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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
QUATORZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 21 février 2017.
RAPPORT D’INFORMATION
DÉPOSÉ
PAR LA COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES (1)
sur la conformité au principe de subsidiarité de la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil sur l’application de la directive 2006/123/CE relative aux services dans le marché intérieur, établissant une procédure de notification des régimes d’autorisation et des exigences en matière de services (COM(2016) 821 final)
ET PRÉSENTÉ
PAR Mme Marietta KARAMANLI,
Députée
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(1) La composition de la commission figure au verso de la présente page.
(La Commission des affaires européennes est composée de : Mme Danielle AUROI, présidente ; M. Christophe CARESCHE, Mme Marietta KARAMANLI, MM. Jérôme LAMBERT, Pierre LEQUILLER, vice-présidents ; M. Philip CORDERY, Mme Sandrine DOUCET, MM. Arnaud LEROY, André SCHNEIDER, secrétaires ; MM. Ibrahim ABOUBACAR, Kader ARIF, Philippe BIES, Jean-Luc BLEUNVEN, Alain BOCQUET, Jean-Jacques BRIDEY, Mmes Isabelle BRUNEAU, Nathalie CHABANNE, MM. Jacques CRESTA, Mme Seybah DAGOMA, MM. Yves DANIEL, Bernard DEFLESSELLES, William DUMAS, Mme Marie-Louise FORT, MM. Yves FROMION, Hervé GAYMARD, Jean-Patrick GILLE, Mme Chantal GUITTET, MM. Razzy HAMMADI, Michel HERBILLON, Laurent KALINOWSKI, Marc LAFFINEUR, Charles de LA VERPILLIÈRE, Christophe LÉONARD, Jean LEONETTI, Mme Audrey LINKENHELD, MM. Lionnel LUCA, Philippe Armand MARTIN, Jean-Claude MIGNON, Jacques MYARD, Rémi PAUVROS, Michel PIRON, Joaquim PUEYO, Didier QUENTIN, Arnaud RICHARD, Mme Sophie ROHFRITSCH, MM. Jean-Louis ROUMEGAS, Rudy SALLES, Gilles SAVARY.)
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Pages
INTRODUCTION 5
I. LE MARCHÉ UNIQUE DES SERVICES, OBJECTIF FONDAMENTAL DE CE TEXTE, POUR LA COMMISSION EUROPÉENNE, SERAIT TROP PEU HARMONISÉ 7
II. LA PROPOSITION DE LA COMMISSION FAIT PESER DES RISQUES IMPORTANTS SUR LE BON DÉROULEMENT DE LA PROCÉDURE LÉGISLATIVE 9
A. UN SYSTÈME DE NOTIFICATION ÉTENDU 9
B. UNE APPLICATION AU PROCESSUS LÉGISLATIF QUI POURRAIT S’AVÉRER PROBLÉMATIQUE 11
TRAVAUX DE LA COMMISSION 13
PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE 17
MOTION FOR A EUROPEAN RESOLUTION 19
Mesdames, Messieurs,
La liberté de prestation de services est enchâssée dans l’ensemble des quatre libertés dont il convient, au moment où le Royaume-Uni quitte l’Union européenne, de rappeler le caractère fondateur. Inscrite au cœur des traités, cette liberté vise à la création d’un marché unique approfondi dans ce domaine, au sein duquel les restrictions nationales ne se justifient que par un intérêt général réel.
C’est au nom de cette liberté que la Commission européenne a établi la proposition que nous examinons dans le présent rapport. Le mécanisme de notification tel qu’il apparaît ici vise en effet à moderniser un système, issu de la directive « services » de 2006 (1), jugé insuffisamment efficace. En cela, il empêcherait la pleine réalisation d’un marché intérieur dont le potentiel en termes de croissance est estimé encore très important.
Ce rapport vise à estimer dans quelle mesure le poids qui pèserait alors sur les États membres, notamment dans le cadre de leur procédure législative, ne serait pas excessif. La procédure de notification emporte en effet des conséquences, dans les modalités d’application des lois, qui pourraient contraindre la capacité réglementaire des États membres. À ce titre, il existe un risque réel pour le bon exercice des réglementations nationales, et, partant, pour le respect du principe de subsidiarité.
