Accueil > Travaux en commission > Commission des affaires sociales > Les comptes rendus

Afficher en plus grand
Afficher en plus petit
Voir le compte rendu au format PDF

Commission des affaires sociales

Mercredi 25 juillet 2012

Séance de 8 heures 45

Compte rendu n° 05

Présidence de Mme Catherine Lemorton, Présidente

– Audition, ouverte à la presse, de M. Didier Migaud, premier président de la Cour des comptes, sur le rapport relatif à la situation et les perspectives des finances publiques et celui sur la certification des comptes du régime général de sécurité sociale pour 2011

– Informations relatives à la Commission

– Présences en réunion

COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES

Mercredi 25 juillet 2012

La séance est ouverte à huit heures cinquante.

(Présidence de Mme Catherine Lemorton, présidente de la Commission)

La commission des affaires sociales procède à l’audition, ouverte à la presse, de M. Didier Migaud, premier président de la Cour des comptes, sur le rapport relatif à la situation et les perspectives des finances publiques et celui sur la certification des comptes du régime général de sécurité sociale pour 2011.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Nous recevons M. Didier Migaud, Premier président de la Cour des comptes. Il était important de l’entendre au regard de la situation difficile des finances publiques de notre pays, qu’il s’agisse de la dette ou du déficit.

Nous aurons l’occasion de l’interroger sur deux rapports, l’un sur la situation et les perspectives des finances publiques – en préambule au débat que nous avons eu il y a deux semaines à ce sujet –, l’autre, sur la certification des comptes du régime général de sécurité sociale pour 2011 – celui sur l’exécution de la loi de financement devant à cet égard nous parvenir d’ici à quelques semaines.

Certains comptes de branche sont certifiés avec réserve, d’autres ne le sont pas, montrant que nous sommes confrontés à un véritable problème structurel de financement des comptes sociaux. Il est de notre responsabilité d’y apporter une solution.

M. Didier Migaud, Premier président de la Cour des comptes. Je vous remercie d’avoir organisé cette audition. Elle intervient peu après le dépôt du rapport annuel sur la situation et les perspectives des finances publiques et donne à la Cour l’occasion de préciser à votre attention comme à celle des citoyens les messages qu’elle formule dans le champ des finances sociales. Elle est également l’occasion de répondre à votre souhait de débattre sur le contenu du rapport de certification des comptes du régime général de sécurité sociale, que j’aborderai en premier lieu.

Comme le prévoit la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale, le rapport de la Cour sur la certification des comptes de 2011 du régime général de la sécurité sociale vous a été remis avant la fin du mois de juin.

Le régime général de sécurité sociale réalise chaque année des centaines de millions d’opérations. Le périmètre d’audit de la Cour est très donc large : il recouvre 460 milliards d’euros de produits, dont certains affectés à des tiers comme l’assurance chômage, et 390 milliards d’euros de charges, soit respectivement 23 % et 19,6 % de la richesse nationale.

Avec de tels volumes, la démarche d’audit cherche tout particulièrement à apprécier si les systèmes d’information et les dispositifs de contrôle interne, dans leur conception et leur mise en œuvre, permettent de maîtriser les risques d’anomalies ayant une incidence sur les comptes.

Cette année, la Cour a pris acte de l’importance des réorganisations en cours au sein des différents réseaux. À titre d’exemple, les caisses d’allocations familiales (CAF) ont été regroupées en 2011 et sont passées de 123 à 102. De tels chantiers ont concentré largement les efforts des équipes de direction. La Cour a cependant observé en 2011 un ralentissement de la démarche continue et progressive d’amélioration de la qualité des comptes du régime général. En témoigne l’augmentation du nombre de réserves ou d’éléments motivant un refus de certification, soit 42 au total, contre 39 en 2010.

S’agissant de la branche famille, la Cour avait certifié avec des réserves ses comptes pour l’exercice 2010. L’augmentation de 1,2 à 1,6 milliard d’euros du montant des erreurs de portée financière qui affectent les prestations versées et comptabilisées par la branche, selon les propres mesures établies par la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF), a conduit la Cour à estimer ne pas être en mesure de certifier les comptes de la branche famille et de la caisse nationale pour l’exercice 2011. Ces erreurs recouvrent principalement des trop-perçus par les allocataires et concernent surtout le revenu de solidarité active (RSA) et les aides au logement.

L’augmentation du montant des erreurs de portée financière souligne l’inadaptation du dispositif de contrôle interne de la branche, caractérisé notamment par des insuffisances de conception et des faiblesses de pilotage par la caisse nationale. En particulier, celle-ci ne fixe pas aux organismes de son réseau des objectifs de montants d’erreurs à ne pas dépasser, mais des objectifs en nombre de contrôles à réaliser. En outre, les caisses d’allocations familiales bénéficient d’une autonomie excessive dans la réalisation effective des contrôles prescrits par la caisse nationale. La Cour a également relevé des faiblesses dans le domaine des systèmes d’information, notamment le caractère incomplet des tests en environnement de production préalablement au déploiement de nouvelles versions applicatives et les insuffisances du dispositif de suivi des incidents informatiques.

Enfin, il convient de souligner un désaccord sur une écriture comptable de provision, dont il résulte une amélioration de 540 millions d’euros du montant du résultat de l’exercice, qui a été arrêté à - 2,6 milliards d’euros.

S’agissant des comptes de la branche des accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP), en 2010, la Cour avait refusé d’en certifier les comptes en raison principalement des insuffisances cumulées du contrôle interne relatif aux cotisations et dans l’activité de recouvrement. Au titre de 2011, elle dispose toujours d’une assurance insuffisante sur l’exhaustivité et l’exactitude des cotisations sociales, autrement dit de la quasi-totalité des produits de la branche.

En outre – et c’est d’ailleurs un motif de refus de certification encore plus important –, la Cour a relevé un défaut de provisionnement des conséquences financières très lourdes liées aux produits de cotisations des contentieux engagés par les employeurs de salariés qui sont pendants à la clôture de l’exercice. Ces contentieux, qui portent sur plusieurs centaines de millions d’euros, auraient dû en effet être provisionnés.

J’en viens aux branches et caisses nationales dont les états financiers avaient été certifiés avec des réserves l’an dernier et pour lesquelles la Cour a reconduit une opinion de certification avec réserves.

D’abord, la branche recouvrement a connu en 2011 un fait marquant d’envergure : la généralisation du transfert du recouvrement des contributions d’assurance chômage et des cotisations du régime d’assurance pour la garantie des salaires. Les Urssaf ont ainsi mis en recouvrement 26,1 milliards d’euros de contributions d’assurance chômage et 1,3 milliard d’euros de cotisations d’assurance des créances des salariés. Au terme des vérifications qu’elle a effectuées, la Cour estime disposer d’une assurance raisonnable sur la maîtrise de cette opération de transfert et l’exactitude des produits et des encaissements attribués à l’Unédic et à l’Association pour la gestion du régime d’assurance des créances des salariés au regard des opérations traitées par les Urssaf.

L’audit des comptes de 2011 a fait apparaître certains progrès, notamment le déploiement d’une cartographie des risques dans les organismes les plus importants du réseau et des consignes données aux Urssaf sur le paramétrage de contrôles automatisés. Par ailleurs, des composantes des réserves prononcées sur les comptes de 2010 ont pu être levées.

Des difficultés importantes subsistent toutefois, notamment des faiblesses du contrôle interne relatif à certains processus de gestion, ainsi que des insuffisances toujours marquées de la maîtrise des risques pour deux catégories de flux minoritaires dans l’ensemble des états financiers de l’activité de recouvrement : les cotisations AT-MP et les cotisations et contributions sociales des travailleurs indépendants, tout particulièrement ceux relevant du dispositif de l’interlocuteur social unique (ISU) partagé avec le régime social des indépendants (RSI).

Enfin, des problèmes comptables demeurent concernant l’évaluation des provisions pour dépréciation de créances sur les cotisants et le traitement des cotisations et contributions sociales des travailleurs indépendants et des impôts et taxes recouvrés par l’État. Ce traitement continue à relever d’une logique de caisse et n’est donc pas conforme au principe législatif de la tenue des comptes des organismes de sécurité sociale en droits constatés.

Pour ce qui est de la branche maladie, la Cour a pu lever sa réserve relative à la conformité des règlements des établissements hospitaliers aux activités de soins déclarées par ces derniers.

En revanche, elle a constaté la présence d’erreurs ayant une portée financière significative dans les charges de prestations en nature – exécutées en ville et en établissement – et d’indemnités journalières. Selon les estimations établies par la Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS), les erreurs en faveur ou en défaveur des assurés atteignent des montants importants, soit 300 millions d’euros pour les prestations en nature et 80 millions d’euros pour les indemnités journalières.

S’agissant des prestations en nature, le rapprochement globalement limité des paiements avec les pièces justificatives – feuilles de soins, ordonnances et accords préalables – prive une part importante des enregistrements comptables d’une justification appropriée. En outre, les caisses primaires d’assurance maladie ne disposent d’aucun outil permettant de prévenir le remboursement de dépenses de santé pour lesquelles l’accord préalable a été refusé ou soumis à certaines conditions.

Par ailleurs, les dispositifs de contrôle interne d’une partie des mutuelles gérant des prestations maladie relevant de la couverture de base, par délégation du régime général, demeurent perfectibles.

