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N° 4658

_____________

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 8 juin 2017

RAPPORT D’INFORMATION

FAIT

en application de l’article 29 du Règlement

au nom des délégués de l’Assemblée nationale à l’Assemblée

parlementaire du Conseil de l’Europe (1) sur l’activité de cette Assemblée

au cours de la deuxième partie de sa session ordinaire de 2017

par M. René ROUQUET

ET PRÉSENTÉ À LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

(1) La composition de cette délégation figure au verso de la présente page.

La Délégation de l’Assemblée nationale à l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe était composée, en octobre 2016, de : Mme Brigitte Allain, MM. Gérard Bapt, Denis Jacquat, Mme Marietta Karamanli, MM. Pierre-Yves Le Borgn’, Jean-Yves Le Déaut, François Loncle, Thierry Mariani, Jean-Claude Mignon, François Rochebloine, René Rouquet et Mme Marie Jo Zimmermann en tant que membres titulaires, et M. Damien Abad, Mme Danielle Auroi, M. Philippe Bies, Mmes Pascale Crozon, Marie-Christine Dalloz, Geneviève Gosselin-Fleury, Anne-Yvonne Le Dain, Martine Martinel, Marie-Françoise Perol-Dumont, Catherine Quéré, MM. Frédéric Reiss, Rudy Salles et André Schneider en tant que membres suppléants.

SOMMAIRE

Pages

PREMIER CHAPITRE : ACTIVITÉS DE LA DÉLÉGATION FRANÇAISE DEPUIS LA PRÉCÉDENTE PARTIE DE SESSION 7

ACTIVITÉS DU PRÉSIDENT 7

A. Commission et Bureau - Madrid (9 et 10 mars 2017) 7

B. Conférence sur la lutte contre le terrorisme – Saint-pétersbourg (27 et 28 mars 2017) 7

C. Conférence sur majorité et opposition – Bucarest (6 avril 2017) 8

SECOND CHAPITRE : 2ÈME PARTIE DE LA SESSION ORDINAIRE DE 2017 9

I. ACTUALITÉS DE LA DÉLÉGATION FRANÇAISE 10

A. La délégation et son bureau 10

B. Nominations et élections des parlementaires français 13

C. Rencontres de la délégation 13

II. INFORMATIONS GÉNÉRALES SUR LE DÉROULEMENT DE LA PARTIE DE SESSION 14

A. Ordre du jour et interventions des parlementaires français 14

B. Textes adoptés 15

C. Le rapport d’activité du bureau et de la commission permanente 18

D. remise du prix du musée de l’europe et du prix de l’europe 24

a) Le Prix du Musée de l’Europe 24

b) Le Prix de l’Europe 24

E. Examen des candidatures francaises au Comité européen pour la prévention de la torture (CPT) 25

III. SUITES DU VOYAGE DU PRÉSIDENT DE L'APCE EN SYRIE 26

IV. ÉCHANGES AVEC DIFFÉRENTES PERSONNALITÉS 28

A. Les questions au secrétaire général du conseil de l'europe 28

B. Communication du Comité des ministres à l’Assemblée, présentée par M. Ioannis Kasoulides, ministre des affaires étrangères de Chypre, président du comité des ministres 28

C. Discours de M. Prokopios Pavlopoulos, président de la République héllénique 31

D. Rapport d'activité de M. Nils muizneks, commissaire aux droits de l'homme 32

E. Discours de sa Majesté le roi Felipe VI d’Espagne 34

V. LA SITUATION DES DROITS DE L’HOMME DANS LE MONDE 36

A. Débat libre 36

B. Les valeurs européennes en danger : faire face à la montée de la xénophobie, de l’antisémitisme et de l’islamophobie en Europe 37

C. Détournement du système d'Interpol 38

D. La protection des droits des parents et des enfants appartenant à des minorités religieuses 38

E. La convergence technologique, l’intelligence artificielle et les droits de l’homme 40

F. La lutte contre les inégalités de revenus : un moyen de favoriser la cohésion sociale et le développement économique 43

VI. LA SITUATION DE LA DÉMOCRATIE ET DE L'ÉTAT DE DROIT DANS LES PAYS DU CONSEIL DE L'EUROPE 45

A. Observation des élections législatives en Bulgarie 45

B. Le fonctionnement des institutions démocratiques en Turquie 46

C. Les droits de l’homme dans le Caucase du Nord : quelles suites donner à la résolution 1738 (2010) ? 49

D. Débat selon la procédure d’urgence : évolutions inquiétantes en Hongrie : une nouvelle loi pour les ONG restreignant la société civile et la fermeture d’une université internationale 50

VII. LES APPORTS DU CONSEIL DE L'EUROPE AU DÉVELOPPEMENT DE L’ETAT DE DROIT ET DES DROITS DE L’HOMME 51

A. 25 ans de CPT : progrès accomplis et améliorations à apporter 51

B. Débat d’urgence : projet de Convention du Conseil de l’Europe sur les infractions visant des biens culturels 52

VIII. LES DROITS DES RÉFUGIÉS 53

A. Protéger les femmes réfugiées de la violence fondée sur le genre 53

B. Les possibilités d’améliorer le financement des situations d’urgence impliquant des réfugiés 54

PREMIER CHAPITRE :

ACTIVITÉS DE LA DÉLÉGATION FRANÇAISE
DEPUIS LA PRÉCÉDENTE PARTIE DE SESSION

Afin de mieux rendre compte des activités de la délégation française entre les parties de session de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE), le présent rapport expose, essentiellement sous forme de comptes rendus, les entretiens, déplacements et événements ayant concerné les membres de la délégation.

Depuis la 1ère partie de la session de 2017, qui s’était tenue du 23 au 27 janvier 2017, le président de la délégation a participé au Bureau de l’APCE, les 9 et 10 mars, à la conférence sur la lutte contre le terrorisme à Saint-Pétersbourg, les 27 et 28 mars, et à la conférence sur le rôle de la majorité et de l’opposition à Bucarest, le 6 avril.

ACTIVITÉS DU PRÉSIDENT

A. COMMISSION ET BUREAU - MADRID (9 ET 10 MARS 2017)

M. René Rouquet (Val-de-Marne – Socialiste, écologiste et républicain), président de la délégation française, a participé aux réunions du Bureau et de la Commission permanente de l’APCE, à Madrid, les 9 et 10 mars.

Cette réunion a permis de célébrer le 40ème anniversaire de l’entrée de l’Espagne au Conseil de l’Europe. Sa Majesté le roi d’Espagne a reçu les membres de la Commission permanente à cette occasion.

Par ailleurs, la présence d’une délégation de parlementaires russes a permis d’avoir un débat sur le retour éventuel de la délégation russe au sein de l’APCE.

B. CONFÉRENCE SUR LA LUTTE CONTRE LE TERRORISME – SAINT-PÉTERSBOURG (27 ET 28 MARS 2017)

À l’occasion de la commémoration des 20 ans de l’Assemblée interparlementaire de la Communauté des États indépendants (AIP-CEI) à Saint-Pétersbourg, une sous-commission ad hoc de la commission des questions politiques de l’APCE s’est rendue à Saint Pétersbourg.

M. René Rouquet (Val-de-Marne – Socialiste, écologiste et républicain), président de la délégation française, Mme Josette Durrieu (Hautes-Pyrénées – Socialiste et républicain) et Mme Sylvie Goy-Chavent (Ain – UDI-UC) faisaient partie de cette délégation. Ils ont participé, le 27 mars, à une réunion conjointe avec la Commission permanente sur les questions politiques et la coopération internationale de l’AIP-CEI dont le thème portait sur le terrorisme. Cette réunion a permis un échange de vues, notamment sur la crise syrienne.

Le 28 mars, la délégation a pu participer à la conférence parlementaire sur la lutte contre le terrorisme international, organisée conjointement par l’AIP-CEI et l’Assemblée parlementaire de l’OSCE. Parmi les thèmes de la conférence figuraient « la coopération internationale dans le domaine de la sécurité et la lutte contre le terrorisme », « les aspects humanitaires de la lutte contre le terrorisme », et « les fondements économiques et sociaux du cadre international de sécurité ».

C. CONFÉRENCE SUR MAJORITÉ ET OPPOSITION – BUCAREST (6 AVRIL 2017)

Ouverte par le Président de la République de Roumanie, M. Klaus Iohannis, en présence de nombreuses personnalités et universitaires, cette conférence a permis de débattre du statut de l’opposition et des rapports avec la majorité, au-delà même des textes. Le cas de la Roumanie a naturellement fait l’objet d’un débat approfondi.

SECOND CHAPITRE :

2ÈME PARTIE DE LA SESSION ORDINAIRE DE 2017

Notre Assemblée a un pouvoir limité, d’ordre essentiellement moral. Il suppose une crédibilité et une légitimité sans failles. Un certain nombre d’évolutions récentes étaient venues entamer celle-ci, des allégations de corruption à un déplacement problématique du président de l’APCE auprès de Bachar al Assad, sans parler de l’absence de débats sur des États divergeant de nos valeurs, ainsi la Pologne, la Hongrie, l’ancienne République Yougoslave de Macédoine, entre autres.

La partie de session d’avril s’est caractérisée par une réaction de l’Assemblée pour enrayer cette dérive inquiétante. On ne peut donc que se réjouir qu’un large consensus se soit finalement dégagé sur le principe de la mise en place d’une commission d’enquête externe et indépendante. Nous n’avons que trop tardé ! Espérons qu’elle pourra faire la lumière rapidement sur les graves accusations proférées à l’encontre de divers parlementaires et qui nuisent gravement à notre crédibilité.

La rencontre du président de l’APCE avec le dictateur syrien a également suscité le trouble au sein de notre Assemblée et à l’extérieur. Tant à l’intérieur qu’à l’extérieur, ce déplacement, qui plus est dans un avion russe, a paru à beaucoup en totale contradiction avec la vocation première de l’APCE et du Conseil de l’Europe. La saisine de la commission du Règlement et le rapport confié à Mme Maury Pasquier (Suisse – SOC) devraient permettre d’apporter une solution à ce problème qui compromet gravement l’image de l’Assemblée parlementaire.

Il est également heureux qu’un débat ait enfin pu avoir lieu sur la Hongrie. Ces dernières années, seul le Parlement européen débattait des problèmes graves existant dans nos États membres… Les débats sur l’observation des élections ont été également particulièrement riches. Formons le vœu que la prochaine partie de session de l’APCE poursuive dans cette voie.

I. ACTUALITÉS DE LA DÉLÉGATION FRANÇAISE

A. LA DÉLÉGATION ET SON BUREAU

La délégation française à l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe comprend vingt-quatre députés (douze titulaires et douze suppléants) et douze sénateurs (six titulaires et six suppléants), soit dix-huit sièges.

