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Commission des affaires économiques

Mardi 9 septembre 2014

Séance de 16 heures 15

Compte rendu n° 111

Présidence de M. François Brottes Président
et de
M. Jean-Paul Chanteguet Président de la Commission du développement durable

– Audition, ouverte à la presse, commune avec la Commission spéciale pour l’examen du projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte et la Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, de Mme Ségolène Royal, ministre de l’Écologie, du développement durable et de l’énergie, sur le projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte (n° 2188)

La commission des affaires économiques, la commission spéciale et la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire ont auditionné Mme Ségolène Royal, ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, sur le projet de loi de transition énergétique pour la croissance verte (n° 2188).

M. le président François Brottes. Nous accueillons aujourd’hui Mme Ségolène Royal, ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, qui vient nous présenter le projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte.

Nous avions posé cette date dans l’agenda de Mme la ministre avant même que la décision de créer une commission spéciale ne soit prise. Il semblait logique que la Commission des affaires économiques et la Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire puissent auditionner ensemble Mme la ministre. C’est pourquoi cette audition réunit à la fois les deux commissions permanentes et la Commission spéciale.

Je remercie Mme Ségolène Royal d’être à nos côtés et de prendre le temps de répondre largement aux questions qui seront posées. La Commission spéciale, que j’ai l’honneur de présider, a été installée ; les rapporteurs ont été désignés. L’opposition a regretté de ne pas avoir de rapporteurs, et, pour en avoir éprouvé de similaires lorsque j’étais dans l’opposition, je peux comprendre ces regrets. Le bureau est installé. Monsieur Chassaigne, nous avons nommé un secrétaire du groupe GDR qui, je l’espère, sera de temps en temps avec nous, si je puis me permettre cette remarque.

Avant de vous laisser le soin de faire une présentation du texte, madame la ministre, je vais donner la parole à M. Jean-Paul Chanteguet, le président de la Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire.

M. Jean-Paul Chanteguet, président de la Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire. Je remercie Mme la ministre de sa présence et je me réjouis de la mise en place de la commission spéciale pour un texte dont personne ne pourra contester la transversalité. En votre nom à tous, je félicite François Brottes, le président de cette Commission spéciale. Le format est tout à fait original – deux commissions et une commission spéciale – mais l’affluence montre l’intérêt que vous portez à ce sujet et à ce projet de loi.

M. le président François Brottes. Madame la ministre, vous êtes la bienvenue pour nous présenter ce texte tant attendu.

Mme Ségolène Royal, ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie. Monsieur le président, monsieur le président de la Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire, mesdames et messieurs les rapporteurs, mesdames et messieurs les députés, je suis très heureuse de vous présenter le projet de loi sur la transition énergétique pour la croissance verte, qui a été transmis à votre assemblée le 30 juillet dernier.

La présente audition marque le début de l'examen et de la discussion parlementaires, par votre Commission spéciale puis en séance publique, d'un texte très attendu et qui ouvre un nouveau chapitre de l'histoire énergétique de notre pays, tout en apportant – et c’est mon souci principal – des réponses concrètes en matière de création d’emplois sur les territoires dont vous êtes les élus et que vous pouvez engager avec détermination dans la croissance verte.

J'attends beaucoup de vos travaux et de nos débats pour éclairer les enjeux et enrichir le texte qui vous est soumis mais aussi pour que le pays tout entier soit encouragé à se mettre en mouvement et réussisse cette mutation énergétique qui n'est pas une contrainte mais une chance à saisir.

C’est une chance de réduire nos émissions de gaz à effet de serre et de contribuer activement à la lutte contre le dérèglement climatique. C’est une chance de mieux assurer notre indépendance et notre souveraineté énergétiques en préparant l'après pétrole et en réduisant le coût d'importations qui grèvent lourdement notre balance commerciale. C’est une chance de stimuler l'innovation pour laquelle nous ne manquons pas de talents, d'améliorer la compétitivité de nos entreprises et de développer des filières d'avenir taillées pour la compétition internationale et capables d’y conquérir de nouveaux marchés. C’est une chance de créer des emplois non délocalisables, d'alléger la facture énergétique des ménages qui y gagneront du pouvoir d'achat, et de mieux protéger la santé publique.

Je vous le dis comme je le pense : la croissance verte dans laquelle ce projet de loi vise à engager la France est le levier de sortie de crise le plus efficace et le plus rapide si toutes les forces vives du pays – citoyens, entreprises, territoires – se mobilisent ensemble, notamment pour déclencher rapidement des commandes dans les métiers des travaux publics et du bâtiment.

À plusieurs reprises depuis un siècle, les grands choix énergétiques de la France ont été les moteurs de sa modernisation qu'ont scandés quelques grandes lois fondatrices. Ce fut le cas en 1919 pour réparer les ravages de la première guerre mondiale, avec la loi sur l'énergie hydraulique, cette houille blanche comme on disait alors, qui reste aujourd'hui encore la première de nos énergies renouvelables.

Ce fut le cas à la Libération quand le pays était à reconstruire au sortir de la deuxième guerre mondiale : le Conseil national de la Résistance avait fait de l'énergie la clef d'un nouveau développement économique et du rétablissement de notre souveraineté nationale. Les lois de 1946 en prirent les moyens, dans le contexte de l'époque, en créant de puissantes entreprises nationales pour le charbon, le gaz et l'électricité.

Plus tard, quand le premier choc pétrolier révéla la vulnérabilité découlant de notre dépendance aux énergies fossiles, la France lança un programme nucléaire d'une rapidité et d'une ampleur inégalées dans le monde mais sans que, cette fois-là, le Parlement ne soit appelé à se prononcer.

Si différentes que soient les circonstances du temps présent, les opportunités qu'elles offrent et les choix qu'elles appellent, une chose est sûre : le volontarisme énergétique est nécessaire pour que la France redéfinisse, avec vous qui représentez la souveraineté nationale, son nouveau modèle énergétique.

Durant les dernières décennies, le Parlement a souvent légiféré sur les questions d'énergie – votre président a d’ailleurs été à l’origine de nombreux textes – et il a de plus en plus intégré, au-delà de ces constantes que sont la sécurisation de nos approvisionnements et la couverture de nos besoins, la dimension environnementale qui en est désormais indissociable en même temps qu'elle représente un formidable gisement d'activités nouvelles et d'emplois durables.

Permettez-moi, avant de vous présenter les grands axes de ce texte, de saluer le travail de tous mes prédécesseurs, quelle que soit leur sensibilité politique, car je crois qu’il s’agit d’un travail au long cours.

Je tiens à souligner que le projet dont vous êtes saisis s'est très directement inspiré de nombreuses expériences réussies dont les territoires ont pris l'initiative et que la loi va permettre, par les simplifications et les moyens opérationnels qu'elle met en place, d'étendre à tout le pays. Vous qui êtes des élus de terrain, vous savez que les territoires sont souvent en avance sur les modèles nationaux. Je me suis inspirée de ces réalisations d’avant-garde en les intégrant dans le projet de loi afin de permettre leur généralisation.

Ce texte est aussi l'aboutissement d'un dialogue renforcé avec tous les acteurs de la mutation énergétique et de la croissance verte : les associations, les entreprises, les scientifiques, les élus locaux et régionaux, les organismes consultatifs et, bien évidemment, les parlementaires qui ont déjà effectué de nombreux travaux.

Je suis très attachée à l'établissement de diagnostics partagés et à une démarche de co-construction de la loi qui permet de confronter et de rapprocher les points de vue, qui privilégie, sans gommer les différences d'approche et dans le respect de chacun, ce qui permet de fédérer, de coopérer, de se mettre ensemble en mouvement au service de nos concitoyens.

Le projet de loi a également intégré des recommandations du Conseil national de la transition écologique concernant, par exemple, la part des véhicules propres dans le parc automobile de l'État et de ses établissements publics, et a fixé un objectif intermédiaire d'efficacité énergétique en 2030. Puis, après mon audition par le Conseil économique, social et environnemental, j’ai ajouté l’objectif de division par quatre de nos émissions de gaz à effet de serre en 2050, le fameux « facteur 4 » recommandé par Jean Jouzel, et j’ai renforcé la lutte contre la précarité énergétique.

Cinq mois de travail intense avec toutes les parties prenantes ont nourri le texte dont vous êtes saisis. Au terme d’une assemblée générale qui a duré plus de dix heures, le Conseil d'État a validé beaucoup des innovations conceptuelles et pratiques de ce projet.

Nous en arrivons à l’étape la plus importante : le moment où la représentation populaire va s’exprimer et se saisir de ce texte. La co-construction étant vitale, je serai vigilante et attentive à toutes les améliorations que vous pourrez apporter à ce dispositif législatif et à ce nouveau modèle énergétique.

Je n'évoquerai que brièvement les principaux axes du texte qui vous est soumis, m’en tenant aux grands principes, puisque nous aurons l'occasion de les détailler à la faveur de l'examen des amendements.

Le premier axe fixe un cap, une ambition de long terme et des objectifs intermédiaires qui donnent un horizon stable pour agir dès maintenant. Premièrement, il s’agit de réduire de moitié notre consommation d'énergie à l'horizon 2050 par rapport à 2012, de baisser la consommation d'énergies fossiles de 30 % et de porter le rythme annuel de baisse de l'intensité à 2,5 % d'ici à 2030. Deuxièmement, nous voulons réduire de 40 % nos émissions de gaz à effet de serre en 2030 et les diviser par quatre en 2050 par rapport à 1990. Troisièmement, nous prévoyons de rééquilibrer et de diversifier notre modèle énergétique en portant la part des énergies renouvelables au tiers de l'énergie produite en 2030 et en fixant la part du nucléaire à 50 % à l'horizon 2025.

Le deuxième axe porte sur l’efficacité énergétique dans tous les secteurs, en particulier celui du bâtiment. Le grand chantier de la rénovation énergétique des bâtiments est source de créations d'emplois dans un secteur fragilisé et de pouvoir d'achat pour les ménages : dans un logement bien isolé, les factures baissent. Il s’attache aussi à la promotion des bâtiments à énergie positive ou à l'amélioration de la performance énergétique des bâtiments chaque fois que d'importants travaux de transformation sont réalisés. Il traite également du développement des transports propres – véhicules individuels et transports collectifs électriques ou hybrides rechargeables –, du déploiement sur tout le territoire des bornes de recharge, de la réduction des émissions de gaz à effet de serre dans la grande distribution, du développement du covoiturage, etc.

Dans ce domaine de l’efficacité énergétique, nous abordons le développement de territoires « zéro déchets » et l'économie circulaire, avec l’écoconception des produits et la transformation des déchets en matières premières afin d’économiser les ressources en général et l'énergie en particulier. Le texte généralise l'interdiction de la discrimination à l'encontre des matières issues du recyclage et fixe un objectif de réduction de 50 % des quantités de déchets mis en décharge à l'horizon 2025.

Troisième axe : la montée en puissance des énergies renouvelables, terrestres et maritimes dans l'Hexagone ainsi que dans les Outre-mer où elles permettent une autonomie énergétique adaptée à l'insularité et à la situation des zones non interconnectées.

Toutes les ressources de nos territoires – l’hydraulique, l’éolien, le solaire, la biomasse, la géothermie ou les énergies marines – doivent être valorisées pour réaliser à court terme 200 territoires à énergie positive et 1 500 méthaniseurs en milieu rural, afin de développer des filières industrielles innovantes et compétitives et de mobiliser tous les territoires dans le cadre des contrats locaux de la transition énergétique.

Cela suppose une simplification des procédures, un encouragement du financement participatif, une rénovation du cadre législatif de l’hydroélectricité grâce à la création de sociétés d'économie mixte qui permettront de mieux associer les collectivités territoriales à la gestion des concessions et de renforcer le contrôle public sur ce patrimoine commun des Français. Enfin, il est nécessaire de moderniser le soutien financier au développement des énergies renouvelables afin d'accélérer le mouvement et de changer d'échelle.

