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Commission des affaires sociales

Mercredi 16 janvier 2013

Séance de 9 heures

Compte rendu n° 33

Présidence de Mme Catherine Lemorton, Présidente

–  Audition, ouverte à la presse, de M. Marc Meunier, administrateur civil, dont la désignation à la direction générale de l’Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (EPRUS) est envisagée par le Gouvernement

– Présences en réunion

COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES

Mercredi 16 janvier 2013

La séance est ouverte à neuf heures.

(Présidence de Mme Catherine Lemorton, présidente de la Commission)

La Commission entend M. Marc Meunier, administrateur civil, dont la désignation à la direction générale de l’Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (EPRUS) est envisagée par le Gouvernement.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Je souhaite la bienvenue à M. Élie Aboud qui revient dans notre commission après son élection à la suite d’une élection législative partielle.

Nous accueillons aujourd’hui M. Marc Meunier, administrateur civil, dont la nomination à la direction générale de l’Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (EPRUS) est envisagée par le Gouvernement.

Cette audition a lieu en application de l’article L. 1451-1 du code de la santé publique, issu de l’article 1er de la loi de 2011 sur le médicament. En effet, l’EPRUS fait partie des neuf organismes dont les présidents, directeurs généraux et directeurs doivent être auditionnés par le Parlement, en l’espèce les commissions des affaires sociales des deux assemblées, avant leur nomination.

Nous ne sommes pas dans le cadre de la procédure de mise en œuvre de l’article 13 de la Constitution : il ne s’agit que d’une simple audition et non pas d’un avis demandé aux commissions compétentes. Cette audition ne sera donc pas suivie d’un vote.

Je rappelle brièvement que l’EPRUS a été créé par la loi du 5 mars 2007 pour répondre aux différentes menaces sanitaires graves, en France et à l’étranger, en facilitant l’organisation et le déploiement des forces de santé en cas de crise sanitaire exceptionnelle.

Opérateur du ministère en charge de la santé, l’EPRUS s’articule autour de deux pôles d’activités :

– la Réserve sanitaire, constituée de près de 7 400 professionnels de santé volontaires, en activité, retraités ou en fin d’études, prêts à intervenir sur le terrain en France et à l’étranger ;

– le stock stratégique national de santé, puisque l’EPRUS a pour mission d’acquérir, de fabriquer, d’importer, de distribuer et d’exporter les produits et services nécessaires à la protection de la population face aux menaces sanitaires graves. Ce stock est composé de médicaments, de dispositifs médicaux (seringues, aiguilles, collecteurs, masques chirurgicaux…) et de matériels divers (notamment des équipements de protection individuelle).

L’EPRUS est financé à la fois par une subvention de l’État figurant dans les crédits de la mission « Santé » (19 millions d’euros en 2013) et par une contribution des régimes d’assurance maladie déterminée par la loi de financement de la sécurité sociale (22 millions d’euros en 2013).

J’indique que M. Meunier a fait parvenir au secrétariat de la commission son CV : ce document est en distribution dans la salle.

Je voudrais insister sur un point : l’EPRUS est sans doute une agence encore mal connue, mais on en a beaucoup entendu parler lors de la crise de la grippe A(H1N1). Or vous avez peut-être remarqué des « spots » télévisés à la fin de l’année dernière pour le recrutement de réservistes sanitaires, pharmaciens, médecins et infirmières, qui ont valu à l’établissement un prix de la communication. Votre prédécesseur, M. Couderc, nous disait que cette politique de communication avait permis de faire passer le nombre de réservistes à près 9 000. Êtes-vous en mesure de nous confirmer ce chiffre ?

Monsieur Meunier, vous avez la parole pour présenter votre parcours professionnel ainsi que votre motivation pour postuler à cette fonction de directeur général de l’EPRUS, établissement qui est au cœur de la gestion des crises sanitaires dans notre pays.

