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PROJET DE LOI

garantissant l’avenir et la justice du système de retraites

NOR : AFSX1322587L/Bleue

17 septembre 2013

Sommaire

I. Diagnostic de la situation actuelle 8

I.1. Le système de retraite français, malgré les réformes successives, n’est pas encore revenu à une situation financière équilibrée 8

I.1.1. Les caractéristiques du système de retraite français 8

I.1.2. Les réformes successives demeurent insuffisantes et n’ont pas permis d’atteindre l’ensemble des objectifs assignés au système de retraite 9

I.2. Le système de retraite ne répond pas suffisamment aux attentes des Français et doit être consolidé 11

I.2.1. L’équilibre financier n’est toujours pas assuré et le besoin de financement est de l’ordre d’un point à l’horizon 2020 et jusqu’en 2040 11

I.2.2. Malgré leur augmentation, les taux d’emploi des seniors restent à un niveau insuffisant et demeurent une faiblesse structurelle du système 12

I.2.3. En dépit d’un haut niveau de solidarité, le système actuel fait l’objet d’une demande accrue d’équité et de lisibilité 13

II. Les objectifs de la réforme 15

II.1. Garantir dans la durée notre système de retraite par des mesures justement réparties 15

II.1.1. Consolider la situation financière de notre système de retraite à l’horizon 2020 15

II.1.2. Garantir sa pérennité financière dans la durée 17

II.2. Rendre le système plus juste 19

II.2.1. Mieux prendre en compte la pénibilité au travail 19

II.2.2. II.2.2. Favoriser l’emploi des seniors 20

II.2.3. Améliorer les droits à retraite des femmes, des jeunes actifs et des assurés à carrière heurtée 20

II.2.4. Améliorer les petites pensions des non salariés agricoles 21

II.2.5. Ouvrir des solidarités nouvelles en faveur des assurés handicapés et de leurs aidants 22

II.3. Simplifier le système et renforcer sa gouvernance 22

II.3.1. Simplifier l’accès des assurés à leurs droits 22

II.3.2. Améliorer la gouvernance et le pilotage des caisses de retraite 24

III. Présentation de l’impact financier global de la réforme 25

III.1. Des besoins de financement importants 25

III.2. Mesures de court terme assurant l’équilibre en 2020 25

III.3. Mesures de long terme assurant l’équilibre à horizon 2040 26

III.4. Mesures de justice 26

III.5. Trajectoire financière globale 27

IV. Options et dispositifs retenus 30

IV.1. Article 1 : Principes et objectifs de l’assurance vieillesse 30

IV.2. Article 2 – Détermination de la durée d’assurance tous régimes 31

IV.2.1. Diagnostic et objectif poursuivi 31

IV.2.2. Options possibles 33

IV.2.3. Impacts de la mesure 34

IV.3. Article 3 – Règles et dispositifs de pilotage 35

IV.3.1. Diagnostic et objectif poursuivi 35

IV.3.2. Impacts de la mesure 37

IV.4. Article 4 – Report de la date de revalorisation des pensions 37

IV.4.1. Diagnostic et objectif poursuivi 37

IV.4.2. Options possibles 40

IV.4.3. Impacts de la mesure 40

IV.5. Article 5 – La fiche de prévention des expositions 43

IV.6. Article 6 – Le compte personnel de prévention de la pénibilité 44

IV.6.1. Diagnostic et objectif poursuivi 44

IV.6.2. Champ du dispositif 45

IV.6.3. Options possibles 49

IV.6.4. Impacts de la mesure 50

IV.7. Article 7 – Alimentation du compte formation 53

IV.8. Article 8 – Accords en faveur de la prévention de la pénibilité 53

IV.9. Article 9 – Droits à majoration de durée d’assurance vieillesse au titre de la pénibilité 54

IV.9.1. Diagnostic et objectifs poursuivis 54

IV.9.2. Impacts de la mesure 55

IV.10. Article 10 – Dispositions diverses 55

IV.11. Article 11 – Extension de la retraite progressive 56

IV.11.1. Diagnostic et objectif poursuivi 56

IV.11.2. Impacts de la mesure 59

IV.12. Article 12 – Cumul emploi retraite tous régimes 60

IV.12.1. Diagnostic et objectif poursuivi 60

IV.12.2. Un droit à cumul entre ASPA (minimum vieillesse) et emploi sera ouvert par décret 63

IV.12.3. Impacts de la mesure 64

IV.13. Article 13 – Préparer une refonte des majorations de pension pour enfants 65

IV.14. Article 14 - Faciliter l’acquisition de trimestres pour les assurés à faible rémunération 66

IV.14.1. Diagnostic et objectif poursuivi 66

IV.14.2. Autre option possible 68

IV.14.3. Impacts de la mesure 69

IV.15. Article 15 – Elargissement de la retraite anticipée pour carrières longues 69

IV.15.1. Diagnostic et objectif poursuivi 69

IV.15.2. Impacts de la mesure 71

IV.16. Article 16 – Aider les assurés à racheter leurs années d’étude 72

IV.16.1. Diagnostic et objectif poursuivi 72

IV.16.2. Impacts de la mesure 73

IV.17. Article 17 – Mieux prendre en compte les périodes d’apprentissage au titre de l’assurance retraite 73

IV.17.1. Diagnostic et objectif poursuivi 73

IV.17.2. Mesures proposées 74

IV.17.3. Options possibles 76

IV.17.4. Impacts de la mesure 76

IV.18. Article 18 – Améliorer la prise en compte des périodes de formation des chômeurs 77

IV.18.1. Diagnostic et objectif poursuivi 77

IV.18.2. Une extension des périodes assimilées au titre du chômage non indemnisé par décret en complément de la présente mesure 78

IV.18.3. Impacts de la mesure 80

IV.19. Article 19 : Améliorer les droits à pension des conjoints collaborateurs 81

IV.19.1. Diagnostic et objectif poursuivi 81

IV.19.2. Impacts de la mesure 81

IV.20. Article 20 : Suppression de la condition de 17 ans ½ pour bénéficier de la pension majorée de référence (PMR) 83

IV.20.1. Diagnostic et objectif poursuivi 83

IV.20.2. Impacts de la mesure 83

IV.21. Article 21 : Mesures relatives au régime complémentaire obligatoire des non salariés agricoles 84

IV.21.1. Diagnostic et objectif poursuivi 84

IV.21.2. Options possibles 85

IV.21.3. Impacts de la mesure 86

IV.22. Article 22 : Exploitants agricoles : mise en œuvre de la garantie « 75% du SMIC » 87

IV.22.1. Diagnostic et objectif poursuivi 87

IV.22.2. II. Impacts de la mesure 87

IV.23. Article 23 – Elargir l’accès à la retraite anticipée pour les travailleurs handicapés 88

IV.23.1. Diagnostic et objectif poursuivi 88

IV.23.2. Impacts de la mesure 89

IV.24. Article 24 – Extension de l’obtention de la retraite à taux plein dès l’âge légal pour tous les assurés justifiant de 50% de taux d’incapacité permanente 90

IV.24.1. Diagnostic et objectif poursuivi 90

IV.24.2. Impacts de la mesure 91

IV.25. Article 25 : Mieux reconnaître les droits à l’assurance vieillesse des aidants familiaux de personnes handicapées ou de personnes âgées dépendantes 91

IV.25.1. Diagnostic et objectif poursuivi 91

IV.25.2. Impacts de la mesure 93

IV.26. Article 26 : Amélioration de l’information des assurés : création d’un compte individuel retraite 94

IV.27. Article 27 – Pilotage de la simplification et des projets inter-régimes 96

IV.27.1. Diagnostic et objectif poursuivi 96

IV.27.2. Impacts de la mesure 97

IV.28. Article 28 – Une meilleure coordination entre régimes pour le calcul de la retraite des polypensionnés 98

IV.29. Article 29 – Mutualiser le service des petites pensions 100

IV.30. Article 30 : Débat annuel sur les retraites dans la fonction publique 103

IV.31. Article 31 – pilotage du régime complémentaire obligatoire du régime des non salariés agricoles 103

IV.32. Article 32 – Evolution des caisses des professions libérales 104

III.31.1 Diagnostic et objectif poursuivi 104

IV.33. Article 33 – régime à prestations définis gérés en interne 106

IV.34. Article 34 : Habilitation à prendre par ordonnance les mesures d’harmonisation nécessaires à Saint-Pierre-et-Miquelon et Mayotte 109

V. Impact de la loi 111

V.1. Prise en compte du handicap 111

V.1.1. La retraite anticipée des travailleurs handicapés 111

V.1.2. Une dérogation à l’âge d’annulation de la décote 112

V.1.3. Une validation de périodes assimilées à de l’assurance vieillesse au titre des périodes d’invalidité ou de longue maladie 112

V.1.4. De nouveaux droits à l’assurance vieillesse pour les aidants familiaux 112

V.2. Impacts en termes d’égalité entre les femmes et les hommes 113

V.2.1. Six mesures du projet de loi permettent de faciliter l’acquisition de trimestres d’assurance vieillesse par les femmes 114

V.2.2. Quatre mesures de la réforme permettent de prendre en compte la situation spécifique des personnes participant ou ayant participé activement à l'activité professionnelle de leur conjoint – très majoritairement des femmes - afin d'améliorer leurs droits à retraite. 116

V.2.3. La réforme entend améliorer le pilotage de notre système de retraite et préparer une refonte des avantages familiaux de retraite, afin de mieux les orienter vers les femmes et la compensation des impacts, sur la carrière, des enfants 117

V.2.4. La consolidation de la situation financière de notre système de retraite ne se fait pas au détriment des femmes 118

V.3. Impacts juridiques 119

V.4. Impacts outre-mer 119

V.4.1. En Guadeloupe, en Guyane, à la Martinique et à la Réunion 119

V.4.2. A Mayotte et à Saint-Pierre-et-Miquelon 119

V.5. Impacts économiques et financiers 120

V.6. Impacts sur l’emploi 120

V.6.1. Favoriser le maintien des seniors dans l’emploi 120

V.6.2. Améliorer la santé des travailleurs en réduisant l’exposition professionnelle aux facteurs de pénibilité 121

V.6.3. Valoriser les périodes de formation et sécuriser les parcours professionnels 121

V.7. Impacts sociaux 122

V.7.1. Sur le 1er objectif visant à assurer la pérennité des régimes de retraite 122

V.7.2. Sur le 2ème objectif visant à rendre le système plus juste 123

V.7.3. Sur le 3ème objectif visant à simplifier le système et renforcer sa gouvernance 126

V.8. Impacts environnementaux 128

V.9. Impacts administratifs 128

V.9.1. De nouvelles structures ou modalités de gouvernance 128

V.9.2. Des missions nouvelles de gestion, liées à la mise en œuvre du compte personnel de prévention de la pénibilité 129

V.10. Impacts sur le fonctionnement de la justice 130

V.11. Impacts sur les collectivités territoriales 131

VI. Modalités d’application de la réforme 131

VI.1. Application dans le temps 131

VI.2. Consultations 132

VI.3. Textes d’application 134

Le projet de loi garantissant l’avenir et la justice du système de retraites élaboré par le Gouvernement résulte de travaux préparatoires et de consultations qui se sont étalés au total sur plus d’un an.

C’est en effet pour rétablir la confiance dans l’avenir du système de retraites que le Gouvernement a engagé à l’été 2012 une concertation sur les évolutions de notre système de retraite.

Dès juillet 2012, le Gouvernement a rétabli, comme le Président de la République s’y était engagé, la possibilité de partir à 60 ans pour celles et ceux qui ont commencé à travailler jeunes.

Au-delà de cette mesure de justice immédiate, le débat s’est engagé, dès la grande conférence sociale de l’été 2012, sur les évolutions à apporter à notre système de retraites. En accord avec les partenaires sociaux, la feuille de route sur les retraites issue de la grande conférence sociale a ainsi prévu :

- la réalisation par le Conseil d’orientation des retraites (COR) d’un état des lieux sur la situation financière des régimes de retraite mais aussi sur les injustices face à la retraite, qui s’est traduit par deux rapports remis en décembre 2012 et janvier 2013 : le diagnostic a ainsi été posé ;

- la mise en place d’une Commission pour l’avenir des retraites, paritaire, composée de 10 membres et présidée par Mme Yannick Moreau chargée de préparer la concertation et les décisions, sur la base d’un cahier des charges élaboré en lien avec les partenaires sociaux : les différentes pistes envisageables ont été mises sur la table ;

- l’ouverture d’une concertation sur les pistes d’évolution de notre système de retraite : des échanges nourris ont eu lieu, avant et après la conférence sociale de juin 2013.

La réforme que le Gouvernement a choisi de présenter est une réforme structurante qui doit permettre à notre système de retraite de répondre aux évolutions de la société en poursuivant trois objectifs essentiels :

- assurer la pérennité des régimes de retraite ;

- rendre le système plus juste ;

- simplifier le système et renforcer sa gouvernance.

Le présent document constitue l’étude d’impact produite par le Gouvernement à l’appui de ce projet de loi, conformément aux dispositions du quatrième alinéa de l’article 39 de la Constitution et du chapitre II de la loi organique n°2009-403 du 15 avril 2009.

I. Diagnostic de la situation actuelle

1.1. Le système de retraite français, malgré les réformes successives, n’est pas encore revenu à une situation financière équilibrée

1.1.1. Les caractéristiques du système de retraite français

a) Un système complexe et morcelé

Le système de retraite français est un ensemble complexe et diversifié marqué par la pluralité des régimes obligatoires qui en constituent le socle1. Fruit de l’histoire sociale, le morcellement du système de retraite a accompagné l’extension du champ de la couverture vieillesse et s’est réalisé dans un double mouvement :

- d’une part, la multiplicité des régimes de base : ces régimes, structurés sur une base socioprofessionnelle, constituent le premier étage et le « socle » du système de retraite. Il existe aujourd’hui vingt-et-un régimes de retraite de base recensés par le Conseil d’orientation des retraites2, regroupés en trois grands ensembles de régimes. Le premier ensemble couvre les salariés du secteur privé, les non titulaires de la fonction publique ainsi que le régime des salariés agricoles et couvre au total environ 70% des actifs. Le deuxième ensemble correspond aux régimes des non salariés et couvre environ 10% des actifs. Le troisième ensemble comprend les régimes spéciaux, qui couvrent pour l’essentiel les fonctionnaires et les salariés de certaines entreprises publiques et regroupent environ 20% des actifs.

- d’autre part, le développement des régimes complémentaires obligatoires : tous les salariés et non salariés du secteur privé sont obligatoirement affiliés à au moins un régime de retraite complémentaire. Les salariés du secteur privé relèvent ainsi soit de l’Association générale des institutions de retraite des cadres (AGIRC), soit de l’Association des régimes de retraite complémentaire (ARRCO), ces régimes présentant la particularité d’être gérés par les partenaires sociaux. Les régimes complémentaires obligatoires des commerçants et des artisans sont gérés par le RSI et celui des non-salariés agricoles par la MSA. Quant aux régimes complémentaires des professions libérales, ils sont gérés par les sections professionnelles de la CNAVPL.

Par ailleurs, la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites a encouragé la constitution d’une épargne en vue de la retraite pour toute personne, soit à titre privé soit dans le cadre de son activité professionnelle, en complément des régimes de retraite légalement obligatoires en répartition. Il existe ainsi une grande variété de dispositifs d’épargne retraite collective et individuelle  (PERCO, PERP, régimes supplémentaires collectifs d'entreprise...).

b) Un système confronté à un double défi démographique, d’ampleur cependant plus mesurée que chez la plupart de nos voisins3

La France est sans doute l’un des pays qui s’est le plus inquiété de sa capacité à faire face à une nouvelle donne démographique.

Le nombre de naissances a très fortement augmenté en France de la fin des années 1940 au début des années 1970. Durant ce « baby boom », le nombre de naissances annuelles s’est situé entre 800 000 et 900 000. Par la suite, ce nombre a légèrement diminué pour fluctuer entre 700 000 et 800 000 par an. Parallèlement, l’allongement de l’espérance de vie s’est poursuivi et est apparu comme une tendance de long terme. Entre 1994 et 2009, l’espérance de vie à la naissance est passée de 73,6 ans à 77,7 ans pour les hommes et de 81,8 ans à 84,4 ans pour les femmes, soit un gain de près d’un trimestre par an. Sur la même période, les hommes ont gagné 2,5 ans d’espérance de vie à 60 ans et les femmes 2 ans : elle atteint 22 ans pour les premiers et 27 ans pour les secondes.

Les conséquences de ces deux phénomènes – départs des générations du « baby boom » et allongement de la durée de la vie – ont conduit depuis 2005 à une forte dégradation, qui se prolongera essentiellement jusqu’en 2035, du ratio démographique, que l’on peut mesurer en rapportant la population âgée de 20 à 59 ans à celle âgée de plus de 60 ans : ce ratio diminuera en effet de 2,6 à 1,5 entre les années 2005 et 2035, puis plus légèrement après 2035, essentiellement sous l’effet de l’allongement de l’espérance de vie.

Néanmoins, par rapport à nombre de ses voisins européens, la France bénéficie d’une natalité dynamique : l’indicateur conjoncturel de fécondité s’élève à 2 contre 1,59 dans les 27 pays de l’Union européenne. Il est ainsi en France relativement stable et voisin du niveau assurant le remplacement des générations sur le long terme (hors effet de la migration), qui est estimé à 2,1 environ. Il s’agit là d’un atout important qui permettra à nos régimes de retraite, après la période du « choc démographique » 2005-2035, de retrouver les conditions d’un équilibre durable alors que la situation devrait continuer de se dégrader dans les pays qui nous entourent.

Face à ces défis démographiques majeurs, des réformes successives ont été mises en œuvre depuis trente ans sans parvenir à rétablir l’équilibre durable de notre système de retraite.

1.1.2. Les réformes successives demeurent insuffisantes et n’ont pas permis d’atteindre l’ensemble des objectifs assignés au système de retraite

Le débat sur la sauvegarde de notre système de retraites par répartition a été ouvert en 1991 par la publication du Livre Blanc sur les Retraites, premier diagnostic complet des perspectives de long terme de notre système de retraites. Dans sa préface, M. Rocard a tracé le cadre et les objectifs des réformes à venir : respecter l'équité entre les générations, satisfaire l'équité au sein de chaque génération, assurer la maîtrise financière des régimes de retraite pour garantir la pérennité de notre modèle fondé sur la répartition et la solidarité.

Fidèle à la démarche initiée par le Livre Blanc, le Gouvernement de Lionel Jospin a mis en place les premiers éléments d’un système de pilotage global des retraites, avec la création du Conseil d’orientation des retraites, lieu de diagnostic et d’échanges entre les parties prenantes aux réformes des retraites (partenaires sociaux, Gouvernement, parlementaires…) dont les travaux ont préparé et éclairé toutes les réformes des retraites intervenues depuis sa création. Il a par ailleurs créé un Fonds de réserve des retraites pour lisser les conséquences de l’arrivée à la retraite des classes nombreuses du baby-boom, principal défi de notre système diagnostiqué par le Livre Blanc.

Les réformes de 1993 et de 2003 se sont inscrites, pour faire face à l’allongement de l’espérance de vie, dans la démarche d’allongement de la durée d’activité que prônait le Livre Blanc, en augmentant progressivement la durée d’assurance requise pour bénéficier d’une retraite à taux plein.

A rebours de cette démarche, la réforme de 2010 a uniformément et sans préavis augmenté les âges d’ouverture des droits à pension, y compris pour les personnes les plus proches de la retraite.

Dans le même temps, la réforme de 1993 a notamment conduit à peser sur le niveau des pensions, en introduisant en particulier un calcul des pensions de base dans les régimes alignés fondé sur les 25 meilleures années, contre 10 auparavant et en modifiant les conditions de revalorisation des pensions et des salaires utilisés pour les calculer.

A ces mesures paramétriques de réforme se sont ajoutés deux axes de réforme :

- des mesures ont visé à encourager la poursuite de l’activité professionnelle des travailleurs âgés : pour donner davantage de marge de choix dans la date de départ à la retraite, les mécanismes de décote et surcote ont évolué ; la retraite progressive et le cumul emploi retraite ont été libéralisés pour faciliter les possibilités d’emploi pendant la retraite ;

- des prélèvements supplémentaires et une modification du mode de financement des retraites ont complété ces leviers d’action : si les cotisations demeurent la recette principale, les réformes successives ont diversifié les ressources des régimes – et du fonds de financement qui intervient dans le domaine de la retraite, le FSV – et des mécanismes de transferts ont été renforcés pour assurer la solidarité entre régimes.

Toutefois, les réformes successives, si elles ont permis d’atténuer les déficits des régimes, ont jusqu’ici doublement échoué :

• elles ne sont pas parvenues à rétablir durablement l’équilibre financier des régimes : le régime général, à titre d’exemple, est en déficit continu depuis 2005, en dépit des réformes, et l’horizon d’équilibre de la réforme de 2010, qui n’était pas atteint sans réforme nouvelle, s’interrompait en 2018 ;

• elles n’ont surtout pas su apporter de réponses pérennes aux inégalités présentes dans le système de retraite : à titre d’exemple, l’allongement de la durée d’assurance, si elle constitue une réponse à l’allongement rapide de l’espérance de vie, ne peut s’appliquer uniformément, sans tenir compte de la réalité des trajectoires professionnelles des actifs.

Plus généralement, les réformes paramétriques successives n’ont pas su adapter notre système de retraite aux profondes évolutions sociales intervenues depuis sa création, et aux inégalités constatées sur le marché du travail. Force est de constater que, dans ce domaine, peu a été fait par les réformes précédentes. Les leviers utilisés dans les précédentes réformes, en particulier celui de l’âge dans la réforme de 2010, ont été appliqués sans tenir réellement compte de leur impact significatif sur certaines catégories d’assurés, en particulier concernant les carrières longues et les assurés ayant commencé à travailler tôt.

Les réformes successives n’ont par ailleurs pas amélioré la situation des carrières heurtées qui aboutissent à la liquidation de pensions de faible niveau. De même, de trop importantes disparités dans la constitution des droits à retraite perdurent entre les femmes et les hommes : sur le champ des pensions liquidées en 2011, les femmes liquidant un premier droit direct perçoivent en moyenne des pensions inférieures de 32% à celles des hommes.

Enfin, en dépit des réformes successives, le système de retraite demeure complexe et parfois peu lisible pour les assurés, en particulier pour les polypensionnés. Cette complexité ne doit pas se traduire par des difficultés pour les assurés à faire valoir leurs droits.

Au final, les limites des réformes passées ont contribué à alimenter ou accroître un sentiment persistant de défiance envers la capacité du système à faire face à ses engagements collectifs.

1.2. Le système de retraite ne répond pas suffisamment aux attentes des Français et doit être consolidé

1.2.1. L’équilibre financier n’est toujours pas assuré et le besoin de financement est de l’ordre d’un point à l’horizon 2020 et jusqu’en 2040

S’ajoutant aux défis démographiques auxquels notre système est confronté, la durée et l’ampleur de la crise depuis 2008 affectent fortement le système des retraites et rendent plus exigeantes les conditions du retour durable à l’équilibre - ce que la réforme de 2010 ne permettait déjà pas. A long terme, les effets directs de la crise économique sur les ressources du système de retraite se seront atténués mais son effet se conjugue à l’arrivée à la retraite des générations nombreuses du baby boom. La crise pèse donc sur les ressources au moment le plus délicat de notre système de retraite, soit jusqu’en 2035, date à laquelle la « bosse démographique » liée au baby-boom aura été surmontée.

Compte tenu de ces constats, la Commission pour l’avenir des retraites estime que le besoin de financement du système de retraite reste de l’ordre d’un point de PIB à l’horizon 2020 et que son montant dépend, à moyen et long termes, des hypothèses économiques retenues. Elle s’appuie sur le 11e rapport du Conseil d’orientation des retraites consacré aux perspectives des régimes à horizon 2020, 2040 et 2060 et adopté le 19 décembre 2012, qui met en évidence une dégradation de la situation financière liée à la crise économique jusqu’en 2013 avant une amélioration progressive escomptée jusqu’en 2020 : le solde du système de retraites passerait de -13,2 Md€ en 2011 (0,7 point de PIB) à -20,2 Md€ en 2017 (0,9 point de PIB) puis à 20,9 Md€ ou 21,3 Md€ en 2020 selon les scénarios économiques retenus4.

La prise en compte de l’accord national interprofessionnel du 13 mars 2013 conclu par les partenaires sociaux gestionnaires des régimes complémentaires AGIRC-ARRCO conduit cependant à réduire le besoin de 3,9 Md€ en 2017 (4,4 Md€ en 2020) : l’accord prévoit diverses mesures d’équilibrage qui devraient conduire à diviser de plus de moitié les déficits projetés des régimes AGIRC-ARRCO à échéance 2020. Elles sont de trois ordres :

- augmentation des taux de cotisation contractuels de 0,2 point,

- revalorisation des pensions limitée en 2013 à 0,5% (AGIRC) et 0,8% (ARRCO)

puis à l’évolution de l’inflation moins 1 point en 2014 et 2015,

- valeur d’achat du point suivant les règles de la valeur de service du point en 2014

et 2015.

Par rapport aux projections élaborées en décembre 2012 par le COR, les évolutions économiques observées, moins favorables à court terme, ont conduit à retenir une dégradation de l’ordre de 1 à 2 Mds€ en 2014 et au-delà des besoins de financement du système de retraite.

1.2.2. Malgré leur augmentation, les taux d’emploi des seniors restent à un niveau insuffisant et demeurent une faiblesse structurelle du système

Les taux d’emploi des seniors sont croissants, mais demeurent inférieurs aux moyennes européennes. En 2011, le taux d’emploi des seniors âgés de 55 à 64 ans atteignait 41,5 %. Il était inférieur pour les femmes (39,1%, contre 44,1% pour les hommes)

Bien qu’en augmentation, il reste inférieur à la moyenne européenne (47,4 %). En matière de taux d’activité ou d’emploi, la position relative de la France par rapport à la moyenne européenne (UE-27) est plus défavorable pour les hommes que pour les femmes et pour la tranche d’âge 60-64 ans, plus que pour celle des 55-59 ans5.

L’amélioration du taux d’emploi « sous-jacent » des 55-64 ans depuis 2008 a concerné d’abord les 55-59 ans puis en 2011 les 60-64 ans. Cette hausse peut être attribuée à plusieurs causes, dont les poids respectifs sont difficiles à préciser :

- la réduction des dispositifs de cessation anticipée et les réformes des retraites,

- un effet de génération en ce qui concerne l’emploi salarié chez les femmes du baby-boom,

- le décalage progressif des calendriers de vie professionnelle, avec notamment la scolarité obligatoire à 16 ans pour les natifs de 1953,

- une évolution progressive, dans un sens positif, des points de vue des employeurs concernant les salariés seniors.

En dépit de l’évolution récente des taux d’emploi des seniors, les âges effectifs de sortie du marché du travail restent inférieurs à l’âge légal de départ à la retraite et les modalités de transition entre emploi et retraites sont diverses et complexes.

Aussi, au regard de ces éléments, la poursuite de la mobilisation des acteurs en faveur de l’incitation au maintien et à la prolongation d’activité des seniors, l’accompagnement des secondes parties de carrière ainsi qu’un suivi renforcé des transitions entre emploi et retraite apparaissent comme autant de préalables conditionnant plus largement l’amélioration de la situation de l’emploi des seniors. Le Gouvernement s’y est déjà attaché par l’intermédiaire des contrats de génération, qui permettent de lier maintien dans l’emploi des seniors et recrutement des jeunes actifs.

1.2.3. En dépit d’un haut niveau de solidarité, le système actuel fait l’objet d’une demande accrue d’équité et de lisibilité

Grâce à l’amélioration des retraites, le niveau de vie des retraités a rejoint celui des actifs. En prenant en compte leurs différents revenus, les retraités ont un niveau de vie équivalent à celui des actifs et supérieur à celui de l’ensemble de la population.

En 2011, le montant moyen de la pension de droit propre (hors réversion et majoration pour trois enfants et plus), s’élevait à 1 256 € par mois (1 603 € pour les hommes et 932 € pour les femmes). En ce qui concerne l’ensemble des droits de retraite (y compris réversion, avantages accessoires et minimum vieillesse), le montant moyen de la pension de retraite totale pour les personnes résidant en France s’élevait à 1 440 € par mois (1 749 € pour les hommes et 1 165 € pour les femmes) sur la dernière année d’exploitation de l’échantillon interrégimes de retraités (2008).

Cependant, si la redistribution opérée par les dispositifs de solidarité va globalement dans le sens d’une nette réduction des inégalités, leurs effets sont complexes à appréhender et, en dépit des correctifs apportés, des difficultés perdurent et fragilisent plus particulièrement certaines catégories d’assurés. Plusieurs situations appellent ainsi une action correctrice.

Le prolongement de la vie active impose d’agir pour limiter les situations de fin de carrière où des salariés « usés » par certaines conditions de travail ne sont plus en mesure de travailler. Face à ces situations, la réponse passe avant tout par la prévention : l’enjeu est que les travailleurs soient mieux protégés lorsqu’ils sont exposés à des conditions de travail pénibles, définies comme des expositions professionnelles susceptibles de laisser des « traces durables, identifiables et irréversibles sur la santé », et qu’ils puissent en sortir avant que celles-ci n’aient entraîné des conséquences irréversibles sur leur santé. Mais la justice veut également que les conditions de travail ayant conduit à réduire l’espérance de vie des salariés soient compensées par des possibilités de départ anticipé par rapport au droit commun.

Les disparités persistantes de pensions entre les femmes et les hommes justifient une action en faveur d’un renforcement des droits à retraite des femmes, en s’assurant que celles qui combinent bas salaires et temps partiel puissent bien valider quatre trimestres, et en prenant mieux en compte l’impact de la maternité pour le départ en retraite. A long terme, l’ambition de renforcement des droits à retraite des femmes ne peut être poursuivie qu’en réinterrogeant plus largement le rôle assigné aux droits familiaux de retraite, en particulier celui de la majoration de pension de 10%, tout en veillant à compenser, de la façon la plus juste, l’impact potentiellement négatif de l’éducation des enfants sur les carrières.

Au total, ainsi que l’a rappelé le Conseil d’orientation des retraites dans son 12ème rapport sur l’état des lieux du système de retraite et la Commission pour l’avenir des retraites dans son rapport de juin remis au Premier ministre, si ces dispositifs de solidarité, pris dans leur ensemble, jouent globalement dans le sens d’une nette réduction des inégalités, leurs effets demeurent complexes à appréhender et varient fortement d’un dispositif à l’autre, ce qui suppose de tendre vers la simplification et la convergence progressive des règles de ces dispositifs tout en poursuivant l’objectif d’améliorer leur caractère redistributif.

Par ailleurs, le redressement de notre système de retraite passe par une meilleure prise en compte des modalités d’entrée des jeunes sur le marché du travail : pour les apprentis, afin qu’ils puissent valider quatre trimestres par an quand ils travaillent toute l’année ; pour les jeunes qui connaissent des difficultés d’insertion sur le marché du travail, avec la possibilité de valider davantage de trimestres pendant des périodes de chômage non indemnisé et des contrats courts ; pour les jeunes ayant poursuivi leurs études après le bac, afin qu’ils puissent plus facilement racheter des trimestres d’études.

Enfin, l’ambition de corriger les inégalités de notre système de retraite exige de mieux prendre en compte les carrières heurtées, marquées notamment par le chômage ou les accidents de carrière, ainsi que la situation des personnes atteintes de handicap ou les aidants familiaux.

La retraite est le reflet de la vie professionnelle et tous les assurés n’arrivent pas égaux devant la retraite. Le système français de retraite ne peut corriger toutes les inégalités. Il doit cependant éviter de les amplifier et assumer de corriger les injustices les plus importantes devant la retraite, afin de mieux prendre en compte la situation comparée des femmes et des hommes, de ceux qui ont commencé plus ou moins tard, de ceux qui ont une espérance de vie réduite du fait des conditions de travail auxquelles ils ont été exposés.

C’est cette vision de la justice du système de retraite que le Gouvernement entend promouvoir dans cette réforme et qui sert de fil conducteur à l’ensemble du texte.

II. Les objectifs de la réforme 

Le système de retraite par répartition est au cœur du pacte républicain qui rassemble les différentes générations et constitue l’un des piliers du modèle social français, auquel nos concitoyens sont fortement attachés.

Ce pacte entre les générations suppose une confiance partagée : confiance dans le fait que le système de retraite permettra à chacun, lorsque son tour viendra, d’en bénéficier ; confiance dans le fait que le système est juste et que les efforts sont partagés par tous.

Aussi, face à l’impérieuse nécessité de rétablir la confiance dans l’avenir et de sauvegarder ce système de retraite par répartition qui afficherait selon les projections du COR 20 Md€ de déficit en 2020, le Gouvernement a décidé d’engager une réforme structurante portée par une triple ambition :

- une réforme responsable tenant compte de cette réalité incontournable qu’est l’allongement de l’espérance de vie ;

- une réforme équilibrée qui partage équitablement les efforts entre toutes les forces de la nation ;

- une réforme juste qui accorde enfin à certaines catégories de travailleurs les droits qui leur avaient été refusés lors des précédentes réformes.

Cette réforme répond ainsi à trois objectifs principaux :

2.1. Garantir dans la durée notre système de retraite par des mesures justement réparties

Le système de retraite a pour objectif principal d’assurer, pour toutes les générations, un niveau de retraite satisfaisant au regard notamment du niveau de vie précédant la cessation de l’activité professionnelle, tout en faisant face aux évolutions démographiques et économiques qui viennent en modifier l’équilibre.

Le Gouvernement se fixe l’objectif d’assurer la sauvegarde de ce système de retraite par répartition en assurant l’équilibre financier des régimes de retraite de base à l’horizon 2020 et en maintenant cet équilibre à l’horizon 2040 : en effet, la trajectoire de retour à l’équilibre de notre système de retraite doit être à la fois rapide, afin de lui permettre de faire face à ses besoins de financements immédiats, et durable, pour renforcer la confiance notamment des plus jeunes générations dans la solidité et la pérennité de notre système par répartition.

2.1.1. Consolider la situation financière de notre système de retraite à l’horizon 2020

Afin de consolider la situation financière de notre système de retraite, le Gouvernement a choisi de proposer des mesures immédiates de redressement, en lien avec la trajectoire de retour à l’équilibre des comptes publics, afin de résorber les déficits auxquels notre système est aujourd’hui confronté, déficits qui résultent notamment de la crise et de l’arrivée à la retraite de la génération du baby-boom.

Ces mesures reposent sur un effort justement réparti entre tous : entreprises, salariés et retraités.

Les cotisations des actifs et des entreprises aux différents régimes de base seront augmentées dans la même proportion, de façon mesurée, selon des modalités fixées par décret. La hausse sera progressive sur 4 ans : 0,15 point pour les actifs et les employeurs en 2014, puis 0,05 pour les 3 années suivantes. En 2017, l’accroissement total aura été de 0,3 point pour les actifs et 0,3 point pour les employeurs.

Conscient des efforts induits pour les assurés par cette augmentation temporaire des cotisations vieillesse et soucieux de préserver la compétitivité des entreprises, le Gouvernement engagera dès 2014, dans le cadre des travaux du Haut conseil du financement de la protection sociale, une démarche visant à consolider et diversifier le financement de la protection sociale afin que celui-ci pèse moins sur le coût du travail et donc sur l’emploi.

La contribution des retraités reposera sur deux mesures :

- la fiscalisation, dans le projet de loi de finances pour 2014, des majorations de pensions de 10% des retraités ayant élevé 3 enfants ou plus : aujourd’hui exonérées d’impôt sur le revenu, ces majorations y seront désormais soumises comme le reste des pensions.

Cette mesure concernera principalement les retraités les plus aisés ayant eu trois enfants et plus. En effet, moins de 60% des retraités, par construction les plus aisés, sont assujettis à l’impôt sur le revenu. L’augmentation d’assiette se traduira par une augmentation des impôts touchant principalement les retraités des deux derniers déciles de revenus. Elle sera modeste pour les retraités moyens : à titre d’exemple, un couple de retraités percevant chacun 1400 € de pension, y compris une majoration au titre de 3 enfants, devra verser chacun, au titre de l’impôt sur le revenu, moins de 15 € supplémentaires par mois. Il s’agit donc d’un effort conséquent de solidarité, mais qui épargne les retraités modestes et reste mesuré pour les retraités concernés.

- le décalage du 1er avril au 1er octobre de la revalorisation des pensions des retraités, tout en préservant les petites pensions : le report de la revalorisation ne concernera pas les titulaires de l’allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA, dit « minimum vieillesse »).

Il s’agit d’un effort temporaire demandé à l’ensemble des pensionnés afin de participer au rééquilibrage de court terme de notre système d’assurance retraite. Cette mesure est ponctuelle : les années suivantes, les pensions seront revalorisées, selon les règles habituelles, tous les 12 mois. L’effort demandé aux pensionnés est donc réel, mais limité dans le temps et dans ses effets. Il épargne les retraités les plus modestes.

Cet effort demandé aux retraités répond également à un souci d’équité, sans baisser les pensions ni remettre en cause les mécanismes d’indexation des pensions. Le Gouvernement a écarté toute mesure de sous-indexation des pensions ; cette mesure limitée se justifie, comme le soulignait le rapport de la Commission pour l’avenir des retraites, par le fait que « le niveau de vie des retraités est aujourd’hui comparable à celui des actifs, sans que pèsent sur les premiers les risques en matière d’emploi et de pouvoir d’achat auxquels sont confrontés les seconds, et notamment les plus jeunes d’entre eux en cette période de crise et de croissance du chômage ».

2.1.2. Garantir sa pérennité financière dans la durée

Le Gouvernement entend ensuite assurer la pérennité financière des régimes de retraite à l’horizon 2040 afin de porter une ambition collective pour notre système de retraite et rétablir le consensus et la confiance autour de nos retraites.

Pour répondre à ce défi, le Gouvernement propose une évolution mesurée et progressive de la durée d’assurance requise pour l’obtention d’une retraite à taux plein. Afin de ne pas bouleverser les projets de départ des générations proches de la retraite, cette augmentation ne concernera que les générations partant à la retraite à compter de 2020. La mesure proposée par le Gouvernement consiste à augmenter la durée de cotisation d’un trimestre tous les trois ans entre 2020 et 2035. Cette solution apporte une réponse juste, à la fois en termes d’équité entre générations, puisqu’elle conduit à stabiliser la part de la vie consacrée au travail, et au sein de chaque génération, car elle permet, à la différence d’un relèvement de l’âge d’ouverture des droits, de ne pas pénaliser les assurés qui ont commencé à travailler jeune.

Cette augmentation de la durée d’assurance :

- concernera l’ensemble des assurés de tous les régimes ;

- conduit à répartir de façon équilibrée les gains d’espérance de vie entre activité et retraite : entre 2013 et 2035, l’espérance de vie à 60 ans aura augmenté de plus de 2 ans, quand la durée d’assurance sera passée de 41,5 ans à 43 ans ; les retraités profiteront donc plus longtemps de leurs pensions ;

- évite tout changement de cap brutal : sont concernés les assurés nés à compter de 1961, qui liquideront leurs pensions dans 10 ans ; surtout, la règle est connue par avance, ce qui favorise la bonne information des assurés ;

- est limitée et mesurée : ainsi, à compter de 2035, le choc démographique lié au « papy boom » aura été dépassé, ce qui permet de maintenir un régime durablement équilibré sans hausse de la durée d’assurance.

Le Gouvernement entend enfin instaurer un mécanisme de pilotage de la trajectoire des régimes et des objectifs de la politique nationale des retraites afin de garantir le redressement des régimes de retraite dans la durée, d’apporter davantage de visibilité aux assurés et de renforcer la confiance de toutes les générations dans la retraite.

La trajectoire financière doit être pilotée et l’équilibre financier garanti par des mécanismes d’adaptation des recettes et des dépenses permettant de neutraliser les chocs économiques ou démographiques.

L’objectif du Gouvernement est d’en finir avec le pilotage à vue du système de retraite qui a conduit à de trop nombreuses réformes ces dernières années. Ce dispositif de pilotage, s’appuyant sur le Conseil d’orientation des retraites et sur la création d’un Comité de surveillance des retraites, jouera ainsi à la fois le rôle de surveillance financière, d’observatoire des inégalités générées par le système de retraite et de suivi des dispositifs mis en place pour les corriger.

Le dispositif de pilotage retenu vise à donner, au-delà du respect de la trajectoire financière, des garanties sur le respect des grands objectifs du système de retraite tels que : le taux de remplacement, le niveau relatif de pension des femmes, l’emploi des seniors, etc. L’augmentation de la durée d’assurance fera aussi l’objet d’un suivi dans le cadre du pilotage, afin de s’assurer notamment qu’elle reste en ligne avec les évolutions de l’espérance de vie et conduit à une durée de retraite satisfaisante.

La définition de ces indicateurs structurels de suivi de la qualité du système et de sa soutenabilité participent également de la volonté du Gouvernement de se doter d’outils de pilotage de long terme (20-25 ans), correspondant à l’horizon de pilotage d’un système de retraite mais également à l’horizon dans lequel nos concitoyens peuvent se projeter en matière de retraite. Nos concitoyens aujourd’hui au milieu de leur vie active doivent en effet pouvoir anticiper les conditions dans lesquelles ils pourront partir à la retraite. C’est pourquoi le Gouvernement entend inscrire notre système de retraite dans une trajectoire durablement équilibrée à l’horizon 2040.

Pour répondre à cet objectif, le dispositif de pilotage se déclinera autour d’un schéma en quatre étapes :

- le Conseil d’orientation des retraites réalisera chaque année, à partir d’une liste d’indicateurs de suivi du respect des objectifs du système de retraite définis par décret, un bilan public sur le système des retraites ;

- un Comité de surveillance des retraites, composé d’experts indépendants, rendra chaque année un avis public relatif d’une part au suivi des écarts de pensions entre hommes et femmes et de leurs déterminants, d’autre part au respect des objectifs du système de retraite ;

- s’il estime que l’assurance retraite s’éloigne significativement de ses objectifs, le comité devra assortir son avis de recommandations publiques, adressées au Parlement, au Gouvernement et aux régimes de retraite. Les recommandations du Comité de surveillance des retraites seront encadrées au sein d’un « tunnel », afin de ne pas avoir pour effet de porter les grands paramètres du système de retraite en dehors de bornes préétablies. Le Comité pourra également préconiser le recours aux réserves du Fonds de réserve des retraites (FRR), qui retrouve sa vocation originelle, afin de corriger des écarts de nature conjoncturelle par rapport à la trajectoire de redressement financier.

- le Gouvernement présentera au Parlement, après consultation des partenaires sociaux, les suites qu’il entend donner aux recommandations du Comité de surveillance des retraites. Par ailleurs, ce comité rendra un avis sur le suivi de ses recommandations.

Ces recommandations s’imposeront comme un élément essentiel du débat public, afin d’éviter que les réformes nécessaires ne soient ajournées. Ce dispositif de pilotage constitue donc une innovation majeure, permettant de s’assurer du respect des objectifs assignés par la présente loi au système de retraite – qu’il s’agisse des objectifs de pérennité financière, sur lesquels repose la confiance des jeunes générations dans la retraite par répartition, ou des objectifs de justice, fondateurs du pacte social. Ses travaux sur les écarts de pensions entre hommes et femmes et leurs déterminants pourront également servir de base à la réflexion sur les évolutions des droits familiaux de retraite, en particulier sur la refonte des majorations de pensions annoncée par le Premier ministre pour les générations partant à la retraite au-delà de 2020.

2.2. Rendre le système plus juste

2.2.1. Mieux prendre en compte la pénibilité au travail

Le Gouvernement s’engage, et c’est là un axe majeur de cette réforme, à apporter une réponse durable à la question de la pénibilité au travail : l’effort demandé aux assurés pour préserver l’équilibre des régimes de retraites ne peut méconnaître l’impact des conditions de travail auxquelles certains travailleurs sont confrontés. En effet, l’espérance de vie et donc la durée de retraite sont largement dépendantes des conditions de travail pendant la vie active et nos systèmes de retraite se doivent, au nom du principe d’équité, de prendre en compte cette dimension de pénibilité.

Face à ces situations, la réponse passe avant tout par la prévention : l’enjeu est que les travailleurs soient davantage protégés lorsqu’ils sont exposés à des situations de travail pénible, par des mesures de prévention des risques professionnels appropriées, et qu’ils puissent sortir de ces situations dans le cours de leur carrière. La prise en compte de la pénibilité doit donc pour le Gouvernement s’opérer d’abord dans la perspective de prévenir et réduire les situations où la santé des travailleurs est altérée sur le long terme. Mais elle doit aussi intégrer le fait que des mécanismes de compensation sont également nécessaires face à certaines situations.

La réforme proposée, qui s’inscrit dans le prolongement des propositions de la Commission pour l’avenir des retraites, apporte ainsi des réponses à ce double objectif de compensation et de réparation de la pénibilité, en reposant sur la création d’un compte personnel de prévention de la pénibilité, dès 2015.

Son principe est simple : ouvert à tout salarié du secteur privé6 exposé à des conditions de travail réduisant l’espérance de vie, le compte permettra de cumuler des points en fonction de l’exposition à un ou plusieurs facteurs de pénibilité selon son degré d’intensité après prise en compte de l’effet des mesures de protection mises en œuvre par l’employeur (un point par trimestre d’exposition ou deux points en cas d’exposition à plusieurs facteurs de pénibilité).

