N° 869
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
QUATORZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 28 mars 2013.
PROPOSITION DE LOI
tendant à interdire les licenciements boursiers
et les suppressions d’emplois abusives,
(Renvoyée à la commission des affaires sociales, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)
présentée par Mesdames et Messieurs
André CHASSAIGNE, François ASENSI, Alain BOCQUET, Marie-George BUFFET, Jean-Jacques CANDELIER, Patrice CARVALHO, Gaby CHARROUX, Marc DOLEZ, Jacqueline FRAYSSE et Nicolas SANSU,
député-e-s.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
L’avalanche de plans sociaux de ces derniers mois donne le vertige. Loin de refluer, la crise s’est intensifiée sous le double effet d’une course effrénée à la compétitivité des entreprises et des mesures d’austérité.
Si les licenciements et les suppressions d’emplois affectent l’ensemble des secteurs, ils touchent plus particulièrement le secteur industriel. L’année 2012 a vu le nombre de fermetures de sites (266 enregistrées) augmenter de 40 % par rapport à 2011, et depuis 2009, 1 087 fermetures ont été enregistrées pour seulement 703 ouvertures. La France compte donc 384 sites industriels de moins qu’il y a 4 ans.
Or depuis l’invention de la société unipersonnelle et la création de la société par action simplifiée, la composition des groupes s’est considérablement complexifiée, au point de perturber l’appréciation des causes économiques de licenciement. Les sociétés-mères et les principaux actionnaires ne laissent que très peu de marges de manœuvre à leurs filiales, alors même que ces dernières, sous-ensembles juridiquement autonomes, sont non seulement responsables pour elles-mêmes, mais endossent de fait la responsabilité civile, sociale et économique découlant des décisions prises par les groupes auxquels elles appartiennent. Or en matière de restructuration économique, le dogme de la sauvegarde ou du renforcement de la compétitivité, difficilement récusable, sert très souvent de cheval de Troie, faisant primer l’intérêt capitalistique sur la nécessaire protection des employés. Les dispositions du code du travail concernant le licenciement économique n’offrent en effet qu’une protection très limitée aux salariés concernés. Cette tendance a d’ailleurs gagné des structures de moindre taille, qui utilisent les dispositions législatives poussées par les grandes entreprises ou les grands groupes.
Depuis de nombreuses années, le monde du travail constate, impuissant, l’émergence d’un nouveau type de licenciement. Différent du licenciement pour motif personnel et pour motif économique – caractérisé par des difficultés économiques ou à des mutations technologiques – le licenciement « boursier » tend à se généraliser. Il présente la particularité de peser sur les salariés qui en sont victimes, alors que les entreprises qui les employaient jusqu’alors ne connaissent parfois aucune difficulté particulière, ni prévisible. En l’état actuel, notre droit permet aux entreprises de licencier en dépit de leur bonne santé économique.
C’est en 1999 que « l’affaire Michelin » a mis en évidence ces situations. Cette année-là, la direction annonçait simultanément des bénéfices semestriels en augmentation de 20 %, une augmentation des dividendes et la suppression de 7 500 emplois. Dès le lendemain, le cours de la bourse de l’entreprise bondissait de 12 %.
En 2009, l’entreprise Total annonçait un bénéfice annuel de 14 milliards d’euros. De l’aveu même de la direction, près de la moitié de ce gain était destiné à être versé sous forme de dividendes aux actionnaires. Une part insignifiante de ce résultat bénéficiera aux salariés et plusieurs centaines (555 exactement) seront immédiatement remerciés.
En 2010, alors que ses bénéfices s’élevaient à 1,22 milliard pour l’exercice 2009-2010 (en progression de 10 % par rapport à l’exercice précédent), l’entreprise Alstom annonçait une restructuration et la suppression de 4 000 postes.
