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N° 1176

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 26 juin 2013.

RAPPORT D’INFORMATION

DÉPOSÉ

en application de l’article 145 du Règlement

PAR LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES

préalable au débat d’orientation des finances publiques,

ET PRÉSENTÉ

par M. GÉrard Bapt,

Député.

——

INTRODUCTION 5

I.- MALGRÉ LES MESURES VOTÉES EN 2012, LA CONJONCTURE RALENTIT LE REDRESSEMENT DES COMPTES SOCIAUX 8

A. LES MESURES PRISES À PARTIR DE L’ÉTÉ 2012 ONT PERMIS DE REDRESSER LES COMPTES 8

B. LA FAIBLE PROGRESSION DE LA MASSE SALARIALE EN 2013 FREINE LE REDRESSEMENT DES COMPTES 9

1. En 2013, les recettes pâtissent de l’atonie de la masse salariale, mais les dépenses devraient être moins élevées que prévu 9

2. Les incertitudes de l’année 2014 12

II.- DES MESURES STRUCTURELLES DOIVENT ÊTRE PRISES AFIN DE CORRIGER LA TRAJECTOIRE DES FINANCES SOCIALES 13

A. INFLÉCHIR LA TRAJECTOIRE DES DÉPENSES PAR DES RÉFORMES STRUCTURELLES QUI PRÉSERVENT NOS POLITIQUES SOCIALES 13

1. Les dépenses d’assurance maladie 13

2. Les dépenses de retraites 15

3. La branche famille 15

B. RENFORCER ET SIMPLIFIER LES RECETTES DE LA PROTECTION SOCIALE 16

C. LA QUESTION DE LA DETTE DE LA SÉCURITÉ SOCIALE 18

TRAVAUX DE LA COMMISSION 19

INTRODUCTION

Les finances sociales occupent une place à part au sein de l’ensemble des finances publiques, dans la mesure où les dépenses sociales résultent essentiellement de prestations versées en application de dispositions légales, et où les partenaires sociaux jouent un rôle important dans la gestion des régimes.

Toutefois, le nécessaire redressement de nos comptes publics et le respect de nos engagements européens supposent une approche globale des finances publiques, consacrée par la loi organique n° 2012-1403 du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques.

L’article 22 de la loi organique du 2 août 2005 relative aux lois de financement de la sécurité sociale dispose qu’« en vue de l’examen et du vote du projet de loi de financement de la sécurité sociale de l’année suivante par le Parlement, le Gouvernement présente, au cours du dernier trimestre de la session ordinaire, un rapport sur les orientations des finances sociales comportant :

1° Une description des grandes orientations de sa politique de sécurité sociale au regard des engagements européens de la France ;

2° Une évaluation pluriannuelle de l’évolution des recettes et des dépenses des administrations de sécurité sociale ainsi que de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie.

Ce rapport peut donner lieu à un débat à l’Assemblée nationale et au Sénat. Ce débat peut être concomitant du débat prévu à l’article 48 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances. »

En pratique, non seulement le débat d’orientation des finances sociales a toujours été concomitant au débat d’orientation des finances publiques, mais le rapport mentionné au premier alinéa est commun avec le rapport sur l’évolution de l’économie nationale et sur les orientations des finances publiques mentionné à l’article 48 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances.

Par ailleurs, le débat d’orientation des finances publiques intervient peu de temps après la réunion de printemps de la Commission des comptes de la sécurité sociale, qui a eu lieu le 6 juin dernier. Le présent rapport peut donc s’appuyer sur les résultats de l’année 2012 et les prévisions actualisées par la commission pour 2013.

La présentation de la Commission des comptes de la sécurité sociale a montré que les mesures votées en 2012 ont permis un redressement important des finances sociales en 2012, mais que l’augmentation du chômage en 2013 contrarie cette trajectoire en affectant les recettes de la sécurité sociale. Le débat d’orientation des finances publiques pour 2014 doit donc permettre d’examiner comment ramener nos comptes sociaux à l’équilibre sans compromettre la reprise économique espérée l’an prochain.

Pourquoi chercher une trajectoire de retour à l’équilibre, alors que nous vivons depuis trente ans, à l’exception des années 1999 à 2001, avec un régime général en déficit ?

Avant tout, il s’agit d’un impératif moral vis-à-vis des générations futures. La sécurité sociale finance essentiellement des dépenses courantes et non des investissements. Financer la sécurité sociale par le déficit et donc la dette, c’est faire payer aux générations futures les prestations sociales d’aujourd’hui.

C’est aussi une question de souveraineté : le niveau très élevé de la dette publique (plus de 1 800 milliards d’euros) et le poids de la charge de la dette dans les comptes publics (plus de 50 milliards d’euros) nous rendent extrêmement vulnérables à une hausse éventuelle des taux d’intérêts pratiqués par nos créanciers.

Enfin, il s’agit de respecter nos engagements vis-à-vis de nos partenaires de la zone euro.

Le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG) au sein de l’Union économique et monétaire, signé le 2 mars 2012 à Bruxelles, a renforcé la discipline budgétaire et la coordination des politiques économiques, en prescrivant notamment aux États signataires de se fixer un objectif de solde structurel ne pouvant être inférieur à - 0,5 % du PIB pour les États dont l’endettement public brut dépasse 60 % du PIB (1). Le solde structurel est défini comme le « solde annuel corrigé des variations conjoncturelles, déduction faite des mesures ponctuelles et temporaires ». La date à partir de laquelle s’imposera la nouvelle limite de - 0,5 % du PIB n’est pas fixée dans le traité.

La loi organique du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques met en œuvre ce traité en le transposant dans notre droit interne. Elle prévoit que des lois de programmation des finances publiques traceront le chemin du retour à l’équilibre structurel, sous la surveillance d’un Haut Conseil des finances publiques qui pourra donner l’alerte en cas de déviation de la trajectoire.

Ainsi, la loi n° 2012-1558 du 31 décembre 2012 de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017 fixe, pour l’ensemble des dépenses publiques, l’objectif d’un solde structurel supérieur ou égal à - 0,5 % du PIB en 2015, et l’objectif d’un équilibre structurel à partir de 2016. L’objectif pour fin 2013 est de - 1,6 % du PIB.

Le rapport préparatoire au débat d’orientation des finances publiques transmis par le Gouvernement révise l’objectif pour fin 2013 à - 2 %, compte tenu de la conjoncture économique, dans la ligne du programme de stabilité. Cela reste un niveau de déficit structurel jamais atteint depuis 2000 (2). Pour 2014, le Gouvernement prévoit la poursuite de l’effort structurel, à un rythme moins rapide (1,0 point de PIB) porté à 70 % par des économies en dépenses. L’effort se poursuivra sur la période 2015-2017 pour permettre à la France de revenir à l’équilibre structurel en fin de période, conformément à la loi de programmation.

Les administrations de sécurité sociale doivent participer à cet effort structurel à hauteur de 5 milliards d’euros en 2014.

I.- MALGRÉ LES MESURES VOTÉES EN 2012, LA CONJONCTURE RALENTIT LE REDRESSEMENT DES COMPTES SOCIAUX

Les résultats pour 2012 et prévisions pour 2013 présentés à la Commission des comptes de la sécurité sociale le 6 juin dernier sont les suivants.

Solde du régime général et du fonds de solidarité vieillesse

(en milliards d’euros)

 

Maladie

ATMP

Vieillesse

Famille

Régime général

FSV

Régime général
+ FSV

2011

– 8,6

– 0,2

– 6,0

– 2,6

– 17,4

– 3,4

– 20,9

2012

– 5,9

– 0,2

– 4,8

– 2,5

– 13,3

– 4,1

– 17,5

2013*

– 7,9

+ 0,3

– 3,5

– 3,2

– 14,3

– 3,0

– 17,3

* Soldes prévisionnels.

Source : Commission des comptes de la sécurité sociale, juin 2013.

Grâce à d’importants efforts structurels en recettes et en dépenses, les comptes sociaux ont été sensiblement redressés en 2012. Rappelons en effet que l’évolution spontanée du déficit du régime général est de 4 à 5 milliards d’euros si on laisse jouer l’effet de ciseaux dû à la stagnation économique (les dépenses sociales augmentent alors que les recettes diminuent).

