ailleurs, il y a une autre catégorie de droits – droits de passage, servitudes de bord de rivières ou de fleuves domaniaux –, d’un ordre supérieur au droit de la propriété : les ACCA entrent dans cette catégorie. La formule « sous réserve des droits des tiers » englobe toutes les personnes qui auraient des droits sur le bien concerné et que le propriétaire ne connaîtrait pas parce qu’il n’aurait pas spécifiquement contracté avec elles.

Dans cette perspective, la rédaction adoptée par notre assemblée en deuxième lecture me semble correcte. Toutefois, la mention de l’accord préalable ne semble pas utile puisque le propriétaire ne peut aller contre un contrat qu’il a lui-même signé. En revanche, la formule « sous réserve des droits des tiers » est essentielle.

Mme la rapporteure. Le droit des contrats s’appliquera. Si un droit de chasse fait l’objet d’un contrat, il s’éteindra à l’échéance du contrat.

Je ne comprends pas vos craintes, ou du moins je comprends ce qui les motive : vous ne voulez pas que le dispositif des ORE soit mis en place, autrement dit vous refusez aux propriétaires la possibilité de faire avancer de façon volontaire la préservation de la biodiversité.

M. Philippe Plisson. Nous n’allons pas y passer la nuit. (Sourires)

Nous ne sommes pas opposés aux ORE, Madame la rapporteure : la rédaction que notre assemblée a votée en deuxième lecture mettait ces obligations au cœur de nos préoccupations tout en garantissant aux détenteurs de droits de ne pas se retrouver « Gros-Jean comme devant ». Mais vous voulez faire passer les ORE, et ensuite, aux plus forts la guirlande ! Ce n’est pas acceptable. Je ne voterai pas l’article 33 dans sa rédaction actuelle.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. À l’évidence, nous voyons se manifester une forme d’incompréhension.

Mme Martine Lignières-Cassou. Disons-le clairement : il y a de la peur. Les chasseurs craignent de ne plus pouvoir chasser sur les terrains qui feraient l’objet d’une ORE.

Mme la rapporteure. Qu’on leur explique que cela ne sera pas du tout le cas !

Mme Martine Lignières-Cassou. Comment dissiper cette peur ?

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Reprenons la rédaction du Sénat de l’alinéa 7 : « Le propriétaire doit également demander l’accord préalable et écrit de la commune si celle-ci relève de l’article L. 429-2, sous réserve de l’article L. 429-4, ou de l’association communale de chasse agréée lorsque le propriétaire y a adhéré. » Le problème soulevé par Philippe Plisson se pose lorsque le propriétaire n’est pas adhérent d’une ACCA : on ne lui demande pas son avis. Comment le régler ?

Par ailleurs, je ne crois pas qu’il y ait dans notre commission de fortes oppositions aux ORE – sans doute les paroles de Mme la rapporteure ont-elles dépassé sa pensée. Les explications données par les uns par les autres montrent qu’il existe un peu d’incompréhension, voire de la peur, comme le soulignait Mme Lignières-Cassou.

Ne faut-il pas faire en sorte que le texte voté en commission marque un statu quo avant qu’ensemble nous trouvions une rédaction qui rassure les uns et les autres ? Je n’ai pas envie de forcer le vote.

Mme la rapporteure. Peut-être pourrait-on se rallier à la solution présentée par Jean-Yves Caullet en ajoutant les termes « sous réserve des droits des tiers ». Cela serait en tout cas beaucoup moins mauvais que la rédaction actuelle…

M. Jean-Yves Caullet. Il est toujours compliqué de rédiger des textes juridiques a capella. La première partie de la rédaction que nous avons adoptée en deuxième lecture me semble parfaitement claire : « Le propriétaire qui a consenti un bail sur son fonds ne peut, à peine de nullité absolue, accepter de telles obligations réelles environnementales qu’avec l’accord préalable et écrit du preneur ».

Mme la rapporteure. Quand le bail est rural !

M. Jean-Yves Caullet. Cela vaut pour tout bail, et en particulier pour les baux ruraux. Et si l’on mettait dans le même sac les contrats qu’il a pu conclure, qui n’ont pas la nature d’un bail, on réglerait la question de l’éventuelle duplicité du propriétaire qui, après avoir accordé par contrat à quelqu’un le droit de faire quelque chose, chercherait à le lui retirer sous couvert d’une ORE. Il suffirait d’adopter la rédaction suivante : « Le propriétaire qui a consenti un bail ou un contrat sur son fonds ne peut, à peine de nullité absolue, accepter de telles obligations réelles environnementales qu’avec l’accord préalable et écrit du preneur et des parties audit contrat, sous réserve des droits des tiers. »

Mme la rapporteure. Cette rédaction me paraît très compliquée, et de nature à décourager la signature d’obligations réelles environnementales.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Le contrat visé par votre rédaction pourrait-il être un contrat non écrit ?

M. Jean-Yves Caullet. On atteint les limites de l’exercice… Il faudrait savoir qui a contracté. Pour moi, c’était un contrat écrit.

M. Philippe Plisson. Je pense que nous devons partir de ces réflexions pour trouver ensemble une rédaction qui fasse l’unanimité. J’accepte de retirer mon amendement dans cette perspective.

Mme Laurence Abeille. À ma question sur la liste des possibles détenteurs de droits et d’usages, Monsieur Plisson, vous avez répondu qu’elle comprenait les chasseurs. Qui d’autres encore ?

Par ailleurs, j’aimerais que soit prise également en compte la question des territoires urbains qui posent des problèmes juridiques d’une autre nature.

M. Gilles Savary. Ma question porte sur le contenu des ORE. Comment se présentent-elles concrètement ? Peuvent-elles être assimilées à un cahier des charges ? Précisent-elles des obligations de préservation espèce par espèce ?

Mme la rapporteure. Je l’ai déjà dit dix fois : les ORE relèvent d’une démarche volontaire et individuelle ; le propriétaire peut y mettre ce qu’il y veut, à condition d’en tenir au courant son fermier et de recueillir son accord.

Et en zone urbaine également, il me paraît très important d’ouvrir cette possibilité à des gens qui ont envie de manifester leur intérêt pour la biodiversité.

M. Jean-Paul Chanteguet. Pour parvenir à une solution qui recueille l’unanimité, je propose que tous les amendements portant sur l’alinéa 7 soient retirés. En attendant, nous en resterons à la rédaction du Sénat.

Les amendements CD145 de M. Philippe Plisson, CD190 de Mme Laurence Abeille, CD 137 de M. David Douillet et CD206 de la rapporteure sont retirés.

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CD82 de la rapporteure.

Elle adopte alors l’article 33 ainsi modifié.

Section 2
Zones prioritaires pour la biodiversité

Article 34 (article L. 411-1 du code de l’environnement) (supprimé) : Création de zones prioritaires pour la biodiversité

La Commission est saisie de l’amendement CD189 de Mme Laurence Abeille.

Mme Laurence Abeille. Cet amendement rétablit l’article 34 tel qu’issu des travaux de l’Assemblée nationale et supprimé en commission au Sénat. On constate, aujourd’hui, bien souvent l’échec ou l’insuffisance des mesures incitatives en faveur de l’environnement dans le domaine agricole. En effet, les promoteurs de ces mesures peinent à trouver des partenaires agricoles, alors que la situation des espèces concernées et de leurs habitats se dégrade rapidement. Le cas du grand hamster d’Alsace témoigne, si besoin était, de cette lacune qui expose la France à des contentieux européens.

Il est donc proposé de restaurer les zones prioritaires pour la biodiversité afin de combler un vide dans la palette des outils disponibles et de ne pas priver l’État français d’un levier qui permet d’obtenir des résultats pour la biodiversité dans des situations où toutes les autres politiques, actions et outils ont échoué et où l’urgence pour la biodiversité se fait sentir.

Afin de répondre aux inquiétudes émises lors des précédentes lectures, il est proposé de rendre obligatoire les aides lorsque les pratiques induisent des surcoûts ou des pertes de revenus pour les agriculteurs.

Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte cet amendement.

En conséquence, l’article 34 est ainsi rétabli.

Section 3 bis
Protection des chemins ruraux

Article 35 quater (article L. 161-10-2 [nouveau] du code rural et de la pêche maritime, article L. 3222-2 du code général de la propriété des personnes publiques) : Modification d’assiette et continuité d’un chemin rural

La Commission adopte l’article sans modification.

Section 4
Aménagement foncier agricole et forestier

Article 36 bis A (articles L. 151-23 et L. 421-4 du code de l’urbanisme) : Protection des espaces boisés

La Commission adopte l’article sans modification.

Section 6
Espaces de continuités écologiques

Article 36 quater (articles L. 113-29 et L. 113-30 [nouveaux] du code de l’urbanisme) : Création d’espaces de continuités écologiques

La Commission est saisie des amendements CD90 de la rapporteure et CD187 de Mme Laurence Abeille pouvant faire l’objet d’une discussion commune.

Mme la rapporteure. Mon amendement CD90 propose de rétablir l’article 36 quater¸ adopté par l’Assemblée nationale en première lecture et supprimé par le Sénat, qui prévoit la possibilité d’identifier des espaces de continuité écologique dans les plans locaux d’urbanisme et d’élaborer des prescriptions afin de les préserver.

La trame verte et bleue est un outil important en milieu urbain mais aussi rural. Il figure de plus en plus souvent dans les schémas régionaux de cohérence écologique et permet de mener des politiques publiques en matière de maintien des continuités écologiques et des réservoirs de biodiversité, indispensables pour la reconquête de la biodiversité.

Simple à mettre en place pour les collectivités, la trame verte et bleue est extrêmement appréciée dans les territoires où elle a déjà été adoptée.