Aujourd’hui, pas une semaine ne se passe sans l’annonce de réductions d’activité, de fermetures de sites, de licenciements massifs par des grands groupes industriels – Air France, Valéo, Pétroplus, Continental, Carrefour, Unilever, Arcelor, Eon France, PSA, Sanofi, 3 Suisses, Renault, Goodyear –, qui entrainent dans leur chute nombre de sous-traitants, en majeure partie des petites et moyennes entreprises.
En dépit des affirmations de leurs dirigeants, ces décisions violentes et indécentes ont rarement pour origine la crise financière qui sévit en Europe. Il s’agit souvent de conserver des marges de profit nécessaires au maintien ou à l’augmentation de la part revenant aux actionnaires, ou à la constitution de réserves en capital. C’est donc bien davantage la financiarisation de l’économie qui est en cause, favorisée par une succession de décisions politiques, de choix économiques et fiscaux d’inspiration ultra-libérale, couplée aux réformes structurelles du marché du travail tendant à rendre ce dernier toujours plus flexible. Les travailleurs, réduits à leur « coût », sont ainsi relégués au rang de variables d’ajustement d’une économie de casino aveuglée par la rentabilité maximale et l’accumulation des profits.
Alors que les bénéfices des entreprises du CAC 40 avaient baissé de 33 % en 2009, les dividendes versés en 2010 au titre de cet exercice ont dépassé les 35 Mds d’euros (contre 36,6 Mds d’euros l’année précédente), faisant ainsi grimper le taux de distribution (qui évalue les dividendes rapportés aux bénéfices) à 62 % ! En 2011, ce sont 45 Mds d’euros qui furent versés aux actionnaires au titre de l’exercice 2010, pour un taux de distribution frisant les 50 % ! Ces chiffres ne sont que la conséquence du comportement des actionnaires qui exigent des entreprises une valorisation à deux chiffres des actions qu’ils détiennent, mais sont injustifiables au regard du contexte économique et du taux de croissance de l’économie dans son ensemble.
Fort heureusement la justice n’est pas totalement impuissante face à ces pratiques abusives : en témoigne le jugement de la Cour d’appel de Paris du 2 décembre 2010 dans le dossier LU qui a pour la première fois estimé qu’un licenciement dont le seul but est d’accroître la rentabilité des actions ne pouvait pas être considéré comme économique, l’employeur n’invoquant pas, dans la lettre de licenciement, l’existence de difficultés économiques mais « la seule nécessité (...) de sauvegarder la compétitivité de l’entreprise ». Par ailleurs, la Cour a également souligné qu’au cours de l’exercice 2000, l’entreprise se trouvait « dans un cycle de croissance ininterrompue, en particulier, de ses bénéfices opérationnels », précisant que « le salarié fait valoir, avec pertinence, que le chiffre d’affaires du secteur d’activité considéré a connu une augmentation sensible de 1999 à 2000, à savoir de plus de 400 millions d’euros, passant de 2,8 milliards d’euros en 1999 à 3,25 milliards d’euros en 2000 ». Elle a enfin noté que « dans le rapport annuel du groupe Danone (page 43) sans que cela soit contredit, une nette progression des bénéfices du secteur d’activité “biscuits” dont la marge opérationnelle est passée de 7,9 % en 1999 à 8,7 en 2000 ; les biscuits représentant cette année-là 24 % des ventes et 19 % du résultat opérationnel du groupe; qu’il ressort de ce même rapport, que le pôle biscuits du groupe était numéro un des ventes en France, au Benelux, en Europe de l’Est, en Inde, en Chine, en Nouvelle Zélande et numéro deux en Italie, au Brésil, en Argentine ».
