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Commission des affaires économiques

Mercredi 20 novembre 2013

Séance de 17 heures

Compte rendu n° 27

Présidence de M. François Brottes Président

– Suite de l’examen, en 2ème lecture, du projet de loi, modifié par le Sénat, relatif à la consommation (n° 1357) (M. Razzy Hammadi et Mme Annick Le Loch, rapporteurs)

La commission a poursuivi l’examen en deuxième lecture, du projet de loi, modifié par le Sénat, relatif à la consommation (n° 1357) sur le rapport de M. Razzy Hammadi et Mme Annick Le Loch.

La Commission des affaires économiques poursuit l’examen, sur le rapport de M. Razzy Hammadi et de Mme Annick Le Loch, des articles du projet de loi relatif à la consommation (n° 1357).

Article 21 ter : (article L. 211-15-1 [nouveau] du code des assurances) : Libre choix de son réparateur automobile

La commission examine, en discussion commune, les amendements CE239 de Mme Catherine Vautrin et CE443 de M. Razzy Hammadi, rapporteur.

M. Damien Abad. Les compagnies d’assurances et les mutuelles concluent de plus en plus souvent des contrats d’agrément afin de diriger leurs sociétaires vers des professionnels qu’ils ont agréés, en valorisant les facilités que ceux-ci offrent au client. Ces comportements tendant à entraver la liberté du choix du professionnel par l’assuré, la Commission d’examen des pratiques commerciales (CEPC) a étudié les relations entre assureurs et réparateurs. En 2008, une charte de bonne conduite a été signée entre les différentes parties, mais, après trois ans d’application, le respect du principe de libre choix du consommateur n’est pas toujours garanti. Au contraire, les contrats d’agrément ne cessent de se développer. L’amendement CE239 a pour objet d’inscrire ce principe dans la loi pour l’ensemble des contrats de mutuelle ou d’assurance. L’amendement du rapporteur ne va pas assez loin, car il ne concerne que les contrats d’assurance automobile.

M. Benoît Hamon, ministre délégué chargé de l’économie sociale et solidaire et de la consommation. Au-delà des réserves que j’avais exprimées en première lecture, en raison du fait que les réseaux agréés bénéficiaient aux consommateurs et qu’il n’y avait pas de pratique anticoncurrentielle avérée, votre amendement aura un coût pour les assurés si les assureurs doivent rééditer tout le stock de contrats. C’est pourquoi nous avons prévu un dispositif à deux volets : mention écrite sur les contrats nouveaux et notification à l’assuré au moment du sinistre sur les modalités à définir par arrêté. Avis défavorable.

M. Razzy Hammadi, rapporteur. L’amendement CE443 tient compte de la difficulté technique qu’il y aurait à réécrire le stock des millions de contrats existants pour y inscrire la notion de liberté de choix.

Il existe aujourd’hui des contrats de 30 à 50 % moins chers que les contrats classiques, mais qui engagent le client à faire appel, pour ses réparations, à un réseau agréé. Si je suis favorable à l’esprit de l’amendement CE239, qui reprend d’ailleurs dans l’exposé de ses motifs l’avis de la CEPC, je crains que la rétroactivité ne soit un piège. En ce sens, l’amendement CE443 me paraît juridiquement mieux adapté.

Par ailleurs, l’amendement CE239 porte sur l’ensemble des secteurs, et pas seulement sur le secteur automobile, qui avait fait l’objet de nos discussions en première lecture.

M. le ministre. Avis favorable.

Mme Laure de La Raudière. La référence à l’article L. 211-1 du code des assurances laisse penser que l’amendement du rapporteur ne concerne que les sinistres automobiles.

M. le rapporteur. C’est bien le cas.

Mme Laure de La Raudière. Nous souhaitons, nous, ouvrir cette liberté de choix au-delà du secteur automobile.

M. Damien Abad. Nous ne sommes pas opposés à l’amendement CE443, qui va dans le bon sens, mais il faut être plus ambitieux. Certains opticiens, par exemple, refusent l’adhésion à un réseau, en fonction de critères peu clairs. Nous proposons donc d’étendre ce principe à l’ensemble des contrats.

M. le rapporteur. On ne peut pas défendre les réseaux de soins agréés pour les remettre en cause au détour d’un projet de loi sur la consommation. En revanche, adopter cette mesure pour le secteur automobile ne pose pas de problème, puisque nous en avons discuté et que les syndicats professionnels sont d’accord.

Mme Laure de La Raudière. Vous savez pourtant que nous avons raison.

M. le président François Brottes. J’ai eu récemment à faire avec un carrossier qui avait affiché cet amendement dans sa devanture, pour que ses clients soient avertis de l’existence de cette liberté de choix.

M. le rapporteur. Monsieur le président, je me permets de vous rappeler qu’il s’agit d’un amendement d’initiative parlementaire.

M. le président François Brottes. Le ministre peut également être fier que son texte permette de telles avancées.

La Commission rejette l’amendement CE239.

Puis elle adopte l’amendement CE443 à l’unanimité.

En conséquence, les amendements CE240, CE203 et CE323 tombent.

La Commission adopte l’article 21 ter modifié.

Article 21 quater (articles L. 131-3 [nouveau] du code des assurances, L. 931-3-3 [nouveau] du code [nouveau] du code de la sécurité sociale et L. 211-11 [nouveau] du code de la mutualité) : Information obligatoire sur la prise en charge des soins courants

La Commission examine, en discussion commune, les amendements CE322 de Mme Jeanine Dubié et CE147 de M. Christian Paul.

Mme Jeanine Dubié. L’objet de l’amendement CE322 est de garantir que la liste des principaux actes soit identique pour toutes les structures qui commercialisent des complémentaires santé. Cela permettra au consommateur de comparer les offres et de choisir, en fonction des soins auxquels il est le plus susceptible d’avoir recours, celle qui est pour lui la plus avantageuse. En effet, le consommateur fonde souvent sa décision sur le seul critère du prix, alors que, parfois, une comparaison à prestations identiques pourrait le conduire à opter pour une autre complémentaire santé, plus chère, mais mieux adaptée à ses besoins.

Mme Fanélie Carrey-Conte. L’amendement CE147 veut améliorer la lisibilité des garanties auxquelles souscrivent les 94 % des Français qui sont couverts par une assurance complémentaire santé. Il entend pour cela accentuer la dynamique vertueuse engagée par l’Union nationale des organismes d’assurance maladie complémentaire – qui regroupe les mutuelles, les assurances et les instituts de prévoyance – en favorisant la comparaison des assurances complémentaires, grâce à l’adoption, dans tous les documents de promotion des organismes qui commercialisent ces garanties, d’une présentation standardisée du niveau de prise en charge en euros des prestations de remboursement parmi les plus courantes. Cette mesure devra s’appliquer aux contrats individuels comme aux contrats collectifs, puisque, avec la loi sur la sécurisation de l’emploi, nous avons généralisé la complémentaire santé par contrat collectif dans les entreprises.

M. le ministre. Les précisions demandées par Mme Dubié seront prévues dans l’arrêté censé fixer les modalités de mise en œuvre de la liste des soins représentatifs et des supports de communication appropriés. Je lui propose donc de retirer son amendement.

Sur l’amendement CE147, j’émets en revanche un avis favorable.

L’amendement CE322 est retiré.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement CE147.

Puis elle adopte l’article 21 quater modifié.

Article 22 bis A (article L. 243-2 du code des assurances) : Attestation d’assurance

La Commission adopte l’article 22 bis A sans modification.

Section 3

Registre national des crédits aux particuliers

Article 22 bis (articles L. 333-6 à L. 333-23 [nouveaux] et L. 311-9, L. 311-16, L.313-9, L. 331-11 du code de la consommation, L. 670-6 du code de commerce, article 80 de la loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale, ordonnance n° 2013-421 du 23 mai 2013 relative à l'inscription au fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers des décisions relatives au traitement du surendettement en Polynésie française) : Registre national des crédits aux particuliers

La Commission examine les amendements identiques CE53 de M. Damien Abad et CE119 de M. Lionel Tardy.

M. Damien Abad. Cet amendement est le premier d’une série visant à supprimer les articles qui créent un registre national des crédits aux particuliers (RNCP). Nous nous interrogeons sur l’efficacité de ce « fichier positif », qui vise à lutter contre le surendettement, mais est soumis au principe de proportionnalité.

M. Lionel Tardy. Lors de l’examen en séance, j’avais listé les arguments qui devraient raisonnablement conduire à un rejet du fichier positif : la question de la finalité et de la proportionnalité ; la mise en place d’un fichage massif ; le coût du fichier et sa sécurisation ; le nombre excessif de renvois à des décrets ; l’absence d’étude d’impact, etc. Pour toutes ces raisons, la création de cette usine à gaz doit être abandonnée.

M. le ministre. Si je demandais à M. Tardy de développer chacun des points de son énumération, sa démonstration apparaîtrait moins robuste.

J’entends par ailleurs la question de M. Abad sur la compatibilité entre le principe de proportionnalité et l’efficacité du fichier. La conviction du Gouvernement est que, dès lors que, dans la plupart des dossiers de surendettement figurent des crédits à la consommation et non du crédit immobilier, c’est bien le crédit à la consommation et le crédit renouvelable qui favorisent et accélèrent le surendettement.

Grâce au test de solvabilité, les banques, désormais responsabilisées, ne pourront plus s’abriter derrière la prétendue bonne foi de l’acheteur de crédit. Nous mettons ainsi en place un cercle vertueux. Notre objectif n’est pas de faire disparaître du jour au lendemain le surendettement grâce à la création de ce fichier, mais de diminuer progressivement le niveau moyen de surendettement des dossiers traités par la Banque de France.

Annoncée à l’issue de la conférence nationale contre la pauvreté, la création du RNCP avait satisfait la plupart des organisations du secteur. Avis défavorable.

M. le rapporteur. La droite ne s’est pas toujours uniformément opposée à la création d’un fichier positif. Je partage pour ma part l’avis du ministre et reviendrai sur le sujet en séance publique.

La Commission rejette les amendements.

Elle adopte ensuite l’amendement de coordination CE461 du rapporteur.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements CE120 de M. Lionel Tardy et CE59 de M. Damien Abad.

M. Lionel Tardy. La Banque de France a exprimé à plusieurs reprises ses réticences à la création du fichier positif, mais, puisque le Gouvernement veut néanmoins le mettre en place, il est vrai qu’elle est la mieux placée pour le gérer. Néanmoins, avec la formule « placé sous la responsabilité de », le Gouvernement prévoit-il que, contrairement à son intention initiale, la gestion du fichier sera déléguée à un organisme privé ? On ne m’a pas apporté de réponse satisfaisante en séance publique.

M. Damien Abad. Il s’agit de clarifier le rôle et les responsabilités dévolus à la Banque de France dans un domaine où la sécurisation des données et la confiance des consommateurs vis-à-vis d’un tel dispositif doivent être un impératif majeur. Nous souhaitons donc préciser que le fichier est directement géré par la Banque de France.

