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N° 336

_____________

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 30 octobre 2012

RAPPORT D’INFORMATION

FAIT

en application de l’article 29 du Règlement

au nom des délégués de l’Assemblée nationale à l’Assemblée

parlementaire du Conseil de l’Europe (1) sur l’activité de cette Assemblée

au cours de la quatrième partie de sa session ordinaire de 2012

par M. René ROUQUET

ET PRÉSENTÉ À LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

(1) La composition de cette délégation figure au verso de la présente page.

La Délégation de l’Assemblée nationale à l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe était composée, en octobre 2012, de : Mme Danielle Auroi, MM. Gérard Bapt, Jean Glavany, Mme Arlette Grosskost, M. Denis Jacquat, Mme Marietta Karamanli, MM. Jean-Yves Le Déaut, François Loncle, Thierry Mariani, Jean-Claude Mignon, François Rochebloine et René Rouquet en tant que membres titulaires, et Mme Brigitte Allain, MM. Christian Bataille, Philippe Bies, Mmes Estelle Grelier, Anne Grommerch, M. Christophe Léonard, Mme Christine Pires Beaune, MM. Frédéric Reiss, Rudy Salles, André Schneider, Gérard Terrier et Mme Marie-Jo Zimmermann, en tant que membres suppléants.

SOMMAIRE

Pages

INTRODUCTION 5

I. ACTUALITÉS DE LA DÉLÉGATION 7

A. LA DÉLÉGATION ET SON BUREAU 7

B. INITIATIVES DE SES MEMBRES ET NOMINATIONS 9

C. RENCONTRES DE LA DÉLÉGATION 9

II. INFORMATIONS GÉNÉRALES SUR LE DÉROULEMENT DE LA PARTIE DE SESSION 11

A. ORDRE DU JOUR 11

B. TEXTES ADOPTÉS 12

C. INTERVENTIONS DES PARLEMENTAIRES FRANÇAIS 14

III. LES DROITS DE L’HOMME EN EUROPE ET DANS LE MONDE 17

A. LE RESPECT DES OBLIGATIONS ET ENGAGEMENTS DE LA FÉDÉRATION DE RUSSIE 17

B. INTERVENTION DE M. NICOLAE TIMOFTI, PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE DE MOLDOVA 21

C. DÉBAT D’URGENCE : LA RÉPONSE EUROPÉENNE FACE À LA CRISE HUMANITAIRE EN SYRIE 23

D. DÉBAT D’ACTUALITÉ : L’AFFAIRE SAFAROV 26

E. DÉBAT LIBRE 29

IV. LES NOUVEAUX ENJEUX DE LA PROTECTION DES DROITS DE L’HOMME 33

A. LE RENFORCEMENT DES INSTITUTIONS DÉMOCRATIQUES 33

1. Pour des élections plus démocratiques 33

2. Partis politiques et représentation politique des femmes 37

B. LES ACTIVITÉS DE L’ORGANISATION DE COOPÉRATION ET DE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUES (OCDE) EN 2011-2012 39

C. LA DÉFINITION DE PRISONNIER POLITIQUE 46

D. LES DROITS DE L’HOMME ET LA POLITIQUE ÉTRANGÈRE 48

E. LE DROIT À LA LIBERTÉ DE CHOIX ÉDUCATIF EN EUROPE 52

F. UN RETOUR À LA JUSTICE SOCIALE GRÂCE À UNE TAXE SUR LES TRANSACTIONS FINANCIÈRES 53

G. L’ESPACE EUROPÉEN DE L’ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR, UN ATOUT POUR LE RENFORCEMENT DES DROITS DE L’HOMME 57

1. La consolidation et l’ouverture internationale de l’Espace européen de l’enseignement supérieur 58

2. La gouvernance des établissements d’enseignement supérieur dans l’Espace européen de l’enseignement supérieur 59

V. L’AVENIR DU CONSEIL DE L’EUROPE EN DÉBAT 61

A. DÉONTOLOGIE DES MEMBRES DE L’ASSEMBLÉE PARLEMENTAIRE : BONNE PRATIQUE OU DEVOIR ? 61

B. LA PRÉSIDENCE ALBANAISE DU CONSEIL DE L’EUROPE 62

1. Intervention de M. Bujar Nishani, président de l’Albanie 62

2. Communication du Comité des Ministres 64

ANNEXES 67

Annexe 1 Résolution 1900 (2012) – La définition de prisonnier politique  69

Annexe 2 Résolution 1899 (2012) – Les activités de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) en 2011-2012  71

Annexe 3 Résolution 1905 (2012) – Un retour à la justice sociale grâce à une taxe sur les transactions financières  77

Annexe 4 Résolution 1906 (2012) – La consolidation et l’ouverture internationale de l’Espace européen de l’enseignement supérieur  81

Annexe 4 bis Recommandation 2005 (2012) – La consolidation et l’ouverture internationale de l’Espace européen de l’enseignement supérieur  85

Annexe 5 Résolution 1907 (2012) – La gouvernance des établissements d’enseignement supérieur dans l’Espace européen de l’enseignement supérieur  87

Annexe 6 Résolution 1903 (2012) – Déontologie des membres de l’Assemblée parlementaire: bonne pratique ou devoir ?  91

INTRODUCTION

Les travaux de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE) au cours de la quatrième partie de la session 2012 ont été marqués par certains débats très vifs. Une journée entière a été consacrée à l’évaluation du respect, par la Fédération de Russie, des obligations et engagements qu’elle a souscrits lors de son adhésion au Conseil de l’Europe, journée à l’issue de laquelle l’Assemblée a finalement décidé de ne pas saisir le Comité des Ministres ; un débat d’actualité a été organisé sur « l’affaire Safarov », qui a confirmé combien sont vives les tensions qui persistent dans la région du Caucase entre deux États membres de l’Organisation ; enfin, l’Assemblée a défini le statut de prisonnier politique avec, en filigrane, la situation des droits de l’homme en Azerbaïdjan et le sort qui y est fait à de nombreux prisonniers politiques.

Les autres sujets débattus par l’Assemblée parlementaire ont confirmé son rôle central dans l’élaboration des réponses qu’il convient d’apporter aux défis auxquels l’Europe est confrontée. C’est ainsi que l’Assemblée a fait des propositions nombreuses visant à améliorer le caractère démocratique des élections, en favorisant la participation des citoyens, en garantissant la transparence des opérations électorales et en renforçant leur contrôle ; elle s’est également penchée sur la responsabilité éminente des partis politiques dans le nécessaire renforcement de la représentation politique des femmes. Elle a vu dans une taxe sur les transactions financières un moyen de ramener de la justice sociale au cœur d’une finance excessivement dérégulée et toujours aussi pétrie d’arrogance. Les sujets relatifs à l’éducation – le droit à la liberté de choix éducatif et le fonctionnement de l’Espace européen de l’enseignement supérieur – ont également donné lieu à des échanges approfondis entre les membres des délégations nationales.

L’Assemblée a enfin réaffirmé son engagement en faveur de l’intégrité, de la transparence et de l’exemplarité qui sont de plus en plus exigées des institutions politiques. Elle a, dans cette perspective, débattu de la déontologie de ses membres et a approuvé les termes d’un Code de conduite qui a vocation à être intégré prochainement dans le corpus des règles de l’APCE.

I. ACTUALITÉS DE LA DÉLÉGATION

A. LA DÉLÉGATION ET SON BUREAU

La délégation française à l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe comprend vingt-quatre députés (douze titulaires et douze suppléants) et douze sénateurs (six titulaires et six suppléants).

Composition de la délégation en octobre 2012

Membres titulaires

 

Chambre Parlement national

Groupe Parlement national

Groupe

Conseil de l’Europe

       

Mme Danielle AUROI

Députée

ECOLO

M. Gérard BAPT

Député

SRC

SOC

M. Jean-Marie BOCKEL

Sénateur

UCR

PPE/DC

M. Éric BOCQUET

Sénateur

CRC

GUE

Mme Josette DURRIEU

Sénatrice

SOC

SOC

M. Jean-Claude FRÉCON

Sénateur

SOC

SOC

M. Jean GLAVANY

Député

SRC

SOC

Mme Arlette GROSSKOST

Députée

UMP

PPE/DC

M. Denis JACQUAT

Député

UMP

PPE/DC

Mme Marietta KARAMANLI

Députée

SRC

SOC

M. Jean-Yves LE DÉAUT

Député

SRC

SOC

M. François LONCLE

Député

SRC

SOC

M. Jean-Louis LORRAIN

Sénateur

UMP

PPE/DC

M. Thierry MARIANI

Député

UMP

PPE/DC

M. Jean-Claude MIGNON

Député

UMP

PPE/DC

M. Philippe NACHBAR

Sénateur

UMP

PPE/DC

M. François ROCHEBLOINE

Député

UDI

PPE/DC

M. René ROUQUET

Député

SRC

SOC

Membres suppléants

 

Chambre Parlement national

Groupe Parlement national

Groupe

Conseil de l’Europe

       

Mme Brigitte ALLAIN

Députée

ECOLO

M. Christian BATAILLE

Député

SRC

SOC

M. Philippe BIES

Député

SRC

SOC

Mme Maryvonne BLONDIN

Sénatrice

SOC

SOC

Mme Bernadette BOURZAI

Sénatrice

SOC

SOC

M. Bernard FOURNIER

Sénateur

UMP

PPE/DC

Mme Estelle GRELIER

Députée

SRC

SOC

Mme Anne GROMMERCH

Députée

UMP

PPE/DC

M. Jacques LEGENDRE

Sénateur

UMP

PPE/DC

M. Christophe LÉONARD

Député

SRC

SOC

M. Jean-Pierre MICHEL

Sénateur

SOC

SOC

Mme Christine PIRES BEAUNE

Députée

SRC

SOC

M. Yves POZZO DI BORGO

Sénateur

UCR

PPE/DC

M. Frédéric REISS

Député

UMP

PPE/DC

M. Rudy SALLES

Député

UDI

PPE/DC

M. André SCHNEIDER

Député

UMP

PPE/DC

M. Gérard TERRIER

Député

SRC

SOC

Mme Marie-Jo ZIMMERMANN

Députée

UMP

PPE/DC

Le Bureau de la délégation est composé de la façon suivante :

Président

M. René ROUQUET

Député

SRC

Président délégué

M. Jean-Claude MIGNON

Député

UMP

Première vice-présidente

Mme Josette DURRIEU

Sénatrice

SOC

Vice-présidents

Mme Brigitte ALLAIN

Députée

ECOLO

 

M. Jean-Marie BOCKEL

Sénateur

UCR

 

M. Jean-Claude FRÉCON

Sénateur

SOC

 

Mme Arlette GROSSKOST

Députée

UMP

 

Mme Marietta KARAMANLI

Députée

SRC

 

M. Jacques LEGENDRE

Sénateur

UMP

 

M. François LONCLE

Député

SRC

 

M. François ROCHEBLOINE

Député

UDI

 

M. André SCHNEIDER

Député

UMP

B. INITIATIVES DE SES MEMBRES ET NOMINATIONS

M. René Rouquet (Val-de-Marne – SOC), président de la délégation, a été élu vice-président de l’Assemblée parlementaire, au titre de la France.

Mme Maryvonne Blondin (Finistère – SOC) a été nommée membre de la commission pour le respect des obligations et engagements des États membres du Conseil de l’Europe (Commission de suivi), sur proposition du groupe socialiste.

M. Jacques Legendre (Nord – UMP) a été nommé membre de la commission pour le respect des obligations et engagements des États membres du Conseil de l’Europe (Commission de suivi), sur proposition du groupe PPE.

Mme Maryvonne Blondin (Finistère – SOC) a été nommée représentante de la commission des questions sociales, de la santé et du développement durable à la conférence sur « Le renforcement de l’autonomie politique et socio-économique des femmes basé sur des histoires de femmes », co-organisée par le Centre Nord-Sud, l’Assemblée parlementaire et la Grande Assemblée Nationale de Turquie, (Istanbul, 4-6 novembre 2012).

En sa qualité de vice-président de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, M. René Rouquet, président de la délégation française, a présidé la séance publique du mercredi 3 octobre au matin et celle du jeudi 4 octobre après-midi.

C. RENCONTRES DE LA DÉLÉGATION

Le représentant permanent de la France auprès du Conseil de l’Europe, S.E. M. Laurent Dominati, a reçu la délégation française, le 30 septembre, pour un dîner de travail au cours duquel il a abordé les principaux points inscrits à l’ordre du jour.

Les membres de la délégation ont été reçus par la délégation allemande, lors d’un dîner de travail, le 2 octobre 2012.

II. INFORMATIONS GÉNÉRALES SUR LE DÉROULEMENT DE LA PARTIE DE SESSION

A. ORDRE DU JOUR

Lundi 1er octobre 2012

– Débat libre ;

Mardi 2 octobre 2012

– Le respect des obligations et engagements de la Fédération de Russie ;

– Communication du Comité des Ministres à l’Assemblée parlementaire, présentée par M. Edmond Panariti, ministre des affaires étrangères de l’Albanie, président du Comité des Ministre ;

– Débat joint sur le renforcement du caractère démocratique des élections et sur la représentation politique des femmes au sein des partis politiques ;

Mercredi 3 octobre 2012

– Les activités de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) en 2011-2012, précédé d’une intervention de M. Angel Gurría, Secrétaire général de l’OCDE ;

– Intervention de M. Nicolae Timofti, président de la République de Moldova ;

– La définition de prisonnier politique ;

– Les droits de l’homme et la politique étrangère ;

Jeudi 4 octobre 2012

– Débat d’urgence : La réponse européenne face à la crise humanitaire en Syrie ;

– Intervention de M. Bujar Nishani, président de l’Albanie ;

– Déontologie des membres de l’Assemblée parlementaire : bonne pratique ou devoir ?

– Le droit à la liberté de choix éducatif en Europe ;

– Débat d’actualité : l’affaire Safarov ;

Vendredi 5 octobre 2012

– Un retour à la justice sociale grâce à une taxe sur les transactions financières ;

– Débat joint sur la consolidation et l’ouverture internationale de l’Espace européen de l’enseignement supérieur et sur la gouvernance des établissements d’enseignement supérieur dans l’Espace européen de l’enseignement supérieur.

B. TEXTES ADOPTÉS

Le Règlement de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe distingue trois types de textes : les avis, les recommandations et les résolutions :

– aux termes de l’article 24.1.a, une recommandation consiste en une proposition de l’Assemblée adressée au Comité des Ministres, dont la mise en œuvre échappe à la compétence de l’Assemblée mais relève des gouvernements ;

– définie à l’article 24.1.b, une résolution exprime une décision de l’Assemblée sur une question de fond, dont la mise en œuvre relève de sa compétence, ou un point de vue qui n’engage que sa responsabilité ;

– les avis répondent aux demandes qui sont soumises à l’Assemblée par le Comité des Ministres concernant l’adhésion de nouveaux États membres au Conseil de l’Europe, mais aussi les projets de conventions, le budget ou la mise en œuvre de la Charte sociale.

Le texte intégral des rapports, avis, comptes rendus des débats de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, ainsi que les textes adoptés, sont consultables sur le site : http://assembly.coe.int.

Texte et rapporteur(e)

Document(s)

Commission des questions politiques et de la démocratie

Garantir des élections plus démocratiques

M. Jean-Charles GARDETTO (Monaco – PPE/DC)

• Résolution 1897

Les activités de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) en 2011-2012

M. Jean-Marie BOCKEL (France – PPE/DC)

• Résolution 1899

Les droits de l’homme et la politique étrangère

M. Pietro MARCENARO (Italie – SOC)

• Résolution 1901

• Recommandation 2004

Commission des questions juridiques et des droits de l’Homme

La définition de prisonnier politique

M. Christoph STRÄSSER (Allemagne – SOC)

• Résolution 1900

Commission des questions sociales, de la santé et de la famille

Un retour à la justice sociale grâce à une taxe sur les transactions financières

Mme Hermine NAGHDALYAN (Arménie – ADLE)

• Résolution 1905

Commission de la culture, de la science et de l’éducation et des médias

Le droit à la liberté de choix éducatif en Europe

Mme Carmen QUINTANILLA (Espagne – PPE)

• Résolution 1904

La consolidation et l’ouverture internationale de l’Espace européen de l’enseignement supérieur

M. Rafael HUSEYNOV (Azerbaïdjan – ADLE)

• Résolution 1906

• Recommandation 2005

La gouvernance des établissements d’enseignement supérieur dans l’Espace européen de l’enseignement supérieur

M. Gvozden Srećko FLEGO (Croatie – SOC)

• Résolution 1907

Commission des migrations, des réfugiés et des personnes déplacées

La réponse européenne face à la crise humanitaire en Syrie

M. Giacomo SANTINI (Italie – PPE)

• Résolution 1902

Commission sur l’égalité et la non-discrimination

Partis politiques et représentation politique des femmes

Mme Maria STAVROSITU (Roumanie – PPE/DC)

• Résolution 1898

Commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles

Déontologie des membres de l’Assemblée parlementaire : bonne pratique ou devoir ?

M. Oliver HEALD (Royaume-Uni – GDE)

• Résolution 1903

Commission pour le respect des obligations et engagements des États membres du Conseil de l’Europe (Commission de suivi)

Le respect des obligations et engagements de la Fédération de Russie

M. György FRUNDA (Roumanie – PPE/DC)
M. Andreas GROSS (Suisse – SOC)

• Résolution 1896

C. INTERVENTIONS DES PARLEMENTAIRES FRANÇAIS

Lundi 1er octobre 2012

– Débat libre : Mme Josette Durrieu et M. François Rochebloine ;

Mardi 2 octobre 2012

– Le respect des obligations et engagements de la Fédération de Russie : Mmes Maryvonne Blondin, Josette Durrieu et Marie-Jo Zimmermann ;

– Communication du Comité des Ministres à l’Assemblée parlementaire, présentée par M. Edmond Panariti, ministre des affaires étrangères de l’Albanie, président du Comité des Ministre : MM. Bernard Fournier et Jean-Pierre Michel ;

– Débat joint sur le renforcement du caractère démocratique des élections et sur la représentation politique des femmes au sein des partis politiques : Mmes Maryvonne Blondin, Josette Durrieu et Marie-Jo Zimmermann ; MM. Jean-Louis Lorrain et René Rouquet ;

Mercredi 3 octobre 2012

– Les activités de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) en 2011-2012, précédé d’une intervention de M. Angel Gurría, Secrétaire général de l’OCDE : MM. Jean-Marie Bockel, rapporteur, et André Schneider

– Intervention de M. Nicolae Timofti, président de la République de Moldova : Mme Josette Durrieu ;

– La définition de prisonnier politique : MM. Jean-Pierre Michel et François Rochebloine ;

– Les droits de l’homme et la politique étrangère : Mme Bernadette Bourzai et M. Bernard Fournier

Jeudi 4 octobre 2012

– Débat d’urgence : La réponse européenne face à la crise humanitaire en Syrie : MM. Jean-Pierre Michel et Rudy Salles

– Intervention de M. Bujar Nishani, président de l’Albanie : M. Bernard Fournier

– Le droit à la liberté de choix éducatif en Europe : M. Jean-Pierre Michel

– Débat d’actualité : l’affaire Safarov : MM. François Rochebloine, René Rouquet et Rudy Salles

Vendredi 5 octobre 2012

– Un retour à la justice sociale grâce à une taxe sur les transactions financières : Mme Danielle Auroi et MM. Frédéric Reiss et René Rouquet

– Débat joint sur la consolidation et l’ouverture internationale de l’Espace européen de l’enseignement supérieur et sur la gouvernance des établissements d’enseignement supérieur dans l’Espace européen de l’enseignement supérieur : M. Jean-Yves Le Déaut

III. LES DROITS DE L’HOMME EN EUROPE ET DANS LE MONDE

A. LE RESPECT DES OBLIGATIONS ET ENGAGEMENTS DE LA FÉDÉRATION DE RUSSIE

Depuis son adhésion au Conseil de l’Europe, en 1996, l’Assemblée a fait le point des progrès réalisés par la Fédération de Russie dans le respect de ses obligations et engagements en 2002 et 2005. Dans sa Résolution 1455 (2005), l’Assemblée avait reconnu sans réserve le droit des autorités russes à mener des réformes adaptées aux réalités économiques, politiques et administratives. Elle avait salué les progrès accomplis dans le respect de divers engagements, comme la ratification de la Charte sociale européenne, la mise en place d’un service public de médias, la réforme du mode d’élection des gouverneurs, etc.

Le rapport présenté par la commission pour le respect des obligations et engagements des États membres du Conseil de l’Europe (commission du suivi), qui couvre la période 2005-2012, salue certaines initiatives très positives, tels que les amendements à la loi sur les partis politiques, les changements apportés à la loi électorale et le rétablissement d’élections au suffrage direct pour les gouverneurs. Il note également avec satisfaction diverses réformes réalisées dans le domaine judiciaire, comme la mise en place du Comité d’investigation et sa séparation du Bureau du Procureur, l’adoption de la Loi d’indemnisation et la réforme du système pénitentiaire.

La commission juge, en revanche, que d’autres mesures sont « très préoccupantes », notamment les amendements à la loi sur la Cour constitutionnelle, les quatre textes que la Douma d’État a adoptés en juin et en juillet 2012 (pénalisation de la diffamation ; Internet ; amendements à la loi sur les rassemblements ; amendements à la loi sur les ONG), ainsi que les défauts et la mise en œuvre restrictive d’autres lois essentielles pour le fonctionnement des institutions démocratiques et pour l’environnement politique, qui à ses yeux empêchent un véritable pluralisme politique de prospérer.

La commission estime, en définitive, que « dans l'ensemble, l’état de la démocratie en Russie est préoccupant, tout comme la lenteur des progrès réalisés par le pays pour se conformer à ses obligations et à ses engagements ». Elle recommande donc à l’Assemblée de poursuivre le processus de suivi des obligations et engagements de la Fédération de Russie.

Lors de son intervention, M. Alexey Pushkov, président de la délégation russe, a dénoncé une attitude discriminatoire de l’APCE vis-à-vis de la Fédération de Russie. Mme Josette Durrieu (Hautes-Pyrénées – SOC) s’est inscrite en faux contre cette interprétation des travaux de l’Assemblée et de la commission de suivi :

« Je voudrais aussi remercier les rapporteurs, et m’adresser à M. Pushkov pour lui dire qu’il n’y a aucune discrimination contre la Russie : si vous deviez ramener ce message à Moscou, vous auriez tort. La Russie, ici, ne compte que des amis, mais excusez tout de même les parlementaires que nous sommes de vouloir avoir une vision objective de la situation. Je vous demande de croire que nous sommes nombreux à penser que nous attendons que votre grand pays, tant par sa taille que par tout ce qu’il représente dans l’Histoire, devienne un grand acteur ; il ne l’est pas encore. Nous souhaitons qu’il devienne un vrai partenaire ; il ne l’est pas encore, et c’est dommage. Nous souhaitons qu’il s’engage sur la voie de la démocratie puisque nous sommes ici pour le dire et accompagner les différents pays, quels qu’ils soient, même les plus anciens.

Incontestablement, aujourd’hui, certains éléments et une série de lois attentatoires aux libertés préoccupent le Secrétaire général, qui a exprimé son inquiétude. Je reviendrai rapidement sur ce qui est arrivé au député Gudkov. Ancien colonel du KGB, il a manifesté et a été privé de son mandat de député en juillet et destitué en août ! Dans un débat que nous aurons tout à l’heure, nous nous demanderons si, dans une démarche démocratique, cela est acceptable. La réponse est non. N’est-ce pas l’une des raisons de la non-venue du Président de la Douma, auquel nous n’aurions pas manqué de poser la question ?

Au plan international, face au problème de la Syrie et du Moyen-Orient, on note une grande prudence de la part de la Russie. Elle avait peut-être raison, probablement raison. Mais aujourd’hui, à l’instant, à la lueur de la situation et des massacres, la Syrie est votre alliée. Votre vision de la situation est froide, elle est analysée à l’aune des conséquences : on ne veut pas d’islamistes à Damas parce que l’on ne veut pas d’islamistes au Daghestan et en Tchétchénie. Vous avez le droit de le dire, mais curieusement, vous alimentez ce conflit : les armes sont russes et peut-être aussi les conseillers militaires. Étrangement, le conflit en Syrie ressemble à celui de la Tchétchénie.

On n’a jamais autant parlé ici des « conflits gelés ». On en parle, et tant mieux, car cela veut dire que le débat va finir par s’engager. Vous êtes acteurs dans la plupart de ces pays. Rien ne sera résolu sans votre volonté. Alors, quand vous parlez d’ingérence des puissances occidentales en Syrie, je me dis qu’effectivement, il y a une certaine ingérence de la Russie en Géorgie et en République de Moldova.

J’aurais pu parler de l’OMC. Vous y êtes entrés, après de longues négociations, mais cela implique des exigences : Gazprom ne peut pas exercer de monopole sur la distribution, le transport, l’alimentation et les prix. Le malaise est aujourd’hui profond, nous avons des doutes en ce moment. Nous souhaitons réellement – et c’est un message d’espoir et de confiance – que la Russie devienne ce grand partenaire dont l’Europe a besoin. »

Mme Maryvonne Blondin (Finistère – SOC) a, pour sa part, appelé le Conseil de l’Europe et l’Assemblée parlementaire à réagir aux dérives autoritaires du pouvoir russe, dont le sort fait aux Pussy Riot est une illustration éclairante :

« De l’infraction invoquée jusqu’au déroulement du procès, le jugement des Pussy Riot a renvoyé une image déplorable de la Russie et de ses dérives autoritaires. La peine infligée, disproportionnée, a été dénoncée dans de nombreux pays, y compris en Russie. Hier devait s’ouvrir le procès en appel ; il a été reporté au 10 octobre.

