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PROJET DE LOI

autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et

le Gouvernement du Royaume hachémite de Jordanie relatif au statut de leurs forces

NOR : MAEJ1614365L/Bleue-1

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ÉTUDE D’IMPACT

I. - Situation de référence et objectifs de l’accord

La coopération en matière de défense avec le Royaume hachémite de Jordanie a dans un premier temps été structurée par des accords signés dans les années 1990.

En décembre 2011, les autorités jordaniennes ont fait savoir qu’elles souhaitaient réviser le statut juridique des personnels militaires jordaniens en France et français en Jordanie.

L’objectif de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume hachémite de Jordanie relatif au statut de leurs forces, objet du présent projet de loi, est donc de déterminer sur une base réciproque le statut et les facilités accordées aux forces françaises sur le territoire jordanien et aux forces jordaniennes sur le territoire français.

Cet accord a été signé par le ministre de la défense au nom du Gouvernement français le 11 octobre 2015, à l’occasion d’un déplacement du Premier ministre en Jordanie au cours duquel il a souligné l'importance et la qualité de la coopération militaire entre les deux pays.

II. - Conséquences estimées de la mise en œuvre de l’accord

- Conséquences économiques

Le présent accord n’a pas de conséquence économique, il concerne la coopération bilatérale dans le domaine de la défense et de la sécurité.

- Conséquences financières

Le présent accord n’a pas de conséquence financière particulière. Les dépenses éventuelles, dont les modalités de règlement entre les parties sont prévues par l’article 14, s’inscrivent dans le cadre du fonctionnement courant des administrations concernées.

L’accord prévoit des exonérations de droits et taxes pour l’importation et la réexportation de matériels et autres marchandises destinés à l’usage exclusif des forces pouvant être présentes sur le territoire de l’autre partie. Ces dispositions sont classiques s’agissant de ce type d’accord.

- Conséquences juridiques

Le présent accord porte sur le statut des forces. Il définit le cadre juridique de la présence des membres du personnel relevant de la partie française ou de la partie jordanienne en séjour ou en transit respectivement sur le territoire de l’autre partie au titre de la coopération militaire et des relations bilatérales dans le domaine de la défense et de la sécurité développées entre les deux Etats.

L’article 11 prévoit les règles de partage de compétence juridictionnelle dans le cas où un des membres du personnel commettrait une infraction. Cet article confère aux personnels civils et militaires français engagés dans la coopération en matière de défense et aux personnes à leur charge les garanties essentielles de protection de leurs droits. Comme c’est le cas classiquement dans ce type d’accords, l’article 11.2 prévoit que les autorités compétentes de la partie d’envoi exercent par priorité leur droit de juridiction en cas d’infraction résultant de tout acte ou négligence d’un membre du personnel accompli dans l’exercice de ses fonctions officielles, ainsi que dans les cas où l’infraction porte uniquement atteinte à la sécurité ou aux biens de la partie d’envoi, ou lorsqu’elle porte uniquement atteinte à la personne ou aux biens d’un autre membre du personnel de la partie d’envoi. Conformément à l’article 11.1, dans tous les autres cas, la partie d’accueil exerce par priorité son droit de juridiction.

L’article 11.3 prévoit la possibilité pour l’Etat qui bénéficie de la priorité de juridiction de renoncer à ce droit, si l’autre Etat le demande et dans le cas où des considérations particulièrement importantes le justifient.

Le droit à un procès équitable, au sens de la convention européenne des droits de l’homme (CEDH) 1, et les garanties qui en découlent, sont consacrés par l’article 11.7 de l’accord. Ainsi, les membres du personnel de la partie d’envoi, ainsi que toute personne à charge, poursuivis devant les juridictions de la partie d’accueil, ont le droit d’être jugés dans un délai raisonnable, d’être représentés selon leur choix ou d’être assistés, de bénéficier d’un interprète gracieusement fourni par la partie d’accueil, de communiquer avec leur ambassade, d’être informés avant l’audience des accusations portées contre eux, d’être confrontés aux témoins, de ne pas être poursuivis pour un acte qui ne constituait pas une infraction au moment où il a été commis.

L’article 11.9 constitue une des stipulations angulaires de l’accord. En effet, cette clause protège les membres du personnel et les personnes à charge des deux Etats contre la peine capitale et les traitements inhumains ou dégradants au sens de l’article 3 de la CEDH2. Abolie en France, la peine de mort est prévue par la législation jordanienne et elle est encore appliquée dans cet Etat. Ainsi, la Jordanie s’est engagée à ce que cette peine ne soit ni requise, ni prononcée, ni exécutée à l’encontre des membres du personnel français et des personnes à leur charge.

