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N° 2549

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 3 février 2015.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L’ÉDUCATION SUR LE PROJET DE LOI, ADOPTÉ PAR LE SÉNAT, portant nouvelle organisation territoriale de la République,

PAR M. Stéphane TRAVERT,

Député.

——

Voir les numéros :

Sénat : 636 (2013-2014), 174, 175, 140, 150, 154, 157, 184 et T.A. 54 (2014-2015).

Assemblée nationale : 2529.

SOMMAIRE

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Pages

LES PRINCIPALES MODIFICATIONS ADOPTÉES PAR LA COMMISSION 7

INTRODUCTION 9

I. LES COMPÉTENCES RELATIVES À L’ÉDUCATION 11

A. UNE ASSOCIATION CROISSANTE DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES À LA POLITIQUE DE L’ÉDUCATION 11

1. La traditionnelle frontière entre le champ pédagogique, du ressort exclusif de l’État, et les conditions matérielles d’enseignement assumées par les collectivités 11

a. Un réel succès dans la prise en charge par les collectivités des investissements et des conditions matérielles de l’enseignement 11

b. Un État, de plus en plus déconcentré, garant de l’unité pédagogique 13

2. Une ligne de partage en évolution 14

a. Une association étroite entre l’État et les collectivités dans la répartition des établissements 14

b. La multiplication d’initiatives éducatives diverses et protéiformes 16

c. Une participation active à la gouvernance des établissements scolaires 17

B. UNE CLARIFICATION NÉCESSAIRE, AU SERVICE DES NOUVELLES AMBITIONS DONNÉES À L’ÉDUCATION NATIONALE 18

1. Un transfert des collèges aux régions contradictoire avec les nouvelles continuités école-collège et lycée-enseignement supérieur, au cœur de la refondation de l’école 19

2. Une mise en cohérence bienvenue des compétences éducatives des départements et des régions 21

3. Un équilibre des compétences soucieux de l’impératif de rationalisation budgétaire 23

II. LES COMPÉTENCES RELATIVES À LA CULTURE ET AU SPORT 25

A. LE MAINTIEN DES DOMAINES DE LA CULTURE ET DU SPORT DANS LE CHAMP DES COMPÉTENCES PARTAGÉES ENTRE LES DIFFÉRENTS NIVEAUX DE COLLECTIVITÉS TERRITORIALES 25

1. Le nécessaire maintien de compétences partagées en matière de culture et de sport 25

a. Deux champs de compétences qui, par leur nature, ont toujours depuis 1983 été partagées par les différents niveaux de collectivités territoriales 25

b. Des concours financiers très importants 27

c. Des inquiétudes exprimées sur un possible désengagement de l’État au profit des collectivités territoriales qu’il convient de lever au plus vite 29

2. L’instauration de procédures centralisées d’instruction et d’octroi des aides et subventions 30

3. Les apports du Sénat en matière de coordination des politiques conjointes : le renforcement des conférences territoriales d’action publique (CTAP) 30

B. LES NOUVELLES COMPÉTENCES DES RÉGIONS EN MATIÈRE DE SPORT DE HAUT NIVEAU ET DE FORMATION AUX MÉTIERS DU SPORT ET DE L’ANIMATION 32

1. La régionalisation des centres de ressources, d’expertise et de performance sportive (CREPS) 32

2. Une première réponse à l’inégalité territoriale dans le domaine du sport de haut niveau et de la formation professionnelle aux métiers du sport et de l’animation 33

EXAMEN EN COMMISSION 35

I. DISCUSSION GÉNÉRALE 35

II. EXAMEN DES ARTICLES 55

Article 8 (art. L. 3111-7 et suivants du code des transports, art. L. 213-11 et L. 213-12 du code de l’éducation, art. L. 3321-1, L. 3542-1 et L. 4321-1 du code général des collectivités territoriales et art. L. 8221-6 du code du travail) : Transfert des compétences en matière de transports scolaires aux régions 55

Article 12 (art. L. 212-9, art. L. 213-1 et suivants, art. L. 214-5 et suivants, art. L. 214-8-1 et L. 214-8-2 [nouveaux], art. L. 216-4 et suivants et L. 442-9 du code de l’éducation, art. L. 3321-1, L. 3411-2, L. 3542-1, L. 3641-2 et L. 4221-1-1 du code général des collectivités territoriales et article 1er de la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 relative à l’accueil et à l’habitat des gens du voyage) : Transfert des collèges et des autres compétences scolaires du département vers la région 62

Après l’article 12 69

Article 12 bis A (art. L. 214-2 et L. 614-3 du code de l’éducation) : Rôle des régions dans la planification des formations d’enseignement supérieur et de la recherche 70

Article 12 bis B (art. L. 216-11 du code de l’éducation [nouveau]) : Soutien des collectivités territoriales à l’enseignement supérieur 73

Article 12 ter (art. L. 114-1 à L. 114-17 [nouveaux] et L. 211-1 du code du sport, art. L. 4321-1 du code général des collectivités territoriales, art. 21 de la loi n° 90-1067 du 28 novembre 1990) : Régionalisation des centres de ressources, d’expertise et de performance sportive (CREPS) 74

Article 12 quater (art. L. 211-1 et L. 115-1 [nouveau] du code du sport) : Dispositions relatives aux anciens CREPS de Corse, de Basse-Normandie et de Bretagne et au recrutement d’assistants d’éducation par les établissements publics de formation 79

Article additionnel après l’article 12 quater : Définition des missions et pouvoirs d’investigation de l’inspection générale de la jeunesse et des sports 81

Chapitre IV – Compétences partagées dans le domaine de la culture, du sport et du tourisme et guichets uniques 83

Article 28 A : Principe de garantie des droits culturels des citoyens sur chaque territoire 84

Article 28 (art. L. 1111-4 du code général des collectivités territoriales) : Compétences partagées dans les domaines de la culture et du sport et création de conférences territoriales de l’action publique (CTAP) dédiées 88

Article 28 bis (art. L. 1111-9-1 du code général des collectivités territoriales) : Fonctionnement de la CTAP dans les domaines de la culture et du sport – composition de la CTAP 92

Article 29 (art. L. 1111-8, L. 1111-8-1 et L. 1111-8-2 [nouveau] du code général des collectivités territoriales) : Centralisation de l’instruction et de l’octroi des aides et subventions dans les domaines de compétence partagée 95

Article additionnel après l’article 29 (art. L. 1231-1 à L. 1231-4 [nouveaux] du code général des collectivités territoriales) : Consécration législative de l’existence du Conseil national des collectivités territoriales pour le développement culturel 99

ANNEXES 101

ANNEXE N° 1 : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR 101

ANNEXE N° 2 : LISTE DES CONTRIBUTIONS ÉCRITES REÇUES 102

LES PRINCIPALES MODIFICATIONS ADOPTÉES
PAR LA COMMISSION

Au cours de sa séance du mardi 3 février, la Commission a, sur les articles dont elle s’est saisie pour avis (articles 8, 12, 12 bis A et 12 bis B, qui ont trait aux compétences en matière d’éducation, 12 ter et 12 quater, introduits par le Sénat en première lecture et relatifs au sport, ainsi que 28 A, 28, 28 bis et 29, relatifs au maintien de compétences partagées en matières culturelle et sportive), adopté douze amendements, dont sept du rapporteur, trois de Mme Barbara Pompili (groupe Écolo), un de M. Hervé Féron (groupe SRC) et un de Mme Dominique Nachury (UMP). Elle a, sous réserve de ces amendements, donné un avis favorable à l’adoption de ces articles.

● S’agissant des compétences éducatives, la commission a adopté trois amendements :

– un amendement du rapporteur rétablissant le transfert des transports scolaires des départements aux régions, tel qu’il était prévu dans le projet de loi initial (article 8) ;

– un amendement du rapporteur encourageant le développement des actions communes et de la mutualisation des services des départements et des régions pour la construction et le fonctionnement des collèges et des lycées ; à cet effet, l’amendement confie à la région, désignée « chef de file », la responsabilité d’identifier et de proposer ces mutualisations en rédigeant un projet de convention territoriale d’exercice partagée de compétence, soumis à la délibération de la conférence territoriale d’action publique (CTAP) et à la ratification des conseils régionaux et généraux volontaires (article 12) ;

– un amendement de M. Hervé Féron prévoyant que les interventions des collectivités territoriales en matière d’enseignement supérieur et de recherche prennent en compte les orientations du schéma régional de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation (article 12 bis A) ;

● S’agissant des compétences culturelles et sportives, la commission a adopté neuf amendements :

– un amendement du rapporteur visant à définir, dans la loi, les missions et les pouvoirs de l’inspection générale de la jeunesse et des sports (article additionnel après l’article 12 quater) ;

– un amendement du rapporteur remplaçant, dans l’intitulé d’un chapitre de la loi, la terminologie équivoque et mal comprise de « guichets uniques » par une expression plus conforme au contenu de l’article 29 du projet de loi ;

– un amendement du rapporteur, rectifié par la Commission qui en a élargi le périmètre, visant à affirmer solennellement que les compétences partagées telles que définies à l’article 28 (culture, sport, tourisme, action territoriale et coopération internationale) sont exercées conjointement par l’État et les collectivités territoriales, afin de rassurer les acteurs de terrain, inquiets d’un possible désengagement de l’État dans ces domaines (article 28 A) ;

– trois amendements de Mme Barbara Pompili visant à faire de la vie associative une nouvelle compétence partagée entre les différents niveaux de collectivités territoriales, et, par conséquent, à créer une conférence territoriale d’action publique (CTAP) dédiée à cette compétence (articles 28 et 28 bis) ;

– un amendement de Mme Dominique Nachury visant à préciser, s’agissant des missions de la CTAP, qu’elles ne s’étendent pas à veiller à la mise en œuvre équilibrée des politiques publiques sur les territoires, mais se limitent à en garantir la continuité, la Commission estimant que la mise en œuvre des politiques relève de chaque acteur public (article 28 bis) ;

– un amendement du rapporteur revenant sur l’ajout par le Sénat, s’agissant de la composition de la CTAP, de postes de membres de droit pour les sénateurs du département, la Commission estimant qu’il ne revient pas à des élus nationaux de siéger dans ces instances territoriales (article 28 bis) ;

– un amendement du rapporteur institutionnalisant dans la loi le Conseil national des collectivités territoriales pour le développement culturel (article additionnel après l’article 29).

INTRODUCTION

Déposé au Sénat le 18 juin 2014, le présent projet de loi constitue, après l’adoption de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, dite « MAPTAM », et de la loi n° 2015-29 du 16 janvier 2015 relative à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral, le troisième volet de la réforme des territoires souhaitée par le Président de la République.

Ce texte organise une nouvelle répartition des compétences entre les différents niveaux de collectivités territoriales. Il supprime la clause de compétence générale des régions et des départements, à laquelle il substitue, sauf dans les champs de compétences qui demeurent partagés, des compétences précises confiées par la loi à chaque niveau de collectivité. Il renforce les compétences des régions, auxquelles sont confiés de nouveaux blocs de compétences au service du développement économique, de l’attractivité et du développement équilibré des territoires, assoit celles des intercommunalités afin de leur permettre de mutualiser davantage leurs actions, d’assurer de nouvelles compétences de proximité et d’offrir aux citoyens des services publics de qualité, et conforte le statut des métropoles, issu de la loi MAPTAM.

La commission des Affaires culturelles et de l’éducation s’est, comme elle l’avait fait lors de l’examen du projet de loi MAPTAM, saisie pour avis des dispositions du projet de loi relatives à ses domaines de compétences, se penchant ainsi sur les articles 8, 12, 12 bis A et 12 bis B, qui ont trait aux compétences en matière d’éducation, les articles 12 ter et 12 quater, introduits par le Sénat en première lecture et relatifs au sport, ainsi que sur les articles 28 A, 28, 28 bis et 29, relatifs au maintien de compétences partagées dans les domaines du sport et de la culture.

Le Sénat a adopté ce projet de loi en première lecture le 27 janvier dernier. Son inscription à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale dès la semaine du 16 février prochain conduit la commission des Lois, qui est saisie du projet de loi au fond, comme les différentes commissions qui se sont saisies pour avis, à examiner le texte dans des délais extrêmement contraints, ce que le rapporteur pour avis ne peut que déplorer. Il a néanmoins pu mener quelques auditions et a reçu des contributions écrites (1) qui lui ont permis de recevoir l’éclairage, tant d’associations d’élus que de praticiens des domaines étudiés, à propos des articles sur lesquels portent le présent avis et des modifications adoptées par le Sénat en première lecture.

I. LES COMPÉTENCES RELATIVES À L’ÉDUCATION

A. UNE ASSOCIATION CROISSANTE DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES À LA POLITIQUE DE L’ÉDUCATION

La répartition des compétences en matière d’éducation obéit à un principe clair et ancien, qui confie à l’État la responsabilité exclusive des contenus d’enseignement tandis que les collectivités territoriales s’attachent à améliorer les conditions d’enseignement.

Dès l’institution de l’école de la République à la fin du XIXe siècle, l’Instruction publique devenue l’Éducation nationale a en effet fait l’objet d’une décentralisation s’inscrivant moins dans une logique de transfert de compétence que dans une logique d’association des collectivités à un État unique garant du service public de l’éducation.

Le treizième alinéa du préambule de la Constitution de 1946 a ainsi clairement délimité les frontières des actions de chacun en disposant que « l’organisation de l’enseignement public gratuit et laïc à tous les degrés est un devoir de l’État ».

Cette évolution, dont le rythme s’est considérablement accéléré depuis le début des années 1980, a été consacrée par la nouvelle rédaction de l’article L. 211-1 du code de l’éducation par la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et aux responsabilités locales, qui a substitué à une Éducation « service public de l’État, sous réserve des compétences attribuées aux collectivités territoriales » un « service public national dont l’organisation et le fonctionnement sont assurés par l’État, sous réserve des compétences attribuées aux collectivités territoriales […] pour les associer au développement de ce service public. »

1. La traditionnelle frontière entre le champ pédagogique, du ressort exclusif de l’État, et les conditions matérielles d’enseignement assumées par les collectivités

a. Un réel succès dans la prise en charge par les collectivités des investissements et des conditions matérielles de l’enseignement

À cet effet, s’est d’abord dessinée une ligne de partage inspirée par la distinction entre tout ce qui relève du champ pédagogique, compétence exclusive de l’État, et la prise en charge des conditions matérielles de l’enseignement, progressivement confiée aux collectivités.

Une logique d’échelon pour les conditions matérielles

Ces transferts des compétences ont été effectués dans une logique d’échelon, attribuant à chaque niveau territorial (commune, département et région) une étape de l’enseignement scolaire (école, collège et lycée). Cette méthode de spécialisation, pour des métiers comparables, sur un type d’établissement particulier, a porté ses fruits, les collectivités territoriales ayant relevé avec un réel succès les défis posés par la modernisation des établissements scolaires et la massification de l’enseignement secondaire.

Cette approche s’est d’abord solidement ancrée dans le premier degré d’enseignement. Les lois du 1er août 1879 relatives à l’établissement des écoles normales primaires, du 30 octobre 1886 sur l’organisation de l’enseignement primaire (loi « Goblet ») et du 19 juillet 1889 sur les dépenses ordinaires de l’instruction primaire publique et les traitements du personnel de ce service ont ainsi confié aux communes les dépenses liées à l’investissement, au fonctionnement matériel, ainsi qu’au recrutement et à la gestion des personnels d’entretien, de restauration et de surveillance des écoles maternelles et élémentaires, les départements assumant ces responsabilités pour les écoles normales supérieures.