M. le ministre. Pour construire ce fichier et résoudre les questions très techniques qu’il pose, il est probable que la Banque de France fasse appel à des prestataires extérieurs, dont il faudra évidemment contrôler la qualité. C’est la raison pour laquelle nous avons opté pour la formule « placé sous la responsabilité de ». Avis défavorable aux deux amendements.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette successivement les amendements CE120 et CE59.

Elle en vient ensuite à l’amendement CE121 de M. Lionel Tardy.

M. Lionel Tardy. Ce n’est pas un comité de suivi, aussi efficace soit-il, qui permettra d’éviter les risques liés au fichage. Si l’on veut évaluer la mise en place et l’impact du fichier positif, mieux vaut s’appuyer sur le rapport prévu à l’article 22 sexies.

M. le ministre. Avis défavorable, l’idée étant de réunir autour d’une même table l’ensemble des parties prenantes à la réalisation et à la mise en œuvre de ce registre, de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) à la Banque de France, en passant par les associations de consommateurs et d’aide aux personnes surendettées.

M. le rapporteur. L’idée de ce comité émane notamment du Conseil national de la consommation, et la puissance publique a engagé sa parole sur la mise en place de ce comité. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CE122 de M. Lionel Tardy.

M. Lionel Tardy. J’ai cru comprendre que le Gouvernement voulait un fichier positif proportionné afin d’éviter le rejet du dispositif par le Conseil d’État. Or, en étendant sa portée aux personnes qui se portent caution, on augmente significativement le nombre de consommateurs fichés. De plus, cela constitue une immixtion dans le droit des contrats, puisqu’on en vient à demander des informations sur ces personnes.

M. le ministre. La proportionnalité tient au nombre de personnes inscrites dans ce fichier. Or les personnes se portant caution ne seront pas intégrées au fichier, seule leur solvabilité étant vérifiée. Il n’y a donc pas de problème de proportionnalité. En outre, être informé sur sa solvabilité peut être utile à la personne devant se porter caution. Avis défavorable.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement CE122.

Elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel CE464 du rapporteur.

Puis elle en vient à l’amendement CE60 de M. Damien Abad.

M. Damien Abad. Cet amendement propose une clarification concernant les finalités du RNCP.

J’en profite pour demander des éléments d’information sur la manière dont on répertoriera les fichiers, ainsi que sur la reprise de stock.

M. le ministre. Cet amendement est satisfait par l’alinéa 18 de l’article 22 bis. Je demande donc son retrait.

L’amendement est retiré.

La Commission examine, en discussion commune, les amendements CE123 de M. Lionel Tardy et CE321 de Mme Jeanine Dubié.

M. Lionel Tardy. En étendant la portée du fichier positif, on étend la portée du fichage. Le début de l’article nous annonce que le registre recense « les crédits à la consommation ». Pourtant, la liste contient les autorisations de découvert. Or, lorsqu’elles sont remboursables dans un délai supérieur à trois mois, celles-ci s’apparentent à un crédit, sans en être un à proprement parler. Surtout, elles concernent le lien contractuel qui lie un client à sa banque, et le fait que le fichier positif vienne s’immiscer me paraît assez douteux. Pour ces raisons, elles doivent être retirées du RNCP.

Mme Jeanine Dubié. Le RNCP a pour finalité de prévenir les situations de surendettement des personnes physiques. Or sa mise en œuvre prendra du temps, puisqu’il gérera le flux et non le stock. Nous proposons donc d’améliorer la vérification de la solvabilité en complétant la partie positive du répertoire par l’intégration des autorisations de découvert et des dépassements de plus de un mois. En effet, une durée supérieure à un mois est le signal de difficultés financières persistantes, et, pour certaines personnes, le découvert constitue une manière récurrente de boucler les fins de mois. Si cela peut leur permettre de disposer d’une trésorerie sans recourir à l’emprunt, cela atteste néanmoins d’une réelle fragilité financière, l’accumulation de découverts successifs pouvant, par un effet boule de neige, conduire au surendettement. Nous proposons donc d’inclure ces découverts dans la liste des éléments de vérification.

M. le ministre. Monsieur Tardy, les autorisations de découvert remboursables dans un délai supérieur à trois mois sont soumises aux dispositions du code de la consommation, au même titre que les prêts personnels et le crédit renouvelable. Il s’agit de véritables crédits, et il serait parfaitement illogique de ne pas les inscrire dans le registre.

Pour ce qui relève des autorisations de découvert classiques, facilités de trésorerie associées à la plupart des comptes bancaires, elles sont remboursables dans un délai inférieur à trois mois et ne seront pas inscrites dans le registre.

L’amendement de Mme Dubié prévoit l’inscription dans le registre des crédits, au titre des informations positives, des autorisations de découvert et des dépassements d’une durée supérieure à un mois. Or les autorisations de découvert remboursables dans un délai inférieur à trois mois répondent à une logique de gestion de trésorerie et non de crédit. Ainsi, elles n’ont pas vocation à être inscrites dans le registre.

J’émets donc un avis défavorable à ces deux amendements.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette successivement les amendements CE123 et CE321.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements CE444 du rapporteur et CE61 de M. Damien Abad.

M. le rapporteur. Cet amendement supprime l’obligation de déclaration des opérations de rachat de crédits et de regroupements de crédits par les établissements de crédit auprès de la Banque de France, car elle pose problème au regard de l’exigence constitutionnelle de proportionnalité du RNCP formulée par le Conseil d’État.

M. le ministre. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement CE444.

En conséquence, l’amendement CE61 tombe.

Puis elle adopte les amendements rédactionnels CE465 et CE466 du rapporteur.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CE124 de M. Lionel Tardy.

M. Lionel Tardy. Le rapport du groupe de travail sénatorial sur le RNCP de 2013 préconise la création d’un identifiant sécurisé dérivé du numéro d’inscription au répertoire (NIR), communément appelé « numéro de sécurité sociale », seul à même de garantir un niveau de sécurité satisfaisant. Or le Gouvernement préfère fonder l’identifiant sur l’état civil. À défaut d’une étude d’impact et d’un avis du Conseil d’État sur la création du fichier positif, pouvez-vous, monsieur le ministre, m’indiquer les raisons de ce choix ?

M. le ministre. Je suis désolé que vous ayez manqué, monsieur Tardy, l’explication que j’ai maintes fois répétée lors du débat en première lecture. Nous avons initialement envisagé de nous appuyer sur le NIR. Mais, face aux réserves émises par la CNIL et le Conseil d’État et au risque d’inconstitutionnalité, nous avons décidé de travailler à la constitution d’un registre à partir de l’état civil. Nous souhaitons aboutir à un identifiant fiable, sécurisé et conforme aux exigences en matière de garantie des libertés fondamentales.

M. le rapporteur. Même avis. Je précise en outre que les conclusions du groupe de travail auxquelles vous faites référence n’étaient pas univoques sur la pertinence du NIR.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel CE467 du rapporteur.

Elle examine ensuite l’amendement CE125 de M. Lionel Tardy.

M. Lionel Tardy. La création d’un fichier impose de garantir un droit d’accès pour les personnes enregistrées dont vous renvoyez les modalités à un décret. Pour être effectif, ce droit doit pouvoir s’exercer via internet. C’est ce que cet amendement propose d’inscrire dans le texte.

M. le ministre. Cet amendement ne paraît pas opportun. Il est évident que le droit d’accès s’exercera principalement via internet, mais mentionner cette seule modalité dans le texte pourrait priver de ce droit ceux qui n’ont pas la possibilité d’accéder à internet.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement.

La Commission est saisie de l’amendement CE62 de M. Damien Abad.

M. Damien Abad. La consultation du registre des crédits par les seuls personnels des établissements de crédit individuellement désignés et habilités à cet effet est source d’interprétations multiples, de difficultés opérationnelles et donc d’insécurité juridique. La désignation individuelle obligerait, en pratique, à tenir à jour et à transmettre à la Banque de France un fichier desdites personnes qui serait très lourd à gérer et n’aurait pas de réelle valeur ajoutée en matière de confidentialité des données.

Il convient de fixer un principe général d’habilitation interdisant à toute personne non autorisée de consulter le registre. Les établissements ont l’habitude de ce principe en vertu duquel ce sont les personnes dans leurs fonctions qui sont habilitées, et non les personnes nommément.

M. le ministre. Le nombre et la qualité des personnes susceptibles de consulter le registre ainsi que les moyens d’accès à celui-ci font partie des principaux sujets qui ont été examinés par le Conseil d’État. La désignation individuelle des personnes habilitées à consulter le RNCP est indispensable pour en contrôler strictement l’accès et éviter les détournements de ses finalités. Avis défavorable.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement.

Elle adopte l’article 22 bis modifié.

Article 22 quater (articles L. 311-9, L. 311-16, L. 313-9, L. 331-11 et L. 333-6, L. 333-7, L. 333-8, L. 333-9, L. 333-10, L. 333-11, L. 333-12, L. 333-13, L. 333-14, L. 333-15, L. 333-16, L. 333-17, L. 333-18, L. 333-19, L. 333-20, L. 333-21, L. 333-22, L. 333-23 [nouveaux] du code de la consommation, article 22-2 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986, L. 670-6 du code de commerce, article 80 de la loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale, ordonnance n° 2013-421 du 23 mai 2013 relative à l'inscription au fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers des décisions relatives au traitement du surendettement en Polynésie française) : Coordination

La Commission examine les amendements identiques CE55 de M. Damien Abad et CE126 de M. Lionel Tardy.

M. Damien Abad. J’attends toujours une réponse du ministre sur l’efficacité du fichier et les questions posées par la reprise du stock, les crédits répertoriés et la mise à jour du fichier.

M. Lionel Tardy. La disparition du fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP), pourtant de création récente, qu’entérine l’article 22 quater, paraît hâtive et prématurée, dès lors que la loi Lagarde n’a pas pu produire tous ses effets. Il serait préférable de prendre en compte les nombreuses propositions d’améliorations qui ont été formulées.

M. le ministre. Le FCIP, qui est un instrument utile, n’est pas supprimé, mais intégré dans le RNCP dans un souci de simplification. Les amendements étant de nature à remettre en cause le RNCP, j’y suis défavorable.

M. le rapporteur. Même avis. Je précise que la création du FCIP date de 1989.

La Commission rejette les amendements.

Puis elle adopte l’amendement de coordination CE468 du rapporteur.

Elle adopte l’article 22 quater modifié.

Article 22 quinquies (articles L. 334-5, L. 334-9, L. 333-10 et L. 333-17 du code de la consommation) : Application du Registre national des crédits aux particuliers outre-mer

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement CE56 de M. Damien Abad.