Composition de la délégation en avril 2017

Membres titulaires

 

Chambre Parlement national

Groupe
Parlement national

Groupe

APCE

       

Mme Brigitte Allain

Députée

NI

SOC

M. Gérard Bapt

Député

Socialiste, écologiste et républicain

SOC

Mme Maryvonne Blondin

Sénatrice

Socialiste et républicain

SOC

Mme Nicole Duranton

Sénateur

Les Républicains

PPE/DC

Mme Josette Durrieu

Sénatrice

Socialiste et républicain

SOC

M. Bernard Fournier

Sénateur

Les Républicains

PPE/DC

Mme Sylvie Goy-Chavent

Sénateur

UDI-UC

PPE/DC

M. François Grosdidier

Sénateur

Les Républicains

PPE/DC

M. Denis Jacquat

Député

Les Républicains

PPE/DC

Mme Marietta Karamanli

Députée

Socialiste, écologiste et républicain

SOC

M. Pierre-Yves Le Borgn’

Député

Socialiste, écologiste et républicain

SOC

M. Jean-Yves Le Déaut

Député

Socialiste, écologiste et républicain

SOC

M. François Loncle

Député

Socialiste, écologiste et républicain

SOC

M. Thierry Mariani

Député

Les Républicains

PPE/DC

M. Jean-Claude Mignon

Député

Les Républicains

PPE/DC

M. François Rochebloine

Député

Union des démocrates et indépendants

PPE/DC

M. René Rouquet

Député

Socialiste, écologiste et républicain

SOC

Mme Marie-Jo Zimmermann

Députée

Les Républicains

PPE/DC

Membres suppléants

 

Chambre Parlement
national

Groupe
Parlement national

Groupe

APCE

M. Damien Abad

Député

Les Républicains

PPE/DC

Mme Danielle Auroi

Députée

NI

SOC

M. Philippe Bies

Député

Socialiste, écologiste et républicain

SOC

M. Jacques Bigot

Sénateur

Socialiste et républicain

SOC

Mme Pascale Crozon

Députée

Socialiste, écologiste et républicain

SOC

Mme Marie-Christine Dalloz

Députée

Les Républicains

PPE/DC

Mme Geneviève Gosselin-Fleury

Députée

Socialiste, écologiste et républicain

SOC

M. Guy-Dominique Kennel

Sénateur

Les Républicains

PPE/DC

Mme Anne-Yvonne Le Dain

Députée

Socialiste, écologiste et républicain

SOC

M. Jacques Legendre

Sénateur

Les Républicains

PPE/DC

Mme Martine Martinel

Députée

Socialiste, écologiste et républicain

SOC

Mme Marie-Françoise Perol-Dumont

Sénatrice

Socialiste et républicain

SOC

M. Yves Pozzo Di Borgo

Sénateur

UDI-UC

PPE/DC

Mme Catherine Quéré

Députée

Socialiste, écologiste et républicain

SOC

M. André Reichardt

Sénateur

Les Républicains

PPE/DC

M. Frédéric Reiss

Député

Les Républicains

PPE/DC

M. Rudy Salles

Député

Union des démocrates et indépendants

PPE/DC

M. André Schneider

Député

Les Républicains

PPE/DC

Le Bureau de la délégation est composé de la façon suivante :

Président

M. René Rouquet

Député

Socialiste, écologiste et républicain

Président délégué

M. Jean-Claude Mignon

Député

Les Républicains

Première vice-présidente

Mme Josette Durrieu

Sénatrice

Socialiste et républicain

Vice-présidents

Mme Brigitte Allain

Députée

NI

 

Mme Marietta Karamanli

Députée

Socialiste, écologiste et républicain

 

M. Jacques Legendre

Sénateur

Les Républicains

 

M. François Loncle

Député

Socialiste, écologiste et républicain

 

M. François Rochebloine

Député

Union des démocrates et indépendants

 

M. André Schneider

Député

Les Républicains

 

Mme Marie-Jo Zimmermann

Députée

Les Républicains

B. NOMINATIONS ET ÉLECTIONS DES PARLEMENTAIRES FRANÇAIS

M. René Rouquet (Val-de-Marne – Socialiste, écologiste et républicain), président de la délégation française, a présidé les séances des mardi 25 avril après-midi, jeudi 27 avril après-midi et vendredi 28 avril.

Mme Maryvonne Blondin (Finistère – Socialiste et républicain) a été élue première vice-présidente de la Commission sur l’égalité et la non-discrimination.

Mme Sylvie Goy-Chavent (Ain – UDI-UC) devient membre titulaire de la sous-commission sur l’intégration de la commission des migrations, des réfugiés et des personnes déplacées. Elle a également désignée par le Bureau, sur proposition de son groupe, membre titulaire de la commission ad hoc pour l’observation des élections en Albanie (18 juin 2017).

Mme Geneviève Gosselin-Fleury (Manche – Socialiste, écologiste et républicain) a été désignée par le Bureau, sur proposition de son groupe, membre titulaire de la commission ad hoc pour l’observation de l’élection présidentielle en Albanie (18 juin 2017).

M. Yves Pozzo di Borgo (Paris – UDI-UC) a été désigné par le Bureau, sur proposition de son groupe, membre titulaire de la commission ad hoc pour l’observation des élections présidentielle en Albanie (18 juin 2017).

M. Frédéric Reiss (Bas-Rhin - LR) a été désigné par la commission de la culture, de la science, de l’éducation et des médias rapporteur sur « Pour la création d’un Ombudsman compétent pour qualifier le contenu sur internet de licite ou illicite par le biais d’une procédure d’examen du contenu visé ».

C. RENCONTRES DE LA DÉLÉGATION

Le Représentant permanent de la France auprès du Conseil de l’Europe, M. Jean-Baptiste Mattéi, a rencontré M. René Rouquet lundi 24 avril.

II. INFORMATIONS GÉNÉRALES SUR LE DÉROULEMENT DE LA PARTIE DE SESSION

A. ORDRE DU JOUR ET INTERVENTIONS DES PARLEMENTAIRES FRANÇAIS

Lundi 24 avril

– Rapport d’activité du Bureau et de la commission permanente et observation des élections anticipées en Bulgarie : Mme Marie-Christine Dalloz ;

– Communication du Comité des Ministres à l’Assemblée parlementaire, présentée par M. Ioannis Kasoulides, ministre des affaires étrangères de Chypre, Président du Comité des Ministres : M. René Rouquet et Mme Maryvonne Blondin ;

– Débat libre : Mmes Pascale Crozon et Josette Durrieu et M. Pierre-Yves Le Borgn’ ;

Mardi 25 avril

– Le fonctionnement des institutions en Turquie : Mmes Josette Durrieu et Nicole Duranton, MM. Bernard Fournier, Pierre-Yves Le Borgn’ et René Rouquet ;

– Questions à M. Thorbjørn Jagland, Secrétaire général du Conseil de l’Europe : MM. Bernard Fournier et Pierre-Yves Le Borgn’ ;

– Les droits de l’hommedans le Caucase du Nord : quelles suites donner à la Résolution 1738 (2010) ? : M. Bernard Fournier ;

– La lutte contre les inégalités de revenus : un moyen de favoriser la cohésion sociale et le développement économique : Mmes Maryvonne Blondin, Pascale Crozon et Marie-Christine Dalloz ;

Mercredi 26 avril

– Protéger les femmes réfugiées de la violence fondée sur le genre : Mmes Maryvonne Blondin et Pascale Crozon ;

– Discours de M. Prokopis Pavlopoulos, Président de la République hellénique ;

– Rapport annuel d’activité 2016 du Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe, M. Nils Muižnieks : Mmes Maryvonne Blondin et Josette Durrieu, et M. Pierre-Yves Le Borgn’ ;

– Débat d’actualité : Les valeurs européennes en danger : faire face à la montée de la xénophobie, de l’antisémitisme et de l’islamophobie en Europe : Mme Geneviève Gosselin-Fleury ;

– 25 ans de CPT : progrès accomplis et améliorations à apporter ;

– Détournement du système d’Interpol : nécessité de garanties légales plus strictes ;

Jeudi 27 avril

– Débat d’urgence : les évolutions inquiétantes en Hongrie : une nouvelle loi pour les ONG restreignant la société civile et la fermeture d’une université internationale ;

– Discours de sa Majesté le Roi d’ Espagne;

– La protection des droits des parents et des enfants appartenant à des minorités religieuses : Mme Anne-Yvonne Le Dain, MM. Frédéric Reiss et André Schneider ;

– Les possibilités d’améliorer le financement des situations d’urgence impliquant des réfugiés ;

Vendredi 28 avril

– La convergence technologique, l’intelligence artificielles et les droits de l’homme: Mme Anne-Yvonne Le Dain, MM. Jean-Yves Le Déaut, rapporteur, M. Frédéric Reiss et André Schneider ;

– Débat d’urgence : projet de Convention du Conseil de l’Europe sur les infractions visant des biens culturels : M. André Schneider.

B. TEXTES ADOPTÉS

Le Règlement de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe distingue trois types de textes : les avis, les recommandations et les résolutions :

– aux termes de l’article 24.1.a, une recommandation consiste en une proposition de l’Assemblée adressée au Comité des ministres, dont la mise en œuvre échappe à la compétence de l’Assemblée, mais relève des gouvernements ;

– définie à l’article 24.1.b, une résolution exprime une décision de l’Assemblée sur une question de fond, dont la mise en œuvre relève de sa compétence, ou un point de vue qui n’engage que sa responsabilité ;

– les avis répondent aux demandes qui sont soumises à l’Assemblée par le Comité des ministres concernant l’adhésion de nouveaux États membres au Conseil de l’Europe, mais aussi les projets de conventions, le budget ou la mise en œuvre de la Charte sociale.

Texte et rapporteur(e)

Document(s)

Commission des questions politiques et de la démocratie

Évolutions inquiétantes en Hongrie : projet de loi sur les ONG restreignant la société civile et possible fermeture de l’Université d’Europe centrale

Rapporteur : M. Mogens Jensen
(Danemark – SOC)

Résolution n° 2162

Commission des questions sociales, de la santé
et du développement durable

La lutte contre les inégalités de revenus : un moyen de favoriser la cohésion sociale et le développement économique

Rapporteur : M. Andrej Hunko
(Allemagne – GUE)

Résolution n° 2158

Commission des migrations, des réfugiés et des personnes déplacées

Les possibilités d’améliorer le financement des situations d’urgence impliquant des réfugiés

Rapporteur : M. Cezar Florin Preda
(Roumanie - PPE/DC)

Résolution n° 2164

Commission des questions juridiques et des droits de l’homme

Les droits de l’homme dans le Caucase du Nord : quelles suites donner à la Résolution 1738 (2010) ?

Rapporteur : M. Michael McNamara
(Irlande – SOC)

Recommandation n° 2099

Résolution n° 2157

25 ans de CPT: progrès accomplis et améliorations à apporter

Rapporteur : M. Jordi Xuclà

(Espagne – ADLE)

Recommandation n° 2100

Résolution n° 2160

Détournement du système d’Interpol : nécessité de garanties légales plus strictes

Rapporteur : M. Bernd Fabritius

(Allemagne – PPE/DC)

Résolution n° 2161

Commission de la culture, de la science, de l’éducation et des médias

La convergence technologique, l’intelligence artificielle et les droits de l’homme

Rapporteur : M. Jean-Yves Le Déaut
(France – SOC)

Recommandation n° 2102

Projet de Convention du Conseil de l’Europe sur les infractions visant des biens culturels

Rapporteur : M. Stefan Schennach
(Autriche – SOC)

Avis n° 293

Commission sur l’égalité et la non-discrimination

Protéger les femmes et les filles réfugiées de la violence fondée sur le genre

Rapporteure : Mme Gisela Wurm
(Autriche – SOC)

Résolution n° 2159

La protection des droits des parents et des enfants appartenant à des minorités religieuses

Rapporteur : M. Valeriu Ghiletchi
(République de Moldavie – PPE/DC)

Recommandation n° 2101

Résolution n° 2163

Commission de suivi

Le fonctionnement des institutions démocratiques en Turquie

Co-rapporteures :
Mmes Ingebjørg Godskesen (Norvège – CE) et Marianne Mikko (Estonie – SOC)

Résolution n° 2156

Le texte intégral des rapports, avis, comptes rendus des débats
de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe,
ainsi que les textes adoptés, sont consultables sur le site : http://assembly.coe.int

C. LE RAPPORT D’ACTIVITÉ DU BUREAU ET DE LA COMMISSION PERMANENTE

L’ouverture de chaque partie de session est traditionnellement consacrée à l’examen du rapport d’activité du Bureau et de la commission permanente.

M. Jordi Xuclà (Espagne – ADLE) a rappelé l’actualité dans les commissions, notamment la décision de la commission des questions juridiques de faire un rapport sur la nécessité de faire la lumière sur les circonstances de l’assassinat de Boris Nemtsov. Il a également souligné que la commission sur l’élection des juges à la Cour européenne des droits de l’homme, qui habituellement ne présente pas de rapport, dérogeait cette fois-ci à la règle afin de présenter ses mécanismes de perfectionnement du processus d’élection des trois candidats présentés par les États membres et sur lesquels l’Assemblée se prononce par vote.

Il a rappelé que la séance se tenait dans des circonstances exceptionnelles, assez troublées, et a annoncé que les groupes politiques allaient présenter une proposition de mémorandum pour qu’un organe externe puisse enquêter sur les allégations de corruption qui se sont manifestées au sein de l’Assemblée parlementaire. La décision de créer une telle commission avait été prise au mois de janvier. Ce document a été adopté au Bureau puis en assemblée plénière lors de la séance du vendredi matin. Un groupe d’enquête externe sera donc mis en place. Il sera composé de trois personnalités indépendantes et hautement qualifiées. Le Bureau choisira ses trois membres. Ces nominations seront soumises à l’approbation de l’Assemblée. Une fois nommés, les membres ne peuvent être révoqués. Le mandat de cette commission a été défini par le Bureau.

