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Mission d’information commune sur la banque publique d’investissement, Bpifrance

Jeudi 29 janvier 2015

Séance de 11 heures

Compte rendu n° 1

Présidence
de Mme Véronique Louwagie,
Présidente

–  Audition, ouverte à la presse, de M. Nicolas Dufourcq, directeur général de la Banque publique d'investissement Bpifrance

–  Présences en réunion 13

La mission d’information entend, en audition ouverte à la presse, M. Nicolas Dufourcq, directeur général de la Banque publique d'investissement Bpifrance.

Mme la présidente Véronique Louwagie. Nous commençons ce matin les travaux de la mission d'information commune sur la Banque publique d'investissement Bpifrance par l'audition de M. Nicolas Dufourcq, son directeur général, que je remercie de sa présence.

Nous voulons évaluer l'activité de Bpifrance en appréciant la conformité du bilan de son action à ce jour avec les objectifs qui lui ont été fixés dans la loi du 31 décembre 2012. Nous vous entendrons donc, monsieur le directeur général, avec grand intérêt.

M. Nicolas Dufourcq, directeur général de la Banque publique d'investissement Bpifrance. Bpifrance exerce ses activités depuis maintenant près de trente mois, dans des conditions qui ont évolué depuis que j’ai été nommé, le 17 octobre 2012, préfigurateur puis, le 7 février 2013, directeur général de ce qui était encore une coquille vide. Cette coquille a été remplie le 12 juillet 2013, mais, dès décembre 2012, j’avais fait comme si la Banque existait déjà, de manière que, dès sa création effective, Bpifrance soit à même de répondre le plus rapidement possible aux besoins des entrepreneurs. La mission de préfiguration a donc été pilotée avec le double impératif de bon sens et de vitesse.

Au Portugal – et je puis vous annoncer que le contentieux de marque qui nous opposait à la banque privée portugaise BPI est heureusement réglé – le projet de banque publique d’investissement en est, depuis trente mois, toujours au stade de la préfiguration.

L’année 2013 a donc été celle du lancement de Bpifrance à marche forcée ; 2014 a été celle de la croissance et, aussi, de la finalisation de l’harmonisation des statuts et de la fusion des entités. En 2015, la croissance se poursuivra selon la trajectoire engagée en 2014. Il en résultera que, du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2015, les en-cours de la Bpi, dans la partie bancaire de ses activités – les crédits de court, de moyen ou de long terme – auront augmenté de moitié. La croissance des activités « fonds propres » a été d’environ 30 % entre 2014 et 2013 ; celle de l’activité « prêts à l’innovation », domaine dans lequel nous recevons de l’État les capitaux que nous redistribuons aux entrepreneurs, de 35 %, et elle sera à nouveau significative en 2015.

Bpifrance est maintenant une entreprise intégrée, très homogène. Elle compte environ 2 200 salariés qui ont le feu sacré. Nous avons significativement recruté en 2014 et la croissance de nos activités justifie que nous continuions de le faire en 2015.

La Banque a six métiers. Le premier, la garantie, est de tous celui dont la croissance est la plus faible. Nous garantissons les crédits des banques privées. Le groupe BPCE, avec 22 % de parts de marché, est notre premier partenaire, puis vient le Crédit agricole mais tous les réseaux sont représentés. Le volume de crédit annuel aux PME qui est garanti s’établit entre 8 et 9 milliards d’euros. Sa croissance, qui reflète celle du marché bancaire français, est faible, mais elle existe, ce qui signifie qu’il n’y a pas réellement d’asséchement du crédit en France : les en-cours augmentent et le nombre de crédits à long et moyen terme également.

Ce métier dépend entièrement de la discussion budgétaire que nous avons chaque année avec l’État sur l’alimentation du fonds de garantie. Nous avons besoin de 100 millions d’euros par an environ pour remplir cette mission, et certaines années sont meilleures que d’autres. Nous avons convaincu la direction du budget de la pertinence d’un mécanisme tel que, au moins pour les trois ans à venir, le dividende de Bpifrance qui revient à l’État soit réinjecté pour partie vers les fonds de garantie. Cela nous donne un horizon clair ce qui n’était pas le cas initialement. Je me rappelle avoir été amené, le 15 octobre 2012, à dire au président de la République que Bpifrance allait certes être créée mais que l’activité « garantie » avait été débudgétisée pour les années 2013 à 2015. Nous avons résolu la difficulté de la manière que je vous ai dite et nous pouvons exercer notre mission.

Les prêts garantis sont des prêts à la création, des prêts de développement, des prêts à la transmission d’entreprise ; nous garantissons quelques 35 000 crédits bancaires privés chaque année, qui concernent à 60 % les TPE. Pour tous les crédits inférieurs à 200 000 euros, notre garantie est automatique : lorsque le crédit accordé est supérieur à ce plafond, nous ré-instruisons le dossier.