Mme Laurence Abeille. Mon amendement CD187 est pratiquement identique. Le dispositif des espaces de continuité écologique est en effet extrêmement précieux pour la préservation de la biodiversité en territoire urbain ou périurbain.

La Commission adopte l’amendement CD90.

En conséquence, l’article 36 quater est rétabli et l’amendement CD 187 tombe.

Section 6 bis
Biodiversité en milieux urbain et périurbain

Article 36 quinquies A (article L. 111-19 du code de l’urbanisme) : Incitation à l’exploitation des toitures des zones commerciales et à la perméabilisation des places de stationnement

La Commission est saisie de l’amendement CD120.

M. Yannick Favennec. Si l’article 36 quinquies A est animé par une volonté louable, il risque néanmoins de freiner les investissements en générant des surcoûts difficilement supportables. C’est pourquoi nous proposons de le supprimer.

Mme la rapporteure. Cet article résulte d’un important travail en amont que nous avons effectué avec les organisations professionnelles. Elles ont commencé à s’investir dans cette dynamique. Le supprimer réduirait à néant tous ces efforts. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel CD91 de la rapporteure.

La commission en vient à l’examen, en discussion commune, des amendements CD92 de la rapporteure, CD119 de M. Yannick Favennec et CD188 de Mme Laurence Abeille.

M. Yannick Favennec. L’amendement CD119 est un amendement de repli qui vise à substituer à la date du 1er janvier 2018 celle du 1er janvier 2020.

Mme la rapporteure. L’amendement CD92 prévoit, à l’inverse de celui de M. Favennec, de revenir non au 1er janvier 2017, mais au 1er mars 2017, ce qui ménage un délai de six mois environ après la date prévisible de promulgation du texte. Cette proposition a obtenu l’accord des représentants des professionnels de la grande distribution qui ont déjà largement anticipé l’entrée en vigueur de la disposition en question.

Mme Laurence Abeille. Je souhaite pour ma part que nous en revenions au 1er janvier 2017.

J’en profite pour souligner que le texte comporte peu de dispositions relatives à la biodiversité en milieu urbain. Les récents épisodes de crues, dévastateurs et terriblement coûteux pour la société, les finances publiques et les assurances, notamment, montrent que tout doit être fait pour mieux maîtriser l’absorption des eaux grâce à la végétalisation des toitures ou des zones commerciales. Il faudrait que le dispositif très timide que nous prévoyons soit un prétexte pour aller plus loin. Toute réflexion sur l’urbanisation doit en effet inclure la préservation de la biodiversité ou sa recréation. Dans cette perspective, il faut tenir compte du coût, élevé, du traitement de la pollution de l’eau après son passage par des terrains salis.

Il s’agit d’entrer dans un cercle vertueux ; or, comme les professionnels sont prêts à appliquer ce type de dispositif, qui du reste se développe de plus en plus, je propose la date la plus rapprochée possible.

M. Yannick Favennec. Vous allez peut-être me trouver bien indiscret, Madame la rapporteure, mais peut-on savoir quels sont les représentants des centres commerciaux que vous avez rencontrés ?

Mme la rapporteure. Je pourrai vous le dire. Je n’ai pas leurs noms en tête, aussi, mais nous vous transmettrons la liste par courriel. Mettiez-vous en doute mes propos, Monsieur Favennec ? C’est que le diable est dans les détails…

M. Yannick Favennec. Pas du tout ! J’ai même pris des précautions oratoires en demandant si je n’étais pas indiscret…

La commission adopte l’amendement CD92.

En conséquence, les amendements CD119 et CD188 tombent.

La commission adopte l’article 36 quinquies A modifié.

Section 7
Associations foncières pastorales

Article 36 sexies : Rapport sur l’opportunité de classer le frelon asiatique dans la catégorie des organismes nuisibles

La commission adopte l’article 36 sexies sans modification.

Chapitre III
Milieu marin

Section 1
Pêche professionnelle en zone Natura 2000

Article 37 (article L. 414-4 du code de l’environnement) : Activités de pêche professionnelle en zone Natura 2000

La commission adopte l’article 37 sans modification.

Section 2
Aires marines protégées

Article 38 (articles L. 332-8 et L. 640-1 du code de l’environnement et articles L. 912-2, L. 912-3 et L. 912-7 du code rural et de la pêche maritime) : Gestion des réserves naturelles en mer par les acteurs socio-économiques

La commission adopte l’article 38 sans modification.

Section 3
Autorisation des activités sur le plateau continental
et dans la zone économique exclusive

Article 40 (articles 1er, 2, 4 et 5 et articles 6 à 14 [nouveaux] de la loi n° 76-655 du 16 juillet 1976 relative à la zone économique et à la zone de protection écologique au large des côtes du territoire de la République) : Organisation des activités sur le plateau continental et dans la zone économique exclusive

La commission adopte successivement les amendements rédactionnel CD32 et de précision CD205 de la rapporteure.

Puis elle examine l’amendement CD31 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. La notion de « suivi environnemental » n’est pas définie par la loi du 16 juillet 1976 et il est donc impossible de préciser clairement le champ des données qui seront communiquées. C’est pourquoi le présent amendement propose de remplacer cette expression sans réel fondement juridique par des termes plus clairs. Cette modification permet également d’élargir le champ des données communiquées.

La commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CD64 de Mme Viviane Le Dissez.

Mme Viviane Le Dissez. L’alinéa 27 a été supprimé par le Sénat. Nous vous proposons de le réintroduire dans une nouvelle rédaction : il semble en effet important de lier toute activité économique dans le milieu marin à une activité de recherche dans la mesure où ce dernier n’est pas encore suffisamment connu.

Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 40 ainsi modifié.

Section 5
Protection des ressources halieutiques et zones de conservation halieutiques

Article 43 bis : Rapport relatif aux activités d’extraction de granulats marins

La commission examine les amendements identiques CD33 de la rapporteure et CD66 de Mme Viviane Le Dissez.

Mme la rapporteure. Le Sénat a supprimé l’article 43 bis, qui prévoyait la remise d’un rapport au Parlement évaluant l’impact environnemental et économique sur le littoral et l’écosystème marin des activités d’exploration des ressources minérales. Or demander ce rapport paraît tout à fait légitime.

La commission adopte ces amendements.

L’article 43 bis est ainsi rétabli.

Article 44 (articles L. 942-1, L. 942-4, L. 942-10, L. 945-4-1 [nouveau] et L. 945-5 du code rural et de la pêche maritime) : Dispositions de coordination

La commission adopte l’amendement rédactionnel CD34 de la rapporteure.

Puis elle en vient à l’amendement CD35 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Le présent amendement vise à supprimer l’alinéa 37. Le III de l’article 44 est en effet inutile du fait de la rédaction du premier alinéa du II de cet article : les modifications faites au titre V du livre IX du code rural et de la pêche maritime « dans sa rédaction issue de l’article 11 de l’ordonnance n° 2016-391 du 31 mars 2016 recodifiant les dispositions relatives à l’outre-mer du code rural et de la pêche maritime » entrent en vigueur à la date d’entrée en application de l’ordonnance du 31 mars 2016 prévue par l’article 20 de cette ordonnance, sans qu’il soit nécessaire de le mentionner explicitement.

La commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 44 modifié.

Section 6
Protection des espèces marines

Article 46 quater : Équipement des navires avec un dispositif anticollision avec les cétacés

La commission adopte l’amendement rédactionnel CD36 de la rapporteure.

Puis elle examine l’amendement CD180 de Mme Laurence Abeille.

Mme Laurence Abeille. Le présent amendement vise à préciser le caractère ponctuel permettant aux navires de bénéficier d’une exonération de l’obligation de s’équiper du dispositif anticollision. Les rouliers qui transportent une à deux fois par an du minerai de Livourne à Marseille en seraient ainsi exonérés.

Mme la rapporteure. Vous proposez de supprimer le renvoi à un texte réglementaire et de définir dans la loi ce que recouvre la notion, en l’occurrence floue, de « caractère ponctuel ». Vous introduiriez de la sorte un élément de rigidité, dans la mesure où le recours à un texte réglementaire aurait permis de définir plus finement les exonérations en fonction des catégories de navires. Je vous suggère donc de retirer votre amendement.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement CD182 de Mme Laurence Abeille.

Mme Laurence Abeille. Le présent amendement vise à augmenter le montant de l’amende infligée à un armateur qui n’aurait pas équipé un navire du dispositif anticollision avec les cétacés dans les sanctuaires marins. Cette amende est actuellement peu élevée au regard de l’activité économique concernée. En effet, l’ordre de grandeur du coût d’exploitation des navires concernés se situe autour de 50 000 euros par jour. Le coût du dispositif anticollision, quant à lui, est de 4 200 euros par an pour la location du matériel, maintenance incluse.

S’agissant d’une amende délictuelle, supérieure à 3 750 euros, le montant de l’amende correspond à la somme maximale que le juge pourra fixer.

Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la commission adopte l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CD183 de Mme Laurence Abeille.

Mme Laurence Abeille. Même proposition que précédemment, mais à l’alinéa 8.

Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la commission adopte l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement CD181 de Mme Laurence Abeille.

Mme Laurence Abeille. Lorsque nous avons travaillé sur la protection des mammifères marins, nous n’avons pas forcément pensé au tourisme destiné à les observer – le whale watching, en français : l’observation des baleines. La rédaction actuelle ne couvre toutefois pas tous les cas de figure comme les navires à passagers de plus de vingt-quatre mètres ou les navires de plaisance à utilisation commerciale. Le présent amendement vise donc à poser le principe d’une interdiction pour les armateurs qui proposent des activités commerciales d’observation des mammifères marins de s’équiper du dispositif de repérage des cétacés, quelle que soit la catégorie ou la taille du navire. Il simplifie aussi la rédaction du présent alinéa. Il s’agit d’éviter que des navires s’équipent de ces dispositifs non pas pour éviter ces mammifères, mais bien pour venir les déranger.