D. REMISE DU PRIX DU MUSÉE DE L’EUROPE ET DU PRIX DE L’EUROPE

a) Le Prix du Musée de l’Europe

Le Prix du Musée du Conseil de l’Europe est attribué chaque année depuis 1977 par l’Assemblée parlementaire. Il a pour but d’encourager la contribution des musées à une meilleure compréhension de la riche diversité de la culture européenne. Le prix est attribué par la commission de la culture, de la science, de l’éducation et des médias sur la base de recommandations formulées par le Forum européen du musée.

Cette année, le Prix a été attribué au Mémorial ACTe, Centre caribéen d’expressions et de mémoire de la Traite et de l’Esclavage (MACTe)- Guadeloupe. Le MACTe a pour ambition d’apporter des moyens intellectuels efficaces de lutte contre les conséquences sociales et sociétales de l’esclavage telles que le racisme, l’exclusion sociale, les inégalités et les formes contemporaines d’atteinte aux droits de l’homme.

b) Le Prix de l’Europe

Lors de cette partie de session, l’Assemblée parlementaire a attribué le Prix de l’Europe 2017. Créé par l’APCE en 1955, le Prix de l’Europe est la plus haute distinction qui puisse être décernée à une ville européenne pour ses actions dans le domaine européen (jumelages, manifestations, échanges, etc.). Il est constitué d’un trophée itinérant, d’une médaille, d’un diplôme et d’une bourse pour un voyage d’études de jeunes de la commune lauréate aux institutions européennes.

La sous-commission du Prix de l’Europe examine les candidatures pour les quatre distinctions et soumet son choix à la commission des questions sociales, de la santé et du développement durable pour approbation. Tous les ans sont ainsi décernées quatre distinctions : le Prix de l’Europe, la Plaquette d’honneur, le Drapeau d’honneur et le Diplôme européen.

La plus haute distinction de ce Prix, octroyé chaque année par l’Assemblée parlementaire pour récompenser la ville qui assure de manière particulièrement active la promotion de l'idéal européen, a été décernée à la ville de Lublin en Pologne.

Quatre autres villes, à savoir Bamberg en Allemagne, Issy-les-Moulineaux en France, Ivano-Frankivsk en Ukraine et Ravenne en Italie, avaient aussi été présélectionnées, et la commission les a félicitées pour leurs réalisations.

Plusieurs villes françaises ont également été distinguées par l’Assemblée parlementaire : un Drapeau d’honneur a été décerné à Saint-Germain-en-Laye, la Plaquette d’honneur, qui est la deuxième distinction la plus haute après le Prix de l’Europe, a été décernée à dix municipalités, dont Creil.

E. EXAMEN DES CANDIDATURES FRANCAISES AU COMITÉ EUROPÉEN POUR LA PRÉVENTION DE LA TORTURE (CPT)

Dans le cadre du processus de sélection du nouveau membre français au CPT, la sous-commission des droits de l’hommea examiné les candidatures transmises par la délégation française. Lors de cette réunion, M. Pierre-Yves Le Borgn’ (Français établis hors de France – Socialiste, écologiste et républicain), représentant la délégation, a présenté l’ensemble de la procédure de sélection nationale et la liste des trois candidats proposés par la France à savoir :

- M. Vincent Delbos, Inspecteur général de la justice ;

- Docteur Françoise Schaetzel, Inspectrice générale des Affaires sociales ;

- Mme Magali Lafourcade, Secrétaire générale de la Commission nationale consultative des droits de l’homme.

M. Peter Omtzig (Pays-Bas – PPE/DC), président de la sous-commission, a félicité la France pour la transparence de sa procédure nationale et notamment la création d’un comité d’experts indépendants, et la sous-commission a décidé à l’unanimité de transmettre au CPT les candidatures dans l’ordre proposé par la délégation française.

Il appartiendra au Comité des Ministres d’opérer le choix final.

I. SUITES DU VOYAGE DU PRÉSIDENT DE L'APCE EN SYRIE

Le déroulement de la partie de session a été troublé par les suites du voyage en Syrie du Président Pedro Agramunt, du président de la commission des questions juridiques, M Alain Destexhe (Belgique – ADLE), et du président du groupe ADLE, M. Jordi Xucla (Espagne).

Cette visite s’est déroulée en mars. Les trois membres de l’APCE faisaient partie d’une délégation européenne avec plusieurs parlementaires européens. Cette délégation voyageait avec une délégation du parlement russe. Les deux délégations ont été reçues par Bachar Al Assad et se sont également rendues à Alep.

Avant d’ouvrir formellement la session, le président a reconnu que sa visite en Syrie, en sa qualité de sénateur espagnol, avait été une erreur et il s’en est excusé auprès des membres de l’APCE. Cependant, compte tenu de la demande d’un nombre important de parlementaires, Pedro Agramunt a accepté de participer à une audition publique dans l’hémicycle le mardi 25 avril, où il a été interrogé, ainsi que les deux autres membres de l’APCE, par des représentants désignés par les groupes. Lors de cette audition, le Président Agramunt a déclaré qu’il ferait part de sa position le vendredi suivant au Bureau.

Le Président n’ayant pas participé à cette réunion du Bureau et n’ayant pas présenté de lettre de démission, le Bureau a jugé nécessaire de prendre des mesures car, en vertu du Règlement actuel, le président ne peut être contraint de démissionner. Il a décidé de refuser sa confiance à Pedro Agramunt en sa qualité de président de l’Assemblée.

Il a, par ailleurs, décidé que M. Agramunt n’était plus autorisé à entreprendre aucune visite officielle, à participer à aucune réunion, ni à prononcer aucune déclaration publique au nom de l’Assemblée en sa qualité de président.

Pour sa part, dans une déclaration adoptée à l’unanimité, la commission du Règlement a souligné que l’absence de dispositions réglementaires écrites et de mécanismes permettant à l’Assemblée de s’assurer du respect de l’engagement de responsabilité de ses membres exerçant une fonction élective – une procédure de destitution ou de mise en cause par vote de défiance – nuisait au bon fonctionnement de l’Assemblée. La commission a décidé de faire un rapport en faisant des propositions de modification du règlement. Ce rapport, confié à Mme Liliane Pasquier Maury (Suisse – SOC), sera débattu lors de la session de juin.

II. ÉCHANGES AVEC DIFFÉRENTES PERSONNALITÉS

A. LES QUESTIONS AU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DU CONSEIL DE L'EUROPE

L’ordre du jour de cette partie de session avait ménagé du temps pour permettre au Secrétaire général du Conseil de l’Europe, M. Thorbjørn Jagland, de répondre aux questions des parlementaires.

M. Pierre-Yves Le Borgn’ (Français établis hors de France – Socialiste, écologiste et républicain) a interrogé le Secrétaire général sur la situation d’Alexeï Pichugin, privé de liberté en Russie dans le contexte de deux jugements successifs en rupture avec les règles de procès équitable contenues dans la Convention européenne des droits de l’homme et rappelées par la Cour européenne des droits de l’homme dans un arrêt, non exécuté à ce jour. En tant que rapporteur en charge de la mise en œuvre des arrêts de la Cour, il a demandé si ce sujet avait été évoqué avec les autorités de la Fédération de Russie.

Le Secrétaire général lui a répondu que l’arrêt non exécuté relevait maintenant de la compétence du Comité des Ministres qui a la charge de veiller à l’exécution des arrêts de Cour. Le Comité des Ministres a insisté auprès des autorités russes afin que des mesures soient prises et la question sera à nouveau inscrite à l’ordre du jour du Comité.

M. Bernard Fournier (Loire - Les Républicains) a interrogé le secrétaire général sur la relation du Conseil de l’Europe avec les États-Unis, qui ont le statut d’observateur, après l’incertitude diplomatique ouverte par l’élection de Donald Trump.

Le Secrétaire général a constaté que, pour l’instant, les États-Unis étaient présents à chaque Comité des Ministres. Il est possible que le Président Trump souhaite modifier leur statut vis-à-vis du Conseil de l’Europe. Mais en l’absence de signaux en ce sens, le Conseil de l’Europe continuera à dire aux Américains son opposition à la peine de mort et poursuivra ses efforts pour les convaincre d’y mettre fin dans les États qui l’appliquent encore.

B. COMMUNICATION DU COMITÉ DES MINISTRES À L’ASSEMBLÉE, PRÉSENTÉE PAR M. IOANNIS KASOULIDES, MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES DE CHYPRE, PRÉSIDENT DU COMITÉ DES MINISTRES

M. Ioannis Kasoulides, ministre des affaires étrangères de Chypre, a insisté sur l’importance de poursuivre sans relâche le combat contre le terrorisme en faisant le meilleur usage possible des instruments à la disposition des États membres, dont ceux offerts par le Conseil de l’Europe. À cet égard, il s’est félicité de l’entrée en vigueur le 1er juillet du protocole additionnel à la convention du Conseil de l’Europe sur la prévention du terrorisme, prévoyant la criminalisation du fait d’être recruté, de former au terrorisme ou de le financer.

Des lignes directrices révisées sur la protection des victimes d’actes terroristes devraient être soumises au Comité des Ministres pour adoption le 19 mai prochain, à Nicosie. Ce texte ne constitue pas seulement une reconnaissance officielle des souffrances endurées par les victimes d’actes terroristes et leurs familles, mais permettra aussi de mieux leur venir en aide en répondant de manière plus adéquate à leurs besoins spécifiques.

Il a rappelé que la lutte contre le terrorisme impliquait aussi des mesures à long terme visant à prévenir les causes de celui-ci, comme la mise en œuvre du cadre de référence élaboré au sein du Conseil de l’Europe à propos des compétences nécessaires à une culture de la démocratie.

La crise migratoire constitue un autre défi majeur pour l’Europe d’aujourd’hui. Il a insisté sur les échanges constructifs du Comité des Ministres et de M. Tomáš Boček, représentant spécial du Secrétaire général, sur ce sujet. Le mois dernier, ce dernier a présenté un rapport thématique sur les enfants réfugiés et migrants, qui forme l’assise d’un projet de plan d’action que les délégués examinent actuellement. Ce projet de plan d’action vise à permettre aux enfants réfugiés et migrants, et plus particulièrement aux mineurs non accompagnés, d’accéder à des procédures qui leur soient adaptées, à bénéficier d’une meilleure protection et à améliorer leur intégration dans les sociétés d’accueil.

Il a également évoqué le lancement, à Nicosie, de la nouvelle stratégie du Conseil de l’Europe en faveur des 80 millions de personnes vivant en Europe avec un handicap.

Il a insisté sur le fait qu’une société inclusive était une société dont tous les membres bénéficiaient d’un minimum de bien-être matériel, tel que garanti par la Charte sociale européenne. Sur la situation en Ukraine, il a souligné l’importance d’avancer dans la voie du dialogue tout en restant ferme sur le respect des principes du droit international, pour que les droits des individus soient pleinement respectés, conformément aux exigences de la Convention européenne des droits de l’homme. Il a salué les efforts déployés par le Secrétaire général ainsi que par le Commissaire aux droits de l’homme pour maintenir l’attention sur le sort de ces personnes et veiller à ce que leurs droits soient garantis.

Concernant la situation en Turquie, il a insisté sur l’importance d’agir conformément à la Convention européenne des droits de l’homme et a rappelé que le référendum du 16 avril avait suscité beaucoup de réactions au sein et en dehors de la Turquie. Le Secrétaire général a invité les autorités turques à faire preuve de prudence à la suite du référendum.

En dehors de l’espace géographique du Conseil de l’Europe, le président du Comité des Ministres a jugé essentiel que les autorités de la Biélorussie apportent la démonstration de leur volonté de se rapprocher du Conseil de l’Europe en avançant à pas soutenus vers la mise en place d’un moratoire sur la peine de mort.

M. René Rouquet (Val-de-Marne – Socialiste, républicain et socialiste), président de la délégation française, s’exprimant au nom du groupe socialiste, a constaté qu’un nombre croissant d’États refusaient d’exécuter les décisions de la Cour européenne des droits de l’homme, soit frontalement – la Russie et le Royaume-Uni – soit de facto, comme l’Azerbaïdjan. Un jour viendra où les autres États se demanderont pourquoi ils s’astreignent à exécuter les décisions de la Cour, et c’est alors tout le système de protection des droits de l’homme qui s’effondrera. M. Rouquet a demandé quelle était la position du Comité des Ministres sur cette question fondamentale.

Le président a expliqué qu’une discussion a eu lieu au sein du Comité des Ministres à propos de cette tendance inquiétante à contester la nature contraignante des arrêts de la Cour, alors que c’est la base même du système de protection des droits de l’homme en Europe. Respecter la Convention est un engagement fondamental, nécessaire pour adhérer à l’Organisation. Le système conventionnel a, de nombreuses manières, joué un rôle majeur dans l’amélioration de la protection des droits de l’hommeen Europe.

