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PROJET DE LOI

autorisant la ratification de l’accord d’association entre l’Union européenne

et la Communauté européenne de l’énergie atomique et leurs États

membres, d’une part, et la Géorgie, d’autre part

NOR : MAEJ1501711L/Bleue-1

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ÉTUDE D’IMPACT

I. - Situation de référence et objectifs de l’accord

L’accord d’association entre l’Union européenne et la Communauté européenne de l’énergie atomique et leurs États membres, d’une part, et la Géorgie, d’autre part (ci-après l’accord) a été signé le 27 juin 2014 à Bruxelles, en marge du Conseil européen, conformément à l’objectif d’une signature « au plus tard en juin 2014 » fixé par le Conseil européen dans ses conclusions du 20 mars 2014.

Les négociations de l’accord, entre juillet 2010 et juillet 2013, avaient abouti au paraphe de l’accord le 29 novembre 2013, à Vilnius, lors du troisième sommet du Partenariat oriental de l’Union européenne. La conclusion d’accords d’association constitue en effet l’un des objectifs de ce Partenariat initié en 2009 dans le but de relancer le volet oriental de la politique européenne de voisinage en direction de l’Arménie, de l’Azerbaïdjan, de la Biélorussie, de la Géorgie, de la Moldavie et de l’Ukraine.

L’accord a vocation à remplacer l’accord de partenariat et de coopération entre les Communautés européennes et leurs États membres, d’une part, et la Géorgie, d’autre part, signé en 19961 et entré en vigueur en 1999 pour une durée initiale de dix ans. Plus ambitieux, il vise à renforcer le dialogue politique et les échanges économiques et commerciaux entre l’Union européenne et la Géorgie, en permettant un important rapprochement règlementaire et normatif et une vaste libéralisation des échanges dans le cadre d’une « association politique et d’une intégration économique » avec l’Union européenne.

L’accord d’association repose sur trois volets : un volet politique, un volet de coopération et un volet commercial. Ses objectifs sont les suivants :

- promouvoir l’association politique et l’intégration économique entre l’Union européenne et ses États membres et la Géorgie ;

- développer le dialogue politique dans tous les domaines d’intérêt commun, fondé sur des valeurs, des principes et des objectifs communs, en particulier le respect et la promotion de la démocratie et des droits de l’Homme, du développement durable, de la bonne gouvernance et de l’État de droit, avec l’engagement de promouvoir et de protéger ces valeurs et ces principes sur la scène internationale, de manière à contribuer au renforcement du multilatéralisme ;

- encourager, sauvegarder et consolider la paix et la stabilité à l'échelle tant régionale qu'internationale, notamment en conjuguant les efforts pour éliminer les sources de tension, en améliorant la sécurité aux frontières et en promouvant la coopération transfrontière et les relations de bon voisinage ;

- contribuer au renforcement de la démocratie et à la stabilité politique, économique et institutionnelle en Géorgie ;

- soutenir et renforcer la coopération en matière de liberté, de sécurité et de justice de manière à asseoir l'État de droit et le respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que la coopération dans les domaines de la mobilité et des contacts entre les peuples ;

- créer les conditions propices au renforcement des relations économiques et commerciales en vue de l'intégration progressive de la Géorgie dans le marché intérieur de l'Union européenne, notamment par la mise en œuvre d’un accord de libre-échange complet et approfondi prévoyant un rapprochement important des réglementations, normes et standards, une vaste libéralisation de l'accès au marché des biens et des services, des avancées en matière de suppression des barrières non-tarifaires, d’accès aux marchés publics, de protection de la propriété intellectuelle, dans le respect des droits et des obligations découlant de l'adhésion des parties à l'OMC, ainsi que l'application transparente de ces droits et obligations ;

- contribuer au développement politique et socio-économique de la Géorgie par une vaste coopération dans un large éventail de domaines d’intérêt commun, tels que la bonne gouvernance, la liberté, la sécurité et la justice, l'intégration commerciale et le renforcement de la coopération économique, la politique sociale et de l'emploi, la gestion financière, la réforme de l'administration publique et de la fonction publique, la participation de la société civile, le renforcement des institutions, la réduction de la pauvreté et le développement durable.