Puis elle adopte les amendements de conséquence CE462 et CE463 du rapporteur.

La Commission adopte l’article 22 quinquies modifié.

Article 22 sexies (articles L. 333-8 à L. 333-11, l’article L. 333-13, L. 333-14 et L. 333-15 à L. 333-20 du code de la consommation) : Entrée en vigueur du Registre national des crédits aux particuliers

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement CE57 de M. Damien Abad.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements CE63 et CE76 de M. Damien Abad.

M. Damien Abad. L’amendement CE63 propose de modifier le point de départ du délai de mise en œuvre du RNCP. Le comité de préfiguration du registre des crédits a estimé qu’un délai de mise en œuvre technique d’environ deux ans serait nécessaire à compter de l’adoption de la loi, mais aussi de la fourniture d’un cahier des charges précis qui est conditionnée par la publication de l’ensemble des décrets d’application. Un délai trop court ferait courir d’importants risques opérationnels.

L’amendement CE76 prévoit la réalisation par le comité consultatif du secteur financier d’une étude d’impact sur le fichier positif avant son entrée en vigueur.

M. le ministre. Sur l’amendement CE63, il nous semble préférable de fixer un délai, par ailleurs raisonnable et réaliste, avec un point de départ certain, le plus en amont possible, afin de mobiliser l’ensemble des acteurs.

Sur l’amendement CE76, le Gouvernement est convaincu que le RNCP permettra de prévenir un certain nombre de situations de surendettement. La décision, au demeurant difficile, de créer ce registre n’a pas été prise à la légère. Nous en avons pesé les avantages et les inconvénients. Il ne me paraît pas souhaitable de la repousser encore, dans l’attente d’une énième étude qui n’apportera rien de neuf à une réflexion très nourrie. Il était temps d’agir.

M. le rapporteur. Le délai de trois ans prévu par le texte est supérieur aux recommandations du comité de préfiguration.

M. Damien Abad. Votre argument sur l’inutilité d’un rapport supplémentaire ne vous a pas empêché de prévoir un rapport sur la mobilité bancaire et la portabilité du numéro de compte. Par ailleurs, le choc de simplification devrait inciter à réaliser des études d’impact avant de présenter un projet de loi sur des sujets transcendant les clivages politiques.

Je retire les amendements au profit de l’amendement CE150 de Mme de La Raudière.

M. le ministre. Le parallèle avec la mobilité bancaire et la portabilité du compte n’est pas pertinent, car cette réforme pourrait concerner 90 millions de comptes quand le fichier ne recensera que 10 millions de personnes au plus.

En outre, cette réforme justifie une étude d’impact, car elle modifiera considérablement le fonctionnement des établissements bancaires. Leur capacité à en supporter le coût devra aussi être évaluée.

Enfin, avec le débat sur le RNCP, qui est beaucoup plus ancien, nous ne sommes pas en terrain inconnu alors que le sujet de la mobilité bancaire mérite d’être défriché.

Les amendements sont retirés.

La commission est saisie de l’amendement CE150 de Mme Laure de La Raudière.

Mme Laure de La Raudière. Cet amendement propose un droit à l’expérimentation pour une réforme qui a été décidée sans que la loi Lagarde ait fait l’objet d’une évaluation complète, et alors même qu’elle a eu des effets positifs dans la lutte contre le surendettement. L’efficacité du fichier positif est loin d’être démontrée, puisqu’il ne prend pas en compte toutes les dettes. Une étude de la Banque de France publiée en 2007 soulignait notamment que, dans les trois quarts des cas, le surendettement était lié à un accident de la vie. Il s’agirait donc de ficher 10 millions de personnes pour un quart seulement des cas !

Cet amendement propose d’expérimenter la mise en place du fichier dans une seule région française, particulièrement touchée par l’endettement des ménages, durant une période de deux ans. Il faut être pragmatique. Il est, de surcroît, dommage de ne pas saisir l’occasion d’innover en recourant à l’expérimentation, que notre pays pratique trop peu.

Enfin, la création du fichier positif a un coût, pour les établissements bancaires et pour l’État, qui sera inévitablement supporté par les consommateurs, sous forme d’impôts ou de hausse de tarifs.

L’expérimentation permettrait d’évaluer les conséquences du dispositif et son adéquation aux objectifs fixés. Je lance un appel au bon sens.

M. le ministre. Je ne suis pas, madame la députée, imperméable à votre raisonnement. Mais les coûts liés aux investissements nécessaires pour la constitution du fichier ne seraient guère différents s’il était mis en place dans une seule région ou sur l’ensemble du territoire. L’expérimentation serait selon moi une source de complexité.

Votre proposition est une manière de différer la mise en œuvre d’un dispositif attendu pour limiter le surendettement. Je m’y refuse sans pour autant condamner le principe de l’expérimentation et renoncer à l’innovation.

M. le rapporteur. Je développerai en séance mes arguments sur l’allongement du délai de mise en œuvre, la restriction du champ ou la limitation de l’efficacité du dispositif que proposent plusieurs amendements.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement CE445 du rapporteur.

Elle est saisie de l’amendement CE127 de M. Lionel Tardy.

M. Lionel Tardy. La mise en place du fichier positif sera accompagnée par un comité de suivi, ce que je regrette, et fera l’objet d’un rapport dans un délai de trois ans, ce qui semble trop long. Le délai doit être réduit afin de pouvoir remédier sans tarder aux dysfonctionnements que le rapport met en évidence. L’amendement propose de ramener le délai à un an et demi.

M. le ministre. Le délai de dix-huit mois que vous proposez n’est pas réaliste, puisque le dispositif sera alors tout juste opérationnel.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 22 sexies modifié.

Article 22 septies : Regroupement des mesures d’application réglementaire

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement CE58 de M. Damien Abad.

Elle adopte ensuite l’article 22 septies sans modification.

La séance, suspendue à dix-sept heures cinquante-cinq, est reprise à dix-huit heures cinq.

Chapitre IV

Indications géographiques et protection du nom des collectivités territoriales

Article 23 (articles L. 411-1, L. 411-4, L. 711-4, L. 712-2-1 [nouveau], L. 712-4, L. 713-6, L. 721-1, L. 721-2 à L. 721-9 [nouveaux] et L. 722-1 du code de la propriété intellectuelle) : Protection de la dénomination des collectivités locales et création d’indications géographiques pour les produits non alimentaires

M. le président François Brottes. L’article 23 est réservé.

Article 24 bis (articles L. 731-1 à L. 731-3 [nouveaux] du code de la propriété intellectuelle) : Encadrement de la publicité et des pratiques commerciales relatives aux prestations de dépannage, réparation et entretien dans le secteur du bâtiment et de l’équipement de la maison

La Commission adopte l’article 24 bis sans modification.

Chapitre V

Modernisation des moyens de contrôle de l’autorité administrative chargée de la protection des consommateurs et adaptation du régime de sanctions

Section 1

Renforcement des moyens d’action en matière de protection économique du consommateur

Article 25 (articles L. 141-1 et L. 141-1-1-1 [nouveau] du code de la consommation, L. 313-21 du code de l’action sociale et 9 de la loi n° 89-421 du 23 juin 1989 relative à l’information et à la protection des consommateurs ainsi qu’à diverses pratiques commerciales) : Transfert dans le code de la consommation de l’article du code de l’action sociale et des familles relatif aux pouvoirs des agents de la DGCCRF en matière de protection économique des usagers, renforcement de la coopération avec la CNIL, faculté de prononcer des sanctions administratives en cas de non-respect des injonctions et faculté de saisir le juge contre un service de communication en ligne

La Commission examine l’amendement CE447 du rapporteur.

M. le rapporteur. Cet amendement propose le retour au texte adopté en première lecture par l’Assemblée nationale.

M. le ministre. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements CE128 et CE129 de M. Lionel Tardy.

M. Lionel Tardy. Je propose de supprimer la possibilité donnée à l’autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation d’obtenir l’interdiction d’accès à des contenus ou services en ligne. Le blocage des sites internet est techniquement inefficace dans tous les cas et envoie de mauvais signaux. Lors de l’examen du projet de loi sur les consommateurs, défendu par M. Lefebvre, je m’étais opposé à une telle mesure, comme mes collègues socialistes qui la considéraient alors injustifiée, inefficace et illégitime. J’espère qu’ils n’ont pas changé d’avis.

M. le ministre. J’émets le même avis défavorable que lors des débats de première lecture : toutes les explications propres à rassurer M. Tardy avaient alors été données, mais apparemment sans succès.

M. le rapporteur. Cette question a été largement débattue en première lecture. L’autorité administrative n’agit qu’en cas d’échec des recherches du responsable du site. Toutes les précautions ont été prises pour aboutir à un dispositif mesuré et raisonné.

M. Lionel Tardy. Mais cela ne marche pas. Je prends date et vous donne rendez-vous dans quelque temps…

M. le rapporteur. Et si cela marchait ?

M. Lionel Tardy. La question ne se pose pas : cela ne marche pas, on l’a vu avec HADOPI.

La Commission rejette successivement les amendements.

Puis elle adopte l’article 25 modifié.

Article 26 (article L. 141-1-1 [nouveau] du code de la consommation) : Faculté pour la DGCCRF d’enjoindre un professionnel de la vente à distance de ne plus prendre de paiement à la commande en cas de risque de défaillance

La Commission adopte l’amendement de coordination CE448 du rapporteur.

Puis elle adopte l’article 26 modifié.

Section 2

Renforcement des moyens d’action relatifs à la sécurité et à la conformité des produits

Article 33 (articles L. 215-10 et L. 215-11 du code de la consommation) : Modification du régime d’information de l’auteur présumé d’une infraction

La Commission adopte l’article 33 sans modification.

Article 37 bis (article L. 218-1 du code de la consommation) : Modalités de contrôles des agents de la CCRF

La Commission adopte l’article 37 bis sans modification.

Article 38 (articles L. 218-1-2, L. 218-1-3 [nouveaux], L. 215-2-2, L. 215-2-3, L. 215-2-4, L. 557-46 et L. 557-59 du code de la consommation) : Renforcement des contrôles à l’importation des denrées alimentaires autres que celles d’origine animale et des matériaux au contact des denrées alimentaires

La Commission adopte l’article 38 sans modification.

Article 39 (article L. 218-2 du code de la consommation) : Communication des rapports d'analyse ou d'essais et recours à une personne qualifiée

La Commission adopte l’article 39 sans modification.

Article 40 (article L. 218-4 du code de la consommation) : Suspension par le préfet de la commercialisation de produits dangereux

La Commission adopte l’article 40 sans modification.

Article 43 (article L. 218-5-2 du code de la consommation) : Renforcer les pouvoirs de police administrative pour garantir la sécurité des produits commercialisés

La Commission adopte l’article 43 sans modification.