Les points accumulés sur le compte pourront être utilisés pour suivre des formations permettant de se réorienter vers un emploi moins pénible, financer un maintien de rémunération lors d’un passage à temps partiel en fin de carrière, bénéficier de trimestres de retraite. Afin d’inciter au premier chef à la prévention et à la limitation des durées d’exposition, une partie des points acquis par le salarié devra être utilisée en vue d’une formation, en articulation étroite avec le compte personnel de formation.

Le dispositif sera financé par une cotisation des employeurs : une cotisation minimale de toutes les entreprises, au nom de la solidarité interprofessionnelle, et une cotisation additionnelle appliquée aux seules entreprises exposantes, l’objectif de cette dernière étant d’inciter les entreprises à réduire le niveau d’exposition de leurs salariés par une meilleure protection et par un moindre recours.

2.2.2. II.2.2. Favoriser l’emploi des seniors

Le Gouvernement entend agir en faveur de l’emploi des seniors et plus particulièrement vis-à-vis de ceux qui en fin de carrière éprouvent le besoin d’une transition entre l’emploi et la retraite. La retraite progressive, en mettant fin à la coupure brutale entre activité et retraite, vise à encourager la prolongation d’activité rémunérée en facilitant la transition entre emploi et retraite. Fin 2012, la retraite progressive concerne peu d’assurés, 2 409 bénéficiaires au régime général. C’est un dispositif peu connu et souvent mal compris, alors que cette période de cumul d’une activité à temps partiel et d’une fraction de la pension de retraite est favorable aux assurés à qui elle permet de poursuivre l’acquisition des droits à retraite et de liquider à terme une retraite majorée.

C’est pourquoi le Gouvernement a souhaité la rénover pour l’adapter à la réalité de la fin de carrière des seniors. Une réforme structurante du dispositif est ainsi prévue pour en étendre le champ, en abaissant la condition d’âge à partir duquel les assurés pourront entrer en retraite progressive. Actuellement fixée à l’âge légal, la condition d’âge serait abaissée de 2 ans, afin d’en favoriser l’accès aux salariés ayant commencé à travailler tôt.

Par ailleurs, le Gouvernement souhaite engager une démarche de simplification et de rétablissement de l’équité entre les assurés au regard des principes du cumul emploi-retraite (CER). Un récent rapport de l’inspection générale des affaires sociales souligne que la confusion des textes normatifs conduit un retraité sur cinq reprenant une activité (soit 100 000 personnes en 2011) à se créer des nouveaux droits à retraite, alors même qu’ils sont déjà retraités. La coexistence de différentes règles, associées à de nombreuses exceptions, nuit à la compréhension globale du dispositif ainsi qu’à l’accès de tous les assurés au CER.

La réforme permet de supprimer cette inégalité entre assurés : elle généralise le principe selon lequel les cotisations d’assurance vieillesse versées par un assuré retraité constituent des cotisations de solidarité.

2.2.3. Améliorer les droits à retraite des femmes, des jeunes actifs et des assurés à carrière heurtée

Le Gouvernement entend moderniser et faire évoluer certaines règles de calcul des pensions, relevant du cœur du système ou des dispositifs de solidarité, afin d’améliorer l’équité globale de notre système de retraite et de mieux prendre en compte les évolutions économiques, sociales, professionnelles et familiales survenues depuis un demi siècle, en particulier en ce qui concerne la situation des femmes au regard de la constitution des droits à retraite, les conditions d’entrée dans la vie active des jeunes et la prise en compte des accidents de carrière dans le déroulement des parcours professionnels.

Le Gouvernement souhaite d’abord améliorer les droits à retraite des femmes en s’attachant à faire progresser l’égalité entre les femmes et les hommes. La réforme prévoit en particulier de mieux prendre en compte les trimestres d’interruption au titre du congé de maternité en permettant, à compter du 1er janvier 2014, de valider autant de trimestres que de périodes de 90 jours de congé maternité. En outre, dans le cadre d’un départ anticipé pour carrière longue, tous les trimestres de congé maternité – alors que deux trimestres sont jusqu’ici retenus depuis le décret du 2 juillet 2012 – seront réputés cotisés à compter du 1er janvier 2014. Le Gouvernement entend également favoriser la validation de trimestres pour les petits temps partiels, qui touchent essentiellement les femmes, en prévoyant notamment l’acquisition d’un trimestre avec 150 heures SMIC au lieu de 200 et le report de cotisations non utilisées pour valider un trimestre sur l’année suivante : un mois de travail payé au SMIC permettra de valider un trimestre de retraite. Enfin, le Gouvernement remettra au Parlement, dans les six mois suivant la promulgation de la présente loi, un rapport afin d’analyser l’impact des enfants sur la carrière et la pension des femmes et de proposer des pistes d’évolution des avantages familiaux de retraite, notamment les majorations de pensions.

Le Gouvernement entend ensuite améliorer les droits à retraite des jeunes. La réforme permet ainsi aux apprentis et aux jeunes en alternance de valider tous leurs trimestres d’apprentissage : l’assiette de cotisation des apprentis est révisée afin qu’ils puissent valider à l’avenir un nombre de trimestres de retraite correspondant à la durée de leur période d’apprentissage, quelle que soit leur rémunération. En outre, afin de renforcer leur confiance dans le système de retraite, le Gouvernement souhaite aider les jeunes à racheter leurs périodes d’études en leur proposant un tarif préférentiel de rachat de trimestres calibré pour cibler plus spécifiquement les assurés les plus jeunes et aux revenus les plus faibles lors du rachat.

La réforme proposée s’attache par ailleurs à améliorer les droits à retraite des personnes ayant eu des parcours professionnels morcelés ou marqués par la précarité. Afin de corriger les injustices liées aux carrières heurtées, le Gouvernement a souhaité étendre la validation des périodes de formation professionnelle et de chômage non indemnisé. Ainsi, à compter du 1er janvier 2015, l’ensemble des stagiaires de la formation professionnelle verront leurs trimestres de formation assimilés à des périodes d’assurance, dans les mêmes conditions que les périodes de chômage indemnisé.

De plus, la réforme vise à mieux prendre en compte les accidents de carrière pour les assurés à carrière longue. Le décret du 2 juillet 2012 a ajouté, au titre de la durée réputée cotisée pour les départs en carrière longue, 2 trimestres de chômage et 2 trimestres au titre de la maternité : à compter du 1er janvier 2014, seront réputés cotisés 2 trimestres supplémentaires de chômage et 2 trimestres d’invalidité.

2.2.4. Améliorer les petites pensions des non salariés agricoles

Conformément aux engagements du Président de la République, les pensions des anciens exploitants agricoles et de leurs conjoints, dont le niveau est particulièrement faible, seront revalorisées :

- garantie pour les chefs d’exploitation ayant effectué une carrière complète d’une pension minimale de 75% du SMIC par la création d’un complément de retraite complémentaire ;

- attribution de droits aux conjoints et aides familiaux au titre des années antérieures à la création du régime complémentaire ;

- suppression de la condition de durée de 17,5 ans pour bénéficier de la pension minimale ;

- extension du dispositif de « droits combinés » (permettant au conjoint survivant d’un chef d’exploitation décédé avant d’avoir demandé la liquidation de sa pension de cumuler les droits du défunt et les siens pour le calcul de sa retraite de base) et de la réversion du régime complémentaire obligatoire

2.2.5. Ouvrir des solidarités nouvelles en faveur des assurés handicapés et de leurs aidants

Prenant en considération les difficultés auxquelles font face les personnes handicapées sur le marché du travail, et notamment en fin de carrière, le Gouvernement a choisi de défendre des mesures visant à améliorer les droits à la retraite des personnes handicapées, en facilitant en particulier leur accès à la retraite anticipée. Ces élargissements des modalités d’ouverture de droits constituent tant une mesure de solidarité en faveur des assurés handicapés, qu’une simplification, gage d’une plus grande intelligibilité de notre système de retraite.

Le Gouvernement a par ailleurs souhaité renforcer les solidarités en faveur des aidants familiaux.

L'investissement des familles dans la prise en charge de leurs proches handicapés ou en perte d’autonomie est important et les éloigne parfois durablement du marché du travail et réduit par là même leurs droits à retraite. Des mesures favorables existent déjà : le Gouvernement a toutefois souhaité les renforcer de deux manières :

- d’une part en supprimant la condition de ressources requise pour l’affiliation gratuite et obligatoire à l’assurance vieillesse des parents au foyer (AVPF), qui permettra de ne plus priver de droits à retraites certaines personnes qui réduisent ou interrompent leur activité pour prendre soin d’une personne handicapée ou en perte d’autonomie ;

- d’autre part en créant une majoration de durée d’assurance pour les aidants familiaux en charge d’un adulte lourdement handicapé, à l’image du dispositif de majoration de durée d’assurance pour enfant handicapé (majoration d’un trimestre par période de trente mois de prise en charge à temps complet et dans la limite de 8 trimestres).

2.3. Simplifier le système et renforcer sa gouvernance

2.3.1. Simplifier l’accès des assurés à leurs droits

Les Français connaissent mal leur système de retraite, car il est complexe et peu accessible. Le Gouvernement a donc choisi de mettre en œuvre une réforme des retraites qui ne s’occupe pas uniquement des équilibres financiers mais intègre également la question de l’usager face au système de retraite.

Les mesures de simplification proposées dans cette réforme prennent acte du constat renouvelé de la complexité du système de retraite et ont pour objet de faciliter l’accès aux droits pour les usagers : la liquidation de la retraite combine aujourd’hui une complexité normative et la nécessité de produire, au moment de la liquidation, des documents relatifs au début de la période d’activité.

La Gouvernement réaffirme d’abord l’importance du droit à l’information des assurés et a entendu renforcer la lisibilité du système de retraite, en intervenant sur les trois étapes des relations des assurés et des régimes de retraite :

- avant la liquidation : la réforme vise à simplifier l’accès des assurés à leurs droits, en poursuivant les efforts engagés en matière de droit à l’information et en proposant la création d’un nouveau service aux assurés, en ligne, leur donnant accès à tout moment à leurs informations retraite. Ce compte unique de retraite permettra d’avoir une vision consolidée, à jour, de la carrière de chaque assuré, en regroupant l’ensemble des informations sur les droits acquis sur l’ensemble de leur carrière, pour tous les régimes ;

- au moment de la liquidation : le Gouvernement prévoit la création d’une demande unique de retraite en ligne avec une déclaration préremplie et souhaite encourager le développement d’accueil unifiés inter-régimes ainsi que des mutualisations renforcées entre régimes dans le but d’offrir aux assurés un service de meilleure qualité ;

- une fois la pension liquidée : la réforme vise à simplifier et à faciliter les démarches du retraité dans l’utilisation du compte unique  de retraite pour lui permettre d’avoir accès à l’ensemble de ses pensions de retraite, de retrouver tous les documents et formulaires utiles et de déposer les informations nécessaires aux caisses.

La démarche de simplification présuppose également une coordination des régimes de base et des régimes complémentaires. Piloter une telle démarche interrégimes est un projet à la fois ambitieux et complexe et le Gouvernement propose en conséquence de créer une structure de pilotage inter-régime, en charge de ces développements. Cette structure inclura l’ensemble des régimes pour produire les outils de simplification nécessaires à la bonne relation de l’usager avec le système de retraite.

Par ailleurs, le Gouvernement entend réduire les écarts de situation entre les poly-pensionnés et des mono-pensionnés. Les régimes alignés ont des règles de calcul de la pension extrêmement proches ; pourtant, ils calculent de manière indépendante, sur la base des droits acquis en leur sein, les pensions de leurs assurés. Cette situation conduit, à effort contributif égal, à des montants de pensions différents entre assurés mono-pensionnés et assurés poly-pensionnés, dans des régimes pourtant à règles proches. Afin de permettre un traitement équitable entre mono et poly-pensionnés, la réforme renforce la coordination entre régimes et met en place pour les poly-pensionnés un calcul unique de la pension relevant du régime général et des régimes alignés.

Une autre mesure importante de simplification à laquelle le Gouvernement est très attaché interviendra : il s’agit de diminuer le nombre de poly-pensionnés, en permettant de faire servir, par le régime principal, la petite pension qu’aurait dû verser un autre régime. Cette mesure permet d’éviter les versements en capital, qui réduisent le pouvoir d’achat des poly-pensionnés, et évite aux assurés d’être en contact avec plusieurs régimes, parfois pour des montants de pension modestes.

2.3.2. Améliorer la gouvernance et le pilotage des caisses de retraite

Le Gouvernement entend agir de manière ambitieuse pour améliorer la gouvernance générale du système de retraite. Outre le mécanisme spécifique de pilotage visant à garantir le redressement des régimes de retraite dans la durée et la mise en place d’une structure interrégimes visant à porter les chantiers de simplification de la relation de l’usager avec sa caisse de retraite, la réforme met en œuvre d’importantes mesures visant à rénover le pilotage stratégique des régimes de retraite.

D’abord, et c’est là une condition essentielle qui a présidé à l’élaboration de ce projet de loi, le Gouvernement est soucieux de continuer à associer étroitement les partenaires sociaux à la conduite et au pilotage du système de retraite. C’est pourquoi le Gouvernement a prévu d’organiser, tous les ans, un débat sur les orientations de la politique des retraites dans la fonction publique avec les organisations syndicales de fonctionnaires.

Ensuite, le Gouvernement souhaite renforcer le rôle de la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole (CCMSA) dans la détermination de la stratégie de pilotage du régime, à l’image des autres régimes complémentaires professionnels (notamment ceux du Régime social des indépendants – RSI et de l’Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l’Etat et des collectivités publiques - IRCANTEC). Il prévoit en particulier une évolution des paramètres du régime sur les trois années à venir ainsi que la mobilisation de leviers supplémentaires de pilotage pour garantir l’équilibre de long terme du régime.

Par ailleurs, guidé par le souci de la transparence et de la convergence, le Gouvernement a souhaité réformer la CNAVPL de façon à renforcer ses liens avec l’Etat et à lui donner davantage d’outils pour moderniser la gestion des retraites des professionnels libéraux.

Dans ce même esprit, et afin de sécuriser et garantir pour l’avenir le versement des rentes pour les personnes en ayant acquis le droit en achevant leur carrière dans l’entreprise, le Gouvernement souhaite que les régimes de retraite supplémentaires gérés en interne par les entreprises soient externalisées auprès d’un organisme assureur, en laissant aux entreprises un délai suffisant pour se mettre en conformité avec le nouveau droit.

Enfin, compte tenu du fait que les régimes de retraite de Mayotte et de Saint-Pierre-et-Miquelon sont régis par des textes spécifiques, le Gouvernement a prévu une habilitation à prendre par ordonnance les mesures d’harmonisation nécessaires afin que la présente réforme puisse être étendue à ces deux régimes.

III. Présentation de l’impact financier global de la réforme

3.1. Des besoins de financement importants

Ces évolutions démographiques se traduisent par des déficits notables aujourd’hui, et des besoins de financement accrus demain. S’y ajoutent les effets de la crise économique, qui pèse sur les ressources des régimes.

Sous l’effet de ces trois facteurs, notre système de retraite serait confronté, en l’absence de réforme, à un déficit important. En 2020, le déficit des régimes de retraite de base (CNAV, régimes non équilibrés par subvention et FSV) atteindrait ainsi 7,6 Mds€. Le déficit s’élèverait à 13,0 Mds€ en 2040. Pour l’ensemble des régimes de retraite, de base et complémentaires, le déficit projeté par le COR est de 20,9 Mds€ en 2020 et 28,9 Mds€ en 2040. En tenant compte de l’accord conclu au printemps 2013 par les partenaires sociaux relatif aux régimes complémentaires ARRCO-AGIRC, et des évolutions des hypothèses économiques à court terme, ce déficit serait de 20,7 Mds€ en 2020 et 26,6 Mds€ en 2040.

Pour revenir à une situation d’équilibre tout au long de la trajectoire, la réforme propose des mesures différentes selon l’horizon considéré, de court ou de long terme. Ces mesures permettent d’assurer l’équilibre du régime général et des régimes de base qui ne sont pas équilibrés par une subvention de l’employeur ou de l’Etat. Elles contribuent également au redressement des régimes complémentaires, gérés par les partenaires sociaux, qui bénéficient des effets de la hausse de la durée dans les régimes de base.

Ces mesures concernent tous les régimes et tous les assurés. Elles réduisent également le déficit des régimes de retraite des fonctionnaires et des régimes spéciaux équilibrés par subvention.

Au-delà, il convient de rappeler que le besoin de financement restant à l’horizon 2020 pour ces régimes est assuré par les efforts de maîtrise de dépense de l’Etat. En effet, les pensions du régime des fonctionnaires sont financées directement par l’Etat et intégrées, à ce titre, à la norme de dépense, qui fait l’objet d’un gel en volume. La progression des dépenses de pension est donc compensée par des efforts sur d’autres dépenses. Il s’agit d’un effort réel réalisé chaque année dans le cadre de la préparation du budget général, qui n’est pas pris en compte dans les projections du COR, qui ne portent que sur le système de retraite.

Les régimes complémentaires, sont gérés par les partenaires sociaux. Les partenaires sociaux ont démontré au printemps leur capacité à prendre des mesures permettant de rétablir les comptes de ces régimes. Il leur appartiendra de prendre les mesures adaptées pour assurer, en complément des mesures de long terme décidées par le Gouvernement, l’équilibre à long terme de ces régimes.

3.2. Mesures de court terme assurant l’équilibre en 2020

Trois mesures principales permettront de résorber en 2020 le déficit du régime général, du FSV et des régimes de base non équilibrés par subvention.

Premièrement, la hausse des taux de cotisation vieillesse déplafonnées se traduira par une recette supplémentaire pour ces régimes de 4,4 Md€ en 2020 et 6,4 Md€ en 2040. Cette hausse, qui s’amorcera en 2014, concernera à la fois les parts salariale et patronale. Après une augmentation de 0,15% en 2014 chacune, ces taux de cotisation s’accroîtront de 0,05% par an entre 2015 et 2017. Pour l’ensemble des régimes de base, les effets des hausses de cotisations seront de 4,6 Mds€ en 2020 et 6,8 Mds€ en 2040.

L’effort de rééquilibrage portera également sur les retraités, dont les majorations de pensions de 10% au titre de l’éducation de trois enfants ou plus ne feront désormais plus l’objet d’une exonération d’impôt sur le revenu, mais seront fiscalisées. Cette recette fiscale s’élèvera à 1,3 Md€ en 2020 et 1,7 Md€ en 2040.

Enfin, la troisième mesure d’équilibrage de court terme est une mesure d’économie sur la dépense. La revalorisation annuelle des pensions (qui sont indexées sur l’évolution des prix à la consommation hors tabac) serait reportée au 1er octobre (contre le 1er avril actuellement). Cette mesure réduira le besoin de financement de ces régimes de 1,4 Md€ en 2020 et 2 Md€ en 2040, pour les régimes de base qui ne sont pas équilibrés par subvention. Pour l’ensemble des régimes de base, l’effet de cette mesure sera de 1,9Mds€ en 2020 et 2,6Mds€ en 2040.

3.3. Mesures de long terme assurant l’équilibre à horizon 2040

Une augmentation de la durée d’assurance à partir de 2020 permettra de corriger la trajectoire sur le long terme. Au rythme d’un trimestre toutes les trois générations, cette hausse portera la durée d’assurance requise pour un départ à taux plein à 43 ans en 2035 pour la génération 1973. L’économie générée par cette mesure pour le régime général et les régimes de base non équilibrés par subvention sera de 5,6 Md€ en 2040.

Son impact sur l’ensemble des régimes de retraite, y compris les régimes équilibrés et les régimes de retraite complémentaires, s’élève quant à lui à 10,4 Md€ à horizon 2040.

Au total, les mesures de redressement de court et de long terme s’élèvent à 8,1 Mds€ en 2020 et 21,6 Mds€ en 2040 sur le champ de l’ensemble des régimes de retraite.

3.4. Mesures de justice

Les dispositifs d’équilibrage du système de retraite s’accompagnent d’un ensemble de mesures de justice.

En premier lieu, sera créé un compte personnel de prévention de la pénibilité, mobilisable pour de la formation, un passage à temps partiel, ou des trimestres de majoration de durée d’assurance pour la retraite. Avec 18,2% des actifs concernés, le coût de cette mesure est estimé à 500 M€ en 2020 et 2,5 Md€ en 2040. Le financement du dispositif reposera sur une contribution de l’ensemble des entreprises et une cotisation additionnelle demandée à celles dont les salariés sont exposés, dont le rendement est estimé à 500 M€ en 2020 et 800 M€ en 2040.

En second lieu, un ensemble de mesures en faveur des jeunes, des femmes, des carrières heurtées et des petites pensions corrige des situations individuelles particulières au regard des droits à la retraite. Ces mesures se traduiront à la fois par des dépenses nouvelles et des recettes supplémentaires pour les régimes, pour un coût net nul jusqu’en 2020, qui devrait ensuite atteindre 400 M€ en 2030 et 1,3 Md€ en 2040.

Enfin, un ensemble de mesures agricoles constituera un bloc équilibré sur la période, avec une dépense intégralement financée, estimée à 200 M€ en 2020 et à 300 M€ en 2040.

3.5. Trajectoire financière globale

L’impact de la réforme sur le déficit de l’ensemble des régimes de retraite, de base et complémentaire, est présenté dans les tableaux ci-dessous.

Tous les montants sont exprimés en Md€ constants 2011 

2014

2020

2030

2040

Déficit de l'ensemble des régimes de retraite - projections du COR

-17,7

-20,9

-26,1

-28,9

Après prise en compte de l'accord ARRCO - AGIRC de 2013 et révision des hypothèses économiques de court terme

-19,1

-20,7

-24,2

-26,6

         

Impact de la réforme des retraites sur l’ensemble des régimes

         

Mesures de redressement à court moyen terme

(impact tous régimes)

4,1

8,0

9,6

11,3

• Retraités

2,0

3,2

3,7

4,2

Report indexation au 1/10

0,8

1,9

2,2

2,6

Fiscalisation des majorations de pension

1,2

1,3

1,5

1,7

• Salariés : Hausse cotisations 0,15% en 2014 et de 0,05 point de 2015 à 2017

1,1

2,3

2,8

3,4

• Entreprises : Hausse cotisations 0,15% en 2014 et de 0,05 point de 2015 à 2017

1,1

2,3

2,8

3,4

• Economies de gestion

 

0,2

0,3

0,3

         

Mesure d'allongement de la durée d'assurance après 2020

(impact tous régimes)

 

0,0

5,4

10,4

Total des mesures de redressement à court et long terme

(impact tous régimes)

4,1

8,1

15,0

21,6

dont en économies

0,8

1,9

6,7

11,6

dont en recettes

3,3

6,2

8,3

10,1

         

Mesures de justice

-0,2

-0,7

-2,7

-4,1

Mesures Jeunes, femmes, carrières heurtées et petites pensions

0,0

0,0

-0,4

-1,3

Mesures agricoles

-0,2

-0,2

-0,3

-0,3

Mesure pénibilité

 

-0,5

-2,0

-2,5

         

Pénibilité, financement spécifique

 

 

 

 

Cotisation à la charge des entreprises exposant à la pénibilité

 

0,5

0,5

0,8

Financement mutualisé (à déterminer)

 

 

 

 

         

Mesures agricoles financement

0,2

0,2

0,3

0,3

Impact net des mesures

4,1

8,1

13,1

18,6

Déficit de l'ensemble des régimes de retraite après réforme et avant équilibrage des régimes de l’Etat ou équilibrés par subvention

-15,0

-12,7

-11,2

-7,9

Déficit de l'ensemble des régimes (hors AGIRC ARRCO) après réforme et équilibrage des régimes de l’Etat ou équilibrés par subvention

-5,1

-0,4

0,9

0

Déficit de l'ensemble des régimes (y.c. AGIRC ARRCO) après réforme et équilibrage des régimes de l’Etat ou équilibrés par subvention

-9,4

-4,8

-5,9

-5,8

Soldes des régimes avant et après réforme

Régimes de bases non équilibrés par subvention (CNAV, MSA, RSI, CNRACL, FSV…)

Tous les montants sont exprimés en Md€ constants 2011 

2014

2020

2030

2040

Déficit des régimes de base (CNAV, FSV, régimes non équilibrés par subvention)

-8,8

-7,6

-8,7

-13,0

Déficit des régimes de base CNAV, FSV, et autres régimes non équilibrés par subvention après réforme

-5,0

-0,3

+0,9

0,0

Régimes de l’Etat ou équilibrés par subvention (RATP, Mines, SNCF)

La présentation du déficit du régime des pensions de l’Etat et des régimes spéciaux dont il assure l’équilibre par une subvention est conventionnelle (déficit « apparent », en réalité comblé par l’Etat) mais révèle une situation démographique plus favorable à moyen-long terme. Les effets de la réforme se traduiront par ailleurs par une réduction de ce déficit conventionnel à horizon 2040. L’équilibrage de ces régimes est assuré dans le cadre de la mise en œuvre de l’encadrement de l’évolution des dépenses de l’Etat (norme de dépense « 0 volume » dont le respect permet dès 2014 l’équilibrage des régimes).

Tous les montants sont exprimés en Md€ constants 2011 

2014

2020

2030

2040

Déficit « apparent » des régimes de l’Etat ou équilibrés par subvention, avant prise en compte de l’impact de la réforme

-5,9

-8,7

-7,7

-4,4

Déficit « apparent » des régimes de l’Etat ou équilibrés par subvention, après prise en compte de l’impact de la réforme et avant effort de l’Etat

-5,6

-7,9

-6,3

-2,1

Equilibrage des régimes de l’Etat ou équilibrés par subvention (norme de dépense)

+5,6

+7,9

+6,3

+2,1

Régimes complémentaires

Les régimes complémentaires sont gérés par les partenaires sociaux. Ces derniers ont décidé le 7 mars 2013 des mesures de redressement applicables jusqu’à 2017. Le Gouvernement leur fait confiance pour prendre les mesures adaptées pour assurer, avec les mesures de long terme décidées par le Gouvernement, l’équilibre à long terme de ces régimes.

Tous les montants sont exprimés en Md€ constants 2011 

2014

2020

2030

2040

Déficit des régimes complémentaires après accord AGIRC ARRCO du 7 mars 2013 et avant prise en compte de l’impact de la réforme

-4,3

-4,4

-7,8

-9,1

Déficit des régimes complémentaires après prise en compte de l’impact de la réforme

-4,3

-4,4

-5,8

-5,8

IV. Options et dispositifs retenus

4.1. Article 1 : Principes et objectifs de l’assurance vieillesse

Cet article permet de réaffirmer avec solennité, dans le premier chapitre du code de la sécurité sociale, consacré à l’organisation de la sécurité sociale, les grands objectifs du système de retraite par répartition. Il reprend pour partie ceux présents dans l’actuel article L. 161-17A du même code (abrogé par ce même article premier), en plaçant toutefois les dispositions relatives à l’intelligibilité du système dans l’article relatif au droit à l’information (article 26 du présent texte).

La rédaction des principes et finalités de l’assurance vieillesse est ainsi clarifiée, ce qui facilite le renvoi qui est fait à ces mêmes objectifs dans l’article 3 du présent projet de loi, relatif au pilotage du système de retraite.

Titre Ier - Assurer la pérennité des régimes de retraite

Compte tenu de la dégradation de la situation financière du régime de retraite, le Gouvernement entend proposer une réforme garantissant la pérennité du système de retraite en retenant trois axes d’intervention permettant d’influer sur l’équilibre des régimes de retraite à court terme et dans la durée ainsi que sur le pilotage et le suivi du système.

Les mesures permettant de consolider la situation financière à l’horizon 2020 afin de résorber les déficits auxquels notre système est aujourd’hui confronté visent à répartir l’effort à consentir sur les actifs, les entreprises et les retraités.

Comme indiqué ci-dessus il est prévu que les cotisations des actifs et des entreprises aux différents régimes de base seront augmentées dans la même proportion, de façon mesurée, selon des modalités fixées par décret. La hausse sera progressive sur quatre ans : 0,15 point pour les actifs et les employeurs en 2014, puis 0,05 pour les trois années suivantes. Au final en 2017, l’accroissement aura été de 0,3 point pour les actifs et 0,3 point pour les employeurs.

La contribution des retraités reposera quant à elle sur deux mesures :

- l’inclusion des majorations de pensions des retraités ayant élevé trois enfants ou plus dans l’assiette de l’impôt sur le revenu, comme c’est le cas pour le reste des pensions : cette mesure sera examinée dans le cadre du projet de loi de finances pour 2014 ;

- le décalage de six mois de la revalorisation des pensions prévue à l’article 4 du présent projet de loi, à l’exception du minimum vieillesse, la revalorisation de l’allocation de solidarité aux personnes âgées étant maintenue au 1er avril de chaque année.

Ces mesures de redressement à court terme s’accompagneront d’une mesure permettant de faire face au défi que constitue à long terme l’allongement de l’espérance de vie en proposant une évolution modérée et progressive de la durée d’assurance requise pour l’obtention d’une retraite à taux plein, prévue à l’article 2 du présent projet de loi. Cette mesure qui consiste à augmenter la durée de cotisation d’un trimestre toutes les trois générations permet de donner une visibilité aux actifs et futurs actifs sur leur condition de départ à la retraite sans impacter les actifs proches de la retraite, l’augmentation de l’âge prenant effet en 2020. Ces dispositions permettront ainsi de garantir la pérennité financière du système dans la durée.

Parallèlement à ces mesures et afin de garantir le redressement des régimes, d’apporter davantage de visibilité et de renforcer la confiance de toutes les générations, un mécanisme de pilotage est instauré permettant de s’assurer en continu du respect des objectifs, financiers et sociaux, du système de retraite et de proposer si nécessaire des mesures permettant de corriger d’éventuels écarts à ces objectifs. Le dispositif de pilotage proposé, prévu à l’article 3, vise à donner, au-delà du respect de la trajectoire financière, des garanties sur le respect des grands objectifs du système de retraite tels que le taux de remplacement, le niveau relatif de pension des femmes, etc. L’augmentation de la durée d’assurance fera aussi l’objet d’un suivi dans le cadre du pilotage, afin de s’assurer notamment qu’elle reste en ligne avec les évolutions de l’espérance de vie et conduit à une durée de retraite satisfaisante.

4.2. Article 2 – Détermination de la durée d’assurance tous régimes

4.2.1. Diagnostic et objectif poursuivi

Selon les projections du Conseil d’orientation des retraites (décembre 2012), le nombre de retraités devrait fortement progresser, passant de 15,1 millions (en 2011) à 21,8 millions (en 2060) sous un double effet :

- L’arrivée à la retraite des générations du « baby-boom » (personnes nées entre 1946 et 1970) ;

- L’allongement de l’espérance de vie à 60 ans, qui devrait continuer à progresser d’une année tous les 10 ans jusqu’en 2060.

Ce mouvement entraîne une érosion du ratio démographique, qui mesure, dans notre système de retraite par répartition, la couverture des pensions par les cotisations des actifs. S’il y a aujourd’hui près de 5 retraités pour 10 actifs, ce chiffre devrait passer à 7 retraités pour 10 actifs à l’horizon 2035 selon le scénario « central » (scénario B) des projections du COR établies en décembre 2012.

Pour répondre à ce défi démographique, l’allongement de la durée d’assurance constitue la réponse la plus efficace : elle réduit la dégradation du ratio démographique, tout en portant sur l’ensemble des assurés, quel que soit leur régime, leur statut ou leur âge d’entrée dans la vie active. Elle est plus juste en outre qu’une mesure qui modifierait l’âge d’ouverture des droits, car elle permet de tenir compte des carrières longues afin de ne pas pénaliser les assurés qui ont commencé à travailler jeunes.

Le I de l’article 5 de la loi du 21 août 2003 a défini une règle d’évolution de la durée d’assurance requise pour le taux plein, « de manière à maintenir constant, jusqu’en 2020, le rapport constaté [en 2003] entre [la durée d’assurance pour le taux plein] et la durée moyenne de retraite ». Dans sa lignée, l’article 17 de la loi du 9 novembre 2010 a fixé une procédure annuelle de détermination de la durée d’assurance, avec pour chaque génération un décret intervenant avant la fin de l’année où elle atteint 56 ans. La dernière durée d’assurance fixée dans ce cadre concerne la génération 1956 (41 ans ½, soit 166 trimestres). Le COR donnera prochainement un avis sur la durée d’assurance pour la génération 1957 et de premières estimations permettant de prévoir ce que pourrait être la durée d’assurance de la génération 1958. Le mécanisme prévu en 2003 comprenait en outre une clause de revoyure en 2020, soit pour la génération 1960 (qui devrait atteindre 41,75 ans de durée d’assurance).

Le présent article modifie cette règle d’évolution de la durée d’assurance au terme du mécanisme prévu en 2003 (donc après 2020, soit à compter de la génération 1961, même si par souci de clarté, elle reprend les durées d’assurance à compter de la génération 1958). La loi déterminera en effet durablement la durée d’assurance requise pour liquider une pension sans décote : ce faisant, elle remplace un décret annuel, peu favorable à l’anticipation de leur situation par les assurés, par une mesure pérenne et directement lisible par les assurés.

La durée d’assurance requise pour le taux plein, à l’extinction du dispositif de la loi de 2003 (donc à compter de la génération 1961) augmentera, de façon très progressive, d’un an. Elle sera portée de 42 ans (génération 1961) à 43 ans (génération 1973), selon le calendrier suivant :

Génération

Durée taux plein en trimestres

Durée taux plein en annuités

Date de liquidation de la pension (à 62 ans)

 

1956

166

41,5

2018

Durée connue

1957

166

41,5

2019

Durée qui sera fixée dès 2013, par décret pris en application de la loi de 2003

1958

167

41,75

2020

Durée d’assurance qu’il est proposé de fixer à l’avance dans la loi.

1959

167

41,75

2021

1960

167

41,75

2022

1961

168

42

2023

1962

168

42

2024

1963

168

42

2025

1964

169

42,25

2026

1965

169

42,25

2027

1966

169

42,25

2028

1967

170

42,5

2029

1968

170

42,5

2030

1969

170

42,5

2031

1970

171

42,75

2032

1971

171

42,75

2033

1972

171

42,75

2034

1973 et après

172

43

2035

Cette augmentation de la durée d’assurance :

- concernera l’ensemble des assurés de tous les régimes ;

- conduit à répartir de façon équilibrée les gains d’espérance de vie entre activité et retraite : entre 2013 et 2035, l’espérance de vie à 60 ans aura augmenté de plus de 2 ans, quand la durée d’assurance sera passée de 41,5 ans à 43 ans ; les retraités profiteront donc plus longtemps de leurs pensions ;

- évite tout changement de cap brutal : sont concernés les assurés nés à compter de 1961, qui liquideront leurs pensions dans 10 ans ; surtout, la règle est connue et fixée à l’avance, ce qui favorise la bonne information des assurés.

A compter de 2035, le choc démographique lié au « papy boom » aura été dépassé, ce qui permet de maintenir un régime durablement équilibré sans hausse de la durée d’assurance : toutes les générations nées après 1972 devront justifier de 43 annuités de durée d’assurance pour liquider leurs pensions de retraite sans décote, quel que soit leur régime d’affiliation.

4.2.2. Options possibles

Trois autres options auraient pu être envisagées :

- Le prolongement, au-delà de 2020, de la règle instituée en 2003. Ce prolongement aurait conduit à maintenir l’incertitude relative à la durée d’assurance requise par génération, puisque la loi de 2003 prévoyait que cette durée était connue seulement lorsqu’une génération atteignait 56 ans. En outre, un tel prolongement aurait conduit à poursuivre l’augmentation de la durée d’assurance en fonction de l’espérance de vie au-delà des besoins de financement du système de retraite : le présent article propose d’arrêter en 2035, et à 43 annuités, la hausse de durée.

- Une augmentation plus rapide (au rythme d’1 trimestre toutes les deux générations) de la durée d’assurance requise, plafonnée à 44 annuités, comme l’envisageait le rapport remis par Yannick Moreau au premier ministre. Cette solution aurait toutefois conduit à dépasser les besoins de financement requis par le papy-boom – compte tenu des nouvelles recettes et de l’équilibre général de la réforme.

- Un report de l’âge légal d’ouverture des droits à pension de vieillesse : le gouvernement a écarté cette option qui aurait pénalisé principalement les assurés qui ont une durée d’assurance importante et ont donc commencé à travailler tôt. En effet, un report par exemple à 63 ans de l’âge légal aurait signifié, pour un assuré qui a commencé à 20 ans, de devoir décaler son départ d’un an alors même qu’il justifiait déjà du taux plein. L’assuré à carrière longue, qui correspond souvent à un profil moins qualifié, et donc moins rémunéré, aurait dû, sans en tirer aucun bénéfice, travailler un an de plus.

4.2.3. Impacts de la mesure

L’augmentation de la durée d’assurance pour les générations à venir sera codifiée dans le code de la sécurité sociale contrairement au dispositif précédent. Elle concernera les assurés de tous les régimes légalement obligatoires de retraite de base.

Cette mesure, en relation avec la mobilisation du gouvernement en faveur de l’emploi des seniors, par l’intermédiaire des contrats de génération d’une part, des dispositions du chapitre II du titre II d’autre part, aura un impact positif sur le taux d’emploi des seniors.

D’autre part, la mesure aura un effet positif sur le taux d’emploi des seniors, en raison du maintien en emploi des seniors suite à l’allongement de la durée d’assurance : au régime général, 60 000 assurés supplémentaires cotiseraient en 2030 (100 000 à l’horizon 2040).

Organismes impactés

(régime, branche, fonds)

Impact financier en droits constatés sur le solde des régimes

(en M€ 2011)

Coût ou moindre recette (signe -)

Economie ou recette supplémentaire (signe +)

2014

2020

2030

2040

Tous régimes de base et complémentaires

   

+ 5 400

+ 10 400

Tous régimes de base non automatiquement équilibrés

   

+ 2 700

+ 5 600

Source : Modèle PRISME pour la CNAV et, pour les autres régimes, DSS à partir des calculs du COR (sur la base du scénario central).

4.3. Article 3 – Règles et dispositifs de pilotage

4.3.1. Diagnostic et objectif poursuivi

La loi du 9 novembre 2010 a créé le Comité de pilotage des régimes de retraite (Copilor), chargé de « veiller au respect des objectifs du système de retraite par répartition » et de rendre chaque année un avis sur la situation financière des régimes de retraite. Il ne s’est réuni qu’une fois en formation plénière (en 2011) et n’a jamais rendu d’avis.

Le rapport de la commission Moreau a identifié les carences actuelles du système et proposé quelques principes directeurs devant guider la construction d’un pilotage efficace :

- un pilotage annuel – par opposition aux rendez-vous quadriennaux mis en œuvre par la réforme des retraites de 2003 avant leur abrogation en 2010, qui présentent un effet anxiogène et dont la périodicité peut percuter les autres calendriers politiques ;

- un pilotage permanent, qui ne fixe pas d’horizon limité (à la différence de la réforme des retraites de 2010 qui limitait l’objectif de rééquilibrage financier à l’horizon 2018) ;

- un pilotage pleinement opérationnel, ce qui conduit notamment à exclure la création d’instances pléthoriques et mêlant des acteurs disparates, comme l’était le Copilor qui associe les administrations, les régimes de retraites, les partenaires sociaux et les parlementaires et interdit de facto l’élaboration de propositions concrètes. Une expertise technique et indépendante doit pouvoir s’exercer en amont du dialogue social et du débat parlementaire. Ce rôle ne peut être confié au COR, qui est une instance de dialogue créée pour dégager des diagnostics partagés mais qui ne peut endosser un rôle d’alerte ou de proposition vis-à-vis des pouvoirs publics ;

- un pilotage qui ne se limite pas aux trajectoires financières mais associe au suivi de la trajectoire financière celui d’indicateurs concernant le niveau des retraites, les équilibres hommes/femmes, l’emploi des seniors ou la lisibilité du système.

Pour permettre un pilotage annuel efficace de l’ensemble des régimes, une nouvelle instance, le « comité de surveillance des retraites », sera désignée comme pivot du système de pilotage des retraites. Il s’agira d’une instance resserrée, comportant 5 membres et composée exclusivement de personnalités qualifiées nommées à raison de leur expérience ou de leurs compétences en matière de retraites, pour une durée suffisamment longue (5 ans). Le comité sera indépendant, nommé par décret et rattaché directement au premier ministre. Son Président sera nommé par décret en conseil des ministres.

§ En amont, un examen annuel des écarts de pension entre hommes et femmes et des principaux paramètres du système des retraites

Le I du présent article prévoit qu’un état des lieux annuel du système de retraites et de son adéquation à ses principaux objectifs sera réalisé chaque année et objectivé par des indicateurs de suivi définis au niveau réglementaire, en lien étroit avec les objectifs assignés au système de retraite tels qu’ils ont été identifiés à l’article 1 du présent projet de loi. Cet état des lieux sera rendu public avant le 15 juin et sera confié au COR au cours d’une séance annuelle consacrée au suivi de ces indicateurs. Cette mission pourra s’intégrer sans difficulté à ses missions actuelles.

Le Comité de surveillance, en s’appuyant en particulier sur ce rapport, sera chargé de suivre annuellement les différences de pension entre les femmes et les hommes, afin de formuler notamment des propositions d’évolution des avantages familiaux de vieillesse. Le Comité devra en particulier analyser si ces derniers, qui impactent tant la durée d’assurance que le montant des pensions, sont toujours en adéquation avec les évolutions sociales, ou s’il convient de les faire progressivement évoluer afin de leur permettre de mieux remplir leurs objectifs.

§ Un mécanisme d’alerte et de recommandations

Dans le même avis que celui relatif aux écarts de pension entre femmes et hommes, le Comité de surveillance des retraites, dont la création et les missions sont définies au II de cet article, devra décider chaque année avant le 15 juillet s'il estime ou non qu'il convient de prendre des mesures de court terme ou de moyen/long terme afin d’assurer le respect des objectifs fixés par la loi pour le système de retraite. Le champ de ces recommandations pourra concerner également les dispositifs propres à la prise en compte de la pénibilité.

Le Comité de surveillance pourra solliciter l’appui technique du conseil d’orientation des retraites, des différentes administrations ou établissements publics de l’Etat ainsi que les organismes chargés de la gestion d’une régime de retraite, pour ses travaux, notamment en ce qui concerne la manière dont elles évaluent le maintien ou non des tendances observées sur les indicateurs de suivi. L’importance des sujets relatifs aux trajectoires financières et leur analyse justifie qu’il s’appuie également sur les documents produits par le Gouvernement en matière de projections économiques de moyen terme et d’effet sur les comptes publics (Programme de stabilité notamment).

S’il estime que l’assurance retraite s’éloigne significativement de ses objectifs, le comité devra assortir son avis de recommandations en termes de leviers d’action.

Mais, en sens inverse, si la situation économique ou de l’emploi s’améliore au-delà de la prévision, et que de ce fait les régimes de retraite retrouvent un niveau élevé de recettes, le comité de surveillance pourra proposer des mesures favorables, notamment une réindexation temporaire des pensions ou des salaires portés au compte sur les salaires.

De même, si la progression de l’espérance de vie à 60 ans ne progresse plus pendant plusieurs années, il pourra proposer de stabiliser la durée de cotisation.

¡ Les recommandations du Comité s’adressent à la fois au Gouvernement et au Parlement, mais aussi aux gestionnaires des régimes de retraite. Ses avis sont rendus publics.

¡ Le présent article prévoit dans le même temps que les recommandations pourront notamment porter sur l’utilisation des réserves du Fonds de réserve des retraites, si l’écart par rapport à la trajectoire de redressement financier, constaté par le Comité, est consécutif à une dégradation économique conjoncturelle. De ce fait, le FRR retrouve sa mission principale de fonds d’équilibrage des régimes, ce que prévoit le IV de cet article. Par ailleurs, en cas d’écart au redressement financier identifié comme structurel, le Comité pourra notamment proposer au Gouvernement de modifier les taux de cotisation d’assurance vieillesse, ou encore de faire évoluer la durée d’assurance requise par génération.

¡ Les recommandations du comité de surveillance des retraites ne pourront pas avoir pour effet de porter les grands paramètres du système de retraite en dehors de bornes préétablies. En particulier, ses recommandations ne pourront conduire à augmenter les taux de cotisation au-delà d’un plafond, ou à baisser le taux de remplacement (ratio entre revenus d’activité et pensions, défini par décret) en-deçà d’un plancher. Ce « tunnel » permettra d’encadrer les propositions afin de garantir, durablement, le respect et la soutenabilité des objectifs du système de retraite par répartition.

4.3.2. Impacts de la mesure

La mesure concernera l’ensemble des régimes obligatoires de retraite, de base et complémentaires. La définition des bornes maximales de taux de cotisation, et minimales de taux de remplacement sera fixée par décret ; le taux de remplacement de référence sera construit sur le fondement d’un ou plusieurs cas-type, fondés en particulier sur les travaux du Conseil d’orientation des retraites.