Un autre de nos métiers est celui du crédit, à court terme d’une part, à moyen et long terme d’autre part. Le crédit à court terme s’est développé de manière fulgurante grâce au préfinancement du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE), produit emblématique de Bpifrance. Cela représentait plus de 2 milliards d’euros d’en-cours en 2014 ; 22 000 entreprises, dont 15 000 TPE, en ont bénéficié, pour des montants s’étageant entre 1 000 euros et 10 millions d’euros. Cette activité se développe à marche forcée. Elle nous a demandé de gros investissements – le recrutement d’intérimaires – car c’est le seul de nos métiers où nous sommes en contact direct avec les TPE, sans intermédiation des banques.

Le crédit à moyen et à long terme prend diverses formes : crédit-bail, crédit classique avec prise de sûretés et prêts de développement sans garantie.

Notre activité de crédit-bail matériel a crû l’an dernier de 26 %, sur un volume relativement limité de 500 millions d’euros ; dans le crédit-bail immobilier, domaine dans lequel Oséo était très puissant, nous maintenons une part de marché élevée, de l’ordre de 12 %, avec une croissance raisonnable de 10 %. Les prêts de développement, qui sont au cœur de l’objectif de financement de l’investissement, sont consentis sans garantie, pour sept ans, avec un différé de remboursement de deux ans ; ils sont assis sur des fonds de garantie dépendant entièrement des financements de l’État par le biais du programme d’investissements d’avenir et, marginalement, du Fonds européen d’investissement. Ces prêts ont un effet puissant puisque l’entreprise est libre de choisir comment l’utiliser au mieux pour se développer. Par ce moyen, Bpifrance finance l’immatériel, ce que les banques privées font mal, si bien que nous occupons une place centrale sur ce marché ; il n’est pas surprenant que cette activité ait augmenté de 40 % en 2014. Nous avons pour objectif de parvenir en 2015 à un volume de prêts de développement sans garantie compris entre 1,9 et 2 milliards d’euros.

Nous sommes une banque de place : notre objectif est de créer un effet multiplicateur et d’entraînement sur le marché bancaire. Aussi bien, un crédit n’est consenti que si la règle du « un pour un » est respectée, autrement dit à la condition expresse qu’une banque consente à l’entreprise considérée le même volant de crédit dans les trois à quatre mois qui suivent – le risque est toujours partagé. Nous nous en tenons strictement à cette règle fondamentale, établie pour éviter que Bpifrance ne se trouve encombrée de tous les mauvais risques de la place et pour garder de bonnes relations avec les établissements bancaires, nos partenaires.

Ce principe connaît une exception : les prêts à l’innovation – qui sont les prêts les plus risqués – alloués à des entreprises dont le résultat opérationnel est négatif et qui sont pour cette raison peu bancarisables. Le prêt à l’innovation est en effet une autre de nos activités, financée par la deuxième vague du programme d’investissements d’avenir. Bpifrance est chargée, dans ce cadre, de gérer 3 milliards d’euros. Les principes qui régissent notre intervention sont une attention portée de manière primordiale au client, la simplicité, la réduction des délais et la lutte contre toutes les dérives bureaucratiques. Avec M. Louis Gallois puis avec M. Louis Schweitzer, et avec le soutien des ministres, celui de M. Arnaud Montebourg en particulier, nous avons réussi à imposer comme discipline la rapidité d’exécution de l’allocation d’une subvention à une entreprise ou à une université. Nous voulons que les fonds soient injectés dans l’économie française le plus vite possible ; de fait, les délais, qui étaient de 15, et parfois 18 mois, ont été réduits à 3 mois.

Autre métier de Bpifrance : la contribution à la constitution de fonds propres, avec une gamme complète de possibilités. Nos investissements dans les fonds de fonds privés français ont connu une croissance phénoménale de 50 % : en 2014, nous avons injecté 800 millions d’euros dans les fonds français, car cette année-là les levées de fonds ont été nombreuses ; nous ne ferons pas cela tous les ans. Nous finançons environ 300 fonds. C’est une réalité méconnue que la France, par l’action de la Caisse des dépôts (CDC) et maintenant de Bpifrance, est, ex aequo avec le Royaume-Uni, la deuxième place mondiale du capital- risque et du capital-développement des PME. Il existe dans notre pays 100 fonds de capital-risque, et seulement 5 en Allemagne. On comprend que les Allemands puissent considérer la France comme la Californie de l’innovation, au point de nous demander de mettre des capitaux dans leurs fonds, sous condition de réinvestissement en France. KfW Bankengruppe, notre partenaire allemand, qui a décidé de lancer une politique de prêt à l’innovation en Allemagne, y consacrera 400 millions d’euros en cinq ans, soit dix fois moins que Bpifrance. Le secteur financier français d’investisseurs – nous finançons 1 700 professionnels de l’investissement - est un actif stratégique pour le pays.

