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Commission des affaires sociales

Mardi 25 juin 2013

Séance de 17 heures 15

Compte rendu n° 71

Présidence de Mme Catherine Lemorton, Présidente

– Audition, ouverte à la presse, de M. Marc Mortureux, directeur général de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES), dont la reconduction dans ses fonctions est envisagée par le Gouvernement (application de l’article L. 1451-1 du code de la santé publique)

– Présences en réunion

COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES

Mardi 25 juin 2013

La séance est ouverte à dix-sept heures trente-cinq.

(Présidence de Mme Catherine Lemorton, présidente de la Commission)

La Commission entend M. Marc Mortureux, directeur général de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) dont la reconduction dans ses fonctions est envisagée par le Gouvernement en application de l’article L. 1451-1 du code de la santé publique.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Mes chers collègues, nous accueillons aujourd’hui M. Marc Mortureux, directeur général de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, l’ANSES, dont la reconduction dans ses fonctions est envisagée par le Gouvernement.

Cette audition a lieu en application de l’article L. 1451-1 du code de la santé publique, issu de l’article 1er de la loi relative au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé que nous avons adoptée en 2011. En effet, l’ANSES fait partie des neuf organismes dont les présidents, directeurs généraux et directeurs doivent être auditionnés par le Parlement – en l’espèce les commissions des affaires sociales des deux assemblées – avant leur nomination.

Nous ne sommes pas dans le cadre de la procédure de mise en œuvre de l’article 13 de la Constitution : il ne s’agit donc que d’une simple audition, et non pas d’un avis demandé aux commissions compétentes. Cette audition ne sera donc pas suivie d’un vote.

L’ANSES est un établissement public créé le 1er juillet 2010 par la fusion de l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments – AFSSA – et de l’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail – AFSSET.

L’ANSES assure des missions de veille, d’expertise, de recherche et de référence sur un large champ couvrant la santé humaine, la santé et le bien-être animal et la santé végétale. Elle offre une lecture transversale des questions sanitaires et couvre ainsi de manière globale l’ensemble des expositions – particules, ondes, inhalation, ingestion… – auxquelles un individu peut être soumis, volontairement ou non, à tous les âges et moments de sa vie, qu’il s’agisse d’expositions au travail, pendant ses transports, ses loisirs, ou via son alimentation.

L’ANSES transmet ses avis et recommandations aux pouvoirs publics et rend systématiquement publics l’ensemble de ses travaux. Elle s’appuie sur un réseau de onze laboratoires de référence et de recherche, reconnus au niveau international dans plusieurs domaines ou disciplines. Elle compte près de 1 350 agents et mobilise environ 800 experts extérieurs via ses collectifs d’experts.

Monsieur Mortureux, vous avez fait parvenir au secrétariat de la Commission votre curriculum vitae ainsi que la déclaration publique d’intérêts que la loi vous oblige à souscrire : ces documents sont en distribution à l’entrée de la salle.

C’est la sixième fois depuis le début de la législature que nous nous livrons à cet exercice d’audition préalable à une nomination, mais c’est la première fois qu’il s’agit d’une reconduction. Cela ne sera pas sans incidence sur la teneur de nos échanges. En effet, vous connaissez parfaitement cet établissement, que vous dirigez depuis sa création, d’autant plus que vous étiez auparavant directeur général de l’AFSSA et que vous vous étiez vu confier la mission de préfiguration de ce qui allait devenir l’ANSES.

Après nous avoir présenté votre parcours professionnel, pourriez-vous nous faire connaître les raisons pour lesquelles vous êtes candidat à la poursuite de votre mission ? Quels enseignements tirez-vous de votre action à la tête de l’ANSES depuis trois ans ? La fusion a-t-elle été une réussite ? Quels sont vos satisfactions et vos regrets, si vous en avez ? Comptez-vous infléchir votre gestion au cours de ce nouveau mandat et quelles seraient ces inflexions ?

M. Marc Mortureux, directeur général de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail. Je me réjouis que ma candidature à un nouveau mandat à la tête de l’ANSES, agréée par les cinq ministères de tutelle – santé, agriculture, environnement, travail et consommation – me donne l’occasion d’être entendu par votre Commission, d’autant que les agences de sécurité sanitaire ont été créées par la volonté du Parlement. J’ai du reste déjà été auditionné par votre commission ainsi que par celle du développement durable.

Ingénieur du corps des mines, j’ai connu jusqu’à présent un parcours professionnel diversifié. J’ai commencé ma carrière comme chef de la division « Environnement » à la direction régionale de l’industrie et de la recherche d’Ile-de-France et comme secrétaire général d’Airparif, organisme gestionnaire du réseau de surveillance de la pollution atmosphérique en Ile-de-France. J’ai travaillé ensuite au ministère de l’industrie, puis comme directeur de la recherche et du développement à la Compagnie générale de géophysique, entreprise privée à vocation internationale. J’ai dirigé ensuite le Laboratoire national de métrologie et d’essais, établissement public à caractère industriel et commercial, avant de devenir directeur général adjoint de l’institut Pasteur. Puis j’ai été directeur du cabinet du secrétaire d’État chargé de l’industrie et de la consommation, avant d’être nommé, en août 2009, directeur général de l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments, l’AFSSA, et préfigurateur de l’établissement public qui devait, aux termes de la « loi Hôpital, patients, santé, territoires », ou « loi HPST », reprendre les missions de l’AFSSA et de l’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail, l’AFSSET. En juillet 2010, je suis devenu directeur général de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, l’ANSES, créée par ordonnance.