Enfin, la Cour a constaté un manque de fiabilité des provisions pour dépréciation de créances sur les recours contre les tiers, les prestations, participations et franchises restant à la charge des assurés sociaux.

En ce qui concerne les comptes de la branche vieillesse, comme pour l’exercice 2010, la Cour les a certifiés avec réserves. Elle estime que la Caisse nationale de l’assurance vieillesse (CNAV) évolue trop lentement au regard de constats qu’elle a, pour la plupart d’entre eux, établis de longue date. Ainsi, les données de carrière prises en compte dans le calcul des pensions, notamment celles adressées par des organismes sociaux – périodes assimilées, assurance vieillesse des parents au foyer – comportent toujours des erreurs et des incertitudes. En outre, une partie des pensions de retraite attribuées ne fait pas l’objet d’une révision – généralement au détriment des assurés –, alors qu’elle le devrait.

Nous avons par ailleurs constaté que des erreurs, en faveur ou en défaveur des assurés, continuaient à affecter, dans une mesure significative, les pensions de retraite liquidées, mises en paiement et comptabilisées.

La certification des comptes du régime général de sécurité sociale par la Cour, auditeur externe indépendant, constitue un levier majeur d’amélioration de la fiabilité des comptes d’une composante essentielle des finances publiques de la France, de sécurisation des procédures et de modernisation de la gestion des organismes de sécurité sociale. En effet, ses observations favorisent l’exacte application des principes et des règles comptables et permettent une maîtrise accrue des risques financiers qui ont une incidence sur les comptes. Cette maîtrise est nécessaire à la fois pour sécuriser les recettes et les dépenses sociales – en contribuant ainsi à l’effort de redressement des finances sociales engagé par les pouvoirs publics – et pour améliorer le service rendu aux assurés sociaux.

Dans le cadre de l’audit des comptes de 2012, la Cour évaluera la concrétisation des engagements pris à cet égard par les organismes nationaux du régime général et leurs autorités de tutelle, tout particulièrement dans cette période difficile pour les finances publiques.

Compte tenu de la nature de ses constats, la Cour ne pourra certifier sans réserve à une échéance raisonnable les comptes de chacune des branches du régime général que si les dirigeants des organismes nationaux et leurs autorités de tutelle mettent en place ou accélèrent les plans d’action nécessaires à la réalisation de cet objectif partagé.

En ce qui concerne, plus largement, la situation et les perspectives des finances publiques, en particulier celles des administrations de sécurité sociale, je rappelle que cette notion, issue de la comptabilité nationale, ne recouvre pas seulement les régimes de sécurité sociale, mais également l’assurance chômage, les régimes de retraites complémentaires et les autres régimes obligatoires de protection sociale.

En 2011, le déficit de l’ensemble des administrations publiques s’est établi à 5,2 % du PIB, soit 103 milliards d’euros. Il s’est réduit de 34 milliards d’euros par rapport à 2010 si l’on tient compte de l’impact de la non-reconduction en 2011 des mesures temporaires qui affectaient les comptes en 2010, tel le plan de relance. En isolant ces opérations temporaires, d’une ampleur inhabituelle et dont il ne faut pas escompter la répétition, la réduction du déficit est de 18 milliards d’euros. Les administrations sociales ont contribué pour 10,8 milliards d’euros à ce redressement. L’accroissement des ressources, porté par le dynamisme de la masse salariale – qui s’est accrue de 3,6 % en 2011 contre 2 % en 2010 – et de nouvelles mesures de recettes votées en 2010 et 2011 ont contribué au redressement observé, bien plus que le ralentissement de la progression des dépenses, qui a été en fait peu marqué.

Toutefois, la situation des administrations sociales reste profondément dégradée. En 2011, leur déficit a été de 12,5 milliards d’euros. En mettant à part la Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES) et le Fonds de réserve pour les retraites (FRR), qui font partie des administrations sociales mais qui sont d’une nature particulière, les différents régimes ont connu un déficit de 23,4 milliards d’euros, soit plus du double des déficits constatés en 2007 ou en 2008. Ce lourd déficit se concentre sur le régime général, pour 17,4 milliards d’euros, et le Fonds de solidarité vieillesse (FSV), pour 3 milliards d’euros. Le déficit structurel dont souffrent les régimes sociaux, c’est-à-dire le déficit corrigé de l’effet des variations conjoncturelles, n’a pas été résorbé : il s’établit à près de 0,6 point de PIB, soit environ 12 milliards d’euros.

Pour ce qui concerne plus spécifiquement la seule sécurité sociale – hors donc assurance chômage et régimes complémentaires conventionnels –, la loi de programmation des finances publiques de 2010 avait fixé deux normes : l’une encadre l’ensemble des dépenses des régimes obligatoires de base et l’autre porte sur l’objectif national des dépenses d’assurance maladie (ONDAM). Elles ont toutes deux été respectées.

S’agissant de l’ONDAM, l’objectif, fixé à 167,1 milliards d’euros, n’a pas été dépassé pour la deuxième année consécutive. Il a même été sous-exécuté à hauteur de 500 millions d’euros. La dépense d’assurance maladie a connu ainsi un sensible ralentissement, avec une progression de 2,8 % en moyenne annuelle sur les années 2010 et 2011 alors qu’elle était de 3,5 % en moyenne sur la période 2005-2009. Pour autant, les déficits de l’assurance maladie, s’ils ont commencé à reculer après le niveau historique atteint en 2010 – à 8,6 milliards d’euros contre 11,4 milliards d’euros –, sont restés massifs.

Du fait des déficits cumulés, l’encours de dette sociale a continué d’augmenter, passant de 193 à 209 milliards d’euros, soit 10,5 % du PIB. Même si elle ne représente qu’une part modérée de l’ensemble de la dette publique, la dette sociale constitue, selon la Cour, une grave anomalie spécifique à notre pays. Que les régimes sociaux puissent connaître un déficit transitoire, lorsque survient une dégradation conjoncturelle, peut se justifier. Mais aucun pays autre que la France ne connaît un déficit structurel de ses comptes sociaux entraînant une croissance ininterrompue de la dette sociale, même en période de croissance économique. J’ai eu l’occasion de qualifier la dette sociale de poison en septembre dernier : aucun argument ne peut en effet justifier que le remboursement des prestations sociales dont une génération bénéficie soit reporté sur une autre.

Pour 2012, la France s’est engagée en avril dernier à revenir, pour l’ensemble des administrations publiques, à un déficit de 4,4-4,5 % du PIB après 5,2 % en 2011. En réponse à la demande du Premier ministre, la Cour a cherché à apprécier, au regard des informations disponibles à ce stade de l’année, et compte non tenu des mesures décidées après le 6 mai 2012, si cet objectif de 4,4-4,5 % pouvait être tenu et à quelles conditions. Il ne s’agit pas d’un pronostic sur le solde qui sera atteint en fin d’année, mais d’une analyse des risques qui pèsent sur l’année 2012, compte non tenu, j’insiste, des mesures nouvelles décidées après le 6 mai dernier, dont le financement devra par ailleurs être assuré.

L’analyse de la Cour montre que le respect de la trajectoire pour 2012 est possible, mais qu’il suppose des mesures rapides de correction, en raison de moins-values de recettes affectant principalement le budget de l’État.

Dans le champ des administrations de sécurité sociale, la Cour n’a pas identifié de risques substantiels sur l’évolution des dépenses. Une attention particulière devrait cependant concerner l’assurance maladie. L’ONDAM voté pour 2012 s’élève à 171,1 milliards d’euros, soit une évolution de 2,5 % par rapport à l’ONDAM 2011 évalué à l’automne dernier. Les mesures d’économies permettant d’atteindre cet objectif ont porté principalement sur des baisses de prix des médicaments et des tarifs en biologie et en radiologie.

La sous-exécution de l’ONDAM l’an dernier facilite la réalisation de l’objectif de 171,1 milliards d’euros, qui, du fait de cette sous-estimation, représente en réalité une progression de 2,7 % par rapport à l’ONDAM réellement exécuté en 2011. En sens inverse, une dépense de 300 millions d’euros devra être comptabilisée en 2012 sans avoir été prévue initialement : elle concerne les sommes que l’assurance maladie devra verser aux médecins au titre de la « rémunération à la performance » instaurée par la nouvelle convention médicale.

Les informations recueillies par la Cour ne font pas apparaître de risque substantiel de dépassement de l’ONDAM si la tendance observée au premier semestre se prolonge. La Cour estime même possible et souhaitable de tirer parti de la sous-exécution en 2011 pour viser une progression de l’ONDAM limitée strictement à 2,5 % par rapport aux dépenses effectivement constatées l’an dernier. Une action résolue de maîtrise des dépenses ainsi qu’une grande prudence dans le dégel éventuel des crédits hospitaliers devraient permettre d’atteindre cet objectif. Il conviendra cependant de veiller à ce que le respect de l’ONDAM hospitalier n’ait pas pour contrepartie un accroissement des déficits des établissements hospitaliers mais incite au contraire les établissements à réaliser des gains de productivité.

Pour les dépenses des autres régimes de protection sociale obligatoire, la Cour n’a pas identifié de risques pour l’année 2012.