En 2013, les dépenses sont toujours bien maîtrisées mais les recettes pâtissent du ralentissement de la croissance de la masse salariale, si bien que la trajectoire de redressement des comptes devrait connaître un palier. La poursuite des réformes structurelles en 2014 devrait permettre de poursuivre l’amélioration du solde structurel sans compromettre la reprise économique.

A. LES MESURES PRISES À PARTIR DE L’ÉTÉ 2012 ONT PERMIS DE REDRESSER LES COMPTES

Notre majorité a hérité d’une situation des comptes sociaux catastrophique. Le déficit cumulé du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) atteignait presque 21 milliards d’euros en 2011. En outre, bien qu’apportant de nouvelles recettes à la sécurité sociale, la loi de financement pour 2012 avait été votée en fonction d’hypothèses trop optimistes : un taux de croissance du PIB de 1 % contre 0 % réalisé, un taux de croissance de la masse salariale de 3 % contre 2,2 % réalisés.

Grâce aux mesures prises à l’été 2012, l’exécution des comptes 2012 a finalement été conforme aux objectifs de la loi de financement. La loi de finances rectificative du 16 août 2012 a en effet prévu la hausse du forfait social, l’augmentation des prélèvements sociaux sur le capital et la hausse des impositions sur les stock-options.

Ainsi, les produits du régime général ont augmenté de 4,4 % en 2012, soit un taux de progression nettement supérieur à celui de la masse salariale. Le supplément de recettes correspondant aux nouvelles mesures de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 et de la loi de finances rectificative précitée est estimé à 7 milliards d’euros en 2012.

À fin 2012, le déficit du régime général s’établit à 13,3 milliards d’euros, et 17,5 milliards d’euros en incluant le FSV, soit une amélioration de 3,3 milliards d’euros par rapport à 2011. Votre rapporteur souligne que cette amélioration n’a pas empêché que soient prises des mesures de justice immédiates dès l’été 2012, comme l’augmentation de 25 % de l’allocation de rentrée scolaire et la possibilité de liquider sa retraite à 60 ans à taux plein pour les personnes ayant commencé à travailler avant 20 ans et justifiant d’une carrière complète, mesures qui ont été financées d’emblée.

Les dépenses de santé ont été bien maîtrisées en 2012, avec une sous-exécution de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (ONDAM) de 860 millions d’euros de moins que l’objectif fixé en loi de financement, écart presque intégralement imputable aux soins de ville. On observe également que les comptes des hôpitaux se sont globalement améliorés.

B. LA FAIBLE PROGRESSION DE LA MASSE SALARIALE EN 2013 FREINE LE REDRESSEMENT DES COMPTES

1. En 2013, les recettes pâtissent de l’atonie de la masse salariale, mais les dépenses devraient être moins élevées que prévu

La Commission des comptes de la sécurité sociale s’appuie sur les prévisions économiques du programme de stabilité 2013-2017 transmis à la Commission européenne fin avril, qui ont été révisées par rapport à celles qui sous-tendaient les lois de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2013. Le tableau suivant présente les hypothèses économiques révisées.

Prévisions économiques pour 2013

(en %)

 

LFI et LFSS pour 2013
(automne 2012)

Programme de stabilité
(avril 2013)

Croissance du PIB

0,8

0,1

Croissance de la masse salariale

2,3

1,3

Inflation

1,75

1,2

Source : loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 et programme de stabilité 2013-2017.

La loi de financement pour 2013 prévoyait un déficit réduit à 11,7 milliards d’euros pour le régime général (compte tenu de la décision du Conseil constitutionnel qui a déclaré certains articles non-conformes à la Constitution) et à 2,5 milliards d’euros pour le FSV. Malgré la bonne maîtrise des dépenses, la commission des comptes prévoit désormais un déficit du régime général de 14,3 milliards d’euros et de 3 milliards d’euros pour le FSV, soit un déficit total de 17,3 milliards d’euros.

Les recettes sont inférieures de 3,4 milliards d’euros aux prévisions initiales, avec 4 milliards d’euros de moindres recettes fiscales et sociales (dont 2,9 milliards sur les revenus d’activité et 1,1 milliard sur les recettes fiscales), en partie compensés par une augmentation des transferts du FSV de 600 millions d’euros au titre de la prise en charge des cotisations chômage.

Les recettes progressent malgré tout plus vite que la masse salariale (1,3 %), grâce à l’extension en année pleine des mesures fiscales et sociales de 2012 et aux mesures nouvelles de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013. Ce sont, au total, 6 milliards d’euros de recettes supplémentaires pour le régime général et le FSV liées à ces mesures.

Ainsi, les cotisations nettes devraient augmenter de 3,2 % en 2013, en raison du relèvement des taux de cotisations retraites au régime général (extension en année pleine de l’augmentation des cotisations à compter du 1er novembre 2012) et à la Caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales (CNAVPL), de la hausse des cotisations au Régime social des indépendants (RSI) et de la forte réduction des exonérations de cotisations sur les heures supplémentaires.

En revanche, les recettes de CSG ne progresseraient que de 0,8 % (après + 3,9 % en 2012) en raison de l’atonie des revenus d’activité, d’une répartition de la CSG défavorable à la Caisse nationale d’assurance maladie (CNAMTS) et d’une baisse des revenus du capital.

Du côté des dépenses, la Commission des comptes anticipe 800 millions d’euros d’économies par rapport aux prévisions de la loi de financement, du fait des moindres revalorisations de certaines prestations vieillesse et famille (en raison de la révision à la baisse de l’inflation) et de la sous-consommation des dépenses d’assurance maladie en 2012 (« effet de base »). Les dépenses augmenteraient néanmoins plus vite qu’en 2012.

Dans son avis publié le 31 mai 2013, le comité d’alerte sur l’évolution des dépenses d’assurance maladie estime qu’« une grande partie de l’effet de base hérité de 2012 doit pouvoir être conservée. Une prévision prudente prenant en compte tous les aléas négatifs conduit pour 2013 à un montant de dépenses inférieur de 200 millions d’euros à l’objectif. Mais les réalisations pourraient être sensiblement plus basses. »

La branche vieillesse connaît un fort rebond des départs en retraite (715 000 départs, soit 24 % de plus qu’en 2012) induit par les effets irréguliers, d’une année à l’autre, de la montée en charge de la réforme de 2010 (3), et par une forte augmentation des départs anticipés (138 000 contre 84 000 en 2012) liée au décret de juillet 2012 permettant le départ à 60 ans pour certaines personnes ayant commencé à travailler avant 20 ans.

La croissance des prestations familiales du régime général ralentit à 2 % (contre + 3 % en 2012), du fait de la révision à la baisse de l’inflation.

En définitive, l’évolution des soldes des différentes branches de la sécurité sociale entre 2012 et 2013 est contrastée :

– le déficit de la branche maladie augmente de 2 milliards d’euros en 2013, atteignant 7,9 milliards d’euros au lieu de 5,2 milliards d’euros prévus en loi de financement ; il se pourrait néanmoins que le déficit constaté en fin d’année soit moins élevé que prévu, grâce à une sous-consommation de l’ONDAM de l’ordre de 200 millions d’euros, comme la Commission des comptes de la sécurité sociale en émet l’hypothèse ;

– le déficit de la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF), après une stabilisation en 2011 et 2012 autour de 2,5 milliards d’euros, s’accroîtrait de 700 millions d’euros en 2013, du fait du freinage très marqué de la croissance des recettes de cotisations et de CSG qui constituent 83 % des recettes de la branche famille ;

– en revanche, l’amélioration du solde de la Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV) se poursuit en 2013 : les charges augmentent fortement du fait de l’augmentation des départs (+ 4,1 %) mais sont plus que compensées par l’augmentation des produits (+ 5,5 %) à laquelle contribuent principalement la hausse du taux de cotisation de 0,2 point intervenue au 1er novembre 2012, l’augmentation des prélèvements sociaux affectés à la branche retraite (forfait social et prélèvements sur les revenus du capital) et celle des cotisations prises en charge par le FSV au titre du chômage ; ce dernier point a cependant comme effet d’alourdir les charges du FSV de façon symétrique (prise en charge de cotisations retraite au titre du chômage) ; toutefois, au total, le solde du FSV s’améliore d’un milliard d’euros grâce à l’augmentation de ses recettes (dont l’affectation temporaire de 0,3 point de CSG qui devront revenir à la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie – CNSA – à partir de 2014).