La fusion de l’AFSSA, chargée de contrôler l’ensemble de la chaîne alimentaire, « de la fourche à la fourchette », et de l’AFSSET, chargée depuis sa création en 2006 des questions de santé environnementale et de santé au travail, n’a pas manqué de rencontrer des résistances, en raison notamment de l’hétérogénéité des problématiques traitées par les deux agences. Beaucoup craignaient que les missions spécifiques des deux agences ne se diluent dans un ensemble trop vaste, et que l’AFSSET, qui ne comptait que 150 agents, ne soit absorbée par l’AFSSA, ses 1 200 agents et son réseau de laboratoires couvrant tout le territoire.

Ma conviction était que la fusion ne réussirait que si l’on engageait la concertation la plus large et la plus approfondie de l’ensemble des acteurs concernés par ces sujets – partenaires sociaux, organisations professionnelles, organisations non gouvernementales, associations de consommateurs, ainsi que les ministères. Une quinzaine de réunions rassemblant chacune plus d’une quarantaine de partenaires nous ont permis de poser les fondations de cette nouvelle agence. Cet espace de concertation a été pour moi le laboratoire de l’ANSES, qui reste porteuse de cet esprit de grande ouverture.

Ma deuxième préoccupation a été de créer de la valeur ajoutée à partir du meilleur des deux cultures. Certaines synergies étaient évidentes, par exemple entre la mission d’évaluation des produits phytosanitaires qui était celle de l’AFSSA et l’évaluation des produits biocides, qui relevait de l’AFSSET, ou encore entre la surveillance de la qualité sanitaire de l’eau à destination de la consommation humaine, mission de l’AFSSA, et celle de la qualité des eaux de baignade, qui relevait de l’AFSSET.

La troisième condition de réussite était la capacité de lancer une dynamique interne susceptible de mobiliser les salariés des deux agences dans un projet commun.

Au bout d’un processus de onze mois et à l’échéance prévue, l’ANSES a vu le jour le 1er juillet 2010, les équipes se regroupant dès les jours suivants.

Aujourd’hui, l’ANSES, c’est 1 350 personnes et onze laboratoires répartis sur tout le territoire, au plus près des activités de terrain, des lieux d’élevage ou de culture par exemple. Cette proximité avec le terrain est essentielle pour une agence comme la nôtre. En effet notre rôle ne se limite pas à dresser l’état des connaissances scientifiques existantes sur un sujet donné ; nous devons également confronter celles-ci aux données les plus précises et les plus concrètes recueillies sur le terrain.

Avec trois ans de recul, je crois pouvoir dire objectivement que la création de l’ANSES a marqué un progrès en matière de sécurité sanitaire, notamment grâce à trois éléments qui font son originalité sur le plan international.

Premièrement, l’ampleur de son champ de compétence lui permet une approche transversale des risques, tenant compte pour chaque type de risque de l’ensemble des sources d’exposition auxquelles un même individu peut être soumis, que ce soit en tant que consommateur, comme travailleur ou comme citoyen. Cette spécificité rend notre dispositif particulièrement apte à saisir et décrire la réalité des expositions et de leur cumul, et c’est la raison pour laquelle ce dispositif intégré de vigilance sanitaire suscite un intérêt marqué à l’étranger.

Deuxième originalité, la gouvernance de l’agence est marquée par une grande ouverture à la société civile. Cela nous permet d’intégrer à notre travail les préoccupations des acteurs sociaux, limitant ainsi la probabilité de passer à côté de risques qui mériteraient d’être évalués.

Troisièmement, l’agence bénéficie d’un cadre déontologique renouvelé. La nécessité d’une expertise indépendante est depuis le début une préoccupation constante, et des procédures extrêmement strictes ont été établies afin de prévenir les conflits d’intérêts qui pourraient mettre en péril cette indépendance. Ainsi nos experts sont-ils sélectionnés à l’issue d’un appel public à candidature le plus large possible. En outre, tout expert travaillant à l’agence doit fournir une déclaration publique d’intérêt et se conformer à des règles déontologiques extrêmement exigeantes. Enfin, elle dispose d’une instance spécifique, le comité de déontologie et de prévention des conflits d’intérêt.

L’agence peut être saisie par l’État, mais également par des acteurs de la société civile – ONG, associations, partenaires sociaux. Elle assure l’évaluation des risques sanitaires via des procédures d’expertise collectives et contradictoires, dont l’indépendance est très strictement protégée de tout risque d’influence d’intérêts particuliers.