Mme la rapporteure. Je comprends parfaitement votre intention et je reconnais qu’il est nécessaire d’améliorer la rédaction de l’article 46 quater. Mais la rédaction que vous proposez soumettrait certains navires à l’obligation et à l’interdiction d’installer ces dispositifs en même temps. C’est compliqué. Je vous propose de retirer votre amendement afin que nous le retravaillions ensemble.

Mme Laurence Abeille. Je retire mon amendement : je suis d’accord avec la rapporteure pour considérer qu’il faudrait conserver les deux objectifs en évitant toute complexification.

L’amendement est retiré.

La commission adopte l’article 46 quater ainsi modifié.

Chapitre IV
Littoral

Article 51 ter A : Programme d’actions de protection des mangroves et plan d’action pour la protection des récifs coralliens

La commission examine, en discussion commune, les amendements CD37 rectifié de la rapporteure, CD186 de Mme Laurence Abeille et CD121 de M. Bertrand Pancher.

Mme la rapporteure. Le présent amendement vise à compléter l’alinéa 3 par les deux phrases suivantes : « Dans le cadre de ce plan d’action, l’État se fixe pour objectif d’interdire, dans les zones sous souveraineté ou juridiction françaises, les opérations de dragage des fonds marins dans lesquels des récifs coralliens sont présents. Cette interdiction n’a pas vocation à s’appliquer aux dragages qui visent à assurer la continuité du territoire par les flux maritimes. »

Nous nous sommes en effet rendu compte que la première version de l’amendement était un peu trop restrictive, en particulier pour assurer la continuité territoriale en question dans les ports. Nous souhaitons donc rétablir une certaine cohérence, et du bon sens, en interdisant tous les dragages, sauf dans certains cas particuliers.

Mme Laurence Abeille. Notre amendement CD186 propose d’insérer un alinéa précisant que le dragage des fonds marins, lorsqu’il est susceptible de toucher des récifs coralliens, est interdit sur l’ensemble des territoires français.

M. Bertrand Pancher. Notre amendement CD121 répond aux mêmes motivations.

Mme la rapporteure. Je viens de défendre un amendement qui concerne des problèmes spécifiques aux outre-mers, ce qui n’est pas le cas des amendements CD186 et CD121 – auxquels je suis donc défavorable.

M. Bertrand Pancher. Pourquoi devons-nous distinguer l’outre-mer des autres zones concernées par le dragage des fonds marins ?

Mme la rapporteure. Parce que, par endroits, il y a des îles qu’il faut rejoindre et que le passage des bateaux peut être compliqué ; il faut également tenir compte de la rénovation d’aires portuaires. Comme il n’est pas question d’interdire une activité économique de transport, nous avons prévu cette restriction. Il faut savoir faire preuve de raison et considérer que les arguments qu’on nous a exposés sont recevables pour peu que l’on se soucie de l’avenir de ces territoires dont la situation n’est pas toujours facile.

Mme Laurence Abeille. J’entends bien votre argument ; toutefois, les récifs coralliens posent un réel problème en outre-mer – ils sont peu présents autour du territoire métropolitain, si ce n’est en Méditerranée. La rédaction de votre amendement, Madame la rapporteure, ne permet pas de s’assurer que l’on protégera le mieux possible, en tout cas que l’on détruira le moins possible. Il faudrait trouver une formulation plus protectrice des récifs coralliens. Quand votre amendement précise que l’« interdiction n’a pas vocation à s’appliquer aux dragages qui visent à assurer la continuité du territoire par les flux maritimes », il faut lire qu’on donne la priorité aux flux maritimes. Je comprends la problématique, mais je regrette la façon dont vous l’écrivez.

Mme Chantal Berthelot. Ces amendements nous renvoient à la question de la continuité territoriale entre les outre-mers et ce qu’on appelle l’hexagone. Lorsque la rapporteure a présenté son amendement, tout le monde a considéré que la protection des récifs coralliens d’outre-mer entrait dans la logique de la reconquête de la biodiversité. Seulement, dans trois territoires, dont la Martinique et la Guadeloupe, pour pouvoir accéder dans les ports actuels, il faut draguer un chenal. Si on l’interdit, les bateaux vont passer ailleurs et causer des dégâts aux récifs coralliens. Dès lors, que fait-on ? Je rappelle que le trafic maritime entre les Antilles et la métropole est la veine qui irrigue et donc fait vivre ces îles, qu’il s’agisse d’acheminer, dans un sens, des produits agricoles tels que la banane ou le sucre, ou, en sens inverse, des produits alimentaires.

La question est par conséquent de savoir comment draguer des chenaux permettant aux navires de passer. En Guyane, nous sommes obligés de le faire tous les jours… Il est vrai que nous avons moins de coraux, même si l’on vient d’en découvrir de très beaux dans le Nord-Est du Brésil.

Bref, il s’agit de préserver la biodiversité tout en donnant à nos territoires les moyens de leur développement économique. Les outre-mers ont su montrer leur volonté de préserver ce capital indispensable ; mais ils doivent pouvoir, j’y insiste, se développer correctement. La volonté de protéger 75 % de la biodiversité est maintenue ; nous demandons tout simplement de ne pas interdire un dragage s’il permet la continuité territoriale.

Mme Laurence Abeille. La nécessité de préserver les fonds marins et la biodiversité des récifs coralliens est essentielle. Je pense donc vraiment qu’on peut introduire l’idée de détruire le moins possible, ce qui implique sans doute des choix un peu plus difficiles sur les plans économique et technique ; l’idée que le bateau devra passer là où il sera le moins susceptible de dégrader les récifs.

Mme Delphine Batho. L’article 51 ter A fixe des objectifs dont la portée normative reste assez limitée. Nous sommes tous d’accord pour interdire le dragage afin de protéger les coraux, tout en faisant des chenaux servant au trafic maritime la seule exception. Nous pouvons, par conséquent, d’ores et déjà voter l’amendement de la rapporteure, quitte à le compléter en séance.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Nous avons également entendu les arguments de Laurence Abeille.

Mme la rapporteure. On peut en effet retravailler mon amendement. On pourrait préciser, par exemple, la définition des flux maritimes. Reste qu’il est important de laisser aux populations non métropolitaines la capacité de se déplacer. Je rappelle que ce texte valide par ailleurs la notion de compensation : du coup, quand on détruira des récifs coralliens, il se posera probablement un problème de compensations : il y aura donc intérêt à détruire le moins possible.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Compte tenu de nos échanges, je vous propose de voter l’amendement de la rapporteure et d’en améliorer la rédaction d’ici à l’examen en séance.

Les amendements CD186 et CD121 sont retirés.

La commission adopte l’amendement CD37 rectifié.

Puis elle adopte l’article 51 ter A ainsi modifié.

Chapitre IV bis
Lutte contre la pollution

Article 51 undecies A (article 214-17 du code de l’environnement) : Articulation entre la continuité écologique des cours d’eau et la préservation des moulins

La commission examine l’amendement CD38 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Le présent amendement vise à supprimer l’article 51 undecies A, réintroduit au Sénat après que l’Assemblée l’a supprimé en deuxième lecture.

En effet, cet article visait à introduire à l’article L. 214-17 du code de l’environnement une disposition selon laquelle les règles applicables aux ouvrages implantés sur des cours d’eau relevant de la seconde liste définie à cet article, doivent assurer « la conciliation du rétablissement de la continuité écologique avec les différents usages de l’eau, en particulier le développement de la production d’électricité d’origine renouvelable ».

Cette précision semble superflue, étant donné que l’article L. 211-1 du code de l’environnement, qui définit les grands principes de la gestion équilibrée et durable de la ressource en eau, mentionne cet objectif de conciliation entre les usages.

La commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 51 undecies A est supprimé et l’amendement CD199 tombe.

Article 51 duodecies (articles L. 219-1 à L. 219-6 du code de l’environnement) : Régime d’opposabilité des documents stratégiques de façade et des documents stratégiques de bassin maritime et transposition de la directive du 23 juillet 2014 établissant un cadre pour la planification de l’espace maritime

La commission examine les deux amendements identiques CD39 de la rapporteure et CD68 de Mme Viviane Le Dissez.

Mme Viviane Le Dissez. Il semble aux députés du groupe Socialiste, écologiste et républicain que la rédaction des alinéas 14 et 15 est porteuse d’insécurité juridique. En effet, le schéma de cohérence territoriale (SCOT) est un document de planification et non un document régissant l’usage des sols. Aussi les dispositions ici prévues nous semblent-elles de nature à fragiliser les autorisations d’urbanisme plutôt qu’à asseoir leur autorité, et donc de nature à multiplier les recours contentieux. On peut à l’inverse chercher à améliorer la loi littorale dont l’application se révèle difficile, en particulier en Bretagne ; mais ce n’est pas dans le cadre de la reconquête de la biodiversité que nous trouverons des solutions.

Mme la rapporteure. Les alinéas 14 et 15 visent à mettre en place une réforme des règles d’opposabilité de la loi littoral, d’interprétation complexe et porteuse de risques juridiques.

L’alinéa 14 semble instaurer un rapport de compatibilité entre le SCOT et la stratégie nationale pour la mer et le littoral. Or entre ces deux niveaux est placé le document stratégique de façade que le SCOT doit se borner à prendre en compte, le rapport de compatibilité étant plus contraignant que le rapport de prise en compte.

Quant à l’alinéa 15, il prévoit qu’en l’absence de document local d’urbanisme, il doit y avoir un rapport de conformité entre les autorisations d’urbanisme et le SCOT. Or, le SCOT étant un outil de planification stratégique, ce rapport est très difficile à appréhender.