Néanmoins, la dégradation de la situation économique qui pèse sur les recettes de la sécurité sociale devrait conduire à un net ralentissement du rythme de redressement des comptes sociaux, en dépit des mesures d’ajustement prises en cours d’année par le gouvernement précédent et de celles présentées tout dernièrement par l’actuel gouvernement dans le cadre du projet de deuxième loi de finances rectificative pour 2012 actuellement présenté devant vous. Ce dernier prévoit en effet un apport complémentaire de ressources à la sécurité sociale par l’augmentation des prélèvements sociaux sur les revenus du capital, l’intéressement et les stocks options, ainsi que l’augmentation du forfait social et l’extension aux non-résidents du prélèvement sur les revenus immobiliers de source française.

La Cour publiera le 13 septembre, dans le cadre de son rapport annuel sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale, des prévisions actualisées sur le déficit de la sécurité sociale. Celles-ci prendront notamment en compte l’impact sur 2012 des mesures décidées au cours de l’été, lesquelles auront surtout un effet sur 2013.

S’agissant des perspectives pour l’année 2013 et pour les années suivantes, dans son rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques publié début juillet, la Cour a mis en lumière l’ampleur des efforts à accomplir pour tenir l’objectif de 3 % de déficit de l’ensemble des administrations publiques, selon quatre scénarios de croissance, allant de 0 % à 2 %.

Le Gouvernement a récemment fixé une nouvelle prévision de croissance économique pour 2013 à 1,2 %, contre 1,75 % en avril dernier. La trajectoire prévue dans le programme de stabilité impose pour 2013 une marche plus haute que les années précédentes : la révision des hypothèses économiques a pour conséquence de rendre cette marche plus haute encore. L’une des hypothèses retenues par la Cour est celle d’un taux de croissance de 1 %. Dans ce cas, la marche à franchir est de 33 milliards d’euros, sans préjudice de l’impact important de certains contentieux fiscaux, d’un montant estimé à 5 milliards d’euros pour 2013.

Cet effort sera moindre si le taux de croissance était supérieur à 1,2 % comme le prévoit le Gouvernement, mais encore plus important s’il était plus faible – le rapporteur général de la Commission des finances du Sénat évoquait hier le consensus des économistes sur une prévision de croissance de 0,7 % pour 2013.

Un effort de 33 milliards d’euros est de même ampleur que celui que la France a réalisé pour se qualifier pour entrer dans l’Union économique et monétaire en 1997, dans un contexte économique quelque peu différent il est vrai.

Si l’on retient un partage égal entre mesures sur les recettes et mesures sur les dépenses, ce sont 16,5 milliards d’euros d’économies sur les dépenses qui devront être réalisées par rapport à leur évolution tendancielle. Un tel effort reviendrait à stabiliser en volume les dépenses publiques dans leur ensemble, c’est-à-dire à faire en sorte qu’elles n’évoluent pas plus vite que l’inflation. Par comparaison, en 2012, en dépit de l’application des normes de dépenses et de la réduction des effectifs de fonctionnaires de l’État, la dépense publique totale dans son ensemble devrait croître en volume de 0,5 %.

La Cour évoque, dans son rapport, différentes modalités de répartition de cet effort global entre l’État, la sécurité sociale et les collectivités territoriales. Le premier scénario est celui d’une stabilisation en volume des dépenses de chacune des administrations publiques. Il conduirait à faire peser sur les administrations de sécurité sociale une lourde contrainte car le vieillissement démographique et les caractéristiques propres aux dépenses de santé conduisent à une croissance tendancielle en volume des dépenses de l’ordre de 1,75 %, contre 1,3 % pour l’État et 1 % pour les collectivités territoriales.

Un autre scénario prend en compte cette contrainte en réduisant l’effort demandé au secteur social, par exemple en laissant croître ses dépenses de 1,2 % en volume. Dans ce cas, les dépenses de l’État devraient être stabilisées en valeur, ce qui conduirait à un durcissement des normes de dépenses appliquées en 2012.

Si la définition des mesures permettant de réaliser cet effort relève de choix politiques, la Cour rappelle dans son rapport plusieurs principes généraux pouvant sous-tendre la consolidation des comptes publics.

Le premier est que l’effort doit reposer en priorité sur la maîtrise des dépenses. Le deuxième est que toutes les administrations doivent y contribuer, dans le cadre d’une gouvernance des finances publiques entre l’État, la sécurité sociale, les opérateurs et les collectivités territoriales qui fait encore défaut. Le troisième principe est que des hausses de prélèvements obligatoires seront nécessaires pour compléter l’effort sur la dépense : elles devront viser en priorité la réduction du coût des niches fiscales et sociales. Le quatrième et dernier principe est que la priorité devra être donnée au rééquilibrage des comptes sociaux.

S’agissant de ce dernier point, je voudrais préciser quelques pistes concrètes suggérées par la Cour pour permettre ce retour à l’équilibre des comptes sociaux à une échéance plus rapprochée que celle des comptes publics dans leur ensemble.

La maîtrise des dépenses d’assurance maladie constitue un enjeu essentiel pour l’équilibre des comptes sociaux. À titre d’exemple, sur la base d’une croissance annuelle de la masse salariale de 3,5 % – correspondant à la moyenne des douze dernières années –, une progression annuelle de l’ONDAM de 3 % ne permettrait le retour à l’équilibre de l’assurance maladie qu’en 2024 et conduirait à continuer d’accumuler une dette supplémentaire qui représenterait 45 milliards d’euros en 2020 – laquelle s’ajouterait à la dette sociale actuelle de plus de 200 milliards d’euros. Une progression de l’ONDAM limitée à 2,5 % permettrait un retour à l’équilibre en 2018 et la dette supplémentaire accumulée jusqu’en 2020 serait dans ce cas de 20 milliards d’euros.

À court terme, des mesures similaires à celles décidées ces dernières années devraient permettre de limiter la progression de l’ONDAM : baisse du prix des médicaments, limitation de la progression des tarifs hospitaliers, maîtrise médicalisée. Une vigilance particulière devra être apportée pour que les économies imposées aux hôpitaux conduisent à des réorganisations et non à un endettement accru. Le rapport de la Cour sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale qui vous sera présenté en septembre montrera, comme ceux des années précédentes, que de substantiels gains d’efficience peuvent être obtenus dans le secteur hospitalier.

D’importantes marges de manœuvre existent également pour faire baisser la dépense de médicaments, qui demeure la plus élevée d’Europe. Cela suppose une maîtrise renforcée de la prescription des médecins, une relance déterminée des médicaments génériques pour porter leur part dans la prescription au niveau de nos voisins et une réforme du système de fixation des prix. Si la dépense de médicaments rapportée au PIB était ramenée au niveau de celle des Allemands, il en résulterait une économie de l’ordre de 5 milliards d’euros pour l’assurance maladie.

À moyen terme, la maîtrise des dépenses d’assurance maladie supposera des progrès dans la coordination des soins entre hôpital et médecine de ville sous l’impulsion des agences régionales de santé. Les réformes envisagées devront préserver la garantie d’égal accès aux soins. Si de nouvelles mesures de déremboursement étaient prises, leurs conséquences sur le reste à charge des assurés et le rôle de la protection complémentaire devraient être soigneusement mesurées.

Pour la branche vieillesse et le FSV, les hypothèses qui sous-tendaient la réforme des retraites de 2010 étaient excessivement optimistes, notamment en matière d’évolution de la situation de l’emploi. En dépit des ressources complémentaires déjà décidées, leur équilibre ne sera pas rétabli en 2018 et leur déficit restera à un niveau élevé, de l’ordre de 10 milliards d’euros. À court terme, les mécanismes d’indexation des pensions pourraient être mobilisés pour contribuer à la maîtrise des dépenses. Différents scénarios de revalorisation pourraient être étudiés en fonction du niveau des pensions perçues afin de préserver les retraités les plus modestes. Les pouvoirs publics devraient étudier la faisabilité technique et juridique d’une telle opération.

À moyen terme, la Cour réitère ses recommandations relatives aux avantages familiaux. Il s’agirait de faire évoluer les règles relatives aux majorations de retraite pour les parents de trois enfants, de limiter ou d’interdire le cumul de l’assurance vieillesse des parents au foyer et des majorations liées à l’accouchement et à la naissance. Ces avantages familiaux pourraient également être soumis à l’impôt sur le revenu.

Les déficits anticipés de la branche vieillesse et du FSV sont d’une ampleur telle qu’ils appellent, au-delà des mesures que j’ai évoquées, une nouvelle réforme structurelle qui garantisse le retour à l’équilibre des régimes de retraite pour en assurer la pérennité et la crédibilité pour les plus jeunes générations.

La branche famille, en l’absence de mesures nouvelles, devrait conserver des déficits annuels supérieurs à 2 milliards d’euros jusqu’en 2020, en raison notamment de la diminution progressive du rendement de certaines recettes qui lui ont été affectées en 2010. Pour réduire le déficit de la branche, il pourrait être décidé que l’évolution des prestations légales soit inférieure à l’inflation, à l’instar de ce qui s’est produit en 2012. À moyen terme, un réexamen d’ensemble des prestations familiales pourrait être conduit, afin de rechercher un meilleur ciblage des aides au profit des familles les plus vulnérables. Ce réexamen devrait prendre en compte l’effet des mécanismes fiscaux en faveur des familles.

La Cour actualisera l’ensemble de ces prévisions, tant pour 2012 que pour les années suivantes, à l’occasion de la publication du prochain rapport annuel sur la loi de financement de la sécurité sociale. Ce dernier illustrera par ailleurs les importantes marges de manœuvre qu’une gestion beaucoup plus rigoureuse de la sécurité sociale peut dégager – sans compromettre la qualité des soins ni une dimension de solidarité qui est au cœur de notre protection sociale –, de manière à revenir rapidement à l’équilibre des comptes sociaux.

