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Commission des affaires économiques

Mercredi 16 janvier 2013

Séance de 10 heures

Compte rendu n° 40

Présidence de M. François Brottes Président

– Audition, ouverte à la presse, de MM. Emmanuel Sartorius et Jacques Serris, co-auteurs du rapport, commandé par le Gouvernement, sur la situation de PSA et de M. Pierre Ferracci, Mmes Nadia Ghedifa et Christine Hoch, respectivement président, directrice générale et directrice régionale de la société SECAFI, experts mandatés par le comité d’entreprise de PSA Peugeot Citroën

La commission a auditionné MM. Emmanuel Sartorius et Jacques Serris, co-auteurs du rapport, commandé par le Gouvernement, sur la situation de PSA et de M. Pierre Ferracci, Mmes Nadia Ghedifa et Christine Hoch, respectivement président, directrice générale et directrice régionale de la société SECAFI, experts mandatés par le comité d’entreprise de PSA Peugeot Citroën.

M. le président François Brottes. Le secteur automobile européen est, comme vous le savez, en grande difficulté avec notamment l’annonce faite hier par Renault de suppression de postes. Le groupe de suivi, que nous avons constitué au sein de notre commission, sur la situation des entreprises dont l’État est actionnaire se saisira dès la semaine prochaine de cette question. Permettez-moi de rappeler brièvement les principaux événements qui ont marqué l’actualité du groupe PSA Peugeot-Citroën depuis l’annonce du plan social, le 12 juillet dernier. Le 25 juillet, le gouvernement présentait un plan de soutien à l’industrie automobile comprenant notamment un renforcement du bonus écologique. Le lendemain, conjointement avec la commission des affaires économiques du Sénat, nous auditionnions M. Philippe Varin, président du directoire du groupe PSA, puis les organisations syndicales. À cette occasion, j’avais pris l’engagement d’auditionner conjointement les experts mandatés par le gouvernement d’une part, et par les organisations syndicales d’autre part. Le 11 septembre dernier, M. Emmanuel Sartorius remettait, au nom du Conseil général de l’économie, de l’industrie, de l’énergie et des technologies, un rapport sur la situation de PSA Peugeot-Citroën. Le rapport demandé par le comité central d’entreprise (CCE) du groupe, au cabinet d’experts SECAFI, a été remis plus récemment, ce qui explique la date de l’audition qui nous réunit aujourd’hui. Entretemps, je vous rappelle que l’État a accordé sa garantie à la Banque PSA Finance (BPF) et, comme l’a évoqué hier, devant notre commission, le ministre de l’économie et des finances, M. Pierre Moscovici, nous attendons désormais l’avis de la Commission européenne sur cette garantie. Par ailleurs, M. Louis Gallois a été nommé membre du conseil de surveillance du groupe PSA, en qualité d’expert indépendant.

M. Emmanuel Sartorius. En guise de préliminaire, je souhaite mettre l’accent sur trois points de méthode qui illustrent les limites de l’exercice qui m’était confié. En premier lieu, quels étaient les objectifs de la mission ? Le Gouvernement souhaitait une expertise indépendante de la direction du groupe et des organisations syndicales. Dans cette perspective, le ministre du redressement productif m’a adressé, le 10 juillet 2012, une lettre de mission demandant cette expertise indépendante ainsi qu’une évaluation des mesures proposées dans le plan social afin d’établir un diagnostic partagé. En second lieu, qu’en était-il des moyens de la mission ? Ils étaient limités puisque nous étions deux experts, appelés à travailler dans un temps court puisque le rapport a été remis le 11 septembre 2012. En outre, nous ne disposions pas de pouvoirs d’investigation particuliers : nous n'avions ni les attributions d’un commissaire aux comptes, ni n’étions mandatés par le comité central d’entreprise. Notre analyse s’est donc appuyée sur les données publiques disponibles aux niveaux français (comité des constructeurs français d’automobiles – CCFA), européen (association des constructeurs européens d’automobiles – ACEA) et international (organisation internationale des constructeurs automobiles – OICA) ainsi que sur les rapports annuels du groupe, et des entretiens avec des représentants de la direction, du personnel et des experts du secteur. Cette mission indépendante est intervenue en amont de celle confiée au cabinet d’experts SECAFI, ce qui explique que les données du rapport datent d’il y a six mois, alors que le secteur automobile a entretemps connu des évolutions rapides.

Quel constat tire le rapport ? Tout d’abord, si le marché automobile mondial, qui représente environ 80 millions de véhicules par an, est en croissance (+ 3 % par an), il se caractérise par de fortes disparités régionales. L’Asie – majoritairement la Chine – représente la moitié de ce marché et connaît une croissance de 30 % par an. D’autres zones de forte croissance existent en Amérique latine (+ 15 %), en Russie (+ 4 %) et en Amérique du Nord (+ 3 %). Le marché européen, qui représente un quart du marché mondial, est en revanche fortement déprimé. Après un pic de production en 2007 avec 23 millions de véhicules, il a connu une forte baisse pour atteindre un niveau de 17 millions de véhicules produits en 2009. Ce niveau de production s’établit à 19 millions de véhicules fin 2011 et les dernières estimations l’évaluent à 17 millions de véhicules en 2012. Ce marché européen déprimé se caractérise par des faiblesses structurelles. En premier lieu, il s’agit d’un marché saturé dont la production est uniquement orientée sur le renouvellement du parc existant. En second lieu, avec une démographie stable, ce marché n’est pas porteur contrairement à celui de l’Amérique du Nord, par exemple. Enfin, il comprend des pays durement affectés par la crise financière comme l’Italie, l’Espagne et la Grèce. D’après le CCFA, la France en 2012 enregistre une baisse de production de 14 %, soit son niveau de vente le plus bas depuis 15 ans.

Deuxième élément de constat : le groupe PSA est fortement exposé sur le marché européen où il réalise 58 % de ses ventes, principalement en Europe du Sud dont les pays sont durement affectés par la crise et ont connu une diminution de près de la moitié de leur marché automobile en quelques années. Cette évolution doit être mise en regard de celle de la Chine par exemple où PSA ne réalise que 3 % de ses ventes alors que General Motors représente 16 % du marché et Volkswagen 14 %. De surcroît, le groupe PSA est un constructeur automobile généraliste, positionné sur les segments B et C du marché, les plus concurrentiels et marqués par une guerre féroce des prix. À titre d’exemple, j’ai été frappé d’observer des annonces publicitaires proposant une remise de 8 000 euros sur des véhicules Peugeot pendant les vacances de Noël. Tous les constructeurs généralistes comme Fiat, Opel ou Renault sont, comme le groupe PSA, pris en tenaille entre la production de véhicules à bas prix et les marques « Premium » qui descendent en gamme. Troisième élément du constat : le groupe PSA connaît une surcapacité de production sur le marché européen, découpé en zones « autosuffisantes » dans la mesure où l’on construit désormais là où on vend. Le groupe PSA est confronté à une sous-utilisation de son outil de production en Europe avec un taux d’utilisation de ses capacités qui n’a été que de 61 % en 2011. Sur les années 2008-2011, le recours au chômage partiel a représenté près de 4 millions d’heures et atteint aujourd’hui ses limites. Pour donner une idée de l’ampleur du recours à cette solution, 1,5 million d’heures représentent 1 000 emplois temps plein.