Quatrième axe : le texte permet au Parlement de jouer pleinement son rôle en matière de définition et de conduite de notre politique énergétique. Il renforce la transparence et l'information des citoyens sur les coûts et les tarifs de l'énergie ainsi que sur la sûreté nucléaire ; il met en place les conditions d'une nouvelle citoyenneté énergétique ; il prévoit le déploiement des compteurs intelligents ; il va fournir aux citoyens de nouveaux outils de connaissance, de maîtrise et de pilotage de leurs consommations énergétique.

Ce texte définit aussi un mix énergétique équilibré et met en place les moyens de l’atteindre. Il crée de nouveaux instruments de planification à l'échelle nationale et locale : stratégie bas carbone, programmation pluriannuelle de l'énergie.

Enfin, il reconnaît la spécificité et le potentiel des Outre-mer qui sont autant d'atouts pour que les territoires ultramarins deviennent des précurseurs de la transition énergétique et puissent innover grâce aux habilitations données par le projet de loi. C'est là une dimension importante du changement de modèle dont la croissance verte est le moteur : pour les Outre-mer, il ne s'agit plus de rattraper mais, au contraire, d’anticiper et même de devancer cette transition énergétique.

Le projet de loi qui vous est soumis comporte plusieurs innovations que nous examinerons en détail : la consécration, pour la première fois dans notre droit positif ainsi que l'a validé le Conseil d'État, des notions de croissance verte, de territoires à énergie positive et d'économie circulaire ; la possibilité d’expérimentations dans les domaines des boucles locales, de la production décentralisée d'énergie ou de l'autoconsommation.

Ce texte comporte donc bien des mesures qui sont des leviers d'innovation technologique, de dynamisation de notre tissu industriel et de création d'emplois non délocalisables qui impliquent une montée en qualification et des plans de formation professionnelle. Il assure aussi la compétitivité des entreprises électro-intensives. Il est facteur de solidarité avec le remplacement des tarifs sociaux par un chèque énergie plus efficace, plus juste et bénéficiant à toutes les sources d'énergie.

Au lieu de contraindre ou d’accabler par des normes supplémentaires, il fait le choix d'entraîner et de mobiliser, de donner à chaque acteur potentiel de la croissance verte les moyens de s’impliquer et de coopérer avec d’autres.

Il est accompagné de moyens financiers adaptés et accessibles à tous : le crédit d'impôt transition énergétique – 30 % du montant des travaux jusqu'à 8 000 euros pour une personne seule et 16 000 euros pour un couple – dont la création vous sera soumise dans le cadre du projet de loi de finances ; la relance des prêts à taux zéro – 100 000 prêts devraient être octroyés – dès lors que les banques ont été déchargées, par un décret que j’ai signé récemment, de leur rôle de contrôle technique qui en limitait l'octroi ; les prêts « transition énergétique et croissance verte » de la Caisse des dépôts pour financer les projets des collectivités territoriales à un taux très avantageux, remboursables sur vingt à quarante ans et qui pourront atteindre jusqu'à 5 millions d'euros de travaux par opération sans autofinancement initial ; des interventions de la Banque publique d’investissement et de la Banque européenne d'investissement ; dans le cadre des contrats de plan État-régions, le financement par l'État du volet mobilité multimodale puisque le Gouvernement s’est engagé à débloquer 950 millions d'euros par an sur la période 2015-2020, ce qui permettra avec le cofinancement des régions, un total de travaux de 3 milliards d'euros pour nos entreprises de travaux publics.

Certaines de ces dispositions viennent d'être mises en place dans le cadre des plans d'action que j'ai lancés pour accélérer dès maintenant le tournant vers la croissance verte. D'autres sont en cours de finalisation dans le cadre de la Conférence bancaire et financière : le mécanisme de tiers financement ; la création d'un Fonds de financement de la transition énergétique, doté de 1,5 milliard d'euros, pour soutenir notamment la conversion des véhicules polluants ainsi que le développement de la méthanisation, de la chaleur renouvelable, de l'économie circulaire et des travaux d’isolation sur les bâtiments à énergie positive.

Toutes ces décisions visent à lever les freins et à libérer des initiatives économiques pour atteindre les objectifs que fixera la loi.

Je voudrais, pour conclure, souligner deux points essentiels. Le texte que vous allez examiner fait le choix de ne pas opposer les énergies les unes aux autres mais il organise leur complémentarité dans la perspective dynamique d'un nouvel équilibre énergétique qui comprend des objectifs à court, moyen et long termes. C'est ainsi, je le crois, que nous pourrons engager le pays dans cette mutation irréversible. C’est le moment de le faire avec détermination car les esprits et les mentalités ont beaucoup évolué.

La France a les moyens d’être exemplaire sur le plan de l’efficacité énergétique et, de ce fait, de reprendre son avenir en main. Cette politique par la preuve est prête à se développer à l'échelle du pays et dans chacun des territoires dont vous êtes les élus. D’ailleurs, certains territoires sont déjà engagés dans cette transition énergétique et ont déjà réalisé beaucoup de choses.

Quelles que soient les différences de nos mix énergétiques au niveau européen, qui résultent de l'histoire particulière de chaque pays, nous devons être une force d'entraînement en investissant dans l'efficacité énergétique, dans la constitution de filières d'excellence bas carbone, dans les réseaux intelligents, dans le stockage de l'énergie, dans l'électro-mobilité, dans les biocarburants de deuxième génération, dans les villes « zéro déchets », etc. Le champ d’innovation et d’action est aussi vaste que passionnant.

La France peut se doter de la législation la plus avancée en Europe car, à ce jour, la seule à intégrer toutes les dimensions de la transition énergétique et de la croissance verte. Elle sera ainsi mieux à même d'assumer les responsabilités internationales qui lui incombent en tant que pays hôte de la conférence Paris Climat 2015.

Dans les territoires dont vous êtes les élus, vous pouvez observer que le mouvement est lancé. Il mobilise de nouvelles compétences et de nouveaux savoir-faire. Les entreprises, quelle que soit leur taille, attendent que le Parlement donne le coup d’envoi de cette transition énergétique qui donnera du travail. À vous, mesdames et messieurs les députés, de donner le signal, de fixer le cadre et d’enrichir le projet de loi que j’ai le plaisir de vous présenter pour déployer des actions concrètes au bénéfice de tous les Français. Dans vos circonscriptions, vous pouvez être à l’avant-garde de ce mouvement et devenir rapidement créateurs des emplois d’aujourd’hui et de demain.

J'ai travaillé avec beaucoup d'entre vous pour la préparation de ce texte et je vous remercie de votre engagement. Je suis et je resterai à votre écoute, convaincue que nous pouvons encore améliorer ce projet de loi et faire en sorte que sa discussion donne lieu à un beau débat de société qui dépasse les clivages politiques, à la fois dans le cadre de votre Commission et en séance publique.

Je souhaite qu'à l'issue de vos travaux nous puissions avoir la fierté de l'œuvre législative accomplie et la conviction d'avoir donné au pays une avance majeure, les moyens de relever les défis énergétiques, écologiques et de santé publique et de créer les emplois d'aujourd'hui et de demain.

M. le président François Brottes. Merci, madame la ministre, pour la concision et la force de ce propos liminaire. Une fois que les représentants des groupes et les rapporteurs se seront exprimés, je donnerai la parole aux inscrits qui sont, pour l’instant, au nombre de quarante et un.

M. Christophe Bouillon. Tout d’abord, je souhaite féliciter l’ensemble des architectes de ce projet de loi relatif à la transition énergétique, en commençant par les collègues qui nous ont précédés et sous l’égide desquels ce projet de loi a été initié.

Je souhaite aussi saluer les parties prenantes qui se sont investies dans le débat national sur la transition énergétique : les entreprises, les collectivités, les associations et les parlementaires mais aussi les citoyens qui se sont saisis du débat, notamment dans les régions.

Votre volonté et votre détermination viennent de loin, d’une époque où les architectes n’étaient pas légion. Le projet de loi que vous nous présentez aujourd’hui est l’un de ceux qui marqueront, à coup sûr, la législature : ambitieux mais réaliste, il fera de la France l’un des pays les plus engagés dans la voie de la transition énergétique pour une croissance verte. Il fait rimer protection de l’environnement et développement de l’emploi non délocalisable. Il permet de lutter à la fois contre le réchauffement climatique et la précarité énergétique ; il préservera notre planète comme le pouvoir d’achat des Français ; il est bon pour l’environnement, pour l’emploi et le porte-monnaie.

Sa présentation intervient dans le contexte particulier que vous avez rappelé : la France est actuellement trop dépendante des énergies fossiles qui représentent 70 % de notre consommation finale, ce qui engendre un déficit de notre facture énergétique de 70 milliards d’euros, imputable pour les trois quarts aux produits pétroliers. Fortement importatrice, la France ne maîtrise ni l’évolution des prix ni la sécurité d’approvisionnement. Les énergies fossiles rejettent massivement les gaz à effet de serre et, par ailleurs, les ressources fossiles ne sont pas infinies.

La France s’est donné des objectifs très ambitieux en matière de réduction de ces émissions de gaz à effet de serre, et elle a pris des engagements aux niveaux européen et international. Le Président de la République a également pris des engagements forts lors des conférences environnementales de 2013 et 2014 dans les domaines de la rénovation thermique, des énergies renouvelables et des transports, qui ont été rappelés par le Premier ministre lors de sa déclaration de politique générale. L’an prochain, la conférence sur le climat aura lieu à Paris, ce qui permettra à la France, souhaitons-le, d’être exemplaire en la matière.

Avec ce texte qui fixe des objectifs et des mesures clefs, la France souhaite devenir un pays d’excellence environnementale et énergétique. Il s’agit d’économiser l’énergie, de favoriser la sobriété et l’efficacité, de diversifier les sources d’approvisionnement et les modes de production d’électricité, d’associer les citoyens, les entreprises et les territoires, de faire une large place à la recherche et à l’innovation, d’assurer la transparence et l’information de tous, notamment sur le coût de l’énergie, et de développer la recherche dans les réseaux intelligents, le stockage et l’hydrogène. Ce sont autant de leviers essentiels sur lesquels la France peut s’appuyer pour atteindre ses objectifs.

Madame la ministre, je voudrais recueillir votre opinion sur deux sujets qui me tiennent particulièrement à cœur : le mécanisme de tiers financement et l’économie circulaire.

Le mécanisme de tiers financement étant un formidable levier pour la rénovation énergétique des bâtiments, que pensez-vous de la possibilité de création de sociétés d’économie mixte, permettant d’associer plusieurs collectivités locales autour de ces objectifs ? Le cas échéant, souhaiteriez-vous que leur gouvernance permette un équilibre géographique dans la répartition des financements, afin de ne pas laisser de côté le monde rural et périurbain s’agissant de la rénovation thermique ?

Quant à l’économie circulaire, sa définition dans la loi représente une véritable avancée, de même que la réaffirmation du principe de traitement des déchets au plus près de leur lieu de production est une très bonne chose. Avec ces dispositions nous rejoignons des pays comme l’Allemagne, le Japon ou la Chine qui ont déjà adopté des lois-cadres sur l’économie circulaire. Le projet de loi traite essentiellement de la question des déchets. Aussi, madame la ministre, souhaitais-je avoir votre vision du développement de l’économie de fonctionnalité qui est a prouvé, notamment par le biais des services de location de vélos ou de véhicules électriques, toute son attractivité.

M. Julien Aubert. Madame la ministre, vous nous présentez enfin ce texte sur la transition énergétique sur lequel ont travaillé plusieurs de vos prédécesseurs, qui a été intitulé de diverses manières et fait l’objet de plusieurs versions. En introduction, au nom du groupe UMP, je voudrais signaler que la longueur de sa préparation contraste avec les mauvaises conditions dans lesquelles le Parlement va l’examiner : procédure accélérée, délais très courts pour effectuer les auditions en Commission spéciale. Comme nous attendions ce texte depuis plusieurs mois, nous n’en étions plus à une semaine près car il faut prendre le temps d’en discuter sereinement.