I. LE MARCHÉ UNIQUE DES SERVICES, OBJECTIF FONDAMENTAL DE CE TEXTE, POUR LA COMMISSION EUROPÉENNE, SERAIT TROP PEU HARMONISÉ
Inscrite au sein des quatre libertés garanties par les traités, la libre prestation de service s’appuie sur un cadre juridique fourni. La compétence de l’Union en la matière découle d’abord du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE), et plus précisément des articles 26 (marché intérieur), 49 à 55 (établissement) et 56 à 62 (services). Au titre de ces différents articles, les indépendants, les professions libérales ou les personnes morales, au sens de l'article 54, peuvent exercer une activité économique dans un cadre stable et continu dans un autre État membre (liberté d’établissement prévue à l’article 49 du TFUE) ou proposer et fournir temporairement leurs services dans d'autres États membres tout en demeurant dans leur pays d'origine (liberté de prestation de services, prévue à l'article 56 du même traité).
Ces libertés tolèrent des exceptions, elles-mêmes inscrites dans la lettre du traité. Ainsi, en vertu de l’article 51, la liberté d'établissement et de prestation de services ne s'applique pas aux activités participant à l'exercice de l'autorité publique, à condition que la profession concernée soit entièrement consacrée à l'exercice de l'autorité publique ou que la partie qui y est consacrée n'est pas séparable du reste. D’autres exceptions relèvent de la production et du commerce de matériel de guerre (article 346, paragraphe 1, point b du TFUE) ou du maintien d’un régime propre aux non-nationaux pour des raisons d'ordre public, de sécurité publique ou de santé publique (article 52, paragraphe 1).
Les traités ont été complétés par la directive « services » précitée, dont de nombreux débats polémiques ont terni l’image alors même qu’elle visait l’approfondissement du marché des services. Elle s’est en effet inscrite dans la démarche d’achèvement du marché intérieur, en créant un marché unique des services au sein de l'Union, tout en veillant à garantir la qualité des services fournis aux consommateurs dans l'Union. Selon la communication de la Commission, dite « Europe 2020 » (2), la mise en œuvre complète de cette directive permettrait d’accroître les échanges de services commerciaux de 45 % et les investissements directs étrangers de 25 %, ce qui serait susceptible d'engendrer une hausse du PIB européen comprise entre 0,5 % et 1,5 %. C’est donc dans cette logique que la Commission a souhaité proposer un véhicule législatif autonome destiné à moderniser les instruments de la directive « services ».
La Commission européenne fait le constat, dans les motivations de la proposition examinée, d’un manque dans la pleine application des dispositions issues de la directive « services ». En effet, afin de vérifier que certaines réglementations nationales, restreignant la liberté d’établissement et la libre prestation de services, ne sont pas discriminatoires au regard de la nationalité ou de la résidence, mais sont proportionnées et justifiées par des raisons impérieuses d’intérêt général, les instances de l’Union ont instauré un dispositif de notification lors de l’édiction d’une nouvelle réglementation afférente à ces domaines, et plus particulièrement, des régimes d’autorisation ou certaines exigences, qu’ils soient nouveaux ou modifiés.
Des efforts ont été consentis par les États membres en vue d’améliorer l’efficacité de la procédure de notification. Les échanges de bonnes pratiques entre administrations nationales, la publication de données sur l’utilisation de la procédure de notification existante ou encore les orientations fournies dans le Manuel relatif à la mise en œuvre de la directive sur les services sont autant d’instruments juridiques « doux » et récents, destinés à fluidifier l’application de la directive.
Pourtant, de nombreuses déficiences demeurent. Ainsi, en 2015, 40 % des dialogues structurés lancés par la Commission européenne avec les États membres pour garantir le respect de la directive sur les services concernaient des mesures nationales nouvellement introduites, signe, pour cette dernière, de l’inadéquation de la procédure de notification existante. L’étude d’impact a révélé plusieurs faiblesses, résumées ainsi :
- les possibilités pour les États membres, la Commission et les parties prenantes d’intervenir de manière anticipée avant que la réglementation nationale soit adoptée sont limitées ;
- les moyens de traiter les exigences notifiées relevant de cette procédure sont incohérents ;
- il manque des évaluations adéquates de la proportionnalité et les effets juridiques du non-respect de l’obligation de notification ne sont pas clairs.
Enfin, la Commission européenne estime que tous les États membres ne se conforment pas à l’obligation de notification, aux dépends des prestataires mais aussi des destinataires des services. Ce constat est d’ailleurs partagé par la Cour des comptes européennes, qui relève plus particulièrement les manques de clarté dans la procédure et dans les notifications existantes (3).