Pour l’Union européenne et ses États membres, il s’agissait, dans ces négociations :

- de soutenir la mise en œuvre de réformes visant à moderniser en profondeur l’économie géorgienne au moyen notamment d’un rapprochement avec l’acquis de l’Union ;

- de promouvoir de nouveaux domaines de coopération, correspondant à des enjeux globaux tels que le développement durable ou la paix et la sécurité, la démocratie et les droits de l’Homme ainsi que le développement social ;

- d’obtenir des garanties quant à la protection de la propriété intellectuelle, ainsi qu’en matière de protection des indications géographiques.

Sur le volet politique

En établissant une « association », l’accord donne une nouvelle impulsion à la dynamique de rapprochement entre l’Union européenne et ses États membres et la Géorgie. Il prévoit :

- le développement et le renforcement du dialogue politique sur les réformes intérieures ;

- l’intensification du dialogue et de la coopération dans le domaine de la politique étrangère et de sécurité, y compris la politique de sécurité et de défense commune, de façon à favoriser une convergence progressive, en se penchant en particulier sur les questions de prévention des conflits et de gestion des crises, de stabilité régionale, de désarmement, de non-prolifération, de limitation des armements et de contrôle des exportations ;

- l’engagement de l’Union européenne et de la Géorgie de parvenir à un règlement pacifique et durable des conflits dans les régions géorgiennes d’Abkhazie et d’Ossétie du Sud (région de Tskhinvali), dans le plein respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de la Géorgie, et de soutenir la réhabilitation après le conflit.

Sur le volet commercial

L’accord ouvre des perspectives majeures de développement des relations entre l’Union européenne et la Géorgie :

- il prévoit la libéralisation des échanges pour 100 % des lignes tarifaires en valeur commerciale pour la Géorgie, et de 99,9 % pour l’Union européenne. Le calendrier de diminution des droits de douane est asymétrique afin de prendre en compte les différences de développement économique entre l’Union européenne et la Géorgie ;

- en sus des démantèlements tarifaires, l’accord prévoit des engagements pour une élimination progressive de certains obstacles techniques au commerce et une facilitation des procédures douanières ;

- il couvre la plupart des sujets commerciaux non tarifaires d’intérêt offensif européen, parmi lesquels les mesures sanitaires et phytosanitaires, les services, la concurrence, les marchés publics et la propriété intellectuelle, qui font l’objet de chapitres spécifiques. L’accord prévoit ainsi la reconnaissance et la protection de toutes les indications géographiques européennes.

Sur le volet de coopération

L’accord d’association vise à renforcer la coopération entre l’Union européenne et ses États membres et la Géorgie dans un large éventail de domaines d’intérêt commun, en s’appuyant en particulier sur la reprise progressive et la mise en œuvre par la Géorgie d’une partie l’acquis de l’Union et sur l’assistance de l’Union aux réformes suscitées par celles-ci. Il s’agit en particulier de :

- soutenir la mise en œuvre de réformes en profondeur ;

- promouvoir la croissance économique ;

- contribuer au renforcement de la bonne gouvernance ;

- renforcer la coopération dans vingt-sept secteurs tels que : la réforme de l’administration publique ; la gestion des finances publiques ; l’énergie, les transports, l’environnement, la politique industrielle et relative aux petites et moyennes entreprises ; les politiques sociales ; la protection des consommateurs ; l’agriculture et le développement rural ; la coopération transfrontalière et régionale ; l’éducation et la formation ; la jeunesse ; la culture.

II. - Conséquences estimées de la mise en œuvre de l’accord

- Conséquences économiques

L’accord d’association, qui comprend un accord de libre-échange complet et approfondi constituant son titre IV (« Commerce et questions liées au commerce »), crée un nouveau cadre pour les relations économiques entre l’Union européenne et la Géorgie et doit favoriser l’essor de celles-ci alors que l’Union européenne représentait en 2013, 20 % des exportations de la Géorgie et 30 % de ses importations. Il doit permettre des avancées notamment en matière d’accès au marché, de questions liées au commerce et de convergence réglementaire. La Géorgie devrait voir augmenter ses exportations vers l’Union européenne de 12 % et ses importations en provenance de l’Union européenne de 7,5 %.

Eu égard aux flux commerciaux entre la France et la Géorgie et aux parts de marché françaises en Géorgie, la portée économique de l’accord d’association pour les entreprises françaises devrait être relativement limitée, mais l’accord permettra d’intensifier nos relations commerciales (176,4 M€ d’échanges en 2013) et ouvrira de nouvelles opportunités.