La salle n° 7 du tribunal de Khamovniki à Moscou, où ont été jugées les jeunes femmes, est en passe de devenir un symbole très négatif du régime actuel et de sa lecture pour le moins étriquée de la Convention européenne des droits de l’Homme. Cette salle a en effet été aménagée à la suite des observations formulées par la Cour européenne des droits de l’Homme au sujet de la cage à barreaux dans laquelle avait été parqué Mikhail Khodorkovski au début de son procès. Certes, une cage en verre a été installée à la place. Mais c’est dans cette sorte d’aquarium, où l’air climatisé ne pénètre pas, qu’ont évolué les accusées, obligées de se contorsionner pour parler à leurs avocats, puisque cette cage ne dispose que d’une petite ouverture, mal placée, pour pouvoir converser. Détail, direz-vous, mais ô combien significatif !

Les Pussy Riot ne sont pourtant que les dernières victimes connues de la conception particulière de la démocratie que développe M. Poutine depuis son arrivée au pouvoir. On remarquera d’ailleurs que son troisième mandat commence comme le deuxième, c’est-à-dire par un verdict spectaculaire, destiné à bien rappeler sur quelles bases doit évoluer la Russie. Entre-temps, deux assassinats non élucidés, ceux d’Anna Politokvskaïa et de Stanislas Markelov, sont venus rappeler la situation tragique dans laquelle se trouvent les défenseurs des droits de l’Homme dans ce pays. La contestation des élections de décembre 2011 a, de son côté, débouché sur une vague d’arrestations – et je ne fais là allusion qu’à Moscou. L’on pourrait ajouter à ces problèmes la limitation des droits des LGBT.

Face à ces dérives, reconnaissons, mes chers collègues, qu’il est urgent que le Conseil de l’Europe, en particulier notre Assemblée, réagisse. Alors que nous nous employons à transmettre et diffuser nos valeurs de démocratie, de droits de l’Homme et de l’État de droit, nous ne pouvons tolérer de tels comportements, peu en phase avec la Convention européenne des droits de l’Homme.

Avec le durcissement imposé par la nouvelle loi sur les médias en Russie et la fermeture de Radio Svoboda, cette radio appelée « liberté », ouverte en mars 1953 sous Staline, il était important qu’un tel débat puisse être organisé aujourd’hui ; il faut qu’il se traduise par de réelles avancées. Cela suppose de commencer par adopter les recommandations du rapport, ce que je vous engage à faire. »

Les interrogations de la commission de suivi relatives au respect du principe de séparation des pouvoirs et à l’influence extraordinaire de l’exécutif sur le fonctionnement des autres pôles institutionnels ont amené Mme Marie-Jo Zimmermann (Moselle – UMP) à évoquer une conception figée du pouvoir, en décalage avec les aspirations et les capacités d’un peuple qui s’est éveillé à la liberté :

« Messieurs les rapporteurs, comme vous, je pense que les relations entre la Russie et l’Union européenne ne sauraient se résumer à des accords économiques. La question des valeurs doit revenir au cœur du dialogue politique avec ce grand pays. N’oublions pas que si la Russie est représentée au sein de cette Assemblée, c’est parce qu’elle a choisi – librement choisi – d’adhérer aux valeurs du Conseil de l’Europe : la démocratie, l’État de droit et les droits de l’Homme.

Le partenariat « stratégique » russo-européen est une réalité, mais il n’a de sens qu’à condition de s’appuyer sur une volonté partagée de se parler franchement et ouvertement. Ainsi, à l’Assemblée nationale française, une grande commission interparlementaire France-Russie a été créée en 1995 à l’initiative du président Philippe Séguin. Elle a permis d’aborder des sujets difficiles, de discuter de nos points d’accord et de désaccord sur le fonctionnement de la démocratie. Entre deux partenaires, il ne peut y avoir de sujets tabous. C’est pourquoi, chers collègues russes, l’amitié ne doit pas nous empêcher de dénoncer, comme l’ont fait les rapporteurs, le décalage qui existe parfois entre les textes et la réalité russe.

Les nombreuses atteintes portées ces derniers mois au principe de la séparation des pouvoirs, pourtant affirmé dans la constitution de 1993, en est un des symboles. Le président Medvedev avait affirmé, en 2010 lors d’un forum international, que « beaucoup de choses dépendent du bon fonctionnement du pouvoir judiciaire national, dont la réputation du pays ». Il avait raison. Mais ce n’est pas simplement la réputation de votre pays qui est en jeu, c’est surtout la confiance que la société civile peut ou ne peut pas placer dans les institutions et la justice ! L’indépendance de la justice ne doit pas être un vain mot, sa garantie passe par un statut protecteur accordé aux juges.

La séparation des pouvoirs doit aussi s’appliquer aux relations entre le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif. Quelques signes positifs avaient été donnés : la décision du président Medvedev de revenir à une élection directe des gouverneurs ; la décision, prise au début de la législature, de donner des postes importants de la Douma à des députés de l’opposition présente au Parlement.

Mais le déroulement des dernières élections législatives, la nouvelle loi sur les partis ou la destitution d’un député de l’opposition posent question.

Chers collègues, 20 ans après la fin de la guerre froide, il me semble qu’un opposant ne doit plus être considéré comme un dissident, mais simplement comme un opposant libre de s’exprimer comme dans toutes les démocraties.

La Russie n’est pas là par le hasard de l’Histoire, mais parce que son peuple a choisi la liberté et aspire à une réelle démocratie. Les « marches des millions », le développement des blogs et des sites internet qui réclament le pluralisme démocratique sont un signe : la société civile russe a mûri et sa conscience politique s’est affermie. Les dirigeants doivent entendre son message. »

La résolution adoptée par l’Assemblée appelle les autorités russes à confirmer leur engagement en faveur des progrès démocratiques et précise les sujets qui sont d’une importance particulière au regard du processus de suivi des obligations et engagements. L’Assemblée a décidé de prolonger la procédure de suivi concernant la Fédération de Russie.

L’Assemblée a, par ailleurs, rejeté un projet de recommandation présenté par la commission du suivi. Celle-ci recommandait au Comité des Ministres « d’accorder toute l’attention qu’elles méritent aux questions et préoccupations abordées dans la résolution ».

B. INTERVENTION DE M. NICOLAE TIMOFTI, PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE DE MOLDOVA

L’Assemblée parlementaire a accueilli M. Nicolae Timofti, président de la République de Moldova. Celui-ci a été élu en mars 2012 par le Parlement moldave au terme d’une crise politique de près de trois ans, car la coalition gouvernementale ne disposait pas, à l’issue des élections législatives de juillet 2009 comme à celle des élections de novembre 2010, de la majorité des trois cinquièmes nécessaire à l’élection présidentielle. Trois députés de l’opposition s’étant finalement ralliés à la coalition, le blocage institutionnel a pu être surmonté.

Le président a tout d’abord relevé que, 17 ans après son adhésion au Conseil de l’Europe et près de 3 ans après les élections législatives de 2009 qui ont « mis à l’épreuve les capacités nationales et les aspirations européennes » des citoyens moldaves, la voie européenne choisie par le pays est désormais irréversible. La coalition gouvernementale, intitulée « Alliance pour l’intégration européenne », promeut des réformes visant à renforcer l’État de droit, dont témoigne notamment les actions engagées pour lutter contre la corruption et la stratégie de réforme du secteur de la justice adoptée pour la période 2011-2016.

Cet effort s’appuie sur la compétence et le soutien du Conseil de l’Europe et de ses différents mécanismes, normes et institutions. Sur la question des droits de l’Homme, le « dialogue structuré » lancé en 2010 entre la République de Moldova et l’Union européenne a bénéficié de l’implication du Conseil de l’Europe, le travail conjoint entre les deux organisations européennes ayant pour effet de renforcer les transformations démocratiques. C’est le cas, par exemple, de la situation de la presse, avec la mise en place d’un conseil de la presse, l’élaboration d’un code de déontologie pour les journalistes ou la dénationalisation des publications périodiques publiques.

Le président a dit sa conviction que la Cour européenne des droits de l’Homme est une institution fondamentale pour la défense de la justice et de l’équité. Les arrêts de la Cour, notamment ceux qui concernent directement la République de Moldova, ont amené les pouvoirs publics à prendre les mesures nécessaires pour garantir, dans sa juridiction, le respect des dispositions de la Convention européenne des droits de l’Homme. La réforme de la Cour doit donc être soutenue afin d’en maintenir l’efficacité.

Le conflit de Transnistrie devrait pouvoir trouver une solution dans un cadre national, par l’intermédiaire de la définition d’un statut spécial au sein de la République afin d’offrir à la région un degré adéquat d’autogestion. Le Conseil de l’Europe a un rôle important à jouer par le biais des mesures de confiance de part et d’autre de la rivière Nistru. Cela suppose aussi que soient retirées les troupes russes présentes sur le territoire national sans le consentement des autorités de la République de Moldova.

Celle-ci n’a pas ménagé ses efforts pour approfondir son ouverture internationale et européenne, comme le montrent la poursuite des négociations sur l’accord d’association et les progrès réalisés en matière de libéralisation de visas. Au delà, la République de Moldova réaffirme solennellement sa volonté de satisfaire aux obligations et engagements qu’elle a souscrits lors de son adhésion au Conseil de l’Europe. Le Parlement a d’ailleurs adopté, le 13 juillet 2012, un plan d’actions spécifique.

Le président a appelé l’Assemblée parlementaire à aider la République de Moldova à mener à bien ses réformes, dont l’objectif est de passer bientôt à l’étape du post-suivi.

Intervenant au nom du groupe socialiste, Mme Josette Durrieu (Hautes-Pyrénées – SOC) a interrogé M. Timofti sur les attentes et les espoirs qu’il nourrit vis-à-vis tant de la Russie que de l’Europe :

« Monsieur le Président, j’ai été moi aussi bien longtemps rapporteure pour la République de Moldova, petit pays courageux privé de la Transnistrie, totalement dépendant de la Russie pour les ressources énergétiques et pour tous les échanges, confronté depuis trois ans à un problème institutionnel qui aurait pu provoquer une crise profonde dont l’évitement montre combien vous avez assimilé la démarche démocratique : cela vous honore. Mon ancienneté dans cette Assemblée m’autorise à dire que vous êtes peut-être, en effet, à la porte du post-suivi. Vous mériteriez en tout cas que l’on reconnaisse ainsi ce que votre pays est devenu.

Deux questions seulement : qu’attendez-vous de la Russie ? Qu’espérez-vous de l’Europe ? »

Le président lui a fait part de sa volonté d’améliorer les relations de la République de Moldova avec la Russie, ce qui passe par la solution du conflit de Transnistrie, et d’aboutir à l’adhésion à l’Union européenne :

« Madame Durrieu, je n’ai pas oublié que nous avons travaillé ensemble dans les années 1990 sur les réformes en République de Moldova, en particulier celle du système judiciaire.

Qu’attendons-nous de la Fédération de Russie ? Les bonnes relations que nous entretenons actuellement avec elle pourraient être encore améliorées. Dès mon élection, j’ai organisé des réunions avec les dirigeants russes et j’ai toujours indiqué que nous étions ouverts à des pourparlers de paix et à des discussions bilatérales en vue de trouver une solution au litige en cours. La Fédération de Russie est pour nous un partenaire économique très important. En outre, de nombreux citoyens russes résident sur notre territoire. Nous en tenons compte. Mais nous n’avons de cesse de demander à la Fédération de Russie l’ouverture de pourparlers de paix afin de résoudre le problème de la Transnistrie. La Fédération de Russie a une influence prédominante et les forces militaires russes qui stationnent sur le territoire de la République de Moldova sans y être autorisées par un accord bilatéral devraient se retirer conformément aux normes et aux valeurs internationales. Nous espérons que cela nous apportera la paix.

Nous continuerons donc à entretenir et à développer de bonnes relations avec les pays de l’Union européenne comme avec la Fédération de Russie.

Quant à nos attentes pour l’Europe, nous comptons sur un soutien accru de celle-ci pour que les programmes en cours et les plans visant à notre intégration et notre adhésion à l’Union européenne puissent avancer. Nous déployons des efforts en ce sens et je suis fier de pouvoir dire que, ces derniers temps, nous avons réussi à instaurer une certaine stabilité malgré la crise prévalant en Europe. Nous avons réussi à surmonter ce moment difficile. Nous espérons vivement que nous continuerons à connaître des temps de paix et de prospérité et que grâce au soutien de l’Union européenne, il nous sera possible de promulguer des lois qui garantiront les droits de l’Homme et nous permettront de parachever les réformes à tous les niveaux. »

C. DÉBAT D’URGENCE : LA RÉPONSE EUROPÉENNE FACE À LA CRISE HUMANITAIRE EN SYRIE

Depuis le début du conflit en Syrie, plus de 2,5 millions de personnes se trouvent dans une situation précaire, souffrant du manque de nourriture, d’hygiène et de produits de première nécessité. Plus de 1,2 million de personnes ont été déplacées à l’intérieur du pays, tandis que près de 300 000 autres ont trouvé refuge dans les pays voisins ou dans certains États membres du Conseil de l’Europe (France, Allemagne, Suède, etc.). Parmi ces réfugiés se trouvent un grand nombre d’enfants non accompagnés.

Face à cette tragédie, l’Europe doit exercer sa responsabilité de protéger les populations et faire preuve de solidarité, en particulier avec les pays accueillant un grand nombre de demandeurs d’asile. La crise économique qui sévit en Europe ne doit pas servir de prétexte pour refuser d’accueillir des réfugiés. Cette conviction forme la trame du rapport présenté par la commission des migrations, des réfugiés et des personnes déplacées.

M. Rudy Salles (Alpes-Maritimes – UDI) a exhorté les pays européens à tout mettre en œuvre pour assurer la protection des populations et leur apporter l’assistance que leur désarroi nécessite :

« Monsieur le Président, mes chers collègues, la situation de la Syrie est une tragédie, une guerre civile qui a d’ores et déjà provoqué la mort de plus de 30 000 personnes, plongé plus de 2,5 millions de personnes dans la précarité, souffrant du manque de nourriture, d’hygiène et de produits de première nécessité et forcé au déplacement de plus de 1,2 million de Syriens à l’intérieur du pays tandis que près de 300 000 personnes ont choisi l’exil pour échapper à la violence.

Bien sûr, nous sommes ici pour dénoncer les responsabilités qui sont extrêmement nombreuses. L’Histoire les analysera. Chacun convient que le régime en place participe au massacre de son peuple sans rechercher de solution politique. Les exactions se trouvent à la fois parmi les tenants du pouvoir en place et parmi les insurgés. Néanmoins, ce qui nous intéresse au premier chef ici, et ce doit être notre priorité, est d’examiner la situation des Syriens qui sont pris dans ce piège, dans cet engrenage sans fin, et dont nous voulons que les institutions internationales assurent la protection.

Face à ce drame, face à cette tragédie, que peut faire l’Europe ? Quelle peut être notre contribution ? Nous devons tout mettre en œuvre pour assurer la protection des populations et développer notre solidarité. Il faut, par exemple, comme le préconise le rapport, mettre en place un mécanisme de protection temporaire et un plan d’action visant à accueillir ces populations en précarité, sur le modèle de ce qui avait été fait pour le Kosovo.

Par ailleurs, pour permettre aux pays d'accueil d’héberger des réfugiés, nous devons impérativement leur apporter l’assistance nécessaire. Je salue l’effort réalisé dans ce sens par la Commission européenne qui a débloqué 50 millions d’euros de crédits.

J’insiste beaucoup sur la nécessité pour l’Europe d’appuyer de toutes ses forces le médiateur, M. Lakhdar Brahimi, de façon à trouver une issue politique à ce conflit qui tôt ou tard, et je souhaite que ce soit le plus vite possible, trouvera son dénouement. Il sera alors temps de penser à la reconstruction de la Syrie, de son économie, de ses institutions. Et sur ces points l’Europe doit anticiper en s’y préparant très activement afin que ce pays situé au cœur d’un Proche-Orient meurtri, puisse rapidement assurer à son peuple des conditions de vie lui permettant d’espérer un avenir meilleur. »

M. Jean-Pierre Michel (Haute-Saône – SOC) a, pour sa part, insisté sur la nécessité de vérifier le bon emploi de l’aide humanitaire déployée en direction du peuple syrien, et a rappelé que la Russie détient en grande partie les clefs de la solution politique qui seule pourra mettre fin au martyre de ce peuple :

« Merci, Monsieur le Président d’avoir permis ce débat. Merci, plus largement, pour les initiatives politiques que vous prenez à la tête de cette Assemblée qui, ne l’oublions pas, est une assemblée politique et non une annexe de fonctionnaires ! Merci aussi à nos rapporteurs.

Nous avons entendu les dommages terribles dont souffre le peuple syrien, victime innocente de ce conflit, les dommages qu’ont subi les infrastructures ainsi que le patrimoine mondial de l’humanité en Syrie. Tous ceux qui connaissent Alep comprennent que la destruction des souks et d’une partie de la citadelle sont irrémédiables.

Je formulerai deux observations, en premier lieu sur la situation humanitaire. Certes, les États membres du Conseil de l’Europe et les pays de l’Union européenne doivent agir massivement, mais nous devons vérifier à qui parvient cette aide et qui la distribue sur le terrain, faute de quoi nos moyens pourront aller aux groupes islamistes extrémistes qui viennent de pays étrangers et qui bénéficient déjà de financements très importants. Il s’agit là d’une course contre la montre. Tous les démocrates syriens que j’ai rencontrés à Paris me l’ont confirmé, à moi et à d’autres élus.

En second lieu, l’aide humanitaire est immédiate, mais la solution doit être politique. Nous le savons, elle est possible. Les forces de transition existent, elles sont constituées et elles sont en mesure de former à Damas un gouvernement de transition à caractère démocratique et laïque dans un pays qui, comme l’a indiqué Mme El Ouafi, représentante du Maroc, a jusqu’à maintenant fait coexister toutes les religions à Damas.

Toutefois un obstacle majeur s’oppose à la solution politique, à savoir la position de la Fédération de Russie. J’adresse ici un appel à nos collègues russes, à quelque formation qu’ils appartiennent. Je me souviens qu’il y a dix ans, dans cette enceinte, le ministre des Affaires étrangères russe avait justifié la guerre en Tchétchénie en arguant que la Russie combattait l’islamisme radical qui était aux portes de l’Europe et qui menaçait son territoire. Eh bien, aujourd’hui, mes chers collègues russes, pourquoi soutenez-vous à tout prix le régime de Bachar Al-Assad ? Pourquoi permettez-vous que les forces islamistes intégristes soient aux portes de la Syrie, prêtes à prendre le pouvoir ? Plus nous tarderons à trouver une solution politique, plus la présence des forces sera forte au moment de la prise de pouvoir. Notre responsabilité est historique et la Fédération de Russie sera jugée à l’aune de sa position sur cette question. »

La résolution adoptée par l’Assemblée condamne fermement les actes de violence et les opérations militaires dont ont été victimes les populations civiles et qui ont fait plusieurs milliers de morts. Elle regrette que la Turquie, en dépit de l’accueil généreux qu’elle a fait aux réfugiés de Syrie, continue de maintenir la réserve géographique faite à la Convention des Nations Unies de 1951 relative au statut des réfugiés, qui restreint ses obligations aux seules personnes réfugiées du fait d’événements survenant en Europe. Elle demande également aux parties au conflit d’arriver le plus rapidement possible à un cessez-le-feu, préalable nécessaire à toute solution politique, de permettre aux organisations humanitaires et aux organisations non gouvernementales (ONG) d’aider les personnes déplacées en Syrie et de respecter en conséquence le droit humanitaire pour l’accès de tous les travailleurs humanitaires.

La résolution recommande par ailleurs aux États membres du Conseil de Sécurité des Nations Unies de prendre les mesures pour mettre en place une zone d’exclusion aérienne afin d’empêcher le bombardement de la population civile. Elle appelle enfin les États membres du Conseil de l’Europe et les pays limitrophes de la Syrie à offrir une protection juridique temporaire aux réfugiés, assortie d’un plan d’action pour leur accueil, ainsi qu’à organiser à une large échelle une assistance et un hébergement adaptés.

D. DÉBAT D’ACTUALITÉ : L’AFFAIRE SAFAROV

En février 2004, M. Rafil Safarov, officier azerbaïdjanais, participe à un stage organisé par l’OTAN à Budapest, en compagnie d’officiers venant d’autres États membres de cette organisation. Une nuit, il pénètre dans la chambre de M. Gourgen Margarian, officier arménien, et le tue de plusieurs coups de hache, le laissant presque décapité. Lors de son procès, en Hongrie, il justifie son geste par la volonté de venger son pays, dix ans après la fin des hostilités ouvertes entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan pour la souveraineté sur le Haut-Karabakh.

Condamné à la réclusion à perpétuité, M. Safarov purge sa peine en Hongrie. Le 31 août 2012, il est extradé vers l’Azerbaïdjan pour terminer sa peine dans son pays. Les deux diplomaties ont passé un accord pour que la durée minimale d’incarcération de 25 ans soit respectée. Cependant, dès son arrivée sur le sol national, M. Safarov est gracié, réintégré dans l’armée et promu au grade de commandant. Son pays lui verse huit ans de salaires, pour « compenser » ses huit ans de prison. M. Safarov apparaît à la télévision. Il devient un héros national.

Le traitement réservé à M. Safarov à la suite de son extradition a soulevé une vague d’indignation dans de nombreux pays. Il pourrait ranimer les tensions dans une région du Caucase meurtrie par des années de conflits.

Intervenant au nom du groupe PPE, M. François Rochebloine (Loire – UDI) a estimé que l’affaire Safarov était particulièrement inquiétante, pour le règlement futur du conflit du Haut-Karabakh, pour la sauvegarde des valeurs communes qui sont le fondement du Conseil de l’Europe et pour la cohésion de l’Europe politique :

« Les conditions scandaleuses dans lesquelles le criminel Ramil Safarov a été transféré aux autorités de son pays sont trop largement connues pour que je ne les rappelle pas ici longuement.

Mais tout de même, comment ne pas s’indigner lorsqu’un homme, condamné à la réclusion à perpétuité en 2006 pour un assassinat commis en 2004, se retrouve libre à peine six ans après sa condamnation et de plus promu commandant et même fêté en héros national en Azerbaïdjan !

Aussi voudrais-je exprimer ma profonde compassion à la famille de Gourguen Marguarian, à qui on vient d’infliger, huit ans après sa mort, une nouvelle et cruelle douleur. Je voudrais également m’associer à l’indignation légitime de la nation arménienne et aux nombreuses réactions internationales.

Mais au-delà de sentiments indispensables de solidarité, ce dramatique événement m’amène à exprimer de sérieuses inquiétudes.

D’abord, pour le processus de règlement du conflit dit du Haut-Karabakh. Souvent par le passé, les parlementaires français qui soutiennent la République d’Artsakh ont été accusés de méconnaître les dispositions pacifiques du président Aliev et de l’Azerbaïdjan. Mais enfin, quel crédit peut-on accorder à un homme qui fait d’un lâche et d’un assassin un héros national ? Comment négocier avec un pouvoir qui ne parle pas le langage des gens de bonne foi, qui tord le sens commun des mots au bénéfice de ses mauvaises causes ?

Ensuite, pour les valeurs qui nous sont communes. Le droit à un procès équitable est considéré par la Convention européenne des droits de l’Homme comme un droit fondamental de l’Homme. Il a pour contrepartie l’obligation de respect des décisions de justice conformes à ce droit. Nul n’a contesté que la condamnation de Ramil Safarov ait été prononcée dans le plus strict respect des principes fondamentaux des nations civilisées. Que le gouvernement hongrois la réduise à néant au mépris de sa propre justice est un échec pour la cause des droits de l’Homme, auquel notre Assemblée devrait être particulièrement sensible.

Enfin, pour la cohésion de l’Europe politique. Même si elle est de la responsabilité exclusive de M. Orban, la libération de Safarov crée un trouble qui porte préjudice à toute l’Union européenne. Un gouvernement qui est prêt à vendre la dignité d’une grande nation pour faire éponger ses dettes par un dictateur du pétrole, quelle honte pour son pays ! Quelle honte pour l’Europe !

Autant d’observations qui me paraissent justifier une enquête approfondie, au sein de notre Assemblée, sur les véritables causes et les conséquences probables de l’affaire Safarov. »

M. René Rouquet (Val-de-Marne – SOC) a lui aussi relevé que l’affaire Safarov touche à l’essence du Conseil de l’Europe et de ses valeurs et a appelé l’Assemblée parlementaire à prendre une initiative forte :

« Mes chers collègues, l’affaire Safarov touche aux valeurs qui sont au cœur de notre institution. Un homme a tué un autre homme, l’a massacré à coups de hache, pour satisfaire à une pulsion nationaliste d’un autre âge. La victime ne lui avait rien fait, M. Safarov ne la connaissait même pas. Mais M. Margarian avait le tort d’être arménien. M. Safarov, condamné en Hongrie à la prison à vie pour ce meurtre odieux a été libéré, extradé vers son pays par les autorités hongroises et promu par le président Aliev dès son retour.

Nous sommes particulièrement préoccupés de voir que le gouvernement hongrois, en extradant un assassin, a joué avec le feu dans un contexte géopolitique régional où les braises ne sont pas éteintes. Cet acte risque de compromettre la sécurité fragile du sud Caucase, mais aussi la sécurité des Arméniens dans le monde.

Mais ce qui s’est passé au retour de M. Safarov en Azerbaïdjan est encore plus grave. Accueillir M. Safarov en héros, le glorifier pour avoir massacré un Arménien, c’est faire l’apologie de l’intolérance et de la haine nationaliste. « Plus jamais ça ! », ces mots qui furent à l’origine de la création du Conseil, signifiaient : plus jamais de haine meurtrière en Europe.

Célébrer M. Safarov, sans égard pour la famille de M. Margarian, c’est porter atteinte au respect de la vie. Ce n’est pas digne d’un pays membre du Conseil de l’Europe.

Certains, en Azerbaïdjan, ont cherché à justifier ce geste comme une conséquence logique du conflit du Haut-Karabakh. Mais comme l’a affirmé avec raison le Parlement européen le 14 septembre dernier, la frustration dans l’absence de progrès dans le processus de paix sur le Haut-Karabakh ne saurait justifier des actes de vengeance.