Articulation du texte avec les accords ou conventions internationales existants

Les stipulations de l’accord sont pleinement compatibles avec, d’une part, les engagements de la France dans le cadre des Nations unies (articles 2 et 51 de la Charte des Nations unies)3 et, d’autre part, ses engagements dans le cadre de l’OTAN et de l’UE. Le traité de Washington du 4 avril 19494 n’exclut pas la possibilité pour un État partie à ce traité de conclure des accords avec des États tiers, pour autant qu’ils ne soient pas en contradiction avec ledit traité (article 8).

Dans l’attente de la conclusion et de l’entrée en vigueur de cet accord réciproque sur le statut des forces et afin de garantir le statut juridique des forces armées françaises déployées sur le territoire jordanien tout en maintenant le niveau de la coopération franco-jordanienne, un accord transitoire sous forme d’échange de lettres a été signé entre le Gouvernement français et le Gouvernement jordanien le 24 décembre 20145. Cet accord, non réciproque, octroie aux membres du personnel français un statut particulièrement protecteur et un certain nombre de facilités opérationnelles. Il prévoit explicitement (article 12, alinéa 4) qu’il cessera de s’appliquer quand un nouvel accord relatif au statut des forces entrera en vigueur.

L’accord franco-jordanien portant statut des forces signé le 11 octobre 2015 prévoit un statut des forces qui permet d’instaurer un régime réciproque et protecteur pour nos personnels civils et militaires respectifs. Il convient de relever qu’en cas d’arrestation ou de jugement par les autorités de l’État d’accueil, les membres du personnel ou des personnes à charge de l’une ou l’autre des parties bénéficient de toutes les garanties de procédures admises et prévues par le pacte relatif aux droits civils et politiques, signé à New York le 16 décembre 19666.

L’accord du 11 octobre 2015 emporte abrogation de l’accord transitoire par échange de lettres du 24 décembre 20147, comme le prévoient les dispositions de ce dernier.

Articulation du texte avec le droit de l’Union européenne

L’accord prévoit des exonérations de droits et de taxes pour l’importation de matériels et autres marchandises, sous certaines conditions (cf. article 15). Il est conforme au droit communautaire. L’article 131 a) du règlement n°1186/2009 du 16 novembre 20098 (codifiant le règlement n° 918/83) établissant un régime communautaire de franchises douanières prévoit que jusqu'à l'établissement de dispositions communautaires dans le domaine considéré, les Etats membres peuvent octroyer des franchises particulières aux forces armées stationnées sur leur territoire en application d'accords internationaux.

Articulation du texte avec le droit interne 

L’entrée en vigueur de l'accord ne nécessite aucune modification du droit interne.

III. - Historique des négociations

En décembre 2011, les autorités jordaniennes ont indiqué qu’elles souhaitaient réviser le statut juridique des personnels militaires jordaniens en France et français en Jordanie.

Prenant acte de cette position, un premier projet d’accord a été proposé dès 2012 aux autorités jordaniennes. Ce projet a fait l’objet de divers échanges entre les autorités françaises et jordaniennes entre 2012 et 2014.

La session de négociation qui s’est déroulée à Amman en mars 2014 et les échanges consécutifs ont permis d’aboutir à un texte validé par les deux parties en septembre 2015.

Cet accord a été signé à Amman le 11 octobre 2015 à l’occasion du déplacement du ministre de la défense en Jordanie.

IV. - État des signatures et ratifications

L’accord a été signé le 11 octobre 2015.

La Jordanie a indiqué, le 2 décembre 2015, avoir accompli les procédures constitutionnelles nécessaires à son entrée en vigueur.

V. - Déclarations ou réserves

Sans objet.

1 http://www.echr.coe.int/Documents/convention_FRA.pdf

2 Article 3 – Interdiction de la torture : Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants

3 http://ultraliberalisme.online.fr/Documents/ONU/1945_06_26.pdf

4 http://www.nato.int/cps/fr/natolive/official_texts_17120.htm

5 Texte joint en annexe.

6 http://www.assemblee-nationale.fr/histoire/peinedemort/pacte-international-droits-civils-et-politiques.asp

7 Texte joint en annexe

8 http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=OJ:L:2009:324:0023:0057:fr:PDF


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