Vous affichez votre souhait d’une démarche de co-construction, ce que je comprends. Nous avons deux possibilités : un débat politicien clanique opposant la droite à la gauche qui s’achèvera par la victoire politique d’une majorité sur une minorité et par un texte qui sera le reflet de vos équilibres internes mais ne répondra pas à l’intérêt du pays ; la volonté de trouver un consensus dans l’intérêt de la France et des Français.

Pour vous prendre au mot, madame la ministre, l’UMP a sérieusement préparé ce texte. Notre groupe a longuement travaillé dans le cadre d’un autre débat sur la transition énergétique qui a réuni, pendant près de six mois, une centaine de participants venus de tous les secteurs économiques, des associations, des think tanks, pour arriver à un corpus idéologique qui vous est transmis sous la forme d’une synthèse d’une cinquantaine de pages où sont formulées une dizaine de propositions.

Si vous souhaitez le consensus, nous avons trouvé dans votre texte des points de rapprochement, ce dont nous nous réjouissons, mais aussi des lacunes et des divergences. Je souhaitais appeler votre attention sur quelques-unes de nos propositions qui vise à dégager une véritable stratégie énergétique alors que ce texte embrasse beaucoup de choses puisqu’il prévoit aussi bien le pourcentage d’énergie nucléaire dans la production énergétique en France que l’instauration d’amendes pour le retrait des filtres à particules.

Premièrement, nous proposons d’inclure dans la loi un objectif contraignant : zéro charbon dans cinq ans, c'est-à-dire interdire le recours à l’énergie rouge, la plus polluante avant 2020. Le mot hydrocarbure apparaît trop peu dans ce texte, madame la ministre. Quel est votre avis sur cet objectif ?

Notre deuxième proposition porte sur un point majeur de désaccord : la capacité nucléaire de la France. Vous faites une erreur magistrale en voulant limiter la capacité nucléaire de la France, comme le démontre l’exemple allemand. En optant pour les énergies vertes et la limitation du nucléaire, l’Allemagne a obtenu l’inverse de l’effet recherché, c'est-à-dire une augmentation des émissions de CO2. Par conséquent, nous proposons d’acter la stabilité du potentiel de nos filières d’exportation d’énergie nucléaire, afin de conserver un atout majeur dans la mondialisation : la capacité de la France d’exporter son savoir-faire.

Troisièmement, nous voulons dépasser la guerre du schiste, en distinguant gaz de schiste et pétrole de schiste pour faire de ce dernier une énergie de transition potentielle. Le Parlement peut décider d’exploiter le pétrole de schiste avec des moyens respectant l’environnement et d’en reverser intégralement le revenu à un fonds pour les énergies vertes, de manière à financer la transition énergétique.

Quatrièmement, dans l’habitat où la consommation d’énergies fossiles reste importante, l’idée serait de coupler les mécanismes d’incitation fiscale – un bonus énergétique sur la taxe foncière – avec un système crédible et neutre de diagnostic énergétique – un service public labellisé et rattaché au ministère des finances, par exemple – de manière à simplifier le choix des citoyens et à alléger le contrôle fiscal.

Cinquièmement, nous proposons de réorganiser en la simplifiant la gouvernance publique de la transition énergétique en créant un Commissariat à la transition énergétique rattaché au Premier ministre et en désignant, dans chaque département, un sous-préfet qui serait l’interlocuteur du secteur.

Outre ces cinq propositions, nous vous soumettons une question portant sur le financement des mesures, grand absent de ce texte : comment allez-vous lever des fonds pour financer cette transition énergétique ?

M. Bertrand Pancher. Madame la ministre, vous avez beaucoup de chance que les parlementaires du groupe UDI ne s’en tiennent pas à une position politicienne et ne décident pas de rejeter ce texte en bloc tant ils sont en colère depuis des mois face à l’absence de politique environnementale du Gouvernement.

Tous les piliers de l’économie verte ont été minutieusement sapés au cours des dernières années. Dans le secteur de l’habitat, grand consommateur d’énergie, seulement 160 000 logements anciens sont en cours de rénovation alors que le Président de la République, avec le soutien de toutes les grandes organisations environnementales, s’était engagé sur un chiffre d’au moins 500 000 par an. Dans le domaine des transports, nous ne construisons pratiquement plus aucune infrastructure nouvelle et les appels à projet sont repoussés faute de financement. Quant aux énergies renouvelables, elles ont longtemps suscité des débats animés dans cette salle mais nous constatons peu de construction d’éoliennes et un retard de tous les projets. Ne parlons pas du photovoltaïque qui se résume à néant.

Pourquoi avez-vous fait cela alors que tous les acteurs du Grenelle de l’environnement vous tendaient sur un plateau les méthodes de mise en œuvre des stratégies en matière d’économie verte ? Il est vrai que vous commencez à vous rendre compte de l’intérêt de soutenir certaines démarches – le plan logement qui est engagé n’est pas dénué de bon sens – mais que de retard ! Dans le domaine des transports, vos positions sont incompréhensibles, madame la ministre, plus que celles du Gouvernement. À défaut de pouvoir tenir le pourcentage de 23 % d’énergies renouvelables en 2020, vous vous engagez sur de grands objectifs pour 2030, 2040 ou 2050. C’est bien, mais nous souhaitions déjà savoir comment nous pouvions atteindre nos objectifs de court terme.

Notre colère est aussi due aux conditions d’examen de ce texte. Nous n’avons jamais vu cela ! Il est urgent d’examiner ce texte, prétendez-vous, alors que le Président de la République l’annonçait il y a déjà plus de deux ans. Nous devions analyser ce projet et vous nous présentez, dans le courant du mois d’août, un texte dont les versions ont continuellement changé. Nous n’aurons même pas le temps d’auditionner toutes les organisations environnementales. L’une d’elles vient de me soumettre plein d’idées intéressantes qu’elle n’a pas le temps de présenter sous forme d’amendement. Nous n’en avons pas le temps non plus puisque nous devons examiner le projet dans quelques jours.

Nous allons quand même travailler sérieusement sur ce texte qui contient des propositions intelligentes, issues notamment de la société civile. Avait-on besoin d’une nouvelle loi ? Pourquoi pas. Nous ferons part de nos réflexions dans le courant des débats sur certains domaines et sur des objectifs d’autant plus généreux qu’ils sont fixés à long terme. Les objectifs en matière de rénovation thermique sont certes intéressants, mais que de yo-yo sur le plan fiscal, sans parler d’être sûrs d’obtenir les moyens promis. Nous avons été tellement échaudés, madame la ministre ! Nous reviendrons aussi sur les objectifs intéressants concernant l’économie circulaire et sur les dangers des énergies renouvelables.

Je vous soumets quatre questions. Est-il possible de tenir les objectifs intermédiaires ? Comment avoir des garanties de pérennité financière ? Quels sont les objectifs en termes de fiscalité carbone ? Mes amis d’outre-mer ici présents m’en voudraient de ne pas parler la contribution au service public de l'électricité, et des mécanismes prévus pour les DOM-TOM.

Mme Cécile Duflot. Pour le groupe écologiste, l’examen de cette loi est un moment très important. Dans notre pays, les questions d’énergie ont trop longtemps été privatisées alors qu’elles supposent des choix démocratiques, ce qui nous a fait prendre du retard. Grâce aux débats conduits par vos prédécesseurs, dont Delphine Batho ici présente que je salue, l’opinion a pu prendre conscience de cet enjeu de la transition énergétique.

Nous serons attentifs au travail sur ce texte, tout en étant les premiers soutiens d’une loi innovante et marquant la volonté d’organiser cette transition énergétique dans notre pays. Si l’énergie est une richesse, elle est aussi pour tous nos concitoyens un bien de première nécessité dont le coût s’accroît avec la raréfaction des ressources. La précarité énergétique touche de plus en plus de ménages français : d’une part, il est difficile d’évaluer le nombre de personnes qui ne vivent pas dans le confort qu’ils pourraient souhaiter du fait du coût de l’énergie ; d’autre part, se pose la question des transports, de l’éloignement des lieux de travail et de domicile.

L’accès de tous à l’énergie dans des conditions socialement et économiquement acceptables représente un élément décisif de notre analyse du projet de loi, qui va bien au-delà de la seule dimension environnementale même si celle-ci est essentielle. Comme en témoigne le rapport de M. Jouzel sur les conséquences du dérèglement climatique sur l’ensemble du territoire français, madame la ministre, cette question de la préservation des ressources naturelles, de l’adaptation aux dérèglements et de la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre est absolument centrale.

Certaines dispositions comme le chèque énergie et les alternatives en matière de transport sont très intéressantes, mais je voudrais rappeler les positions du groupe écologiste sur les grandes questions énergétiques. Alors que la France était pionnière dans le domaine de l’énergie solaire dans les années 1970, il a été décidé, sans débat, d’abandonner ce développement pour faire le choix exclusif du nucléaire.

Votre projet de loi prévoit de réduire à 50 % la part du nucléaire dans la production d’énergie électrique mais nous devons aller plus loin et opter de manière résolue en faveur des énergies de l’avenir : les énergies renouvelables. Les écologistes plaident pour la sortie du nucléaire qui s’imposera de toute façon en raison d’une raréfaction de la ressource et du renchérissement du coût d’exploitation des centrales. Nous voulons anticiper pour que la France ne prenne pas de retard dans le développement des énergies renouvelables. C’est pourquoi, au-delà du projet de loi auquel nous accorderons toute notre attention, l’investissement en France et en Europe nous apparaît comme un enjeu décisif.

Madame la ministre, vous pourrez compter sur l’énergie, l’enthousiasme et la détermination du groupe écologiste pour que ce projet de loi porte une ambition collective et démocratique : conduire notre pays vers l’avenir.

M. le président François Brottes. Permettez-moi d’avoir une petite pensée pour l’hydraulique qui a aussi donné lieu à de grands chantiers durant les années 1970.

M. Joël Giraud. Madame la ministre, j’ai également apprécié ces neuf mois de débat au sein du Conseil national de la transition écologique, créé en août 2013. Ce travail entre des gens aux positions parfois antagonistes a pu engendrer des débats douloureux et polémiques, mais la participation des acteurs socioprofessionnels et des corps intermédiaires peut permettre d’aboutir à un projet de loi efficace et pragmatique.

Le groupe RRDP approuve les grandes lignes du projet de loi sur le nucléaire et la décarbonation de l’énergie ainsi que l’adoption de mesures concrètes pour faire face aux changements climatiques et à la réduction de la facture énergétique. Mais si tous ces objectifs chiffrés sont ambitieux, volontaristes et nécessaires, notre expérience nous incite à faire preuve d’une certaine méfiance s’agissant des horizons de long, moyen et même de court terme.

Comment allons-nous surveiller concrètement les évolutions et comment pourrons-nous ajuster les mesures pour se rapprocher des trajectoires prévues ? Nous devons améliorer le texte sur ce point et travailler, par exemple, sur la collecte des données.

D’autres sujets méritent des précisions et des améliorations. Nous sommes heureux de l’inscription dans la loi du concept de territoires à énergie positive et nous voulons encourager toutes les initiatives en ce sens. Cependant, les mesures prévues nous semblent insuffisantes pour se traduire par un grand succès sur le terrain.

La rénovation des bâtiments en vue d’économiser l’énergie suppose des moyens colossaux alors que les contraintes financières devraient nous inciter à un peu de prudence. Cela étant, l’enjeu est d’importance, notamment en ce qui concerne les logements sociaux et l’immobilier de loisir qui sont de magnifiques passoires énergétiques dont les locataires s’appauvrissent car l’énergie ne fait pas partie de l’assiette de calcul de l’allocation personnalisée au logement.