Deux raisons structurelles sont à l’origine de cette situation. D’une part, un objectif de production de 4 millions de véhicules par an fixé au début des années 2000 qui s’est avéré surdimensionné. Le groupe n’est en effet jamais parvenu à dépasser le chiffre de 3,6 millions de véhicules construits. Ce problème de surdimensionnement affecte tous les constructeurs européens comme en témoignent les fermetures d’usines de Fiat en Italie, de Ford en Grande-Bretagne et en Belgique et d’Opel en Allemagne. Parallèlement, les capacités de construction de véhicules se développent en Europe de l’est et en Russie, ce qui ne constitue bien évidemment pas une situation favorable. D’autre part, le groupe PSA est confronté à une difficulté de taille : 8ème au classement mondial des constructeurs, il ne peut bénéficier d’économies d’échelle alors que l’effet taille contribue entre 7 et 10 % du coût de production des véhicules. PSA s’est tardivement développé à l’international alors que le groupe bénéficiait d’une présence ancienne en Amérique latine, dès les années 60 et en Chine, dès les années 80. Mais, jusque dans les années 2000, le groupe n’a occupé qu’une position marginale sur ces marchés en ne développant pas ses moyens de production et en n’adaptant pas ses véhicules à la demande.

M. le président François Brottes. Je tiens à préciser que lors d’un déplacement en Chine avec une délégation présidée alors par M. Patrick Ollier, nous avions rencontré cinq présidents de province qui avaient tous déploré le fait que les Français vendaient des véhicules obsolètes sur le marché chinois. Cette erreur stratégique a manifestement laissé des traces.

M. Emmanuel Sartorius. Enfin, après la fin de la prime à la casse, le groupe a anticipé une reprise du marché qui ne s’est pas produite. Au cours de l’année 2011, il a fallu freiner brutalement les recrutements en cours au fur et à mesure que les perspectives de reprise s’éloignaient. Au cours du premier semestre 2012, PSA a ainsi consommé 1 milliard d’euros de cash flow opérationnel et enregistré sur l’exercice une perte de 819 millions d’euros, à l’origine de sa sortie du CAC 40. Pour témoigner des efforts de redressement du groupe, des gages ont été donnés au niveau des actifs notamment, avec la vente du siège de la Grande Armée pour le relouer, ce qui n’est pas forcément optimal. La filiale de véhicules de location du groupe a été cédée ainsi que la filiale logistique Gefco, fleuron du groupe. Les dépenses de recherche et développement ont été réduites tandis qu’un investissement à hauteur de 600 millions d’euros en Inde a été abandonné, ce qui est regrettable au regard des potentialités de ce marché d’1,4 milliard d’habitants. L’alliance avec General Motors s’est concrétisée par une augmentation de capital d’un milliard d’euros au printemps 2012, la création d’une joint-venture et la programmation de quatre projets. Enfin, un plan social a été élaboré, dont l’annonce a été faite le 12 juillet dernier. En conclusion, si le rapport admet que le plan social est difficilement évitable, il émet cependant des réserves sur ses modalités de mise en œuvre. Un tel plan ne peut se contenter de tailler dans les dépenses sans offrir des perspectives d’avenir. Aujourd’hui, la situation a fortement évolué avec une dégradation des perspectives sur le marché européen. D’après les prévisions d’IHS Global Insight, un retour au pic de production de 2007 est attendu en 2018 mais les estimations de ventes entre juin et novembre dernier font état d’une chute de 4,2 millions de véhicules sur 7 ans, soit une moyenne annuelle de 600 000 véhicules, ce qui correspond à la capacité de production de deux usines d’assemblage. Dans le même temps, les marchés émergents prospèrent et c’est là que se situe l’avenir du groupe PSA mais il faut un partenaire. À cet égard, les perspectives de l’alliance avec General Motors s’annoncent plus modestes qu’initialement prévu. En définitive, l’enjeu industriel dépasse largement la situation du seul groupe PSA Peugeot Citroën.

M. Pierre Ferracci, président de la société SECAFI. Je vais tout d’abord vous préciser le cadre de notre mission avant que Mme Nadia Ghedifa ne vous donne la synthèse générale de nos travaux. Nous avons été désignés par le comité central d’entreprise de PSA le 24 juillet 2012 dans le cadre de la procédure de consultation et d’information ouverte par la direction de l’entreprise à l’occasion de cette restructuration. Nos travaux ont porté d’une part sur la situation financière du groupe et la marge de manœuvre dont il disposait à l’ouverture de cette procédure, ensuite sur l’organisation des sites industriels et la Direction de la recherche et développement, la stratégie du groupe et le développement de la filière et, enfin, sur les conséquences sociales du plan et les aspects ressources humaines.

Pour travailler nous avons pour l’essentiel utilisé le plan à moyen terme 2012-2015 de PSA, sachant que ces données ont naturellement évolué depuis l’ouverture de notre mission et qu’il convenait donc de tenir compte de la dégradation de la situation dans notre présentation. Je tiens également à souligner que les travaux que nous effectuons pour les représentants du personnel sont publics, que nos rapports se trouvent très rapidement sur la place publique, alors même qu’existent des clauses de confidentialité et que cet état de fait peut nous conduire à protéger un certain nombre de sources et même parfois à nuancer nos écrits dans une conjoncture marquée par les difficultés économiques du groupe. Je précise également que Mme Christine Hoch, directrice régionale de la société SECAFI pour l’est de la France, suit le dossier PSA depuis 2006 et que nous avons donc une bonne connaissance de l’évolution de ce dossier et des signes annonciateurs qui se sont concrétisés par la suite.

Mme Nadia Ghedifa, directrice générale de la société SECAFI. Le travail que nous menons consiste en une série d’expertises, conduites par nos collaborateurs, qui représentent à peu de chose près toutes les fonctions de l’entreprise car il est nécessaire d’avoir un point de vue sur tous les aspects qui constituent la stratégie de l’entreprise et ses différentes mises en œuvre opérationnelles. L’essentiel de notre travail a consisté sur la période d’aout à décembre à alterner des phases d’expertise et des phases d’appui à la concertation. Les représentants du personnel sont en effet demandeurs d’expertises mais aussi d’appui pour la concertation avec les dirigeants de l’entreprise ou même parfois entre les organisations syndicales ou les différents sites concernés. Nous avons eu accès à des informations particulièrement sensibles qui nous conduisent à préserver une certaine confidentialité à leur égard afin notamment de pouvoir continuer à avoir accès à de telles informations indispensable à notre travail et pour que les partenaires sociaux nous fasse confiance.

Sans déflorer les éventuelles évolutions stratégiques intervenues depuis la publication de notre rapport, je souhaite m’appesantir sur un certain nombre d’éléments qui sont d’autant plus vrais aujourd’hui. Comme vous le savez, la position concurrentielle de PSA est fortement challengée sur ses marchée mais aussi sur ses technologies et ses positionnements, il importe de comprendre pourquoi nous sommes arrivés à une telle situation et quels sont les écueils auxquels ont été confrontés l’entreprise. Le premier point sur lequel je souhaite insister est que le groupe n’a pas pris la mesure des moyens nécessaires à la diversification géographique ainsi qu’à l’adaptation aux changements de comportement de consommation. Cette question concerne le positionnement sur des territoires tiers en dehors de l’Europe ainsi que le positionnement sur les gammes de produits et la façon dont on organise les marques.

Il y a eu des soutiens gouvernementaux à la consommation de véhicules neufs qui ont certes apporté un répit temporaire mais n’ont pu empêcher, la crise se poursuivant, que les difficultés structurelles rejaillissent et mettent l’entreprise au pied du mur. Historiquement Peugeot a fait de l’Europe du sud son territoire privilégié de vente et est donc plus exposé que les autres fabricants aux évolutions de cette région. Il s’avère aujourd’hui que ces territoires sont les plus touché par la baisse des immatriculations. Or il s’avère que PSA est le constructeur le plus structurant pour la filière automobile française mais il convient également de souligner qu’il ne peut à lui seul soutenir cette filière. Pour vous donner un ordre d’idée, les seuls sites d’Aulnay et de Rennes induisent de l’ordre de 10.000 emplois. Par ailleurs Peugeot peine à saturer ses capacités de production.