Outre que nous investissons dans les fonds de fonds, nous avons aussi des fonds directs. Les premiers sont les fonds directs de capital-risque, qui concernent le Bio’Tech, l’Internet, la transition énergétique, les Med’Tech, tous secteurs en effervescence : nous sommes presque débordés par le nombre de dossiers à traiter, tant les élèves ingénieurs préfèrent désormais créer leur entreprise plutôt que de rejoindre un grand groupe. Nous finançons donc des incubateurs et des accélérateurs. Grâce au Fonds national d’amorçage, qui dispose d’un milliard d’euros, nous commençons par allouer des prêts d’amorçage avant de faire des prêts de capital-risque puis d’accompagner la phase de croissance internationale par des participations en capital, grâce au fonds Large Venture, créé en 2013 et doté de 600 millions d’euros. Notre boîte à outils est donc complète : on peut partir d’une aide à l’innovation de 200 000 euros pour parvenir progressivement, de prêt d’amorçage en co-investissements avec des business angels, à une participation en capital de 10 millions d’euros. Mais les innovations sont si nombreuses que, pour être à la hauteur de cette révolution de l’économie française, nous avons dû recruter des investisseurs et investir de plus en plus dans des fonds privés de capital-risque. Le développement de l’innovation, loin d’être exclusivement parisien, est un phénomène constaté partout sur le territoire. C’est un grand facteur d’espoir pour notre pays, et cela commence à être reconnu à l’étranger.

Un autre type d’intervention en fonds propres directs se fait par le biais de l’ancien Fonds stratégique d'investissement (FSI), devenu la division « ETI et grandes entreprises » de Bpifrance. En 2014, nous avons déployé un tiers de capital de plus qu’en 2013, en quinze opérations qui ont concerné des ETI, non de grandes entreprises – même si nous avons passé beaucoup de temps sur le dossier Alstom, qui a été reporté à 2015. Nous avons en particulier investi 44 millions d’euros dans l'opérateur boursier Euronext et nous sommes entrés au capital de Technicolor pour l’aider à résister à l’activisme d’un fonds étranger qui se proposait de démanteler l’entreprise. Je citerai aussi une prise de participation de 180 millions d’euros, à Morlaix, dans Sermeta, leader européen des échangeurs thermiques pour chaudières à gaz, très belle entreprise avec laquelle nous avons signé un partenariat de dix ans.

Notre dernier métier est le capital développement des petites et moyennes entreprises, qui s’opère par l’entremise d’un réseau d’investisseurs en province. Nous avons investi dans cent entreprises pour 1 million d’euros en moyenne, dans 60 % des cas en capital pur, dans 40 % des cas en obligations convertibles. Cette activité aussi est en forte croissance.

On pourrait craindre que l’augmentation de l’activité de la Bpi dans tous ses métiers, qui se poursuivra en 2015 selon la même trajectoire, ne s’assortisse de l’accroissement corrélatif du coût du risque. Ce n’est pas le cas. Dès ma nomination, j’ai signifié que la création de Bpifrance ne modifierait pas la politique de risque. On a pu croire, un temps, que Bpifrance apporterait la solution à tous les maux du pays, si bien que nos chargés d’affaires bancaires ont été soumis à très forte pression pour accorder des crédits dans des conditions difficiles. J’ai fait savoir que la politique de sinistralité qui avait fait le succès d’Oséo ne changerait pas. Il résulte de ces consignes que notre très forte croissance en 2014 s’est faite avec un coût du risque bancaire, dérisoire, de 36 millions d’euros pour un bilan de 55 milliards d’euros.

En fonds propres, le coût du risque est plus élevé. Nous avons été conduits à prévoir des provisions substantielles pour Sequana, qui a été sauvée ; pour certaines entreprises cotées opérant dans le secteur parapétrolier – Technip, Vallourec, CGG – ; pour Eramet, en raison de la crise du nickel. Mais le total des provisions passées sur des participations en fonds propres est un multiple du coût du risque bancaire d’une activité qui permet de financer, directement et indirectement, 30 000 PME françaises par an. Toujours et en tous lieux, l’investissement en fonds propres est dix fois plus risqué que le crédit, mais nos comités d’investissements sont extrêmement exigeants.

Je conclurai par quelques mots sur la gouvernance de Bpifrance. Au conseil d’administration de la société de tête siègent notamment des représentants de la CDC, de l’État, des régions – M. Jean-Paul Huchon et Mme Marie-Guite Dufay – et des salariés, ainsi que des personnalités qualifiées indépendantes : M. Eric Lombard, président de Generali Europe, qui dirige le comité d’audit, et Mme Amélie Faure, entrepreneure, qui dirige le comité des nominations. Ce conseil d’administration élabore le plan stratégique et le budget ; il se prononce, exceptionnellement, sur les opérations qui excédent 200 millions d’euros.

La société de tête chapeaute des filiales. Au conseil d’administration de Bpifrance Investissement siègent également des administrateurs indépendants : M. Frédéric Saint-Geours dirige le comité d’investissement aux côtés de Mme Florence Parly, par ailleurs présidente du comité des nominations. Le capital de Bpifrance Financement étant détenu à 90 % par l’État et à 10 % par des banques et des compagnies d’assurance, celles-ci sont représentées au conseil d’administration : c’est le cas de la Société générale, le comité d’audit étant présidé par Mme Catherine Halberstadt, de la BPCE. Siègent également des personnalités qualifiées indépendantes telles M. Jean-Luc Petithuguenin, président-directeur-général du groupe Paprec, ou Mme Marie-Christine Levet, présidente de MCL Consulting. Cette structure est d’une gestion un peu lourde, mais les débats se passent bien.