Le déficit à fin 2013 est tout de même stabilisé quasiment au même niveau qu’en 2012, à 17,3 milliards d’euros – rappelons qu’il aurait atteint 26 milliards d’euros si aucune mesure de redressement n’avait été prise en 2012.

2. Les incertitudes de l’année 2014

L’atonie de la masse salariale pèsera sur les comptes 2014. Même si la courbe du chômage se retourne fin 2013, il faudra encore plusieurs mois pour que les recettes reviennent à un niveau suffisant. Le programme de stabilité pour 2013-2017, présenté à la Commission européenne en avril dernier, prévoit que l’évolution de la masse salariale se redresse progressivement pour atteindre 2,4 % de croissance sur l’année 2014 et revoit la trajectoire des déficits publics en fonction des nouvelles prévisions économiques.

Le tableau suivant présente les objectifs de solde effectif par sous-secteur d’administration publique.

Solde public par sous-secteurs d’administration publique

(en % du PIB)

 

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Dépenses publiques

– 4,8

– 3,7

– 2,9

– 2,0

– 1,2

– 0,7

État

– 3,9

– 2,8

– 2,2

– 1,9

– 1,5

– 1,2

Divers adm. centrale

– 0,1

– 0,1

– 0,1

0

0

0

Adm. locales

– 0,2

– 0,2

0

0

0

0

Sécurité sociale *

– 0,6

– 0,6

– 0,5

– 0,1

0,3

0,6

* y compris assurance chômage, Caisse d’amortissement de la dette sociale et Fonds de réserve pour les retraites.

Source : Programme de stabilité 2013-2017.

Ces projections reposent sur l’hypothèse d’un taux de croissance de 1,2 % en 2014 et de 2 % par an à partir de 2015, soit un chiffre légèrement supérieur à la croissance potentielle évaluée à 1,5 % en moyenne.

L’objectif de retour à - 3 % de déficit public effectif en 2013 fixé par la loi de programmation des finances publiques a été repoussé à 2014 par le programme de stabilité. La Commission européenne a accepté d’accorder un délai supplémentaire d’un an à la France. Ainsi la Commission européenne demande un déficit de 3,9 % pour 2013, 3,6 % en 2014 et 2,8 % en 2015. Ce report doit permettre de laisser jouer les stabilisateurs automatiques et de ne pas prendre de mesures susceptibles d’empêcher la reprise économique. En revanche, il n’autorise aucun relâchement de l’effort structurel de réduction du déficit.

II.- DES MESURES STRUCTURELLES DOIVENT ÊTRE PRISES AFIN DE CORRIGER LA TRAJECTOIRE DES FINANCES SOCIALES

La conduite de réformes structurelles en dépenses et en recettes doit permettre de ramener les comptes sociaux à l’équilibre tout en préservant notre modèle social.

A. INFLÉCHIR LA TRAJECTOIRE DES DÉPENSES PAR DES RÉFORMES STRUCTURELLES QUI PRÉSERVENT NOS POLITIQUES SOCIALES

Le programme de stabilité prévoit que la répartition de l’effort structurel en dépense en 2014 pèse pour environ la moitié sur l’État et ses opérateurs (7,5 milliards d’euros) et pour l’autre partie sur les administrations de sécurité sociale (5 milliards d’euros) et les collectivités territoriales (1,5 milliard d’euros).

L’ensemble des prestations sociales seraient ramenées à un taux de croissance de 2,4 % entre 2014 et 2017.

1. Les dépenses d’assurance maladie

La croissance de l’ONDAM devrait être ramenée à 2,6 % en 2014 (contre + 2,7 % en 2013). Ralentir la progression de l’ONDAM de 0,1 point représente un effort d’environ 175 millions d’euros par rapport à 2013 – mais aux alentours de 3 milliards d’euros par rapport à l’évolution tendancielle des dépenses de santé.

Cependant, le rapport préparatoire transmis par le Gouvernement indique que l’ONDAM pourrait supporter « un effort supplémentaire de 300 millions d’euros programmé pour tenir compte de l’impact favorable du crédit d’impôt compétitivité emploi (CICE) sur le coût des soins, notamment en révisant les tarifs des cliniques privées qui en bénéficient ».

La sous-exécution de l’ONDAM en 2012, et vraisemblablement aussi en 2013, montre que cette maîtrise des dépenses de santé est réaliste.

Votre rapporteur s’interroge sur la pertinence du maintien de taux de progression équivalents entre dépenses de soins de ville et dépenses hospitalières.

Les dépenses de soins de ville sont mieux maîtrisées, comme en témoigne leur sous-consommation en 2012. Cela laisse supposer qu’il reste encore des marges d’économies sur ce secteur. Cependant, désavantager la ville par rapport à l’hôpital risquerait de décourager le premier secteur dans ses efforts de maîtrise des dépenses. Plutôt que de restreindre davantage la progression de l’objectif des dépenses de soins de villes, votre rapporteur suggère que les sous-consommations soient partiellement réinvesties dans l’amélioration de l’offre de soins dans les zones de faible densité, dans le développement de la télémédecine, dans la rémunération à la performance des médecins ruraux, etc.

Cela dit, il reste encore des progrès à faire en matière de lutte contre les actes et prescriptions inutiles, les hospitalisations injustifiées ainsi qu’en matière d’efficience hospitalière.

En ce qui concerne l’hôpital, la « stratégie nationale de santé » vise à structurer le système de santé autour de la notion de parcours de soins, en donnant sa juste place à l’hôpital. Cela suppose de décloisonner les secteurs des soins de ville, des soins hospitaliers et le secteur médico-social, dans le but de limiter les hospitalisations non pertinentes, ce qui conduira à réaliser des économies sur les dépenses d’hôpital et sur les dépenses de santé en général. Ainsi, le logiciel « Trajectoire » est un outil d’aide à l’orientation qui permet d’améliorer la procédure de transfert des patients en court séjour à l’hôpital vers les soins de suite et réadaptation. Lancé en 2008 à Lyon, il s’est étendu à la quasi-totalité des régions. Il peut englober également l’hospitalisation à domicile et le secteur médico-social.

Une meilleure organisation des urgences, grâce à la mise en place des maisons de garde et à l’amélioration de la permanence des soins, permettrait de réaliser des économies sur ces structures très coûteuses.

L’amélioration de la gestion des lits passe aussi par une rationalisation et une harmonisation des systèmes d’information hospitaliers. Sans imposer les mêmes systèmes à tous, il faudrait mettre en œuvre des règles d’homologation et d’interopérabilité des systèmes. Certaines formules coopératives existent déjà dans quelques villes : il faut que ce genre de méthodes se généralise au niveau régional.

Votre rapporteur souhaite également que le Fonds d’intervention régionale (FIR) soit conforté, afin de permettre aux agences régionales de santé de mener une politique régionale d’organisation des soins.

Des économies pourraient encore être réalisées sur les dépenses de médicaments, notamment par un meilleur respect des règles de bonnes pratiques par les prescripteurs. Par ailleurs, votre rapporteur trouve anormal que, lorsqu’il existe un générique, le prix du princeps (c’est-à-dire le médicament initialement commercialisé) reste quasiment le même. On pourrait envisager que le prix du princeps ne puisse excéder une certaine proportion du prix du générique. De même, lorsqu’arrive sur le marché un nouveau médicament dans une classe qui comporte déjà des génériques, il faut pouvoir comparer l’amélioration du service médical rendu (SMR) par rapport aux autres médicaments : si celle-ci est négligeable, il faudrait que le prix du nouveau médicament soit fixé dans un rapport proche du prix des génériques existants.

