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Commission des affaires économiques

Mercredi 21 mai 2014

Séance de 9 heures 30

Compte rendu n° 82

Présidence de M. François Brottes Président

– Audition, ouverte à la presse, de M. Carlos Tavares, président du directoire de PSA Peugeot Citroën

La commission a auditionné M. Carlos Tavares, président du directoire de PSA Peugeot Citroën.

M. le président François Brottes. Je vous remercie, monsieur Tavares, d’avoir accepté notre invitation et d’avoir réservé à notre commission votre première sortie publique depuis votre nomination à la présidence du directoire de PSA. Nous avions déjà eu l’occasion de vous entendre mais vous exerciez alors vos responsabilités pour une autre marque.

Nous vous auditionnons aujourd’hui dans un contexte nouveau pour PSA, avec un nouveau président du directoire, un nouveau président du conseil de surveillance en la personne de Louis Gallois, un nouvel actionnariat composé pour un tiers d’investisseurs chinois, pour un tiers de la famille Peugeot et pour un tiers de l’État français qui est entré au capital du groupe après lui avoir apporté une garantie de sept milliards d’euros, un nouveau conseil d’administration, dont la composition a évolué en conséquence de ces changements.

Vous avez le projet de « rebooster » les marques du groupe. La Chine représente, nous dit-on, une grande partie du marché de l’avenir puisqu’on y vend en moyenne autant de voitures en un mois qu’on en vend en France en un an.

Réorganisation de la gouvernance et de l’actionnariat, augmentation du capital, interrogations qui demeurent sur l’avenir du site, emblématique, d’Aulnay, controverse sur les émissions de particules fines par les moteurs diesel qui ne manque pas d’interroger sur l’avenir de la filière, notamment après la décision qui vient d’être annoncée à Paris mais dont on parle sans être toujours juste vis-à-vis des nouveaux moteurs diesel : autant de sujets dont nous souhaitons débattre avec vous. Nous aurons aussi à aborder le sujet de la voiture électrique – vous en avez connu les débuts lorsque vous exerciez d’autres fonctions chez un autre constructeur, je connais vos convictions en ce domaine ; or, Peugeot a plutôt choisi l’hybride que le tout électrique. Dans cette commission, nous croyons à la voiture électrique, nous y avons récemment adopté une proposition de loi visant à favoriser le déploiement d’un réseau de bornes de recharge, de façon que les automobilistes n’aient pas à craindre de tomber en panne de batterie au milieu d’un trajet. Vous nous direz aussi comment vous pensez réaliser à la fois les investissements d’innovation et d’industrialisation nécessaires car PSA semble aujourd’hui un peu en-dessous de ses concurrents. Vous nous direz quel nouvel élan, quelle nouvelle stratégie vous comptez donner au groupe. Nous vous savons homme à n’avoir pas sa langue dans sa poche, je suis donc certain que nous ne serons pas déçus à vous entendre. Sans plus attendre, je vous laisse la parole.

M. Carlos Tavares, président du directoire de PSA Peugeot Citroën. Mesdames et messieurs les députés, je vous remercie, en particulier vous-même, monsieur le président, de l’opportunité qui m’est donnée de m’adresser à la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale. C’est pour moi un honneur et pour notre entreprise un rendez-vous d’une grande importance. Nous pensons en effet que ce dialogue est indispensable pour bien comprendre la stratégie de l’entreprise.

Comme vous le savez, PSA se trouve dans une phase de redressement économique dont nous avons tous intérêt qu’il soit couronné de succès.

J’articulerai mon exposé autour de trois points. Tout d’abord, le redressement du groupe, déjà engagé même s’il reste un long chemin à parcourir. Ensuite, son avenir, qui passe par sa capacité à devenir un acteur mondial de l’automobile. Enfin, notre volonté de conforter son ancrage industriel en France, élément clé de notre stratégie, mais pour être crédible et pérenne, cet ancrage passe par l’amélioration de notre compétitivité.

Le redressement économique de l’entreprise est bien engagé. Nous avons connu avec mon prédécesseur, Philippe Varin, un « passage de témoin lancé » qui s’est effectué dans de très bonnes conditions, avec un grand professionnalisme, sans aucune perte d’efficience dans le pilotage des opérations.

Ce redressement était indispensable après l’effondrement du marché automobile européen qui a perdu un quart de ses volumes entre 2007 et 2012, en particulier en Europe du Sud, où la présence de notre groupe étant historiquement très forte, nous avons été atteints plus que d’autres. Les conséquences de cette crise ont été très lourdes pour le groupe vu que nous produisons essentiellement en France et en Europe.

Pour ce qui est de l’ensemble des engagements pris, PSA a tenu parole, j’ai tenu à le vérifier personnellement. Sur les huit mille postes concernés par les plans de redéploiement des emplois et des compétences (PREC) et les plans de sauvegarde de l’emploi (PSE), au 31 décembre 2013, 7 300 contrats avaient pu être signés. Les engagements ont donc été tenus et ce qui reste à faire sera fait, je tenais à vous en assurer.

Grâce à ces efforts, PSA est en train de redresser ses fondamentaux. Tout d’abord, le groupe réduit ses coûts fixes, qui étaient l’un de ses problèmes structurels. Cela doit lui permettre de limiter très fortement et d’annuler au plus tôt sa consommation de trésorerie. En effet, l’endettement que cela entraîne asphyxie à terme nos dépenses de recherche-développement et grève notre compétitivité, l’accès au financement devenant hors de prix.

Une autre clé du redressement du groupe réside dans son internationalisation. Nous devons être capables de vendre de manière rentable des véhicules hors d’Europe occidentale. Nous devons diversifier nos marchés pour nous protéger des crises régionales, où qu’elles se produisent. En 2013, notre taux de ventes à l’international a atteint 42 % contre 38 % en 2012. Nous nous sommes fixé l’objectif qu’il soit au moins de 50 % en 2015.

Je tiens à souligner le rôle de l’État, que nous mesurons à sa juste valeur et qui nous tient à cœur, sur ce chemin du redressement économique. L’État est intervenu à plusieurs reprises, notamment en accordant une garantie qui a permis à notre banque de se financer à un coût raisonnable et ainsi de soutenir les ventes de l’entreprise. Cette intervention a été vitale à un moment critique. La présence de l’État au capital de l’entreprise, où il agira en investisseur avisé, est également déterminante pour la suite.

Pour autant, cette réduction des coûts fixes, cette internationalisation et ce soutien de l’État ne suffiront pas. Il nous faut aussi abaisser nos coûts variables, encore trop élevés. Nos stocks et notre besoin en fonds de roulement sont également trop importants. Il nous faut apprendre à fonctionner de manière plus frugale au sein de l’entreprise, à mieux maîtriser nos stocks, à consommer moins de trésorerie. Sur tous ces points, j’en suis convaincu, de multiples progrès sont possibles. Il nous faut aussi progresser dans la promotion de nos marques. En effet, alors que nos produits ont un très haut niveau technologique et un très haut niveau de qualité, nous sommes confrontés à un problème d’image et ne bénéficions pas encore de la même valorisation de nos marques que certains de nos concurrents, allemands notamment. Ce n’est pas cohérent. Je ne puis que vous inviter tous à en faire avec nous la promotion de façon à rattraper ce déficit d’image. Cela pénalise en effet lourdement les recettes nettes unitaires issues de la vente de chaque véhicule et l’ensemble du résultat économique de l’entreprise, et donc notre capacité à investir.

Tous ces efforts sont décrits dans le plan stratégique que nous avons dénommé Back in the race retour dans la course. Ce nom lui-même illustre notre détermination non seulement à redresser l’entreprise mais à la transformer en un acteur automobile mondial compétitif. Nous ne nous contenterons pas de rattraper le peloton, nous avons bien l’intention de doubler également quelques concurrents. PSA est de retour dans la course !

Quand ce redressement sera-t-il terminé ?, me demande-t-on souvent. Nos collaborateurs sont usés par la durée de cette crise, de cette période difficile, et on peut les comprendre. Par respect à leur égard tant d’ailleurs qu’à l’égard de nos interlocuteurs, il faut dire clairement les conditions qui, une fois remplies, autoriseraient à fêter la fin du redressement. La première est de revenir à un free cash flow positif trois années de suite, dont le total se monterait à deux milliards d’euros au moins sur la période 2016-2018. Bien entendu, si nous avons la possibilité d’y parvenir avant, nous le ferons.

La deuxième condition est que la division automobile atteigne une marge opérationnelle positive de 2 % en 2018, l’objectif étant de la porter à 5 % sur la période 2019-2023.

Une fois ces deux conditions remplies, nous pourrons considérer le redressement économique terminé. Celui-ci a été engagé par les décisions prises par l’équipe aux commandes depuis plusieurs années. L’essentiel, si ce n’est la totalité, de ces décisions étaient pertinentes. Il nous reste à les mettre en œuvre. Nous nous y attachons avec la détermination et la rigueur qu’exige la gravité de la situation.

J’en viens à l’avenir du groupe. Celui-ci doit devenir un constructeur automobile mondial. Si nous sommes capables de réaliser du profit sur plusieurs marchés mondiaux, cela signifie que nous avons bien compris les attentes des clients et que notre technologie ainsi que notre créativité permettent d’y répondre, nous permettant de vendre des véhicules à un prix rémunérateur. Cette diversification de nos ventes rentables nous protégera statistiquement des crises régionales.

Nous devons également mieux rentabiliser nos investissements de R&D, CAPEX (capital expenditure) ou non, par des volumes de ventes aussi importants que possible sur plusieurs marchés mondiaux.

Le marché mondial de l’automobile n’est pas du tout déprimé. D’ici à 2020, il devrait croître de 40 %. Nous sommes aujourd’hui fortement centrés sur l’Europe mais nous sommes aussi présents sur d’autres marchés qui ont un très fort potentiel de croissance, notamment les marchés asiatiques qui représenteront 60 % de cette croissance d’ici à 2020. Pour prendre sa part de cette croissance mondiale, il est fondamental que nous devenions un acteur significatif en Chine et, plus largement, dans l’ensemble du continent asiatique.