Reprenant ce mouvement un siècle plus tard, les lois « Defferre » n° 83-8 du 7 janvier 1983 et n° 83-663 du 22 juillet 1983 relatives à la répartition des compétences entre les communes, les départements, les régions et l’État ont étendu, à partir du 1er janvier 1986, ces missions matérielles aux départements et aux régions, auxquels ont été rattachés respectivement les collèges et les lycées. Ces collectivités établissent ainsi, pour chaque étape du second degré d’enseignement, le programme prévisionnel des investissements. Elles déterminent la localisation, la capacité et le mode d’hébergement des élèves des établissements. Elles prennent en charge « la construction, la reconstruction, l’extension, les grosses réparations, l’équipement et le fonctionnement » des collèges et des lycées.

Tirant parti de la dynamique remarquable constatée dans l’exécution de ces missions, les investissements dans les collèges et les lycées ayant été multipliés respectivement par cinq et douze entre 1986 et 2003, la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et aux responsabilités locales (LRL) a transféré aux régions et aux départements :

– la pleine propriété des biens mobiliers et immobiliers des établissements publics locaux d’enseignement relevant de leur compétence (articles L. 213-3 et L. 217-7 du code de l’éducation) ;

– les compétences d’accueil, de restauration, d’hébergement et d’entretien général et technique (articles L. 213-2 et L. 214-6) ;

– le recrutement, la rémunération et la gestion de près de 93 000 agents formant les personnels techniciens, ouvriers et de service (TOS), devenus agents techniques territoriaux des établissements d’enseignement (ATTEE) ainsi que les 14 000 emplois aidés affectés dans les collèges et les lycées (articles L. 213-2-1 et L. 214-6-1).

Cette dévolution a permis d’étendre à toute la scolarité le modèle forgé par les lois républicaines des années 1880 pour les communes, qui, au titre de la « charge des écoles publiques » qu’elles assument sur le fondement de l’article L. 212-4, recrutent, rémunèrent et gèrent les agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles (ATSEM).

Une logique de métier pour les transports scolaires

Retenant une logique de compétence plutôt que d’attribution d’un échelon d’enseignement, la loi du 22 juillet 1983 a parallèlement confié aux seuls départements la responsabilité des transports scolaires, sous réserve des compétences attribuées directement aux collectivités urbaines qui choisissent de se doter d’un périmètre de transports urbains (PTU).

b. Un État, de plus en plus déconcentré, garant de l’unité pédagogique

En miroir de ces dispositions, l’État a conservé, tout en menant une ample déconcentration de sa gestion au profit des rectorats et des inspections académiques, l’ensemble des prérogatives nécessaires à l’organisation pédagogique de l’enseignement.

Sur le fondement de l’article L. 211-1 du code de l’éducation, il définit ainsi les voies de formation, les programmes nationaux et le contenu des enseignements. Il certifie les connaissances et les compétences acquises par les élèves et les étudiants par la définition et la délivrance des diplômes nationaux et la collation des grades et titres universitaires.

L’État assume la répartition des moyens consacrés aux enseignements, « afin d’assurer en particulier l’égalité d’accès au service public » et le contrôle et l’évaluation, « en vue d’assurer la cohérence d’ensemble du système éducatif ».

De même, il demeure seul responsable du recrutement, de la gestion et de la rémunération du personnel enseignant ainsi que de l’administration, de l’inspection et de l’évaluation.

Il maîtrise l’ouverture et la fermeture des classes, auxquelles sont liées les affectations des enseignants, décidées par le directeur académique des services de l’éducation nationale pour les écoles et par le recteur pour les établissements du secondaire.

Il assume enfin le financement des « dépenses de fonctionnement à caractère directement pédagogique » au nombre desquelles la loi n° 2013-595 du 8 juillet 2013 d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République a clairement ajouté les dépenses « afférentes aux ressources numériques, incluant les contenus et les services, spécifiquement conçues pour un usage pédagogique » (article L. 211-8).

2. Une ligne de partage en évolution

La distinction traditionnelle entre pédagogie et condition matérielle, qui structure le système éducatif français, n’est pas une frontière infranchissable.

Entre le cœur du métier d’enseignement et les murs des établissements, existent de larges opportunités d’actions grâce auxquelles collectivités et État, dans un étroit partenariat, peuvent innover et contribuer à enrichir la qualité de l’éducation offerte à nos jeunes concitoyens.

Loin de se cantonner à l’intendance, communes, départements et régions ont ainsi déployé un large spectre d’initiatives tandis que le législateur prenait soin de les associer aux grandes évolutions imprimées à l’Éducation nationale.

a. Une association étroite entre l’État et les collectivités dans la répartition des établissements

En cohérence avec leur mission d’investissement, les collectivités territoriales se sont vues reconnaître une place de codécideurs dans la planification et la répartition des établissements d’enseignement.

Il importe de rappeler qu’ici encore, s’est enclenchée une dynamique d’association et non de répartition de compétences étanches.

Ainsi, s’agissant de la création des établissements secondaires, départements et régions ne sont, dans les faits, qu’à l’initiative. C’est l’État qui concrétise les projets en arrêtant la constitution des établissements publics. Cette situation est d’ailleurs différente de celle retenue pour les écoles maternelles et primaires, qui peuvent être créées, aux termes de l’article L. 2121-30 du code général des collectivités territoriales, par les conseils municipaux après avis du préfet.

Par ailleurs, même dans les cas où les collectivités exercent des compétences de carte scolaire, l’État a conservé un rôle incontournable en confiant aux inspecteurs d’académie les deux prérogatives exclusives que constituent la détermination des effectifs maximums des établissements et la délivrance des autorisations d’inscription des élèves ne résidant pas dans le secteur de recrutement de leur établissement.

Surtout, comme il a été vu supra, l’État dispose du dernier mot, en pouvant librement décider d’ouvrir – en les dotant d’enseignants – et de fermer les classes nécessaires au fonctionnement des écoles, collèges et lycées.

La définition du ressort des écoles et des collèges confiée aux communes et aux départements en association avec l’État

Sous ces réserves, la loi LRL du 13 août 2004 a encouragé une évolution importante dans la fixation du ressort des établissements, et par conséquent de la répartition des élèves.

D’une part, elle a attribué la compétence de carte scolaire des écoles au conseil municipal, et non plus au seul maire au nom de l’État.

D’autre part, elle a transféré au département la détermination du secteur de recrutement de chaque collège, « en tenant compte des critères d’équilibre démographique, économique et social », la loi n° 2013-595 du 8 juillet 2013 d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République leur offrant ensuite la faculté de partager un même secteur de recrutement entre plusieurs collèges « lorsque cela favorise la mixité sociale » (article L. 213-1 du code de l’éducation).

L’affirmation des régions stratèges des formations secondaires, en particulier professionnelles

Dans une logique différente, en sans responsabilité toutefois en matière de carte scolaire pour les lycées, la région s’est vue confier, en cohérence avec ses responsabilités économiques, une mission stratégique de planification et de pilotage qui dépasse d’ailleurs les seuls lycées, dont elle assume la charge matérielle.

– La région adopte ainsi depuis la loi LRL du 13 août 2004, dans le respect des orientations nationales et après accord des départements concernés, le schéma prévisionnel des formations des collèges et de l’ensemble des lycées, qui est ensuite décliné dans les programmes d’investissements définis comme il a été vu supra par les deux acteurs dans leur domaine de compétence respective (article L. 214-1 du code de l’éducation). Ce schéma s’étend aux formations offertes par les établissements privés sous contrat.

– Surtout, la région dispose désormais d’une compétence renforcée dans la structuration de l’offre de formation professionnelle, en cohérence avec la place incontournable que lui aménage désormais la législation en matière d’orientation.

Initialement limité par la loi « Defferre » du 7 janvier 1983 à l’apprentissage et à la formation professionnelle continue, clairement distinguée de la formation initiale, le rôle des conseils régionaux s’est en effet considérablement étendu afin de leur donner les moyens de mieux faire correspondre les formations proposées aux besoins économiques des bassins d’emplois.

Au terme d’une lente mais efficace montée en puissance, la loi de refondation de l’école du 8 juillet 2013 a consacré un véritable pouvoir de codécision entre État et régions qui sont désormais contraints de s’entendre pour créer ou supprimer des sections de formations professionnelles, y compris celles délivrées dans les lycées.

Région et autorité académiques signent ainsi préalablement un contrat de plan régional de développement des formations et de l’orientation professionnelle, sur le fondement duquel la région arrête la carte régionale des formations professionnelles initiales. Ce document, exhaustif, précise les sections nouvelles, fermées ou maintenues, sur lesquelles État et régions se mettent d’accord en adoptant chaque année la convention d’application du contrat de plan.

b. La multiplication d’initiatives éducatives diverses et protéiformes

De très nombreuses actions d’accompagnement et de soutien

En parallèle de ces nouvelles prérogatives, les collectivités territoriales, généralement concentrées sur leur échelon d’enseignement, ont investi des domaines aux marges de blocs de compétence fixés en 1983 et 2004.

Elles ont ainsi multiplié des initiatives venant compléter les actions entreprises par l’État en vertu de sa mission pédagogique.

Cette complémentarité est manifeste dans les réseaux d’éducation prioritaire, dans lesquels les collectivités jouent depuis longtemps un rôle décisif de coordination et d’accompagnement.

Mais de manière plus générale, régions et départements se sont efforcés de participer à l’effort éducatif national.

Nombre d’entre eux ont ainsi pris en charge, de manière totale ou partielle, le coût des manuels scolaires ou financé des « chéquiers lectures » à destination des collégiens et des lycéens. Ils ont très fréquemment accordé des mesures d’aide sociale complémentaire à celles de l’État, par l’attribution de bourses, notamment pour les élèves de sections d’enseignement général et professionnel adapté (SEGPA), ou par la prise en charge de tout ou partie des frais de restauration ou de transports.

Un nombre très important de collectivités confrontées au défi de l’échec scolaire a choisi de s’impliquer dans l’accompagnement éducatif en mettant en place de dispositifs de médiation, d’aide aux devoirs, d’accompagnement scolaire individualisé dans les lycées professionnels, de « classes-relais », de « collèges ouverts » et d’internats « de la réussite ».

C’est enfin dans le déploiement des technologies de l’information que communes, régions et départements ont su donner la plus précieuse impulsion en consentant de puissants efforts pour équiper les établissements en ressources informatiques récentes (tableaux interactifs, environnements numériques de travail, attributions d’ordinateurs portables ou de tablettes aux élèves et aux équipes enseignantes…).

Un rôle croissant des régions dans l’enseignement supérieur

Dans un esprit comparable, les régions, chefs de file du développement économique et responsables de la formation professionnelle et de l’apprentissage, sont progressivement intervenues dans l’enseignement supérieur, compétence de principe de l’État. Divers facteurs ont rendu nécessaire cet investissement.

D’abord, l’organisation de certaines formations universitaires au moyen de l’apprentissage ou de la formation continue, comme l’implantation de formations supérieures dans les lycées dont elles ont la charge, qu’il s’agisse des classes préparatoires aux grandes écoles (CPGE) ou des sections de techniciens supérieurs (STS), relèvent directement de leurs compétences.

Ensuite, la multiplication des formations professionnalisantes au-delà du baccalauréat (DUT en apprentissage ou formation continue, licences et masters professionnels, formations d’ingénieurs…), a conduit de nombreuses régions à se soucier de la cohérence d’ensemble de l’offre de formation et à intervenir pour encourager une meilleure adéquation entre les qualifications proposées et les besoins constatés sur le marché du travail.

Enfin, les régions ont assumé, dès le début des années 1990, un effort croissant d’investissement pour répondre aux besoins créés par la massification de l’enseignement supérieur, essentiellement au moyen de la participation à des opérations d’immobilier universitaire, y compris de logement des étudiants, et de soutien à la réalisation d’équipement scientifique et de recherche, à la mise en réseau des acteurs dans le cadre des politiques de site et aux stratégies d’innovation, de valorisation et de transfert de technologie.

c. Une participation active à la gouvernance des établissements scolaires

Pour tenir compte de cette étroite association, le législateur a renforcé la représentation des collectivités dans la gouvernance des écoles, des collèges et des lycées.

À cet effet, la loi de refondation de l’école du 8 juillet 2013 a fait passer d’un à deux, dont éventuellement un non élu, la représentation des collectivités de rattachement, la commune siège conservant un ou deux représentants selon que le conseil d’administration est composé de vingt-quatre ou trente membres (article L. 421-2 du code de l’éducation).

Elle a aussi permis aux collectivités qui le désirent d’être partie au contrat d’objectif conclu entre l’établissement et l’autorité académique (article L. 421-4).

Elle a enfin prévu leur association aux projets éducatifs territoriaux consacrés aux activités périscolaires prolongeant le service public de l’éducation (article L. 551-1).

Les instances de concertation permanente entre l’État et les collectivités territoriales, importantes pour garantir une information constante et générale sur les actions de chacun, semblent pour leur part avoir rencontré plus de difficultés pour trouver leur place.

Au niveau national, tout d’abord, le conseil territorial de l’éducation nationale, mis en place par la loi LRL de 2004 pour étayer au niveau central du ministère de l’éducation la culture émergente d’une concertation étroite avec les élus locaux, n’a jamais fait ses preuves avant d’être supprimé par le décret n° 2013-420 du 23 mai 2013.

Au niveau local, les conseils académiques de l’éducation nationale (CAEN) prévus par l’article L. 235-1 du code de l’éducation, instances consultatives tripartites associant l’État (via le préfet et le recteur), les élus des départements et des régions et les organisations représentatives des personnels et des usagers, fonctionnent plus efficacement, sans doute en partie grâce à leur bicéphalisme mieux affirmé. Ces commissions sont en effet présidées, selon le sujet abordé, par le représentant de l’État ou le président du conseil régional ou général, qui établissent conjointement leur ordre du jour. Force est toutefois de déplorer que le rôle et la reconnaissance de ces commissions demeurent très inégaux selon les territoires et qu’elles peinent à assumer l’intégralité des missions de coordination qu’appelle pourtant leur vocation.

B. UNE CLARIFICATION NÉCESSAIRE, AU SERVICE DES NOUVELLES AMBITIONS DONNÉES À L’ÉDUCATION NATIONALE

Au travers de ces modalités complexes d’association, les collectivités territoriales assument aujourd’hui 24,5 % de la dépense intérieure d’éducation, dont 40,3 % de la dépense pour le premier degré, 21,8 % pour le second degré et même 10,5 % pour le supérieur (en incluant l’apprentissage).

Ce poids impose à la représentation nationale de réserver un traitement particulier aux questions éducatives dans l’examen de la réforme d’ampleur de l’architecture territoriale de notre pays que dessine le projet de loi.

En l’absence d’un consensus sur la disparition du département, le rapporteur pour avis considère que le respect de trois grands principes doit guider la répartition des compétences éducatives des collectivités territoriales.

– Le premier concerne la cohérence entre les missions confiées aux collectivités et les grandes ambitions fixées à l’Éducation nationale.

L’association des collectivités au service de l’un des grands desseins de la présente législature qu’est la priorité éducative a précisément pour objet de renforcer la qualité de notre système éducatif en mobilisant leur réactivité, leur capacité d’initiative et leur connaissance des besoins locaux au service la réussite de tous les élèves et étudiants.

Stratégie de décentralisation et stratégie scolaire globale ne peuvent dès lors qu’être intrinsèquement liées, de la même manière que le premier degré et les communes ont, dès l’origine, su nouer une alliance décisive pour fonder l’école de la République.

– Le second principe est la nécessité de moderniser et de clarifier, de manière globale, les compétences dévolues aux collectivités, pour qu’enfin nos concitoyens identifient clairement les responsabilités de chacun et que chaque acteur se concentre sur les plus-values qu’il est réellement en mesure d’apporter à notre pays.

À cet égard, le rapporteur pour avis estime que l’équilibre dessiné par le présent projet de loi entre des régions renforcées, devenues pleinement architectes et maîtres d’œuvre du développement économique, de l’innovation et de l’emploi, et des départements recentrés sur les missions de proximité et de solidarité auxquelles les appellent leur vocation et leur taille, est pleinement pertinent et peut aisément inspirer la répartition des missions éducatives.