Mme Maryvonne Blondin (Finistère – Socialiste et républicain), s’exprimant au nom du groupe socialiste, a interrogé le président sur la situation dans l’est de l’Ukraine, région difficilement accessible et sur l’action du Conseil de l’Europe pour aider les États parties à mettre en œuvre les Accords de Minsk en étroite collaboration avec l’OSCE.

Le président a rendu hommage aux activités menées par la mission spéciale de l’OSCE en Ukraine dans des circonstances particulièrement difficiles. Il a rappelé que le Conseil de l’Europe n’est pas impliqué directement dans le traitement des questions de politique de sécurité. Cependant, ainsi que l’a souligné le Comité des Ministres à plusieurs reprises, l’ensemble des parties concernées doit respecter strictement les accords de Minsk et prendre toutes les mesures nécessaires pour que ces accords soient rapidement mis en œuvre.

Par ailleurs, il a insisté sur la nécessité d’un accès sans entraves du Conseil de l’Europe et ses organes de surveillance à l’est de l’Ukraine pour y mener leurs activités sans obstacles et conformément à leur mandat afin de traiter les questions liées au respect des droits de l’hommeet des libertés fondamentales.

C. DISCOURS DE M. PROKOPIOS PAVLOPOULOS, PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE HÉLLÉNIQUE

Le Président Pavlopoulos a considéré que le rôle de l’Europe était de défendre l’Homme et les droits de l’homme en ces moments difficiles et cruciaux. En évitant les abus de pouvoir et les restrictions des droits humains, la démocratie représentative protège les droits de l’homme face à toutes les menaces, qui émanent non seulement du pouvoir de l’État mais aussi, à l’heure de la mondialisation, d’organes privés. À l’heure actuelle, ces derniers peuvent même être beaucoup plus menaçants pour les droits humains que le pouvoir gouvernemental et l’État. En son sein, les contrepoids institutionnels, ces checks and balances, garantissent l’État de droit.

Il a évoqué les droits sociaux, qui sont essentiellement humains. Il ne s’agit pas seulement de déclarer des droits ; pour qu’ils soient effectifs, applicables, dans une véritable démocratie représentative, l’État doit garantir aux citoyens les moyens de les exercer. S’il n’y a pas d’égalité dès le départ, alors l’exercice de ces droits peut devenir purement théorique, virtuel. L’État de droit doit être aussi un État social : il doit permettre aux plus faibles sur le plan économique et social de se placer au même point de départ que les autres.

Il ne s’agit donc pas seulement de protéger les Hommes du pouvoir arbitraire des organes d’État, mais aussi des atteintes exercées par ceux qui sont plus puissants économiquement ou socialement.

Le président a également insisté sur le déséquilibre entre les pouvoirs engendrés par la crise, notamment avec une supériorité accrue du pouvoir exécutif. Le parlement, le législateur, est démis de sa fonction propre, de son pouvoir, qui est de faire la loi : il est placé en dehors du processus de production des lois. Le président a considéré que cette supériorité donnée à l’arbitraire de l’exécutif était dangereuse car il n’était pas aussi légitime que le législatif, ni indépendant comme le judiciaire. Il a d’ailleurs parlé de despotisme gouvernemental.

Il a insisté sur le problème de l’inefficacité judiciaire due à la crise, de très nombreuses affaires restant en suspens devant les tribunaux sans pouvoir être jugées. En temps de crise, la justice ne fonctionne pas avec la notion de protection judiciaire. Dans la mesure où la justice n’est pas rendue en temps et en heure, à la fin de la procédure, la justice rendue est vraiment théorique, pour ne pas dire virtuelle. Voilà exactement ce qui mine la justice et sa crédibilité. Enfin il a dénoncé le fait que parfois la justice ne soit pas rendue parce que, bien que le verdict ait été prononcé, il n’est pas appliqué.

Dans le cadre de la mondialisation, de nouvelles formes d’intervention sont apparues, ayant des incidences non seulement sur les hommes, mais sur les États, voire sur plusieurs États. Aucune démocratie ne s’exerce dans ces organismes. Le président a évoqué notamment « les marchés », capables d’influer sur l’action des États, voire de l’entraver en les empêchant de prendre les orientations qu’ils souhaiteraient. Ce phénomène global inclut les agences de notation. Il faut absolument créer des contrepoids. Parfois, même le pouvoir légitime d’un État démocratiquement élu est impuissant face à ces phénomènes. Sans aucun contrôle, ces agences peuvent conduire au désastre des sociétés, des États, des nations.

Il a enfin évoqué le risque de dissolution de l’État social, notamment au sein de l’Europe. Il a insisté sur le rôle fondamental du Conseil de l’Europe pour promouvoir l’idéal européen et les droits de l’homme partout dans le monde. Il a considéré que l’Union européenne devait adhérer au Conseil de l’Europe. Il a souhaité que l’Europe dispose d’une charte sociale puissante, réelle, capable de défendre l’État social, pilier de l’Europe.

D. RAPPORT D'ACTIVITÉ DE M. NILS MUIZNEKS, COMMISSAIRE AUX DROITS DE L'HOMME

Le Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe a présenté son cinquième rapport annuel.

L’année 2016 a été un tournant en Europe. Le thème des migrations a été dominant. En dépit de tous les efforts faits, il s’agit d’un domaine où les États membres coopèrent peu et ne satisfont pas toujours à leurs obligations.

Il a évoqué la Turquie et les conséquences du coup d’État. Les mesures d’urgence sont toujours en place et les opérations antiterroristes restreignent encore les droits et la liberté d’expression. Elles touchent les blogueurs, les journalistes, un grand nombre d’utilisateurs des réseaux sociaux, d’opposants politiques et d’universitaires.

Il a rappelé que le Gouvernement polonais avait aussi pris un certain nombre de mesures qui limitaient les compétences des juridictions, entraînant une menace systémique de l’État de droit, d’après les propos mêmes de la Commission européenne.

Il a insisté sur la catastrophe humanitaire en Ukraine et la violation des droits de l’homme dans l’Est et en Crimée, ainsi que sur les pressions sur les défenseurs des droits de l’homme qui se sont poursuivies dans plusieurs États membres. Le Commissaire est tierce partie intervenante dans des affaires contre la Russie et l’Azerbaïdjan. Il a exprimé ses préoccupations face aux menaces contre les journalistes en Fédération de Russie et en Azerbaïdjan où la situation continue cependant de se détériorer.

Il a évoqué sa coopération avec les membres de l’APCE et les a invités à parler de la gravité de la régression dans de nombreux pays, à jouer un rôle plus actif au niveau national pour la mise en œuvre des arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme, de pousser les gouvernements à respecter ces droits et à donner les moyens financiers nécessaires à leur application.

Il a rappelé que, si certains pays ne renforçaient pas leur politique de soutien à l’intégration des réfugiés, ces derniers se déplaceraient et créeraient des problèmes ailleurs. Enfin, il a souhaité que les parlementaires contestent les prorogations presque systématiques des états d’urgence, qui impliquent des restrictions à l’application de la Convention européenne des droits de l’homme. Enfin, il a rappelé que toute menace qui pesait sur les medias était une menace sur les droits de l’homme en tant que tels.

M. Pierre-Yves Le Borgn’ (Français établis hors de France – Socialiste, écologiste et républicain), s’expimant au nom du groupe socialiste, a souligné que 2016 avait été très largement une annus horribilis pour les droits de l’homme. Et qu’il était révolté par les attaques contre les défenseurs des droits, la liberté des médias et les migrants, révulsé par la montée du discours et des actes de haine. Il a demandé au Commissaire quelles actions devaient mener les parlements nationaux pour réveiller les consciences.

Le Commissaire a répondu que les parlementaires de l’APCE devaient servir de relais pour informer leurs collègues sur le recul des droits et les attaques directes et indirectes sur l’ensemble du système de protection des droits de l’homme. Quant à la question de la haine et de l’intolérance, les parlementaires peuvent jouer un rôle actif dans la campagne du Conseil de l’Europe « Ni Haine Ni Peur ». Il a insisté sur la nécessité de faire mieux connaître les travaux de la Commission européenne contre le racisme et l’intolérance (ECRI).

Mme Maryvonne Blondin (Finistère – Socialiste et républicain) a évoqué la situation dramatique en Tchétchénie des personnes LGBT pour qui c’est l’exil ou la mort. Elle a interrogé le Commissaire sur ses actions en lien avec les autorités russes, pour faire cesser ces pratiques inacceptables qui illustrent la persistance d’une homophobie d’État.

Le Commissaire a expliqué qu’il avait contacté le Conseil présidentiel des droits de l’homme de Russie, et l’ombudsman russe, ainsi que la commission d’enquête de la Fédération de Russie, avec des questions précises. À ce jour, il n’y a aucune réponse. Les rapports fournis par les ONG sur cette situation semblent très crédibles et il s’agit de très graves violations des droits de l’homme auxquelles notre institution doit répondre.

Les États membres devraient envisager d’offrir l’asile aux personnes qui fuient cette situation. Accorder le droit d’asile n’est pas une politique très populaire ces derniers temps, mais ces personnes ont besoin de protection. Elles ont besoin d’un environnement sûr et il est certain que ce n’est pas en Tchétchénie qu’elles le trouveront.

Mme Josette Durrieu (Hautes-Pyrénées – Socialiste et républicain) a rappelé qu’Israël siégeait au sein de l’Assemblée en tant qu’observateur et les Palestiniens en tant que Partenaires pour la démocratie. Face à une paix introuvable depuis 60 ans et à un État d’Israël qui vient de déclarer légales des constructions de colonies sur des terres privées en Cisjordanie, elle a demandé le sentiment du Commissaire sur cette question.

Le Commissaire a considéré que Israël ne faisant pas partie du Conseil de l’Europe, même s’il s’intéressait personnellement à cette problématique, il avait déjà trop à faire dans les 47 pays membres.

E. DISCOURS DE SA MAJESTÉ LE ROI FELIPE VI D’ESPAGNE

Sa Majesté le Roi Felipe VI d’Espagne s’est adressé à l’Assemblée dans le cadre des célébrations du 40e anniversaire de l’adhésion de l’Espagne au Conseil de l’Europe.

Il a rappelé que cet anniversaire invitait à se souvenir que la démocratie doit toujours être protégée et améliorée, avec détermination et constance, et ce par l’engagement ferme de tous. La liberté, l’égalité, la justice et le pluralisme politique sont les valeurs suprêmes que proclame la Constitution espagnole de 1978, et qui inspirent notre coexistence en démocratie. La reconnaissance et la protection de la dignité de la personne humaine constituent le plus grand acquis de l’Europe. Le Roi a rendu un hommage particulier aux fondateurs du Conseil de l’Europe, « une génération fermement convaincue que le sentiment d’humanisme le plus élevé et la démocratie sont les seuls antidotes contre la tyrannie et la dictature, contre l’oppression et l’exploitation des êtres humains ».

Soulignant l’importance de l’année 1977 dans l’histoire de la démocratie espagnole, il a remercié le Conseil de l’Europe pour son soutien dès l’adhésion au processus démocratique qui était en cours. Felipe VI a expliqué que la démocratie était arrivée en Espagne par l’œuvre d’hommes et de femmes qui avaient fait le pari généreux de la compréhension et du dialogue pour surmonter les conflits et les différences historiques du pays qui semblaient jusqu’alors insolubles. Ils ont vraiment été les Espagnols de la réconciliation.

Rappelant que la Constitution de 1978 a incorporé l’acquis des droits et libertés qui s’est constitué au sein de l’Europe occidentale depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, il a évoqué le recours d’amparo1, qui peut être invoqué devant le Tribunal constitutionnel, ainsi que le recours individuel devant la Cour européenne des droits de l’homme qui garantissent la mise en œuvre de la Convention.

Dans le monde globalisé du XXIe siècle, l’Europe doit continuer d’être un modèle pour la liberté et la capacité d’intégration. Les défis contemporains supposent aujourd’hui plus que jamais unité et résistance de la part des institutions démocratiques. Le Roi Felipe VI a insisté sur l’importance du dialogue, de solutions globales, voire mondiales et d’un équilibre entre l’émotion et la raison, en faveur d’actions concrètes, toujours dans le respect des valeurs européennes.