S’agissant des réseaux de chaleur et du code minier pour la géothermie, des ajustements sont nécessaires si nous décidons d’accélérer le mouvement. Nous vous proposerons également des amendements visant à améliorer la situation de la sûreté nucléaire et de la micro-hydroélectricité ou encore sur les fournisseurs d’électricité coopératifs. Partisans d’une réelle décentralisation, nous souhaitons aussi que le texte soit amélioré pour accompagner le mouvement de réforme territoriale, du moins tel que nous le concevons. Nos débats nous donnerons également l’occasion d’approfondir de nombreux sujets qui sont absents ou peu évoqués : l’aménagement urbain, le transport, l’agriculture.

Permettez-moi de dire un mot sur la sobriété énergétique, un enjeu important. Certaines collectivités, de tous bords politiques, tentent des expériences intéressantes en créant des opérateurs qui permettent de réduire leur facture énergétique ou en décidant, par exemple, d’éteindre l’éclairage la nuit. Il serait bon de les encourager dans cette voie par le biais de la dotation globale de fonctionnement. Après tout, une part de la DGF ne dépend-elle pas des aménités positives apportées à la nation par les parcs nationaux ? Cette mesure créée par la loi de 2006 produit de grands bénéfices et nous pourrions nous en inspirer pour les aménités positives offertes par les collectivités territoriales dans ces domaines.

Pour conclure, madame la ministre, nous sommes très satisfaits de nombreux points de ce projet de loi et vous pouvez compter sur nous pour le faire évoluer dans le bon sens.

M. Patrice Carvalho. Tout d'abord, je veux saluer ce projet de loi et les intentions qu'il affiche. Il s'agit, nous dit-on, de construire un nouveau modèle énergétique plus diversifié, plus équilibré, plus sûr et plus participatif, avec l’objectif d’assurer une croissance capable de lutter contre le réchauffement climatique, de combattre le chômage et de réduire la facture énergétique de notre pays. Cette ambition est soutenue par des mesures concrètes. Très bien.

Plutôt que d’énumérer nos points d'accord, je vais vous faire part de nos interrogations et de nos doutes. Sous le précédent quinquennat, nous avons connu le Grenelle de l'environnement qui, aux dires de celui qui occupait vos fonctions à l’époque, devait être une révolution copernicienne. Tout cela n'a pas été inutile et a notamment contribué à une prise de conscience mais la montagne a tout de même accouché d'une souris. Je ne voudrais pas, madame la ministre, que votre texte connaisse un sort similaire.

Depuis deux ans, le Président de la République présente ce projet de loi comme l’un des plus importants du quinquennat. C'est sans doute vrai puisqu’il a déjà épuisé trois ministres de l'écologie en vingt-quatre mois. Pour l'heure, je m’en tiens à quelques aspects qui m'interrogent. L'objectif est volontariste : créer 100 000 emplois en trois ans grâce à l'établissement d'une croissance qui lutte contre le réchauffement climatique, combat le chômage et réduit la fracture énergétique.

Où se trouvent donc ces réserves d'emplois ? Dans la filière des énergies renouvelables, répondez-vous. Celles-ci doivent prendre le relais du nucléaire dont la part dans le mix énergétique doit passer de 75 % à 50 % d'ici à 2025, conformément à l'engagement de François Hollande et à ses promesses aux écologistes.

Ces intentions sont illusoires comme le démontrent les premières expériences de développement des énergies renouvelables et l'exemple de l’Allemagne où la fermeture des centrales nucléaires et la fragilité et l’imprévisibilité des énergies renouvelables ont conduit à rouvrir des centrales à charbon. Le nucléaire représente 220 000 emplois. Qu'en faisons-nous, si l'activité décroît ?

Autre grand gisement d’emplois : le bâtiment où 500 000 rénovations lourdes sont prévues tous les ans d'ici à 2017. Ce plan est souhaitable mais très ambitieux car les objectifs fixés ne sont jamais atteints. Le débat parlementaire sera l'occasion d'évoquer le financement de ce vaste chantier.

Le texte législatif entend aussi préparer la reconversion verte de l'industrie automobile française grâce à la voiture électrique, ce qui complète les trente-quatre plans annoncés par Arnaud Montebourg et qui dessine la nouvelle France industrielle. Que vont devenir à présent ces intentions ? Tout cela est fort louable mais il ne sert à rien d'aligner les promesses si l'on ne voit pas comment les réaliser.

Une volonté politique forte sera nécessaire pour adapter notre appareil productif à la transition écologique et pour affronter des lobbies autrement plus puissants que celui auquel le Gouvernement a cédé concernant l’écotaxe. Cela ne passera pas par les 41 milliards d’euros offerts au patronat sans contrepartie notamment écologique – le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi et pacte de responsabilité – mais, selon l'Observatoire français des conjonctures économiques, par 16 milliards d’euros d'investissements annuels à consentir par l'État et les entreprises.

Enfin, citons les grands absents de ce projet de loi : les alternatives au « tout routier » que sont le fret ferroviaire et les voies d'eau, le développement des transports publics, l'agriculture, la fiscalité écologique.

Madame la ministre, nous sommes ouverts au débat mais nous pensons qu'une transition écologique réussie passe par un autre mode de développement économique que celui auquel le Gouvernement Valls 2 s'est résolument converti.

Mme Marie-Noëlle Battistel, rapporteure pour les titres Ier et V. Ce texte ambitieux vise à réduire nos émissions de gaz à effet de serre et notre consommation finale d’énergie fossile d’ici à 2050, et à développer la production d’énergies renouvelables tout en réduisant la part du nucléaire. Le titre Ier actualise les objectifs assignés à la politique énergétique nationale, notamment quant à l’ambition de voir émerger une énergie sobre, compétitive et riche en emplois ; il donne une nouvelle impulsion à notre politique énergétique, dans la continuité de la loi de 2005. L’article 23 vise un sujet majeur, l’intégration des énergies renouvelables dans le marché de l’électricité. Nous aurons l’occasion, madame la ministre, d’apporter des réponses aux questions que pose ce changement de modèle, qu’il s’agisse des mécanismes à mettre en place ou de la manière d’associer les petits acteurs.

Je tiens aussi à souligner les avancées permises par l’article 27, qui encourage le financement participatif des projets d’énergie renouvelable par les habitants et les collectivités. De fait, l’adhésion de la population est indispensable à l’atteinte des objectifs en la matière.

Enfin, vous connaissez mon intérêt pour la première des énergies renouvelables, l’hydraulique. Je compte sur les débats parlementaires et sur nos échanges avec votre cabinet pour enrichir le texte en ce domaine. J’espère notamment que les préconisations du rapport que j’ai présenté avec M. Straumann pourront être retenues. L’hydroélectricité n’est pas sans lien avec le coût de l’électricité, lequel dépendra aussi des choix faits dans le cadre du renouvellement des concessions. Le prix de l’électricité est un enjeu, non seulement pour les particuliers, mais aussi pour la compétitivité des électro-intensifs et pour l’avenir de notre industrie. Je sais, madame la ministre, que vous aurez à cœur de vous pencher sur cette question.

Mme Sabine Buis, rapporteure pour les titres II et IV. Je vous remercie, madame la ministre, d’avoir insisté sur la valeur ajoutée que peut apporter la discussion parlementaire. J’ai l’honneur d’être rapporteure de deux titres du texte, à commencer par celui relatif à la rénovation des bâtiments, sujet qui, au-delà des objectifs fixés en matière de transition énergétique, est très attendu par les nombreux Français qui subissent la précarité énergétique comme la précarité professionnelle. De ce point de vue, je vous félicite d’avoir changé le titre du projet de loi afin d’y inclure une référence à la croissance verte : créatrice d’emplois, celle-ci désigne aussi, n’en déplaise à certains, un nouveau modèle de développement.

N’oublions pas, toutefois, que la précarité ne touche pas seulement nos concitoyens des zones urbaines, mais aussi ceux des zones rurales, dont je me fais l’écho en tant que députée de l’Ardèche. Sur ce point, le texte peut aller plus loin, notamment en approfondissant la notion de guichet unique de la rénovation, qui permet un accompagnement par les professionnels. Pourquoi ne pas imaginer une aide fiscale sur un bouquet de travaux plutôt que sur une action isolée ? Pourquoi, également, ne pas relancer la notion de service public régional de l’efficacité énergétique, qui avait été un temps envisagée ? Enfin, à travers le tiers financement et les dérogations au monopole bancaire, les régions peuvent apporter un réel soutien aux ménages en situation de précarité énergétique.

M. Philippe Plisson, rapporteur pour les titres III et VI. Permettez-moi, madame la ministre, d’exprimer toute ma satisfaction de voir arriver ce grand débat, dont on peut d’ailleurs espérer qu’il définisse une transition, non seulement énergétique, mais aussi écologique. Je me félicite également que notre demande pressante quant à la création d’une commission spéciale ait été acceptée : un texte comme celui-ci mérite en effet la mobilisation transversale de nos commissions. À plusieurs reprises, vous avez souligné que les parlementaires pourront l’enrichir ; pour ma part, j’ai créé un groupe de travail au sein du Conseil national de la transition énergétique, le CNTE, où je suis l’un des représentants de l’Assemblée nationale. Ce travail préalable me permettra de vous faire des propositions, notamment sur le titre III, qu’il s’agisse du transport des marchandises, du transport fluvial, du covoiturage ou du schéma de transport et de déplacement durable pour les territoires ruraux, lesquels doivent avoir les mêmes chances et les mêmes droits que les métropoles. Je vous remercie par avance de l’accueil favorable que vous réserverez à ces propositions, afin de relever ensemble le pari d’un nouveau mode de développement.

M. le président François Brottes. La commission des affaires économiques a demandé à Mme Bareigts, à qui je vais donner la parole, et à M. Fasquelle, un rapport sur l’énergie dans les territoires d’outre-mer, qui montre que ceux-ci doivent faire l’objet d’une attention toute particulière.

Mme Éricka Bareigts, rapporteure pour le titre VII et le chapitre IV du titre VIII. Je salue, madame la ministre, votre vision stratégique pour les territoires d’outre-mer, dont les élus entendent faire valoir des atouts qui, d’ailleurs, peuvent apporter des solutions au problème de l’emploi.

La situation est assez contradictoire, puisque ces territoires demeurent très carbonés en dépit de fortes potentialités en termes d’énergie renouvelable. Il convient donc d’identifier les obstacles en ce domaine, afin de les lever pour mener à bien la transition énergétique et développer la croissance verte en outre-mer. J’en mentionnerai quelques-uns, à commencer par la gouvernance, que nous souhaitons partagée et locale. Par ailleurs, les appels d’offres gagneraient à être mieux adaptés aux stratégies, aux besoins et aux capacités du terrain. Il faut aussi se pencher sur les moyens liés aux stratégies de maîtrise de consommation d’énergie. Enfin, un choix stratégique devra être fait entre les énergies renouvelables intermittentes et les énergies renouvelables garanties. Nous espérons donc que le travail collectif qui va s’engager permettra de mener à bien cette grande ambition de la transition énergétique dans les outre-mer.

M. Denis Baupin, rapporteur pour le titre VIII. Le titre consacré à la gouvernance signe d’ores et déjà le retour des pouvoirs publics dans la politique de l’énergie, aux niveaux national et territorial. Les budgets carbone sont un signal important, en amont de la COP – « conference of the parties » – de 2015 à Paris, de la volonté française d’encadrer les émissions de gaz à effet de serre. Dans ce cadre, la question de la valeur tutélaire du carbone méritera sans doute d’être précisée.

L’autre outil national est bien entendu la programmation pluriannuelle de l’énergie ; elle remplacera les programmations actuelles, non coordonnées, et prendra en compte les objectifs de maîtrise de l’énergie. Nous aurons l’occasion de débattre des relations entre ces outils, de leurs calendriers, de la façon d’y associer le Parlement et de la concertation menée en amont. Le débat sur la transition énergétique a en effet montré que de nombreux acteurs pouvaient apporter des contributions importantes.