Dans un même esprit, toutes les dispositions du projet intensifiant l’ancrage démocratique et les facultés d’expérimentation des collectivités emportent son entière et profonde adhésion.

– Un dernier principe doit enfin être gardé à l’esprit : il est essentiel de veiller à ce que la nouvelle organisation territoriale soit aussi une source de rationalisation des dépenses et donc d’économies pour la nation.

Les dispositions initiales du projet de loi relatives à l’éducation, ainsi que les modifications apportées par le Sénat dans sa première lecture, peuvent ainsi être appréciées de manière nuancée lorsqu’elles sont confrontées à ces trois grandes préoccupations.

1. Un transfert des collèges aux régions contradictoire avec les nouvelles continuités école-collège et lycée-enseignement supérieur, au cœur de la refondation de l’école

Principale innovation du projet de loi, le transfert des collèges des départements aux régions apparaît à ces trois égards contestable, et sans doute trop exclusivement inspiré par l’extinction progressive des compétences du département qui avait fixé le cadre des premières réflexions du Gouvernement.

En premier lieu, en effet, l’absorption par les régions de la gestion des collèges et par conséquent son rapprochement des lycées entrent en contradiction avec l’un des axes majeurs de la refondation de l’école dégagé par la loi de refondation du 8 juillet 2013.

Face aux profondes difficultés auxquelles notre école est confrontée, aux défis de l’hétérogénéité de ses élèves et aux fractures croissantes éloignant les plus faibles des meilleurs d’entre eux, le Parlement a en effet réaffirmé son ambition de doter tous les élèves à l’issue du collège unique d’un solide socle commun de connaissances, de compétences et de culture.

Fort de la conviction que cette acquisition repose sur une meilleure coordination entre l’école primaire, où se joue l’essentiel des destins scolaires, et le collège, où les difficultés les plus criantes se manifestent, il a introduit la notion de continuité entre ces deux étapes décisives de l’éducation obligatoire, prévoyant même l’institution d’un cycle commun associant le CM2 et la 6e.

Afin d’encourager le rapprochement des écoles et des collèges, dans le respect des particularités locales, la loi de refondation a ainsi prévu la mise en place de conseils collège-école, chargés de proposer des enseignements et des projets pédagogiques communs et ainsi de donner corps à ce continuum.

À l’autre bout des études, pour remédier à la nette inflation des taux d’échec dans les premières années de l’enseignement supérieur et aux sévères difficultés d’orientation subies par les élèves et les étudiants, s’est affirmée la volonté d’étoffer les liens entre les lycées et l’enseignement supérieur et d’offrir à chacun la possibilité de bénéficier d’une réelle orientation, adaptée à ses aspirations, à ses aptitudes et aux besoins réels du marché du travail.

Cette notion dite « -3/+3 » a ainsi été introduite dans l’annexe de la loi de refondation de l’école du 8 juillet 2013 et dans le dispositif de la loi n° 2013-660 du 22 juillet 2013 relative à l’enseignement supérieur et à la recherche (ESR). Elle fait aujourd’hui notamment l’objet d’une mission d’information créée le 19 novembre 2014 par de la commission des Affaires culturelles et de l’éducation.

Le rapprochement des collèges et des lycées, sous l’égide de la région, interviendrait en outre à contre-courant du décloisonnement nécessaire du système secondaire français.

Il est vrai que les missions d’investissement et de fonctionnement n’affectent pas directement les activités pédagogiques assumées par l’État. Il est néanmoins manifeste, comme il a été vu supra, que les collectivités tendent à déployer des activités et à promouvoir des initiatives qui s’étendent bien au-delà de leurs seules tâches matérielles mais qui demeurent légitimement concentrées sur le niveau d’éducation dont elles assument la charge.

Dans ce contexte, la cohérence plaide pour :

– d’un côté, une plus ample association entre les écoles et les collèges, qui forme d’ailleurs depuis longtemps l’un des piliers de notre politique d’éducation prioritaire, au service de l’acquisition des compétences et des connaissances fondamentales et de la lutte contre l’échec scolaire ;

– de l’autre, un rapprochement des lycées et des enseignements supérieurs, pour une orientation réussie.

Cette ambition ne peut se passer de l’aide des collectivités territoriales.

Transférer aux régions, à une échéance rapprochée, 5 257 collèges publics venant s’ajouter aux 2 513 lycées dont elles ont la charge, pourrait créer des difficultés de gestion obérant la pleine appropriation par les élus de ces chantiers décisifs. Cela est d’autant plus probable qu’il serait dans les faits extrêmement difficile aux élus régionaux de s’impliquer dans tous ces établissements, ne serait-ce qu’en participant à leurs conseils d’administration.

2. Une mise en cohérence bienvenue des compétences éducatives des départements et des régions

Le rapporteur pour avis estime que les départements et les régions sont, par la nature même des missions globales que l’on souhaite leur confier, les plus aptes à gérer efficacement les défis particuliers des établissements dont ils ont aujourd’hui la charge.

Une répartition des collèges et des lycées aujourd’hui en cohérence avec la vocation de proximité et de solidarité des départements et la vocation stratégique et économique des régions

Le collège, mobilisé sur la garantie d’un socle commun indifférencié pour tous les élèves, est en effet le plus dépendant de la qualité de l’accompagnement personnalisé organisé à l’intérieur mais aussi à l’extérieur de ses murs, sur lequel les départements ont su forger une réelle expertise.

Il est aussi le lieu où s’expriment les symptômes les plus aigus des douleurs sociales, auxquelles le département, recentré sur ses compétences de solidarité, apparaît le mieux à même de répondre.

La gestion des défis quotidiens du collège semble ainsi bien s’inscrire dans la logique de proximité qui s’impose au cœur des attributions du département.

À l’inverse, le transfert de la responsabilité de la gestion des 39 823 ATTEE affectés aujourd’hui dans les collèges constituerait un défi très lourd pour les régions, dont les effectifs seraient ainsi brutalement augmentés de plus de 50 %.

Il est utile de rappeler, en effet, que l’entrée dans la fonction publique territoriale de ces personnels, incontestablement réussie puisque 71 % d’entre eux ont préféré intégrer ses cadres d’emplois plutôt que de rester en position de détachement sans limitation de durée, a imposé un effort d’adaptation considérable des structures et des méthodes de gestion des ressources humaines des départements et des régions. Ces agents, en très vaste majorité de catégorie C et à l’égard desquels l’État ne s’était pas toujours montré à la hauteur de ses responsabilités, ont soulevé des problématiques inédites pour les collectivités, notamment en termes de pénibilité, de santé, de formation et de mobilité.

Une répétition à vaste échelle de cette expérience menacerait de priver les régions de l’atout que leur confère leur caractère d’administration de projet plutôt que de gestion, mobilisée par les fonctions stratégiques qu’elles assument avec une particulière efficacité.

Une rationalisation opportune des transports scolaires sous l’égide de la région

Les autres transferts proposés dans le projet de loi initial s’intègrent plus aisément dans la vocation opérationnelle et économique des grandes régions.

Ainsi, de la même manière que, comme il a été vu supra, les régions encadrent l’ensemble des investissements ensuite définis et mis en œuvre par elles-mêmes ou les départements dans l’ensemble des lycées et des collèges, il apparaît cohérent au rapporteur pour avis qu’elles assument un nouveau rôle de coordination en se voyant transférer, comme le proposent les dispositions de l’article 8 du projet de loi initial supprimées par le Sénat, l’organisation et le fonctionnement des transports scolaires.

En proposant de faire de la région l’autorité organisatrice des transports, le projet de loi ne prétend pas leur imposer brutalement la gestion quotidienne de l’étroit et complexe maillage des réseaux de ramassage scolaire.

Sa rédaction préserve en effet la faculté de déléguer cette compétence à une liste d’organisateurs secondaires, à laquelle il ajoute opportunément les départements.

Conformément à l’ambition de planification confiée aux régions, ce transfert permettrait, à l’inverse, de renforcer la cohérence globale et l’harmonisation du service public des transports scolaires, en garantissant notamment la coordination des axes de ramassage avec les implantations de sites scolaires que la région maîtrise déjà au travers des schémas prévisionnels des formations précités.

Il pourrait même renforcer les possibilités de mutualisation des coûts de transports, dont la particularité est qu’ils pèsent d’autant plus lourds qu’ils sont organisés dans des départements ruraux aux habitations dispersées, dont les ressources financières sont souvent plus limitées que celles des départements plus urbains. L’échelle des grandes régions est sans doute la plus pertinente pour mettre en place ce type de péréquation.

Une utile association avec l’État pour établir la carte de l’enseignement supérieur

Dans cette logique d’adaptation de la répartition des formations aux réalités locales, le Sénat a adopté un article 12 bis A prévoyant que la carte des formations supérieures et de la recherche, arrêtée et révisée, conformément à l’article L. 614-3 du code de l’éducation, par le ministre chargé de l’enseignement supérieur, soit préalablement approuvée, pour ses parties concernant leur territoire, par les régions concernées.

Cette disposition vise à renforcer la portée des schémas régionaux de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation qu’adoptent les régions depuis la loi ESR du 22 juillet 2013.

Ainsi dotées de missions de planification à la fois pour l’ensemble du secondaire et les transports qui y sont associés, pour la formation professionnelle initiale et continue et pour les formations supérieures et de recherche, les régions disposeraient de tous les instruments cohérents pour mettre en œuvre une réelle stratégie de développement, en étroite association avec l’État.

Ces missions seraient de nature à mieux leur permettre d’assumer la mission fondamentale d’orientation que leur a confiée la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale. Cette dernière dispose en effet qu’État et régions « assurent le service public de l’orientation tout au long de la vie », le premier pilotant l’orientation scolaire et universitaire tandis que la seconde coordonne, sur son territoire, l’action de tous les autres organismes participant à ce service (missions locales, Pôle emploi, réseau Information Jeunesse…).

3. Un équilibre des compétences soucieux de l’impératif de rationalisation budgétaire

Le nouvel équilibre proposé par le rapporteur pour avis, qui exclue le transfert des collèges aux régions mais intègre leurs nouvelles compétences en matière de transport et de planification de l’enseignement supérieur, apparaît le plus conforme aux nécessités de rationalisation des dépenses qu’impose l’état de nos finances publiques.

Il apparaît en particulier désormais consensuel que les économies d’échelle qui pourraient utilement être dégagées par le rapprochement des tâches d’investissement et de fonctionnement dans les collèges et les lycées découleront moins du transfert proposé que d’un nouvel élan donné à la libre mutualisation par les collectivités de leurs métiers communs.

Outre son inéluctable coût de transition et l’adaptation nécessaire des services de ressources humaines, le transfert des ATTEE des collèges aux régions serait en effet susceptible de générer des dépenses supplémentaires induites par l’harmonisation de leurs rémunérations. Le rapport présenté le 9 mai 2012 par le ministère de l’éducation nationale au Parlement sur les effets de la décentralisation sur le fonctionnement du système éducatif pour la période 2005-2010 a ainsi relevé que « l’augmentation moyenne des agents des lycées correspondrait à deux ou trois fois celle des agents des conseils généraux », notamment en raison de l’intégration, en même temps que les personnels des lycées, des agents des lycées agricoles dont le régime indemnitaire était significativement supérieur dans la fonction publique de l’État.

C’est pourquoi le rapporteur pour avis a préféré présenter une solution alternative confiant aux régions, consacrées chef de file dans l’enseignement secondaire, la responsabilité d’encourager cette mutualisation en proposant aux départements des actions communes dans le cadre des conventions territoriales d’exercice concerté d’une compétence.

II. LES COMPÉTENCES RELATIVES À LA CULTURE ET AU SPORT

A. LE MAINTIEN DES DOMAINES DE LA CULTURE ET DU SPORT DANS LE CHAMP DES COMPÉTENCES PARTAGÉES ENTRE LES DIFFÉRENTS NIVEAUX DE COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Le chapitre IV du titre III du projet de loi, consacré aux « compétences partagées dans le domaine de la culture, du sport et du tourisme et guichets uniques » contient, dans sa rédaction issue du Sénat, quatre articles intéressant les compétences de la commission des Affaires culturelles et de l’éducation : l’article 28 maintient la culture et le sport dans le champ des compétences partagées entre les différents niveaux de collectivités territoriales, par dérogation à la suppression de la clause de compétence générale des régions et des départements à laquelle procèdent respectivement les articles 1er et 24 du projet de loi ; le Sénat a par ailleurs adopté un article 28 A visant à garantir les droits culturels des citoyens par l’exercice conjoint de la compétence en matière de culture par l’État et les collectivités territoriales ; l’article 29 crée la possibilité d’un traitement centralisé par un niveau de collectivité territoriale ou par l’État, sur délégation des autres collectivités, de l’instruction des demandes d’aides ou de subventions et de leur octroi – dispositif improprement qualifié de « guichets uniques » ; sur l’initiative du Sénat, les compétences des conférences territoriales de l’action publique – instances régionales de concertation entre les élus et l’État créées par la loi MAPTAM – sont renforcées dans les domaines de compétences partagées (articles 28, dernier alinéa, et 28 bis).

1. Le nécessaire maintien de compétences partagées en matière de culture et de sport

a. Deux champs de compétences qui, par leur nature, ont toujours depuis 1983 été partagées par les différents niveaux de collectivités territoriales

La suppression de la clause de compétence générale des régions et des départements, opérée par le projet de loi dans un souci de rationalisation de l’action des collectivités territoriales, ne se justifie pas dans tous les domaines. Certains méritent de demeurer dans le champ des compétences partagées entre les différents niveaux de collectivités territoriales ; il en va ainsi, notamment, des domaines transversaux que sont la culture et le sport.

La construction de grands équipements, qu’ils soient culturels ou sportifs, met nécessairement en jeu des cofinancements par les différents niveaux de collectivités, ce qui permet une levée de fonds bien plus importante, mais aussi une répartition des risques financiers et, au-delà, un partage de points de vue et d’expériences et une vision d’ensemble à l’échelle d’un territoire plus vaste. En matière culturelle, la pluralité des acteurs apparaît aussi comme indispensable à la diversité des propositions artistiques offertes au public.

D’ailleurs, la loi du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales, qui avait supprimé la clause de compétence générale des régions et des départements, avait déjà maintenu les compétences relatives à la culture et au sport dans le champ des compétences partagées n’étant pas susceptibles d’être confiées de manière exclusive à un seul niveau de collectivités territoriales. Toutefois, l’exception ainsi ménagée au bénéfice de ces secteurs n’épuisait pas les raisons de l’inquiétude suscitée par ce texte, qui comportait également des limites aux financements croisés. C’est pourquoi le législateur avait, dans le cadre de la loi MAPTAM, réintroduit la clause de compétence générale des régions et des départements, assortie de dispositifs nouveaux de coordination des différentes politiques mises en œuvre dans les territoires, au travers des instances de dialogue entre les collectivités et l’État que sont les conférences territoriales de l’action publique (CTAP).

Dès l’adoption de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition de compétences entre les communes, les départements, les régions et l’État, la décentralisation culturelle avait moins répondu à une logique de spécialisation des compétences que d’exercice conjoint d’une compétence générale par chacun des niveaux de collectivités publiques. Depuis lors, les compétences culturelles ont toujours été partagées entre les collectivités : si certains domaines relèvent de manière privilégiée d’un niveau de collectivité – ainsi en est-il notamment de la compétence des départements en matière d’archives – aucune collectivité publique n’exerce le monopole d’une des compétences culturelles transférées. Chaque niveau de collectivités territoriales est compétent pour intervenir dans l’ensemble des champs de la politique culturelle, l’État demeurant le garant de la cohérence de cette politique au plan national, par l’édiction de règles et l’exercice du contrôle scientifique (2).