Il nous faut également changer de paradigme. Alors que jusqu’à présent, notre culture d’entreprise a été celle d’un constructeur européen vendant ses produits hors d’Europe s’il en a l’opportunité mais pour qui cela reste marginal, nous souhaitons devenir un constructeur mondial. Nous souhaitons rester un acteur majeur en Europe, où nous sommes le deuxième constructeur – certes loin derrière le premier. Nous souhaitons a minima conserver cette position et l’améliorer si cela est rémunérateur. Mais nous devons dans le même temps utiliser toutes nos compétences et notre créativité pour devenir un acteur mondial à part entière, capable de répondre aux attentes aussi bien des clients brésiliens que des clients chinois ou d’autres pays d’Asie.

L’un de nos atouts majeurs est que nous disposerons maintenant d’un portefeuille fort de trois marques : Peugeot, Citroën, et DS, qui va devenir une marque Premium à part entière. Nous avons en effet observé chez nos concurrents que les marques Premium étaient les plus rémunératrices et que ce sont leurs profits qui permettent de financer les nouvelles technologies et les nouveaux modèles.

DS, marque Premium du groupe, aura pour vocation de symboliser la french touch, le french glamour, le french way of life, tous éléments fortement valorisés à l’étranger. Pour avoir vécu plusieurs années en Asie, je puis vous dire que ce mode de vie et cette modernité y sont très valorisés par les clients, surtout ceux des gammes Premium. Seul un constructeur français peut saisir cette opportunité qui, par nature, n’est pas accessible à nos concurrents allemands ou américains. Peugeot entend bien la saisir. Nous étions déjà bien engagés avec DS dans cette voie. J’ai souhaité accélérer le pas en donnant à la marque une autonomie et un positionnement propres.

Nous voulons utiliser les trois marques de manière plus complémentaire, de façon qu’aucune ne cannibalise les autres, comme il a pu arriver par le passé, à notre détriment. Nous avons clarifié le positionnement de chacune d’entre elles. Peugeot symbolisera la rigueur technologique, avec à la fois une élégance et une certaine dose d’émotion latines
– tout cela est déjà perceptible sur la Peugeot 308, élue meilleure voiture de l’année en 2014. Citroën, qui est, pour les raisons historiques et technologiques que vous savez, pleinement légitime sur le territoire du confort, symbolisera aussi l’innovation utile au quotidien et l’innovation conceptuelle. À la lumière de ce qui est advenu par le passé avec les monospaces ou les crossover (véhicules multi-segments), c’est de Citroën que nous pouvons attendre les plus grandes innovations conceptuelles car c’est elle qui a le champ créatif le plus large. Je ne reviens pas sur le positionnement de DS.

La maîtrise technologique de PSA est largement reconnue. Elle a d’ailleurs été fortement valorisée par notre nouvel actionnaire, Dongfeng. Parmi toutes ces technologies, il faut accorder une importance particulière à toutes celles liées à la qualité de l’air, non seulement pour ce qui est des émissions du véhicule mais aussi de la capacité à assainir l’air à l’intérieur des habitacles, élément particulièrement valorisé sur les marchés asiatiques.

Dans le cadre du plan Back in the race, nous avons décidé de bâtir un plan-produit mondial, mieux ciblé et plus concentré, afin de répondre aux attentes sur divers marchés mondiaux et de mieux rentabiliser nos investissements.

Aujourd’hui, le marché automobile comporte environ vingt segments : nous allons progressivement d’ici à 2022 nous concentrer sur 26 modèles – contre 45 aujourd’hui – que nous allons concevoir, développer, valider, et dont nous allons industrialiser la fabrication pour l’ensemble des marchés mondiaux. C’est amplement suffisant pour couvrir tous les segments des marchés sur lesquels nous souhaitons jouer un rôle. Ce sera un pas très important dans l’amélioration de l’efficience de l’entreprise.

Dans cet objectif, nous allons également améliorer la gestion de nos plates-formes, qui représentent de très gros investissements, et en ramener le nombre de sept à deux, dont une aura une variante quatre roues motrices pour donner toute crédibilité à notre offre de SUV et de crossover.

Nous profiterons de cette évolution de notre plan-produit mondial pour repositionner nos produits sur des segments et des marchés plus rémunérateurs.

Enfin, pour que le groupe soit mieux à même de saisir les opportunités, nous sommes en train de mettre en place une organisation régionale. Nous avons découpé le globe en six grandes régions et, pour chacune d’entre elles, nous allons nommer au niveau du comité exécutif du groupe un responsable, dont l’objectif sera d’aller y chercher du business et d’y générer de la croissance rentable tout en faisant bien sûr remonter au sein de l’entreprise les besoins qui sont les siens pour ce faire. Cette organisation sera annoncée dans les prochaines semaines.

Pour l’instant, notre groupe repose sur deux piliers, un pilier européen et un pilier asiatique qui continuent tous deux de progresser. Nous devons nous interroger sur nos activités sur les marchés russe et d’Amérique latine, où nous perdons de l’argent. Plusieurs décisions prises en ce début d’année, malgré un contexte externe défavorable, sont toutefois en train de porter leurs fruits, et nous sommes en train d’y réduire nos pertes, certes jamais assez vite, mais nous avançons dans la bonne direction.

J’en viens à mon troisième point : la clé d’un ancrage solide de PSA et de sa pérennité, c’est sa compétitivité.

Je vous le dis solennellement et m’en porte garant, PSA tiendra les engagements qu’il a pris et respectera l’intégralité du contrat social qui a été signé en octobre 2013 pour la période 2013-2016. Je soutiens pleinement le contenu de ce bon accord, dont je ne soulignerai que deux dispositions. Sur la période, les investissements en France se monteront à 1,5 milliard d’euros, traduction concrète de l’effort de modernisation de nos sites industriels et des annonces déjà faites ou que nous allons faire des nouveaux véhicules qui y seront affectés, et 75 % de la R&D du groupe resteront en France.

Cet accord prévoit également le traitement des sureffectifs du groupe. Nous sommes en train de le mettre en œuvre. Les choses avancent comme prévu et les objectifs fixés sont maintenant en ligne de mire. Notre dialogue avec les partenaires sociaux est particulièrement responsable.

Ce contrat social doit nous permettre de résoudre certains problèmes structurels du groupe, ce qui nous fera mieux rebondir dès le redressement achevé.

Nous avons également décidé, et c’est un point particulièrement important, de moderniser notre appareil industriel. C’est une réalité de l’industrie automobile qu’en moyenne 80 % des véhicules vendus dans une région du monde y sont fabriqués, pour des raisons liées à la sensibilité aux taux de change, au coût du transport des véhicules assemblés et à l’existence de barrières douanières. Il nous faut être aussi performants en France que nos voisins allemands, britanniques ou espagnols. L’objectif est crédible et raisonnable : il n’y a aucune raison que nous ne puissions pas atteindre leur niveau de performance. L’exercice que nous demandons à nos collaborateurs ne doit pas être insoluble : pour gagner, il faut qu’ils puissent s’appuyer sur de nouveaux véhicules, conçus dans l’idée de faciliter une industrialisation efficace mais aussi que l’appareil industriel ait été modernisé afin qu’ils n’aient pas à se battre avec une main attachée dans le dos. Dans le montant des investissements que nous comptons faire, une part sera dédiée à de nouveaux véhicules et une autre à l’efficience industrielle de nos usines.

Pour avoir depuis ma nomination passé beaucoup de temps à visiter nos usines, notamment en France, je puis vous assurer qu’il est vraiment possible d’améliorer notre efficacité. Si nous conduisons correctement cette modernisation, nous pourrons être compétitifs sur le marché européen.

Notre référentiel interne « Usine excellente » trace aux usines la voie à suivre pour devenir une « usine excellente », dans le contexte européen notamment. Bien que les volumes soient toujours difficiles à prévoir, nous pensons néanmoins qu’à l’horizon 2020-2022, le taux d’utilisation de nos usines sera de 115 % par rapport à une référence de fonctionnement en deux équipes. Ce taux n’est pas le plus élevé au monde mais il est raisonnable. Nous avons par ailleurs défini les coûts fixes et les stocks que nous devons réduire afin d’abaisser le point mort de marge opérationnelle de l’entreprise, élément économique-clé pour mesurer la vitesse de notre redressement.

Pour autant, ce travail sur nos usines et nos produits ne suffira pas. Il faut que la filière automobile tout entière puisse progresser de façon homogène. Il faut garder présent à l’esprit que 75 % du prix de revient de nos automobiles tient à des pièces et systèmes que nous achetons à des fournisseurs. Il est donc important que nous aidions ceux-ci, notamment ceux qui sont en difficulté, à accélérer le pas de progrès pour qu’il y ait homogénéité de performance dans l’industrie automobile française. PSA, qui est l’un des membres créateurs de la Plateforme automobile, apporte sa contribution. Les deux mouvements, le nôtre et celui de nos partenaires en France, sont indissociables. Il nous appartient de les aider à résoudre les problèmes qu’ils pourraient rencontrer et qui sont en définitive très similaires aux nôtres : frais fixes, compétitivité des coûts, rigueur de gestion, développement des nouvelles technologies…

Je tiens ici à souligner le rôle des pouvoirs publics qui accompagnent certaines mutations. Nous sommes ainsi fortement engagés dans un programme de conception de véhicules 2 l/100 km qui avance à un bon rythme.

Enfin, le mot peut paraître tabou mais il ne faut pas en avoir peur, nous devons développer au sein de notre entreprise une véritable culture du profit. En effet, c’est le profit qui nous permettra de continuer à investir dans de nouvelles technologies, de nouveaux produits, de nouveaux véhicules et d’attaquer de nouveaux marchés rentables. Au cours des trois dernières années, c’est l’absence de profit qui a placé l’entreprise dans une situation critique, heureusement traitée au travers des décisions que vous connaissez. La culture du profit est in fine ce qui protègera le mieux l’entreprise et le groupe d’individus qui la compose. Seule la performance permet de créer de la valeur et la mesure de la création de valeur, c’est le profit qui permet ensuite à une entreprise d’investir pour l’avenir. C’est encore plus vrai dans l’industrie automobile, hyper-compétitive et extrêmement ouverte.

En conclusion, je considère que PSA a toutes les cartes en mains pour conduire son redressement. Pour que celui-ci soit durable, il faudra être extrêmement vigilant sur les fondamentaux : frais fixes, prix de vente de nos véhicules, valorisation de nos marques, rigueur, qualité et durabilité de nos véhicules… Nous avons la détermination. Nous pouvons nous appuyer au sein de l’entreprise sur des talents individuels exceptionnels et compter sur l’engagement de tous nos salariés qui, dans cette période économique très difficile, ont compris que le redressement économique était la meilleure façon de se protéger.