Les résultats de Peugeot ont clairement plongé et le groupe dispose désormais de moins de moyens pour financer les investissements qui sont pourtant essentiels pour asseoir une politique produit et un positionnement concurrentiel qui lui sont nécessaires. Il ne dispose plus des moyens de ses ambitions stratégiques qui sont fondées sur trois leviers, l’internationalisation, la résistance en Europe et la montée en gamme. Mais peut-être est-il envisageable de considérer que le positionnement privilégié en Europe du sud, qui fait actuellement l’objet de nombreuses critiques, doit être néanmoins préservé car il constitue un élément différenciant. Le groupe PSA ne peut pas compter sur les revenus de ses activités internationales, contrairement à d’autres groupes, en raison de délai nécessaire pour obtenir un retour sur investissements que nous estimons devoir intervenir aux environs de 2015 à la suite des prévisions établies en lien avec la Direction du groupe.

En tout état de cause, les plans d’économies et de restructuration, qui d’ailleurs succèdent à des plans précédents depuis 2012, prévoient un retour à l’équilibre en 2014. Les sources de réduction des coûts sont connues, il s’agit du plan social, du plan de redéploiement des effectifs à hauteur de 11.500, des coupes budgétaires en dépenses d’avenir et en particulier sur les dépenses de R et D, des arbitrages sur le plan produits et des économies liées aux premiers effets de l’alliance avec GM. Comme vous le savez le groupe a également entamé une série de cessions ainsi qu’une augmentation de capital, la trésorerie est assurée par le recours à des emprunts dont plusieurs arriveront à échéance d’ici 2015 ce qui rend d’autant plus important le retour à l’équilibre financier en 2014. Le groupe est plutôt confiant dans sa capacité à lever des fonds sur les marchés obligataires même si la notation de l’entreprise rend la démarche à la fois plus difficile et plus coûteuse. Selon nous le plan présenté par le groupe PSA n’aborde pas deux questions susceptibles de remodeler la physionomie du groupe, à savoir la réflexion sur les marques et leur positionnement et l’approfondissement de l’alliance, ou le développement d’autres alliances, alors qu’une étape semble franchie en ce domaine. Sur le plan social, plusieurs sujets nécessitent selon nous une concertation plus importante, le premier concerne l’exemplarité de la revitalisation sur les sites concernés et Aulnay en premier lieu, le second concerne le site de Rennes qui est en sous-charge conjoncturelle jusqu’à la fin 2016 et doit ensuite retrouver une activité plus soutenue ; il est nécessaire de trouver des process innovants pour consolider la période transitoire avec un maintient que nous avons chiffré à 555 emplois sur les 1400 suppressions de poste annoncées. Dernier point, pour sécuriser le retour à l’emploi car certains personnels ont besoin de reconversion longue, il nous parait nécessaire d’innover avec un dispositif qui mutualise les moyens et permet d’assurer un repositionnement professionnel.

M. François Brottes, président. On vient d’apprendre que le marché de l’automobile en Europe est à son niveau le plus bas depuis 1993 ce qui explique la sévérité de votre diagnostic.

M. André Chassaigne. À partir des deux rapports qui nous ont été présentés, et en particulier le rapport plus récent de SECAFI, la CGT a présenté une sorte de plan B avec des solutions alternatives. Je souhaite vous interroger sur les trois volets de ce plan. Sur le plan financier, quelle est votre appréciation sur l’idée d’un apport de 1,5 milliard d’euros au capital de PSA de la part de la famille Peugeot et de ses sociétés financières qui sont multiples et qui ont accumulé assez important pour réaliser une telle opération ?

Ce plan B permettrait de réaliser des travaux de développement, de relancer des modèles et aurait donc un impact sur le second volet qui est le volet industriel. Celui-ci développe un nouveau scénario « 10 » qui, contrairement aux autres scénarii qui reposent sur la surcharge de certains sites, préconise le maintien des différents sites avec des capacités de production diminuées sur les différents sites, en considérant que maintenir la totalité des sites n’emporte pas de conséquence significative en termes de coût de production. Il convient enfin de ne pas oublier le volet social car, même dans sa version la plus optimiste, ce plan B permet de passer de 7979 suppressions d’emplois à 5454, ce qui ne résout pas le problème social dans son ensemble et implique de créer de nouveaux emplois sur les sites avec des productions qui pourraient être différentes et de sécuriser les transitions professionnelles et les fins de carrière.

M. Michel Piron. Je ne reviendrai pas sur les constats concernant les marchés divergents entre l’Europe et l’Asie, sur les surcapacités ou l’inadéquation des capacités s’agissant du groupe PSA. Je souhaite tout d’abord avoir des précisions sur ce que vous avez évoqué en matière de stratégie industrielle. Vous avez évoqué la question des modèles, vous avez évoqué la question des gammes et la question R et D, pouvez-vous en dire un peu plus sur la stratégie R et D et sur la question filière car Peugeot a un impact considérable en France ?

Au sujet de la stratégie financière, quelle peut être dans l’avenir la stratégie capitalistique du groupe ? Quels appuis ? Quelles alliances ? Quel temps de retour attendu par rapport aux capitaux mobilisés ? Il est clair qu’il existe dans ce domaine des choix plus ou moins industriels et de plus ou moins long terme.

Vous avez évoqué la géopolitique des investissements, quelles sont les priorités ? La Chine en est assurément une mais quid de l’Inde ? Quand vous parlez d’Amérique du sud quels sont les pays visés ? Voire en Amérique centrale ?

Dernier point celui des calendriers qui peuvent être différents selon les sujets abordés, comment arrivez-vous à 2016 pour le site de Rennes ? Par quels calculs ? Sommes-nous en capacités de voir clair sur ces sujets ? Enfin, comment voyez-vous les évolutions dans les quatre ou cinq années à venir ?

M. Daniel Goldberg. Cette audition est programmée le jour même où sont annoncés des résultats négatifs pour le secteur automobile, au-delà du cas de PSA, tandis que nous venons d’apprendre que le site d’Aulnay-sous-Bois est bloqué depuis ce matin par un mouvement social, à la suite des annonces et du début de concertation le concernant. Sur le bilan, tout a été dit avec sérieux par MM. Sartorius et Serris d’une part, par le cabinet SECAFI d’autre part. Sur la réalité de la santé financière de PSA, je répète ce que j’ai déjà dit à M. Varin quand nous l’avons auditionné, nous avons le sentiment d’avoir perdu entre un an et un an et demi, entre mai 2011 et juillet 2012, en termes d’anticipation et de préconisations pour le devenir de l’entreprise et des sites de production, mais aussi pour les salariés concernés. Ces derniers subissent particulièrement ce décalage, dont on a par ailleurs cru comprendre qu’il n’était pas totalement indépendant de préoccupations électorales. Du reste, entre l’annonce en juillet dernier du plan de restructuration et aujourd’hui, nous sommes passés de 8000 à 11 000 postes supprimés…

Ma première question s’inscrit dans le contexte de la signature, la semaine dernière, de l’accord entre le patronat et plusieurs syndicats sur la flexibilité de l’outil de production et la sécurisation des parcours professionnels. Un tel accord aurait-il trouvé à s’appliquer et de quelle manière pourrait-il être appliqué à l’avenir ? La question du dialogue social semble en effet constituer une faille chez PSA et il faut peut-être envisager de nouveaux modes de gouvernance.

Si le sort de l’outil de production d’Aulnay-sous-Bois semble malheureusement scellé, nous sommes par ailleurs loin des engagements qui ont été pris il y a six mois, à savoir qu’aucun salarié d’Aulnay n’irait à Pôle emploi, que 1 500 emplois seraient créés sur le site, au sein d’autres entreprises, et que 1 500 salariés seraient redéployés à Poissy.

Je souhaite aussi insister sur l’enjeu fort que constitue le site de Rennes. Nous en avons discuté à plusieurs reprises avec nos collègues Marie-Anne Chapdelaine et Jean-René Marsac. Le plan de restructuration en cours va-t-il permettre de pérenniser ce site ?