Un vaste démantèlement tarifaire est prévu, l’accord comprenant une élimination de 100 % de droits en valeur commerciale pour la Géorgie et de 99,9 % pour l’Union européenne. S’agissant des produits industriels, la libéralisation tarifaire sera immédiate, pour la Géorgie comme pour l’Union. Le commerce des produits agricoles sera également immédiatement et intégralement libéralisé, à l’exception de l’ail qui bénéficiera d’un contingent de 220 tonnes à droits nuls. Si des concessions ambitieuses ont été octroyées, les intérêts défensifs des deux parties ont été pleinement pris en compte : certains produits identifiés comme sensibles – des viandes (bœuf, porc, volaille et mouton), des produits laitiers (beurre et poudre de lait), les œufs, les champignons, des céréales (maïs, orge, le gluten de blé ou encore le son) et les produits à base de céréales, les produits issus de l’amidon, les sucres et les produits à base de sucre – sont protégés par un mécanisme anti-contournement. Ce dernier mécanisme, visant à limiter les risques de contournement de droits de douane via un transit par d’autres pays voisins, fixe des seuils au-delà desquels les préférences tarifaires prévues par l’accord peuvent être suspendues. Il prévoit également un système de notifications permettant à la Géorgie de fournir les informations nécessaires pour expliquer ses flux d’exportation vers l’Union européenne.

Le rapprochement réglementaire et normatif prévu par l’accord de libre-échange complet et approfondi doit permettre des avancées importantes s’agissant en particulier :

- de la reprise prévue par la Géorgie de l’acquis de l’Union en matière de normes sanitaires et phytosanitaires afin de faciliter le commerce des plantes, produits végétaux ainsi que des animaux et produits d’origine animale, tout en s’assurant que le niveau de protection est maintenu ; ainsi, le processus menant à la reconnaissance de l’équivalence des normes SPS comporte un mécanisme de consultation rapide pour remédier aux barrières commerciales avec un système d’alerte précoce pour les urgences vétérinaires et phytosanitaires ;

- de la reprise prévue par la Géorgie de l’acquis de l’Union en matière de services, notamment les services maritimes, le commerce électronique, les services postaux et les services financiers ;

- du renforcement de la protection des indications géographiques, des droits de propriété intellectuelle en général et de l’intensification de la lutte contre la contrefaçon ;

- de l’amélioration attendue du climat des affaires et de la libre concurrence. Le démantèlement tarifaire et les avancées en matière non-tarifaire doivent permettre d’améliorer l’accès au marché. Ainsi, la modernisation du système de passation des marchés publics géorgien et l’alignement progressif de la législation géorgienne sur celle de l’Union européenne doivent permettre aux entreprises européennes d’accéder au marché géorgien dans les mêmes conditions que les entreprises locales.

Les exportations vers la Géorgie ne représentaient qu’environ 0,02 % du total des exportations françaises en 2012 (82,6 M€). En outre, la part de marché française dans les importations de la Géorgie est très modeste, plutôt en recul depuis une dizaine d’années, les importations en provenance de France ne représentant que 1,4 % du total des importations géorgiennes en 2012 (contre 1,9 % en 2002). Sur les dix dernières années, l’évolution de la part des importations françaises dans les importations totales du pays a été volatile en Géorgie (entre un minimum de 1,4 % en 2012 et un maximum de 4,9 % en 2003). La France exporte principalement vers ce pays des produits à haute ou relativement haute valeur ajoutée : pour l’essentiel des produits pharmaceutiques (premier poste), des moteurs et turbines industriels (deuxième poste), caractérisés par une moindre élasticité aux tarifs douaniers que d’autres produits.

Toutefois, si les relations commerciales entre la France et la Géorgie sont modestes, la présence de nos entreprises est relativement importante (29 implantations) et celles-ci devraient profiter de l’amélioration attendue du climat des affaires. La France s’est positionnée ces dernières années sur des secteurs importants, notamment le secteur financier (Société Générale), et la distribution (Carrefour).

S’agissant des investissements directs à l’étranger (IDE), le régime commercial plus stable et plus prévisible résultant de la reprise de la législation de l’Union européenne devrait stimuler le flux d’IDE en provenance de l’Union européenne vers la Géorgie, favorisant la création d’entreprises et le renforcement de la compétitivité de l’économie géorgienne.