Notre pacte social, qui a fait l’objet de larges discussions, a été bien accepté. Nous le mettons en œuvre de la manière la plus rigoureuse et la plus respectueuse possible.

Notre excellence technologique est largement reconnue : pour la septième année consécutive, PSA est le premier déposant de brevets en France, preuve de notre dynamisme en matière de R&D et de notre capacité créatrice. La reconnaissance par nos pairs, experts de l’industrie automobile, fait elle aussi peu à peu son chemin, comme en témoigne l’élection de la 308 comme meilleure voiture de l’année 2014.

L’augmentation de capital de trois milliards d’euros dont nous avons pu bénéficier nous permet de continuer à investir sur le moyen terme. Nous pouvons ainsi conduire le redressement économique sans nous mettre en situation délicate pour ce qui est de nos investissements, destinés à assurer notre performance et notre compétitivité. Cette augmentation de capital, qu’il faut saluer, était une étape nécessaire. Mais sans le redressement économique visant à restaurer notre rentabilité, cet argent viendrait à s’épuiser et nous nous retrouverions devant les mêmes problèmes qu’il y a quelque temps. Nous sommes engagés sur la bonne voie mais il nous reste encore beaucoup de défis à relever.

Je voudrais ici vous dire quelques mots du rôle des pouvoirs publics qui, il faut le reconnaître, accordent à l’industrie automobile l’attention qu’elle mérite. Il est important que dans notre pays nous cultivions l’amour de l’automobile, ce fantastique outil de liberté et de mouvement, et que nous soyons fiers des véhicules que nous concevons et que, pour certains, nous continuons de fabriquer en France : cela participe du soutien à l’industrie automobile, dans laquelle nous possédons une grande compétence.

Il faut également tout faire pour que le marché automobile français conserve son dynamisme : en effet, cela se vérifie dans la plupart des cas, un constructeur a une bonne rentabilité sur son marché national. C’est le cas pour nous, c’est le cas pour nos concurrents français, c’est le cas pour nos concurrents étrangers dans leur propre pays.

Nos contemporains ont une attente de mobilité, à laquelle nous devons répondre de façon intelligente, en harmonie avec notre société. Je suis certain que vos questions nous aideront à définir ces solutions.

L’Allemagne a su créer un environnement favorable au fait automobile. L’industrie automobile est l’un de ses fleurons industriels qu’elle a su développer dans le respect des enjeux écologiques et urbains. On a aussi veillé outre-Rhin à ne pas faire de l’automobile un objet de fiscalité. En effet, à partir d’un certain niveau, celle-ci peut menacer la liberté d’aller et venir et nuire à l’industrie automobile.

La mobilité, c’est aussi un enjeu social. L’absence de solution de mobilité est un facteur d’exclusion sociale, freinant par exemple le retour à l’activité de certains de nos concitoyens. PSA s’investit dans ce domaine au travers de sa fondation, de même qu’il cherche à apporter une réponse à l’enclavement géographique.

Nous devons partager ensemble une culture de la compétitivité. Nous devons comprendre que seule notre performance, déterminant de notre compétitivité, protège de façon durable les emplois de l’industrie automobile. La meilleure mesure de la création de valeur dans notre entreprise sera la récurrence de ses profits à l’avenir pour continuer d’investir.

Je suis maintenant prêt à répondre à vos questions.

M. le président François Brottes. Je vous remercie de cet exposé très précis sur la nouvelle stratégie du groupe.

Chers collègues, vingt-cinq d’entre vous ayant demandé à s’exprimer, pour que nous demeurions dans le temps imparti pour cette audition, je vous demande de bien vouloir limiter votre temps de parole à une minute, les représentants des groupes, qui s’exprimeront en premier, disposant, eux, de deux minutes.

M. Daniel Goldberg. Le nouveau départ que vous proposez, monsieur Tavares, pour PSA est tout à fait intéressant.

Comment la différenciation entre les trois marques, Peugeot, Citroën et DS, sur laquelle vous avez insisté, pourra-t-elle aller de pair avec le resserrement de l’offre, le nombre de modèles étant ramené de 45 à 26 et celui des plates-formes de sept à deux ?

Quelles sont, selon vous, les perspectives pour le marché automobile européen ? L’industrie allemande, pas seulement automobile d’ailleurs, a développé un écosystème avec les pays d’Europe de l’Est sans qu’il y ait nécessairement délocalisation de l’ensemble de la chaîne de production. Quelles sont pour PSA les perspectives de « co-localisation » avec certains pays d’Afrique ou du Maghreb ?

Pour avoir eu la chance d’accompagner Jean-Marc Ayrault, alors Premier ministre, lors de son déplacement en Chine en décembre dernier, et visité avec lui l’usine de Wuhan, que PSA co-exploitait déjà avec Dongfeng avant même l’accord passé avec ce dernier, j’ai pu mesurer l’attractivité de PSA et l’engouement que le groupe suscite. Mais Dongfeng, maintenant entré au capital de PSA, est aussi engagé en Chine avec d’autres constructeurs. Qu’en pensez-vous ?

Vous avez surtout insisté sur l’Asie. Quelles sont les perspectives de développement de PSA au Brésil ? Pourriez-vous aussi dire un mot du retrait de Citroën d’Iran en raison du contexte international ?

Permettez-moi enfin de terminer en évoquant le site d’Aulnay, qui se trouve dans ma circonscription. PSA a une dette vis-à-vis des hommes et des femmes de ce territoire, vis-à-vis de ce territoire lui-même où, pendant quarante ans, Citroën puis PSA ont produit des automobiles. Les annonces de 2012 ont provoqué un véritable traumatisme. Je me félicite d’ailleurs de la qualité du dialogue qui, après 2012 n’a rien eu à voir avec ce qu’il était auparavant. Pouvez-vous nous faire un point précis sur le reclassement des 3 000 salariés d’alors et sur le devenir du terrain ? Quel avenir pour ce site exceptionnel de 180 hectares, situé aux portes de Paris, emblématique du Grand Paris ? Pourriez-vous nous donner des précisions sur la mission confiée à Jean-Paul Bailly ? Quel en est le calendrier ? Quand sont attendus ses résultats ? Nous étions d’accord sur le mot d’ordre : « ni spoliation ni spéculation ». Aujourd’hui, écartez-vous, comme j’ai cru l’entendre ces derniers jours, tout portage foncier public à venir de ce terrain en vue d’un redéveloppement industriel que, pour ma part, je souhaite et pour lequel mon exigence sera la même, qu’il soit conduit par l’État ou par votre entreprise ?

M. Daniel Fasquelle. Votre présentation, monsieur Tavares, nous a rassurés. Nous sentons que le groupe PSA est bien pris en mains. Fort de votre feuille de route, vous allez mobiliser les salariés et tous vos collaborateurs pour atteindre les objectifs fixés.

J’ai toutefois quelques questions à vous poser sur le plan stratégique du groupe. La première concerne l’avenir du diesel. On associe encore beaucoup Peugeot, voire Citroën, au diesel. Or, comme en témoignent encore les récentes annonces d’Anne Hidalgo à Paris, le diesel est diabolisé. Ces annonces étaient-elles opportunes ? Le diesel est-il un mode de carburation à bannir à tout prix ? Allez-vous le développer, le réduire ou l’écarter ? Quel sera le positionnement stratégique du groupe entre l’électrique, l’hybride, le diesel et l’essence ? Le sujet est essentiel : l’opinion est très sensible à ces questions.

Vous souhaitez abaisser le point mort du groupe à deux millions de véhicules. Comment maintenir l’emploi en France et en Europe en diminuant la production puisqu’on est aujourd’hui à 2,6 millions de véhicules ? Certains ont dit que Peugeot avait été handicapé par rapport à Renault parce qu’il avait un plus grand nombre d’emplois en France. Quelles garanties avons-nous au-delà de 2016 que le groupe préservera ses emplois dans notre pays ?

La présentation de la nouvelle 308 SW, qui a d’ailleurs eu lieu dans ma commune du Touquet-Paris-Plage qui vous en remercie, a attiré des journalistes du monde entier, à quoi on mesure déjà le caractère mondial du groupe, que vous souhaitez renforcer. Le pourrez-vous sans nouvelles alliances, comme Volkswagen en a conclues à un moment donné ? La taille actuelle de Peugeot est-elle suffisante pour en faire un groupe mondial ? Ne le fragilise-t-elle pas et ne constitue-t-elle pas une limite pour ses ambitions ?

On attend depuis longtemps une berline française capable de rivaliser avec les berlines allemandes. Qu’en pensez-vous ? Le développement de véhicules low cost a permis au groupe Renault, au sein duquel vous avez occupé le poste de numéro deux, d’améliorer sa rentabilité. Y aura-t-il un jour des véhicules low cost chez PSA ?

M. Franck Reynier. Merci, monsieur Tavares, de votre présentation claire et lucide des objectifs et de la stratégie de PSA. Celle-ci ne peut plus être exclusivement nationale, ni même européenne. L’approche, tout comme les cibles, doivent être mondialisées.

Comment concilier la réduction du nombre de modèles et la nécessité de répondre à des attentes toujours plus diversifiées dans un périmètre de commercialisation toujours plus important ? La qualité de l’air par exemple, nous avez-vous dit, est un critère important pour les consommateurs sur le marché asiatique.

Vous avez, monsieur Tavares, travaillé chez un autre constructeur où vous avez connu une autre approche du véhicule électrique. Quelle est votre vision de ce segment important du marché automobile ? Comment devrait, à votre avis, se positionner l’industrie française en matière de R&D en ce domaine ?

Vous avez évoqué la french touch que PSA est capable de symboliser. J’ai une question, sans doute annexe, mais qui compte en matière d’image du groupe et de valorisation de cette image : le plan Back in the race prévoit-il que PSA s’engage dans la compétition automobile, qui est aussi une vitrine technologique ? PSA s’engage dans de nouvelles disciplines avec Sébastien Loeb. Que pensez-vous de ce vecteur de communication ?

Mme Michèle Bonneton. Merci, monsieur Tavares, d’être venu devant notre commission. Je poserai mes questions de façon lapidaire puisque le temps qui nous est imparti est très limité.