Les recommandations du Comité de surveillance des retraites n’auront pas d’effets juridiquement contraignants pour le Gouvernement, qui prendra ou proposera au Parlement les mesures d’ajustement nécessaires. Toutefois, compte tenu de sa composition et de l’importance de ses missions, les recommandations du Comité s’imposeront comme un élément essentiel du débat public, afin d’éviter que les réformes nécessaires ne soient ajournées. Surtout, le gouvernement sera tenu, comme le prévoit le V de l’article L. 114-4 du code de la sécurité sociale qu’il est proposé de créer, de rendre compte au Parlement, après concertation avec les partenaires sociaux, des suites qu’il entend donner à ces recommandations. Ce cercle vertueux s’achève l’année suivante : en cas d’alerte lancée par le Comité, il établira une évaluation du suivi de ses recommandations au plus tard dans le cadre de son avis annuel suivant.

Ce dispositif de pilotage constitue donc une innovation majeure, permettant de s’assurer du respect des objectifs assignés par la loi (article premier) à l’assurance vieillesse – qu’il s’agisse des objectifs de pérennité financière, sur lesquels repose la confiance des jeunes générations dans la retraite par répartition, ou des objectifs d’équité, fondateurs du pacte social.

Enfin, il est proposé par cet article de supprimer le Comité de pilotage des organismes de retraite (Copilor), ainsi que la Commission de garanties des retraites : ils sont de fait tous deux en sommeil.

4.4. Article 4 – Report de la date de revalorisation des pensions

4.4.1. Diagnostic et objectif poursuivi

§ Chaque année, les pensions des 15 millions de retraités sont revalorisées au 1er avril en fonction de l’inflation : ce dispositif est destiné à garantir le maintien du niveau de vie des retraités.

Le mode de revalorisation des pensions est prévu à l’article L.161-23-1 du code de la sécurité sociale ; il intègre :

- la prévision d’inflation pour l’année N retenue par la commission économique de la Nation qui s’est réunie avant le 15 avril de l’année N ;

- à laquelle s’ajoute un ajustement au titre de l’année N-1 ; cet ajustement est égal à l’écart entre le taux d’inflation établi à titre définitif par l’INSEE pour l’année N-1 et la prévision initiale pour cette même année ayant servi de base à la revalorisation effectuée l’année N-1.

Ce coefficient s’applique, par renvois, aux différents régimes de retraites, y compris les régimes spéciaux, ainsi qu’aux salaires reportés au compte retraite (L. 351-11 du code de la sécurité sociale) mais également à différentes prestations : pensions d’invalidité, rentes AT-MP, allocation de solidarité pour les personnes âgées (ASPA).

Pour les régimes de base, seul le régime des avocats (CNBF) établit le taux de revalorisation qui lui est applicable7.

Les régimes de retraite complémentaire (tous régimes) définissent la plupart du temps8 eux-mêmes les règles qui leurs sont applicables. Ainsi, l’Arrco et l’Agirc ont décidé en mars 2013 de sous-indexer les pensions de retraites complémentaires durant trois années consécutives (2013 à 2015 inclus), alors que les régimes complémentaires des professions libérales ont appliqué indifféremment une revalorisation moindre ou plus importante.

Tant le mode de calcul du coefficient de revalorisation que la date (1er janvier ou 1er avril) et les niveaux de normes ont évolué ces dernières années (niveau législatif ou réglementaire).

Historique des revalorisations des pensions depuis 2004 :

Date

Revalorisation

Inflation de l’année

Date

Revalorisation

Inflation de l’année

1er janvier 2004

1,7 %

2,1 %

1er avril 2009

1 %

0,1 %

1er janvier 2005

2 %

1,8 %

1er avril 2010

0,9 %

1,5 %

1er janvier 2006

1,8 %

1,6 %

1er avril 2011

2,1 %

2,1 %

1er janvier 2007

1,8 % 

1,5 %

1er avril 2012 

2,1 %

2 %

1er janvier 2008

1,1 %

2,8 %

1er avril 2013 

1,3 %

 

1er septembre 2008

0,8 % 

2,8 %

     

§ La mesure proposée (1° du I de l’article 4) conduit à décaler de 6 mois (du 1er avril au 1er octobre) la revalorisation des pensions, sans modifier le mécanisme de calcul. Les pensions de vieillesse des régimes de base resteront donc indexées sur l’inflation : le présent article maintient la garantie de pouvoir d’achat pour l’ensemble des retraités.

Le décalage dans le temps représente toutefois un effort demandé aux retraités, qui devront attendre 6 mois, en 2014, la revalorisation de leurs pensions. Cet effort doit être toutefois nuancé : la revalorisation d’avril 2013 a conduit, compte tenu de l’écart entre la prévision d’inflation pour 2013 et le tendanciel actuel, à sur-revaloriser les pensions. La revalorisation 2014 serait donc, en l’état actuel des données macro-économiques, relativement peu importante.

Ce report de six mois impactera tous les retraités (à l’exception de bénéficiaires de l’ASPA cf infra), mais l’effort consenti sera proportionnel à la pension de base : les retraités modestes seront sensiblement moins concernés. A titre indicatif, avec une revalorisation des pensions en 2014 de 0,9%, l’impact de ce décalage serait de 9 euros pendant 6 mois.

Il s’agit donc d’un effort mesuré demandé à l’ensemble des pensionnés, afin de participer au rééquilibrage de court terme de notre système d’assurance retraite. Cette mesure est ponctuelle : les années suivantes, les pensions seront revalorisées, selon les règles habituelles, tous les 12 mois. L’effort demandé aux pensionnés est donc indéniable, mais limité dans le temps et dans ses effets.

Cet effort demandé aux retraités répond à un souci d’équité, sans baisser les pensions ni remettre en cause les mécanismes d’indexation des pensions. Le gouvernement a écarté toute mesure de sous-indexation ou de gel des pensions ; cette mesure limitée dans son impact se justifie, comme le soulignait le rapport Moreau, par le fait que « le niveau de vie des retraités est aujourd’hui comparable à celui des actifs, sans que pèsent sur les premiers les risques en matière d’emploi et de pouvoir d’achat auxquels sont confrontés les seconds, et notamment les plus jeunes d’entre eux en cette période de crise et de croissance du chômage ».

§ Le report au 1er octobre obéit également à des logiques de cohérence macro-économique

 Actuellement, les pensions sont indexées en fonction d’une prévision spécifique d’inflation réalisée en mars par la Commission économique de la Nation. Le report au 1er octobre permettra de lier directement la revalorisation des pensions et les prévisions d’inflation publiées par le gouvernement dans le cadre de la préparation des lois financières (c’est l’objet du 2° du I de l’article) : au 1er octobre, la fiabilité de la prévision pour l’année est bien plus importante, ce qui limitera les rattrapages, parfois négatifs, l’année suivante.

§ L’effort demandé concerne les retraités ; il ne touche cependant ni les retraités les plus modestes, ni les bénéficiaires de pensions d’invalidité ou de rentes servies au titre des accidents du travail ou des maladies professionnelles.

Les II et III de l’article permettent de ne pas appliquer ce report au 1er octobre de la revalorisation au minimum vieillesse (Allocation de solidarité aux personnes âgées – ASPA), aux pensions d’invalidité de la fonction publique (II) et du régime général (III) et aux rentes AT-MP.

En effet, l’ASPA constitue un minimum social, et non une pension de vieillesse : il permet de compléter la pension en la portant à un montant minimal (787 € pour une personne seule par mois). Le présent article conserve donc pour l’ASPA la règle d’indexation actuelle : seules sont modifiés les renvois, pour séparer désormais la date de revalorisation du minimum vieillesse (1er avril) de celle des pensions (1er octobre).

A l’identique, les pensions d’invalidité et les rentes AT-MP seront, comme aujourd’hui, revalorisées au 1er avril. Il serait en effet injuste de demander aux bénéficiaires de ces prestations, sans lien avec la retraite, de participer à l’effort de consolidation financière de court terme des régimes d’assurance vieillesse. Pour cette raison, ces dispositifs, jusqu’ici indexés comme les pensions de vieillesse par renvoi direct à l’article L. 161-23-1 du code de la sécurité sociale, conserveront une revalorisation au 1er avril, par modification de l’article L. 341-6 du code de la sécurité sociale - ce qui conduit les prestations revalorisées comme les pensions d’invalidité (ASI, rentes AT-MP) à être également revalorisées, comme aujourd’hui, au 1er avril. Le II procède au même ajustement pour les pensions d’invalidité servies par les fonctions publiques, par ajustements du code des pensions civiles et militaires.

Ces modifications rédactionnelles et ces ajustements de renvois permettent donc de garantir que la mesure de décalage de la revalorisation des retraites sera sans impact pour les bénéficiaires du minimum vieillesse (ASPA) comme pour les bénéficiaires de prestations sans lien avec l’assurance vieillesse.

4.4.2. Options possibles

Une autre option aurait pu reposer sur une sous-indexation ou un gel des pensions pendant quelques années, éventuellement modulée en fonction du montant des pensions des assurés. Cette mesure alternative a été écartée pour trois raisons :

- Elle aurait certes procuré un rendement supérieur, mais aurait conduit à dégrader le montant des pensions, en mettant fin à la garantie de pouvoir d’achat que constitue l’indexation des pensions sur les prix.

- Elle aurait été très lourde en gestion, et peu compréhensible par les assurés, en raison des effets de seuil qu’elle aurait pu induire.

- Elle comportait un risque juridique au regard du principe d’égalité, pointé par le rapport remis par Y. Moreau au Premier ministre au printemps 2013.

4.4.3. Impacts de la mesure

Cet effort demandé aux assurés déjà retraités permet en 2014 une économie de 800 millions d’euros en 2014 pour l’ensemble des régimes de base obligatoires, de 2,6 milliards d’euros sur le moyen terme.

L’impact élevé de cette mesure est lié à un double effet :

0Elle repose sur une assiette très large : elle concerne tous les retraités, soit 23,7 millions de pensions, exception faite du minimum vieillesse, représentant environ 200 Md€ de dépenses annuelles ;

0Elle a des effets de long terme, liés au simple « rebasage » : le total des pensions servies en 2014 sera légèrement moins important que ce qu’il l’aurait été sans ce décalage. La courbe du montant des dépenses est donc légèrement décalée vers le bas, par rapport au scénario tendanciel établi par le COR.

Ce rebasage ne signifie pas la réitération de la mesure : les pensions, exception faite de 2014, seront revalorisées tous les 12 mois, en fonction de l’inflation.

Organismes impactés

(régime, branche, fonds)

Impact financier en droits constatés

(en M€ constants 2011)

Coût ou moindre recette (signe -)

Economie ou recette supplémentaire (signe +)

2014

2020

2030

2040

Décalage de la revalorisation au 1er octobre : tous régimes de base (hors ASPA)

+ 800

+ 1 900

+ 2 200

+ 2 600

Décalage de la revalorisation au 1er octobre : tous régimes de base non automatiquement équilibrés (hors ASPA)

+ 600

+ 1 400

+ 1 700

+ 2 000

Titre II – Rendre le système plus juste

Titre II - Chapitre Ier : Mieux prendre en compte la pénibilité au travail

Le chapitre 1er du titre II porte sur la prise en compte de la pénibilité au travail.

Du fait de leur exposition à des conditions de travail pénibles, certains salariés ont une espérance de vie et donc une durée de retraite réduite. Face à ces situations, la réponse passe avant tout par la prévention : l’enjeu est que les travailleurs bénéficient de protections lorsqu’ils sont exposés à des situations de travail pénibles, et qu’ils puissent sortir de ces situations avant que celles-ci n’aient entraîné des conséquences irréversibles sur leur santé.

Lors de la précédente réforme des retraites avaient seulement été prévues des possibilités de départ précoce pour les personnes justifiant d’un certain taux d’incapacité suite à un accident du travail ou à une maladie professionnelle. Or, les conséquences du travail pénible sur la santé ne sont pas nécessairement visibles immédiatement et les troubles ne se déclarent souvent que plus tard.

Suite aux propositions de la commission pour l’avenir des retraites, le Gouvernement a donc décidé de créer un « compte personnel de prévention de la pénibilité » qui permet de lier prévention et réparation.

Le chapitre 1er comporte ainsi six articles détaillant les modalités de fonctionnement et de gestion du compte personnel de prévention de la pénibilité, son financement, son articulation avec la fiche de prévention des expositions, comme avec les accords en faveur de la prévention de la pénibilité.

Le principe de ce compte repose sur l’attribution de points en cas d’exposition. Ainsi, tout salarié exposé à au moins un facteur de pénibilité (parmi les 10 définis à l’article D. 4121-5 du code du travail9) voit son compte crédité d’un point par trimestre d’exposition, ou de deux points en cas d’exposition à plusieurs facteurs de pénibilité, en fonction de seuils qui dépendent de l’efficacité des mesures de protection mises en place par l’employeur.

Le salarié peut ensuite utiliser ses points, soit pour suivre une formation lui permettant d’accéder à un emploi non pénible, soit pour travailler à temps partiel à la fin de sa carrière en conservant sa rémunération, soit enfin, pour partir à la retraite jusqu’à deux ans plus tôt que ce que le droit commun lui permettrait. Pour inciter à la prévention et à l’aménagement des carrières et des parcours professionnels, une partie des points acquis par le salarié devra être utilisée en vue d’une formation, en articulation étroite avec le compte personnel de formation.

C’est la CNAV qui gérera le dispositif, en s’appuyant sur le réseau des CARSAT, qui sont compétentes à la fois pour l’assurance retraite et pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles des salariés du secteur privé. Le présent chapitre prévoit ainsi que la CNAV enregistre au fur et à mesure les points du salarié correspondant aux données déclarées par l’employeur et est chargé de l’information du travailleur relatif aux points dont il dispose et aux utilisations possibles de ces points. La CNAV sera par ailleurs en charge des décaissements correspondant aux différentes modalités d’utilisation des points, et du contrôle de l’attribution des points. Les recours relatifs au compte personnel de prévention de la pénibilité seront du ressort du contentieux général de la sécurité sociale, avec des aménagements précontentieux spécifiques.

Pour ne pas compliquer la tâche des entreprises, ce sont les fiches de prévention de la pénibilité, créées en 2010, qui serviront de support à l’attribution des points par les employeurs.

Enfin, afin de mettre l’accent sur la prévention, le financement des nouveaux droits accordés aux salariés reposera sur une cotisation à deux étages : un socle payé par l’ensemble des entreprises, et une cotisation additionnelle appliquée aux seules entreprises exposantes. L’objectif de cette cotisation additionnelle est d’inciter les entreprises à réduire le niveau d’exposition de leurs salariés. Ces cotisations viendront abonder le fonds en charge du financement des droits liés au compte personnel de prévention de la pénibilité, créé par la loi.

Environ 20 % des salariés du secteur privé s’ouvriront ainsi des droits chaque année au titre du compte personnel de prévention de la pénibilité. La fonction publique dispose déjà de mécanismes spécifiques de prise en compte de la pénibilité sur une base collective, qui seront revus à l’occasion de la concertation qui va s’ouvrir en 2014, et ses agents10 ne sont donc pas dans le champ du nouveau compte, qui fonctionne sur une base individuelle. Il en va de même pour les salariés des entreprises privées affiliés à un régime spécial de retraite prenant déjà en compte la pénibilité.

Le compte sera mis en place à compter des expositions retracées au cours de l’année 2015. Pour les salariés déjà en fin de carrière exposés à la pénibilité, les points seront bonifiés afin de leur permettre de bénéficier de la réforme.

La mise en place du compte personnel s’inscrit dans le cadre d’un renforcement des actions et politiques de prévention de la pénibilité. L’obligation faite aux employeurs d’assurer une traçabilité des expositions aux facteurs de risques professionnels dans le cadre de la fiche de prévention des expositions sera rendue plus effective, en raison d’une part de l’utilisation de la fiche dans le cadre de l’ouverture des droits liés au compte, et d’autre part de l’objectivation des seuils au-delà desquels l’exposition doit être tracée (seuils qui sont aujourd’hui fixés par l’employeur seul). La fiche, dans laquelle sont consignées les mesures de prévention, pourra ainsi servir plus effectivement comme outil de gestion des parcours professionnels et de suivi de la santé des salariés. L’obligation de négocier des accords de prévention de la pénibilité sera, de la même façon, renforcée par l’objectivation des seuils et par la priorité donnée à la négociation par rapport aux plans d’action unilatéraux. Enfin, le déploiement du dispositif s’accompagnera d’actions volontaristes des services et opérateurs concernés en matière de prévention, pour accompagner les entreprises dans leurs efforts visant à réduire au maximum le niveau des expositions des salariés, en agissant sur l’ensemble des leviers liés aux techniques et à l’organisation du travail, ainsi qu’aux moyens de prévention et de protection.

4.5. Article 5 – La fiche de prévention des expositions

La loi du 9 novembre 2010 a instauré à l’article L. 4121-3-1 du code du travail, une fiche dans laquelle l’employeur doit consigner les conditions de pénibilité auxquelles le travailleur est exposé, la période au cours de laquelle cette exposition est survenue ainsi que les mesures de prévention organisationnelles, collectives et individuelles mises en œuvre par l’employeur pour faire disparaître ou réduire ces facteurs. Cette obligation concerne toutes les entreprises, ainsi que les employeurs publics, indépendamment de leur taille et de l’obligation d’être couvert par un accord ou un plan d’action de prévention de la pénibilité.

Le projet de loi modifie cet article pour, d’une part l’insérer dans le nouveau Titre VI ajouté à la Quatrième partie du code du travail, intitulé ‘Dispositions particulières à certains facteurs de risques professionnels et pénibilité’ et d’autre part renforcer l’effectivité de son déploiement. Ainsi est-il prévu que l’employeur consigne l’exposition au-delà de seuils définis par décret pour chacun des facteurs, et non en fonction de sa seule appréciation.

Le projet de loi prévoit en outre des dispositions spécifiques aux travailleurs intérimaires. En effet, titulaires d’un contrat de mission conclu avec une entreprise de travail temporaire, les travailleurs intérimaires se trouvent placés, pour l’exécution de leurs tâches, sous l’autorité d’une entreprise utilisatrice liée à l’entreprise de travail temporaire par un contrat de mise à disposition. Si l’employeur est bien l’entreprise de travail temporaire, c’est l’entreprise utilisatrice qui porte la responsabilité de la protection de la santé et de la garantie de la sécurité du travailleur intérimaire (article L. 1251-21 du code du travail). Aussi l’établissement de la fiche de prévention des expositions à certains facteurs de risques professionnels relève-t-elle d’une responsabilité partagée. C’est pourquoi le projet de loi prévoit que l’entreprise utilisatrice transmet à l’entreprise de travail temporaire les informations dont cette dernière a besoin pour établir la fiche.

Enfin, dans un souci de bonne information, la fiche de prévention des expositions sera désormais tenue à la disposition du travailleur à tout moment, en plus des cas de transmission automatique par l’employeur.

4.6. Article 6 – Le compte personnel de prévention de la pénibilité

4.6.1. Diagnostic et objectif poursuivi

Malgré l’augmentation de l’espérance de vie depuis 25 ans, les inégalités sociales face à la mort ne se sont pas résorbées. Ainsi, l’espérance de vie à 35 ans pour les hommes cadres était plus élevée en moyenne de 6,8 années que pour les hommes ouvriers, dans les conditions de mortalité de 2000-200811. De façon plus marquée encore, les hommes occupant les professions les plus qualifiées ont, à 50 ans, une espérance de vie en bonne santé supérieure de 9 ans à celle des hommes ouvriers (contre 4,8 ans pour l’espérance de vie)12.

Sans que ces écarts soient intégralement attribuables aux différences de conditions de travail, de nombreux travaux scientifiques montrent qu’elles y contribuent. Des études épidémiologiques montrent notamment comment les expositions à certaines conditions de travail pénibles peuvent susciter des pathologies, y compris des années après avoir été exposé. Le rapport rédigé en 2005 par Gérard Lasfargues13 synthétise une grande partie de ces travaux scientifiques qui documentent les effets de différents facteurs de pénibilité sur la santé, dont la plupart correspondent à ceux repris par la loi portant réforme des retraites de 2010 utilisés pour définir la pénibilité au travail14. Le rapport pointe en particulier ceux qui mettent en évidence le vieillissement différentiel lié à « l’accumulation durable de contraintes liées aux cadences, à la manutention de charges lourdes, aux efforts physiques et aux contraintes posturales dans le travail » qui peuvent se traduire par « des phénomènes d’usure précoce ou de morbidité irréversible touchant l’appareil moteur ». En outre, l’exposition aux produits toxiques, et notamment cancérogènes, peut conduire à l’apparition de cancers 20 ans, voire 40 ans après l’exposition initiale.

Les enquêtes statistiques réalisées par le ministère du Travail permettent de mesurer l’ampleur et la diffusion de ces expositions dans la population des salariés du secteur privé. Deux sources peuvent être mobilisées à cette fin : les enquêtes Surveillance Médicale des Expositions aux Risques professionnels (Sumer) et Santé et Itinéraire Professionnel (SIP).

L’enquête SUrveillance Médicale des Expositions aux Risques professionnels (Sumer), réalisée par l’Inspection Médicale du Travail et la Dares, permet d’avoir une photographie détaillée des expositions auxquels les individus sont confrontés (et de leurs évolutions entre 1994 et 2010). Les informations concernent les expositions observées au cours de la semaine précédant la visite médicale du travail, à l’occasion de laquelle elles sont collectées par les médecins du travail.

L’enquête fait apparaitre un recul des expositions aux contraintes physiques dans le travail entre 1994 et 2003, mais une stabilisation entre 2003 et 2010. L’exposition aux produits chimiques a, quant à elle, globalement diminué entre 2003 et 2010. Quelles que soient les expositions considérées, les inégalités d’exposition selon les catégories professionnelles sont très élevées, les salariés occupant les emplois les moins qualifiés étant beaucoup plus exposés que les autres. Les ouvriers sont 6 à 7 fois plus exposés que les cadres à au moins une contrainte physique intense, et jusqu’à 10 fois plus exposés aux risques chimiques.

4.6.2. Champ du dispositif

Jusqu’ici le code du travail ne définissait que des valeurs limites d’exposition au-delà desquelles l’exercice d’une activité professionnelle est interdit. Il va de soi que l’objectif premier des politiques publiques dans ce domaine doit rester la prévention pour résorber autant que possible l’exposition à des conditions de travail pénibles. Le projet de loi n’entend pas définir des nouvelles normes d’exposition en deçà desquelles l’activité serait considérée comme non pénible, ou encore des seuils d’innocuité, mais, en plus de conforter l’obligation de consigner l’ensemble des expositions, il introduit de nouveaux droits associés au dépassement de certains seuils de pénibilité, par essence inférieurs aux limites d’exposition.

Les seuils d’exposition, à savoir les durées, fréquence et intensité d’exposition, pour chacun des 10 facteurs de pénibilité feront l’objet d’une concertation avec les acteurs sociaux avant d’être précisés par décret.

• La part des salariés exposés

Le choix du gouvernement s’est porté sur un scénario global permettant à près d’un salarié sur 5 de voir alimenté chaque année son compte personnel de prévention de la pénibilité (soit 3,3 millions de salariés d’après l’enquête de 2010). Ce scénario permet de donner un aperçu de la ventilation des salariés concernés par facteur de pénibilité.

Pourcentage de salariés exposés

 

Ensemble de la population

24 ans et moins

Entre 25 et 39 ans

Entre 40 et 49 ans

Entre 50 et 59 ans

60 ans et plus

Manutentions manuelles de charges

6,10%

7,80%

6,19%

5,85%

5,81%

4,40%

Vibrations mécaniques

1,10%

1,15%

1,12%

1,05%

1,08%

0,38%

Postures pénibles

6,50%

6,95%

6,31%

7,02%

6,39%

3,41%

Agents toxiques

1,10%

1,37%

0,95%

1,18%

1,30%

0,45%

Températures extrêmes

0,60%

0,72%

0,60%

0,76%

0,52%

0,08%

Bruit

1,20%

1,47%

1,06%

1,23%

1,35%

0,62%

Travail répétitif

2,80%

4,07%

2,46%

2,60%

3,08%

2,25%

Travail de nuit

2,20%

2,06%

2,37%

2,26%

1,96%

2,31%

Horaires alternants

2,90%

1,77%

3,22%

3,14%

2,50%

1,23%

Exposition à au moins l'un des facteurs

18,20%

20,48%

18,39%

18,44%

17,41%

12,29%

une exposition

13,40%

14,62%

13,78%

13,40%

12,55%

9,93%

deux expositions

3,70%

5,00%

3,53%

3,85%

3,48%

1,94%

trois expositions et plus

1,10%

0,86%

1,08%

1,19%

1,39%

0,42%

Source : Enquête Sumer 2010, Dares-DGT-DGAFP, calculs Dares.

Champ : Salariés du secteur privé

On constate que les salariés jeunes sont la catégorie la plus exposée ; c’est donc d’abord à eux que profitera la mise en place du compte.

• Les parcours de pénibilité

L’enquête Santé et Itinéraire Professionnel, conduite en 2008 par la Dares et la Drees apporte des informations sur une base rétrospective, en interrogeant les répondants sur leur carrière professionnelle passée. La mesure des expositions est cependant beaucoup moins détaillée que dans l’enquête Sumer et est limitée à 4 facteurs : le travail de nuit, le travail physiquement exigeant, le travail répétitif et l’exposition aux produits nocifs. Elle est par ailleurs fondée sur la déclaration des individus à l’enquête. Elle apporte néanmoins une information unique sur les durées d’exposition aux différents facteurs pris en compte, qui correspond souvent à la durée d’occupation des emplois exposés à la pénibilité.

Ainsi, 35% des personnes âgées de 50 à 59 ans en 2008 et ayant occupé un emploi pendant au moins 10 ans déclarent avoir été exposées pendant au moins 15 ans à l’un des facteurs de pénibilité pris en compte dans l’enquête15. Là encore, les inégalités sociales apparaissent nettement, les cadres étant 4 fois moins exposés que les ouvriers parmi les personnes de 50 à 59 ans ayant occupé pendant au moins 10 ans un emploi.

Confirmant les études épidémiologiques citées plus haut, le risque de déclarer une limitation d’activité dans les activités quotidiennes est significativement plus élevé lorsqu’on a été exposé longtemps à des facteurs de pénibilité. En outre les corrélations présentées sous-estiment probablement l’effet réel de l’exposition à la pénibilité sur la santé, du fait de l’effet « travailleur sain », qui fait que les salariés ayant une santé défaillante restent moins longtemps sur des postes « pénibles » que des personnes initialement en bonne santé.

En outre, les salariés exposés sortent plus rapidement du marché du travail que les autres : parmi les séniors exposés au cours de leur carrière et à au moins une pénibilité physique durant 15 ans, 68% sont en emploi à la date de l’enquête, contre 75% de ceux qui n’ont pas été ainsi exposés. Cette différence illustre l’effet négatif des conditions de travail pénibles sur la capacité des salariés à rester en emploi.

Outre la dégradation du capital santé des salariés exposés, qui se traduit par un retrait précoce d’activité, l’exposition à des facteurs de travail pénibles a des conséquences plus directes et immédiates, qui sont l’apparition de maladies professionnelles ou plus simplement d’arrêts de travail pour raison de maladie. Une étude récente de la Dares16 pointe le rôle important des conditions de travail sur l’absentéisme maladie. Ainsi, en moyenne au cours d’une semaine, 5,5% des salariés cumulant trois contraintes physiques sont absents pour raison de santé, contre seulement 2,5% de ceux n’en cumulant aucune.

Ces absences sont coûteuses pour les entreprises par la désorganisation qu’elles entraînent. Elles le sont encore plus pour le système d’assurance maladie, par la prise en charge des dépenses de soins et des indemnités journalières.

Le dispositif de 2010

La loi portant réforme des retraites de 2010 a créé un dispositif de retraite anticipée pour les salariés du régime général et du régime agricole, pensé pour compenser les effets avérés de la pénibilité au travail. Ce dispositif, applicable depuis le 1er juillet 2011, est ouvert aux assurés justifiant d’un taux d’incapacité permanente au moins égal à 10% reconnu au titre d’une maladie professionnelle (MP) ou d’un accident du travail (AT) ayant entrainé des lésions identiques à celles indemnisées au titre d’une maladie professionnelle. Il permet d’abaisser sous certaines conditions à 60 ans l’âge légal d’ouverture du droit à pension et de calculer au taux plein la pension quelle que soit la durée d’assurance.

Selon la CNAVTS, fin août 2013, 9 238 demandes avaient été réceptionnées par les CARSAT, dont 5 408 au titre des AT, 3 023 au titre des MP, 348 au titre à la fois d’une MP et d’un AT et 303 au titre d’un motif non encore déterminé. 6 359 demandes avaient été acceptées, 1 515 rejetées et 1 218 étaient en cours d’instruction. Parmi les 6 359 attributions, 1683 ont un taux d'IP compris entre 10% et 20% (dont 750 AT, 911 MP et 22 AT-MP) et 4 676 ont un taux d'IP supérieur à 20% (dont 2 801 AT, 1 629 MP et 246 AT-MP). Le nombre de demandes a été plus faible que ne l’indiquaient les prévisions ; le dispositif n’a pas achevé sa montée en charge et entre en concurrence avec d’autres plus connus tels que la retraite anticipée pour longue carrière.

Au-delà de ces chiffres et comme le souligne le rapport « Nos retraites demain : équilibre financier et justice » remis par Yannick Moreau au Premier ministre en juin 2013, ce dispositif a posé un problème d’orientation, qui a suscité des critiques. Censé prendre en compte la « pénibilité » du parcours passé, il en soumet l’appréciation à un constat d’ordre médical qui suppose un diagnostic de pathologie établi – qui plus est, dans une liste prédéterminée de pathologies, avec une origine professionnelle spécifique. Cela signifie, d’une part, que la reconnaissance de la pénibilité suppose la survenance effective d’une pathologie avant l’âge de la retraite alors que, pour l’essentiel, ce sont des dégradations de la santé survenant postérieurement qui pourront affecter l’espérance de vie en bonne santé ; d’autre part, que certains facteurs de pénibilité, non encore reconnus comme cause de pathologies spécifiques (comme le travail de nuit), sont absents du dispositif.

Outre ce volet relatif à la compensation de la pénibilité, la loi de réforme des retraites de 2010 comportait également un ensemble de mesures visant à prévenir la pénibilité au travail. Parmi elles, la fiche de prévention des expositions, effective depuis début 2012, constituait un premier support de traçabilité des expositions à la pénibilité et une incitation, pour l’employeur, à adopter des mesures de prévention. L’instauration d’une obligation de négocier en faveur de la prévention de la pénibilité dans certaines entreprises participe de la même logique. Cependant, le déploiement de ces mesures et leurs effets restent en pratique insuffisants, si bien qu’il s’avère indispensable de les faire évoluer, d’une part, et de les compléter avec d’autres outils d’autre part.

• Le nouveau dispositif

L’article 6 crée, à compter du 1er janvier 2015, un dispositif ouvrant des droits à tous les salariés du secteur privé exposés à un ou plusieurs facteurs de pénibilité au-delà de seuils qui seront définis par décret. Ce dispositif contribuera à la gestion de leurs parcours professionnels pour éviter qu’ils ne poursuivent une activité pénible jusqu’à ce que leur santé s’en trouve dégradée à terme grâce à l’accès à une formation, aidera à la gestion de leurs fins de carrière et à leur maintien en emploi et leur permettra éventuellement de partir plus tôt à la retraite.

Ainsi, tout au long de leur carrière, le compte permettra aux salariés, grâce à des actions de formation, d’accéder à des emplois non pénibles ou moins pénibles, avant que leur santé n’en soit altérée. Ce mécanisme permettra aux salariés les plus exposés, qui sont aussi les moins qualifiés, d’accéder plus facilement à des formations adaptées. Pour les travailleurs en fin de carrière, le compte constituera une aide au maintien en emploi, en permettant le passage à temps partiel, pour limiter l’usure ressentie au travail et faciliter le maintien en emploi jusqu’au départ en retraite. Enfin, le compte servira également l’objectif de compensation d’une exposition longue à la pénibilité en autorisant un départ anticipé à la retraite.

Le compte sera ouvert à tous les salariés des entreprises du secteur privé et à tous les personnels des personnes publiques employés dans les conditions du droit privé, à l’exception des salariés affiliés à un régime spécial de retraite.

Le salarié accumulera sur son compte des points en fonction de son exposition constatée aux facteurs de pénibilité, après prise en compte des dispositifs de protection individuelle, au-delà de seuils fixés par décret pour chacun d’entre eux. Les seuils en question seront naturellement définis dans le respect et en deçà des valeurs limites d’exposition professionnelle (lorsqu’elles existent pour les facteurs concernés tels que bruit et vibrations), et de façon à encourager une réelle diminution des expositions des travailleurs à la pénibilité, par la réduction des risques « à la source » ou, à défaut, par le recours aux moyens de prévention et de protection les plus adaptés.

Le mécanisme de financement du compte prévoit en effet une cotisation additionnelle fonction des expositions du salarié, qui sera payée par l’employeur et devrait l’inciter à recourir aux moyens de prévention visant à supprimer ou réduire l’exposition à la pénibilité. Les employeurs seront appuyés dans cette démarche par les services de l’administration du travail, par le réseau de l’agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail ainsi que par les services de prévention des CARSAT.

4.6.3. Options possibles

L’option retenue consiste à instituer, pour les salariés concernés, un compte personnel de prévention de la pénibilité. Ils y accumuleront des points en fonction de leur durée d’exposition : chaque trimestre d’exposition au cours de l’année civile ouvrira droit à un point et deux points seront accordés en cas de poly expositions. A partir de dix points, ils se constitueront les droits suivants :

- le financement de tout ou partie des frais d’une action de formation professionnelle continue ;

- la compensation de la diminution de leur rémunération en cas de réduction de leur durée de travail ;

- la majoration de leur durée d’assurance auprès du régime de retraite.

Ces droits seront portables tout au long de leur carrière dans le secteur privé ; en outre, les salariés conserveront leur droit à majoration de durée d’assurance y compris s’ils quittent ce secteur pour une activité indépendante ou dans le secteur public.

Les conditions auxquelles les salariés pourront s’en prévaloir seront définies de sorte à privilégier des choix allant dans le sens du respect de l’intégrité de leur santé, qui est l’objectif premier du Gouvernement. C’est pourquoi les vingt premiers points devront être consacrés à la formation professionnelle continue, afin de favoriser l’évolution vers des emplois les exposant moins à la pénibilité. Pour la même raison, le nombre de points que le salarié pourra utiliser sera plafonné à 100 (ce qui correspond à une exposition de 25 ans à des facteurs de pénibilité au-delà d’un certain seuil) et c’est à partir d’un âge déterminé qu’il pourra affecter ses points au financement d’une réduction de son temps de travail (55 ans) ou à la majoration de sa durée d’assurance lors de la liquidation de sa pension.

Pour les salariés aujourd’hui proches de la retraite, qui ne pourront donc accumuler suffisamment de points sur leur compte personnel, les points acquis seront doublés et les vingt premiers points n’auront pas à être affectés obligatoirement à des actions de formation.

L’utilisation du dispositif à des fins de formation professionnelle s’inscrira dans le cadre du compte personnel de formation prévu à l’article L. 6111-1 du code du travail qui doit être instauré pour chaque salarié en application de l’article 5 de la loi du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l’emploi. Le compte personnel de prévention de la pénibilité facilitera ainsi le financement d’actions de formation professionnelle continue destinées à faciliter l’accès à des emplois non exposés ou moins exposés à des facteurs de pénibilité en abondant le compte personnel de formation du salarié.

La possibilité ouverte au salarié de réduire sa durée de travail s’exercera de façon plus souple que dans les conditions du droit commun : l’employeur ne pourra s’opposer à la demande du salarié qu’en cas d’impossibilité due à l’activité économique. Sous cette réserve, les parties détermineront librement l’importance de la réduction de la durée du travail. Les points dont disposera le travailleur seront convertibles en l’équivalent en trimestres travaillés à 50% de sa durée de travail ordinaire et rémunérés à 100%. Ce complément de rémunération pourra être modulé pour s’adapter aux choix du bénéficiaire (quotité de travail et niveau de rémunération). Ainsi le travailleur aura la possibilité d’étaler le bénéfice de ce temps partiel sur-rémunéré, soit en optant pour un complément partiel de rémunération, soit en choisissant une quotité de travail plus élevée que 50%. Il pourra également réduire son temps de travail en-deçà de 50 % sur une durée moindre.

La majoration de durée d’assurance, pour sa part, permettra à l’assuré d’abaisser son âge de départ en retraite. En effet, au titre de son exposition à des facteurs de risques professionnels, il pourra valider jusqu’à 8 trimestres supplémentaires : ceux-ci lui permettront d’anticiper d’autant de trimestres son départ en retraite, de sorte qu’un assuré qui serait parti au plus tôt à 62 ans pourra partir à 60 ans ; ils majoreront en outre sa durée d’assurance retenue pour le calcul du taux de sa pension. Les pensions auxquelles il pourra éventuellement prétendre auprès d’autres régimes de base seront quant à elles liquidées simultanément.

De surcroît, elle facilitera également le bénéfice du dispositif de retraite anticipée « carrière longue ». En effet, les trimestres validés au titre de cette majoration de durée d’assurance seront réputés « cotisés » et entreront donc dans la durée d’assurance cotisée exigée de l’assuré pour un départ avant l’âge légal.

L’option envisagée dans le rapport, « Nos retraites demain : équilibre financier et justice », consistant à réserver ce compte aux salariés débutant leur carrière après la mise en place du dispositif et, s’agissant des salariés qui partiront à la retraite dans les prochaines années, à prévoir un dispositif transitoire permettant de compenser certaines expositions passées (travail de nuit, exposition aux agents cancérogènes), n’a pas paru devoir être retenue compte tenu des difficultés importantes de reconstitution des expositions passées, qui auraient inévitablement conduit à des inégalités de traitement injustifiables.

4.6.4. Impacts de la mesure

Les dépenses générées par les présentes dispositions seront supportées par le fonds en charge du financement des droits attachés au compte personnel de prévention de la pénibilité.

En combinant les informations sur les expositions issues de l’enquête Sumer et les durées d’exposition pour certains facteurs de pénibilité à partir de l’enquête SIP, il est possible de reconstruire des carrières d’exposition passées17 et sous certaines hypothèses de consommation du compte, chiffrer les dépenses selon les différents modes possibles de consommation.

Les points s’accumulent sur les comptes en fonction des expositions qu’ils connaissent dans le cadre de leur travail. Lorsqu’ils sont exposés durant un trimestre à un facteur de pénibilité, le compte est abondé d’un point. Lorsqu’ils sont exposés à plusieurs facteurs, le compte est abondé de deux points. Une fois accumulés, ces points peuvent être dépensés selon trois modalités : la participation au financement d’une formation, le financement d’un maintien de la rémunération dans le cadre d’une baisse de la durée du travail et le rachat d’un trimestre de retraite. Dans le chiffrage présenté, 10 points accumulés ouvrent droit à un trimestre de l’une ou l’autre modalité de consommation. Pour inciter les salariés à se former, 20 points (correspondant à deux trimestres de formation) sont réservés pour la formation. Seuls les points au-delà de cette réserve peuvent être consommés à une autre fin. Par ailleurs, pour limiter les comportements dommageables d’accumulation excessifs des points sur le compte, c'est-à-dire inciter à ne pas prolonger l’exposition, les individus ne peuvent pas accumuler plus de 100 points, ce qui correspond, une fois tenu compte de la réserve pour la formation, à 8 trimestres de retraite, soit deux années pleines.

• Evaluation

Sur la base d’un scénario de consommation des points reflétant les comportements actuels en matière de recours à la formation et au temps partiel, on peut estimer le nombre de personnes qui utiliseraient leur compte et le nombre de trimestres qui seraient consommés au titre du compte chaque année pour chaque utilisation.

D’après les estimations disponibles, vingt ans après l’entrée en vigueur, 300 000 personnes utiliseraient chaque année des points accumulés sur leur compte. Environ 55% des bénéficiaires seraient des hommes, 45% des femmes.

Le coût du dispositif est estimé à environ 500 M€ en 2020, 2 Mds€ en 2030 et 2,5 Mds€ en 2040.

• Financement

Afin de garantir les nouveaux droits créés en faveur des salariés, il convient de mettre en place les conditions d’un financement pérenne, juste et équitable, tout en tenant compte des impératifs de sauvegarde de la compétitivité.

C’est pourquoi le financement des nouveaux droits reposera sur les entreprises. Les recettes du fonds seront constituées de deux cotisations. Une première cotisation sera due par les employeurs au titre des salariés entrant dans le champ d’application du compte personnel de prévention défini à l’article L. 4162-1 qu’ils emploient. Le taux sera fixé par décret dans la limite de 0,2 %.

Une cotisation additionnelle, également assise sur les salaires, sera due par les employeurs ayant exposé au moins un de leurs salariés à la pénibilité. Son taux sera fixé par décret, entre 0,3 % et 0,8 % pour les salariés exposés à un seul facteur de pénibilité et entre 0,6 % et 1,6 % pour les salariés exposés à plusieurs facteurs.

Ce taux nettement plus significatif que pour la cotisation applicable à l’ensemble des entreprises permettra de responsabiliser les employeurs et de créer une incitation à diminuer l’exposition des salariés à la pénibilité.

§ Gouvernance financière

Un fonds en charge du financement des droits liés au compte personnel de prévention de la pénibilité est institué. Ce fonds est un établissement public de l’Etat.

Le conseil d’administration comprendra des représentants de l’Etat, des représentants des salariés et des employeurs désignés par les organisations représentatives au plan national et interprofessionnel et des personnes qualifiées.

Un décret définira le régime financier du fonds, ainsi que les relations financières et comptables entre le fonds et les organismes gestionnaires du compte personnel de prévention de la pénibilité, chargés de verser pour son compte les sommes représentatives des utilisations du compte personnel de prévention.

Le budget et les comptes du fonds retraceront ainsi en dépenses et en charges les financements correspondant aux trois possibilités d’utilisation des droits pénibilités, à savoir la formation professionnelle, les aménagements de carrière et les majorations de droits à retraite. S’y ajouteront la prise en charge des frais d’expertise exposés par les commissions instituées pour traiter les réclamations des salariés ainsi que celle des frais exposés par la CNAV pour la gestion des comptes personnels de prévention de la pénibilité.

Les recettes seront constituées du produit des deux cotisations qui lui seront affectées (cf. supra).

§ Calcul et recouvrement des cotisations « pénibilité »

Le financement des droits sera assuré par deux cotisations à la charge des employeurs et assises sur les salaires. Une cotisation sera due par les employeurs au titre de leurs salariés entrant dans le champ d’application du compte personnel de prévention défini à l’article L. 4162-1. Une cotisation additionnelle sera due par les employeurs qui auront exposé au moins un de leurs salariés à la pénibilité.

L’assiette des deux cotisations sera identique à celle des cotisations de sécurité sociale. Elles n’entreront pas dans le champ des allègements généraux (« réduction Fillon ») définis à l’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale, au même titre que les cotisations AT-MP.

Afin de simplifier au maximum les obligations déclaratives des employeurs, les deux cotisations seront déclarées, recouvrées et contrôlées selon les mêmes modalités que les cotisations sociales. Les entreprises pourront donc opérer ces déclarations en utilisant les mêmes outils que ceux actuellement à leur disposition (notamment par voie dématérialisée, via net-entreprises).

La cotisation sera due par les employeurs au titre de chaque salarié entrant dans le champ d’application du compte personnel de prévention de la pénibilité.

La cotisation additionnelle sera due au titre de chaque salarié dont les caractéristiques de son poste conduisent, au regard des critères et des conditions définies à l’article 6, à le regarder comme exposé à un ou plusieurs facteurs de pénibilité.

Le rendement attendu de ces cotisations est estimé à environ 500 M€ d’ici à 2020.

4.7. Article 7 – Alimentation du compte formation

L’accord national interprofessionnel du 11 janvier 2013 puis la loi du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l’emploi a posé les principes du compte personnel de formation. Chaque personne dispose dès son entrée sur le marché du travail, indépendamment de son statut, d’un compte personnel de formation comptabilisé en heures, dont elle conserve les droits en cas de perte ou de changement d’emploi. Le compte est alimenté chaque année dans les mêmes conditions que le droit individuel à la formation ainsi que par des abondements déterminés par l’Etat et les régions, selon, par exemple, des logiques de publics, de filières ou de territoires.

Le présent projet de loi ajoute que ce compte pourra également être alimenté au titre des droits acquis par la personne dans le cadre de son compte personnel de prévention de la pénibilité. Dès lors que la personne souhaitera suivre une action de formation pour faire évoluer ses compétences, les points du compte pénibilité seront traduits en heures de formation, ces heures de formation venant s’ajouter à celles déjà acquises par le titulaire du compte de formation et pouvant être mobilisées dans ce cadre.

Ces principes étant posés il revient désormais à la négociation nationale interprofessionnelle sur la formation professionnelle et à la concertation quadripartite Etat-Régions-partenaires sociaux relative au compte personnel de formation, qui ont démarré au début de cet automne, de déterminer l’ensemble des modalités opérationnelles de mise en œuvre de ce compte. Le projet de loi portant réforme de la formation professionnelle qui sera préparé pour la fin de l’année 2013 donnera une traduction législative à cette mise en œuvre opérationnelle.