Sur la gouvernance du mix électrique, autre sujet très attendu, le texte organise aussi un salutaire retour de l’État stratège ; en ce domaine, la commission d’enquête sur les coûts de la filière nucléaire a adopté un certain nombre de recommandations dont nous pourrons nous inspirer.

Vous avez salué, madame la ministre, les nombreuses initiatives des territoires, auxquels ce projet de loi pourra donner une impulsion supplémentaire afin de permettre aux régions d’être réellement chefs de file et aux intercommunalités de devenir des autorités organisatrices.

Le dernier sujet, et pas le moindre, est la précarité énergétique, avec cette innovation qu’est le chèque énergie : largement attendu, il mérite des clarifications aussi bien au regard de son financement que de son utilisation, que ce soit pour payer les factures ou même les réduire.

M. le président François Brottes. Nous en venons aux orateurs inscrits, que j’invite à la concision.

M. Bernard Accoyer. Nous ne pouvons que déplorer le recours à la procédure accélérée sur ce texte auquel chacun aurait aimé apporter sa contribution. Sur la forme encore, le fait que les six rapporteurs soient tous membres de la majorité témoigne d’un esprit partisan peu constructif.

Diminuer la consommation des énergies fossiles, la part du nucléaire et les émissions de gaz à effet de serre, voilà trois objectifs qu’il me semble pour le moins ambitieux de poursuivre de front : le texte aurait sans doute gagné à fixer une priorité. Enfin, nous devrions tirer les leçons de l’échec allemand quant à la sortie du nucléaire, sortie dont le coût est aujourd’hui estimé à 1 000 milliards d’euros. À toutes ces questions s’ajoutent celles que pose l’actualité, qu’il s’agisse de l’approvisionnement en gaz de l’Europe ou des incertitudes sur l’évolution du cours du pétrole. À cet égard, le texte aurait mérité un éclairage actualisé et un temps d’examen plus long.

Mme Frédérique Massat. Quid du déploiement des bornes de recharge électrique ? Pour atteindre l’objectif de les porter à 7 millions en 2030, il faudra mettre les bouchées doubles puisque notre pays n’en compte aujourd’hui que 10 000. Quelle sera l’articulation entre les collectivités, l’opérateur national et le nécessaire maillage territorial afin de combler les nombreux déséquilibres ?

Les zones de montagnes sont des gisements d’énergie renouvelable : au-delà des grandes concessions hydrauliques, on peut aussi penser à la petite hydroélectricité, sans oublier l’énergie solaire et la méthanisation.

On parle souvent des réseaux intelligents, mais il faut aussi veiller à l’état des réseaux de distribution, qui sont parfois dégradés.

Enfin, la péréquation tarifaire doit être impérativement préservée.

M. Daniel Fasquelle. Je déplore les couacs et l’absence de pilotage sur ce projet de loi qui est peut-être le grand texte du quinquennat. Comme l’a reconnu un membre de la majorité, la montagne a accouché d’une souris ; surtout, ce texte est dangereux parce qu’il est flou : une transition mal pilotée et mal pensée accroîtra forcément le coût de l’énergie pour les particuliers comme pour les entreprises. En quoi, madame la ministre, la transition française sera-t-elle mieux pilotée que l’allemande ? On peut nourrir les plus grands doutes sur ce point.

Enfin, avez-vous une idée du coût de votre texte, démantèlement des centrales nucléaires et recours aux énergies non renouvelables inclus ? Comment financer les différentes mesures ? Serez-vous à l’écoute de l’opposition, notamment des propositions que j’ai formulées avec Julien Aubert dans le cadre du débat sur la transition énergétique ?

M. André Chassaigne. L’objectif de diviser par deux notre consommation d’énergie finale est contestable au regard de notre dynamisme démographique et du droit à l’énergie pour tous. La France devrait, selon les prévisions, compter 70 millions d’habitants en 2050, contre 65 millions aujourd’hui : ce facteur a-t-il été pris en compte ? S’il ne l’a pas été, l’objectif suppose que chaque habitant consommera en réalité 54 % d’énergie en moins. De plus, comment envisager le redressement de notre industrie avec une diminution massive de la consommation énergétique ? Faut-il voir dans les objectifs du texte le signe d’un grand pessimisme quant à la possibilité de ce redressement ?

Par ailleurs, quelles sont les filières professionnelles à même de réaliser l’isolation des bâtiments, secteur le plus consommateur en énergie ? Quels sont les financements prévus pour les travaux ? Le Président de la République a annoncé la rénovation de 500 000 logements par an ; or il n’y en a eu que 160 000 en 2013.

M. Jacques Alain Bénisti. Vous n’avez toujours pas répondu, madame la ministre, à la question que nous vous avions posée, en commission du développement durable, sur la fermeture de Fessenheim et d’autres centrales, afin de réduire la part du nucléaire de 75 % à 50 % dans la production électrique à l’horizon 2025. En tout état de cause, vous ne vous êtes toujours pas donné les moyens juridiques d’atteindre cet objectif.

Dans le texte – certes remanié – que vous nous présentez, vous vous contentez de plafonner à un peu plus de 60 gigawatts notre capacité nucléaire ; or ce chiffre, comme vous le savez, correspond à la capacité actuellement installée en France. Ce sont ainsi plusieurs milliers d’emplois qui sont menacés, alors que vous annoncez vouloir les développer.

Mme Édith Gueugneau. Je salue ce texte ambitieux, qui valorisera les ressources de nos territoires. Sur la diversification du mix énergétique, les collectivités sont en première ligne. Maire d’une station thermale de Bourgogne disposant d’un potentiel de très basse énergie en géothermie, j’aimerais savoir comment on peut accompagner les collectivités dans le développement des projets de pompe à chaleur, afin de récupérer les calories des eaux usées. Plus généralement, l’objectif est de créer des réseaux de chaleur et d’accroître l’efficacité énergétique à travers l’utilisation de techniques innovantes. De ce point de vue, quels pourraient être les accompagnements en matière d’ingénierie ?

M. Charles de Courson. Le texte fixe l’objectif de ramener la part du nucléaire dans la production d’électricité de 75 % aujourd’hui à 50 % en 2025 – dans l’article 1er –, et de plafonner à 63,2 gigawatts la capacité de production nucléaire – dans l’article 55 –, soit le niveau existant. Comment concilier ces objectifs avec la progression de l’intensité énergétique de 2,5 % par an ?

D’autre part, à combien s’élève le coût du plafonnement à 63,2 gigawatts, et celui du raccordement au réseau de l’EPR de Flamanville en 2016 ?

Enfin, quelles sont les sanctions prévues en cas de non-respect du plafonnement ?

M. Jean-Yves Le Déaut. La rénovation des bâtiments est en panne à cause de freins réglementaires : l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, l’OPECST, vient de publier un rapport à ce sujet. Ne peut-on aller plus loin dans la gestion active de l’énergie ? Peut-être faudrait-il aussi simplifier le système des aides, au nombre de 17 au niveau national et de 243 au niveau local.

La réglementation thermique 2012 est un progrès, mais le système de calcul est une boîte noire qu’il faudrait peut-être rendre transparente.

N’y a-t-il pas, dans l’évaluation de la performance énergétique, un mélange des genres entre la recherche, le conseil, l’expertise et le contrôle ?

Vous avez fait le choix de stimuler l’innovation ; or, en matière de recherche, le bâtiment fait figure de parent pauvre en France : quelles sont les pistes en ce domaine ?

Enfin, la performance énergétique est appréciée au regard de l’énergie primaire : ne devrait-elle pas l’être aussi en fonction de l’émission de CO2 et de la part d’énergies renouvelables dans les projets ?

M. Charles-Ange Ginesy. C’est à juste titre que vous présentez l’économie circulaire comme l’un des piliers en matière d’innovation ; de fait, elle doit rendre plus efficace l’utilisation des ressources et diminuer l’impact sur l’environnement. Les objectifs fixés par le texte sont de réduire la production de déchets de 7 % par habitant et de porter le taux de recyclage à 70 % pour le secteur du bâtiment ; mais rien n’est dit sur les moyens d’atteindre ces objectifs.

L’industrie doit également participer à la transition énergétique en développant des produits qui prennent en compte le recyclage et organisent sa fin de vie ; mais je m’inquiète de ne pas voir davantage de mesures volontaristes et créatrices d’un appareil productif adapté.

Je conclurai en citant le Premier ministre : « La filière nucléaire est plus que jamais une grande filière d’avenir. » Or le projet de loi vise à baisser à 50 % la part du nucléaire dans la production d’électricité à l’horizon 2025. Pourriez-vous nous éclairer sur ce point ?

Mme Catherine Troallic. Je vous remercie, madame la ministre, de votre engagement fort en faveur de la transition énergétique ; s’il est une énergie à ne pas économiser, c’est bien celle des élus, des décideurs, des entrepreneurs, des associations et de toute la société civile. C’est collectivement que nous réussirons.

Beaucoup de territoires sont d’ores et déjà engagés dans la transition énergétique : c’est le cas en Haute-Normandie, que ce soit avec l’appel à projets « Énergies », le développement de l’éolien offshore, la rénovation thermique des bâtiments et habitations, le chèque énergie ou la voiture électrique.

Aujourd’hui, l’État entend impulser une nouvelle dynamique que je tiens à saluer. Dans ce cadre, comment voyez-vous votre action et votre collaboration avec les collectivités, à commencer par les régions, afin d’obtenir un effet démultiplicateur, notamment au regard des actions déjà engagées ?

M. Dino Cinieri. Cet été, EDF a été pointé du doigt pour avoir signé un accord avec une filiale de l’énergéticien américain Cheniere, en vue d’importer du gaz, dont une partie sera issu des roches de schiste. Cette annonce a fortement inquiété vos alliés écologistes. De fait, le gaz non conventionnel représente environ 30 % de la production totale aux États-Unis. Pour les opposants au gaz de schiste en France, EDF – dont l’État détient 87 % du capital – délocaliserait ainsi les éventuelles conséquences environnementales de l’exploitation de cette ressource.

Dans les années à venir, ce sont près de 30 % des importations françaises de gaz naturel qui proviendront de pays exploitant le gaz de schiste. Compte tenu de l’interdiction d’exploiter celui-ci sur son territoire, il est peu probable que la France puisse renoncer à ces sources d’approvisionnement. La seule alternative serait de se tourner vers la Russie, ce qui n’est pas compatible avec la nécessaire sécurisation des approvisionnements. Bref, ne pensez-vous pas que la France importera, qu’elle le veuille ou non, une quantité non négligeable de gaz de schiste via ses fournisseurs traditionnels ?

Enfin, la position du Gouvernement sur la fracturation hydraulique a-t-elle évolué ?

M. Yannick Favennec. Aujourd’hui, 4 500 éoliennes – dont 75 dans mon département de la Mayenne – sont bloquées par l’armée. Si celle-ci décide d’étendre les zones d’exclusion militaire, l’installation d’éoliennes serait compromise sur près de 60 % du territoire. Il n’est évidemment pas question de remettre en cause les impératifs de sécurité aérienne, mais ces contraintes, si elles augmentent, compromettront nos objectifs en matière d’énergie renouvelable et mettront en péril l’économie liée au développement durable. Ce sont 9 milliards d’euros d’investissements privés qui sont en souffrance. L’armée doit-elle prendre autant de place ? Que comptez-vous faire pour qu’elle ne bloque pas autant de projets sur notre territoire ?

M. le président François Brottes. Un dialogue pourrait s’engager, sur ce point, entre notre commission spéciale et la commission de la défense, notamment à travers ceux qui appartiennent à l’une et l’autre.

Mme la ministre. Jean-Yves Le Drian, avec qui j’ai évoqué le sujet, est prêt à lever certaines interdictions, au cas par cas après examen des projets.