M. Marc Meunier, directeur général pressenti de l’EPRUS. Je suis devant vous, comme l’a rappelé Mme la Présidente, pour présenter ma candidature au poste de directeur général de l’EPRUS. À 51 ans, mon parcours professionnel est assez varié, mais a comme fil conducteur le service public, le domaine médical et l’organisation d’actions opérationnelles. Ma formation initiale est celle de docteur vétérinaire, je suis très rapidement entré dans l’administration, d’abord comme inspecteur vétérinaire sur le marché de Rungis où je m’occupais d’inspection sanitaire et de salubrité avec des horaires un peu particuliers qui m’ont permis de suivre une formation à l’Institut d’administration des entreprises de Paris. Ensuite, par l’intermédiaire du ministère de la coopération, je suis parti au Sénégal comme directeur administratif et financier dans une société d’élevage à laquelle participait l’État français, expérience particulièrement intéressante.

À mon retour en France, j’ai repris mon métier de vétérinaire inspecteur, dans le domaine de la santé animale cette fois, en Dordogne. Dès lors mon contact avec le monde préfectoral m’a conduit à vouloir l’intégrer. Aussi, à ma sortie de l’ENA, je suis devenu administrateur civil au ministère de l’intérieur. J’ai alors occupé les différents postes classiques d’un sous-préfet : directeur de cabinet du préfet du Cher, sous-préfet d’arrondissement dans le Lot et secrétaire général de la préfecture de la Manche, parcours entrecoupé d’une mobilité en administration centrale au ministère de l’intérieur comme adjoint au sous-directeur de l’action sociale. Ensuite, sous-directeur de l’éducation routière au ministère des transports, puis de l’intérieur, je m’occupais du permis de conduire, dans ses aspects formation et examen, et notamment de la gestion des 1 300 inspecteurs du permis de conduire. En mai 2012, Mme Marisol Touraine m’a appelé à son cabinet pour participer à sa mise en place et aux premiers mois de son fonctionnement. Elle m’a récemment proposé le poste de directeur général de l’EPRUS.

Comme vient de le rappeler Mme la Présidente, l’EPRUS est un opérateur de l’État qui s’occupe de logistique avec deux volets particulièrement importants, la gestion au plan national des stocks de produits et de médicaments destinés à faire face à des crises ou des menaces sanitaires majeures et la mise en place d’une Réserve sanitaire. Les derniers chiffres dont je dispose la concernant sont un peu moins élevés que ceux que vous avez cités, madame la Présidente, puisqu’on estime aujourd’hui le nombre de réservistes sanitaires autour de 6 à 7 000. Ce sont des volontaires issus de différents milieux, hôpitaux ou sécurité civile, des professionnels ou anciens professionnels médicaux, des étudiants en médecine ou des professions paramédicales.

L’établissement doit être en mesure de mettre sur le terrain des hommes, des matériels ou des produits extrêmement rapidement pour répondre à des crises sanitaires qui peuvent être de plusieurs ordres : menaces terroriste, biologique, chimique, nucléaire, radiologique mais aussi pandémies comme la grippe aviaire, catastrophes naturelles ou encore épisodes de canicule ou de grand froid, en France. Son action se fait sur le plan national, mais également à l’étranger, comme ce fut le cas ces dernières années pour plusieurs opérations.