Cet assassinat, et cela le rend d’autant plus odieux, a eu lieu lors d’une réunion dans le cadre du « partenariat pour la paix » – oui, pour la paix ! Aujourd’hui nous sommes inquiets des conséquences néfastes de cet acte sur le processus de Minsk, dont la France est un acteur important. L’affaire Safarov est un mauvais signe pour la paix et la stabilité dans la région du Caucase.

Monsieur le Président, vous avez fait de la résolution des conflits gelés une priorité de votre présidence, et nous nous en félicitons. L’Assemblée parlementaire ne saurait rester spectatrice face à cette affaire : comme dans l’affaire du bateau errant en Méditerranée, elle doit prendre une initiative forte et jouer son rôle de vigie des droits de l’Homme. Il en va de la défense de nos valeurs et du processus de paix dans le Caucase, il en va de l’honneur de notre institution. »

M. Rudy Salles (Alpes-Maritimes – UDI) a fait part de ses interrogations quant au respect, par les États parties prenantes à l’affaire, de l’esprit de la convention d’extradition adoptée sous l’égide du Conseil de l’Europe et a appelé l’Azerbaïdjan à prendre ses responsabilités :

« Chers collègues, la libération et la glorification de M. Ramil Safarov ont soulevé, à juste titre, de très vives protestations. Accueillir en héros un homme qui a commis un acte aussi odieux est indigne d’un pays membre du Conseil de l’Europe.

Je ne reviendrai pas sur les faits, mais la préméditation et la brutalité de ce crime sont des circonstances aggravantes. Sa motivation, la haine des Arméniens et l’absence totale de remords de M. Safarov aussi.

C’est pourquoi la grâce et la promotion accordées à M. Safarov par le Président de l’Azerbaïdjan suite à son extradition et à l’occasion de son retour dans son pays portent atteinte d’autant plus à nos valeurs, au respect élémentaire de la vie de l’autre, quel qu’il soit.

Un troisième pays membre de notre Assemblée est impliqué : celui où s’est produit ce massacre et qui a autorisé l’extradition vers l’Azerbaïdjan : la Hongrie. Car cette affaire pose aussi la question de l’application de la Convention européenne sur le transfèrement des personnes condamnées, une convention du Conseil de l’Europe.

Bien sûr, d’un point de vue purement technique, la convention a été suivie à la lettre. Bien sûr, son article 12 prévoit que les États peuvent user de leur droit de grâce. Mais la condamnation de Ramil Safarov prononcée par un juge hongrois avait fait l’unanimité contre elle en Azerbaïdjan ; l’Arménie avait demandé à la Hongrie de ne pas extrader ce meurtrier. Alors pourquoi cette décision a-t-elle été prise si rapidement, sans prévenir la partie arménienne ?

Au delà du texte et des procédures juridiques, il y a aussi l’esprit de la convention : elle a pour objet principal de favoriser la réinsertion sociale des personnes condamnées en permettant à un étranger privé de sa liberté à la suite d’une infraction pénale de purger sa peine dans son pays d’origine. Oui, purger sa peine !

La gravité de l'acte − rappelons que M. Margarian a été massacré de 16 coups de hache pendant son sommeil − la sévérité justifiée de la condamnation, la perpétuité, pour un homme reconnu responsable de ses actes par les experts, y compris azerbaïdjanais, la situation des relations entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, tous ces éléments auraient dû conduire la Hongrie à plus de prudence et de retenue dans l’application de la convention.

L’attitude de l’Azerbaïdjan est quant à elle intolérable et doit être condamnée. En libérant cet homme, ce pays a encore une fois éloigné toute perspective de règlement pacifique du conflit du Haut-Karabakh et remis en cause le processus de Minsk. En le transformant en héros national, ce pays, membre du Conseil de l’Europe, a fait honte à notre institution.

Il faut donc que l’Azerbaïdjan prenne ses responsabilités et respecte ses engagements : pour cela, Ramil Safarov doit retourner en prison et purger sa peine.

Je me tourne maintenant vers mes collègues azerbaïdjanais pour leur dire que ce ne sont pas des arguments que nous avons entendus cet après-midi, c’est de la propagande ! L’amalgame avec le Haut-Karabakh était totalement insupportable. Les déclarations des représentants de votre délégation cet après-midi la déshonorent dans cette enceinte, qui est le temple des droits de l’Homme en Europe. Si l’Azerbaïdjan persiste dans cette attitude, cette affaire restera comme une tache indélébile, que ce pays devra un jour ou l’autre effacer. Dans l’immédiat, je m’interroge sur la légitimité de l’Azerbaïdjan à siéger au sein du Conseil de l’Europe. »

E. DÉBAT LIBRE

La réforme du Règlement entrée en vigueur au début de la session 2012 prévoit l’organisation d’un débat libre. Les parlementaires disposent de trois minutes pour intervenir sur un sujet qui n’est pas inscrit à l’ordre du jour.

M. François Rochebloine (Loire – UDI), intervenant au nom du groupe PPE, a souhaité attirer l’attention de l’Assemblée sur le sort de Mme Ioulia Timochenko, dont la condamnation est devenue définitive après le rejet de son pourvoi en cassation :

« Monsieur le Président, mes chers collègues, le sort réservé par les actuelles autorités politiques de l’Ukraine à Mme Ioulia Timochenko a suscité une émotion unanime dans l’opinion internationale. Mon groupe partage cette émotion.

La condamnation de Mme Timochenko est devenue définitive après le rejet de son pourvoi en cassation. De l’avis de tous les observateurs, cette condamnation est intervenue au terme d’une procédure qui n’a respecté aucune des garanties élémentaires de la défense.

Madame Timochenko a porté l’affaire devant la Cour européenne des droits de l’Homme. Nous attendons avec intérêt la décision de la Cour et ses motivations, sachant par expérience que sa pratique exclut toute dissimulation ou toute complaisance. Si cette décision confirme les critiques exprimées antérieurement contre la procédure, nous espérons que les autorités ukrainiennes sauront se conformer à leurs engagements internationaux et mettre fin à des pratiques contraires aux droits élémentaires de l’Homme.

L’histoire de l’Europe depuis la Seconde Guerre mondiale nous offre malheureusement de trop nombreux exemples de situations où la volonté d’élimination d’un adversaire politique conduit à se satisfaire du recours à l’apparence du droit et au simulacre de la preuve. Nous espérions que de tels procédés appartenaient à un passé totalitaire, nous espérions que la chute du mur de la honte permettrait aux États et aux peuples de l’Est européen de se persuader que la démocratie et la liberté sont les meilleurs atouts pour la cohésion et la force d’une nation. La poursuite résolue de la coopération entre États dans cette perspective est l’une des plus puissantes raisons d’être du Conseil de l’Europe.

La situation faite, non seulement à Mme Timochenko, mais aussi à de nombreux autres opposants, traduit de ce point de vue une régression alarmante.

Par des procédés obliques, le gouvernement ukrainien a choisi d’écarter tous les dirigeants de l’opposition dont Mme Timochenko est le symbole. L’acharnement qu’il met à réaliser cette éviction ne plaide pas en sa faveur : en recourant à l’intimidation et à la persécution, il ne grandit pas sa cause.

Ces procédés n’ont pas fait taire la voix de l’opposition et Ioulia Timochenko, samedi, sur son lit d’hôpital, a lancé un appel aux citoyens ukrainiens pour les élections à venir. Ces élections seront un test pour l’Ukraine, celui de sa capacité à organiser, comme l’a promis son Président « des élections honnêtes ». Mais pour cela, il faut que les procès politiques camouflés cessent immédiatement !

Le groupe PPE appelle à la reprise d’un véritable dialogue démocratique en Ukraine. C’est l’intérêt de l’Ukraine. C’est l’intérêt de l’Europe. »

Pour sa part, Mme Josette Durrieu (Hautes-Pyrénées – SOC) a voulu dénoncer la remise en cause de l’avortement qui apparaît à travers le contenu d’une proposition de résolution déposée par certains membres de l’Assemblée parlementaire :

« J’ai entre les mains un document, qui n’est pour l’instant qu’une proposition de résolution intitulée « Combattre l’eugénisme et la discrimination à l’encontre des personnes handicapées ». Le titre, en soi, n’engage à rien de définitif et le débat pourrait être légitime. Mais le texte de cette proposition traite de tout autre chose. L’objectif est clair : dénoncer une fois de plus l’avortement.

Je n’ai pas pour habitude d’intervenir sur ce type de sujets, mais je le fais volontiers, et d’autres collègues le font brillamment et souvent. Je voudrais affirmer mon profond respect pour le droit à la vie. Je veux également me prononcer de la façon la plus catégorique contre l’eugénisme, cette idéologie qui prône la race pure et l’enfant parfait. Mais on ne peut qu’être surpris de lire d’entrée dans ce texte : « les dépistages prénataux sont des actes d’eugénisme. » Naturellement, nous en venons immédiatement au fœtus, et à l’éternel problème, par ailleurs légitime, de savoir s’il est vie humaine. Le débat n’est pas tranché, mais des réponses ont été apportées par le corps médical et par la loi. Le fœtus n’est pas viable, les fœtus ne sont pas vie avant un certain nombre de semaines, voire de mois. Veut-on remettre ici ce problème en question ?

Avec cet amalgame, on va même jusqu’à dénoncer l’avortement thérapeutique y compris dans les cas extrêmes de trisomie 21, une situation acceptée dans la plupart des pays d’Europe, à 90%, avec l’avortement thérapeutique. S’il est mis en cause dans ce texte, qu’en est-il alors de l’avortement tout court ? Il est bien évident qu’il est condamné aussi.

On veut abolir le droit à l’avortement. La démarche est constante dans tous les pays et peut-être accélérée actuellement. Elle est insidieuse ici, mais nous sommes vigilants. Le Bureau dans sa sagesse se souviendra que le Conseil de l’Europe s’est prononcé sur le principe, qu’il a affirmé sa position : respect des droits universels de l’Homme et des individus dans toutes leurs diversités philosophiques et religieuses. »

IV. LES NOUVEAUX ENJEUX DE LA PROTECTION DES DROITS DE L’HOMME

A. LE RENFORCEMENT DES INSTITUTIONS DÉMOCRATIQUES

L’Assemblée a organisé un débat joint sur deux rapports présentés, respectivement, par la commission des questions politiques et de la démocratie et consacré au renforcement du caractère démocratique des élections, et par la commission sur l’égalité et la non-discrimination et consacré à la représentation politique des femmes au sein des partis politiques.

1. Pour des élections plus démocratiques

La commission des questions politiques et de la démocratie a engagé sa réflexion à partir d’un constat simple : dans la plupart des États membres, la législation électorale nationale constitue généralement une bonne base pour la tenue d’élections « libres et équitables », qui sont au cœur du patrimoine politique des nations démocratiques. Pourtant, il subsiste cependant des violations récurrentes, qui traduisent l’incapacité – ou le manque de volonté – des forces politiques au pouvoir de faire appliquer pleinement la loi et de garantir l’égalité de traitement entre tous les candidats. Par ailleurs, désormais, les violations les plus graves se produisent le plus souvent pendant la période préélectorale et sont, de ce fait, plus difficiles à détecter.

Le rapport de la commission fait état des multiples façons de violer le principe d’élections libres et équitables : abus de ressources administratives ; opacité du financement des campagnes électorales et autres problèmes relatifs au financement des partis politiques ; inégalité d’accès aux médias et partialité des médias ; manque d’indépendance et de neutralité de l’administration électorale ; menaces, pressions, violences et intimidations à l’encontre de candidats ou d’électeurs ; inexactitudes dans les listes électorales susceptibles d’entraîner des fraudes ; restrictions indues du droit d’éligibilité ou obstacles à l’inscription des candidats et des partis politiques ; achat de voix, bourrage d’urnes, falsification des procès-verbaux de résultats et autres irrégularités pendant le dépouillement ; caractère inopérant des procédures de recours en matière électorale. Le rapport relève que, bien souvent, les instances du Conseil de l’Europe ont été amenées à se pencher sur ces pratiques et à formuler des recommandations, soit de portée générale, soit directement aux États membres concernés.

Dans son intervention, M. Jean-Louis Lorrain (Haut-Rhin – UMP) a rappelé qu’au-delà des « imperfections techniques » qui peuvent émailler les opérations électorales ou préélectorales, la dimension éthique de l’élection doit aussi être prise en considération :

« Monsieur le Président, mes chers collègues, permettez-moi au préalable de saluer l’excellent rapport de notre collègue Jean-Charles Gardetto qui vient, une nouvelle fois, souligner l’œuvre utile que poursuit notre Organisation au cours des missions d’observations électorales. Comme le souligne la commission des questions politiques et de la démocratie, on ne saurait résumer l’élection au seul jour du scrutin, et nous devons être extraordinairement vigilants au contexte qui l’entoure, tant celui-ci détermine le résultat et confère à la démocratie un caractère réellement représentatif.

Si ce rapport s’attache à relever les imperfections techniques du scrutin, notamment dans la phase préélectorale, j’ajouterai quelques observations de fond sur le décalage entre les aspirations des électeurs, leurs attentes à l’égard des candidats et la réalité du mandat. L’éthique du politique sur laquelle je travaille à côté de mon mandat a guidé ma réflexion.

Là où l’électeur entend que le législateur mette en œuvre l’intérêt général, celui-ci se borne à mettre en œuvre une pensée politique individualiste et utilitariste. Sa perception de l’intérêt général est celle de l’addition des intérêts individuels.

Carol Gilligan a introduit un concept philosophique, sociologique et politique : le « care ». L’intérêt de son travail consiste à mettre en évidence de nouvelles vulnérabilités, sociales ou environnementales. Son ambition fondamentale est de mettre en place une démocratie sensible. Nous ne sommes pas très loin des préoccupations du rapport présenté aujourd’hui : adapter le scrutin aux nouveaux enjeux sociétaux et aux nouveaux publics.

Il convient d’appuyer une telle démarche, tant sur la forme que sur le fond. Elle seule permettra de réhabiliter le concept de bien commun inhérent à la démocratie et dévoyé aujourd’hui, quel que soit le degré de modernité du code électoral. N’en doutons pas, le souci de la vie bonne, du vivre ensemble et du bien commun ne sont pas suffisamment perçus par la représentation issue de la démocratie. Pire, le législateur se limite, dans de nombreux cas, à n’exercer qu’un rôle mesuré, celui d’adaptateur des changements sociétaux. Il a beaucoup de mal à se détacher d’un discours émotionnel, voire religieux pour certains d’entre eux. Les débats sur la bioéthique en attestent dans la plupart de nos pays.

Tout débat sur le vivant déclenche en effet passions, émotions et pressions multiples. Des réformes pourtant essentielles sont souvent combattues au nom de convictions purement personnelles ou d’une conscience morale mal identifiée.

Le bien commun peut être défini comme l’ensemble de ce qui soutient la coexistence. Vouloir réformer la démocratie, c’est, à mon sens, redécouvrir la coexistence : chacun doit trouver sa place, jouir d’un bien-être relationnel et être relié aux autres. C’est à cette tâche essentielle que doit s’astreindre le représentant du peuple. Faute de cela, le mandat politique perd tout son sens. »

Mme Josette Durrieu (Hautes-Pyrénées – SOC) a souligné la parenté entre les préoccupations du rapporteur et celles de la commission européenne pour la démocratie par le droit, dite Commission de Venise :

« Monsieur le Président, à mon tour, je félicite et remercie les rapporteurs.

Je voudrais m’exprimer au titre de membre de la commission européenne de la démocratie par le droit qui, siégeant à Venise, est connue sous l’appellation de Commission de Venise. Nous avons beaucoup réfléchi à ces sujets et, d’ailleurs, notre ami Gardetto a travaillé étroitement avec nous et s’est probablement inspiré de certains de ces travaux.

Il faut toujours rappeler le principe essentiel qui fonde le patrimoine électoral européen, à savoir que le suffrage universel doit être égal, libre, secret et direct. Nous avons posé à une époque la question du double vote qui permet à un même citoyen de voter deux fois – notamment dans des pays ayant des problèmes de représentation de leurs minorités –, mais il faut trouver d’autres réponses parce que cette solution ne répond justement pas à ce principe fondamental du vote égal : une personne, une voix.

Si nous sommes d’accord pour dire que l’on peut faire varier les niveaux de représentation dans les différents systèmes, modifier le nombre de sièges, avoir des sièges réservés, poser des seuils, il ne faut pas toucher à ce principe du vote égal – une personne, une voix !

Alors, en ce qui concerne les minorités, nous sommes allés plus loin, faisant preuve d’un peu d’audace. On sait à quel point le sujet est sensible et l’on a fini par admettre qu’en cas de nécessité, des mesures spécifiques de transition pouvaient assurer une représentation appropriée pour le moment, mais nous avons aussi dit avec insistance que l’intérêt à long terme des minorités, et plus généralement des sociétés était, en principe, mieux servi par une représentation dans le cadre général du système électoral ordinaire qui doit garantir, et garantit, des droits égaux aux citoyens, quelle que soit leur appartenance initiale à un groupe. Nous avons insisté sur le fait qu’une participation effective des minorités au processus électoral commun pouvait être un facteur propre à garantir la paix et la stabilité interethnique.

Nous nous sommes aussi interrogés sur le vote des citoyens expatriés, établis à l’étranger. Car ils ont le droit de voter : c’est la Résolution 1459 de 2005. Ce n’est pourtant pas le cas partout. Les ressortissants ne peuvent pas tous voter. Les modalités sont variables : des bureaux de vote dans les consulats et les ambassades, le vote par correspondance, le vote par procuration, le vote électronique. Il faut impérativement améliorer cette situation, mais je ne veux pas citer les pays dans lesquels il faut l’améliorer.

Sur le problème des femmes, vous avez les uns et les autres dit, et bien dit, les choses. La France est peut-être – je dis « peut-être », car le projet est en préparation – en train d’inventer un système nouveau : le binôme. Sur une circonscription, un couple, un homme et une femme. Pour le moment, ce n’est qu’une intention. Nous verrons si cela passe dans un projet de loi, mais les fondements de la démocratie se construisent par un acte conscient et volontaire, bâti sur des principes de justice, d’égalité et, tout simplement, de respect de l’individu. »

M. René Rouquet (Val-de-Marne – SOC), président de la délégation, a, pour sa part, souligné combien la démocratie trouve à s’approfondir lorsqu’elle s’appuie sur des mesures aussi généreuses que celle qui consiste à accorder le droit de vote aux migrants pour les élections locales :

« Monsieur le Président, mes chers collègues, je voudrais féliciter moi aussi tous les rapporteurs pour leur travail sur des sujets qui sont au cœur des valeurs de notre institution : l’État de droit, la démocratie et les droits de l’Homme.

Le rapport sur les élections démocratiques rappelle le travail accompli par notre Assemblée, mais aussi les lacunes – et le vide, parfois – qui portent atteinte à la légitimité démocratique de nos élections.

La question de la participation des migrants dans nos démocraties est essentielle. Elle a été au centre de nos débats au sein de la commission des migrations. L’Union européenne a montré la voie en favorisant l’octroi aux résidents communautaires du droit de vote et d’éligibilité aux élections locales. Cette citoyenneté de résidence permet aux étrangers qui vivent depuis longtemps sur nos territoires de jouer un rôle dans la vie de la cité. Cette nouvelle forme de citoyenneté n’est d’ailleurs que la suite logique des conseils consultatifs locaux de résidents, qui existent depuis de nombreuses années dans plusieurs pays.

Accorder aux migrants le droit de participer aux élections locales est un signe de reconnaissance et de confiance. C’est reconnaître qu’il existe une communauté d’intérêts entre les habitants d’une même ville. C’est reconnaître la voix de tous dans la cité, sans discrimination. Certains pays européens ont franchi le pas, sans que leur caractère démocratique ne soit atteint, bien au contraire. Leur exemple et leur expérience devraient nourrir notre réflexion sur la démocratie représentative.

En excluant une partie importante de nos populations, nous prenons le risque d’un déficit démocratique, car ces migrants, qui participent à la vie de la Nation par leur travail, leurs impôts, leur rôle associatif, ne comprennent pas toujours qu’ils ne puissent être acteurs dans la cité.

La démocratie de proximité, le souhait de rapprocher la décision politique du citoyen n’ont pas de sens si la citoyenneté locale est réservée à certaines catégories d’habitants et interdite à d’autres. C’est pour ces raisons que je soutiens l’amendement de notre collègue M. Santini, qui vise à faire participer les migrants à la vie démocratique et tend à recommander aux États de permettre à leurs résidents étrangers de participer au processus électoral, soit par la naturalisation, soit par la constitution d’organismes consultatifs, afin de résorber ce déficit démocratique.

La résolution adoptée par l’Assemblée invite les États membres du Conseil de l’Europe à prendre les mesures visant à encourager la participation des citoyens au processus électoral, à garantir la transparence du processus électoral et à renforcer le contrôle dont bénéficient les opérations électorales en veillant à mettre en place un mécanisme efficace de recours en vue de mettre fin à la « culture de l’impunité » pour les infractions commises dans ce domaine. »

2. Partis politiques et représentation politique des femmes

Le fait qu’une insuffisante proportion de femmes au sein des institutions politiques nuise à la représentativité démocratique de celles-ci est largement reconnu. Pourtant, les parlements des États membres du Conseil de l’Europe ne comptent, en moyenne, que 23,4 % de femmes. Peut-être parce que, jusqu’ici, le débat sur les moyens d’accroître la représentation des femmes au parlement s’est essentiellement concentré sur l’opportunité d’établir des garanties en matière de droit électoral, notamment à travers l’instauration de quotas de femmes sur les listes électorales.

La commission sur l’égalité et la non-discrimination a considéré que les partis politiques ont un rôle éminent dans l’amélioration de la représentation politique des femmes ; son rapport s’est particulièrement intéressé au large éventail des mesures qu’ils peuvent prendre de leur propre initiative, soit dans le cadre de leur fonctionnement général, soit dans le cadre de la préparation aux élections législatives : dispositions statutaires visant l’égalité entre les femmes et les hommes au sein des structures et organes de décision du parti, établissement de structures exclusivement féminines, quotas volontaires au sein des organes exécutifs ou dans les listes électorales, etc.

Le rapport montre combien la qualité de la représentation des femmes dépend de la culture politique de chaque pays, les pays nordiques ayant, en cela, ouvert la voie depuis de nombreuses décennies. Il ne méconnaît pas l’utilité des politiques de quotas mais considère qu’ils ne sont « ni indispensables, ni suffisants ».

Pour Mme Maryvonne Blondin (Finistère – SOC), l’évolution récente constatée en France confirme à la fois le bien-fondé des mesures contraignantes ou incitatives et leurs limites :

« Monsieur le Président, mes chers collègues, la place des femmes en politique et l’amélioration de leur représentation ne sont pas des sujets nouveaux, dans notre Assemblée ni dans d’autres d’ailleurs. Leur caractère récurrent tient précisément à la lenteur des progrès observés en la matière. C’est pourquoi je partage pleinement le volontarisme du rapport de Mme Stavrositu.

En France, le débat sur le bien-fondé de mesures contraignantes visant à aboutir à la parité a eu lieu à l’occasion de la révision de la Constitution de juillet 1999. Elle a débloqué une situation qui faisait de la politique un quasi-monopole des hommes et qui, s’il avait fallu s’en remettre à l’évolution spontanée, n’était pas près de changer, contrairement à une affirmation entendue tout à l’heure.

En effet, la loi du 6 juin 2000 favorisant un égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives s’est traduite par une indéniable amélioration de la représentation des femmes au sein des assemblées élues sur liste à la représentation proportionnelle, dite « fermeture éclair » par notre rapporteur et que je préfère qualifier de « chabada ».

A contrario, les progrès enregistrés aux élections au scrutin uninominal, non concernées par la législation sur la parité, ont été quasiment nuls.

Cependant, cette législation n’a pas connu le prolongement qui aurait dû être le sien au niveau des formations politiques, l’exercice des responsabilités demeurant concentré généralement entre les mains des hommes.

Il convient aussi de lutter contre la prégnance des stéréotypes sexués. Associer les femmes aux affaires sociales ou scolaires et les hommes à l’urbanisme ou aux finances est encore trop fréquent !

L’amélioration de la place des femmes en politique est également liée à la question du statut de l’élu. L’instauration d’un tel statut permettrait aux femmes de mieux concilier l’exercice d’un mandat avec leur vie professionnelle et familiale, donc de mieux s’engager au sein des formations politiques. Certes, sans oublier, Messieurs, le nécessaire partage des tâches ménagères et la garde des enfants. Malheureusement les amendes imposées aux partis politiques ne présentant pas suffisamment de femmes n’ont pas produit les effets escomptés. Il faudrait les augmenter.

C’est un sujet dont notre Assemblée pourrait légitimement se saisir prochainement. »

Rendre les sanctions financières plus contraignantes permettrait également, aux yeux de Mme Marie-Jo Zimmermann (Moselle – UMP) d’amener les partis politiques à accélérer leur mue vers la parité :

« Je remercie tous les rapporteurs pour leur excellent travail. Je me concentrerai pour ma part sur le rapport portant sur les partis politiques et la représentation politique des femmes.

Madame la rapporteure, en matière de parité, on constate malheureusement trop souvent un décalage entre l’arsenal législatif, souvent vertueux, et son application, souvent limitée. En France, plusieurs lois ont été adoptées afin de favoriser la parité politique, notamment en instaurant une alternance stricte des femmes et des hommes dans les élections à scrutin de liste et, dans les scrutins majoritaires, un système de pénalités financières encourues par les partis politiques qui ne respectent pas les règles. Lors des élections à scrutin de liste, l’alternance stricte permet d’aboutir à une quasi-parité ; ainsi, les conseils régionaux comptent plus de 48% de femmes. Mais pour les élections à scrutin majoritaire, l’observatoire français de la parité souligne que « les stratégies électorales, discriminantes, continuent à primer sur l’enjeu démocratique qu’est l’égalité entre les femmes et les hommes ». Malgré de réels progrès, nous n’avons ainsi que 27% de femmes députées.