M. Yannick Favennec. Merci, madame la ministre.

Mme Béatrice Santais. Ce texte traduit une ambition sans précédent dans le domaine de l’énergie. Il est beaucoup question, dans le titre IV, des énergies renouvelables électriques. Peut-être faut-il se pencher plus avant sur la production de chaleur : je pense en particulier au solaire thermique, énergie simple qui permet, le soir, d’économiser la consommation d’électricité grâce à la chaleur emmagasinée durant la journée. Il s’agit aussi, détail non négligeable, d’une filière exportatrice. Les collectivités, vous l’avez rappelé, développent de beaux projets en matière d’énergies renouvelables : c’est le cas, justement, avec le solaire thermique. Nous pourrions donc nous en inspirer davantage.

M. Alain Leboeuf. On peut se féliciter de l’objectif d’installer 1 500 méthaniseurs en milieu rural : ils seront notamment une source de bioGNV – gaz naturel pour véhicules. Cependant, si l’on compte de plus en plus de bus roulant au GNV en ville, ce n’est pas le cas des bus intercités, encore équipés de moteurs diesel alors que le GNV pourrait avoir un véritable intérêt pour eux, notamment pour les transports scolaires en milieu rural. Les constructeurs sont très attentistes : ils ne se lanceront dans la fabrication de tels véhicules que s’ils entrevoient un marché à travers des incitations fortes. Quelle est votre position sur le transport intercités ? Envisagez-vous des actions pour le promouvoir ?

M. Hervé Pellois. Lors du colloque du 1er juillet dernier consacré à la biomasse, vous avez annoncé des mesures pour inciter les collectivités, les entreprises, les exploitants agricoles et les particuliers à investir dans les projets de méthanisation. Largement développés dans les pays du Nord, notamment en Allemagne, ces projets souffrent en France de deux freins majeurs. Le premier est administratif, avec la lenteur d’examen des dossiers. L’expérimentation de l’autorisation unique en matière d’installation classée commence-t-elle à porter ses fruits ?

Le second frein est la fiscalité, inadaptée à la faible rentabilité des investissements pour ces installations si sophistiquées. Que comptez-vous faire pour lever ces deux obstacles et encourager la filière ?

M. Jean-Pierre Gorges. Ce projet de loi a été préparé avant l’été ; depuis, deux événements ont eu lieu. Le premier est la publication du rapport de la commission d’enquête sur les coûts de la filière nucléaire, d’après lequel le reste à vivre de la ressource uranium sur la terre s’établit à 130 ans pour la troisième génération de réacteurs, mais à 7 000 ans pour la quatrième. Ce chiffre est un élément clé de ce rapport de M. Baupin, que Mme Duflot n’a donc pas dû lire.

Le second événement est la nomination du Gouvernement Valls 2. Son virage libéral peut étonner mais, pour ma part, je n’ai pas été moins étonné par les propos du Premier ministre selon lesquels le nucléaire est une filière stratégique.

Ces deux éléments majeurs ont-ils été pris en compte dans le texte que vous nous présentez ?

Mme Anne-Yvonne Le Dain. La France a la chance d’être l’un des rares pays au monde, avec les États-Unis et la Russie, à connaître tous les climats : l’atlantique, le tempéré, le méditerranéen, le montagnard, le continental, le tropical voire le boréal. Est-il envisageable d’ajuster notre réglementation et nos systèmes d’aides en fonction de ces spécificités ? Cela aiderait notre industrie à fabriquer des technologies et des objets que l’on pourrait vendre dans le monde entier.

M. Patrick Hetzel. Dans ma circonscription, un forage de géothermie a provoqué un sinistre important. Les murs d’une cinquantaine de maisons sont en train de se fissurer dans la commune de Lochwiller. Je tiens d’ailleurs à souligner l’efficacité des services de l’État en cette occasion : la direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DREAL), le préfet de région et vos propres services, madame la ministre.

Toutefois, si l’on veut développer la géothermie, il est essentiel de la sécuriser davantage au plan juridique comme au plan financier car, même si les sinistres sont heureusement très rares, le risque zéro n’existe pas. Pour l’heure, le seul référent juridique est le code minier : je vous laisse imaginer l’embarras des particuliers qui ont effectué un forage peu profond sur leur terrain… Il faudra y revenir car le projet de loi, dans sa rédaction actuelle, ne traite pas le problème.

M. Jean-Yves Caullet. Comment faire de la performance énergétique des bâtiments un enjeu, non seulement en termes de coûts de fonctionnement, mais aussi de patrimoine ?

Comment assurer à des coûts raisonnables la disponibilité des compétences techniques, administratives et financières nécessaires au succès de la transition énergétique sur l’ensemble du territoire ?

Enfin, ne pourrait-on affecter l’aide au logement à la rénovation, pour en faire un moyen d’éradiquer les passoires énergétiques dans le locatif privé ?

Le titre V du projet de loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, que nous allons voter dans deux jours, prévoit la création d’un fonds stratégique. Une clé de répartition des crédits carbone en faveur de ce fonds ne favoriserait-elle pas la mobilisation de la ressource forestière, nécessaire au vu de l’enjeu de la biomasse dans la transition énergétique ?

M. Claude de Ganay. L’article 55 du projet de loi plafonne la capacité de production nucléaire à son niveau actuel, soit 63,2 gigawatts. S’attaquer de la sorte au nucléaire est une erreur. Si les énergies renouvelables sont une formidable opportunité pour la France, elles demeureront complémentaires des sources régulières d’énergie électrique. Il est donc illusoire de penser que nous parviendrons, en l’état actuel de nos capacités de stockage, à nous passer du développement du nucléaire, outil au service de la transition énergétique et de notre indépendance énergétique depuis des décennies. Atteindre le plafond visé signifie purement et simplement la fermeture d’une vingtaine de réacteurs de 900 mégawatts, avec à la clé la destruction de 40 000 emplois directs. La question n’est plus de savoir si vous infléchirez cette décision : il s’agit de nous faire connaître les réacteurs d’ores et déjà condamnés. Au nom des salariés d’EDF, des prestataires et des bassins d’emplois concernés, je vous remercie de nous apporter les informations les plus précises sur ce point.

M. Lionel Tardy. Madame la ministre, envisagez-vous toujours une seule lecture de ce projet dans chaque chambre ? Étant donné l’ampleur du texte et la portée des questions posées, cela semble peu acceptable. Par ailleurs, comment s’articuleront l’article 10 du projet, relatif à l’installation des points de charge des véhicules électriques, et la loi facilitant le déploiement d'un réseau d'infrastructures de recharge de véhicules électriques sur l'espace public adoptée le 4 août dernier ? Enfin, quelle place sera donnée aux réseaux électriques intelligents ? En l’état, la seule référence qu’y fait le texte est, en son article 59, d’autoriser le Gouvernement à prendre par voie d’ordonnances des mesures de déploiement expérimental assez floues. Sur un plan général, il est indispensable de lier fortement transition énergétique, efficience économique et simplification administrative, et le texte devra aussi être examiné sous cet angle.

Mme Françoise Dubois. Je salue les mesures du titre II visant à combattre la précarité énergétique qui touche 4 millions de familles en France. Il était important, aussi, que l’exigence d’exemplarité énergétique figure dans le texte. Je me félicite de l’entrée en vigueur, le 1er septembre, du crédit d’impôt pour la transition énergétique que vous avez décidé. Cependant, en supprimant le critère du bouquet de travaux, le nouveau dispositif met fin à l’obligation de procéder à des travaux complémentaires renforçant l’efficacité des travaux entrepris sur le plan énergétique. L’objectif, remarquable, est d’élargir l’accès à ce crédit d’impôt, par ailleurs très attractif. Mais ne risque-on pas de voir les ménages repousser les gros travaux, nécessairement plus coûteux – les réfections de toiture par exemple – pour privilégier des travaux plus modestes qui n’auront pas le même impact en termes d’efficacité énergétique ? La question se pose avec d’autant plus d’acuité que le texte oblige par ailleurs à renforcer significativement les performances énergétiques et environnementales à chaque fois que des travaux importants sont réalisés dans un bâtiment.

M. Michel Heinrich. Le texte prévoit de réduire de 7 % en dix ans la quantité de déchets produits par habitant ; cet objectif ne me semble pas très ambitieux. Le crédit d’impôt prévu pour la rénovation thermique est une bonne chose et constituera certainement une incitation à agir. En revanche, l’obligation faite à tout propriétaire de procéder à des travaux de rénovation thermique quand il entreprend, par exemple, des travaux sur une façade ne risque-t-elle pas d’empêcher des propriétaires d’entretenir le bâti, et même de dissuader certains de le faire ? Enfin, il est regrettable que le texte ne dise rien du potentiel que représente la biomasse.

M. Michel Lesage. En matière de gouvernance, le projet propose de mobiliser les territoires. Ils sont en effet au cœur de la réussite de la transition énergétique, à la fois parce que les services publics territoriaux sont le patrimoine de ceux qui n’en ont pas et parce que les territoires sont les lieux essentiels de mise en cohérence des politiques publiques du logement, de transport, d’habitat et d’aménagement du territoire, qui ont toutes un fort impact en matière énergétique. Pouvez-vous préciser comment s’articuleront les objectifs nationaux et les indispensables approches transversales, qu’elles soient régionales ou intercommunales, les intercommunalités devenant de fait les autorités organisatrices de l’énergie ?

M. Franck Reynier. Nous partageons nombre des objectifs fixés dans ce texte, mais plusieurs inquiétudes demeurent. En premier lieu, tant pour le bâtiment que pour les transports, l’efficacité énergétique demandera de fortes incitations ; eu égard à l’état des finances publiques, aurez-vous des moyens suffisants à consacrer à ce grand projet ? D’autre part, il est bon de faire évoluer le mix énergétique pour favoriser des énergies plus vertes, mais cela a un coût élevé. Considérant les difficultés que connaissent un grand nombre de nos concitoyens, on ne peut qu’être préoccupé par l’impact qu’auront les mesures annoncées sur le pouvoir d’achat. Quel est votre avis à ce sujet ?

Mme Geneviève Gaillard. Un des axes du projet est le renforcement de la sécurité nucléaire. Le texte confirme également la réduction de la part de l’énergie nucléaire dans la production d’électricité et je m’en félicite. Cependant, on parle d’allonger jusqu’à soixante ans la durée de vie de certaines centrales, ce qui ne manque pas d’inquiéter car on sait la corrélation entre l’occurrence d’incidents et l’âge des réacteurs. Si cette décision était confirmée, comment nous rassureriez-vous sur la sûreté des installations ? Ce choix pourrait d’autre part avoir un impact sur notre capacité à démanteler les réacteurs. Alors que nous avons su vendre des usines et des centrales clés en main, nous risquerions de rater le coche de l’excellence en matière de démantèlement. Quel est votre avis sur ces sujets ?

Mme Sophie Rohfritsch. Je m’étonne de ne trouver mot dans le texte des négociations européennes relatives au marché de l’énergie. Avez-vous évoqué ce sujet au cours du dernier Conseil européen ? En particulier, un accord stable est-il envisagé avec nos partenaires allemands, avec lesquels nous devons absolument être en phase en cette matière ? J’observe aussi la faible transversalité du projet en matière diplomatique. Qu’en sera-t-il de la sécurisation de nos approvisionnements en gaz russe si nous continuons à nous opposer frontalement à la Russie, notamment si nous l’empêchons de réaliser le nouveau gazoduc Sud ?

Enfin, le texte est relativement creux pour ce qui concerne les nouvelles méthodes et les nouveaux critères de fixation des tarifs de l’électricité. Vous projetez de les revoir, mais il n’y a pas d’avancée à ce sujet, ce qui est très pénalisant pour EDF. Est tout aussi pénalisant le fait d’ignorer comment seront financées les extensions de réseaux nécessaires au développement des énergies renouvelables puisque l’on ignore quel sera le contour exact de la réforme territoriale.