L’agence émet des avis et des recommandations à l’adresse des pouvoirs publics, dans le respect du principe de séparation entre l’évaluation et la gestion des risques : son rôle est non pas de prendre des décisions, mais d’éclairer la décision des pouvoirs publics en les instruisant du dernier état des connaissances scientifiques. Cela signifie les tenir informés, non seulement de ce que l’on sait, mais également des limites de la certitude scientifique, dont la connaissance est également nécessaire à la décision publique.

L’ANSES est la plus grande agence de sécurité sanitaire en Europe par son champ de compétence, qui couvre celui de quatre agences européennes : l’Autorité européenne de sécurité des aliments – l’EFSA –, l’Agence européenne des produits chimiques – l’ECHA –, qui a pour mission d’assurer la mise en œuvre de la directive REACH, l’Agence européenne des médicaments – l’EMA – et l’Agence européenne pour la sécurité et la santé au travail – EU-OSHA. Si les réglementations européennes ont mis fin à la compétence nationale d’évaluation en certaines matières – c’est le cas, par exemple, de l’évaluation du bien-fondé des allégations nutritionnelles et de santé –, d’autres font l’objet de compétences partagées entre les agences européennes et l’échelon national : c’est le cas de l’évaluation des produits phytosanitaires, dont les substances actives sont évaluées au niveau européen, alors que les produits eux-mêmes sont évalués au niveau national, afin de tenir compte des spécificités du territoire.

Nous sommes également très présents au niveau international. Sur certains sujets, tels les perturbateurs endocriniens ou le bisphénol A, l’agence s’est distinguée par une approche à la fois très structurée et très ouverte, qui nous a permis de faire avancer ces dossiers.

L’ANSES assure ses missions dans un contexte budgétaire contraint, puisque nous nous inscrivons pour la troisième année dans une logique de réduction d’emplois. La fusion a permis des optimisations.

Je voudrais, pour finir, évoquer le futur de l’agence. Celle-ci est désormais en ordre de marche : elle l’a prouvé par sa capacité à se mobiliser sur des questions urgentes comme celle de l’Escherichia coli ou de l’insecticide Cruiser OSR. D’une façon générale, elle a fait preuve de sa capacité à s’investir sur des sujets sensibles tels que celui de l’exposition des travailleurs agricoles aux pesticides, qui fait l’objet de travaux dédiés, ou de l’antibiorésistance.

Mon objectif pour les trois ans à venir est que l’agence garde toujours une avance en matière d’anticipation des risques émergents, dans le souci de protéger toujours mieux nos concitoyens. Cela suppose que nous soyons capables, au-delà de l’urgence, de nous projeter dans le moyen terme. Nous avons ainsi engagé un travail de prospective scientifique afin d’identifier les thématiques qui vont monter en puissance dans les années à venir et nous finançons des travaux de recherche scientifique dans cette perspective. Nous ne disposons cependant pas des moyens suffisants pour évaluer les études conduites par les industriels eux-mêmes ou sur des sujets suscitant des inquiétudes tels que la question des effets à long terme des organismes génétiquement modifiés (OGM), qui mériterait pourtant de mobiliser des financements publics. Il n’existe pas d’équivalent européen du NTP américain, le National Toxicology Program.

Il faudra également renforcer notre capacité à prendre en compte tous les signaux d’alerte que nous recevons quotidiennement. C’est l’un des objectifs poursuivis par la loi relative à l’indépendance de l’expertise en matière de santé et d’environnement et à la protection des lanceurs d’alerte, qui vient d’être adoptée. Celle-ci impose aux organismes tels que l’ANSES de tenir un registre des alertes qui leur sont transmises. Dans cette perspective, nous souhaiterions engager avec les organismes concernés, dans le cadre de la Commission nationale de la déontologie et des alertes en matière de santé publique et d’environnement créée par la loi, un travail de définition de ce qu’est une alerte et de ce que doit être le rôle de chacun. Les pouvoirs publics envisagent par ailleurs une réorganisation des dispositifs de vigilance et de suivi des produits ayant bénéficié d’une autorisation de mise sur le marché. Ce sont là des domaines où nous devons encore progresser.

Troisièmement, l’agence doit poursuivre ses travaux de méthodologie sur des phénomènes complexes comme les effets cocktails des substances chimiques ou les effets sanitaires des faibles doses, que l’amélioration des capacités d’investigation scientifique a permis de mettre à jour. Il faut savoir cependant qu’entre l’identification de nouveaux risques et la mise en place de protocoles permettant d’y parer, il s’écoule toujours un laps de temps relativement long.

Pour assurer au mieux ces missions, l’ANSES devra faire face à quatre défis.

Premièrement un contexte budgétaire toujours extrêmement contraint nous impose de faire des choix, ce qui est particulièrement compliqué en matière de sécurité sanitaire. En effet, même en hiérarchisant ses priorités de la façon la plus rationnelle, on n’est jamais à l’abri de voir émerger un risque dont la probabilité de survenue était pourtant faible.

Deuxièmement, l’agence doit continuer de se renforcer à l’international. Nous souhaitons par exemple développer des coopérations avec la toute nouvelle agence chinoise de sécurité sanitaire des aliments. Nous pouvons pour cela nous appuyer sur l’expertise que nous avons acquise, la France étant réputée pour la qualité de son dispositif.