Les partis politiques jouent un rôle essentiel dans ce domaine lorsqu’ils ne présentent des femmes que comme suppléantes ou dans des circonscriptions difficiles, voire ingagnables, et lorsqu’ils préfèrent payer les pénalités financières plutôt que respecter la règle – ce que certains d’entre eux font encore aujourd’hui en France. Rendre les sanctions financières plus contraignantes, voire supprimer toute aide publique aux partis politiques ne respectant pas la parité, comme l’a proposé la ministre chargée des droits des femmes en juin dernier, sera sans doute la seule manière d’obliger les partis à investir des femmes. J’approuve cette décision.

Car il faut une véritable volonté politique pour faire entrer les femmes dans les sphères du pouvoir. La parité est d’abord un acte de courage politique. Elle ne sera pas réalisée tant que les femmes seront considérées dans les partis politiques, quels qu’ils soient, comme des variables d’ajustement ou de simples faire-valoir. Les partis portent une lourde responsabilité car c’est au sein même de leurs instances que le combat commence. Comme l’a souligné le rapport, il faut ainsi plus de femmes dans les instances décisionnelles des partis, mais surtout dans les commissions qui investissent les candidats.

Dans les pays où la parité politique est une réalité, c’est la place de la femme dans la société toute entière qui, bien souvent, est différente. Depuis longtemps, dans les pays de l’Europe du Nord, les femmes sont considérées et respectées dès l’enfance, dans la famille ou au travail. L’élection d’une femme députée ou présidente de la République y est dépourvue d’enjeu politique. En revanche, dans les pays où les femmes ne jouent pas un rôle reconnu en politique, cela reflète leur statut dans la société, dans la famille et au travail.

Les femmes sont compétentes ; elles sont engagées ; elles ont des convictions. Elles doivent, pour cogérer leur pays, être à égalité avec les hommes dans les lieux de pouvoir. »

La résolution adoptée par l’Assemblée s’adresse tout d’abord aux partis politiques, auxquels elle recommande de mettre en œuvre les bonnes pratiques identifiées dans le rapport de la commission sur l’égalité et la non-discrimination. Elle invite ensuite les États membres à mettre en œuvre des politiques plus dynamiques, en adoptant des lois qui, d’une part, incitent à des actions positives et, d’autre part, sanctionnent fermement les partis qui ne s’acquittent pas de leurs obligations légales en termes de parité. Elle appelle enfin les groupes politiques de l’APCE à prendre à leur compte une démarche plus volontariste sur la question de la parité dans leur participation au fonctionnement de l’Assemblée parlementaire.

B. LES ACTIVITÉS DE L’ORGANISATION DE COOPÉRATION ET DE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUES (OCDE) EN 2011-2012

Les activités de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) sont traditionnellement présentées devant l’Assemblée parlementaire à l’occasion de la quatrième partie de session. L’Assemblée s’élargit, à cette occasion, aux délégations des parlements nationaux des États membres de l’OCDE non membres du Conseil de l’Europe (à savoir les délégations australienne, canadienne, chilienne, israélienne, japonaise, mexicaine et coréenne). À la suite de la réforme du Règlement entrée en vigueur en janvier 2012, le rapport correspondant est désormais présenté par la commission des questions politiques et de la démocratie.

Celle-ci a porté son regard sur les analyses développées par l’OCDE quant aux perspectives économiques à moyen terme et aux réponses de politique économique qui leurs sont apportées. Son rapport souligne l’importance des travaux consacrés par l’Organisation à la montée des inégalités et aux moyens d’y faire face, de même qu’aux stratégies d’assainissement budgétaire et à leur interaction avec le dynamisme de la croissance. Le rapport met également en évidence la forte implication de l’OCDE dans l’évaluation des problèmes de compétitivité qui pèsent sur de nombreux pays de l’Organisation et dans la construction de politiques structurelles efficaces, qui doivent actionner de nombreux leviers comme la fiscalité ou la politique du marché du travail tout en veillant à maîtriser, voire compenser, leur incidence négative sur le plan de l’équité.

Le rapport consacre enfin des développements spécifiques sur la réponse apportée à la crise des dettes souveraines en Europe et aux développements de la coopération entre l’OCDE et les pays du Proche et du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord.

M. Jean-Marie Bockel (Haut-Rhin – UCR), rapporteur du texte, a centré l’essentiel de son intervention sur les conséquences en Europe de la crise actuelle et l’impact de l’action de l’OCDE dans le bassin méditerranéen :

« Monsieur le Président, mes chers collègues, la réforme de structure de notre Assemblée a permis le transfert à la commission des questions politiques et de la démocratie du rapport de suivi des activités de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). La gestion de la crise actuelle, le soutien apporté aux nouvelles démocraties arabes dans le contexte de révolution que l’on connaît, justifient cette appréciation plus politique de l’action de l’OCDE, l’angle économique ou financier, important certes, ne pouvant plus être le seul retenu.

Le rapport que je vous soumets aujourd’hui au nom de la commission évoque un certain nombre de thématiques, qu’il s’agisse de la crise des dettes souveraines en Europe, du rôle des agences de notation dans celle-ci, de la taxe sur les transactions financières, de la coopération de l’OCDE avec les pays arabes ou des perspectives économiques à court et moyen terme. Je vais axer mon intervention sur deux points : les conséquences en Europe de la crise actuelle et l’impact de l’action de l’OCDE dans le bassin méditerranéen.

En ce qui concerne le premier point, dépassons le seul cadre de la zone euro qui retient depuis des mois toute l’attention. L’analyse de la crise des dettes souveraines ne saurait être limitée à l’Union économique et monétaire. Elle frappe en effet, à peu près, l’ensemble du continent.

L’encouragement à des politiques vertueuses, qui passe notamment par l’intégration dans nos lois fondamentales de la fameuse règle d’or, est louable et doit être encouragé sur l’ensemble du continent. Il convient néanmoins d’être attentif à ne pas céder à la tentation d’un intégrisme budgétaire, où le dogme de l’excédent budgétaire conduirait à limiter les dépenses d’avenir, à savoir nos investissements en matière d’éducation, de recherche ou d’infrastructures. La rigueur ne peut se faire au détriment de l’Europe de la connaissance que notre Organisation porte depuis des années et qui devrait lui permettre aussi de renouer durablement avec la croissance et l’emploi. Je suis heureux, monsieur le Secrétaire général, que l’OCDE milite également pour des mesures ciblées d’investissement dans ce secteur. J’ai écouté votre discours lors des journées de l’OCDE à Paris il y a quelques mois.

L’austérité, pour partie mal nécessaire, ne peut plus être uniforme et frapper l’ensemble d’une population sans distinction. L’OCDE insiste sur la question des personnes les plus vulnérables. Elle est effectivement essentielle. Quand bien même il est en difficulté, l’État doit rester le garant de l’intérêt général et donc de la justice sociale. Nous ne pouvons ajouter de la rigueur à la précarité dans laquelle se trouvent bon nombre de nos concitoyens. La flexibilité nécessaire dans nos modèles sociaux en vue d’accroître la compétitivité de nos économies ne peut se traduire, par ailleurs, par une généralisation de l’insécurité sociale.

Dans un contexte d’accroissement des inégalités au sein de nos sociétés, l’effort demandé aux populations doit être judicieusement réparti si l’on souhaite qu’il soit compris par elles.

Je ne veux pas céder à la tentation de l’urgence sans laisser le temps aux gouvernements des pays en difficulté d’expliquer, de mettre en œuvre.

J’insiste sur deux points : le soutien aux personnes en situation de précarité comme le financement des dépenses d’avenir qui ne peuvent être des variables d’ajustement budgétaire. Des dépenses doivent être sanctuarisées pour préserver l’unité de nos corps sociaux. Faute de quoi, nos États malades seraient condamnés à mourir guéris.

Venons-en maintenant au deuxième point, le soutien de l’OCDE aux pays d’Afrique du Nord, du Proche et du Moyen-Orient. Notre Assemblée milite depuis près de trois ans pour un rapprochement avec les pays du bassin méditerranéen. Les événements de l’an dernier − je pense notamment au statut de partenaire pour la démocratie − ont validé cette stratégie en mettant en avant l’extraordinaire soif de démocratie des populations de cette région.

Une fois l’euphorie de la révolte passée, il est indispensable de permettre à ces jeunes démocraties de se consolider. Elles sont, en effet, confrontées à des défis de taille : montée de l’intégrisme religieux et résistance des tenants des anciens régimes. La réaction s’est toujours appuyée, au cours des siècles, sur les difficultés économiques que pouvait traverser un pays. La question économique, même si elle n’est pas unique, ne saurait, de fait, rester trop longtemps dans l’ombre du politique.

Or de nombreuses interrogations subsistent dans ces pays en matière économique, qu’il s’agisse du sous-emploi massif ou de la vulnérabilité de larges parties de la population.

Les défis sont multiples. Il faut libéraliser les économies, tout en tenant compte des équilibres internes mais aussi externes. Il convient désormais de combiner les libertés politiques et le mieux-vivre. Il est également à craindre que la montée de l’intégrisme observable dans chacun de ces pays, avec certaines ambiguïtés, ralentisse considérablement la révolution économique indispensable à l’avenir de ces pays dans la démocratie.

Par-delà notre soutien politique, il convient donc de mettre en place un soutien efficace à l’économie de ces États. L’OCDE a apprécié avec justesse l’ampleur des chantiers et multiplié les instruments de coopération avec les pays concernés, sans que sa démarche puisse être jugée ultralibérale, à l’image des programmes du Fonds monétaire international durant les années 1990. Actuellement, nous sommes dans une démarche équilibrée.

L’action de l’OCDE, comme celle de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement, d’ailleurs, me semble plus cohérente et guidée par l’objectif de renforcer la démocratie comme l’économie de marché. Une telle approche rejoint celle de notre Assemblée. Le programme d’action de l’OCDE est concentré sur la réforme des administrations locales sans laquelle on ne peut rien faire, et la lutte contre la corruption, la promotion du développement régional et la gouvernance d’entreprise, les questions d’égal accès des hommes et des femmes à l’emploi.

La BERD, que nous avons rencontrée avec la sous-commission ad hoc il y a quelques semaines, s’est, dotée en mai d'un fonds spécial d’un milliard d’euros pour étendre ses opérations à quatre démocraties arabes émergentes : l’Égypte, la Tunisie, le Maroc et la Jordanie. Il y aura un rapport sur la BERD devant notre Assemblée.

La réussite de l’action combinée de la BERD et de l’OCDE est, à n’en pas douter, la clé du succès des révolutions démocratiques dans les pays arabes. Il convient donc d’encourager leurs programmes par l’intermédiaire de nos États membres et de veiller à ce que là encore, ils ne soient pas tributaires, à un moment ou à un autre, des restrictions budgétaires affectant les contributeurs.

C’est dans cette optique que je vous invite à adopter le projet de résolution mais aussi les amendements judicieux de la commission des questions sociales.

Je vous rappelle, par ailleurs, que ce texte permet également une modification du Règlement relatif aux débats de notre Assemblée sur l’activité de l’OCDE afin de prendre en compte la réforme des méthodes de travail dont je vous parlais dans mon propos liminaire. »

Intervenant à la suite du rapporteur, M. Angel Gurría, Secrétaire général de l’OCDE, a rappelé que les pays de l’OCDE touchés par la crise sont loin d’en avoir terminé avec elle : 48 millions de personnes sont au chômage dans la zone OCDE et il faudrait créer 14 millions d’emplois pour revenir au niveau d’avant la crise. Des mesures importantes ont été prises pour gérer la crise des dettes souveraines et la crise bancaire, mais l’Europe reste confrontée à des défis majeurs et l’inaction est très coûteuse en termes de crédibilité et de croissance.

La « feuille de route » de l’OCDE en matière de réformes structurelles est parfois critiquée, mais tous les pays ont beaucoup à gagner de réformes visant à améliorer l’éducation, à encourager la performance, l’entreprenariat et l’innovation, à renforcer la concurrence sur les marchés de produits et de services et à mieux adapter les marchés du travail. D’ailleurs, contrairement à une opinion largement répandue, les bénéfices de telles politiques peuvent se faire sentir à court terme.

Pour autant, le court terme c’est aussi le traitement en urgence de la crise sociale : avec la montée des inégalités, la cohésion sociale est menacée partout dans la zone de l’OCDE. Les inégalités de revenus y sont aujourd’hui plus marquées qu’il y a une cinquantaine d’années, et elles continuent de se creuser. Ce n’est pas la voie de la croissance.

Mais la crise économique ne pourra être surmontée que si la crise de confiance est elle-même surmontée. Lorsque les citoyens n’ont plus confiance en leurs institutions et leurs gouvernements, lorsque la corruption et l’évasion fiscale s’insinuent dans les fissures ouvertes par la crise, les meilleures politiques restent impuissantes. Sur toutes ces questions, les pays de l’OCDE ont beaucoup à partager avec les partenaires clés que sont le Brésil, la Chine, l’Indonésie ou encore la Russie, avec laquelle des négociations d’adhésion ont été ouvertes.

M. André Schneider (Bas-Rhin – UMP), intervenant au nom du groupe PPE, a souligné l’importance de l’action conduite par l’OCDE en faveur d’une « croissance verte » :

« Je voudrais tout d’abord remercier notre collègue Jean-Marie Bockel pour la qualité de son rapport, et revenir sur un point du projet de résolution qui me semble essentiel et que Monsieur le Secrétaire général vient d’évoquer de façon très succincte : la notion de « penser vert » ou de croissance verte.

L’adoption par l’OCDE en 2011 d’une Stratégie pour la croissance verte est une initiative importante. La transition vers des sociétés limitant leur empreinte énergétique dans l’activité économique est nécessaire.

Intégrer la défense de l’environnement dans les politiques publiques peut être un moyen, non seulement de renouer avec la croissance, mais aussi de répondre aux objectifs fixés lors de la Conférence de Rio. Souvenons-nous, mes chers collègues, que l’on ne commande la nature qu’en lui obéissant.

Penser vert, c’est prendre en compte la valeur du capital naturel en tant que facteur de production et de croissance. La stratégie mise en place par l’OCDE va dans ce sens en visant au renforcement mutuel de la croissance économique et de la préservation du capital naturel, mais également en incitant à une utilisation efficiente des ressources naturelles et à rendre la pollution plus coûteuse.

Lors de mes travaux au sein de la commission des affaires européennes de l’Assemblée nationale française, j’ai pu constater, comme l’OCDE le rappelle avec justesse, combien nous sommes confrontés aujourd’hui à un goulet d’étranglement, lié aux ressources, qui peut avoir des conséquences économiques importantes, notamment quant au coût de l’énergie. Nous sommes aussi face à des déséquilibres dans les systèmes naturels qui touchent violemment certains secteurs économiques liés à l’exploitation des ressources.

Sur ce point, je voudrais revenir sur l’adoption par l’OCDE, en juin dernier, d’une stratégie pour le développement. Il me semble évident que ces deux actions sont complémentaires. Comment réussir un vrai développement durable, parvenir à une croissance verte efficace, sans associer les pays qui subissent le plus les conséquences du changement climatique et de l’exploitation inconsciente des ressources naturelles ?

Comment mettre en œuvre ce principe du « penser vert » ? En faisant porter nos efforts sur l’innovation et en parvenant à une prise de conscience sur le prix de la pollution. L’investissement dans des infrastructures permettant d’utiliser les technologies de dernière génération, notamment dans les transports, l’énergie et la communication représente un effort vital. N’oublions pas que la mobilité est aujourd’hui au cœur de nos systèmes économiques. Le financement de la recherche et développement est aussi un axe important. La fixation d’un prix à payer pour la pollution ou la surexploitation des ressources rares, dont l’eau (3% seulement des ressources d’eau disponibles dans le monde sont de l’eau douce), doit aussi être au cœur de notre réflexion. La mise en place d’une fiscalité écologique juste et efficace est un défi.

Sachons, Monsieur le Secrétaire général, mobiliser tous les acteurs, y compris le secteur privé, la société civile, la communauté scientifique et tous les citoyens ; prenons conscience des enjeux pour les générations futures ; pensons vert ! J’aurais souhaité que vous nous donniez encore quelques éclaircissements sur ce sujet très important pour les décennies à venir. »

Répondant aux porte-parole des groupes politiques, M. Angel Gurría, Secrétaire général de l’OCDE, a affirmé que les termes « croissance » et « verte » ne doivent pas être opposés mais vont de pair et qu’il convient de fonder notre stratégie de croissance sur l’économie verte. Face à l’épuisement des ressources naturelles et aux menaces causées par le changement climatique, il ne faut pas occulter la responsabilité des générations présentes par rapport aux générations futures : le prix de l’inaction sera très lourd à payer car l’eau, la biodiversité, la conservation de tous les écosystèmes sont concernées.

Dans sa réponse aux différents intervenants, M. Jean-Marie Bockel, rapporteur du texte, a estimé que le débat avait confirmé l’intérêt, pour l’Assemblée parlementaire, d’orienter ses travaux vers la prise en compte de la dimension politique de l’action de l’OCDE :

« Je voudrais de prime abord remercier mes collègues pour la qualité de leurs interventions. Par-delà les désaccords qui ont pu s’exprimer, les sensibilités politiques diverses ou les particularités de chaque pays, sur les réponses concrètes à apporter, sur la solidarité à exprimer, nos convergences sont supérieures à nos divergences, en tout cas, nous enregistrons des points d’accord extrêmement importants et c’est encourageant.

Je veux maintenant exprimer notre reconnaissance à M. Gurría pour sa présence, une présence active, j’allais même dire pro-active : il respecte notre Assemblée, apportant à chacun une réponse approfondie. Encore mieux, il a fait preuve, outre de sa compétence qui est connue, d’un vrai enthousiasme et d’une volonté forte pour que l’OCDE joue pleinement son rôle dans un contexte particulier, auquel elle n’était d’ailleurs pas forcément préparée – pas plus que nous voilà quelques années.

Je formulerai maintenant quelques remarques. Au-delà des sujets un peu emblématiques, certains collègues – je pense à M. Schneider ou à Mme Clune – ont insisté sur la croissance verte, sur le rôle de l’éducation par rapport à l’économie et aux capacités de développer davantage les emplois. C’est une bonne chose d’avoir insisté sur ces aspects extrêmement concrets.

J’ai noté quelques phrases, comme celle que vous avez d’ailleurs soulignée, Monsieur le Secrétaire général, qualifiant notre Assemblée de référent parlementaire de l’OCDE. J’aime assez cette expression. Nous avons eu le sentiment que nous étions pleinement dans notre rôle. D’ailleurs, je voudrais à mon tour remercier nos collègues des pays associés pour leurs interventions, qui ont donné une dimension plus large à notre discussion.

J’aime la conscience que vous avez, vous qui venez de continents qui ne sont pas en crise – même si vous l’avez connue, comme le rappelait notre collègue japonaise – que nous sommes interdépendants. C’est une belle idée.

Un de nos collègues a justement dit « laissons de côté nos a priori ». Même si, en général, quand on dit cela, on pense au fond de soi-même que c’est surtout l’autre qui doit laisser de côté ses a priori, vu que nous détenons la vérité ! Mais nous avons bien senti aujourd’hui que personne ne détenait la vérité. Monsieur le Secrétaire général, on ne peut pas remettre en cause votre attachement à l’économie de marché, mais quand vous avez entendu certains propos quelque peu ultra-libéraux, voire un peu arrogants à l’égard de ceux qui souffrent en ce moment, vous avez su trouver les bons mots, la bonne mesure.

Un autre collègue a évoqué une dimension démocratique – nous sommes au Conseil de l’Europe –, et a rappelé qu’il faut toujours qu’il y ait, pour nos peuples, une lumière au bout du tunnel. C’est en effet extrêmement important. On peut se tromper, les politiques que l’on met en œuvre peuvent ne pas être suivies des effets désirés, mais il faut toujours qu’il y ait cette lumière au bout du chemin.

Je voudrais terminer mon propos par la taxe sur les transactions financières, même si nous devons en reparler vendredi matin. J’ai bien senti qu’il y avait là un vrai débat avec nos collègues venus des autres continents. Il s’agit d’un sujet complexe et difficile, avec certainement des risques d’effets pervers, mais c’est une question que l’on ne peut laisser de côté.

Bien entendu, prise isolément, cette mesure n’aurait aucune efficacité. En même temps, si l’on y met trop de conditions, cela ne se fera jamais. Il y a donc un juste milieu à trouver pour mettre en place une telle taxe, qui permettrait une certaine solidarité mais revêtirait aussi une dimension psychologique par rapport aux excès des marchés financiers. Je ne nie pas le rôle de ces derniers, mais les excès sont à condamner et il est utile que l’Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe mène également une réflexion à ce sujet.

Monsieur le Secrétaire général, je vous remercie pour la qualité de ce débat et pour nous avoir stimulés dans notre travail. »

La résolution adoptée par l’Assemblée invite les États membres à agir plus fermement pour relever le défi lancé par une croissance qui stagne, une crise financière et bancaire qui persiste, une crise des dettes souveraines qui reste menaçante. Cela passe par des efforts spécifiques en faveur de l’emploi et de l’entreprenariat des jeunes, des mesures d’assainissement plus courageuses que celles qui ont été prises jusqu’à présent, ou encore une plus grande efficacité du cadre réglementaire des activités financières. La résolution appelle également les États membres à veiller à ce que le poids de ce processus soit socialement équilibré et distribué équitablement entre toutes les strates de la population, de manière à réduire les inégalités. Elle salue les efforts de l’OCDE pour contribuer au consensus et aux accords atteints lors de la conférence Rio+20, ainsi que la décision de l’OCDE de renforcer son programme de coopération avec les pays arabes à la suite des développements politiques récents.

C. LA DÉFINITION DE PRISONNIER POLITIQUE

La notion de prisonniers politiques a été élaborée en 2001 au sein du Conseil de l’Europe par un collège de trois experts indépendants désignés par le Secrétaire général du Conseil de l’Europe, qui avaient pour mission d’apprécier les cas de prisonniers politiques présumés en Arménie et en Azerbaïdjan, dans le cadre de l’adhésion de ces deux États à l’Organisation. Les critères généraux retenus par les experts indépendants ont été approuvés à l’époque par l’ensemble des parties prenantes, y compris par le Comité des Ministres et par l’Assemblée parlementaire. Ils ont été appliqués dans des centaines d’affaires, avec l’accord de toutes les parties, y compris dans les travaux de l’Assemblée parlementaire portant sur d’autres États membres que l’Azerbaïdjan.

Lors de plusieurs réunions de la commission des questions juridiques et des droits de l’Homme consacrées à l’examen du projet de rapport « Suivi de la question des prisonniers politiques en Azerbaïdjan » − qui a finalement été adopté par la commission le 26 juin 2012 et devrait être présenté à l’Assemblée lors de la première partie de session de 2013 −, certains membres de la commission ont appelé à rouvrir la question de la définition des prisonniers politiques.

Le rapporteur a affirmé dans son rapport que « l’Assemblée commettrait une grave erreur si elle renonçait à l’acquis de la définition en vigueur et se lançait dans un interminable débat général et théorique. Un tel choix équivaudrait clairement à un recul, qui ferait par ailleurs naître des soupçons, certes sans fondement, sur les véritables motivations de l'ouverture de ce débat, qui pourrait être sans fin et ne produirait sans doute aucun résultat. » Il a appelé l’Assemblée à ne plus tergiverser et à réaffirmer la définition des prisonniers politiques en vigueur depuis 2001.

M. Jean-Pierre Michel (Haute-Saône – SOC) a exhorté l’Assemblée à ne pas commettre la lâcheté qui consisterait à reporter une nouvelle fois sa décision sur le sujet :

« Spécialiste du droit pénal, j’ai conscience de la complexité de la question qui nous occupe. Mais je me dois de reconnaître que notre rapporteur a su résister à toutes les pressions – orientées, disons-le – et nous présenter un rapport équilibré.

Commençons par écarter un faux débat : notre Assemblée est compétente pour adopter une telle résolution, qui s’inscrit très exactement dans le cadre de ses missions.

Ensuite, cette résolution s’appliquera à tous les pays du Conseil de l’Europe, sans exception. Elle s’appliquera donc naturellement à des pays démocratiques
– je n’ose dire « en principe ». Or, dans ces pays, personne ne peut évidemment s’opposer à l’État par des actes criminels et se voir décerner le statut de prisonnier politique. J’espère rassurer ainsi nos collègues turcs et espagnols inquiets des attentats qui visent leur pays et qui, sous couvert de revendications politiques, ne sont que des actes criminels contre des États démocratiques. La situation était très différente pendant la seconde guerre mondiale, lorsque des résistants – des terroristes, disait-on alors – s’opposaient au nazisme et au fascisme.

Naturellement, la définition que nous adopterons ne permettra pas de traiter tous les cas, cher collègue Kox. Mais l’absence de définition, la lâcheté dont ferait preuve notre Assemblée en renvoyant à nouveau la question aux calendes grecques seraient pires que tout. Je m’étonne que vous, en particulier, le demandiez. Ce serait un très mauvais signal adressé à certains membres du Conseil de l’Europe, voire à d’autres pays.

On invoque la Cour européenne des droits de l’Homme, mais la Cour juge au cas par cas. Elle s’inspirera certainement de la règle que nous aurons adoptée, mais elle pourra l’adapter au cas de l’espèce.

Tout milite donc en faveur de l’adoption de ce projet de résolution.