4.8. Article 8 – Accords en faveur de la prévention de la pénibilité

Une obligation de négocier un accord ou d’élaborer un plan d’action en faveur de la prévention de la pénibilité s’applique aux entreprises et aux établissements publics employant au moins 50 salariés (ou appartenant à un groupe dont l’effectif comprend au moins 50 salariés), si au moins 50 % de leur effectif est exposé à un ou plusieurs facteurs de risques professionnels fixés par décret (article L.138-29 du code de la sécurité sociale).

Les entreprises de 50 à 300 salariés sont dispensées de cette obligation si elles sont couvertes par un accord de branche étendu de prévention de la pénibilité. A défaut, elles encourent une pénalité financière modulable en fonction des efforts constatés et égale au plus à 1 % de la masse salariale des salariés exposés. Au 31 août 2013, deux branches sont couvertes :

- la branche du BTP, suite à l’extension par arrêté du 12 novembre 2012 de son accord relatif à la prévention de la pénibilité et à l'amélioration des conditions de travail.

- la branche des œufs et industries en produits d’œuf, suite à l’extension par arrêté du 7 juin 2013 de son accord du 29 mars 2012 relatif à la prévention de la pénibilité.

Au 31 août 2013, on dénombrait quinze accords de branche18 et plus de 4800 accords d’entreprise ou plans d’action relatifs à la pénibilité.

Le projet de loi replace les articles du code de la sécurité sociale portant sur la négociation en faveur de la prévention de la pénibilité dans le code du travail, au sein du nouveau Titre VI crée à la fin de sa Quatrième partie.

Pour clarifier le périmètre des entreprises qui sont dans l’obligation de conduire cette négociation ou d’adopter un plan d’action, le projet de loi précise que la proportion de salariés exposés à un ou plusieurs facteurs de risques professionnels fixés par décret (au minimum 50% pour être assujetti) est déterminée en prenant comme référence des seuils qui seront fixés par décret, pour chacun des facteurs. Le projet de loi vise ainsi à renforcer l’effectivité de cette mesure qui constitue un levier important en termes de prévention de la pénibilité.

De plus, il prévoit que l’adoption d’un plan d’action en faveur de la prévention de la pénibilité n’est possible qu’en cas d’échec de la négociation. Il donne donc clairement la priorité à la négociation sur le modèle des négociations « contrat de génération » et « égalité professionnelle entre les femmes et les hommes ».

4.9. Article 9 – Droits à majoration de durée d’assurance vieillesse au titre de la pénibilité

4.9.1. Diagnostic et objectifs poursuivis

La diminution potentielle de l’espérance de vie induite par une exposition professionnelle à des facteurs de pénibilité est scientifiquement documentée ; la pluri-exposition tend en outre à renforcer ces risques. Le rapport de la commission présidée par Yannick Moreau a rappelé ce constat, et souligné l’absence de mécanisme permettant de compenser cet effet, en particulier quand il devient visible seulement après le passage à la retraite. En outre, les conditions de travail tout au long de la vie professionnelle influent – en termes statistiques – sur la longévité et sur la qualité de vie au grand âge, donc sur la durée et la qualité de la retraite.

La retraite anticipée au titre de la pénibilité, créée par la loi portant réforme des retraites de 2010, n’a pas répondu à cet objectif : en effet, cette retraite anticipée est réservée, sous conditions, aux seuls assurés qui bénéficient d’une rente servie au titre des accidents du travail ou des maladies professionnelles. Le dispositif créé en 2010 (qui a seulement permis, depuis son entrée en vigueur, à 6359 assurés de partir plus tôt), bien que peu utilisé, sera maintenu en l’état ; mais la création d’une majoration de durée d’assurance permettra, elle, de prendre en considération les effets différés de la pénibilité, et non les seuls effets médicalement constatés avant la liquidation des droits à pension.

Le même rapport remis par Yannick Moreau préconisait, pour prendre en compte ces effets différés de la pénibilité, la mise en place d’un « rachat de trimestres » permettant de partir plus tôt à la retraite. Cette option a toutefois été écartée : le  rachat peut uniquement combler des « trous » de carrière : un rachat, même financé par la solidarité nationale, n’aurait pas permis à tous les assurés de bénéficier, au titre des périodes futures d’exposition à la pénibilité, d’un départ anticipé.

Il est donc proposé, de permettre aux salariés titulaires d’un compte personnel de prévention de la pénibilité d’acquérir s’ils le souhaitent des trimestres de majoration de durée d’assurance vieillesse pour ainsi partir plus tôt à la retraite. Pour les assurés aujourd’hui très proches de l’âge de la retraite, les points acquis sur le compte personnel pénibilité seront bonifiés afin de convertir plus facilement les points en trimestres de retraite ou de temps partiel (cf. supra).

4.9.2. Impacts de la mesure

L’article 9 prévoit donc la création d’une majoration de durée d’assurance, positionnée dans le régime dont relevait l’assuré lorsqu’il était exposé à la pénibilité (régime général et régime des salariés agricoles). Cette majoration de durée permettra aux assurés de bénéficier au maximum de 8 trimestres financés par le compte pénibilité. Ces trimestres seront triplement utiles :

- Ils permettront d’augmenter la durée d’assurance tous régimes, et donc d’atteindre plus rapidement le « taux plein », qui est juridiquement l’annulation de la décote.

- Ils seront « réputés cotisés » pour le bénéfice de la retraite anticipée pour carrières longues, ce qui permettra à un assuré qui aurait déjà ouvert droit à un départ anticipé de partir plus tôt ;

- Ils permettent d’avancer dans tous les cas l’âge de départ, par rapport aux 62 ans : dans tous les cas, c’est l’objet du II de cet article, l’âge légal est diminué d’autant de trimestres que l’assuré a de majorations à son compte.

Par exemple, dans le cas d’un assuré né en 1967 (âge légal de départ à 62 ans ; durée d’assurance requise 42.5 ans) qui aurait accumulé 4 trimestres de majoration :

- S’il atteignait le taux plein à 63 ans (=> début d’activité à 20 ans ½), il pourra désormais partir à taux plein dès 62 ans ;

- S’il pouvait partir en retraite anticipée à 61 ans (=> début d’activité à 18 ans ½), il pourra partir à 60 ans à taux plein ;

- S’il pouvait partir à 62 ans ½ à taux plein (=> début d’activité à 20 ans), il pourra partir à 61 ans ½ à taux plein.

Ces trois mécanismes favorables sont valorisés dans l’ensemble des régimes de retraite de l’assuré, sans que les poly-pensionnés soient donc désavantagés par rapport aux mono-pensionnés : l’âge de liquidation de sa pension du régime général à taux plein permettra à l’assuré de liquider ses pensions des autres régimes au même âge, toujours sans décote.

Cette majoration de durée permet donc d’accompagner la hausse très progressive de la durée d’assurance, prévue à l’article 2. En effet, dès lors que la durée d’assurance requise pour le taux plein augmente en fonction de l’espérance de vie, il paraît, en équité, indispensable de prendre en considération les cas particuliers des assurés dont l’espérance de vie (et donc la durée de service de la pension) peut être diminuée, en raison de leur exposition, pendant leur vie professionnelle, à des facteurs de pénibilité.

L’impact de ce dispositif est retracé dans l’analyse générale des impacts du compte personnel de prévention de la pénibilité, à l’article 6.

4.10. Article 10 – Dispositions diverses

Cet article vise à supprimer deux mesures créées par la loi du 9 novembre 2010 :

- la possibilité de négocier un accord collectif de branche pour créer un dispositif d'allègement ou de compensation de la charge de travail des salariés occupés à des travaux pénibles. Aucune branche n’a négocié un tel accord et le compte personnel de prévention de la pénibilité s’y substitue. Ce dispositif expérimental était destiné à s’éteindre le 31 décembre 2013.

- la création d’un comité scientifique, qui devait être constitué avant le 31 mars 2011. Il avait pour mission d'évaluer les conséquences de l'exposition aux facteurs de pénibilité sur l'espérance de vie avec et sans incapacité des travailleurs. Sa composition devait être fixée par décret. Ce comité n’a jamais été installé. Etant donné la mise en place du compte personnel de prévention de la pénibilité qui prend en compte l’exposition à la pénibilité indépendamment de l’état de santé de la personne, on peut considérer que le nouveau dispositif répare bien la pénibilité à effets différés et son impact sur l’espérance de vie des salariés. Le comité n’a donc plus lieu d’être.

Titre II - Chapitre II : Favoriser l’emploi des seniors

L’augmentation du taux d’emploi des seniors (55-65 ans) est une condition essentielle du rééquilibrage financier du système de retraites : le prolongement effectif de l’activité professionnelle renforce, par les cotisations versées, les ressources de la branche vieillesse, tout en limitant le report vers d’autres dispositifs sociaux (assurance chômage, préretraites, invalidité).

En créant le dispositif de contrats de génération (loi du 1er mars 2013) le gouvernement s’est engagé, dans un contexte d’emploi difficile, à favoriser l’emploi des seniors.

Le présent projet de loi s’inscrit dans cette stratégie et, plus particulièrement, vis-à-vis de ceux qui en fin de carrière éprouvent le besoin d’une transition douce entre l’emploi et la retraite. La réforme introduite par l’article 11 vise ainsi à ouvrir la retraite progressive à un public plus large.

Il participe également à la démarche de simplification et de rétablissement de l’équité entre assurés dans la mesure où, quel que soit le régime auquel un retraité est affilié, celui-ci ne pourra plus se recréer de nouveaux droits à retraite à partir du moment où il a liquidé une pension de retraite. Son activité lui procurera des revenus supplémentaires, mais il paraît équitable, à partir du moment où il a choisi de liquider sa pension, qu’il ne s’ouvre plus de droits à vieillesse, comme c’est d’ores et déjà le cas lorsque le cumul emploi-retraite intervient au sein du même régime.

4.11. Article 11 – Extension de la retraite progressive

4.11.1. Diagnostic et objectif poursuivi

§ La retraite progressive, en mettant fin à la césure nette entre activité et retraite, vise à encourager la prolongation d’activité rémunérée en facilitant la transition entre emploi et retraite.

La retraite progressive, comme le cumul emploi retraite (CER), permet de cumuler une activité professionnelle avec une pension de retraite. L’assuré qui a recours à ce dispositif cumule alors une fraction de sa pension de vieillesse avec une activité à temps partiel, et continue à améliorer ses droits à retraite futurs. Le dispositif est ouvert aux assurés relevant du régime général, du régime social des indépendants (RSI), de la mutualité sociale agricole (MSA), de la caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales (CNAVPL) et du régime des non-salariés agricoles.

Pour en bénéficier, l’assuré doit remplir les trois conditions suivantes :

0avoir atteint l’âge légal de départ à la retraite ;

0justifier de 150 trimestres de durée d’assurance validés dans les régimes qui appliquent la retraite progressive (RG, RSI, MSA, CNAVPL)

- exercer une activité à temps partiel à titre exclusif, pour les salariés, ou réduite pour les non salariés.

Il existe par ailleurs des conditions spécifiques pour les chefs d’exploitations ou d’entreprises agricoles.

La fraction de la pension servie est calculée selon les règles habituelles de droit commun. Elle est en outre comparée au minimum contributif et au maximum des retraites. Toutefois, la retraite progressive n’ouvre pas droit à l’ASPA.

La fraction de retraite servie dépend de la durée de travail retenue par l’assurée :

Durée du travail à temps partiel par rapport au temps complet dans l'entreprise

Fraction de la pension

60% à 80% (borne exclue)

30%

40% à 60% (borne exclue)

50%

moins de 40%

70%

La retraite est servie à titre temporaire : la liquidation totale entraine un nouvel examen des droits à retraite qui prend en compte les périodes cotisées depuis l’accession à la retraite progressive. Il s’agit donc d’une dérogation au principe général d’intangibilité des retraites après leur liquidation (R. 351-10 CSS).

Elle est versée sous forme de rente mensuelle même si son montant est inférieur au seuil du versement forfaitaire unique. En cas de reprise d’activité à temps complet ou d’une autre activité à temps partiel, le versement de la fraction de retraite est supprimé.

Au moment de la liquidation complète de la retraite, celle-ci est calculée de manière classique. Elle ne peut cependant pas être inférieure à la retraite qui a servi de base de calcul à la retraite progressive.

Enfin, en accord avec l’employeur, l’assuré a la possibilité de surcotiser afin de ne pas être pénalisé par la réduction de son temps de travail.

§ La retraite progressive est peu utilisée, en raison de sa complexité et de son caractère restrictif

Créée en 1988, la retraite progressive a été rendue plus attractive en 2003 et 2006. En 2006, par crainte d’un effet d’aubaine trop important, le législateur a rendu le dispositif temporaire (jusqu’à fin 2008) avant de le prolonger en 2008 et 2009, puis de le pérenniser fin 2010.

Date de la mesure

Entrée en vigueur

Nature de la réforme

Durée d’assurance nécessaire

5 janvier 1988 (loi) et 2 mai 1988 (décret)

1er juillet 1988

Création de la retraite progressive

150 trimestres

27 aout 1993 (décret)

1er janvier 1994

Augmentation progressive de la durée d’assurance nécessaire

Entre 150 trim.

(génération 1934) et

160 trim. (génération 1943)

21 août 2003 (loi)

 

Caractère provisoire de la liquidation (recalcul de la pension au moment du départ définitif)

160 trimestres

7 juin 2006 (décret)

1er juillet 2006

Abaissement de la durée d’assurance nécessaire – fin du dispositif au 31 décembre 2010

150 trimestres

30 décembre 2010 (décret)

1er janvier 2011

Pérennisation de la retraite progressive

Fin 2012, la retraite progressive concerne 2 409 bénéficiaires au régime général (+ 9,6 % par rapport à 2011 et + 100 % par rapport à 2007), dont 1101 nouvelles attributions. 47,8 % des bénéficiaires ont une fraction de pension servie à 30 %, 36,9 % ont une fraction de pension à 50 % et 15,3 % ont une fraction de pension à 70 %, pour un coût de 12,5 millions d’euros au régime général (hors cotisations).

Entre le 1er janvier et le 30 juin 2013, le régime général a attribué 798 nouvelles retraites progressives, soit une augmentation de 27 % par rapport à la même période en 2012.

Alors même qu’il s’agit d'un dispositif a priori avantageux pour les assurés, la retraite progressive reste encore confidentielle et méconnue des assurés et des entreprises : seuls 29 % des jeunes retraités déclarent connaitre la retraite progressive (enquête CNAV/DREES/DSS « motivations de départ à la retraite », novembre 2012).

Cette situation s’explique par différents facteurs :

- le nom même est peu représentatif du dispositif. Rares sont ceux qui dans les faits réduisent de manière progressive leur retraite. De plus, le nom ne reflète pas suffisamment l’idée du partage du temps entre activité professionnelle et retraite ;

- elle suppose d’avoir atteint l’âge légal, ce qui la rend peu opérante comme mécanisme de transition activité / retraite ;

- la grille temps travaillé/fraction de pension servie est peu lisible ;

- les modalités d’ouverture apparaissent parfois complexes et restrictives ;

- enfin, la communication sur le dispositif n’est pas adaptée.

Les mesures proposées dans l’article 11, qui seront complétées par des ajustements réglementaires, visent à accroître l’attractivité de la retraite progressive.

§ Assouplir les conditions d’accès

L’article 11 procède à une réforme structurante du dispositif. En effet, il abaisse la condition d’âge à partir duquel les assurés pourront entrer en temps-partiel retraite : actuellement fixée à l’âge légal (62 ans pour la génération née en 1955), la condition d’âge sera abaissée à 2 ans de moins que l’âge légal, soit 60 ans, afin d’en favoriser l’accès aux salariés ayant commencé à travailler tôt.

Par conséquent, avant même de pouvoir prétendre partir à la retraite, les assurés pourront exercer leur activité à temps partiel, tout en bénéficiant d’une fraction de leur pension ; à l’issue de leur temps partiel (qui leur permettra de compléter leur pension, notamment pour atteindre le taux plein), les assurés liquideront la totalité de leur retraite, majorée compte tenu des droits nouveaux acquis au cours du temps partiel.

Enfin, le 2° du même article clarifie la durée d’assurance requise pour permettre de passer en retraite progressive : la condition actuelle de durée d’assurance (150 trimestres) ne prend pas en considération la durée d’assurance tous régimes, ce qui conduit à exclure certains assurés du bénéfice de ce temps partiel - retraite. Il est donc proposé de retenir une durée d’assurance tous régimes, en renvoyant à un décret le soin de préciser tant la durée exigée que le périmètre « tous régimes » de la durée d’assurance.

§ Accroître la lisibilité du dispositif

Ce renforcement de l’attractivité de la retraite progressive, outil de transition entre emploi et retraite, sera complété par un décret destiné notamment à simplifier le barème. En se fondant sur des bases différentes (pension de retraite et temps de travail), le barème n’est pas clair et ne permet pas à l’assuré de mesure l’impact du dispositif sur sa situation. En effet, en affichage, le barème est plus attractif pour les assurés dont la quotité de travail est comprise entre 30 et 40 %, entre 50 et 60 % et entre 70 et 80%. Un décret permettra de simplifier le barème, afin que la somme composée de la fraction de retraite versée et de la quotité travaillée soit systématiquement proche de 100%.

4.11.2. Impacts de la mesure

En 2012, le coût de la retraite progressive s’élève à 12,5 millions d’euros au régime général (hors cotisations).

Dans son format actuel, le dispositif n’est pas actuariellement neutre. Les mesures visant à assouplir les conditions d’ouverture du dispositif représentent un coût supplémentaire à court terme (augmentation des liquidations partielles) et à long terme (amélioration du montant des pensions servies).

Toutefois, des externalités positives, difficilement quantifiables, sont à prévoir notamment sur la branche maladie, accidents du travail et maladies professionnelles (baisse des arrêts maladies, des accidents du travail etc.).

Face au risque d’un développement trop important les précédentes réformes avaient été progressives (abaissement de la durée d’assurance nécessaire de 160 à 150 trimestres) et à titre provisoire (avant une pérennisation).

Même s’il ne peut être totalement exclu, le risque semble contenu puisque le recours au dispositif reste encore marginal.

Toutefois, le net assouplissement du dispositif, lié à l’abaissement à 60 ans de l’âge d’entrée dans le dispositif, conduira à un fort développement : sous l’hypothèse d’un quintuplement des effectifs à l’horizon 2017 l’impact financier de la mesure serait ainsi d’au plus 50 M€ (€ 2011) au même horizon.

4.12. Article 12 – Cumul emploi retraite tous régimes

4.12.1. Diagnostic et objectif poursuivi

§ En raison de la complexité de la réglementation, trois types de cumul emploi retraite (CER) coexistent actuellement : le CER intra-régime plafonné, le CER intra-régime intégral (ou libéralisé) et le CER inter-régimes. Les deux modes de CER intra-régime sont réglementés alors qu’il n’y a aucune restriction concernant le CER inter-régimes.

Le cumul emploi retraite intra-régime concerne les assurés qui exercent une activité rémunérée dans le groupe de régimes duquel ils perçoivent une pension de retraite ; il peut être plafonné ou libéralisé. Dans les deux cas, cette nouvelle activité est soumise aux cotisations sociales mais n’ouvre pas droit à une nouvelle pension ni à un nouveau calcul de celle-ci. Les règles des cumuls emploi retraite intra-régimes sont reprises dans le tableau ci-dessous.

Synthèse du cumul emploi retraite dans les principaux régimes

 

Références

Cumul emploi retraite plafonné

(pensions liquidées à partir du 1er janvier 2004)

Cumul emploi retraite libéralisé

(pensions liquidées à partir du 1er janvier 2009)

Régime général et
MSA (salariés)

L. 161-22 CSS

Oui

Limites :

- Avoir plus de 55 ans

- La somme pension + revenus d’activité
< 1,6 SMIC ou dernier salaire

Oui

Limites :

- Avoir atteint l’âge légal (62 ans en 2017)

- Avoir le taux plein (par l’âge ou la durée d’assurance)

- Avoir liquidé l’intégralité des pensions de retraite

RSI

L. 634-6 CSS

Oui

Limites :

- Revenus annuels d’activité < PASS (soit 3 086 €/ mois) en zone urbaine sensible (ZUS) ou zone de revitalisation rurale (ZRR)

- Revenus annuels d’activité < 1/2 PASS (soit 1 543 €/ mois)

CNAVPL

L. 643-6 CSS

Oui

Limites :

- Revenus annuels nets d’activité < PASS (et, jusqu’au 5 octobre 2016, 130% du même plafond pour les médecins âgés de plus de 65 ans au moment de l’entrée en jouissance de la pension)

Fonction publique

L. 84 à 86-1 CPCM

Oui

Limites :

- Revenus annuels d’activité < 1/3 de la pension perçue la même année

CNBF

L. 723-11-1 CSS

Non

NSA

L. 732-39 Code Rural

Non

Oui

Limites :

- Mêmes conditions que les autres régimes + conditions spécifiques (L. 722-5, L. 312-6 favorisant l’installation des jeunes agriculteurs)

§ La reprise d’activité par les retraités ne génère normalement pas de droits nouveaux à retraite

Avant 2003, un retraité ne pouvait pas reprendre une activité rémunérée dans le même groupe de régimes. Cette interdiction résulte du caractère impératif, pour liquider une pension de retraite auprès du régime concerné, de la rupture de tout lien professionnel pour les salariés, de la cessation d’activité pour les non salariés et de la radiation des cadres pour les fonctionnaires.

Depuis 2003, le législateur a autorisé le cumul d’une pension et d’une activité rémunérée dans le cadre de la création du cumul emploi-retraite plafonné. En 2009, la possibilité de reprendre une activité rémunérée a été élargie à l’ensemble des régimes avec la création du CER libéralisé (déplafonné), soumis à la triple condition d’avoir liquidé toutes ses pensions à taux plein et à partir de l’âge légal. Toutefois, ces cumuls ne sont que des dérogations, encadrées, à la règle d’interdiction d’une reprise d’activité une fois la retraite liquidée.

S’il est possible de reprendre une activité rémunérée, celle-ci reste soumise à cotisations sociales : ces cotisations ne sont pas génératrices de droits nouveaux, les pensions étant déjà liquidées. Les cotisations versées par les retraités qui cumulent emploi et retraite constituent donc des cotisations de solidarité.

§ L’existence de « groupes de régimes » conduit à des exceptions nombreuses, injustifiées en équité, au principe de cotisations de solidarité

Pour l’appréciation du cumul emploi-retraite, les régimes de retraite sont rassemblés en sept groupes en fonction des règles communes qui s’y appliquent.

Le cumul emploi retraite inter-régime permet aux assurés pensionnés d’un groupe de régimes d’exercer une activité relevant d’un autre groupe de régimes. Cette nouvelle activité est soumise aux cotisations sociales et permet à l’assuré de se constituer des nouveaux droits à retraite.

Groupe 1

Régime général, salariés agricoles, certains régimes spéciaux (IEG, SNCF, RATP, Mines, Banque de France, Clercs et employés de notaires, Opéra national de Paris, Comédie-Française, Personnel de la caisse autonome de sécurité sociale dans les mines, Port autonome de Strasbourg)

Groupe 2

Régime social des indépendants

Groupe 3

Professions libérales

Groupe 4

Avocats

Groupe 5

Exploitants agricoles

Groupe 6

Les trois fonctions publiques

Groupe 7

Autres régimes spéciaux

Par exemple, un assuré à la retraite relevant du groupe 1 (tableau supra) pourra librement reprendre une activité professionnelle emportant une affiliation dans l’un des régimes du groupe 3. Il se créera alors de nouveaux droits à retraite et pourra bénéficier d’une retraite versée par ce nouveau régime.

En outre, les règles de cumul intra-régime s’appliquent seulement à compter de l’âge légal du régime général : pour cette raison, un assuré relevant par exemple d’un régime spécial et liquidant avant 62 ans peut cumuler une pension du régime spécial et une activité rémunérée au régime général sans encadrement. Ses cotisations deviennent alors productrices de droits nouveaux à retraite.

Ainsi, un retraité qui reprend une activité rémunérée peut actuellement se recréer des droits nouveaux dans deux situations :

- s’il reprend une activité dans un autre groupe de régimes ;

- s’il est pensionné d’un régime spécial relevant du groupe 1 et reprend une activité entrainant une affiliation à un régime du même groupe.

§ Harmoniser les règles de cumul emploi-retraite

Selon un récent rapport, un retraité sur cinq reprenant une activité, soit 100 000 personnes en 201119, échappe à toute réglementation et peut dès lors se recréer des nouveaux droits à retraite. Cette situation crée une inégalité injustifiée entre assurés : selon le groupe dont dépend le régime duquel les retraités sont pensionnés et le groupe de régimes dans lequel ils reprennent une activité rémunérée, cette activité sera ou ne sera pas créatrice de droit à pension. De plus, la coexistence de différentes règles, associées à de nombreuses exceptions, nuit la à compréhension globale du dispositif ainsi qu’à l’accès pour tous au CER.

Dans un principe d’équité entre assurés, le I du présent article permet de mettre fin à cette situation :

- En mettant fin à la notion de groupes de régimes, par la modification du premier alinéa de l’article L. 161-22 du code de la sécurité sociale : la liquidation d’une pension, dans n’importe quel régime, supposera désormais de mettre fin à l’ensemble de ses activités (ce qui n’interdit nullement, comme actuellement, de reprendre la même activité ensuite20) ;

- En généralisant, dans le 2° du I, le principe de cotisations non génératrices de droits nouveaux à retraite quel que soit le régime dont est pensionné l’assuré et quel que soit l’âge auquel il a liquidé ses pensions.

La suppression du cumul emploi retraite non encadré, et la disparition des « groupes » de régime emporte une conséquence pour le cumul emploi-retraite plafonné (dans lequel la reprise d’activité est autorisée, à condition que les revenus d’activité soient inférieurs à un plafond) : une reprise d’activité, dans le cadre du cumul emploi-retraite, est possible quel que soit le nouveau régime d’affiliation à l’assurance vieillesse. Toutefois, pour le calcul du plafond (et des dépassements du plafond) seront pris en considération tous les revenus professionnels, y compris ceux soumis à cotisation dans un autre groupe de régime.

Les II, III et IV du même article procèdent aux ajustements des textes pour les régimes des travailleurs indépendants et les régimes spéciaux, par jeux de renvoi au premier alinéa de l’article L. 161-22 du code de la sécurité sociale.

Enfin, le IV prévoit le maintien d’une seule exception, pour les bénéficiaires d’une pension militaire de retraite. En effet, le statut des militaires leur permet d’ouvrir des droits à pension, parfois modestes (compte tenu d’une durée d’assurance réduite), dès 17 ans de service pour les simples soldats. Dans leur cas, le cumul emploi retraite correspond plus à une seconde partie de carrière qu’à un moyen de bénéficier, pour une courte durée, d’un revenu d’activité et de la pension. Par conséquent, seuls les pensionnés du régime militaire ne seront pas soumis au principe selon lequel les activités d’un retraité ne génèrent pas de droit nouveau au titre de l’assurance vieillesse.

4.12.2. Un droit à cumul entre ASPA (minimum vieillesse) et emploi sera ouvert par décret

L’allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA) permet de garantir un niveau de ressources minimal aux personnes âgées : 787,26 € par mois pour une personne seule et 1222,27 € pour un couple au 1er avril 2013. Elle complète les ressources de la personne âgée jusqu’à ce montant (mécanisme différentiel). La base ressources de l’ASPA est très large : elle intègre tous les types de revenus et comprend notamment les revenus d’activité.

Les bénéficiaires de l’ASPA n’ont en conséquence aucun intérêt à exercer une activité professionnelle : les revenus qu’elle procure sont en effet neutralisés par une diminution à due concurrence du montant de l’allocation. La Cour des comptes et l’IGAS se sont récemment interrogées sur les raisons pour lesquelles aucun mécanisme d’intéressement n’avait été mis en place pour l’ASPA. La sénatrice Isabelle Debré, a déposé en mai dernier une proposition de loi proposant d’autoriser un cumul partiel emploi – ASPA. Cette proposition de loi, adoptée au Sénat, a été renvoyée pour examen en commission des affaires sociales à l’Assemblée nationale.

Comme l’avait indiqué le Gouvernement à l’occasion de l’examen de cette proposition de loi, une telle mesure ne peut que s’inscrire dans le cadre plus large des réflexions sur le cumul emploi-retraite, mises en œuvre par le présent article ; elle relève en outre du pouvoir réglementaire et non de la loi.

C’est pourquoi le gouvernement mettra en place, par décret en Conseil d’Etat, un mécanisme d’intéressement à la reprise d’une activité professionnelle pour les bénéficiaires de l’ASPA : seront exclus, de la base ressources utilisée pour calculer l’ASPA, une partie des revenus d’activité. La mesure pourra entrer en vigueur dès le 1er janvier 2014 et concernera l’ensemble des régimes. Le coût de la mesure est estimé à environ 10 M€ par an pour le seul régime général.

4.12.3. Impacts de la mesure

Actuellement, le CER intra-régime a un impact à long terme pour les régimes positif et en règle générale légèrement supérieur à la surcote : les régimes sont donc gagnants, par comparaison avec une logique de neutralité actuarielle21. A court terme toutefois, le CER représente une perte de trésorerie pour les régimes. A l’inverse, le CER inter-régimes que le présent article propose de davantage encadrer en créant de nouveaux droits à pension, permet à un assuré de cumuler deux avantages (le cumul et la surcote, en particulier) : il est donc très coûteux pour les régimes, à court et à long terme.

La généralisation du principe de cotisation non productrice de nouveaux droits à pension entrainera donc un impact positif pour l’ensemble des régimes. Environ 100 000 assurés bénéficient du CER inter-régimes, c’est-à-dire qu’ils ont liquidé leurs droits à retraite dans un régime, et qu’ils cotisent dans un autre. Par ailleurs, ces assurés se situent plutôt dans le haut de la distribution des revenus22. Ainsi, si 70% de ces assurés acquièrent de nouveaux droits à retraite dans le régime où ils sont néo-cotisants, et si l’on suppose en moyenne une activité à 1/3 temps, sur la base d’une rémunération à ½ PSS, et une durée de cumul moyenne de 2 ans23, on peut estimer le rendement de la mesure à environ 30 M€ de moindre dépense pour les régimes de base (estimation établie sur la base des droits RG, par simplification) l’année de l’entrée en vigueur, et 450 M€ au terme de la montée en charge (€ constants 2013).

Organismes impactés

(régime, branche, fonds)

Impact financier en droits constatés (en M€ constants 2011)

Coût ou moindre recette (signe -)

Économie ou recette supplémentaire (signe +)

2015

2020

2030

2040

Moindres prestations à verser

+ 31

+ 161

+ 360

+ 453

En gestion, la mise en œuvre de ces dispositions passe par une coordination étroite entre tous les régimes, sur le modèle de celle qui existe déjà entre les régimes du groupe 1 : elle aura vocation à être largement étendue, ce qui peut induire des travaux d’adaptation d’environ un an. Le V du présent article prévoit donc une entrée en vigueur différée au 1er janvier 2015.

Titre II - Chapitre III : Améliorer les droits à la retraite des femmes, des jeunes actifs et des assurés à carrière heurtée

Le chapitre III comporte des mesures de solidarité et d’équité de notre système de retraite. Ces dispositions tendent à améliorer la constitution de droits à retraite des assurés les plus fragiles, ceux qui éprouvent des difficultés à se constituer une carrière complète en raison notamment de la précarité du marché du travail.

Sont ainsi principalement concernés par ces mesures les assurés ayant des parcours professionnels morcelés.

Ces mesures bénéficieront ainsi au premier chef aux femmes qui subissent des carrières heurtées faiblement rémunérées notamment en raison de durée de travail à temps partiel.

Les jeunes sont également touchés par des difficultés d’insertion sur le marché du travail alors même que, compte tenu de la tendance à l’allongement des études, leur entrée sur le marché de travail est retardée par rapport aux générations précédentes.

Ainsi, les dispositions du chapitre III visent ainsi à mieux prendre en compte les périodes d’activité professionnelle réduite - en raison de contrats de travail de courtes durées ou d’un emploi à temps partiel -, les périodes de chômage et notamment de formation professionnelle, les interruptions de carrière en raison de la maternité ou les périodes d’apprentissage. L’accès au rachat des jeunes de leurs périodes d’études supérieures devrait également être facilité.

4.13. Article 13 – Préparer une refonte des majorations de pension pour enfants

La Commission présidée par Yannick Moreau s’est, dans son rapport remis en 2013, penchée sur les avantages familiaux de retraite et a examiné différents scénarios d’évolution ou de refonte. Elle a notamment souligné combien les différents avantages servis (majorations de durée d’assurance par enfant, AVPF pour les interruptions de carrière liées aux enfants, majoration de 10% de la pension pour les parents de trois enfants) pouvaient, tout en améliorant sensiblement les pensions des femmes, créer de situations d’inéquité entre assurés et entre régimes.

A titre d’illustration, les majorations de retraite pour enfants (en règle générale, une majoration de pension de 10% pour les parents ayant élevé trois enfants) présentent un triple biais :

- Elles ciblent les seuls parents de trois enfants et plus, hommes et femmes confondus – et écartent totalement les parents d’un et deux enfants ;

- Elles sont très variables selon les régimes (elles n’existent pas à la CNAVPL et à la CNBF ; elles sont plafonnées dans les régimes complémentaires Agirc-Arrco ; elles peuvent être supérieure à 10% dans certains régimes spéciaux) ;

- Elles sont doublement favorables aux pensions les plus élevées, en ce qu’elles sont proportionnelles à la pension d’abord (et donc plus importantes pour les pensions élevées), non assujetties à l’impôt sur le revenu ensuite.

Cette majoration pour trois enfants contribue donc à accroître les écarts de pension entre hommes et femmes, puisque les hommes ont en moyenne, avant cette majoration, une pension déjà plus élevée.

Le Gouvernement entend, dans un premier temps, corriger une de ces deux inéquités, en assujettissant à l’impôt sur le revenu ces majorations : cette disposition, intégrée au projet de loi de finances pour 2014, contribue au rééquilibrage de court terme du système de retraite, tout en mettant fin à la principale distorsion constatée.

Si le rapport remis par Yannick Moreau, déjà cité, conclut de son analyse d’ensemble des avantages familiaux qu’il fallait à la fois simplifier et faire converger les avantages familiaux existant dans les différents régimes, il a toutefois estimé que des travaux complémentaires importants étaient encore nécessaires, d’autant que ces réflexions supposaient d’être inscrites dans un cadre inter-régimes, de base et complémentaires.

Le présent article 13 reprend à son compte ce constat de besoin d’une réforme, mais également de la nécessité d’une part d’en définir les contours à la lumière d’un rapport dédié, d’autre part d’en différer les effets, afin de maintenir inchangées les règles de calcul de la pension applicables aux générations proches de la retraite.

Pour ces raisons, l’article 13 propose que le Gouvernement remette un rapport au Parlement permettant de dégager les pistes possibles de la réforme des droits familiaux afin de mieux compenser les effets sur la carrière et les pensions des femmes de l’arrivée d’enfants au foyer.

4.14. Article 14 - Faciliter l’acquisition de trimestres pour les assurés à faible rémunération

4.14.1. Diagnostic et objectif poursuivi

Le nombre de trimestres d’assurance vieillesse validés par un salarié ou un assuré relevant d’un régime dit « aligné » sur le régime général (RSI, salariés agricoles) au titre d’une année civile n’est pas établi uniquement sur la base du montant de sa rémunération soumise à cotisations sur l’année. Sont validés autant de trimestres que le salaire annuel représente de fois 200 heures de travail rémunérées au SMIC avec un maximum de quatre trimestres par année civile.

Ainsi un salarié valide l’année complète dès lors que sa rémunération annuelle brute atteint 800 heures de SMIC. Il est donc possible de valider une année entière :

- en un peu plus de 10 mois et demi, pour un salarié à mi temps seulement rémunéré au SMIC ;

- en moins de 5 mois et demi seulement pour un salarié occupant un poste à temps plein (35h/semaine) rémunéré au SMIC ;

- en moins de 2 mois et demi pour un salarié percevant une rémunération mensuelle brute égale au plafond de la sécurité sociale.

Les cotisations versées au-delà n’augmentent pas la durée d’assurance mais peuvent permettre, dans la limite du plafond de la sécurité sociale, d’améliorer le salaire annuel moyen, sauf si elles ne rentrent pas parmi les meilleures années prises en compte pour le calcul (25 au maximum).

Ce mode de validation de trimestres, s’il est globalement favorable aux assurés, induit toutefois des effets paradoxaux :

- un artisan à très faibles revenus, mais travaillant à temps complet, ne validera pas 4 trimestres si son revenu annuel est inférieur à 800 fois le SMIC horaire, alors qu’un assuré affilié à un seul régime, et à revenus élevés, validera 4 trimestres en moins de trois mois d’activité.

- un assuré, affilié à deux régimes, pourra facilement valider plusieurs trimestres au régime général (en plus de ses 4 trimestres dans son régime d’affiliation), pour peu que sa rémunération y soit proche du plafond, y compris pour une quotité travaillée faible. En effet, si la durée d’assurance tous régimes est écrêtée à 4 trimestres par an, il est possible, pour le calcul de la pension, de prendre en compte 4 trimestres par régime, sans écrêtement.

Le 12e rapport du COR a souligné que cette règle dite des « 200 heures SMIC » combinée avec les règles de calcul du salaire annuel moyen (SAM) « apparaît tantôt favorable, tantôt défavorable aux assurés. Comme pour la règle des 25 meilleures années, elle avantage les salariés à carrière plutôt longue mais peut pénaliser les assurés à carrière courte et précaire ».

§ L’acquisition de trimestres d’assurance vieillesse sera largement facilitée pour les assurés à temps partiel, qui sont très majoritairement des femmes

L’article 13 permet d’assouplir et de préciser les conditions d’acquisition des trimestres d’assurance au régime général et dans les régimes alignés sur lui ; en adaptant l’article L. 351-2 du code de la sécurité sociale, il conduira le gouvernement à procéder à deux modifications, par décret :

§ Un assouplissement des conditions d’acquisition des trimestres, en les faisant passer de « 200H SMIC » à « 150H SMIC » : un assuré à temps très partiel (1/3 temps) au SMIC pourra désormais valider 4 trimestres par an grâce à son activité soumise à cotisation. Aujourd’hui, ce même assuré ne valide que 3 trimestres, alors même qu’il est en activité toute l’année. Cette mesure est particulièrement profitable aux assurés à bas salaires et à faible quotité de travail – en particulier les femmes, qui représentent la grande majorité des salariés à temps partiel.

§ Un mécanisme de report de cotisations d’une année civile vers l’année suivante, lorsqu’un assuré n’a pas validé quatre trimestres d’assurance vieillesse lors de chacune de ces deux années. La mesure consiste à autoriser un transfert vers l’année suivante du reliquat de cotisations qui n’a pas permis de valider un trimestre. Les reliquats de cotisations pourraient ainsi correspondre, au total du montant des cotisations versées l’année civile considérée, diminué du produit du nombre de trimestres validés la même année et du montant minimal réglementaire permettant de valider un trimestre. Par exemple, si un assuré a cotisé à hauteur de 550 fois le SMIC horaire en 2015 (sans valider 4 trimestres), 450 H SMIC seraient conservées pour 2015 (soit 3 trimestres) et 100 H SMIC seraient transférées vers l’année suivante, si toutefois ce transfert permet de valider un trimestre supplémentaire l’année suivante. Dans ce même exemple, en 2016, le même assuré qui cotiserait à hauteur de 550 H SMIC bénéficiera, grâce au transfert de 100 H SMIC, de 650 H SMIC à son compte, soit quatre trimestres.

Ce mécanisme permet donc de compléter la précédente mesure, en permettant à des assurés qui, temporairement, travailleraient à très faible quotité (1/4 temps) et au salaire minimum, de valider néanmoins quatre trimestres.

Enfin, à ces deux mesures très favorables s’ajoute une mesure d’équité, qui consiste à appliquer un plafond spécifique pour le calcul de la durée d’assurance au régime général et dans les régimes alignés : ne seront prises en compte, pour le seul décompte de la durée d’assurance, que les cotisations portant sur un revenu mensuel inférieur à 1,5 SMIC, en lieu et place du plafond de la sécurité sociale. Cette disposition concernera le seul décompte de la durée d’assurance : elle sera sans impact sur le calcul du salaire de référence, notamment, qui reflète la contributivité de l’assuré. Elle permettra d’éviter qu’un assuré fortement rémunéré puisse (le plus souvent en plus d’une activité principale relevant d’un autre régime et qui lui procure déjà quatre trimestres24), valider quatre trimestres au régime général en quelques semaines d’activité salariée.

Cette mesure s’articule avec les deux précédentes. Le présent article facilite en effet l’acquisition de trimestres d’assurance vieillesse pour les assurés à temps très partiel : compte tenu du décompte annuel de la durée d’assurance (lié à des pratiques de gestion, les régimes ne disposant pas des données trimestrielles) cet assouplissement très favorable conduirait un assuré rémunéré au plafond de la sécurité sociale à valider 4 trimestres non plus en un peu moins de 3 mois, comme actuellement, mais en un peu moins de deux mois.

Il est donc proposé, en introduisant ce plafonnement à hauteur de 1,5 SMIC, de corriger un effet induit de la mesure réglementaire favorable, ciblée sur les assurés à bas salaires et à temps partiel, sur des assurés à forte rémunération et travaillant quelques semaines dans l’année. Avec cet ajustement, un assuré rémunéré au plafond validera, comme aujourd’hui, 4 trimestres en un peu moins de 3 mois, et non en moins de 2 mois si cet ajustement n’était pas proposé.

La mesure dite « 150H SMIC » est seulement réglementaire ; elle est toutefois étroitement liée aux deux autres dispositions rendues possibles par l’adaptation législative proposée.

4.14.2. Autre option possible

Alternativement, le décompte des trimestres d’assurance vieillesse aurait pu être effectué en fonction du nombre d’heures de travail dans l’année civile, en supprimant toute référence à la rémunération : un trimestre aurait pu être validé pour une activité à temps partiel, au-delà d’une certaine quotité travaillée (1/3 temps pendant 3 mois par exemple, ou encore 150 heures, par analogie avec le mécanisme des 150 H SMIC). Toutefois, un tel dispositif aurait supposé que les caisses de retraite des régimes alignés disposent des quotités de travail et des périodes d’activité des salariés, et non de la seule rémunération soumise à cotisation : une telle évolution, particulièrement longue et complexe à mettre en place, a conduit à privilégier une option plus simple en gestion, qui permet en outre facilement de totaliser les activités entre régimes dits alignés (totalisation prévue à l’article 28 du présent projet de loi).

4.14.3. Impacts de la mesure

La mesure s’appliquera au régime général et aux régimes alignés sur lui (RSI, salariés agricoles). La disposition relative au possible transfert de cotisations d’une année civile vers l’année suivante implique d’importants aménagements en gestion, liés aux recalculs consécutifs à l’intégration de ces reliquats de cotisations.

La DREES a simulé le passage de 200h SMIC à 150h SMIC pour la validation d’un trimestre à partir de 2014 (le chiffrage tient à la fois compte des gains de l’effet cotisation, qui joue dès 2014 et des masses de prestations qui seront versées in fine à la liquidation). Cette mesure favorable, qui permet d’augmenter le nombre de trimestres validés, a ensuite été couplée à la seconde mesure favorable, consistant à tenir compte des reliquats de trimestres entre deux années consécutives. Les deux mesures combinées de solidarité représentent une charge nouvelle pour le régime général, et un effort conséquent de la solidarité nationale à destination des assurés à temps partiel, comme le souligne le tableau suivant :

Organismes impactés

(régime, branche, fonds)

Impact financier en droits constatés (en M€ constants 2011)

Coût ou moindre recette (signe -)

Economie ou recette supplémentaire (signe +)

2014

2020

2030

2040

Ensemble des régimes de base

-10

-30

-180

-496

Pour la génération 1982, selon la DREES, environ 15% des assurés bénéficieraient de la mesure et gagneraient en moyenne plus de 5 trimestres. Pour les 85% d’assurés restants la mesure serait neutre.

4.15. Article 15 – Elargissement de la retraite anticipée pour carrières longues

4.15.1. Diagnostic et objectif poursuivi

La retraite anticipée pour longue carrière permet aux assurés qui justifient au moins de la durée d’assurance cotisée requise pour leur génération de partir à la retraite avant l’âge légal (soit 62 ans pour la génération 1955).

Deux âges d’accès au dispositif sont possibles à compter de la génération 1960 :

- un départ est possible à compter de 58 ans pour les assurés justifiant de la durée d’assurance cotisée requise pour leur génération, majorée de huit trimestres cotisés, et qui ont commencé à travailler particulièrement jeunes (avant 16 ans) ;

- un départ est possible à partir de 60 ans pour les assurés justifiant de la durée d’assurance cotisée requise pour leur génération et qui ont commencé leur activité avant 20 ans.

Le décret du 2 juillet 2012 a considérablement élargi les conditions d’accès de la retraite anticipée à 60 ans :

-la majoration de huit trimestres validés qui existait (il fallait donc 2 annuités supplémentaires pour partir à 60 ans) a été supprimée et la condition de début d’activité a également été assouplie puisqu’elle est passée de 18 à 20 ans.