Enfin, le développement des approches thérapeutiques personnalisées, basées sur les progrès réalisés en matière de génomique et de biomarqueurs, impose désormais un nouveau modèle médico-économique pour contenir l’envolée du coût des médicaments innovants.

2. Les dépenses de retraites

Une économie d’un milliard d’euros environ est d’ores et déjà assurée pour 2014 par l’accord signé par les partenaires sociaux en mars 2013 sur les retraites complémentaires AGIRC-ARRCO, qui prévoit une sous-indexation des pensions pendant trois ans ainsi qu’une augmentation des taux de cotisations.

Si ces retraites complémentaires sont dans le champ des administrations de sécurité sociale au sens du programme de stabilité, elles ne font néanmoins pas partie du périmètre des lois de financement de la sécurité sociale.

En ce qui concerne l’ensemble des régimes de retraite obligatoires de base et complémentaires, les projections du Conseil d’orientation des retraites (COR) publiées en décembre 2012 montrent que le besoin de financement total atteindra de l’ordre de 20 milliards d’euros en 2020, malgré la réforme de 2010 dont l’objectif était l’équilibre à cet horizon.

La réforme qui est en cours de discussion avec les partenaires sociaux doit permettre de ramener les régimes de retraite à l’équilibre en 2020. Des économies pourraient être réalisées dès 2014.

3. La branche famille

La réforme du quotient familial présentée récemment (baisse du plafond du quotient familial de 2 000 à 1 500 euros par demi-part), ainsi que le gel et la modulation de l’allocation de base de la prestation d’accueil du jeune enfant (PAJE) et la suppression de la majoration du complément de libre choix d’activité (CLCA) doivent permettre de réaliser des économies structurelles significatives pour la branche famille dès 2014. Une partie de ces économies doivent permettre de financer le plan pluriannuel contre la pauvreté (revalorisation de l’aide aux familles monoparentales et aux familles nombreuses sous le seuil de pauvreté).

L’économie nette de ces mesures doit être d’environ un milliard d’euros pour la branche famille, ce dont le programme de stabilité présenté en avril tient déjà compte.

Votre rapporteur propose également la diminution du montant du complément de libre choix du mode de garde (CMG) au-delà d’un certain revenu. En effet, ce complément s’élève à 173 euros par mois au-delà de 53 000 euros de revenus annuels (ménage avec deux enfants) pour les ménages qui emploient une assistante maternelle ou une garde d’enfants à domicile, sans limite de revenus. On pourrait envisager un nouveau seuil de revenus à partir duquel le complément serait réduit. Le Haut Conseil de la famille travaille ainsi sur de possibles modulations des barèmes dans le but de renforcer la dimension redistributive de la politique familiale.

Enfin, le recours à des appels d’offre ouverts et impartiaux concernant les systèmes d’information doit permettre à la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF) de réaliser de substantielles économies de fonctionnement.

Les modalités du transfert des recettes supplémentaires d’impôt sur le revenu vers la caisse nationale ne sont pas encore connues. Il s’agira probablement d’affecter un produit équivalent d’une autre taxe actuellement partagée entre l’État et la sécurité sociale. Se pose la question du dynamisme de l’assiette qui sera choisie par rapport à celle de l’impôt sur le revenu.

Les prochaines lois de finances et de financement de la sécurité sociale devront également prendre en compte le coût du financement des 275 000 nouvelles places de garde annoncées d’ici à 2017.

B. RENFORCER ET SIMPLIFIER LES RECETTES DE LA PROTECTION SOCIALE

Du fait de l’atonie de la masse salariale en 2013, les prévisions de recettes de la sécurité sociale pour 2014, à législation inchangée, pourraient devoir être revues à la baisse. Rappelons que selon la Commission des comptes de la sécurité sociale, la perte d’un point de masse salariale a pour effet la dégradation d’environ 2 milliards d’euros des recettes du régime général, toutes branches confondues.

Le programme de stabilité tient déjà compte de la révision à la baisse de la croissance de la masse salariale puisque le solde effectif des administrations de sécurité sociale en 2014 est passé de l’équilibre dans la loi de programmation (compte tenu de la Caisse nationale d’amortissement de la dette sociale et du Fonds de réserve pour les retraites) à - 0,5 % du PIB dans le programme de stabilité (soit une dizaine de milliards d’euros).

Des mesures supplémentaires de réduction des niches fiscales et sociales pourraient compenser en partie le moindre rendement des mesures de recettes mises en œuvre en 2013.

Toutefois, le répit d’un an accordé par la Commission européenne doit permettre de laisser jouer les stabilisateurs automatiques sans avoir à prendre des mesures fiscales et sociales qui pourraient être néfastes à la croissance et à l’emploi.

En premier lieu, votre rapporteur rappelle que la contribution de 0,3 % sur les pensions imposables créées dans la loi de financement pour 2013, et affectée exceptionnellement cette année au Fonds de solidarité vieillesse, devra être affectée à la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) en 2014, comme cela est déjà prévu par la loi.

En matière de niches sociales, votre rapporteur souhaite que soit revue la situation des travailleurs frontaliers, à l’occasion de l’arrivée à échéance de la convention franco-suisse en 2013. Il examinera avec attention le rapport de la mission conjointe de l’Inspection générale des affaires sociales et de l’Inspection des finances qui doit être remis cet été.

En matière de taxes comportementales, l’action sur l’alcool et le tabac doit être poursuivie. Le rapport d’étape de juin 2013 du Haut Conseil pour le financement de la protection sociale montre que l’action sur les prix du tabac a un impact particulièrement sensible sur les comportements des adolescents et des jeunes adultes. À cet égard, il faut veiller à ce toutes les formes de tabac soient frappées de la même manière, afin d’éviter les attitudes de contournement au profit du tabac à rouler. Le Haut Conseil recommande également de taxer à un même niveau l’unité d’alcool ingérée, quel que soit le produit consommé.

S’agissant d’autres produits alimentaires dont la consommation excessive nuit à la santé, votre rapporteur souhaite poursuivre le travail de réflexion sur l’assiette pertinente de taxation.

Enfin, un chantier d’une autre ampleur doit être ouvert : celui de la simplification et de la clarification des recettes de la sécurité sociale. Le rapport du Haut Conseil montre combien les notions d’universalité, de redistribution, d’assurance et de solidarité sont imbriquées voire confondues dans les différentes branches de la sécurité sociale. Ainsi, l’assurance maladie était historiquement universelle dans ses prestations mais contributive dans ses ressources ; toutefois, la CSG a pris de plus en plus d’importance dans les recettes de la CNAMTS. L’assurance vieillesse fonctionne selon un principe contributif mais comporte de nombreux éléments de solidarité.

Le Haut Conseil propose plusieurs scénarios de clarification du financement de la protection sociale, par branche. Les propositions les plus importantes portent sur la branche famille, et par répercussion sur la branche vieillesse et la branche maladie.

Le premier scénario consisterait à échanger, entre la branche famille et la branche vieillesse, des cotisations employeurs et des impôts et taxes : les impôts et taxes seraient réservés à la branche famille et la branche vieillesse serait à nouveau principalement financée par des cotisations.

Le deuxième scénario entraînerait des réaffectations plus importantes des impôts et taxes aujourd’hui attribués aux branches famille et maladie, de façon à concentrer au sein de cette dernière l’ensemble des taxes comportementales.

Le troisième scénario peut être cumulé au premier ou au second : il substituerait, au sein des prélèvements à la charge des ménages, de la CSG aux cotisations salariales, dans le but d’alléger le coût du travail.

Si la clarification du financement de la sécurité sociale n’est pas de nature à apporter de nouvelles recettes, elle permet néanmoins de rendre les prélèvements plus facilement acceptables par les assurés.

C. LA QUESTION DE LA DETTE DE LA SÉCURITÉ SOCIALE

La persistance des déficits du régime général pose la question du traitement de la dette.

Les déficits de la branche vieillesse sont repris chaque année jusqu’en 2018 (4) par la Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES) en vertu de la loi de financement pour 2011, dans le cadre de la réforme des retraites de 2010. En revanche, l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) accumule les déficits des autres branches.