Ce poste m’intéresse à un double titre. D’abord ma formation médicale trouve ici à s’appliquer. Vétérinaire, j’ai eu l’occasion dans l’administration de préparer plusieurs plans de lutte contre certaines maladies animales, comme la fièvre aphteuse, qui ressemblent aux plans de lutte contre les maladies humaines, avec évidemment quelques différences, heureusement, en termes de mises en œuvre et de finalités… Sous-préfet, j’ai en aval, participé à des exercices, notamment de sécurité nucléaire, puisque j’étais dans des départements ou le nucléaire tenait une place importante. J’ai aussi pris en charge des opérations de secours dans un certain nombre de circonstances, vous vous souvenez peut-être, par exemple, du sauvetage des spéléologues disparus dans un gouffre à Gramat en 1999 pendant dix jours. J’ai également eu à gérer les conséquences d’épisodes neigeux, notamment sur l’autoroute A 13 en Normandie, autoroute supportant bien la pluie, mais nettement moins la neige. Il a fallu passer des nuits en poste de secours pour venir en aide aux automobilistes bloqués. J’ai également une bonne expérience de l’interministériel et du travail en coordination, ayant appartenu à différents ministères : agriculture, coopération, transports, intérieur, santé… Enfin, mes dernières fonctions au cabinet de Mme Marisol Touraine ont complété ma connaissance du monde de la santé en me permettant d’y créer un réseau et d’y avoir des correspondants.

Le poste de directeur général de l’EPRUS constitue une suite logique de mes fonctions antérieures, cohérente dans mon parcours professionnel et correspondant à un domaine qui m’a toujours attiré.

J’en viens à la façon dont j’envisage mes nouvelles fonctions. L’EPRUS est un organisme relativement jeune, datant de 2007, il est encore en phase de montée en puissance. Sa mise en place a été à la fois perturbée et accélérée par l’épisode de pandémie grippale que nous avons connu en 2009, puisque l’établissement n’était pas encore complètement prêt alors. L’accent a été surtout mis pendant ses cinq premières années sur l’organisation interne, les procédures et leur sécurisation que ce soit pour l’acquisition, le stockage ou la distribution des médicaments avec de nombreux dispositifs mis en place pour évaluer les stocks et lisser leur acquisition dans le temps. Pour la Réserve sanitaire, comme l’a rappelé Mme la Présidente, une forte campagne de communication a permis en quelques mois d’augmenter de manière significative le nombre de réservistes. Mon action va s’inscrire et poursuivre ce travail de mise en place de la structure de l’établissement.

Il convient aussi de s’intéresser maintenant aux actions et au positionnement de l’EPRUS par rapport aux autres acteurs, nombreux, de la sécurité civile, les hôpitaux, la sécurité civile, le service de santé des armées. Un travail important de coordination, de partenariat, de mise en commun, tant des pratiques que des stocks ou des savoir-faire, est à réaliser. L’EPRUS, qui est une petite structure, a ici un rôle important à jouer, puisqu’il s’appuie sur ces différents acteurs sans en avoir la culture et est donc plus souple pour exploiter les atouts des uns et des autres et mettre en place des équipes performantes sur le terrain. L’EPRUS a toute sa place dans ce travail de coopération horizontale entre les différents acteurs mais aussi de coordination verticale. Le niveau régional, mais surtout zonal, prend de l’importance dans la gestion des crises avec les agences régionales de santé (ARS) et préfets de zone. L’EPRUS doit ici à la fois faire jouer le principe de subsidiarité, et ne pas se substituer à ce qui est très bien fait à l’échelon local, mais aussi organiser et apporter son expertise au service de ces acteurs locaux, en particulier en matière de condition de stockage des médicaments, de marchés publics de commandes de médicaments ou de produits de santé. Pour résumer, je me fixe donc pour objectif de poursuivre le développement de l’EPRUS afin de mieux organiser en France la réponse aux crises sanitaires dans un contexte budgétaire relativement difficile, en exploitant au mieux les capacités de chacun des acteurs concernés.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Je vous remercie pour cette présentation complète et concise qui donnera néanmoins sans doute lieu à des questions. Monsieur Gérard Bapt va intervenir au nom du groupe SRC et je sais que lors de la crise du virus A(H1N1), il avait maintes fois visité l’EPRUS et inspecté ses stocks de masques et de vaccins.