Pour conclure mon intervention, la question de la filière automobile dans notre pays se trouve aujourd’hui posée. Pourra-t-on acheter à l’avenir une automobile produite dans notre pays ? Les questions de mondialisation des processus de production et de différenciation doivent absolument nous interroger.

M. Franck Reynier. Plusieurs collègues ont déjà rappelé le caractère inquiétant de la situation du marché automobile européen. Les deux rapports qui nous présentés ce matin s’accordent sur le fait que des mesures de réorganisation et de redressement sont indispensables. Cela étant, les mêmes rapports suggèrent que d’autres choix industriels auraient pu être réalisés.

À la suite de votre constat et de vos analyses, pouvez-vous nous faire un point sur la situation du site d’Aulnay-sous-Bois ? Les positions ont-elles évolué ? Des solutions semblent-elles se dégager ? L’intelligence collective et le dialogue doivent être mis à profit, dans ces situations de crise, ce qui suppose de la confiance entre les différents acteurs économiques.

Deuxième point que je souhaite aborder, en lien avec les solutions alternatives proposées : on ne peut pas ne pas prendre en considération la situation économique de la France dans son ensemble. Quelle est votre vision en particulier concernant le coût du travail ? Que pensez-vous des préconisations du rapport Gallois et des conséquences de leur application pour la filière automobile ?

Pourriez-vous nous dire un mot sur les possibilités de rachat du groupe Opel ? Si l’on regarde la structure de ce groupe au sein de General Motors, on voit qu’il est plutôt fixé sur le marché européen. Or, vous dites précisément que le groupe PSA n’est pas suffisamment internationalisé et que le marché européen est en train de se resserrer.

Enfin, il me semble important de garder le regard fixé sur l’avenir. Qu’il s’agisse du développement des plateformes communes, des alliances, de l’évolution des gammes, de la motorisation et du développement du véhicule électrique, pouvez-vous nous donner des éclairages, étant entendu que le volet « recherche et développement » est fondamental pour la filière.

Mme Michèle Bonneton. PSA a été largement aidé par les pouvoirs publics au cours des années précédentes et a distribué, parallèlement, plusieurs milliards d’euros de dividendes. Les difficultés actuelles concernent 11 500 salariés, ce qui n’est pas rien ! Des choix stratégiques peu pertinents ont été faits : choix du tout diesel, concentration sur le milieu de gamme, effets pervers de l’alliance avec General Motors. Plusieurs centaines de millions d’euros ont par ailleurs été perdus dans le cadre du marché avec l’Iran, de l’aveu même de M. Philippe Varin.

Quel est aujourd’hui le niveau de la dette de PSA par rapport à son chiffre d’affaires ? Selon les données dont je dispose, la dette est de 3 Mds€ pour un chiffre d’affaire de 64 Mds€.

On trouve actuellement sur le marché des offres plus intéressantes que les véhicules PSA, s’agissant notamment de la garantie. Avez-vous des pistes pour améliorer la performance en matière de solidité, de durabilité et de garantie ?

Que pensez-vous des politiques de plateformes et de modularité, consistant à produire plusieurs modèles sur le même site.

Le développement de la R&D et la mise au point de nouveaux moteurs à essence moins polluants et plus économes en carburants me semble nécessaire. Je vous ai entendu dire que PSA avait décidé de réduire son budget de R&D et cela m’inquiète beaucoup. N’est-ce pas suicidaire pour l’avenir ? D’après des estimations sérieuses, les véhicules hybrides ou électriques pourraient représenter jusqu’à 10% du marché en 2020.

Qu’en est-il du dialogue social et de la participation des salariés aux décisions de l’entreprise et de leur présence au conseil d’administration ? Quelles améliorations pourraient être apportées à l’organisation actuelle et peuvent être attendues à court terme ?

Enfin, à propos des alliances, lesquelles faudrait-il d’après vous privilégier ?

Mme Jeanine Dubié. Nous ne sommes évidemment pas des spécialistes de stratégie d’entreprise automobile mais nous constatons comme tous que certains paradigmes économiques concernant l’industrie automobile vulgarisés dans les médias nous semblent assez aléatoires.

Par exemple, il y a environ 10 à 15 ans, on lisait régulièrement que seuls les groupes parvenant à produire au minimum 4 millions de véhicules pourraient survivre dans notre économie mondialisée. Ce paradigme a enclenché des vagues de rapprochement de groupes, de fusions, qui peuvent parfois se révéler périlleuses, alors que d’autres groupes, qui ont des stratégies différentes, se portent mieux. Aussi, je voudrais connaitre votre analyse sur ces types d’affirmation que vous semblez valider puisque selon votre rapport, l’avenir de PSA passe nécessairement à moyen terme par une alliance avec un autre grand constructeur mondial.

Ensuite, les commentaires faits sur votre rapport pointent le fait que vous n’avez pas pour mission d’analyser la politique commerciale du groupe PSA alors que, selon certains, ce serait la cause majeure de la crise qu’il traverse. Avez-vous des éléments particuliers à nous donner à ce sujet ? Pensez-vous que la politique commerciale ne joue qu’à la marge ? Cette dernière question s’adresse plus particulièrement à M. Emmanuel Sartorius.

Concernant les coût de production et la localisation des entreprises, les observateurs remarquent souvent le fait que le groupe PSA a 40 % de sa production en France contre seulement 20 % pour Renault. L’actualité, avec l’annonce du « choc de compétitivité » – entre nous je trouve ces mots de plus en plus galvaudés –, et l’annonce de la suppression de 7500 emplois par Renault, semble ne pas corroborer cette thèse. Quelles sont vos analyses sur les coûts de production et la localisation des sites concernant les entreprises du secteur automobile ?

Pour terminer, au sujet de l’accompagnement de l’État, Peugeot est une entreprise privé, mais compte tenu du fait qu’elle traverse une crise grave, avec des pertes considérables et un plan social, nous sommes convaincus que le Gouvernement doit agir avec tous les leviers dont il dispose. Il s’est efforcé de limiter les pertes, notamment avec l’apport de la garantie d’État pour répondre aux attaques de la filiale bancaire PSA Finance, qui était attaquée. Mais ce soutien de la part du Gouvernement ne pourrait-il pas être renforcé pour aider PSA à passer un cap douloureux, avec des contreparties plus fortes en termes d’emplois, de localisation des unités de production et d’amélioration de la gouvernance ? Pensez-vous qu’il soit opportun d’aller plus loin dans l’accompagnement de l’entreprise, et si oui, comment l’améliorer?

M. Pierre Ferracci. Je vais essayer de répondre au mieux à quelques questions qui ont brassé un grand nombre de sujets souvent vastes.

Sur l’alliance et la stratégie de PSA, on a eu un accord avec General Motors après avoir eu, il y a quelques années, un échec des négociations avec Mitsubishi. Alors, est-ce que la famille Peugeot, c’est-à-dire l’actionnaire principal, laisse suffisamment de liberté au groupe pour conduire comme elle l’entend sa politique commerciale et d’alliances afin d’assurer sa pérennité, je n’en suis pas certain. Ainsi, le fait de bloquer à 7 % la montée de General Motors au capital de PSA jusqu’à 2022 est très étrange alors que PSA n’a pas aujourd’hui, à l’évidence, les moyens financiers de développer une stratégie autonome compte tenu de ce qu’est l’industrie automobile. Il va falloir que l’actionnaire historique se pose très sérieusement la question de savoir ce qui doit être préféré entre une relative dilution du capital et un freinage des dépenses en R & D.

Il y a également un problème lorsque l’on constate que PSA a diminué ses investissements annuels, les faisant passer de 4 à un peu plus de 3 Mds€ alors que, dans le même temps, le groupe Volkswagen investit plus de 50 Mds€ sur trois ans et investit notamment en Amérique latine autant que PSA sur l’ensemble du globe ; là se pose un véritable problème de taille critique, qui plus est pour un constructeur qui se veut généraliste.