Sur le terrorisme, dont l’Espagne a été victime pendant plus de quatre décennies, il a considéré que l’intégrité et la fermeté de la société espagnole, associées à la force et à la solidité de l’État de droit, ont su s’imposer et mettre le terrorisme en échec. Dans cette victoire, la dignité des victimes du terrorisme, le respect de l’honneur dû à leur mémoire, constituent un exemple de courage civique. Transposant l’expérience espagnole à l’Europe, il a affirmé que les valeurs qui inspirent notre coexistence démocratique prévaudront face au fanatisme, à l’intolérance et à la violence.

Sur la question des migrations, le Roi a demandé que les migrants puissent être accueillis dans la mesure des moyens pour qu’ils puissent mener une vie digne et a considéré qu’il s’agissait d’un devoir moral. Il faut faire tout ce qui est possible pour favoriser les conditions propices au retour dans leurs foyers. Cela impose de mettre fin aux conflits et de poser les bases pour que les guerres laissent place à des processus politiques aboutissant à des sociétés inclusives et démocratiques, dans lesquelles les atteintes à la vie et la liberté n’auront pas leur place.

En conclusion, il a rappelé que l’Espagne démocratique et constitutionnelle, unie, plurielle et moderne, dans laquelle tous les pouvoirs de l’État émanent du peuple espagnol qui leur confère ainsi leur légitimité, était le meilleur actif que les Espagnols puissent apporter pour continuer à contribuer à une Europe chaque jour plus ferme dans la défense de ses valeurs.

Pour lui, l’Europe est aussi un projet et une idée, d’aucuns diraient un rêve. En tout état de cause, elle est une entreprise pour laquelle il vaut la peine de se battre, même si, parfois, le chemin est semé d’embûches pour continuer à donner une forme tangible à ce rêve qui animait les fondateurs de l’Europe, en rassemblant les personnes, comme Jean Monnet, et en forgeant une conscience propre, comme le désirait ardemment Salvador de Madariaga.

I. LA SITUATION DES DROITS DE L’HOMME DANS LE MONDE

A. DÉBAT LIBRE

La réforme du Règlement entrée en vigueur en janvier 2012 prévoit l’organisation d’un débat libre, les parlementaires pouvant intervenir sur un sujet qui n’est pas inscrit à l’ordre du jour.

M. Pierre-Yves Le Borgn’ (Français établis hors de France – Socialiste, écologiste et républicain), s’exprimant au nom du groupe socialiste, a évoqué la situation d’Alexeï Pichugin, emprisonné en Russie depuis 2003 dans des conditions et des circonstances que la Cour européenne des droits de l’homme a condamnées. Il fut la première personne arrêtée dans ce qui allait devenir l’affaire Ioukos. Quatorze ans après, il reste privé de liberté. À ce jour, il reste interrogé hors présence de ses avocats et menacé de voir ses proches arrêtés s’il ne collabore pas avec les autorités contre l’ancienne direction de Ioukos.

Rappelant qu’Alexeï Pichugin est emprisonné en Sibérie dans des conditions sordides, dégradantes et menaçantes pour sa santé, M. Le Borgn’ a considéré qu’il s’agissait d’une persécution politique, en rupture avec l’État de droit et les valeurs du Conseil de l’Europe. Il a condamné la loi adoptée l’an passé en Russie permettant désormais aux tribunaux russes d’écarter la jurisprudence de la Cour et a déclaré que l’abus de pouvoir et les persécutions politiques devaient se combattre.

Mme Pascale Crozon (Rhône – Socialiste, écologiste et républicain) s’est inquiétée de l’avenir de la démocratie en Europe. Partout en Europe, les populismes progressent lorsque les électeurs ne votent plus avec leurs espoirs, mais avec leurs peurs. Il existe une forme de résignation, que les alternances politiques ne changent rien à leurs vies, que la démocratie n’est plus qu’un théâtre. Dans ce contexte, Mme Crozon a rappelé que, comme en Turquie, les peuples sont prêts à renoncer aux libertés qu’ils ont conquises au nom de ce qu’ils pensent être une plus grande sécurité.

Elle a rappelé qu’il n’y a pas d’État de droit ni de société démocratique là où ces droits et ces libertés ne sont pas garantis et qu’à l’heure où ce sont bien souvent les plus jeunes qui, craignant pour leur avenir, deviennent les promoteurs des replis identitaires, il faut leur rappeler notre histoire. Elle a insisté sur le rôle de l’éducation pour combattre les inégalités et les frustrations, sur lesquelles prospèrent aujourd’hui les populismes.

Mme Josette Durrieu (Hautes-Pyrénées – Socialiste et républicain) a tenu à répondre à l’intervention d’un parlementaire turc, qui a formulé un certain nombre de remarques concernant les observateurs envoyés par l’Assemblée en Turquie à l’occasion du référendum, considérant que ces propos n’étaient pas neutres.

Évoquant le premier tour de l’élection présidentielle, Mme Durrieu a rappelé qu’à l’issue des élections, les extrêmes n’auront pas gagné, ni l’extrême gauche, ni l’extrême droite. Le populisme ne gagne pas partout. Mais les partis traditionnels, de droite comme de gauche, ont perdu. Elle a considéré qu’au bout du compte, la démocratie progressera, mais en passant peut-être, en France, par une importante phase de mutation, liée à une demande profonde de renouvellement non seulement de la classe politique, mais aussi des objectifs politiques. Elle a rappelé que le grand vainqueur du scrutin était l’Europe.

B. LES VALEURS EUROPÉENNES EN DANGER : FAIRE FACE À LA MONTÉE DE LA XÉNOPHOBIE, DE L’ANTISÉMITISME ET DE L’ISLAMOPHOBIE EN EUROPE

Lors de la partie de session, l’Assemblée a décidé de tenir un débat d’actualité, poposé par la délégation turque, sur « Les valeurs européennes en danger : faire face à la montée du populisme, de la xénophobie, de l’antisémitisme et de l’islamophobie en Europe ». Ce débat ne donnait lieu à aucun vote et n’a pas été introduit comme de coutume, l’orateur désigné par le Bureau, M. Talip Küçükcan (Turquie - CE) étant absent.

Mme Geneviève Gosselin-Fleury (Manche – Socialiste, écologiste et républicain) a rappelé que le racisme nous concernait tous et que la remise en cause de nos valeurs, au cours des dernières années, représentait un danger pour chaque citoyen, quelle que soit son origine ou sa religion.

Elle a noté que la remise en cause des valeurs européennes s’est accentuée, du rejet de l’étranger par la construction de murs à la montée des extrêmes droites xénophobes dans toute l’Europe. Elle a condamné ceux qui tergiversent et soutiennent l’idée qu’une présidente extrémiste ou un démocrate, c’est pareil. Elle a rappelé que l’histoire de la Seconde Guerre mondiale notamment a montré qu’une nationalité ne protégeait pas de la haine.

Considérant que l’Europe s’est nourrie de métissages, elle a souhaité que le terrorisme et la crise économique ne servent pas de prétexte à un rejet de populations musulmanes, pas plus que le conflit israélo-palestinien de prétexte pour agresser des personnes juives. En conclusion, elle a insisté sur le rôle de l’école dans l’éducation aux valeurs démocratiques et sur la nécessité de lutter contre les crises politiques, socio-économiques et identitaires qui favorisent la remise en cause de ces valeurs communes.

C. DÉTOURNEMENT DU SYSTÈME D'INTERPOL

M. Bernd Fabritius (Allemagne - PPE/DC), rapporteur, a souligné l’importance d’Interpol, en particulier dans la lutte contre le terrorisme. Il s’est félicité des récentes modifications du système des « notices rouges » adoptées par Interpol en novembre 2016, mais a indiqué que d’autres améliorations étaient possibles.

Dans sa résolution, l’APCE a demandé que les États membres du Conseil de l’Europe s’abstiennent de procéder à des arrestations sur la base de « notices rouges » lorsqu’ils ont de sérieux motifs d’inquiétude qui laissent penser que la notice en question puisse être abusive. Elle a appelé au renforcement du mécanisme de recours, complètement indépendant vis-à-vis d’Interpol, qui devrait permettre aux personnes visées et à leurs avocats d’être informés des motifs de la demande de « notices rouges » et de formuler des observations à leur sujet. Elle a préconisé plusieurs améliorations dont, par exemple, la prise en compte des informations des organes des Nations Unies et du Conseil de l’Europe dans les affaires difficiles.

D. LA PROTECTION DES DROITS DES PARENTS ET DES ENFANTS APPARTENANT À DES MINORITÉS RELIGIEUSES

M. Valeriu Ghiletchi (Moldavie – PPE/DC), rapporteur, a proposé plusieurs mesures concrètes, législatives ou autres, visant à « affirmer le droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion pour tous les individus ».

Il a notamment recommandé de protéger le droit de tout un chacun de « ne pas être contraint d’accomplir des actions contraires à ses croyances religieuses ou morales profondes », en veillant à ce que l’accès aux services légalement fournis soit maintenu et que le droit d’autrui à ne pas être discriminé soit protégé et de promouvoir « un aménagement raisonnable des pratiques » de tous les individus mus par des croyances religieuses ou morales profondes en cas de conflit grave pour permettre aux citoyens de manifester librement leur religion ou leur croyance en privé ou en public, sans que cela porte atteinte aux droits d’autrui.

L’Assemblée, dans sa résolution, a notamment demandé que les lois ou les règles qui établissent une « distinction discriminatoire entre les croyances religieuses minoritaires et les croyances majoritaires » soient abrogées.

Reprenant les propositions du rapporteur, dans sa recommandation, l’APCE a demandé au Comité des Ministres d’élaborer des lignes directrices sur les moyens à mettre en œuvre par les États membres pour procéder à un aménagement raisonnable efficace des croyances morales ou religieuses profondes des individus tout en veillant au respect des droits d’autrui.

M. André Schneider (Bas-Rhin – Les Républicains) a rappelé que la question de l’autorité parentale et de son interaction avec la liberté de conscience prenait un sens tout particulier alors que plusieurs pays se tournent vers l’autoritarisme et le nationalisme. Imposer une religion, refuser de reconnaître la différence, voilà ce qui nourrit les haines et les radicalisations.

Il a considéré que le régime concordataire alsacien pourrait servir de modèle. Il a insisté sur la nécessité que la protection des droits des parents aille de pair avec le respect des droits des enfants, sans aboutir à l’isolement social ou mettre en danger la santé de l’enfant.

Il a souligné le danger que peuvent représenter les dérives sectaires, terme qui ne fait pas consensus à l’APCE où les sectes sont parfois considérées comme des religions minoritaires. Il a demandé que, malgré ces divergences, l’intérêt de l’enfant guide les décisions à prendre.

Mme Anne-Yvonne Le Dain (Hérault – Socialiste, écologiste et républicain) a pour sa part considéré qu’ en matière d’éducation religieuse, le droit d’éducation des parents n’était pas en danger. Elle a rappelé le caractère strictement privé de l’exercice de ce droit. Certes, les religions minoritaires ne perdureront que si les parents s’occupent de les transmettre. Mais la coexistence pacifique ne peut être imposée par l’État. Elle a considéré que pour que les enfants puissent exercer plus tard leur liberté de choix, l’éducation religieuse ne pouvait être faite à l’école. Elle a insisté sur l’importance de pouvoir quitter une religion, ou y revenir.

Ainsi la neutralité de l’État et des institutions publiques est-elle une garantie fondamentale de la liberté de conscience. La laïcité est, de ce point de vue, une grande conquête de l’humanité. La seule responsabilité de l’État est de garantir la liberté de culte de chacun, dans l’espace privé. Si des aménagements sont possibles, comme le concordat en vigueur en Alsace ou les établissements d’enseignement privé sous contrat d’association avec l’État français, les enfants inscrits dans ces écoles doivent pouvoir choisir de suivre ou pas l’enseignement religieux.

Considérant que des solutions existent, elle s’est prononcée contre l’adoption du texte du rapporteur.

M. Frédéric Reiss (Bas-Rhin – Les Républicains) a rappelé que si le droit au respect de la vie privée et familiale est au cœur du corpus de libertés protégées par la Convention, cette liberté devait s’exercer dans les limites de l’ordre public, de la santé et de la morale. Condamnant les signes de prosélytisme religieux dans l’espace public, il a insisté sur l’équilibre entre la nécessaire liberté religieuse, qui doit rester du domaine du privé, et la neutralité indispensable de l’espace public, pour permettre à chacun de vivre sa foi et à tous de s’épanouir ensemble.