Je vous propose donc de supprimer ces deux alinéas porteurs d’insécurité juridique.

La commission adopte ces deux amendements.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel CD40 de la rapporteure.

Enfin, elle adopte l’article 51 duodecies ainsi modifié.

Article 51 terdecies A (articles L. 541-10 et L. 541-10-5 du code de l’environnement) : Interdiction des cotons-tiges à tige en plastique et création de sanctions pour le non-respect de l’interdiction des sacs, verres, gobelets, assiettes et cotons-tiges en plastique

La commission examine l’amendement CD74 de M. Yves Goasdoué.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Je vous souhaite la bienvenue au sein de cette commission, Monsieur Goasdoué.

M. Yves Goasdoué. Je vous remercie pour votre accueil chaleureux, Monsieur le président.

Le présent amendement me paraît très important pour l’industrie française. L’article 51 terdecies A prévoit de remplacer les « sticks », autrement dit les tiges des bâtonnets ouatés par toute substance biodégradable. C’est une excellente chose. Aujourd’hui, la quasi-totalité, dans le monde, à savoir des milliards de sticks sont en plastique et donc polluent. Or, quand on est maire, comme moi, depuis de très nombreuses années, qu’on administre de grandes stations d’assainissement, on sait que ces tiges sont très difficiles à retenir et à filtrer. Je n’ai donc aucune difficulté sur le fond avec cet article.

Il faut cependant laisser l’industrie française le temps de s’adapter. Cette industrie, c’est essentiellement une entreprise familiale, le groupe Lemoine, localisée dans l’Orne, plus précisément dans ma ville et qui emploie 250 personnes. C’est le père, le fils…

Mme Laurence Abeille. Et le Saint-Esprit ? (Sourires.)

M. Yves Goasdoué. Il n’y pas le Saint-Esprit… Je veux dire par là qu’il ne s’agit en aucun cas d’une industrie qui relèverait de grands groupes financiers, de fonds de pension ; elle est dirigée par des gens dont l’engagement éthique – publié il y a cinq ans : ils ne nous ont pas attendus –, précise notamment : « Nous nous engageons à apporter une contribution sociale, à respecter notre environnement, à préserver nos attaches territoriales et à rémunérer justement les salariés comme l’actionnaire. »

Je ne voulais pas présenter, devant cette commission, une demande qui fût dilatoire. J’ai donc demandé aux services du ministère de l’environnement d’étudier les conditions dans lesquelles cette industrie devait s’adapter – ses concurrents sont essentiellement chinois et allemands. J’ai demandé au ministère de m’indiquer si le délai de 2020 était raisonnable ou de nature dilatoire. Il m’a été répondu qu’il était raisonnable. J’ai donc demandé aux dirigeants de l’entreprise d’engager dès à présent, à savoir avant même le vote du projet de loi, l’ensemble des diligences qui leur permettra d’adapter la technique, les préséries, les séries, la commercialisation. Ils se trouvent en ce moment même en Chine pour traiter avec les Chinois.

Telles sont les raisons pour lesquelles je vous demande de reporter l’interdiction des bâtonnets ouatés à tige plastique de 2018 à 2020.

Mme la rapporteure. Compte tenu de vos explications, même si nous aurions aimé que ce soit plus tôt, il convient d’être conscient des problèmes que peut poser cette interdiction à une entreprise. Je suis donc prête à donner un avis favorable à votre amendement.

M. Yves Goasdoué. Je vous remercie, Madame la rapporteure.

La commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel CD41 de la rapporteure.

Elle en vient à l’amendement CD125 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Cet amendement de clarification rédactionnelle permet d’expliciter le fait qu’il ne sera pas possible de mettre sur le marché des produits cosmétiques rincés à usage d’exfoliation ou de nettoyage dont les particules sont d’origine naturelle ou, quand elles ne le sont pas, ne sont pas susceptibles de subsister dans les milieux, d’y propager des principes actifs chimiques ou biologiques ou d’affecter les chaînes trophiques animales. Il s’agit donc également d’encourager le développement rapide d’alternatives.

L’amendement est adopté.

La Commission examine les amendements identiques CD43 de la rapporteure et CD67 de Mme Sylviane Alaux.

Mme Viviane Le Dissez. Nous proposons d’interdire, par la voie législative plutôt que par la voie réglementaire, la distribution et la production de produits cosmétiques et de détergents comportant des particules plastiques.

Mme la rapporteure. L’amendement CD43 a le même objet que le CD67. Avis favorable.

La Commission adopte ces amendements.

Puis elle adopte l’article 51 terdecies A ainsi modifié.

(La séance, suspendue à vingt-deux heures quarante, est reprise à vingt-deux heures cinquante.)

Article 51 quaterdecies (article L. 253-1 du code rural et de la pêche maritime) : Restriction de l’utilisation des produits contenant des substances actives de la famille des néonicotinoïdes

La Commission examine, en discussion commune, les amendements CD141 de la rapporteure, CD142 de Mme Delphine Batho et CD184 rectifié de Mme Laurence Abeille.

Mme la rapporteure. Cet amendement, cosigné par plus de 90 députés membres de commissions différentes, vise à rétablir la mesure d’interdiction des produits phytopharmaceutiques contenant des substances actives de la famille des néonicotinoïdes dans la rédaction que l’Assemblée avait adoptée en deuxième lecture, en fixant au 1er septembre 2018 la date d’interdiction de ces produits.

Il nous apparaît, en effet, que seule une interdiction de portée générale de ces produits peut être efficace, dès lors qu’en raison des propriétés de systémie et de persistance des néonicotinoïdes, les mesures de réduction des risques ou d’interdiction partielle n’ont pas eu un effet suffisant pour réduire l’intoxication chronique de l’environnement causée par les usages. De plus, le législateur ne doit pas se décharger sur l’ANSES de décisions qui ne sont pas seulement d’ordre technique, mais également de nature politique. Les parlementaires doivent prendre leurs responsabilités dans un débat qui ne se limite pas à un problème agronomique mais qui a des répercussions sur la protection de l’environnement et sur la santé publique.

Mme Delphine Batho. Mon amendement CD142 se distingue de l’amendement CD141, dont je suis cosignataire, sur un seul point, celui de la date d’entrée en vigueur de l’interdiction, que je souhaiterais voir fixée au 1er septembre 2017.

À ce stade de la discussion, je tiens à évoquer deux points. Tout d’abord, la disposition votée par le Sénat ne tient pas debout sur le plan juridique, puisqu’elle renvoie la décision d’interdire ces substances à l’ANSES alors qu’une telle interdiction ne relève pas de ses compétences. Ensuite, selon les informations rendues publiques après la saisie de la Commission d’accès aux documents administratifs (CADA) par les apiculteurs, le tonnage de néonicotinoïdes utilisés en France a augmenté de 31 %, et de 36 % pour l’imidaclopride, et ce, malgré le « moratoire » – terme inapproprié – partiel européen, d’ailleurs soutenu par la France. Force est donc de constater que de simples restrictions d’usage ne permettent pas de réduire l’utilisation de ces substances. C’est pourquoi une mesure d’interdiction de portée générale est préférable, dans les conditions prévues par l’amendement, notamment en ce qui concerne la présentation aux agriculteurs de solutions alternatives permettant de protéger leurs cultures des ravageurs.

Mme Laurence Abeille. Auditions, reportages, témoignages : tous soulignent la gravité et la persistance des effets des pesticides néonicotinoïdes sur l’environnement, la biodiversité et la santé humaine. L’interdiction de ces produits est donc une urgence sanitaire. Parce qu’il nous semble, à nous, écologistes, que nous ne pouvons plus attendre, je propose également, par l’amendement CD184 rectifié, que cette interdiction entre en vigueur à compter du 1er septembre 2017. En effet, nous pouvons d’ores et déjà nous passer des pesticides néonicotinoïdes, même si une mobilisation générale, en particulier des services de l’État, sera nécessaire pour permettre aux agriculteurs concernés de s’engager rapidement dans la transition. J’ajoute que si nous sommes parvenus à un compromis sur la date d’interdiction, cette date est importante et symbolique et il serait mieux pour tout le monde qu’elle puisse être avancée.

Mme Françoise Dubois. Je suis tout à fait opposée à ces amendements, car les dates proposées me paraissent beaucoup trop proches. Nous mettrons les agriculteurs en grande difficulté tant que nous ne serons pas en mesure de leur proposer des solutions alternatives aux néonicotinoïdes. Au demeurant, ils utilisent désormais ces produits de manière raisonnable, et ils en ont besoin, comme j’ai pu le constater ce matin en rendant visite à certains d’entre eux, dont les cultures de maïs sont attaquées par une mouche qui se développe à la faveur du dérèglement climatique. Pour ces différentes raisons, la date de 2020, retenue par le Sénat, me paraît beaucoup plus raisonnable.

M. Yannick Favennec. Alors que notre agriculture traverse une crise sans précédent, l’interdiction des produits néonicotinoïdes, au 1er septembre 2018, est à la fois prématurée et inopportune. Nos agriculteurs ne cessent de nous alerter sur la complexification des normes et la multiplication des contraintes. En prenant une décision aussi radicale, nous risquons de tomber, une fois de plus, dans les travers de la surtransposition. En outre, le danger, bien réel, est de créer une nouvelle distorsion de concurrence entre notre agriculture et celle des autres États membres. Or, dans le contexte actuel, il serait tout à fait irresponsable de soumettre notre filière agricole à des restrictions aussi sévères, tout en continuant à importer des produits européens qui ne seront pas soumis aux mêmes règles. De fait, si nos voisins commencent à réfléchir à une interdiction partielle, aucun n’a encore opté pour une interdiction généralisée de ces produits.