M. Gérard Bapt. L’EPRUS a en effet été plus particulièrement connu à partir du moment où il est intervenu, comme opérateur, lors de la crise de la grippe A(H1N1). Alors rapporteur spécial pour la Commission des finances, j’ai visité l’EPRUS au titre d’un contrôle sur place et sur pièces et j’ai été favorablement impressionné par la façon dont cet établissement public prenait en charge et exécutait les orientations du gouvernement de l’époque. Les opérations de stockage se sont bien déroulées et ce n’était pas une mince affaire. Le pharmacien général en poste à l’époque a fait preuve d’une grande expertise et veillé à la mise à disposition potentielle, sur l’ensemble du territoire, des matériels, des médicaments et des vaccins nécessaires. Vous prenez donc en charge un instrument d’une importance extrême dans la façon dont notre pays doit se prémunir contre les risques non seulement pandémiques mais aussi de bioterrorisme.

Je souhaiterais attirer votre attention sur le stockage des antiviraux, conditionnés soit sous forme de comprimés soit de poudres, que les pharmacies des armées peuvent ensuite rendre rapidement opérationnels. Or leur efficacité est très discutée, notamment pour le Tamiflu. Des questions se posent sur l’opportunité de conserver de tels stocks, qui sont onéreux et se périment, et que l’on est régulièrement amenés soit à détruire, soit à prolonger en repoussant la date de péremption, ce qui n’est pas très satisfaisant. Je ne peux que vous souhaiter plein succès dans vos différentes missions.

M. Jean-Pierre Door. C’est pour moi un plaisir que de vous entendre car j’ai un peu été à l’origine de l’EPRUS en tant que rapporteur, en 2007, de la loi sur la préparation du système de sécurité sanitaire avec le sénateur Francis Giraud, qui avait obtenu le vote unanime des députés. Nous avions un grand besoin de cet établissement. Quel que soit l’effort d’anticipation, les crises ne se déroulent jamais comme prévu. On se souvient de la grippe H5N1 puis de la grippe A(H1N1).

Je me félicite du fait que le corps de réserve sanitaire a gagné en importance passant de 300 praticiens à près de 6 000, dont de nombreux retraités… et je suis l’un d’eux. Je rappelle à Mme la Présidente que lors de l’examen du dernier projet de loi de financement de la sécurité sociale, j’ai proposé de valoriser la participation des médecins retraités à la médecine de terrain ou à la réserve, mais vous avez repoussé mon amendement. Le chiffre de 6 000 est très satisfaisant et montre qu’il y a encore beaucoup de médecins retraités qui aspirent à rester actifs lorsqu’il y a des problèmes.

Je souhaite vous interroger sur les lieux de stockage, qui sont multiples, je pense par exemple au centre de la Pharmacie des armées de Chartres. Pourrez-vous nous parler du nouvel établissement qui sera créé à Vitry-le-François et préciser la nature des stocks qui y seraient regroupés ? Je rejoins Gérard Bapt sur la nécessité de veiller à la validité des dates de péremption.

Je sais que l’EPRUS a vécu des périodes délicates, notamment dans la gestion des marchés publics. Des rapports de la Cour des comptes et du Sénat ont fait état de difficultés de gestion. J’espère que la page est tournée désormais.

Je réitère ma proposition, faite initialement à votre prédécesseur, de création de conseils de zone de défense qui seraient des référents, sanitaires ou administratifs, immédiatement opérationnels sur le terrain, de façon équilibrée.

Pour conclure, j’apprécie votre double profil de haut fonctionnaire, qui a travaillé en préfecture, et d’expert médical, vétérinaire en l’occurrence, mais l’on sait que nombre de ces pandémies ont une origine animale. Vous serez une vigie et pourrez régulièrement revenir nous présenter l’action de cet établissement, que nous défendrons.