Quant à l’amendement n° 2, je préfère ne pas en parler. Peut-être le problème se règlera-t-il ailleurs. Mais les conditions dans lesquelles s’est déroulé le vote de la commission des questions juridiques – des questions juridiques ! – est un déshonneur pour toute notre Assemblée. »

M. François Rochebloine (Loire – UDI) a, pour sa part, salué la pertinence des travaux conduits par le rapporteur et a regretté que l’Azerbaïdjan se soit livré à des manœuvres de diversion pour contrarier l’adoption du projet de résolution :

« Monsieur le Président, mes chers collègues, le débat concernant la définition du prisonnier politique a quelque chose de paradoxal. Comme le rappelle notre rapporteur, il s’agit de consolider une référence commune, dont la nécessité est apparue à l’occasion de l’observation de la situation des droits de l’Homme en Arménie et en Azerbaïdjan. Pour autant, c’est bien une définition de caractère général que la commission a cherché à atteindre et à confirmer, et non pas une description de compromis spécifiquement liée aux deux pays en cause.

J’approuve totalement cette démarche. En effet, si nous voulons donner une pleine efficacité aux efforts que nous déployons collectivement pour défendre les libertés fondamentales partout où elles nous semblent menacées, il est indispensable que nous sachions de quoi nous parlons et que nous ayons une compréhension commune des concepts que nous utilisons.

Les indications données par le rapport permettent de constater que le travail de définition du prisonnier politique a été accompli avec toutes les garanties nécessaires d’élaboration concertée et de précision, grâce au concours d’experts reconnus. Je ne vois donc que des avantages à ce que les conclusions présentées par la commission des affaires juridiques soient validées par l’Assemblée parlementaire. Tout allongement du débat sur cette question ne peut être qu’une manœuvre de diversion, permettant à ceux qui n’ont pas une pratique claire des libertés fondamentales d’esquiver leur mise en cause sur le fond, sous des prétextes de procédure.

Je ne suis pas étonné, on le comprendra, de voir l’Azerbaïdjan impliqué dans cette diversion. Nous recevons tous les jours des informations qui montrent qu’à défaut d’accepter ce que nous entendons ici par prisonnier politique, les autorités de Bakou s’emploient, malheureusement, à multiplier les cas de personnes qui relèvent à l’évidence de cette catégorie. Le propre du totalitarisme, à Bakou comme ailleurs, est de refuser la vérité commune. Le même phénomène s’observe en Turquie, où de nombreux députés kurdes et élus locaux sont en prison. Il ne faudrait pas faciliter la tâche à ces régimes. Ne laissons pas à la diversion le temps de prendre force. Rejetons l’amendement adopté par la commission, comme nous y invite le rapporteur, et adoptons le projet de résolution. »

D. LES DROITS DE L’HOMME ET LA POLITIQUE ÉTRANGÈRE

La commission des questions politiques et de la démocratie a décidé, en juin 2011, de consacrer un rapport aux relations entre droits de l’Homme et politique étrangère. Trop souvent, en effet, la défense par les États de leurs intérêts purement nationaux prime, dans la conduite de leurs relations avec les pays tiers, la promotion des valeurs fondamentales du Conseil de l’Europe que sont la défense des droits de l’Homme, le renforcement de la démocratie et l’approfondissement de l’État de droit, valeurs qu’ils se sont par ailleurs engagés à respecter au plan interne.

Le Conseil de l’Europe poursuit quant à lui une politique de promotion active des droits de l’Homme dans les relations entre les États membres, au nom de leur caractère universel. Avec le statut de « partenaire pour la démocratie », créé en 2009 par l’Assemblée parlementaire, l’Organisation a également trouvé un instrument efficace, qui est étendu hors du domaine parlementaire dans le cadre de l’émergence de nouvelles formes de partenariat et d’un dialogue spécifique avec les pays voisins du sud de la Méditerranée, du Proche-Orient et de l’Asie centrale. Pour sa part, l’Union européenne a intégré les droits de l’Homme dans le dialogue politique qu’elle conduit au titre de sa politique d’élargissement ou avec les États avec lesquels elle conclut des accords de coopération.

Ces évolutions devraient être confortées : lorsque la politique extérieure néglige trop longtemps les droits de l’Homme et se concentre uniquement sur les intérêts économiques et géopolitiques stratégiques, des crises en rapport avec les droits de l’Homme peuvent se déclencher et les États peuvent se trouver entraînés dans des interventions humanitaires d’urgence qui relève d’un impératif moral. Dans cette perspective, défendre activement les droits de l’Homme dans le cadre de la politique étrangère peut contribuer à prévenir des tensions, voire des conflits.

Dans son intervention, M. Bernard Fournier (Loire – UMP) a lui aussi relevé la difficulté à conjuguer la défense des droits de l’Homme et celle des intérêts fondamentaux d’un État, les échecs de la « diplomatie des droits de l’Homme » étant d’ailleurs particulièrement patents :

« Monsieur le Président, mes chers collègues,

Selon le philosophe français Raymond Aron, « la diplomatie d’une grande puissance ne peut être ni machiavélique ni purement angélique et ceci ni en parole ni en action. » Cette ambivalence se retrouve dans la plupart des politiques extérieures de nos États. L’avènement aux États-Unis d’une diplomatie des droits de l’Homme, au milieu des années soixante-dix, sous l’impulsion de Jimmy Carter, venait avant tout masquer l’échec de la Realpolitik prônée au Vietnam. Cette nouvelle manière d’aborder les choses n’effaçait pas pour autant l’ancienne : la préservation des intérêts essentiels du pays guidait toujours l’action des diplomates.

Gardons-nous en effet de toute naïveté. Le diplomate cherche avant tout à gérer, atténuer et rendre supportables des différences entre son pays d’origine et celui dans lequel il exerce ses fonctions. Les droits de l’Homme, au contraire, visent à l’universalité et ne peuvent tolérer un quelconque relativisme.

La fin de la guerre froide et l’émergence de nouvelles puissances ont contribué à renforcer cette ambiguïté entre la promotion des valeurs fondamentales, d’un côté, et, de l’autre, la consolidation de la sécurité des pays. La politique extérieure d’un État ne se confond plus intégralement avec celle de l’alliance à laquelle il appartient ; elle peut être fonction de ses intérêts immédiats dans telle ou telle partie du monde.

Dans le même temps, les opérations menées au nom des droits de l’Homme ont pour la plupart échoué – que l’on songe notamment à l’incapacité de l’Afghanistan à s’affranchir des talibans –, avec en plus cette conséquence terrible que l’on voit la promotion des valeurs fondamentales associée à un messianisme de mauvais aloi. L’Irak est ainsi presque devenu un cas d’école. Mue par un double impératif – renforcer la sécurité mondiale en luttant contre la prolifération des armes de destruction massive et, dans le même temps, renverser une dictature –, l’action militaire a pris le tour d’une opération terrorisant la population, les soldats, hérauts des droits de l’Homme, se transformant pour certains en d’horribles tortionnaires.

La promotion d’une diplomatie des droits de l’Homme implique, à cet égard, une exemplarité qu’il est parfois difficile de mettre en œuvre. Les débats que nous avons au sein de notre Assemblée sur le respect par tel ou tel État membre des obligations induites par l’adhésion au Conseil de l’Europe viennent l’attester. Faute de cette exemplarité, toute politique étrangère des droits de l’Homme pourra légitimement être accusée d’incarner une forme de néo-colonialisme, terriblement cynique.

Je comprends les motivations de notre excellent collègue Pietro Marcenaro et j’estime moi aussi qu’il est nécessaire de mettre tout en œuvre pour que la Realpolitik de nos gouvernements soit régulièrement contrebalancée par des actions efficaces en faveur des droits de l’Homme. »

Mme Bernadette Bourzai (Corrèze – SOC) a, pour sa part, regretté les divergences constatées au sein du Conseil de l’Europe sur les conflits latents en Europe et a souligné les risques que fait peser sur l’existence même du Conseil de l’Europe la multiplication des initiatives de l’Union européenne dans le domaine des droits de l’Homme :

« Monsieur le Président, mes chers collègues, l’intitulé de l’excellent rapport de notre collègue Pietro Marcenaro pourrait ressembler à un vœu pieux, tant la défense des droits fondamentaux est à géométrie variable ou, passez-moi l’expression, à géographie variable, au sein des politiques extérieures de nos États membres.

Je conçois aisément que notre Organisation entende favoriser une approche conjointe, mais force est de constater, comme le démontre le cas syrien, que le principe d’une diplomatie morale est encore loin d’être effectif et qu’il est par ailleurs très difficile de dénoncer de façon unanime, au sein du Conseil de l’Europe, les exactions que peut subir une population, quand bien même l’évidence des atrocités ne serait plus à démontrer.

L’exemple du Kosovo me semble également pertinent. Notre Organisation, comme l’Union européenne, d’ailleurs, n’a pas de position unique sur le sujet. Le refus de reconnaître ce jeune pays fragilise, me semble-t-il, toute position du Conseil de l’Europe sur la région, un soin particulier étant mis à ne pas froisser les intérêts des uns et des autres.

Les divisions au sein même de notre propre Organisation fragilisent également la mise en œuvre d’une approche conjointe. Il suffit de rappeler un certain nombre de conflits latents sur notre continent – tels ceux existant entre la Russie et la Géorgie, entre Chypre et la Turquie ou encore entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan – pour conclure que toute approche commune pourrait être parasitée par ces oppositions.

Une fois passées ces remarques quelque peu désabusées, je souhaite revenir sur les avancées enregistrées par l’Union européenne en matière d’action extérieure, mais aussi, plus récemment, en ce qui concerne la défense des droits de l’Homme. Je ne sais s’il convient de saluer, comme le propose la commission des affaires politiques et de la démocratie, le cadre stratégique et le plan d’action de l’Union européenne sur les droits de l’Homme et la démocratie, tant ils semblent aller à rebours des intérêts de notre Organisation, complètement mésestimée par Bruxelles, pour ne pas dire ignorée. Qu’il paraît loin le temps où un mémorandum d’accord était signé entre nos deux organisations ! Il faut se rendre à l’évidence : la Commission et le Conseil européen tendent aujourd’hui à dupliquer tous nos organes.

L’Union européenne a ainsi ouvert une Agence européenne des droits fondamentaux, créé un Institut européen pour l’égalité des sexes, institué une Assemblée parlementaire multilatérale EuroNest, qui réunit des pays qui dialoguent déjà au sein de notre Assemblée, et lancé un projet de Fonds européen pour la démocratie. Elle a enfin procédé à la nomination d’un Représentant spécial chargé des droits de l’Homme, dont la mission ressemble comme une sœur à celle du Commissaire aux droits de l’Homme du Conseil de l’Europe, lequel, je le rappelle, était au cœur du dispositif de coopération prévu par le Mémorandum. Il serait d’ailleurs bon qu’il vienne nous dire où en est son évaluation.

C’est pourquoi je soutiens pleinement le souhait du rapporteur de mettre à profit le Mémorandum. Je souhaite que l’on aille rapidement plus loin, en faisant travailler ensemble le Commissaire aux droits de l’Homme et le Haut représentant et en mutualisant nos moyens respectifs. Faute d’une telle association, et compte tenu de la faiblesse de nos moyens dans le contexte actuel, je ne donne pas cher de l’avenir à long terme de notre Organisation. »

La résolution adoptée par l’Assemblée appelle les États membres à œuvrer au renforcement de la capacité de la communauté internationale, dans son ensemble, à sauvegarder et promouvoir les droits de l’Homme et à leur accorder une place prépondérante dans la politique étrangère. Elle appelle également les parlements nationaux à encourager et soutenir la « diplomatie parlementaire » en y plaçant au cœur de celle-ci les valeurs du Conseil de l’Europe.

La recommandation adoptée par l’Assemblée appelle le Comité des Ministres à inviter les États membres à s’efforcer d’assurer la cohérence entre, d’une part, les principes qu’ils se sont engagés à respecter à l’échelon national en matière de démocratie et de droits de l’Homme et, d’autre part, la gestion de leurs relations extérieures et la mise en œuvre de leurs stratégies de politique étrangère.

E. LE DROIT À LA LIBERTÉ DE CHOIX ÉDUCATIF EN EUROPE

Les États membres du Conseil de l’Europe doivent offrir un système d’éducation qui assure l’égalité des chances et une éducation de qualité pour tous les élèves, pour transmettre à la fois le savoir et les valeurs qui favorisent la promotion des droits fondamentaux et la citoyenneté démocratique. Ils doivent également garantir le droit fondamental à la liberté de choix éducatif, conformément à l’article 2 du Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l’Homme. Ce droit, intimement lié aux droits à l’éducation et à la liberté de conscience, comporte l’obligation pour les États de respecter le droit des parents d'assurer l’éducation et l’enseignement conformément à leurs convictions religieuses et philosophiques.

Le rapport que la commission de la culture, de la science, de l’éducation et des médias a consacré au droit à la liberté de choix éducatif en Europe a plus particulièrement examiné si le droit des États membres permet :

– de fonder des établissements privés d’enseignement susceptibles d’être intégrés au service public de l’éducation,

– à ces établissements de répondre à des demandes spécifiques des familles, tout en respectant le « cahier de charges » des écoles fondées par l’État,

– à l’État de soutenir financièrement ces établissements (éventuellement sous conditions spécifiques) et/ou les familles qui décident d’y inscrire leurs enfants.

La commission de la culture a par ailleurs souligné le besoin de préserver le principe de neutralité de l’État et le pluralisme dans le système national d’éducation, et, à cette fin, la nécessité de garantir la viabilité et la qualité du réseau d’écoles publiques.

Lors de la discussion des articles du projet de résolution, M. Jean-Pierre Michel (Haute-Saône – SOC) a présenté un amendement co-signé par plusieurs de ses collègues, tendant à supprimer le paragraphe 5.1 du projet. Ce paragraphe prévoyait que l’Assemblée recommande aux États membres du Conseil de l’Europe « d’accorder aux élèves des écoles privées et à leurs familles les mêmes avantages financiers (allocations d’éducation ou autres) octroyés aux élèves des écoles publiques ou à leur familles » :

« Nous venons d’adopter un amendement qui soumet à certaines conditions, notamment de carence, le fait de financer les écoles privées. Dans ces conditions, il convient de supprimer le paragraphe 5.1, qui ne fixe aucune condition et qui permettrait donc aux pouvoirs publics de financer indifféremment l’école privée et l’école publique. Il faut que les choses soient claires : fonds publics pour l’école publique, fonds privés pour l’école privée. »

Sur l’avis favorable de la commission, cet amendement a été adopté.

M. Jean-Pierre Michel (Haute-Saône – SOC) a ensuite présenté un amendement co-signé par plusieurs de ses collègues, tendant à supprimer le paragraphe 5.2 du projet. Ce paragraphe prévoyait que l’Assemblée recommande aux États membres du Conseil de l’Europe « de ne soumettre le financement des établissements d’enseignement privés faisant partie du système national d’éducation qu’à des conditions objectives et non discriminatoires, y compris celles nécessaires à assurer que les sommes versées bénéficient aux familles, comme par exemple le but non lucratif des établissements en question et leur soumission à des contrôles comptables » :

« Dans la mesure où le paragraphe 5.1 vient d’être supprimé, il convient, par cohérence, de supprimer également le paragraphe 5.2. Ainsi, on conserve seulement le texte adopté tout à l’heure à travers l’amendement n° 2. »

Sur l’avis favorable de la commission, cet amendement a été adopté.

La résolution adoptée par l’Assemblée recommande de préserver le rôle des autorités publiques dans le domaine de l’éducation ainsi que la présence, la viabilité et la qualité des écoles publiques sur tout le territoire. Elle appelle également les États membres à permettre la création et le fonctionnement, dans leur juridiction, d’établissements privés d’enseignement dans des conditions non discriminatoires tout en veillant à ce que ceux-ci délivrent un enseignement de qualité et ne s’inscrivent pas dans une démarche communautariste.

F. UN RETOUR À LA JUSTICE SOCIALE GRÂCE À UNE TAXE SUR LES TRANSACTIONS FINANCIÈRES

Avec le déclenchement, l’expansion et la persistance de la crise financière qui frappe de nombreux pays européens, l’idée de taxer les transactions financières a reçu, ces dernières années, un regain d’attention. La commission des questions sociales, de la santé et du développement durable a considéré qu’un consensus se fait jour peu à peu sur le fait qu’une taxe sur les transactions financières pourrait renforcer le lien entre d’une part, le marché financier global et ses institutions et, d’autre part, l’économie réelle et la société dans son ensemble, alors que les premiers semblent être de plus en plus « déconnectés » des seconds. En particulier, une telle taxe – assortie de mesures de régulation − devrait contribuer à remédier à la dégradation des finances publiques et des systèmes sociaux provoquée par la crise, et permettrait de renforcer les lignes de défense érigées pour prévenir la réapparition de telles crises.

Par-delà les considérations touchant à l’ordre économique et financier international, la taxation des transactions financières apparaît aussi comme un acte de portée politique, qui traduit, pour les parties prenantes, la volonté de dépasser la dictature des marchés et de partager des valeurs communes. Ainsi doit s’entendre le projet de taxation actuellement discuté au sein de l’Union européenne.

Dans son intervention, M. René Rouquet (Val-de-Marne – SOC) a tenu à préciser les conditions auxquelles devrait satisfaire une telle taxe pour être juste et efficace à la fois :

« Monsieur le Président, mes chers collègues, quarante ans après les premiers travaux de Tobin, la taxe sur les transactions financières pourrait enfin voir le jour sur notre continent.

Le projet de la Commission européenne, amendé par le Parlement européen en mai dernier, contient un certain nombre d’éléments positifs qu’il convient de saluer. Je pense notamment à la volonté de la Commission d’englober un nombre aussi large que possible d’instruments financiers et d’acteurs. La nécessité d’adopter rapidement une réglementation européenne destinée à prévenir la fraude, l’évasion et les abus fiscaux est également rappelée dans le document.

La taxe sur les transactions financières, pour être juste et efficace, doit s’inscrire dans une triple dimension.

La première consiste à s’assurer que le secteur financier contribue de manière satisfaisante aux charges publiques, c’est-à-dire qu’il soit taxé à hauteur de sa capacité de contribution. La deuxième vise à limiter l’activité financière indésirable, je pense notamment au trading, et à stabiliser les marchés. La troisième répond à la nécessité pour nos États d’augmenter leurs recettes en trouvant, notamment, des financements innovants.

Il est important de rappeler que la mise en place d’une taxe sur les transactions financières devrait notamment permettre de réduire le courtage automatique à haute fréquence, qui représente un réel danger pour nos économies.

Cependant, je m’interroge sur l’exemption de taxe des transactions effectuées par les fonds de pension, même si l’on peut convenir que ceux-ci sont, par nature, des investisseurs à long terme et non des spéculateurs.

La répartition des recettes de la nouvelle taxe mériterait également d’être précisée. Le projet de la Commission et du Parlement s’abstient de fixer la gestion de ces recettes. Je pense au contraire qu’il convient de faire du produit de cette taxe un élément essentiel du financement de l’éducation, de la recherche, de la santé, de l’emploi, de la culture, de l’environnement ou du développement des énergies renouvelables.

Même si une application est limitée dans un premier temps à une douzaine d’États, l’instauration de cette taxe devra être rapide, en vue, notamment, de rassurer nos opinions publiques lassées d’assister aux dérives de la dérégulation financière. Les populations ont le sentiment de devoir payer via la fiscalité les dégâts liés aux excès des banques, et considèrent que celles-ci ne contribuent pas assez à la lutte des gouvernements contre la crise. Une absence de réponse à ce manque de solidarité contribue à fragiliser la confiance de nos concitoyens à l’égard de leur gouvernement. Elle sert de terreau à la montée des mouvements populistes, elle représente un danger pour nos démocraties !

Madame la rapporteure, je vous apporte mon plus total soutien. »

Mme Danielle Auroi (Puy-de-Dôme – Ecolo) a souligné la nécessité de donner à la taxe sur les transactions financières une assiette très large et d’orienter son produit vers des emplois qui répondent aux nécessités économiques, sociales et environnementales de notre temps :

« Madame la rapporteure, votre projet de résolution me semble particulièrement important, et je salue votre initiative. Je souhaiterais insister sur certains points afin que cette taxe sur les transactions financières soit à la hauteur de nos ambitions.

Cette taxe, nous l’attendons depuis longtemps. Elle suscite de grands espoirs au sein d’une partie des forces politiques en Europe – une partie seulement, malheureusement. Faut-il encore convaincre de la nécessité de s’attaquer aux comportements spéculatifs qui ont causé tant de ravages dans nos sociétés depuis maintenant cinq ans ?

Cet instrument se doit également d’apporter une contribution financière substantielle à une justice sociale bien trop malmenée, en souffrance de moyens. Or la taxe sera juste et efficace si son assiette est large et si son affectation sert des objectifs de développement. Je rappelle que la proposition initiale de la Commission européenne permettait d’envisager des ressources fiscales supplémentaires de l’ordre de 55 milliards d’euros.

Les déficits importants auxquels sont confrontés les pays européens renforcent la nécessité d’une assiette large, avec le champ d’application le plus large possible. Je me réjouis que le projet de résolution l’affirme dans son point 8.1.

Le Parlement européen a progressé sur ce point. En effet, il a judicieusement complété le principe de résidence par un principe d’émission, ce qui élargit la base de taxation tout en bloquant d’éventuelles stratégies de contournement ; il a également ajouté un principe de propriété afin que les contrats dérivés qui auraient « échappé » à la taxe ne soient pas reconnus juridiquement. Mais, dans le même temps, il a accordé une exemption aux fonds de pension, ce que je regrette profondément.

Certes, ces investisseurs à long terme seront touchés de manière marginale par la taxe, puisque celle-ci pénalise essentiellement les acteurs de court terme. Cependant, nous savons que ces fonds, en spéculant sur les marchés financiers, ont été un acteur important de la crise. Cette exemption est donc un mauvais signal envoyé au monde de la finance.

Venons-en à l’affectation du produit de cette taxe, évoqué au point 8.5 du projet de résolution.

Je souhaiterais à cet égard rappeler l’esprit de la taxe originelle, dite taxe Tobin, sur laquelle j’ai pu travailler en tant qu’eurodéputée : une part importante de cette taxe devait être dédiée au financement des engagements européens en matière d’aide au développement et de lutte contre le changement climatique. Or on observe aujourd’hui un glissement vers une affectation plus importante des sommes collectées à la résorption des déficits. En cette période, je peux le comprendre. Mais je pense néanmoins que l’esprit de la taxe doit demeurer.

Ainsi, les actions en faveur du développement durable et d’une vraie solidarité avec les pays les plus pauvres doivent être au cœur du débat sur l’affectation de la taxe sur les transactions financières. La transition écologique créera des emplois, qu’il faut aussi aider.

Au sein de l’Union européenne, la mise en place de cette taxe fera l’objet d’une coopération renforcée à laquelle participera la France. C’est un premier pas, nous devons espérer que d’autres pays rejoignent rapidement ce premier groupe. J’approuve totalement ce rapport et pense que ce pas encourageant sera suivi par la plupart des États. »

M. Frédéric Reiss (Bas-Rhin – UMP) avait, quant à lui, mis en avant l’ampleur des défis à relever pour mettre en œuvre, au plan international, une taxe dont le principe n’est désormais plus guère contesté :

« Monsieur le Président, mes chers collègues, la crise économique et financière qui fragilise nos démocraties depuis quatre ans a conduit la grande majorité de nos pays à s’imposer de vastes cures d’austérité pour lutter contre l’augmentation des dettes publiques. Cette prise de responsabilité de la part des gouvernements n’a pas trouvé d’écho véritable au sein du monde financier dont les excès d’avant la crise des subprimes tendent à réapparaître. La déconnexion avec l’économie réelle est, notamment, de plus en plus patente.

Cette situation a conduit les États à rechercher des financements innovants. C’est dans ce contexte que la taxe sur les transactions financières s’est imposée dans le débat politique.

Mais si le principe d’une taxe est aujourd’hui étudié, la mise en œuvre s’avère compliquée, tant sa définition demeure à géométrie variable d’un État à un autre.

Au sein de l’Union européenne, le principe de résidence et les taux proposés empêchent à l’heure actuelle d’obtenir un consensus. Certains considèrent même, que la mise en place d’une taxe sur les transactions financières générale représente un risque économique pour l’Europe.

Ainsi le Premier ministre britannique a-t-il dénoncé, devant notre Assemblée, le risque d’un déplacement de l’activité financière vers les pays n’appliquant pas cette taxe. Il a également insisté sur les pertes d’emplois que le contournement de la taxe pourrait entraîner. Nous comprenons ses inquiétudes légitimes, la City de Londres concentrant 80% des transactions financières européennes.

Le Royaume-Uni a été à l’origine de la plus ancienne taxe sur les transactions financières du monde, le droit de timbre. Mais aujourd’hui, la situation sociale nous oblige à trouver ensemble des modes de financement de la dette qui ne pèsent pas sur nos populations, de plus en plus tentées par les idées, aussi simplistes que tranchées, des mouvements populistes.

Même s’il est nécessaire de concevoir avec soin la taxe sur les transactions financières en prenant en compte les remarques des uns et des autres, chaque pays européen doit prendre ses responsabilités et apporter son soutien à une taxe plus générale, plus efficace. L’utiliser pour plus de justice sociale est une bonne idée, mais beaucoup de chemin reste à parcourir.

Ce rapport a le mérite de poser un certain nombre de problèmes et je le soutiendrai.

Comme l’indiquait l’un des promoteurs de la taxe sur les transactions financières, l’ancien président de la République française Nicolas Sarkozy, elle est aujourd’hui “techniquement possible, financièrement indispensable et moralement incontournable”. »

La résolution adoptée par l’Assemblée appelle les responsables politiques des États membres à veiller à ce que des enseignements soient tirés de la crise actuelle et à s’employer à renforcer les lignes de défense afin d’empêcher que de telles crises ne se reproduisent à l’avenir. Elle invite le Conseil et la Commission de l’Union européenne à adopter une taxe dont le champ d’application sera le plus large possible, à œuvrer à l’introduction d’une telle taxe au plan mondial et à orienter le produit de la future taxe vers des emplois propres à renforcer la cohésion sociale et à réparer les dommages causés par la crise. La résolution invite aussi les États membres du Conseil de l’Europe à s’engager dans la même voie que l’Union européenne.