PSA coopère-t-il toujours avec General Motors bien que celui-ci se soit retiré de son capital ? Où en était PSA de la pénétration du marché iranien, avant que celle-ci ne soit bloquée ?

Consécutivement à l’entrée du constructeur chinois Dongfeng au capital de PSA, quelles ont été les réorientations stratégiques concernant les futurs modèles – diesel, essence, hybride diesel-électrique ou essence-électrique… ?

S’agissant du diesel, je rappelle tout de même à M. Fasquelle que l’OMS évalue à 42 000 le nombre de morts prématurées dues aux particules fines émises par les moteurs diesel. Est-il exact que PSA privilégie les moteurs hybrides diesel-électrique ? Qu’en sera-t-il dans le futur ?

Concernant toujours les réorientations stratégiques du groupe, pouvez-vous nous en dire davantage sur ses implantations dans le monde et en France ? Quelles conséquences pour l’emploi dans notre pays, y compris chez les sous-traitants, dont certains voient leurs commandes diminuer très fortement ? Comment pensez-vous régler le problème des sureffectifs dont vous n’avez parlé que très brièvement ?

Un mot de la fiscalité sur l’automobile. Celle-ci doit, me semble-t-il, tenir compte de l’intérêt général et du coût pour la société que représentent la création et l’entretien des infrastructures, les pollutions, les questions d’emploi… Quels efforts compte faire PSA dans tous ces domaines ?

M. Carlos Tavares. Pour ce qui est du nombre de modèles, il faut partir d’une vision simple. Si PSA a rencontré les problèmes que l’on sait, c’est que « la machine » que constitue l’entreprise n’était pas assez rentable. Si le groupe a perdu beaucoup d’argent, c’est que son rendement, en tant qu’organisation, n’a pas été optimal. En un mot, l’entreprise n’a pas pu « performer » collectivement – ce qui ne signifie pas un quelconque problème de qualité individuelle. Où se situent ces pertes de rendement par rapport à nos concurrents ? Disposer de 45 modèles ne nous a pas évité de graves problèmes financiers. Le nombre de modèles n’est pas en soi un critère pertinent pour mesurer de la puissance d’une entreprise automobile. Pourquoi faudrait-il 45 modèles pour couvrir un marché qui ne comporte en moyenne que vingt segments ? Vingt véhicules compétitifs, bien conçus et bien construits, devraient y suffire. Concevoir un véhicule pour une région du monde et un autre pour une autre région du monde nous a fait perdre du rendement, alors qu’un véhicule mondial, utilisable dans plusieurs régions, aurait été plus adapté.

Il y a quelques semaines, au Salon de l’automobile de Pékin, nous avons dévoilé un excellent véhicule, la DS 6 WR, qui est un crossover pour la marque DS en Chine, où elle est appelée à rencontrer un grand succès. J’aurais souhaité qu’il puisse être vendu, voire fabriqué, en Europe aussi. Or, ce n’est pas possible car il n’a pas été conçu au départ pour respecter l’ensemble de la réglementation européenne et n’offre pas certaines prestations répondant aux attentes spécifiques des clients européens. Dès le départ, il aurait fallu dire à ses concepteurs que le véhicule avait vocation à être vendu en Chine, en Europe, au Brésil, voire en Russie, et qu’il fallait donc prendre en compte l’ensemble des contraintes réglementaires et les attentes de l’ensemble des clients, quitte bien sûr, c’est ce que nous faisons et continuerons de faire, à adapter le véhicule à chaque marché local, où il existe toujours quelques spécificités à respecter.

Une gamme mondiale a vocation à améliorer l’efficience de nos investissements. Nous n’aurons que 26 modèles contre 45, mais chacun sera plus beau, inclura davantage des technologies les meilleures et sera encore davantage l’illustration du talent de nos collaborateurs. Et ainsi chacun, sur l’ensemble des marchés mondiaux, permettra un meilleur retour sur investissement. Il n’y a donc pas d’inquiétude à avoir de ce côté. En effet, par rapport à la situation actuelle, la couverture des marchés sera même améliorée de 10 %. Il n’y aura aucun problème ni sur le plan commercial, ni sur le plan de la conception car toutes les ressources libérées seront utilisées pour développer de nouvelles technologies : plug in hybride-essence, version quatre roues motrices de notre plate-forme EMP2, connectivité des véhicules… L’accélération technologique de l’industrie est telle que non seulement nous devons améliorer le rendement de notre organisation mais aussi libérer des ressources pour investir dans les domaines importants.

Sur la question des émissions, ma vision n’a pas changé. L’objectif pour l’industrie automobile est bien de proposer des objets de mobilité à zéro émission. Encore faudrait-il savoir de quelles émissions on parle et quels sont les indicateurs retenus. PSA est fortement engagé dans la technologie hybride, excellente technologie qui possède l’énorme avantage de ne présenter de contraintes, ni en matière d’infrastructures ni en matière d’autonomie pour les utilisateurs. Les émissions d’un véhicule hybride ne sont pas nulles mais ses rejets de CO2 sont fortement réduits. Par ailleurs, PSA a également en vente deux véhicules électriques, que certes il ne fabrique pas. Il nous appartient de soutenir l’ensemble des technologies qui vont dans la bonne direction en vue de l’objectif zéro émission et de ne pas en exclure certaines par rapport à d’autres. Il arrive en effet que des réglementations, sans être nées d’une mauvaise intention, provoquent des biais se retournant contre nous si elles sont mal utilisées. Il faut être vigilant sur ce point.

En résumé, l’hybride est une technologie qui permet un grand pas dans la bonne direction Cela ne signifie pas que le véhicule électrique n’est pas une bonne réponse pour des usages plus urbains et plus limités.

La question du diesel est importante. Je vais la traiter d’abord car je suis sûr que vous attendez des réponses. Si j’écoute mes techniciens, mes chercheurs, mes chimistes, mes physiciens et mes ingénieurs, aucun d’entre eux ne doute que le diesel moderne, c’est-à-dire aux normes Euro 5 et Euro 6, est parfaitement propre, y compris pour ce qui est de l’émission des particules. Madame la députée qui me dites non de la tête, je propose que votre commission nomme un groupe d’experts scientifiques indépendants, français et étrangers, qui rendra ses conclusions en toute liberté. Je ne vous demande pas de me croire, car mon jugement sera toujours biaisé à vos yeux, mais soyez assurée que je mettrai à la disposition de ce groupe d’experts la totalité de nos mesures et de nos résultats. Je m’engage à la plus totale transparence et la plus parfaite honnêteté : mes techniciens, mes chimistes, mes physiciens, mes ingénieurs vous expliqueront ce qu’ils mesurent et comment ils le mesurent, et pourquoi ils pensent ce que je vous ai dit. Le diesel moderne est propre car le grand nombre de filtrations successives opérées par les filtres à particules permettent de piéger ces particules. Je n’ai qu’une formation d’ingénieur, je ne possède pas la science infuse. Le groupe d’experts que je vous propose de mettre en place devrait apporter de la sérénité au débat. Je crois qu’ils concluront que le problème n’est pas les moteurs diesel modernes, mais la modernisation du parc roulant actuel. L’introduction des filtres à particules par PSA en 2000 a en effet complètement changé la donne.

Le diesel s’est développé essentiellement grâce à une fiscalité favorable, mais aussi parce que l’accent a été mis sur les émissions de CO2. Or, les moteurs diesel en rejettent environ 20 % de moins que les moteurs essence traditionnels. Dès lors que l’accent était mis sur le seul CO2, tous les constructeurs ont développé les moteurs diesel, pas seulement d’ailleurs les constructeurs français – les constructeurs allemands l’ont fait également.

Les moteurs diesels modernes sont a priori parfaitement propres, je le redis, y compris en matière d’émission de particules. Je conçois toutefois qu’il puisse y avoir du scepticisme et je m’engage à la plus totale transparence de la part de notre groupe, de façon que puisse se tenir un débat serein et rationnel.

M. le président François Brottes. Je relève votre proposition et regarderai avec la commission du développement durable comment créer une mission d’information commune sur le sujet, aux travaux de laquelle participeront des experts et à laquelle je souhaite que Mme Batho, qui vous disait tout à l’heure non de la tête, prenne une part active. Je lui donne d’ailleurs immédiatement la parole sur ce sujet.

Mme Delphine Batho. Les moteurs diesel aux normes Euro 6 émettent dix fois moins de particules que ceux fabriqués en 2000. Le sujet majeur en matière de santé publique est l’élimination du parc de véhicules diesel datant d’avant 1997. Que pensez-vous, monsieur Tavares, d’une prime à la conversion qui serait financée par une convergence progressive sur cinq ans entre la fiscalité aujourd’hui applicable au gazole et celle applicable à l’essence ? On pourrait ainsi financer au profit des ménages modestes le retrait de la circulation des véhicules anciens, ce qui d’ailleurs soutiendrait le marché automobile intérieur.

S’il est indéniable que les diesels modernes polluent moins que les anciens, je ne peux pas vous laisser dire que les véhicules aux normes Euro 6 ne polluent pas. Cela est faux : ils émettent en effet 33 % d’oxydes d’azote (NOx) de plus que les véhicules essence – mais le dioxyde d’azote (NO2), l’un des composants des NOx, n’est pas mesuré aujourd’hui ! Une commission de scientifiques pourra établir tous ces faits, connus depuis longtemps.

PSA envisage-t-il de produire des véhicules hybrides essence pour ne pas laisser à d’autres constructeurs le monopole de cette technologie ? Que pensez-vous des moteurs à hydrogène ?

Lors de la remise de son rapport sur la compétitivité française, le commissaire à l’investissement, Louis Gallois, avait dit que le problème de la France, c’était le diesel, et s’était déclaré favorable à une évolution de la fiscalité. La mutation industrielle qui est nécessaire ne peut pas intervenir du jour au lendemain. Quelle pourrait être la stratégie à plus long terme de PSA sur ce sujet ?

M. Carlos Taveres. Je ne souhaite pas contester votre opinion. Vous avancez des chiffres, je pourrais en citer des centaines d’autres dont je dispose ici. Je ne le ferai pas…

Tout cela illustre la complexité de la qualité environnementale de nos objets de mobilité. Alors que depuis des décennies, vous l’avez vous-même souligné, la réglementation est centrée sur le CO2, et non sur les particules ou les NOx.