- Conséquences financières

D’un point du vue financier, l’accord ne devrait pas avoir de conséquences négatives, notamment sur le plan de la souveraineté fiscale. Son article 135 prévoit une application sans préjudice des conventions fiscales existantes et futures.

Le chapitre 7 du titre IV de l’accord, relatif aux paiements courants et à la circulation des capitaux, prévoit une libéralisation des mouvements de capitaux et paiements courants entre les parties, conforme aux engagements pris dans le cadre des institutions financières internationales (en l’espèce, les statuts du Fonds monétaire international) et tenant compte de la stabilité monétaire de chaque partie. L’article 139 prévoit des mesures de sauvegarde (ne dépassant pas six mois) en matière de circulation des capitaux entre les parties lorsque, dans des circonstances exceptionnelles, les mouvements de capitaux entre les parties causent ou menacent de causer de graves difficultés dans le fonctionnement de la politique des taux de change ou de la politique monétaire d’un ou de plusieurs États membres de l’Union européenne et de la Géorgie. Ces derniers peuvent donc prendre des mesures de sauvegarde en matière de circulation des capitaux pendant une période ne dépassant pas six mois.

S’agissant des services financiers (chapitre 6 du titre IV), l’article 115 prévoit une exception qui stipule que chaque partie peut adopter ou maintenir, pour des raisons prudentielles, des mesures visant à garantir l’intégrité et la stabilité de son système financier. Il prévoit également qu’aucune stipulation de l’accord ne peut être interprétée comme obligeant une partie à révéler tout renseignement confidentiel ou exclusif en la possession d’entités publiques. L’article 119 stipule enfin que l’accord ne peut s’appliquer aux activités exercées par une banque centrale ou une autorité monétaire ou par toute autre entité publique dans le cadre de l’application de politiques monétaires ou de taux de change.

S’agissant du traitement des données à caractère financier, l’article 118 de l’accord prévoit que chaque partie autorise les fournisseurs de services financiers de l’autre partie à transférer des informations sous forme électronique ou sous toute autre forme à l’intérieur et en dehors de son territoire. Le même article prévoit néanmoins des mesures de sauvegarde afin d’assurer la protection de la vie privée et des droits fondamentaux, ainsi que des libertés individuelles, en particulier en ce qui concerne le transfert de données à caractère personnel.

Il convient de noter que, selon la CNIL (http://www.cnil.fr/linstitution/international/les-autorites-de-controle-dans-le-monde/), la Géorgie est caractérisée par un niveau non adéquat de protection des données (cf. ci-dessous : conséquences juridiques).

S’agissant de la lutte contre le blanchiment, l’accord prévoit dans son article 116 une mise en œuvre par les parties « des normes reconnues sur le plan international en matière de régulation et de surveillance du secteur des services financiers, ainsi que de lutte contre la fraude et l’évasion fiscales ».

- Conséquences sociales

L’accord s’inscrit dans la perspective selon laquelle le développement social doit aller de pair avec le développement économique afin d’assurer le renforcement de la cohésion sociale et lutter contre la pauvreté, les inégalités, les injustices et l’exclusion sociale. L’accord vise à contribuer au développement socio-économique de la Géorgie, notamment par une vaste coopération notamment en matière d’emploi, de politique sociale et d’égalité des chances (chapitre 14 du titre VI de l’accord), de santé publique (chapitre 15 du titre VI), d’éducation et de formation (chapitre 16 du titre VI), et en stipulant dans certains domaines, l’engagement de la Géorgie à rapprocher progressivement sa législation de celle de l’Union européenne et des instruments internationaux énumérés à l’annexe XXX, en matière de droit du travail, de non-discrimination et d’égalité entre les femmes et les hommes, et de santé et de sécurité au travail.

Cet objectif de contribution au développement socio-économique de la Géorgie est également décliné dans le volet commercial de l’accord (titre IV : « Commerce et questions liées »), dont le chapitre 13 (« Commerce et développement durable »), soulignant l’interdépendance entre développement économique et développement social, affirme la volonté des parties de « promouvoir le développement du commerce international de façon à le rendre propice au plein emploi productif et à un travail décent pour tous » (article 229). Des engagements sont pris en matière d’application de normes sociales, en particulier quant à la mise en œuvre des conventions internationales dans ce domaine dont celles découlant de l’adhésion des parties à l’Organisation Internationale du Travail.