Il s’est montré assez réservé à propos des « aménagements raisonnables » préconisés par le rapporteur, considérant qu’il lui paraissait difficile de se prévaloir de sa religion pour refuser d’accomplir certaines actions dans le cadre du service public. De même, sur la question scolaire et sur l’enseignement des religions à l’école, il a rappelé l’exemple français des « écoles libres » et du concordat, dans le contexte d’un État laïque. Dans ces conditions, l’instruction à domicile ne paraît pas être indispensable au respect des droits des parents appartenant à des religions minoritaires alors que cette solution fait courir aux enfants un risque de désocialisation.

En conclusion, il a évoqué la situation des familles des chrétiens d’Orient, notamment les coptes, pour rappeler combien la protection des religions minoritaires était importante.

E. LA CONVERGENCE TECHNOLOGIQUE, L’INTELLIGENCE ARTIFICIELLE ET LES DROITS DE L’HOMME

M. Jean-Yves Le Déaut (Meurthe-et-Moselle – Socialiste, écologiste et républicain) rapporteur de la commission de la culture, de la science, de l’éducation et des médias a rappelé que les nouveaux défis de l’ère numérique, la biologie de synthèse, l’intelligence artificielle et les possibilités de modification du génome induisaient des changements si rapides que les applications sont déjà sur le marché alors que les connaissances sont incomplètes.

Ainsi, l’intelligence artificielle permet la création de machines intelligentes, capables d’un apprentissage automatique par l’expérience (deep learning), ce qui leur donne, d’une certaine manière, une aptitude à raisonner. Elles sont capables de résoudre des problèmes complexes. Ces nouvelles machines sont utilisées dans tous les domaines, tels que des systèmes de commandement militaire ou l’aide à la gestion financière.

Rappelant que son rapport n’était pas exhaustif, il a considéré que les sujets non abordés comme les conséquences de la numérisation de la société sur l’emploi ou les possibilités d’utilisation d’artefacts intelligents dans le domaine militaire pourraient être étudiés dans de prochains rapports.

Ces technologies associent les nanotechnologies, les biotechnologies, les technologies de l’information et les sciences cognitives, qui se rejoignent et se complètent. Elles sont de plus en plus puissantes et revêtent un caractère à la fois irréversible et incertain. La convention d’Oviedo avait anticipé ces évolutions en annonçant des principes directeurs destinés à protéger la dignité de l’être humain dans le cadre des progrès de la biomédecine. Mais si nous voulons protéger la dignité humaine au XXIe siècle, il faut se pencher sur l’ensemble de ces technologies qui envahissent notre intimité, modifient nos capacités et détiennent une foule d’informations nous concernant.

Le premier droit à défendre est celui de la protection des données à caractère personnel. Le modèle d’internet repose avant tout sur la surveillance de masse. Les données massives collectées permettent en un clic de révéler votre orientation sexuelle, votre groupe ethnique, vos opinions politiques ou religieuses, vos traits de caractère. Le recours au profilage algorithmique peut être discriminatoire. Il faut mettre en place une véritable transparence pour tout ce qui concerne les algorithmes et le profilage. De plus, chacun doit être informé de la valeur des données collectées.

Le droit au respect de la vie privée est un sujet de préoccupation car des applications informatiques ont été créées dans le but de modifier l’attitude et les comportements des personnes. Ces activités de persuasion portent atteinte à leur autonomie, à leur autodétermination, mais également à leur liberté de penser et de conscience.

Les robots de soin incarnent l’intelligence artificielle, mais ceux-ci peuvent influencer la qualité des relations humaines en maintenant l’utilisateur dans un monde virtuel, notamment lorsqu’ils prodiguent des soins à des groupes vulnérables comme les enfants, les personnes âgées ou les personnes handicapées.

Il a proposé de renforcer la réglementation et de doter les individus de moyens juridiques leur permettant de résister à des pressions ou à des contraintes qui les soumettraient à des technologies qui amélioreraient leurs performances, par exemple dans les domaines du sport, des jeux ou même du travail ; de définir la responsabilité des acteurs sur les traitements automatiques visant à collecter, à utiliser, à manier des données à caractère personnel ; de définir un cadre commun de normes à respecter pour les produits de l’intelligence artificielle ; d’instituer la transparence et l’information du public, d’imposer la nécessité pour toutes machines, tous robots, tous produits de l’intelligence artificielle, de rester sous le contrôle constant de l’homme ; d’instaurer un droit à l’anonymat et à la tranquillité, c’est-à-dire le droit de refuser de faire l’objet de profils informatiques, d’être coaché, d’être géo-localisé, d’être manipulé et le droit de pouvoir privilégier la qualité des relations humaines par rapport à celles prodiguées par un robot ; d’instituer une coopération entre l’Union européenne et l’Unesco organisant un cadre juridique et des mécanismes de régulation au niveau international. Le réseau européen des Offices parlementaires d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (EPTA, European Parliamentary Technology Assessment), dont l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe est membre, pourrait être un des lieux d’organisation d’auditions publiques et contradictoires, réunissant experts, politiques et citoyens sur toutes ces questions.

Dans sa recommandation, l’APCE a repris les préconisations du rapporteur.

M. André Schneider (Bas-Rhin – Les Républicains) a rappelé que les appareils connectés étaient dorénavant plus nombreux que les êtres humains. Les scientifiques et les politiques doivent réfléchir aux conséquences des applications techniques.

Il a appelé l’Assemblée à se prononcer sur la création d’un comité d’experts regroupant des scientifiques, des élus, des représentants syndicaux, des philosophes, afin qu’ils nous fournissent une expertise technique, éthique, voire normative sur cette question. Les géants du web, en créant une fondation chargée de promouvoir une pratique responsable et sans danger de l’intelligence artificielle, sont dorénavant juges et parties.

Rappelant que l’humanité n’avait pas le droit au suicide, et que l’homme devait rester maître de la technique en construisant une éthique de responsabilité, il a approuvé sans réserve les préconisations du rapporteur.

M. Frédéric Reiss (Bas-Rhin – Les Républicains) a pour sa part rappelé les marches pour la science ayant pour objectif de faire prendre conscience de l’importance de la culture scientifique, afin que chaque citoyen puisse fonder ses choix sur des idées construites plutôt que des idées reçues.

Dans ce contexte, la question de la responsabilité des usagers et des décideurs face aux questions éthiques posées par l’intelligence artificielle est essentielle. La transition numérique a placé les algorithmes au cœur de nos vies, qu’il s’agisse des moteurs de recherche ou de l’affectation des étudiants à l’université, voire de certains diagnostics médicaux. La défense des droits des usagers devra donc évoluer pour s’adapter à la présence accrue de l’intelligence artificielle.

Il a insisté sur la protection des données qui, à l’heure du big data, revêt un double enjeu pour la personne : savoir quand les données sont traitées et surtout pouvoir reprendre la main sur les données collectées. Il a considéré que le profilage représentait un danger réel pour la démocratie, alors que les partis extrêmes se renforcent et que de plus en plus d’États adoptent des lois liberticides. Il a appelé à une souveraineté européenne sur ces données.

Il a appelé à une réflexion sur les tâches confiées à l’intelligence artificielle, en s’inquiétant de la déshumanisation des soins aux plus vulnérables et de la création de futures armées de robots ou de drones au nom d’une certaine conception du droit humanitaire.

Mme Anne-Yvonne Le Dain (Hérault – Socialiste, écologiste et républicain) a considéré qu’il était essentiel que le Conseil de l’Europe se saisisse de ces questions, de ce monde numérique dans lequel nous vivons déjà. Mais il faut faire la part de l’inquiétude et de l’espoir que suscitent ces nouvelles technologies. La science a toujours représenté un outil, un moyen d’améliorer la vie humaine, dans nos démocraties. On ne peut pas arrêter la science, mais on doit la contrôler : c’est le rôle du législateur.

Sur la directive sur la protection des données personnelles, elle a considéré que l’Union européenne ne prenait ses responsabilités que dans un second temps, si les États n’y arrivaient pas. Il s’agit donc d’un droit à la fois national et européen, en mettant la responsabilité au niveau de l’homme.

Elle a insisté sur l’éducation des jeunes. Il faut apprendre à coder, à comprendre comment ce monde fonctionne, apprendre à s’en servir et à s’en méfier, s’en défier, en construisant des outils pour agir, interagir dans un monde qui a changé, sans en avoir peur.

F. LA LUTTE CONTRE LES INÉGALITÉS DE REVENUS : UN MOYEN DE FAVORISER LA COHÉSION SOCIALE ET LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE

M. Andrej Hunko (Allemagne – GUE), rapporteur, a souligné que les inégalités de revenus n’avaient jamais été aussi importantes et que, sur le long terme, elles étaient nuisibles pour la cohésion sociale, le développement économique et la démocratie. Il a invité les gouvernements européens à faire de la lutte contre les inégalités de revenus « une priorité politique » et à développer des stratégies nationales « globales et efficaces ».

Reprenant les préconisations du rapporteur, l’APCE, dans sa résolution, a recommandé d’offrir aux salariés « des perspectives professionnelles plus stables », d’investir dans les programmes de formation et la formation continue, de renforcer la participation des femmes au marché de l’emploi, et de « mettre en place un salaire minimum suffisamment élevé ». l’APCE a demandé aux États membres d’accroître la progressivité des systèmes d’imposition. Elle a également plaidé pour le renforcement du dialogue social en tant que moyen de lutter contre les inégalités de revenus.

Mme Maryvonne Blondin (Finistère – Socialiste et républicain) s’est inquiétée des conséquences du creusement des inégalités sur la stabilité des démocraties. Rappelant que beaucoup accusent la mondialisation, elle a considéré que les causes de nos problèmes économiques étaient plus complexes et tenaient d’abord à la dégradation de la qualité et de l’efficacité des facteurs de production, qui augmentent moins vite qu’avant la crise de 2008.

Elle a rappelé que, dans la plupart des pays industrialisés, la part du revenu rémunérant le travail avait sensiblement diminué au profit de la rémnération du capital. Dans le même temps, le salaire des peu qualifiés augmentait moins vite que celui des très qualifiés. Selon le FMI, cette évolution résulterait en partie du progrès technologique. Enfin, l’économie mondiale souffre de flux de capitaux non optimaux, certains d’entre eux alimentant des bulles spéculatives en raison des défaillances de la régulation financière internationale.

Elle a considéré que le dynamisme économique n’était pas une fin en soi, mais permettait aussi de donner une dignité aux salariés et d’assurer leur attachement à la démocratie.

Mme Marie-Christine Dalloz (Jura – Les Républicains) a considéré que si la hausse des inégalités de revenus était un frein au développement de la croissance économique, il était clair que l’augmentation des inégalités dans tous les pays européens avait des conséquences dramatiques sur la cohésion sociale.

L’inégalité des revenus est accentuée par la disparité des minimas sociaux, ces derniers devant, dans l’ensemble de l’Europe, tenir compte du coût de la vie, ce qui n’est pas toujours le cas.

Rappelant que le sentiment d’abandon, voire de frustration de certaines populations se traduisait par des taux d’abstention élevés, mais surtout par un vote populiste, elle a insisté sur la peur de déclassement de certaines populations.

Considérant que pour appartenir à une nation, il faut avoir droit à l’égalité, où que l’on vive sur le territoire, elle a appelé à des politiques nationales prenant mieux en compte les spécificités des territoires, et au renforcement des services publics de proximité – ce qui, de fait, attirerait aussi de l’emploi.

Mme Pascale Crozon (Rhône – Socialiste, écologiste et républicain) a rappelé que la globalisation de l’économie exigeait des réponses rapides et nouvelles, des protections sociales adaptées, des stabilisateurs sociaux qui continuent de faire en sorte que le peu de croissance dont nous disposons soit répartie de façon à produire un effet multiplicateur.

Elle a considéré que les politiques d’austérité menées en Europe n’allaient pas dans le bon sens et que ces politiques, fondées sur l’idée selon laquelle l’offre produit une demande potentiellement infinie et sur la théorie du ruissellement, qui dit qu’il faut enrichir les plus riches pour en faire bénéficier les moins aisés, ne fonctionnaient pas.

Les inégalités de revenus se creusent dramatiquement, sans faire redémarrer la croissance. C’est typiquement ce qu’il se passe en Grèce, où ce n’est plus le niveau de dépenses qui interdit le désendettement, mais l’effondrement de la croissance, sous l’effet des efforts demandés au peuple grec.