M. le président François Brottes. Je rappelle que nous nous prononcerons cette semaine sur la création d’une commission d’enquête relative aux tarifs de l’électricité.

M. Jean-Louis Bricout. L’article 60 instaure un chèque énergie. Est-il prévu de moduler son montant en fonction de la géographie ? Il n’échappe à personne que le climat diffère selon que l’on se trouve en Picardie ou en Provence et que cela a une incidence sur le montant des charges énergétiques.

Pour lutter contre la précarité énergétique, je propose d’introduire dans le texte la notion d’ « insécurité économique », cette insécurité provoquée par les bailleurs indélicats qui mettent sur le marché des logements qui sont autant de passoires thermiques. Ce faisant, ils plongent les populations les plus fragiles dans la précarité et suscitent aussi des dépenses pour l’État et pour les collectivités territoriales par la mobilisation de dispositifs de soutien tels que le fonds de solidarité pour le logement ou l’aide personnalisée au logement. La disposition consisterait à encadrer les charges fixes constituées par le loyer et les charges énergétiques en se donnant la possibilité de faire évoluer les loyers des logements énergivores sur la base du diagnostic de performance énergétique (DPE). Lorsque j’ai avancé cette proposition au cours du débat sur la loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové, il m’a été répondu que l’idée était bonne mais que son application se heurtait au fait que le DPE, bien qu’obligatoire lors de la signature du bail, n’était pas opposable. Une évolution est-elle envisageable ?

M. Guillaume Chevrollier. Vous faites de la rénovation thermique des bâtiments une priorité méritée. C’est aussi un moyen de soutenir le secteur du bâtiment et ses artisans, qui en ont bien besoin, vous l’avez souligné. Mais je tiens à vous faire part de deux remarques souvent entendues dans ma circonscription. La première est que l’Agence nationale de l’habitat est incapable de faire face à l’afflux de dossiers qui lui arrivent, et que leur traitement va prendre des mois. La seconde, c’est que les normes, dans le domaine de la rénovation thermique, sont devenues trop contraignantes et qu’elles ont souvent des effets pervers. Ainsi, la réglementation thermique 2012 encourage le chauffage au gaz et réduit la place des solutions électriques et renouvelables ; cela provoquera un surcroît d’émissions de CO2 à l’avenir. De plus, ces normes incitent peu à l’innovation. Les artisans du bâtiment demandent que cette réglementation soit modifiée et souhaitent être associés à sa définition ou, au minimum, consultés.

Mme Martine Lignières-Cassou. Les collectivités territoriales et notamment les intercommunalités sont appelées à jouer un rôle important dans le pilotage de la transition énergétique. Je puis témoigner que, jusqu’à présent, les collectivités ne disposaient pas des éléments leur permettant de mesurer la consommation énergétique sur leur territoire. Les discussions à ce sujet, notamment avec ERDF, étaient très compliquées. Ainsi, la communauté d’agglomérations que je présidais avait été appelée à participer au financement du renforcement d’un poste source, sans que nous puissions mesurer l’impact, direct et indirect, de notre action. Le projet permettra-t-il aux collectivités territoriales et aux EPCI en particulier de piloter pleinement la transition énergétique, d’être véritablement partie prenante à la définition de la stratégie souhaitable et d’obtenir d’ERDF les éléments qui leur permettront de mesurer l’impact des actions entreprises ?

M. Damien Abad. La dimension européenne de la transition énergétique est la grande oubliée du projet. Le mot « Europe » n’apparaît que deux fois dans le texte – et encore sous forme d’une pétition de principe, à l’article 53 –, alors que le Président de la République a dit vouloir la création d’une communauté européenne de l’énergie. Préfèrerez-vous le modèle allemand, le modèle espagnol ou le modèle anglais ?

Mme Annick Le Loch. Les îles du Ponant, dont l’île de Sein, font partie des zones insulaires non interconnectées (ZNI) au réseau électrique métropolitain. Elles sont alimentées par des groupes électrogènes dont le fonctionnement est assuré par des centaines de milliers de litres de fuel, et le coût supplémentaire induit est assumé par la collectivité nationale par le biais de la « contribution au service public de l’électricité ». Les élus et des porteurs de projets aspirent à développer la production d’énergies renouvelables disponibles sur le site. Seriez-vous disposée à lever des verrous réglementaires pour favoriser cette production ? N’y a-t-il pas lieu, par exemple, de rehausser le plafond qui fixe à 30 % de la puissance globale injectée dans le réseau la part des énergies intermittentes dans les ZNI ?

M. Jean-Pierre Vigier. La transition énergétique exige des mesures mûrement réfléchies, cohérentes et compatibles entre elles. Or vous reprenez dans ce texte fourni un projet élaboré par vos deux prédécesseurs ; la vision d’ensemble est floue, et les Français auront le sentiment d’éparpiller leurs efforts. Si l’objectif de réduire de 40 % les émissions de CO2 d’ici à 2030 est louable, il entraîne de fortes contraintes pour les usagers et pour les entreprises. Que faire, dans ce contexte, pour éviter que les efforts engagés par l’Europe et notamment par la France pour limiter le changement climatique ne soient réduits à néant par l’industrie des pays émergents ?

M. Jean-Pierre Le Roch. Vous avez fixé pour objectif l’installation de 1 500 méthaniseurs mais une fiscalité inappropriée peut faire obstacle à ce projet en freinant les investissements ; quelles mesures proposerez-vous à ce sujet ? Par ailleurs, comment accompagner la formation pour assurer la sécurité optimale du fonctionnement de ces appareils ? Enfin, reverrez-vous les critères des appels d’offres pour permettre que des projets de centrales solaires ou de parcs photovoltaïques aboutissent au nord de la Loire ?

M. François-Michel Lambert. Il y a bien davantage dans l’économie circulaire que le recyclage, puisqu’il s’agit de passer d’une société du gaspillage des ressources notamment énergétiques à un développement durable. Ma question, qui porte sur le seul volet « énergie » de la réflexion relative à l’économie circulaire, concerne l’énergie fatale, c’est-à-dire l’énergie résiduelle produite au cours du processus industriel mais non utilisée. EDF l’estime à 140 TWh par an, soit 30 % de la consommation d’électricité dans l’industrie. Or, de nombreux exemples d’écologie industrielle et territoriale, en France et surtout en Europe du Nord, montrent la possibilité de gains énergétiques formidables en ce domaine. L’exploitation du potentiel de l’énergie fatale est insuffisante dans notre pays ; comment la France rattrapera-t-elle son retard sur ses voisins ? Allons-nous nous lancer dans une démarche d’écologie industrielle, au sujet de laquelle les études britanniques indiquent que chaque million d’euros investi rapporte 16 millions d’euros aux entreprises et aux territoires ?

M. Éric Straumann. Le fait que la fermeture de la centrale de Fessenheim ne figure pas dans le texte signale-t-il qu’elle poursuivra son activité au-delà de 2017 ?

M. Bruno Nestor Azerot. Votre projet de transition énergétique est une grande opportunité pour ce quinquennat. Outremer, en Martinique en particulier – où nous avons eu le plaisir et l'honneur de vous accueillir la semaine dernière – on ne peut parler de transition énergétique mais bien de création ou de révolution énergétique. Nous sommes dépendants à 97 % de l'énergie électrique issue du fuel. Or, nous avons le soleil, la mer et les volcans. Notre objectif est donc de développer dans les vingt années à venir les énergies renouvelables pour mixer notre approvisionnement énergétique. Notre priorité, vous le savez, ce sont les énergies marines renouvelables avec l'éolien offshore, l'hydrolien avec le projet NEMO de Bellefontaine – et rapidement, je le souhaite, de Sainte-Marie –, la géothermie et le solaire.

Nous souhaitons, madame la ministre, que vous nous souteniez dans l'élaboration d'un « plan bleu » pour la Martinique car, au-delà de la transition énergétique, c'est tout le développement de nos îles qui est en question, et leur avenir. Je vois dans votre projet de loi l'opportunité pour la Martinique de retrouver une industrie qu'elle a perdue, des emplois dont elle a grandement besoin, des activités économiques de services liés, et des formations d'excellence pour nos jeunes.

L'Outremer, qui donne sa vocation mondiale à la France et à l'Europe, n'a pas vocation à rester dans les rebuts de l'Histoire et de la mondialisation. Je salue donc votre ambition forte, madame la ministre, et je soutiendrai bien sûr ce projet.

Mme Michèle Bonneton. Le texte met l’accent sur le développement des véhicules propres et en particulier sur les véhicules électriques. C’est une avancée intéressante, mais cela ne suffira pas à résoudre tous les problèmes de déplacement et de pollution de l’air, ne serait-ce que parce que les véhicules électriques supposent des batteries et que leur fabrication demande une certaine consommation d’énergie électrique. Dans quel texte alors envisager un « plan vélo », un plan de développement de transports collectifs et un plan de transport de marchandises par voie d’eau ?

D’autre part, l’armée n’est pas seule à faire obstacle aux projets d’éoliennes : il en va de même des services météorologiques. Peut-on imaginer la levée de ce blocage ?

Mme la ministre. Cela vient d’être fait.

M. Yves Daniel. L’un des objectifs affirmés dans ce projet destiné à favoriser la transition énergétique est de protéger la santé publique. Cela se conçoit fort bien. Je me dois cependant de vous alerter sur les nuisances provoquées par les ondes émises par les éoliennes, néfastes pour la santé des animaux comme pour celle des êtres humains. En sera-t-il tenu compte dans l’évaluation des projets ? Nous manquons pour l’instant d’évaluations scientifiques de ces risques ; pourtant, des éleveurs de ma circonscription sont en grande difficulté de ce fait, subissant des coûts importants qui ne sont pas pris en charge par les constructeurs bien que la loi les y oblige. Il faut prendre garde aussi aux impacts négatifs de la production des énergies renouvelables.

M. Martial Saddier. Ce texte doit être l’occasion de renforcer le rôle des territoires. Je me félicite à ce sujet que l’article 45 maintienne les tarifs de cession aux entreprises locales de distribution (ELD) et que les articles 56 à 58 prévoient des expérimentations concernant la régionalisation. Je m’inquiète cependant de l’évolution des tarifs de rachat de la production d’énergies renouvelables par les ELD ; cette question doit être clarifiée.

En ma qualité d’ancien président du Conseil national de l’air, je salue le volet du projet consacré à la qualité de l’air avec le plan de réduction des émissions et le retour des APPA que nous avions mis en place. Je regrette en revanche l’absence de mesures encourageant à changer les chauffages domestiques peu performants ; il faut pourtant lier économies d’énergie et efficacité énergétique.

M. Dominique Potier. Le développement de l’économie circulaire impose l’adoption de réglementations internationales nouvelles qui éviteront que nos déchets ne nous reviennent sous forme manufacturée après avoir fait le tour de la planète. Ces réglementations doivent être définies matériau par matériau ; ces chantiers n’ont pas encore été ouverts par l’Europe et le texte pourrait être l’occasion de poser quelques jalons.

En matière d’isolation thermique, le retour des entreprises et des centres de recherche tiendra pour beaucoup à la continuité des politiques publiques menées. Les politiques précédemment conduites ont connu des à-coups, ont souvent été fractionnées, sont reparties sur d’autres bases… Pour que l’appareil de recherche et développement se mette en branle, la permanence est indispensable : c’est elle qui sécurise la conversion des entreprises à ces nouveaux métiers.

M. Laurent Furst. L’Union européenne a supprimé il y a peu les ampoules à filament et les industriels se sont reconvertis dans la fabrication d’ampoules halogènes, lesquelles font maintenant l’objet de débats. Or 7 000 emplois sont en jeu de ce fait en Europe, dont quelque 2 000 en France. Quelle est la position du Gouvernement sur ces équipements qui ont permis de réduire la consommation d’énergie ?