Mme la présidente Véronique Louwagie. Jugez-vous satisfaisante la coordination entre Bpifrance et les autres acteurs chargés de l’internationalisation des entreprises que sont Business France, la Coface et le Fonds international de la CDC ? Vous avez fait état d’une forte demande de crédits à l’innovation, ce qui est réjouissant, mais vous avez indiqué que le volume des dossiers à examiner vous pose problème. Ces difficultés traduisent-elle un manque de moyens humains ou financiers ? Quelles suggestions pouvez-vous faire à ce sujet ? Enfin, quels critères président à vos choix ? Avez-vous retenu des secteurs d’action prioritaires ou appréciez-vous les dossiers au cas par cas ?

M. Laurent Grandguillaume, rapporteur. Comment sont résolus les éventuels désaccords entre l’État et la Caisse des dépôts, qui contrôlent Bpifrance à parité ? Quels sont les frais fixes de Bpifrance, et notamment sa masse salariale ? Quelle est votre stratégie de rémunération et quel est l’écart entre le plus hauts et les plus bas salaires ? Sur un autre plan, comment coordonnez-vous votre action avec le Commissariat général à l’investissement et l’ADEME ? Comment les fonds dont dispose Bpifrance sont-ils dirigés vers les TPE, l’innovation, la transition énergétique et l’économie sociale et solidaire ? En particulier, qu’en est-il du mécanisme de soutien de la BPI aux sociétés de recherche sous contrat et de son enveloppe de 10 millions d’euros en subventions ? Comment la Banque applique-t-elle les 19 recommandations du rapport Beylat-Tambourin destinées à stimuler l'innovation, qui reconnaissent l’importance des Instituts Carnot, des centres techniques industriels et des structures de recherche sous contrat ?

M. Nicolas Dufourcq. Pour l’international, notre partenaire Business France, né de la fusion de l'Agence française pour les investissements internationaux et d'Ubifrance, nous a délégué 40 chargés d’affaires internationaux chargés de convaincre les entrepreneurs de se projeter à l’export. Nous avons équipé toutes nos agences d’un système de visio-conférence branché sur le réseau mondial de Business France. Nous avons développé une gamme de produits export. Pour le principal d’entre eux, le prêt export, qui est un prêt de développement sans garantie de 3 millions d’euros, l’enveloppe a doublé en 2014 et continuera de croître. C’est un axe stratégique majeur pour Bpifrance car les entreprises qui innovent et qui exportent sont en croissance. Aussi prenons-nous l’initiative, par un porte-à-porte – 75 000 visites en 2014 – de faire savoir aux entreprises que nous pouvons financer leur croissance par l’internationalisation. Outre le prêt export, nous disposons pour cela de plusieurs instruments. Nous nous attachons à mobiliser les créances nées à l’étranger, conformément à un dispositif lancé en septembre dernier et qui prend son essor. Nous distribuons l’assurance prospection de la Coface par le biais de vingt développeurs Coface qui sont pour partie à la BPI. Nous avons aussi une activité de crédit acheteur à l’export, également lancée en septembre dernier pour les ETI françaises ; elle nous permet de financer les acheteurs étrangers de biens d’équipement français. Tout cela concerne des contrats compris entre 10 et 40 millions d’euros. Au-delà, les banques françaises sont correctement équipées pour pourvoir aux besoins.

Je souhaite renforcer notre excellente collaboration avec Business France. Le déficit commercial de la France étant celui que l’on sait, les 40 chargés d’affaires internationaux qui nous ont été dépêchés ne suffisent pas ; leur effectif devrait passer à 150 personnes, autant qu’en compte notre réseau chargé des prêts à l’innovation. Je continuerai de pousser en ce sens. De même, nous pourrions faire beaucoup plus avec la Coface que de distribuer son assurance prospection ; la tutelle en discute. Le partage des tâches à l’international avec la Caisse des dépôts est connu : la CDC a créé CDC International Capital, structure qui reçoit des capitaux de certains fonds souverains, dont ceux du Qatar et d’Abou Dhabi, et qui les réinvestit dans des infrastructures et, le cas échéant, dans les ETI françaises. Nous essayons de travailler en bonne intelligence avec ce fonds. Je souligne que Bpifrance investit uniquement dans le financement des entrepreneurs, aucunement dans les infrastructures.