Troisièmement, l’agence devra continuer à attirer les meilleurs experts et les meilleurs chercheurs, dans le respect des règles extrêmement strictes que nous avons mises en place pour prévenir les conflits d’intérêts et assurer l’indépendance de notre expertise. Ce ne sera pas simple à un moment où les partenariats entre la recherche et l’industrie se multiplient.

Enfin nous devrons poursuivre notre travail de restauration de la confiance de nos concitoyens via l’excellence scientifique, l’indépendance de l’expertise, la transparence et l’ouverture. De ce point de vue, l’agence bénéficie des compétences d’acteurs sociaux très mobilisés dans des domaines particuliers. Ces interlocuteurs nous permettent de nourrir notre réflexion, d’ouvrir le champ de nos sources d’information et de contribuer au débat public sur la base du travail scientifique de l’agence.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Le champ de compétence de l’agence couvre des sujets sur lesquels nous sommes très souvent interpellés dans nos circonscriptions, tels que les boissons énergisantes, sur lesquelles vous exercez une surveillance, ou les médicaments vétérinaires, en lien avec les risques d’antibiorésistance. Comment comptez-vous améliorer les conditions d’exercice de votre mission de nutrivigilance, alors que le dernier rapport de l’ANSES souligne la difficulté de recueillir les signalements nécessaires ? Nous sommes également interpellés sur les dangers supposés de l’exposition aux ondes émises par les antennes relais. Cette question fait-elle l’objet de recherches scientifiques, notamment au niveau européen ?

M. Gérard Bapt. Je suis convaincu, monsieur le directeur général, que votre personnalité a beaucoup contribué à la préservation des deux cultures dont l’ANSES est issue.

L’ANSES a été à l’initiative de l’interdiction des biberons contenant du bisphénol A, même si le problème de la définition de la perturbation endocrinienne reste entier. Ne vous semble-t-il pas que les atermoiements de l’EFSA à propos du bisphénol ou de l’aspartam sont dus à l’existence de conflits d’intérêts ?

Pourriez-vous nous dire un mot de l’avis que vous comptez donner sur l’expertise collective que l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) vient de présenter à propos des pesticides et sur la reconnaissance de certaines hémopathies comme maladies professionnelles ?

Votre dispositif de nutrivigilance vous permet-il de nous apporter des éléments nouveaux sur la question des boissons énergisantes ?

Mme Bérengère Poletti. Nous sommes heureux de vous entendre aujourd’hui, monsieur le directeur général, vous dont la personnalité a en effet permis que la fusion entre l’AFSSA et l’AFSSET se déroule dans de bonnes conditions.

L’ANSES est une agence dont le haut niveau scientifique est reconnu au niveau international. Il faut noter que ses 1 392 agents comptent 69 % de femmes. La compétence de l’agence va des sujets les plus prosaïques aux plus importants, qui interpellent nos concitoyens, qu’il s’agisse des pesticides, du danger des radiofréquences ou des perturbateurs endocriniens.

S’agissant des grands débats publics, comme celui sur les OGM ou encore celui sur les nanoparticules, où en est l’ANSES ? La surveillance de la filière de la viande entre-t-elle dans votre champ de compétence ? Où en êtes-vous sur le sujet des boissons énergisantes ou de la levure de riz rouge ?

M. Arnaud Richard. Ne vous semblerait-il pas légitime que le Parlement puisse saisir directement l’ANSES ?

Des études américaines ont montré que le triclosan, présent dans de nombreux produits d’usage courant, était un perturbateur endocrinien : ne craignez-vous pas que l’on doive faire face à un nouveau scandale de santé publique au moment où l’Organisation mondiale de la santé considère les perturbateurs endocriniens comme une menace de dimension mondiale ? Que fait l’ANSES sur ce point ?

À la fin de l’année dernière, vous aviez admis devant nous l’insuffisance de vos études sur le maïs NK 603 Monsanto : où en êtes-vous sur cette question ?

Vous n’avez jamais été à ce jour saisi de la question du gaz de schiste, qui me semble pourtant relever de votre compétence. Qu’en pensez-vous ?

Bénéficie-t-on d’une vraie tutelle quand on relève de cinq ministères différents, dont les objectifs sont souvent opposés ?

Quelle est selon vous la meilleure voie de coordination européenne et internationale pour faire face à l’ensemble de ces risques ?

M. Jean-Louis Roumegas. Je vous remercie pour votre présentation, ainsi que pour votre contribution déjà ancienne au travail des parlementaires. Vous avez ainsi nourri très utilement nos travaux sur les lanceurs d’alerte ou sur le bisphénol. Le travail accompli par l’ANSES a même inspiré la création de la Commission nationale de la déontologie et des alertes en matière de santé publique et d’environnement

Ne pensez-vous pas que l’ANSES devrait renforcer sa communication pour rétablir la confiance de nos concitoyens envers l’industrie et la science ?

Au vu de ce qui s’est passé s’agissant du bisphénol A ou des perturbateurs endocriniens, la coopération avec les agences européennes semble plus problématique que vous le dites. Croyez-vous que la France puisse préserver l’indépendance de son dispositif d’évaluation des risques sanitaires par rapport à une expertise européenne qui me semble plus soumise aux lobbies ?