Elle en a donc légitimement conclu « que ces éléments traduisent une stabilité, voire une augmentation des résultats et démontrent que la compétitivité du secteur d’activité n’était soumise à aucune menace particulière ni à des difficultés économiques objectivement prévisibles, contredisant ainsi les affirmations de l’employeur selon lesquelles il y aurait un phénomène d’érosion généralisée de la présence de certains produits du groupe sur les marchés considérés, en particulier en Argentine et au Brésil ; qu’ainsi, ces éléments sont manifestement bien loin de témoigner de l’émergence de quelconques difficultés économiques prévisibles. »
En réalité, lors d’une rencontre avec les responsables politiques d’une ville voisine, le directeur général et le directeur de la branche « biscuits » du groupe Danone France ont avoué, comme le rappelle la Cour d’appel, que « la rentabilité actuelle des sites de production était bonne, notamment celle de l’usine LU de Ris-Orangis, mais que le groupe devait s’adapter à la concurrence internationale et aux risques d’OPA sur les actions du groupe. Il convenait donc d’agir pour augmenter la rentabilité nette du groupe à un taux qui devait atteindre 12 % (chiffre donné lors de l’entretien). Cette stratégie justifiant les mesures envisagées. »
C’est sur le fondement de ces observations que la Cour d’Appel a considéré que « s’il n’appartient pas au juge d’apprécier la pertinence des décisions prises par l’employeur, il lui revient néanmoins de contrôler la réalité du motif économique ; que la preuve de la réalité de difficultés économiques prévisibles de la SA LU France comme du groupe Danone dont elle fait partie intégrante, n’est en toute hypothèse pas rapportée par l’employeur. »
Ce jugement a constitué évidement une victoire importante face aux comportements scandaleux des dirigeants et des actionnaires. Cependant, de telles décisions n’interviennent dans bien des cas que plusieurs années après les faits.
Plus récemment le 3 mai 2012, à l’occasion de l’affaire Vivéo, la chambre sociale de la Cour de Cassation a annulé la procédure de consultation du comité d’entreprise saisi d’un projet de suppression d’emploi accompagné d’un plan de suppression d’emploi. Le contrôle du juge portait, à l’initiative et dans le cadre des prérogatives du comité d’entreprise, sur la validité du projet de suppression d’emploi accompagné d’un plan de sauvegarde de l’emploi, autrement dit sur la régularité d’un processus décisionnel et non pas sur le caractère réel et sérieux d’éventuels licenciements futurs.
Dans cette affaire la Cour, s’appuyant sur l’article L. 1233-31 du code du travail, a considéré que l’employeur qui consulte le comité d’entreprise dans le cadre d’un projet de licenciement collectif économique est tenu de justifier la ou les raisons économiques, financières ou techniques des mesures envisagées, faute de quoi les représentants du personnel ne sont pas en mesure de fournir un avis éclairé sur le projet. Par suite, évoquant l’article L. 1235-10 du code du travail qui permet au juge de suspendre ou d’annuler une procédure de licenciement en cas d’absence ou d’insuffisance du plan de sauvegarde de l’emploi, la Cour a estimé par parallélisme des formes qu’en l’absence de motif économique, le comité d’entreprise n’avait pas lieu d’être consulté sur le plan de reclassement.
En interdisant la poursuite d’une consultation à caractère déloyal le juge a ainsi suspendu la procédure de licenciement.
Ces deux jugements ont, comme tant d’autres, fait les gorges chaudes des milieux patronaux, qui se sont empressés de dénoncer une immixtion intolérable du juge dans les choix de gestion des employeurs et une atteinte à la liberté d’entreprendre.
Or les juges n’ont fait que pallier l’insuffisance des dispositions législatives en matière de licenciement économique. Ils ont jugé que la situation économique florissante d’une entreprise ou son intention d’augmenter sa rentabilité ou sa compétitivité ne saurait motiver des suppressions d’emplois, et ont mis en évidence le caractère artificiel de la distinction entre les règles procédurales et le droit applicables aux licenciements économiques.
Compte tenu de la situation économique que traverse la France, d’un taux de chômage préoccupant aggravé par les comportements d’un certain nombre d’employeurs qui exploitent sans vergogne la faiblesse des dispositions législatives, les auteurs de la présente proposition de loi estiment qu’il convient désormais de donner aux juges les moyens législatifs de juger au fond et non plus seulement la forme des licenciements. Nul ne peut, en effet, raisonnablement nier qu’il est préférable de prévenir que d’indemniser, ou interrompre une procédure nulle avant que de prononcer des licenciements, notamment en raison de l’insécurité juridique dans laquelle sont placés les salariés concernés et de la précarité qui découle inévitablement de la perte d’emploi.