De manière analogue, dans le domaine sportif, l’article L. 100-2 du code du sport, issu de la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 relative à l’organisation et à la promotion des activités physiques et sportives, consacre l’existence d’une compétence partagée : son premier alinéa dispose que « l’État, les collectivités territoriales et leurs groupements, les associations, les fédérations sportives, les entreprises et leurs institutions sociales contribuent à la promotion et au développement des activités physiques et sportives », tandis que le second alinéa précise que « l’État et les associations et fédérations sportives assurent le développement du sport de haut niveau, avec le concours des collectivités territoriales, de leurs groupements et des entreprises intéressées ». Depuis lors, les lois de décentralisation n’ont jamais fait du sport une compétence d’attribution de tel ou tel niveau de collectivité. Les régions, les départements et les communes, mais également les structures intercommunales, lorsque les compétences en la matière leur ont été transférées, sont progressivement intervenus dans le champ des activités physiques et sportives, qu’il s’agisse de la construction, de l’entretien ou de la mise à disposition d’équipements sportifs, ou de l’octroi de subventions aux associations et sociétés sportives.

b. Des concours financiers très importants

L’existence de la clause de compétence générale, ou le maintien de compétences partagées dérogatoires lorsque cette clause a été supprimée, sont à l’origine du développement de politiques locales ambitieuses et d’un véritable foisonnement dans les domaines culturel et sportif, marqués par l’importance des concours financiers apportés par les collectivités territoriales dans ces deux domaines.

Dans le domaine sportif

À l’heure actuelle, les collectivités territoriales sont devenues les premiers financeurs publics du sport en France et parmi elles, les communes davantage que les autres niveaux de collectivités, comme l’illustre le tableau suivant :

RÉPARTITION DES DÉPENSES SPORTIVES PAR TYPE DE FINANCEURS

(en milliards d’euros)

 

2006

2007

2008

2009

2010

2011

Ménages

15,8

16,4

16,7

16,5

17,1

17,6

Collectivités territoriales

9,6

10,2

10,6

10,8

10,6

11,6

dont communes

8,4

9

9,3

9,4

9,3

10,2

dont départements

0,8

0,8

0,8

0,8

0,8

0,7

dont régions

0,4

0,5

0,5

0,6

0,6

0,7

État

4,1

4,2

4,3

4,3

4,4

4,6

Entreprises

3,2

3,2

3,3

3,3

3,3

3,3

Total

32,7

34

34,9

34,9

35,4

37,1

Sources : les « chiffres clés du sport », février 2013 et juin 2014.

Dès 2009, la Cour des comptes avait souligné, dans un rapport public thématique intitulé Les collectivités territoriales et les clubs sportifs professionnels, que « les collectivités territoriales, au premier rang desquelles se trouvent les communes, assurent la plus grande partie des efforts financiers publics pour l’organisation de la pratique du sport » (3).

Dans le domaine culturel

De la même manière, les collectivités territoriales sont particulièrement impliquées dans le financement des politiques culturelles, comme en atteste une récente étude réalisée en mars 2014 par le département des études, de la prospective et des statistiques (DEPS) du ministère de la culture et de la communication, en association avec le Forum pour la gestion des villes et des collectivités territoriales, sur les dépenses culturelles des collectivités territoriales en 2010 (4).

Cette étude, fruit d’une enquête statistique nationale, a conclu que les dépenses culturelles de ces collectivités – hors communes de moins de 10 000 habitants – se sont élevées à 7,6 milliards d’euros en 2010, contre 7 milliards en 2006. Elle a mis en avant l’importance croissante des intercommunalités en matière culturelle, essentiellement les communautés d’agglomération et les communautés de communes. Elle a aussi relevé une relative stabilité dans la répartition des financements de la culture par les différents niveaux de collectivités, les communes comprises dans l’étude consacrant en moyenne 8,2 % de leur budget pour la culture, les départements 2,1 % et les régions 2,7 %.

Le tableau ci-après retrace l’évolution des dépenses culturelles des collectivités territoriales et de leurs groupements entre 2006 et 2010 :

ÉVOLUTION DES DÉPENSES CULTURELLES DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES
ET DE LEURS GROUPEMENTS

(en milliards d’euros)

 

2006

2010

Régions

0,5

0,7

Départements

1,3

1,4

Établissements publics de coopération intercommunale

0,8

1

Communes de plus de 10 000 habitants

4,4

4,5

Total

7

7,6

Source : étude d’impact annexée au projet de loi, page 105.

Cette même étude a analysé de manière précise les subventions croisées reçues par les différents niveaux de collectivités territoriales. Elle a relevé que, si le montant des subventions reçues par les collectivités en provenance des autres collectivités avait peu augmenté entre 2006 et 2010, passant de 231 à 240 millions d’euros, la répartition des flux s’était quelque peu modifiée :

– le bloc communal contribue davantage, puisqu’il verse, en 2010, 15 % du montant total des subventions, contre seulement 4 % en 2006 ;

– cette augmentation s’est avant tout orientée vers les villes elles-mêmes, même si les subventions aux régions progressent également, cette évolution traduisant le développement de l’intercommunalité culturelle mais aussi une compensation de l’engagement moindre des départements ;

– le montant des subventions versées par les régions aux autres collectivités demeure quant à lui stable pour s’établir à 109 millions d’euros. Cette stabilité cache une évolution dans la répartition de ces subventions selon les destinataires, au bénéfice des départements et des groupements de communes et au détriment des communes.

c. Des inquiétudes exprimées sur un possible désengagement de l’État au profit des collectivités territoriales qu’il convient de lever au plus vite

Le projet de loi, dans la droite ligne des textes précédemment évoqués, conforte la logique d’exercice conjoint d’une compétence partagée des différents échelons locaux dans les domaines de la culture et du sport. Ce maintien de l’état actuel du droit a été unanimement salué par les personnes consultées par le rapporteur pour avis, qui ont cependant, pour nombre d’entre elles, exprimé leur inquiétude, dans le contexte budgétaire que connaît notre pays, qu’il ne puisse servir de « prétexte » à l’État pour se désengager du financement des actions culturelles et sportives sur les territoires.

C’est d’ailleurs cette même crainte qui a animé les sénateurs qui ont adopté l’article 28 A tendant à réaffirmer un « exercice conjoint » de la compétence culturelle par l’État et les différents échelons de collectivités territoriales.

Le rapporteur pour avis estime indispensable de réaffirmer avec force la mission déterminante que l’État doit assumer en matière de politiques culturelles : il est le garant de l’équité pour tous les citoyens dans l’accès à la culture, de la cohérence des politiques menées sur l’ensemble du territoire national et du bon maillage des territoires permettant d’éviter que des zones entières ne soient délaissées. Il revient aux DRAC d’assumer cette mission en régions.

Les engagements très forts qui ont récemment été pris par le Gouvernement devraient être de nature à rassurer les inquiétudes qui se sont légitimement exprimées : outre la sanctuarisation des crédits de la culture sur trois ans décidée dès la fin de l’année dernière, le dégel immédiat des crédits des programmes « création » et « transmission des savoirs » de la mission « culture » a été annoncé le 7 janvier 2015, ainsi que l’augmentation des crédits de ces programmes dans le cadre du prochain projet de loi de finances.

2. L’instauration de procédures centralisées d’instruction et d’octroi des aides et subventions

Parallèlement au maintien de compétences partagées, le projet de loi encourage une simplification de l’organisation des cofinancements au plan local, en instaurant des procédures – facultatives – de centralisation du traitement des demandes de financement. Il est attendu de ces procédures à la fois une rationalisation de l’action publique, évitant les doublons dans le traitement administratif des demandes par les différents échelons locaux, et une simplification des démarches pour les porteurs de projet, qui ne seront plus confrontés aux difficultés liées à l’existence d’une multiplicité d’acteurs à solliciter et à la constitution d’autant de dossiers appuyant leur demande. Une telle mesure pourrait aussi être de nature à infléchir une tendance, parfois dénoncée sur le terrain, conduisant certains décideurs locaux, qui contribuent chacun de manière limitée sur chaque projet, à ne pas exercer un contrôle aussi strict que nécessaire sur la réalisation des projets financés ; en ce sens, une responsabilisation accrue des décideurs locaux peut être attendue de ce dispositif.

L’article 29 du projet de loi traduit cet objectif par l’instauration de procédures de délégations par les collectivités territoriales ou l’État de l’instruction des dossiers et de l’octroi des aides à une collectivité délégataire – État ou autre niveau de collectivité territoriale – qui aura une vision globale de la demande. Dans tous les cas, la délégation, facultative, sera formalisée par convention.

3. Les apports du Sénat en matière de coordination des politiques conjointes : le renforcement des conférences territoriales d’action publique (CTAP)

Maintenir l’exercice partagé des compétences ne saurait être suffisant ; il faut aussi définir les outils d’une bonne articulation des politiques sur les territoires, afin d’éviter que des pans entiers de la création culturelle ou de la pratique sportive ne disparaissent de certains territoires.

Tel est l’intérêt de deux apports du Sénat, qui, notamment à l’initiative de Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteure pour avis au nom de la commission de la Culture, de l’éducation et de la communication, ont renforcé les missions dévolues aux conférences territoriales d’action publique (CTAP) dans le cadre des compétences partagées :

– le premier porte création de CTAP dédiées respectivement à la culture, au sport et au tourisme, afin que ces questions fassent obligatoirement l’objet de débats et de réflexions entre les différents niveaux de collectivités territoriales et de leurs groupements ;

– le second complète les missions de la CTAP en précisant que la conférence « veille à la continuité des politiques publiques en matière de culture, de sport et de tourisme et à leur mise en œuvre équilibrée dans l’ensemble des territoires ». 

La conférence territoriale de l’action publique

La conférence territoriale de l’action publique (CTAP) est l’instance de coordination au plan régional de l’action des collectivités territoriales et de l’État, créée, à compter de 2015, par la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles (MAPTAM).

Régie par l’article L. 1111-9-1 du code général des collectivités territoriales, la CTAP est chargée de « favoriser un exercice concerté des compétences des collectivités territoriales, de leurs groupements et de leurs établissements publics ». Elle peut débattre et rendre des avis sur tous les sujets relatifs à l’exercice de compétences et à la conduite de politiques publiques nécessitant une coordination ou une délégation de compétences entre les collectivités territoriales et leurs groupements.

Présidée par le président du conseil régional, la CTAP réunit également les présidents des conseils généraux, les présidents des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) de plus de 30 000 habitants, un représentant élu des EPCI à fiscalité propre de moins de 30 000 habitants par département, un représentant élu des communes de plus de 30 000 habitants de chaque département, un représentant élu des communes comprenant entre 3 500 et 30 000 habitants de chaque département, un représentant élu des communes de moins de 3 500 habitants de chaque département, ainsi, le cas échéant, que d’un représentant des collectivités territoriales et groupements de collectivités des territoires de montagne.

Le préfet de région participe aux réunions de la CTAP lorsque l’avis de l’État est requis sur une demande d’une collectivité territoriale ou d’un EPCI à fiscalité propre tendant à obtenir la délégation de l’exercice d’une compétence de l’État, dans le cadre de la procédure fixée à l’article L. 1111-8-1 du code général des collectivités territoriales. Il participe aux autres séances à sa demande.

La CTAP organise librement ses travaux, au travers de commissions thématiques. C’est son président qui fixe l’ordre du jour de ses réunions, chaque membre pouvant néanmoins proposer l’inscription à l’ordre du jour de questions complémentaires relevant des compétences exercées par la personne publique ou la catégorie de personnes publiques qu’il représente. La CTAP peut associer à ses travaux tout élu ou organisme non représenté. Elle peut solliciter l’avis de toute personne ou de tout organisme.

La CTAP peut élaborer une convention territoriale d’exercice concerté fixant les objectifs de rationalisation et les modalités de l’action commune pour chacune des compétences qui la concernent.

B. LES NOUVELLES COMPÉTENCES DES RÉGIONS EN MATIÈRE DE SPORT DE HAUT NIVEAU ET DE FORMATION AUX MÉTIERS DU SPORT ET DE L’ANIMATION

Le Sénat a introduit, à l’initiative du Gouvernement, deux articles relatifs aux centres de ressources, d’expertise et de performance sportive (CREPS) et aux structures, en Basse-Normandie, en Bretagne et en Corse, qui leur ont succédé après leur fermeture en 2009 et 2010 (articles 12 ter et 12 quater).

1. La régionalisation des centres de ressources, d’expertise et de performance sportive (CREPS)

Les centres de ressources, d’expertise et de performance sportive (CREPS), établissements publics de formation, assurent aujourd’hui deux missions essentielles : la formation et la préparation des sportifs de haut niveau, dans le cadre du double projet, sportif et professionnel ; la formation professionnelle, initiale et continue, dans les domaines des activités physiques et sportives et de l’animation.

Cette deuxième mission tend d’ores et déjà à faire des dix-sept CREPS qui existent aujourd’hui les interlocuteurs naturels des régions. Mais, pour mieux ancrer l’action des CREPS dans le territoire, la décentralisation d’une partie de leurs compétences est aujourd’hui nécessaire. Aussi l’article 12 ter prévoit-il de transférer aux régions le patrimoine immobilier des CREPS et les personnels exerçant les missions d’accueil, de restauration et d’hébergement, qui relèveront désormais de l’échelon régional.

Les CREPS ont aussi vocation, sous l’impulsion des régions, à mettre en œuvre certaines compétences – l’accompagnement des sportifs de niveau régional vers le haut niveau, la promotion du sport pour tous et du « sport-santé », la mise en place d’activités en faveur de la jeunesse et de l’éducation populaire, le développement d’une offre de formation spécifique, adaptée aux besoins de la région – qui en feront de véritables outils de la politique régionale, dans le domaine du sport et de la jeunesse, mais aussi de la santé et de l’emploi.

L’article 12 ter tire les conséquences de cette décentralisation partielle en modifiant la gouvernance de ces structures. Notamment, le président du conseil régional désignera le président du conseil d’administration du CREPS et donnera son avis préalablement à la nomination de son directeur. Par ailleurs, les collectivités territoriales, notamment la région, verront leur poids considérablement renforcé au sein du conseil d’administration. Ainsi, les régions seront à même de se saisir de ces structures très souples pour les adapter aux besoins locaux.

Pour autant, cette décentralisation n’est nullement synonyme d’un désengagement de l’État. En effet, les CREPS continueront d’exercer, au nom de l’État, leurs compétences en matière de sport de haut niveau, de formation professionnelle, d’expertise et de recherche. Ils se verront ainsi assigner des objectifs particuliers par leur tutelle étatique, qui assureront la cohérence de la politique de l’État dans ces domaines.

2. Une première réponse à l’inégalité territoriale dans le domaine du sport de haut niveau et de la formation professionnelle aux métiers du sport et de l’animation

L’article 12 quater, quant à lui, permettra aux régions qui ont participé aux différents projets de reprise des CREPS fermés dans le cadre de la révision générale des politiques publiques de s’y investir plus avant. En cédant aux régions de Bretagne et de Basse-Normandie, ainsi qu’à la collectivité territoriale de Corse, le patrimoine immobilier des anciens CREPS d’Houlgate, de Dinard et d’Ajaccio, le projet de loi répond à une demande pressante de ces structures.

En effet, celles-ci fonctionnent aujourd’hui dans un cadre juridique peu satisfaisant, qui limite fortement l’investissement des collectivités et soulève des problèmes de responsabilité vis-à-vis des personnes accueillies, notamment mineures. En faisant l’acquisition, à titre gratuit, de ce patrimoine immobilier, les régions, déjà largement investies dans ces projets, pourront consentir des investissements de nature à développer l’activité de ces structures dédiées au sport, à la jeunesse et à l’éducation populaire.

L’article 12 quater constitue également une première réponse à l’inégalité territoriale de l’engagement de l’État dans le domaine du sport de haut niveau et de la formation professionnelle dans le domaine du sport, de la jeunesse et de l’éducation populaire. En effet, toutes les régions ne disposent pas d’un CREPS, un certain nombre d’entre eux ayant fermé au cours de la dernière décennie. Ainsi, la façade maritime nord-ouest de la France en est totalement dépourvue (cf. carte ci-après). À l’inverse, certaines régions, à la faveur de la récente réforme, bénéficient de plusieurs CREPS : c’est notamment le cas de la région Champagne-Ardenne-Lorraine-Alsace, qui regroupe les CREPS de Reims, Nancy et Strasbourg.