Article 44 (articles L. 218-5-3 et L. 218-5-4 [nouveaux] du code de la consommation) : Mesures de police administrative relatives à l’absence d’avertissement d’un risque non perceptible

La Commission est saisie de l’amendement CE173 de M. Frédéric Barbier.

M. Frédéric Barbier. Cette disposition complète les mesures de police administrative du chapitre VIII du titre Ier du livre II du code de la consommation et constitue une mesure d’harmonisation avec les dispositions de l’article L. 141-1 du code de la consommation revues à l’article 28. Elle permettra aux agents compétents d’enjoindre à un opérateur de se conformer aux obligations résultant de la réglementation lorsqu’aucune autre mesure de police ne sera applicable. Ainsi, les agents pourront faire obligation à un opérateur d’établir la documentation technique ou la déclaration de conformité relatives à un produit lorsque la réglementation le prévoit, de tenir à disposition du public certaines informations, telles que le guide de la consommation de carburant et des émissions de dioxyde de carbone des voitures particulières neuves prévu par le décret n° 2002-1508, ou de faire figurer certaines informations sur un site internet : par exemple, la liste des composants prévue par le règlement européen n° 648/2004 relatif aux détergents. Ils disposeront ainsi, quel que soit le manquement constaté, d’une mesure de police administrative adaptée visant à mettre fin aux pratiques non conformes à la réglementation en vigueur.

M. le ministre. Je suis tout à fait favorable à cet amendement.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement.

Elle adopte ensuite l’article 44 modifié.

Article 47 (article L. 215-1 du code de la consommation) : Modification de la liste des agents qualifiés pour procéder à la recherche et à la constatation des infractions

La Commission adopte l’article 47 sans modification.

Article 47 bis (article L. 215-1-1 du code de la consommation) : Extension des pouvoirs des agents de la DGCCRF

La Commission adopte l’article 47 bis sans modification.

Article 48 (articles L. 215-3-3 et L. 215-3-4 [nouveaux] du code de la consommation) : Habilitation à procéder à des relevés d’identité et à utiliser le procédé du consommateur et cyberconsommateur « mystère »

La Commission examine l’amendement CE64 de M. Damien Abad.

Mme Catherine Vautrin. Cet amendement a pour objet de prévoir un encadrement des enquêtes anonymes que pourront mener les agents de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), notamment afin d’assurer le respect de l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, ainsi que le principe de loyauté dans l’administration de la preuve, qui s’impose aux autorités chargées d’apporter la preuve. C’est l’objet du garde-fou supplémentaire proposé par cet amendement.

M. le ministre. Il n’est pas besoin de garde-fou supplémentaire puisque le principe de loyauté dans l’administration de la preuve et le droit à un procès équitable interdisent d’ores et déjà la provocation par un agent de l’autorité publique à la commission d’une infraction. Les juridictions sanctionnent une telle déloyauté par l’irrecevabilité des éléments de preuve ainsi obtenus. D’ailleurs, si les juridictions autorisent déjà les agents de la DGCCRF à intervenir sans annoncer leur qualité d’agents de l’autorité publique, ce n’est qu’à la condition expresse de respecter ce principe. Il convient de préciser que ce dispositif prévu dans la loi ne fait que consacrer ce qu’autorise la jurisprudence. Il s’agit, pour un enquêteur de la DGCCRF, de se faire passer pour un consommateur pour souscrire un prêt ou faire un achat en ligne afin de vérifier si le professionnel respecte bien ses obligations. Nous ne sommes pas dans le cas d’agents infiltrés, comme ceux des services des douanes ou de la police, qui se font passer pour des trafiquants : dans ce dernier cas, il est important de préciser qu’ils ne doivent pas provoquer la commission d’une infraction. Pour les agents de la DGCCRF, une telle précision n’est pas nécessaire. C’est pourquoi je suis défavorable à l’amendement.

M. le rapporteur. Défavorable, pour les mêmes raisons. J’ajoute que l’agent qui agirait ainsi serait passible de poursuites. Les textes d’application fixeront une échelle des sanctions. Enfin, l’agent qui constatera l’infraction ne sera pas celui qui fixera la sanction. Nous ne pouvons faire peser une présomption de culpabilité sur des fonctionnaires dévoués à l’intérêt général.

M. Daniel Fasquelle. Il est heureux que, à la différence du droit anglo-saxon, notre tradition juridique n’admette pas la recevabilité des preuves obtenues par des moyens déloyaux. Certes, la jurisprudence consacre ce principe, mais le législateur ne peut cependant pas s’en remettre au bon vouloir du juge, et c’est pourquoi nous vous proposons d’inscrire ce principe dans la loi. Nous aurons ainsi une règle claire et accessible à tous au bénéfice de la sécurité juridique des entreprises.

La Commission rejette l’amendement.

Elle adopte ensuite l’article 48 sans modification.

Article 49 (sections 5 et 6 [nouvelles] du chapitre V du titre Ier du livre II du code de la consommation) : Pouvoir de perquisition et de saisie pour les infractions en matière de fraude et de falsification

La Commission adopte l’article 49 sans modification.

Article 49 bis (articles 16, 17 et 18 de la loi n° 94-665 du 4 août 1994 relative à l’emploi de la langue française) : Modification de la liste des agents qualifiés pour procéder à la recherche et à la constatation des infractions

La Commission adopte l’article 49 bis sans modification.

Article 50 : Extension du domaine d’application de l’article L. 450-1

La Commission adopte l’article 50 sans modification.

Article 50 bis (article L. 464-9 du code de commerce) : Dispositions relatives aux pouvoirs de sanction du ministre de l’économie

La Commission adopte l’article 50 bis sans modification.

Article 50 ter (article L. 550-1, L. 550-2, L. 550-3 et L. 621-9 du code monétaire et financier) : Dispositions relatives aux intermédiaires en biens divers

La Commission adopte l’article 50 ter sans modification.

Article 52 (article L. 450-3, L. 450-3-1 et L. 450-3-2 [nouveaux] du code de commerce) : Droit d’accès aux locaux

La Commission est saisie de l’amendement CE476 du rapporteur.

M. le rapporteur. Je retire cet amendement afin de l’intégrer à la discussion relative aux communications électroniques.

L’amendement CE476 est retiré.

La Commission adopte l’article 52 sans modification.

Section 4

Mise en place de sanctions administratives

Article 53 (article L. 141-1-2 [nouveau] du code de la consommation) : Modalités de prononciation d’une amende administrative

La Commission adopte l’amendement de coordination CE420 du rapporteur.

Elle examine ensuite les amendements CE241 et CE242 de Mme Catherine Vautrin, qui peuvent faire l’objet d’une présentation commune.

Mme Catherine Vautrin. Je défendrai également les amendements CE243, CE245, CE246 et CE247, qui doivent être examinés plus loin. Tous visent à encadrer le pouvoir de sanction accordé à l’autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation. L’amendement CE241 vise à renforcer les possibilités d’un débat contradictoire avant le prononcé de la sanction. L’amendement CE242 prévoit que toute contestation de la sanction par l’entreprise suspend le paiement de l’amende. L’amendement CE243 prévoit la possibilité d’un recours devant le juge judiciaire dans un délai de deux mois suivant la notification de l’amendement. L’amendement CE245 vise à ce que le paiement de l’amende soit repoussé à l’issue du débat contradictoire. L’amendement CE246 précise que l’exigibilité de l’amende est suspendue jusqu’à la décision définitive. Quant à l’amendement CE247, il précise que le juge judiciaire est le juge naturel des relations entre professionnels et consommateurs.

M. le ministre. Le juge administratif est déjà compétent pour statuer sur les recours formés contre les mesures d’injonction et de police administrative délivrées par les agents de la DGCCRF. Il est donc déjà amené à trancher des contentieux relatifs à des contrats de service. Il est de ce fait familiarisé avec le droit de la consommation, dont il doit, par exemple, examiner l’application à des contrats de distribution d’eau liant les collectivités et les usagers. Il n’y a donc pas de raison pour transférer ce nouveau contentieux au juge judiciaire, d’autant que le droit de la consommation n’a pas suscité de divergence d’interprétation entre les deux ordres de juridiction.

En outre, ce transfert de compétence juridictionnelle ne concernerait que les amendes administratives créées par le présent projet, tandis que les contestations relatives aux injonctions et mesures de police administrative prises sur le fondement du code de la consommation resteraient de la compétence du juge administratif. Ce transfert ne permettrait donc pas d’unifier le contentieux du droit de la consommation au profit du juge judiciaire. Il ne serait donc pas conforme à la jurisprudence du Conseil constitutionnel, qui ne permet au législateur de déroger au champ de compétence constitutionnel du juge administratif que dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice pour éviter la dispersion des contestations.

En outre, le fait que, devant le juge administratif, la possibilité d’obtenir le sursis à exécution des décisions administratives contestées existe sans qu’il soit besoin de le prévoir expressément ne fait que renforcer la position du Gouvernement en faveur du maintien de ces contentieux dans le champ de compétence du juge administratif.

Telles sont les raisons pour lesquelles je suis défavorable à cette série d’amendements.

M. le rapporteur. Étant donné que nous avons déjà eu ce débat en première lecture et que la réponse du ministre délégué a été plus que complète, je me contenterai ici de formuler un avis identique.

Mme Catherine Vautrin. S’agissant de la répartition du contentieux entre l’ordre administratif et l’ordre judiciaire, je vous mets en garde quant au fait que ce texte risque d’accroître le volume du contentieux, et donc les risques de conflits de compétence.

Vous n’avez pas jugé utile de répondre à nos premières propositions, notamment sur le contradictoire. Je ne vois pas ce qui s’oppose à ce que le texte, qui entre dans tant d’autres détails, renforce le contradictoire avant le prononcé de la sanction.

M. Daniel Fasquelle. Je regrette que le Gouvernement écarte systématiquement les propositions de l’opposition, même lorsqu’il s’agit de solutions purement techniques et sans aucun caractère partisan. Un tel a priori est tout à fait dommageable.

Les amendements de Mme Vautrin méritent d’être considérés à trois titres au moins. Premièrement, ils visent à obtenir ce qui a déjà été imposé à l’autorité de la concurrence par la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, soit imposer les règles du procès civil et du procès pénal à l’autorité administrative indépendante, notamment le principe du contradictoire. Il est probable que le juge appliquera ces règles à ce nouveau contentieux.

Deuxièmement, il est essentiel d’assurer un effet suspensif à la contestation de la sanction administrative, dans la mesure où, ces amendes pouvant se cumuler, on pourra très vite atteindre des sommes considérables, qui condamneront à mort des entreprises avant même qu’elles aient pu se défendre. Laissez aux entreprises le temps de s’expliquer.

Enfin, le texte va créer deux contentieux de la consommation, l’un relevant du juge administratif et l’autre du judiciaire. En dépit du lobbying incessant exercé par le Conseil d’État pour accroître le champ de sa compétence et justifier ainsi son existence, le droit de la consommation régit des rapports de droit privé, qui, à ce titre, ne relèvent en rien du juge administratif. En créant cette usine à gaz, source de conflits de compétence, vous commettez une erreur majeure.