L’accord vise par ailleurs à renforcer la participation de la société civile dans les relations entre l’Union européenne et la Géorgie, au moyen notamment de la mise en place dans le cadre du volet commercial de l’accord (article 241) d’un forum mixte avec les organisations de la société civile et de l’institution d’une plate-forme de la société civile (article 412) disposant d’un pouvoir de recommandation à l’intention du conseil d’association.

- Conséquences environnementales

L’accord d’association compte parmi ses principaux objectifs la réponse aux besoins en matière d’environnement, y compris par la mise en œuvre des accords internationaux multilatéraux et par la coopération transfrontalière à ce sujet, et le respect des principes du développement durable.

Le renforcement de la coopération entre l’Union européenne et la Géorgie en matière d’environnement et de lutte contre le changement climatique doit contribuer à la réalisation de l’objectif à long terme de développement durable et d’économie plus verte. Cet objectif fait l’objet de deux chapitres spécifiques (chapitres 3 et 4) du volet coopération de l’accord (titre VI), lesquels stipulent l’engagement de la Géorgie à rapprocher progressivement sa législation de celle de l’Union européenne et des instruments internationaux énumérés aux annexes XXVI et XXVII, selon le périmètre et dans des délais décrits par celles-ci ; sont en particulier visés les textes relatifs à la gouvernance environnementale et la prise en compte des questions environnementales dans d'autres domaines d'action, la qualité de l’air, la qualité de l'eau et la gestion des ressources, la gestion des déchets et des ressources, la protection de la nature, la pollution industrielle et aux risques industriels, aux produits chimiques, et au changement climatique et à la protection de la couche d'ozone.

Cet objectif est incorporé de façon transversale dans l’ensemble de l’accord et notamment dans son volet commercial (titre IV : « Commerce et questions liées ») dont un chapitre est consacré au lien entre les politiques commerciales, sociales et environnementales (chapitre 13 : « Commerce et développement durable »). Promouvant une approche globale du commerce et du développement durable, ce chapitre réaffirme l’engagement à prendre des mesures en faveur du développement durable, eu égard notamment à l’interdépendance du développement économique, du développement social et de la protection de l’environnement, reconnaît le droit et la responsabilité des parties à adopter des réglementations sociales et environnementales dans la poursuite d’objectifs légitimes et met l’accent sur l’application effective de la législation du travail et de l’environnement. En outre, des engagements sont pris en matière d’application de normes environnementales, en particulier quant à la mise en œuvre des conventions internationales dans ce domaine.

- Conséquences juridiques

Articulation de l’accord avec d’autres conventions

Cet accord, et en particulier les stipulations de l’accord de libre-échange complet et approfondi constituant son titre IV, vise à approfondir les engagements contractés par l’Union européenne et ses Etats membres, d’une part, et la Géorgie, d’autre, dans le cadre des accords de l’Organisation Mondiale du Commerce, la Géorgie étant membre de celle-ci depuis le 14 juin 2000.

La Géorgie est membre de l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (Unesco) depuis 1992. Elle a ratifié la Convention pour la protection du patrimoine mondial, culturel et naturel et son premier site protégé a été inscrit à la liste en 1994. La Géorgie a également ratifié la Convention sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles. L’accord d’association comprend un chapitre 17 (titre VI), intitulé « Coopération dans le domaine culturel » qui stipule, en son article 362, que les Parties encouragent la coopération culturelle conformément à cette dernière convention2.

Articulation avec le droit de l’Union européenne

Aux termes de l’article 423 (titre VII), l’accord d’association remplace l’accord de partenariat et de coopération entre les Communautés européennes et les États membres, d’une part, et la Géorgie, d’autre part, signé le 22 avril 1996 et entré en vigueur le 1er juillet 1999, qui est abrogé. Toutefois, pendant la période d'application provisoire de l’accord d’association, les stipulations de l'accord de partenariat et de coopération continuent d'être appliquées dans la mesure où elles ne sont pas concernées par l'application provisoire de celui-ci.

L’accord d’association remplace également l’accord entre l’Union européenne et la Géorgie relatif à la protection des indications géographiques des produits agricoles et des denrées alimentaires, signé à Bruxelles le 14 juillet 20113 et entré en vigueur le 1er avril 2012.