-les aléas de carrière ont été mieux pris en considération, en intégrant, au sein des trimestres réputés cotisés, 4 nouveaux trimestres possibles : 2 trimestres de chômage, 2 trimestres de maternité.

En effet, ce dispositif centré sur les carrières longues s’appuie sur la notion de durée d’assurance cotisée : elle correspond aux trimestres acquis par les cotisations de l’assuré, c’est-à-dire par ses périodes d’activité. Depuis la création du dispositif en 2003, il a été admis que certains trimestres validés (c'est-à-dire acquis sans contrepartie de cotisations à la charge de l’assuré et financés par la solidarité nationale) soient considérés comme cotisés, à savoir quatre trimestres de service national et quatre trimestres de maladie/maternité/accident du travail ou maladie professionnelle (AT-MP).

Le décret du 2 juillet 2012 a donc élargi le nombre de trimestres « réputés cotisés » pour la retraite anticipée carrière longue, en ajoutant deux trimestres de chômage et deux trimestres supplémentaires au titre de la maternité (un trimestre est accordé par maternité, positionné le trimestre civil de l’accouchement). Ce même décret a supprimé la différence, peu compréhensible pour les assurés et conduisant parfois à des situations d’inéquité, entre trimestres validés et trimestres cotisés. Logiquement, s’agissant de carrières longues, la durée de référence est constituée par les périodes d’activité effective de l’assuré, ayant donné lieu à cotisations sociales ; dans le même temps, dans un souci de justice, ce décret a « réputés cotisés » des trimestres financés par la solidarité nationale (2 trimestres de maternité et de chômage).

§ Le présent article permet de préciser cette distinction entre trimestres effectivement cotisés et trimestres réputés cotisés ; son décret d’application conduira à assouplir à nouveau les conditions d’accès à la retraite à 60 ans

Le Gouvernement se propose d’élargir à nouveau le nombre de trimestres « réputés cotisés » afin de faciliter l’accès à la retraite anticipée pour longue carrière à des assurés qui, bien qu’ayant commencé leur activité jeune, ont connu des aléas de carrières.

Dans ce but, il paraît préférable de clarifier la rédaction de l’article législatif relatif à cette retraite anticipée : il est donc proposé, à l’article 15, d’élargir le champ des trimestres qui peuvent être réputés cotisés par décret. Jusqu’ici restreint aux seuls trimestres de service national, ce champ potentiel serait élargi à l’ensemble des « périodes assimilées », c’est-à-dire à toutes les validations de trimestres validées par la solidarité nationale et destinées à limiter l’effet d’un aléa de carrière (chômage, invalidité, maladie..) sur les droits à pension. Cette disposition est reprise dans l’ensemble des régimes qui appliquent la retraite anticipée pour carrière longue.

A compter du 1er janvier 2014, par décret, seront donc réputés avoir donné lieu à cotisation, pour le bénéfice de la retraite anticipée « carrières longues » :

- deux trimestres supplémentaires de chômage ;

- deux trimestres acquis au titre du versement de la pension d’invalidité ;

- tous les trimestres acquis au titre de la maternité.

Tableau récapitulatif des trimestres réputés cotisés

Avant 2012

Depuis juillet 2012

A compter de 2014

0 trimestres maternité

2 trimestres maternité

Tous les trimestres maternité

0 trimestre de chômage

2 trimestres de chômage

4 trimestres de chômage

0 trimestres invalidité

0 trimestres invalidité

2 trimestres invalidité

4 trimestres de service national

4 trimestres de service national

4 trimestres de service national

Bloc de 4 trimestres maladie / maternité / invalidité / AT-MP

Bloc de 4 trimestres maladie / maternité / invalidité / AT-MP

Bloc de 4 trimestres maladie / maternité / invalidité / AT-MP

Cette mesure est donc particulièrement favorable aux carrières heurtées : les assurés qui ont commencé à travailler jeune pourront partir à 60 ans à taux plein, même si leur fin de carrière a par exemple été marquée par une période de chômage (1 an), suivi d’une période de perception d’une pension d’invalidité (18 mois).

§ Cette disposition corrige une inégalité entre hommes et femmes

Précédemment, une femme pouvait au maximum se voir accorder huit trimestres : deux au titre du chômage, quatre au titre de l’ensemble maladie-maternité-rente AT/MP et deux supplémentaires pour la maternité - contre dix trimestres au maximum pour un homme : quatre trimestres au titre du service national, quatre trimestres au titre de la maladie et deux trimestres au titre du chômage.

Le décret d’application de la retraite anticipée prendra en compte tous les trimestres acquis au titre de l’accouchement, afin de corriger cette distorsion entre hommes et femmes en termes de trimestres réputés cotisés. Ainsi, pour la RALC, seraient réputés cotisés tous les trimestres acquis au titre de la maternité.

4.15.2. Impacts de la mesure

Cette mesure concerne la plupart des régimes obligatoires de base.

Organismes impactés

(régime, branche, fonds)

Impact financier en droits constatés (en M€ constants 2011)

Coût ou moindre recette (signe -)

Economie ou recette supplémentaire (signe +)

2014

2020

2030

2040

Impact sur le solde CNAV

0

-285

-228

-62

4.16. Article 16 – Aider les assurés à racheter leurs années d’étude

4.16.1. Diagnostic et objectif poursuivi

§ Le rachat d’années d’études est très peu utilisé par les jeunes actifs, en raison de son coût élevé

Les assurés peuvent d’ores et déjà racheter jusqu’à 12 trimestres d’assurance au titre des années d’études, dans le cadre du dispositif prévu par l’article L. 351-14-1 du code de la sécurité sociale créé en 2003 ; un mécanisme équivalent existe dans l’ensemble des régimes de retraite obligatoire. Le tarif de ce rachat, déterminé sur le principe de la neutralité actuarielle pour les régimes (qui revient à faire payer à l’assuré le coût que représentera, pour le régime, le supplément de pension induit par le versement) est cependant relativement élevé ce qui le rend difficile d’accès : au régime général, un rachat valable pour le taux et la proratisation coûte de 1 500 € à 2 000 € le trimestre racheté à 20 ans, et de 2200 € à 2 700 € si le rachat est effectué à 28 ans.

Pour cette raison, le rachat est surtout effectué par des assurés proches de la retraite : seuls 1% des assurés qui rachètent des années d’études ont moins de 40 ans.

Pourtant, comme le souligne le rapport de la commission pour l’avenir des retraites, le nombre de trimestres validés avant 30 ans a diminué de 11 trimestres entre la génération 1950 et la génération 1978 : les assurés nés en 1978 comptent en moyenne 31 trimestres validés (soit légèrement moins de 8 ans d’assurance vieillesse) à 30 ans. C’est largement lié à l’âge tardif de stabilisation dans un emploi et dans les mécanismes protecteurs de l’assurance vieillesse (les périodes assimilées, qui permettent de prendre en charge les aléas de carrière) : pour cette même génération, l’âge à partir duquel des années complètes sont validées jusqu’à 30 ans est d’un peu plus de 22 ans en moyenne. C’est dire l’intérêt que peut représenter un rachat d’années d’études, en particulier pour un assuré qui a entrepris des études supérieures longues.

§ Il est donc proposé de mettre en place un barème spécifique de rachat d’une année d’études, destiné aux jeunes actifs

L’article 16 prévoit, pour l’ensemble des régimes dans lesquels ce rachat est applicable25, d’abaisser le barème du rachat d’années d’études. Ce tarif favorable pourrait concerner jusqu’à quatre trimestres. Un décret en précisera les conditions : il s’agit en particulier de réserver ce barème favorable aux jeunes actifs, peu après la fin de leurs études. La diminution du coût du trimestre sera forfaitaire alors même que le tarif du rachat augmente proportionnellement aux revenus. De ce fait, la réduction du barème de rachat sera, en pourcentage, bien plus significative pour les assurés modestes.

Ce barème aidé sera défini par décret ; il permettra par exemple à un jeune salarié de 23 ans, rémunéré à 1.2 SMIC, de racheter un trimestre (pour un trimestre utile pour le taux et la proratisation) pour 657 € (soit moins de 40% du tarif en vigueur), ou pour 1 109 € s’il gagne plus de 3000 € par mois (soit 50 % du tarif).

4.16.2. Impacts de la mesure

Sous hypothèse d’un taux de recours à 10% au dispositif, ce rachat aidé bénéficierait à 30 000 bénéficiaires par an, pour 120 000 trimestres rachetés au total. Les 30 000 bénéficiaires concernés pourront de ce fait ouvrir droit à pension de retraite un an plus tôt : l’impact financier sur les régimes de retraite interviendra toutefois à long terme lorsque les générations concernées feront valoir droit à pension, ce qui viendra en déduction des gains en cotisations.

Organismes impactés

(régime, branche, fonds)

Impact financier en droits constatés (en M€ constants 2011)

Coût ou moindre recette (signe -)

Economie ou recette supplémentaire (signe +)

2014

2020

2030

2040

Régimes de base

+150

+300

+350

+250

4.17. Article 17 – Mieux prendre en compte les périodes d’apprentissage au titre de l’assurance retraite

4.17.1. Diagnostic et objectif poursuivi

Les apprentis, au nombre d’environ 400 000 aujourd’hui, représentent une catégorie d’assurés qui n’acquièrent pas de droits à retraite proportionnés à leur rémunération. Celle-ci est définie, sous réserve de dispositions contractuelles ou conventionnelles plus favorables, en pourcentage du SMIC, en fonction de l’âge du bénéficiaire et de sa progression dans le cycle de formation :

Tableau 1 : rémunération légale minimale des apprentis en % du SMIC

L’assiette de calcul des cotisations est déterminée à partir de cette base abattue de 11 points du SMIC (et de 20 points dans les DOM). Lorsque l’employeur rémunère l’apprenti au-delà du montant minimal, la cotisation reste assise sur cette même assiette.

Tableau 2 : assiette des cotisations en % du SMIC

Ces règles pénalisent les apprentis pour leurs droits à retraite. En effet, comme pour les autres assurés, le nombre de trimestres d’assurance vieillesse validés au titre d’une année civile est établi sur la seule base du montant de la rémunération soumise à cotisations : sont validés autant de trimestres que le salaire annuel représente de fois 200 heures de travail rémunérées au SMIC. Pour valider 4 trimestres par an, l’assiette abattue doit donc être supérieure à 44 % du SMIC.

Ainsi, les apprentis ne peuvent valider une année entière qu’à la troisième année de leur apprentissage s’ils ont plus de 18 ans et la deuxième et la troisième année de leur apprentissage s’ils ont plus de 21 ans. Un apprenti qui commence son apprentissage à 16 ans validera seulement 7 trimestres sur trois ans. Le tableau suivant indique pour chacune des situations le nombre de trimestres de retraite validés pour une année complète passée en apprentissage :

Tableau 3 : nombre de trimestre actuellement validés

L’augmentation du nombre d’apprentis, la diminution de la durée des contrats et l’élévation du niveau de diplôme préparé renforcent les interrogations relatives à l’insuffisance des droits à retraite validés. Par ailleurs, la Cour des comptes dans son rapport de 2009 sur la sécurité sociale notait que « l’augmentation importante et rapide du nombre d’apprentis, dont la progression moyenne annuelle est de l’ordre de 12% depuis 1996 donne à cette question une acuité accrue. ».

4.17.2. Mesures proposées

Afin de mieux prendre en compte les périodes d’apprentissage au titre de l’assurance vieillesse tout en évitant un report financier sur les employeurs ou le budget de l’Etat un mécanisme en deux temps est proposé : il s’agit, d’une part, de passer à une assiette réelle pour les cotisations finançant le risque vieillesse de base et, d’autre part, d’introduire un système de validation complémentaire de droit à retraite de base pour les apprentis qui ne valideraient toujours pas autant de trimestre de retraite que de trimestre d’apprentissage sur une année civile.

§ Supprimer l’abattement de 11 points sur le seul risque vieillesse

Afin de rendre le système de retraite plus équitable notamment en faveur des jeunes travailleurs, il est proposé de rétablir l’assiette des cotisations de retraite de base des apprentis au niveau de leur rémunération réellement perçue.

La mesure consiste ainsi à supprimer l’abattement de 11 points sur le risque vieillesse de base. La suppression de l’abattement aura pour conséquence, dans le contexte d’un passage de la règle de validation de trimestres de 200 heures à 150 heures SMIC travaillés, l’obtention de 4 trimestres dès que la rémunération dépasse 33 % du SMIC, c’est à dire pour la quasi-totalité des apprentis à l’exception de ceux en 1ère année de formation et âgés de moins de 18 ans (qui valideront 3 trimestres).

Afin de ne pas accroître le coût pour les employeurs d’apprentis, une exonération est mise en place en complément des exonérations de cotisations patronales et salariales compensées par l’Etat et de l’exonération de CSG-CRDS. Comme pour cette dernière le financement de la nouvelle mesure sera assuré par la sécurité sociale, pour un montant de 140 M€26, et devra faire l’objet d’une mesure prévoyant sa non-compensation dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014.

§ Introduire un mécanisme de validation complémentaire pour les apprentis qui continueraient à ne pas pouvoir valider 4 trimestres sur une année civile de formation (1ère année avant 18 ans)

La suppression de l’abattement de 11 points sur l’assiette des cotisations vieillesse ne permet toutefois pas aux apprentis en 1ère année de formation et âgés de moins de 18 ans de valider systématiquement 4 trimestres par année civile de formation.

Tableau 4 : répartition des effectifs d’apprentis

 

avant 18 ans

de 18 à 20 ans

21 ans et plus

TOTAL

1ère année

17%

22%

15%

54%

2ème année

14%

17%

12%

43%

3ème année

1%

2%

1%

4%

TOTAL

32%

41%

27%

100%

Pour ces derniers, l’introduction d’un mécanisme de validation complémentaire de type « service civique » est proposé afin de garantir à l’ensemble des apprentis une prise en compte des trimestres de retraite équivalente à la durée d’apprentissage sur une année civile.

En pratique, il s’agit d’assurer le versement du complément de cotisations d’assurance vieillesse nécessaire pour valider auprès des régimes de base un nombre de trimestres correspondant à la durée du contrat d’apprentissage. Une cotisation sera ainsi versée par le FSV en appliquant le taux de cotisation vieillesse de droit commun (soit 16,85 %) au différentiel d’assiette (écart entre l’assiette cotisée au titre de la rémunération et l’assiette fixée par décret pour l’acquisition du trimestre27). Une fois le montant du trimestre fixé, on valide un mois pour chaque mois civil entier et un trimestre d'assurance par période de trois mois, mais pas forcément par trimestre civil (en application de l’article D. 372-4 de la sécurité sociale).

Sur la base de l’assiette retenue pour le service civique, ce dispositif de validation complémentaire conduira à un transfert de 18 M€ du FSV vers les régimes vieillesse de base.

4.17.3. Options possibles

Deux autres options auraient pu être envisagées :

- Supprimer l’abattement de 11 points sur l’ensemble des cotisations patronales et salariales de sécurité sociale, ce qui aurait eu pour conséquence de normaliser davantage l’assiette de cotisations des apprentis mais aurait conduit à retenir un montant de non compensation plus important en LFSS, estimé à 290 M€ au lieu de 140 M€.

- Maintenir l’assiette abattue pour les apprentis et introduire un mécanisme d’assiette forfaitaire fixée au niveau minimum permettant la validation des trimestres de retraite, soit 150 heures SMIC par trimestre. Cette option a été exclue car elle est totalement contraire aux principes de la sécurité sociale en ce qu’elle permet de choisir le risque couvert et d’optimiser les règles de validation.

4.17.4. Impacts de la mesure

L’impact sur les droits à retraite des apprentis sera immédiat : avec la suppression de l’abattement de 11 points sur le risque vieillesse, le passage à la règle des 150 heures/smic et l’introduction d’un système de cotisation complémentaire, tous les apprentis verront leur nombre de trimestres validés équivalent à leur durée d’apprentissage sur année civile.

Par ailleurs, la réforme proposée est ajustée de façon à ne pas surenchérir le coût du travail pour les employeurs et à maintenir ainsi l’attractivité du recrutement d’apprentis. Enfin, la validation de droit sociaux sans baisse du net versé ne peut que renforcer l’attractivité de l’apprentissage auprès des jeunes, d’autant que ce dispositif a déjà fait ses preuves en matière d’insertion sur le marché du travail.

Impacts économiques et financiers

Organismes impactés

(régime, branche, fonds)

Impact financier en droits constatés (en M€ 2011)

Coût ou moindre recette (signe -)

Economie ou recette supplémentaire (signe +)

2014

2017

2020

2030

2040

Tous régimes de retraite légalement obligatoire

18

18

18

18

18

FSV

-18

-18

-18

-18

-18

Ensemble des régimes de retraite de base

0

0

0

0

0

4.18. Article 18 – Améliorer la prise en compte des périodes de formation des chômeurs

4.18.1. Diagnostic et objectif poursuivi

§ Les demandeurs d’emplois qui ne relèvent plus du régime d’assurance chômage ne valident pas de trimestres d’assurance vieillesse pendant leurs périodes de stage de formation professionnelle, au contraire des stagiaires indemnisés par Pôle Emploi qui valident des trimestres au titre du chômage

Les demandeurs d’emploi qui ne relèvent plus du régime d’assurance chômage (et ne bénéficient plus de l’allocation de retour à l’emploi : allocation de solidarité spécifique, revenu de solidarité active, …) ainsi que les travailleurs reconnus handicapés satisfaisant également une condition de durée d’activité et les apprentis dont le contrat a été rompu, sans qu’ils soient à l’initiative de cette rupture peuvent bénéficier pendant leurs périodes de stages de formation professionnelle d’une rémunération dont le financement est effectué par l’Etat ou les régions, ou a minima d’une prise en charge forfaitaire de leurs cotisations sociales. Ces assurés, en particulier les premiers, sont bien souvent éligibles aux dispositifs de validations gratuites de trimestres (périodes assimilées à de l’assurance vieillesse) accordées aux chômeurs non indemnisés et financées par le Fonds de solidarité vieillesse : toutefois, en devenant stagiaires de la formation professionnelle, ils perdent ce statut et la prise en charge, par la solidarité nationale, des validations de trimestres. Si l’Etat ou la région prennent bien en charge des cotisations retraites, celles-ci sont établies sur une base forfaitaire trop faible en général pour valider des trimestres de retraite28.

Ces stagiaires de la formation professionnelle se trouvent donc souvent dans une situation plus défavorable au regard de la retraite que s’ils étaient chômeurs, indemnisés ou non, bénéficiant de périodes assimilées (un trimestre pour 50 jours de chômage). Cette inégalité de traitement constitue en outre un frein à la formation, les assurés pouvant préférer conserver le bénéfice des validations de trimestres et renoncer, pour cette raison, à une formation professionnelle.

On dénombre environ 300 000 stagiaires de la formation professionnelle.

§ Le présent article propose d’étendre pour ces situations, la possibilité de bénéficier de périodes assimilées (validations de trimestres sans contrepartie de cotisations)

L’article constitue une mesure forte d’encouragement à la formation professionnelle des chômeurs. Le II de cet article considère, pour les personnes visées ci-dessus, les périodes de stages de formation professionnelle continue rémunérés par l’État, la région et les stages de formation professionnelle non rémunérés (dont les cotisations forfaitaires sont néanmoins éligibles à une prise en charge par l’État) comme des périodes assimilées d’assurance vieillesse. Ainsi chaque totalisation de 50 jours de stage, qu’il soit ou non rémunéré par l’État ou la région, au cours de l’année civile ouvrirait droit à un trimestre d’assurance vieillesse, pris en charge par la solidarité nationale. Pour ce décompte, les jours de stages indemnisés par Pôle Emploi continueraient à être totalisés avec les autres jours de chômage indemnisé.

Cette mesure mettrait donc fin à la situation d’assurés qui perdent actuellement des droits à trimestres de périodes assimilées du fait de l’entrée en stage de formation professionnelle – situation sur laquelle le Défenseur des droits a alerté le gouvernement à de nombreuses reprises29.

§ Cette mesure favorable serait prise en charge par le Fonds de solidarité vieillesse

Le I du même article prévoit le financement de cette mesure de solidarité par le Fonds de solidarité vieillesse. Le FSV prend en effet en charge, de manière forfaitaire, les validations de trimestres sans contrepartie de cotisations (dites périodes assimilées) au régime général : la mesure impactera par conséquent le FSV et non les régimes de retraite.

La cotisation vieillesse calculée sur l’assiette forfaitaire devrait être maintenue, afin de ne pas faire de dissociation d’assiette selon les risques, dans la mesure où d’autres cotisations sont prélevées. Toutefois, il sera tenu compte de ces cotisations pour le calcul de la compensation globale versée à la CNAV par le FSV.

Une entrée en vigueur différée de la mesure, au 1er janvier 2015, est prévue afin de préparer les échanges d’information entre les caisses de retraite et l’Agence de Services et de Paiement en charge des opérations de protection sociale des chômeurs non indemnisés par Pôle Emploi.

4.18.2. Une extension des périodes assimilées au titre du chômage non indemnisé par décret en complément de la présente mesure

§ La validation de trimestres au titre des périodes de chômage non indemnisé s’interrompt en cas de reprise d’emploi, même si celle-ci est insuffisante pour valider un trimestre

Les périodes de chômage non indemnisées peuvent donner droit à validation gratuite des trimestres. La première période est validée pendant 1 an et demi (dans la limite de 6 trimestres). Ensuite, à chaque fois où au cours de sa carrière, il arrive à expiration de droits à assurance chômage, l’assuré continue de valider des trimestres pendant un an. Cette durée est toutefois portée à 5 ans lorsque l’assuré est âgé d’au moins 55 ans à la date où il cesse de bénéficier des indemnités et a cotisé au moins 20 ans.

Le financement de ces trimestres est assuré par le Fonds de solidarité vieillesse (FSV), selon une base forfaitaire correspondant à 90% du SMIC, pour des montants (près de 11 Md€ prévus pour 2013) qui représentent plus de la moitié du total des dépenses du fonds.

Un chômeur non indemnisé valide des droits à retraite dans les conditions et limites de durée précisées supra. S’il reprend une activité avant expiration de ces délais, il cesse alors de bénéficier de trimestres de « périodes assimilées » et ce même si l’activité professionnelle retrouvée est insuffisante pour lui permettre de valider des trimestres d’assurance et qu’il reste en recherche d’emploi (dans le cas par exemple des chômeurs de catégorie B).

§ Afin d’éviter que l’alternance entre chômage non indemnisé et emploi ne réduise les droits à validation de trimestres, le Gouvernement mettra en place, par décret, une possibilité de maintien des droits à validation de trimestres pour chômage non indemnisé, même en cas de reprise d’emploi, si l’assuré reste inscrit sur les listes de Pôle Emploi

En cohérence avec la mesure législative du présent article, et au-delà du seul cas des stagiaires de la formation professionnelle, le gouvernement entend sécuriser, en termes de droits à l’assurance vieillesse, les périodes de transition entre chômage non indemnisé et emploi.

Par conséquent, pour remédier à cette difficulté qui est susceptible de pénaliser des chômeurs retrouvant un emploi, la période de chômage non indemnisé pourra donner lieu à validation de trimestres d’assurance vieillesse à la seule condition que l’assuré soit inscrit sur la liste des demandeurs d’emploi, sans que la reprise d’une activité n’interrompe ces droits. Les trimestres de « période assimilée » viendront le cas échéant compléter les trimestres acquis en contrepartie des cotisations.

ð A titre d’exemple, un assuré de 45 ans qui, à l’issue de chômage indemnisé, serait encore en recherche d’emploi, ouvre droit à un an de périodes assimilées au titre du chômage non indemnisé, à compter par exemple de mars 2014.

S’il retrouve un emploi faiblement rémunéré en avril 2014, ou un CDD, il perd ensuite droit à ces périodes assimilées à l’issue de cette courte période d’emploi (car ces périodes de chômage non indemnisé doivent succéder immédiatement à du chômage indemnisé).

Il est donc proposé que cet assuré, s’il est resté inscrit sur les listes de demandeur d’emploi (ce qui signifie que sa reprise d’emploi est temporaire ou insuffisante), puisse continuer à valider ses droits à périodes assimilées au titre du chômage indemnisé.

ð Dans ce cas, cet assuré aura des périodes assimilées « chômage non indemnisé » jusqu’en février 2015 (pendant un an), même s’il est en emploi, dès lors qu’il reste inscrit à Pôle emploi.

Il s’agit donc d’une logique de portabilité des droits, destinée à limiter les désincitations à reprendre un emploi (fût-il temporaire) et à mieux protéger les assurés confrontés à du chômage de longue durée.

Cette mesure, d’ordre réglementaire (article R. 351-12 du code de la sécurité sociale), précisera donc l’articulation entre validations de chômage non indemnisé et périodes d’emploi : les validations au titre du chômage non indemnisé qui succèdent à du chômage indemnisé (ou, pour les jeunes assurés, à une période d’emploi, s’ils ne sont pas éligibles à indemnisation du chômage) se prolongeront, à hauteur respectivement d’un an ou d’un an et demi, tant que l’assuré restera inscrit comme demandeur d’emploi – et ce même en cas de reprise d’une activité temporaire.

4.18.3. Impacts de la mesure

Le coût de la mesure sera compensé par le FSV selon les mêmes modalités de calcul que les périodes de chômage soit par un versement forfaitaire égal au produit : a) du taux global de cotisations pour la couverture du risque vieillesse ; b) d’une assiette forfaitaire de 90% SMIC ; c) des effectifs concernés.

L’Agence de Service et de Paiement a traité en 2011 pour l’État et les conseils régionaux (sauf pour le conseil régional de Poitou-Charentes qui le fait lui-même) les opérations de rémunération et de protection sociale d’environ 300 000 stagiaires30 de la formation professionnelle par l’Etat ou la région

La durée moyenne des stages étant de 3 mois31, le nombre total de trimestres devrait être proche en moyenne à un par assuré.

Le montant d’une compensation par le FSV selon les mêmes modalités de calcul que les périodes de chômage présentées supra aurait coûté environ 222 M€ au titre de l’année 201332.

Il est en revanche difficile d’évaluer finement l’impact en masses de prestations pour le régime général, faute d’indication sur la répartition par âge des stagiaires. En supposant que cette population est hétérogène en termes de tranches d’âge, la montée en charge du coût pour la CNAV serait la suivante : 6 M€ (€ constants 2013) en 2016, 57 M€ en 2020, 248 M€ en 2030, 357 M€ en 2040, 415 M€ en 2050 et 480 M€ à l’horizon 2060. Ce coût est calculé à partir de la pension moyenne CNAV de droits directs (654 € mensuel en 2012) servi un trimestre plus tôt pour 80% des stagiaires.

Organismes impactés

(régime, branche, fonds)

Impact financier en droits constatés (en M€ constants 2011)

Coût ou moindre recette (signe -)

Economie ou recette supplémentaire (signe +)

2016

2020

2030

2040

Ensemble des régimes

-10

-57

-248

-357

4.19. Article 19 : Améliorer les droits à pension des conjoints collaborateurs

4.19.1. Diagnostic et objectif poursuivi

Actuellement, en cas de divorce, de décès ou de départ à la retraite du chef d’entreprise, son conjoint collaborateur cesse d’être affilié et d’acquérir des droits à l’assurance vieillesse, à moins qu’il ne puisse prendre la direction de l’entreprise.

Pour éviter cette interruption brutale de droits, l’article ouvre aux conjoints collaborateurs le droit de cotiser à l’assurance volontaire vieillesse – cette possibilité est aujourd’hui réservée aux seuls chefs d’entreprise cessant toute activité professionnelle avant d’atteindre l’âge de la retraite. Les conjoints-collaborateurs pourront ainsi, s’ils le souhaitent, contribuer à améliorer le niveau de leur pension ou à partir plus tôt à taux plein.

Ce droit nouveau est ouvert aux conjoints d’artisans et commerçants, d’exploitants agricoles et de professions libérales : ces conjoints collaborateurs, qui sont environ 100 000 au total, sont dans leur immense majorité des femmes. Cette mesure favorable participe donc du renforcement des droits à pension des femmes, en particulier lorsqu’elles sont en fin de carrière et éprouvant plus de difficulté à se réinsérer dans l’emploi. Un décret précisera les modalités de mise en œuvre de cette assurance volontaire et notamment le délai dans lequel la demande d’adhésion devra être formulée.

4.19.2. Impacts de la mesure

La mesure relative à l’assurance volontaire vieillesse n’aura pas d’impact financier direct sur les régimes, l’assuré volontaire cotisant selon les taux de droit commun et sur une assiette représentative du montant de ses revenus d’activité antérieurs. On compte environ 100 000 conjoints collaborateurs dont plus de la moitié d’un chef d’exploitation agricole.

Titre II - Chapitre IV : Améliorer les petites pensions des non salariés agricoles

§ La faiblesse des pensions agricoles mérite de renforcer les solidarités en faveur de la population agricole

La pension moyenne de droit direct (y compris avantages complémentaires et allocation du minimum vieillesse) servie par le régime des non salariés agricoles (NSA) s’élevait fin 2011 à 377€ (toutes durées d’assurance confondues).

Les pensions de droit direct des retraités NSA sont inférieures en moyenne de près de 40 % à celles des retraités du régime général et du RSI. En effet, pour une carrière complète, la pension moyenne de droit direct s’élève à 1 015 € au régime général et à 625 € au régime NSA, soit un montant inférieur de 38 %.

Cet écart est la résultante de plusieurs phénomènes :

- le calcul de la pension agricole s’effectue sur la totalité de la carrière et pas sur les 25 meilleures années ;

- les revenus agricoles sont faibles,

- un barème de points de retraite proportionnelle fixé avant 1990 sur le revenu cadastral,

- l’ouverture récente (1994) de la retraite proportionnelle aux aides familiaux et conjoints,

- la création récente d’un régime complémentaire obligatoire dont le taux de cotisation est par ailleurs faible,

- l’absence de retraite complémentaire pour les membres de famille actuellement retraités.

La faiblesse des pensions est particulièrement prononcée pour les femmes, majoritairement anciens membres de famille.

Pour les pensions nouvellement liquidées, la mise en place en 2009 d’un mécanisme de minimum contributif, par des majorations de la pension de retraite (voir infra) a pu augmenter le niveau des pensions de base.

Le présent chapitre, qui se décline en trois articles, concrétise les engagements pris par le Président de la République et met en place les dispositifs permettant de relever substantiellement le niveau des petites retraites.

Il convient de noter que ces dispositions font l’objet d’un financement spécifique, qui sera soumis au Parlement dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014. Ce financement sera notamment assuré par la suppression de schémas classiques et répandus de minoration de l’assiette sociale par le biais de recours à des formes sociétaires adaptées, sur le modèle des dispositions prises lors de la dernière LFSS s’agissant des travailleurs indépendants.

4.20. Article 20 : Suppression de la condition de 17 ans ½ pour bénéficier de la pension majorée de référence (PMR)

4.20.1. Diagnostic et objectif poursuivi

Les non salariés agricoles bénéficient depuis le 1er janvier 2009 d’un dispositif spécifique de majoration des pensions de retraites dite « pension majorée de référence » (PMR) servies par le régime d’assurance vieillesse des personnes non salariées agricoles. Ce dispositif permet de servir un montant minimum de retraite égal, au 1er avril 2013, pour une carrière complète, à 681,20 € par mois pour les chefs d’exploitation (et pour les conjoints survivants) et à 541,30 € par mois pour les conjoints collaborateurs, les anciens conjoints participant aux travaux et les aides familiaux.

Trois conditions cumulatives d’ouverture de droit à la majoration des retraites personnelles non salariées agricoles sont requises pour les pensions prenant effet à compter du 1er janvier 2002 :

- justifier d’une durée minimale d’assurance dans le régime des personnes non salariées agricoles de 17,5 années depuis le 1er janvier 2011 (22,5 années étaient nécessaires auparavant),

- bénéficier d’une retraite à « taux plein » dans le régime des personnes non salariées agricoles,

- avoir fait valoir l’intégralité des droits en matière d’assurance vieillesse dans les régimes légalement obligatoires (condition de subsidiarité).

Conformément à l’engagement du Président de la République, la mesure consiste à supprimer la clause de stage de 17,5 ans, pour les pensions prenant effet à compter du 1er janvier 2014.

Ainsi, l’accès au dispositif de la PMR sera désormais uniquement soumis à deux conditions cumulatives :

- justifier des conditions permettant le bénéfice d’une retraite à « taux plein » ;

- avoir liquidé l’intégralité de ses droits auprès des régimes de retraite de base et complémentaire légalement obligatoires.

4.20.2. Impacts de la mesure

Organismes impactés :

Impact financier en droits constatés

(en M€ constants 2011)

2013

(rectificatif)

2014

P

2015

P

2016

P

2017

P

CCMSA / régime des NSA / branche vieillesse

-

-0,15

-0,3

-0,3

-0,3

4.21. Article 21 : Mesures relatives au régime complémentaire obligatoire des non salariés agricoles

4.21.1. Diagnostic et objectif poursuivi

Le présent article à pour objet d’améliorer en priorité les droits à pension des conjoints de chefs d’exploitation qui, le plus souvent, sont des femmes. A cette fin, trois leviers sont mobilisés :

- Attribution de points gratuits au titre de la Retraite Complémentaire Obligatoire (RCO) pour les périodes d’activité accomplies avant l’obligation d’affiliation au régime de RCO en qualité de membre de la famille ou de « petit chef » d’exploitation agricole ;

- Attribution à titre gratuit d’une réversion des points de RCO aux chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole décédés à compter du 1er janvier 2003 sans avoir procédé à la liquidation de leurs droits à pension dans le régime non salarié agricole ;

- Possibilité pour les conjoints survivants de bénéficier des points de RCO de l’assuré décédé, dans le cadre du dispositif des droits combinés.

Depuis le 1er janvier 2011, les collaborateurs d’exploitation et les aides familiaux sont affiliés au régime de RCO à titre obligatoire. Cette affiliation leur ouvre des droits moyennant le paiement d’une cotisation acquittée par le chef d’exploitation. Aucun droit gratuit ne leur a été attribué pour les années antérieures à leur affiliation contrairement à ce qui avait été mis en place en 2002 pour les chefs d’exploitation au moment de la création du régime RCO.

C’est pourquoi il est proposé, au I du présent article, que les années d’activité agricole exercées avant 2011 en qualité de collaborateur, d’aide familial ou de conjoint participant aux travaux ouvrent droit à l’attribution de points gratuits de RCO.

Les mêmes points gratuits seront attribués aux exploitants n’ayant pas eu accès au dispositif en 2003, pour leurs années d’activité antérieures à cette date.

La réforme s’appliquerait aux personnes déjà retraitées ainsi qu’aux nouveaux flux de retraités liquidant leurs pensions à compter du 1er janvier 2014.

Par ailleurs, avant le 1er janvier 2010, la pension de réversion de RCO n’était attribuée sur les points gratuits au conjoint survivant d’un chef d’exploitation ou d’entreprise agricole que lorsque ce dernier avait pris sa retraite après le 1er janvier 2003.

Pour améliorer cette situation, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2010 a prévu que la pension de réversion soit servie au conjoint survivant d’un exploitant bénéficiaire de la RCO à titre gratuit, quelle que soit la date de liquidation de sa pension.

Il convient de noter que cette mesure ne concernait pas les conjoints survivants des chefs d’exploitation décédés en activité, avant d’avoir procédé à la liquidation de leurs droits à pension.

La mesure proposée constitue donc une mesure d’équité : elle consiste, à compter du 1er janvier 2014, à finaliser le dispositif de réversion de la RCO en permettant le service d’une pension de réversion au conjoint survivant d’un exploitant bénéficiaire de la RCO à titre gratuit, décédé en activité postérieurement à l’entrée en vigueur du régime de RCO le 1er janvier 2003.

Enfin, le dispositif des droits combinés permet au conjoint survivant d’un chef d’exploitation décédé en activité d’ajouter les annuités acquises par le défunt à ses propres annuités, lorsqu’il reprend l’exploitation.

Ces droits combinés s’apparentent à un droit personnel dans la mesure où la personne qui reprend l’exploitation de son conjoint, chef d’exploitation décédé en activité, peut demander à ce que les droits à la retraite de base (retraite forfaitaire et retraite proportionnelle) acquis par le défunt soient cumulés aux siens. Dans ce cas, le conjoint survivant ne bénéficie pas de droits à réversion.

En revanche, actuellement, les droits combinés ne comprennent pas les droits acquis en retraite complémentaire obligatoire (RCO).

C’est pourquoi il est proposé d’étendre l’option des droits combinés au régime de retraite complémentaire obligatoire (RCO).

Ces deux dernières mesures figurent au III de l’article.

4.21.2. Options possibles

Le Gouvernement a élaboré plusieurs scénarios d’extension de la RCO aux membres de la famille, modulant les durées d’assurance minimales requises et les périodes d’assurance validées.

Le scénario le plus coûteux reprenait les mêmes conditions d’attribution des points gratuits que celles applicables aux chefs d’exploitation en 2003 en ne retenant cependant que 66 points pour les périodes de conjoint ou d’aide familial (correspondant aux points acquis par cotisation à compter de 2011) et 100 points pour les périodes de « petits chefs » inférieures 17,5 années.

Un scénario alternatif consistait à considérer que les retraites agricoles étant composées de trois étages (retraite forfaitaire, retraite proportionnelle et RCO), on ne pouvait attribuer la RCO à titre gratuit (le 3ème étage) que pour les périodes où la retraite proportionnelle (le 2ème étage) a été cotisée, à savoir à compter de 1994 pour les conjoints et 1999 pour les aides familiaux.

Le scénario retenu par le Gouvernement pour l’extension de la RCO aux membres de la famille consiste à accorder un maximum de 17 annuités33 de 66 points34 gratuits pour les périodes de conjoints, d’aides familiaux mais aussi de « petits chefs d’exploitation35 ».

Chaque année concernée ouvrira droit à l’attribution de 66 points gratuits (nombre de points acquis actuellement par les membres de famille en contrepartie de la cotisation forfaitaire assise sur une assiette de 1200h SMIC). Ces points seront attribués dans la limite maximale de 17 annuités. Cette limite correspond au nombre d’années qui séparent la mise en place de la retraite proportionnelle (en 1994) de la mise en place de la RCO (en 2011) pour les membres de famille travaillant sur l’exploitation.

Les conditions d’ouverture au bénéfice de la mesure sont similaires à celles mises en place en 2002 pour bénéficier du dispositif des points gratuits. Ainsi, il sera demandé aux retraités d’avant 1997 de justifier d’une durée minimale d’assurance non salariée agricole égale à 32,5 années et aux retraités d’après 1996 de justifier d’une durée minimale d’assurance non salariée agricole égale à 17,5 années ainsi que de la durée d’assurance et de périodes reconnues équivalentes tous régimes confondus, nécessaire pour bénéficier du taux plein dans le régime des non salariés agricoles.

4.21.3. Impacts de la mesure

L’impact de la mesure qui attribue des points gratuits de RCO aux « petits chefs » et aux membres de famille est évalué à partir de la base des données exhaustive des retraités non-salariés agricoles de la Caisse centrale de mutualité sociale agricole (CCMSA) au 31 décembre 2011 (1 662 000 retraités dont 1 559 000 retraités de droit direct). Sur les effectifs 2011, son coût global s’élève à 163 M€ (valeur 2011) et le nombre de bénéficiaires s’élève à 557 000 individus.

Le coût du dispositif a été projeté à horizon 2040. Selon ces projections, le coût de la mesure est évalué à 160 M€ en 2014 et à 151 M€ en 2017. Le coût est appelé à décroître sous l’effet de l’érosion démographique avec un nombre de décès de bénéficiaires supérieurs aux flux futurs de nouveaux bénéficiaires. En effet, fin 2011, le nombre de retraités de droit direct anciens membres de famille s’élève à près de 720 000 personnes. A la même période, les conjoints et aides familiaux cotisants en activité représentent moins de 50 000 individus. Ce rapport explique une diminution inéluctable du coût de la mesure qui est projeté à 142 M€ et 69 M€ en € courant à horizon 2020 et 2040.

Le coût de la mesure portant attribution d’une réversion des points de RCO attribués à titre gratuit aux chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole décédés à compter du 1er janvier 2003 sans avoir procédé à la liquidation de leurs droits à pension est estimé à 1,8 M€ en 2014, puis à environ 0,2 M€ supplémentaires par an par la suite.

Enfin le coût de la mesure étendant l’option des droits combinés au régime de retraite complémentaire obligatoire (RCO) est faible. Il est estimé à 56 000 € en 2014 et les années suivantes.

4.22. Article 22 : Exploitants agricoles : mise en œuvre de la garantie « 75% du SMIC »

4.22.1. Diagnostic et objectif poursuivi

Créé par la loi n° 2002-308 du 4 mars 2002, le RCO a expressément poursuivi l’objectif de permettre d’attribuer une pension de retraite agricole (base et complémentaire) minimale équivalente à 75 % du SMIC net à tous les chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole disposant d’une carrière complète en agriculture. Or dans la mesure où le SMIC augmente plus rapidement que les pensions de retraite, cet objectif n’a jamais pu être respecté. L’écart actuel au 1er avril 2013 est de 564 € par an. La pension minimum globale d’un chef d’exploitation pour une carrière complète s’élève actuellement à 786 € par mois, soit l’équivalent de 70,8 % du SMIC mensuel net des salariés de la production agricole (1 111 €).

C’est pourquoi le Gouvernement propose d’attribuer aux retraités, anciens chefs d’exploitation agricole, quelle que soit la date de liquidation de leur pension, un complément différentiel de points de retraite complémentaire obligatoire (RCO) permettant d’atteindre progressivement sur 3 années un montant de retraite minimal égal à 75% du SMIC net (73% en 2015, 74% en 2016 et 75% en 2017) pour une carrière complète de chef d’exploitation.

Les critères d’éligibilité de la mesure sont ceux retenus pour l’attribution des droits gratuits de RCO.

Le complément différentiel est servi dans la limite de 73% à 75% du SMIC net d’un salarié agricole, et au prorata de la durée d’assurance en qualité de chef d’exploitation ou d’entreprise agricole.

Dans le cas où un assuré peut prétendre à la fois à la PMR et au complément différentiel de RCO, la PMR sera servie en priorité.

4.22.2. II. Impacts de la mesure

Le coût de la mesure est évalué à 72 M€ en 2015, 109 M€ en 2016 et 146 M€ en 2017. Le coût serait relativement stable jusqu’en 2030 (161 M€ en 2030) sous la conjugaison de deux phénomènes aux effets contraires : l’accroissement du complément différentiel et l’érosion des effectifs du stock au 1er janvier 2015. Par la suite, le coût augmenterait de l’ordre de 3% par an pour atteindre 220 M€ en 2040, sous l’hypothèse d’une évolution annuelle du SMIC supérieure de 0,5 point à celle de l’inflation (hypothèse d’inflation annuelle de 1,75% et progression annuelle du SMIC de 2,25%).

238 000 individus seraient concernés par la mesure en 2015. 5 000 à 7 000 personnes par flux (40% des effectifs) bénéficieraient de la mesure par la suite.

L’estimation du coût de la mesure est très sensible aux hypothèses d’évolutions du SMIC et des prix. Si l’écart de 0,5 point retenu était réduit de moitié, le coût de la mesure s’établirait aux alentours de 160 M€ en 2040.

Titre II – Chapitre V : Ouvrir des solidarités nouvelles en faveur des assurés handicapés et de leurs aidants

Le chapitre V propose quatre mesures favorables destinées à améliorer la prise en considération du handicap par la retraite : il repose sur une approche globale qui valorise tant les périodes d’activité des assurés handicapés, que la mobilisation de leurs proches, lorsque l’importance du handicap nécessite l’aide permanente d’un tiers.

Deux d’entre elles sont tournées vers les assurés handicapés et permettent de mieux valoriser leurs périodes d’affiliation à l’assurance vieillesse, afin de leur permettre de partir plus tôt :

- L’article 23 propose de remplacer, pour le bénéfice de la retraite anticipée des travailleurs handicapés, le critère de la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé, peu opérant, par le taux d’incapacité permanente (IP) de 50%, tel qu’il est déterminé par les MDPH. Cette mesure permettrait ainsi, tout en renforçant l’objectif d’élargissement du dispositif souhaité en 2010, de prendre en compte les périodes pendant lesquelles l’assuré pouvait justifier d’un handicap lourd (50% de taux d’IP) sans avoir pour autant demandé une RQTH qui pouvait alors passer pour stigmatisante ;

- L’article suivant abaisse à 62 ans, contre 65 aujourd’hui, l’âge à compter duquel les assurés handicapés bénéficient d’une retraite à taux plein.

Deux autres mesures (article 25) améliorent considérablement la compensation, par l’assurance vieillesse, des interruptions de carrière destinées à aider un proche lourdement handicapé :

- Le bénéfice de l’assurance vieillesse des parents au foyer (AVPF) sera accordé aux aidants familiaux d’un proche handicapé ou lourdement dépendant, sans condition de ressources ;

- Ces mêmes aidants bénéficieront d’une majoration de durée d’assurance d’un trimestre tous les 30 mois de prise en charge d’un proche.