RÉPARTITION DES CREPS SUR LE TERRITOIRE

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Source : ministère de la ville, de la jeunesse et des sports.

Par ailleurs, alors que, dans certaines régions, les structures intervenant dans ce domaine ont parfois bénéficié d’un soutien de l’État – sous la forme d’une mise à disposition de personnel –, ce n’est nullement le cas sur l’ensemble du territoire. Même si le rapporteur considère que le soutien de l’État aux structures effectuant des missions de service public relevant a priori de l’État, notamment dans le domaine du sport de haut niveau, doit être renforcé dans certaines régions, la mesure envisagée par l’article 12 quater permettra d’ores et déjà à ces organismes d’exercer leurs missions dans des conditions plus favorables.

Enfin, l’article 12 ter, qui prévoit que chaque région métropolitaine a vocation à accueillir un CREPS sur son territoire, ouvre aussi la voie à la future réimplantation de CREPS dans les régions qui en sont aujourd’hui dépourvues.

EXAMEN EN COMMISSION

I. DISCUSSION GÉNÉRALE

La commission des Affaires culturelles et de l’éducation examine pour avis, sur le rapport de M. Stéphane Travert, les articles 8, 12, 12 bis A, 12 bis B, 12 ter, 12 quater, 28 A, 28, 28 bis et 29 du projet de loi, adopté par le Sénat, portant nouvelle organisation territoriale de la République (n° 2529), lors de sa séance du mardi 3 février 2015.

M. le président Patrick Bloche. Le calendrier d’examen du projet de loi dit « NOTRe » est très serré : adopté le 27 janvier en première lecture par le Sénat, il est inscrit à l’ordre du jour de la séance publique de notre assemblée dès la semaine du 16 février. La commission des Lois, saisie au fond, procède à l’audition de la ministre et à la discussion générale du projet de loi cet après-midi même et commencera ce soir l’examen des articles, ce qui lui permettra d’examiner les amendements éventuellement adoptés par les commissions qui se sont saisies pour avis.

Malgré ces délais particulièrement contraints, notre commission a souhaité examiner pour avis les dispositions du texte relevant de sa compétence, comme elle l’avait fait pour la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, dite « loi MAPTAM », pour laquelle notre rapporteur pour avis était déjà notre collègue Stéphane Travert.

Les articles retenus pour notre saisine concernent tout à la fois l’éducation, la culture et le sport, les dispositions adoptées par le Sénat étant assez différentes de celles figurant dans le projet de loi initial.

M. Patrick Hetzel. La conférence des présidents, réunie ce matin, a décidé de prolonger l’examen du projet de loi pour la croissance et l’activité sur une troisième semaine, ce qui devrait reporter d’une semaine l’examen du projet de loi « NOTRe » en séance publique. Dans ces conditions, ne serait-il pas possible de décaler d’une semaine le délai de dépôt des amendements s’y rapportant ? Ce serait d’autant plus judicieux que nous n’avons pu prendre connaissance du rapport pour avis de notre collègue Stéphane Travert qu’hier soir, malgré la diligence des administrateurs de la commission.

Pourriez-vous, monsieur le président, vous faire le relais de ces préoccupations auprès de vos homologues des autres commissions saisies pour avis, qui rencontrent sans doute les mêmes problèmes ?

M. le président Patrick Bloche. Les modifications apportées par la conférence des présidents de ce matin n’affectent pas l’examen en séance publique du projet de loi « NOTRe », qui reste inscrit aux dates initialement prévues ; les délais ne peuvent donc être modifiés. Il nous faut étudier les amendements avant vingt et une heures trente aujourd’hui pour permettre à notre rapporteur pour avis de les présenter devant la commission des Lois, saisie au fond.

M. Stéphane Travert, rapporteur pour avis. Le projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, dit « NOTRe », constitue, après l’adoption de la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, dite MAPTAM, et de la loi du 16 janvier 2015 relative à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral, le troisième volet de la réforme des territoires souhaitée par le Président de la République.

Le projet de loi, déposé le 18 juin 2014 au Sénat, qui l’a adopté le 27 janvier dernier, doit être examiné par notre commission dans des délais extrêmement courts, du fait de son inscription à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale dès la semaine du 16 février prochain. La réunion de la commission des Lois, saisie au fond, est d’ailleurs déjà en cours. J’ai néanmoins pu mener dans ce temps très court quelques auditions et recevoir des contributions écrites qui m’ont permis de bénéficier de l’éclairage tant d’associations d’élus que de praticiens de terrain.

S’agissant des compétences éducatives, deux grandes propositions ont structuré le débat : le transfert de la gestion matérielle des collèges des départements aux régions et les transports scolaires. Il me semble cependant important de préciser ici, au préalable, que les propositions du projet de loi initial étaient fortement liées aux perspectives qui présidaient alors aux réflexions. Dans un contexte d’extinction progressive des départements, transférer toutes les compétences éducatives à la région avait la force de l’évidence. Mais dès lors qu’est acté le maintien des départements, ancrés dans leur vocation de solidarité et de proximité, le débat change de nature.

L’importance de l’association des collectivités à l’éducation, dont elles assument près du quart de la dépense intérieure, m’a conduit à soumettre les dispositions du projet de loi à trois grandes questions.

La première, essentielle, est celle de la cohérence avec les ambitions que nous avons fixées à l’Éducation nationale. Les transferts proposés servent-ils efficacement les objectifs fondamentaux que nous poursuivons pour réussir la refondation de l’école ? Comme beaucoup d’autres, j’ai pu constater que le transfert des collèges aux régions proposé par l’article 12, supprimé par le Sénat, et la reformation d’un « bloc » du secondaire allait directement à l’encontre de l’un des axes majeurs de la loi de refondation. D’une part, pour parvenir à doter tous les élèves d’un solide socle commun de connaissances, de compétences et de culture, nous nous sommes entendus sur la nécessité de rapprocher le collège de l’école primaire, notamment en instituant un nouveau cycle à cheval sur le CM2 et la sixième. D’autre part, face à la dangereuse inflation de l’échec dans les premiers cycles universitaires et aux sévères difficultés d’orientation rencontrées par trop de nos jeunes concitoyens, s’est affirmée la volonté d’étoffer les liens entre les lycées et l’enseignement supérieur, avec une continuité entre bac moins trois et bac plus trois, sur laquelle travaille d’ailleurs une mission d’information créée par notre commission.

Le rapprochement des collèges et des lycées interviendrait à contre-courant de cette volonté de décloisonnement. Il est vrai que les missions des collectivités prévues dans la loi se limitent aux investissements et au fonctionnement des établissements. Mais nous savons tous combien les départements et les régions ont su déployer des activités et promouvoir des initiatives bien au-delà de cette frontière – je pense à l’équipement numérique, au soutien scolaire, aux bourses. Dans les faits, les collectivités limitent leurs interventions au type d’établissement dont elles assument la charge. C’est pourquoi il m’est apparu beaucoup plus cohérent de laisser les collèges aux départements, collectivités de proximité et de solidarité, tout en encourageant les régions à réussir leur nouvelle mission de service public de l’orientation en se concentrant sur les lycées et l’enseignement supérieur.

Le deuxième grand principe qui a inspiré mes réflexions, c’est la cohérence des missions confiées à chaque collectivité. La gestion des collèges, je l’ai dit, me semble plus aisément s’inscrire, au regard tant des douleurs sociales qui peuvent parfois s’y exprimer que des défis qu’ils recèlent en termes d’accompagnement personnalisé et de coordination avec l’école, dans la vocation de proximité et de solidarité des départements. À l’inverse, transférer les près de 40 000 agents territoriaux d’entretien de ces établissements à la région – ce qui en augmenterait les effectifs de 50 % –, risquerait de les priver définitivement de l’atout qu’est leur caractère d’administration de mission et non de gestion. Ce qu’il faut, c’est leur donner tous les moyens d’être les stratèges du développement, de l’innovation et de l’emploi dont nous avons tant besoin.

Ce souci de cohérence entre les vocations des collectivités et les missions proposées m’a conduit, à l’inverse, à revenir sur la suppression par le Sénat du transfert de la compétence en matière de transport scolaire inscrit à l’article 8. Il me semble, en effet, que cette proposition rentre parfaitement dans la vocation de coordination et de planification que l’on souhaite donner aux régions. Il ne faut pas se méprendre sur ce sujet : il n’est pas question d’imposer brutalement aux régions la gestion quotidienne du complexe maillage des réseaux de ramassage scolaire. Le texte proposé par le Gouvernement, que je vous suggère de rétablir, préserve la faculté de déléguer tout ou partie de cette compétence à des organisateurs secondaires parmi lesquels figurent, bien sûr, les départements. L’idée est, en sens opposé, d’apporter cohérence, clarté et harmonisation dans des services publics de transports scolaires qui aujourd’hui diffèrent beaucoup selon les territoires. Les économies d’échelle seront réelles, tout comme d’ailleurs les possibilités de solidarité, car il faut rappeler qu’aujourd’hui les départements qui dépensent le plus en matière de transport scolaire, en raison de la dispersion de l’habitat, sont les départements ruraux, qui ne sont pas les plus riches.

Ici intervient mon troisième critère d’appréciation : le nouvel équilibre des compétences qui est proposé sert-il aussi la nécessité de rationaliser les dépenses ? Pour les collèges, je pense que le transfert aux régions n’était probablement guère économe, ne serait-ce qu’en raison des différences de traitement que réservent régions et départements à leur personnel dans les établissements scolaires. Cela ne doit pas pour autant nous empêcher d’avancer, car il existe de vraies possibilités de mutualisation entre des collectivités dont le métier ne diffère pas selon qu’elles l’exercent dans les collèges ou les lycées. C’est pourquoi je vous proposerai une solution alternative, confiant à la région, désignée chef de file, la responsabilité de préparer des actions communes de mutualisation en rédigeant un projet de convention territoriale d’exercice concerté pour les compétences éducatives, soumis ensuite à la conférence territoriale de l’action publique (CTAP) et, bien sûr, à la ratification des conseils généraux.

S’agissant, ensuite, des compétences en matière de culture et de sport, le projet de loi prévoit le maintien de ces deux domaines dans le champ des compétences partagées entre les niveaux de collectivités territoriales, par dérogation à la suppression de la clause de compétence générale des régions et des départements à laquelle procèdent respectivement les articles 1er et 24 du projet de loi. Cette suppression, qui s’inscrit dans un souci de rationalisation de l’action des collectivités territoriales, ne se justifie pas dans tous les domaines, notamment ceux marqués par la transversalité comme la culture et le sport. Ces deux champs de compétences ont d’ailleurs toujours été, depuis l’adoption de la loi du 7 janvier 1983, partagés par les différents niveaux de collectivités territoriales. La loi du 16 décembre 2010, qui avait supprimé la clause de compétence générale des régions et des départements, avait déjà maintenu les compétences relatives à la culture et au sport dans le champ des compétences partagées n’étant pas susceptibles d’être confiées de manière exclusive à un seul niveau de collectivité territoriale.

En matière de politique culturelle, c’est la libre intervention qui a permis aux différents échelons de contribuer à la construction d’un modèle culturel français singulier, garant de la liberté de création, de diffusion des œuvres et de la continuité des projets. Fondés sur le seul volontariat des élus locaux, les financements conjoints ont ainsi été à l’origine d’un maillage dense en équipements culturels, d’une diversité de l’offre et de l’existence d’un secteur artistique structuré sur tout notre territoire. De plus, la construction de grands équipements, qu’ils soient culturels ou sportifs, met nécessairement en jeu des cofinancements par les différents niveaux de collectivités, ce qui permet une levée de fonds bien plus importante mais aussi une répartition des risques financiers et, au-delà, un partage d’expériences et une vision d’ensemble à l’échelle d’un territoire plus vaste.

L’article 28 du projet de loi conforte la logique d’exercice conjoint d’une compétence partagée des différents échelons locaux dans les domaines de la culture et du sport. Ce maintien de l’état actuel du droit a été unanimement salué par les personnes que nous avons consultées, même si nombre d’entre elles ont par ailleurs exprimé leur inquiétude que l’État puisse prendre prétexte du contexte budgétaire que connaît notre pays pour se désengager du financement des actions culturelles et sportives sur les territoires. Il faut ici réaffirmer avec force la mission déterminante que l’État doit assumer en matière de politiques culturelles : il est le garant de l’équité dans l’accès à la culture de tous les citoyens, de la cohérence des politiques menées sur l’ensemble du territoire national et du bon maillage des territoires, nécessaire pour éviter que des zones entières ne soient délaissées. Il revient aux directions régionales des affaires culturelles (DRAC) d’assumer cette mission en région.

Je reçois comme un signal fort les récents engagements pris par le Gouvernement en la matière : outre la sanctuarisation des crédits de la culture sur trois ans décidée dès la fin de l’année dernière, le dégel immédiat des crédits des programmes « Création » et « Transmission des savoirs » de la mission « Culture » a été annoncé le 7 janvier 2015, ainsi que leur augmentation dans le cadre du prochain projet de loi de finances.

Parallèlement au maintien de compétences partagées, le projet de loi encourage une simplification de l’organisation des cofinancements au plan local, en instaurant des procédures de centralisation du traitement des demandes de financement à l’article 29. Il est attendu de ces procédures à la fois une rationalisation de l’action publique, destinée à éviter les doublons dans le traitement administratif des demandes par les différents échelons locaux, et une simplification des démarches pour l’ensemble des porteurs de projets. La traduction juridique de ce qui est improprement qualifié de « guichets uniques » est l’instauration de procédures facultatives de délégations, par les collectivités territoriales ou l’État, de l’instruction des dossiers et de l’octroi des aides à une collectivité délégataire – l’État ou un autre niveau de collectivité territoriale – qui aura une vision globale du dossier. Dans tous les cas, la délégation sera formalisée par une convention. Cette procédure permettra aussi de réduire les frais administratifs des acteurs culturels et contribuera à restaurer la marge artistique qui a beaucoup trop diminué ces dernières années.

Le Sénat a, par ailleurs, enrichi cette partie du texte de deux articles additionnels. L’article 28 A vise à garantir les « droits culturels » des citoyens par l’exercice conjoint de la compétence en matière de culture par l’État et les collectivités territoriales – je vous présenterai d’ailleurs un amendement proposant une réécriture de l’article. L’article 28 bis conforte les compétences des conférences territoriales de l’action publique dans les domaines de compétences partagées. Je me réjouis que les sénateurs, un temps moins favorables aux CTAP – je n’ai pas oublié les débats de la loi MAPTAM – soient aujourd’hui à ce point convaincus de la nécessité de renforcer leurs missions qu’ils créent des CTAP dédiées à la culture et au sport et qu’ils prévoient des postes de membres de droit pour tous les sénateurs du département !

Maintenir l’exercice partagé des compétences ne suffit pas, il faut aussi définir les outils d’une bonne articulation territoriale des politiques afin d’éviter que des pans entiers de la création culturelle ou de la pratique sportive ne disparaissent de certains territoires. Je souscris donc largement aux apports du Sénat s’agissant des CTAP, même si je vous proposerai de revenir sur le statut de membres de droit que se sont octroyé les sénateurs.

Enfin, le projet de loi transmis par le Sénat comprend deux dispositions particulièrement utiles relatives aux centres de ressources, d’expertise et de performance sportive (CREPS), qui préparent les sportifs de haut niveau et mettent en œuvre des formations professionnelles dans les domaines des activités physiques et sportives et de l’animation.