Qu’est-ce qu’un air de bonne qualité ? Là est bien la première question. En tant qu’industriel, je serais très heureux qu’une étude approfondie, multi-factorielle, soit conduite sur la qualité de l’air. Nous avons en effet vocation à apporter des solutions, nous souhaitons faire tout ce qui est nécessaire à la fois pour la prospérité de notre entreprise et le bien-être de la population. Si on nous dit que le problème est le CO2, nous recherchons des solutions aux émissions de CO2. Mais vous comprenez que si on nous dit ensuite que le problème, ce sont les particules, puis encore ensuite les NOx, il nous est difficile de suivre sur le plan industriel. Toute évolution brutale de la réglementation nous met en difficulté. Il faut nous donner le temps de nous adapter. Nous sommes ouverts au dialogue pour définir dans quelle direction il faut aller. Mais commençons par répondre à cette question simple : qu’est-ce qu’un air de bonne qualité ? Quels sont les polluants à contrôler pour qu’un air soit de façon unanime jugé de bonne qualité non par vous ou moi, mais par l’ensemble de la communauté scientifique ? Je ne doute pas de votre compétence, vous pouvez douter de la mienne, je pense qu’il y a des gens plus compétents que nous deux pour définir ce qu’est un air de bonne qualité. Ce sont eux qui doivent fixer les objectifs. Dès lors qu’ils l’auront été, nous ferons ce qui est nécessaire pour les atteindre. Cependant, pour ne pas mettre en péril l’industrie et les emplois, l’évolution doit être progressive et nous laisser le temps de nous adapter.

Pour répondre à votre question, oui, nous allons développer une technologie plug in hybride essence. La décision est prise.

J’en viens aux autres questions. PSA fabriquera-t-il un jour des véhicules low cost ? Sur ce sujet, je suis plutôt pragmatique. La force de PSA est de posséder, avec Citroën et Peugeot, deux marques plus que centenaires, qui, toutes deux, possèdent une très belle histoire, de très belles racines, et ont une grande crédibilité aux yeux des consommateurs, ce qui nous autorise à vendre nos véhicules à un certain prix. Il serait inopportun pour l’instant comme à moyen terme que PSA s’embarque dans la création d’une marque dite low cost. En effet, il est très long et très coûteux de faire acquérir de la notoriété à une telle marque. Je préfère améliorer les marges de nos marques actuelles, que nos clients apprécient. Certains nous écrivent pour nous dire que dans leur famille, on en est à la quinzième Citroën ou à la douzième Peugeot de suite ! La valeur de nos marques soutient nos prix de vente. Ce qu’il nous faut, tout en conservant cette valeur et en continuant à rendre les objets que nous créons encore plus attractifs, c’est en réduire les coûts, de façon à accroître notre compétitivité et notre rentabilité. Je préfère mettre l’accent sur cela.

Par ailleurs, s’il est vrai que les marques low cost ont un bon taux de rentabilité, il ne faut jamais oublier que, même élevé, un taux de rentabilité s’appliquant à une recette unitaire plus faible, se traduit par un profit en masse plus faible. Une marge de 5 % sur un objet à 40 000 euros rapporte plus qu’une marge de 10 % sur un objet à 10 000 euros ! Gardons toujours présents à l’esprit les profits considérables que réalisent, par marque, certains de nos concurrents allemands que, par courtoisie, je ne nommerai pas ici.

M. le président François Brottes. Je ne souhaiterais pas être discourtois, monsieur Tavares, mais je vous demanderai d’être plus concis dans vos réponses. Sinon tous nos collègues qui ont demandé à s’exprimer ne pourront pas le faire.

M. Carlos Tavares. Je vais bien évidemment accéder à votre demande, au risque d’être moins respectueux à l’égard des parlementaires…

Pour ce qui est d’Aulnay, PSA tient parole, je voudrais que vous en soyez convaincus. Le dossier est suivi de façon quasi-hebdomadaire au plus haut niveau du groupe. Sur les 3 000 salariés concernés, 2 800 ont été reclassés. Il y a eu 1 000 mobilités internes, dont 600 à Poissy, 1 800 mobilités externes et 600 congés senior, congés de reclassement ou départs en retraite. À l’heure où je vous parle, nous accompagnons encore 190 personnes, sur lesquelles 107 ont accepté un dossier en cours de finalisation. Sur 3 000 salariés, il n’y en que 88 qui, pour l’instant, n’ont pas accepté les propositions qui leur ont été faites, pourtant très raisonnables à la fois en nature de travail et de lieu géographique proposés. Je surveille cela de près, et le directeur des ressources humaines suit cela personnellement chaque semaine. Je ne sais si cela vous rassurera, mais je tiens à vous dire que le dossier est traité au plus haut niveau de l’entreprise, avec un souci extrêmement fort de respecter nos engagements.

J’en viens aux sujets touchant à l’international. Le Brésil est un pays où nous devrions être capables de gagner de l’argent. Ce n’est pas le cas actuellement pour diverses raisons, liées à la qualité du sourcing, à l’insuffisante profondeur d’intégration locale, à la performance de nos usines, et dans certains cas, à l’inadaptation des produits pour ce marché. Le redressement économique de notre plaque Amérique latine est en cours. La situation en Argentine nous a pénalisés cette année, de même que l’affaiblissement du real brésilien. Malgré ces vents contraires et bien que nous n’ayons pas lancé de nouveaux véhicules, la rigueur de notre gestion et la valorisation de nos produits sont en train de porter leurs fruits.

Cela est également valable pour la Russie. Je ne vous ferai pas l’injure de vous décrire les vents contraires qui y soufflent. Mais nous progressons dans la bonne direction. Nous nous sommes engagés à revenir dans le positif sur les marchés brésilien et russe avant 2017. C’est très important d’abord parce que ces pertes nous pénalisent aujourd’hui sur le plan économique, ensuite parce que nous devons démontrer notre capacité à être rentables hors d’Europe, comme c’est le cas, et de manière substantielle, en Chine.

Pour ce qui est de General Motors, notre approche est très pragmatique, presque terre-à-terre. C’est gagnant-gagnant. Nous avons trois projets avec le groupe américain. Ils portent sur le partage de divers investissements et l’utilisation croisée de plates-formes pour produire trois véhicules. Sur les trois, deux sont fabriqués dans les usines de PSA. Comme je l’ai dit à mon homologue de General Motors, il est de notre intérêt bien compris que ces trois projets atteignent leurs objectifs en matière de coûts, de recettes, de qualité… de façon que PSA et GM soient tous deux satisfaits de l’expérience et que de l’appétit puisse se manifester ensuite pour en faire davantage. C’est le succès des projets actuels qui dictera ce que nous ferons ou non par la suite.

L’Iran était une excellente opportunité pour PSA qui y a expédié jusqu’à 455 000 kits de pièces détachées et pièces de rechange en 2011. La situation actuelle nous pénalise gravement puisque nous avons perdu la quasi-totalité de ces ventes. Sous couvert des négociations ayant eu lieu à Genève en janvier dernier, nous avons repris contact avec nos partenaires iraniens, reconstruit un plan, rétabli une convergence d’intérêts pour être en situation de redémarrer l’activité dès que les pouvoirs publics nous donneront le feu vert et que les sanctions à l’encontre de ce pays auront été allégées. Ce n’est pas le cas pour l’instant où nous en sommes réduits à des contacts, des discussions qui ne peuvent se traduire concrètement. Pour le sort des sanctions, une étape importante aura lieu en juillet. Il est de l’intérêt de PSA et de la France que nous puissions reprendre nos activités sur le marché iranien, qui a un fort potentiel de croissance rentable.

Vous m’avez interrogé sur un sujet qui m’est cher, la compétition automobile. Je ne connais pas de constructeur automobile mondial qui soit engagé en même temps et avec autant de succès dans un championnat du monde des rallyes, comme l’est Citroën, qui, depuis le début de la saison, est monté trois fois sur le podium, dans un championnat du monde des véhicules de tourisme sur piste où nous avons remporté cinq courses sur cinq. Notre performance est donc tout à fait remarquable. J’en profite pour féliciter l’équipe de Citroën Racing qui réalise un travail exceptionnel. Par ailleurs, comme nous l’avons annoncé, Peugeot sera de retour sur le Dakar en janvier 2015. Nos succès sportifs doivent demeurer un outil de promotion de la valeur de nos marques, notamment sur les marchés où nous connaissons une croissance rentable. Au-delà, je cherche à ce que nous déployions partout dans notre entreprise l’esprit de compétition qui existe chez Peugeot Sport et Citroën Racing et qui doit être le nôtre pour que nous puissions nous battre efficacement avec nos concurrents.

Un dernier mot sur Dongfeng, qui est lié par des joint-ventures avec d’autres constructeurs, notamment Honda, Kia, Nissan et Renault. Dès le premier jour de mon arrivée dans le groupe, on a sollicité mon avis sur les négociations en cours avec le constructeur chinois. J’ai toujours considéré que la présence de Dongfeng au capital de PSA était un facteur positif et stratégique. Qu’il soit l’un de nos actionnaires nous place de facto dans la position de partenaire privilégié sur les marchés chinois et du Sud-Est asiatique. Chaque fois que nous connaissons une croissance rentable, comme c’est le cas très fortement début 2014 en Chine, et chaque fois que notre joint-venture en Chine fait des profits, ceux-ci se répartissent pour moitié entre Dongfeng et PSA. Dongfeng a tout intérêt à nous aider en Chine, d’abord parce qu’il gagne ainsi lui-même plus d’argent sur ce marché, ensuite parce que si PSA se redresse, notamment grâce au marché chinois, sa participation dans le capital de PSA elle-même se valorise. Être ainsi le partenaire privilégié de Dongfeng en Chine nous protège aujourd’hui et pour l’avenir puisque le marché chinois est celui qui a le plus fort potentiel de croissance au monde. Il est indispensable que nous y soyons bien accompagnés et épaulés. Alors que tant que nous avons une dette importante, nos possibilités d’investissement s’inscrivent dans un cadre strict, les fonds disponibles de notre joint-venture en Chine nous permettent en outre d’investir sur les marchés du Sud-Est asiatique, Or, la Malaisie, l’Indonésie, la Thaïlande sont des marchés intéressants pour nous et sur lesquels nous sommes très peu présents. C’est pourquoi le choix de Dongfeng, au-delà de l’histoire commune nouée avec ce partenaire depuis vingt ans, est particulièrement pertinent.