La science veut des certitudes, que nous, les politiques, ne pouvons pas attendre : lorsqu’il s’agit de protéger les populations, la présomption de l’existence d’un risque suffit pour prendre des décisions. Par ailleurs, les scientifiques travaillent au cas par cas, alors que les politiques ont besoin d’une approche globale. Votre doctrine intègre-t-elle ces différences ?

Enfin quels liens entretenez-vous avec l’INSERM ?

Mme Isabelle Le Callennec. Vous avez dit que certaines thématiques étaient appelées à connaître une montée en puissance : pourriez-vous nous en dire davantage ? Comment comptez-vous mobiliser des financements publics et attirer les meilleurs experts dans le contexte budgétaire actuel ?

Quelle est votre position sur l’électrosensibilité, pathologie dont souffriraient des centaines de milliers de nos concitoyens ? Quels travaux menez-vous sur la santé au travail ? Quel est l’impact sanitaire des champs électromagnétiques ? C’est une question que je pose régulièrement à la ministre en charge de l’environnement et à celle en charge de la santé, sans avoir jusqu’ici de réponse de cette dernière.

Mme Véronique Massonneau. Le projet d’accord de libre-échange entre l’Union européenne et les États-Unis, qui doit aboutir à la disparition des barrières non tarifaires, ne représente-t-il pas une menace pour les normes sanitaires et environnementales européennes dont on sait combien elles diffèrent de la réglementation américaine ? Avez-vous commencé à étudier les conséquences de ce projet sur la protection des citoyens européens ?

M. Jean-Pierre Door. J’avais émis des doutes lors de la création de l’ANSES en raison de la complexité de la fusion de l’AFSSA et de l’AFSSET. Vous semblez l’avoir bien digérée, monsieur Mortureux, et je m’en félicite.

Pouvez-vous nous donner des précisions sur le financement de l’ANSES, sa composition, son organigramme et sa gouvernance ? Les associations d’usagers sont-elles représentées ? Quelles sont les relations de l’agence avec la Commission européenne dans le domaine de l’alimentation ? Enfin, quel a été le rôle de l’ANSES dans l’affaire Spanghero ?

Mme la présidente Catherine Lemorton. La liste des associations d’usagers représentées figure dans le rapport annuel de l’ANSES.

M. Élie Aboud. L’expertise et la transversalité de l’institution que vous dirigez, monsieur Mortureux, font de vous un interlocuteur privilégié des parlementaires, vous l’aurez compris.

La Suède utilise l’indice « PBT », qui évalue la persistance, la bioaccumulation et la toxicité des molécules entrant dans la composition des médicaments. Compte tenu des limites actuelles du financement public, qui interdisent une véritable prévention, peut-on envisager une collaboration avec le secteur privé et les industries pharmaceutiques ? Est-il possible d’importer l’indice « PBT » en France ou de s’inspirer du critère du service médical rendu pour exiger des industriels une évaluation sérieuse de la toxicité des médicaments ? À défaut, il faut sensibiliser l’industrie et le consommateur à cette question.

M. Bernard Perrut. Le rapport d’activité 2012 souligne le champ d’action considérable de l’ANSES ainsi que la richesse de sa production scientifique et sa forte implication dans plusieurs domaines.

Comment comptez-vous accentuer vos efforts en faveur de la diffusion de l’information auprès de l’ensemble des citoyens ? L’opinion publique a besoin de repères sur les grands sujets scientifiques de notre société. Comment l’agence peut-elle améliorer l’accès de l’ensemble de la population aux travaux scientifiques ? L’évolution du site Internet est à cet égard encourageante.

L’agence s’intéresse à la santé des abeilles au sujet de laquelle nous sommes souvent sollicités par les apiculteurs comme par les amoureux de la nature. Pouvez-vous préciser son action dans ce domaine ?

Enfin, comment pouvez-vous accroître l’efficience de vos ressources ? Le rapport d’activité mentionne la baisse des dépenses de fonctionnement en 2012 et la réunion des équipes dans un nouveau siège. Ces éléments sont-ils de nature à rationaliser les dépenses et à gagner en efficacité ?

M. Jean-Pierre Barbier. La veille sanitaire active est importante pour la protection de nos concitoyens.

L’étendue des compétences de l’agence pose inévitablement la question de ses moyens dans le cadre budgétaire contraint que nous connaissons, d’autant que l’ANSES doit s’acquitter de la tâche compliquée de communiquer sur son travail : les scandales qui soulignent les échecs de la prévention sont très médiatisés alors que le travail en amont pour les éviter ne l’est pas.

L’inscription du principe de précaution dans la Constitution est une particularité française susceptible, selon moi, d’entraver notre avancée dès lors que les autres pays européens ne font peut-être pas preuve de la même rigueur dans son application. Je n’entends pas là remettre en cause ce principe mais je sollicite l’avis d’un expert sur les difficultés que peut poser son application.

M. Fernand Siré. Dans la région frontalière dont je suis élu, les agriculteurs n’hésitent pas à aller en Espagne s’approvisionner en pesticides interdits en France. En outre, 20 à 30 % de la population achète des produits alimentaires à moindre coût en Espagne toujours, où la réglementation sanitaire est très différente.