Or, là-encore selon la Commission européenne, le plein potentiel économique de la directive sur les services, soit une augmentation de la croissance du PIB de l’UE de 2,6 %, n’a pas été atteint. D’après les estimations menées, les réformes mises en œuvre par les États membres entre 2006 et 2014 n’ont permis de réaliser qu’un tiers de ce potentiel (0,9 % de croissance du PIB de l’UE).
La proposition d’une modernisation de la procédure de notification s’inscrit donc dans la perspective de pallier ces dysfonctionnements, au prix d’ajustements qui paraissent gros de risques pour la formation de normes à l’échelle des États membres.
II. LA PROPOSITION DE LA COMMISSION FAIT PESER DES RISQUES IMPORTANTS SUR LE BON DÉROULEMENT DE LA PROCÉDURE LÉGISLATIVE
Le système proposé par la Commission européenne s’appuie sur les recommandations de plusieurs instances européennes. En effet, la réalisation d’un marché intérieur plus approfondi et plus équitable est l’une des dix priorités politiques de la Commission européenne sur la période 2014-2019. Elle est soutenue en cela par le Conseil européen, qui, dans ses conclusions du 18 décembre 2015, a souhaité faire preuve d’ambition dans la réalisation de la stratégie pour le marché unique, dans le prolongement de la communication de la Commission intitulée « Améliorer le marché unique : de nouvelles opportunités pour les citoyens et les entreprises ». Ce dernier a également fixé un calendrier (4), pour que les différentes stratégies déployées pour l’achèvement du marché unique soient mises en œuvre d’ici 2018, en vue de « récolter les fruits des ambitions fixées pour le marché unique européen ».
Les objectifs de la présente proposition sont donc d’accroître l’efficacité de la procédure de notification, d’améliorer la qualité et le contenu des notifications soumises, mais aussi « de couvrir les exigences supplémentaires dont l’application de la directive sur les services a démontré qu’elles pouvaient constituer d’importants obstacles au marché intérieur des services. » Est visée avant tout l’introduction de régimes d’autorisation ou d’exigences discriminatoires, injustifiés et disproportionnés, applicables aux services relevant de la directive, susceptibles de générer une économie moins ouverte et moins intégrée, entraînant une hausse des prix et un choix plus limité pour les consommateurs ou de freiner l’entrepreneuriat et les investissements, via une diminution de la création d’entreprises.
Il est à noter que cette proposition s’inspire par ailleurs de la procédure de notification applicable aux biens et aux services de la société d’information établie par la directive sur la transparence dans le marché unique (5) et serait mise en œuvre par le système d’information du marché intérieur établi par le règlement IMI (6).
Le dispositif de la proposition se fonde, en son article 3, sur l’obligation de notification établie par la directive sur les services. Cette obligation spécifique et inconditionnelle s’applique également lorsqu’un État membre apporte à un projet de mesure notifié des modifications ayant pour effet d’élargir considérablement la portée ou le contenu de celle-ci, de raccourcir le calendrier initialement prévu pour la mise en œuvre, d’ajouter des exigences ou régimes d’autorisation ou de rendre ces exigences ou régimes d’autorisation plus restrictifs pour l’établissement, ou pour la prestation de services transfrontaliers. L’État membre doit en effet notifier à nouveau, tel que modifié, le projet de mesure.
Mais cette obligation de notification s’étend également, selon l’article premier, à tous les projets de dispositions législatives, réglementaires ou administratives introduisant de nouveaux régimes d’autorisation, ce qui a pour effet d’augmenter considérablement le champ d’application de la directive. L’article 4 l’étend également aux exigences d’établissement, à certaines exigences ayant une incidence sur la libre prestation de services et aux exigences relatives à l’assurance responsabilité professionnelle, ainsi qu’aux activités pluridisciplinaires.
Pour ce qui est du calendrier d’application, enfin, l’article 5 établit un délai de consultation de trois mois à compter de la notification d’un projet de mesure. La Commission et les autres États membres disposent de deux mois au maximum pour présenter leurs observations sur une mesure notifiée, suivis d’un mois au plus pour que l’État membre notifiant réponde à ces observations. Par ailleurs, en vertu de l’article 6, la Commission européenne peut lancer une alerte à l’État membre notifiant lorsque, au terme de l’évaluation de la mesure notifiée, elle émet des réserves quant au respect de la directive sur les services. L’émission d’une alerte implique que l’État membre concerné ne peut, pendant trois mois, adopter la mesure notifiée en cause. C’est après cette alerte que, selon les termes de l’article 7, la Commission peut adopter une décision juridiquement contraignante déclarant la mesure notifiée incompatible avec la directive sur les services et demandant à l’État membre notifiant de s’abstenir de l’adopter.