Il convient toutefois de relever, d’une part que cet accord s’appliquera sans préjudice des accords bilatéraux (ou conventions bilatérales) déjà négociés, signés et conclus entre les États membres de l'UE et la Géorgie dans les domaines du trafic aérien et des transports maritimes, ferroviaires ou routiers, dans la mesure où ceux-ci énoncent des règles et des normes plus étendues et qu’ils ne portent pas à atteinte à la compétence des Etats membres et de la Géorgie de conclure de futurs accords bilatéraux (ou conventions bilatérales) énonçant de telles règles et normes plus étendues.

Accord mixte et application provisoire

L’accord d’association porte à la fois sur des matières relevant de la compétence de l’Union européenne et sur des matières relevant de celle des États membres. Il en va ainsi notamment, s’agissant du volet politique, des clauses en matière de protection des droits de l’Homme et de la lutte contre la prolifération par exemple, mais également, s’agissant de la partie commerciale, des sanctions pénales prévues pour la protection des droits de propriété intellectuelle (article 151). L’accord est donc de nature mixte et doit, pour entrer en vigueur, être ratifié par les États membres.

En outre, certaines stipulations, relevant de la compétence des États membres, sont de nature législative. C’est notamment le cas de la coopération en matière de lutte contre la prolifération des armes de destruction massive (article 10). S’agissant des obligations en matière de propriété intellectuelle (chapitre 9 du titre IV), l’accord précise que les coopérations mises en œuvre dans ce domaine s’effectuent dans le respect des législations nationales et des obligations internationales des parties.

L’accord prévoit en son article 432 une application provisoire de certaines de ses stipulations à compter du premier jour du second mois suivant la notification à l’Union européenne par la Géorgie de la ratification de l’accord par le parlement géorgien, soit depuis le 1er septembre 2014, celle-ci étant intervenue le 25 juillet 2014.

Sont ainsi appliqués à titre provisoire, en vertu de la décision du Conseil du 16 juin 2014 relative à la signature, au nom de l'Union européenne, et à l'application provisoire de l'accord (2014/494/UE4) :

- le titre I ;

- certaines stipulations des titres II (articles 3 et 4 ; articles 7 à 9) et III (articles 13 et 16) ;

- l’intégralité du titre IV (à l'exclusion de l'article 151 dans la mesure où il concerne l'action pénale visant à assurer le respect des droits de propriété intellectuelle, et à l'exclusion des articles 223 et 224 dans la mesure où ils s'appliquent aux procédures administratives ainsi qu'aux réexamens et recours au niveau des États membres) ;

- les articles 285 et 291 du titre V ;

- l’essentiel des stipulations des chapitres 1, 2, 3, 7, 10, 11, 13, 20, 23 du titre VI :

- le titre VII ;

- le titre VIII ;

- les annexes II à XXXI et l’annexe XXXIV, ainsi que les protocoles I à IV.

Par ailleurs, une déclaration du Conseil annexée à la décision de signature par l’Union précise que l’application provisoire de l’accord est sans préjudice de la compétence partagée des Etats membres en matière de services de transport.

Conséquences en droit interne

Afin de mettre en œuvre les dispositions de l’annexe XIV-b à l’accord (« Liste des engagements relatifs à la fourniture transfrontalière de services (Union) ») relatives aux services juridiques, il sera nécessaire d’introduire en droit français le statut de consultant juridique étranger qui permettra de dispenser des consultations en droit international, en droit de l'UE et dans le droit du pays pour lequel le consultant est qualifié5. A cet égard, la modification de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 19716 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, bien que non nécessaire à l’approbation de l’accord, est à envisager.

Protection des données personnelles 

Selon la CNIL la Géorgie est caractérisée par un niveau non adéquat de protection des données. Les transmissions de données personnelles impliquées l’accord s’inscrivent dans le cadre des dispositions de la loi n° 78-177 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés

- Conséquences administratives

L’accord institue un conseil d’association (article 404), chargé de superviser et de contrôler l’application et la mise en œuvre de l’accord, de réexaminer de façon périodique le fonctionnement de celui-ci à la lumière de ses objectifs et d’évoquer toute question majeure relevant de l’accord ainsi que toute autre question bilatérale ou internationale d’intérêt mutuel. Le conseil d’association se réunit au niveau ministériel, au moins une fois par an, et lors de réunions extraordinaires si nécessaire. Il est composé de membres du Conseil de l’Union européenne et de la Commission européenne d’une part, et de membres du gouvernement de la Géorgie, d’autre part. Sa présidence est assurée alternativement par l’Union européenne et par la Géorgie.