Le solde de « trésorerie » de l’ACOSS s’est élevé à - 16,6 milliards d’euros au 31 décembre 2012, après avoir atteint - 4,7 milliards d’euros fin 2011. La variation de trésorerie tient compte d’une reprise de dette par la CADES de 6,65 milliards d’euros effectuée entre mars et mai 2012, au profit de la branche vieillesse.

La loi de financement pour 2012 avait fixé le plafond de trésorerie de l’ACOSS à 22 milliards d’euros. Cette limite a été respectée, avec un point bas de trésorerie qui s’est établi à - 18,4 milliards d’euros le 14 décembre 2012.

En juin 2013, la CADES devrait reprendre 7,7 milliards d’euros à la CNAV et au FSV. Toutefois, la trésorerie de l’ACOSS devrait atteindre un point bas à - 27,8 milliards d’euros, sans dépasser le plafond de trésorerie fixé à 29,5 milliards pour 2013.

L’accumulation de ces déficits pose inévitablement la question de leur reprise par la CADES, ou, pourquoi pas, par le budget de l’État (comme c’était le cas avant 1996).

Dans le cadre des dispositions organiques en vigueur, les transferts de dette à la CADES doivent s’accompagner d’un relèvement de la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS). Une autre solution consiste à repousser l’échéance de remboursement de la dette, comme la précédente majorité avait décidé de le faire, prolongeant cette échéance de quatre ans. Cette mesure n’a d’autre effet que de reporter sur les générations futures le paiement des dépenses d’aujourd’hui.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

Au cours de sa séance du mercredi 26 juin 2013, la commission des affaires sociales examine le rapport d’information de M. Gérard Bapt, préalable au débat d’orientation des finances publiques.

Après l’exposé du rapporteur, plusieurs commissaires sont intervenus dans la discussion générale.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Comme je vous l’ai indiqué plus tôt, je regrette, au nom de tous les membres de la commission, la réception tardive du rapport préparatoire au débat d’orientation des finances publiques que je n’ai pu vous faire parvenir qu’hier dans l’après-midi. J’adresserai un courrier en ce sens au ministre de l’économie et des finances.

Je pense que l’exposé qui vient de nous être fait devrait dissuader certains de nos collègues de la commission des finances qui seraient tentés par une fusion de la loi de finances et de la loi de financement de la sécurité sociale. À l’évidence, les recettes et les dépenses de la sécurité sociale présentent une spécificité qui justifie un examen distinct de celles du budget de l’État, ne serait-ce que dans un souci de clarté.

Je vous rappelle, par ailleurs, que nous entendrons prochainement Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé, sur la stratégie nationale de santé. Nous auditionnerons également, dans le courant du mois de juillet, le professeur Michel Reynaud, addictologue, qui a rendu un rapport à la demande de la Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (MILDT) dans lequel il souligne l’efficacité des taxes comportementales pour lutter contre les addictions qui constituent une menace pour notre société.

M. Jean-Marc Germain. Ce débat est un moment important pour la commission des affaires sociales : nous en arrivons à « l’heure de vérité » sur nos choix politiques. Le groupe SRC est, sans surprise, globalement satisfait des choix du Gouvernement qui reprennent les orientations déjà définies l’an dernier. L’objectif est celui d’une gestion rigoureuse de l’argent public, mais sans rigueur. Il est indispensable, compte tenu de la situation économique, que chaque euro soit bien dépensé, sans pour autant « casser » la croissance qui doit, tout au contraire, être soutenue.

S’agissant du passé, il convient de dépasser les polémiques stériles. Nous devons nous retrouver, droite et gauche confondues, pour redresser notre pays. Je note que nous obtenons des recettes supplémentaires et, contrairement aux années passées, une nette diminution du déficit structurel, sans précédent – de - 1,2 % – grâce à des économies dans les dépenses qui diminuent de 300 millions d’euros en 2012. Un effort est donc consenti pour agir sur les deux leviers.

Les économies réalisées dans les dépenses de santé illustrent la volonté d’être rigoureux. Des réductions importantes sont obtenues en matière de médicaments ou de dépenses en faveur des laboratoires pharmaceutiques. Cela va dans le bon sens.

Pour l’avenir, il me semble qu’en tant que parlementaires, nous devons émettre un avis sur le scénario économique qui nous est proposé, à savoir une croissance proche de zéro en 2013 puis un retour à une croissance tendancielle plus dynamique. Je pense que notre pays a les moyens d’atteindre un taux de croissance de 2 %, notamment par un effet de rattrapage, après une période de moindre dynamisme. C’est sans doute un scénario pour lequel il faudra se battre, mais il n’est ni pessimiste, ni exagérément optimiste. Il repose sur une politique offensive, notamment en matière d’investissements publics et privés, et réaliste.

Concernant la future stratégie, un retour à l’équilibre des comptes est prévu pour 2016 s’agissant du solde structurel, et, pour les comptes de la sécurité sociale, un excédent structurel est attendu pour 2017. Je me réjouis d’ailleurs du choix d’un objectif de solde structurel, rendu possible par la signature du traité de l’été dernier : il devrait nous éviter un scénario « à la grecque » dans lequel à force de vouloir combler des déficits conjoncturels, on en vient à les aggraver.

J’en viens à la méthode retenue, qui me paraît pertinente. Elle repose sur la modernisation de l’action publique et des économies réalisées au cas par cas, et non pas « à la hache » comme cela était le cas avec la révision générale des politiques publiques (RGPP). Les économies seront réalisées dans la justice, avec la recherche permanente du progrès. Dans le domaine de la santé, le grand enjeu pour les années à venir sera le vieillissement de la population ; en matière de politique familiale, ce sera le mode de garde des enfants ; ce sera la pénibilité du travail et l’égalité entre femmes et hommes pour ce qui concerne les retraites.

M. Jean-Pierre Door. En préalable, je tiens à vous assurer de notre soutien, Madame la Présidente, dans vos démarches auprès du ministère de l’économie et des finances. Il est inadmissible d’avoir dû examiner, dans la nuit, les documents qui nous ont été transmis si tardivement. Je félicite d’ailleurs le rapporteur pour son travail de rédaction nocturne…

Mme la présidente Catherine Lemorton. Je vous rappelle que nous avons eu, nous aussi, à connaître des situations similaires sous la précédente législature.

M. Jean-Pierre Door. Peut-être, mais je croyais que « le changement, c’était maintenant ! ».

J’en viens au fond. Jusqu’en 2008, on a enregistré une nette diminution des déficits. Ceux-ci ont recommencé à se creuser en 2009 et 2010 pour ce qui concerne l’assurance maladie, pour passer de 10 milliards d’euros en 2008 à 20 milliards d’euros en 2010, en raison de la crise. Cette situation nous a conduits à adopter en 2011, à l’initiative de M. François Fillon, une loi de financement de la sécurité sociale rectificative, grâce à laquelle les déficits ont reflué, passant de 2011 de 12 milliards à 8 milliards d’euros pour la branche maladie, puis à 5,9 milliards d’euros en 2012.

J’appelle donc l’actuelle majorité à un peu plus de modestie et de prudence. On constate aujourd’hui, avec la Commission des comptes de la sécurité sociale, une nette reprise de la dégradation des comptes sociaux, avec un déficit de 14,3 milliards d’euros dont 2 milliards de plus pour la seule branche maladie.

Vous avez voulu, au mois d’octobre dernier, rester « droits dans vos bottes » : je me souviens des réflexions de M. Jérôme Cahuzac, alors ministre du budget, et de Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé, lorsque nous attirions leur attention sur le caractère totalement irresponsable des prévisions qui étaient faites, à savoir un taux de croissance économique de 0,8 %, un taux de croissance de la masse salariale de 2,4 % et une progression de l’Objectif national des dépenses d’assurance-maladie (ONDAM) de 2,7 %.

Nous constatons aujourd’hui que nous avions alors raison dans notre analyse, confirmée, d’ailleurs, par la Commission des comptes de la sécurité sociale.