La réglementation oblige à chlorer l’eau, y compris l’eau de source pourtant très potable puisée à 120 mètres de profondeur. Cela décourage la consommation et fait peser des risques sur la santé en raison de la présence de chloramines. Je ne comprends pas pourquoi nous interdirions l’importation de poulets en provenance des États-Unis au motif qu’ils sont nettoyés au chlore alors que l’on nous oblige à boire de l’eau riche en chloramines cancérigènes.

M. le directeur général de l’ANSES. La nutrivigilance est un dispositif récent qui organise la remontée d’informations sur la base du signalement par les professionnels de santé des problèmes de santé de leurs patients liés à la consommation de certains produits.

À cet égard, nous sommes préoccupés par la rapide expansion du marché des compléments alimentaires qui ont été les premiers à entrer, à titre expérimental, dans le dispositif de nutrivigilance. Ces produits sont souvent vantés pour leur origine naturelle alors que celle-ci n’est pas une garantie de leur innocuité – dans certains cas qui nous ont été signalés, ils contiennent des extraits de plantes qui ne sont pas comestibles et dont la traçabilité est insuffisante. En outre, la réglementation impose une simple déclaration auprès de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) des compléments alimentaires qui, pour certains, s’apparentent pourtant à des médicaments.

Le dispositif de nutrivigilance est très intéressant, car les signalements effectués constituent un filet de sécurité qui s’ajoute à la réglementation. Il n’est en revanche pas adapté aux problèmes rencontrés par le grand public qui doit plutôt s’adresser aux centres antipoison et de toxicovigilance. Les informations recueillies alimentent le dispositif de toxicovigilance qui nécessite d’être amélioré.

S’agissant des boissons énergisantes, nous avons publié un communiqué de presse encourageant les signalements afin de documenter une étude dont les résultats devraient être connus à l’automne. Il est très difficile d’établir le lien entre la consommation de ces boissons et les effets sur la santé, car de nombreux autres paramètres complexes doivent être pris en compte, notamment la consommation associée d’alcool. Nous menons parallèlement une étude sur l’évolution des habitudes de consommation qui fait apparaître une croissance de la consommation et des pratiques de consommation extrême. Notre rôle est de faire passer des messages qui s’appuient sur les travaux scientifiques réalisés : le premier d’entre eux est qu’il convient de distinguer boissons énergétiques et énergisantes, ces dernières étant contre-indiquées avec l’effort physique en raison de leurs effets sur le cœur, alors même que les publicités les associent à la pratique du sport.

La radiofréquence et les antennes-relais sont au cœur des préoccupations de l’agence. Un groupe d’experts permanent dédié a ainsi été mis en place, il y a un an et demi, afin d’étudier leur impact. Ce groupe, dont les premiers travaux devraient être restitués en septembre, a vocation à travailler chaque année à l’actualisation des connaissances sur les différents aspects du sujet.

L’électrosensibilité sera le thème central des travaux du groupe d’experts l’année prochaine. Nous devons prendre en charge la souffrance des personnes concernées – nous échangeons régulièrement avec les collectifs mobilisés sur cette question – et progresser dans la compréhension de ce phénomène complexe à appréhender sur le plan scientifique.

Parallèlement, un comité de dialogue réunissant les responsables du groupe d’experts, les associations et les opérateurs de téléphonie a été institué afin d’expliquer la méthodologie de notre expertise sur laquelle les attentes en matière de transparence sont fortes. Ainsi, nous communiquons aux membres du comité la liste des études scientifiques répertoriées par nos soins sur le sujet et les encourageons à nous faire part de sources complémentaires afin que notre démarche soit la plus complète et la plus ouverte possible.

Nous sommes complètement indépendants de l’EFSA européenne puisque nous avons nos propres procédures et groupes d’experts. Nous évitons de travailler sur les mêmes sujets. L’ANSES se met ainsi en retrait sur les questions examinées au niveau européen – c’est le cas pour les colorants par exemple.

Il est vrai que certains sujets font apparaître des divergences entre les deux agences, qui tiennent au périmètre plus large et à la méthodologie différente de l’ANSES. Dans le cas du bisphénol A, nous avons déployé d’importants efforts pour développer la concertation avec le groupe d’experts européen. Celui-ci a d’ailleurs choisi de retarder la publication de ses travaux pour prendre pleinement en compte l’étude que nous lui avons présentée de manière très détaillée. Dans le cas de l’aspartame, nous avons apporté une contribution dans le cadre de la consultation publique lancée par l’EFSA. Je suis convaincu que l’ANSES pèse dans l’évolution de l’approche des questions sanitaires au niveau européen et international. Il est important d’être présent et influent à l’échelle européenne pour que l’originalité de notre approche soit prise en compte dans l’élaboration de la réglementation.