Entre 2013 et 2015, l’ensemble des États membres ont été soumis à un moratoire européen sur trois substances néonicotinoïdes réputées dangereuses. Ainsi, plutôt que d’interdire drastiquement ces produits sur son territoire national, la France devrait engager des négociations claires avec ses partenaires européens à Bruxelles. De manière générale, les députés du groupe Union des démocrates et indépendants soutiennent la mise en place d’une phase de transition permettant une interdiction progressive de ces substances dont nous reconnaissons la toxicité, commune à tous les produits phytopharmaceutiques.

En outre, si des produits alternatifs existent, ils ne représentent pas toujours des garanties supplémentaires pour les pollinisateurs. Ainsi, l’interdiction des néonicotinoïdes risque de produire l’effet inverse de celui recherché, en favorisant l’utilisation d’insecticides tout aussi néfastes pour les abeilles en période de pollinisation. J’ajoute que pour certaines cultures, comme celle de la noisette, aucune solution de remplacement n’est encore connue à ce jour.

Face à ce constat, les députés du groupe Union des démocrates et indépendants ont choisi de défendre une position responsable et raisonnée en proposant un compromis, qui a du reste été repris par le Sénat en deuxième lecture. Cette solution, qui consiste à confier, à l’ANSES, le soin d’interdire l’usage d’un des produits de la famille des néonicotinoïdes dès lors qu’il existe des méthodes ou des produits de substitution identifiés, permettrait d’organiser une interdiction progressive en fonction des alternatives connues et, surtout, moins nocives. À titre d’information, l’ANSES a rappelé les lacunes importantes qui demeurent dans la connaissance de l’impact de ces produits sur les abeilles. Elle s’est néanmoins prononcée en faveur d’un prolongement du moratoire européen sur les trois substances estimées dangereuses : le thiaméthoxame, la clothianidine et l’imidaclopride. Sur ce point, les députés du groupe Union des démocrates et indépendants ne peuvent que soutenir la préconisation de l’ANSES. Du reste, le ministre de l’agriculture lui-même soutient ce compromis.

M. Guillaume Chevrollier. Je souscris aux arguments présentés par mon collègue de la Mayenne qui, comme moi, connaît bien les réalités du monde agricole. Le débat sur l’interdiction des néonicotinoïdes a déjà fait l’objet de nombreux échanges entre les deux chambres du Parlement, puisque nous en sommes à la troisième lecture du texte. Un compromis a ainsi été trouvé au Sénat, qui est parvenu à un équilibre entre, d’une part, la nécessité de limiter ou de supprimer, à terme, les néonicotinoïdes et, d’autre part, celle de laisser le temps aux exploitants de s’adapter pour éviter de mettre à mal la diversité des productions agricoles, génératrice d’emplois sur le territoire. Une date d’interdiction trop proche ne permettrait pas à nos agriculteurs, aux prises avec un environnement concurrentiel difficile, de trouver des solutions alternatives efficaces au plan agronomique, économiquement tenables et écologiquement performantes.

La sagesse commande donc d’attendre que l’ANSES nous remette un rapport avant la fin de l’année 2016, puis de lui confier, à compter de 2018, une mission pérenne de vigilance avant une interdiction à l’horizon 2020, afin que les professionnels aient le temps de trouver des produits de substitution. Cette solution équilibrée permettrait à notre agriculture de maintenir ses positions.

M. Gérard Bapt. Je comprends la position du groupe Union des démocrates et indépendants, qui souhaite que nous adoptions un compromis en vue de la suppression, à terme, des néonicotinoïdes – objectif qui semblent reconnus par tous –, puis de l’ensemble des pesticides. Toutefois, le Sénat s’en remet à l’ANSES pour interdire l’usage de ces produits culture par culture, catégorie de produit par catégorie de produit, en fonction de l’existence d’un substitut. Or, ces solutions alternatives consistent, pour une part, dans de nouvelles méthodes agronomiques, dont l’efficacité est reconnue mais qui sont mises en œuvre progressivement dans l’agriculture biologique, mais également les fermes Delphi, et concernent de petites entreprises dirigées par de jeunes exploitants. Nous savons que les générations les plus anciennes auront quelques difficultés à opérer cette révolution culturale.

Ces solutions résident également dans la mise sur le marché de produits de substitution. Mais je vois mal comment l’ANSES pourrait, d’ici au 31 décembre 2016, faire d’autres propositions que celles qui figurent dans ses rapports, notamment le dernier, dans lequel elle préconise le renforcement du moratoire et des précautions d’usage.

En outre, même lorsque des substituts existent, les firmes multinationales qui produisent ces substances refusent de les mettre sur le marché européen. Or, l’ANSES n’aura jamais la capacité juridique de passer outre leur refus et d’imposer la commercialisation d’un produit de substitution qui lui permettrait d’interdire l’usage d’un produit néonicotinoïde – le même problème se pose, du reste, dans le secteur pharmaceutique, à propos, par exemple, de la substitution de l’Avastin au Lucentis. Nous avons pu constater, lors de l’interdiction du Bisphénol A, que, lorsque les industriels sont au pied du mur et peuvent bénéficier d’un délai d’adaptation, ils finissent par proposer des produits de substitution. Mais encore faut-il qu’ils l’acceptent, ce qui n’est pas le cas en l’espèce. On sait en effet qu’une vingtaine de produits de biocontrôle vendus aux États-Unis sont absents du marché européen, tout simplement parce que les grandes firmes en ont décidé ainsi.

Quoi qu’il en soit, il est nécessaire de fixer une date butoir – 2017 ou 2018, à la limite, peu importe. D’autant que, depuis quelques mois, la publication des études s’est accélérée dans ce domaine. On sait ainsi désormais qu’un neurone humain soumis à de faibles doses de nicotine ou de néonicotinoïdes subit les mêmes retards de développement qu’un neurone de rat. Faut-il rappeler l’épidémie d’autisme à laquelle on assiste et la progression exponentielle de ce que l’on appelle les troubles envahissants du développement neurocognitif, dont l’ONU elle-même s’alarme ?

En conclusion, s’il convient de prévoir un certain temps d’adaptation, il est impératif de fixer une date butoir, car il y a urgence, et l’on nous demandera des comptes. Les problèmes de fertilité qui obligent un nombre croissant de couples à recourir à la PMA pour avoir des enfants doivent nous interpeller !

M. Philippe Plisson. C’est un débat difficile. Moi qui suis fils d’agriculteur, j’ai vécu, dans ma ferme, le passage de l’agriculture rurale à l’agriculture productiviste, avec tous ses avantages, mais également tous ses inconvénients. Nous sommes passés du cheval au tracteur, d’une petite propriété familiale à une exploitation beaucoup plus vaste, mais également à une autre logique avec les intrants, les engrais, les pesticides… et nous avons assisté à un emballement. Aujourd’hui, nous touchons aux limites du système, et il nous faut revenir en arrière. Hélas, le « logiciel » des agriculteurs est ainsi fait que cette révolution culturelle les affole, et je peux le comprendre. Elle est néanmoins indispensable, pour les céréaliers comme pour les viticulteurs. Dois-je rappeler en effet que, dans ma circonscription, des écoliers ont été malades à cause de l’épandage d’insecticides dans des vignobles proches de leur établissement ? Et pendant ce temps, la Commission européenne hésite et il faut une forte pression des populations pour qu’on ne réautorise pas le Roundup, dont on connaît pourtant tous les effets néfastes.

Il faut donc que nous ayons le courage politique de dire : « C’est fini ! ». Des délais sont toutefois nécessaires. C’est pourquoi, si je peux être favorable à la date de 2017, je crois préférable de retenir celle du 1er septembre 2018, proposée dans l’amendement CD141.

M. Jean-Yves Caullet. Philippe Plisson me paraît bien optimiste, car personne au monde n’est jamais parvenu à changer de système alimentaire et agronomique en dix-huit mois ! Or, l’enjeu est bien celui-là, et la question de la date d’entrée en vigueur de l’interdiction devrait être examinée à cette aune. J’ajoute que, si l’on veut « revenir en arrière », pour reprendre ses mots, il faut accepter que chaque ménage consacre en moyenne 30 % de ses revenus à l’alimentation… (Murmures)

En tout état de cause, il me paraît beaucoup trop prématuré d’interdire l’utilisation de ces produits dès 2018, d’autant que l’amendement de notre rapporteure ne comporte aucune mesure intermédiaire puisque les alinéas relatifs aux solutions de substitution ne s’inscrivent pas dans les mêmes délais. Quant à savoir comment un arrêté pourrait déterminer des pratiques culturales… Ce serait une véritable innovation juridique ! En réalité, une fois ces substances interdites, les agriculteurs se débrouilleront avec les pyrèthres qu’ils ont sous la main et qu’ils pulvériseront, conformément à la réglementation, deux à trois fois par an, avec un succès inégal pour le traitement des cultures, mais des effets certains sur les insectes volants en pleine période de butinage.

J’avais, quant à moi, préconisé une solution tenant compte des imperfections de la rédaction sénatoriale : il s’agissait de s’inscrire dans une véritable démarche de réduction, sous le contrôle d’une autorité administrative, et de fixer une date butoir – celle de 2020 me paraissait acceptable. Hélas ! il ne sera pas possible d’en discuter.