Par ailleurs, à côté de ces procédures de licenciements collectifs, les employeurs disposent désormais d’autres outils pour réduire leurs effectifs et éviter les risques liés aux licenciements économiques. C’est le cas de la rupture conventionnelle, qui représente désormais près d’une rupture de contrat à durée indéterminée sur dix et compense depuis peu le recul des licenciements économiques. Il convient de mettre un terme à l’utilisation par les employeurs de ce mode de licenciement qui constitue un contournement de leurs obligations en matière de licenciement économique.
Si ces pratiques scandaleuses suscitent toujours les réactions indignées de l’exécutif, force est de constater qu’au fil des ans, les ministres concernés ont témoigné de davantage de résignation que de volontarisme.
Les auteurs du présent texte estiment, quant à eux, indispensable de remédier rapidement à certaines situations pénalisantes pour notre tissu économique (en particulier pour les employeurs respectant les règles afférentes aux licenciements économiques qui tentent de maintenir leur activité ou de la diversifier afin de maintenir dans l’emploi leurs salariés, et pour lesquels les licenciements abusifs constituent une forme de concurrence déloyale) ainsi que pour les travailleurs qui subissent de plein fouet des décisions fondées sur la seule préservation de la rentabilité des entreprises ou des groupes.
La présente proposition de loi n’a pas vocation à mettre à mal le nécessaire équilibre entre deux principes constitutionnellement garantis, le droit pour chacun d’obtenir un emploi (et par extension de le conserver) et la liberté d’entreprendre. Il s’agit, au contraire, de renforcer cet équilibre et la justice sociale indispensable à la survie de notre modèle social, ainsi que du modèle social européen, dont la fragile construction est historiquement liée à la Déclaration de Philadelphie de 1944 de l’Organisation Internationale du Travail.
L’article 1er propose en premier lieu de modifier la définition du licenciement économique. La rédaction actuellement en vigueur de l’article L. 1233-3 du code du travail permet aux employeurs de fonder les licenciements qu’ils envisagent sur le motif économique de la sauvegarde de la compétitivité (y compris par anticipation des évolutions hypothétiques du secteur), difficilement récusable. Ce prétexte sous-tend actuellement près de 80 % des licenciements pour motif économique, quand bien même l’entreprise ne rencontre aucune difficulté économique ou financière majeure. L’article 1er restreint à trois le nombre de cas dans lesquels un employeur peut légitimement envisager un licenciement pour motif économique : en cas de cessation d’activité, de difficultés économiques (dont l’employeur doit faire la preuve) ou de mutation technologiques. Parallèlement l’employeur devra justifier de manière précise les mesures qu’il aura prises pour limiter le nombre de suppressions d’emplois. On passe donc d’une situation de quasi impunité à une obligation de sincérité, de loyauté de la part de l’employeur sur la situation économique et financière de l’entreprise, tant de ses employés que de la justice si ces derniers viennent à contester la procédure de licenciement ou les plans de suppression d’emploi (quelle que soit la forme qu’ils prennent : départs volontaires, non-remplacement, etc.).
L’article 2 interdit les licenciements abusifs sans cause réelle et sérieuse. Il précise l’article L. 1233-2 du code du travail en indiquant que tout licenciement pour motif économique est dépourvu de cause réelle et sérieuse dès lors que l’entreprise a constitué des réserves ou réalisé un résultat net ou un résultat d’exploitation dont le solde a été positif au cours des 2 derniers exercices comptables, a distribué des dividendes, des stocks option ou des actions gratuites, ou procédé à une opération de rachat d’actions. Cet article est la reprise de l’article premier de la proposition de loi des sénateurs communistes, votée par l’ensemble de la gauche sénatoriale en février dernier.