M. le président François Brottes. Comme nous devons, dans cette même salle, auditionner à 11 heures 45 Mme Ségolène Royal, dans le cadre de la commission d’enquête sur le nucléaire, je demande aux collègues qui vont maintenant nous interroger, d’être brefs.

M. Jean-Claude Mathis. Un grand merci, monsieur Tavarès pour votre exposé liminaire, et ces premières réponses. Je souhaitais vous interroger sur la diminution du nombre de modèles, le développement du SUV, des moteurs hybrides. Mais vous avez déjà répondu sur tous ces points.

Mme Frédérique Massat. Quelles conséquences votre décision de ramener de 45 à 26 le nombre de modèles et de sept à deux celui des plates-formes aura-t-elle sur l’emploi et l’organisation du travail dans l’entreprise ? Quelles conséquences la diminution des stocks que vous avez annoncée aura-t-elle sur l’emploi dans les territoires mais aussi pour la clientèle ?

Permettez-moi de revenir sur le véhicule électrique. L'Assemblée nationale a adopté il y a peu une proposition de loi visant au déploiement d’un réseau d’infrastructures de recharge….

M. le président François Brottes. Vous en étiez, madame Massat, la première signataire !

Mme Frédérique Massat. L’État va s’engager dans ce déploiement à côté d’autres partenaires, dont certains constructeurs automobiles. Le manque d’infrastructures constitue en effet un frein au développement du véhicule électrique. PSA compte-t-il s’associer à ce déploiement ? A-t-il l’intention d’investir en R&D dans le domaine du véhicule électrique ? Ne craignez-vous pas sinon de rater un marché important ?

M. François de Rugy. Quel est le programme de développement par PSA de la technologie Hybrid Air, qui pourrait équiper de plus petits véhicules ? Selon quel calendrier ?

M. Alain Chrétien. En tant qu’usager, je confirme que la 308 mérite bien d’avoir été élue meilleure voiture de l’année 2014 !

La réduction des coûts fixes, dont le réseau logistique fait partie, est un élément essentiel de votre stratégie. C’est à Vesoul, dont je suis le député-maire, que se situe le centre mondial d’envoi des pièces détachées et pièces de rechange. Confirmez-vous le choix fait il y a quelques années d’y centraliser l’ensemble du réseau de logistique ? Confirmez-vous l’implantation locale et les futurs développements que vous y avez prévus, en lien notamment avec l’Iran si le marché iranien s’ouvre de nouveau ?

Mme Marie-Lou Marcel. Je souhaiterais aborder le sujet des sous-traitants. Un guide des bonnes pratiques a été élaboré… ce qui laisse à penser qu’il y en avait donc de mauvaises. C’est le cas notamment des baisses de prix imposées aux sous-traitants par les constructeurs. Dans un article paru hier dans Les Echos, le PDG de l’équipementier Groupe Arche, qui va internationaliser sa production, explique que les constructeurs exigent toujours davantage des sous-traitants sans qu’ils ne sacrifient la qualité et qu’il ne sait pas résoudre l’équation consistant à baisser les prix de 30 % en cinq ans, alors que le coût de l’énergie et de la main-d’œuvre augmente.

L’État a accordé une garantie à PSA puis est entré à son capital, décision de patriotisme économique. Dans le même souci de patriotisme, votre groupe fera-t-il appel plutôt aux sous-traitants nationaux ? Enfin, quelles sont vos relations avec Groupe Arche ?

M. Alain Suguenot. Un regret, monsieur le président, concernant la compétition automobile : les duels Audi-Peugeot nous manqueront dans un mois au Mans !

PSA a bénéficié d’une augmentation de capital de trois milliards d’euros. Dongfeng et l’État français ont chacun pris 14 % de son capital. Des fonds sont levés en bourse. Par le jeu des bons de souscription d’actions attachés aux actions existantes, quelle somme totale PSA pourrait-il, d’après vous, lever ? Il est important de le savoir car cela permettra de fiabiliser le projet industriel.

Mme Jacqueline Maquet. En 2013, PSA Banque a lancé le site internet économieréelle.fr afin de financer l’économie réelle. Pouvez-vous dresser un premier bilan après six mois de fonctionnement de ce site ?

Ma deuxième question concerne les sous-traitants. Les entreprises de taille intermédiaire (ETI), souvent sous-traitantes ou cotraitantes de groupes comme le vôtre, peuvent se retrouver en difficulté lors de fusions internationales. Même si vous avez reprécisé tout à l’heure l’ancrage de PSA en France, quelles garanties ont-elles quant à leur pérennité demain lorsqu’une usine française sera pilotée par des équipes de direction basées à l’étranger, peut-être à Pékin ?

M. Éric Straumann. Par quel canal sera distribuée la nouvelle marque DS ? Le sera-t-elle par de nouveaux distributeurs ?

Peugeot a toujours été historiquement très présent sur le marché africain qui recèle un potentiel important. Quels sont vos projets sur ce continent ?

M. Jean-Luc Laurent. PSA a été sauvé grâce aux engagements pris en matière d’objectifs de production et de véhicules réalisés sur les différents sites français. Au-delà de la tenue de ces engagements, pour assurer son redressement, le groupe doit, me semble-t-il, relever deux défis. L’un est interne, c’est celui de la qualité, de la montée en gamme, surtout par rapport aux autres constructeurs au niveau international. Quelle est votre stratégie pour hisser PSA à un niveau supérieur ?

Le deuxième défi ne vous concerne pas directement mais a une incidence au regard de votre production en France et de vos exportations : c’est celui de l’euro cher. Avez-vous une position sur le sujet ? Avez-vous calculé l’incidence sur la marge de votre groupe de la surévaluation actuelle de 15 % à 20 % de l’euro ?

Mme Béatrice Santais. Je souhaiterais compléter la question de Frédérique Massat sur les véhicules électriques. La mienne est simple : y croyez-vous vraiment ? Je suis maire d’une ville qui, il y a bientôt une quinzaine d’années, avait acheté trois véhicules électriques à Peugeot. Propres et silencieux, ces véhicules sont particulièrement adaptés à l’usage qu’en ont des collectivités en ville. Lorsque je vous entends dire que votre groupe doit être capable de continuer à investir dans ce domaine, cela ne me rassure pas vraiment pour autant. J’aimerais connaître, au-delà de la stratégie de Peugeot, votre point de vue personnel sur l’avenir des véhicules tout électriques et des véhicules hybrides.

M. Paul Molac. Dans le classement des marques sur le marché français en fonction de leur fiabilité, établi par un grand quotidien spécialisé dans l’automobile, les marques françaises, Renault mais aussi Peugeot, monopolisent les premières places, tandis que d’autres marques allemandes bien connues figurent en queue de peloton.

Avec la décentralisation du groupe intervenue dans les années soixante, l’industrie automobile est devenue très importante pour la vitalité de nos territoires ruraux. Je pense à l’usine qui a été implantée à Rennes, avec de nombreux équipementiers qui se sont installés autour. Quel sera le devenir de cette usine ?

Comme mon collègue de Rugy, je pense que les véhicules doivent être de plus en plus sobres, non seulement pour assurer une meilleure qualité de l’air mais aussi pour limiter la consommation de pétrole. De plus petits modèles seront-ils un jour équipés de moteurs hybrides qui aujourd’hui s’arrêtent en gros à la 3008 et à la DS 4 ? On parle des moteurs à hydrogène, mais il semblerait qu’ils seraient plutôt réservés à de gros modèles. On parle aussi, de l’Hybrid Air, François de Rugy l’a évoqué. Sans déflorer vos recherches, pourriez-vous nous dire quelles pistes technologiques vous explorez pour parvenir à une économie de plus en plus décarbonée ?

M. Philippe Armand Martin. Monsieur le président, je tiens à vous féliciter pour vos ambitions de redressement de PSA.

Je souhaitais vous interroger sur l’Iran, vous avez déjà répondu.

La faiblesse de la présence de PSA sur le marché nord-américain s’explique par une inadéquation de ses produits au marché et par l’absence de réseaux commerciaux performants. L’industrie automobile allemande, elle, n’a pas fait l’erreur de sous-estimer l’importance du marché nord-américain pendant les années de crise. Elle produit maintenant 20 % de ses véhicules sur le sol américain. Quelles sont les raisons du choix de PSA ? Entendez-vous le confirmer ?

Vous n’avez pas abordé le sujet des véhicules deux et trois roues qui constituent une alternative à l’automobile, notamment en milieu urbain. Quelle part représentent-ils dans les ventes de Peugeot et quelles sont les perspectives de développement de ce secteur d’activité ?

Mme Marie-Noëlle Battistel. Je m’associe à la question que vous a posée notre collègue Frédérique Massat sur le développement des véhicules hybrides rechargeables.

Vous avez évoqué un plan pour mettre au point un véhicule qui ne consommerait que 2 l/100. Quels sont vos objectifs ? Quelle échéance vous fixez-vous et quelles incidences cela pourrait-il avoir en termes d’emplois ?

M. François Sauvadet. Je suis très intéressé par les perspectives qu’offre l’alliance avec vos partenaires chinois, y compris pour renforcer les activités en France. On parle beaucoup aujourd’hui de patriotisme industriel. Comment cela pourrait-il se traduire concrètement pour PSA ? Quel appareil industriel, quels centres de recherche sur le territoire français ?

Qu’est-ce qui, selon vous, explique la renommée des marques automobiles allemandes par rapport aux marques françaises ? À quoi tient leur réputation de fiabilité, de sérieux, de solidité, autour de laquelle toute leur publicité est construite ? « En claquant simplement une porte, on voit que c’est du solide », entend-on dire souvent ! Que faudrait-il faire pour redorer l’image de vos marques ? Pour ma part, j’aime beaucoup les Peugeot, mais force est de constater que la marque a quasiment disparu du haut de gamme. Comment faire pour qu’un jour on dise d’une voiture « C’est une française ! » comme on dit aujourd’hui « C’est une allemande ! » ?

M. le président François Brottes. Chacun aura compris que c’est là une question sur le syndrome Claudia Schiffer !

M. Hervé Pellois. Quelles sont les perspectives pour le site de La Janais à Rennes ? 2016 est un horizon proche pour ceux qui y travaillent, comme pour les élus du secteur. Pouvez-vous les rassurer ?