4.23. Article 23 – Elargir l’accès à la retraite anticipée pour les travailleurs handicapés

4.23.1. Diagnostic et objectif poursuivi

§ Le critère de reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé, utilisé pour ouvrir droit à la retraite anticipée des travailleurs handicapés, paraît largement inopérant

La loi portant réforme des retraites de 2003 a ouvert la possibilité de liquider les pensions à taux plein à compter de 55 ans pour les assurés handicapés, soit jusqu’à 7 ans avant l’âge légal. La pension anticipée en faveur des assurés handicapés fait l’objet d’une majoration, destinée à améliorer le montant des pensions servies.

Environ 1000 nouveaux pensionnés supplémentaires bénéficient chaque année de cette retraite anticipée – ce qui représente un coût annuel, pour le seul régime général, de 35 M€ en 2012, pour les 2000 assurés actuellement en retraite anticipée à ce titre.

Les travailleurs handicapés peuvent bénéficier de ce dispositif sous trois conditions cumulatives :

- justifier d’une durée d’assurance minimale,

- justifier d’une durée d’assurance minimale cotisée,

- justifier d’un taux d’incapacité permanente de 80% pendant les deux durées requises, ou avoir obtenu, pendant ces mêmes périodes, la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH).

Ce dernier critère, celui de la RQTH, a été introduit par la loi portant réforme des retraites du 9 novembre 2010 ; il a constitué une mesure favorable pour les travailleurs handicapés – la RQTH étant accordée à des assurés justifiant d’un taux d’incapacité permanente, évalué par les Maisons départementales du handicap, inférieur à 80 %.

Toutefois, il apparaît que le critère de la RQTH n’est pas le plus adapté pour identifier un droit à pension : la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé repose en effet sur une démarche d’insertion dans l’emploi, et est attribuée par les MDPH dans cette logique, pour une durée de 1 à 5 ans. En devenant un critère alternatif pour bénéficier d’une retraite anticipée 7 ans avant l’âge légal, la RQTH constitue désormais une prestation sociale différée, bien différente de sa vocation première.

Cet aspect est renforcé par le fait que, fréquemment, des travailleurs handicapés ne demandaient pas la RQTH – qui d’une part pouvait ne leur apporter aucun droit spécifique, et d’autre part pouvait, dans des périodes anciennes, passer pour stigmatisante. Pour cette raison, certains assurés se voient refuser le droit à la retraite anticipée des travailleurs handicapés faute de pouvoir justifier le bénéfice de la RQTH durant toute leur période d’activité ou d’assurance vieillesse. Les demandes de RQTH avec effet rétroactif sont nombreuses – mais ne peuvent être satisfaites, la RQTH étant attribuée en liaison avec l’insertion professionnelle, donc pour l’avenir seulement. Certains assurés justifiant d’un handicap durable, médicalement attesté, ou encore d’un handicap congénital, ne comprennent ainsi pas que la RQTH ne puisse se présumer, alors même qu’ils pourraient justifier d’un taux d’incapacité permanente, au sens de la MDPH, antérieur.

§ Le présent article propose donc de substituer au critère retenu en 2010, celui de la RQTH, un critère de taux d’incapacité permanente de 50 %, qui peut se présumer pour le passé au vu des dossiers notamment médicaux

L’article 23 propose de remplacer pour le bénéfice de la retraite anticipée des travailleurs handicapés, le critère de la RQTH peu opérant, par le taux d’incapacité permanente (IP) de 50%, déterminé par les MDPH en se fondant sur un guide-barème normé. Cette mesure permettra ainsi, tout en renforçant l’objectif d’élargissement du dispositif, de prendre en compte les périodes pendant lesquelles l’assuré justifie d’un handicap lourd (50 %) et au titre desquelles il ne peut jusqu’ici pas s’ouvrir de droit à la retraite anticipée. De plus, le taux d’IP de 50% constitue un critère objectif, connu et permettant d’obtenir d’autres prestations (comme l’AAH notamment).

4.23.2. Impacts de la mesure

La mesure fine de l’impact n’a pas été possible, faute de disposer, logiquement, d’une évaluation fine du nombre d’assurés qui auraient pu demander et obtenir la RQTH, mais ne l’ont pas demandé, tout en justifiant pourtant bien d’un taux d’incapacité permanente à 50 %. Au terme de la montée en charge de cet assouplissement, un quasi doublement du nombre de bénéficiaires de cette retraite anticipée est envisagé – soit 1 000 attributions supplémentaires chaque année, conduisant à terme à une dépense annuelle supplémentaire d’environ 20 M€.

4.24. Article 24 – Extension de l’obtention de la retraite à taux plein dès l’âge légal pour tous les assurés justifiant de 50% de taux d’incapacité permanente

4.24.1. Diagnostic et objectif poursuivi

§ La retraite à taux plein dès 62 ans est accordée aux assurés qui bénéficient de l’AAH, mais non aux assurés handicapés qui justifient d’un taux d’incapacité permanente de 50 %

La pension de vieillesse pour inaptitude au travail (liquidée à taux plein, c’est-à-dire sans décote, dès l’âge légal) est actuellement servie dans deux principaux cas de figure :

- Elle vient se substituer à la pension d’invalidité et au bénéfice de l’AAH ;

- Elle est également accordée aux assurés qui obtiennent, lors de la liquidation de leurs pensions, une reconnaissance médicale de leur inaptitude au travail – liée au fait que les assurés sont dans l’incapacité de poursuivre l’exercice de l’emploi sans nuire gravement à leur santé et sont atteints d’une incapacité de 50 % médicalement constatée (sans barème médical).

La loi portant réforme des retraites de 2010 a permis aux assurés handicapés justifiant d’un taux d’incapacité permanente de 50% (tel que requis pour le bénéfice de l’allocation adulte handicapée) de partir à taux plein dès 65 ans au lieu de 67 ans.

Cette dérogation permet donc aux assurés qui n’ont pas obtenu l’AAH (car ils ne remplissent pas le critère de restriction substantielle et durable à l’emploi ou bénéficient de ressources trop élevées ou ne remplissent pas la condition de résidence) de prétendre à une retraite sans décote à compter de 65 ans. Cet âge d’annulation de la décote, pour des assurés lourdement handicapés, paraît tardif.

§ Le présent article rend possible le départ à taux plein dès 62 ans de tous les assurés handicapés (entendus comme justifiant d’un taux d’incapacité permanente de 50 %)

L’article, en remplaçant l’âge de 65 ans  par un renvoi à l’âge légal (fixé à terme à 62 ans, à l’article L. 161-17-2 du code de la sécurité sociale) étend à ces mêmes assurés la possibilité de liquider leurs droits à pension de retraite dès 62 ans à taux plein, contre 65 ans aujourd’hui, sans autre justificatif que celui de la MDPH.

Par conséquent, l’adoption de cette mesure permettra à l’ensemble des assurés justifiant d’un taux d’incapacité permanente de 50%, leur ouvrant potentiellement droit à l’AAH, de liquider leurs pensions sans décote dès l’âge légal. Cet élargissement constitue donc tant une mesure de solidarité en faveur des assurés handicapés, qu’une simplification, gage d’une plus grande intelligibilité de notre système de retraite.

4.24.2. Impacts de la mesure

En 2012, près de 36 000 assurés ont liquidé leur pension au titre de l’inaptitude au régime général. Ces assurés sont, avant le passage en retraite, soit des bénéficiaires de l’allocation adulte handicapé (AAH), soit des titulaires d’une rente pour incapacité permanente, soit des assurés reconnus inaptes au travail au moment du passage en retraite. Pour la première catégorie, les assurés bénéficient du taux plein à l’âge légal et n’entrent pas dans le champ de la mesure. Pour les deux dernières catégories, les assurés ayant un taux d’IP compris entre 50% et 80% doivent faire reconnaître leur inaptitude auprès du médecin conseil lors d’une visite médicale au moment du départ à la retraite. Certains assurés (ceux qui n’ont pas l’AAH) ne liquident donc pas leur retraite à l’âge légal et au taux plein. Ils représentent un peu moins de 20% des départs au titre de l’inaptitude (cependant, parmi ces 20% qui ne liquident pas à l’âge légal, certains auraient pu bénéficier du dispositif actuel pour partir plus tôt). Ainsi, la mesure retenue va permettre à une partie de ces assurés de partir plus tôt en retraite entre 1 et 2 ans environ.

Au total, cette mesure de solidarité représente un coût annuel évalué à environ 30 M€ pour le seul régime général.

Organismes impactés

(régime, branche, fonds)

Impact financier en droits constatés (en M€ constants 2011)

Coût ou moindre recette (signe -)

Economie ou recette supplémentaire (signe +)

2014

2020

2030

2040

CNAV

-30

-33

-41

-50

4.25. Article 25 : Mieux reconnaître les droits à l’assurance vieillesse des aidants familiaux de personnes handicapées ou de personnes âgées dépendantes

4.25.1. Diagnostic et objectif poursuivi

§ Les aidants familiaux bénéficient, sous condition de ressources, de l’assurance vieillesse des parents au foyer (AVPF)

Les aidants familiaux d’une personne lourdement handicapée (ils sont désignés par les MDPH) se consacrent de manière permanente à l’aide d’un enfant ou d’un adulte lourdement handicapé (le taux de handicap est fixé à 80 %). Depuis 1975, les aidants familiaux bénéficient de l’affiliation gratuite et obligatoire à l’assurance vieillesse des parents au foyer (AVPF). L’AVPF garantit, sous certaines conditions, une continuité dans les droits à la retraite d’une personne qui aurait cessé ou réduit son activité professionnelle, pour s’occuper d’un jeune enfant ou d’une personne handicapée au foyer familial. Environ 1 600 assurés sont actuellement bénéficiaires de l’AVPF à ce titre.

Les assurés qui souhaitent interrompre leur activité pour s’occuper d’un adulte handicapé ou d’un proche présentant une perte d’autonomie d’une particulière gravité peuvent également bénéficier d’une affiliation à l’AVPF. Elle est liée, pour les salariés, à la prise d’un congé de soutien familial (congé non rémunéré, de droit pour les assurés justifiant d’une certaine ancienneté dans l’entreprise, entraînant la suspension du contrat de travail) destiné à prendre en charge, dans la limite d’un an, ce proche handicapé ou lourdement dépendant. Les non salariés prouvant leur cessation d’activité sont également concernés.

L’AVPF est analogue au processus qui conduit un employeur à verser un salaire à un assuré : l’ouverture de droit à l’AVPF induit le versement de cotisations forfaitaires à l’assurance vieillesse par la CNAF et le report au compte vieillesse d’un SMIC pour chaque mois d’affiliation. Le bénéfice de l’AVPF pour les aidants a été élargi, en 2010, à ceux d’entre eux qui exercent une activité à temps partiel.

L’affiliation gratuite à l’AVPF est toutefois soumise à condition de ressources, fondée sur les revenus du foyer (ce sont les conditions de ressources du complément familial) : dans le cas d’un couple parent d’un enfant handicapé, le parent qui arrête son activité bénéficiera de l’AVPF si les revenus de son conjoint sont inférieurs à un plafond, d’environ 2000 euros mensuels. Cet état du droit prive de droits futurs à retraite certains conjoints qui interrompent durablement leur activité pour s’occuper d’un membre de leur famille lourdement handicapé.

§ Le I de l’article 25 propose donc que les aidants familiaux de personnes lourdement handicapées ou de personnes âgées dépendantes puissent obtenir le bénéfice de l’AVPF, sans condition de ressources

Les aidants familiaux, qui sont très majoritairement des femmes, peuvent, dans le cas d’un enfant handicapé par exemple, rester pour de longues périodes éloignés, ou partiellement éloignés, de l’emploi. Ces situations pénalisent durablement le membre de la famille aidant qui interrompt son travail ou a recours à une activité à temps partiel : l’AVPF permet justement d’y répondre. Toutefois, le champ d’application qui vise uniquement les familles modestes peut paraître fortement injuste.

Aussi, il est proposé, au I de l’article 25, d’élargir le champ des bénéficiaires par la suppression de la condition de ressources : tous les aidants familiaux de personnes handicapées qui interrompent leur activité ou exercent une activité à temps partiel pourront prétendre au bénéfice du dispositif.

Cette mesure de solidarité concernerait également les bénéficiaires de l’allocation journalière de présence parentale et les aidants familiaux de personnes âgées dépendantes. Enfin, il est proposé d’étendre aux départements d’outre-mer cette mesure favorable, ce que prévoit le III du même article.

§ Etendre aux aidants familiaux de personnes lourdement handicapées la majoration de durée d’assurance accordée aux parents d’enfants handicapés

Actuellement, les assurés sociaux salariés ou travailleurs indépendants qui assument la charge d’un enfant handicapé à 80 % ouvrant droit à l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé et à l’un des compléments de cette allocation ont droit à un trimestre de majoration de durée d’assurance par période d’éducation de 30 mois de cet enfant, soit au maximum 8 trimestres.

Cette majoration de durée d’assurance pour l’éducation d’un enfant handicapé est intégralement cumulable avec les autres dispositifs accordés à raison des enfants et les trimestres validés dans le cadre de l’AVPF.

Toutefois, cette majoration ne couvre pas la situation des aidants d’adultes handicapés. Aussi, il est proposé, au IV de l’article 25, de créer une majoration de durée d’assurance pour les aidants familiaux en charge d’un adulte lourdement handicapé (MDA-AF), sur le modèle du dispositif de majoration de durée d’assurance pour enfant handicapé (MDAEH). Le champ des bénéficiaires de la mesure sera identique à celui ouvrant droit à l’AVPF, à savoir l’ascendant, le descendant, le collatéral ou le conjoint (ou concubin ou Pacsé). Le droit serait ouvert à l’aidant familial à raison d’un trimestre par période de trente mois de prise en charge à temps complet et dans la limite de 8 trimestres.

Cette majoration sera créée au régime général (article L. 351-4-2) ; elle est rendue applicable aux régimes alignés et aux régimes des travailleurs indépendants (professions libérales, avocats, non salariés agricoles).

4.25.2. Impacts de la mesure

Cette mesure représente une forte simplification pour les assurés, comme pour les CAF, qui assurent l’affiliation à l’AVPF.

Environ 1 600 assurés bénéficient de l’AVPF aidants familiaux d’un adulte handicapé. Si on suppose qu’un flux annuel de 100 liquidants bénéficient du dispositif en anticipant leur départ à la retraite, le coût serait de 1,6 M€ (le flux s’écoulant en deux ans) par an dès 2014.

Organismes impactés

(régime, branche, fonds)

Impact financier en droits constatés (en M€ constants 2011)

Coût ou moindre recette (signe -)

Economie ou recette supplémentaire (signe +)

2014

2020

2030

2040

Masse de prestions supplémentaires à verser

     

- 100

La suppression de la condition de ressources ne fera que des gagnants par l’augmentation du nombre de bénéficiaires du dispositif. Cela se traduira financièrement par un surcroît de dépenses à terme correspondant aux masses de prestations additionnelles.

Titre III – Chapitre Ier : Simplifier l’accès des assurés à leurs droits

Exception faite de chantiers ponctuels, souvent à l’initiative des organismes, la simplification constitue un parent pauvre de l’assurance vieillesse : la complexité normative de l’assurance retraite, associée à la nécessité de produire parfois, pour la liquidation, des documents relatifs à des périodes de début d’activité, plaident pourtant en faveur d’une démarche de simplification vis-à-vis des assurés. Les différentes réformes des retraites ont jusqu’à présent considéré comme annexe le champ de la simplification, en privilégiant la consolidation financière des régimes et des mesures d’articulation inter-régimes, au risque d’accroître la complexité.

Le présent chapitre repose au contraire sur l’ambition de replacer l’assuré au cœur de l’assurance vieillesse, en s’attachant à ce qu’il connaisse ses droits et ses régimes, mais aussi en réduisant les contraintes qui pèsent sur les poly-pensionnés (qui sont actuellement conduits à multiplier les démarches auprès de chacun de leurs régimes).

La simplification proposée repose largement sur des chantiers et des outils infra-législatifs : le présent texte propose toutefois trois innovations majeures :

- Un compte retraite en ligne, permettant à l’assuré de retrouver toutes ses informations dans un même espace sécurisé ;

- Un pilotage des chantiers de mutualisation, qui permettra de faire avancer simultanément les outils et bonnes pratiques, qu’il s’agisse de la consolidation des carrières, de la mutualisation des pièces justificatives, d’une demande unique de retraite préremplie ou encore d’accueils téléphoniques communs ;

- Une réforme destinée à permettre aux poly-pensionnés de tendre vers un interlocuteur unique, en réduisant également les inéquités de traitement qui peuvent exister entre mono- et poly-pensionnés.

Ces ambitions nouvelles reposent sur des chantiers, notamment techniques, particulièrement importants : la mise en œuvre de ces mesures sera donc progressive, mais leur pilotage stratégique, par un GIP dédié qu’il est proposé de créer, permet d’en assurer les différentes étapes.

4.26. Article 26 : Amélioration de l’information des assurés : création d’un compte individuel retraite

§ Le droit à l’information a permis des avancées conséquentes, mais les assurés, en particulier les poly-pensionnés, appréhendent encore difficilement le système de retraite

Le développement du « droit à l’information » depuis ces dix dernières années a permis d’améliorer considérablement la lisibilité de leurs droits à retraite pour les assurés, grâce notamment à l’envoi quinquennal, à partir de 35 ans, de relevés de situations (RIS, désormais disponibles en ligne) et, à partir de 55 ans, d’estimations du montant de pension (EIG). Parallèlement, il a conduit tous les régimes à organiser des échanges lourds de données, comme à construire des documents d’information mutualisés.

Si les assurés se montrent très satisfaits des documents envoyés par le GIP Info Retraite, ils n’en demeurent pas moins souvent peu informés des règles qui leur sont applicables, mais aussi des articulations entre emploi et retraite, pourtant essentielles pour développer l’emploi des seniors et faciliter les transitions de fin de carrière. Les enquêtes annuelles réalisées par la CNAV sur les motivations de départ révèlent que les assurés ont souvent liquidé leur pension sans même connaître les éléments de base qui ont servi au calcul, à commencer par le « taux plein ».

Le rapport Moreau préconisait ainsi de prolonger cette démarche, en proposant un projet ambitieux, dont le présent article reprend la trame.

§ Il est proposé la création d’un compte individuel retraite donnant naissance à un point d’entrée unique, pour les régimes comme pour les assurés.

L’article 26 crée, par le 5° du I, un compte individuel retraite en ligne, tous régimes, interface unique entre l’assuré et ses régimes. La mise en œuvre de ce compte en ligne interviendra par voie réglementaire, mais également conventionnelle : elle sera pilotée par le GIP Info-retraite, qui réunit l’ensemble des régimes obligatoires de retraite, de base et complémentaire. Ce compte en ligne sera fortement appuyé, à terme, sur le projet de répertoire général des carrières unique (RGCU), qui doit regrouper toutes les données élémentaires de carrière éventuellement mobilisables pour ouvrir des droits à l’assurance retraite.

Ce compte individuel retraite tous régimes en ligne aurait notamment vocation à intégrer :

- Une vision consolidée, à jour, de la carrière de chaque assuré. Les assurés bénéficient actuellement de ce service à travers le RIS à la demande accessible en ligne ;

- Des documents d’information portant non seulement sur les droits acquis, mais aussi des informations simples relatives aux démarches à conduire pour liquider sa pension ;

- Une interface entre l’assuré et ses régimes, permettant à l’assuré de contacter ses régimes et de transmettre toute information utile directement à l’ensemble des régimes ;

- L’outil de simulation des pensions futures (dit EVA), piloté par le GIP Info-retraite, qui se fondera sur les données de carrière réelle des assurés, et permettra à terme à l’assuré, dès 45 ans, d’estimer le montant de sa pension, en fonction des choix de carrière qu’il envisage d’effectuer. Une première version de l’outil est prévue pour 2015.

La construction de ces comptes individuels en ligne, projet techniquement ambitieux, nécessitera un délai de mise en œuvre relativement important, précédé d’une expression des besoins techniques : pour cette raison, le II de cet article propose une entrée en vigueur différée, au plus tard au 1er janvier 2017.

L’article 26 a également pour objet de modifier une erreur rédactionnelle de l’article L. 161-17 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction actuelle, en déplaçant au sein de l’article les alinéas relatif à l’information délivrée en cas d’expatriation. En effet, cet alinéa, relatif aux informations spécifiques proposées aux candidats à l’expatriation, a été intercalé entre les dispositions sur l’entretien retraite à 45 ans et celles sur la simulation de pensions. Juridiquement, par jeu de renvoi, la simulation de pension ne devrait être proposée à l’assuré que dans le cadre d’un entretien sur l’expatriation et non pas dans celui des entretiens information retraite à 45 ans. Il est donc proposé de déplacer cet alinéa dans l’article de loi afin de revenir à l’intention du texte ; l’article de loi, dense, serait également doté de blocs d’alinéas numérotés, afin de limiter les risques futurs de renvois erronés.

4.27. Article 27 – Pilotage de la simplification et des projets inter-régimes

4.27.1. Diagnostic et objectif poursuivi

Les organismes gérant les régimes de retraite obligatoires, de base et complémentaires, travaillent actuellement à des chantiers communs ambitieux ayant pour objet de fiabiliser et moderniser leur gestion afin, in fine, d’améliorer la qualité du service rendu aux assurés et de simplifier leurs démarches. Ces travaux portent notamment sur la construction :

- du répertoire d’échanges inter-régimes de retraite (EIRR) prévu par l’article L. 161-1-6 CSS. Ce répertoire est déjà opérationnel pour la mise en œuvre des mécanismes d’écrêtement tels que le minimum contributif ou la majoration de pension de réversion) mais il continue à être enrichi de nouvelles fonctionnalités ;

- du répertoire de gestion des carrières unique (RGCU), prévu par l’article L. 161-1-7 CSS, qui doit rassembler à terme l’ensemble des informations relatives aux carrières des assurés éventuellement mobilisables pour ouvrir des droits à retraite dans tous les régimes de retraite de base obligatoires.

De nouveaux projets impliquant la coordination des régimes sont prévus dans le présent projet de loi tels que le compte retraite en ligne (article 26), la demande, le calcul et le service uniques de la pension des poly-pensionnés (article 28) ou encore la mutualisation du service des petites pensions (article 29).

La coordination de la mise en œuvre de ces différents chantiers structurants de simplification exige de définir une gouvernance commune plus ambitieuse.

Il est donc proposé de créer une instance, sous forme de groupement d’intérêt public, dite « union des institutions et services de retraites » associant l’ensemble des organismes de retraite obligatoire (de base et complémentaire) qui sera chargée d’assurer le pilotage des principaux projets inter-régimes de simplification actuels et futurs.

Cette nouvelle instance doit garantir aux principaux régimes susceptibles de porter directement les projets de mutualisation et d’en assurer le financement, une réelle efficacité dans la réalisation des nouveaux outils.

Ainsi, le lancement des projets de simplification sera sous la responsabilité opérationnelle des principaux régimes de base et complémentaire réunis au sein d’un conseil d’administration. L’ensemble des régimes sera représenté au sein d’une assemblée générale.

Le GIP Info Retraite demeurera compétent pour la mise en œuvre des prestations relatives au droit à l’information et notamment pour la création du compte retraite en ligne prévu par l’article 26 du présent projet de loi et la réalisation de l’outil de simulation en ligne du montant potentiel de la future pension prévu par l’article D. 161-2-1-8-3 CSS. Le GIP Info Retraite et la nouvelle Union auront naturellement vocation à fusionner à moyen terme – une fois que les nouveaux chantiers de simplification auront suffisamment avancé pour tous intégrer l’ensemble des régimes.

Les services de l’Etat concluront avec l’Union un contrat fixant les objectifs stratégiques pluriannuels de simplification et de mutualisation de l’assurance vieillesse, conclu pour une période minimale de quatre ans, et auquel sera annexé un schéma stratégique des systèmes d’information de la branche retraite.

De plus, l’article propose de compléter le répertoire de gestion des carrières unique (RGCU), prévu par l’article L. 161-1-7 CSS, des informations relatives au nombre de points acquis au titre du compte personnel de prévention de la pénibilité.

4.27.2. Impacts de la mesure

L’amélioration du pilotage permettra d’accélérer le développement des chantiers de mutualisation et de simplification.

Au-delà des chantiers structurants pour la branche vieillesse rappelés précédemment, l’objectif est de parvenir, à terme, à la réalisation d’une « demande unique de retraite pré-remplie » et tous régimes, intégrant les principales données connues relatives à l’assuré et pointant les données manquantes, sur le modèle de la déclaration de revenus élaborée par la DGFiP.

La mise en place du compte unique retraite (article 26) comme l’extension de la demande unique de retraite (DUR) pourrait favoriser la mutualisation entre les régimes, développée par cinq vecteurs, pour partie successifs :

- Harmonisation des pièces justificatives demandées à l’usager à des moments clefs que sont le « rendez-vous retraite » et la demande de pension ;

- Mutualisation entre les régimes de l'information existante relative aux données manquantes, par la mobilisation éventuelle d’un régime pivot. Il s’agit en outre de ne recueillir progressivement que les informations non disponibles auprès d’autres institutions ;

- Suppression de certaines pièces justificatives ;

- Une amélioration du suivi, par l’assuré, de ses opérations de liquidation ;

- Plateforme téléphonique d’accueil mutualisée qui permettrait à tout assuré d’obtenir des informations et conseils, au regard de sa situation personnelle. Elle suppose que les télé-conseillers puissent consulter dans un outil commun les données de carrière (RGCU) ainsi que les données issues de la DUR ; elle bénéficiera du développement prévu (horizon 2015) d’un outil inter-régimes de simulation du calcul des pensions, fondé sur les données réelles de l’assuré.

Ces chantiers, même s’ils ne remettent pas en cause l’existence d’une gouvernance dédiée pour chaque régime, supposent de renforcer la gouvernance inter-régimes – et seront donc rendus possibles par le GIP qu’il est proposé de mettre en place.

4.28. Article 28 – Une meilleure coordination entre régimes pour le calcul de la retraite des polypensionnés

III.27.1 Diagnostic et objectif poursuivi

§ La complexité des règles applicables en matière d’assurance retraite pénalise particulièrement les poly-pensionnés

Les régimes dits alignés (régime général, régime des salariés agricoles et régime social des indépendants) ont des règles de calcul de la pension extrêmement proches ; pourtant, ils calculent de manière indépendante, sur la base des droits acquis en leur sein, les pensions de leurs assurés. Le rapport du COR sur les poly-pensionnés (2011) et le récent rapport Moreau (2012) ont souligné la complexité des mécanismes en jeu et les paradoxes auxquels ils conduisent. Seuls sont pris en considération de manière coordonnée :

- le taux de liquidation (décote / surcote), déterminé en appréciant la durée d’assurance totale acquise dans l’ensemble des régimes de retraite – dans la limite de 4 trimestres par an ;

- les 25 meilleures années du salaire annuel moyen (SAM), réparties entre régimes au prorata temporis (si un assuré a relevé dix ans du régime général et 30 ans du RSI, le régime général calculera ainsi un SAM fondé sur ¼ de 25 meilleures années, soit 6 ans) ;

- les mécanismes non contributifs incluant un écrêtement tous régimes (le service du Minimum contributif, en particulier).

Cette situation conduit, à effort contributif égal, à des montants de pensions différents entre assurés mono-pensionnés et assurés poly-pensionnés, dans des régimes pourtant à règles proches.

A titre d’illustration, s’agissant des règles d’acquisition des trimestres :

- un assuré pluri-affilié peut valider 4 trimestres dans chaque régime, soit 8 par an – alors que, pour la même rémunération, un assuré relevant d’un seul régime n’en validerait que 4 par an ;

- à l’inverse un pluri-affilié faiblement rémunéré (un saisonnier qui peut alterner entre MSA salariés et régime général) peut valider moins de 4 trimestres dans l’année, alors que sa rémunération, dans un seul régime, lui aurait permis de valider une année complète.

De même, un poly-pensionné sera favorisé ou pénalisé par rapport à un mono-pensionné pour la détermination du SAM et du montant de sa pension selon son profil de carrière :

- en termes de SAM, le calcul sur les 25 meilleures années peut conduire à ne pas retenir les 25 meilleurs années de l’ensemble de sa carrière, mais à retenir des meilleures années régime par régime ; à titre d’exemple, un assuré qui aurait cotisé 10 ans au régime général au SMIC, puis 30 ans au RSI rémunéré à 1,5 SMIC, aura une pension calculée au RG fondée sur les années au SMIC – alors même que 30 années de sa carrière totale d’actif sont supérieures à cette rémunération ;

- inversement, les polypensionnés sont notamment avantagés par le coefficient de proratisation (qui rapporte, dans chaque régime, la durée d’assurance effective dans le régime à la durée d’assurance requise pour le taux plein) : le coefficient de proratisation est plafonné à 1 (même si un assuré dépasse le nombre de trimestre requis) par régime ; lorsqu’un assuré relève de plusieurs régimes, la somme de ses coefficients de proratisation peut dépasser 1.

Le 9e rapport du COR sur les poly-pensionnés (2011) a souligné l’effet contrasté de ces deux mécanismes : l’un (la règle des 25 meilleures années) défavorise les poly-pensionnés ; l’autre (le coefficient de proratisation) les avantage.

§ Une simplification qui concernera plus de 40% des poly-pensionnés

Près de 43% des poly-pensionnés relèvent des seuls régimes alignés. L’article 28 met en place un régime unique de référence pour ces poly-pensionnés des régimes alignés, pour lesquels la liquidation des pensions interviendra systématiquement de façon simultanée (comme le prévoit le I de l’article L. 173-1-2 qu’il est proposé de créer).

Ce régime de référence procédera au calcul de la pension comme si l’assuré avait systématiquement relevé d’un seul régime. Ce régime procédera à la somme, d’une part, des revenus sur lesquels il a cotisé auprès des régimes alignés et, d’autre part, des trimestres qu’il a validés auprès de ces régimes. Le total de ces revenus sera, comme pour un mono-pensionné, retenu dans la limite du plafond de la sécurité sociale et celui des trimestres dans la limite de 4 trimestres. L’addition des cotisations dans plusieurs régimes pourra également permettre de valider des trimestres supplémentaires, dans le cas où un assuré a été, une même année, affilié à plusieurs régimes sans valider 4 trimestres au total, eu égard au faible niveau de sa rémunération. C’est par exemple le cas des travailleurs saisonniers qui ont pu valider 280 H SMIC au régime général et 320 H SMIC au régime des salariés agricoles : la somme de leurs cotisations permettra de valider 3 trimestres, contre deux aujourd’hui. Ces cotisations additionnées permettront donc d’établir un salaire de référence et une durée d’assurance, afin de calculer le montant de la pension effective, servie par un seul régime pivot.

L’assuré restera affilié à plusieurs régimes, juridiquement, mais en gestion l’ensemble des droits ouverts seraient calculés comme si l’assuré n’avait relevé que d’un régime – y compris pour décompter les 25 meilleures années. Par conséquent, tant en termes de SAM que d’acquisition de trimestres, une telle réforme conduira à refléter la réalité de l’activité du poly-affilié ; dans le même temps, celui-ci perdra la possibilité de valider, lors d’une même année, 8 trimestres au total dans deux régimes différents.

Le régime de référence, une fois déterminés les paramètres de calcul de la pension (SAM, durée d’assurance), déterminera le montant de la pension en fonction des règles qui lui sont propres, et avec ses outils de gestion : ce régime sera le seul interlocuteur de l’assuré (comme le prévoit le III du même article L. 173-1-2) ; des transferts financiers entre régimes, invisibles pour l’assuré, auront toutefois lieu afin d’éviter de faire peser sur l’un des trois régimes des charges supplémentaires.

Cette mesure permettra donc de soumettre au même traitement les poly et mono-pensionnés, dès lors qu’ils relèvent de régimes à règles comparables : il s’agit donc d’une mesure forte d’équité entre mono- et poly-pensionnés.

Par souci de simplification et de lisibilité, cette mesure s’accompagne d’un versement des pensions des régimes de base par le régime principal. Le régime interlocuteur unique de l’assuré sera déterminé par décret, afin de veiller à ne pas déséquilibrer les régimes en termes de charge administrative, tout en mobilisant d’importantes économies de gestion.

Cette mesure forte de simplification et d’équité entre mono- et poly-pensionnés nécessite des aménagements d’importance : afin de permettre aux régimes concernés d’adapter leurs outils notamment informatiques, il est prévu une entrée en vigueur au 1er janvier 2016.

III.27.2 Impacts de la mesure

Schématiquement, la réforme proposée améliore les pensions des assurés (en retenant les 25 meilleures années sur l’ensemble de la carrière et non plus au sein de chacun des régimes) d’une part, et les diminue de l’autre (en limitant à un le coefficient de proratisation). Ces deux effets se neutralisant, l’impact financier précis est difficile à évaluer.

4.29. Article 29 – Mutualiser le service des petites pensions

§ Le versement de la pension en capital conduit à réduire la pension servie aux polypensionnés

Lorsque le montant annuel de la pension de retraite est inférieur à un seuil défini par décret dans un régime aligné, la pension de vieillesse de base est servie en capital (article L. 351-9 du code de la sécurité sociale), sous forme de versement forfaitaire unique (VFU). Le VFU correspond alors à quinze fois le montant annuel de la pension. Le seuil du VFU, fixé par décret en Conseil d’Etat, n’a jamais été révisé depuis sa création ; au 1er avril 2013 son seuil de déclenchement est fixé à 156,09€ par an, soit 13€ par mois.

Le versement en VFU correspond à des activités réduites : deux ans au SMIC en début de carrière conduisent à percevoir à ce titre un VFU.

Une très large majorité des assurés percevant un VFU a une pension de retraite plus importante dans au moins un autre régime : 94% des assurés percevant un VFU au régime général sont polypensionnés. La proportion d’assurés percevant leur pension de retraite en capital varie selon le régime considéré. A la CNAV, 1,2% des départs à la retraite en 2009 ont fait l’objet d’un VFU (7 835 personnes représentant une masse financière de 8,9 M€) ; au RSI, en 2010, 6,5 % des artisans (2 488 personnes) et 9,9 % des commerçants (5 506 personnes) ont perçu un VFU, tandis que cette proportion est plus élevée à la MSA où 22 % de salariés agricoles ont perçu un VFU en 2010 (23 719 personnes). Ce chiffre plus élevé à la MSA s’explique par des carrières courtes plus fréquentes dans ce régime (travaux saisonniers).

Le versement forfaitaire unique est de nature hybride : il ne s’agit pas à proprement parler d’une pension, bien qu’il ouvre par exemple droit à réversion. La simplification proposée permet de clarifier juridiquement le statut de ce versement en capital et de simplifier les règles de versement des pensions pour les assurés.

Le VFU existe également dans d’autres régimes de retraite, avec un mode de calcul différent : à titre d’exemple, l’IRCANTEC verse un capital unique correspondant au remboursement des cotisations salariales et patronales réévaluées. Pour l’ARRCO et l’AGIRC, le capital unique correspond au montant brut annuel de la rente multiplié par un coefficient calculé en fonction de l’âge de liquidation.

Le service d’une pension en capital, s’il semble cohérent pour des assurés qui n’ont qu’à peine relevé de l’assurance vieillesse en France, est en revanche paradoxal s’agissant d’assurés qui ont un régime principal d’affiliation : le service en capital conduit de facto à réduire leur rente mensuelle, d’autant que le VFU, calculé sur 15 ans, s’est éloigné progressivement de la durée effective de service de la pension, aujourd’hui sensiblement supérieure à 20 ans.

L’article poursuit par conséquent un double objectif : clarifier le remboursement de cotisation pour les monopensionnés qui ont une durée d’assurance très brève d’une part, coordonner le service des petites pensions d’autre part.

§ Le remboursement des cotisations permet de réduire la complexité du système de retraite

A la différence de nombreux pays européens et des régimes complémentaires, les régimes obligatoires de base ne prévoient pas de remboursement des cotisations pour des assurés qui n’auraient été affiliés que très brièvement à l’assurance vieillesse. S’ensuivent des services en capital ou en rente, nécessitant des calculs complexes de liquidations de droits – pour en définitive servir des montants mécaniquement très modestes. Il est donc proposé, au I de cet article, de procéder à un remboursement de cotisations lorsqu’un assuré a, dans l’ensemble de ses régimes, totalisé un nombre de trimestres inférieur à un seuil fixé par décret, à 8 trimestres ou moins. Il s’agit pour l’essentiel d’assurés qui ont effectué un court séjour en France et pu acquérir à cette occasion quelques trimestres, soit quelques centaines d’assurés par an. Dans un souci de simplification, il est proposé dans ce cas de procéder à un remboursement des cotisations perçues – en actualisant le montant servi, afin de ne pas léser l’assuré.

Cette évolution n’emportera pas de conséquence pour les droits sociaux de l’assuré : s’il réside en France et en remplit les conditions, il pourra, comme aujourd’hui, bénéficier de la CMU ou de l’ASPA –c’est déjà le cas pour les bénéficiaires d’un VFU. La principale différence est juridique : ce remboursement de cotisations ne constitue pas une pension et son calcul est très simple à établir par la caisse. Cette simplification permet donc de clarifier le statut hybride du VFU (pension servie en capital) et d’en étendre le principe à l’ensemble des régimes de retraite de base.

§ Le service de la pension en rente, par un régime principal, constitue une simplification pour les assurés et améliore leur pension mensuelle

Autant le remboursement de cotisations paraît légitime pour des assurés qui ne perçoivent aucune pension en France, autant il paraît préjudiciable à l’assuré, lorsque ce dernier, ce qui est le cas le plus fréquent, relève d’un autre régime d’assurance vieillesse. Cet état du droit, antérieur à la coordination entre régimes, pénalise les polypensionnés : il semble désormais désuet, au regard des démarches de simplification engagées par le présent projet de loi.

Le II de l’article 29 ouvre donc la possibilité à l’ensemble des régimes de base, sur le fondement de conventions de gestion, de mutualiser le service des petites pensions. Dans ce cadre, le service de la pension de niveau mensuel modeste (le seuil serait fixé par décret, qui pourrait, dans un premier temps, correspondre à celui du VFU, soit 13€ / mois) sera assurée par le régime « principal » de l’assuré, défini comme celui servant la pension la plus élevée.

A titre d’exemple, un fonctionnaire qui aurait, avant d’intégrer dans la fonction publique, été salarié du privé pendant quelques trimestres, perçoit aujourd’hui sa pension du service des retraites de l’Etat, et une modeste sortie en capital ou en rente au titre du régime général : il est proposé que le service des retraites de l’Etat lui serve sa pension de fonctionnaire ainsi que sa pension du régime général. Le retraité polypensionné aura ainsi un interlocuteur unique, ce qui simplifie ses démarches comme la gestion des caisses. Un décret précisera les transferts financiers entre régimes, afin que cette simplification en gestion soit neutre pour les caisses. Tirant les conséquences de cette simplification, le III du même article abroge le service de la pension en VFU ; compte tenu des délais de mise en œuvre, une entrée en vigueur différée, au 1er janvier 2016, est proposée.

Le premier dispositif (remboursement de cotisations) devrait concerner quelques centaines d’assurés par an ; le second (mutualisation des petites pensions pour les polypensionnés) serait susceptible de bénéficier à 35 000 nouveaux liquidants par an. Si le service en rente est légèrement plus coûteux, pour les régimes, qu’un service en capital (fondé sur 15 ans de service), ce léger coût est plus que compensé par les économies de gestion permises par cette simplification.

Titre III - Chapitre II : Améliorer la gouvernance et le pilotage des caisses de retraite

Le chapitre 2 du titre III vise à améliorer la gouvernance en matière de sécurité sociale.

Les dispositions ainsi prévues concernent trois régimes, dont de récents rapports ont souligné le besoin d’évolution.

Concernant la Fonction publique tout d’abord, suite au constat du rapport de la commission pour l’avenir des retraites sur l’absence de cadre pérenne de discussion entre le Gouvernement et les partenaires sociaux, l’article 30 institue un rendez-vous annuel pour débattre des orientations de la politique des retraites, dans les trois fonctions publiques.

L’article 31 ensuite, conformément au rapport de l’IGAS de 2013 sur le pilotage des régimes complémentaires de retraites, propose, à l’image des autres régimes complémentaires professionnels, notamment ceux du RSI et de l’IRCANTEC, de renforcer le rôle de la CCMSA dans la détermination de la stratégie de pilotage du régime complémentaire obligatoire de retraite des exploitants agricoles. La CCMSA proposera ainsi une évolution des paramètres du régime (taux de cotisation, valeur d’achat, valeur de service) sur les trois années à venir, fixée sur la base d’un rapport actuariel communiqué aux tutelles, de sorte à garantir l’équilibre de long terme du régime. Les ministres de tutelles approuveront les évolutions proposées par arrêté.

Enfin, suite à différentes missions de la Cour des comptes et de l’IGAS qui ont constaté que la gestion des régimes de retraite de base et complémentaires des professions libérales pourrait utilement être rendue plus efficiente, l’article 32 précise les missions de la caisse nationale des professions libérales et instaure une contractualisation pluriannuelle avec l’Etat sur les moyens dont elle dispose. Cette réforme de la gouvernance sera ensuite déclinée dans les sections professionnelles. Le projet de loi leur permet par ailleurs de mutualiser leurs moyens, afin de favoriser les rapprochements. L’ensemble de ces dispositions devrait permettre à la CNAVPL de jouer un rôle de tête de réseau pour les sections professionnelles, rôle qui lui avait été attribué en 2003, et qu’elle n’a jamais eu les réels moyens d’exercer.

Le présent chapitre prévoit enfin de transférer, conformément au droit communautaire, les régimes de retraite supplémentaire gérés directement en interne par les entreprises auprès d’un organisme assureur, et prévoit par ailleurs d’étendre à Mayotte et Saint-Pierre-et-Miquelon tout ou partie des dispositions de la présente loi par ordonnance dans les 18 mois qui suivent la publication de celle-ci.

4.30. Article 30 : Débat annuel sur les retraites dans la fonction publique

Le rapport de la commission pour l’avenir des retraites fait le constat qu’il n’existe « aucun moment identifié entre les employeurs et les représentants des personnels pour suivre l’évolution des retraites ».

Cette absence de cadre pérenne de discussion entre le Gouvernement et les partenaires sociaux nuit à un pilotage efficient de notre système de retraites.

Dans cette optique, le présent article a pour objet d’instituer un rendez-vous annuel pour débattre des orientations de la politique des retraites, dans les trois versants de la fonction publique, et assurer un suivi transparent et concerté des grands indicateurs que sont l’évolution des taux de remplacement, l’évolution moyenne des pensions, la situation financière des régimes, la comparaison de l’évolution des pensions entre hommes et femmes. Il s’agit également de mettre à disposition du citoyen une meilleure information sur les retraites dans la fonction publique.

4.31. Article 31 – pilotage du régime complémentaire obligatoire du régime des non salariés agricoles

Actuellement, dans le régime complémentaire des non salariés agricoles, un décret fixe chaque année, pour l’année en cours, le taux de cotisation et la valeur de service du point. Ce décret n’est jamais accompagné d’une description de l’impact sur le régime de la fixation de ces paramètres. Ce mode de pilotage ne semble pas présenter, pour les pouvoirs publics, les garanties et l’assurance d’un contrôle efficace : il relève d’une vision budgétaire à court terme plus que d’un pilotage à long terme du régime.

Actuellement la CCMSA ne s’implique pas dans le pilotage du régime. Le taux de cotisation et les tranches de cotisations (D. 732-165 du code rural et de la pêche maritime) ainsi que la valeur d’achat (D. 732-155 du code rural et de la pêche maritime) et la valeur de service du point (D. 732-166 du code rural et de la pêche maritime) sont définis par décret simple. La fixation annuelle du taux et de l’assiette minimale de cotisation et de la valeur de service du point sont cependant soumis à l’avis du Conseil d’administration de la CCMSA.

La responsabilité de la CCMSA ne porte donc pas aujourd’hui sur le pilotage du régime mais uniquement sur sa gestion administrative, ainsi que sur la gestion de la trésorerie et des disponibilités.

C’est pourquoi le Gouvernement propose de renforcer le rôle de la CCMSA dans la détermination de la stratégie de pilotage du régime, à l’image des autres régimes complémentaires professionnels, notamment ceux du RSI et de l’IRCANTEC, et dans la continuité des préconisations du rapport de l’IGAS de 2013 sur le pilotage des régimes complémentaires de retraite,

La CCMSA devra dès lors proposer une évolution des paramètres du régime (taux de cotisation, valeur d’achat, valeur de service) sur les trois années à venir, fixée sur la base d’un rapport actuariel communiqué aux tutelles, de façon à garantir l’équilibre de long terme du régime. Les ministères de tutelles pourront approuver les évolutions proposées par arrêté.

Cependant, le régime étant actuellement financé pour partie par une ressource attribuée au titre de la solidarité nationale (droits tabacs), la CCMSA dispose d’une variable supplémentaire pour effectuer le bilan de sa situation financière sur le long terme. Il est envisagé en conséquence d’autoriser des marges de variation sur les trajectoires cibles définies pour les trois années suivantes (encadrées par décret).

En outre, les éléments qui devront être communiqués a minima dans le rapport actuariel (impact des décisions prises dans le passé, tests de sensibilité notamment sur l’évolution démographique, étude de l’évolution de l’équité intergénérationnelle, etc.) seront encadrés par voie réglementaire.