M. le président François Brottes. La liste des orateurs étant épuisée, la parole est à Mme la ministre.

Mme la ministre. J’ai apprécié la qualité de ces échanges. L’extrême technicité de certaines des questions posées appelle une expertise supplémentaire avant qu’une réponse précise leur soit apportée. Sur un plan général, j’ai été frappée par la tonalité très positive de notre dialogue. Je remercie ceux d’entre vous qui ont dit leur soutien et leur adhésion à ce texte, fruit d’un travail considérable que je suis heureuse de vous présenter. Vos contributions, sur tous les bancs, témoignent d’un engagement réel pour trouver les meilleures solutions, propres à entraîner nos concitoyens à adopter les nouveaux comportements qui leur permettront de réduire leur facture énergétique, et à créer des emplois.

Vos interventions ont montré à la fois une vision stratégique partagée sur les choix structurants de notre modèle énergétique et certaines divergences. Des questions ont ainsi porté sur la cohérence globale du texte, sur la part réservée au nucléaire, sur les échéances stratégiques fixées dans le texte – tant en matière de pourcentages que de calendrier – et sur la place réservée aux questions européennes. Je me réjouis des fortes convergences exprimées sur la nécessité d’être opérationnels au plus vite car, souvent, nos concitoyens sont en avance sur le temps parlementaire ; vous ne l’ignorez pas, vous qui aidez à la réalisation de projets de rénovation thermique ou de production d’énergies renouvelables.

L’ancienne parlementaire que je suis comprend les questions relatives au choix de la procédure d’urgence pour l’examen de ce texte. Permettez-moi toutefois de rappeler que le temps de parole n’a pas été limité ; vous aurez donc le temps de vous exprimer et pendant les travaux de votre commission, au cours desquels je serai bien sûr constamment présente, et lors du débat en séance publique. Le temps imparti au débat sera donc de qualité et très dense. La discussion qui s’achève a d’ailleurs montré qu’il n’est pas besoin de s’éterniser pour mettre l’accent sur des sujets opérationnels, à propos desquels je m’engage à vous apporter des réponses précises et argumentées.

J’observe aussi que l’appréciation de l’urgence n’est pas la même pour nous, qui avons le temps de débattre, pour nos concitoyens qui souffrent du chômage et pour les petites entreprises du bâtiment qui attendent des commandes. J’ai donc eu le souci de trouver le juste équilibre permettant de concilier la qualité du débat parlementaire et la nécessité d’apporter le plus vite possible à nos entreprises – celles du secteur du bâtiment, celles de la filière des énergies renouvelables et celles qui veulent innover – des réponses opérationnelles. Elles nous en sauront gré. Vos questions le prouvent, qu’elles portent sur les méthaniseurs ; sur les ZNI ; sur la nécessité d’une action très rapide outremer, où le coût de l’énergie est considérable et où des opportunités majeures existent d’apporter des solutions en termes de formation professionnelle et d’emploi à une jeunesse pour moitié inactive ; sur la rénovation thermique et sur la manière dont le crédit d’impôt permettra aux citoyens de passer rapidement des commandes aux entreprises du secteur du bâtiment ; sur la formation professionnelle, que les entreprises du bâtiment sont en train de définir ; sur la place faite aux communautés de communes ; sur l’accès, crucial, aux renseignements sur tous ces sujets, nécessité qui nous poussera à installer des plateformes d’information.

De vos contributions, auxquelles je répondrai précisément soit par écrit, soit lors de l’examen des articles, soit après une expertise complémentaire pour certaines des questions abordées, je retiens votre souci de pragmatisme et d’efficacité. Je suis persuadée que le débat parlementaire, à partir de questions dont je n’avais pas obligatoirement perçu tous les aspects ou de sujets qu’il faudra préciser, donnera une marge de manœuvre suffisante pour permettre aux collectivités territoriales de se mettre en mouvement. Je ne voudrais donc pas que le choix de la procédure d’urgence soit mal interprété : il ne s’agit pas, et le dialogue que nous venons d’avoir le prouve, de bâcler le débat mais de répondre à l’urgence et aux attentes des territoires, qui sont souvent en avance sur le législateur.

Si la dimension européenne de la question ne relève pas de dispositions législatives, vos questions à ce sujet sont tout à fait fondées et je vous informerai des échéances européennes à venir. Je vous dirai aussi comment, en dépit de modèles énergétiques très divers, nous avons essayé de faire converger les approches des États membres de manière à respecter les engagements pris au niveau planétaire pour lutter contre le réchauffement climatique, réduire la précarité énergétique et renforcer l’indépendance énergétique, chaque pays ayant à ce sujet un même objectif. Je vous dirai encore comment nous parviendrons peut-être à un échange de stratégies et à la construction de filières d’investissement communes dans ce qui sera la prochaine révolution énergétique, celle du transport propre et du stockage de l’énergie. Le jour où l’on saura stocker l’énergie – et la recherche progresse assez vite – on aura également résolu la question du coût de l’utilisation des énergies renouvelables.

Voilà qui m’amène à traiter de la cohérence du texte, sur laquelle M. de Courson, notamment, s’est interrogé, évoquant le coût du plafonnement de notre capacité nucléaire. Cette cohérence existe : elle tient à la montée en puissance des énergies renouvelables, à la recherche de la performance énergétique, aux économies d’énergie et à la complémentarité voulue avec l’économie circulaire. Nous devons parvenir à faire de nos territoires des territoires dits « zéro déchet », où tous les déchets non éliminés doivent être considérés comme de nouvelles matières premières. En Allemagne, 70 % des déchets du bâtiment sont recyclés dans la construction. Parce que, en France, le taux est très bas, j’ai décidé de permettre la valorisation de ces déchets en les catégorisant comme matières premières, ce qui renforcera la productivité de la filière du bâtiment. Des évolutions considérables sont donc possibles, en s’inspirant des meilleures pratiques de chaque pays, pour réduire de manière draconienne le volume de déchets – dont l’élimination ou le traitement coûte fort cher –, en les intégrant, en qualité de matières premières, au cycle de production. Cela implique aussi une autre consommation. Cette vision globale de l’énergie emporte et une cohérence et une ambition.

Mais il faudra, bien sûr, plusieurs années pour l’atteindre. Dans un premier temps, j’ai comme vous, monsieur Heinrich, jugé que viser une réduction de 7 % en dix ans de la production de déchet par habitant était bien peu. C’était oublier que cette production augmente de manière exponentielle ; parvenir à la stabiliser est donc un effort considérable en soi, la réduire de 7 % est un effort plus important encore. J’étudierai la question dans le détail, car je suis convaincue que le volume de certains déchets – cartons, emballages, bouteilles d’eau en plastique par exemple – peut être réduit bien davantage et réintégré dans le cycle de production. Cela vaut aussi pour les déchets putrescibles et pour ce qui concerne le gaspillage alimentaire : d’évidence, on peut tirer de ces déchets-là beaucoup plus de compost, et les utiliser à grande échelle dans les méthaniseurs. Cela suppose la montée en puissance de projets individuels dans des territoires à énergie positive, dans le cadre de contrats locaux de transition énergétique. Ces contrats permettront de mobiliser les ressources de l’Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, les moyens définis dans le projet et les co-financements des collectivités territoriales et du système bancaire, notamment ceux de la Banque publique d'investissement.

Vos interventions ont rendu perceptible une adhésion globale à l’idée que la transition énergétique est réalisable et à portée de main.

J’ai entendu les divergences qui se sont exprimées à propos du nucléaire. Après avoir écouté attentivement toutes les sensibilités et toutes les parties prenantes, j’ai le sentiment d’être parvenue à un équilibre et je vous propose un choix raisonné. Il souligne la place très importante du nucléaire – qui, en nous permettant d’accomplir la transition énergétique sans devoir, contrairement à nos voisins allemands, recourir au charbon, nous apporte une sécurité énergétique – tout en incluant dans l’appréciation du coût de cette filière celui du traitement des déchets ultimes, pour le comparer valablement au coût des énergies renouvelables, dont la performance économique s’améliorera à mesure qu’elles monteront en puissance.

Nous sommes à un moment charnière. Nous devons adopter les bonnes stratégies, cruciales pour l’avenir du pays ; opter pour le « tout ou rien » serait une erreur très coûteuse, à terme, pour la nation. En plafonnant la capacité de production nucléaire du pays, nous choisissons la sécurité. Par ce choix volontariste, nous nous donnons aussi les moyens de faire monter en puissance les énergies renouvelables et de ce fait d’en réduire le coût, et aussi de motiver l’investissement dans le stockage de l’énergie, élément clef. Le troisième pilier du dispositif, c’est la lutte contre le gaspillage énergétique, le choix de la sobriété et de la performance énergétique pour les bâtiments, un domaine dans lequel la France doit être à la pointe des compétences. Aussi, je souhaite que tous les nouveaux permis de construire des bâtiments publics et des logements sociaux concernent des bâtiments à énergie positive. Si certains réussissent à produire au moins autant d’énergie qu’ils en consomment, pourquoi n’en irait-il pas de même pour tous ? Michel-Ange le disait : le progrès est dans la contrainte – une contrainte qui doit, bien sûr, être intelligente. Il ne s’agit pas de fixer des normes incompréhensibles mais de tracer les contours de ce qui deviendra irréversible, non seulement parce que ce sera la norme juridique mais parce que tous les citoyens du pays auront compris qu’ils ont intérêt à s’engager dans cette voie.

Voilà ce qui fait de ce formidable chantier un champ d’innovation et de créativité. C’est aussi un instrument pour ceux qui souffrent de la précarité énergétique ; pour notre pays qui paye cher ses importations d’énergie ; pour les citoyens qui ne comprennent pas toujours le montant des factures qui leur sont adressées et qui veulent en réduire le coût pour gagner du pouvoir d’achat ; pour nos entreprises enfin, qu’elles soient traditionnelles ou innovantes et qui, chaque jour, apportent la preuve que la technologie française en matière de transition énergétique fait partie des meilleures au monde. (Applaudissements)

M. le président François Brottes. Je vous remercie, madame la ministre, pour la pédagogie et le pragmatisme dont vous avez fait preuve dans le projet et au cours du débat. Selon la volonté de la ministre, qui est aussi la mienne, ce texte sera conçu comme une co-construction. J’invite donc ceux de mes collègues qui ont des idées d’amendements à les communiquer dès maintenant à nos rapporteurs.

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Membres présents ou excusés

Commission des affaires économiques

Réunion du mardi 9 septembre 2014 à 16 h 15

Présents. - M. Damien Abad, M. Bruno Nestor Azerot, Mme Ericka Bareigts, Mme Delphine Batho, Mme Marie-Noëlle Battistel, M. Yves Blein, Mme Michèle Bonneton, M. Christophe Borgel, M. Jean-Claude Bouchet, M. François Brottes, M. André Chassaigne, M. Dino Cinieri, Mme Corinne Erhel, M. Daniel Fasquelle, M. Christian Franqueville, M. Joël Giraud, Mme Pascale Got, M. Jean Grellier, M. Philippe Kemel, M. Jean-Luc Laurent, Mme Annick Le Loch, M. Philippe Le Ray, M. Jean-Pierre Le Roch, Mme Audrey Linkenheld, Mme Marie-Lou Marcel, Mme Frédérique Massat, M. Jean-Claude Mathis, M. Yannick Moreau, M. Hervé Pellois, M. Dominique Potier, M. Patrice Prat, M. Bernard Reynès, M. Franck Reynier, Mme Béatrice Santais, M. Éric Straumann, M. Lionel Tardy, M. Jean-Marie Tetart, Mme Catherine Troallic, M. Jean-Paul Tuaiva, Mme Clotilde Valter

Excusé. - Mme Jeanine Dubié

Assistaient également à la réunion. - M. Charles de Courson, M. Yves Daniel, Mme Sophie Dessus, Mme Edith Gueugneau, M. Jean-Philippe Nilor, M. Boinali Said, M. Jean Jacques Vlody