Pour ce qui est des prêts à l’innovation, nous avons fait de grands progrès dans les délais de traitement, et les dérapages ponctuels qui ont pu être observés dans certaines régions relèvent du management. Une faiblesse potentielle demeure : si les ressources issues du programme d’investissement d’avenir sont sanctuarisées dans la durée, il n’en va pas de même des crédits du programme 192 - Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle. Ces crédits permettent d’accorder des aides de 200 000 à 500 000 euros à 3 000 entreprises françaises chaque année. C’est le cœur du financement de l’innovation : il n’est pas une entreprise innovante qui ait commencé ses activités sans un prêt de ce type. Or, il nous faut batailler à chaque instant pour préserver l’intégralité de ce budget, au demeurant relativement modeste à l’échelle du pays, et qui est tous les ans en danger. En proportion de leur PIB respectif, la Suède et la Finlande consacrent à cet objet de 5 à 8 fois plus que nous. Avec un budget annuel oscillant entre 175 et 180 millions d’euros, nous sommes à l’étiage ; il ne faut en aucun cas faire moins. En l’état, dès le 15 octobre, nous n’avons plus rien à distribuer, non que nous ayons été trop larges au premier semestre, mais parce que la ligne budgétaire allouée au programme 192 est épuisée. Cela nous contraint, pendant tout le dernier trimestre, à inviter les entreprises à réitérer leur demande en janvier ; c’est peu satisfaisant. Nous nous interrogeons donc sur les moyens de pérenniser un montant compris entre 200 à 250 millions d’euros destiné au cœur du financement de l’innovation en France. J’appelle à comparer ces 250 millions d’euros, destinés à 3 000 PME et directement créateurs d’emplois, aux 700 millions d’euros qui seront injectés dans le seul programme de recherche et développement « Nano 2017 ». Il faut préserver cette ligne, absolument.

Nos relations avec le Commissariat général à l’investissement, dont nous sommes l’opérateur, sont permanentes. Pour éviter d’allonger indûment les délais d’exécution, les rôles doivent être clairement répartis : au Commissariat la définition de la stratégie et le pilotage de l’allocation des ressources, à Bpifrance le soin de les mettre en œuvre. La Banque est entièrement centrée sur le client : sur le terrain, nos 150 scientifiques choisissent et instruisent les dossiers, les font remonter, et la décision, positive ou négative, est prise sans que d’autres équipes aient à refaire les additions.

Avec l’Ademe, qui conduit ses opérations spécifiques en fonds propres, et sans doute faute de temps de part et d’autre, nous avons très peu de relations, si ce n’est dans le cadre de notre fonds EcoTech, qui mobilise 250 millions d’euros en faveur de la transition énergétique.

Vous m’avez interrogé sur les critères qui déterminent nos choix. Dans le volet « fonds propres » de nos activités, on trouve des fonds thématiques : un fonds Internet, un fonds BioTech, un fonds NetTech, un fonds EcoTech. De même, dans le volet « fonds de fonds », il y a une classe d’actifs BioTech, une classe d’actifs Internet et aussi une très petite classe d’actifs « transition énergétique ». Ce secteur du capital investissement est en effet dangereux, coûteux et rapporte peu, si bien qu’en France, deux fonds seulement se sont spécialisés dans ce domaine. Les fonds d’amorçage sont également spécialisés.

En revanche, pour le milliard d’euros que nous distribuons chaque année dans le cadre de nos activités bancaires – aides à l’innovation, subventions, programmes collaboratifs du programme d’investissements d’avenir, subventions du Fonds unique ministériel, programme d’innovations de rupture de Mme Anne Lauvergeon, prêts pour l’innovation et prêts d’amorçage –, nous n’avons défini a priori ni enveloppe ni quota par grand secteur d’avenir. Ce qui compte pour nous est la qualité de l’entrepreneur : nous ne voulons donner de capitaux ni à des professeurs Cosinus incapables de passer au stade du développement industriel de leurs inventions, ni à d’excellents entrepreneurs dont l’envergure scientifique est insuffisante. C’est dire l’importance de nos talentueuses équipes sur le terrain.

Nous finançons l’économie sociale et solidaire par le biais du Fonds d’investissement dans l’innovation sociale (FISO), doté de 10 millions d’euros alloués dans les régions par nos équipes « Innovation ». Nous avons lancé lundi dernier notre nouvelle politique d’allocation, dans laquelle nous insistons sur les projets d’innovation non technologiques – ceux qui concernent les usages. Les Français ont brillé par leur créativité dans des innovations d’usage avec des inventions telles que le stylo Bic ou le minitel. C’est moins le cas maintenant car nos dispositifs de financement de l’innovation nous imposaient de ne financer que des produits ; en Scandinavie, 30 % des aides à l’innovation vont à l’innovation non technologique et une partie à l’innovation sociale. Notre vision de l’innovation est maintenant élargie et nous avons d’autre part commencé de déployer un prêt de développement « Économie sociale et solidaire » sans garantie. Cela a pris du temps, le fonds de garantie qui permettait de le lancer n’étant jusqu’alors pas alimenté par l’État ; il l’est maintenant. Enfin, nous allons lancer le prêt « quartiers » de 50 000 euros, autre prêt de développement sans garantie. Voilà pour les crédits.

Pour ce qui est des fonds propres, nous avons pris des participations au capital de plusieurs coopératives telles que Limagrain et Sofiprotéol. Outre cela, nous avons injecté en 2014 des ressources dans Citizen Capital et Impact Partenaires, les deux seuls fonds qui alimentent en fonds propres des entreprises situées dans des zones défavorisées ; nous serons amenés à renforcer leurs moyens car ils ont d’autres idées. Des fonds de cette sorte, il en faudrait dix, mais les équipes d’investisseurs entrepreneurs à composante sociale capables de sélectionner les risques sans se rémunérer comme on se rémunère dans les fonds classiques, ne sont pas légion.