G. L’ESPACE EUROPÉEN DE L’ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR, UN ATOUT POUR LE RENFORCEMENT DES DROITS DE L’HOMME

L’Assemblée a organisé un débat joint sur deux rapports présentés par la commission de la culture, de la science, de l’éducation et des médias et consacrés, respectivement, à la consolidation et l’ouverture internationale de l’Espace européen de l’enseignement supérieur et à la gouvernance des établissements d’enseignement supérieur dans l’Espace européen de l’enseignement supérieur.

1. La consolidation et l’ouverture internationale de l’Espace européen de l’enseignement supérieur

Le processus de Bologne a engagé, en 1999, la construction de l’Espace européen de l’enseignement supérieur qui est considéré depuis l’origine comme un facteur déterminant dans la création d’un environnement propice à une meilleure intégration européenne. Durant la première décennie, le processus de Bologne a été concentré sur les réformes structurelles, comme la mise en place de cadres de qualifications et de systèmes de diplômes comparables, d’un dispositif favorisant la mobilité avec le Système européen de transfert et d’accumulation de crédits (ECTS), et diverses mesures visant à renforcer globalement l’attractivité des systèmes universitaires européens. Au cours de cette période, la dimension sociale et la perspective mondiale de l’Espace européen de l’enseignement supérieur ont progressivement gagné en importance.

Le rapport déposé par la commission de la culture, de la science, de l’éducation et des médias estime que l’Espace européen de l’enseignement supérieur est aujourd’hui confronté à plusieurs défis, notamment celui d’une certaine disparité – car 18 pays ont adhéré au processus de Bologne dans la décennie 2001-2010 − et une mobilité encore insuffisante et asymétrique. L’Espace européen de l’enseignement supérieur doit donc être consolidé, car il en va de l’attractivité de l’Europe pour les étudiants, les enseignants et les chercheurs du monde entier. En ce sens, la consolidation est intimement liée à l’ouverture internationale de l’enseignement supérieur européen, qui est à la fois un instrument de rayonnement et un levier de prospérité partagée.

La résolution adoptée par l’Assemblée affirme que de nouvelles actions s’imposent pour renforcer l’Espace européen de l’enseignement supérieur et pour le rendre plus ouvert et attrayant, et que les parlements nationaux doivent apporter tout le soutien politique nécessaire à sa mise en œuvre. Elle appelle les États membres du Conseil de l’Europe à mener les réformes structurelles encore nécessaires, notamment la mise au point de cadres de qualifications et de systèmes de diplômes comparables, et à favoriser la mobilité entre les systèmes d’enseignement supérieur. Elle les invite à faire en sorte que le Conseil de l’Europe demeure un partenaire actif du processus de Bologne et à ce qu’il contribue à la coopération avec d’autres pays.

La recommandation adoptée par l’Assemblée invite le Comité des Ministres à continuer à placer le développement de l’enseignement supérieur au cœur des activités du Conseil de l’Europe, en soutenant les initiatives favorables à la mise en cohérence des systèmes européens (par exemple la mise en place d’un passeport européen de qualifications) ; elle invite également le Comité à renforcer sa coopération avec l’Union européenne, tout particulièrement en direction des pays ayant récemment adhéré.

2. La gouvernance des établissements d’enseignement supérieur dans l’Espace européen de l’enseignement supérieur

L’autonomie des établissements d’enseignement supérieur, la liberté académique et la liberté de la recherche scientifique et des arts sont des principes fondamentaux de l’enseignement supérieur, notamment dans le cadre de sociétés démocratiques et pluralistes. Pour autant, il revient aux autorités publiques de garantir la qualité de l’enseignement supérieur, tout en veillant à mettre en place progressivement un enseignement supérieur gratuit et accessible à tous sur la base des capacités de chacun. D’autres facteurs « politiques » exercent une influence sur la gouvernance des établissements d’enseignement supérieur, comme l’intensité de la concurrence qui peut s’exercer entre eux ou les conditions de leur financement.

Le rapport de la commission de la culture, de la science, de l’éducation et des médias estime qu’en matière de gouvernance, l’autonomie des établissements de l’enseignement supérieur reste encore embryonnaire et qu’elle est menacée par divers facteurs extérieurs. Elle devrait reposer dans une plus grande mesure sur des évaluations internes ainsi que sur des structures décisionnelles auxquelles participent l’ensemble des parties prenantes, notamment les étudiants, les enseignants et les chercheurs.

M. Jean-Yves Le Déaut (Meurthe-et-Moselle – SOC) a fait part de son accord avec les analyses contenues dans les deux rapports, tout en apportant des précisions quant au contexte français où s’est développée l’autonomie des universités :

« Je souscris aux priorités du Conseil de l’Europe en ce qui concerne la création d’un espace européen d’enseignement supérieur et je soutiens le processus de Bologne. Je partage en outre les recommandations de nos collègues Huseynov et Flego en vue de moderniser l’enseignement supérieur dans les 47 États membres.

Nous voulons concevoir un nouveau paysage académique au service de la réussite des étudiants, d’une recherche ambitieuse et du transfert des connaissances acquises à la société. Nous soutenons particulièrement l’objectif de mobilité de 20 % des étudiants à l’horizon 2020 et la priorité à l’insertion professionnelle, incluant notamment la valorisation du doctorat au niveau européen – car à quoi bon former des docteurs pour en faire des chômeurs ? –, ainsi que la dimension sociale – logement, santé, autonomie des étudiants.

Le texte est en phase avec des orientations françaises sur les référentiels de compétences. En introduisant le système LMD en 2002, nous avons contribué à la comparabilité des référentiels européens. Cependant, nous ne sommes pas favorables à une uniformité a priori : il est essentiel de reconnaître les différences entre les histoires et les approches culturelles de nos pays, car il faut partir des richesses accumulées dans le passé pour mieux construire. C’est ce qui explique que nous ayons toujours en France des grandes écoles à côté des universités. Notre nouvelle ministre souhaite toutefois renforcer leur coopération.

Nous partageons les objectifs du rapport sur la gouvernance. En France, la liberté académique est accordée aux établissements d’enseignement supérieur. Leur autonomie a été accrue par la loi de 2007 sur la gouvernance des universités, qui leur a donné des responsabilités nouvelles en matière budgétaire, de gestion de ressources humaines et de transfert de biens immobiliers et a resserré les liens entre le monde académique et le monde de l’entreprise. Le financement des établissements reste avant tout public et n’est pas discriminatoire, comme le préconise le rapport. En France, les conseils d’administration comportent actuellement des enseignants chercheurs, des étudiants, des personnels et des personnalités extérieures représentant les collectivités et le monde du travail.

La nouvelle loi sur l’autonomie mérite toutefois d’être modifiée pour développer la collégialité. Des assises de l’enseignement supérieur organisées par notre ministre auront lieu au niveau régional en octobre et au niveau national en novembre. Dans les propositions de modifications législatives et réglementaires que le Premier ministre m’a demandé de préparer pour la fin de l’année, j’inclurai les recommandations de nos rapporteurs en vue de faire progresser l’Europe de la connaissance. »

MM. Le Déaut, Mariani, Nachbar, Rochebloine, Bataille et Rouquet ont déposé un amendement tendant à remplacer, dans le paragraphe 9 du projet de résolution, les mots « et les encourage à associer » par les mots : « Elle souhaite que la gouvernance soit organisée autour de la notion de collégialité et encourage les universités et les établissements à s’associer. » M. Jean-Yves Le Déaut (Meurthe-et-Moselle – SOC) a défendu cet amendement :

« M. Connarty [rapporteur suppléant] indique qu’il faut associer à la gouvernance des universités tous les personnels et des personnalités extérieures. J’ai ainsi demandé que l’on introduise la notion de collégialité. »

Sur l’avis favorable de la commission, cet amendement a été adopté.

La résolution adoptée par l’Assemblée appelle les États membres à protéger et préserver l’autonomie des établissements de l’enseignement supérieur et la liberté académique, notamment en empêchant toute ingérence politique et économique dans la gestion interne de ces établissements, qu’ils soient privés ou publics, et en veillant à la transparence et à la neutralité de leur financement. Elle les invite également à promouvoir l’égalité d’accès aux établissements de l’enseignement supérieur sur la base des capacités de chacun et, à cette fin, d’apporter un soutien financier aux établissements et aux étudiants pour surmonter les obstacles socioéconomiques, notamment en période de difficultés financières et de crise sociale.

V. L’AVENIR DU CONSEIL DE L’EUROPE EN DÉBAT

A. DÉONTOLOGIE DES MEMBRES DE L’ASSEMBLÉE PARLEMENTAIRE : BONNE PRATIQUE OU DEVOIR ?

Les membres de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe exercent diverses fonctions : en particulier, ils adoptent des résolutions politiques portant sur des questions d’intérêt stratégique pour les États européens, ils participent à des missions d’observation d’élections, soutiennent les activités de divers organismes intergouvernementaux ou autres et élisent les juges de la Cour européenne des droits de l’Homme, le Commissaire aux droits de l’Homme du Conseil de l’Europe, le Secrétaire général du Conseil de l’Europe, le Secrétaire général de l’Assemblée parlementaire ainsi que d’autres titulaires de fonctions importantes au sein de l’Organisation.

Jusqu’à récemment, le Règlement de l’Assemblée ne contenait aucune disposition spécifique relative à la conduite de ses membres. Il semblait tout naturel que ces derniers respectent les principes tels que l’intégrité et l’honnêteté, étant tenus, en leur qualité de parlementaires nationaux, de se conformer aux règles d’éthique et aux dispositions de lutte contre la corruption en vigueur dans leur pays. Ces dernières années, un code de conduite applicable à tous les rapporteurs de l’Assemblée parlementaire a été adopté en 2011. La réflexion s’est ensuite poursuivie quant à l’opportunité d’établir des règles déontologiques applicables à l’ensemble des membres de l’Assemblée.

Le rapport présenté par la commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles fait le point sur les principes généraux susceptibles d’offrir des points de repère quant aux comportements que l’on est en droit d’attendre des membres de l’Assemblée. Il explicite également les règles de conduite qui doivent former la charpente du Code proposé à l’approbation de l’Assemblée.

La résolution adoptée par l’Assemblée indique que, en se dotant d’un code de conduite, celle-ci entend faire prévaloir la primauté de l’intérêt public dans son travail et répondre, par la mise en place d’un système de règles cohérentes applicables à l’ensemble de ses membres, aux préoccupations générales exprimées s’agissant notamment du favoritisme politique, des offres de cadeaux ou d’hospitalité faites aux membres, des situations de conflits d’intérêts ou de l’utilisation du mandat pour la promotion et la défense d’intérêts personnels. La résolution précise les modifications à apporter à l’article 12 du Règlement et inclut, en annexe, le texte du Code de conduite. Elle invite également les parlements nationaux des États membres du Conseil de l’Europe à coopérer avec le GRECO (Groupe d’États du Conseil de l’Europe contre la corruption) et à continuer à promouvoir des stratégies anti-corruption.

B. LA PRÉSIDENCE ALBANAISE DU CONSEIL DE L’EUROPE

1. Intervention de M. Bujar Nishani, président de l’Albanie

Ministre de la Justice entre 2009 et 2011 et ministre de l’Intérieur une première fois entre 2007 et 2009 et une deuxième fois de 2011 à 2012, M. Bushar Nishani a été élu président de la République par le Parlement le 11 juin 2012, au quatrième tour de scrutin. Il a pris ses fonctions le 24 juillet suivant. M. Nishani a été amené à s’exprimer devant l’Assemblée parlementaire pour expliquer quelles voies son pays entend suivre pour renforcer davantage sa coopération avec le Conseil de l’Europe – dont il est membre depuis le 13 juillet 1995 −, dans la perspective d’intégration euro-atlantique qu’il a choisie.

Le président a commencé par rappeler l’ampleur des transformations politiques vécues par l’Albanie depuis le début des années 1990, transformations auxquelles le Conseil de l’Europe a pris une part essentielle. Le pays, « autrefois champion de la violation des droits de l’Homme » et « connu pour son hostilité aveugle et fanatique à l’égard du monde occidental », est aujourd’hui membre de l’OTAN et participe aux efforts des forces de paix en Afghanistan et ailleurs. Autrefois complètement isolée, l’Albanie envisage aujourd’hui avec confiance l’obtention du statut de pays candidat à l’Union européenne ; les citoyens albanais voyagent librement sans visa en Europe.

Le président a également souligné que, si l’Albanie a bénéficié du savoir-faire et de la coopération du Conseil de l’Europe dans divers domaines − la réforme constitutionnelle grâce à la coopération avec la Commission de Venise, la tenue d’élections libres et démocratiques conformes aux normes européennes, l’établissement et la consolidation d’une justice efficace et indépendante, la lutte contre la corruption, le crime organisé et les trafics illicites, la croissance de la culture démocratique, etc. – elle tient de son histoire la capacité de jouer un rôle stabilisateur dans la région. En particulier, « la tolérance et l’harmonie entre les religions, caractéristiques des Albanais, constituent un modèle de coexistence dans la diversité », cette même diversité qui est le « destin » de l’Europe et qui constitue « la force et l’avantage » du continent. M. Nishani a dit sa conviction que l’avenir de la région dépend de la stabilisation dans le cadre de l’intégration européenne et euro-atlantique, seule solution aux problèmes hérités de l’histoire. Il a mis en avant le rôle positif que peuvent avoir, à cet égard, les nombreux Albanais disséminés dans les pays de la région.

Le président a ensuite affirmé que la République du Kosovo est « une réalité et un facteur de stabilité dans la région » et que « la question de son statut et de son intégrité territoriale est close ». Il a appelé le Conseil de l’Europe à s’engager plus avant au Kosovo pour y promouvoir la démocratie, les droits de l’Homme et l’État de droit et pour offrir une perspective européenne aux citoyens qui y vivent. Il a souligné qu’y « existent désormais partout des institutions multi-ethniques et démocratiques qui fonctionnent, ce qui montre que le pays a résolument tourné le dos à son douloureux passé » et a regardé positivement la reprise récente des discussions avec la Serbie, condition d’une normalisation de la situation.

M. Nishani a aussi relevé que la politique de coopération du Conseil de l’Europe en direction des pays voisins, notamment riverains de la Méditerranée, est indispensable : l’Organisation dispose de tous les mécanismes nécessaires pour contribuer à l’édification de sociétés démocratiques durables et l’Albanie apprécie tout particulièrement le rôle de la Commission de Venise, qui assiste le Maroc et la Tunisie en matière de droit constitutionnel afin de les aider à conformer leur législation aux normes internationales en matière de droits de l’Homme. Au-delà, l’Albanie croit fermement au dialogue entre les civilisations et continuera de s’engager activement pour abolir les différences en matière de droits de l’Homme. Pour autant, il n’est pas toujours facile de surmonter les différences culturelles pour parvenir à l’harmonie, comme le montre l’épisode de la vidéo qui a circulé sur Internet pour diffuser un film médiocre, irrespectueux envers l’islam et envers ce que les musulmans considèrent comme sacré.

Le président a enfin condamné fermement la violence commise contre le peuple de Syrie, « amoureux de la liberté », et les actes commis par un régime qui a perdu sa légitimité. L’Albanie considère que personne ne devrait rester les bras croisés face aux terribles événements qui se déroulent, jour après jour, depuis un an et demi maintenant, et qui ont entraîné la perte de milliers de vies humaines.

M. Bernard Fournier (Loire – UMP) a souhaité connaître le sentiment du ministre quant aux perspectives de retour d’un dialogue politique entre majorité et opposition :

« Monsieur le Président, l’Albanie a connu pendant de longs mois une crise politique nuisant au bon fonctionnement du pays au quotidien, mais aussi à son avenir à long terme, notamment dans la perspective d’une adhésion à l’Union européenne. C’est d’autant plus regrettable que l’Albanie connaît un développement spectaculaire, comme j’ai pu le constater encore très récemment.

Pouvez-vous nous donner des assurances quant à un retour progressif à la normalité, avec un échange régulier entre votre gouvernement et l’opposition ? À défaut, comment le Conseil de l’Europe pourrait-il vous aider à réinstaurer ce dialogue indispensable ? »

Le président Nishani a considéré que le débat – même vif − est une composante normale de la vie démocratique et a dit être optimiste quant à la perspective de voir les partis politiques représentés au Parlement s’accorder prochainement sur de nouvelles règles :

« Tout d’abord, la coopération avec le Conseil de l’Europe est très importante pour nous. Ensuite, je voudrais vous dire que la vie parlementaire se porte bien depuis maintenant plusieurs années. L’opposition est revenue au Parlement il y a trois ans et nous travaillons ensemble. Évidemment, la vie politique suppose le débat, et celui-ci est parfois vif. En tant que Président de la République, j’encourage à tout instant la coopération directe entre les partis. Je mentionnais à l’instant deux exemples de cette coopération, à savoir la nouvelle loi électorale et la levée de l’immunité.

Une commission travaille pour améliorer les règles de la vie parlementaire. J’attends beaucoup, sur ce sujet, des deux grands partis. Je pense qu’ils voteront ensemble la proposition qui leur sera faite. Bien évidemment, chez nous comme ailleurs, le débat politique existe, mais je peux vous donner l’assurance que, jour après jour, la classe politique en Albanie s’améliore. »

2. Communication du Comité des Ministres

M. Edmond Panariti, ministre des affaires étrangères de l’Albanie (depuis juillet 2012), président du Comité des Ministres, était invité à faire le point devant l’Assemblée parlementaire sur les actions de la présidence albanaise du Conseil de l’Europe.

Dans son allocution, le ministre est tout d’abord revenu sur certaines actions engagées dans le cadre de la « promotion des sociétés démocratiques durables », qui constituait la première priorité affichée de la présidence albanaise. Avec des manifestations comme la Rencontre 2012 du Conseil de l’Europe sur la dimension religieuse du dialogue interculturel, la présidence a voulu ouvrir ce qu’elle pense être un grand chantier du Conseil de l’Europe dans les années à venir : la lutte contre les tensions religieuses et interethniques et la promotion de la compréhension mutuelle, de l’ouverture aux cultures et croyances de l’ensemble des peuples d’Europe.

La présidence a également accordé une attention soutenue aux moyens de garantir l’efficacité de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales. En réponse aux sollicitations qui lui étaient adressées par l’Assemblée parlementaire, le Comité des Ministres a souligné l’importance du rôle des parlements nationaux dans une meilleure défense des droits de l’Homme au niveau national, ainsi que la forte implication du Comité dans la surveillance de la mise en œuvre des arrêts de la Cour.

Enfin, le ministre a dit sa conviction que l’action du Conseil de l’Europe trouvera sa pleine efficacité – par exemple en matière de promotion d’un droit électoral respectueux des principes fondamentaux des droits de l’Homme – dans le cadre de coopérations renforcées avec les autres organisations qui partagent les valeurs du Conseil de l’Europe : avec les Nations Unies comme l’OSCE ou l’Union européenne, les convergences sont suffisamment fortes pour que puissent apparaître des synergies.

M. Bernard Fournier (Loire – UMP) a souhaité savoir dans quelle mesure la question religieuse avait été abordée dans le dialogue entamé par le Comité des Ministres avec les pays méditerranéens non membres du Conseil de l’Europe :

« Parmi les priorités de la présidence albanaise figure la promotion de la dimension religieuse en tant qu’élément important du dialogue interculturel.

Vous avez souhaité également renforcer le dialogue et la coopération avec les pays d’Afrique du Nord et de la Méditerranée. Ces deux thèmes ne sont pas sans lien au moment d’une montée du radicalisme religieux et des menaces qui pèsent sur certaines communautés au Proche-Orient.

La question religieuse a-t-elle été abordée dans le dialogue entamé par le Comité des Ministres avec les pays de la Méditerranée ? »

Le ministre a rappelé que la tolérance religieuse et le dialogue sont au cœur des principes fondamentaux qui animent la politique du Conseil de l’Europe :

« Les libertés de pensée, de conscience et de religion sont des éléments essentiels pour pouvoir vivre ensemble dans un esprit de compréhension mutuelle et de tolérance. Ces droits sont garantis par l’article 9 de la Convention européenne des droits de l’Homme.

Dans sa déclaration sur la liberté religieuse du 20 janvier 2011, le Comité des Ministres a rappelé qu’il condamnait toute forme d’incitation à la haine et à la violence religieuse.

La présidence albanaise a voulu faire de la combinaison entre diversité et liberté l’une de ses priorités en s’appuyant sur sa tradition séculaire de tolérance religieuse. Elle a d’ailleurs organisé à Durrës, en Albanie, une rencontre sur la dimension religieuse du dialogue interculturel, les 3 et 4 septembre derniers.

Vous trouverez dans le rapport des personnalités éminentes divers éléments qui seront les thèmes de la conférence que l’Albanie organisera en novembre prochain sur le thème « Unis dans la diversité ». Et la première session de cette conférence sera consacrée à ce dialogue interreligieux. »

Pour sa part, M. Jean-Pierre Michel (Haute-Saône – SOC) a interrogé le ministre sur les initiatives de la présidence albanaise pour améliorer l’efficacité de la Cour européenne des droits de l’Homme :

« Monsieur le Président du Comité des Ministres, le second souffle qu’il convient de donner à la Cour européenne des droits de l’Homme est-il une priorité de votre présidence ? Les États membres ne pourraient-ils pas être incités à prévoir des voies de recours plus accessibles à leurs ressortissants ainsi qu’à mettre en place des mécanismes de contrôle systématiques ? »

Le ministre lui a répondu :

« Maintenir l’efficacité à long terme de la Cour européenne des droits de l’Homme a assurément constitué une priorité de notre mandat.

Suite à la déclaration de la Conférence de Brighton, en avril, des projets d’amendements sont en préparation. Ils seront transmis en temps utile à l’Assemblée parlementaire pour avis.

L’application de la Convention européenne des droits de l’Homme au niveau national pour assurer la pérennité du mécanisme de supervision de la Convention est essentielle. Cela fera d’ailleurs l’objet d’un débat à la Conférence de Tirana, qui se tiendra dans quelques jours et qui réunira des représentants des gouvernements ainsi que des cours européennes. Un échange de vues aura lieu le 24 octobre entre les délégués des Ministres, avec le président de la Cour. »

ANNEXES

Annexe 1

Résolution 1900 (2012) – La définition de prisonnier politique 
1

1. L’Assemblée parlementaire rappelle que la notion de prisonniers politiques a été élaborée en 2001 au sein du Conseil de l’Europe par les experts indépendants du Secrétaire Général, qui avaient pour mission d’évaluer les cas de prisonniers politiques présumés en Arménie et en Azerbaïdjan, dans le cadre de l’adhésion de ces deux États à l’Organisation.

2. L’Assemblée parlementaire note que les critères retenus par les experts susmentionnés s’inspiraient, entre autres, des circonstances spécifiques de la guerre civile de 1989 en Namibie. Ils ont été appliqués à des cas concernant deux pays lors de leur adhésion au Conseil de l’Europe et n’ont pas, à ce jour, fait l’objet d’un débat approfondi ni d’une approbation spécifique de la part de l’Assemblée parlementaire.

3. L’Assemblée réaffirme son adhésion à ces critères, résumés comme suit :

« Une personne privée de sa liberté individuelle doit être considérée comme un “prisonnier politique” :

a. si la détention a été imposée en violation de l’une des garanties fondamentales énoncées dans la Convention européenne des Droits de l’Homme (CEDH) et ses Protocoles, en particulier la liberté de pensée, de conscience et de religion, la liberté d’expression et d’information et la liberté de réunion et d’association ;

b. si la détention a été imposée pour des raisons purement politiques sans rapport avec une infraction quelle qu’elle soit ;

c. si, pour des raisons politiques, la durée de la détention ou ses conditions sont manifestement disproportionnées par rapport à l’infraction dont la personne a été reconnue coupable ou qu’elle est présumée avoir commise ;

d. si, pour des raisons politiques, la personne est détenue dans des conditions créant une discrimination par rapport à d’autres personnes ; ou,

e. si la détention est l’aboutissement d’une procédure qui était manifestement entachée d’irrégularités et que cela semble être lié aux motivations politiques des autorités. » (SG/Inf(2001)34, paragraphe 10)

4. Les personnes privées de liberté pour des crimes terroristes ne seront pas considérées comme des prisonniers politiques si elles ont été poursuivies et condamnées pour de tels crimes en accord avec les législations nationales et la Convention européenne des droits de l’homme (STE n° 5).

5. L’Assemblée invite les autorités compétentes de l’ensemble des États membres du Conseil de l’Europe à apprécier une nouvelle fois le cas de tout prisonnier politique présumé en appliquant les critères susmentionnés et à libérer ou rejuger ces prisonniers, selon les cas.

Annexe 2

Résolution 1899 (2012) – Les activités de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) en 2011-2012 
2

1. L’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, élargie aux délégations des parlements nationaux des États membres de l’Organisation pour la coopération économique et le développement (OCDE) non membres du Conseil de l’Europe et à une délégation du Parlement européen, examine, à nouveau, les activités de l’OCDE. L’Assemblée élargie a passé en revue les activités de l’OCDE en 2011-2012 à la lumière des rapports de l’organisation et du rapport présenté par la commission des questions politiques et de la démocratie.

2. A la suite de la réforme des structures et méthodes de travail de l’Assemblée qui est entrée en vigueur en janvier 2012, la commission des questions politiques et de la démocratie a désormais la responsabilité de présenter ce rapport. L’Assemblée a souhaité ainsi donner une orientation plus politique au débat et l’Assemblée élargie juge également important d’aborder l’évaluation du travail de l’OCDE non plus seulement sous l’angle économique, comme elle le faisait par le passé, mais aussi sous l’angle politique. A cet égard, le présent rapport se concentre sur les réponses à la crise de la zone euro et les activités de soutien à la région Proche et Moyen-Orient et Afrique du Nord (MENA).