Je voudrais insister, pour finir, sur la question de la dette sociale. La réforme de 2010 a prévu que la CADES reprenne en 2011 les déficits de l’ensemble des branches et, à partir de 2012 et jusqu’en 2018, ceux de la branche vieillesse et du FSV, dans la limite globale de 62 milliards d’euros. En revanche, rien n’est actuellement prévu pour le déficit des branches maladie et famille, ni pour 2012 ni pour les années suivantes. De même, au-delà de 2018, rien n’est prévu si la branche vieillesse et le FSV continuent de connaître des déficits, ce qui est probable. La Cour considère qu’il n’est pas raisonnable de laisser s’accumuler une dette sociale supplémentaire.

Enfin, si les mesures d’économies sur la dépense et la réduction des niches sociales ne pouvaient suffire pour permettre un retour rapide à l’équilibre, il pourrait dans ce cas – j’insiste sur cette condition – être nécessaire d’augmenter le taux d’impôts à assiette large, de préférence la contribution sociale généralisée (CSG), pour rééquilibrer les comptes sociaux. Une telle augmentation devrait avoir un caractère temporaire et s’effacer au fur et à mesure du retour à l’équilibre des comptes publics et de la montée en puissance des économies sur les dépenses.

Pour conclure, le rapport fait apparaître que la France est loin d’avoir été exemplaire dans la gestion de ses finances publiques depuis plusieurs décennies. Les efforts et la discipline qui s’imposent aujourd’hui pour revenir à des comptes équilibrés et à une action publique plus efficiente exigent des choix difficiles. De nombreux dispositifs qui n’auront pas fait la preuve de leur efficience devront être réduits ou supprimés et des projets d’investissements retardés ou abandonnés. Il est aussi essentiel que l’objectif de ces réformes soit expliqué aux citoyens. C’est la raison pour laquelle la Cour, tout en fournissant des pistes d’économies précises, insiste sur les méthodes de réforme : elles doivent reposer sur des évaluations et privilégier la transparence et la pédagogie.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Monsieur le Premier président, votre exposé, très complet, n’est pas de nature à nous donner le moral ! L’équation va en effet être très compliquée à résoudre et le travail à accomplir est immense ! Il reviendra au politique de prendre ses responsabilités et de faire des choix.

J’observe que, comme l’avait souligné l’opposition d’alors, la réforme des retraites de 2010 n’apportait pas de solution durable : vous venez vous-même d’indiquer qu’il faudrait revenir dessus. La majorité l’avait d’ailleurs reconnu à l’époque en disant qu’un autre rendez-vous serait nécessaire quelques années plus tard…

S’agissant de l’ONDAM, vous avez rappelé les trois postes sur lesquels des économies ont pu être faites – la radiologie, la biologie et les médicaments – et que 5 milliards d’euros supplémentaires pourraient être obtenus sur les dépenses de médicament. Cependant, ce montant doit être relativisé dans le contexte du changement actuel du modèle économique de l’officine, qui entraînera des frais, les conventions prévoyant des rémunérations en compensation de la baisse du coût des médicaments.

Au sujet de la coordination des soins entre médecine de ville et médecine hospitalière, le rapport évoque une fongibilité des enveloppes : se traduira-t-elle par à une diminution du temps passé à l’hôpital, qui correspond à la tendance actuelle, au profit de la médecine de ville ? Un rééquilibrage entre les deux enveloppes me paraît souhaitable : qu’en pensez-vous ? Je note à cet égard que vous avez insisté sur l’égal accès aux soins, notamment pour les plus démunis et les malades en affection de longue durée.

M. Gérard Bapt. Merci, monsieur le Premier président, d’avoir fait état de la situation exacte des déficits et de la dette accumulée, mais aussi des perspectives – très difficiles – qui nous attendent. Comment ne pas saluer, au nom du groupe SRC, le courage du Gouvernement et de l’actuelle majorité, qui, dans le cadre du projet de loi de finances rectificative, ont eu le mérite de prendre en compte le ralentissement de la croissance et l’affaiblissement de la masse salariale, en apportant dès 2012 1,5 milliard d’euros de recettes supplémentaires pour stabiliser les comptes du régime général et du FSV ? Ils respectent ce faisant les engagements du Président de la République, lesquels reprennent d’ailleurs ceux de son prédécesseur.

Pour 2013, la loi de finances rectificative apportera plus de 5 milliards d’euros supplémentaires à la protection sociale, soit autant que ce qu’avait voté l’ancienne majorité en 2011 pour cette année. Vous privilégiez la piste de la réduction des niches sociales : or, lorsque vous étiez président de la Commission des finances de notre assemblée, vous aviez proposé, dans le cadre d’un rapport sur la fusion de l’impôt sur le revenu et de la CSG, l’imputabilité de la CSG maladie sur le revenu fiscal. Pourquoi ne l’avez-vous pas évoquée ? Concerne-t-elle selon vous une niche sociale ?

La branche vieillesse et le FSV présentent des perspectives particulièrement inquiétantes : pouvez-vous préciser à cet égard les propositions de la Cour, compte tenu de l’insuffisance structurelle de financement de la réforme des retraites de 2010, accrue par le nouveau contexte économique ?

En ce qui concerne le refus de certification des comptes de la branche famille et la somme de 1,6 milliard de trop-versés par les caisses d’allocations familiales, je rappelle que la Délégation nationale à la lutte contre la fraude (DNLF) chiffre à 511 millions d’euros pour 2011 l’ensemble de la fraude, dont 100 millions d’euros seulement pour la branche famille : pouvez-vous nous confirmer que cette somme ne correspond pas à de la fraude, mais bien à des trop-perçus, en général repris sur les allocataires par l’organisme payeur ?

M. Dominique Tian. Le rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques indique que l’ONDAM a été respecté pour la deuxième fois – avec même un surplus de 500 millions de crédits non consommés –, montrant que la position du groupe UMP au cours de ces dernières années pour se conformer à cet objectif et adopter certaines mesures d’ajustement de la sécurité sociale a porté ses fruits.

La Cour des comptes adresse par ailleurs un avertissement au Gouvernement en lui indiquant que si nous sommes sur la bonne voie, il est nécessaire de respecter certains engagements et de maintenir cette politique de justice et d’effort conduite par l’ancienne majorité. La dette sociale reste en effet considérable, à plus de 209 milliards d’euros !

Si le récent rapport de la Délégation nationale à la lutte contre la fraude a montré que, grâce aux mesures législatives prises lors de la précédente législature, les résultats de la lutte contre la fraude ont progressé de 18 %, la Cour n’en a pas moins refusé de certifier les comptes de deux branches.

En ce qui concerne la branche famille, ce n’est pas la première fois. La Cour relève que « selon les mesures disponibles établies par la CNAF à partir de contrôles portant sur des échantillons de prestations, le montant agrégé des erreurs de portée financière est estimé à 1,6 milliard d’euros en 2011 contre 1,2 milliard en 2010 », ces erreurs concernant principalement les trop-perçus par les allocataires du revenu de solidarité active et des aides au logement. Toujours selon la Cour, « l’augmentation du montant des erreurs de portée financière souligne l’inadaptation du dispositif interne de la branche caractérisé notamment par les insuffisances de conception et les faiblesses de pilotage par la CNAF ». La Cour indique aussi que le non-respect de la loi par les caisses pose de nombreux problèmes, à l’origine, entre autres, de son refus de certifier les comptes.

Au sujet de la branche AT-MP, la Cour déclare qu’elle n’a pu en 2011, comme en 2010, certifier les comptes de cette branche, constatant un passif non provisionné de plusieurs centaines de millions d’euros.

Enfin, la Cour souligne des faiblesses dans le contrôle interne en matière d’indemnités journalières et de prestations en nature ainsi qu’un manque de fiabilité des données. On est donc confronté à un véritable problème de gestion, relevé d’ailleurs par les travaux de la Mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (MECSS) conduits avec la Cour des comptes, lesquels indiquaient que la sphère sociale se caractérisait parfois par un manque de rigueur, voire un non-respect de la loi – ce qui est consternant.

Dans le rapport de la délégation nationale, il est fait état qu’une part importante de la fraude – non traité par la Cour, ni par les organismes sociaux – est liée à la fraude documentaire : pour le service administratif national d’identification des assurés (SANDIA), chargé de gérer les numéros d’immatriculation, sur 400 000 dossiers d’ouverture des droits établis chaque année, plus de 10 % reposeraient sur de faux documents. 40 000 personnes entrent donc tous les ans dans notre système de sécurité sociale en produisant des faux, ce qui laisse présager une fraude d’ampleur considérable ! La Cour devra en conséquence recommander aussi aux organismes sociaux une grande vigilance sur ce point. Force est de reconnaître à cet égard qu’un certain nombre de mesures prises par l’ancienne majorité, comme le croisement des fichiers, ont permis de lutter efficacement contre certaines dérives.

M. Arnaud Richard. Vous m’autoriserez une question aussi institutionnelle qu’impertinente au Premier président, j’espère qu’il ne la prendra pas mal. Monsieur le Premier président, comment voyez-vous votre fonction avec le nouveau gouvernement et la nouvelle majorité ?