Sur l’accord qui vient d’être passé entre les partenaires sociaux, il est vraisemblable que si les conditions du dialogue social avaient été différentes il y a quelques années, la situation du groupe serait aujourd’hui bien différente. Comme je l’ai dit, nous suivons le groupe PSA depuis 2006. Or, dès cette époque, il y avait de sérieux doutes sur l’avenir du site d’Aulnay : le dialogue n’a pas existé et rien n’a été vraiment fait pour anticiper la reconversion du site ou sa pérennisation à travers son adaptation. Il est vraisemblable en tout état de cause qu’il aurait fallu s’attaquer au problème plus tôt. De manière générale, si l’on pouvait faire au sein du groupe davantage de gestion prévisionnelle des compétences, on aurait sans nul doute davantage de sûreté.

Je vais laisser ma collègue Christine Hoch vous répondre sur les questions chiffrées.

Mme Christine Hoch. Les chiffres que vous avez cités, Mme Bonneton, sont proches de la réalité. L’endettement de PSA est effectivement de 3 Mds€ environ, sachant qu’il s’agit là du chiffre consolidé pour 2010 et qu’il demande donc à être précisé mais le niveau demeure à peu près celui-ci. Ce niveau d’endettement s’explique pour partie par l’érosion des résultats du groupe et par le maintien d’un investissement en R & D de l’ordre de 4 Mds€ : or, vous savez que ce type d’investissements se fait sur le long terme et que, de ce fait, une fois engagés, il importe de les mener au bout sauf à faire une croix sur ce qui a déjà été engagé. Quelques actifs restent à réaliser mais les marges de manœuvre s’avèrent plus ténues à certains endroits : la situation financière est donc tendue. La notation de l’entreprise par quelques agences a mis notre banque en difficulté, celle-ci ayant eu plus de mal à se refinancer, mettant ainsi en jeu, par voie de conséquence, notre propre activité. Les chiffrages de notre rapport sont assez exacts mais il importe de savoir que certains d’entre eux n’ont été ni validés ni infirmés par la direction.

La R & D est un levier qu’il est difficile d’actionner à court terme mais qu’il est assez tentant d’utiliser compte tenu des masses en jeu. Cela nous conduit à soupeser d’autant plus lourdement nos arbitrages. La question de l’Inde a été posée : il faut à mon sens tirer les leçons des échecs et des atermoiements qui ont eu lieu en Chine ou en Amérique latine pour aborder le marché indien avec d’autant plus d’acuité. Le fait de diminuer nos dépenses en la matière de 4 à 3,3 Mds€ va nous permettre de réaliser 700 M€ d’économies : sera-ce suffisant pour l’entreprise ? Peut-être mais il s’agit là d’un point qui reste à examiner.

Sur le sujet des garanties, il est difficile de s’aligner sur certains autres constructeurs capables d’aligner des coûts d’investissement importants sur ces sujets-là, il est même, dans certains cas, dangereux de le faire car leurs pratiques peuvent s’avérer quelque peu coûteuses.

Sur le coût du travail, nous avons traité de ce point dans notre rapport : je me permets donc de vous y renvoyer, en insistant notamment sur la quote-part de la VAPRF dans l’automobile (valeur ajoutée qu’ajoute le constructeur sur les achats à l’extérieur).

M. le président François Brottes. Le Pacte de compétitivité n’a-t-il pas modifié la donne ?

Mme Hoch. Oui. Sur le site de Rennes, nous avons eu quelques soucis mais nous voulons préserver toutes ses chances pour le pérenniser. Or, si nous avons construit nos calculs à partir des informations recueillies sur place, celles dont nous avons au final disposé s’avèrent très lacunaires et n’ont pu être avalisés en CCE. Sur le scénario 10, je signale que l’on a travaillé avec les syndicats qui le souhaitaient. Certains souhaitaient une diminution du temps de travail, notamment dans le département de la R & D, ce qui peut notamment faire sens pour les cadres. Avec le scénario 10 s’est posé le problème du taux de saturation de l’outil de production de PSA : à partir de quand PSA est-il profitable ? La cible selon certains doit être d’un taux de 115 %. Il y a sans doute des marges de manœuvre qu’il nous faut étudier mais notre hypothèse de travail est là et ne demande qu’à être discutée.

M. Sartorius. Je vous remercie, Mesdames et Messieurs, pour toutes les questions que vous avez posées car elles sont pour la plupart tournées vers l’avenir et c’est en effet ce qui doit nous intéresser. La situation actuelle du groupe est difficile : il faut chercher à sauver ce groupe qui est important pour notre industrie, et tout spécialement pour notre industrie automobile. Je précise que ma mission s’est arrêtée mi-septembre et que je n’ai rien reçu comme commande de la part du ministre depuis ; je n’ai donc pas d’information privilégiée à vous communiquer à ce stade.

Sur l’aspect de politique commerciale, PSA a, semble-t-il des difficultés à faire vivre les deux marques que sont Citroën et Peugeot. Il est assez révélateur de constater que, si Citroën a été acheté en 1978, ce n’est qu’en 2000 à l’initiative de Jean-martin Folz que l’on a enfin eu des plates-formes communes ! S’il existe une montée en gamme chez Citroën (notamment avec la DS), je constate également qu’il y a un fort parallélisme des modèles entre les deux groupes : la 207 répond à la C 3, la 508 à la C 5… Or, si l’on regarde par exemple Volkswagen, on observe qu’il existe des familles de voitures réservées à chaque marque qui ne se concurrencent donc pas inutilement : Audi se positionne sur le haut de gamme, Volkswagen sur le moyen de gamme et le bas de gamme est confié aux marques produites dans les pays à bas coût que sont par exemple Seat ou Skoda. Je constate que si PSA se rapproche davantage d’Opel, les difficultés risquent de s’accroître puisque marques et modèles sont concurrents.

M. le président François Brottes. Je vous remercie et je laisse la parole à ceux qui le souhaitent pour une minute.

Mme Clotilde Valter. Je ne suis pas tout à fait d’accord avec ce que vous venez de dire M. Sartorius sur le retour de ce qui s’est passé. On a plutôt le sentiment d’une catastrophe annoncée. On avait l’impression de recevoir des indicateurs d’alerte mais il n’en a pas été tenu compte d’où un vrai sentiment d’incapacité à agir, de prendre les choses en main. Est-ce un problème de pilotage d’ensemble et comment pensez-vous qu’il soit possible de reprendre la main ?

M. Philippe Armand Martin. La France dispose de nombreuses friches industrielles, notamment à la suite de l’abandon d’unités de production. Dans votre rapport, vous évoquez la ré-industrialisation du site d’Aulnay : quelle forme la ré-industrialisation du site pourrait-elle prendre selon vous ?

Mme Battistel. Dans vos rapports respectifs, M. Sartorius et la SECAFI, vous critiquez les choix de PSA. Quel est selon vous l’avenir de la filière ? N’y a-t-il pas de problème de concertation avec les partenaires sociaux, d’assemblages (on a déjà souligné l’absence de plateformes communes). Quant à l’éventuelle reprise d’Opel par PSA, qui a été annoncé par la presse avant d’être démentie par General Motors, qu’en pensez-vous ?

M. François Sauvadet. Nous venons d’apprendre que Renault annonce la suppression de près de 1500 emplois d’ici 2016. En outre, les prévisions de l’agence européenne font état d’une baisse de 8,9 % du marché automobile entre 2011 et 2012, soit le niveau le plus bas depuis 1993.

Je veux saluer la qualité du travail effectué par M. Emmanuel Sartorius. Vous avez souligné que le marché européen est essentiellement un marché de renouvellement et que les perspectives de développement seraient donc hors d’Europe. Je souhaiterais savoir quelles sont, d’après lui, les adaptations nécessaires de l’appareil industriel français, sachant que le développement économique se situe majoritairement hors de nos frontières. Quelles sont vos recommandations en tant qu’expert ayant rédigé un rapport sur ce sujet ?