Les TPE concernent des millions d’individus. Bpifrance, avec un effectif de mille personnes sur le terrain, n’est pas outillée pour les traiter, et n’a pas été conçue pour cela. La tâche revient aux réseaux bancaires, qui ont chacun plusieurs dizaines de milliers de salariés. Nous n’avons de relations avec les TPE que pour le préfinancement du CICE – ce qui représente 15 000 contrats par an.

Pour les TPE de l’économie sociale et solidaire, ce sont les réseaux d’Initiative France, de France Active et de l’ADIE qui interviennent. Ces réseaux entrent dans le périmètre de la CDC ; nous ne les finançons pas, mais ils distribuent notre prêt « économie sociale et solidaire ».

Vous m’avez interrogé sur le règlement des désaccords éventuels entre nos deux actionnaires, l’État et la CDC. Ce qui concerne Bpifrance passe pour l’essentiel par M. Régis Turrini, Commissaire de l’Agence des participations de l’État, d’une part, M. Franck Silvent, directeur du pôle Finances, stratégie et participations du groupe Caisse des dépôts d’autre part. La politique de dividendes est maintenant définie et il n’y a pas de désaccords entre eux. Nous entretenons un dialogue créatif avec la direction du Trésor et il n’y a pas davantage de conflits, ni sur la gestion de la garantie, ni sur les nouveaux produits bancaires. Avec la direction générale des entreprises, le dialogue sur l’innovation se déroule bien.

Les deux plus hauts salaires de Bpifrance – le mien et celui de l’ancien directeur général du Fonds stratégique d’investissement – sont, comme c’est la règle, plafonnés à 450 000 euros. Je pense que l’écart entre les plus hauts et les plus bas salaires est d’environ 1 à 18. Les différences de rémunérations versées par les quatre entités qui ont formé Bpifrance étaient assez marquées. Nous avons entièrement révisé la structure des rémunérations et nous entendons parvenir à l’harmonisation en six ans. Nous corrigerons progressivement les décalages en commençant par les plus bas salaires, ceux des fonctions support en particulier ; nos actionnaires ont aussi donné leur accord pour que certaines catégories salariales soient repositionnées.

Vous m’avez interrogé sur nos frais fixes. Pour le fonds d’investissement, la mesure se fonde sur deux indicateurs : le nombre d’investissements réalisés par an et par investisseur et le nombre de lignes d’investissement suivies par an et par investisseur. Avec, en moyenne, 7,5 lignes et 5 investissements annuels par investisseur contre respectivement 4,5 et 3 sur le marché, nos chargés d’affaires, très productifs, ont une plus lourde charge que leurs homologues. C’est une des raisons pour lesquelles nos actionnaires ont accepté que nous recrutions en 2015.

Pour les activités de crédit, les frais fixes se mesurent en calculant le coefficient d’exploitation et sa stabilité dans le temps. Le notre est stable à 62 % pour une activité très particulière, puisque la garantie ne rapporte rien ; le crédit rapporte 5 % et les prêts à l’innovation, parce qu’ils ont été débudgétisés pour les frais de fonctionnement, nous font perdre, structurellement, 30 millions d’euros par an. En partant d’une base 100 en 2009, le volume des en-cours de prêts de garantie est de 240 dans le budget 2015, les frais de personnel s’établissant à 133. Pour une activité qui a été multipliée par 2,3 depuis 2009, les frais de personnel ont été multipliés par 1,3 et les effectifs par 1,16 – en tenant compte des recrutements à venir en 2015. Nous sommes d’une frugalité extrême, et aucun recrutement n’a lieu si le conseil d’administration de la maison mère n’en a pas voté le budget.

M. Arnaud Leroy. J’avais milité en faveur d’un fort partenariat entre l’Ademe et Bpifrance ; je suis donc surpris par ce que vous nous avez dit à ce sujet et nous devrons nous y intéresser. Je partage votre opinion sur l’importance du capital-risque français ; la loi Macron devrait d’ailleurs nous doter d’un outil qui nous permettra de lutter contre nos concurrents luxembourgeois pour attirer les fonds internationaux.

Deux fonds, nous avez-vous dit, se sont spécialisés dans le financement de la transition énergétique. Ce secteur, outre qu’il est très capitalistique, demande des engagements de très long terme de 15 ans, parfois de 30 ans. J’entends que le rôle de Bpifrance n’est pas de financer des infrastructures, il n’empêche : nous avons besoin d’un soutien pour car la transition énergétique forme un écosystème de PME et d’ETI. Comment satisfaire ce besoin d’investissements de long terme dont le rythme de rendement n’est pas le rythme habituel ?

Le plan Juncker tend, en mobilisant 21 milliards d’euros, à en mettre par effet de levier, 315 milliards à disposition de l’économie européenne. Dans ce cadre, Bpifrance sera certainement sollicitée, soit pour donner des garanties, soit pour prendre des participations en capital ; quel rôle imaginez-vous jouer dans ce chantier important pour la relance de l’économie européenne ? Comment pouvons-nous vous aider si des évolutions législatives sont nécessaires ?