A titre conservatoire, il est prévu que dans le cas où la CCMSA ne proposerait pas de plan triennal permettant de garantir l’équilibre de long terme, les paramètres du régime seraient déterminés par décret.

Par ailleurs, dans le cadre de la rénovation du pilotage du régime complémentaire des non salariés agricoles, il semble opportun d’organiser par la loi une flexibilité des mesures de financement que pourrait proposer la CCMSA en prévoyant la possibilité d’inclure différents taux de cotisations en fonction de tranches de revenus et différentes valeurs d’achat du point36. Une telle flexibilité permettra, le cas échéant, de moduler l’intensité de l’effort demandé à chaque catégorie de revenu.

4.32. Article 32 – Evolution des caisses des professions libérales

III.31.1 Diagnostic et objectif poursuivi

Le régime d’assurance vieillesse des professions libérales est constitué d’une caisse nationale (la caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales – CNAVPL) et de dix sections professionnelles. On appelle l’ensemble l’organisation autonome d’assurance vieillesse des professions libérales (OAAVPL).

Les sections gèrent à la fois le régime de base pour le compte de la CNAVPL (régime commun à toutes les sections), les régimes complémentaires obligatoires et les régimes invalidité-décès (spécifiques à chaque section) ainsi que, pour les professions de santé, les régimes des prestations complémentaires de vieillesse (ASV), qui viennent en complément.

Une réforme, introduite par la loi portant réforme des retraites de 2003, a créé un régime unique, en points, commun à l’ensemble des sections professionnelles et en a confié la gestion à la CNAVPL. A titre subsidiaire, l’objectif de la loi était de renforcer la CNAVPL en tant que caisse nationale, en particulier dans un rôle d’animateur du réseau des sections professionnelles.

Toutefois, 10 ans après, la CNAVPL n’occupe toujours pas cette place et différentes missions d’inspection de la Cour des comptes et de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) ont pointé les lacunes et suggéré de réformer, depuis plusieurs années, la gouvernance de l’OAAVPL en vue notamment de faire de la caisse nationale une véritable tête de réseau à même de mener à bien les missions qui lui sont confiées.

L’IGAS notamment relève que du fait de l’absence de contrôle de la gestion des sections professionnelles par la CNAVPL, la gestion du régime de base est éclatée et le même régime est géré selon des règles de gestion différentes dans les sections.

En outre, la CNAVPL est le seul organisme de base, avec la CNBF37, à ne pas avoir conclu de contrat de gestion avec l’Etat. Cette absence de contractualisation ne permet pas aujourd’hui aux organismes de l’OAAVPL et à l’Etat de disposer d’une vision pluri-annuelle et harmonisée des objectifs de gestion des régimes, ni d’indicateurs de qualité de service normalisés. Il apparaît donc impératif de renforcer, sur un mode partenarial, la collaboration avec l’Etat et la gouvernance interne de l’OAAVPL.

L’IGAS a également appelé à une révision du mode de nomination des directeurs tant de la CNAVPL que des sections professionnelles lesquels sont aujourd’hui nommés par leur seul conseil d’administration, contrairement aux pratiques en usage dans la plupart des organismes de sécurité sociale.

Ainsi, le rôle de la CNAVPL, tant vis-à-vis des sections professionnelles que de l’Etat, doit, afin de lui permettre de mener à bien ses missions, être précisé et intégrer :

- le contrôle des sections professionnelles auxquelles la CNAVPL délègue la gestion du régime de retraite de base des professions libérales ;

- la négociation d’une convention collective pour le personnel de l’OAAVPL afin de faciliter le renouvellement et la mobilité des personnels des sections professionnelles ;

- la définition d’un schéma directeur des systèmes d’information (SDSI) commun à l’ensemble de l’organisation ;

- la signature d’un contrat pluriannuel de gestion avec l’Etat, lequel sera ensuite décliné entre la CNAVPL et les sections professionnelles en conventions pluriannuelles ;

- la consultation systématique de la CNAVPL de tous les textes législatifs et règlementaires la concernant ;

- la validation par la CNAVPL des modifications statutaires des sections professionnelles suivant un modèle arrêté par la tutelle.

Les modalités de nomination du directeur de la CNAVPL (par décret pour 6 ans à l’instar du directeur du RSI) ainsi que de l’agent comptable de la caisse nationale et la répartition des pouvoirs entre le directeur et le conseil d’administration de la CNAVPL seront précisées par décret. 

De même, cette réforme de la gouvernance devra également s’étendre aux sections professionnelles.

S’agissant des sections professionnelles, la loi doit permettre :

- l’encadrement, par la CNAVPL, de l’action sociale des sections professionnelles ;

- la définition d’un cadre juridique propice aux regroupements permettant de développer la mutualisation des moyens au service d’une efficience collective renforcée.

Des modifications d’ordre réglementaire accompagneront cette réforme de la gouvernance des sections professionnelles afin de garantir que le conseil d’administration des caisses puisse jouer son rôle et que les outils indispensables au contrôle de la bonne gestion des caisses soient produits et déployés (comptabilité analytique, contrôle interne, contrôle de gestion…).

4.33. Article 33 – régime à prestations définis gérés en interne

III.32.1 Diagnostic et objectif poursuivi

Les régimes de retraite supplémentaire gérés directement en interne par les entreprises ne sont pas conformes à l’article 8 de la directive 2008/94/CE relative à la protection des travailleurs salariés en cas d’insolvabilité de l’employeur.

Les régimes concernés sont les régimes relevant de l’article L. 137-11 du code de la sécurité sociale, exclusivement financés par l’employeur et dont le droit à pension est conditionné par la présence du salarié dans l’entreprise au moment du départ en retraite.

A la différence de la protection offerte dans le cadre des contrats d’assurance (gestion externalisée), en cas de liquidation de l’entreprise, les anciens salariés bénéficiaires de pensions de retraite supplémentaire gérées en interne ne sont pas protégés :

- les pensions échues, non encore versées par l’entreprise à la date de liquidation ne sont pas protégées par un privilège spécial : le retraité est un simple créancier chirographaire,

- les versements futurs cessent. En effet, le droit des procédures collectives n’a prévu aucune protection particulière pour les bénéficiaires de ces pensions supplémentaires issues de régimes internes y compris dans des cas où des provisions techniques figurent au bilan de l’entreprise. Ces pensions ne relèvent pas de l’Assurance de garantie des salaires (AGS).

La Commission européenne a mis la France en demeure de se mettre en conformité avec la directive précitée. Cette procédure précontentieuse est l’ultime étape avant le contentieux communautaire dont l’issue serait probablement défavorable à la France.

Diverses dispositions ont été prises pour limiter les régimes gérés en interne :

- l’article L. 913-2 du code de la sécurité sociale, introduit par la loi relative à la protection sociale complémentaire des salariés du 8 août 1994, a interdit toute disposition des conventions, accords ou décisions unilatérales instaurant des régimes supplémentaires qui entrainent la perte des droits acquis ;

- la loi de financement de la sécurité sociale pour 2010 du 24 décembre 2009 a interdit de créer des régimes à prestations définies en gestion interne à compter du 1er janvier 2010 ;

- les lois de financement de la sécurité sociale de ces dernières années ont dissuadé de créer ou maintenir des régimes internes par un alourdissement progressif des prélèvements sociaux (leur taux est de 48 % sur la dotation aux provisions au bilan de l’entreprise).

A l’occasion de l’interdiction de la création de nouveaux régimes en loi de financement de la sécurité sociale pour 2010, le Parlement avait sollicité un rapport présentant une cartographie précise des régimes de retraite à prestations définies. L’objectif de ce rapport était notamment d’appréhender précisément la volumétrie de ceux de ces régimes qui étaient gérés en interne.

Ce rapport, remis au Parlement en 2010, estimait que la quasi-totalité (environ 97%) des entreprises avait externalisé leur régime auprès d’un organisme assureur : ce rapport dénombrait environ 300 régimes gérés directement au sein des entreprises.

Ces mesures n’apparaissent cependant pas suffisantes :

- en effet, même si le nombre de régimes internes a été réduit depuis en raison des mesures désincitatives, on en dénombre encore quelques centaines en France. Il s’agit principalement des régimes de retraite « maison » instaurés par des PME/TPE ;

- en outre, aucune norme n’oblige les entreprises qui n’ont pas fait le choix de l’externalisation de préfinancer leurs engagements retraite. Les normes comptables internationales (IAS/IFRS) leur imposent uniquement de reconnaître ces engagements dans leur bilan comptable. Quand bien même ces entreprises auraient constitué des provisions, la contrepartie à l’actif n’est pas toujours constituée d’actifs « liquides ».

Afin de sécuriser ces dispositifs, c'est-à-dire de garantir le versement des rentes pour les personnes en ayant acquis le droit de manière certaine en achevant leur carrière dans l’entreprise, et compte-tenu du nombre très limité de régimes concernés, il est donc proposé de contraindre les entreprises qui gèrent encore aujourd’hui leurs régimes de retraite en interne à les externaliser auprès d'un organisme assureur.

Les employeurs devront souscrire un contrat d’assurance auprès d’un organisme assureur habilité afin de lui transférer la gestion de deux types de rentes :

- les rentes déjà liquidées, en cours de service ;

- les nouvelles rentes, une fois les droits à retraite liquidés.

L’organisme assureur portera les engagements retraite (rentes viagères et revalorisation) et assurera le versement des rentes aux bénéficiaires. En contrepartie, l’employeur lui versera les capitaux constitutifs de ces rentes à chaque nouvelle liquidation. Conséquemment, l’organisme assureur portera dès lors le risque du versement des rentes, protégeant ainsi les retraités du risque d’insolvabilité de leur dernier employeur.

Toutefois, le transfert des provisions représentatives des rentes en cours à un organisme assureur peut nécessiter un délai pour l’entreprise concernée, notamment car la contrepartie à l’actif n’est pas toujours constituée d’actifs « liquides ». En conséquence un délai de mise en conformité de 5 années est proposé.

L’externalisation obligatoire des rentes en cours de service et à venir de ces régimes a pour objectifs de :

- garantir le versement des rentes versées aux bénéficiaires de ces régimes en cas d’insolvabilité de l’employeur ;

- rendre conforme ces régimes à la directive 2008/94/CE relative à la protection des travailleurs salariés en cas d’insolvabilité de l’employeur.

III.32.2 Options possibles

La solution retenue consiste à contraindre les employeurs qui gèrent les rentes en interne à externaliser ces prestations en cours de service ou à venir à un organisme assureur.

Un délai de 5 ans est laissé aux entreprises eu égard au coût impliqué par le transfert des capitaux constitutifs représentatifs des engagements.

Une alternative à ce mode opératoire consiste à mettre en place un transfert « par tranche annuelle d’engagements ». Un tel dispositif parait plus protecteur des droits mais également plus contraignant pour l’employeur.

Le choix retenu parait donc un bon équilibre entre ces deux objectifs.

III.32.3 Impacts de la mesure

Le taux de contribution à la charge de l’employeur est différencié en fonction du mode de gestion (externe/interne) pour les cotisations à l’entrée. Les contributions dues sur les primes versées aux assureurs (gestion externe) est de 24 % alors que les contributions versées sur les dotations aux provisions (gestion interne) est de 48 %.

L’externalisation de ces régimes pourrait dès lors avoir pour effet de diminuer les recettes perçues dans la mesure où la taxation moyenne serait moindre. Toutefois, eu égard au nombre limité de ces régimes, la perte estimée serait faible.

Il convient par ailleurs de noter qu’une telle attrition de l’assiette est l’objet même de ce prélèvement de nature comportementale.

4.34. Article 34 : Habilitation à prendre par ordonnance les mesures d’harmonisation nécessaires à Saint-Pierre-et-Miquelon et Mayotte

Les régimes de retraite de Saint-Pierre-et-Miquelon et de Mayotte sont régis par des textes spécifiques et la réforme des retraites doit leur être étendue avec d’éventuelles adaptations.

§ Saint-Pierre–et-Miquelon

La collectivité territoriale d’outre-mer de Saint-Pierre-et-Miquelon est dotée d’un régime de sécurité sociale qui lui est propre. Ce régime, qui a été créé par l’ordonnance n° 77-1102 du 26 septembre 1977, couvre l’ensemble de la population de la collectivité (salariés, non salariés et inactifs) pour l’ensemble des risques. La couverture du risque vieillesse assurée par ce régime est issue de la loi n° 87-563 du 17 juillet 1987. Cette loi visait à rapprocher du régime général métropolitain le régime de retraite de base de Saint-Pierre-et-Miquelon. Au sein de ce dernier, certaines spécificités étaient certes instituées ou maintenues par cette loi mais elles étaient d’ampleur limitée.

Au fil du temps, le régime de retraite de base de Saint-Pierre-et-Miquelon s’est écarté progressivement du droit commun métropolitain. Les évolutions intervenues en métropole depuis une vingtaine d’années, notamment les réformes de 1993 et de 2003 portant sur le salaire annuel moyen et la durée d’assurance, n’ont en effet été que très partiellement transposées dans le régime local. Les divergences devraient encore s’accentuer avec la mise en œuvre de la présente loi puisque des mesures favorables aux assurés ne lui seront pas applicables en l’état.

Pour répondre à cette situation, le Gouvernement a décidé de faire évoluer le régime d’assurance vieillesse de base de Saint-Pierre-et-Miquelon dans le sens d’une harmonisation sur le droit commun métropolitain. Cette évolution s’opèrera de manière progressive.

§ Mayotte

L’ordonnance n° 2011-1923 du 22 décembre 2011 relative à l’évolution de la sécurité sociale à Mayotte dans le cadre de la départementalisation a actualisé l’ordonnance n° 2002-411 relative à l’assurance vieillesse pour prendre en compte les mesures de la loi portant réforme des retraites de 2010 concernant notamment le recul de l’âge légal.

L’objectif du Gouvernement est, dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, de prendre deux ordonnances nécessaires pour étendre et adapter la législation en matière d’assurance vieillesse applicable en métropole aux spécificités du régime mahorais, et pour rapprocher, dans le cas de Saint-Pierre-et-Miquelon, les dispositions de la loi n° 87-563 du 17 juillet 1987 portant réforme du régime d'assurance vieillesse applicable à Saint-Pierre-et-Miquelon de la loi applicable en métropole.

Dans les deux cas, les ordonnances veilleront à adapter les dispositions métropolitaines aux spécificités de ces territoires, en veillant notamment à tenir compte du caractère encore récent de l’assurance vieillesse à Mayotte.

V. Impact de la loi

5.1. Prise en compte du handicap

Différents dispositifs de solidarité permettent de prendre en considération la situation spécifique des assurés handicapés au regard de l’assurance vieillesse. Le présent projet, et en particulier le chapitre V du titre II, permet d’élargir le champ de ces solidarités.

5.1.1. La retraite anticipée des travailleurs handicapés

La loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites a ouvert la possibilité de liquider les pensions à taux plein dès 55 ans pour les assurés lourdement handicapés (taux d’incapacité permanente de 80%) même s’ils ne justifient pas du nombre de trimestres nécessaires pour avoir une pension à taux plein. Les assurés bénéficiant de ce dispositif peuvent liquider leur pension jusqu’à sept ans avant l’âge légal.

Les assurés peuvent bénéficier de ce dispositif sous trois conditions cumulatives :

- une durée d’assurance minimale,

- une durée d’assurance minimale cotisée,

- un taux d’incapacité permanente de 80% pendant les différentes durées requises, ou avoir obtenu, pendant les mêmes périodes, la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH).

La pension anticipée en faveur des assurés handicapés fait l’objet d’une majoration, destinée à améliorer le montant des pensions servies au titre de la retraite anticipée pour les travailleurs handicapés.

L’article 23 propose de remplacer, pour le bénéfice de cette retraite anticipée, le critère de la RQTH, peu opérant, par le taux d’incapacité permanente (IP) de 50%38, déterminé par les MDPH en se fondant sur un guide-barème normé.

En effet, le critère de RQTH, introduit par la loi du 9 novembre 2010, apparait inadapté dans de nombreuses situations d’assurés qui n’ont pas demandé le bénéfice de la RQTH pendant les périodes où ils travaillaient, alors qu’ils auraient pu en bénéficier. Certains assurés justifiant d’un handicap durable, médicalement attesté, ou encore d’un handicap congénital, sont ainsi écartés du bénéfice de la mesure en raison de l’absence de RQTH, alors même qu’ils pourraient justifier d’un taux d’incapacité permanente, au sens de la MDPH, pour ces périodes.

Cette mesure permettra ainsi de prendre en compte les périodes pendant lesquelles l’assuré justifie d’un handicap lourd (50%) et au titre desquelles il ne peut jusqu’ici pas ouvrir droit à la retraite anticipée, compte tenu de l’impossibilité de présumer la RQTH.

Cet assouplissement, introduit dans tous les régimes qui appliquent la retraite anticipée des travailleurs handicapés, permet également d’inscrire dans la loi, et non dans un décret simple, ce taux d’incapacité permanente de 50 %.

5.1.2. Une dérogation à l’âge d’annulation de la décote

Les assurés inaptes bénéficient d’une pension de retraite à « taux plein » dès l’âge légal. Les titulaires d’une pension d’invalidité ou de l’allocation aux adultes handicapés (AAH) bénéficient de plein droit d’une pension à taux plein, c’est-à-dire sans décote, dès l’âge d’ouverture du droit à retraite, même si la carrière est incomplète.

En outre, les assurés qui justifient d’un taux d’incapacité permanente de 50% peuvent liquider leur pension de retraite à « taux plein » (sans décote) dès 65 ans au lieu de 67 ans à compter de la génération 1955.

L’article 24, en remplaçant cet âge de 65 ans par un renvoi à l’âge légal (donc à 62 ans) étend à ces mêmes assurés la possibilité de liquider leurs droits à pension de retraite dès 62 ans à taux plein, contre 65 ans aujourd’hui, sans autre justificatif que celui de la MDPH. Cette mesure favorable constitue donc également une harmonisation : tous les travailleurs dont le taux d’IP est supérieur ou égal à 50% pourront liquider leurs pensions sans décote à compter de 62 ans (contre 65 ans ou 62 ans aujourd’hui, selon les cas) – soit 5 ans avant l’âge d’annulation de la décote.

Cet élargissement constitue à la fois une mesure de solidarité en faveur des assurés handicapés et une simplification, gage d’une plus grande intelligibilité de notre système de retraite.

5.1.3. Une validation de périodes assimilées à de l’assurance vieillesse au titre des périodes d’invalidité ou de longue maladie

Au régime général et dans les régimes alignés, un trimestre d’assurance vieillesse est validé pour chaque trimestre de perception d’une pension d’invalidité et pour chaque arrêt maladie indemnisé pendant au moins 60 jours. Ce trimestre est pris en charge par la solidarité nationale.

L’article 15, en élargissant l’accès de la retraite anticipée pour carrière longues (RALC), permettra de « réputer cotisés », pour le bénéfice de la RALC, deux trimestres de périodes assimilées à de l’assurance vieillesse, accordés au titre de l’invalidité.

5.1.4. De nouveaux droits à l’assurance vieillesse pour les aidants familiaux

Les aidants familiaux bénéficient de l’affiliation gratuite et obligatoire à l’allocation vieillesse des parents au foyer, qui leur garantit une continuité dans leurs droits à retraite.

Cette affiliation est toutefois soumise à condition de ressources : elle n’est ouverte que si les revenus du foyer sont inférieurs au plafond de ressources du complément familial.

L’article 25 supprime cette condition de ressources afin qu’elle ne prive plus de droits à retraite certaines personnes qui réduisent ou interrompent leur activité pour prendre soin d’une personne handicapée ou en perte d’autonomie. La mesure bénéficiera aussi aux parents qui s’interrompent pour s’occuper d’un enfant malade et perçoivent l’allocation journalière de présence parentale. Cette mesure s’applique à compter du 1er janvier 2014 et dans les départements d’outre-mer (Guadeloupe, Guyane, Martinique, la Réunion) à compter du 1er janvier 2015.

L’article crée également une majoration de durée d’assurance pour les aidants familiaux en charge d’un adulte lourdement handicapé, à l’image du dispositif de majoration de durée d’assurance pour enfant handicapé (majoration d’un trimestre par période de trente mois de prise en charge à temps complet et dans la limite de huit trimestres).

5.2. Impacts en termes d’égalité entre les femmes et les hommes

La réduction des écarts de pension entre hommes et femmes constitue un enjeu essentiel de solidarité au sein du système de retraite, comme réaffirmé dans l’article 1 du présent projet de loi.

En décembre 2011, l’ensemble des avantages de retraite de droit direct perçus par les femmes s’élevait à 932 euros par mois contre 1603 pour les hommes, soit 58,1% du montant moyen perçu par les hommes. Ces écarts se réduisent progressivement (le même ratio entre droit direct des femmes et celui des hommes s’établissait à 54.6 % en 2004).

La pension totale des femmes (tenant compte des avantages de base et complémentaires mais également de la réversion et des majorations pour enfants) s’élevait pour cette même année à 72 % du montant perçu par les hommes – les femmes constituant en particulier les principales bénéficiaires des pensions de réversion.

La réduction des écarts de pensions entre les femmes et les hommes s’explique par la hausse de l’activité féminine, la montée en charge de l’AVPF et la diminution de l’écart salarial (entre 1950 et 75, l’écart était de l’ordre de 35% dans le secteur privé, il est passé depuis 1995 à environ 20%).

Mais le maintien d’inégalités importantes sur le marché du travail ne permettra pas un rattrapage des pensions féminines :

- Depuis le milieu des années 90, la hausse de l’activité féminine s’est ralentie, avec la persistance des interruptions d’activité liées aux naissances. Selon les projections de population active de l’INSEE, le taux d’activité des femmes de plus de 45 ans devrait continuer à progresser pour rattraper celui des hommes d’ici 20 ans, mais le taux d’activité des femmes de moins de 45 ans devrait se stabiliser et rester 10 à 15 points en deçà de celui des hommes. Pour autant, les durées d’assurance validées par les femmes convergent vers celles des hommes pour les plus jeunes générations.

- Le temps partiel s’est très largement répandu (30% de l’emploi féminin, contre 15% au début des années 80). Aujourd’hui, huit salariés à temps partiel sur dix sont des femmes.

- Les écarts salariaux ont pratiquement cessé de se réduire depuis le milieu des années 90. En 2010, l'écart de salaire moyen en équivalent temps plein (EQTP) entre hommes et femmes était de 19,1 % en 2010 pour les salariés du secteur privé.

Ces inégalités sur le marché du travail sont d’ores et déjà atténuées au moment de la retraite par des mécanismes de solidarité entre assurés : règles de validation de trimestres permettant d’amortir les conséquences d’une activité à temps partiel sur les droits à la retraite, majorations de durée d’assurance pour enfants bénéficiant majoritairement aux femmes.

Les projections réalisées pour le Conseil d’orientation des retraites montrent que les écarts de niveau de pension entre hommes et femmes ne se résorberont toutefois pas spontanément à politique inchangée : ils resteront de 20 % pour les générations nées dans les années 70.

Compte tenu de ces éléments et afin de rendre notre système de retraite plus juste, le projet de loi comporte plusieurs mesures fortes destinées à améliorer rapidement les droits à la retraite des femmes et, par suite, à accélérer la réduction des écarts de pension entre les hommes et les femmes. L’ensemble des politiques menées pour favoriser l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes au cours de leur carrière contribueront également dans le futur à réduire les écarts au moment de la retraite

5.2.1. Six mesures du projet de loi permettent de faciliter l’acquisition de trimestres d’assurance vieillesse par les femmes

Parmi ces mesures, certaines s'adressent à tous les assurés, mais touchent dans les faits majoritairement les femmes, compte tenu du niveau moindre de leur rémunération ou de leur surreprésentation dans la population ciblée ; d’autres sont destinées exclusivement aux femmes, puisqu’elles concernent les règles de validation de trimestres au titre de la maternité.

• L’article 14 du projet de loi assouplit les conditions d’acquisition des trimestres d’assurance au régime général et dans les régimes alignés pour les assurés à faible rémunération. Les décrets d’application qui seront pris par le gouvernement conduiront notamment à instaurer plusieurs mesures très favorables aux assurés travaillant à temps partiel – qui sont à 82% des femmes.

- Un assouplissement des conditions d’acquisition des trimestres, en les faisant passer de « 200H SMIC » à « 150H SMIC » : un assuré à temps très partiel (1/3 temps) au SMIC pourra désormais valider 4 trimestres par an grâce à son activité soumise à cotisation. Aujourd’hui, ce même assuré ne valide que 3 trimestres, alors même qu’il est en activité toute l’année.

- Un mécanisme de report de cotisations d’une année civile vers l’année suivante, lorsqu’un assuré n’a pas validé quatre trimestres d’assurance vieillesse lors de chacune de ces deux années. Ce mécanisme permet de compléter la précédente mesure, en permettant à des assurés qui, temporairement, travailleraient à très faible quotité (1/4 temps, par exemple) et au salaire minimum, de valider néanmoins quatre trimestres.

Ces deux mesures combinées sont particulièrement profitables aux assurés à bas salaires et à faible quotité de travail : elles bénéficieront donc en particulier aux femmes (qui constituent entre 60 et 70% des bénéficiaires, cf. graphique infra, établi pour le régime général) et auront un impact positif sur leurs droits propres à retraite.

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• L’article 15 facilite l’accès des femmes au dispositif de retraite anticipée longue carrière (RALC) en prenant mieux en compte les trimestres d’interruption d’activité au titre du congé maternité

Le décret du 2 juillet 2012 élargissant la possibilité de départ anticipé avant 60 ans avait ajouté, au titre de la durée réputée cotisée pour les départs en carrière longue, deux trimestres au titre de la maternité. A compter du 1er janvier 2014, tous les trimestres dits de « périodes assimilées à de l’assurance vieillesse » accordés au titre du congé maternité seront réputés cotisés.

• Une mesure réglementaire viendra compléter ce dispositif et permettra d’améliorer la prise en considération, au titre de l’assurance vieillesse, des congés maternité

Actuellement, les femmes qui interrompent leur activité professionnelle en raison d’un congé maternité valident à ce titre un trimestre d’assurance. Cependant, un seul trimestre est ainsi validé même lorsque que la durée du congé est bien supérieure : c’est notamment le cas des salariées attendant leur troisième enfant (6 mois) ou une naissance multiple (environ 8 mois pour des jumeaux, plus de 10 mois pour des triplés) ainsi que celles subissant une grossesse pathologique liée à une exposition au Distilbène. L’INSEE a recensé en 2010, environ 120 000 naissances de 3ème rang de naissance ou plus, et, en 2011, 14 125 accouchements de jumeaux et 214 de triplés.

Aussi, il est proposé que les femmes valident désormais un nombre de trimestres d’assurance qui soit fonction de la durée de leur congé maternité indemnisé, soit un trimestre au titre de chaque période de 90 jours de perception d’indemnités journalières de maternité. Cette mesure, qui bénéficiera aux assurées du régime général et des régimes alignés, fera prochainement l’objet d’un décret en vue d’une mise en œuvre à compter du 1er janvier 2014.

Motif du congé maternité

Durée en semaines

Durée en mois

Nb de trimestres validés aujourd’hui

Nb de T validés après réforme

Nb de T supplémentaire liés à la réforme

1er ou 2ème enfant

16

3,7

1

1

(Inchangé)

3ème enfant

26

6

1

2

+ 1

Jumeaux

34

7,8

1

2

+ 1

Triplés

46

10,6

1

3

+ 2

Grossesse pathologique consécutive à une exposition au« Distilbène »

/

10

1

3

+ 2

• L’article 25 permet d’améliorer doublement les droits à retraite des aidants familiaux en charge d’une personne handicapée. Ces aidants familiaux sont, dans leur très large majorité, des femmes.

- Il facilite leur accès au dispositif de l’assurance vieillesse des parents au foyer (AVPF) qui leur permet de valider gratuitement au titre de la retraite les périodes d’aide auprès de la personne handicapée : la condition de ressources actuellement prévue pour bénéficier de ce dispositif sera supprimée.

- Il crée, à l’instar du dispositif de la majoration de durée d’assurance pour enfant handicapé (MDAEH), une majoration de durée d’assurance pour les aidants familiaux en charge d’un adulte lourdement handicapé (MDA-AF) ou en perte d’autonomie. La mesure bénéficiera également aux personnes qui s’interrompent pour s’occuper d’un enfant malade et perçoivent l’allocation journalière de présence parentale. Ces personnes pourront dorénavant valider un trimestre par période de trente mois de prise en charge à temps complet et ce dans la limite de 8 trimestres.

5.2.2. Quatre mesures de la réforme permettent de prendre en compte la situation spécifique des personnes participant ou ayant participé activement à l'activité professionnelle de leur conjoint – très majoritairement des femmes - afin d'améliorer leurs droits à retraite.

• L'article 19 améliore les droits à pension des 100 000 conjoints collaborateurs des chefs d’une entreprise artisanale, commerciale ou libérale ou d’une exploitation agricole.

Ils pourront désormais, lorsqu’ils cessent de remplir les conditions de l’affiliation obligatoire (en cas de divorce, de décès ou de départ à la retraite du chef d'entreprise), choisir d'adhérer à l'assurance volontaire vieillesse pour compléter leurs droits à retraite et ainsi améliorer le niveau de leur pension et/ou partir plus tôt à la retraite. Les conjoints collaborateurs étant majoritairement des femmes (79% chez les commerçants, 91,5% chez les artisans et 90% chez les professions libérales), elles seront donc les premières bénéficiaires de la mesure.

• L’article 21 comprend plusieurs mesures visant à concrétiser l'engagement de campagne du Président de la République d’améliorer le niveau des pensions des retraités du monde agricole, et en particulier des conjoints d’exploitants.

La faiblesse des pensions touchant particulièrement les femmes, le projet de loi prévoit l’attribution :

- de points gratuits au titre de la retraite complémentaire obligatoire (RCO) aux collaborateurs d'exploitation et aides familiaux au titre de leur activité exercée en cette qualité avant l'obligation d'affiliation au régime de RCO. Cette mesure bénéficiera essentiellement aux femmes qui, de fait, sont plus nombreuses à avoir exercé leur activité en qualité de collaborateur, d'aide familial ou sous l'ancien statut de conjoint participant aux travaux ;

- des points de RCO de l'assuré décédé au conjoint survivant dans le cadre du dispositif des « droits combinés ». Cette mesure permettra d'améliorer les pensions servies aux veuves de chefs d'exploitation agricole décédés en activité, lorsqu'elles reprennent l'exploitation. Elle figure au nombre des mesures inscrites dans le plan interministériel d’action pour l’égalité entre les femmes et les hommes 2013-2017.

- d’un complément différentiel de points de RCO aux retraités et anciens chefs d’exploitation agricole permettant d’atteindre un montant de retraite minimal égal à 75% du SMIC net pour une carrière complète de chef d’exploitation. Cette mesure concerne tous les retraités anciens chefs d’exploitation (hommes et femmes) ; elle bénéficiera à près de 60 000 femmes à horizon 2017.

5.2.3. La réforme entend améliorer le pilotage de notre système de retraite et préparer une refonte des avantages familiaux de retraite, afin de mieux les orienter vers les femmes et la compensation des impacts, sur la carrière, des enfants

Au-delà des mesures favorables rappelées précédemment, le suivi même de l’objectif de réduction des écarts de pension entre hommes et femmes est intégré au pilotage du système de retraite lui-même. L’article 3 du projet de loi prévoit en effet que le nouveau comité de surveillance des retraites mis en place devra, en s’appuyant notamment sur un rapport du Conseil d’orientation des retraites, rendre un rapport annuel analysant la situation comparée des hommes et des femmes au regard de l’assurance vieillesse et, plus précisément, sur les différences de montants de pension, de durée d’assurance et de l’impact des avantages familiaux de vieillesse sur les écarts de pensions.

Surtout, bien que distribuant des droits non contributifs importants aux femmes, les dispositifs actuels des régimes de retraite en matière de droits familiaux sont mal ciblés.

La majoration de pension pour trois enfants est ainsi un dispositif doublement favorable aux pensions les plus élevées, en ce qu’elle est proportionnelle à la pension d’abord (et donc plus importante pour les pensions élevées), et non assujettie à l’impôt sur le revenu ensuite. Elle bénéficie à 70 % aux hommes, et contribue ainsi à accroître les écarts de pension entre hommes et femmes.

Par ailleurs, les droits familiaux accordent prioritairement des trimestres au titre de la durée d’assurance ; or les écarts de durée d’assurance entre hommes et femmes se réduisent progressivement, du fait de l’augmentation du taux d’activité des femmes.

La Commission pour l’avenir des retraites présidée par Yannick Moreau a ainsi préconisé une remise à plat globale des avantages familiaux de retraite.

Le Premier ministre a annoncé une refonte des majorations de pension à compter de 2020, consistant à plafonner progressivement la majoration pour trois enfants et à la transformer en majoration forfaitaire par enfant, bénéficiant principalement aux femmes.

Le projet de loi ne modifie pas les règles relatives aux droits familiaux pour les retraités actuels et ceux partant à la retraite d’ici 2020. En revanche, une disposition du PLF pour 2014 prévoit que les majorations de pensions seront assujetties à l’impôt sur le revenu.

Afin de définir les modalités de mise en œuvre de la réforme annoncée par le Premier ministre à compter de 2020, l’article 13 prévoit que le Gouvernement remettra un rapport au Parlement, préalable à la préparation des évolutions législatives et réglementaires nécessaires pour la mettre en œuvre.

Par ailleurs, ce rapport pourra envisager des orientations de plus long terme s’agissant de la validation de trimestres au titre des avantages familiaux, prenant en compte l’évolution de la société et de l’activité féminine, et permettant de mieux compenser les interruptions de carrière directement liées aux jeunes enfants et l’impact sur les rémunérations (et partant sur les pensions) induit par l’éducation des enfants.

5.2.4. La consolidation de la situation financière de notre système de retraite ne se fait pas au détriment des femmes

Le projet de loi définit un certain nombre de mesures visant à résorber les déficits et à faire face à l’allongement de l’espérance de vie. Ces mesures ont été déterminées avec l’objectif de ne pas pénaliser plus fortement les femmes, en particulier celles qui disposent de petites pensions.

L’évolution progressive de la durée d’assurance requise pour l’obtention de la retraite à taux plein ne concernera que les générations partant à la retraite à partir de 2020. Or, les durées validées par les femmes se rapprochent de celles des hommes au fil des générations : pour la génération 1974, on n’observe quasiment plus d’écart entre hommes et femmes sur les durées validées à 30 ans et les projections montrent que les durées se rapprochent.

Les retraités participent à l’effort de réduction des déficits par le décalage de la revalorisation des pensions d’avril à octobre chaque année. Les bénéficiaires du minimum vieillesse ne sont pas concernés par cet effort, la revalorisation de l’ASPA étant maintenue au 1er avril. Les femmes représentent près de trois quarts des allocataires isolés de l’ASPA et leur part augmente de façon continue avec l’âge : de 62 % pour les personnes âgées de 65 à 70 ans, elle passe à 91 % pour les 90 ans ou plus. Ces femmes ne seront pas affectées par le report de la date de revalorisation des pensions.

5.3. Impacts juridiques

Les dispositions du projet de loi sont codifiées dans le code de la sécurité sociale, le code des pensions civiles et militaires de retraite, le code rural et de la pêche maritime et le code du travail. Ce choix systématique de la codification, ainsi que celui de ne procéder qu’aux évolutions normatives strictement nécessaires, participe de l’intelligibilité de la norme.

En outre, le Gouvernement a fait le choix d’une réforme très progressive, afin d’éviter toute instabilité juridique : à titre d’exemple, les dispositions relatives à la durée d’assurance ne concernent que les générations éloignées de la retraite (elles modifient le droit existant pour les générations nées à compter de 1961, qui liquideront leurs pensions à 62 ans en 2023) ; elles introduisent une stabilité et une lisibilité de la norme applicable, les assurés connaissant, très en amont de l’ouverture de leurs droits à retraite, les règles qui leur seront applicables.

5.4. Impacts outre-mer

5.4.1. En Guadeloupe, en Guyane, à la Martinique et à la Réunion

Le code de la sécurité sociale (CSS) est applicable en métropole et dans quatre des départements d’outre-mer : la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique et la Réunion. Il n’est pas applicable à Mayotte, qui bien que département régi par l’article 73 de la Constitution depuis avril 2011, demeure dans une phase de transition vers le droit commun métropolitain.

La seule exception spécifique aux quatre départements d’outre-mer auxquels le CSS est applicable, prévue dans le présent texte, concerne le dispositif de l’assurance vieillesse des parents au foyer (AVPF), qui connaît une application spécifique dans les DOM. L’AVPF est une affiliation obligatoire et gratuite au régime général, les cotisations étant prises en charge par la CNAF. L’affiliation est prononcée par la CAF pour les allocataires de certaines prestations familiales (complément familial, prestation d’accueil du jeune enfant, complément de libre choix d’activité…) ainsi que pour les aidants familiaux d’une personne lourdement handicapée, enfant ou adulte. Seule l’affiliation de cette dernière catégorie a été étendue aux DOM. L’extension aux DOM de la mesure favorable spécifique aux aidants familiaux (suppression de la condition de ressources pour bénéficier de l’AVPF) nécessite donc une mesure législative ad hoc, qui est proposée à l’article 25.

Toutes les mesures du présent projet de loi seront donc applicables dans les quatre DOM concernés.

5.4.2. A Mayotte et à Saint-Pierre-et-Miquelon

Mayotte est en transition vers le droit commun. La départementalisation de Mayotte ne peut pas, dans le domaine social, s’effectuer sans une transition « progressive et adaptée ». C’est ce à quoi s’était engagé l’Etat dans le « Pacte pour la départementalisation », avant le référendum local sur la départementalisation. En matière de sécurité sociale et de minima sociaux, la période de convergence vers le droit commun a été fixée à 25 ans. Une ordonnance du 22 décembre 2011 et le décret du 17 octobre 2012 organisent une première étape substantielle de mesures de rapprochement ou d’alignement sur le droit commun du régime d’assurance vieillesse local. Si certaines mesures ont été d’application immédiate, la progressivité est de rigueur en revanche (s’agissant en particulier d’un régime jeune) pour ce qui concerne le nombre d’années retenues pour le calcul du SAM ou la durée d’assurance requise pour l’obtention du taux plein - qui seront alignés sur la métropole en 2027.

Saint-Pierre-et-Miquelon, département d’outre-mer de 1976 à 1985, est aujourd’hui une collectivité d’outre-mer au statut particulier : juridiquement, elle relève de l’identité législative mais, en matière de sécurité sociale, ne relève pas du code de la sécurité sociale mais de textes spécifiques et anciens.

Pour répondre à cette situation, le Gouvernement a décidé de faire évoluer le régime d’assurance vieillesse de base de Saint-Pierre-et-Miquelon dans le sens d’une harmonisation vers le droit commun métropolitain. Cette évolution s’opèrera de manière progressive.

Par l’article 34, le présent projet de loi propose d’habiliter le Gouvernement, dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, à prendre deux ordonnances nécessaires pour étendre et adapter la législation en matière d’assurance vieillesse applicable en métropole aux spécificités du régime mahorais, et pour rapprocher, dans le cas de Saint-Pierre-et-Miquelon, les dispositions de la loi n° 87-563 du 17 juillet 1987 portant réforme du régime d'assurance vieillesse applicable à Saint-Pierre-et-Miquelon de la loi applicable en métropole. Dans les deux cas, les ordonnances veilleront à adapter les dispositions métropolitaines aux spécificités de ces territoires, en veillant notamment à tenir compte du caractère encore récent de l’assurance vieillesse à Mayotte.

5.5. Impacts économiques et financiers

Cet aspect est traité dans le II de la présente étude d’impact.

5.6. Impacts sur l’emploi

La lutte contre le chômage et pour l’amélioration des conditions de travail constitue une priorité forte du gouvernement : le projet de loi garantissant l’avenir et la justice du système de retraites s’inscrit pleinement dans cette dynamique, dans trois volets principaux.

5.6.1. Favoriser le maintien des seniors dans l’emploi

Le taux d’emploi des 55-64 ans39 a progressé de presque 4,5 points en 8 ans et représente 41,5 % en 2011, contre 37 % en 2003, soit près d’un million de seniors en emploi supplémentaire. Il reste cependant inférieur à la moyenne européenne (47,4 % en 2011) et est encore loin de l’objectif de 50 % fixé par la Stratégie de Lisbonne et repris par la Stratégie Europe 2020. En outre, le taux progresse moins vite que la moyenne européenne (+ 7,5 %).

De plus, ces chiffres cachent un grand contraste : le taux d’emploi des 55-59 ans est de 64 % (+ 9,6 % depuis 2003) alors qu’il chute à 18,9 % pour la tranche 60-64 ans.

La hausse du taux d’emploi des seniors reste donc encore limitée et ne repose pas nettement sur un changement des comportements de départ à la retraite : trois retraités sur quatre affirment être partis à la retraite dès qu’ils le pouvaient. Cette proportion atteint 84 % pour ceux qui n’étaient pas en emploi40.

Cette « préférence pour le présent » est confirmée par le succès du cumul emploi retraite (CER). Les seniors privilégient en effet une poursuite d’activité dans le cadre d’un CER (qui permet une augmentation immédiate des ressources pendant la période de cumul) plutôt que dans le cadre de la surcote qui, en tant que majoration de pension, offre un gain étalé durant toute la perception de la pension.

Les mesures des articles 11 et 12 visent ainsi à prolonger les efforts déjà engagés en matière d’emploi des séniors.

L’article 11, en abaissant de deux ans l’âge d’ouverture de la retraite progressive et en élargissant le champ des trimestres retenus permet d’ouvrir ce dispositif à une population plus large. Davantage de seniors pourront ainsi faire le choix d’un départ progressif vers la retraite, en cumulant une activité à temps partiel et une fraction de pension.

L’article 12 permet de préciser les règles applicables à toute reprise d’activité rémunérée par un pensionné, y compris en cas de cumul emploi retraite inter-régime, et généralise les cotisations non génératrices de droits nouveaux à retraite. Ces mesures d’équité permettent de lutter contre la préférence pour le présent des assurés puisqu’ils ne pourront plus percevoir à la fois une pension de retraite et se créer des droits auprès d’un autre régime.

5.6.2. Améliorer la santé des travailleurs en réduisant l’exposition professionnelle aux facteurs de pénibilité

La création d’un « compte personnel de prévention de la pénibilité », par l’article 6, donne des droits aux salariés exposés à des facteurs de pénibilité en leur octroyant, tout au long de la carrière, des points convertibles en périodes de formation professionnelle, en périodes de temps partiel compensées financièrement ou en majoration de durée d’assurance vieillesse. Cette majoration permettra à l’assuré d’anticiper son départ en fonction du nombre de trimestres acquis à ce titre.

La mesure devrait avoir un effet positif sur l’emploi, sans qu’il soit directement chiffrable, la préservation de l’intégrité de la santé des salariés participant de leur maintien en emploi (prévention de l’inaptitude et de la désinsertion professionnelle, diminution du nombre de maladies professionnelles ou d’accidents du travail, par exemple). Cet impact sera d’autant plus fort pour les salariés âgés qu’ils sont confrontés à des problématiques d’exclusion du marché du travail en raison de l’usure professionnelle liée à des expositions longues à des facteurs de pénibilité.

5.6.3. Valoriser les périodes de formation et sécuriser les parcours professionnels

Le projet de loi permet de mieux prendre en compte, au titre de l’assurance vieillesse, les années d’études (article 16) d’apprentissage (article 17) ainsi que les périodes de formation professionnelle pour les chômeurs (article 18). La meilleure valorisation des années d’études, d’apprentissage et de formation professionnelle, pour le calcul de la retraite, est de nature à encourager les travailleurs à se former et, partant, permet d’accroitre la qualification des travailleurs présents sur le marché du travail – induisant en outre un effet bénéfique sur la capacité d’insertion professionnelle de ces assurés.

5.7. Impacts sociaux

La réforme structurante présentée par le Gouvernement doit permettre de répondre aux évolutions de la société. Le redressement de notre système de retraite appelle en effet des efforts de tous qui soient justement répartis, entre toutes les composantes de la société et toutes les générations, sans bouleverser les projets de ceux qui sont très proches de la retraite.

C’est pourquoi le Gouvernement a veillé à ce que les trois grands objectifs de cette réforme – garantir dans la durée notre système de retraite, corriger les inégalités du système afin d’en rétablir l’équité et le rendre plus juste, simplifier le système et renforcer sa gouvernance – puissent être poursuivis dans un cadre équilibré, qui partage équitablement les efforts entre tous les assurés, tout en accordant enfin à certaines catégories de travailleurs plus fragiles les droits qui leur avaient été refusés lors des précédentes réformes.

5.7.1. Sur le 1er objectif visant à assurer la pérennité des régimes de retraite

L’augmentation de la durée d’assurance prévue par l’article 2 du projet de loi :

- concernera l’ensemble des assurés de tous les régimes ;

- conduit à répartir de façon équilibrée les gains d’espérance de vie entre activité et retraite : entre 2013 et 2035, l’espérance de vie à 60 ans aura augmenté de plus de 2 ans, quand la durée d’assurance sera passée de 41,5 ans à 43 ans ; les retraités profiteront donc plus longtemps de leurs pensions ;

- évite tout changement de cap brutal : sont concernés les assurés nés à compter de 1961, qui liquideront leurs pensions dans 10 ans ; surtout, la règle est connue et fixée à l’avance, ce qui favorise la bonne information des assurés.