Je souligne à mon tour que la Cour a refusé de certifier les comptes de deux branches du régime général : la branche famille, qui représente 84 milliards d’euros – avec une estimation du montant d’erreurs de 1,6 milliard d’euros sur les prestations légales –, et la branche accident du travail - maladie professionnelle (AT-MP), pour laquelle elle s’interroge sur la réalité des prestations en nature. En cela, elle a pleinement réalisé sa mission d’auditeur indépendant.

Il est étonnant – et inquiétant – de voir que sur des montants aussi élevés, il existe toujours des défauts d’information aussi abyssaux et des carences de pilotage généralisés. Je pense notamment à la branche famille et aux réseaux des caisses d’allocations familiales, qui semblent bénéficier en matière de contrôle financier d’une marge d’erreur financière à la fois généreuse et aléatoire selon les territoires.

Votre réserve sur les comptes combinés de la branche AT-MP fait état de difficultés comparables.

S’agissant de la branche famille, existe-t-il pour la caisse nationale un outil permettant d’identifier de façon cohérente sur l’ensemble du territoire, par organisme et par prestation, les risques d’erreurs de portée financière ? La réforme du réseau des caisses d’allocations familiales est-elle un facteur d’amélioration des dispositifs de contrôle ? En ce qui concerne les risques de fraude et d’erreurs liés aux allocations de logement – qui s’élèvent à 17 milliards d’euros en 2011, marquant ainsi une sensible dégradation –, la caisse nationale a-t-elle lancé un plan national de maîtrise des risques ?

Par ailleurs, estimez-vous que la réforme engagée au sein de la branche AT-MP concernant les cotisations dont l’échéance est prévue en 2014 sera de nature à répondre aux préoccupations de la Cour ? D’une façon plus générale, si celle-ci joue son rôle d’auditeur indépendant sur la situation des finances publiques, qui est dramatique, l’opinion publique ne comprendrait pas qu’on ne donne pas à la Cour les moyens d’une action plus coercitive.

Pour ce qui est de l’assurance vieillesse, comment expliquez-vous les taux d’erreurs très élevés constatés par la Cour – 20 % en moyenne en métropole – concernant la liquidation des droits à la retraite ? Existe-t-il une cartographie des erreurs ? Quelle est la part de la pratique des liquidations en l’état, consistant à liquider les dossiers de retraite par anticipation pour prévenir les ruptures de ressources des assurés ? Comment expliquez-vous que l’assurance vieillesse ne s’engage pas systématiquement à réviser le cas échéant les droits à pension, ce qui semble souvent une évidente mesure de justice sociale ?

En ce qui concerne l’assurance maladie, quelles sont les démarches engagées permettant de mesurer les risques relatifs aux prestations gérées par les mutuelles, qui ont réglé en 2011 près de 8 milliards d’euros de prestations en nature ? Enfin, quelles raisons empêchent d’avoir un compte exact des cotisations famille et maladie des praticiens et des auxiliaires médicaux conventionnés ?

Mme la présidente Catherine Lemorton. Monsieur Richard, je crois que l’indépendance, le sérieux, la rigueur et les compétences de M. Migaud sont reconnus de tous dans cette commission et au-delà ! Il continuera, je pense, à travailler de la même manière !

Quant au trop-perçu, monsieur Tian, il ne constitue pas forcément une fraude !

Mme Martine Carrillon-Couvreur. J’ai travaillé avec Dominique Tian sur le rapport sur la fraude sociale : il sait bien, pour l’avoir entendu lors des différentes auditions organisées dans ce cadre, que les trop-perçus ne sont en effet pas des fraudes, mais correspondent à des situations à un instant donné qui peuvent se corriger !

À la page 15 de la synthèse du rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques, sont mentionnés des risques identifiés concernant quelques missions budgétaires faisant l’objet de tensions récurrentes. C’est notamment le cas de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », qui concentre, dans une période difficile, un certain nombre de problèmes, en particulier une sous-budgétisation récurrente depuis plusieurs années : comment la Cour l’analyse-t-elle et quelles propositions suggère-t-elle en la matière ?

Quelles précisions pouvez-vous nous apporter sur les allocations aux personnes adultes handicapées, qui connaissent une augmentation continue ?

Enfin, s’agissant de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA), comment concevez-vous sa place et quel avis portez-vous en particulier sur la question des crédits non consommés ?

M. Bernard Perrut. Monsieur le Premier président de la Cour des comptes, vous avez rappelé les principes généraux devant guider notre retour à l’équilibre des comptes et indiqué que l’ensemble des administrations publiques doit participer à cet effort. Selon votre rapport, l’enchevêtrement des compétences des différentes collectivités publiques pénalise l’efficience de leurs dépenses : dès lors, seriez-vous favorable à une évolution de la décentralisation et à une clarification des compétences ? Comment concevriez-vous cette évolution dans les domaines ciblés de la formation, de l’emploi et du logement ?

Seriez-vous favorable à la conclusion, entre l’État et les collectivités territoriales, d’un pacte de stabilité dans lequel elles s’engageraient à respecter la trajectoire globale de maîtrise des dépenses définie par le Gouvernement et les pouvoirs publics ?

La départementalisation et la nouvelle organisation des caisses d’allocations familiales peuvent-elles améliorer la gestion et le contrôle du budget de la branche famille et de ses allocations ?

M. Michel Liebgott. Nous avons tous compris la nécessité de faire des efforts dans les années à venir.

Vous avez indiqué, monsieur le Premier président, que les prestations d’assurance vieillesse doivent évoluer sans que cette évolution pénalise les plus défavorisés.

S’il existe un déséquilibre structurel de la branche maladie, certains patients ne bénéficient pas d’une prise en charge optimale et sont contraints de recourir à des mutuelles tandis que d’autres renoncent aux soins de ville.

Avez-vous des propositions plus globales à formuler pour assurer une réduction des dépenses, s’agissant notamment des dépassements d’honoraires et des dérapages dans les pratiques médicales ? Le système en vigueur en Alsace-Moselle est fondé sur un régime complémentaire non pas facultatif mais obligatoire et permet ainsi d’adapter les cotisations des salariés aux dépenses effectivement engagées. Il assure par conséquent une certaine égalité de traitement et d’accès aux soins entre les usagers : ne pourrait-on s’en inspirer ?

M. Rémi Delatte. Afin d’assurer la pérennité de notre système de protection sociale, il sera nécessaire de faire des choix difficiles de nature à maîtriser la dépense. La progression des dépenses d’assurance maladie est passée de + 4,2 % en 2007 à + 2,9 % en 2011, année au cours de laquelle l’ONDAM a été respecté pour la première fois. Il est utile de comparer ce chiffre à l’évolution tendancielle de l’ONDAM, estimée à + 4,4 % par an au cours de la période 2007-2012. Cela prouve que la maîtrise des dépenses de santé est effective dès lors qu’elle est le fruit d’une volonté politique forte, comme ce fut le cas au cours des dernières années, grâce à la politique exigeante et sérieuse menée sous l’autorité de M. Xavier Bertrand. Vous soulignez qu’au cours des cinq années à venir, l’ONDAM devra progresser spontanément moins vite qu’actuellement, soit à hauteur de 4 % à l’horizon 2017 selon l’estimation de l’Inspection générale des finances (IGF) et de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS). Pourriez-vous nous confirmer qu’il est indispensable de revoir à la baisse la progression de l’ONDAM dès le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 par rapport à celui de 2012 ? Le Gouvernement a en effet annoncé son souhait de la fixer à environ 3 %. Cette révision à la baisse irait pourtant dans le sens d’une maîtrise des dépenses publiques sans laquelle la pérennité de notre système de protection sociale serait aléatoire : ce serait une belle façon de ne plus inscrire dans le marbre les déficits de nos comptes sociaux.

Mme la présidente Catherine Lemorton. La progression de l’ONDAM actuellement prévue pour 2013 est de 2,7 % et non pas 3 %.

M. Christophe Cavard. Quelles seraient les conséquences sur les finances sociales d’une progression de 3 % ?

S’agissant des niches fiscales et sociales, la TVA sociale ayant été supprimée dans le cadre du collectif budgétaire, que pense la Cour des comptes de l’instauration d’une CSG progressive ?

La réforme du réseau des caisses d’allocations familiales est fondée sur un partenariat entre la caisse nationale et les caisses d’une part, et les collectivités locales d’autre part. La création d’outils communs permettrait d’éviter le phénomène des trop-perçus, considéré par certains comme de la fraude alors qu’il ne s’agit parfois que de dysfonctionnements du système.

M. Jean-Noël Carpentier. Les constats dressés par la Cour des comptes ne sont guère surprenants étant donné la conjoncture économique. Cela étant, lors des élections de mai dernier, les Français ont souhaité prendre en compte cette situation économique difficile tout en refusant un plan d’austérité généralisé. Ils ont en effet choisi de sauvegarder notre modèle social. Il nous faut donc faire preuve d’imagination, aussi bien en recettes qu’en dépenses.

La proximité et l’accessibilité sont des principes essentiels à notre service public de santé. Or de nombreux élus locaux s’inquiètent de la fermeture de caisses d’allocations familiales tandis que, dans les hôpitaux de proximité, certains services « rentables » sont fermés, parfois au profit d’institutions privées.

Mme Martine Pinville. Vous avez évoqué, monsieur le Premier président, le déficit, prévisible depuis 2010, de certaines recettes de la branche famille : comment assurer la pérennité de ces recettes ?

La Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES) est un organisme public chargé de reprendre à sa charge les déficits cumulés du régime général et d’en assurer le remboursement. Elle dispose, depuis octobre 2010, d’une capacité de financement de 135 milliards d’euros, mais il s’agit d’une charge très lourde à porter pour les générations futures dans la perspective d’un retour à l’équilibre.

De manière plus globale, s’il convient de préserver notre système de protection sociale, ne faut-il pas en réformer les recettes ?

M. Arnaud Robinet. J’espère que ce rapport de la Cour des comptes servira de livre de chevet aux membres du Gouvernement ainsi qu’à nos responsables politiques. En effet, si, en 2011, la trajectoire du retour à l’équilibre de nos finances publiques a été amorcée, il nous est cependant nécessaire d’accroître nos efforts. Vous indiquez dans votre rapport qu’il nous est possible, grâce à des gains d’efficience collective, de réduire le poids des dépenses publiques sans pour autant remettre en cause la qualité de nos services publics. Dès lors, que pensez-vous des dispositions du collectif budgétaire adopté par l’Assemblée nationale la semaine dernière ?

Sans remettre en cause le principe du non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux, la politique d’augmentation du recrutement dans l’Éducation nationale est telle que nous allons conserver un nombre stable d’agents dans la fonction publique : selon vous, quels effets cela aura-t-il sur l’évolution des déficits ?

Les contraintes budgétaires qu’instituent les lois de programmation concernent exclusivement l’État : comment faire en sorte qu’elles s’imposent également aux collectivités territoriales, sachant que certaines d’entre elles ont parfois des difficultés à maîtriser leurs dépenses ?

Les perspectives d’évolution de la branche vieillesse du régime général de la sécurité sociale pour 2017-2018 fixées par la réforme des retraites de 2010 pourraient ne pas être tenues. Du reste, à l’époque, j’avais estimé nécessaire d’aller plus loin. Quel sera l’impact sur cette branche du retour à la règle de départ à la retraite à soixante ans pour certains de nos concitoyens ?

Selon la Cour, l’enchevêtrement des compétences entre différents niveaux de collectivités ne favorise pas l’efficience des dépenses. Va-t-elle évaluer la remise en cause par le Gouvernement de la réforme des collectivités territoriales, qui avait justement pour objectif de clarifier les choses ?

M. Francis Vercamer. La branche famille se trouve confrontée à un problème de fraude ou de trop-perçus qui s’explique par le fait que les prestations familiales sont versées sur la base des déclarations effectuées par les allocataires eux-mêmes. Or la récupération d’indus par une caisse d’allocations familiales peut, sur le plan humain, avoir des conséquences dramatiques pour les familles concernées.

La départementalisation des caisses aura-t-elle un effet bénéfique ? En effet, le président de la caisse nationale a affirmé au Sénat que ce processus avait compliqué le travail de ses agents.

Ne vaudrait-il pas mieux accompagner les familles dans la rédaction de leurs déclarations et simplifier le système fort complexe des allocations familiales ?

S’agissant enfin des perspectives financières des comptes de la Nation, s’il est impératif de réaliser des économies, la tentation sera forte de diminuer les dépenses d’équipement, plus faciles à réduire. Si c’était le cas, quel en serait l’impact sur la croissance ultérieure ?

M. Jérôme Guedj. S’agissant de la branche famille, il est indiqué dans le rapport sur la certification des comptes de la sécurité sociale qu’il existe un taux d’erreurs et des incidences financières pour 2,4 % des prestations mais que l’on constate cependant de fortes disparités selon les prestations concernées. En effet, ce taux est inférieur à 0,5 % pour les allocations familiales mais peut s’élever jusqu’à 20 % s’agissant de prestations plus complexes telles que l’allocation de logement familiale ou le revenu de solidarité active. Des simplifications ne permettraient-elles pas de réduire cette marge d’erreurs.

Dans la branche famille, contrairement aux branches vieillesse et maladie, le contrôle interne n’est soumis à aucune obligation de résultats mais uniquement à une obligation de moyens, exprimée sous forme de taux quantitatifs de contrôles à effectuer. Les mauvais résultats de ce contrôle interne s’expliquent-ils par la faiblesse des ressources administratives et humaines qui lui sont dévolues ? La convention d’objectifs et de gestion entre la branche famille et l’État a-t-elle été suffisamment exigeante en matière de contrôle interne ?

La certification des comptes des hôpitaux publics par la Cour des comptes est-elle toujours à l’ordre du jour ?

Mme Véronique Louwagie. Les résultats de la certification des comptes de la sécurité sociale me laissent perplexe. Je ne porte certes pas de jugement sur les opinions exprimées dans le rapport de certification car elles résultent des travaux de la Cour et de la collecte des éléments nécessaires à l’obtention ou non d’une assurance raisonnable sur l’absence d’anomalies significatives dans les comptes, l’objectif étant que les comptes fournissent une image fidèle de l’activité de l’année. Je constate cependant une évolution négative de la branche famille dont la Cour des comptes a refusé de certifier les comptes en 2011 alors qu’en 2010, elle n’avait fait qu’émettre une réserve. Cette évolution traduit une absence d’amélioration voire une détérioration des systèmes de contrôle interne de cette branche.

Plus globalement, la Cour des comptes a refusé de certifier les comptes de la branche famille et de la branche accidents du travail – maladies professionnelles (AT-MP), et a assorti ses certifications de 25 réserves. Si nous exigeons actuellement des entreprises une présentation de leurs comptes qui soit exemplaire, il convient à présent de souhaiter une amélioration de la présentation des comptes des différentes branches nous permettant de disposer des informations les plus pertinentes et les plus fiables possibles. La caisse nationale et les différentes branches se sont-elles engagées dans le temps à améliorer leurs systèmes d’organisation et de contrôle interne ?

M. Olivier Véran. Le mode de financement des hôpitaux publics repose sur la tarification à l’activité, la T2A : en d’autres termes, seule l’activité d’un établissement détermine son budget de fonctionnement.

Les efforts financiers successifs demandés aux hôpitaux afin de réduire le déficit et d’améliorer l’efficience allocative, qu’il s’agisse de la convergence tarifaire ou de la réduction des budgets alloués, les ont contraints à des restructurations massives les ayant progressivement asphyxiés alors même que les Français y sont très attachés. Nous sommes certes favorables à l’efficience allocative, mais pas à l’asphyxie de l’hôpital public !

En outre, les règles mises en œuvre sont les mêmes pour tous les hôpitaux, indépendamment de leur taille et de leur localisation géographique. Les petits hôpitaux en souffrent davantage que les autres, car ils offrent des services de proximité dans des territoires peu densément peuplés et éloignés des grands centres urbains. Leur activité est trop restreinte pour qu’ils puissent réaliser des économies d’échelle. Le coût de la mise en place d’une ligne d’astreintes pour assurer la permanence de soins est le même, quelle que soit la taille de l’hôpital. À l’exception des très grands centres hospitaliers, notoirement endettés, ce sont les plus petits établissements qui sont les plus endettés. En conséquence, les agences régionales de santé n’ont d’autre choix que d’exiger de ces hôpitaux qu’ils suppriment des activités entières au détriment de l’accessibilité géographique à des soins de qualité et de proximité.

Dès lors, la tarification à l’activité vous semble-t-elle adaptée au financement des petits hôpitaux ?

Disposez-vous de simulations de la manière dont évoluera l’ONDAM hospitalier dans l’hypothèse où, comme nous le souhaitons, le Gouvernement renonce à la convergence tarifaire entre établissements publics et privés ?

Mme Isabelle Le Callennec. J’espère que nous nous réapproprierons la priorité absolue, énoncée à la page 203 du rapport de la Cour des comptes, que constitue le renforcement de l’efficience de nos dépenses publiques. En effet, ce sont les consolidations budgétaires qui reposent prioritairement sur un effort de maîtrise de la dépense qui sont les plus efficaces dans la durée.

À la page 201 de votre rapport, monsieur le Premier président, vous évoquez la nécessité d’adopter rapidement de nouvelles mesures fiscales pour compenser la révision à la baisse des recettes attendues en 2012 : à quelles recettes pensez-vous ?

Il est nécessaire d’évaluer les niches fiscales et sociales dans la mesure où certains dispositifs ont, selon vous, fait la preuve de leur efficience. Que proposez-vous en matière de niches ? Lesquelles conviendrait-il de garder ? Lesquelles faudrait-il supprimer ?

Je m’associe aux propos de la Cour des comptes qui, à la page 157 de son rapport, indique au sujet de l’hôpital qu’« il est nécessaire et indispensable de limiter les nouvelles opérations au strict nécessaire. » Cela étant, qui en jugera, sachant que les agences régionales de santé ont un poids très important ? Si les hôpitaux – en particulier les hôpitaux locaux – ont fait d’énormes efforts de gestion, il leur est parfois difficile de mener des opérations d’investissement alors même que celles-ci permettraient à certains d’entre eux de faire évoluer leur activité.

Enfin, selon l’estimation de la Caisse nationale d’allocations familiales (CNAF), le taux de fraude s’établit à 1,2 % pour l’ensemble des prestations servies par les caisses, ce qui correspond à un coût de 698 millions d’euros. Si l’on met tout particulièrement en cause la fraude au revenu de solidarité active (RSA) et aux allocations de logement familiales, le niveau de fraude a-t-il été évalué région par région ?