M. Gilles Carrez. Le plan Draghi de rachat massif d’actifs se fera à 80 % par le biais des banques centrales nationales. Selon le gouverneur de la Banque de France, la Banque centrale européenne espère susciter un enchaînement vertueux, ces rachats de dette souveraine entraînant une réallocation d’actifs financiers plus orientée vers les entreprises. On en comprend l’idée, mais cela aura-t-il un impact sur vos conditions de financement et vos conditions d’interventions en fonds propres ?

M. Louis Schweitzer a indiqué que, pour le plan Juncker, les propositions françaises seront gérées par le Commissariat général à l’investissement, plus précisément M. Thierry Francq, commissaire général adjoint. Enfin, l’opérateur principal du programme d’investissements d’avenir en matière de recherche est l’Agence nationale de la recherche (ANR). Existe-t-il une articulation entre l’ANR et Bpifrance ?

M. Nicolas Dufourcq. Nous sommes le premier banquier de la transition énergétique française. En 2014, nous avons distribué 800 millions d’euros de crédits pour l’éolien, le photovoltaïque, la biomasse ou encore l’hydro-électrique ; c’était l’objectif stratégique que nous nous étions fixé pour 2017 ! Nous avons désormais de 25 à 30 % de parts de ce marché. Ce sont des crédits à 20 ou 25 ans pour lesquels nous prenons des hypothèques sur l’ensemble des infrastructures. Je vous l’ai dit, nous ne financerons pas des équipements autoroutiers ou des infrastructures du type du viaduc de Millau – c’est le rôle de la CDC – mais, depuis le 1er janvier 2015, nous gérons un nouveau fonds, doté de 425 millions d’euros, qui investit dans les sociétés de projets – pour moitié dans la transition énergétique, pour moitié dans les « usines du futur » – par des crédits de 10 à 15 millions d’euros. Nous faisons des crédits à 25 ans, mais pas encore de crédits à 30 ans.

Comme l’a signalé M. Gilles Carrez, M. Thierry Francq centralise les propositions françaises relatives au plan Juncker. Nous en avons quatre. Notre ressource rare, je vous l’ai dit, c’est l’argent public dans les fonds de garantie. En aurions-nous davantage que nous allouerions plus de crédits sans garantie, de prêts de développement, de prêts à l’innovation, de prêts export, avec un formidable effet multiplicateur – il est de 10, et parfois de 12. Il n’y a pas mieux en termes d’allocation d’argent public que des fonds de garantie à effet multiplicateur, correctement gérés. Nous voulons donc que de l’argent du plan Juncker soit injecté dans nos fonds de garantie, par le canal du programme de partage de risque (Risk sharing instruments, RSI) du Fonds européen d’investissement. Bpifrance est parfaitement équipée pour mettre en œuvre un système de garantie qui a fait ses preuves ; le FEI n’a donc aucune raison de la contourner.

Ensuite, s’il y a suffisamment d’argent public dans le capital développement et dans le capital-risque, les fonds privés demeurent insuffisants, ce qui nous oblige à faire le tour du monde pour trouver des capitaux. Cela tient en particulier aux obligations prudentielles fixées par la directive Solvabilité II. Il conviendrait donc, pour permettre aux assureurs vie européens d’investir, de leur accorder la garantie gratuite de leurs opérations de capital investissement. Nous recommandons la mise au point d’un tel mécanisme.

Notre troisième proposition est d’appeler à la constitution d’un fonds de fonds européen de capital-risque, fonds commun des grandes banques de développement européennes associant les fonds français, britanniques, scandinaves et l’amorce de fonds allemand. Le principe serait le suivant : pour tout investissement dans un fonds français, ce fonds européen centralisé, dans lequel auront été injectées des ressources issues du plan Juncker, co-investirait automatiquement.

Notre dernière proposition est que le plan Juncker accompagne les tentatives de création de fonds transnationaux, pour permettre aux PME européennes de se mondialiser plus rapidement. Pour cela, elles ont tout intérêt à ce que les fonds entrés à leur capital aient un bureau à Paris et aussi à Munich ou à Stockholm. Nous avons quelques fonds transnationaux, notamment le Fonds franco-chinois, dans lequel nous avons investi 250 millions d’euros. Jamais les billets de banque chinois n’auraient intégré des éléments de sécurité de la société française Hologram Industries si le Fonds franco-chinois n’avait eu une équipe à Shanghai. Les fonds transnationaux sont essentiels à l’économie, mais difficiles à monter et à financer. Le plan Juncker nous rendrait donc un signalé service s’il avait pour effet que, lorsque nous décidons d’investir 10 millions d’euros dans un fonds allemand à condition qu’il réinvestisse en France, un abondement du même montant soit automatique.

J’ajoute que le plan Draghi a pour conséquence directe l’écrasement des taux, et donc des marges des banques.

M. Gilles Carrez. Il va aussi provoquer la baisse du cours de l’euro. Bpifrance pourrait alors être confrontée à un afflux de demandes d’intervention de la part de PME enclines à penser que certains de leurs produits qui n’étaient pas compétitifs jusqu’alors peuvent le devenir. Vous êtes-vous préparés à cette éventualité ?