M. Bertrand Pancher. Il est évidemment urgent de réglementer et d’interdire l’usage des néonicotinoïdes. Il serait en effet déraisonnable de ne pas reconnaître leurs graves effets sur la santé et l’environnement. Je partage le raisonnement de Gérard Bapt, sur ce point. Mais l’on sait que les biocontrôles posent des problèmes de coût et d’efficacité, donc de rendement. En outre, s’ils sont adaptés à certains types de culture, comme la viticulture ou l’arboriculture fruitière, c’est beaucoup plus compliqué pour les grandes cultures. Interdire, à court terme, l’utilisation des néonicotinoïdes du jour au lendemain mettra donc les agriculteurs en grande difficulté. Par ailleurs, il s’agit d’une famille de produits ; il serait donc intelligent de distinguer entre les différentes catégories de néonicotinoïdes. C’est pourquoi prononcer une interdiction de portée générale dès 2018 me paraît prématuré. Il faut poser le principe d’une telle interdiction et fixer un calendrier un peu plus long. Enfin, je souscris totalement à l’argumentaire de Jean-Yves Caullet : si nous supprimons les néonicotinoïdes trop tôt, les agriculteurs reviendront au traitement aérien à l’ancienne, dont nous connaissons les inconvénients.

En résumé, notre groupe est favorable à la réglementation et à l’interdiction la plus rapide possible de ces substances, mais selon un calendrier réaliste et dans le cadre d’une analyse des produits de substitution disponibles.

M. Gilles Savary. Dans ce débat, nous devons garder la tête froide, même si nous subissons, au nom de l’environnement et du politiquement correct, des pressions très fortes qui pourraient nous amener à privilégier l’intuition plutôt que la raison.

Je ne crois pas une seconde que nos agriculteurs feront marche arrière et qu’ils reviendront à la houe et au travail manuel. Imagine-t-on de revenir aux conditions de travail ouvrières du XIXsiècle au moment où nous introduisons des critères de pénibilité un peu partout ?

Plusieurs députés du groupe Socialiste, écologiste et citoyen. Il n’est pas question de cela !

M. Gilles Savary. Si, je l’ai déjà entendu.

Tour d’abord, je rappelle que le projet agricole de la France n’a jamais eu pour objectif de subvenir aux seuls besoins du pays mais de nourrir, au-delà de ses frontières, une partie la population mondiale qui n’a pas le privilège de se trouver sur le 45e parallèle. Il faudra bien que nous discutions un jour de ce sujet ; nous ne pouvons pas être égoïstes.

Ensuite, si je crois que nous devons nous assigner pour objectif l’abandon de la chimie, en particulier des néonicotinoïdes, et fixer une date d’interdiction, j’aurais préféré que l’on prévoie des clauses de rendez-vous à propos des solutions alternatives. Car, aujourd’hui, nous envisageons de prendre une mesure qui, pour idéale qu’elle soit, ne sera pas appliquée par les agriculteurs. Nous savons ce qu’il en est du Roundup : des stocks existent partout, on se les refile, certains revendent en sous-main. Si l’on est trop brutal, si l’on refuse toute alternative qui ne relève pas d’une agriculture presque primitive – qu’il s’agisse des OGM ou de la chimie –, non seulement les agriculteurs basculeront tous vers le Front national, mais ils sauront parfaitement s’organiser pour contourner ces interdictions. (Murmures)

Nous devons donc être très clairs sur l’objectif, mais nous devons fixer des clauses de rendez-vous. Ne soyons pas intégristes : si l’on supprime les néonicotinoïdes, comment vais-je faire pour préserver mes semences ? Si j’ai des solutions alternatives, je les supprime. Si je n’en ai pas, je serai très arrogant, très présomptueux – et sans doute très politiquement correct.

Mme Laurence Abeille. Ne caricaturons pas : personne n’envisage de revenir à la houe ! Il s’agit, au contraire, d’aller de l’avant, de s’inscrire dans une logique non de régression, mais de progrès. Si nous affirmons qu’il est non seulement nécessaire mais possible de se passer des néonicotinoïdes, c’est parce que nous savons que des solutions alternatives existent d’ores et déjà. Les ingénieurs agronomes, les techniciens de l’agriculture et certains agriculteurs les connaissent parfaitement et on sait qu’elles n’ont pas d’influence négative sur le rendement. Si l’on en croit les discours alarmistes dont nous submergent les firmes de l’industrie chimique, nous détruirions l’emploi et la production. Non ! Ce qui est en jeu aujourd’hui, c’est la santé publique et la biodiversité, car ces produits tuent les insectes pollinisateurs. Nous ne pouvons pas nous permettre de ne pas nous engager dans cette voie. Sinon, dans quelques années, la situation aura empiré, car les colonies d’abeilles continueront de disparaître. On nous a un jour présenté un buffet sur lequel n’étaient disposés que des aliments issus de produits qui peuvent se dispenser de pollinisateurs. Eh bien, je peux vous dire qu’il n’y avait pas grand-chose sur la table ! (Sourires)

Si nous ne prenons pas la décision d’interdire ces substances, nous allons vers une catastrophe. Certes, l’État et les chambres d’agriculture devront accompagner les agriculteurs concernés au cours de la transition. Mais, dès lors que des solutions alternatives existent, il ne faut pas s’inquiéter outre mesure.

M. Gilles Savary. Si ces solutions existent, alors il n’y a pas de problème !

Mme Laurence Abeille. J’estime quant à moi qu’il faut agir le plus rapidement possible, mais j’accepte de me rallier à la date proposée dans l’amendement CD141 puisqu’elle fait l’objet d’un relatif consensus. Je suis certaine que la coopération et la mutualisation qui existent au sein du monde agricole nous aideront à gagner ce pari.

Mme Delphine Batho. L’exemple du maïs est intéressant. En effet, le moratoire européen portait précisément sur le traitement de ces semences par le thiaméthoxame, la clothianidine et l’imidaclopride. Or, il est important de le rappeler, ce moratoire a été décidé le 24 mai 2013 et appliqué dès le 1er décembre 2013 : c’est dire la longueur du délai de prévenance… Notre position n’a rien à voir avec le politiquement correct : elle est fondée sur des connaissances scientifiques. Ainsi, ces substances sont en train d’être réévaluées au niveau européen : un jour ou l’autre, le couperet tombera, et le délai d’application sera comparable à celui du moratoire européen.

Mais que s’est-il passé avec le maïs ? Comme ce moratoire ne visait que trois substances, une quatrième, celle-là autorisée, le Sonido, a été mise sur le marché, de sorte que le maïs continue d’être traité à l’aide d’un produit de la même famille… Telle est la technique imparable des firmes, parfaitement décrite par Gérard Bapt en séance publique : dès qu’une molécule est interdite en raison d’une urgence sanitaire, elles sortent de leur chapeau une nouvelle, à peu près comparable, qui échappe à l’interdiction.

En outre, la simplicité me paraît préférable à la complexité. Or, des mesures de restriction partielle portant uniquement sur certains usages, telles que celles que préconise l’ANSES, conduisent à des dispositions à s’arracher les cheveux pour les agriculteurs, beaucoup moins faciles à mettre en œuvre qu’une décision simple, claire et de portée générale : ainsi, on ne pourrait plus faire de colza dans un champ semé en blé l’année précédente et traité au Gaucho… Par ailleurs, puisque nous parlons du monde agricole, j’aimerais que nous interpellions tous vigoureusement le Gouvernement sur la mise en œuvre de la réforme de la PAC, dont le calendrier n’est jamais respecté.

En conclusion, à force de reporter sans cesse la décision d’interdire ces substances, nous serons un jour contraints d’appliquer une décision européenne, et elle sera brutale.

M. Philippe Plisson. Il n’y a pas d’alternative : si, demain, ces produits sont supprimés, l’agriculture française n’existera plus. Cependant, si nous ne donnons pas de signaux forts, elle ne se remettra jamais en question et nous continuerons de nous empoisonner. Alors qu’on a pris conscience de la dangerosité de ces produits et on continue, tous phares allumés, en attendant le déluge !

Le président Jean-Paul Chanteguet a organisé une table ronde où des agriculteurs sont venus nous expliquer comment ils avaient réussi leur coming out. Je me souviens d’un jeune agriculteur qui pratique des jachères tournantes, ce qu’on ne fait plus : il réalise des bénéfices. Car ces produits coûtent terriblement cher ; ce jeune agriculteur gagnait plus en s’en passant, il ne s’empoisonnait plus et n’empoisonnait plus ses voisins. Il est temps de siffler la fin de ce productivisme dangereux, au profit d’une agriculture raisonnable et raisonnée.

Mme la rapporteure. Dans ce débat, que nous avons déjà eu, nous sommes tous d’accord : il y a urgence, pour les pollinisateurs, pour la santé publique, mais aussi pour nos agriculteurs. Il faut prendre nos responsabilités et pour cela nous devons prévoir une date butoir, sinon nous adopterons des mesurettes qui ne serviront à rien, et dans dix ou quinze ans, nous serons encore à pleurer de ne pas avoir voté, lorsque nous étions parlementaires, une interdiction claire et précise…

Néanmoins, nous ne souhaitons pas placer les agriculteurs devant des difficultés insurmontables. Nous connaissons leurs contraintes. C’est pourquoi l’amendement que je propose permet un temps d’adaptation, car je pense que 2017 est effectivement trop court pour permettre à tous de mettre en place des méthodes de culture alternatives.

Cet amendement prévoit un arrêté conjoint des ministres définissant, après avis de l’ANSES, les solutions de substitution : produits phytopharmaceutiques alternatifs, pratiques culturales durables, etc. Des mesures alternatives sont déjà connues ; mais, « c’est le comble », disait très bien Gérard Bapt, jamais elles ne viendront sur le marché si nous ne créons pas d’obligation.

Ajoutons que la France est, en matière agricole, un poids lourd au plan européen ; elle donnera par là même un signal très fort à l’Europe. Évidemment, il faudra sans doute un accompagnement par les chambres d’agriculture, qui jusqu’à présent ont toujours prôné la même logique et les mêmes techniques. Notre responsabilité est de dire qu’il faut en sortir ; et pour cela, il faut arrêter une date butoir.