M. Élie Aboud. Vous avez bien présenté les différents aspects de gestion de la crise sanitaire mais cet établissement est-il également compétent en matière d’évaluation des risques sanitaires ? On a pu constater il y a quelques années la grande divergence des opinions émises par les scientifiques en matière d’évaluation des risques, qui pouvait laisser dubitatifs les parlementaires même les plus avertis. L’établissement est-il en mesure de gérer l’évaluation du risque sanitaire et quelles sont ses relations avec le monde scientifique ?

M. Christian Hutin. Monsieur le Préfet, il est rare de voir un CV comportant des plages vides mais, entre 1993 et 1997, nous n’avons pas d’information. Je retire bien sûr immédiatement ma question si la réponse est d’ordre privé.

Je partage l’avis de mes collègues. En matière de crise, quand il ne se passe rien, il faut être l’arme au pied et se contenter de gagner un prix de communication pour recruter des réservistes, ce qui est une excellente chose au demeurant. Concernant les périodes de crise, il y a tout l’aspect matériel, ces stocks que vous avez au demeurant évoqués, mais il y a également un aspect immatériel et humain et je souhaite avoir votre sentiment sur la dimension anxiogène, parfois paranoïde, de la crise dans la population. Enfin en matière de gestion, vous disposez d’un budget de plus de 40 millions d’euros. Quel est le budget de fonctionnement et quelle part est réservée aux stocks ? Cela vous paraît-il suffisant ?

M. Dominique Dord. Je m’associe à mes prédécesseurs pour souhaiter bonne chance à M. Meunier. Je mesure la difficulté de la mission : quand il ne se passe rien, vous êtes assis sur des stocks qui, par définition, se périment et ; quand il y a une crise sanitaire, on n’est pas forcément prêt car on n’a pas forcément pu la deviner. Mais j’ai une question plus personnelle : la vie était-elle si difficile au cabinet de la ministre de la santé pour que vous acceptiez de prendre ces nouvelles fonctions ?

Mme la présidente Catherine Lemorton. Merci M. Dord. Je crois que c’est une question à laquelle j’exonérerai M. Meunier de répondre.

M. Michel Issindou. Nous vous souhaitons bonne chance dans vos nouvelles fonctions, mais la manière dont vous avez géré en 1999 l’accident survenu dans le gouffre de Gramat lorsque vous étiez sous-préfet du Lot – je m’en souviens parfaitement – est de nature à nous rassurer. Que sont devenus les dizaines de millions de vaccins contre la grippe A(H1N1) qui avaient été stockés en prévision de l’épidémie ? Par ailleurs, la réserve sanitaire peut-elle être mobilisée rapidement le moment venu ?

Mme Véronique Louwagie. Je vous souhaite également bonne chance et je m’interroge sur la dimension européenne et internationale de l’activité de l’EPRUS : y a-t-il des coopérations et des synergies avec les homologues de l’EPRUS qui existeraient dans les pays étrangers ?

Mme Monique Orphé. Le champ de compétence de l’EPRUS inclut-il l’outre-mer ? Quels sont les plans d’action permettant de résoudre en outre-mer des crises sanitaires comme celle du chikungunya voici quelques années, où il a fallu attendre que la moitié de la population ait été contaminée et que des décès soient survenus pour que des actions soient entreprises ?

M. Gérard Sebaoun. Le fait que de plus en plus de molécules et vaccins soient fabriqués à l’étranger ne fait-il pas courir un risque de rupture d’approvisionnement en cas de tensions internationales ou de conflits ?

Mme Annie Le Houérou. Je vous souhaite bonne chance, sachant que la diversité de votre parcours professionnel constitue un élément très positif, notamment votre participation à la conception d’un plan départemental de lutte contre la fièvre aphteuse. Vous êtes aussi au fait des difficultés du service public en milieu rural. De ce point de vue, quelle est selon vous l’organisation territoriale qu’il faut retenir dans le domaine de la préparation aux urgences sanitaires ? Par ailleurs, le risque sanitaire étant un risque international, quelles sont les coopérations que l’EPRUS a engagées avec ses homologues d’autres pays ?