M. Christian Hutin. Dans les années à venir, la vague de la dépendance va se transformer en tsunami. Il s’agit en effet d’une déferlante financière, sociale et humaine qui peut nous surprendre. Que pensez-vous de l’organisation financière actuelle des différents intervenants du secteur, caractérisée par la stratification et des difficultés de coordination ? Peut-on créer un véritable statut de l’aidant tout en préservant l’équilibre économique du secteur de la santé ? Il s’agit en effet d’emplois non délocalisables et qui peuvent être pérennes.

Enfin, quel bénéfice financier retire-t-on de la journée de solidarité, dont on ne parle guère que le lundi de la Pentecôte ? Le résultat financier de cette journée est-il satisfaisant ?

Mme Joëlle Huillier. Les budgets d’action sociale des caisses d’assurance retraite et de la santé au travail (CARSAT) sont destinés aux personnes âgées en perte d’autonomie. Certaines caisses ont du mal à assurer des missions telles que le financement de l’aide ménagère. Cela fragilise encore davantage les personnes âgées mais également les services d’aide à domicile ainsi que leurs salariés.

Ainsi la caisse de Rhône-Alpes a-t-elle décidé en avril dernier de diminuer voire de supprimer des plans d’aide personnalisés et des heures d’intervention aux personnes classées dans les groupes iso-ressources (GIR) 5 et 6.

Dès lors, les budgets de l’action sociale sont-ils équitablement répartis entre les différents organismes du régime général ? Si ce n’est le cas, il convient sans doute de les réformer afin de les rendre plus justes. En revanche, si c’est le cas, l’autonomie relative accordée aux CARSAT dans le cadre de l’action sociale peut conduire, dans certaines régions, à une consommation totale de leurs enveloppes dès le milieu de l’année.

Promise par l’ancien Président de la République, la réforme de la dépendance a été constamment repoussée pour enfin être abandonnée. M. François Hollande s’est cependant engagé à la mener à bien. Ne conviendrait-il pas de désigner un interlocuteur ou un guichet unique pour assurer la prise en charge de la dépendance ? En effet, si les Français font actuellement face à deux types d’interlocuteurs, en fonction du degré de leur perte d’autonomie – les conseils généraux pour les GIR 1 à 4 et les CARSAT pour les GIR 5 et 6 –, la mise en place de guichets uniques simplifierait les démarches administratives de leurs bénéficiaires tout en permettant de réaliser des économies.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Dans quelles proportions les choix budgétaires et fiscaux qui ont été faits au cours des dix dernières années ont-ils contribué à la détérioration de la situation financière de notre pays ?

M. le Premier président de la Cour des comptes. En complément des réponses que nous allons vous apporter lors de cette audition, je vous présenterai en septembre prochain notre rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale, dans lequel nous proposerons un certain nombre de pistes pour contribuer à une meilleure maîtrise des dépenses de santé et au retour à l’équilibre des comptes sociaux.

La Cour des comptes est un organisme collégial, c’est d’ailleurs ce qui fait son crédit et son autorité. Absolument tout ce qu’écrit la Cour fait l’objet de débats contradictoires avec l’ensemble des administrations qu’elle contrôle. Cette collégialité – faite de collégialités successives et qui s’additionnent –, associée au statut de magistrats des membres de la Cour, constitue la meilleure garantie de son impartialité et de son indépendance. C’est pourquoi même si le résultat de l’élection présidentielle avait été différent, le rapport de la Cour des comptes aurait été le même, son travail ne pouvant être qu’objectif.

Certains membres de la Commission ont insisté sur le choix qu’ont fait les Français et sur ce quoi ce choix impliquait, à savoir la nécessité de sauvegarder notre modèle social. Et c’est bien afin de contribuer à cette sauvegarde que la Cour des comptes formule ses constats et ses recommandations. Est-ce contribuer à la sauvegarde du modèle social que de continuer sur la voie des déficits, aussi bien pour la sécurité sociale que pour les comptes publics, surtout s’agissant de dépenses courantes ? Est-il légitime de faire supporter le poids de nos dépenses quotidiennes de sécurité sociale à nos enfants et à nos petits-enfants ? S’il revient aux représentants du suffrage universel d’en décider, il reste que les électeurs sont sensibles à la question tant ils sont conscients du fait que ce sont eux qui finiront par être sollicités afin de couvrir les déficits. Devons-nous sans cesse ajuster nos recettes au niveau de nos dépenses sans nous interroger quant à la qualité, à l’efficacité et à l’efficience de ces dépenses ? Notre étude d’une dépense ou d’une politique publique donnée nous permet d’identifier des marges de progression possibles pour renforcer leur efficacité et leur efficience.

Il nous faut réduire la dépense tout en étant parfaitement conscients du fait que les dépenses de santé vont continuer à augmenter. L’un des scénarios que nous avons étudiés se fonde sur l’hypothèse d’une augmentation des dépenses de santé de 1,2 % en sus de l’inflation : une maîtrise de la dépense nous permettrait de retrouver une certaine capacité d’action. Les nombreux rapports de la Cour des comptes, de l’IGF et de l’IGAS ont illustré l’existence de marges de progrès. Certaines de nos recommandations sont d’ailleurs suivies, s’agissant par exemple des génériques, pour ce qui est des dépenses, et du forfait social, pour ce qui concerne les recettes.

La meilleure façon de préserver le modèle social français, c’est d’être extrêmement attentif à la qualité et à l’efficacité de la dépense.

S’agissant des services publics de proximité, il convient sans doute de mener un travail de définition de cette notion dans la mesure où l’on ne peut disposer d’un service des grands brûlés dans tous les cantons de France ou d’un CHU partout ! J’ai d’ailleurs entendu cette expression être utilisée au sujet de la carte des chambres régionales des comptes. Or je ne suis pas convaincu que nous constituions un service public de proximité, bien que nous assurions une mission de service public. Il vous revient donc de déterminer en quoi consiste la notion de service de proximité.

Il ne m’appartient pas de commenter les décisions qui ont été prises en matière de fixation de l’âge de départ à la retraite. Si toute mesure nouvelle doit être financée, la décision prise par l’actuel gouvernement en la matière l’est ; elle est même surfinancée : de l’ordre d’un milliard d’euros à l’horizon de 2020. Cela étant, le problème du financement des retraites reste posé car, malgré la récente réforme, les régimes de retraite ne seront pas équilibrés en 2018. En effet, les hypothèses retenues en termes de situation de l’emploi et sur lesquelles les estimations de financement des retraites étaient fondées étaient très optimistes. Si jamais elles ne se réalisent pas, il est possible que l’on enregistre un déficit de nos régimes de retraite d’une dizaine de milliards d’euros à l’horizon 2018-2020. Il est donc nécessaire que vous vous saisissiez à nouveau de ce sujet.

Compte tenu de l’état de dégradation de nos comptes publics, tout le monde – y compris les collectivités territoriales et les organismes de sécurité sociale – doit se sentir concerné par l’effort engagé pour les redresser. Dans notre rapport, nous vous invitons à réfléchir à la manière d’améliorer la gouvernance du système et à la conclusion d’un pacte
– que l’on peut éventuellement qualifier de pacte de stabilité – entre l’État et les collectivités territoriales. En effet, même si ces dernières s’administrent librement, l’État français ne peut prendre des engagements pour l’ensemble du pays si une partie des entités qui le constituent ne se sent pas concernées par ces engagements. En outre, même si le budget des collectivités territoriales doit être équilibré et qu’elles sont soumises à la règle d’or que constitue l’interdiction d’emprunter pour financer des dépenses de fonctionnement, elles contribuent néanmoins aussi à la dépense.

Qui plus est, toutes les dépenses ne sont pas obligatoirement pertinentes et ne confortent pas obligatoirement la croissance de la même manière. Ainsi, s’agissant du schéma routier ou des grandes infrastructures routières, nous vous invitons à réfléchir aux priorités qui sont les vôtres car de nombreux projets sont actuellement à l’ordre du jour sans que l’on dispose du moindre euro pour les financer, dans un contexte budgétaire extrêmement tendu. Il est donc nécessaire de se doter d’outils permettant d’apprécier la rentabilité socio-économique et la pertinence de tels projets. Cela relève de la noblesse de la fonction politique et de votre responsabilité.

La journée de solidarité rapporte environ deux milliards d’euros par an, ce qui n’est pas négligeable étant donné l’état de nos finances publiques.

Notre travail de certification des comptes fait état d’erreurs, mais toute erreur n’est pas nécessairement imputable à la fraude : en effet, certaines erreurs sont favorables tandis que d’autres sont défavorables aux assurés sociaux. En revanche, leur quantité, qui a sensiblement augmenté, est anormale, ce qui explique notre refus de certifier les comptes de deux branches cette année. Cette augmentation s’explique tant par l’inadaptation des contrôles internes que par la complexité d’un certain nombre de dispositifs : de fait, les erreurs sont d’autant plus nombreuses que les dispositifs sont complexes et mettent en scène différents acteurs. Au reste, le législateur peut être à l’origine de certaines erreurs… Quant aux organismes concernés, ils s’efforcent d’en limiter le nombre ; vous pouvez d’ailleurs interroger les présidents de leurs conseils d’administration sur ce point.

La Cour des comptes est convaincue du fait que l’exercice de certification des comptes contribue à la fiabilité, à la transparence et à la sincérité de ceux-ci. Si nous nous engageons résolument à accompagner les caisses dans ce processus, la certification, loin d’être automatique, nécessite des progrès en la matière. Or, on constate actuellement un certain ralentissement des démarches engagées.