Maintenant, que faire ? Les déficits pourraient devenir abyssaux, surtout si vous continuez sur la même ligne. Certains points sont positifs : l’ONDAM est respecté, ce qui est tout à l’honneur de la médecine de ville dont il faut saluer l’esprit de responsabilité. Les dépenses hospitalières se sont stabilisées. Il est vrai, aussi, que nous n’avons pas eu à connaître de grande épidémie – il n’est pas sûr qu’il en soit toujours ainsi.

L’adoption d’une loi de financement de la sécurité sociale rectificative me paraît désormais indispensable, alors que telle ne semble pas être votre intention. On nous dit, monsieur le rapporteur, que toute évolution des prélèvements obligatoires est entourée d’un certain nombre de risques : lesquels ? Allez-vous être contraints d’augmenter ces prélèvements ? Avec une prévision de croissance délicate pour 2013 et 2014, qui sera défavorable pour les régimes de retraites et les recettes fiscales, serez-vous dans l’obligation d’augmenter la CSG, les cotisations de sécurité sociale et les impôts comme l’an dernier, alors qu’on voit bien, aujourd’hui, que ces mesures ont été inefficaces pour résorber les déficits ?

La solution, à mes yeux, consiste à réviser l’ONDAM pour en fixer le taux de croissance à 1,8 % ou 2 %, et donc à adopter une loi de financement de la sécurité sociale rectificative.

Mme la présidente Catherine Lemorton. Je vous rappelle, monsieur Door, que nous avons connu, cette année, une épidémie de grippe importante. Cela démontre que les professionnels de santé peuvent maîtriser les comptes sociaux et que tous les malades ne sont pas des fraudeurs…

M. Jean-Louis Roumegas. Nous atteignons aujourd’hui les limites de l’exercice, compte tenu des délais dont nous avons disposé pour étudier le rapport qui nous a été remis.

J’émettrai une remarque d’ordre général. Je ne pense pas que l’on puisse se contenter d’une approche strictement comptable en faisant l’impasse sur les besoins de santé de nos concitoyens et sur la politique de santé publique. Dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013, nous nous sommes engagés à améliorer les soins et à lutter contre les déserts médicaux. Quel est le bilan dans ces domaines ? Le rapporteur a évoqué la politique de prévention, qui repose, notamment, sur des taxes comportementales. Cette approche doit être généralisée.

Il convient aussi de mener un travail d’évaluation concernant les « maladies de civilisation », telles que les qualifie l’Organisation mondiale de la santé (cancers, allergies par exemple), et qui contribuent au « trou » de la sécurité sociale. L’espérance de vie en bonne santé régresse. Il nous faut répondre à cet enjeu sanitaire, grâce à une politique de prévention ambitieuse. On nous promet une grande loi de santé publique, mais son examen a été reporté à 2014. Que fait-on, en attendant, pour l’éducation à la santé, la lutte contre la malnutrition et la « malbouffe », ou la lutte contre les risques chimiques ? Nous ne disposons pas d’évaluation en la matière. On ne peut, en tout état de cause, se contenter d’une approche strictement comptable.

M. Arnaud Robinet. La question des finances publiques est un enjeu majeur pour l’avenir de notre pays et chaque acteur de la dépense – l’État, les collectivités territoriales et les administrations de sécurité sociale – doivent contribuer significativement à la réduction des déficits publics.

Depuis plus de trente ans, les finances publiques ont été en déficit de manière permanente. Il faut remonter à 1974 pour trouver la trace d’un excédent des administrations publiques. Conséquence directe de ces déficits récurrents, la dette publique a explosé.

Le Fonds monétaire international (FMI), s’il adresse un satisfecit aux gouvernements sur leurs finances publiques, « épingle » la France. À l’issue de sa mission d’évaluation annuelle, il estime que la récession sera de 0,2 % cette année dans notre pays, contre 0,1 % dans ses précédentes prévisions publiées mi-avril, et que la croissance ne redémarrera que très mollement en 2014.

Les critiques ne viennent pas que du FMI, mais de nombre d’institutions : Haut Conseil des finances publiques, Cour des comptes, Commission européenne, etc.

Et pour cause : les déficits publics pourraient atteindre au moins 4 % du produit intérieur brut (PIB) en 2013 au lieu des 3,7 % prévus par le Gouvernement. La dette publique devrait dépasser 93 % du PIB en 2013. Les recettes fiscales seront inférieures d’au moins 15 milliards d’euros aux prévisions gouvernementales. Les dépenses, essentiellement celles de la sécurité sociale, pourraient déraper d’environ 5 milliards d’euros par rapport à ces mêmes prévisions. Enfin, le manque de réformes d’ampleur fait que le chômage continuera à augmenter, avec les conséquences que l’on connaît sur nos finances publiques. Sur six mois, l’augmentation du taux de chômage a atteint 0,6 point et la tendance n’est pas prête de s’inverser. L’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) estime que le taux de chômage continuera à augmenter jusqu’à fin 2014 malgré l’expansion des emplois aidés et une plus grande flexibilité rendue possible par l’accord sur le marché du travail. Le taux de chômage devrait atteindre 11 % fin 2013 et continuer à progresser en 2014 pour atteindre 11,2 % de la population active à la fin de l’année prochaine. Vous promettiez pourtant un rapide changement…

Je conclurai en conseillant à notre rapporteur Gérard Bapt, qui évoquait la réforme des retraites de 2010, de lire les rapports de la Caisse nationale d’assurance vieillesse qui montrent qu’elle permet de retrouver un équilibre pour le régime général.

Mme Marie-Françoise Clergeau. Je centrerai mon intervention sur la branche famille. Nous avons pour volonté d’assurer sa pérennité et de rendre la politique familiale plus juste par une meilleure redistribution des aides aux familles, en les ciblant davantage en direction de celles qui connaissent le plus de difficultés, les familles monoparentales et celles qui se situent en dessous du seuil de pauvreté.

Je note également la volonté du Gouvernement d’augmenter les moyens du Fonds national d’action sociale, qui progresseront d’environ 40 % dans les années à venir, pour atteindre 6,5 milliards d’euros en 2017, soit une augmentation de 2 milliards par rapport à aujourd’hui.

Une meilleure distribution des prestations familiales a été présentée aux acteurs concernés il y a quelques semaines. La convention entre la Caisse nationale d’allocations familiales (CNAF) et l’État est en cours de signature : c’est un moment important qui permettra de fixer les règles pour l’avenir.

Je rappelle enfin que nous disposons du Haut Conseil de la famille, structure très dynamique et qui produit de nombreux travaux, comme l’a souligné le rapporteur. Actuellement, le Haut Conseil travaille, à la demande du Gouvernement, sur les barèmes des prestations familiales, dans un souci constant non pas d’économies mais de justice renforcée. Il me semble nécessaire d’attendre ses conclusions afin d’être totalement éclairés sur les évolutions que nous pourrions apporter à la branche famille, au-delà des propositions déjà présentées le 3 juin dernier par le Premier ministre.

Mme Véronique Louwagie. Je prends acte de la volonté du Gouvernement de rétablir l’équilibre des comptes publics d’ici la fin de la législature : je m’inquiète néanmoins lorsque je vois que notre déficit devrait atteindre 4 % du PIB, que les chiffres du chômage et la dette continuent d’augmenter et lorsque j’entends que le ministre de l’éducation nationale annonce la création de 10 000 postes supplémentaires en plus des 60 000 postes déjà programmés pour la prochaine rentrée scolaire dans les collèges et les lycées.

Il a été évoqué une loi sur la dépendance qui est très attendue. Il est vrai que le vieillissement de la population est une problématique lourde. Or, les services à domicile et les places d’hébergement pèsent lourdement sur les départements et nous savons que ceux-ci sont dans une situation difficile. Qu’en est-il de cette loi tant annoncée ?

M. Gérard Sebaoun. S’agissant du bilan relatif à l’exercice 2012, le rapport préparatoire au débat d’orientation sur les finances publiques montre bien que les dépenses d’assurance maladie ont ralenti : on a assisté à une moindre consommation de soins, les honoraires sont restés stables, de même que la consommation de médicaments. De ce point de vue, donc, 2012 n’est pas une mauvaise année. Je souscris entièrement aux préconisations du rapporteur pour 2014 : il faut retrouver des économies et de la performance sur les systèmes d’information en santé, s’inscrire à plein dans la stratégie nationale de santé, notamment par la mise en place d’un équilibre entre l’hôpital et les soins de ville, l’application des bonnes pratiques édictées par la Haute Autorité de santé ou encore une action sur les prix des princeps lorsqu’il existe des médicaments génériques. Enfin, il faut une médecine plus spécialisée.