Le conseil d’association est assisté par un comité d’association, composé de représentants des parties au niveau des hauts fonctionnaires, se réunissant au moins une fois par an et chargé de préparer les réunions du conseil d’association. Pour aborder toute question relative au titre IV de l’accord (« Commerce et questions liées au commerce »), le comité d’association se réunit, au moins une fois par an, dans une configuration spécifique.

Le comité d’association est assisté de sous-comités spécialisés créés en tant que de besoin. Le titre IV de l’accord (« Commerce et questions liées au commerce ») prévoit la création d’un certain nombre de sous-comités dédiés spécifiquement aux aspects commerciaux de l’accord (sous-comité sanitaire et phytosanitaire ; sous-comité douanier ; sous-comité concernant les indications géographiques ; sous-comité du commerce et du développement durable).

L’accord prévoit en outre l’institution d’une commission parlementaire d’association, composée de membres du Parlement européen d’une part, et de membres du Parlement de la Géorgie d’autre part, ainsi que celle d’une plate-forme de la société civile, formée notamment, s’agissant de l’Union européenne, de membres du Comité économique et social européen. Ces instances disposent notamment d’un pouvoir de recommandation à l’intention du conseil d’association.

L’accord n’a pas de conséquences administratives en France.

- Conséquences concernant la parité femmes/hommes

Le renforcement de la non-discrimination et de l’égalité entre les femmes et les hommes constitue l’un des objectifs de l’accord d’association.

En vertu du chapitre 14 de l’accord (« Emploi, politique sociale et égalité des chances ») du titre VI (« Autres politiques de coopération »), les parties intensifient leur dialogue et leur coopération en vue d’améliorer l’égalité entre les femmes et les hommes, de garantir l’égalité des chances entre eux et de lutter contre les discriminations (articles 348 et 349 e)). La Géorgie s’engage en outre (article 354) à rapprocher progressivement sa législation de celle de l’Union en matière de non-discrimination et d’égalité entre les femmes et les hommes, selon le périmètre et dans des délais décrits à l’annexe XXX de l’accord. La reprise de l’acquis de l’Union porte en particulier sur les directives suivantes8 :

- Directive 2000/43/CE du Conseil du 29 juin 2000 relative à la mise en œuvre du principe de l'égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race ou d'origine ethnique ;

- Directive 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail ;

- Directive 2006/54/CE du Parlement européen et du Conseil du 5 juillet 2006 relative à la mise en œuvre du principe de l'égalité des chances et de l'égalité de traitement entre hommes et femmes en matière d'emploi et de travail ;

- Directive 2004/113/CE du Conseil du 13 décembre 2004 mettant en œuvre le principe de l'égalité de traitement entre les femmes et les hommes dans l'accès à des biens et services et la fourniture de biens et services ;

- Directive 92/85/CEE du Conseil du 19 octobre 1992 concernant la mise en œuvre de mesures visant à promouvoir l'amélioration de la sécurité et de la santé des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes au travail (dixième directive particulière au sens de l'article 16, paragraphe 1 de la directive 89/391/CEE) ;

- Directive 79/7/CEE du Conseil du 19 décembre 1978 relative à la mise en œuvre progressive du principe de l'égalité de traitement entre hommes et femmes en matière de sécurité sociale.

Par ailleurs, en vue de la réalisation des objectifs du titre IV (« Commerce et questions liées au commerce »), la coopération en matière de commerce et de développement durable (chapitre 13) peut porter sur les aspects liés au commerce de l’Agenda pour un travail décent de l’OIT, y compris les interactions entre le commerce et l’égalité entre les hommes et les femmes (article 239 h)).

III. - Historique des négociations

Le 10 mai 2010, le Conseil a autorisé la Commission à ouvrir des négociations avec la Géorgie en vue de la conclusion d’un nouvel accord destiné à remplacer l’accord de partenariat et de coopération entre les Communautés européennes et leurs États membres d’une part, et la Géorgie d’autre part, signé le 22 avril 1996 et entré en vigueur le 1e juillet 1999 pour une durée initiale de dix ans.