La marque DS sera-t-elle distribuée par de nouveaux concessionnaires, ou, au contraire, toutes vos marques seront-elles regroupées dans une concession unique ?

M. Marcel Bonnot. Monsieur Tavares, j’ai écouté avec grand intérêt vos propos sur la stratégie industrielle du groupe et les conditions de son redressement.

Je suis député de Montbéliard-Sochaux, site historique du groupe qui compte non seulement un site de production mais un très important centre de R&D. Quels sont les critères qui, pour vous, font un site performant garantissant sa pérennité et lui permettant d’être porteur d’avenir ?

Le pays de Montbéliard-Sochaux est l’espace géographique français qui compte la plus forte densité de PME-PMI sous-traitantes de l’automobile. Vous avez indiqué qu’une certaine homogénéité de performance était nécessaire dans l’ensemble de la filière automobile et que les sous-traitants devaient donc eux aussi faire un effort. Je sais que PSA mène des actions sur le terrain avec ses sous-traitants. Pourriez-vous nous en dire davantage ?

Ma troisième question portait sur les deux roues et les trois roues, mais elle a déjà été posée.

M. Jean Grellier. Le crédit d’impôt-recherche et le crédit d’impôt compétitivité-emploi (CICE) sont deux mesures, renouvelée pour la première et récemment prise pour l’autre, visant à améliorer la compétitivité des entreprises. Quelles en sont les retombées pour votre groupe ? Quel volume financier cela représente-t-il ? Vos sous-traitants bénéficient également de ces dispositifs. Leur demandez-vous de tenir compte de ces aides pour abaisser leurs prix ou les laissez-vous en profiter pour améliorer leur propre compétitivité ?

M. Alain Marc. Vous avez évoqué, monsieur Tavares, le projet d’un véhicule ne consommant que 2 l/100, dont M. Montebourg nous a également parlé. À quelle échéance pourrait-il être au point ?

L’image et la notoriété d’un véhicule sont aussi souvent fonction de sa fiabilité. Je suis donc très étonné qu’en France, où nous avons des voitures très fiables, on mette toujours en avant la fiabilité des voitures allemandes. Étrange attitude qu’il faudrait inverser !

Quelle part du chiffre d’affaires de PSA représentent les deux roues et trois roues ?

M. Carlos Tavares. Vesoul est le cœur de notre service d’expédition et a vocation à le rester. Il n’y a aucun péril pour ce site pour autant qu’il s’engage, comme le reste du groupe, dans une dynamique de réduction des coûts et d’amélioration de la qualité.

L’une d’entre vous m’a interrogé sur les baisses de prix imposées aux fournisseurs. Telle n’est pas la réalité. En revanche, madame la députée, ce qui s’impose à nous comme à nos fournisseurs, ce sont les prix de vente de nos concurrents. Lorsqu’ils vendent des véhicules de qualité à un prix attractif, l’alternative est simple : soit nous nous excluons du marché soit nous nous alignons. Lorsque nous nous alignons pour ne pas sortir du marché, sans quoi il faudrait que l’entreprise soit trois fois plus petite, nous ne pouvons faire autrement que de répercuter un certain nombre de contraintes sur l’ensemble de la chaîne de valeur, y compris sur nos fournisseurs. Si nous acceptions d’un côté la loi du marché pour le prix de vente des automobiles et ne pouvions pas de l’autre côté répercuter une partie de l’effort sur nos partenaires, c’est PSA qui disparaîtrait, et toute la chaîne de valeur avec ! Lorsque le marché nous impose à la fois de réduire nos prix et d’améliorer notre qualité, nous prenons notre part de l’effort. C’est ce que nous faisons avec le redressement économique de l’entreprise, dont Dieu sait s’il a été douloureux. Mais nous devons aussi faire supporter une part de cet effort par la filière, de façon qu’elle soit elle aussi compétitive. La seule façon pour un fournisseur sur le territoire national de démontrer que par la qualité de ses produits, l’excellence de sa technologie et le niveau de ses prix, il est compétitif, c’est de réaliser au moins 30 % à 40 % de son chiffre d’affaires avec des clients autres que les deux constructeurs nationaux. Des fournisseurs qui ne travailleraient qu’avec les constructeurs nationaux se mettraient en situation très délicate : cela ne serait certainement pas bon pour eux sur le plan stratégique et en tout cas, cela ne leur permettrait pas d’apprécier leur niveau réel de performance. Les baisses de prix demandées sont le déploiement sur la chaîne de valeur de la baisse des prix de vente des véhicules. Il y a quelques années, il n’existait pas de véhicules à 8 000 euros. Aujourd’hui, il y en a !

Cela étant, nous avons créé au sein de la direction des achats de PSA un service dédié au soutien et à l’accompagnement de nos fournisseurs. Nous sommes tout à fait prêts à les aider à améliorer leur performance s’ils en ont vraiment la volonté. Un groupe d’experts ne travaille qu’à cela. Dans une industrie aussi ouverte que l’industrie automobile, tout fournisseur qui ne chercherait pas à s’améliorer se mettrait lui-même en difficulté.

La meilleure façon pour nous de faire preuve de patriotisme économique dans les trois à cinq prochaines années est de redresser PSA, de façon que le groupe ne devienne pas un problème pour la France, qu’il puisse renforcer encore sa R&D et tirer vers le progrès et la croissance rentable l’ensemble de ses fournisseurs qui peuvent eux aussi investir à l’international.

S’agissant de DS, quand nous introduirons cette marque Premium dans des pays où nous ne sommes pas fortement présents, nous créerons un réseau dédié. Sur le marché européen en revanche, les concessionnaires pourront créer un salon DS au sein de leur concession, avec une mise en valeur spécifique – nous leur proposons à cet effet un kit à prix intéressant –, jusqu’à ce qu’ils aient suffisamment confiance et aient les moyens d’investir dans une concession exclusivement dédiée à la marque. Mais ce sont eux qui en décideront, pas nous. C’est la stratégie adoptée par Toyota avec Lexus, par Nissan avec Infinity et par Volkswagen avec Audi. Tous les constructeurs qui ont créé une gamme Premium ont commencé par mettre en place des salons dédiés – ce qu’on appelle en anglais des corners – à la marque Premium au sein des concessions de la marque généraliste. En Chine, nous avons créé d’emblée un réseau DS indépendant puisque nous avons un partenaire qui se consacre exclusivement au développement de cette marque sur le territoire chinois.

L’un d’entre vous a rappelé, à juste titre, que nous avons encore une image extrêmement forte sur le continent africain. Parmi les six grandes divisions régionales que nous allons prochainement mettre en place, il y en aura bien une Afrique/Moyen-Orient. Un membre du comité exécutif sera spécifiquement chargé de renforcer notre présence dans ces régions du monde. Je partage le point de vue exprimé : nous avons l’opportunité de reconquérir une grande partie du marché africain, notamment avec Peugeot.

Vous m’avez interrogé sur la qualité. Nous avons décidé il y a deux semaines de remonter la barre de nos objectifs de qualité. En effet, beaucoup de progrès ont été réalisés et il ne faudrait pas que des objectifs moins ambitieux conduisent à une forme de stagnation dans l’amélioration de la qualité. Ce serait une erreur car, les autres continuant pendant ce temps de progresser, nous perdrions en position relative. Il y a quelques semaines, nous avons donc rendu plus sévères les critères pour les produits – livraison, durabilité, aspect et finition des véhicules… – mais aussi pour le service, devenu un élément important de différenciation. Ainsi voulons-nous nous redonner une perspective suffisante de progrès afin de gagner des places dans les classements vis-à-vis des autres constructeurs.

Une question m’a été posée sur l’euro cher. Sur ce sujet, ma position est simple et se fonde sur les faits : lorsque l’euro se déprécie, nos résultats s’améliorent. Un euro faible est donc un facteur d’accélération de notre redressement.

Vous m’avez interrogé sur notre stratégie en Amérique du Nord. Il faut savoir que l’Amérique du Nord et la Chine représentent à elles deux les deux tiers du profit de l’industrie automobile mondiale. Autant dire qu’être absent de l’un de ces deux territoires, c’est se priver de la possibilité de participer à un tiers du profit mondial de notre industrie. La question de l’Amérique du Nord se posera pour nous dans le cadre du plan 2019-2023. J’espère que nous aurons alors achevé notre redressement et que nous pourrons décider de nous y développer.

Comment en définitive mesure-t-on la performance d’un site ? Excellente question ! Il faut que le coût de la valeur ajoutée créée sur le site soit compétitif par rapport à d’autres sites. Fabriquer une automobile, c’est s’approvisionner en pièces, les frapper et les souder, peindre des caisses, assembler le tout, effectuer des tests qualité et certifier la qualité du produit final. Nous savons exactement, voiture par voiture, modèle par modèle, usine par usine quelle est la valeur ajoutée créée. Nous pouvons la rapporter au nombre d’heures nécessaire à la fabrication d’une voiture. Nous l’analysons sous l’angle de critères économiques et non économiques pour faire la part des choses entre l’efficience industrielle de l’usine et le coût du travail. Il faut que le coût de cette valeur ajoutée soit compétitif par rapport aux autres usines du groupe et par rapport à ce que nous savons de celles de nos concurrents.

Le deuxième critère c’est le « bon direct », c’est-à-dire le taux de voitures qui arrivent en bout de ligne sans aucun problème de qualité à corriger. Toute retouche qualité représente non seulement un coût supplémentaire mais présente aussi le risque de créer un nouveau problème en cherchant à en régler un autre. Le « bon direct » est la mesure de la rigueur, de l’efficience et de la qualité du management d’une usine.

Le troisième critère est bien évidemment la qualité des produits provenant d’une usine donnée, telle que mesurée, non pas par nos techniciens mais par nos clients. La qualité des produits d’une usine est un facteur de différenciation très important.

Le dernier critère, économique également, réside dans la qualité des flux, la qualité de la logistique interne et la compacité. Aujourd’hui, nombre de nos usines datent d’il y a trente ou cinquante ans. Elles ont été construites à une époque où on valorisait ce qui était « gros », alors qu’aujourd’hui, ce qui est « gros » se révèle un handicap sur le plan de la consommation d’énergie, de la maintenance, de la gestion, de la protection du site, du coût de la logistique interne. La modernité en matière d’efficacité industrielle automobile, ce sont des sites très compacts, comportant une seule ligne, proche de l’approvisionnement, et où très peu de retouches qualité sont nécessaires. Une usine performante aujourd’hui, et ce sera encore plus vrai à l’avenir, est une usine compacte, monoflux, avec une plate-forme comportant plusieurs dérivés. C’est pourquoi, face à nos concurrents, nous devons moderniser notre appareil industriel.