Elle a insisté sur la dévalorisation du travail, considérant que c’est dans cette distribution inégalitaire du travail et sa déconnexion de plus en plus criante avec les moyens d’en vivre dignement que se creusent aujourd’hui les inégalités de revenus. Elle a conclu en rappelant qu’il était essentiel de reposer la question du sens du progrès, du sens des gains de productivité, de l’émancipation au travail ; et pour cela, de son partage

I. LA SITUATION DE LA DÉMOCRATIE ET DE L'ÉTAT DE DROIT DANS LES PAYS DU CONSEIL DE L'EUROPE

A. OBSERVATION DES ÉLECTIONS LÉGISLATIVES EN BULGARIE

L’APCE a observé les élections législatives anticipées du 26 mars en Bulgarie. Ce scrutin fait suite à la démission du gouvernement de Boïko Borissov à la mi-novembre 2016, consécutive à la défaite de sa candidate aux élections présidentielles. Il a été convoqué après l’investiture du nouveau président de la République, Roumen Radev, le 22 janvier 2017.

La commission ad hoc était présidée par Mme  Marie-Christine Dalloz (Jura – Les Républicains). Les autres parlementaires français ayant participé à cette mission étaient Mmes Nicole Duranton (Eure – Les Républicains) et Anne-Yvonne Le Dain (Hérault – Socialiste, écologiste et républicain).

Mme  Marie-Christine Dalloz (Jura – Les Républicains), rapporteure de la commission ad hoc du Bureau sur l’observation des élections législatives en Bulgarie, a rappelé que l’APCE avait observé toutes les élections parlementaires et présidentielles en Bulgarie depuis 1990 depuis vingt-sept années.

Elle a considéré que, le jour du scrutin, les citoyens avaient pu faire leur choix librement et que le scrutin avait été, dans l’ensemble, bien organisé, même si par exemple des cas isolés de non-respect des procédures de dépouillement dans certains bureaux de vote ont pu être observés, sans effet cependant, sur le résultat.

Elle a souligné que les observateurs avaient pu constater une vraie désillusion et une lassitude des citoyens. En effet, six scrutins différents se sont tenus en Bulgarie depuis 2013. Il sera de la responsabilité de la nouvelle assemblée bulgare d’apaiser les tensions, à l’intérieur comme à l’extérieur du pays. Il incombera par ailleurs aux partis politiques et à leurs responsables de combattre toutes les formes de corruption électorale et de discrimination. Toutefois, l’administration électorale a travaillé de manière professionnelle et transparente.

La commission ad hoc a préconisé de renforcer la transparence en ce qui concerne les propriétaires des médias, le contrôle effectif des comptes de campagne et du financement des partis politiques ; de définir des critères clairs d’établissement des bureaux de vote à l’étranger, améliorer l’éducation des citoyens d’ethnies autres que bulgare dans le domaine des élections, ce qui inclut l’aspect linguistique du problème.

Mme  Nicole Duranton (Eure – Les Républicains) a souligné que ces élections comportaient pour ce pays des enjeux importants. Ceux du développement économique et social, d’abord : la Bulgarie est le pays le plus pauvre de l’Union européenne et a perdu environ un million d’habitants en vingt ans. Des enjeux de renouveau démocratique ensuite : les citoyens bulgares n’ont été que 54 % à participer à ces élections législatives. La corruption reste très élevée. Pour autant, ces élections se sont déroulées dans des conditions globalement satisfaisantes, même si le code électoral et la législation demeurent perfectibles, en particulier sur la transparence de la propriété des médias.

En conclusion, elle a rappelé que la Bulgarie devait, pour la première fois, exercer la présidence de l’Union européenne au premier semestre 2018. Les autorités sont pro-européennes, même si elles entretiennent des relations pragmatiques avec la Russie. Elle a évoqué la nécessité pour ce pays d’entretenir des relations équilibrées avec Ankara, rappelant que la protection de la frontière bulgaro-turque est fondamentale, en particulier dans le contexte actuel d’un renforcement du nationalisme en Turquie.

A. LE FONCTIONNEMENT DES INSTITUTIONS DÉMOCRATIQUES EN TURQUIE

Mmes Ingebjørg Godskesen (Norvège CE) et Marianne Mikko (Estonie SOC), co-rapporteures sur la Turquie pour la commission de suivi du respect des engagements des États membres, ont considéré que neuf mois après la tentative de coup d’État, « la situation s’était détériorée et les mesures dépassaient largement le cadre de ce qui était nécessaire et proportionné ».

Elles ont condamné le contournement du Parlement par l’utilisation de décrets-lois et les arrestations abusives de journalistes. Elles ont également déploré que le référendum constitutionnel du 16 avril 2017 se soit tenu dans des « conditions inéquitables ».

Reprenant les recommandations des co-rapporteures, l’Assemblée a décidé de rouvrir la procédure de suivi2 à l’égard de la Turquie jusqu’à ce que les « profondes préoccupations » concernant le respect des droits de l’homme, la démocratie et l’Etat de droit « soient traitées de manière satisfaisante ». Elle a notamment demandé aux autorités turques d’établir la commission d’enquête sur les mesures de l’état d’urgence et de veiller à ce que les procès se tiennent dans le respect des garanties d’une procédure régulière.

Mme  Nicole Duranton (Eure – Les Républicains) a expliqué qu’elle avait participé à la mission d’observation de l’APCE pour le référendum et qu’elle allait dans le sens des co-rapporteures sur l’illégitimité des résultats. Comme Mme Durrieu, elle a condamné les accusations portées par un parlementaire turc lors du débat libre3.

Rappelant combien l’évolution des libertés fondamentales et de l’État de droit y était tellement préoccupante, elle a considéré que les méthodes employées par les autorités turques pour faire face au coup d’État manqué étaient très éloignées des valeurs et des normes du Conseil de l’Europe : purges massives dans l’administration et la justice, restrictions à la liberté d’expression, arrestations de députés et de journalistes entre autres. Ces mesures justifient la réouverture de la procédure de suivi à l’égard de la Turquie.

Mais la dérive turque n’est pas nouvelle. Les relations de la Turquie avec ses proches voisins, comme la Grèce et la Bulgarie, sont mauvaises. Elles sont distantes avec les États-Unis, notamment en raison de la question kurde. La Turquie s’est fortement rapprochée de la Russie en 2016, mais cette alliance est en réalité fragile. Enfin, les risques de confrontation avec l’Iran chiite ne sont pas minces. La Turquie est isolée.

M. René Rouquet (Val-de-Marne – Socialiste, écologiste et républicain), président de la délégation française, a rappelé que la Turquie est un partenaire incontournable du Conseil de l’Europe, mais que le maintien des liens avec l’Europe ne pouvait cependant se faire à n’importe quel prix.

Les purges disproportionnées qui ont suivi la tentative de coup d’État, les graves atteintes à la liberté d’expression, les conditions de la tenue d’un référendum, la transformation des institutions dans un sens autoritaire et la menace répétée de rétablir la peine de mort, et donc de quitter le Conseil de l’Europe ; obligent à s’ interroger sur la volonté de la Turquie de continuer à partager nos valeurs. Comme les co-rapporteures, il a donc considéré qu’il fallait rouvrir la procédure de suivi, regrettant qu’en Turquie, les progrès significatifs vers l’État de droit et la démocratie obtenus ces dernières années aient été remis en cause. Il a insisté sur le caractère symbolique de cette mesure qui ne saurait constituer une solution à la crise.

Il faut réfléchir ensemble à la manière d’enrayer cette spirale régressive, en particulier en soutenant l’opposition turque.

En conclusion, il a rappelé que la réouverture de la procédure de suivi devait être comprise non pas comme un signe de méfiance, mais comme un témoignage de la volonté de l’APCE d’aider la Turquie.

Mme Josette Durrieu (Hautes-Pyrénées – Socialiste et républicain) a rappelé que la situation en Turquie était complexe et que depuis 2002, avec l’arrivée de M. Erdoğan, qui est un islamo-conservateur, les choses ont inéluctablement évolué vers un recul de la laïcité, tandis que l’armée a été très progressivement décimée. Aujourd’hui, le référendum a sonné la fin de la démocratie parlementaire en Turquie.

Elle a souligné que, depuis 15 ans, les procès, les emprisonnements, les purges, les violations des droits touchent toujours les mêmes cibles. Elle a insisté sur la gravité de la levée de l’immunité parlementaire des députés d’opposition, rappelant que celle-ci a réussi dans la pire des campagnes, à obtenir 49 % pour le non.

Sur la peine de mort, elle a considéré que la position des parlementaires de l’AKP n’était pas claire. Elle a insisté sur la nécessité d’être vigilants sur ce qui se passe dans ce pays, tout en rappelant notre amitié profonde à la Turquie et au peuple turc, dans le cadre d’une procédure de suivi, fondée sur une attention positive à l’évolution du régime.

M. Bernard Fournier (Loire – Les Républicains) a considéré que, si la nouvelle Constitution devait permettre au pouvoir exécutif de prendre rapidement des mesures fortes pour assurer la sécurité sur son territoire dans un contexte difficile, marqué par le terrorisme et le coup d’État manqué de juillet 2016, elle devrait aussi garantir les droits fondamentaux. Malheureusement, la réforme constitutionnelle adoptée consacre la prééminence du président de la République, sans réel contre-pouvoir. Ainsi le président nommera la majeure partie des membres de la Cour constitutionnelle et du Haut Conseil des juges et des procureurs, ce qui renforce son ascendant sur les autorités judiciaires, le Parlement lui-même ne pourrait plus constituer ce contre-pouvoir. Il a considéré que, pour protéger ses droits et faire respecter sa Constitution, le peuple turc pourrait avoir besoin du Conseil de l’Europe. Il a souhaité la réouverture de la procédure de suivi afin de se montrer solidaire envers un peuple qui a adhéré aux valeurs du Conseil de l’Europe dès 1950 et qui entend conserver ses droits et sa liberté.

M. Pierre-Yves Le Borgn’ (Français établis hors de France – Socialiste, écologiste et républicain) a également jugé nécessaire, au vu de la détérioration des droits et libertés, de rouvrir la procédure de suivi. Le recours à l’état d’urgence peut se concevoir dans le contexte du coup d’État, mais force est de reconnaître que la proportionnalité fait malheureusement défaut.

Rappelant les arrestations de parlementaires de l’opposition, influençant tout débat politique démocratique dans le pays, la révocation d’un quart des juges et des procureurs, mettant à mal le fonctionnement du système judiciaire, la révocation de 5 000 universitaires ou l’incarcération de plus de 150  journalistes, il a considéré que c’était la société que l’on voulait mettre au pas, l’esprit critique que l’on voulait museler, loin des checks and balances et de la séparation des pouvoirs qui fondent les sociétés de liberté et de responsabilité.

Il a rappelé qu’au Conseil de l’Europe, il n’est pas possible de vivre à côté de la Convention européenne des droits de l’homme. Il faut s’y soumettre et il a souhaité la levée rapide de l’état d’urgence en Turquie, la remise en cause des révocations collectives de fonctionnaires, le respect des procédures individuelles et, dans ce cadre, de la présomption d’innocence

B. LES DROITS DE L’HOMME DANS LE CAUCASE DU NORD : QUELLES SUITES DONNER À LA RÉSOLUTION 1738 (2010) ?

M. Michael McNamara (Irlande SOC) était l’auteur du rapport. N’étant plus membre de l’APCE, ses positions ont été présentées par M. Franck Schwabe (Allemagne SOC). En effet, en raison de la non-participation aux travaux de la délégation de la Russie, pays principalement concerné, le débat avait été reporté à plusieurs reprises. Le débat s’est tenu en l’absence de la délégation russe.

Dans son rapport, M. Mc Namara avait expliqué qu’en République tchétchène, les autorités continuaient à entretenir un climat de peur sous-jacente, dans une atmosphère de personnalisation du pouvoir. M. Kadyrov a personnellement menacé plusieurs opposants et appuie son pouvoir sur une application stricte des normes religieuses, ce qui a des conséquences graves pour les droits des femmes.

Reprenant les préconisations du rapporteur dans sa résolution, l’APCE a considéré que la situation des droits de l’homme au Caucase du Nord demeure « l’une des plus graves de l’ensemble de l’espace géographique du Conseil de l’Europe ». Cette situation est aggravée par les informations récentes sur des cas de détentions secrètes et de tortures, voire d’exécutions sans jugement de personnes LGBT. Elle a demandé la conduite d’une enquête spécifique sur la question et s’est inquiétée de la non-exécution des arrêts de la Cour de Strasbourg concernant la Tchétchénie.