Quant aux perturbateurs endocriniens, l’ANSES avait émis, il y a un an, un avis sur de possibles définitions de ceux-ci. Actuellement, des discussions complexes sont en cours au niveau européen. Nous sommes dans l’attente d’une définition claire du perturbateur endocrinien et de ses modalités de caractérisation, qui nous permettrait de réévaluer certaines substances. Nous poursuivons nos travaux sur ce sujet très prioritaire puisque nous avons été saisis par les ministères de l’environnement et de la santé au sujet de plusieurs substances, mais un cadre européen précis et stable est nécessaire.

S’agissant de nos relations avec d’autres institutions de recherche, nous animons le réseau « R 31 » qui rassemble les principaux organismes de recherche afin de coordonner les travaux de recherche dont nous avons besoin dans les domaines d’expertise de l’ANSES.

Nous avons été saisis pour examiner les conséquences sur la réglementation de l’étude de l’INSERM sur le lien entre l’exposition aux pesticides et certaines maladies. Cette étude montre heureusement que les produits les plus nocifs pour la santé ont été interdits, mais certaines substances en cours d’évaluation sont encore utilisées.

Après un important rapport sur les nanoparticules, il y a plus d’un an, qui avait mis en évidence la difficulté à les identifier, celles-ci sont désormais étudiées dans le cadre d’un groupe d’experts dédié. Depuis la loi Grenelle 2, les industriels ont l’obligation de déclarer l’incorporation de nanoparticules dans leurs produits. Les déclarations, qui seront collectées jusqu’à la fin juin, alimentent une base de données gérée par l’ANSES dont un premier bilan sera dressé à l’automne. Il pourra alors éventuellement être décidé d’évaluer les risques liés à certaines particules. Des travaux sont déjà menés sur les nanotubes de carbone et sur le nanoargent. Parallèlement, un comité de dialogue avec tous les secteurs a été mis en place, qui nous aide notamment à orienter les appels à projets de recherche aux fins de documenter la question.

L’ANSES n’a pas été impliquée directement dans le scandale de la viande de cheval qui posait d’abord des problèmes de contrôle. En revanche, nous sommes concernés par le défaut de maîtrise de l’ensemble de la chaîne alimentaire que cette affaire a mis en évidence et par ses conséquences sanitaires. Face à la complexité des chaînes alimentaires et aux contraintes budgétaires, notre rôle est de mettre au point, en s’appuyant sur les meilleures technologies, les outils d’analyse les plus performants et d’en faire bénéficier les laboratoires sur le terrain afin de doter les pouvoirs publics d’une capacité de détection et de contrôle fiable et efficace. Nous développons ainsi une méthode permettant d’identifier 150 contaminants chimiques potentiels en une seule analyse. Mais nous devons aussi être en mesure de rechercher des agents inconnus ou inattendus en élargissant le spectre d’analyse. Dans le domaine de la microbiologie, nous utilisons les capacités de séquençage à haut débit pour identifier, dans les gènes des microorganismes, les facteurs de virulence qui sont responsables de leur caractère particulièrement pathogène, comme dans le cas de la bactérie Escherichia coli en Allemagne. Il s’agit de pouvoir gagner la course de vitesse, en cas d’intoxication alimentaire par exemple.

Nous publierons très prochainement un avis sur la levure de riz rouge.

En matière de pollution de l’air, nous menons des études sur le pollen. Dans la plupart des cas, nos travaux consistent à évaluer les risques lorsque la source de danger est connue. Mais, afin d’améliorer notre capacité d’anticipation, nous développons aussi des recherches à partir d’une pathologie – le développement des allergies est ainsi l’un des premiers sujets que nous traitons de manière globale.

L’ANSES s’intéresse aussi à la santé au travail. Nous conduisons des études sur les travailleurs exposés au bitume, à la suite d’une saisine par une organisation syndicale, sur les égoutiers et sur le travail en horaires décalés. L’agence anime, en outre, le Réseau national de vigilance et de prévention des pathologies professionnelles (RNV3P) qui permet de recueillir auprès des centres hospitaliers des informations sur certains risques professionnels sur lesquels l’agence peut ensuite décider d’engager des travaux spécifiques.

Le Parlement ne peut pas formellement saisir l’ANSES. Je le regrette. À titre personnel, il me semble légitime, et même souhaitable au regard de notre indépendance, que le Parlement puisse solliciter l’expertise de l’agence. Sans attendre une éventuelle évolution en ce sens, qui vous appartient, l’ANSES répondra à toute demande émanant de la présidence de votre Commission.

S’agissant du triclosan, la Commission européenne a lancé une consultation publique afin de réglementer l’usage de ce conservateur utilisé dans les produits cosmétiques. Je sais que l’Agence nationale de la sécurité du médicament et des produits de santé – ANSM – , qui est compétente en la matière, y participe activement.

L’ANSES plaide pour une meilleure documentation scientifique sur les effets à long terme du maïs NK603 et des OGM en général. La Commission européenne a décidé de financer une étude sur ce sujet et le ministère de l’environnement s’apprête également à lancer un appel d’offres.

L’ANSES n’a jamais été saisie de la question des gaz de schiste.