M. Nicolas Dufourcq. Oui, en nous fixant pour 2015 un objectif de prêts à l’export très élevé. Nous avons deux priorités stratégiques : l’international et l’accompagnement des entreprises. Aux Assises du financement et de l’investissement, nous avons annoncé la création d’un dispositif de déconsolidation des crédits aux PME et ETI dans les bilans des banques françaises pour les revendre aux assureurs vie. Ainsi, nous proposerons à une banque qui a un portefeuille de 80 milliards d’euros de crédit aux PME qu’elle nous en cède la moitié. Nous logerons cette créance dans un fonds de prêt à l’économie garanti à 100 %, et nous en revendrons le rendement aux assureurs vie – rendement qui, même diminué du coût de la garantie, est plus élevé que celui des dettes souveraines qui ne rapportent plus grand-chose.

M. Gilles Carrez. Un tel mécanisme suppose un processus de titrisation des prêts à des PME dont je ne sais s’il existe.

M. Nicolas Dufourcq. La créance sera stockée : elle n’a pas vocation à être revendue sur le marché ; l’assureur vie prendra le rendement. L’opération allégera le bilan des banques, qui pourront donc distribuer plus de crédits. En revanche, leur produit net baissera. Aussi, le dispositif n’intéressera que celles des banques qui souhaitent disposer d’une marge de solvabilité supplémentaire. Nous sommes en discussion à ce sujet avec le secteur bancaire.

Mme la présidente Véronique Louwagie. Si Bpifrance n’a pas de politique sectorielle et prend pour seul critère la qualité de l’entrepreneur, ne risque-t-elle pas finalement de simplement se substituer aux banques traditionnelles ?

M. le rapporteur. J’aimerais vous entendre à propos de l’action Bpifrance pour les structures de recherche sous contrat. D’autre part, comment analysez-vous le fait que le nombre d’ETI diminue en France en dépit des efforts déployés pour les accompagner ?

M. Nicolas Dufourcq. Nous ne sommes jamais en concurrence avec les établissements bancaires car nous ne consentons jamais un crédit qui ne soit cofinancé par une banque. Dans la grande majorité des cas, nous concluons les pools bancaires en apportant un prêt sans garantie. Nous sommes assez puissants dans le secteur du crédit-bail mais, là encore, la condition sine qua non de notre intervention est qu’une banque fasse un crédit à moyen ou long terme. Nos taux d’intérêt sont ceux du marché, c’est-à-dire ceux de nos partenaires bancaires, et notre présence bancaire par secteur est assez proche de la répartition par secteur du PIB français, avec une sous-pondération dans le secteur agro-alimentaire que nous souhaitons corriger en 2015. Je le redis, nous ne concurrençons les banques à aucun moment.

Les ETI sont au cœur de notre stratégie. Nous pensons qu’il y a en France 650 « champions cachés » ; certes, c’est beaucoup moins que les 4 000 ETI allemandes, mais c’est beaucoup plus qu’on ne le pensait. On a récemment constaté, au nombre des 60 000 défaillances d’entreprise annuelles, celles de quelques ETI. Cela résulte du fait qu’elles ne sont pas assez mondialisées. Les ETI françaises réalisent en moyenne 20 % de leur chiffre d’affaires à l’exportation (la proportion est de 70 % pour les ETI allemandes) parce que souvent, le capital de ces sociétés n’est pas ouvert ; en corollaire, la gouvernance, assez stable, tend au conservatisme. Après six ans de crise et de traversée du désert, les ETI sont très prudentes. Notre travail est de les convaincre d’investir, d’exporter, d’ouvrir leur capital en les persuadant que nous allons les propulser à l’international pour que leur chiffre d’affaires double, puis triple. Notre tâche consiste à les équiper et à les motiver ; il y faudra du temps.

Dans deux semaines, nous lancerons un accélérateur, autrement dit un cocktail multivitaminé destiné à 75 PME que nous suivrons pendant trois ans par un accompagnement à la définition puis à l’exécution de véritables business plans. Nous lancerons également une « initiative conseil » essentiellement destinée aux ETI. Elle consistera à inciter les dirigeants de ces sociétés à rédiger, avec notre aide, le plan stratégique qui leur fait défaut – l’entreprise versant pour cela 5 000 euros, Bpifrance autant. Nous comptons réaliser 150 de ces « flashes stratégiques » en 2015, sortir ainsi les ETI de leur routine et apprécier dans trois ans les résultats obtenus.

Mme la présidente Véronique Louwagie. Monsieur, je vous remercie.

Membres présents ou excusés

Mission d'information commune sur la Banque publique d'investissement, Bpifrance

Réunion du jeudi 29 janvier 2015 à 11 heures

Présents. - M. Laurent Grandguillaume, M. Arnaud Leroy, Mme Véronique Louwagie

Excusés. - Mme Sabine Buis, M. Joël Giraud, Mme Clotilde Valter

Assistait également à la réunion. - M. Gilles Carrez