M. Bernard Fournier (Loire – Les Républicains) a dénoncé la situation en Tchétchénie et le fait qu’aucune amélioration n’ait pu être observée depuis les investigations de l’Assemblée en 2010.

La liste des atteintes aux droits de l’homme et aux libertés fondamentales les plus élémentaires est longue. Le Caucase du Nord est devenu une zone de non-droit. À la liste dressée par le rapporteur, il faut désormais ajouter les persécutions contre les homosexuels.

Il a souligné que les pouvoirs, concentrés entre les mains d’un homme et de son clan qui ont mis la région en coupe réglée, ne laissait pas présager une évolution prochaine. Rappelant que le Kremlin a passé un accord tacite avec les dirigeants du Caucase du Nord qui consiste à leur laisser les mains libres pourvu qu’ils assurent l’ordre et la lutte contre le terrorisme dans ces républiques qui ont longtemps été rebelles à Moscou, il s’est indigné de l’indifférence des autorités russes, pays membre du Conseil de l’Europe.

Regrettant l’absence de la délégation russe, il a considéré que les autorités russes pourraient contribuer à améliorer très nettement la situation dans le Caucase du Nord si elles acceptaient de coopérer avec le Conseil de l’Europe et en particulier le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT) et le Commissaire aux droits de l’homme.

C. DÉBAT SELON LA PROCÉDURE D’URGENCE : ÉVOLUTIONS INQUIÉTANTES EN HONGRIE : UNE NOUVELLE LOI POUR LES ONG RESTREIGNANT LA SOCIÉTÉ CIVILE ET LA FERMETURE D’UNE UNIVERSITÉ INTERNATIONALE

L’Assemblée a décidé de tenir un débat selon la procédure d’urgence, à la demande du groupe socialiste, sur la nouvelle loi pour les ONG restreignant la société civile et la fermeture d’une université internationale en Hongrie.

M. Mogens Jensen (Danemark SOC), rapporteur, s’est inquiété du projet de loi sur la « Transparence des organisations recevant des fonds étrangers » ? qui est examiné sans consultation publique et qui crée la possibilité de dissolution d’une ONG pour non-respect de la loi, le tout avec un vaste champ d’application. Il a remarqué que cette loi semblait s’inspirer fortement du précédent russe. Il a également rappelé que, le 4 avril 2017, le Parlement hongrois avait adopté, sans consultation, une loi portant modification de la loi sur l’enseignement supérieur, dont la principale conséquence pourrait être la fermeture de l’Université d’Europe centrale, fondée en 1991 par George Soros et opérant à Budapest. Il a également déploré que la situation des libertés en Hongrie ne cesse de se dégrader et que l’élaboration et l’examen du projet de loi sur les ONG s’inscrivent sur fond de « discours globalement accusateurs et dénigrants des responsables publics hongrois ».

Dans sa résolution, l’APCE a demandé à la Hongrie de suspendre le débat parlementaire sur le projet de loi sur la Transparence des organisations recevant des fonds étrangers et l’application de la loi portant modification de la loi sur l’enseignement supérieur, dans l’attente de l’avis des experts de la Commission de Venise du Conseil de l'Europe. Elle a aussi appelé les autorités hongroises à engager un « dialogue ouvert » sur ces deux textes de loi avec la société civile.

I. LES APPORTS DU CONSEIL DE L'EUROPE AU DÉVELOPPEMENT DE L’ETAT DE DROIT ET DES DROITS DE L’HOMME

A. 25 ANS DE CPT : PROGRÈS ACCOMPLIS ET AMÉLIORATIONS À APPORTER

Le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT) est habilité à visiter tous les lieux où se trouvent des personnes privées de liberté par une autorité publique. Après chaque visite, le CPT établit un rapport qui est transmis à l’Etat concerné. Il est composé d’experts issus d’horizons diverses tels que des médecins, des magistrats, des policiers ou des directeurs d’établissements pénitentiaires.

M. Jordi Xuclà (Espagne ADLE) a félicité le CPT pour le « travail remarquable » accompli ces 25 dernières années. Il a souligné que les procédures de sélection des membres du CPT au niveau national s’étaient améliorées et que de plus en plus d’Etats acceptaient la publication des rapports de visite du CPT les concernant.

Cependant, dans sa résolution, l’Assemblée a estimé qu’il restait encore beaucoup à faire pour améliorer l’efficacité, l’autorité et l’impact des travaux du CPT. Elle a fait notamment plusieurs propositions pour améliorer la sélection nationale et la publicité des travaux du CPT.

Dans sa recommandation, l’APCE a appelé le Comité des Ministres à examiner en urgence les déclarations publiques du CPT.

B. DÉBAT D’URGENCE : PROJET DE CONVENTION DU CONSEIL DE L’EUROPE SUR LES INFRACTIONS VISANT DES BIENS CULTURELS

Le Comité des Ministres a demandé à l’Assemblée de donner un avis sur le projet de convention du Conseil de l’Europe sur les infractions visant des biens culturels, ce qu’elle a fait sous la forme d’un débat d’urgence.

Dans son rapport, M. Stefan Schennach (Autriche SOC), s’est réjoui de la grande portée de cette nouvelle convention, qui élargit la liste des biens culturels concernés par la protection et renforce les efforts de répression en imposant aux États Parties d’incriminer certains actes liés au trafic et à la destruction de biens culturels.

Dans son avis, l’Assemblée a proposé plusieurs amendements portant notamment sur la possibilité d’incriminer d’autres actes tels que le stockage, le recel, le transport et le transfert de biens culturels meubles ; de considérer la participation à un « groupe terroriste » comme circonstance aggravante pouvant être retenue ; et l’enregistrement des infractions par le Comité des Parties (le mécanisme de suivi).

M. André Schneider (Bas-Rhin – Les Républicains) a rappelé la résolution 2347 en faveur de la protection du patrimoine qui a été adoptée à l’unanimité à l’Onu affirmant avec force que la destruction des biens culturels était un crime de guerre. La destruction délibérée mais aussi le saccage et les vols perpétrés par l’organisation État islamique en Irak et en Syrie sont autant d’atteintes aux droits de l’homme et à la mémoire de l’humanité. Ces vols alimentent un commerce des « antiquités de sang » qui finance le terrorisme.

Rappelant qu’il est Alsacien, M. Schneider a souligné combien la transmission de la culture, de la mémoire reste le meilleur rempart contre les totalitarismes. La convention, en s’attaquant à l’ensemble des infractions liées aux biens culturels, des trafiquants aux acheteurs en passant par les passeurs, « les importateurs », devrait permettre une pénalisation accrue à chaque étape et donc, une certaine dissuasion, au moins pour la partie « demande » de ce trafic. Cette convention sera ouverte aux États non membres du Conseil de l’Europe. Cela est indispensable à la réussite du but visé : la protection effective de la mémoire.

I. LES DROITS DES RÉFUGIÉS

A. PROTÉGER LES FEMMES RÉFUGIÉES DE LA VIOLENCE FONDÉE SUR LE GENRE

Mme Gisela Wurm (Autriche SOC), rapporteure, a souligné qu’assurer la protection contre la violence fondée sur le genre à toutes les femmes « doit être une priorité quel que soit leur statut ». Elle a considéré que la dimension de genre de la crise des réfugiés avait été largement négligée.

Reprenant les propositions de la rapporteure, l’Assemblée, dans sa résolution a demandé que tous les Etats du Conseil de l’Europe signent la Convention d’Istanbul. Elle a aussi préconisé dans les centres de transit et d’accueil que soit assurée une présence féminine parmi les travailleurs sociaux ou les policiers et que des espaces spécifiques soient créés partout. Elle a insisté sur la nécessité de fournir des soins appropriés aux victimes y compris en matière de santé reproductive et de s’assurer que les décisions prises par ces victimes le soient librement, sans autorisation préalable d’un conjoint par exemple. Enfin, elle a appelé les Etats à favoriser le regroupement familial et à investir dans des programmes d’intégration économique et sociale destinés aux réfugiés.

Mme Pascale Crozon (Rhône – Socialiste, écologiste et républicain) a rappelé que, depuis un quart de siècle, les femmes étaient devenues majoritaires parmi la population déplacée et réfugiée placée sous la protection du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés.

Il faut admettre des spécificités et affirmer des principes, comme la reconnaissance explicite du sexe comme constitutif d’un groupe social exposé à des persécutions, ainsi que la reconnaissance explicite des violences de genre – notamment les violences sexuelles, le viol, la prostitution forcée et l’esclavage domestique – comme autant de persécutions et de moyens d’asservir les femmes.

Elle a rappelé avoir introduit dans la législation française un certain nombre de ces mesures, qui en étaient absentes, à l’occasion de la réforme de l’asile de 2015, par exemple, le principe de l’entretien individuel de chaque adulte en l’absence de son conjoint et le droit pour un mineur de demander une audition individuelle ou la formation de l’ensemble des officiers de protection aux violences de genre, pour mieux leur permettre de les détecter et de conduire les entretiens sur ces questions sensibles.

Ces persécutions n’ont pas uniquement lieu dans le pays d’origine et ne sont pas toujours la cause de l’exil. Elles se produisent tout au long du parcours, du fait des passeurs, mais aussi d’autres réfugiés, ou encore, parfois, d’autorités corrompues. Il faut avancer vers un régime d’asile commun qui détermine les droits de chacun au plus tôt, au plus près des zones de combat, pour organiser le voyage et l’accueil de celles et ceux qui relèvent de l’asile.

Mme Maryvonne Blondin (Finistère – Socialiste et républicain) a également rappelé que, loin des propos tenus par les populistes, le mouvement migratoire est de plus en plus féminisé. Le phénomène est largement passé sous silence et peu de mesures spécifiques ont pu être mises en œuvre, faute de moyens.

Elle a souligné que le Gouvernement français avait mis en place, pour les années 2017-2019, un plan spécifique sur la protection des femmes et des filles étrangères victimes de violences, qui prévoit des actions en matière d’accès aux soins et aux services, ainsi que des actions de formation des professionnels qui les prennent en charge. De plus, un groupe thématique « Violences faites aux femmes » de l’OFPRA s’est rendu dans les camps de réfugiés français.

Des violences spécifiques sont mentionnées dans les demandes d’asile, telles que l’excision, le mariage forcé, les violences conjugales et intrafamiliales ou les violences sexuelles subies au sein des camps de réfugiés. À la fin 2016, l’OFPRA a protégé un peu plus de 5 000 petites filles contre les risques d’excision.

B. LES POSSIBILITÉS D’AMÉLIORER LE FINANCEMENT DES SITUATIONS D’URGENCE IMPLIQUANT DES RÉFUGIÉS

M. Cezar Florin Preda (Roumanie PPE/DC), rapporteur, a rappelé qu’il relevait de la responsabilité morale et politique de tous les pays européens de contribuer financièrement à la gestion de la crise actuelle des migrants et des réfugiés, en fonction des moyens dont ils disposent.

Il a déploré que « la complexité des procédures budgétaires et du processus décisionnel et la lenteur de la mise en œuvre des programmes de l'UE sur le terrain, empêchent l'établissement d'infrastructures et l'acheminement de l'aide en temps opportun ».

Dans sa résolution, l’Assemblée a encouragé les pays européens à « intensifier le partage de la charge financière engendrée par la situation actuelle ». Elle a également appelé l’Union européenne à poursuivre ses efforts budgétaires non seulement pour les mesures de contrôle et de sécurité mais aussi pour améliorer les conditions d’accueil, accélérer les procédures d’asile et encourager l’intégration à court et moyen terme des migrants et des réfugiés.

1 Le tribunal constitutionnel espagnol peut être saisi directement par un particulier qui souhaite voir ses droits et libertés individuels respectés grâce à la procédure d'amparo et rétablir les droits mis à mal.

2 Jusqu’à ce jour, la Turquie était engagée dans un dialogue post-suivi avec l’Assemblée, tout comme la Bulgarie, le Monténégro et « l’ex-République yougoslave de Macédoine ». Elle est désormais sous procédure de suivi avec autre neuf Etats : l’Albanie, l’Arménie, l’Azerbaïdjan, la Bosnie-Herzégovine, la Géorgie, la Moldovie, la Fédération de Russie, la Serbie et l’Ukraine.

3 Ce parlementaire avait accusé la délégation de l’APCE d’avoir par ses conclusions préliminaires « soutenu le terrorisme ».


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