Les négociations ont été ouvertes le 15 juillet 2010. La négociation de l’accord de libre-échange approfondi et complet qui fait partie intégrante de l’accord d’association (titre IV : « Commerce et questions liées au commerce ») a été initiée en mars 2012 et finalisée le 22 juillet 2013. L’accord a été paraphé le 29 novembre 2013 à Vilnius, lors du troisième sommet du Partenariat oriental de l’Union européenne.

IV. - État des signatures et ratifications

L’accord a été signé le 27 juin 2014 à Bruxelles, en marge du Conseil européen, et publié au Journal Officiel de l’Union européenne le 30 août 2014. Certaines stipulations de l’accord sont appliquées à titre provisoire (cf. II supra) depuis le 1e septembre 2014. L’entrée en vigueur définitive de l’intégralité de l’accord interviendra à compter du premier jour du second mois suivant la date de ratification par le dernier État membre.

La ratification par le parlement géorgien est intervenue le 18 juillet et a été notifiée à l’Union européenne par la Géorgie le 25 juillet 2014. 

Côté européen, au 20 janvier 2015, la ratification a été notifiée par : la Roumanie (14 juillet), la Lituanie (29 juillet), Malte (29 août), la Bulgarie (9 septembre), la Lettonie (2 octobre), la Slovaquie (21 octobre), la Suède (9 janvier), l’Estonie (12 janvier). Le Parlement européen a approuvé la conclusion de l’accord d’association le 18 décembre.

V. - Déclarations ou réserves

Il n’est pas envisagé que la France fasse de déclaration ou de réserve.

1 http://legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000579416&fastPos=16&fastReqId=892971553&categorieLien=id&oldAction=rechTexte

2 http://whc.unesco.org/archive/convention-fr.pdf

http://portal.unesco.org/fr/ev.php-URL_ID=31038&URL_DO=DO_TOPIC&URL_SECTION=201.html

3 http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=OJ:L:2012:093:FULL&from=FR

4 http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:32014D0494&from=EN

5 Ainsi, l'annexe XIV-b dispose que « sont inclus les services de conseil juridique, de représentation juridique, d'arbitrage et de conciliation/médiation juridiques ainsi que de documentation et de certification juridiques. La fourniture de services juridiques n'est autorisée que si ces derniers portent sur le droit public international, le droit de l'UE et le droit de toute juridiction où le fournisseur de services ou son personnel sont habilités à exercer en tant que juristes et, à l'instar de la fourniture d'autres services, est assujettie aux prescriptions et procédures en matière de licences applicables dans les Etats membres. Pour les juristes fournissant des services juridiques relevant du droit international public et du droit étranger, ces prescriptions et procédures peuvent prendre diverses formes: respect des codes de déontologie locaux, utilisation du titre du pays d'origine (à moins que l'équivalence avec le titre du pays d'accueil n'ait été obtenue), prescriptions en matière d'assurance, simple inscription auprès du barreau du pays d'accueil ou admission simplifiée au barreau du pays d'accueil par le biais d'un test d'aptitude et domicile légal ou professionnel dans le pays d'accueil. Les services juridiques ayant trait au droit d'un Etat membre doivent en principe être fournis par un juriste pleinement qualifié admis au barreau d'un Etat membre agissant personnellement, ou par l'entremise d'un tel juriste, et les services juridiques relatifs au droit d'un Etat membre doivent en principe être fournis par un juriste pleinement qualifié admis au barreau de cet Etat membre agissant personnellement, ou par l'entremise d'un tel juriste. L'admission pleine et entière au barreau de l'Etat membre en question pourrait donc être nécessaire pour la représentation devant les tribunaux et autres autorités compétentes de l'UE puisque celle-ci implique la pratique du droit de l'UE et du droit procédural national. Cependant, dans certains Etats membres, les juristes étrangers qui ne sont pas pleinement admis au barreau peuvent être autorisés à représenter, dans une procédure civile, des parties ayant la nationalité ou appartenant à l'Etat dans lequel ces juristes sont habilités à exercer ».

6 http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=LEGITEXT000006068396

7 http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000886460

8 http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=CELEX:32000L0043:fr:HTML ;

http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=CELEX:32000L0078:fr:HTML ;

http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=OJ:L:2004:373:0037:0043:fr:PDF ;

http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/HTML/?uri=CELEX:31992L0085 ;

http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:31989L0391&from=FR ;

http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:31979L0007&from=FR ;

http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=OJ:L:2006:204:0023:0036:fr:PDF


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