Enfin, il est nécessaire d’améliorer la qualité de nos indicateurs de santé : on ne peut avoir une approche strictement mathématique du problème.

Mme Isabelle Le Callenec. Je tiens à souligner votre grand optimisme, voire votre irréalisme, concernant le retour de la croissance dès l’année prochaine, alors même qu’elle est aujourd’hui de 0 %. Poser une hypothèse de croissance de 1,2 % pour 2014 puis de 2 % de 2015 à 2017 me semble utopiste. S’agissant du retour à l’équilibre des comptes, la décentralisation ne modifiera en rien la dynamique des dépenses et des recettes. Avec 4,5 milliards d’euros en moins de dotations, en revanche, nul doute que cela aura un effet sur leur capacité d’investissement. Vous parlez d’identifier les niches les plus efficientes, mais je m’interroge sur la capacité à définir ces niches. Enfin, il faut insister sur la nécessité de lutter contre la fraude, et en particulier, contre le travail dissimulé, qui constitue un réel problème, en particulier depuis la suppression de la défiscalisation des heures supplémentaires. S’agissant de la maîtrise des dépenses enfin, je m’inquiète de ce que l’éducation soit dans notre pays un guichet ouvert, ou encore de l’importance sans cesse soulignée de la police et de la gendarmerie, mais jamais de la santé publique, qui n’apparaît pas comme étant prioritaire pour ce Gouvernement.

Olivier Véran. Il faut poursuivre le processus de réforme de notre modèle social qui a été initié : nous le faisons sur la famille, nous le ferons sur les retraites. Je tiens néanmoins à appeler l’attention sur un point particulier : lorsque le rapporteur évoque la nécessité de contenir l’envolée du coût des médicaments et des dispositifs innovants, il me semble important de rappeler que l’investissement dans l’innovation est un moteur de la croissance française. Ainsi, il est par exemple très difficile aujourd’hui pour le parc hospitalier français de renouveler ses technologies, et je m’interroge sur l’éventualité de trouver d’autres sources de financements pour de tels investissements dans nos hôpitaux.

M. Bernard Perrut. Vous me paraissez excessivement optimiste. Il est nécessaire de rétablir l’équilibre des comptes : nous ne pouvons pas continuer à financer nos comptes sociaux par du déficit. Il convient de prendre des mesures structurelles pour corriger la trajectoire des finances sociales. Il s’agit d’un point qui a été souligné par le rapporteur, et il convient donc d’en faire peser le poids sur l’État et ses opérateurs, les administrations de sécurité sociale, mais aussi sur les collectivités locales. Concernant ces dernières, à la lecture du rapport du Gouvernement on est en droit de s’inquiéter. Que lit-on : sur la période 2015-2017, il est prévu une hausse du taux d’impôts directs ; entre 2013-2015, on parle d’une baisse de 3 milliards d’euros des dotations aux collectivités, et enfin, il est précisé que sur la période, l’investissement local poursuivra sa baisse. S’il faut trouver des solutions pour rétablir les comptes, ces mesures pèseront sur les territoires, et cela est inacceptable.

Enfin, j’aurais souhaité avoir davantage d’éléments sur l’amélioration des comptes des hôpitaux que le rapporteur a évoquée tout à l’heure.

M. Michel Liebgott. L’opposition a adopté un plan de relance en 2008-2009 intégrant des dépenses supplémentaires : je suis donc surpris par sa réaction aujourd’hui. Je m’étonne donc de voir le Président de la commission des Finances dire aujourd’hui que les trois quarts de l’augmentation de la dépense sont imputables aux dépenses sociales. Dans un contexte comme le nôtre, les prestations sociales jouent un rôle important d’amortisseur de la crise ; elles sont indispensables aux plus défavorisés d’entre nos compatriotes. Il n’est donc pas question de revenir sur le niveau des prestations sociales aujourd’hui, qui sont plus que jamais cruciales. Je préfère donc entendre le Gouvernement annoncer un effort sur les dépenses des ministères et sur le budget de l’État que sur ces dépenses sociales qui bénéficient aux plus défavorisés.

M. Dominique Dord. Vous nous reprochiez il y a quelques années une approche comptable de la sécurité sociale, monsieur le rapporteur : votre introduction est pourtant strictement comptable. Vous montrez d’ailleurs bien dans cette introduction que ce n’est pas M. Barroso qui asphyxie la France, mais que notre pays est tenu par les traités qu’il a signés. Je m’associe également au souhait formulé par nos collègues de la commission des Finances, qui demandent un examen conjoint des comptes de la sécurité sociale et du budget de l’État, car quand on voit que pour inverser la courbe du chômage, le Président de la République s’est engagé à financer des contrats aidés supplémentaires à hauteur d’un milliard d’euros pour 2014, ou encore que 10 000 postes supplémentaires doivent être financés à la rentrée prochaine dans l’Éducation nationale, on peut en effet souhaiter un tel examen conjoint, pour être en mesure d’évaluer l’impact réel que ces mesures auront sur l’équilibre global des comptes.

M. Christian Hutin. Je souscris aux propos du rapporteur, lorsqu’il évoque le problème de la non diminution du prix des princeps, alors même que des génériques existent : il conviendrait d’être plus efficient sur ce sujet. J’aimerais également évoquer une question très précise : celle des fonds dévolus aux victimes de l’amiante au sein de la branche accidents du travail – maladies professionnelles (AT-MP). Le Gouvernement avait accepté à l’automne dernier un amendement que j’avais déposé pour permettre d’ouvrir une seconde voie d’indemnisation à des personnes qui aujourd’hui sont victimes de l’amiante mais ne parviennent pas à obtenir d’indemnisation : je pense aux intérimaires, aux sous-traitants ou encore à des artisans isolés. Il me semble possible de reconnaître leur qualité de victime de l’amiante et de leur ouvrir la possibilité d’être indemnisés sans obérer les comptes de la sécurité sociale.

M. Jean-Pierre Barbier. S’il est vrai que les comptes de la sécurité sociale constituent un budget important et difficile, je me réjouis que les dépenses concernant les soins de ville et l’hôpital se situent en dessous de l’ONDAM, en particulier grâce aux efforts fournis par les professionnels. Je dénonce cependant un mal français, qui consiste à demander l’année suivante davantage d’efforts à un secteur qui en a déjà accomplis de conséquents l’année précédente et qui a respecté ses objectifs, en considérant que des économies encore plus importantes peuvent être réalisées. C’est une sorte de « double peine ».

La nouvelle gouvernance hospitalière instaurée par la précédente majorité porte désormais ses fruits. Vous indiquez que vous réfléchissez à des évolutions en la matière, je crois qu’il faut rester prudent dans ce domaine. Lorsque l’on cherche des économies en matière de soins de ville, on pointe toujours le secteur du médicament. Certes le médicament coûte cher et les Français en consomment trop, mais nous devons évaluer l’équilibre entre les recettes et les dépenses générées par ce secteur. En effet, le médicament constitue une source d’innovation, d’emploi et de développement industriel, et permet d’améliorer les soins apportés à nos concitoyens. Il ne faut pas toujours stigmatiser ce secteur. Enfin, selon moi, penser que si les recettes baissent, les dépenses diminueront de manière automatique, revient à oublier que nous avons un devoir de solidarité nationale vis-à-vis des Français et de leur santé.