M. Frédéric Barbier. La stratégie de gamme de PSA a beaucoup évolué récemment. Elle s’oriente d’une stratégie de gamme médiane à une stratégie de gamme supérieure. Ainsi, la 307 et la T9 sont des modèles incorporant nombre d’éléments électroniques appartenant à la gamme supérieure. Cependant, cette stratégie a pour conséquence directe d’engendrer une certaine hausse des prix d’achat et d’entretien. Dans quelle mesure cela vous semble-t-il pertinent dans un contexte de crise économique où les moyens des ménages sont contraints. Il m’apparaîtrait plus logique de favoriser des petits modèles, fiables, à des prix abordables.

Vous avez évoqué le risque économique qui s’attache à la décision d’octroyer un rabais de 8 000 euros sur un véhicule qui en coûte 20 000. Il me semble que cette stratégie pose question, même si je ne la remets évidemment pas en cause.

M. Alain Marc. Le rapport traite de la cannibalisation des modèles entre Peugeot et Citroën. En conséquence, quelles évolutions peut-on envisager ? Préconisez-vous l’unicité des réseaux ? En Allemagne, les différentes marques appartenant à un même groupe se sont spécialisées sur des gammes différentes.

Nous verrons quelle sera la réaction du ministre du redressement productif, M. Arnaud Montebourg, à l’annonce faite par Renault, dont l’État est le premier actionnaire.

Mme Frédérique Massat. Le groupe allemand Volkswagen connaît une croissance fulgurante, enregistrant l’année dernière une hausse de 11,2 % de ses ventes de véhicules, ce qui représente 9 millions de véhicules. Cette hausse est encore plus massive hors des frontières de l’Union européenne puisqu’elle s’élève à 23,3 % en Asie, 38,8 % en Russie et 34,2 % aux États-Unis.

Existe-t-il d’après vous un « modèle » Volkswagen ? Dans quelle mesure l’industrie automobile française pourrait-elle s’en inspirer ?

Il faut saluer l’annonce positive effectuée par la banque PSA finance s’agissant du renouvellement des lignes de crédits bancaires associées aux actions de titrisation. Cela permet d’assurer le refinancement de la banque PSA finances et donc lui assure une certaine robustesse. Quelles perspectives cela peut-il assurer pour le groupe ?

M. Thierry Benoit. Votre rapport de février 2011 illustrait de manière très claire la différence compétitivité de 38 % entre la France et l’Allemagne du fait de l’écart important de charges salariales – qui ne représentent que 23 % du salaire en Allemagne contre 49 % en France – et de durée du temps de travail – 40 heures hebdomadaires en Allemagne contre 35 heures en France – entre ceux deux pays.

À la suite de ces constats, quelles pistes concrètes de réindustrialisation peuvent être mises en œuvre en France ?

Pouvez-vous nous dire où en sont les discussions sur les propositions de départ anticipé en retraite dans le cadre de la refonte de la filière industrielle automobile.

M. Joël Giraud. On a évoqué la R&D comme l’un des moyens à mettre en œuvre pour permettre la sortie de crise. Il me semble qu’il faut également parler de l’importance de l’innovation, essentielle en matière de transition énergétique. Comment peut-on, d’après vous, préserver les crédits affectés à la R&D par les entreprises ? Comment peut-on former des alliances constituant de véritables opportunités en matière de recherche et d’innovation – matériels décarbonés notamment?

M. Henri Jibrayel. Le 23 octobre 2012, l’Union européenne a pris la décision d’allouer 11,9 millions d’euros à la formation des salariés ayant perdu leur emploi à la suite du plan de restructuration de PSA en 2009 et en 2010. Peut-on d’ores et déjà dresser un premier bilan de cette mesure ? Les personnes concernées par le nouveau plan pourront-elles en bénéficier ?

M. le président François Brottes. Avant de laisser la parole à nos intervenants, je souhaiterais également vous interroger sur l’évolution de la fluidité du marché automobile d’occasion.

M. Emmanuel Sartorius. S’agissant tout d’abord de la stratégie du groupe, il est vrai qu’on peut aujourd'hui la trouver mauvaise, mais il ne faut pas oublier qu’il s’agit d’un jugement rétrospectif et que la situation actuelle n’était pas nécessairement aisée à prévoir à prévoir. Ensuite, le groupe a connu des problèmes de management au plus haut niveau puisque ce sont trois directeurs généraux qui se sont succédé en moins de trois ans. Je tiens à préciser qu’il ne s’agit pas de ma part d’un jugement sut la valeur de ces personnes, mais uniquement un constat : l’instabilité du management en temps de crise où des décisions importantes en matière de stratégie doivent être prises a été une difficulté supplémentaire pour PSA.

S’agissant du développement international, qui n’est d’ailleurs pas antinomique mais au contraire complémentaire du développement français, il demande des marges de financement importantes, qui PSA n’est pas à même de dégager. Il lui faut donc un partenaire solide. Cela aurait pu être GM, mais il semble que les ambitions du groupe américain aient récemment été revues à la baisse en ce qui concerne les investissements dans PSA.

Vous avez évoqué le terme de cannibalisation, c’est effectivement un terme que j’ai employé dans le rapport pour qualifier la situation de PSA et la concurrence de modèles similaires entre Peugeot et Citroën.

Plusieurs d’entre vous ont évoqué la montée en gamme comme une solution possible à la crise que vit PSA. Il s’agit en effet d’une idée séduisante, mais qui se révèle difficile à mettre en pratique. L’exemple de la marque Audi montre que la construction d’une image de marque prend du temps. Il aura fallu presque vingt ans au groupe Volkswagen pour modifier durablement l’image d’Audi en marque Premium. Une montée en gamme et la construction d’une réputation sont des éléments longs à développer et qui demandent un conséquent investissement financier – environ 1 Md€ pour le développement d’un modèle Premium.

S’agissant de la question sur la success-story Volkswagen et sa possible adaptation à la France, je serais très mesuré. Il faut garder à l’esprit que ce groupe a connu d’importantes difficultés en 2004 et 2005. Tous les grands groupes automobiles, Ford, Chrysler, GM, ont connu, à un moment ou à un autre de leur histoire, des crises majeures et ont su adapter leur modèle économique et industriel. Je ne pense donc pas qu’il faille tirer de conclusions définitives du modèle qu’offre aujourd'hui Volkswagen.

On m’a interrogé sur le rapport que j’ai rédigé en 2011 sur les sociétés françaises d'ingénierie et de conseil en technologies. Il vise une catégorie très particulière d’entreprises, telles qu’ALTRAN ou ALTEN. Il se trouve que pour ces entreprises où 80 % , il existe en effet des différences entre l’Allemagne et la France. Mais mes conclusions ne peuvent en aucun cas être extrapolées à l’ensemble de l’industrie automobile.

Il faut en moyenne produire 2 millions de voiture par an en France pour maintenir l’activité automobile française.

Mme Christine Hoch. C’est en effet sur cet étiage que se sont basées les discussions en 2009 lors de la première crise.

M. Pierre Ferracci. Mme Clotilde Valter a évoqué les indicateurs qui annonçaient le désastre actuel et qui n’ont pas assez été pris en compte. Je suis d’accord avec M. Emmanuel Sartorius sur le fait que les problèmes de management ont perturbé les choix stratégiques.

Il faut que la structure de l’actionnariat laisse une grande liberté de choix au management.

PSA accumule les difficultés puisque ce groupe ne dispose pas d’entrée de gamme, ni de haut de gamme – qui sont les segments qui souffrent le moins de la crise – et vend essentiellement en Europe – qui est l’une des zones géographiques les plus affectées par la baisse des ventes.

Notre diagnostic est que PSA dispose d’une belle technologie mais souffre d’un certain déficit d’image. Audi a su capitaliser à partir de ses succès de rallye, ce que peinent à faire les marques françaises. L’alliance actuelle ne répond pas de façon suffisante aux défis.