À l’initiative du Gouvernement, les compétences qui revenaient exclusivement à l’État seront désormais partagées avec les régions, qui pourront faire des CREPS de véritables outils au service de la politique sportive locale ainsi que des politiques régionales en faveur de la jeunesse, de l’éducation populaire, voire de l’emploi. Les régions seront beaucoup plus impliquées dans la gouvernance des CREPS et pourront adapter leurs actions aux besoins constatés au niveau local. C’est là l’objet de l’article 12 ter.

Celui de l’article 12 quater est de résoudre les problèmes liés aux CREPS d’Houlgate, de Dinard et d’Ajaccio, repris, après leur fermeture, par des structures associatives ou groupements d’intérêt public. Or ces locaux étaient seulement mis à disposition par l’État, et les régions concernées ne peuvent pas y réaliser les investissements nécessaires. C’est pourquoi l’article 12 quater prévoit la cession, à titre gratuit, de ce patrimoine immobilier aux régions.

Le projet de loi « NOTRe » vient souligner qu’en matière de culture et de sport, tous les niveaux de collectivités ont un rôle essentiel à jouer. L’ensemble des élus territoriaux ont entre leurs mains l’avenir du développement culturel de notre pays et doivent poursuivre la décentralisation culturelle dans le dialogue avec les services déconcentrés de l’État. Rappelons que la culture est portée à plus de 70 % par les collectivités locales et qu’aujourd’hui, certaines d’entre elles se détournent du financement des projets culturels en faisant de la culture une variable d’ajustement. L’État et les collectivités sont, sur ce point, liés par une histoire partagée. Portons avec fierté cette volonté de démocratie culturelle garante d’un accès égal à la culture sur tous les territoires pour tous et toutes, singulièrement pour les jeunes.

Pour toutes ces raisons, mes chers collègues, je vous propose de donner un avis favorable, sous réserve de l’adoption de quelques amendements, aux articles dont la commission s’est saisie.

M. le président Patrick Bloche. Je vous remercie pour votre esprit de synthèse et votre clarté, monsieur le rapporteur.

Mme Sophie Dessus. Je vous félicite, monsieur le rapporteur, pour le brio de votre rapport et la vitesse à laquelle vous l’avez rédigé.

L’enseignement, la culture, le sport sont les pivots de la République, les ferments de la démocratie, les garants de l’égalité entre citoyens, en ce début d’année encore plus que jamais. Renforcer le rôle de l’école, du collège, du lycée et rendre la culture accessible partout et à tous en s’appuyant sur le texte de la loi « NOTRe » est une belle occasion qui ne doit pas être manquée.

Il faut nous assurer à la fois que les nouvelles grandes régions ont les moyens d’exercer les compétences bien définies qui leur échoient, tout particulièrement dans le domaine économique et la formation, et que les départements, maintenus en milieu rural – car on ne sait pas faire sans cette institution de proximité et de solidarité –, jouent pleinement leur rôle dans les domaines qui leur seront impartis, à commencer par la gestion des collèges, qu’ils doivent continuer à assumer, ce qui n’interdit pas une mutualisation dans le cadre des cités scolaires. Soulignons que cette mutualisation est déjà mise en pratique dans certains territoires s’agissant des commandes publiques, pour le fuel par exemple, ou à travers la plateforme Agrilocal qui privilégie les circuits courts.

Par ailleurs, nous devons exercer une vigilance particulière à l’égard d’une proposition de suppression de la sectorisation, car celle-ci est garante de la mixité sociale et de l’égalité des chances. Il appartient à l’État de s’en préoccuper, et pas aux régions.

Se pose ensuite la question des transports scolaires : cette compétence doit-elle être transférée aux régions ou rester aux mains des départements ? La logique pousse à ce qu’elle revienne aux régions, mais il nous faudra alors prêter attention à ce que les appels d’offres comportent au moins une clause permettant aux petites entreprises locales de postuler et d’emporter des marchés de transport, ce à quoi veillent particulièrement les départements aujourd’hui. Il conviendra, par ailleurs, de préciser dans le texte comment gérer le transport des enfants handicapés, puisque le handicap est une compétence dévolue aux départements. Pour ne pas bloquer le système, des délégations départementales devront être organisées dans le domaine du transport, tâche complexe mais indispensable.

En ce qui concerne la culture et le sport, proposer une compétence partagée est la sagesse même. Mettre en place des guichets uniques permettra de rationaliser les interventions et de simplifier la vie des artistes, des compagnies, des associations ou des collectivités qui disposeront de davantage de temps pour se consacrer à leurs activités. Il s’agira de généraliser une pratique qui existe déjà dans mon département – et la Corrèze ne me semble pas être une exception.

Un problème de terminologie semble se poser avec l’expression de « guichets uniques », qui gêne certains par sa connotation sociale. Or on retrouve depuis longtemps ce terme dans des problématiques de développement économique. Alors que le Président de la République a confié à M. Thierry Mandon le chantier de la simplification, il nous revient de veiller à ce qu’elle soit aussi à l’œuvre dans les mots. Ne cédons pas à la tentation de devenir les Précieuses ridicules de notre époque, parfois trop « techno ». Ne craignons pas le bon sens et employons des mots simples. Faisons confiance à Boileau : « ce que l’on conçoit bien s’énonce clairement ».

Quant aux conseils d’architecture, d’urbanisme et de l’environnement (CAUE), ils me semblent être les grands absents de ce texte. On peut, bien sûr, imaginer qu’ils feront l’objet d’une attention plus particulière dans la future loi relative au patrimoine et à la création, cependant celle-ci ne pourra déterminer s’ils doivent rester ou non départementaux, et donc continuer d’être financés en grande partie par la cotisation sur la valeur ajoutée, dépendre d’un chef de file régional ou relever des régions, compte tenu des nouvelles compétences en matière de schéma régional d’aménagement et de développement durable du territoire, de formation, de documents d’urbanisme et d’efficacité énergétique des bâtiments. J’ai déposé des amendements à ce sujet, qui ont été déclarés irrecevables au titre de l’article 40, alors même que les dispositions qu’ils prévoyaient n’impliquaient pas de coût supplémentaire. En tout état de cause, il faudra que le Gouvernement soit saisi de la question en séance pour arrêter une position dans ce texte.

M. le président Patrick Bloche. Comme je le fais désormais systématiquement afin d’éviter toute contestation, j’ai demandé au président de la commission des Finances de préciser par écrit quels amendements étaient jugés irrecevables. Dans un courrier daté d’aujourd’hui, il m’indique qu’il s’agit des amendements, nos AC 2, AC 13, AC 14 et AC 15.

M. Frédéric Reiss. À mon tour, je voudrais souligner les conditions déplorables dans lesquelles nous examinons ce texte, pourtant très attendu. De surcroît, même avec la procédure accélérée, certains candidats aux élections départementales des 22 et 29 mars prochains devront faire campagne sur des thèmes dont ils ignorent tout et sur des compétences qui restent à définir. La grande question est de savoir qui va faire quoi dans le cadre du nouveau découpage territorial. Nous le répétons, nous avons vraiment le sentiment qu’on a mis la charrue avant les bœufs.

La volonté affichée du Gouvernement était de renforcer les nouvelles régions, dont on a défini les contours il y a peu, en leur donnant la compétence des routes, des ports, des transports scolaires, des collèges ; de supprimer les départements à l’horizon 2020 ou 2021 dans une surenchère entre le Premier ministre et le Président de la République ; de consolider les intercommunalités, avec un relèvement du seuil à 20 000 habitants ; de supprimer la clause de compétence générale pour les départements et les régions, en contradiction avec l’article 1er de la loi MAPTAM. Il faudrait savoir de manière précise ce que la majorité et le Gouvernement comptent faire des départements.

L’article 1er supprime la clause de compétence générale. Il faut reconnaître que notre pays est caractérisé par un enchevêtrement des compétences et une multiplication des financements croisés qu’il convient d’éviter. L’article 73 de la loi du 16 décembre 2010 sur la réforme des collectivités locales avait introduit le caractère exclusif des compétences exercées par les départements et les régions et instauré un partage des compétences pour le sport et la culture. Nous pourrons discuter de l’initiative du Sénat d’y avoir adjoint le tourisme.

En matière de collèges, je souscris aux arguments avancés par notre rapporteur. Ils me confortent dans le combat que je mène depuis maintenant une décennie en faveur d’une école du socle, fondée sur le rapprochement entre école primaire et collège, ayant pour pendant un continuum entre lycée et enseignement supérieur, de bac moins trois à bac plus trois, objet d’une mission d’information de notre commission. Les départements, à qui revient la solidarité sociale, ont mené une politique tout à fait satisfaisante s’agissant des collèges. La gestion de ces derniers doit rester de leur compétence, et le Sénat a eu raison de supprimer l’article 12.

Sur certains sujets, nous sommes prêts à rediscuter et à retravailler.

Instaurer un guichet unique en matière de sport et de culture irait dans le sens du choc de simplification voulu par le Gouvernement et permettrait en même temps de répondre à beaucoup de questions que se posent les élus locaux en ces domaines.

Je crains qu’on n’ouvre, avec les dispositions relatives aux CREPS, la boîte de Pandore, en prévoyant des transferts de patrimoine et d’agents aux régions, qui seront heureuses d’apprendre qu’ils seront compensés à l’euro près, même si leur expérience en la matière peut les rendre légitimement inquiètes. Il faudra clarifier la question de la répartition entre État et régions dans le débat en séance. Le Sénat a précisé qu’il devrait y avoir un CREPS dans chaque région mais qu’en est-il des centres en voie de disparition ? Seront-ils remplacés ? Il importe d’éviter toute usine à gaz, compte tenu de l’importance de la politique du sport dans les régions.

Je tiens à dire que si seul un amendement a été déposé par notre groupe dans le cadre de cette commission, c’est que nous avons été pris de court. Nous verrons, à l’issue des travaux de la commission des Lois, ce qu’il y a lieu de retravailler. Pour l’heure, je vais globalement dans le sens du rapporteur.

Mme Barbara Pompili. Je tiens d’abord à saluer le travail réalisé par nos collègues du Sénat.

En supprimant l’article 12, ils sont revenus sur le transfert de la gestion des collèges aux régions, sujet sur lequel nous manquons aujourd’hui de réponses rassurantes. Dans un domaine aussi essentiel que l’éducation, qui engage le quotidien et l’avenir de notre jeunesse, on ne peut pas se permettre de naviguer à vue. Toute décision ne doit être prise qu’après que ses conséquences en ont été mesurées, ce qui implique d’avoir mené au préalable une réflexion de fond, elle-même précédée d’une véritable concertation en amont de l’ensemble des acteurs concernés. Vraisemblablement, cela n’a pas été le cas. Les actions envisagées doivent également être cohérentes avec les réformes en cours. Il ne faudrait pas, par exemple, compromettre les chantiers ouverts à la suite de l’adoption, il y a moins de deux ans, de la loi de refondation de l’école, tel le rapprochement entre école primaire et collège qui constitue une avancée très importante à pérenniser. Un transfert des collèges aux régions ne serait-il pas susceptible de déstabiliser le travail en cours, qui vise à permettre aux enfants de vivre une scolarité plus épanouissante et à lutter contre l’échec scolaire et les inégalités objectives ? Un tel transfert n’apparaît pas si nécessaire ou du moins semble prématuré. C’est la raison pour laquelle la suppression de cet article par le Sénat me paraît être une mesure de sagesse. La discussion n’est toutefois pas terminée.

Les dispositions de l’article 8, consacré au transport scolaire, sont à examiner au regard d’un besoin de cohérence globale. Le choix de l’échelon le plus pertinent doit être guidé par la perspective d’offrir le meilleur service public aux usagers. Les régions sont déjà dotées d’une compétence forte en matière de transports, ce qui est une bonne chose. Si, pour renforcer la cohérence en ce domaine, le transport scolaire devait leur revenir – ce que l’on peut souhaiter –, il faudrait impérativement s’assurer que les besoins de tous les élèves sont bien pris en compte, que la qualité du service rendu fait l’objet d’un nivellement par le haut et que ce transfert ne se fait pas au détriment de territoires plus éloignés, plus enclavés ou comptant moins d’élèves. J’ajoute que notre préoccupation doit surtout être d’organiser un système simple et non d’ajouter de la complexité à la complexité, comme le veut une tendance bien française.

La même logique vaut pour le transport des élèves en situation de handicap. Les grandes régions de demain auront-elles les capacités d’assurer la même qualité pour les services de proximité qu’aujourd’hui ? En matière de handicap, c’est bien de cas par cas qu’il faut parler. Et pour le transport ordinaire comme pour le transport adapté, qui sont indissociables, une attention particulière doit être accordée au périscolaire afin de mieux synchroniser les horaires de ramassage et permettre aux élèves de participer aux activités mises en place grâce à la réforme des rythmes scolaires.

Concernant les articles dédiés à l’enseignement supérieur et à la recherche, je salue le travail du Sénat, qui a contribué à renforcer le rôle des régions. Ma collègue Isabelle Attard présentera un amendement qui vise à poursuivre l’évolution en ce sens.

Dans le domaine de la culture, nos collèges écologistes du Sénat ont fait adopter un amendement devenu l’article 28 A, dont je souhaite souligner l’importance. Afin de garantir les droits culturels des citoyens, droits fondamentaux, il est en effet nécessaire d’affirmer la place de l’État aux côtés des collectivités. La culture est, et doit rester, une responsabilité partagée.

Nous soutenons, à l’article 29, la création d’un guichet unique, gage de lisibilité et de simplification.

Enfin, nous vous proposons d’ajouter la vie associative aux articles 28 et 28 bis. Avec cette loi, la culture, le sport et le tourisme deviendront des compétences partagées. Or toutes les structures associatives n’œuvrent pas dans ces champs-là. Nombre d’associations vont donc pâtir de la suppression de la clause de compétence générale, notamment au niveau de leurs financements. D’ailleurs, la commission d’enquête consacrée aux difficultés du monde associatif a elle-même préconisé dans son rapport la création d’une compétence partagée. Cette dynamique a commencé à être formalisée par la charte des engagements réciproques entre l’État, le mouvement associatif et les collectivités territoriales, signée en février 2014. On sait le travail remarquable que les associations effectuent sur notre territoire et combien elles participent au vivre-ensemble. Empêcher certaines structures associatives de bénéficier de financements croisés serait se priver de solutions innovantes et d’acteurs de terrain au service de l’intérêt général. Pensons aux associations œuvrant dans le champ de l’éducation populaire, de l’environnement, de la citoyenneté, de la lutte contre le racisme ou contre les violences.

Mme Gilda Hobert. Après la loi MAPTAM et la loi instaurant un nouveau découpage des régions, voici le dernier volet de la réforme territoriale, consacré à la répartition des compétences des différentes collectivités. À quelques semaines des prochaines échéances électorales, ce projet de loi était attendu : il devenait urgent de clarifier cette répartition. J’aurai ici une pensée pour les candidats aux élections de mars.

En dépit de délais très contraints, vous avez fourni, monsieur le rapporteur, un travail approfondi et je tiens à vous remercier pour votre rapport nourri et éclairant.

Le projet de loi supprime la clause de compétence générale des régions et des départements. Chacun de ces niveaux détiendra des compétences claires qui rendront l’action publique plus efficace et dynamique.

Le texte assoit également le rôle et les spécificités des intercommunalités et réaffirme le statut des métropoles. Pour avoir assisté à la création de la Métropole de Lyon, le 1er janvier dernier, je ne peux qu’être satisfaite que les métropoles nouvellement créées gardent leurs capacités à lier développement économique et insertion.

Dans le domaine de l’éducation, ce texte prend mieux en compte les réalités locales et l’évolution de la répartition des compétences au quotidien. Néanmoins, je rejoins votre analyse, monsieur le rapporteur, quant au transfert de la gestion des collèges aux régions qui figurait dans le texte initial. Cela ne semblait pas judicieux au regard de la nécessité de mieux établir un lien entre le cycle primaire et le collège, d’une part, entre le lycée et l’enseignement supérieur, d’autre part, deux étapes clefs dans la vie des jeunes. Il semble plus pertinent que chacune des collectivités prenne en charge une de ces étapes. Le Gouvernement et le Sénat se sont mis d’accord pour renoncer à cette mesure et le groupe RRDP sera attentif au maintien de cette décision. La cohérence de nos politiques éducatives ne peut être soumise à des considérations strictement économiques.