3. L’Assemblée élargie note la toile de fond de l’économie mondiale sur laquelle s’inscrivent les activités de l’OCDE en 2011-2012. L’économie mondiale doit faire face à des défis majeurs : pendant que la croissance stagne ou devient négative, le risque d’une catastrophe financière augmente. La crise de la dette souveraine et les mesures qui ont été prises pour la résoudre ont un sérieux impact sur les pays périphériques de la zone euro, tandis que partout à travers le monde les économies semblent s’affaiblir.

4. Le Secrétaire Général de l’OCDE a mis l’accent sur quatre secteurs d’action à prendre en compte par les gouvernements des pays membres et partenaires pour répondre aux défis connexes liés à une reprise hésitante : « penser structurel », « penser social », « penser vert » et « penser institutionnel ». De nombreux pays se trouvent confrontés à un taux de chômage élevé, à des inégalités grandissantes (« penser social »), à des déficits budgétaires et une dette publique élevés. De nouvelles sources de croissance et des mesures propres à renforcer la compétitivité sont à identifier, notamment en matière d’innovation, de croissance verte, d’actifs fondés sur le savoir et, enfin, de compétences, (« penser structurel » et « penser vert ») afin de remettre les économies de l’OCDE sur la voie d’une croissance solide et inclusive. Restaurer la confiance des ménages et des entreprises dans les marchés, les gouvernements et les institutions (« penser institutionnel »), répondre aux défis à long terme liés à une croissance démographique rapide dans les économies émergentes et en développement, s’atteler à des problèmes tels que le vieillissement de la population dans de nombreux pays développés, la pénurie des ressources, le changement climatique et le développement mondial, autant de chantiers qu’il faut également entreprendre et auxquels l’OCDE contribue par ses conseils et ses recommandations. C’est dans cette perspective que la réunion ministérielle de l’OCDE « Tous à bord – Des politiques en faveur d’une croissance inclusive et de l’emploi » a lancé l’initiative « De nouvelles approches face aux défis économiques », qui entend tirer des enseignements de la crise, examiner les arbitrages entre différents objectifs d’action et, s’il y a lieu, revoir les grilles d’analyse afin d’élaborer un programme d’action stratégique pour une croissance inclusive.

5. L’une des conséquences les plus importantes de cette crise est la forte augmentation du chômage, en particulier chez les jeunes. A cet égard, l’Assemblée élargie souhaite rappeler aux gouvernements concernés que, d’après les travaux récents de l’OCDE, en période de sous-emploi des capacités, il est important que les politiques appliquées favorisent la création d’emplois, évitent le chômage de longue durée et aident les plus vulnérables, en particulier les jeunes, avec des programmes et des investissements ciblés dans l’éducation et la formation. Des politiques actives du marché du travail et des réformes fiscales visant à réduire les prélèvements sur le travail et à les déplacer vers la consommation ou la protection de l’environnement peuvent avoir des effets relativement rapides sur l’emploi et contribuer à soutenir l’investissement.

6. Cependant, la montée des inégalités est bien antérieure à la crise financière et c’est le ralentissement de la croissance qui en a renforcé la résonance politique. D’après des travaux récents de l’OCDE, l’augmentation des inégalités tient tout d’abord à un élargissement considérable des revenus salariaux. Si l’ouverture des marchés et le progrès technologique ont permis d’accroître la productivité et la croissance, les travailleurs les moins qualifiés ont été les moins à même de saisir les opportunités ainsi créées. Depuis le milieu des années 90, les systèmes fiscaux et sociaux sont devenus moins redistributifs. L’OCDE met l’accent sur l’amélioration des qualifications de la main d’œuvre pour lutter contre les inégalités. En conséquence, elle a proposé à ses pays membres une Stratégie sur les compétences lors de la réunion ministérielle de mai 2012 afin de garantir que les investissements nécessaires soient soutenus par le développement des qualifications voulues. L’Assemblée élargie estime qu’il convient de réexaminer les systèmes fiscaux nationaux, de mieux cibler les programmes de soutien en faveur des groupes de population les plus vulnérables et de poursuivre les réformes visant à réduire la segmentation du marché du travail et à offrir d’avantage d’emplois de plus grande qualité.

7. L’Assemblée élargie est préoccupée par la persistance de l’évasion fiscale et de l’évitement fiscal, qui soustraient des recettes essentielles aux budgets de l’État. Rappelant la Résolution 1881 (2012) et le rapport de l’Assemblée sur le thème « Promouvoir une politique appropriée en matière de paradis fiscaux », l’Assemblée élargie invite instamment l’OCDE à intensifier ses travaux dans ces domaines et à rechercher des synergies avec les partenaires internationaux concernés, notamment l’Union européenne et le Fonds monétaire international, afin d’aider les États à mettre fin aux pratiques fiscales dommageables, à réduire l’écart entre l’imposition des revenus du capital et des revenus du travail et à améliorer la régulation du secteur financier de manière à mieux gérer les flux internationaux de capitaux.

8. De même, l’Assemblée élargie estime opportun de s’associer à l’appel lancé récemment par l’Organisation internationale du travail à des mesures pour face à la crise de l’emploi des jeunes, aggravée par la crise financière et économique mondiale, qui met en péril la prospérité et la cohésion de nos sociétés. A cet égard, les mesures et les politiques en faveur de l’emploi des jeunes doivent tenir compte du fait que, même si l’éducation et la formation sont essentielles pour permettre aux jeunes de trouver leur place sur le marché du travail, de meilleures qualifications ne se traduisent pas automatiquement par de meilleurs résultats sur le marché du travail ni par un plus grand nombre d’emplois. C’est pourquoi il importe de mettre en œuvre des programmes qui soient spécialement destinés à favoriser l’accès des jeunes à un emploi décent et productif et à promouvoir l’entreprenariat des jeunes, en vue de contribuer à relancer la croissance de manière durable et équitable.

9. Compte tenu des tendances démographiques actuelles et des répercussions de la crise financière, notamment en Europe, il est urgent de renforcer la viabilité des régimes de pension et d’ajuster le niveau des retraites dans de nombreux pays, surtout à la suite des mesures d’austérité qui ont aggravé les inégalités sociales. Rappelant la Résolution 1882 (2012) et la Recommandation 2000 (2012) sur des pensions de retraite décentes pour tous, l’Assemblée élargie appelle l’OCDE et le Conseil de l’Europe à s’employer conjointement à promouvoir les bonnes pratiques dans ce domaine et à élaborer des outils concrets (tels que des lignes directrices) pour guider les États membres dans leurs réformes des régimes de retraite en cours ou à venir.

10. L’Assemblée élargie note avec intérêt les prévisions de l’OCDE d’une relance de l’activité pour 2013, tant au niveau mondial qu’européen. Pour que ces prévisions se réalisent, des décisions au niveau politique sont impératives : pour commencer, des mesures d’assainissement plus courageuses que celles qui ont été prises jusqu’à maintenant doivent être prises à l’intérieur de la zone euro, dans un horizon à moyen terme crédible, ainsi que des réformes structurelles favorisant la croissance. A défaut, l’Europe court le risque de plonger dans une spirale de faillites bancaires, de défauts de paiement et une dépression
– calamité financière qui pourrait mettre en cause le projet européen tout entier.

11. Les causes de la crise des dettes souveraines sont multiples : la faiblesse des taux d’intérêt et la facilité d’accès au crédit ont conduit les ménages, les entreprises privées, le secteur bancaire et les gouvernements à s’endetter excessivement ; la faiblesse de la réglementation des marchés financiers a conduit les banques à négliger de maîtriser leurs risques et à gonfler excessivement leurs engagements au cours des 20 dernières années. La situation d’endettement des États et du secteur bancaire est devenue intenable, créant une crise de confiance et, dans certains pays, une crise de liquidités. A l’été 2011, les marchés financiers ont commencé à douter de la capacité de certains pays européens à assurer leurs besoins de financement, notamment parce qu’il apparaissait de plus en plus probable qu’ils auraient à renflouer leur secteur bancaire privé.

12. A cet égard, l’Assemblée élargie note que la crise actuelle résulte également du fait que des mesures juridiques ont été prises trop tard pour empêcher la prise de risque excessive des institutions financières. Par conséquent, elle souligne l’importance de garantir l’efficacité du cadre réglementaire national et international, en particulier le mécanisme d’alerte précoce pour les risques financiers, afin de rendre les opérations des institutions financières équitables et raisonnables. De plus, l’Assemblée élargie approuve les efforts de l’OCDE pour présenter l’orientation politique de la réglementation financière grâce à son initiative « De nouvelles approches face aux défis économiques » et elle encourage l’OCDE à continuer de fournir l’expertise nécessaire à ses pays membres.

13. L’Assemblée élargie accueille avec satisfaction les mesures adoptées par les membres de la zone euro pour faire face à cette situation, telles que les nouveaux mécanismes de soutien financier (le Mécanisme européen de stabilisation financière et la Facilité européenne de stabilité financière), créés en mai 2010, et le Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance dans l’Union économique et monétaire, qui devrait entrer en vigueur en janvier 2013. Ce nouveau traité, qui vise à renforcer la coordination et la surveillance des politiques au sein de la zone euro, donne à la Commission européenne et au Conseil le droit d’examiner les projets de budget nationaux et, s’il y a lieu, de préconiser des modifications, et rend obligatoire la mise en œuvre des recommandations de la Commission dans le cadre de l’application du Pacte de stabilité et de croissance.

14. De plus, aux difficultés économiques, sociales et au niveau de l’emploi s’ajoutent désormais les doutes sur l’acceptabilité par les opinions publiques du processus d’ajustement. Dans le rapport économique sur la zone euro qu’elle a publié en mai 2012, l’OCDE recommande un ensemble de mesures en ligne avec les orientations récentes prises au niveau européen et permettant de faire face à la crise des dettes souveraines, combiné à des mesures ciblées d’investissement dans la formation et l’éducation, et dans le soutien pour les personnes les plus vulnérables. L’Assemblée élargie recommande instamment aux gouvernements concernés de veiller à ce que le poids de ce processus soit socialement équilibré et distribué équitablement entre toutes les strates de la population, de manière à réduire les inégalités. L’acceptabilité des opinions publiques en dépend.

15. L’Assemblée élargie salue la contribution précieuse de l’OCDE, par sa Stratégie pour une croissance verte, au consensus et aux accords atteints lors de la Conférence Rio+20, visant à assurer un développement durable. L’OCDE y voit une approche pratique et souple permettant une évaluation conjointe des politiques économiques et environnementales dans le sens d’un redressement économique fondé sur l’utilisation durable des ressources naturelles, les gains d’efficacité dans l’utilisation de l’énergie et la valorisation des services écosystémiques, compatible avec la croissance économique, la création d’emplois et l’éradication de la pauvreté. Par ailleurs, l’Assemblée élargie rappelle que les initiatives et les efforts de ce type devraient être mis à profit par les États pour honorer leurs obligations internationales dans le domaine de l’environnement et prendre de nouveaux engagements en la matière.

16. L’Assemblée rappelle ses Recommandation 2002 (2012) et Résolution 1885 (2012) « La jeune génération sacrifiée : répercussions sociales, économiques et politiques de la crise financière », sa Résolution 1884 (2012) « Mesures d’austérité – un danger pour la démocratie et les droits sociaux » et sa Résolution 1886 (2012) sur l’impact de la crise économique sur les collectivités locales et régionales en Europe. Tous ces textes, adoptés pendant la partie de session de juin 2012, vont dans le sens d’une réorientation des programmes de lutte contre la crise dans le but de favoriser la relance économique tout en protégeant les groupes les plus défavorisés de la population, notamment les jeunes. L’Assemblée se félicite du travail novateur accompli par l’OCDE dans ce domaine et l’encourage à continuer de rechercher des solutions politiques concrètes.

17. En juin 2012, l’Assemblée a aussi adopté la Résolution 1888 (2012) sur la crise de la démocratie et le rôle de l’État dans l’Europe d’aujourd’hui, qui analyse les relations entre la gouvernance et la crise ainsi que les dangers pour la démocratie liés à certaines des mesures prises pour faire face à la crise. Ses conclusions, où elle souligne que l’Europe a besoin d’États solides reposant sur des démocraties fortes, à même d’assurer une représentation adéquate et une participation accrue de leurs citoyens aux niveaux local, régional, national et transnational, pourraient constituer une précieuse contribution au débat démocratique dans d’autres pays membres et non membres de l’OCDE.

18. Toujours pendant sa partie de session de juin 2012, l’Assemblée a aussi adopté la Résolution 1892 (2012) sur la crise de la transition démocratique en Égypte et la Résolution 1893 (2012) sur la transition politique en Tunisie, qui font suite à ses travaux sur les développements politiques récents dans ces pays. Elle rappelle une fois de plus sa Résolution 1831 (2011) sur la coopération entre le Conseil de l’Europe et les démocraties émergentes dans le monde arabe, et confirme qu’elle est prête à partager son expérience en matière de transition démocratique pour faciliter leur transition politique.

19. En conséquence, l’Assemblée élargie salue la décision de l’OCDE de renforcer son programme de coopération avec les pays arabes à la suite des développements politiques récents. Elle note que l’approche de l’OCDE de faire bénéficier les pays arabes de son expertise dans la réforme, de mobiliser l’expertise des États membres et de créer les bases pour une coopération régionale est très proche de celle préconisée par l’Assemblée parlementaire dans sa Résolution 1831 (2011) . Elle invite l’OCDE à coordonner divers projets pertinents et à y contribuer de manière volontariste.

20. Il est vital, pour stimuler la croissance économique mondiale, que l’OCDE approfondisse le dialogue non seulement avec ses États membres, mais aussi avec les pays non membres qui occupent une place importante dans l’économie mondiale. A cet égard, l’Assemblée élargie espère que le processus d’adhésion de la Fédération de Russie à l’OCDE en tant que membre à part entière va progresser et inclure des éléments démocratiques pertinents. Elle encourage l’OCDE à resserrer ses relations avec ses principaux partenaires, à accroître le nombre de ses membres et à continuer de faire des propositions à ses principaux partenaires en vue de promouvoir une croissance économique saine.

21. Enfin, l’Assemblée élargie se félicite du rôle moteur joué par l’OCDE dans diverses initiatives stratégiques portant notamment sur la création d’emplois, l’amélioration de la politique de développement, la promotion du libre-échange et d’autres domaines d’action évoqués dans les précédents paragraphes. L’Assemblée élargie invite également l’OCDE à fournir aux participants au débat élargi, d’ici au prochain débat ou pendant celui-ci, des informations concernant ses activités stratégiques relatives aux questions traitées dans la présente résolution.

22. En dernier lieu, l’Assemblée élargie décide de modifier le Règlement relatif aux débats élargis de l’Assemblée parlementaire sur les activités de l’OCDE (voir annexe), pour tenir compte de la réforme des structures de l’Assemblée parlementaire et de la nouvelle répartition des tâches entre ses commissions.

Annexe : Modification du Règlement relatif aux débats élargis de l’Assemblée parlementaire sur les activités de l’OCDE

Annexe 3

Résolution 1905 (2012) – Un retour à la justice sociale grâce à une taxe sur les transactions financières 
3

1. La persistance de la crise financière et économique mondiale a eu des conséquences désastreuses pour les finances publiques et les systèmes de sécurité sociale dans de nombreux États membres du Conseil de l’Europe. Elle a également révélé de graves dysfonctionnements des marchés financiers, notamment une propension à une prise de risques excessive et à la spéculation, une incapacité à assurer la stabilité financière à long terme et un financement suffisant de l’économie réelle, ainsi que des distorsions des conditions de concurrence équitable en raison de la sous-imposition de nombreux services et instruments financiers.

2. Les responsables politiques doivent veiller à ce que des enseignements soient tirés de la crise actuelle et s’employer à renforcer des lignes de défense afin d’empêcher que de telles crises ne se reproduisent à l’avenir. L’Assemblée parlementaire estime que tous les acteurs du monde financier devraient agir de manière plus responsable envers la société et l’économie dans lesquelles ils opèrent, dans l’intérêt général et au service du développement durable. Elle accueille donc favorablement les propositions de la Commission européenne et du Parlement européen concernant la mise en place d’une taxe sur les transactions financières à l’échelle la plus large possible.

3. L’Assemblée note que dans nombre de pays – en Europe et dans le monde –, des taxes sur les transactions financières sont déjà en vigueur ou sur le point d’être introduites. Plusieurs taxes de ce type, applicables à certains services et produits financiers, génèrent des recettes fiscales considérables. Cela prouve qu’il est réaliste et pertinent d’aller plus loin en établissant une taxe plus générale. Si les expériences nationales permettent de tester et d’améliorer différentes formes de taxation des transactions financières, une approche plus harmonisée, plus coordonnée et plus globale est souhaitable si l’on veut obtenir un résultat optimal.

4. L’Assemblée attire l’attention des États membres du Conseil de l’Europe sur la portée politique, les objectifs de développement à long terme et les motivations sociales du lancement d’une taxe européenne sur les transactions financières. Elle soutient les initiatives visant à faire de cette taxe un outil de renforcement de la gouvernance économique, favorisant le développement d’une société plus cohésive où chaque contribuable verserait sa juste part d’impôts pour alimenter le budget de l’État.

5. En outre, l’Assemblée est convaincue que les dernières propositions concernant la mise en place d’une taxe européenne sur les transactions financières pourraient fortement contribuer à remédier au manque à gagner fiscal et à lutter contre l’évasion fiscale dans le secteur financier, à briser le cercle vicieux d’une spéculation financière croissante qui se renforce d’elle-même, à améliorer les finances publiques et à rétablir la justice sociale grâce à une approche innovante envers la finance et la solidarité. Elle note que, d’après les sondages d’opinion, une nette majorité d’Européens sont favorables à l’idée d’une taxe européenne sur les transactions financières.

6. L’Assemblée se félicite en particulier de l’accord conclu en juin 2012 entre 10 pays qui sont convenus de travailler ensemble dans le cadre du mécanisme de « coopération renforcée » de l’Union européenne en vue de l’établissement d’une taxe sur les transactions financières. Elle demande instamment aux autres États membres de l’Union de se joindre à ce mécanisme dans les meilleurs délais.

7. L’Assemblée est particulièrement préoccupée par l’expansion des produits financiers dérivés, des transactions hors bourse et des opérations à haute fréquence qui leur sont liées sur les marchés financiers modernes. Dans la mesure où ces dispositifs financiers échappent largement à la réglementation et à la taxation, l’Assemblée insiste sur la nécessité de la taxe européenne sur les transactions financières proposée – accompagnée d’autres mesures complémentaires de régulation et de contrôle – pour couvrir ces instruments.

8. Compte tenu des considérations ci-dessus, l’Assemblée invite le Conseil et la Commission de l’Union européenne :

8.1. à tout mettre en œuvre pour que la taxe sur les transactions financières couvre de façon exhaustive toute la palette des services, des produits et des acteurs financiers, en particulier les instruments dérivés et les transactions hors bourse ;

8.2. à s’employer à élargir la couverture géographique de la taxe sur les transactions financières et à empêcher la délocalisation des transactions vers des pays qui n’appliquent pas une telle taxe ;

8.3. à établir des partenariats avec des États non membres et les organisations internationales pertinentes, notamment l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et le Fonds monétaire international (FMI), en vue de trouver un terrain d’entente concernant la mise en place d’une taxe mondiale sur les transactions financières ;

8.4. à promouvoir le recours à la taxe sur les transactions financières comme un outil venant en complément d’autres mesures de régulation concernant les marchés financiers ;

8.5. à envisager de prendre des dispositions afin qu’une part substantielle des recettes générées par la taxe sur les transactions financières soit consacrée à remédier aux dommages causés par la crise financière et économique, notamment en finançant à titre prioritaire des mesures en faveur du développement durable, de la création d’emplois, des besoins sociaux et des actions de solidarité internationale, spécialement l’aide au développement ;

8.6. à mettre en place des mécanismes de suivi de l’application et d’évaluation de l’efficacité de la taxe ;

8.7. à mieux informer l’opinion publique des modalités de la taxe proposée sur les transactions financières, des objectifs stratégiques poursuivis et des progrès accomplis en vue de son établissement.

9. L’Assemblée invite les États membres du Conseil de l’Europe à prendre un engagement de principe concernant l’introduction d’une taxe sur les transactions financières et appelle les pays qui ne sont pas membres de l’Union européenne et les États observateurs du Conseil de l’Europe, ainsi que ceux ayant le statut de partenaire pour la démocratie auprès de l’Assemblée, à examiner des modalités d’adoption d’une telle taxe sur la base des propositions de la Commission européenne et du Parlement européen.

10. Enfin, en vue d’optimiser les efforts déployés en Europe en faveur de la mise en place d’une taxation sur tout l’éventail des transactions financières, l’Assemblée demande aux parlements nationaux de soutenir les activités correspondantes de l’Union européenne, de coopérer avec les organisations internationales compétentes et d’agir au niveau national dans cette optique.

Annexe 4

Résolution 1906 (2012) – La consolidation et l’ouverture internationale de l’Espace européen de l’enseignement supérieur 
4

1. L’Assemblée parlementaire réaffirme son soutien au Processus de Bologne et à l’Espace européen de l’enseignement supérieur (EEES) comme garant d’un développement social durable fondé sur la connaissance et la recherche. Elle se félicite du rôle important que joue le Conseil de l’Europe dans ce processus, ainsi que des efforts permanents déployés par les États membres pour établir en Europe un système efficace d’enseignement supérieur à la hauteur des défis du XXIe siècle.

2. Toutefois, l’Assemblée estime que de nouvelles actions s’imposent pour renforcer l’EEES et pour le rendre plus ouvert et attrayant. L’Europe a beaucoup à offrir mais aussi beaucoup à apprendre des autres régions du monde ; il est nécessaire de prendre dûment en considération la perspective mondiale et son influence sur l’enseignement supérieur en Europe.

3. L’enseignement supérieur doit armer les étudiants de compétences leur permettant de trouver un emploi durable, de devenir des citoyens actifs dans des sociétés démocratiques et de pouvoir relever les défis auxquels ils seront confrontés dans la vie. L’Europe doit demeurer un lieu où talent et savoir sont préservés, développés et valorisés, et où l’excellence de l’enseignement supérieur et de la recherche attire les étudiants d’origines et de milieux multiples. Enseignants et chercheurs doivent être mieux préparés à une plus forte coopération internationale.

4. L’efficacité de la coopération internationale dépend de la mobilité universitaire. Pourtant, bon nombre de gouvernements ont pour politique de réduire l’immigration et semblent peu enclins à faire des exceptions pour la mobilité universitaire. Il est nécessaire d’harmoniser les objectifs déclarés par l’EEES et par les politiques nationales d’immigration. Cette question est d’autant plus importante que près de la moitié des États membres de l’EEES ne font pas partie de l’Espace Schengen.

5. Il faut encourager une plus forte coopération bilatérale et multilatérale entre les pays participant à l’EEES et les autres, tant à l’échelon politique au sens large qu’à l’échelon des établissements individuels.

6. L’Assemblée réaffirme son soutien aux principes qui déterminent l’appartenance à l’EEES – tels l’engagement envers la liberté académique, l’autonomie des universités et la participation des étudiants – et elle appelle les pouvoirs publics des pays souhaitant renforcer la coopération avec des membres de l’EEES, ou souhaitant en devenir membre, à garantir le respect des valeurs fondamentales à travers leurs politiques et leurs pratiques, et à résister à toute tentative pour limiter ou contrôler la liberté académique par l’ingérence du gouvernement.

7. La réussite de la mise en œuvre et le bon fonctionnement de l’EEES requièrent la participation active et le soutien de tous les acteurs impliqués dans le Processus de Bologne. Les gouvernements, les établissements d’enseignement supérieur et les associations d’étudiants sont représentés dans le Processus, tandis que les parlements nationaux ne le sont pas encore. Ces derniers doivent être pleinement impliqués dans le Processus. En outre, l’Assemblée parlementaire et le Parlement européen doivent être représentés aux conférences ministérielles du Processus de Bologne.

8. Les parlements nationaux doivent apporter tout le soutien politique nécessaire à la mise en œuvre de l’EEES. En la matière, l’élaboration des politiques doit s’efforcer d’élargir l’aire géographique des pays partageant les objectifs du Processus de Bologne, et de rendre l’EEES plus ouvert et intéressant pour les initiatives de coopération mondiale. En outre, pour améliorer la mobilité universitaire, une plus forte implication parlementaire devrait contribuer à attirer un soutien des ministres de l’Intérieur et des Affaires étrangères chargés de définir les politiques d’immigration, tant au niveau national qu’européen.

9. En conséquence, l’Assemblée invite les États membres du Conseil de l’Europe à mener les actions suivantes :

9.1. veiller à ce que le Conseil de l’Europe demeure un partenaire actif du Processus de Bologne et à ce qu’il contribue, par le biais de la Dimension extérieure du Processus, à la coopération avec d’autres pays ;

9.2. continuer à soutenir le développement de l’EEES et assurer la mise en œuvre cohérente des objectifs de Bologne dans l’ensemble de l’EEES et, en particulier :

9.2.1. mener les réformes structurelles encore nécessaires – notamment, examen de la législation et des règlements nationaux, mise au point des cadres de qualifications – en encourageant la participation de toutes les parties prenantes ;

9.2.2. renforcer la coordination et fournir une assistance mutuelle afin de réduire les disparités dans le rythme de mise en œuvre ;

9.2.3. envisager la possibilité de fournir des bourses ou des contributions forfaitaires pour compléter l’investissement des étudiants qui, sinon, n’auraient pas les moyens d’accéder à l’enseignement supérieur, tout en assurant un contrôle rigoureux de la distribution des bourses ;

9.3. favoriser la mobilité et les échanges des étudiants, enseignants, chercheurs et responsables universitaires et, à cet effet :

9.3.1. prendre des mesures pour réduire encore les obstacles administratifs à la mobilité internationale – par exemple, ceux qui empêchent l’obtention de visas, d’une couverture sociale et de permis de séjour / travail pour le personnel ;

9.3.2. assurer, au terme d’un programme de mobilité, une réelle reconnaissance des qualifications acquises à l’étranger ;

9.3.3. assurer un financement adéquat et l’accès à ce financement par le biais de programmes de mobilité à l’échelon européen ;

9.4. mettre en œuvre le Système européen de transfert et d’accumulation de crédits (ECTS), ainsi que prendre des mesures pour améliorer la compatibilité et la comparabilité des diplômes et, en particulier :

9.4.1. harmoniser le contenu des crédits pris en compte dans l’ECTS, notamment par une évaluation claire des crédits de ceux-ci en termes de charge de travail de l’étudiant et par une mise en correspondance directe avec les résultats de l’apprentissage ;

9.4.2. mettre en œuvre le dispositif Supplément au diplôme Europass ;

9.5. encourager la mise en œuvre effective des principes et des dispositions de la Convention du Conseil de l’Europe et de l’UNESCO sur la reconnaissance des qualifications relatives à l’enseignement supérieur dans la région européenne (STE n° 165) et intensifier la coopération avec les pays candidats à l’adhésion ;

9.6. développer la communication et diffuser toutes les informations pertinentes sur l’EEES, tant en interne qu’en externe ;

9.7. renforcer la coopération et le partenariat avec les pays n’appartenant pas à l’EEES, en incitant à l’échange d’idées neuves et au partage des bonnes pratiques.