Mme la présidente Catherine Lemorton. Je m’interroge sur les réserves de médicaments, notamment d’antiviraux, et sur l’évaluation de leur biodisponibilité au regard de leur forme galénique. La Haute Autorité de santé a ainsi confirmé récemment l’avis négatif qu’elle avait rendu en 2009 sur l’efficacité du Tamiflu, pour lequel le bilan bénéfice/risques n’est pas favorable, quelles que soient les tranches d’âge, mais également pour ce qui est des pathologies associées. Comment, à l’avenir, sera-t-il donc tenu compte des avis de la Haute Autorité de santé ?

M. le directeur général pressenti de l’EPRUS. Je remercie tout d’abord la présidente Catherine Lemorton de m’avoir dispensé de répondre à l’une des questions qui m’ont été posées. Par ailleurs, les trois ans et demi qui n’apparaissent pas dans mon curriculum vitæ correspondent à l’année qui m’a été accordée par mon administration pour préparer le concours d’entrée à l’ENA puis aux vingt-sept mois de scolarité que j’y ai effectués.

Les lieux de stockage sont actuellement multiples et ne sont généralement pas la propriété de l’EPRUS, qui les loue le plus souvent à des grossistes-répartiteurs. Ce nombre, qui était de trente-six, sera considérablement réduit, puisque la construction à Vitry-le-François d’un centre national, destiné à stocker 80 % des produits et médicaments, va débuter dans quelques semaines. Les 20 % restants seront conservés dans sept centres dans chaque zone de défense à la disposition des agences régionales de santé de zone. La rationalité et le coût du stockage seront ainsi améliorés.

La gestion de la péremption des produits a déjà fait l’objet d’un important travail. Il est cependant possible de lisser davantage l’acquisition des produits afin d’étaler autant que possible la reconstitution des stocks en fonction de la date de péremption, ce qui permet également d’éviter les trop grandes variations des dotations budgétaires. On a pu également prolonger la durée de vie de certains médicaments, sous le contrôle de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) sur la base d’études réalisées sur des échantillons. Le recyclage des médicaments avant leur péremption constitue une piste à étudier, mais apparaît toutefois difficile tant dans le réseau des pharmacies d’officine que dans les hôpitaux, car chaque établissement définit sa propre politique d’acquisition. Dès lors, en l’absence de crise sanitaire, la destruction de stocks est souvent inévitable, mais elle est inhérente au mécanisme de précaution.

L’EPRUS s’appuie de façon croissante sur les agences régionales de santé des zones de défense, tant pour les médicaments que pour la réserve sanitaire. La mobilisation des volontaires, notamment ceux qui sont issus de ces zones, suppose en effet une coordination entre l’EPRUS et les agences régionales, ne serait-ce que pour leur communiquer la liste de ces volontaires. L’idée est que l’EPRUS intervienne en « deuxième rideau » lorsque les moyens d’une zone de défense sont insuffisants afin d’apporter, le cas échéant, les renforts nécessaires grâce aux moyens disponibles dans les autres zones.

Il ne faut pas perdre de vue que l’EPRUS est avant tout un opérateur logistique pointu et c’est là une mission à la fois noble et difficile que celle d’organiser la réponse aux urgences sanitaires. L’EPRUS sait le faire, il est même le seul à savoir le faire dans des délais brefs. Pour ce qui est de l’évaluation du risque sanitaire, la décision relève de la direction générale de la santé, au travers du département des urgences sanitaires, et des agences spécialisées que sont l’Institut national de veille sanitaire (InVS) et l’ANSM. Cela étant, l’EPRUS est évidemment associé à la préparation des plans et, le moment venu, à leur exécution.