A compter de 2035, le choc démographique lié au « papy boom » aura été dépassé, ce qui permet de maintenir un régime durablement équilibré sans hausse de la durée d’assurance : toutes les générations nées après 1972 devront justifier de 43 annuités de durée d’assurance pour liquider leurs pensions de retraite sans décote, quel que soit leur régime d’affiliation.

Le nouveau dispositif de pilotage institué par l’article 3 participe de la préoccupation du Gouvernement de renforcer la confiance de toutes les générations d’assurés dans la capacité du système de retraite à tenir ses engagements futurs et assurer à chacun un niveau satisfaisant de pension. Le Gouvernement a souhaité en finir avec le pilotage à vue du système de retraite qui a conduit à de trop nombreuses réformes ces dernières années.

Le dispositif de pilotage retenu vise ainsi à apporter davantage de visibilité aux assurés, en permettant aux assurés aujourd’hui au milieu de leur vie active de pouvoir anticiper les conditions dans lesquelles ils pourront partir à la retraite. En particulier, les recommandations du comité de surveillance créé par l’article 3 ne pourront pas avoir pour effet de porter les grands paramètres du système de retraite en dehors de bornes préétablies, c’est-à-dire par exemple à augmenter les taux de cotisation au-delà d’un plafond ou à baisser le taux de remplacement en-deçà d’un plancher, offrant ainsi aux assurés la garantie d’une stabilité dans la durée des règles de pilotage du système de retraite.

Le dispositif prévoit que le nouveau comité de surveillance des retraites mis en place devra, en s’appuyant notamment sur un rapport du Conseil d’orientation des retraites, rendre un rapport annuel analysant la situation comparée des hommes et des femmes au regard de l’assurance vieillesse et, plus précisément, sur les différences de montants de pension, de durée d’assurance et de l’impact des avantages familiaux de vieillesse sur les écarts de pensions.

Enfin, l’article 4 du projet de loi conduit à décaler de six mois (du 1er avril au 1er octobre) la date de revalorisation des pensions, sans toutefois modifier le mécanisme de calcul. Les pensions de vieillesse des régimes de base resteront donc indexées sur l’inflation : cette mesure maintient la garantie de pouvoir d’achat pour l’ensemble des retraités.

Il s’agit donc d’un effort modéré demandé à l’ensemble des pensionnés, afin de participer au rééquilibrage de court terme de notre système d’assurance retraite. Il ne touche cependant ni les retraités les plus modestes, ni les bénéficiaires de pensions d’invalidité ou de rentes servies au titre des accidents du travail ou des maladies professionnelles puisque ces prestations continueront, comme aujourd’hui, d’être revalorisées au 1er avril.

Enfin, cette mesure est ponctuelle : les années suivantes, les pensions seront revalorisées, selon les règles habituelles, tous les 12 mois. L’effort demandé aux pensionnés est donc indéniable, mais limité dans le temps et dans ses effets, répondant en cela à un souci d’équité visant à ne pas baisser les pensions ni remettre en cause les mécanismes d’indexation des pensions.

5.7.2. Sur le 2ème objectif visant à rendre le système plus juste

Chapitre 1er : Mieux prendre en compte la pénibilité au travail

Le chapitre 1er du titre II du projet de loi porte sur la prise en compte de la pénibilité au travail. Les articles 5 à 10 détaillent les modalités de fonctionnement et de gestion du compte personnel de prévention de la pénibilité, son financement, son articulation avec la fiche de prévention des expositions, comme avec les accords en faveur de la prévention de la pénibilité.

Cette prise en compte de la pénibilité, c’est-à-dire la reconnaissance du fait que certaines conditions de travail dégradent l’espérance de vie, par la création d’un compte personnel conciliant la prévention indispensable de la pénibilité lors de la carrière et la réparation dans le cadre de la retraite participe de la volonté du Gouvernement de créer une avancée sociale majeure en faveur des travailleurs exposés à des conditions de travail pénibles :

- d’abord, en ce qui concerne la fiche de prévention des expositions (article 5), l’obligation de traçabilité des expositions est maintenue pour l’ensemble des employeurs et instaure en outre une obligation de transmission d’informations aux entreprises de travail temporaire par les entreprises recourant à l’intérim afin de faciliter la déclaration des expositions des travailleurs intérimaires ;

- le compte personnel de prévention de la pénibilité (article 6) sera ouvert à tous les salariés des entreprises du secteur privé et des EPIC, à l’exception des salariés dont l’employeur est rattaché à un régime spécial de retraite, exposés à un ou plusieurs facteurs de pénibilité au-delà de seuils qui seront définis par décret.

- ce dispositif de compensation contribuera à la gestion de leurs parcours professionnels pour éviter qu’ils ne poursuivent une activité pénible jusqu’à ce que leur santé s’en trouve dégradée. Ce sont ainsi plus de trois millions de salariés qui devraient être concernés, en particulier dans les secteurs du commerce, de la réparation automobile et motocycle (569 000 salariés), de la construction (374 000), des transports et entreposage (345 000) et activités de services administratifs et soutien (303 000) ;

- tout au long de leur carrière, le compte permettra aux salariés, grâce à des actions de formation, une réorientation professionnelle vers des emplois ne les exposant plus à des situations de travail pénible, et ce, avant que leur santé n’en soit altérée. Pour les travailleurs en fin de carrière, le compte constitue une aide au maintien en emploi, en permettant le passage à temps partiel, dans une logique de repos compensateur. Le compte sert également l’objectif de compensation d’une exposition longue à la pénibilité en autorisant un départ anticipé à la retraite ;

- enfin, la création d’une majoration de durée d’assurance (article 9) permettra aux assurés de bénéficier au maximum de 8 trimestres financés par le compte pénibilité et seront triplement utiles : pour augmenter la durée d’assurance tous régimes et atteindre plus rapidement le « taux plein » ; pour bénéficier de la retraite anticipée pour carrières longues au titre de trimestres « réputés cotisés », ce qui permettra à un assuré qui aurait déjà ouvert droit à un départ anticipé de partir plus tôt ; d’avancer dans tous les cas l’âge de départ, par rapport aux 62 ans car l’âge légal est diminué d’autant de trimestres que l’assuré a de majorations à son compte.

Chapitre II : Favoriser l’emploi des seniors

L’article 11 répond aux préoccupations du Gouvernement vis-à-vis de l’emploi des seniors et plus particulièrement vis-à-vis de ceux qui, en fin de carrière, éprouvent le besoin d’une transition progressive entre l’emploi et la retraite. Le projet de loi procède ainsi à une réforme structurante du dispositif, en abaissant la condition d’âge à partir duquel les assurés pourront entrer en retraite progressive (actuellement fixée à l’âge légal - 62 ans en 2017 pour la génération née en 1955 - la condition d’âge sera abaissée à 2 ans de moins que l’âge légal, soit 60 ans, afin d’en favoriser l’accès aux salariés ayant commencé à travailler tôt) et en prévoyant le soin de préciser par décret tant la durée exigée que le périmètre « tous régimes » de la durée d’assurance.

Par conséquent, avant même de pouvoir prétendre partir à la retraite, les assurés pourront exercer leur activité à temps partiel, tout en bénéficiant d’une fraction de leur pension ; à l’issue de leur temps partiel (qui leur permettra de compléter leur pension, notamment pour atteindre le taux plein), les assurés liquideront la totalité de leur retraite, majorée compte tenu des droits nouveaux acquis au cours du temps partiel. Compte tenu du net assouplissement du dispositif, lié à l’abaissement à 60 ans de l’âge d’entrée dans le dispositif, un fort développement est à prévoir et un quintuplement des effectifs à l’horizon 2017 est anticipé.

L’article 12 rétablit quant à lui l’équité entre les assurés au regard des principes du cumul emploi retraite (CER). En raison de la complexité de la réglementation, trois types de cumul emploi retraite coexistent, dont certains sont plus favorables que d’autres, créant des inégalités entre les assurés. Un récent rapport de l’inspection générale des affaires sociales souligne à ce titre qu’un retraité sur cinq reprenant une activité (soit 100 000 personnes en 2011) échappe à toute réglementation et peut dès lors se créer des nouveaux droits à retraite. Cette situation crée une inégalité injustifiée entre assurés : selon les cas, la reprise d’activité par le retraité est ou non créatrice de droits à pension. De plus, la coexistence de différentes règles, associées à de nombreuses exceptions, nuit à la compréhension globale du dispositif ainsi qu’à l’accès pour tous au CER.

La réforme permet ainsi de supprimer cette inéquité entre assurés, d’une part en mettant fin à la notion de groupes de régimes : la liquidation d’une pension, dans n’importe quel régime, supposera désormais de mettre fin à l’ensemble de ses activités (ce qui n’interdit nullement, comme actuellement, de reprendre la même activité ensuite) ; d’autre part, en généralisant le principe de cotisations non génératrices de droits nouveaux à retraite, quel que soit le régime dont est pensionné l’assuré et quel que soit l’âge auquel il a liquidé ses pensions.

Chapitre III : Améliorer les droits à retraite des femmes, des jeunes actifs et des assurés à carrière heurtée

Au sein de ce chapitre, plusieurs mesures ciblent plus spécifiquement et opèrent de manière directe ou indirecte une redistribution en faveur des femmes (voir supra sur les impacts en termes d’égalité entre les femmes et les hommes) : l’article 13 relatif à la refonte des majorations de pension pour enfants, l’article 14 facilitant l’acquisition de trimestres pour les assurés à faible rémunération, l’article 15 facilitant l’accès des femmes au dispositif de retraite anticipée longue carrière (RALC) en prenant mieux en compte les trimestres d’interruption d’activité au titre du congé maternité ainsi que l’article 19 améliorant les droits à retraite des conjoints collaborateurs.

Par ailleurs, le Gouvernement a entendu agir en faveur de l’amélioration des droits à retraite des jeunes, d’une part en prenant en compte leur entrée de plus en plus tardive sur le marché du travail et en facilitant les conditions du rachat d’années d’études pour compléter leur durée d’assurance (article 16), d’autre part en permettant aux apprentis et aux jeunes en alternance de valider tous leurs trimestres d’apprentissage (article 14 et article 17).

Enfin, la réforme vise à adapter le système de retraite aux changements et évolutions des parcours professionnels, en répondant en particulier aux difficultés que rencontrent certains à s’insérer dans l’emploi. L’article 18 pose ainsi les bases d’une meilleure prise en compte des carrières heurtées en encourageant les chômeurs à la formation professionnelle et en permettant que soient considérées comme des périodes assimilées d’assurance vieillesse toutes les périodes de stage de formation professionnelle continue donnant lieu à cotisation.

Chapitre IV : Améliorer les petites pensions des non salariés agricoles

Eu égard à la faiblesse des pensions agricoles, le Gouvernement a opté pour des mesures visant à augmenter le niveau des pensions agricoles. Ces mesures, déclinées dans les articles 20 à 22, ciblent plus particulièrement les femmes.

• L’attribution de droits gratuits de retraite complémentaire aux conjoints collaborateurs et aides familiaux touche une population féminine âgée : 72% des bénéficiaires de la mesure sont des femmes, 44% des femmes concernées ont plus de 80 ans et 62 % ont plus de 75 ans.

Grâce à cette mesure, le bénéfice de la RCO est étendu à plus de 330 000 personnes qui n’y avaient pas du tout accès, dont 316 000 femmes.

Le gain annuel médian est de 118 € pour un homme (151 € en moyenne). 25% des bénéficiaires hommes bénéficient d’un gain annuel allant de 225 € à 364 €.

Le gain est plus important pour les femmes avec une moyenne annuelle de 351 €, soit un montant proche du montant maximum pouvant être servi de 364 €. 90% des femmes bénéficiaires ont ce maximum et 5% ont entre 241 € et 364 €.

La mesure permet donc d’accroître en moyenne de 6 % les retraites des femmes dont les niveaux de pensions sont plus faibles que celles des hommes. 90% des femmes, bénéficiaires de la mesure, ont une retraite globale mensuelle inférieure à 658 € en 2011 et 50% ont moins de 524 € de pension.

• Un complément différentiel de pension de retraite est mis en place afin de permettre progressivement à tout chef d’exploitation ayant une carrière complète de bénéficier d’une retraite minimum équivalente à 75% du SMIC.

• La suppression de la condition de durée d’activité pour bénéficier des majorations de pensions proposées par le régime de base agricole, la réversion des droits gratuits de retraite complémentaire dont auraient pu bénéficier les chefs d’exploitation décédés en activité et l’ouverture des droits combinés en retraite complémentaire permettront elles aussi d’octroyer des compléments de pensions à des populations bénéficiant de petites retraites.

Chapitre V : Ouvrir des solidarités nouvelles en faveur des assurés handicapés et de leurs aidants

Le Gouvernement a entendu prendre en considération les difficultés auxquelles font face les personnes handicapées sur le marché du travail : les articles 23 et 24, qui élargissent les modalités d’ouverture de leurs droits, constituent tant une mesure de solidarité qu’une mesure de simplification des règles encadrant le départ à la retraite des assurés handicapés.

Par ailleurs, l’article 25, en proposant, d’une part, que les aidants familiaux de personnes lourdement handicapées ou de personnes âgées dépendantes puissent obtenir le bénéfice de l’AVPF sans condition de ressources et, d’autre part, bénéficient dorénavant de la majoration de durée d’assurance accordée aux parents d’enfants handicapés, poursuit l’objectif de mieux reconnaître en matière de droits à retraite l’investissement des familles dans la prise en charge de leurs proches.

5.7.3. Sur le 3ème objectif visant à simplifier le système et renforcer sa gouvernance

Chapitre 1er : Simplifier l’accès des assurés à leurs droits

Le Gouvernement réaffirme d’abord, dans l’article 26, l’importance du droit à l’information des assurés et renforce la lisibilité du système de retraite, en intervenant sur les trois étapes des relations des assurés et des régimes de retraite : avant la liquidation, au moment de la liquidation et une fois la pension liquidée. L’ensemble des assurés verront donc leur information renforcée et leurs démarches liées à la retraite simplifiées.

La démarche de simplification présuppose également une coordination des régimes de base et des régimes complémentaires, confiée à une structure de pilotage inter-régime en charge de ces développements : c’est l’objet de l’article 27. L’ensemble des assurés seront concernés car cette structure inclura l’ensemble des régimes pour produire les outils de simplification nécessaires à la bonne relation de l’usager avec le système de retraite.

Le Gouvernement entend par ailleurs réduire les écarts de situation entre les poly-pensionnés et des mono-pensionnés. Afin de permettre un traitement équitable entre mono et poly-pensionnés, la réforme renforce la coordination entre régimes et met en place pour les poly-pensionnés un calcul unique de la pension relevant du régime général et des régimes alignés (article 28). Cette mesure de simplification concernera 40% des polypensionnés.

Une autre mesure importante de simplification à laquelle le Gouvernement est très attaché interviendra dans le cadre de cette réforme : il s’agit de l’article 29 visant à diminuer le nombre de polypensionnés, en permettant de faire servir, par le régime principal, la petite pension qu’aurait dû verser un autre régime. Cette mesure permet d’éviter aux assurés d’être en contact avec plusieurs régimes, parfois pour des montants de pension modestes.

Chapitre II : Améliorer la gouvernance et le pilotage des caisses de retraite

Outre la rénovation du mécanisme de pilotage (cf. supra), la réforme met en œuvre d’importantes mesures visant à rénover le pilotage stratégique de certains régimes de retraite.

D’abord, le Gouvernement a prévu d’organiser, tous les ans, un débat sur les orientations de la politique des retraites dans la fonction publique avec les organisations syndicales de fonctionnaires (article 30).

Ensuite, la réforme, dans son article 31, souhaite renforcer le rôle de la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole (CCMSA) dans la détermination de la stratégie de pilotage du régime, à l’image des autres régimes complémentaires professionnels (notamment ceux du Régime social des indépendants – RSI et de l’Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l’Etat et des collectivités publiques - IRCANTEC), en prévoyant en particulier une évolution des paramètres du régime sur les trois années à venir ainsi que la mobilisation de leviers supplémentaires de pilotage pour garantir l’équilibre de long terme du régime.

Par ailleurs, guidé par le souci de la transparence et de la convergence, le Gouvernement a souhaité, avec l’article 32, réformer la CNAVPL de façon à renforcer ses liens avec l’Etat.

Dans ce même esprit, et afin de sécuriser et garantir pour l’avenir le versement des rentes pour les personnes en ayant acquis le droit en achevant leur carrière dans l’entreprise, le Gouvernement souhaite que les régimes de retraite supplémentaires gérés en interne par les entreprises soient externalisés auprès d’un organisme assureur, en laissant aux entreprises un délai suffisant pour se mettre en conformité avec le nouveau droit (article 33).

Enfin, compte tenu du fait que les régimes de retraite de Mayotte et de Saint-Pierre-et-Miquelon sont régis par des textes spécifiques, le Gouvernement a prévu dans l’article 34 une habilitation à prendre par ordonnance les mesures d’harmonisation nécessaires afin que la présente réforme puisse être étendue à ces deux régimes et de manière à garantir pour l’avenir une convergence progressive des paramètres de calcul de la pension des assurés vivant en métropole et des assurés résidant sur ces deux territoires.

5.8. Impacts environnementaux

L’article 25 du projet de loi propose de créer un service en ligne permettant aux assurés de réaliser certaines démarches administratives relatives à leur retraite et d’échanger avec leurs régimes des documents dématérialisés.

L’article 27 vise à améliorer la coordination entre régimes pour le calcul de la retraite des poly pensionnés. Il prévoit notamment qu’un assuré ayant acquis des droits auprès du régime général de sécurité sociale, du régime des salariés agricoles et des régimes d'assurance vieillesse des professions artisanales, industrielles et commerciales, n’aurait, désormais plus à formuler qu’une seule demande de liquidation de sa pension.

Ces dispositions sont de nature à limiter le recours au papier ainsi que les déplacements des usagers auprès des services d’accueil des régimes de retraites. Le nombre des bénéficiaires potentiels de ces mesures est important : fin 2010, le nombre global de retraités de droit direct de l’ensemble des régimes obligatoires de sécurité sociale atteint 15,1 millions et 778 000 personnes ont liquidé en 2010 un droit direct à la retraite tous régimes confondus. En outre une forte proportion de retraités perçoit des pensions de plusieurs régimes de base (un retraité sur trois de la génération 1942).

5.9. Impacts administratifs

Le projet de loi prévoit la création de missions nouvelles en gestion et la profonde modification de la gouvernance de certains régimes.

5.9.1. De nouvelles structures ou modalités de gouvernance

L’article 3 prévoit la création d’un Comité de surveillance des retraites, composé de 5 membres. Cette nouvelle institution, indépendante, n’entraînera toutefois pas de lourdes charges administratives nouvelles, d’autant qu’elle s’appuiera sur les travaux réalisés notamment par le Conseil d’orientation des retraites. En outre, cette création emporte la suppression du Copilor (48 membres) et celle de la commission de garantie des retraites, institutions en sommeil.

L’article 28 prévoit la création d’un nouveau GIP, destiné à coordonner la mise en œuvre des projets de simplification. Il s’agit d’une structure de pilotage, légère : la mise en œuvre opérationnelle des simplifications et mutualisations sera opérée par les régimes de retraite. Ce nouveau GIP aura vocation, à terme, à fusionner avec le GIP Info retraite, ce qui limite les charges administratives nouvelles.

Plus largement, les mécanismes de simplification, comme certaines des mesures d’équité, supposeront une mobilisation des organismes gestionnaires de régimes obligatoires de retraite pour mettre en œuvre ces nouveaux dispositifs ; les conventions d’objectifs et de gestion pourront tenir compte de ces adaptations nécessaires, qui à terme produiront des gains en termes d’efficience, compte tenu notamment de l’importance du volet simplification (chapitre 1er du titre III).

L’article 31 met en place un pilotage actuariel pluriannuel du régime de retraite complémentaire des non salariés agricoles et ajoute la possibilité de moduler les différents paramètres d’équilibre du régime, notamment les cotisations, afin de permettre la différenciation de l’impact des éventuelles mesures de redressement selon les catégories de revenus.

L’article 32 renforce le rôle de tête de réseau de la Caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales (CNAVPL) en clarifiant ses missions et ses relations avec les sections professionnelles. Il met également en place les modalités d’une gestion plus efficiente par le biais d’une contractualisation pluriannuelle avec l’Etat et de l’ouverture aux sections professionnelles de la possibilité de créer des structures leur permettant de conduire des missions communes et donc de mutualiser certaines ressources.

5.9.2. Des missions nouvelles de gestion, liées à la mise en œuvre du compte personnel de prévention de la pénibilité

La gestion du compte personnel sera assurée par les caisses chargées du service des prestations de retraite du régime général, c’est-à-dire les caisses d’assurance retraite et de la santé au travail et, pour l’Ile de France, la Caisse nationale de l’assurance vieillesse (CNAV). Elles rempliront les missions suivantes :

a) La gestion du compte de chaque salarié.

Les caisses procéderont à l’ouverture du compte personnel de prévention de la pénibilité. Elles y reporteront les points résultant des données déclarées par l’employeur41 sur la base des informations qu’il a consignées dans les fiches de prévention des expositions (à compter de 2019 au plus tard, l’employeur adressera également à la caisse, par voie électronique, sur un serveur sécurisé, les données figurant dans ces fiches).

Elles notifieront chaque année au salarié les points qu’il a acquis au titre de l’année précédente. Le salarié disposera par ailleurs d’un accès en ligne à son compte : il pourra ainsi visualiser les points acquis, disponibles et consommés.

En cas d’utilisation des points accumulés, elles procéderont aux transferts financiers nécessaires auprès de l’organisme gestionnaire du compte personnel de formation, de l’employeur (au titre des compléments de rémunération versés aux salariés cas de réduction de la durée du travail) ou du régime de retraite intéressé (majoration de durée d’assurance).

b) La gestion des éventuelles contestations du salarié. 

Ce sont les caisses que le salarié saisira de toutes réclamations relatives à son compte. Deux procédures distinctes s’appliqueront selon que la réclamation résulte d’un désaccord avec son employeur sur l’effectivité de l’exposition à des facteurs de risques professionnels ou d’un acte de gestion de la caisse.

Dans le premier cas, la réclamation ne sera recevable que si le salarié établit avoir préalablement contesté l’appréciation de l’employeur. Si tel est le cas, la caisse rendra sa décision après avis motivé d’une commission ad hoc qui pourra demander aux services de l’administration du travail, aux services en charge des accidents du travail et maladies professionnelles des caisses concernées de lui communiquer toute information utile.

Dans le second cas, c’est la procédure habituelle de contestation des actes des organismes de sécurité sociale qui s’appliquera (contestation auprès des services de la caisse, puis de sa commission de recours amiable, puis du tribunal des affaires de sécurité sociale).

c) Le contrôle de l’effectivité de l’exposition.

Indépendamment de toute réclamation du salarié, les caisses pourront procéder à des contrôles : en cas de déclaration inexacte, le montant des cotisations et le nombre de points attribués au salarié seront régularisés ; l’employeur pourra en outre faire l’objet d’une pénalité prononcée par le directeur de la caisse ; ces opérations de contrôle et, le cas échéant, de redressement ne pourront intervenir que durant les trois années postérieures à la déclaration de l’employeur.

Il est prévu que les frais exposés au titre de la gestion du compte personnel de prévention de la pénibilité et les dépenses liées aux frais d’expertise exposés par les commissions sont financés par le fonds en charge du financement des droits liés au compte (article 7).

Enfin, la mise en œuvre du compte personnel de prévention de la pénibilité au 1er janvier 2015 nécessitera d’une part la mise en place de moyens dédiés au pilotage du déploiement de ce compte et d’autre part la développement d’un dispositif important d’information, de communication et d’accompagnement des entreprises.

5.10. Impacts sur le fonctionnement de la justice

La création de droits nouveaux des salariés, liés à l’exposition professionnelle à des facteurs de pénibilité, pourrait avoir un léger impact sur le fonctionnement de la justice. Toutefois, l’article 6 prévoit un mécanisme de précontentieux obligatoire et technique dédié, destiné à faciliter une approche de conciliation : ce mécanisme devrait très fortement limiter la saisine des juridictions compétences (TASS).

La création de droits au profit du salarié repose sur un acte de l’employeur : la déclaration de points résultant d’une exposition à des facteurs de risques au-delà d’un certain seuil. Leurs appréciations respectives quant à l’effectivité de cette exposition peuvent toutefois différer, emportant ainsi des contestations sur le bien-fondé ou non de l’attribution de points.

Une procédure particulière est prévue pour le cas où le salarié considérerait que son exposition à des facteurs de risques professionnels n’a pas été dûment prise en compte.

En effet, sous réserve d’avoir préalablement saisi son employeur aux fins d’obtenir tous éclaircissements utiles (l’employeur peut avoir commis une simple erreur de jugement), c’est à la caisse chargée de la gestion de son compte qu’il s’adressera pour toute réclamation relative au niveau de ses droits. Celle-ci confiera à une commission ad hoc, composée de spécialistes des conditions de travail, le soin d’examiner les arguments respectivement avancés par le salarié et l’employeur, quitte le cas échéant à procéder ou à faire procéder par des organismes compétents à des contrôles au sein de l’entreprise. Cette commission communiquera son avis à la caisse, qui fera connaître sa décision au salarié et à l’employeur. Cette décision, comme toute décision émanant d’un organisme de sécurité sociale, pourra être contestée devant la commission de recours amiable de la caisse puis, le cas échéant, devant le tribunal des affaires de sécurité sociale. L’ensemble des parties seront appelées en la cause, afin que le jugement soit opposable à la fois au salarié et à l’employeur.

L’impact de ce futur contentieux sur les juridictions concernées est difficile à apprécier a priori car aucun contentieux de ce type n’existe à ce jour, rendant toute comparaison impossible. Néanmoins tous les facteurs de pénibilité ne présentent pas les mêmes caractéristiques et l’on peut inférer que certains d’entre eux présentent des degrés de « contestabilité » moins élevés que d’autres. C’est par exemple le cas du travail de nuit et du travail en équipes successives alternantes, qui sont des situations objectives de travail. Ainsi, pour certains facteurs, on peut estimer que le contentieux sera plus limité que pour d’autres pour lesquels les seuils associés seront nécessairement pluridimensionnels et comprendront des références quantifiées.

5.11. Impacts sur les collectivités territoriales

Ce projet de loi est sans impact direct sur les collectivités territoriales : seuls les agents des collectivités territoriales seront directement concernés par la plupart des dispositions.

VI. Modalités d’application de la réforme

6.1. Application dans le temps

Le projet de loi précise, pour chaque article, ceux qui appellent des mesures d’application et ceux qui sont d’application immédiate. C’est l’objet du tableau récapitulatif des textes d’application.

En particulier, ce projet a veillé à prévoir, pour certaines mesures spécifiques, une entrée en vigueur différée de manière à en permettre la mise en œuvre effective. Il s’agit en particulier :

- de la mesure relative à l’allongement de la durée d’assurance (article 2) : le Gouvernement a entendu proposer une évolution mesurée et progressive de cette durée d’assurance qui ne concernera que les générations partant en retraite à compter de 2020 afin de ne pas bouleverser les projets de départ des générations les plus proches de la retraite ;

- des dispositions relatives à la pénibilité (articles 5 à 10), afin de s’assurer que l’ensemble du circuit en gestion du dispositif soit pleinement opérationnel et garantisse son application effective, en particulier concernant les modalités liées à l’alimentation, l’utilisation, la gestion et le contrôle du compte personnel de prévention de la pénibilité ;

- des mesures nécessitant d’importants travaux d’échanges préalables et impliquant d’importants travaux d’ajustement ou d’aménagement technique ou/et en gestion des outils d’information des différents régimes de retraite (article 12 sur le cumul emploi retraite ; article 26 sur le renforcement du droit à l’information ; article 28 sur le renforcement de la coordination entre régimes pour le calcul de la retraite des polypensionnés).

VI.2. Consultations

- Organismes de sécurité sociale

Le projet de loi ayant des incidences sur le financement et le fonctionnement des régimes dont ils assurent la gestion, ont été consultés :

- en application des dispositions de l’article L. 200-3 du code de la sécurité sociale, les conseils d’administration de la Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV), de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS), de la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF), la commission des accidents du travail et des maladies professionnelles (CATMP) ;

- en application des dispositions de l’article L. 723-12 du code rural et de la pêche maritime, le conseil central d’administration de la mutualité sociale agricole (CCMSA) ;

- en application des dispositions de l’article R. 611-9 du code de la sécurité sociale, le conseil d’administration du régime social des indépendants (RSI) ;

- en application de l’article 16 de la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 relative au service public de l’électricité et du gaz et aux entreprises électriques et gazières, le conseil d’administration de la Caisse nationale des industries électriques et gazières (CNIEG).

Le conseil d’administration de l’ACOSS s’est prononcé le 11 septembre 2013 et a émis un avis défavorable par 22 voix contre, 6 voix pour et 2 abstentions.

Le conseil d’administration de la CNAF s’est prononcé le 11 septembre 2013 et a émis un avis défavorable par 19 voix contre, 8 voix pour et 7 abstentions.

Le conseil d’administration du RSI s’est prononcé le 11 septembre 2013 et a émis un avis défavorable à l’unanimité.

Le conseil central d’administration de la MSA s’est prononcé le 11 septembre 2013 et a émis un avis circonstancié unanime. Dans cet avis, le conseil central d’administration approuve notamment les dispositions visant à améliorer l’équité du système de retraite et relève également que le projet de loi reprend, conformément aux engagements du Président de la République, des mesures préconisées de longue date par la MSA à l’égard des non salariés agricoles. Le conseil central d’administration constate en revanche que le projet de loi ne s’inscrit pas dans la logique d’une réforme systémique souhaitée par la MSA et que sa portée reste limitée avec des incertitudes sur son impact financier à moyen et long terme.

La Commission des accidents du travail et des maladies professionnelles s’est prononcée le 11 septembre 2013 et a émis un avis défavorable par 7 voix contre, 2 voix pour et une abstention.

Le conseil d’administration de la CNAV s’est prononcé le 12 septembre 2013 et a émis un avis défavorable par 21 voix contre, 7 pour et 2 abstentions.

Le conseil d’administration de la CNIEG s’est prononcé le 12 septembre 2013 et a émis un avis favorable, par 12 voix pour, 6 voix contre et 2 abstentions.

- Autres organismes

En application de l’article L. 6123-1 du code du travail, le bureau du Conseil national de la formation professionnelle tout au long de la vie (CNFPTLV) s’est prononcé le 13 septembre 2013 et a émis un avis favorable, par 14 voix pour, 7 contre et une abstention.

En application de l’article R. 4641-2 du code du travail, le Conseil d’orientation sur les conditions de travail (COCT) a été consulté le 13 septembre 2013.

En application de l’article L. 2271-1 du code du travail, la Commission nationale de la négociation collective (CNNC) a été consultée le 13 septembre 2013.

En outre, le 9 septembre 2013, le projet de loi a été présenté pour information au Conseil supérieur de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.

VI.3. Textes d’application

Articles du projet de loi

Texte d’application nécessaire

Autres textes réglementaires liés au projet de loi

Article 1er - Principes et objectifs de l’assurance retraite

-

 

TITRE Ier : ASSURER LA PERENNITE DES REGIMES DE RETRAITE

 

Article 2 – Détermination de la durée d’assurance tous régimes

 

Le gouvernement prendra, fin 2013, le décret relatif à la durée d’assurance de la génération 1957, en application de l’article 5 de la loi de 2003

Article 3 – Règles et dispositif de pilotage

Décret en Conseil d’Etat (organisation et fonctionnement du comité)

Décret simple (nomination des membres du Comité de surveillance)

Décret simple (indicateurs de suivi, bornes des taux de cotisation et taux de remplacement)

 

Article 4 – Report au 1er octobre de la revalorisation des pensions, sauf ASPA

-

 

TITRE II : RENDRE LE SYSTEME PLUS JUSTE

 

Chapitre 1er – La pénibilité au travail

 

Article 5 – La fiche de prévention des expositions

Décret simple (seuils d’exposition)

Décret en Conseil d’Etat (établissement de la fiche de prévention)

 

Article 6 – Le compte personnel pénibilité

Décret simple (liste des régimes non concernés)

Décrets en Conseil d’Etat (conditions d’attribution des points, transmission de la fiche d’exposition par l’employeur, modalités de conversion des points, modalités de calcul et paiement)

Décret en Conseil d’Etat (barème de points et âge de liquidation)

Décret simple (condition de réduction de la durée du travail, limites du complément de rémunération)

Décret simple (gestion du compte, contrôles de l’exposition)

Décret en Conseil d’Etat (modalités du recours préalable, composition de la commission et recours du salarié) Décret en Conseil d’Etat (dispositions d’application)

Décret simple (composition et modalités de fonctionnement du Conseil d’administration, régime comptable et financier)

Décret simple (conditions de prise en charge des sommes exposées par les financeurs des actions de formation, des compléments de remboursement, du remboursement des majorations de durée d’assurance, des dépenses d’expertise

Décret simple (détermination du taux de la cotisation due et de la cotisation additionnelle)

 

Article 7 – Alimentation du compte formation par le compte personnel pénibilité

-

 

Article 8 – Accords en faveur de la prévention de la pénibilité

-

 

Article 9 – Droits à majoration de durée d’assurance vieillesse au titre de la pénibilité

Décret simple (conditions et limites de l’abaissement de l’âge)

 

Article 10 – Dispositions diverses

Décret en Conseil d’Etat (entrée en vigueur)

 

Chapitre II – Emploi des seniors

 

Article 11 – Extension de la retraite progressive

Décret en Conseil d’Etat (durée d’assurance tous régimes)

Décret simple (simplification du dispositif)

Article 12 – Cumul emploi retraite tous régimes

-

 

Chapitre III – Améliorer les droits à retraite des femmes, des jeunes actifs et des assurés à carrière heurtée

 

Article 13 – Préparer une refonte des majorations de pension pour enfants

-

-

Article 14 – Faciliter l’acquisition de trimestres pour les assurés à faible rémunération

Décret simple (minimum annuel à 150 H SMIC)

Décret simple (modalités d’affectation des cotisations)

Décret simple (règle de plafonnement)

 

Article 15 – Elargissement de la retraite anticipée pour carrières longues

 

Le gouvernement, par décret, réputera cotisés, pour le bénéfice de la retraite anticipée, deux trimestres supplémentaires deux chômage, deux trimestres d’invalidité ainsi que tous les trimestres de maternité

Article 16 – Aider les assurés à racheter leurs années d’étude

Décret simple (montant du versement de cotisation et conditions d’abaissement)

Barème annuel publié par arrêté

Article 17 – Mieux prendre en compte les périodes d’apprentissage au titre de l’assurance retraite

Décret simple (conditions de prise en charge des cotisations, détermination du taux forfaitaire de prise en charge des dépenses de transport, conditions de prise en charge du versement de cotisations complémentaires)

 

Article 18 – Améliorer la prise en compte des périodes de formation des chômeurs

 

Décret en Conseil d’Etat relatif aux premières périodes de chômage non indemnisé

Article 19 – Prendre en considération les aléas de carrière des artisans et commerçants

Décret simple (modalités d’application et délais de demande d’affiliation)

 

Chapitre IV – Améliorer les petites pensions des non salariés agricoles

 

Article 20 – NSA – Suppression de la condition de 17 ans ½ pour bénéficier de la PMR

-

 

Article 21 – NSA : mesures relatives au RCO

Décret simple (conditions d’application)

 

Article 22 – Exploitants agricoles : garantie 75% du SMIC

Décret simple (conditions d’application)

 

Chapitre V – Des solidarités nouvelles en faveur des assurés handicapés et de leurs aidants

 

Article 23 – Elargir l’accès à la retraite pour les travailleurs handicapés

-

 

Article 24 – Elargir le champ de la retraite à taux plein dès l’âge légal

Décret simple (fixation du taux d’incapacité permanente)

 

Article 25 – Mieux reconnaître les aidants familiaux

Décret simple (fixation du taux d’incapacité permanente)

 

TITRE III – SIMPLIFIER LE SYSTEME ET RENFORCER SA GOUVERNANCE

 

Chapitre Ier – Simplifier l’accès des assurés à leurs droits

 

Article 26 – Droit à l’information

Décret simple (conditions d’application et date d’entrée en vigueur)

 

Article 27 – Pilotage de la simplification et des projets inter-régimes

-

Décret précisant les missions du nouveau GIP

Article 28 – Une meilleure coordination entre régime pour le calcul de la retraite des poly-pensionnés

Décret en Conseil d’Etat (fixation des règles de priorité entre régimes)

Décret simple (modalités de remboursement)

Décret en Conseil d’Etat (modalités d’application)

 

Article 29 – Mutualiser le service des petites pensions

Décret en Conseil d’Etat (fixation de la durée d’assurance)

Décret simple (seuil des droits à pension et modalités d’application)

 

Chapitre II – Améliorer la gouvernance et le pilotage des caisses de retraite

 

Article 30 – Débat annuel sur les retraites dans la fonction publique

-

-

Article 31 – Pilotage RCO du régime NSA

Décret en Conseil d’Etat (modalités d’application et plafonds de variation de la valeur du point)

 

Article 32 – Evolution des caisses des professions libérales

Décret en Conseil d’Etat (modalités d’application, contrat pluriannuel et contrats de gestion, groupements de section)

Décret simple (nomination et approbation du règlement)

Décret en Conseil d’Etat sur la gouvernance des sections professionnelles

Article 33 – Régimes à prestations définies

Décret en Conseil d’Etat (modalités d’externalisation des engagements)

 

Article 34 – Habilitation à prendre par ordonnance les mesures d’harmonisation nécessaire à Saint Pierre et Miquelon et Mayotte

 

Deux ordonnances

1 Une présentation plus détaillée de l’architecture du système de retraite français figure dans la première partie du douzième rapport du COR, « Retraites : un état des lieux du système français », janvier 2013, accessible à l’adresse suivante : http://www.cor-retraites.fr/article418.html

2 Régime général (salariés du privé non agricole - CNAV), MSA salariés (salariés agricoles), MSA non-salariés (non-salariés agricoles), régimes des fonctionnaires civils et militaires, FSPOEIE (ouvriers des établissements industriels de l’État), CNRACL (collectivités locales), régimes des mines, CNIEG (industries électriques et gazières), SNCF, RATP, ENIM (marins), CRPCEN (clercs et employés de notaires), CAVIMAC (cultes), Banque de France, Opéra de Paris, Comédie française, RSI (artisans et commerçants), CNAVPL (professions libérales), CNBF (avocats), Port autonome de Strasbourg. A ces vingt et un régimes s’ajoutent un certain nombre

de régimes regroupant un nombre limité d’assurés – dont de nombreux régimes « fermés ».

3 Voir aussi le rapport de la Commission pour l’avenir des retraites, Nos retraites demain : équilibre financier et justice, Rapport au Premier ministre, juin 2013.

4 Données en euros constants 2011.

5 Pour des données statistiques détaillées, voir le rapport de la Commission pour l’avenir des retraites p. 75 à 77.

6 Ainsi qu’aux personnels des personnes publiques employés dans les conditions du droit privé.

7 L’assemblée générale de la CNBF a adopté, lors de sa réunion du 19 décembre 2009, une résolution visant à s’aligner sur le taux applicable au régime général.

8 Certains régimes font référence à l’article L. 161-23-1 du code de la sécurité sociale.

9 Les manutentions manuelles de charges, les postures pénibles, les vibrations mécaniques, les agents chimiques dangereux, les activités exercées en milieu hyperbare, les températures extrêmes, le bruit, le travail de nuit, le travail en équipes successives alternantes, le travail répétitif.

10 A l’exception du personnel des personnes publiques employé dans les conditions du droit privé.

11 « L’espérance de vie s’accroît, les inégalités sociales face à la mort demeurent », Insee Première n°1372, octobre 2011.

12 « Espérances de vie, espérances de vie en santé et âges de départ à la retraite : des inégalités selon la profession en France », E. Cambois, T. Barnay, J.-M. Robine, Retraite et Société, n°49, août 2010.

13 « Départs en retraite et ‘Travaux pénibles’, L’usage des connaissances scientifiques sur le travail et ses risques à long terme pour la santé », G. Lasfargues, Rapport de recherche du Centre d’Etude pour l’Emploi, avril 2005.

14 Ces facteurs sont : la manutention manuelle de charges, les vibrations mécaniques, les postures pénibles, les agents toxiques, les températures extrêmes, le bruit, le travail répétitif, le travail de nuit, le travail alternant et le travail hyperbare.

15 « Emploi et santé des séniors durablement exposés à des pénibilités physiques au cours de leur carrière : l’apport de l’enquête ‘Santé et Itinéraire Professionnel’ », T. Coutrot, C. Rouxel, Dares-Analyses, n°2011-20, mars 2011.

16 « Les absences au travail des salariés pour raisons de santé : un rôle important des conditions de travail », C. Inan, Dares Analyses n°2013-009, février 2013.

17 La reconstruction des carrières est probabiliste. Les informations disponibles ne permettent pas de reconstituer les expositions passées précises pour un individu donné.

18 Hormis les 2 accords cités plus haut, les autres accords sont soit hors du champ du 1% pénibilité, soit non étendus.

19 La mission IGAS ayant procédé à une évaluation du dispositif (Evaluation du cumul emploi-retraite, Tome I, IGAS, juin 2012) estime à environ 100 000 le nombre de retraités-actifs « inter-régimes ».

20 Le cumul emploi retraite libéralisé suppose d’ailleurs déjà d’avoir liquidé toutes ses pensions de tous ses régimes.

21 Toutefois, bien que la surcote soit réputée actuariellement neutre, elle peut parfois être inférieure à la neutralité actuarielle ; dans ce cas, le CER peut être, pour le régime, légèrement moins avantageux qu’une surcote dont le coût, pour le régime, est inférieur à la stricte neutralité actuarielle.

22 Les montants moyens de pensions des retraités-actifs estimés par la DREES à partir de l’EIR 2008 et figurant dans le rapport de la mission IGAS mentionné supra, montrent que ceux-ci bénéficient de niveaux de pensions supérieurs aux autres retraités.

23 Toujours selon le rapport de 2012, 50% des retraités-actifs du RG cumulent moins de deux ans.

24 La mesure sur les poly-pensionnés de l’article 28 ne vise que les polypensionnés des régimes alignés, un tel cas pourra donc continuer à se présenter même après son entrée en vigueur ;

25 Régime général, RSI, CAVIMAC, Professions libérales, Avocats et Exploitants agricoles ;

26 L’assiette des cotisations de sécurité sociale augmente d’environ 30 % en moyenne, passant ainsi de 2 430 M€ à 3 240 M€.

27 L’assiette retenue pour le service civique est de 50 % du PASS.

28 En effet, leurs cotisations d’assurance vieillesse sont calculées sur une assiette forfaitaire de 1,57 €/heure seulement (soit 1/6 du SMIC) en 2013. Le montant de la cotisation d’assurance vieillesse est de 0,26 € par heure de stage.

29

30 Pour un montant total de cotisations de 83,5 M€ (21,3 M€ pour l’État et 62,3 M€ pour les conseils régionaux).

31 Estimation établie à partir du montant total de cotisations versé au bénéfice des SFP en 2011.

32 Taux de cotisations de 16,85% × 9,43 (smic horaire) x 169 h × 90% x 306 846 (effectif SFP) × 3 mois.

33 L’attribution de points gratuits est plafonnée à 17 annuités ce qui correspond au nombre d’années s’étant écoulées entre l’extension de la retraite proportionnelle (1994) et l’extension de la RCO (2011) aux membres de famille.

34 Depuis 2011 les membres de la famille acquièrent 66 points de RCO par annuité cotisée

35 Les petits chefs sont les agriculteurs ayant été chef d’exploitation moins de 17,5 ans et n’ayant pu à ce titre bénéficier de points gratuits de RCO au titre de la loi « Peiro » du 4 mars 2002.

36 Aujourd’hui le taux de cotisation RCO est unique fixé à 3% des revenus professionnels ou de l’assiette forfaitaire fixée à 1820h SMIC.

37 avec laquelle une contractualisation est en cours.

38 Selon le guide-barème annexé au code de l’action sociale et des familles, le taux de 50 % correspond à des troubles importants entraînant une gêne notable dans la vie sociale de la personne. L'entrave peut soit être concrètement repérée dans la vie de la personne, soit compensée afin que cette vie sociale soit préservée, mais au prix d'efforts importants ou de la mobilisation d'une compensation spécifique. Toutefois, l'autonomie est conservée pour les actes élémentaires de la vie quotidienne.

39 « Tableau de bord trimestriel, activité des séniors et politiques de l’emploi », DARES, décembre 2012.

40 Enquête « motivations de départ à la retraite », CNAV-DREES-DSS, novembre 2012.

41 Les employeurs relevant du régime général déclareront ces données via la déclaration annuelle des données sociales (en l’attente de la mise en œuvre de la déclaration sociale nominative), ceux relevant du régime agricole, via la déclaration trimestrielle des salaires.


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