L’article 3 prévoit le remboursement des aides publiques lorsque le licenciement pour motif économique aura été jugé sans cause réelle et sérieuse. L’entreprise se verra condamnée à rembourser le montant des exonérations de cotisations sociales dont elle a bénéficié au titre de l’ensemble des salariés initialement concernés par le licenciement ou la suppression d’emplois envisagée. Par ailleurs, l’entreprise perdra le cas échéant le bénéfice ou l’opportunité de bénéficier du Crédit Impôt Recherche (CIR) et du Crédit d’Impôt compétitivité Emploi (CICE) voté en décembre. Enfin le juge pourra ordonner le remboursement de tout ou partie du montant dont aura bénéficié l’entreprise au titre du CIR et du CICE. Cet article reprend l’esprit de l’article 2 de la proposition de loi précitée.
L’article 4 introduit la possibilité pour le juge d’apprécier au fond, et non plus seulement sur la forme, les licenciements économiques attaqués. Il pourra ainsi juger du caractère réel et sérieux, et donc de la loyauté, du licenciement. Cette appréciation se fera au niveau de l’entreprise, de l’unité économique et sociale, ou du groupe auquel appartient l’entreprise et devra, en outre, s’assurer que l’employeur a respecté ses obligations en matière de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, ainsi que de la sincérité et de la loyauté de l’information fournie aux représentants du personnel. Le non-respect de ces obligations ou l’insincérité de l’information pourront à eux seul justifier la nullité du licenciement.
L’article 5 vise à mettre fin au détournement du seuil de dix salariés lors des licenciements économiques déguisés.
L’article 6, en supprimant l’article L. 1222-8 du code du travail, rétablit la notion de licenciement économique en cas de refus par un ou plusieurs salariés d’une modification de leur contrat de travail en application d’un accord collectif d’entreprise de réduction du temps de travail. Ainsi ces licenciements ressortiront du régime des licenciements pour motif économique.
L’article 7 supprime les articles relatifs à la rupture conventionnelle qui sert, dans la plupart des cas, à licencier sans avoir à passer par une procédure de licenciement beaucoup plus contraignante pour l’employeur.
L’article 8 abroge l’article L. 2323-61 du code du travail qui permet dès lors qu’un accord collectif de branche, d’entreprise ou de groupe est conclu, dans les entreprises d’au moins 300 salariés, d’adapter les modalités d’information du comité d’entreprise. Il s’agit avec cet article de garantir la loyauté, la sincérité et l’exhaustivité des informations que l’employeur est tenu de transmettre aux CE et de porter à la connaissance des salariés dès lors qu’un PSE est envisagé.
Ce dispositif qui reprend l’esprit d’une proposition de loi déposée par les sénateurs du groupe communiste républicain citoyen repoussée le 16 février 2012 par une très courte majorité, est volontairement restreint. Il ne constitue qu’un premier pas dans la meilleure protection des salariés victimes des pratiques abusives de licenciement « boursier ». Il appelle un nécessaire renforcement des droits des salariés dans l’entreprise, du développement d’une véritable démocratie sociale qui fera de ces derniers de véritables acteurs du développement économique, et non plus des variables d’ajustement. Il devra donc être rapidement complété par la mise en place d’une véritable sécurité sociale professionnelle et de dispositions permettant la reprise des sites par les travailleurs porteurs de projets alternatifs économiquement viables.
L’ampleur de la crise, la violence des comportements des dirigeants d’entreprises à l’égard des travailleurs qui produisent les richesses, la précarité dans laquelle se trouvent plongés un nombre toujours plus grand de salariés du fait de de ces agissements, la destruction de l’emploi industriel (500 000 emplois détruits depuis 2008 !) impose une action rapide du législateur face à l’attentisme coupable des gouvernements successifs.
Les salariés et leurs familles ne peuvent se contenter de la commisération et de l’indignation gouvernementale. Ils veulent des actes.
C’est l’objet de cette proposition de loi.