S’agissant du caractère humain de la gestion des crises, il est incontestable que la crise de la grippe A(H1N1) a démontré que des progrès étaient nécessaires. De nombreux rapports, tant du Conseil d’État que de l’Inspection générale des finances ont souligné que l’information des citoyens et une plus grande transparence étaient indispensables. Il est indéniable qu’une bonne information du public doit s’appuyer sur le corps médical. Lors de la gestion de la crise de la grippe A(H1N1), ces derniers n’avaient pas été suffisamment associés. Je pense que l’on s’y prendra différemment en cas de crise sanitaire nouvelle.

Pour répondre à la question relative à la communication, l’EPRUS dispose d’un budget pour mener à bien des campagnes importantes, comme par exemple, le recrutement de volontaires afin de constituer la réserve sanitaire. Ainsi en 2012, une campagne de ce type a permis d’atteindre le chiffre de 6 000 volontaires.

Concernant le stock des vaccins contre la grippe A(H1N1), la gestion des surplus a été gérée de la manière suivante. En premier lieu, l’État a réussi à ne pas honorer ses engagements vis-à-vis des laboratoires pharmaceutiques pour les commandes passées. Une partie du stock détenu, en deuxième lieu a été revendue à des pays étrangers comme le Qatar ou l’Égypte. Enfin en troisième lieu, l’État a procédé à la destruction progressive du stock restant, opération qui s’est terminée en 2012. À ce jour, il n’existe donc plus de stock de vaccins contre la grippe A(H1N1), dont la date de péremption aurait de toute façon était atteinte.

S’agissant du volet international de l’agence, des améliorations substantielles seront à mettre en œuvre. La coopération internationale est indispensable que ce soit pour mobiliser des moyens humains ou pour passer des marchés. La France était en retard par rapport à d’autres pays européens. Ainsi, le Royaume-Uni dispose d’une force qui lui permet de se projeter à l’étranger dans le cadre de n’importe quelle situation, avec des règles plus souples que celles de l’armée ou de la sécurité civile. L’EPRUS permet d’atteindre ce niveau et l’État dispose désormais d’un opérateur qui gère les aspects logistiques dans le cadre du déploiement d’une force sanitaire à l’étranger.

Quant à l’action de l’agence au sein des départements ou territoires d’outre-mer, nos réponses se devront d’être plus réactives. Le principe de subsidiarité doit être mis en œuvre et les agences régionales de santé concernées seront dotées de pouvoirs plus importants. Ainsi, celle de la Réunion disposera de ses propres volontaires et produits et l’EPRUS jouera un rôle complémentaire pour envoyer des renforts en cas de besoin.

M. Jean-Pierre Door. Quel sera le coût de l’établissement de Vitry-le-François ?

M. le directeur général pressenti de l’EPRUS. Environ 20 millions d’euros qui devraient être amortis en trois ou quatre ans.

M. Jean-Pierre Door. Sur quel budget sont imputés ces crédits et que devient la délégation interministérielle à la lutte contre la grippe aviaire (DILGA) ?

M. le directeur général pressenti de l’EPRUS. L’EPRUS reçoit une subvention de l’État et une participation de l’assurance maladie, celle-ci ne servant pas à financer la réserve sanitaire mais seulement l’autre secteur d’activité de l’EPRUS. Le centre de Vitry-le-François sera donc financé à parité par la part Etat et la part assurance maladie. Cela représente 7 millions d’euros en 2013. La DILGA a rempli ses missions et il a été mis fin à ses fonctions.

Mme Chaynesse Khirouni. Quel est le retour d’expérience de la crise de la grippe A (H1N1) en ce qui concerne la négociation des commandes et la rédaction des clauses d’annulation de celles-ci ?

M. Gérard Sebaoun. De combien de collaborateurs dispose votre établissement ?

M. le directeur général pressenti de l’EPRUS. L’agence est une petite structure qui emploie 34 personnes, y compris le directeur général.