Le fait que les compétences relatives au sport et à la culture soient maintenues dans le champ des compétences partagées est une très bonne chose, eu égard à la nécessité d’une transversalité des politiques menées en ce domaine. L’expérience conduite depuis 1983 l’illustre. De formidables initiatives ont montré leur efficacité aux différents échelons territoriaux. De plus, les collectivités territoriales participent fortement au financement public de ces sphères, marque de l’ancrage local du sport et de la culture. Ainsi ont-elles consacré pas moins de 7,6 milliards d’euros à la culture en 2010. Cette tendance doit être perpétuée, sans pour autant s’accompagner d’un désengagement de l’État.

Permettez-moi de nourrir quelques inquiétudes concernant les politiques relatives à la jeunesse et à la vie associative, dont la répartition dans ce texte n’est pas clairement établie. Il me semble nécessaire qu’elles demeurent des compétences partagées au regard des nombreuses actions mises en place par les collectivités, tant au niveau de la formation que de l’accès à l’emploi, à l’autonomie, à la santé et au logement, ainsi qu’à la culture et à la vie associative. En ces domaines, ont été mises en place des politiques coordonnées, dotées d’une forte dimension transversale liant État, départements et municipalités.

Un flou persistant dans les champs de la jeunesse et de la vie associative aurait de lourdes conséquences sur les dispositifs mis en place par les collectivités. En ce qui concerne ma région, Rhône-Alpes, je pense par exemple à la carte M’ra, qui facilite nombre de pratiques sportives et culturelles, grâce notamment à des réductions, et permet un accompagnement des jeunes dans leur santé au quotidien.

J’espère que nos débats seront l’occasion d’éclairer les divers points que j’ai évoqués.

M. Marcel Rogemont. S’agissant des collèges, je me félicite que le Sénat ait supprimé la disposition du texte gouvernemental qui transférait leur gestion aux régions. Elle doit rester de la compétence des départements.

S’agissant des transports scolaires, la région est-elle vraiment en mesure de gérer le maillage départemental, qui peut compter jusqu’à 20 000 arrêts ? De mon point de vue, c’est impossible. Par ailleurs, la tarification peut aller du simple au double. Et entre 110 euros et 230 euros, je vous parie que l’alignement se fera vers le bas. Cela occasionnera une dépense supplémentaire. Je ne reviens pas sur ce que notre collègue Sophie Dessus a dit des appels d’offres.

Quant au guichet unique, c’est une fausse bonne idée. Les problèmes que rencontrent les associations sportives et culturelles lorsqu’elles déposent leurs dossiers au conseil régional, au conseil général, ou à la commune ne sont pas d’ordre comptable ou administratif. Ce sont les adjoints à la culture ou aux sports des municipalités, les vice-présidents à la culture ou aux sports des conseils généraux ou des conseils régionaux qui compliquent les choses. Pour faire vivre leurs projets, les responsables d’associations doivent savoir comment s’ancrer dans telle ou telle politique menée par les collectivités territoriales. Même si leurs démarches administratives sont simplifiées grâce à un dossier commun, ils se heurteront toujours à l’obstacle de la recherche de financement.

Je termine avec les conférences territoriales d’action publique. Je veux bien souscrire à l’idée persistante d’un nécessaire équilibre territorial, mais il faut prendre en compte certaines réalités. Prenons l’exemple de Rennes. Son statut fait qu’elle est dotée de gros équipements, comme le Théâtre national de Bretagne ou l’Opéra, avant tout fréquentés par des non-Rennais venus du reste du département. Mais qu’en est-il des autres équipements ? Savez-vous, en proportion, combien d’hectares elle devrait consacrer à la construction de salles polyvalentes, de gymnases et de stades de football si elle était équipée comme une commune de 1 000 habitants ? Des centaines ! L’équilibre territorial doit tenir compte des habitants et non pas des touffes d’herbe. Les habitants des villes bénéficient de bien moins d’équipements de proximité que les plus petites communes. Pensez qu’une commune de 237 habitants a construit une salle polyvalente de 400 places !

Mme Annie Genevard. Je souscris à la proposition de créer une commission dédiée à la culture au sein des conférences territoriales de l’action publique. Ayant assisté à une première réunion de CTAP, j’ai perçu l’intérêt qu’il y avait à mettre autour d’une même table tous les acteurs importants de l’action publique. Toutefois, je m’interroge sur la gouvernance. Le glissement de tutelle de la culture vers la région laisse craindre un effacement de l’État que j’estime dangereux. Pour avoir été conseillère régionale pendant huit ans, il ne me semble pas que l’échelon régional ait brillé dans la mise en œuvre d’une politique culturelle équitable. L’irrigation culturelle des territoires n’est pas sa vocation première puisque la région se consacre avant tout à l’art contemporain à travers les fonds régionaux d’art contemporain (FRAC), à l’enseignement artistique, et, dans certains cas, au cinéma.

Pour ce qui est de l’article 28 A, introduit par un amendement des sénateurs écologistes, il prévoit que « Sur chaque territoire, les droits culturels des citoyens sont garantis par l’exercice conjoint de la compétence en matière de culture, par l’État et les collectivités territoriales ». Nous ne pouvons que souscrire à cette affirmation de principe. Mais quel peut en être l’intérêt, si elle n’est pas assortie des moyens correspondants ? Un amendement du rapporteur tend à supprimer la référence à une mise en œuvre « sur chaque territoire ». C’est dommage, car peu d’éléments dans ce projet de loi évoquent l’impératif d’une mise en œuvre équitable des politiques culturelles. Or, c’est un problème majeur auquel nous sommes confrontés aujourd’hui. Vous avez rappelé, monsieur Travert, que le financement de la politique culturelle est assuré à 70 % par les collectivités territoriales. À côté de la question de la compétence de la culture, dont tout le monde convient qu’elle doit être partagée, se pose la question des moyens pour l’exercer. Vous avez sans doute, comme moi, découvert avec désolation la « cartocrise », qui recense au jour le jour les festivals et les manifestations culturelles supprimées par les collectivités territoriales, faute de moyens.

M. le président Patrick Bloche. Lorsque la région intervient dans le domaine culturel, elle le fait souvent sur la base de sa compétence en matière de développement économique misant sur l’apport de la culture en termes d’attractivité du territoire, et donc d’activité, de croissance et d’emploi. On le voit notamment à travers l’action des commissions régionales du film. Ce rôle fait écho au rapport récemment remis par l’inspection générale des affaires culturelles et inspection générale des finances sur la contribution de la culture à l’économie nationale.

Mme Martine Martinel. Monsieur le rapporteur, votre travail a plusieurs mérites, à commencer par celui de ne laisser personne indifférent. Vous soulignez la nécessité de maintenir la gestion de proximité des collèges, en particulier parce que vous y voyez une condition de la réussite de la loi sur la refondation de l’école. Pourriez-vous développer ce point ?

M. François de Mazières. Il faut bien avoir à l’esprit l’évolution suivie par la politique culturelle depuis la décentralisation. Au début des années 80, toutes les collectivités voulaient investir le domaine de la culture, car elle était en quelque sorte l’image de marque des nouvelles compétences territoriales. Des efforts considérables ont été consentis en matière aussi bien d’équipements culturels que de fonctionnement culturel. Mais depuis les élections municipales de 2008, un changement complet s’est produit. Toutes les études le montrent : les collectivités territoriales connaissent une phase de diminution de leurs crédits qui est malheureusement appelée à s’accélérer. Cette nouvelle situation implique de raisonner différemment.

En matière culturelle, il existe deux types de dépenses. Il y a, d’une part, les dépenses immédiatement valorisantes, comme celles liées aux festivals ou aux animations culturelles. Il y a, d’autre part, le financement de l’enseignement artistique qui, lui, n’intéresse personne. La décentralisation commande de regarder constamment la réalité du terrain. En cette période de reconquête démocratique, il faut que l’éducation artistique soit financée. Or cet impératif se heurte à des aberrations budgétaires. Les crédits de l’ancienne action 3 « Soutien aux enseignements spécialisés » de musique, de théâtre, de danse, qui consistaient essentiellement en des dépenses d’interventions déconcentrées au titre de l’aide apportée par l’État aux 36 conservatoires à rayonnement régional et aux 101 conservatoires à rayonnement départemental, ont connu une réduction de 50 % entre 2012 et 2015, passant de 29, 2 millions d’euros à 15 millions. Les concours financiers de l’État ont baissé des deux tiers !

La compétence en matière de culture exercée conjointement par l’État et les collectivités que propose le rapporteur me va bien, mais le problème n’est pas là. Nous devrions aller beaucoup plus loin en imposant des obligations dans le cadre de compétences bien déterminées là où le bât blesse. J’ai présidé pendant des années la Fédération nationale des collectivités territoriales pour la culture : de gauche comme de droite, nous étions tous d’accord pour reconnaître que le financement de l’éducation artistique est une question fondamentale. Si nous jouons le jeu de la décentralisation, il est impératif de préserver les crédits qui lui sont consacrés. Profitons de cette loi pour enfin procéder à une juste répartition en ce domaine.

Mme Marie-Odile Bouillé. L’article 29 offre la possibilité de créer un guichet unique pour les aides et subventions afin de simplifier l’action publique pour les usagers. Mais est-il compatible avec le fait que la culture relève d’une compétence partagée, comme le rappelle l’article 28 A introduit par le Sénat ? N’implique-t-il pas la notion de chef de file, en contradiction avec la compétence partagée ? Plutôt qu’un guichet unique, ne pourrions-nous pas envisager un dossier unique de demande de subventions qui ferait gagner beaucoup de temps à nos associations, tout en permettant un examen différencié selon les niveaux de compétence ?

M. Patrick Hetzel. Il est dommage qu’à aucun moment le projet de loi n’aborde la question des moyens. Cela me paraît extrêmement dangereux, car la réduction des dotations de l’État aux collectivités territoriales conduit d’ores et déjà à un étranglement des finances de ces dernières.

Je m’interroge, monsieur le rapporteur, sur votre commentaire de l’article 12 bis A introduit par le Sénat, qui confie aux régions un pouvoir d’approbation sur la carte des formations supérieures et de recherche établie par l’État. Vous écrivez que « le nouveau rôle reconnu à la région en matière de formation professionnelle et d’orientation milite pour qu’État, régions et établissements d’enseignement supérieur et de recherche trouvent les voies d’une coordination étroite et efficace », tout en précisant, en revanche, qu’il vous « apparaît tout aussi essentiel de préserver les prérogatives de l’État, garant de l’enseignement supérieur, comme celles des universités autonomes ». N’est-ce pas contradictoire ? Jusqu’à quel point considérez-vous cet ajout du Sénat comme un apport utile ? Vous faites un plaidoyer en faveur d’une coordination étroite et efficace entre établissements, État et régions, mais comment la mettre en place ? Aujourd’hui, la plus grande difficulté est bien de concilier les prérogatives de l’État, qui doit garantir la cohérence de l’enseignement supérieur au niveau national, et l’intervention des régions. Que vous n’apportiez pas de réponse plus précise à ce problème me laisse interrogatif, même si j’ai bien noté que votre rapport fournissait des précisions pour d’autres articles.

Mme Colette Langlade. Je me réjouis du maintien des conseils généraux, sous forme de conseils départementaux, car ce sont des institutions très importantes pour notre monde rural.

S’agissant de l’article 8, monsieur le rapporteur, vous soulignez qu’il n’est pas question d’imposer aux régions la gestion fine du maillage des transports scolaires et qu’elles seront en charge d’assurer une mise en cohérence du service public. Que pensez-vous de la solution que pourrait constituer la délégation ?

S’agissant de l’article 12, vous jugez utile de donner une forte impulsion à la mutualisation, estimant nécessaire, pour avancer, d’identifier une collectivité territoriale responsable chargée de préparer, de proposer et d’animer les actions communes. Pouvez-vous nous en dire davantage ?

Mme Dominique Nachury. Je regrette que nous examinions ce texte sur les compétences des régions et des départements sans tenir compte du fait que des élections départementales vont avoir lieu à la fin du mois de mars, autrement dit avant l’adoption du texte définitif. C’est un manque de respect envers les électeurs.

S’agissant des collèges, le projet gouvernemental avait transféré la compétence aux régions. Il est aujourd’hui question qu’ils restent de la compétence des départements. Cette position est-elle définitive ?

Je précise que je ne suis pas concernée par les élections départementales puisqu’il n’y en a plus dans l’agglomération lyonnaise, ni par la question du « va-et-vient » des collèges puisque la loi prévoit que la Métropole de Lyon conserve les collèges et que la compétence ne sera pas transférée à la région.

M. le président Patrick Bloche. Paris étant également ville et département, je me réclame de la même objectivité que notre collègue Dominique Nachury.

M. Jean-Pierre Allossery. Je vous remercie, monsieur le rapporteur pour avis, pour la qualité de votre rapport, que vous avez dû réaliser dans un temps très court.

Le projet de loi répond à trois principes : cohérence entre les missions confiées aux collectivités ; lisibilité pour que chaque citoyen puisse identifier les responsabilités de chaque collectivité et s’orienter dans cette organisation ; rationalisation des moyens et mutualisation.

Pour ma part, je me réjouis que l’article 28 reconnaisse la culture, le sport et le tourisme comme des compétences partagées. En effet, ces politiques ont un caractère transversal. Il faut les inscrire sur l’ensemble du territoire en proximité et en fonction de leur diversité.

La culture souffre de plus en plus du retrait des collectivités, aussi est-il essentiel de réaffirmer et d’instruire cette compétence partagée dans la loi. Cela relève même de l’urgence. J’approuve tout à fait l’article 28 bis introduit par le Sénat. Décider des compétences partagées, c’est affirmer que nous avons tous une responsabilité en partage. Mais sans gouvernance pour co-construire ces politiques transversales, on risque encore de constater des actions juxtaposées, superposées, voire redondantes ou concurrentes. L’article apporte une réponse en confiant aux conférences territoriales de l’action publique le soin de veiller à la continuité des politiques publiques en matière de compétences partagées, et à leur mise en œuvre équilibrée, cohérente et articulée sur l’ensemble des territoires, en fonction de leurs particularités.

Je m’interroge toutefois sur la place faite à la jeunesse et à l’éducation populaire : dans le projet de loi, ce ne sont ni des compétences obligatoires ni des compétences partagées. Pourtant, elles sont essentielles à l’accompagnement et à l’inclusion de nos jeunes. Il y a, à mon sens, tout un travail à mener en matière d’harmonisation et de lisibilité des actions qui leur sont destinées. Il faut remédier à l’empilement des dispositifs existants, proposer des parcours cohérents, en sortant de la logique de l’âge ou de la catégorie. Aussi, je propose d’inscrire la politique de jeunesse et d’éducation populaire dans l’article 28 au titre des compétences et d’une responsabilité partagées.

Mme Laurence Arribagé. Au-delà de la suppression de la clause de compétence générale des régions et des départements, le Sénat a reconnu, avec l’article 28 du projet de loi, l’existence d’une compétence partagée dans les domaines de la culture, du sport et du tourisme. Il l’a, par ailleurs, étendue aux collectivités à statut particulier et aux groupements de collectivités. Les sénateurs se sont accordés à juste titre sur le maintien des possibilités d’intervention de chaque niveau de collectivité dans ces trois domaines, du fait de leur nature transversale et de la diversité des situations qui en découlent.

Ils ont également réaffirmé le partage de ces compétences par la création de commissions ad hoc au sein des conférences territoriales de l’action publique, introduites par la loi MAPTAM. Ces nouvelles instances seront chargées de veiller à la continuité de l’action publique en matière de sport, de culture et de tourisme et à sa mise en œuvre équilibrée dans l’ensemble des territoires.