Le principe de certification des comptes des hôpitaux a été adopté s’agissant des hôpitaux les plus importants. Il reste à en dresser la liste et à prendre quelques mesures législatives complémentaires étant donné que le Conseil constitutionnel a annulé à plusieurs reprises les dispositifs prévus en la matière : soit parce qu’il a considéré qu’il s’agissait de cavaliers législatifs, soit parce que le législateur n’était pas allé jusqu’au bout de sa compétence. J’ai attiré l’attention de la ministre de la santé et du ministre du budget sur la nécessité de préciser, dès le prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale, les mesures à mettre en œuvre pour que la certification des comptes devienne une réalité. Une expérimentation – volontaire dans un premier temps – de la certification des comptes de grandes collectivités est également envisageable. M. Antoine Durrleman va maintenant vous fournir un certain nombre de réponses complémentaires.

M. Antoine Durrleman, président de la sixième chambre de la Cour des comptes. Il nous a été demandé si, dans la branche famille, la réorganisation du réseau des caisses d’allocations familiales avait interféré avec les difficultés que nous avons rencontrées : sur le plan comptable, les opérations de reprise des comptes ont été effectuées dans de bonnes conditions. La Caisse nationale d’allocations familiales et la branche famille ont donc bien fait les choses. En revanche, certaines réorganisations internes ont posé des difficultés, les équipes ayant été mobilisées par ces opérations de réorganisation. Et ce sont les prestations les plus compliquées, c’est-à-dire les allocations de logement familiales et le RSA, qui ont prioritairement souffert des difficultés rencontrées. La caisse nationale a certes réagi mais tardivement, en mettant en place des plans de maîtrise des risques. Ceux-ci ont été mis en œuvre à partir de 2011 et certains d’entre eux produiront leurs effets en 2012 tandis que d’autres doivent encore être mis en application. Globalement, si l’on fait une comparaison avec d’autres branches, la question de la fiabilité des comptes est restée secondaire pour la branche famille. Ainsi, les conventions d’objectifs et de gestion de l’activité de recouvrement et de la branche maladie ont fait de la fiabilité des comptes un objectif prioritaire, à la différence de la convention passée avec la branche famille. Cette convention arrive à échéance, et nous espérons que la question de la fiabilité des comptes sera centrale dans la prochaine convention et que la caisse nationale pilotera beaucoup plus fermement les dispositifs de contrôle interne des caisses.

Pour ce qui est de la branche vieillesse, nous avons constaté des difficultés de liquidation de pensions de retraite. En effet, lorsque l’on recourt à la liquidation en l’état, c’est-à-dire à la liquidation des pensions de retraite en fonction des éléments dont on dispose à l’âge de la liquidation, les informations complémentaires dont on peut disposer après cette liquidation, temporaire en principe, ne sont pas systématiquement prises en compte par une nouvelle liquidation. Si nous avons attiré l’attention de la Caisse nationale d’assurance vieillesse sur ce point depuis 2008, celle-ci n’a cependant pas réagi à nos observations, si bien que nous le pointons assez sévèrement dans notre rapport de certification.

En ce qui concerne la branche maladie, le contrôle des prestations liquidées par les mutuelles nous a permis de constater un certain progrès : la Cour insistait en effet depuis plusieurs années sur cet aspect dans son rapport de certification. En 2011, ce progrès n’est pas encore totalement abouti. De nouveaux dispositifs, qui, selon nous, vont dans le bon sens, devraient être mis en place en 2012.

Nous sommes confrontés à deux difficultés en ce qui concerne la branche des accidents du travail et de maladies professionnelles (AT-MP) : la première concerne le contrôle interne, qui fait l’objet d’efforts importants tant de la part de la Caisse nationale d’assurance maladie que de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS). La seconde est liée à un défaut de provisionnement. En la matière, la décision dépend moins du producteur direct des comptes qu’est la Caisse nationale d’assurance maladie que de ses autorités de tutelle dès lors que le passage de ces provisions a, en l’état actuel des normes comptables, un effet de plusieurs centaines de millions d’euros sur le résultat même de la branche.

La réforme de la tarification est en cours et montera en charge jusqu’en 2014. Si elle n’a pas, en tant que telle, une incidence sur la fiabilité des comptes, on peut cependant espérer qu’elle tarira des sources de contentieux importantes dans l’ancien régime de tarification.

En matière d’assurance-maladie, nous avons analysé la question de la tarification à l’activité et celle de la convergence entre secteur public et privé dans notre rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale de l’an dernier. Nous en avons conclu qu’une véritable convergence impliquait des arbitrages très lourds qui n’avaient pas été rendus et qu’il fallait que les périmètres pris en compte soient les mêmes pour le secteur public et le secteur privé. Nous avons également indiqué dans notre rapport qu’en l’état actuel des choses, l’objectif de convergence fixé par le législateur à 2018 nous paraissait absolument insusceptible d’être atteint.

Point capital, la coordination entre médecine de ville et établissements hospitaliers englobe également la prise en charge médicosociale et le retour à domicile. Ayant motivé la création des agences régionales de santé, elle doit constituer leur priorité. Nous avons commencé à éclairer ce point dans le cadre de nos travaux : ainsi, cette année, nous avons notamment étudié les activités de soins de suite et de réadaptation et nous vous présenterons sur le sujet un certain nombre d’observations dans le cadre du prochain rapport sur l’application des lois de financement de la Sécurité sociale. Faut-il aller jusqu’à des transferts de sous-objectif à sous-objectif de l’ONDAM ? En effet, des questions de périmètre se posent entre l’objectif assigné aux soins de ville d’une part, et les différents objectifs assignés aux établissements de santé, d’autre part.

La dépendance est un point sur lequel la Cour est revenue à plusieurs reprises, soulignant à chaque fois l’extraordinaire enchevêtrement des compétences et l’extraordinaire sédimentation des dispositifs. Sa recommandation principale est d’en simplifier l’accès. De ce point de vue, l’action sociale des CARSAT est une question importante que nous n’avons pas étudiée dans la période récente, sachant qu’il appartient à chaque conseil d’administration de définir sa politique d’action sociale dans le cadre des marges de manœuvre qui lui sont laissées par la CNAV.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Nous nous trouvons devant de grandes difficultés qu’il convient de replacer dans le contexte européen. Dans votre rapport, vous estimez à 1,8 % du PIB la participation de la France à la dette des pays en difficulté dans la zone euro ; or, la situation économique de l’Espagne n’avait pas encore été prise en compte à la fin du mois de juin, au moment de la publication de votre rapport. Cela dit, nous sommes tous ici des euro-convaincus, et l’attachement du Président de la République aux Eurobonds et à la mutualisation des dettes est connu.

Monsieur le Premier président, je vous remercie.

La séance est levée à dix heures cinquante-cinq.

——fpfp——

Informations relatives à la Commission

La Commission des affaires sociales a désigné Mme Dominique Orliac et M. Francis Vercamer, membres de la mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (MECSS), ainsi que M. Jérôme Guedj en remplacement de Mme Martine Pinville.

La Commission a désigné les membres et le rapporteur de la mission d’information, commune avec la Commission des affaires culturelle et de l’éducation, sur les conditions d’emploi dans les métiers artistiques :

 

Groupes politiques

M. Jean-Patrick Gille, rapporteur

SRC

M. Pierre Aylagas

SRC

Mme Fanélie Carrey-Conte

SRC

Mme Chaynesse Khirouni

SRC

Mme Annie Le Houerou

SRC

M. Denys Robiliard

SRC

Mme Valérie Boyer

UMP

M. Henri Guaino

UMP

Mme Véronique Louwagie

UMP

M. Laurent Marcangeli

UMP

M. Francis Vercamer

UDI

M. Christophe Cavard

Écologiste

Présences en réunion

Réunion du mercredi 25 juillet 2012 à 8 h 45

Présents. – M. Pierre Aylagas, M. Gérard Bapt, Mme Véronique Besse, Mme Gisèle Biémouret, M. Jean-Claude Bouchet, Mme Kheira Bouziane, Mme Sylviane Bulteau, M. Jean-Noël Carpentier, Mme Fanélie Carrey-Conte, Mme Martine Carrillon-Couvreur, M. Christophe Cavard, M. Gérard Cherpion, M. Rémi Delatte, Mme Hélène Geoffroy, M. Jean-Marc Germain, M. Jean-Patrick Gille, Mme Linda Gourjade, M. Jérôme Guedj, Mme Joëlle Huillier, M. Christian Hutin, M. Denis Jacquat, Mme Chaynesse Khirouni, Mme Bernadette Laclais, Mme Isabelle Le Callennec, Mme Annie Le Houerou, Mme Catherine Lemorton, M. Michel Liebgott, Mme Gabrielle Louis-Carabin, Mme Véronique Louwagie, M. Gilles Lurton, M. Hervé Morin, M. Jean-Luc Moudenc, M. Jean-Philippe Nilor, Mme Monique Orphe, Mme Luce Pane, M. Bernard Perrut, Mme Martine Pinville, Mme Bérengère Poletti, M. Arnaud Richard, M. Denys Robiliard, M. Arnaud Robinet, M. Jean-Louis Roumegas, M. Gérard Sebaoun, M. Fernand Siré, M. Christophe Sirugue, M. Jonas Tahuaitu, M. Dominique Tian, M. Jean-Louis Touraine, M. Olivier Veran, M. Francis Vercamer

Excusés. – Mme Marie-Françoise Clergeau, M. Guy Delcourt, Mme Dominique Orliac