M. le rapporteur. Je vous rappelle, monsieur Fasquelle, qu’une sanction administrative n’est pas une contravention. Par ailleurs, le juge administratif est, comme tous les juges, soumis au respect de l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, qui pose que toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue publiquement, dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial établi par la loi. En outre, les différentes étapes de la procédure devant le juge administratif ménagent déjà la possibilité du contradictoire. De même, il existe des procédures de référé qui permettent au contrevenant d’obtenir du juge administratif la suspension du paiement des amendes.

Voilà pourquoi je suis défavorable à vos propositions.

M. le ministre. Le projet de loi Lefebvre contenait des propositions similaires à celles auxquelles vous vous opposez aujourd’hui.

M. Daniel Fasquelle. Et je m’y opposais déjà : s’agissant de la compétence du juge judiciaire en matière de contentieux de la consommation, ma position n’a jamais varié.

M. le ministre. L’alinéa 6 de l’article prévoit déjà que, « avant toute décision, l’administration informe par écrit la personne mise en cause de la sanction envisagée à son encontre, en lui indiquant qu’elle peut prendre connaissance des pièces du dossier et se faire assister par le conseil de son choix et en l’invitant à présenter, dans le délai de soixante jours, ses observations écrites et, le cas échéant, ses observations orales » : vous voyez que le contradictoire est garanti.

Quant à la possibilité de suspendre l’exécution des injonctions et des sanctions administratives, elle se justifierait si le contentieux en cause relevait du juge judiciaire. Mais, dans la mesure où le contentieux en cause relève du juge administratif, la possibilité d’obtenir le sursis à exécution des décisions administratives existe déjà en application des règles de procédure administratives de droit commun.

Mme Catherine Vautrin. La possibilité de faire part d’observations écrites, et, le cas échéant, orales, prévue par l’alinéa 6 ne suffit pas à garantir la possibilité d’un débat contradictoire.

M. le ministre. Cet alinéa permet bien le débat contradictoire que vous appelez de vos vœux et qui doit garantir aux entreprises qu’elles seront entendues, et je suis prêt à le répéter en séance publique.

M. Daniel Fasquelle. Vous devriez vous inspirer des garanties offertes aux entreprises par la jurisprudence encadrant les décisions de l’autorité de la concurrence, qui relèvent de la compétence du juge judiciaire.

La Commission rejette successivement les amendements CE241 et CE242.

Elle examine, en discussion commune, les amendements CE133 de M. Lionel Tardy et CE243 de Mme Catherine Vautrin.

M. Lionel Tardy. Le régime des sanctions administratives prévu par le projet de loi est problématique : c’est la DGCCRF qui à la fois établit l’infraction, prononce la sanction et assure son recouvrement. Cette procédure laisse une marge d’interprétation trop importante à l’autorité administrative. Le projet de loi Lefebvre prévoyait un régime identique, avec, cependant, des sanctions plus proportionnées. À l’issue de sa première lecture au Sénat, un compromis avait été trouvé, à l’initiative de la rapporteure socialiste de la commission des lois. C’est cette solution que reprend cet amendement, qui vise à rendre les amendes administratives passibles de recours devant le juge judiciaire. Il permet également de prévenir les conflits de jurisprudence qui pourraient naître entre les deux ordres.

Mme Catherine Vautrin. L’amendement CE243 a été défendu.

M. le ministre. J’ai déjà dit pourquoi j’étais défavorable à ces propositions.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette successivement les amendements.

Elle adopte ensuite l’article 53 modifié.

Article 54 (articles L. 113-6 [nouveau], L. 121-15, L. 121-15-3, L. 121-41, L. 121-85-1, L. 132-2 [nouveau], L. 211-16-1 et L. 211-23 du code de la consommation) : Développement des sanctions administratives

La Commission adopte l’amendement de coordination CE421 du rapporteur.

Elle adopte ensuite l’article 54 modifié.

Article 56 (articles L. 2151-3 [nouveau], L. 2321-1, L. 2331-1-1 [nouveau], L. 2351-1, L. 3114-2-1 [nouveau], L. 3551-1, L. 4271-2 [nouveau], L. 4631-1, L. 4651-1, L. 5421-13 [nouveau], L. 5734-1, L. 5754-1, L. 5764-1, L. 5784-1, L. 5794-1, L. 6432-3 et L. 6733-1 [nouveaux], L. 6754-1, L. 6764-1 et L. 6784-1 du code des transports) : Application de sanctions administratives dans le domaine des transports

La Commission adopte l’article 56 sans modification.

Article 57 quater (article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles) : Publication des comptes des organismes privés gestionnaires d’établissements de services sociaux et médico-sociaux

La Commission examine l’amendement CE422 du rapporteur.

M. le rapporteur. La problématique des organismes privés gestionnaires d’établissements et de services sociaux et médico-sociaux mérite d’être abordée dans le cadre de l’examen du futur projet de loi sur la dépendance qui vous sera soumis par Michèle Delaunay. Je profite de l’occasion pour soutenir la mobilisation de Mme Dubié sur ce sujet, auquel elle nous a sensibilisés lors de la première lecture.

M. le ministre. Favorable.

Mme Jeanine Dubié. C’est là une sage proposition.

La Commission adopte l’amendement.

L’article 57 quater est supprimé.

Article 59 (article L. 465-1 et L. 465-2 [nouveaux] du code de commerce) : Attribution d’un pouvoir d’injonction et de prononcé de sanctions administratives aux agents de la DGCCRF

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette successivement les amendements CE245 et CE246 de Mme Catherine Vautrin.

Elle en vient ensuite à l’amendement CE244 de Mme Catherine Vautrin.

Mme Catherine Vautrin. Nous ne comprenons pas pourquoi le Gouvernement refuse de soutenir la médiation inter-entreprises alors même que 25 % des faillites d’entreprises sont dus à des retards de paiement dont le montant est estimé à 12 ou 13 milliards d’euros et qui fragilisent considérablement la trésorerie des entreprises. La médiation est un dispositif gratuit, rapide et confidentiel, qui permet de préserver les relations commerciales et d’éviter les procédures juridiques longues et coûteuses. Dans le contexte de crise qui est le nôtre, le non-respect des délais de paiement entretient une dégradation de la qualité des relations entre les clients et les fournisseurs. Inscrire dans ce texte la notion de médiation permettra de préserver la relation commerciale. En un mot, notre amendement ne coûte rien et nous permettra d’économiser gros.

M. le président François Brottes. Je confirme que la méditation est un excellent système. Cela étant, Monsieur le ministre, faut-il pour autant légiférer sur le sujet ?

M. le ministre. Avis défavorable, compte tenu du caractère systématique de l’obligation de saisine préalable du Médiateur qui serait imposée à la DGCCRF, mais aussi du fait qu’elle ne pourrait sanctionner le non-respect des délais de paiement qu’en cas d’échec de cette médiation. Cette systématicité risquerait notamment de rendre les sanctions moins dissuasives pour les entreprises contrevenantes.

Cela étant dit, dans le cadre de la directive sur le règlement extrajudiciaire des litiges, la France a fait en sorte que la médiation d’entreprise à la française soit maintenue par le Conseil – alors même qu’elle était largement critiquée par les autres États membres et par la Commission européenne. Et si ce fut un combat constant de la France avant l’alternance de 2012, nous demeurons nous aussi très attachés à ce dispositif.

Nous partageons donc l’objectif consistant à associer étroitement la médiation à la promotion d’une culture de paiement rapide. C’est pourquoi Pierre Moscovici et moi-même nous sommes engagés lors du vote de ce texte en première lecture à écrire aux organisations représentatives des entreprises pour communiquer largement sur le rôle de la médiation en matière de réduction des délais de paiement.

M. le rapporteur. Ayant pu aborder cette question avec le Médiateur lui-même – dont je salue le travail –, je me suis effectivement aperçu qu’aujourd’hui, trois quarts des litiges portant sur des retards de paiement sont réglés lorsqu’ils font l’objet d’une médiation. Or nous sommes nombreux à penser que le caractère volontaire et facultatif de la démarche est l’un des éléments-clefs de ce taux élevé de conciliation.

Qui plus est, la proposition ici formulée me semble lourde : vous prévoyez en effet l’obligation pour la DGCCRF, après avoir elle-même dressé un constat, de saisir le Médiateur. Or, il me semble plutôt que c’est d’un manque de visibilité que souffre le Médiateur. Et la promotion par les entreprises de l’utilité de la médiation ne se décrète pas compte tenu du caractère volontaire de la démarche. Je suis donc défavorable à cet amendement.

Mme Catherine Vautrin. Je rejoins entièrement le rapporteur lorsqu’il souligne à quel point la médiation est en demande de visibilité. De plus, les chiffres parlent d’eux-mêmes puisque le taux de résolution des conflits est très élevé en cas de médiation. Enfin, je peux admettre que notre amendement soit directif. Mais dans ce cas, Monsieur le ministre, avez-vous véritablement la volonté de faire avancer le débat sur ce sujet, auquel cas je pourrais me rapprocher de vos services afin que nous trouvions ensemble une solution d’ici l’examen du texte en séance publique ?

M. le ministre. Il me semble important que les procédures soient suffisamment claires, sans quoi l’on risque de monter une usine à gaz ! Si je ne suis pas fermé d’avance à de nouvelles propositions de votre part, je ne peux me prononcer avant de les avoir examinées.

L’amendement CE244 est retiré.

La Commission examine les amendements CE387 et CE388 de Mme Jeanine Dubié, qui peuvent faire l’objet d’une présentation commune.

Mme Jeanine Dubié. L’amendement CE387 vise à rendre obligatoire la publicité des décisions prononcées par l’autorité administrative, aux frais du professionnel sanctionné. Quant à l’amendement CE388, il s’agit d’une proposition de repli qui ne reprend que la première partie de l’amendement précédent, soit l’obligation de publicité des décisions prononcées par l’autorité administrative.

En première lecture, nous avions déjà proposé un amendement du même ordre, mais il avait été rejeté au motif que la publicité constituait un alourdissement insupportable de la sanction pour les acteurs économiques du secteur. Je n’ai cependant pas été convaincue par les arguments du ministre et du rapporteur, considérant justement que la publication de la sanction avait un réel effet dissuasif sur les acteurs. J’ai d’ailleurs été heureuse de constater que nos collègues sénateurs avaient été bien plus persuasifs que nous, puisqu’ils ont adopté un amendement prévoyant la possibilité d’une telle publicité. Cela nous semble un premier pas important, mais il convient d’aller plus loin en la rendant obligatoire – et, si possible, aux frais du professionnel sanctionné.