Ce sont sur ces derniers éléments que portent les principales craintes quant au respect du processus législatif propre aux États membres.
La procédure de notification introduite par cette proposition diffère de la procédure actuelle en ce qu’elle empêche les États d’adopter une mesure notifiée dès lors que ladite mesure est estimée contraire à la directive « services » notamment. Or, ainsi que la Commission européenne l’expose dans le huitième considérant de la proposition, « en vue de garantir l’efficacité de la procédure, toute méconnaissance de l’obligation de notifier ou de s’abstenir d’adopter une mesure notifiée, y compris durant la période suivant la réception d’une alerte, devrait être considérée comme constituant un vice de procédure substantiel grave quant à ses effets vis-à-vis des particuliers ». La proposition contient donc un risque réel pour l’opposabilité des lois et des règlements, dans un champ des services largement étendu.
Or, le calendrier proposé est particulièrement contraignant. En effet, la Commission européenne estime que, afin de rendre la consultation opérationnelle et de véritablement permettre aux États membres, à la Commission et aux parties prenantes de formuler leurs observations, les États membres devraient notifier les projets de mesure au moins trois mois avant leur adoption. En outre, ainsi qu’il a été vu, l’émission d’une alerte interdit l’adoption d’une mesure notifiée pendant encore trois mois ou entraîne l’abrogation de celle-ci lorsqu’elle enfreint la directive « services ».
Ce total potentiel de six mois semble difficilement compatible avec le calendrier législatif, et ce d’autant plus que les modifications, qui pourraient se manifester sous la forme d’amendements parlementaires, entraînent une nouvelle notification, et les délais y afférant.
Une telle contrainte sur les capacités des États membres à légiférer, y compris dans des domaines de services tels que la santé ou le tourisme pour lesquels, en vertu des articles, respectivement, 168 et 195 du TFUE, la Commission n’a qu’une compétence d’appui et de coordination, est de nature à enfreindre le principe de subsidiarité. Les risques relatifs aux effets juridiques des dispositions législatives nécessitent donc d’être d’autant plus attentif au respect de l’article 5 du Traité sur l’Union européenne (7).
La Commission s’est réunie le 21 février 2017, sous la présidence de Mme Danielle Auroi, Présidente, pour examiner le présent rapport d’information.
L’exposé du rapporteur a été suivi d’un débat.
« Mme Marietta Karamanli, rapporteure. Merci Madame la Présidente. Je voulais vous remercier d’avoir saisi cette opportunité pour donner une présentation sage, juste mais aussi inquiétante.
Ces deux directives ne sont pas anodines. Lorsqu’on regarde ces deux textes qui relèvent du « paquet services » qui a été présenté par la Commission européenne en janvier, on voit bien qu’ils s’inscrivent dans la volonté de libérer la croissance dans le secteur des services, via un approfondissement, justement, du marché intérieur. Cette ligne est traduite dans la stratégie pour le marché unique qui a été annoncée. Les deux propositions de directive sont les derniers éléments en date puisqu’elles datent de Janvier.
Sur le premier texte, vous l’avez dit, Madame la Présidente, il s’agit d’une modernisation du système de notification en matière de services. Cependant, vous l’avez aussi signalé, il demeure des inquiétudes sur le fond. Ce sont des points qui motivent un avis d’infraction au principe de subsidiarité. D’un côté, l’extension démesurée du champ de la directive est un motif d’inquiétude, puisqu’elle pourrait limiter d’autant le champ d’intervention des Etats membres. Mais il y a aussi des contraintes qui pèsent sur la procédure parlementaire, qui pourraient s’avérer délétères. Pour ce qui est du droit d’amendement, par exemple, le délai proposé de trois mois implique que les parlementaires qui voudront exercer cette prérogative entraîneront une nouvelle notification. L’impossibilité, aussi, pour un État membre, d’appliquer une réglementation, lorsque la Commission Européenne l’alerte, pendant trois mois, peut aussi entrer en contradiction avec le calendrier parlementaire.