M. Pierre Morange. Je ne reprendrai pas les propos très pertinents de l’orateur de mon groupe Jean-Pierre Door, et me limiterai à une seule observation pour constater la nécessité ardente de dégager des économies plus substantielles que celles envisagées, au vu de la fragilité du dynamisme des recettes. Je remercie le rapporteur d’avoir salué les recommandations relatives au secteur sanitaire et social de la Mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (MECSS), que j’ai l’honneur de coprésider avec mon collègue Jean-Marc Germain, qu’il serait judicieux de diffuser davantage et d’appliquer. Votre rapport évoque la nécessité de recourir à des appels d’offre ouverts et impartiaux pour les systèmes d’information : bénéficierons-nous de procédures satisfaisantes en la matière ? Il me semble, d’ailleurs, qu’au regard des marges de manœuvre existantes, de telles procédures pourraient être étendues à l’ensemble du champ sanitaire et social.

M. Gilles Lurton. Je constate que le déficit de la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF) en 2012 s’élève à 2,5 milliards d’euros et que le montant des prestations indûment versées, suite à des erreurs de calcul de la caisse, en excluant les fraudes, atteint 2,13 milliards d’euros. Nous avions reçu l’année dernière le Premier président de la Cour des comptes, qui avait critiqué la grande opacité des mesures de lutte contre ce problème prises par la Caisse nationale. Disposons-nous d’informations sur ces mesures et leurs effets ?

M. Élie Aboud. La prévision de croissance du PIB pour 2013 a été réduite à 0,1 %, alors que le Gouvernement avait retenu une prévision de croissance de 0,8 %. Les perspectives économiques sont sombres : la masse salariale privée devrait diminuer de 1 point et la réduction des déficits, amorcée en 2011, devrait donc connaître un coût d’arrêt, au vu de l’augmentation probable des prestations de sécurité sociale. Alors que le Gouvernement prévoyait un déficit de 11,7 milliards d’euros, il se situera probablement entre 14 et 15 milliards d’euros. Les prestations du seul régime général devraient augmenter de 3,4 %, contre les 3,1 % annoncés.

M. Gérard Bapt, rapporteur. Nous tenons ce matin le débat d’orientation budgétaire sur les finances sociales. Or les interventions de certains collègues ont porté sur des domaines ne relevant pas de ce champ, comme la décentralisation ou l’éducation nationale.

Je tiens à rappeler à Bernard Perrut et à Véronique Louwagie et Isabelle Le Callennec que si le Gouvernement a prévu de diminuer la dotation aux collectivités territoriales de 1,5 milliard d’euros par an, le programme présidentiel de l’UMP proposait une réduction de 2 milliards d’euros par an.

Comme l’a souligné Élie Aboud, le rapport de la Commission des comptes de la sécurité sociale prévoit une stabilisation du déficit en 2013. En 2012, les objectifs avaient été tenus, grâce à la loi de finances rectificative qui avait créé 1,5 milliard d’euros de recettes supplémentaires. En revanche, en 2013, le ralentissement de l’économie et la baisse des cotisations sociales liées à la masse salariale produiront une réduction des recettes d’environ 3 milliards d’euros. Si le déficit de la branche famille progresse de 700 millions d’euros, c’est avant tout en raison de la réduction des recettes.

Pour autant, il apparaît essentiel d’afficher des objectifs volontaristes, comme l’a fait M. Pierre Moscovici cette année et M. François Fillon avant lui, afin d’entretenir le moral des Français, ce à quoi ne contribuent pas les déclarations de Gilles Carrez. Je ne crois pas que le déficit dépassera 4 % en 2013, comme l’a affirmé Valérie Pécresse. Les prévisions de croissance restent un exercice difficile : je me souviens que la dissolution de l’Assemblée nationale en 1997 avait été notamment motivée par des prévisions pessimistes de croissance, alors que celle-ci est repartie à la hausse quelques mois plus tard. Nous devons travailler ensemble, majorité et opposition, au redressement des finances de notre pays et au redémarrage de la croissance.

S’agissant des prélèvements obligatoires, le Gouvernement fera porter son effort à 70 % sur les dépenses, et à 30 % sur de nouvelles recettes.

M. Dominique Dord. Quelles nouvelles recettes ?

M. le rapporteur. Les nouvelles recettes seront issues d’un travail sur les niches sociales, dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale, et sur les taxes comportementales, sur les tabacs et l’alcool par exemple, comme l’a évoqué la présidente de notre commission.

Pour répondre à Jean-Louis Roumégas, nous ne faisons pas l’impasse sur les réformes structurelles et mon rapport s’écarte, d’ailleurs, de la stricte présentation comptable. Reconnaissez que, de manière générale, l’ONDAM augmente plus vite que les recettes, malgré la réduction de la prévision de croissance à 0,1 % pour 2013.

À cet égard, comme l’a souligné Olivier Véran, il faut préserver des marges de manœuvre pour l’innovation, y compris en restructurant certaines filières comme les biotechnologies, pour l’équipement des hôpitaux et pour l’organisation régionale des soins. Concernant la prévention, n’oublions pas qu’il est difficile de chiffrer les retombées de politiques pluriannuelles qui doivent porter leurs effets jusqu’en 2017. Par exemple, dans le cas du bisphénol A, l’interdiction n’entrera en vigueur que le 1er janvier 2015 et l’on ne pourra en mesurer les bénéfices que dans plusieurs années. Une bonne politique de prévention repose aussi sur l’amélioration de l’organisation de l’accès aux soins, grâce au parcours de santé. S’agissant du débat sur les 15 milliards d’euros, suite aux déclarations de Gilles Carrez, qui a été évoqué par Arnaud Robinet, il aura lieu demain en commission des finances à l’occasion de l’audition du Premier président de la Cour des comptes.

Dans son dernier rapport, le Conseil d’orientation des retraites (COR) affirme que le déficit de l’ensemble des régimes de retraite s’élèvera à 20 milliards d’euros pour 2020. Le besoin de financement était déjà prévisible lors du vote de la réforme des retraites de 2010. Il s’agit de prévisions objectives.

Je tiens à saluer l’excellent travail accompli par la MECSS, coprésidée par Jean-Marc Germain et Pierre Morange. Il m’apparaît, en effet, anormal que les recommandations de la Cour des Comptes sur les économies à réaliser en matière de systèmes d’information et d’appels d’offres dans le secteur public et les branches de sécurité sociale, n’aient pas été respectées, alors même qu’il s’agit d’engagements pris dans le cadre de conventions d’objectifs et de gestion. Les appels d’offres doivent être impartiaux et ouverts et des inquiétudes persistent à ce sujet.

Pour répondre à Gilles  Lurton sur les prestations familiales indûment versées, la CNAF en récupère une majorité, mais pas l’ensemble car ce n’est pas toujours possible. Je ne connais, toutefois, pas le montant exact des prestations recouvrées dans ce cadre. Nous interrogerons la direction de la caisse à ce sujet.

Isabelle Le Callennec a évoqué le problème de la fraude liée au travail clandestin, le Gouvernement est très attentif à cette question et compte que la lutte contre ces phénomènes participe au redressement des comptes publics.

Enfin, les comptes de la branche AT-MP ont été présentés à l’équilibre, ce qui explique que, peut-être, je n’ai pas accordé l’attention certainement méritée à cette branche dans mon propos liminaire, au vu des délais très courts d’examen qui nous ont été impartis. Mais, comme l’a souligné Christian Hutin, il faut veiller à préserver ses capacités de financement des actions de prévention.

Pour conclure, je souhaite rappeler que notre commission doit travailler sur la stratégie nationale de santé et les réformes structurelles d’organisation des soins à la ville et à l’hôpital.

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La Commission autorise le dépôt du rapport d’information préalable au débat d’orientation des finances publiques.

1 () Depuis 2005, le pacte de stabilité et de croissance prévoyait que l’objectif de moyen terme ne pouvait être inférieur à - 1 % du PIB.

2 () Rappelons qu’en juillet 2012, la Cour des comptes estimait le déficit structurel de la France à 3,9 % du PIB en 2011, après 4,8 % en 2010.

3 () Le recul de l’âge légal de la retraite de neuf mois pour la génération 1952 puis de cinq mois par génération pour les suivantes se traduit par un profil annuel des départs très heurté. Ainsi l’atteinte de l’âge légal s’est trouvée décalée en 2013 pour tous les assurés nés entre mars et décembre 1952, entraînant un report massif de départs de 2012 à 2013.

4 () Dans la limite de 10 milliards d’euros.


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