M. le ministre. Le Gouvernement n’est pas favorable au caractère systématique de la publicité des sanctions administratives, qui doit rester une faculté, en fonction notamment de la nature des manquements constatés de façon à conserver une certaine lisibilité et à ne pas noyer le public dans une information de masse, compte tenu du nombre important de contentieux en ce domaine. On risquerait, sinon, d’associer le nom de petites entreprises ou d’entreprises n’ayant commis que des erreurs minimes, à celui de sociétés ayant commis des fautes plus importantes. Si nous partageons l’objectif de pédagogie de la sanction, nous sommes défavorables à ces amendements. J’ajoute qu’ils risquent d’être contraires au droit constitutionnel, dans la mesure où ils confèrent un caractère systématique à une peine complémentaire.

M. le rapporteur. Je partage l’avis du Gouvernement.

Mme Jeanine Dubié. Ayant entendu les arguments du ministre, je retire ces amendements, tout en saluant la pugnacité du Sénat.

Les amendements CE387 et CE388 sont retirés.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette successivement les amendements CE134 de M. Lionel Tardy et CE247 de Mme Catherine Vautrin.

Mme Laure de La Raudière. Le Sénat a inséré dans le projet de loi une disposition en vertu de laquelle « la décision prononcée par l’autorité administrative peut être publiée selon des modalités fixées par décret en Conseil d’État ». Qu’entend le Gouvernement par le verbe « publier » ?

M. le ministre. La décision sera mise en ligne sur le site internet de la DGCCRF.

Mme Laure de La Raudière. Toutes les décisions de justice des tribunaux d’instance dans le domaine commercial sont-elles publiées elles aussi ? Si tel n’est pas le cas, ne court-on pas le risque d’introduire une différence de traitement entre les décisions de justice et les sanctions administratives ? Je souhaiterais que l’on puisse débattre de ce point en séance publique, car il s’agit là d’un article introduit par le Sénat, dont nous n’avons par conséquent pas encore débattu.

M. le président François Brottes. Bonne question !

M. le rapporteur. En première lecture, le ministre et moi-même avons rappelé que, dans le droit commun, la publication est considérée comme une sanction – qu’elle intervienne par voie de presse ou sur le site de la DGCCRF. C’est à ce titre qu’elle ne peut être automatique. Certaines sanctions sont ainsi prononcées avec publication, d’autres pas.

Mme Laure de La Raudière. Il importe de distinguer entre les erreurs d’exécution qui pourraient être occasionnellement commises par des chefs d’entreprise et les erreurs commises par d’autres acteurs économiques de façon répétée, et qui, une fois sanctionnées, pourraient effectivement être publiées.

M. le président François Brottes. La récidive me paraît en effet un critère intéressant.

La Commission adopte l’article 59 sans modification.

Article 60 (articles L. 441-2-2 et L. 441-3-1 du code de commerce) : Dispositions relatives au prononcé de sanctions administratives

La Commission adopte l’article 60 sans modification.

Article 61 (article L. 441-6, L. 442-6 et L. 443-1 du code de commerce) : Modifications et renforcement de la loi de modernisation de l’économie

La Commission est saisie de l’amendement CE486 de Mme Annick Le Loch, rapporteure.

Mme Annick Le Loch, rapporteure. Cet amendement vise à préciser que, parmi les conditions générales de vente (CGV), figurent non seulement le barème des prix unitaires – c’est-à-dire le tarif proposé par les fournisseurs dans le cadre de la discussion avec le distributeur –, mais également la date d’entrée en vigueur du barème. Cet amendement de précision permettra d’éviter que les distributeurs ne s’affranchissent de la date d’entrée en vigueur convenue, préférant retarder au maximum les hausses qu’ils devraient ainsi subir.

M. le ministre. Avis favorable. Je me permets à cette occasion de replacer ce débat dans le contexte actuel : les négociations commerciales ont commencé depuis le 1er octobre et se dérouleront jusqu’au 1er mars. Elles font l’objet d’intenses discussions entre les fournisseurs – parmi lesquels se trouvent de nombreuses PME – et les centrales d’achat de la grande distribution. Nos débats sont donc très attendus, même si, cette année, les négociations commerciales constituent une forme de terrain d’essai de ce qui pourrait figurer dans la loi l’an prochain. Dans ce contexte, tant les PME – de l’agroalimentaire en particulier – que la grande distribution sont attachées à l’équilibre établi par la loi de modernisation de l’économie (LME), que chacune des parties souhaite néanmoins aménager en fonction de ses intérêts. Le Gouvernement veillera à ce que les grands principes de la LME ne soient pas remis en cause, tout en faisant en sorte que les agents de la DGCCRF puissent exercer correctement leurs missions dans le respect d’un certain formalisme, en s’appuyant sur une documentation suffisante, et qu’ils soient ainsi en mesure d’assigner en cas d’infractions lourdes.

La Commission adopte l’amendement CE486.

Elle en vient ensuite à l’amendement CE389 de Mme Jeanine Dubié.

Mme Jeanine Dubié. Cet amendement vise à clarifier la date d’entrée en vigueur des CGV afin qu’elle ne constitue pas un élément supplémentaire de la négociation commerciale. Il ne s’agit nullement de supprimer celle-ci, mais de la rendre plus équitable. Si la LME avait pour objet de l’organiser sur le fondement d’un socle commun à l’ensemble des clients de la même catégorie, on a cependant constaté des dérives depuis l’adoption du texte en 2008, telles que des demandes de CGV personnalisées pour chaque enseigne, des demandes fréquentes de reports de la date d’application des tarifs ou l’application de conditions négociées au tarif de l’année antérieure.

M. le ministre. Le projet de loi précise que les CGV constituent bel et bien le socle à partir duquel se déclenche la discussion. Plus encore, il oblige désormais à indiquer, dans la convention conclue entre les deux parties prenantes, un barème des prix préalablement communiqué par le fournisseur. Rendre les conditions générales de vente opposables comme vous le proposez équivaudrait de facto à remettre en cause le principe de négociabilité des prix – ce qui constitue à nos yeux une rupture de l’équilibre de la LME. Compte tenu des améliorations déjà apportées par ce texte, j’émets un avis défavorable à l’amendement.

Mme la rapporteure. Même avis. J’ajoute que c’est la convention unique qui est opposable, et non pas les CGV.

Mme Jeanine Dubié. Notre objectif était de réaffirmer que la date d’entrée en application du tarif n’est pas négociable et qu’elle s’applique de plein droit pour ouvrir la négociation commerciale. Cela étant dit, je retire mon amendement.

L’amendement CE389 est retiré.

La Commission en vient ensuite à l’amendement CE487 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Cet amendement vise à préciser que les CGV constituent non seulement le socle de la négociation commerciale, mais surtout son socle unique. Il arrive en effet que les conditions générales d’achat soient présentées au mieux comme le socle de la négociation et, au pire, comme un document devant être signé par le fournisseur et qui tiendra lieu de convention unique. En tout état de cause, c’est là un travestissement de la loi. C’est pourquoi nous souhaitons réaffirmer plus clairement la règle : les négociations ont comme base les CGV, et rien qu’elles – ce qui n’empêche pas les distributeurs d’en discuter ensuite.

M. le ministre. Avis favorable.

Mme Catherine Vautrin. Un socle n’est-il pas unique par définition ?

M. le ministre. Le texte me paraît plus clair avec cette précision.

Mme Catherine Vautrin. Je ne vois guère ce que celle-ci a de normatif…

La Commission adopte l’amendement.

Elle examine l’amendement CE248 de Mme Catherine Vautrin.

Mme Catherine Vautrin. Nous proposons de bien préciser au troisième alinéa de l’article que les CGV constituent le socle de la négociation commerciale, dont découlent les conditions particulières de vente (CPV). C’est là une forme de hiérarchie des normes.

M. le ministre. Votre rédaction est ambiguë, donnant l’impression que les CPV ne seraient qu’une simple déclinaison des CVG. Or, une fois ces dernières posées, libre au fournisseur, lorsque commence la négociation, de consentir des CPV ou pas. Nous sommes donc défavorables à cet amendement qui pourrait être interprété comme contraire au principe de négociabilité, dans la mesure où les CGV sont posées unilatéralement par le fournisseur.

Mme la rapporteure. Je partage cet avis et ajoute que nous en avions déjà débattu en première lecture. Le texte actuel étant suffisamment clair, ne mélangeons pas les CGV et les CPV.

Mme Catherine Vautrin. Il ne s’agit nullement de les mélanger, mais de bien préciser que, une fois les CGV posées, une discussion commence, dont découlent ensuite des CPV. L’objectif de notre amendement consiste à hiérarchiser les CGV et les CPV, justement pour éviter leur confusion – phénomène que l’on constate depuis plusieurs années.

M. Daniel Fasquelle. Vous commencez par affirmer qu’il est très important de préciser que les CGV constituent le socle unique de la négociation. Puis vous nous répondez que les CPV pourront n’avoir rien à voir avec les CGV. Une telle argumentation me paraît totalement contradictoire !

M. le ministre. Dans votre exposé sommaire, vous indiquez que l’amendement « a pour objet de renforcer le principe selon lequel les CGV sont le socle des négociations ». Comment pouvez-vous vouloir renforcer ce principe alors qu’il vous paraît par ailleurs excessif de préciser qu’elles en constituent le socle unique ? En tout état de cause, votre amendement est parfaitement satisfait par la rédaction actuelle de l’article 61.

Mme Catherine Vautrin. Les travaux de la CEPC illustrent bien le problème de confusion des genres et de mélange entre CGV et CPV auquel nous sommes confrontés. D’où la nécessité de bien les hiérarchiser dans la loi.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement CE485 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Cet amendement vise à préciser la rédaction actuelle du texte, sachant par ailleurs que la grande majorité des acteurs auditionnés entre le vote du texte par le Sénat et les réunions de notre commission nous ont fait part de leur satisfaction quant à l’équilibre auquel le Sénat est parvenu.

M. le ministre. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

L’amendement CE249 de Mme Catherine Vautrin est ensuite retiré.

La Commission est saisie de l’amendement CE251 de Mme Catherine Vautrin.

Mme Catherine Vautrin. Je défendrai également mes amendements CE252 et CE250. Ce dernier a pour objet de supprimer la possibilité de prise en compte d’une forme de récidive. De fait, alors que le texte qui nous est proposé ne relève pas du domaine pénal, ses dispositions permettent de constituer une sorte de « casier administratif ». D’autre part, cette disposition n’est assortie d’aucune garantie de protection des droits de la défense.

Les amendements CE251 et CE252 visent à réduire le montant des amendes administratives encourues. Nous souscrivons à l’objectif de punir les agissements sanctionnables, mais, dans la plupart des cas, le montant des amendes fait courir un risque pour la viabilité des structures concernées. Il faut certes punir, mais peut-être pas tuer.

