N° 2430
_____
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
QUATORZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 9 décembre 2014.
relative au respect du principe de laïcité dans le cadre scolaire,
(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)
présentée par
M. Maurice LEROY,
député.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
La France est une République laïque au terme de l’article 2 de la Constitution. Elle l’est par tradition depuis la Révolution et par vocation dans la mesure où la laïcité est le corollaire naturel des principes de liberté et d’égalité qui fondent notre modèle républicain. L’article X de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen proclame que « nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas la loi ».
Le préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 affirme que « la loi garantit à la femme, dans tous les domaines, des droits égaux à ceux de l’homme ». La France est, en outre, signataire de la Convention internationale des droits de la femme qui dispose, en son article V, que les États signataires s’engagent à « modifier les schémas et modèles de comportements socioculturels de l’homme et de la femme en vue de parvenir à l’élimination des préjugés et des pratiques coutumières ou de tout autre type, qui sont fondés sur l’idée de l’infériorité ou la supériorité de l’un ou de l’autre sexe ou d’un rôle stéréotypé des hommes ou des femmes ».
La laïcité, appliquée à l’école, transcrit un idéal de liberté. Elle garantit la liberté de conscience en dehors des dogmes officiels et des religions. L’élève peut vivre, penser, juger et décider en écoutant sa propre conscience.
Face aux particularismes religieux qui entraîneraient l’absentéisme spécifique des élèves dont les croyances s’opposeraient aux contenus de certains cours ou au calendrier scolaire commun, la jurisprudence administrative confirme qu’aucune communauté religieuse ne peut se soustraire aux obligations scolaires essentielles.
Ce principe de laïcité est clairement menacé sous le coup de poussées communautaristes, d’intégrismes religieux et de l’émergence de phénomènes sectaires particulièrement sensibles au sein de l’école de la République.
Le développement, depuis une dizaine d’années, de ce qu’il est convenu d’appeler les affaires de voile islamique en est l’expression la plus symbolique, mais elle n’est pas la seule et l’on peut craindre une multiplication des coups portés à la neutralité de l’école si le principe de laïcité n’est pas réaffirmé et garanti.
Le foulard islamique demeure la marque intangible, non seulement d’une croyance religieuse qu’il n’est aucunement question de remettre en cause, ni même de juger, mais au-delà, il est un signe de discrimination sexuelle et un acte politique fort en complète contradiction avec notre tradition républicaine d’intégration. Il est un acte politique lorsqu’une jeune fille refuse d’ôter le voile en salle de classe, et lorsque ce refus s’accompagne d’un absentéisme accru, voire systématique, dans certains cours tels que les activités physiques et sportives, les sciences naturelles et la littérature française des lumières.
Qui ne voit qu’il constitue dès lors la contestation des valeurs et de la culture françaises, le symbole du refus, la plupart du temps imposé à ces jeunes filles, de l’intégration que permet l’école de la République ?
Les développements des affaires de voile islamique comme mais aussi, plus récemment, les conflits naissant du refus de participer à certains cours, d’éducation physique et sportive par exemple, la contestation du contenu de certains enseignements comme l’histoire, montrent que ces affaires procèdent de stratégies clairement élaborées et s’appuyant sur les faiblesses du dispositif juridique de nature à assurer le respect de la neutralité politique et religieuse de l’école.
Depuis l’avis du Conseil d’État du 27 novembre 1989 et les circulaires ministérielles des 12 décembre 1989 et 20 septembre 1994, le corps enseignant confronté à ces problèmes, les parents d’élèves, et tous ceux qui sont attachés aux valeurs républicaines ont le sentiment d’une véritable démission de l’État, d’un abandon voire d’une liquidation du principe de laïcité scolaire.
Le socle jurisprudentiel évolutif et contradictoire n’est pas le corpus juridique de nature à réaffirmer et garantir ce principe, pilier de notre modèle national.
Une loi de laïcité permettant le respect de la liberté de conscience des élèves et des professeurs et la garantie de la neutralité de l’école, est devenue une urgente nécessité.
Tel est bien l’objet de la présente proposition qui vise à interdire toute manifestation d’appartenance politique ou religieuse dans l’enceinte des établissements scolaires publics.
PROPOSITION DE LOI
L’article L. 111-1 du code de l’éducation est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« L’enseignement est dispensé dans les écoles, collèges et lycées dans le respect de la liberté de conscience des professeurs et des élèves.
« Le respect de la neutralité de l’école et de la laïcité de l’État interdit toute manifestation d’appartenance politique ou religieuse dans l’enceinte des établissements scolaires. »