Le reste se tricotera de lui-même : on commence par faire un point, puis un autre, et c’est ainsi qu’on finit par faire un pull… L’interdiction des produits à base de néonicotinoïdes, c’est un pas, et nous continuerons d’avancer, pour que nos agriculteurs, les pollinisateurs, nos enfants y gagnent. J’ai bien entendu que Laurence Abeille se ralliait à mon amendement ; je propose à Delphine Batho de retirer également le sien, et j’espère que nous pourrons conforter cet accord en séance publique.

L’amendement CD184 rectifié est retiré.

La Commission adopte l’amendement CD141.

En conséquence, l’amendement CD142 tombe.

La Commission examine ensuite l’amendement CD126 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Prenant acte de l’absence d’évaluation, d’information, et de suivi des cultures rendues tolérantes aux herbicides issues de la mutagenèse, communément appelées VrTH (variétés rendues tolérantes aux herbicides), et en l’état actuel d’insuffisance d’évaluations préalables indépendantes et transparentes des risques pour l’environnement, la durabilité des systèmes de culture et la santé publique, la ministre de l’écologie a saisi l’ANSES le 4 mars 2015 pour faire le point sur la question.

Les VrTH étant issus de la mutagenèse, et non de la transgénèse, elles n’entrent pas dans la catégorie des OGM et échappent donc à tout contrôle, alors qu’ils sont tout aussi dangereux, parfois même davantage : qui plus est, il peut s’agir de tournesol, mais également de colza. Il s’agit d’une crucifère, avec de toutes petites graines, qui diffuse très largement et entraîne une résistance accrue des adventices de la même famille auxquelles elle pourra parfois transférer ses gènes. Il n’est pas pensable de laisser ces cultures nous envahir.

À ce jour, le rapport n’a toujours pas été remis, et aucune date de remise n’est prévue. C’est pourquoi je propose un moratoire sur la culture de semences de colza et de tournesol tolérantes aux herbicides issues de la mutagenèse jusqu’au 31 décembre 2018, en espérant que cela incitera l’ANSES à remettre son rapport afin que nous soyons fixés. Il serait dommage de ne rien faire sur les VrTH après ce que nous venons de voter sur les néonicotinoïdes.

M. Jean-Yves Caullet. Au-delà même de l’amendement, que je voterai, nous devrions nous opposer à toute stratégie agricole ou agronomique visant à développer l’usage. Sur les néonicotinoïdes, nous avons interdit une pratique, tandis qu’il s’agit là de déjouer une stratégie : imaginez qu’on nous propose de développer des néonicotinoïdes au motif qu’on a trouvé des abeilles résistantes… Une interdiction générale de ce type de stratégies, qu’elles s’appuient sur la mutagénèse ou sur la transgénèse, devra être décidée un jour ou l’autre, car c’est vraiment une voie sans issue. C’est un début…

M. le président Paul Chanteguet. Comme quoi…

Mme la rapporteure. Il y a un début à tout ! (Sourires)

La Commission adopte cet amendement.

Ensuite de quoi, elle adopte l’article 51 quaterdecies ainsi modifié.

Article 51 sexdecies : Rapport sur les plantes invasives

La Commission adopte l’article 51 sexdecies sans modification.

Chapitre V
Sanctions en matière d’environnement

Article 52 (articles L. 415-3, L. 415-6, L. 624-3 et L. 635-3 du code de l’environnement) : Sanctions applicables à certaines infractions en matière d’environnement (supprimé)

La Commission examine l’amendement CD5 de M. Martial Saddier.

M. Guillaume Chevrollier. Cet amendement supprime l’augmentation de 15 000 à 150 000 euros d’amende sanctionnant les atteintes aux espèces. En effet, l’article L. 415‑3 du code de l’environnement couvre des infractions non intentionnelles et des cas de négligence, y compris le non-respect des conditions d’une dérogation « espèces protégées ». La multiplication par dix du quantum de la peine d’amende apparaît brutale et disproportionnée, et ne répond pas à l’échelle des peines. Il est proposé de maintenir la peine actuelle d’un an de prison et de 15 000 euros d’amende.

Mme la rapporteure. Défavorable. Les juges sont capables de faire la part des choses et de prononcer des peines proportionnées. Ceux qui commettent des infractions plaident souvent la méconnaissance, mais pas toujours à juste titre. Pour avoir une action forte, il faut envoyer un signal clair ; c’est ce que nous faisons à l’alinéa 2.

La Commission rejette cet amendement.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, elle rejette ensuite l’amendement CD6 de M. Martial Saddier.

Puis elle adopte l’article 52 sans modification.

Chapitre VII
Habilitations à légiférer par ordonnance et dispositions diverses

Article 59 bis AA (articles L. 211-3, L. 212-5-1, L. 300-4 [nouveau], L. 331-3, L. 331-3-1 et L. 331-3-2 [nouveaux] du code de l’environnement) : Simplification des règles de fonctionnement des parcs nationaux, rectification d’une erreur matérielle et coordination entre codes

La Commission adopte l’article 59 bis AA sans modification.

Article 59 bis AB (articles L. 411-3, L. 411-4, L. 411-5, L. 411-6, L. 411-7 et L. 411-8, L. 411-9, L. 411-10 et L. 411-11 [nouveaux], L. 414-9, L. 415-2 [nouveau], L. 415-3, L. 624-3, L. 635-3 et L. 640-1 du code l’environnement) : Lutte contre les espèces exotiques envahissantes

La Commission examine l’amendement CD146 de M. Philippe Plisson.

M. Philippe Plisson. Cet amendement vise à supprimer l’alinéa 7 de cet article, qui prévoit que certaines espèces peuvent bénéficier d’une protection particulière. L’intention est louable mais, si cela se généralise au-delà des abeilles, elle pourrait conduire à ne pas détruire certaines espèces nuisibles, au détriment de l’équilibre naturel : malheureusement, la nature ne se régule plus toute seule et l’intervention de l’homme est devenue nécessaire. Cet alinéa 7 est dangereux.

Mme la rapporteure. Défavorable. Je n’ai pas du tout le même point de vue : je pense au contraire que toutes les espèces, à l’instar des abeilles, jouent un rôle dans l’écosystème. Supprimer cet alinéa signifierait que nous sommes prêts à tirer un trait sur certaines espèces, méconnaissant par là même le rôle qu’elles jouent pour le bon fonctionnement de nos écosystèmes.

La Commission rejette cet amendement.

La Commission examine ensuite l’amendement CD96 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. En deuxième lecture, l’Assemblée nationale avait adopté une disposition interdisant la pose de nouveaux poteaux creux ainsi que le remplacement ou le bouchage des poteaux creux existants. Nous nous doutions bien cependant que ce serait un travail immense. Cet amendement propose plutôt de demander aux pouvoirs publics de ne plus faire poser de poteaux qui pourraient constituer des pièges pour les animaux.

La Commission adopte cet amendement.

Ensuite de quoi, elle adopte l’amendement rédactionnel CD94 de la rapporteure.

Puis elle adopte l’article 59 bis AB modifié.

Article 59 bis AC (articles L. 424-1 et L. 424-10 du code de l’environnement) : Dérogations à l’interdiction de destructions d’œufs d’oiseaux

La Commission adopte l’article 59 bis AC sans modification.

Article 59 bis B (article L. 422-4 du code de l’environnement) : Maintien des associations de chasse en cas de fusion de communes

La Commission examine l’amendement CD198 de Mme Karine Berger.

M. Philippe Plisson. Cet amendement a déjà été adopté lors de la précédente lecture. L’application de la loi NOTRe encourage la fusion de communes, ce qui est une bonne chose, mais il existe à la fois des associations communales de chasse agréées (ACCA) que des associations de chasse loi 1901, elles aussi communales. Nous demandons que la fusion de communes n’implique pas forcément celle des associations de chasse, qui doivent rester libres de s’associer ou non, en continuant à vivre sur leur territoire. C’est important car la montée au créneau de chasseurs conduit certains maires à reculer sur des fusions, pourtant nécessaires.

Mme la rapporteure. Défavorable. Le Sénat a permis ce que souhaite M. Plisson : « La fusion de communes n’entraîne ni la dissolution ni la fusion des associations communales de chasse agréées préalablement constituées dans les communes concernées, sauf décision contraire de ces associations. » Ce n’est pas la peine de récrire un article aussi clairement rédigé.

M. Philippe Plisson. Dans certains départements, les ACCA ne sont pas obligatoires et certaines associations de chasseurs ont le statut d’associations loi 1901. Or le Sénat ne parle que des ACCA.

M. Jean-Yves Caullet. La rédaction du Sénat est parfaite pour les ACCA, mais les sociétés communales de chasse n’ont pas le même statut, alors qu’elles posent, eu égard aux fusions de communes, le même type de problèmes, qui peuvent être réglés de la même façon. Cette retouche ne change rien au fond, mais permet d’éviter que les sociétés de chasse ne se croient exclues de l’article et obligées de fusionner.

Mme la rapporteure. Ces explications me conduisent à donner un avis favorable.

La Commission adopte cet amendement.

Puis elle adopte l’article 59 bis B modifié.

Article 59 ter (articles L. 413-6, L. 413-7 et L. 413-8 [nouveaux] du code de l’environnement, article L. 212-10 du code rural et de la pêche maritime) : Encadrement de la détention d’espèces non domestiques protégées

La Commission adopte l’article 59 ter sans modification.

Article 59 quinquies (nouveau) (ordonnance n° 2015 – 1174 du 23 septembre 2015 relative à la partie législative du livre Ier du code de l’urbanisme) : Ratification de l’ordonnance portant nouvelle rédaction, à droit constant, du code de l’urbanisme

La Commission adopte l’article 59 quinquies sans modification.