M. le ministre. Je comprends le sens de ces amendements, mais nous avons choisi d’instaurer des sanctions administratives qui permettent d’améliorer la réactivité et l’efficacité de l’action des pouvoirs publics, afin de lutter plus efficacement contre les retards de paiement. Les gains de croissance liés au respect des délais de paiement sont en effet considérables.

Il importe toutefois, pour atteindre cet objectif, que le montant de la sanction soit dissuasif. De plus, que le débiteur soit une personne physique ou une personne morale, le plafond des amendes doit être significatif, compte tenu de la considérable économie potentielle que les retards de paiement peuvent représenter pour la trésorerie des débiteurs peu disciplinés.

La loi fixe donc des montants de sanctions administratives qui ne pourront excéder un plafond de 75 000 et 375 000 euros, ce qui correspond au montant des amendes pénales actuellement en vigueur en matière de délais de paiement réglementés, dans la mesure où le quintuplement du plafond encouru est automatiquement prévu par le code pénal pour les personnes morales et est bien inférieur aux amendes civiles de 2 millions d’euros que peut aujourd’hui prononcer le juge civil pour le non-respect du délai de droit commun. Les montants plafonds proposés par l’amendement paraissent donc très insuffisants.

Enfin, l’autorité administrative compétente prononcera les amendes au terme d’une procédure contradictoire qui permettra aux entreprises de présenter leurs observations sur les griefs qui leur sont reprochés. Selon les circonstances de chaque espèce, les amendes prononcées pourront évidemment être inférieures aux plafonds légaux, en particulier si les retards de paiement des entreprises débitrices résultent de difficultés de trésorerie liées au non-respect du délai de paiement par leurs propres clients.

Mme la rapporteure. Je souscris aux arguments de M. le ministre. Les amendements proposés sont contraires à la logique des dispositions de ce projet de loi visant à alourdir le montant des amendes administratives pouvant être prononcées afin de leur donner un caractère véritablement dissuasif. Ils pourraient donc être contre-productifs. Les montants prévus sont, je le souligne, des plafonds, ce qui laisse au juge toute latitude pour prononcer la sanction en fonction des circonstances.

La Commission rejette l’amendement CE251.

Puis elle rejette l’amendement CE252 de Mme Catherine Vautrin.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CE481 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Cet amendement propose la publication des amendes prononcées par l’autorité administrative chargée de la consommation et de la concurrence dans le seul cas de la violation des dispositions des articles relatifs aux délais de paiement – excluant donc, contrairement à un amendement précédemment examiné, la publication systématique de toutes les décisions de sanctions administratives de la DGCCRF, qui seraient trop nombreuses.

M. le ministre. Même limité aux sanctions administratives aux manquements à l’article L. 441-6 du code de commerce, le caractère systématique qui est ici envisagé justifie l’avis défavorable du Gouvernement.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle rejette l’amendement CE250 de Mme Catherine Vautrin.

Elle adopte l’article 61 modifié.

Article 62 (articles L. 441-7, L. 441-8 [nouveau] et L. 442-6 du code de commerce ;
articles L. 631-24 et L. 632-2-1 du code rural et de la pêche maritime) : Dispositions relatives aux négociations commerciales entre fournisseurs et distributeurs

La Commission est saisie de l’amendement CE483 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Cet amendement propose une rédaction nouvelle de l’alinéa 3 en vue de définir la nature et le rôle d’une convention unique. Cette convention doit tout d’abord être établie dans le respect des articles L. 441-6 et L. 442-6, c’est-à-dire sur la base des conditions générales de vente procurées par le fournisseur, et ne doit pas donner lieu à des pratiques abusives. Elle doit ensuite, en principe, être établie dans un document unique. Elle ne doit enfin se traduire pour aucune des deux parties par un déséquilibre significatif. Ce sont là autant d’éléments qui permettent de renforcer le cadre dans lequel s’établira la libre négociabilité, qui ne doit pas donner lieu à des abus, notamment de la part des distributeurs, comme c’est déjà le cas depuis assez longtemps.

M. le ministre. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement CE269 de Mme Catherine Vautrin.

Mme Catherine Vautrin. Je défendrai également mes amendements CE268, CE253 et CE254.

L’amendement CE269 supprime l’alinéa 4 qui, en rendant obligatoire sur la facture la dégradation du tarif négocié, ramène au système de « facturologie » qui prévalait avant la LME, laquelle favorisait plutôt le principe de négociation à l’avant.

L’amendement CE268 tend à supprimer les dispositions relatives aux nouveaux instruments promotionnels (NIP) insérées par le Sénat. Avec l’inscription d’un plafond dans la convention du contrat-cadre, ce montant risque d’être considéré comme un plancher.

L’amendement CE253 permet aux parties l’application des coûts et des conditions commerciales à une autre date que celle fixée par la convention de contrat en cas d’accord de branche.

Enfin, l’amendement CE254 vise à supprimer la mention de la date du 1er mars. Il suffit en effet que la loi mentionne le délai de trois mois, car, dans certains secteurs, les négociations commencent avant cette date. En outre, compte tenu du fait que seule une loi peut modifier une loi, la date du 1er mars pourrait être très difficile à modifier à l’avenir si elle figurait dans le texte. Du reste, cette mention relève plutôt du domaine réglementaire.

M. le ministre. L’amendement CE269 propose de revenir à la rédaction initiale, où figurait l’adjectif « correspondantes » et qui avait le défaut de laisser penser que l’objectif poursuivi était de réintroduire la notion de contrepartie, qui allait favoriser le développement des marges arrière. Afin d’éviter toute ambiguïté, le Gouvernement a donné un avis favorable à la suppression de cet adjectif par votre commission lors de l’examen du texte en première lecture. En revanche, il a paru nécessaire et conforme à l’esprit de la loi de préciser que les conditions de l’opération de vente fixées dans la convention unique comprenaient également les réductions de prix. Certains contrats sont en effet des coquilles vides, ne respectant pas l’obligation de transparence posée par la loi en contrepartie d’une plus grande liberté de négociation des prix – transparence que le projet de loi accroît pour des contrôles plus efficaces. C’est là une des priorités du Gouvernement en la matière. Avis défavorable.

Quant aux NIP, des dérives ont été observées dans l’utilisation de ces instruments. La suppression de l’obligation de mentionner dans la convention unique le montant maximal des NIP que le fournisseur accordera au consommateur par le mandat donné au distributeur semblait de nature à éviter ces dérives. Je suis donc défavorable aussi à l’amendement CE268.

Avis défavorable également à l’amendement CE253, qui laisse aux parties le libre choix de la date d’application du prix fixé à l’issue de la négociation commerciale. Le Gouvernement souhaite mettre fin à certaines pratiques abusives des distributeurs qui, profitant de l’imprécision actuelle du texte, font pression sur leurs fournisseurs et obtiennent ainsi des avantages financiers avec effet rétroactif et une application retardée du nouveau tarif. Le texte vient préciser que la date du 1er mars est non seulement une date-butoir pour signer la convention unique ou un contrat-cadre qui reprend entièrement le plan d’affaires, mais aussi la date-butoir de prise d’effet de l’ensemble des clauses nouvelles de cette convention annuelle. Maintenir la liberté contractuelle sur ce point rendrait inefficace le dispositif légal, compte tenu du déséquilibre structurel que vous connaissez entre partenaires commerciaux dans le cadre d’une telle négociation, outre le risque d’insécurité juridique pour la période allant de la date de signature du contrat à la date d’effet du prix convenu : sous quelles conditions, en effet, les commandes seraient-elles passées durant cette période ?

Pour ce qui est de l’amendement CE254, en vue de la conclusion d’un accord commercial en application de l’article L. 441-7 du code de commerce et pour permettre un temps suffisant à la négociation, les CGV doivent être envoyées au distributeur au plus tard trois mois avant la date-butoir du 1er mars. La rédaction que vous proposez prend pour référence pour ce délai la date de signature de la convention. Or, au moment de l’envoi des CGV, celles-ci ne sont, par définition, pas connues et il serait donc impossible de calculer le délai de trois mois. Avis défavorable.

Mme la rapporteure. Je défendrai tout à l’heure moi aussi un amendement de suppression des dispositions relatives aux NIP.

L’amendement CE269 va à l’encontre de l’intérêt des parties. Il permettrait en effet à l’acteur le plus fort d’imposer des réductions tarifaires ou de s’octroyer des avantages exorbitants sans avoir à les justifier. Par ailleurs, les indications figurant dans le texte permettront sans doute de faciliter les contrôles de la DGCCRF dans le cadre d’une éventuelle plainte. Avis défavorable.

Avis défavorable également à l’amendement CE253. Il n’est pas souhaitable de prendre le risque de permettre au distributeur d’imposer ses vues au fournisseur, au détriment de ce dernier. Il faut donc établir clairement la règle et mettre toutes les parties sur un pied d’égalité.

Quant à l’amendement CE254, après consultation des différents acteurs, nous ne souhaitons pas ouvrir le champ pour ce qui concerne la date de signature des conventions. La date du 1er mars fait consensus et il n’est pas question de la changer.

M. le ministre. Je tiens à rectifier une erreur que je viens de commettre à propos de l’amendement CE268. La rédaction actuelle est considérée par les parties prenantes comme peu souple et susceptible de renforcer le déséquilibre au profit des distributeurs, qui utiliseraient le plafond comme un plancher lors de la négociation suivante. L’avis du Gouvernement sur cet amendement est donc favorable.

La Commission rejette l’amendement CE269.

Elle examine ensuite l’amendement CE491 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Il s’agit d’un amendement de précision relatif au contenu de la convention unique. Dans le même ordre d’idées que les deux amendements précédents, les obligations destinées à favoriser la relation commerciale doivent voir leur prix indiqué dans la convention unique. En effet, il est aujourd’hui fréquent qu’aucune contrepartie n’accompagne la réduction de prix consentie par le fournisseur au profit du distributeur.

D’autre part, l’amendement prévoit que la rémunération de certains services effectués par le distributeur ne doit pas être disproportionnée.

Cet amendement, qui va incontestablement dans le sens d’un rééquilibrage des rapports de force entre fournisseur et distributeur, est une réelle avancée.

M. le ministre. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle est saisie des amendements identiques CE480 de la rapporteure, CE268 de Mme Catherine Vautrin et CE391 de Mme Jeanine Dubié.

Mme la rapporteure. M. le ministre a déjà exprimé un avis favorable à cet amendement tendant à la suppression des dispositions relatives aux NIP introduites par le Sénat. Les NIP n’ont pas leur place dans la convention unique. Elles figurent en principe dans un contrat de mandat et font l’objet de négociations séparées. Les NIP sont un instrument commercial aux mains du fournisseur : leur insertion dans la convention unique les placerait dans les mains du distributeur, ce qui ne ferait qu’accroître les déséquilibres que nous souhaitons réduire. Il faudra certes réfléchir à une manière de formaliser les NIP dans le code du commerce, mais, en tout état de cause, la rédaction actuelle ne convient pas.