Au niveau de l’Allemagne, il y a aussi des inquiétudes et le Bundestag a été saisi ; d’autres États seront saisis. On peut donc craindre des risques quant à la bonne application de la loi. Juridiquement parlant, ce n’est peut-être pas suffisant mais politiquement, sur le fond, c’est très inquiétant. D’une part, nous souhaitons émettre un avis négatif et je partage votre proposition de faire en sorte qu’une mission d’information soit mise en place dès la nouvelle mandature.
Sur le second texte, c’est un peu différent. Il y a des éléments sur le plan juridique qui peuvent poser encore plus de questions. Dans le domaine des professions réglementées, pourrait être menacé aussi le bon exercice des règles, pourtant parfois mieux mis en œuvre à l’échelle nationale, en conformité avec l’article 5 du TUE. En matière de santé comme en matière de tourisme ou d’enseignement, les États conservent une pleine compétence, là où l’Union n’intervient qu’à titre d’appui. Un contrôle de proportionnalité ex ante pourrait donc contraindre l’exécution d’objectifs nationaux tels que la protection la plus haute possible de la santé humaine. Il y a là des questions inquiétantes.
De plus, est mentionné dans la directive que « les objectifs de la présente directive, à savoir la suppression des restrictions disproportionnées à l’accès aux professions réglementées ou à leur exercice, ne peuvent pas être atteints d’une manière suffisante par les États membres mais peuvent, en raison des dimensions de l’action, être mieux réalisés au niveau de l’Union ». Rien ne le prouve. La Commission européenne fait appel à des études indépendantes mais lesquelles ? Le lobbying demeure très présent au niveau européen, on l’a évoqué dernièrement dans la commission. Il y a plusieurs aspects dans cette directive qui motivent notre démarche et qui nous font dire aujourd’hui qu’il serait mieux de porter un avis négatif motivé sur ces deux textes.
Nous avons travaillé ensemble sur les deux propositions qui sont présentées ici. La première sur la directive relative à la notification et l’autre sur le contrôle de proportionnalité avant l’adoption d’une nouvelle réglementation de professions. On a rappelé, dans le premier avis le fait que la procédure de notification proposée entrave l’exercice du pouvoir législatif de telle sorte qu’une règle nationale qui pourrait mieux atteindre les objectifs de réglementation des activités de service pourrait être privée d’opposabilité. On a aussi rappelé que la mise en place d’une action préventive interdisant la mise en œuvre d’une mesure notifiée contraignait excessivement les capacités d’intervention des États membres. La position de la Commission Européenne ne justifie également pas suffisamment en quoi la modernisation de la procédure de notification permettrait de mieux satisfaire l’objectif d’approfondissement du marché intérieur des services à l’échelle de l’Union. C’est pour cette raison-là qu’on estime que la proposition de directive précitée n’est pas conforme au principe de subsidiarité. Telle est la proposition de l’avis pour le premier texte.
En ce qui concerne le second texte, on a relevé que la Commission européenne estimait que la réglementation par voie d’activité réservée ne devait être utilisée que si les mesures visent à prévenir le risque d’une atteinte grave aux objectifs d’intérêt général. On a rappelé que la Commission Européenne estime que la suppression des restrictions proportionnées à l’accès aux professions réglementées, ou à leur exercice, ne peut être une mise en œuvre d’une manière suffisante par les États membres. Considérant que la proposition de directive étend le champ du contrôle de proportionnalité aux professions réglementées qui relèvent du champ d’application de la directive de 2005 ; et considérant aussi que le contrôle de proportionnalité proposé pourrait atteindre la capacité des États membres de mettre en œuvre des réglementations en matière de santé, de tourisme, d’enseignement et, enfin, que l’action de l’Union dans les domaines de la protection de l’amélioration de la santé humaine et le tourisme ne doit que compléter celle des États membres, il apparaît que la proposition de directive précitée n’est pas conforme au principe de subsidiarité. Cela nous permet, à la fois sur le plan juridique pour le deuxième texte et sur le plan politique sur les deux textes, de donner un signal. On est en fin de mandature. Je pense que c’était important et sage de notre part de rappeler ces sujets fortement politiques. Ce n’est pas le moment de se diviser entre États membres.