S’agissant de la passation de commandes, la gestion de la grippe A(H1N1) a montré que des progrès restaient à faire. L’agence a amélioré son expertise et a tiré les leçons des commandes de vaccins et négociera avec les laboratoires pharmaceutiques dans de meilleures conditions notamment sur les questions de tranches fermes ou optionnelles et les clauses de dédommagement. Je pense que les contrats seront négociés de manière plus satisfaisante la prochaine fois.

M. Dominique Tian. Quel est le budget de fonctionnement de l’EPRUS ?

M. Marc Meunier. Le coût de la structure, notamment pour rémunérer les collaborateurs, s’élève à 5 millions d’euros par an. Le budget de l’agence est très fluctuant, à titre d’exemple, en 2013, le budget s’élèvera à 50 millions d’euros tandis qu’en 2009, il avait atteint les 500 millions d’euros, en raison de l’achat de médicaments et de vaccins. C’est pourquoi, il convient de mieux lisser dans le temps l’approvisionnement en médicaments de l’agence, comme je le disais tout à l’heure.

Mme Catherine Lemorton. Je souhaiterais revenir sur les soucis occasionnés par le Tamiflu lors de la crise de la grippe A(H1N1), notamment dans la gestion des stocks des pharmaciens. La direction générale de la santé a enjoint les professionnels de santé à prescrire le Tamiflu alors que ce médicament n’était jamais prescrit en médecine de ville. Je savais que vous ne pourriez pas répondre à ma question, il est primordial de s’assurer de l’efficacité de ce médicament afin de sécuriser les professionnels de santé si une nouvelle crise se produisait.

La disposition de la loi relative au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé permet de mieux connaître le rôle des agences sanitaires et de mettre en valeur leurs missions. L’image de l’EPRUS avait été écornée lors de la crise de la grippe A (H1N1) et je crois que cette audition a été l’occasion de montrer l’importance de cet établissement. Je vous remercie, monsieur, de votre participation et souhaite de ne pas avoir à vous auditionner avant cinq années !

La séance est levée à dix heures quinze.

Présences en réunion

Réunion du mercredi 16 janvier 2013 à 9 heures

Présents. – M. Élie Aboud, M. Pierre Aylagas, M. Gérard Bapt, Mme Véronique Besse, Mme Gisèle Biémouret, M. Jean-Claude Bouchet, Mme Kheira Bouziane, Mme Sylviane Bulteau, M. Jean-Noël Carpentier, M. Gérard Cherpion, Mme Marie-Françoise Clergeau, M. Rémi Delatte, M. Jean-Pierre Door, M. Dominique Dord, M. Jean-Patrick Gille, Mme Joëlle Huillier, M. Christian Hutin, Mme Monique Iborra, M. Michel Issindou, M. Denis Jacquat, Mme Chaynesse Khirouni, Mme Bernadette Laclais, Mme Conchita Lacuey, Mme Isabelle Le Callennec, Mme Annie Le Houerou, Mme Catherine Lemorton, M. Jean Leonetti, M. Céleste Lett, Mme Geneviève Levy, M. Michel Liebgott, Mme Véronique Louwagie, M. Gilles Lurton, M. Laurent Marcangeli, Mme Véronique Massonneau, M. Hervé Morin, Mme Ségolène Neuville, Mme Monique Orphé, M. Christian Paul, M. Bernard Perrut, Mme Bérengère Poletti, M. Arnaud Richard, M. Denys Robiliard, M. Arnaud Robinet, Mme Barbara Romagnan, M. Jean-Louis Roumegas, M. Gérard Sebaoun, M. Dominique Tian, M. Francis Vercamer, M. Jean-Sébastien Vialatte

Excusés. – Mme Valérie Boyer, M. Guy Delcourt, Mme Gabrielle Louis-Carabin, M. Jean-Philippe Nilor, M. Fernand Siré, M. Christophe Sirugue, M. Jonas Tahuaitu

Assistaient également à la réunion. – M. Richard Ferrand, M. Régis Juanico