Vous m’avez interrogé sur les deux roues et les trois roues. Il se trouve que je visitais hier Peugeot Scooter à Mandeure. Cette activité présente un intérêt stratégique. Les deux et trois roues offrent en effet en zone urbaine une solution de mobilité intéressante, une alternative à la voiture. Nous avons lancé il y a peu un excellent trois roues, Metropolis. Ces outils hyper-sophistiqués, désormais équipés d’un démarrage mains libres, d’un ABS… se sont grandement développés grâce à une importation intelligente de la technologie automobile et ont beaucoup progressé à son contact. Hélas, nous perdons aujourd’hui de l’argent sur ce secteur. C’est la raison de mon déplacement hier à Mandeure, pour aider les équipes à retrouver le chemin de la rentabilité. Nous vendons environ 60 000 véhicules par an. Nous pourrions en vendre davantage. Nous réalisons encore des pertes parce que notre système industriel et logistique non plus que la façon dont nous valorisons et distribuons ces véhicules ne sont pas optimaux. Il est possible de redresser Peugeot Scooter, et il y a un intérêt stratégique à le faire. Il semblerait qu’il n’y ait pas eu de visite de président du directoire à Mandeure depuis de nombreuses années. Je m’y suis donc rendu aussi pour encourager les équipes sur la voie du développement.

Une question m’a été posée, avec un brin de nostalgie que je partage, sur la présence de Peugeot aux 24 heures du Mans. Je m’attends à ce que la compétition qui y a lieu entre Japonais et Allemands conduise à une inflation considérable des coûts. PSA n’a pas les moyens d’y participer mais je reste très attentif au moment où le constat de cette inflation des coûts ayant été fait et cette bulle ayant éclaté, on reviendra à une réglementation plus acceptable. J’espère qu’à ce moment-là, nous aurons retrouvé la santé et serons en situation de pouvoir participer de nouveau à cette compétition.

Plusieurs d’entre vous m’ont interrogé sur les véhicules électriques. Il y a deux ans, lors de mon audition alors que je travaillais pour un autre constructeur, vous ne souteniez pas autant le véhicule électrique. Je prends acte de votre enthousiasme aujourd’hui. Des véhicules électriques, nous en avons, nous les développions avec un partenaire japonais. Nous allons devoir définir une stratégie pour continuer à en proposer aux clients. Celle-ci n’est pas encore arrêtée. Elle le sera dans les douze prochains mois. La question se posera de savoir si nous les développons seuls ou en partenariat, et où ils seront fabriqués. Nous avons retiré de nombreuses leçons de cette expérience, notamment sur ce qui se passe quand le yen devient très fort. Le véhicule électrique n’est pas spontanément ce qui est proposé au sein de l’entreprise, qui est plus câblée hybride. Mais il n’y a pas de doute que nous devrons continuer d’offrir des véhicules électriques à nos clients. Nous allons voir comment utiliser nos ressources propres de R&D.

Il m’a été demandé à ce sujet si nous ne risquions pas de nous retrouver avec trop d’ingénieurs et de techniciens. Soyez rassurés, vu tous les projets que nous avons sur les quatre roues motrices, les crossover, le plug in hybride-essence, le véhicule électrique – que nous ne développons pas nous-mêmes –, je ne doute pas d’utiliser pleinement nos ressources d’ingénierie. Mais, comme à tous les autres métiers de l’entreprise, comme aux fabricants, comme aux logisticiens, comme aux commerciaux, je dois demander aussi à nos équipes de R&D un effort substantiel de productivité. C’est collectivement que nous avons un problème de rendement dans l’entreprise qui a conduit au résultat que nous connaissons. Elles devront faire un effort comme tous les autres métiers mais seront pleinement utilisées pour développer les nouvelles technologies.

J’en viens au sujet des stocks. Mon expérience préalable chez d’autres constructeurs nous a permis d’avancer rapidement. J’ai en effet immédiatement identifié une différence marquée entre notre niveau de stocks et celui de nos concurrents. Nous avons de suite traité le problème et des progrès ont rapidement été enregistrés. Nous cherchons à protéger ce que nous appelons dans notre jargon le taux de service, c’est-à-dire la capacité à apporter la bonne pièce au bon endroit dans un délai très court. Je demanderai sur ce point à nos concessionnaires de faire des progrès. Il ne faut pas qu’un taux de service excessif, source de coûts importants en amont, serve à rattraper un manque de rigueur de nos partenaires. Pourquoi par exemple avoir à livrer des pièces deux fois par jour alors qu’une programmation du plan de charge de l’atelier d’un jour sur l’autre peut suffire à se satisfaire d’une livraison journalière ? Il faut trouver le juste équilibre entre le bon taux de service, le bon niveau de stocks et le bon niveau de recours à l’emprunt, emprunter restant assez cher pour nous. Lors de mes visites, je pose systématiquement la question de savoir si des véhicules sont immobilisés faute de pièces. La situation n’est pas mauvaise, mais il y a matière à optimiser.

La technologie Hybrid Air est en passe de sortir du stade de la recherche et de l’avant-projet. Nous aurons à décider le mois prochain si le projet est assez mature et performant pour entrer dans la phase d’application. L’évaluation est en cours. Nous saurons alors si l’Hybrid Air est une technologie susceptible de déstabiliser nos concurrents, dans la mesure où elle permet de réduire fortement les émissions de CO2 pour un coût moindre.

S’agissant de l’hydrogène, je pense qu’on est encore loin d’une application généralisée. Le coût des infrastructures est en effet très lourd. Je ne crois pas que les sociétés qui nous entourent soient en mesure de financer cela avant vingt ou trente ans, en tout cas pas dix ans ! Cela n’en est pas moins une bonne technologie.

Pourquoi les clients européens continuent-ils à valoriser autant les voitures allemandes ? Peut-être parce que nous ne valorisons pas assez les voitures françaises. Je vous rappelle et vous invite à le faire savoir largement autour de vous que, tel qu’il résulte de l’évaluation de quarante experts indépendants, la Peugeot 308 a été jugée la voiture la plus performante de sa catégorie, toutes nationalités confondues, et que nous avons battu tous nos concurrents allemands, y compris sur des véhicules Premium qui concouraient. La dimension mentale est importante. Beaucoup de nos concitoyens n’osent pas encore dire qu’ils sont ravis d’avoir une Peugeot et qu’elle est meilleure que bien d’autres modèles d’autres marques !

M. François Sauvadet. Il faut nous y aider.

M. Carlos Tavares. Nous vous y aiderons en fabriquant d’excellentes automobiles. Comptez sur nous.

Je n’ai pas répondu sur l’usine de Rennes. Nous avons annoncé le véhicule qui y sera produit. L’avenir de cette usine est aujourd’hui garanti par ce véhicule, comme nous nous y étions engagés. Demeure le problème important de la logistique, que je souhaite traiter avec les responsables régionaux. Le coût d’approvisionnement de l’usine, excentrée à l’ouest du pays par rapport à notre bassin d’approvisionnement, plutôt centré dans l’Est, n’est pas du tout compétitif. Il nous faut ensemble trouver des solutions astucieuses de pontage logistique qui permette de ne pas pénaliser cette usine.

M. le président François Brottes. Vous n’avez pas répondu sur le CICE.

M. Carlos Tavares. Cela représente pour PSA à peu près 80 millions d’euros d’économies sur une masse salariale de quatre milliards d’euros en France.

M. le président François Brottes. Merci, monsieur Tavares de vos réponses.

J’indique aux membres de la commission que nous aurons l’occasion de reparler automobile dans quelques semaines puisque nous auditionnerons Carlos Ghosn, PDG de Renault.

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Membres présents ou excusés

Commission des affaires économiques

Réunion du mercredi 21 mai 2014 à 9 h 30

Présents. - M. Damien Abad, Mme Brigitte Allain, Mme Delphine Batho, Mme Marie-Noëlle Battistel, M. Thierry Benoit, Mme Michèle Bonneton, M. François Brottes, M. Dino Cinieri, Mme Fanny Dombre Coste, Mme Jeanine Dubié, Mme Corinne Erhel, Mme Marie-Hélène Fabre, M. Daniel Fasquelle, M. Christian Franqueville, M. Franck Gilard, M. Georges Ginesta, M. Daniel Goldberg, M. Jean Grellier, M. Razzy Hammadi, M. Henri Jibrayel, M. Philippe Kemel, Mme Laure de La Raudière, M. Jean-Luc Laurent, M. Michel Lefait, Mme Annick Le Loch, M. Philippe Le Ray, M. Jean-Pierre Le Roch, Mme Audrey Linkenheld, Mme Jacqueline Maquet, M. Alain Marc, Mme Marie-Lou Marcel, M. Philippe Armand Martin, Mme Frédérique Massat, Mme Véronique Massonneau, M. Jean-Claude Mathis, M. Kléber Mesquida, M. Yannick Moreau, M. Germinal Peiro, M. Hervé Pellois, M. Dominique Potier, M. Patrice Prat, M. François Pupponi, M. Bernard Reynès, M. Franck Reynier, M. Frédéric Roig, Mme Béatrice Santais, M. François Sauvadet, M. Michel Sordi, M. Éric Straumann, M. Alain Suguenot, M. Jean-Marie Tetart, Mme Catherine Troallic, Mme Clotilde Valter, M. Fabrice Verdier

Excusés. - M. Bruno Nestor Azerot, Mme Ericka Bareigts, M. Yves Blein, M. Alain Bocquet, M. Christophe Borgel, M. Jean-Claude Bouchet, M. Joël Giraud, Mme Pascale Got, Mme Anne Grommerch, M. Antoine Herth, M. Thierry Lazaro, M. Serge Letchimy, M. Jean-Charles Taugourdeau, M. Jean-Paul Tuaiva, Mme Catherine Vautrin

Assistaient également à la réunion. - M. Marcel Bonnot, M. Alain Chrétien, Mme Françoise Descamps-Crosnier, Mme Annie Genevard, M. Michel Ménard, M. Paul Molac, M. François de Rugy, M. François Vannson, M. Jean-Luc Warsmann