Annexe 4 bis

Recommandation 2005 (2012) – La consolidation et l’ouverture internationale de l’Espace européen de l’enseignement supérieur 
5

1. L’Assemblée parlementaire, se référant à sa Résolution 1906 (2012) sur la consolidation et l’ouverture internationale de l’Espace européen de l’enseignement supérieur, salue les initiatives prises par le Comité des Ministres pour renforcer le dialogue entre les pouvoirs publics, le monde universitaire, les représentants étudiants et la société civile en vue de mieux définir la contribution du Conseil de l’Europe au Processus de Bologne. L’Assemblée salue également la représentation de l’Organisation dans le Groupe de suivi du Processus de Bologne, ainsi que l’assistance apportée pour élaborer des cadres de qualifications nationaux dans plusieurs États membres du Conseil de l’Europe.

2. L’Assemblée est convaincue que le rôle du Conseil de l’Europe dans le secteur de l’enseignement supérieur est crucial et irremplaçable. Malgré le contexte budgétaire actuel difficile et les contraintes qu’il impose, le Conseil de l’Europe doit continuer de soutenir les réformes de l’enseignement supérieur qui visent à satisfaire aux objectifs du Processus de Bologne et à renforcer l’Espace européen de l’enseignement supérieur (EEES).

3. Se référant à sa Résolution 1907 (2012) sur la gouvernance des établissements d’enseignement supérieur dans l’Espace européen de l’enseignement supérieur, l’Assemblée souligne qu’il est important de préserver et de renforcer l’indépendance des institutions d’enseignement supérieur et la liberté académique en tant que principes fondamentaux de l’EEES.

4. En conséquence, l’Assemblée invite le Comité des Ministres :

4.1. à témoigner de l’importance stratégique de l’enseignement supérieur à travers ses décisions sur le programme d’activités du Conseil de l’Europe, et à continuer d’assurer la participation active du Conseil de l’Europe à la mise en œuvre de l’EEES et au Processus de Bologne ;

4.2. à demander à son comité directeur compétent :

4.2.1. d’étudier la relation et l’interaction entre les cadres de qualifications, la reconnaissance des qualifications et l’assurance de la qualité, et d’identifier les mesures nécessaires pour assurer la cohérence dans la mise en œuvre des instruments de l’EEES ;

4.2.2. d’étudier les possibilités de concevoir un dispositif paneuropéen permettant de faciliter la reconnaissance des qualifications - tel qu’un passeport européen de qualifications ;

4.2.3. d’envisager des moyens de favoriser l’échange de bonnes pratiques entre pays membres et non-membres de l’EEES en matière de réforme de l’enseignement supérieur ;

4.3. à renforcer la coopération avec l’Union européenne dans ce domaine, afin d’apporter un soutien ciblé à la consolidation de l’EEES dans les pays membres ayant adhéré récemment, ainsi qu’à la réalisation des objectifs du Processus de Bologne, notamment en termes de mobilité académique.

Annexe 5

Résolution 1907 (2012) – La gouvernance des établissements d’enseignement supérieur dans l’Espace européen de l’enseignement supérieur 
6

1. L’Assemblée parlementaire réaffirme l’importance fondamentale de l’enseignement supérieur pour chaque individu et toute la société. Le droit à l’éducation, garanti par l’article 2 du premier Protocole à la Convention européenne des droits de l’homme (STE n° 9 et STE n° 5), englobe le droit d’accès à l’enseignement supérieur, qui est également protégé par l’article 10.1 de la Charte sociale européenne révisée (STE n° 163).

2. Les personnes avec un niveau d’éducation élevé sont un facteur clé pour le bien-être individuel et collectif ainsi que pour la stabilité économique, sociale et démocratique. Il est, par conséquent, d’une importance stratégique pour les États membres de chercher à mettre en place progressivement un enseignement supérieur gratuit et accessible à tous sur la base des capacités de chacun, conformément à l’article 13 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.

3. L’autonomie des établissements de l’enseignement supérieur, la liberté académique et la liberté de la recherche scientifique et des arts sont des principes fondamentaux du fonctionnement des établissements de l’enseignement supérieur tout comme des sociétés démocratiques et pluralistes. Ces principes vont de pair avec la responsabilité publique en matière d’enseignement supérieur et de recherche telle qu’elle est exprimée dans la Recommandation CM/Rec(2007)6 du Comité des Ministres. A cet égard, l’Assemblée se félicite des travaux récents du Comité des Ministres sur la responsabilité des pouvoirs publics concernant la liberté académique et l’autonomie institutionnelle.

4. Du fait de l’importance cruciale des établissements de l’enseignement supérieur et de la dépendance des individus et de la société vis-à-vis de la recherche universitaire et de la formation des experts, les décisions stratégiques de base concernant le développement des établissements de l’enseignement supérieur devraient être prises sur une base quadripartite, entre les représentants du milieu universitaire (dont les étudiants), du marché du travail (employeurs et syndicats), des organisations de la société civile et du gouvernement (pouvoirs exécutif et législatif).

5. La liberté académique et l’autonomie des établissements de l’enseignement supérieur exigent que ceux-ci puissent déterminer, dans le cadre des politiques nationales de l’enseignement supérieur et du droit interne ainsi que dans le respect des droits de l’homme, leurs programmes d’étude et leurs diplômes de troisième cycle, les critères d’admission des étudiants, la recherche, l’organisation administrative, le financement et le recrutement du personnel.

6. L’Assemblée déplore la violation continue de l’autonomie universitaire et de la liberté académique au Bélarus. Tant que les établissements de l’enseignement supérieur dans ce pays ne respectent pas ces principes universels, ils ne peuvent pas être considérés comme des partenaires valables des établissements d’autres pays au sein de l’Espace européen de l’enseignement supérieur. L’Assemblée se félicite de la récente décision prise par les ministres participant au processus de Bologne de ne pas admettre le Bélarus, ainsi que la décision prise par l’Union européenne de ne pas accorder des visas d’entrée à cinq recteurs des universités du Bélarus.

7. En conformité avec les objectifs de l’article 165 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, l’Assemblée réaffirme la compétence et la responsabilité des parlements nationaux en ce qui concerne l’élaboration des politiques et de la législation relatives à l’enseignement supérieur. Cela devrait être fait en coopération étroite avec les établissements de l’enseignement supérieur.

8. Les établissements de l’enseignement supérieur devraient participer activement au processus décisionnel relatif à la gouvernance des systèmes nationaux de l’enseignement supérieur, selon le principe de subsidiarité. A cet égard, l’Assemblée se félicite des activités de groupes représentatifs comme l’Union des étudiants d’Europe, l’Association des universités européenne et l’Association européenne des institutions d’enseignement supérieur.

9. L’Assemblée souligne l’importance de la gouvernance participative au sein des établissements de l’enseignement supérieur. Elle souhaite que la gouvernance soit organisée autour de la notion de collégialité et encourage les universités et les établissements à associer les étudiants, les diplômés, les enseignants et les chercheurs à l’évaluation interne et à la prise de décisions sur le processus d’apprentissage, mais aussi à mettre en place des dispositifs appropriés pour les impliquer dans les décisions stratégiques.

10. L’Assemblée attache une importance particulière aux initiatives d’autorégulation et, en particulier, à l’Observatoire de la Magna Charta Universitatum de Bologne. Rappelant le paragraphe 13 de sa Recommandation 1762 (2006) sur la liberté académique et l’autonomie des universités, l’Assemblée se félicite de l’invitation de l’Observatoire d’intensifier la coopération et de se faire représenter à ses réunions.

11. L’Assemblée recommande aux États membres et aux pouvoirs publics de préserver et de protéger l’autonomie des établissements de l’enseignement supérieur et la liberté académique et, pour ce faire :

11.1. de promouvoir l’égalité d’accès aux établissements de l’enseignement supérieur sur la base des capacités de chacun et, à cette fin, d’apporter un soutien financier – aux établissements et aux étudiants – pour surmonter les obstacles socioéconomiques, notamment en période de difficultés financières et de crise sociale ;

11.2. de s’entendre sur des principes de financement transparents, de les rendre accessibles au public et de veiller à ce que les programmes de financement directs ou indirects ne favorisent pas de manière indue certains établissements de l’enseignement supérieur ;

11.3. conformément à la Convention sur la reconnaissance des qualifications relatives à l’enseignement supérieur dans la région européenne (STE n° 165) et au Communiqué de Bucarest adopté par les ministres participant au processus de Bologne, d’établir des normes de qualité pour la reconnaissance des périodes d’étude, des titres et des diplômes, sans restriction externe concernant les cours, les titres et les diplômes proposés par les établissements de l’enseignement supérieur ;

11.4. d’empêcher toute ingérence politique et économique dans la gestion interne des établissements de l’enseignement supérieur, qu’ils soient privés ou publics, tout en veillant à la pleine application de la législation nationale pertinente ;

11.5. de soutenir la coopération des établissements de l’enseignement supérieur ainsi que la mobilité des étudiants et des enseignants à travers les frontières ;

11.6. de respecter dûment le droit à la liberté d’association des étudiants, des enseignants et des chercheurs ;

11.7. d’associer les étudiants aux processus décisionnels concernant les questions universitaires ;

11.8. de créer des projets pour les étudiants et les enseignants du Bélarus qui ont été exclus ou renvoyés de leurs établissements de l’enseignement supérieur pour des raisons politiques ; de tels projets devraient inclure des bourses d’étude et des aides universitaires nationales pour ces élèves et ces enseignants.

12. L’Assemblée invite la Conférence permanente des ministres de l’Éducation à renforcer ses liens de travail avec l’Union des étudiants d’Europe, l’Association européenne des universités, l’Association européenne des institutions d’enseignement supérieur ainsi que l’Association internationale des universités, et à accroître son influence et son rôle au sein du processus de Bologne.

13. L’Assemblée invite le Conseil mixte pour la jeunesse et le Parlement européen de la jeunesse à discuter des politiques à suivre pour l’enseignement supérieur.

Annexe 6

Résolution 1903 (2012) – Déontologie des membres de l’Assemblée parlementaire: bonne pratique ou devoir ? 
7

1. A de nombreuses occasions au cours de ses dernières années, l’Assemblée parlementaire a fait part de sa préoccupation face à la critique de la démocratie représentative et de l’institution parlementaire, à la désaffection des citoyens vis-à-vis de la politique et des procédures démocratiques, et à la perte de confiance du grand public dans l’efficacité des assemblées élues et l’intégrité des parlementaires. Dans sa Résolution 1547 (2007) sur la situation des droits de l’homme et de la démocratie en Europe et sa Résolution 1746 (2010) « Démocratie en Europe : crises et perspectives », l’Assemblée s’est attachée à décrypter cette « crise de la démocratie », amplifiée par la crise financière et économique.

2. Les scandales mettant en cause le comportement de parlementaires, qui se sont produits tant au niveau national qu’européen, ont renforcé l’exigence d’exemplarité politique et conduit les parlements nationaux et les institutions parlementaires européennes à élaborer des règles déontologiques. Dans ce contexte, l’Assemblée s’est employée à améliorer son cadre institutionnel, afin de promouvoir les principes de transparence, de responsabilité et d’intégrité auxquels elle est fermement attachée.

3. Ainsi, l’Assemblée a établi des règles visant à prévenir les conflits d’intérêts, le clientélisme et, de façon générale, toute forme de corruption auxquels les parlementaires sont susceptibles d’être exposés pendant la durée de leur mandat, en tenant compte des objectifs et du caractère spécifique des missions dont ceux-ci sont investis. Il en résulte notamment des principes relatifs à la transparence et à la déclaration des intérêts des membres de l’Assemblée, adoptés en 2007, un code de conduite des rapporteurs de l’Assemblée parlementaire, adopté en 2011, ainsi que des dispositions spécifiques figurant dans les lignes directrices sur l’observation des élections par l’Assemblée parlementaire. L’Assemblée considère à présent qu’il y a lieu d’établir des principes et des règles qui doivent régir la conduite de l’ensemble de ses membres, et de se doter d’un cadre de référence transparent et efficace. Ce code de conduite n’entend pas se substituer aux règles déontologiques susmentionnées, qui le complètent.

4. Le besoin de consolider les règles de conduite de ses membres découle également du devoir d’exemplarité auquel l’Assemblée parlementaire est tenue en tant qu’organe statutaire d’une organisation internationale qui se trouve en première ligne pour lutter contre la corruption, y compris dans le domaine politique. L’Assemblée salue tout particulièrement l’action du Groupe d’États contre la corruption (GRECO) du Conseil de l’Europe dont elle entend suivre de près les activités s’agissant de son troisième cycle d’évaluation, consacré à la transparence du financement des partis politiques, et de son quatrième cycle d’évaluation, lancé en janvier 2012, qui porte notamment sur la prévention de la corruption des parlementaires.

5. En se dotant d’un code de conduite, l’Assemblée entend faire prévaloir la primauté de l’intérêt public dans son travail et répondre, par la mise en place d’un système de règles cohérentes applicables à l’ensemble de ses membres, aux préoccupations générales exprimées s’agissant notamment du favoritisme politique, des offres de cadeaux ou d’hospitalité faites aux membres, des situations de conflits d’intérêts ou de l’utilisation du mandat pour la promotion et la défense d’intérêts personnels.

6. Le code de conduite contient des dispositions inhérentes au bon fonctionnement d’une assemblée d’élus dans une société démocratique et que les membres sont invités à respecter dans le cadre de l’exercice de leur mandat à l’Assemblée parlementaire. Les principes généraux, qui forment une partie intégrante du code de conduite, devront guider le comportement des membres de l’Assemblée lorsque des situations difficiles ou confuses surviennent.

7. La conduite des membres relève d’abord et avant tout de leurs appréciation et convictions personnelles, mais leur comportement doit répondre aux attentes de ceux qui ont placé leur confiance dans un élu. L’Assemblée considère que l’engagement déclaré des membres à se conformer au code de conduite dépend en premier lieu de leur volonté de le respecter, en toute bonne foi.

8. L’Assemblée souhaite accroître la transparence de ses activités et de son processus décisionnel. Elle est toutefois préoccupée par les pressions que certains représentants d’intérêts, agissant au nom d’entités privées ou d’États, ont exercées sur des membres, même dans l’enceinte du Palais de l’Europe. L’Assemblée soutient incontestablement une culture pluraliste, mais elle considère également que des procédures claires et transparentes s’imposent pour réglementer l’accès des représentants d’intérêts à l’Assemblée. Elle rappelle, à cet égard, sa Recommandation 1908 (2010) sur le lobbying dans une société démocratique.

9. Au vu des considérations précédentes, l’Assemblée :

9.1. décide de se doter du code de conduite des membres de l’Assemblée parlementaire ci-annexé, et en conséquence :

9.1.1. de modifier l’article 12 de son Règlement comme suit :

« Article 12 - Déontologie des membres de l’Assemblée

12.1. Dans l’exercice de leurs fonctions, les membres de l’Assemblée s’engagent à agir dans le respect des principes et des règles établis dans le code de conduite des membres de l’Assemblée, annexé au présent Règlement en tant que texte pararéglementaire.

12.2. Les dispositions régissant la transparence et la déclaration des intérêts des membres de l’Assemblée sont annexées au présent Règlement en tant que texte pararéglementaire. » ;

9.1.2. décide que ces nouvelles dispositions réglementaires et pararéglementaires entreront en vigueur dès leur adoption ;

9.2. en ce qui concerne des règles d’accès et de circulation dans les locaux du Conseil de l’Europe des représentants d’intérêts pendant les sessions de l’Assemblée parlementaire, et afin d’instaurer une identification spécifique des membres des groupes d’intérêts, charge le Bureau de l’Assemblée de réviser les règles d’accès au Palais de l’Europe et d’utilisation des locaux, et les annexes aux règles concernées ;

9.3. en ce qui concerne les prérogatives des anciens membres de l’Assemblée, charge le Bureau de l’Assemblée de modifier le règlement spécial sur l’honorariat à l’Assemblée parlementaire, ainsi que le règlement spécial sur le titre et les prérogatives de Président(e) honoraire de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, en application du paragraphe 16 du code de conduite ci-annexé.

10. Par ailleurs, l’Assemblée invite les parlements nationaux des États membres du Conseil de l’Europe :

10.1. à coopérer avec le GRECO dans le cadre des troisième et quatrième cycles d’évaluation et de continuer à promouvoir des stratégies anti-corruption ;

10.2. à s’inspirer des dispositions du code de conduite ci-annexé pour toutes les règles déontologiques et de conduite de leurs membres existantes ou qu’ils pourraient être amenés à élaborer.

11. Enfin, l’Assemblée charge son Bureau de réviser les lignes directrices sur l’observation des élections par l’Assemblée parlementaire à la lumière des dispositions du code de conduite ci-annexé, afin de modifier les dispositions relatives au conflit d’intérêts et de préciser les obligations déclaratives qui s’imposent aux membres des commissions ad hoc.

Annexe - Code de conduite des membres de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe

Objet du code de conduite

1. Le présent code entend fournir un cadre de référence aux membres de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe lorsqu’ils exercent leurs fonctions. Il définit les principes généraux de conduite que l’Assemblée est en droit d’attendre de ses membres. En adhérant à ces règles, les membres garantissent et renforcent l’ouverture et la responsabilité nécessaires pour maintenir la confiance vis-à-vis de l’Assemblée parlementaire.

Champ d’application du code de conduite

2. Le présent code s’applique aux membres dans tous les aspects de leur vie publique en rapport avec leur fonction de membres de l’Assemblée parlementaire.

3. Ses dispositions s’ajoutent à l’obligation faite aux membres de l’Assemblée parlementaire de respecter les Règles de conduite, ainsi que les résolutions de l’Assemblée et les décisions du Président relatives à la conduite et à la discipline des membres.

4. L’application du présent code relève de la compétence de l’Assemblée. Des orientations sur toutes les questions couvertes par le présent code de conduite et toutes les situations susceptibles de découler de son application peuvent être demandées au Secrétaire Général de l’Assemblée parlementaire.

Principes généraux de conduite

5. Dans l’exercice de leur mandat en tant que membres de l’Assemblée parlementaire, les membres :

5.1. remplissent leurs fonctions de manière responsable, avec intégrité et honnêteté ;

5.2. prennent des décisions uniquement dans l’intérêt public, sans être soumis à aucune instruction qui compromettrait leur capacité à respecter le présent code ;

5.3. s’abstiennent de tout acte susceptible de porter atteinte à la réputation de l’Assemblée ou de ternir son image ;

5.4. utilisent les ressources mises à leur disposition de manière responsable ;

5.5. n’utilisent pas leur mandat pour servir leurs intérêts privés ou ceux d’un tiers ;

5.6. déclarent tous les intérêts ayant un rapport avec leur mandat et prennent des mesures en vue de résoudre tout conflit de manière à protéger l’intérêt public ;

5.7. adhèrent à ces principes et les défendent en prenant des initiatives et en montrant l’exemple ;

5.8. s’engagent à respecter les règles de conduite ci-dessous.

6. Ces principes seront pris en considération pour l’examen de toute plainte relative à une violation du présent code de conduite.

Règles de conduite

7. Les membres respectent les valeurs du Conseil de l’Europe et les principes généraux de conduite de l’Assemblée et n’entreprennent aucune action susceptible de porter atteinte à la réputation et à l’intégrité de l’Assemblée ou de ses membres.

8. Les membres évitent tout conflit entre, d’une part, un intérêt économique, commercial, financier ou autre, réel ou potentiel, à titre professionnel, personnel ou familial et, d’autre part, l’intérêt public dans le travail de l’Assemblée, en résolvant tout conflit en faveur de l’intérêt public ; tout conflit d’intérêts que le membre ne peut résoudre sera rendu public.

9. Les membres signalent ces intérêts en faisant une déclaration orale, lors d’une séance de l’Assemblée ou d’une réunion de commission, ainsi que dans toute autre communication pertinente.

10. Aucun membre n’agira en tant que promoteur rémunéré d’intérêts dans les travaux de l’Assemblée.

11. Les membres s’engagent à ne pas solliciter ni accepter de rémunération, d’indemnité ou de gratification visant à les influencer dans leur conduite en tant que membre, et plus particulièrement dans leur décision de soutenir ou de s’opposer à une proposition de texte, un rapport, un amendement, une déclaration écrite, une recommandation, une résolution ou un avis. Les membres éviteront toute situation susceptible d’être perçue comme un conflit d’intérêts et n’accepteront aucune rémunération ou cadeau inapproprié.

12. Les membres n’exploiteront pas leur position en tant que membre de l’Assemblée parlementaire pour servir leurs propres intérêts ou ceux d’une autre personne ou entité de manière incompatible avec le présent code de conduite.

13. Les membres ont une obligation de discrétion en ce qui concerne l’utilisation des informations et s’engagent en particulier à ne pas exploiter à des fins personnelles les renseignements confidentiels dont ils ont connaissance dans l’accomplissement de leurs fonctions.

14. Tout cadeau ou tout avantage similaire (tel que la prise en charge de frais de voyage, d’hébergement, de séjour, de repas ou de divertissement) d’une valeur supérieure à 200 euros accepté par les membres dans l’exercice de leur fonction de membre de l’Assemblée devra être enregistré auprès du Secrétariat de l’Assemblée.

15. Les membres veilleront à ce que l’utilisation qu’ils font des notes de frais, des indemnités, des locaux et des services mis à disposition par le Conseil de l’Europe soit strictement conforme aux règles applicables en la matière.

16. Les anciens membres de l’Assemblée parlementaire qui s’engagent dans la représentation et la défense des intérêts d’une autre personne ou entité devant l’Assemblée parlementaire ne peuvent, pendant toute la période où ils exercent cette activité, jouir des prérogatives liées au statut de membre associé ou de président honoraire de l’Assemblée parlementaire, en ce qui concerne la diffusion des documents et l’accès aux bâtiments et aux salles de réunion.

Respect du code de conduite

17. Si un membre est soupçonné d’avoir agi en violation du présent code de conduite, le Président de l’Assemblée peut demander des éclaircissements et des compléments d’information au membre en question, au président de sa délégation nationale, au président de son groupe politique ou au président de la commission dont le membre concerné fait partie.

18. S’il y a lieu, le Président de l’Assemblée peut saisir la commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles, qui examinera les circonstances de la violation alléguée et formulera une recommandation quant à une éventuelle décision à prendre par le Président.

19. Si le Président de l’Assemblée conclut que le membre n’a pas respecté le présent code de conduite, il pourra préparer une déclaration motivée qui sera, s’il y a lieu, lue devant l’Assemblée.

20. Les membres s’engagent à coopérer, et ce à tous les stades, à toute enquête sur leur conduite menée par l’Assemblée ou sous l’autorité de l’Assemblée.

1 () Discussion par l’Assemblée le 3 octobre 2012 (33e séance) (voir Doc. 13011, rapport de la commission des questions juridiques et des droits de l’homme, rapporteur: M. Strässer). Texte adopté par l’Assemblée le 3 octobre 2012 (33e séance).

2 () Discussion par l’Assemblée le 3 octobre 2012 (32e séance) (voir Doc. 13019, rapport de la commission des questions politiques et de la démocratie, rapporteur : M. Bockel; et Doc. 13040, avis de la commission des questions sociales, de la santé et du développement durable, rapporteur : M. Braun). Texte adopté par l’Assemblée le 3 octobre 2012 (32e séance).

3 () Discussion par l’Assemblée le 5 octobre 2012 (36e séance) (voir Doc. 13017, rapport de la commission des questions sociales, de la santé et du développement durable, rapporteure : Mme Naghdalyan). Texte adopté par l’Assemblée le 5 octobre 2012 (36e séance).

4 () Discussion par l’Assemblée le 5 octobre 2012 (36e séance) (voir Doc. 13009, rapport de la commission de la culture, de la science, de l’éducation et des médias, rapporteur : M. Huseynov). Texte adopté par l’Assemblée le 5 octobre 2012 (36e séance).

Voir également la Recommandation 2005 (2012).

5 () Discussion par l’Assemblée le 5 octobre 2012 (36e séance) (voir Doc. 13009, rapport de la commission de la culture, de la science, de l’éducation et des médias, rapporteur : M. Huseynov). Texte adopté par l’Assemblée le 5 octobre 2012 (36e séance).

Voir également la Résolution 1906 (2012).

6 () Discussion par l’Assemblée le 5 octobre 2012 (36e séance) (voir Doc. 12964 et Addendum, rapport de la commission de la culture, de la science, de l’éducation et des médias, rapporteur : M. Flego). Texte adopté par l’Assemblée le 5 octobre 2012 (36e séance).

7 () Discussion par l’Assemblée le 4 octobre 2012 (35e séance) (voir Doc. 13000, rapport de la commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles, rapporteur : M. Heald). Texte adopté par l’Assemblée le 4 octobre 2012 (35e séance).


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