Article 60 (articles L. 331-10, L. 427-6, L. 427-8, L. 33-10-4, L. 422-2, L. 422-15, L. 424-10, L. 427-8, L. 427-10, L. 423-16, L. 424-15, L. 427-11, L. 428-14, L. 428-15 du code de l’environnement ; article L. 2122-21 du code général des collectivités territoriales) : Substitution de la notion d’« espèce déprédatrice » à celle d’« espèce nuisible et malfaisante »

La Commission examine les deux amendements identiques CD25 de M. Martial Saddier et CD147 de M. Philippe Plisson.

M. Guillaume Chevrollier. Il importe de préciser que la protection du gibier peut conduire l’autorité préfectorale à ordonner la mise en place de mesures administratives. Certaines espèces animales sont en effet susceptibles de causer des dommages au gibier. Il peut ainsi être nécessaire de réguler le renard pour protéger les populations de gibier comme les perdrix, les lièvres et les faisans. Trop souvent, lorsqu’il est question de la protection de la faune et de la flore sauvage, les espèces protégées sont seules visées. Le gibier est pourtant lui aussi une composante de notre biodiversité.

M. Philippe Plisson. L’explication de M. Chevrollier est limpide : le gibier est parfois du gibier de lâcher. C’est ainsi : du fait précisément de tous les pesticides et néonicotinoïdes balancés dans la campagne, le gibier sauvage meurt à vitesse grand V, et les chasseurs sont obligés de lâcher du gibier, qu’il convient donc aussi de protéger.

Mme la rapporteure. Défavorable : par définition, le gibier appartient à la catégorie des animaux sauvages et ces amendements conduiraient à inscrire un pléonasme dans la loi. Le Sénat a corrigé cette erreur que nous avions laissée passer. L’article 60 interdit effectivement aux chasseurs de tirer sur des animaux domestiques ou d’élevage, ce qui n’est du reste pas dans leurs habitudes… C’est une question de logique et de langue française : le gibier d’élevage est destiné à l’abattage et n’est pas concerné par la chasse. Je m’oppose à ce pléonasme…

La Commission rejette ces amendements.

Puis elle adopte l’article 60 sans modification.

Article 62 bis (articles L. 331-1, L. 332-1 et L. 334-3 du code de l’environnement) : Extension des espaces protégés aux eaux sous juridiction de l’État et aux espaces du plateau continental

La Commission adopte l’article 62 bis sans modification.

Article 65 : Habilitation à procéder par ordonnance pour définir le cadre juridique applicable aux réserves biologiques

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CD97 de la rapporteure.

Elle examine ensuite l’amendement CD98 de ma rapporteure.

Mme la rapporteure. Il est proposé de rétablir la rédaction originelle, qui prévoie un régime transitoire pour les réserves préexistantes, afin d’éviter que la procédure ne reparte à zéro pour ces structures qui ont déjà fait l’objet de consultations du Conseil national de protection de la nature (CNPN) et des mairies concernées lors de leur création. Le rajout de cette consultation risquerait de créer un engorgement administratif.

La Commission adopte cet amendement.

Ensuite de quoi, elle adopte l’article 65 modifié.

Article 66 (articles L. 171-2, L. 171-8, L. 172-4, L. 172-13 et L. 173-5 du code de l’environnement) : Harmonisation des dispositions relatives à la police de l’environnement

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CD99 de la rapporteure.

Puis elle adopte l’article 66 modifié.

Article 68 ter B (article L. 332-25 du code de l’environnement) : Rétablissement de la nature contraventionnelle des infractions à la réglementation des réserves naturelles (supprimé)

La Commission examine l’amendement CD101 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Le droit actuellement en vigueur pour les réserves naturelles réprime à la fois de manière contraventionnelle et délictuelle la plupart des actes qui contreviennent aux prescriptions et interdictions édictées par la réglementation spéciale de la réserve, ce qui introduit une fâcheuse confusion quant aux sanctions à appliquer. L’amendement CD101 vise à préserver la qualification de délits uniquement pour les infractions à la réglementation des réserves naturelles qui portent une atteinte grave au caractère de la réserve. Le reste des infractions, les plus nombreuses, resteront exclusivement du domaine contraventionnel.

La Commission adopte cet amendement.

L’article 68 ter B est ainsi rédigé.

Chapitre VIII
Biodiversité terrestre

Article 68 sexies (articles L. 341-2, L. 341-6 et L. 341-10 du code forestier ; article L. 146 de la loi n° 2005-157 du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux) : Ajustement de la compensation des opérations de défrichement

La Commission examine l’amendement CD102 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Cet amendement a pour objet de revenir sur les exemptions accordées par le Sénat en matière de compensation : exemption de compensation pour les déboisements effectués dans les cinq premières années suivant l’installation d’un jeune agriculteur, pour les déboisements ayant pour but de planter des chênes truffiers, etc. Cette multiplication de cas d’exemptions ne nous paraît pas le meilleur signal à donner.

Il revient également sur la suppression du coefficient multiplicateur de la compensation de certains défrichements. En revanche, il conserve le rétablissement pas le Sénat de la compensation par l’État du coût supporté par les collectivités pour la mise en œuvre du dispositif d’exonération de la taxe foncière sur les propriétés non bâties en zone Natura 2000, ce qui est très important pour continuer de préserver dans de bonnes conditions ces sites qui ont prouvé leur pertinence dans la protection des écosystèmes, de la flore et de la faune.

M. Jean-Yves Caullet. Je soutiens cet amendement et je tiens à rassurer nos agriculteurs qui se seraient inquiétés d’une limitation des défrichements. D’autres textes, récemment amodiés, laissent de larges possibilités en la matière : nous avons ainsi porté à trente ans la période au-delà de laquelle il est possible de remettre en état sans autorisation une parcelle qui aurait été un recru forestier ; nous avons par ailleurs voté, sous l’impulsion de François Brottes, une disposition autorisant une commune dont le taux de boisement dépasse 70 % de revenir sans autorisation à 50 % ; la réglementation des boisements, dont je souligne l’importance, permet à une commune d’édicter clairement les zones qui doivent être autorisées à être rouvertes. Il n’est donc pas nécessaire de revenir à des exemptions pour ne pas être bridé par la progression forestière… Nous n’en sommes plus à devoir défricher pour implanter l’agriculture dans ce pays. L’inquiétude des agriculteurs pouvait se comprendre, mais elle n’est pas justifiée.

La Commission adopte cet amendement.

En conséquence, L’article 68 sexies est ainsi rédigé et les amendements identiques CD13 de M. Martial Saddier et CD203 de M. Jacques Krabal, les amendements CD207 et CD208 de la rapporteure, les amendements identiques CD14 de M. Martial Saddier et CD204 de M. Jacques Krabal, ainsi que l’amendement CD15 de M. Martial Saddier tombent.

TITRE VI
PAYSAGE

Chapitre II
Paysages

Article 72 bis AA (article L. 350-3 [nouveau] du code de l’environnement) : Protection des allées et des alignements d’arbres (supprimé)

La Commission examine l’amendement CD16 de M. Martial Saddier.

M. Guillaume Chevrollier. Nous demandons la suppression de cet article afin de ne pas rajouter d’interdiction et de protection générale sur des éléments ponctuels du paysage.

De nombreux dispositifs permettent déjà aujourd’hui de préserver les arbres. Les documents d’urbanisme peuvent les protéger de tout arrachage, via les espaces boisés classés ou les éléments de paysage ; la trame verte et bleue vient également identifier dans les schémas régionaux de cohérence écologique les continuités écologiques ; des dispositions peuvent également être prises par les préfets pour protéger les alignements d’arbres ; enfin, les arbres et les alignements d’arbres sur les espaces agricoles sont protégés par la PAC dans le cadre du dispositif de conditionnalité BCAE7. Il ne semble donc pas nécessaire de créer une nouvelle interdiction nationale, qui serait difficile à articuler avec les dispositifs existants.

Mme la rapporteure. En deuxième lecture, nous nous étions longuement interrogés sur cet article introduit par le Sénat, qui comportait des notions très floues et peu juridiques, telles que « l’espace vital ». Nous l’avions supprimé. Le Sénat l’a récrit en deuxième lecture, sans en reprendre les aspects juridiquement contestables ; il en résulte un dispositif qui peut avoir son utilité pour la protection des alignements d’arbres qui font la beauté de certains de nos paysages. Je vous propose donc de conserver cet article, sous réserve d’une légère modification que je présenterai dans un instant.

La Commission rejette cet amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CD103 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Il n’est pas nécessaire de prévoir un décret d’application pour la mise en œuvre de cet article.

La Commission adopte cet amendement.

Puis elle adopte l’article 72 bis AA modifié.

La Commission adopte l’ensemble du projet de loi modifié.

——fpfp——

Membres présents ou excusés

Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Réunion du lundi 13 juin 2016 à 21 heures

Présents. – Mme Laurence Abeille, Mme Chantal Berthelot, M. Florent Boudié, M. Christophe Bouillon, Mme Sabine Buis, M. Jean-Yves Caullet, M. Jean-Paul Chanteguet, M. Guillaume Chevrollier, Mme Françoise Dubois, M. Yannick Favennec, Mme Geneviève Gaillard, Mme Viviane Le Dissez, Mme Martine Lignières-Cassou, M. Philippe Martin, M. Bertrand Pancher, M. Rémi Pauvros, M. Philippe Plisson, M. Gilles Savary, Mme Suzanne Tallard

Excusés. – M. Julien Aubert, M. Vincent Burroni, Mme Florence Delaunay, M. Julien Dive

Assistaient également à la réunion. – M. Gérard Bapt, Mme Delphine Batho, M. Yves Goasdoué