PROPOSITION DE LOI
L’article L. 1233-3 du code du travail est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, le mot : « notamment » est remplacé par les mots : « à une cessation d’activité ou » ;
2° Après le premier alinéa, est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« L’employeur doit justifier de manière précise l’ensemble des mesures prises afin de limiter la suppression d’emplois. »
L’article L. 1233-2 du même code est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Est réputé dépourvu de cause réelle et sérieuse tout licenciement pour motif économique ou toute suppression d’emploi sous quelque forme que ce soit, décidé par un employeur dont l’entreprise a constitué des réserves ou réalisé un résultat net ou un résultat d’exploitation positifs au cours des deux derniers exercices comptables.
« Est également dépourvu de cause réelle et sérieuse tout licenciement pour motif économique ou toute suppression d’emploi sous quelque forme que ce soit, décidé par un employeur dont l’entreprise a, au cours des deux derniers exercices comptables, distribué des dividendes ou des stocks options ou des actions gratuites ou procédé à une opération de rachat d’actions. »
L’article L. 1235-14 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 1235-14. – Lorsque le juge constate que le licenciement pour motif économique ou les suppressions d’emploi sont dépourvus de cause réelle et sérieuse, il ordonne le remboursement du montant de la réduction de cotisations sociales patronales mentionnée à l’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale dont a bénéficié l’entreprise pour les salariés concernés par le licenciement ou la suppression d’emploi envisagés.
« Dès lors que le juge prononce la nullité du licenciement pour motif économique ou de la suppression d’emploi, l’employeur perd le bénéfice des dispositifs prévus aux articles 244 quater B et 244 quater C du code général des impôts si son entreprise en est déjà bénéficiaire, ou l’opportunité d’en bénéficier, pour une période ne pouvant excéder cinq ans. Le juge peut également condamner l’employeur à rembourser tout ou partie du montant dont son entreprise a bénéficié au titre de ces dispositifs. »
L’article L. 1235-10 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 1235-10. – Dans les entreprises d’au moins cinquante salariés, lorsque le projet de licenciements dont le motif doit être conforme aux dispositions de l’article L. 1233-3 concerne au moins dix salariés dans une même période de trente jours, la procédure de licenciement est nulle tant que le plan de reclassement des salariés prévu à l’article L. 1233-61 et s’intégrant au plan de sauvegarde de l’emploi n’est pas présenté par l’employeur aux représentants du personnel, qui doivent être réunis, informés et consultés.
« La réalité et le sérieux du motif économique sont appréciés au niveau de l’entreprise ou, de l’unité économique et sociale ou du groupe.
« La validité du plan de sauvegarde de l’emploi est appréciée au regard des moyens dont dispose l’entreprise ou l’unité économique et sociale ou le groupe.
« Le respect des obligations en matière de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences ainsi que la nécessité d’informer le plus en amont possible les représentants du personnel doivent être également pris en compte.
« La nullité du licenciement peut être prononcée par le juge dès lors que l’information et la consultation ne revêtent pas un caractère loyal et sincère ou lorsqu’elles ne comprennent pas un effet utile lié à la consultation.
« Le premier alinéa n’est pas applicable aux entreprises en redressement ou liquidation judiciaires. »
I. – Le début de l’article L. 1233-25 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L 1233-25. – Lorsque plusieurs salariés ont … (le reste sans changement). »
II. – Après le mot : « à », la fin de l’intitulé du paragraphe 2 de la sous-section 1 de la section 4 du chapitre III du titre III du livre II de la première partie du même code est ainsi rédigée : « plusieurs refus ».
L’article L. 1222-8 du même code est abrogé.
Le code du travail est ainsi modifié :
1° Les articles L. 1237-11 à L. 1237-16 sont abrogés ;
2° Au premier alinéa de l’article L. 1231-1, les mots : « , ou d’un commun accord, » sont supprimés ;
3° Au dernier alinéa de l’article L. 1233-3, les mots : « à l’exclusion de la rupture conventionnelle visée aux articles L. 1237-11 et suivants, » sont supprimés.
L’article L. 2323-61 du même code est abrogé.