Mme Catherine Vautrin. Nous partageons la même analyse. Il n’en reste pas moins que les NIP sont un moyen de détourner à la fois les conditions générales et les conditions particulières de vente. Il importe donc d’aborder la question dans sa globalité.

Mme Jeanine Dubié. Mon amendement CE391 est identique.

La Commission adopte les amendements à l’unanimité.

Elle est saisie de l’amendement CE392 rectifié de Mme Jeanine Dubié.

Mme Jeanine Dubié. La convention annuelle et la définition de son contenu avaient pour objectif de limiter les déséquilibres des relations commerciales. Cet amendement vise donc à rétablir la notion de contreparties effectives et proportionnées octroyées pour chacun des avantages et rémunérations consentis afin de permettre un contrôle effectif de l’évolution entre le tarif de départ et le prix de vente effectivement payé à l’arrivée.

M. le ministre. Avis défavorable. Bien que nous ayons tous en partage un objectif de loyauté, la voie que vous choisissez n’est pas la bonne, car elle aurait pour effet de remettre en cause la négociabilité des tarifs, ce qui est contraire à l’objectif recherché par le Gouvernement. Le texte antérieur prohibait la discrimination tarifaire non justifiée par des contreparties réelles et contribuait à la dérive des marges arrière.

Mme la rapporteure. La notion très importante qui est au centre de cet amendement a déjà été prise en compte dans l’amendement précédent. Je demande donc le retrait de l’amendement CE392 rectifié, à défaut de quoi j’émettrai un avis défavorable.

L’amendement est retiré.

La Commission rejette successivement les amendements CE253 et CE254 de Mme Catherine Vautrin.

Puis elle examine l’amendement CE 477 de M. François Brottes.

M. le président François Brottes. Il arrive que, lorsqu’un accord a été signé entre un fournisseur et un distributeur, l’une des parties remette en cause une disposition de cet accord et que l’autre partie n’obtienne jamais de réponse lorsqu’elle veut connaître les raisons de ce revirement. L’amendement vise donc à instaurer une obligation de répondre et, à défaut de réponse, la possibilité de signaler la situation à la DGCCRF.

M. le ministre. Je m’interroge sur l’effectivité de cette solution et je crains que les fournisseurs n’osent pas prendre la plume. Ils ont du reste déjà la possibilité de saisir la DGCCRF. Avis favorable cependant.

Mme la rapporteure. Avis favorable.

Mme Catherine Vautrin. Quel type de relation commerciale visez-vous ?

M. le président François Brottes. Lorsque, dans la grande distribution, un accord a été conclu sur un volume de produit et sur un prix, et que le directeur d’un magasin ne veut plus du produit, le fournisseur veut comprendre les raisons de ce changement et, souvent, il ne lui est apporté aucune réponse. Il faut donc qu’il puisse obtenir une réponse écrite et, si cette réponse ne vient pas, qu’il puisse signaler à la DGCCRF les difficultés auxquelles se heurte l’exécution du contrat.

La Commission adopte l’amendement.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, la Commission rejette successivement les amendements CE255 et CE256 de Mme Catherine Vautrin.

Puis elle examine l’amendement CE482 de la rapporteure.

Mme la rapporteure. Cet amendement propose de préciser l’article L. 441-8 sur deux points. D’une part, la renégociation du prix doit se faire dans le respect du secret des affaires et des secrets de fabrication. En effet, la renégociation peut conduire à détailler certaines stratégies commerciales ou certains procédés de fabrication qui ont un impact direct sur les prix, et il convient donc que cela ne porte pas atteinte au secret des affaires.

Il s’agit d’autre part d’en tirer les conséquences au niveau des sanctions pouvant être appliquées en cas de manquement au secret.

M. le ministre. Avis favorable.

Mme Catherine Vautrin. Quelle définition entend-on donner à la notion de « secrets de fabrication » ?

Mme la rapporteure. Dans l’industrie agroalimentaire, cela peut être des recettes.

Mme Catherine Vautrin. Tout le problème est dans l’étendue de la définition : jusqu’où doit-on aller ? Pour que l’amendement ait une portée normative, cette notion doit être clairement définie. Sans doute pourrions-nous avoir des précisions en séance.

M. le président François Brottes. J’aurais tendance à émettre l’hypothèse que tout ce qui n’est pas déposé à l’Institut national de la propriété industrielle ne relève pas du secret de fabrication.

Mme Catherine Vautrin. Ce n’est pas si simple.

M. le ministre. Mme Vautrin pose une question intelligente, qui rejoint le débat sur les indications géographiques et l’identification de savoir-faire spécifiques à un territoire ou à une entreprise.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CE290 de Mme Brigitte Allain.

Mme Brigitte Allain. Il s’agit de revenir à la formulation que nous avions adoptée en première lecture, en précisant que la renégociation « tient compte notamment de l’impact de ces fluctuations sur l’ensemble des acteurs de la chaîne d’approvisionnement ». Cela va dans le sens d’une répartition équitable des marges entre les acteurs, afin que les maillons faibles de la chaîne soient protégés.

M. le ministre. Avis favorable.

Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements CE257, CE259 et CE258 de Mme Catherine Vautrin.

Mme Catherine Vautrin. L’amendement CE257 demande la suppression du compte rendu des négociations commerciales. Nous avions, en première lecture, argué du fait que, dans bon nombre de PME, rédiger un compte rendu de négociation commerciale crée une charge administrative pour l’entreprise, qui n’a pas forcément les moyens de s’offrir les services d’un juriste.

L’amendement CE258 est un amendement de repli qui propose la suppression de l’obligation de compte rendu pour les PME et les TPE.

À défaut de le supprimer, au moins pourrait-on envisager l’élaboration d’un formulaire type. C’est ce que propose l’amendement CE259.

M. le ministre. Nous sommes attachés à ce compte rendu, qui, le cas échéant, permettra aux petites entreprises de faire valoir leurs droits, notamment à l’endroit de l’administration de contrôle. Je suis donc défavorable à l’amendement CE257, ainsi qu’à l’amendement de repli.

Nous laissons aux deux parties la liberté de décider de la forme que prendra le compte rendu, mais, dès lors que les blocs de négociation qui doivent être renseignés sont prévus par décret, il me semble que votre demande concernant un formulaire type est partiellement satisfaite. Je suis donc également défavorable à l’amendement CE259.

Mme la rapporteure. Je partage l’avis du ministre. Certes, le compte rendu constitue une obligation supplémentaire, qui sera définie par décret, mais nous pensons qu’il est utile, car il permettra aux acteurs extérieurs de constater la manière dont les discussions se sont déroulées, et, le cas échéant, il pourra être utilisé devant un juge.

Le compte rendu est d’autre part surtout indispensable aux TPE, qui sont les plus fragiles et davantage à la merci des distributeurs ou des grands groupes.

Enfin, dans la mesure où un décret doit déterminer les principes du compte rendu, à charge pour les différentes parties de les mettre en œuvre à leur guise, la rédaction d’un formulaire type ne nous paraît pas nécessaire.

Mme Catherine Vautrin. Peut-être le ministre pourra-t-il nous fournir en séance publique quelques-uns des éléments qui figureront dans le décret.

La Commission rejette successivement les amendements CE257, CE259 et CE258.

Elle examine ensuite l’amendement CE270 de Mme Catherine Vautrin.

Mme Catherine Vautrin. Cet amendement porte sur le secteur du textile, dans lequel la nature des relations commerciales varie en fonction des activités. Il connaît une très forte saisonnalité, et il n’est pas toujours facile d’y travailler sur une base annuelle, pour ce qui concerne notamment la négociation des CGV. Selon que l’on parle de grands magasins, de maisons de couture ou de créateurs de renommée internationale, les pratiques et les modes de distribution sont très différents. Il serait donc souhaitable, eu égard aux spécificités du secteur et afin de renforcer la filière, d’envisager la signature d’accords de branche entre les grands magasins et leurs fournisseurs.

M. le ministre. J’admets que le secteur du textile et de la mode induit des enjeux spécifiques, notamment en matière de saisonnalité. Cependant, des chartes ou des codes de bonne conduite devraient permettre de fixer les conditions d’écoulement des produits en cours et en fin de saison, sans remettre en cause la liberté contractuelle de ces professionnels. Il ne nous semble donc pas opportun de prévoir dans le code de commerce la conclusion d’accords collectifs. Avis défavorable.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, la Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements CE484 de la rapporteure et CE260 de Mme Catherine Vautrin.

Mme la rapporteure. L’amendement CE484 vise à lutter contre les garanties de marge souvent demandées par les distributeurs aux fournisseurs et qui remplacent les anciennes marges arrière que la loi de modernisation de l’économie avait éliminées.

Mme Catherine Vautrin. L’amendement CE260 concerne les activités industrielles où les références sont nombreuses, ce qui peut entraîner des erreurs matérielles. Nous proposons donc d’ajouter dans l’article la notion d’intentionnalité, afin que la sanction ne s’applique que lorsqu’il y a eu volonté délibérée d’enfreindre l’accord conclu.

M. le ministre. Avis favorable à l’amendement CE284 et défavorable à l’amendement CE260. En effet, quand le ministre met en œuvre l’action qui vise à sanctionner civilement les pratiques abusives, au sens de l’article L. 442-6 du code de commerce, il le fait en tant que gardien de l’ordre public économique, en exerçant son pouvoir d’assignation. Une simple erreur matérielle dûment régularisée n’occasionnant pas de trouble à l’ordre public économique, elle n’entraînerait pas le déclenchement d’une telle procédure.

La Commission adopte l’amendement CE484.

En conséquence, l’amendement CE260 tombe.

La Commission adopte l’article 62 modifié.

——fpfp——

Membres présents ou excusés

Commission des affaires économiques

Réunion du mercredi 20 novembre 2013 à 17 heures

Présents. - M. Damien Abad, Mme Brigitte Allain, M. Frédéric Barbier, Mme Marie-Noëlle Battistel, M. Yves Blein, Mme Michèle Bonneton, M. François Brottes, M. Dino Cinieri, Mme Jeanine Dubié, Mme Corinne Erhel, Mme Marie-Hélène Fabre, M. Daniel Fasquelle, Mme Pascale Got, M. Jean Grellier, M. Razzy Hammadi, Mme Laure de La Raudière, M. Jean-Luc Laurent, Mme Annick Le Loch, Mme Marie-Lou Marcel, Mme Frédérique Massat, M. Hervé Pellois, M. Dominique Potier, M. Frédéric Roig, M. Lionel Tardy, Mme Catherine Troallic, Mme Clotilde Valter, Mme Catherine Vautrin

Excusés. - M. Jean-Claude Bouchet, M. Henri Jibrayel, M. Kléber Mesquida, M. Germinal Peiro, M. Bernard Reynès

Assistaient également à la réunion. - M. Jean-Louis Bricout, Mme Fanélie Carrey-Conte