En réponse aux interrogations sur les cinq ministères de tutelle, je suis, après trois années de pratique, plutôt satisfait du fonctionnement de l’agence, en dépit de mes inquiétudes initiales. La multiplicité des tutelles et les positions souvent divergentes des ministères favorisent son indépendance. Chaque ministère assure la coordination des différentes tutelles pendant six mois. Ce cadre est très respectueux du rôle de chacun, celui d’évaluation pour l’ANSES et celui de gestion des risques pour les ministères.

Il est certain que le public ne connaît pas l’ANSES en tant qu’institution. Nos efforts en matière de communication portent sur la pédagogie et la transparence en direction des médias. Nous informons sur les thèmes et l’agenda des travaux que nous réalisons tout en sensibilisant au temps nécessaire pour les mener à bien. Nous nous appuyons également sur les ONG, les associations de consommateurs et les partenaires sociaux qui sont aussi des relais d’opinion. Mais nous ne disposons pas des moyens nécessaires pour nous adresser directement au grand public. Nos travaux rencontrent néanmoins un écho croissant. Il faut bien admettre que les scandales, que nous cherchons pourtant à prévenir, contribuent grandement à notre notoriété. Certains sujets, comme les risques liés aux régimes alimentaires, ont également été largement diffusés. Dans tous les cas, notre rôle est de porter des messages de santé publique en s’appuyant sur un travail scientifique.

Notre doctrine consiste non seulement à dire ce que l’on sait sur le plan scientifique, mais aussi à mettre en évidence les sources d’incertitude. Il revient au gestionnaire du risque d’appliquer le principe de précaution. L’ANSES participe à une application intelligente du principe de précaution qui doit permettre au gestionnaire, sur la base du travail scientifique, de prendre des mesures proportionnées et éventuellement temporaires. Dans le cas du bisphénol A, les risques étaient avérés sur les animaux et suspectés sur l’homme, mais nous avons considéré que les éléments scientifiques à notre disposition étaient suffisants pour recommander la réduction de l’exposition à cette substance. Il appartient au gestionnaire du risque de prendre en compte tous les éléments que nous lui fournissons – les connaissances et les incertitudes – pour fonder la décision politique. Quant à la réglementation REACH, je suis curieux de savoir comment les incertitudes sur d’éventuels effets sanitaires seront prises en compte par les autorités européennes pour décider de mesures de restriction ou d’autorisation des substances chimiques.

Nous sommes pleinement conscients des contraintes budgétaires. Nous n’entendons pas remettre en cause le financement par les industriels des études sur les produits phytosanitaires et les biocides. En revanche, il serait pertinent de mobiliser des financements publics, à l’échelle européenne, sur quelques sujets qui font l’objet de questionnements réguliers et sur lesquels la diversité des sources et la documentation sont insuffisantes.

Dans la perspective de l’accord de libre-échange entre les États-Unis et l’Union européenne, j’ai rencontré récemment mes homologues américains en me rendant sur place afin de leur exposer les dispositifs national et européen de sécurité sanitaire. Face aux accusations d’inconsistance scientifique des règles européennes, je leur ai fait valoir la solidité des travaux et des processus scientifiques sur lesquels reposent les décisions des pouvoirs publics, y compris sur des sujets de désaccord potentiel comme les OGM.

À titre d’exemple, le traitement au chlore des poulets américains pose un problème dans la mesure où il risque de masquer un manque d’hygiène dans la chaîne alimentaire. Les Européens sont en effet très attachés à la maîtrise de l’hygiène dans l’ensemble de cette chaîne alimentaire.

Malgré les controverses sur les fondements scientifiques des décisions politiques, l’Europe n’a pas à rougir de la qualité de son expertise scientifique face aux États-Unis.

Le budget de l’ANSES s’élève à 130 millions d’euros, dont un peu moins de 100 millions proviennent de subventions. Les taxes perçues au titre des dossiers déposés pour les produits phytosanitaires et vétérinaires ou les médicaments biocides complètent le financement, ainsi que les sommes allouées à certains projets de recherche.

Enfin, nous poursuivons les travaux engagés sur l’impact des lignes à haute tension en faisant des études sur les animaux, après les avoir réalisées sur l’homme.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Monsieur le directeur général, j’ai bien entendu votre message sur la saisine de l’ANSES par le Parlement. Cette question pourrait faire l’objet d’un amendement dans le projet de loi sur la santé publique prévu pour 2014.

La séance est levée à dix-neuf heures quinze.

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Présences en réunion

Réunion du mardi 25 Juin 2013 à 17 heures 30

Présents. – M. Élie Aboud, M. Gérard Bapt, M. Jean-Pierre Barbier, Mme Marie-Françoise Clergeau, M. Jean-Pierre Door, M. Dominique Dord, M. Jean-Patrick Gille, Mme Sandrine Hurel, M. Michel Issindou, M. Denis Jacquat, Mme Isabelle Le Callennec, Mme Catherine Lemorton, M. Gilles Lurton, M. Laurent Marcangeli, Mme Véronique Massonneau, M. Christian Paul, M. Bernard Perrut, Mme Bérengère Poletti, M. Arnaud Richard, M. Jean-Louis Roumegas, M. Gérard Sebaoun, M. Fernand Siré

Excusés. – M. Christian Hutin, Mme Luce Pane, M. Christophe Sirugue, M. Jonas Tahuaitu