Mme Nadia Ghedifa. Il nous semble qu’il manque au niveau de PSA une réflexion stratégique de moyen terme. De nombreuses entreprises travaillent sur des scénarios à quatre ou cinq, développent des hypothèses variées, ce qui leur permet d’anticiper les obstacles structurels.

Pour les salariés de Peugeot employés sur le site de Rennes, la situation s’annonce également compliquée.

Pour en revenir à Aulnay, il est évident que la question de la revitalisation du site aurait dû être posée bien plus tôt. Aujourd’hui, il faut entreprendre très rapidement des actions qui nécessitent du temps, surtout si l’on souhaite que chaque salarié quittant le site d’Aulnay retrouve un poste en accord avec ses souhaits. Ainsi, sur le site d’Aulnay, près de 80 % des personnels sont assurés de retrouver un emploi. Pour autant, certaines offres d’emplois nécessitent des formations professionnelles préalables. En ce qui concerne les autres salariés, il sera nécessaire de mettre en place des dispositifs d’accompagnement innovants sur une plus longue durée.

S’agissant du site de Rennes, le bassin est moins dynamique que celui d’Aulnay, tout le monde en conviendra. En conséquence, le processus de reclassement des personnels est plus complexe à mettre en œuvre, notamment car les possibilités de réimplantation d’unités industrielles sont limitées. Ainsi, si le site de Rennes se trouvait confronté à la même situation que celui d’Aulnay, la situation serait beaucoup plus complexe à gérer. C’est pourquoi le rapport préconise de mener une réflexion approfondie sur l’avenir de ce site à moyen terme.

J’en viens à présent à la notion de filière automobile. Nous avons proposé deux pistes de réflexion, au niveau européen comme au niveau national. S’agissant du niveau européen, il n’est pas du tout acquis que le marché soit assez mûr pour obtenir un accord entre les différents acteurs, et notamment les constructeurs. Nous avons cité le cas de Volkswagen, qui n’est pas particulièrement intéressé par une telle évolution. Pourtant, il est évident que la réflexion doit être menée au niveau européen. À nos yeux, il conviendrait d’envisager un encadrement des prix : il ne s’agirait pas d’établir un prix unique des voitures en général, car les disparités sont trop grandes d’un modèle à l’autre, mais de procéder plutôt par gamme par exemple.

Au niveau national, il est essentiel de rappeler que nos débats portent aujourd’hui sur la situation d’une grande entreprise, qui dispose des moyens de mettre en place des actions cohérentes. Si l’on s’intéresse en revanche à l’ensemble de la filière, la situation de nombre d’entreprises est bien différente et il y a un besoin d’accompagnement de la filière.

M. François André. Le rapport Gallois listait une série d’enjeux relatifs au devenir industriel de la France, dont deux concernaient spécifiquement le secteur automobile. Premier enjeu, la reconstitution des marges des entreprises afin de financer les investissements de demain. C’est d’ailleurs ce point qui a motivé la réforme du crédit d’impôt recherche. Dans ce contexte, connaissez-vous le volume que représente le crédit d’impôt recherche pour PSA ? Ce dispositif permettra-t-il de rééquilibrer la situation entre PSA et ses concurrents européens. Deuxième enjeu, la montée en gamme. Nous le savons tous, la gamme « DS » produite par Citroën demeure encore marginale. Néanmoins, force est de le constater, les véhicules de cette gamme remportent un réel succès commercial auprès du public, notamment car ils renouent avec l’identité de la marque concernée. Ne pensez-vous pas qu’il s’agit de la bonne formule pour l’avenir ?

M. Dino Cinieri. Depuis cinq mois, toutes les attentions sont concentrées sur le plan de restructuration qui prévoit près de 8 000 suppressions d’emplois. Néanmoins, d’après votre rapport, l’environnement économique morose général n’explique pas à lui seul la situation du groupe Peugeot aujourd’hui. En effet, Peugeot serait parti trop tard à la conquête du marché international, et ce avec des objectifs inatteignables. Quelles sont les raisons de ce retard ? Vous avez indiqué que la famille Peugeot ne mettrait pas la main à la poche pour financer le milliard et demi d’euros nécessaire au redressement de l’entreprise, mais est-il envisageable que les sociétés annexes du groupes se portent garantes ? Enfin, que pensez-vous de l’idée de constituer un groupement d’employeurs de la filière automobile afin de mettre à la disposition des industriels des compétences de recherche et de développement ?

Mme Jacqueline Maquet. Quelques jours après sa signature par les partenaires sociaux, j’aimerais connaître votre position sur l’impact sur le groupe PSA de l’accord sur l’emploi ?

M. Damien Abad. Tout d’abord, permettez-moi de me réjouir de voir chacun prendre conscience des difficultés économiques de PSA et du secteur automobile dans son ensemble, national et européen. Parmi vos différentes propositions, êtes-vous capables d’identifier les plus prioritaires ? S’agit-il de diminuer la part de la famille Peugeot dans le capital du groupe ? Faut-il mettre en place une stratégie d’alliance avec d’autres entreprises ? Par ailleurs, s’agissant de la faiblesse de la filière automobile, j’aimerais préciser que la situation est particulièrement difficile pour des sous-traitants qui ont une mono-activité. Il en est ainsi dans ma circonscription, située dans la « Plastics Vallée » et abritant ainsi de nombreux sites industriels de plasturgie. Comment prendre en compte la situation particulière de ces sous-traitants ?

M. Philippe Kemel. Le diagnostic est clair, chacun le connaît d’ailleurs. Selon vous, le renouvellement à venir du parc automobile européen, notamment grâce au développement du véhicule électrique, permettrait-il de révolutionner le marché et de relancer la production de manière significative ? Par ailleurs, en tant qu’élu de l’arrondissement de Lens, j’ai pu suivre la transformation économique de cette région, à la suite de l’extinction des activités minières. La reconversion économique a principalement été orientée vers le secteur automobile et des entreprises comme la Française de mécanique ou Faurecia, partenaires de PSA, sont implantées sur nos territoires. Aujourd’hui, la région Nord Pas-de-Calais finance un programme de recherche, avec la Française de mécanique, afin d’anticiper les évolutions du marché. Ne pensez-vous pas que l’État, en coordination avec les collectivités territoriales, devrait mieux anticiper ces évolutions sectorielles pour garantir la sécurité professionnelle dans nos régions ?

Mme Pascale Got. Je souhaiterais savoir si vous avez connaissance des préconisations de votre rapport qui pourraient être retenues par la direction de PSA. Par ailleurs, sauf erreur de ma part, vous n’avez pas analysé le plan social touchant 10 000 à 11 000 personnes, mais seulement indiqué qu’il pourrait être « recalibré ». Qu’entendez-vous exactement par-là ?

M. Alain Suguenot. Permettez-moi une remarque de bon sens. Au-delà de la situation particulière de PSA, il me semble que nous devrions nous interroger sur la politique automobile de la France : notre pays aime-t-il encore l’automobile ? Force est de constater que l’on multiplie les mesures à l’encontre du secteur automobile. Aujourd’hui, seul le haut de gamme parvient à afficher des résultats satisfaisants. En comparaison, aux États-Unis – et ce malgré la crise – ou en Chine, le secteur automobile se porte bien car on y aime la voiture ! En France, on pénalise sans cesse les utilisateurs de voiture, comme en témoigne la suppression de la défiscalisation pour les véhicules de plus de six chevaux.