La présidente Danielle Auroi. Nous avons donc les mêmes inquiétudes sur le fond. J’étais sur la démarche, c’est là notre différence. C’est un choix politique que vous faites, avec cette démarche qui porte sur le fond et non sur la forme est tout à fait respectable. Je m’abstiendrais sur ces deux textes. Il était tout de même important d’avoir cet échange. Je propose de mettre aux voix le texte. »
PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE
L'Assemblée nationale,
Vu l'article 88-6 de la Constitution,
Vu l’article 151-9 du règlement de l’Assemblée nationale,
Vu les articles 5 et 7 du Traité sur l’Union européenne,
Vu l’article 3 du protocole no 1 sur le rôle des parlements nationaux annexé au traité sur l’Union européenne et au traité sur le fonctionnement de l'Union européenne,
Vu le protocole no 2 sur l’application des principes de subsidiarité et de proportionnalité annexé au traité sur l'Union européenne et au traité sur le fonctionnement de l'Union européenne,
Vu la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil sur l'application de la directive 2006/123/CE relative aux services dans le marché intérieur, établissant une procédure de notification des régimes d'autorisation et des exigences en matière de services, et modifiant la directive 2006/123/CE et le règlement (UE) nº 1024/2012 concernant la coopération administrative par l'intermédiaire du système d'information du marché intérieur COM(2016) 821 final,
Considérant que la procédure de notification proposée entrave l’exercice du pouvoir législatif de telle sorte qu’une règle nationale qui pourrait permettre de mieux atteindre des objectifs de réglementation des activités de service pourrait être privée d’opposabilité,
Considérant, en particulier, que la mise en place d’une action préventive interdisant la mise en œuvre d’une mesure notifiée contraint excessivement les capacités d’intervention des États membres,
Considérant que la proposition de la Commission européenne ne justifie pas suffisamment en quoi la modernisation de la procédure de notification permettrait de mieux satisfaire l’objectif d’approfondissement du marché intérieur des services à l’échelle de l’Union,
Estime ainsi que la proposition de directive précitée n’est pas conforme au principe de subsidiarité.
MOTION FOR A EUROPEAN RESOLUTION
The French National Assembly,
Having regard to article 88-6 of the Constitution,
Having regard to article 151-9 of the Rules of Procedure of the National Assembly,
Having regard to articles 5 and 7 of the Treaty on the European Union,
Having regard to article 3 of protocol no 1 on the role of national parliaments annexed to the Treaty on the European Union and to the Treaty on the Functioning of the European Union,
Having regard to protocol no 2 on the application of the principles of subsidiarity and proportionality annexed to the Treaty on the European Union and to the Treaty on the Functioning of the European Union,
Having regard to the draft proposition of the European Parliament and of the Council on the application of directive 2006/123/EC concerning services in the internal market setting up a notification procedure for authorization schemes and requirements in the field of services, thus modifying directive 2006/123/EC and the regulation (EU) nº 1024/2012 regarding administrative cooperation by means of the internal market information system COM (2016) 821 final,
Considering that the proposed notification procedure hinders the exercise of legislative power in so far as a national regulation which could lead to a better implementation of the aims of regulatory operations in the fields of services could be rendered ineffective,
Considering, specifically, that the implementation of a preventative action prohibiting the application of a notified measure would inordinately hinder the capacities of member states to intervene,
Considering that the proposition of the European Commission does not adequately justify why the modernization of the notification procedure would better respond to the aim of deepening the internal services market at the level of the European Union,
Feels that the aforementioned draft directive is not in compliance with the principle of subsidiarity.
1 () Directive 2006/123/CE du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur.
2 () Communication de la Commission « Europe 2020. Une stratégie pour une croissance intelligente, durable et inclusive », 3 mars 2010.
3 () Rapport spécial nº 5/2016 : « La Commission a-t-elle assuré une mise en œuvre efficace de la directive sur les services ? », 14 mars 2016.
4 () Conclusions du Conseil européen du 28 juin 2016.
5 () Directive (UE) 2015/1535 du Parlement européen et du Conseil du 9 septembre 2015 prévoyant une procédure d’information dans le domaine des réglementations techniques et des règles relatives aux services de la société de l’information.
6 () Règlement (UE) nº 1024/2012 du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2012 concernant la coopération administrative par l’intermédiaire du système d’information du marché intérieur et abrogeant la décision 2008/49/CE de la Commission («règlement IMI»)
7 () « En vertu du principe de subsidiarité, dans les domaines qui ne relèvent pas de sa compétence exclusive, l'Union intervient seulement si, et dans la mesure où, les objectifs de l'action envisagée ne peuvent pas être atteints de manière suffisante par les États membres, tant au niveau central qu'au niveau régional et local, mais peuvent l'être mieux, en raison des dimensions ou des effets de l'action envisagée, au niveau de l'Union. »*