M. Jean-Charles Taugourdeau. Si je ne suis pas compétent pour juger de la manière dont l’entreprise est dirigée – s’il suffisait de placer quatre ou cinq députés dans les conseils d’administration des grandes entreprises pour relancer l’industrie, cela se saurait – je m’interroge tout de même sur certains points. D’abord, l’accord sur l’emploi signé il y a quelques jours permettra-t-il à PSA de renforcer sa compétitivité ? Ensuite, quel regard portez-vous sur le lobby de certaines associations, qui conduit à assimiler toute voiture puissante à une voiture dangereuse ? Ce type de stigmatisation me semble dangereux alors que ces modèles véhiculent bien souvent l’image d’une marque. Enfin, pensez-vous qu’annoncer de nombreuses années à l’avance la fermeture d’un site, comme cela a été évoqué, soit bien perçu par les syndicats ? Avant de laisser la parole à mes collègues, permettez-moi de souligner mon plein accord avec M. Suguenot quant au désamour de la France pour l’automobile, alors que notre pays a quasiment inventé cette industrie !

M. Razzi Hammadi. Je ne crois pas que l’amour ait quoique ce soit à voir avec la situation économique d’un secteur industriel. Les politiques menées ces dernières années devraient d’ailleurs interdire à l’opposition l’adoption d’une attitude de donneur de leçons. Nous aussi nous aimons l’emploi et souhaitons que ce secteur redevienne fer de lance de la croissance française ! Cela dit, permettez-moi de vous interroger sur l’existence d’un certain dumping monétaire, les industriels allemands utilisant davantage leur hinterland et profitant de la proximité de la Pologne, et ainsi de la faiblesse du zloty. Car si l’assemblage a toujours lieu en Allemagne, certaines pièces sont fabriquées dans les pays voisins.

M. le président François Brottes. Comme vous le constatez, il y a un grand nombre de questions. J’en poserai pour ma part une dernière avant de vous laisser la parole. Selon vous, choisir l’hybride ou l’électrique est-il à même de relancer l’économie ? En somme, pour paraphraser M. Sauvadet, la filière automobile serait-elle robuste si l’on fabriquait moins de véhicules mais uniquement électriques ?

Mme Christine Hoch. En matière d’évolution technologique, il faut bien avoir en tête l’« espace-temps » automobile. Les évolutions des trois à quatre prochaines années sont déjà actées. Les programmes de R&D qui s’engagent aujourd’hui portent sur les modèles que nous connaîtrons à partir de 2016. Ainsi, les sujets que vous évoquez – mobilité hybride, tout électrique – caractérisent pour l’essentiel la mobilité des années 2020 et au-delà.

Comment regrouper sur le sol français des moyens de recherche pour faire émerger des solutions concrètes ? Les alliances avec d’autres producteurs constituent l’une des solutions. PSA n’a pas attendu son alliance généraliste avec General Motors pour s’engager dans cette direction. Le groupe avait également conclu des alliances d’opportunité, pour un partage de la R&D va jusqu’à un niveau « pré-compétitivité », sur des sujets spécifiques : avec BMW pour le moteur à forte puissance, avec Ford pour le moteur diesel. Les deux constructeurs nationaux peuvent-ils s’entendre ? Jusqu’à présent, ils ont choisi des voies différentes.

M. Pierre Ferracci. Pour répondre à votre question sur le bénéfice attendu du CICE pour le groupe PSA, il serait d’environ 100 millions d’euros par an. C’est une somme importante, mais insuffisante pour inverser le rapport de force avec les concurrents allemands, qui bénéficient d’avantages structurels déterminants : une stratégie ancienne de baisse des coûts, une stratégie offensive fondée sur une R&D innovante, des rapports apaisés au sein de la filière, et, facteur non négligeable, des marges confortables sur le marché chinois, qui permettent de casser les prix en Europe – à ce titre, une stratégie concertée européenne me paraît bien difficile à mettre en place.

Mais le modèle allemand n’est pas le seul qui marche : le low-cost, sur lequel s’est placé Renault, apparaît aujourd’hui pertinent à maints égards. Il est aisé de critiquer aujourd’hui PSA pour des choix qui, il y a peu, paraissaient les bons. Je rappelle que Renault, il y a trois ou quatre ans, était épinglé comme le mauvaise élève, qui faisait le choix de délocaliser sa production plutôt que de garder ses effectifs sur le territoire national.

Fait décisif, l’alliance avec Nissan a donné à Renault des moyens financiers pour mener une stratégie ambitieuse. Par conséquent, on ne peut passer à côté de la question centrale : faut-il élargir le tour de table du groupe PSA ? Il est compréhensible que les actionnaires souhaitent garder la main sur leur entreprise familiale, mais garder une grosse part d’un gâteau qui fond n’a jamais été un choix pertinent…

S’agissant de l’accord conclu entre les partenaires sociaux, l’usage nous dira s’il est bon. Il reste encore beaucoup d’essais à transformer. La gestion prévisionnel de l’emploi et des compétences est un point central : le système français de formation professionnel reste à parfaire est la mobilisation des partenaires sociaux sur ce sujet est insuffisante. Espérons que cet accord change la donne.

M. Emmanuel Sartorius. Lorsque j’ai rencontré Michel Rollier, président de la plateforme de la filière automobile, il m’a fait part d’un premier constat, son grand désarroi pour définir le périmètre de cette plateforme.

En matière de sous-traitants, on compte, d’une part, ceux de taille internationale
– Valeo, Michelin, Faurecia, etc… –, qui s’en sortent bien et, d’autre part, ceux de rang 2, 3 ou 4, qui éprouvent les plus grandes difficultés. Ces centaines de PME constituent le gros des effectifs et ont des problèmes de survie du fait de leur manque de moyens financiers, de leur faible internationalisation et de la forte concurrence sur le secteur.

M. le président François Brottes. Merci à tous pour cette réunion fort intéressante.

——fpfp——

Membres présents ou excusés

Commission des affaires économiques

Réunion du mercredi 16 janvier 2013 à 10 h 15

Présents. - M. Damien Abad, Mme Laurence Abeille, M. Bruno Nestor Azerot, M. Frédéric Barbier, Mme Marie-Noëlle Battistel, M. Thierry Benoit, M. Yves Blein, Mme Michèle Bonneton, M. Christophe Borgel, M. François Brottes, M. Dino Cinieri, Mme Jeanine Dubié, Mme Corinne Erhel, Mme Marie-Hélène Fabre, M. Daniel Fasquelle, M. Christian Franqueville, M. Franck Gilard, M. Georges Ginesta, M. Joël Giraud, M. Daniel Goldberg, Mme Pascale Got, M. Jean Grellier, M. David Habib, M. Razzy Hammadi, M. Henri Jibrayel, M. Philippe Kemel, Mme Laure de La Raudière, M. Jean-Luc Laurent, M. Michel Lefait, Mme Annick Le Loch, M. Philippe Le Ray, Mme Jacqueline Maquet, M. Alain Marc, M. Philippe Armand Martin, Mme Frédérique Massat, M. Jean-Claude Mathis, M. Kléber Mesquida, M. Yannick Moreau, M. Yves Nicolin, M. Germinal Peiro, M. Hervé Pellois, M. Michel Piron, Mme Josette Pons, M. Dominique Potier, M. Patrice Prat, M. François Pupponi, M. Franck Reynier, M. Frédéric Roig, Mme Béatrice Santais, M. François Sauvadet, M. Michel Sordi, M. Éric Straumann, M. Alain Suguenot, M. Lionel Tardy, M. Jean-Charles Taugourdeau, M. Jean-Marie Tetart, Mme Catherine Troallic, Mme Clotilde Valter, M. Fabrice Verdier

Excusés. - Mme Ericka Bareigts, M. Alain Bocquet, M. Jean-Michel Couve, Mme Anne Grommerch, M. Antoine Herth, M. Armand Jung, M. Thierry Lazaro, M. Pierre-Yves Le Borgn', M. Serge Letchimy, Mme Audrey Linkenheld, Mme Marie-Lou Marcel, M. Bernard Reynès, M. Jean-Paul Tuaiva, Mme Catherine Vautrin

Assistaient également à la réunion. - M. François André, M. André Chassaigne