Dans ces domaines, et en particulier dans celui du sport, le niveau communal apparaît comme le premier financeur public, apportant une contribution significativement supérieure à celle des échelons départemental ou régional. Dans ce contexte, il est légitime de s’interroger sur les modalités selon lesquelles s’exercera ce partage de compétences et sur le rôle que les CTAP assumeront dans cette répartition, à plus forte raison dans le cadre de la mise en place des futures grandes régions.

Par ailleurs, il conviendrait de définir précisément dans quelle mesure les métropoles pourraient assurer un rôle leader dans ces domaines, en adéquation avec les actions déterminantes qu’elles exercent sur leur territoire.

M. le rapporteur pour avis. S’agissant des départements, le cadre institutionnel doit être fixé. En quelques mois, en effet, les départements ont été supprimés, puis rétablis. Est même apparue une espèce d’hydre à trois têtes, l’une pour les territoires où les départements étaient remplacés par les métropoles, une autre pour ceux où ils étaient remplacés par une conférence des communautés de communes qui aurait géré l’action sociale, et une autre encore pour les territoires ruraux où continuaient d’exister les conseils généraux. Or la République a besoin d’unité territoriale.

Aujourd’hui, la réponse a été trouvée : il y a des élections départementales à la fin du mois de mars, et les départements sont encore là pour cinq ans – et même pour un bon moment, si l’on considère les difficultés avec lesquelles un accord a été trouvé au Sénat s’agissant des collèges. Pour ma part, je n’ai pas d’inquiétude pour celles et ceux qui vont affronter le suffrage universel à la fin du mois de mars : entre l’action sociale, les collèges et les compétences partagées, ils ne manqueront pas de sujets de discussion.

On peut se réjouir que la culture, le sport et le tourisme deviennent des compétences partagées, mais on ne peut pas les rendre obligatoires, car il y va de la libre administration des collectivités territoriales. Un consensus a été trouvé sur ces compétences partagées. Il reste à trouver comment les faire vivre sur l’ensemble des territoires.

Aujourd’hui, tous les territoires ont une ambition culturelle, d’où la nécessité de réunir les CTAP. Contrairement à ce qu’a dit notre collègue Marcel Rogemont, elles ont leur utilité lorsqu’il s’agit de mettre tout le monde autour de la table. Leur objet n’est pas uniquement de résoudre les problèmes d’infrastructures ; il est de donner de la cohérence et de la lisibilité à l’action culturelle que porte un territoire en réunissant, au moins une fois par an, l’ensemble des acteurs culturels, des services de l’État jusqu’à ceux des collectivités.

Je m’étonne que les sénateurs, qui avaient repoussé la CTAP culture lors de la loi MAPTAM, l’aient « récupérée » à l’occasion de ce projet de loi – souhaitaient-ils pouvoir en être membres pour avoir une sorte de chasse gardée sur la culture ? Mais alors, pourquoi n’autoriserait-on pas la présence des députés, qui sont aussi des élus nationaux et qui ont leur mot à dire sur l’action culturelle, puis celle des conseillers régionaux et des conseillers départementaux ? Il serait alors très difficile de s’entendre au sein d’une telle CTAP.

En commission des Lois a été déposé un amendement qui traite de la compétence partagée en matière de vie associative et d’éducation. Toute la difficulté est de savoir comment reconnaître une compétence dans la vie associative, celle-ci intervenant dans une multiplicité de secteurs d’activité.

En confiant les transports scolaires aux régions, nous apportons de la cohérence. En tant qu’autorités organisatrices de transports (AOT), elles gèrent déjà les transports ferroviaires et maritimes. Demain, il faudra aussi donner une impulsion à la mutualisation pour faire en sorte que le maillage au plus fin soit géré par ceux qui connaissent les problématiques, c’est-à-dire les conseils généraux, grâce à des délégations de compétence appropriées. Ces derniers gérant aussi l’action sociale, le transport des personnes souffrant de handicap par exemple serait facilité par leur étroite association. Toute collectivité – conseil général, EPCI ou syndicat de transport – pourra conventionner avec la région pour obtenir l’autorité déléguée de gestion des transports. L’action des régions trouvera également une cohérence dans la mutualisation, en particulier dans la définition des politiques d’achats de matériels.

Je répondrai à M. Patrick Hetzel sur le rôle des régions dans la carte des formations avec l’exemple d’une expérience personnelle. Entre 2010 et 2012, la Basse-Normandie, dont je suis un élu, avait énormément investi dans la construction d’une faculté de médecine à Caen et d’internats, ainsi que dans le schéma de l’enseignement supérieur et de la recherche. Lorsque le rectorat de l’époque a annoncé la suppression de pans entiers de formation sur notre territoire, la confrontation a été vive. Les régions ont leur mot à dire sur ces sujets. L’article 12 bis A introduit par le Sénat va jusqu’à donner aux régions la possibilité d’opposer un veto sur la carte des formations définie par l’État s’agissant des formations situées sur leur territoire. Cela va sans doute un peu loin, mais cette proposition a le grand mérite de poser le débat fondamental sur la nécessaire cohérence entre les stratégies régionales et l’action de l’État.

Le guichet unique est avant tout un débat sémantique. Cette expression ne plaît pas à des associations telles que le Syndicat national des entreprises artistiques et culturelles (Syndeac) ou le Syndicat national des arts vivants (Synavi). Nous avons fait une proposition dans le rapport, mais je serais presque tenté de me rallier à la proposition de notre collègue Marie-Odile Bouillé : j’aime bien l’idée de « dossier unique ». Ce qui peut être gênant dans le « guichet unique », c’est qu’il renvoie à l’action sociale, si noble et nécessaire à nos concitoyens. Avec le dossier unique, les porteurs de projets feraient leur demande à un seul interlocuteur, chaque collectivité s’en saisissant ensuite et l’instruisant selon ses propres critères. Chacun est maître de ses choix politiques en matière d’action culturelle. Il s’agit, là aussi, d’apporter de la simplification dans l’ordonnancement administratif.

Pourquoi les crédits culturels font-ils toujours l’objet des premières coupes dans les territoires quand, avec un peu d’imagination, on pourrait faire des économies sur d’autres dépenses ? Pourquoi la culture, la jeunesse et l’innovation seraient-elles toujours la variable d’ajustement ? C’est déjà un effort de 11 milliards qui a été consenti, sur un plan global de 50 milliards d’économies. Où en serions-nous s’il avait fallu aller jusqu’aux 100 milliards que certains préconisent ? Nous devons rester vigilants afin que la culture soit diffusée sur l’ensemble de nos territoires et de la manière la plus équitable possible.

J’ai en partie répondu à la question de Mme Annie Genevard sur l’intérêt de la CTAP et sa gouvernance. Aujourd’hui, c’est la région qui est chef de file, la CTAP ayant pour rôle d’apporter coordination et mise en œuvre équitable sur le territoire. Elle va également gérer les compétences et les moyens de l’action culturelle sur l’ensemble du territoire français.

Pour répondre à Mme Barbara Pompili sur l’école du socle, aujourd’hui, nous devons avoir une vision globale. En encourageant l’école primaire et le collège travailler ensemble, nous donnons suite aux choix opérés dans la loi sur la refondation de l’école avec l’ouverture de passerelles entre les différents niveaux d’éducation. Il nous revient, pour réduire le taux d’échec, de créer les conditions de partage, de mutualisation et d’échange entre les différents niveaux, aussi bien entre le primaire et le collège qu’entre le secondaire et le supérieur.

II. EXAMEN DES ARTICLES

M. le président Patrick Bloche. Mme Régine Povéda m’a informé qu’elle n’était pas cosignataire des amendements AC3, AC4 et AC5.

Article 8
(art. L. 3111-7 et suivants du code des transports, art. L. 213-11 et L. 213-12 du code de l’éducation, art. L. 3321-1, L. 3542-1 et L. 4321-1 du code général des collectivités territoriales
et art. L. 8221-6 du code du travail)

Transfert des compétences en matière de transports scolaires aux régions

L’article 8 du projet de loi initial, qui a pour objet de transférer la compétence de l’ensemble transports routiers non urbains aux régions, prévoyait notamment de leur confier la responsabilité de l’organisation et du fonctionnement des transports scolaires en lieu et place des départements.

Le Sénat a supprimé l’ensemble des dispositions relatives aux transports scolaires au principal motif qu’elles entraient en contradiction avec la nécessaire dimension de proximité que doit revêtir la gestion du maillage très fin, complexe et évolutif du réseau de ramassage, à ses yeux plus efficacement assurée par son maintien au département.

1.  Le droit en vigueur

La loi n° 83-663 du 22 juillet 1983 complétant la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition de compétences entre les communes, les départements, les régions et l’État a confié aux départements la gestion de l’ensemble des transports scolaires, à l’exception de ceux organisés à l’intérieur des périmètres de transports urbains existants au 1er septembre 1984.

L’article L. 3111-7 du code des transports, auquel renvoie l’article L. 213-11 du code de l’éducation, définit les transports scolaires comme « des services publics réguliers », qui constituent un service public administratif (Tribunal des conflits, 5 juillet 1982, M. Dris) dont l’accès est soumis au respect du principe d’égalité entre les usagers (Conseil d’État, 4 mai 2011, Époux Sanchez). À cet égard, seules des différences de situation au regard de l’objet même de ce service peuvent légalement justifier, en l’absence de motif d’intérêt général, une différence de traitement, notamment tarifaire, entre les usagers de ce service, dès lors que les élèves fréquentent un établissement d’enseignement public ou privé correspondant au secteur d’enseignement public dont ils dépendent.

Le département consulte à leur sujet le conseil départemental de l’éducation nationale, tandis qu’en parallèle l’autorité compétente de l’État doit informer le département avant l’adoption de toute décision susceptible d’entraîner une modification substantielle des besoins.

Deux exceptions subsistent toutefois :

– Dans les périmètres de transports urbains (PTU) – qui comprennent, en application de l’article 27 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d’orientation des transports intérieurs, « le territoire d’une commune ou le ressort territorial d’un établissement public ayant reçu mission d’organiser les transports publics de personnes », et sont « constatés », sur demande du maire ou du président de l’établissement public, par le représentant de l’État après avis du conseil général –, la responsabilité des transports scolaires est exercée par l’autorité organisatrice de transport urbain (AOTU), qui peut être une commune ou un établissement public. La création ou la modification des PTU exige la conclusion d’une convention entre cette autorité et le département fixant les conditions de financement des services de transports scolaires dans ce nouveau périmètre (article L. 3111-8 du code des transports).

– En région Île-de-France, les transports scolaires relèvent du syndicat des transports d’Île-de-France qui consulte à leur sujet au moins une fois par an le conseil inter-académique.

L’article L. 3111-9 du code des transports permet enfin aux autorités compétentes pour les transports scolaires de déléguer, par convention, tout ou partie de leur organisation à des communes, des EPCI, des syndicats mixtes d’établissements d’enseignement, des associations de parents d’élèves et des associations familiales.

2.  Le projet de loi initial

Dans les faits, les transports scolaires présentent les caractéristiques concrètes d’une compétence partagée en raison de leur ajustement aux implantations et aux rythmes des écoles et des établissements secondaires sur lesquels interviennent à la fois l’État, garant du service public de l’éducation, la commune, le département et les régions au titre des écoles, des collèges et des lycées. Jugeant dans ce contexte qu’un besoin de coordination et de cohérence s’impose pour garantir l’équilibre et la solidarité entre tous les territoires, le Gouvernement a proposé de confier leur responsabilité aux régions.

À cet effet, le 5° et le 6° de l’article 8 du projet de loi initial substituaient la région au département pour la compétence de principe fixée à l’article L. 3111-7 du code des transports, ainsi que pour la conclusion des conventions précitées avec les AOTU (article L. 3111-8) et pour la consultation des conseils départementaux de l’éducation nationale concernés (article L. 3111-7).

Le 6° en tirait les conséquences en déplaçant les dispositions afférentes du code de l’éducation, dans le titre I « La répartition des compétences entre l’État et les collectivités territoriales » du chapitre III « Les compétences des départements » au chapitre II « Les compétences des régions ».

Le 7° étendait au département la liste des bénéficiaires des éventuelles délégations de compétence en matière de transports scolaires que peut effectuer, par convention, l’autorité compétente par principe, qui deviendrait ainsi soit la région, soit l’AOTU (article L. 3111-9). Cette faculté de délégation aux départements offrait notamment aux régions la possibilité de tirer parti de l’expérience accumulée par les conseils généraux.

Le III de ce même article ôtait enfin pour les départements le caractère obligatoire des dépenses liées à l’organisation des transports scolaires et l’introduisait pour les régions.

3.  Les modifications apportées par le Sénat

La commission des lois du Sénat, à l’initiative de ses rapporteurs, MM. Jean-Jacques Hyest et René Vandierendonck, ainsi que de la rapporteure pour avis de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication, Mme Catherine Morin-Dessailly, a supprimé l’ensemble des dispositions relatives au transport scolaire. Le Sénat a confirmé cette suppression dans le texte qu’il a adopté le 27 janvier.

Trois principales difficultés ont été mises en avant pour justifier cette suppression.

Tout d’abord, le Sénat a estimé que l’organisation des transports scolaires, par la complexité et la densité du maillage des circuits de ramassage, qui dépendent étroitement des circonstances locales, est une compétence de proximité, exigeant une réactivité et une connaissance du terrain contradictoire avec l’éloignement du centre de décision induit par sa régionalisation. On rappellera en effet que plus de quatre millions d’élèves, soit près du tiers de la population scolarisée, empruntent régulièrement ces transports qui desservent près de quinze mille établissements.

Ensuite, les sénateurs ont manifesté la crainte que ce transfert de compétence entraîne une harmonisation régionale des tarifs. Au regard de l’extrême diversité des pratiques constatées dans les départements, dont une vingtaine sont allées jusqu’à la gratuité totale, ce rapprochement serait susceptible d’engendrer, selon qu’il se fait par le bas ou par le haut, une détérioration des finances publiques ou un alourdissement des frais assumés par les familles.

Enfin, les modalités de délégation éventuelle de cette compétence sont apparues trop restrictives à la Haute assemblée.

Il est vrai que l’article L. 3111-9, dans la rédaction proposée par le projet de loi, permettait expressément aux régions de déléguer tout ou partie de l’organisation et du fonctionnement des transports scolaires aux départements. Toutefois, l’article 1111-8 du code général des collectivités territoriales interdit ensuite toute subdélégation en fixant le principe que les collectivités ne peuvent déléguer que les compétences dont elles sont attributaires.

Or il apparaît que les conseils généraux utilisent déjà intensément leur faculté de délégation des transports scolaires au profit en particulier des communes et des EPCI, certains d’entre eux associant jusqu’à près d’une centaine d’autorités organisatrices déléguées ou de second degré (AO2) tandis que d’autres ont fréquemment recours à des structures ad hoc.

L’impossibilité de subdéléguer pouvait ainsi avoir pour conséquence de détruire le réseau protéiforme de conventions tissé par les départements au cours des trente dernières années.

Par ailleurs, le Sénat, sur proposition du Gouvernement, a précisé que le transfert aux régions de l’ensemble des services de transports réguliers non urbains n’incluait pas les services de transport spécial des élèves handicapés vers les établissements scolaires, afin de maintenir la compétence du département, au titre de ses missions de solidarité et de proximité.

4.  La position de la Commission

Le rapporteur pour avis estime que les arguments opposés au transfert des transports scolaires aux régions, qui ont le mérite de saluer l’efficacité incontestable de l’action menée par les départements depuis les lois de décentralisation et de mettre en évidence la grande complexité du maillage des réseaux de ramassage scolaire, ne sauraient pour autant condamner l’ambition d’une mise en cohérence de l’ensemble des transports routiers non urbains.

— En premier lieu, l’objet poursuivi par l’article 8 du projet de loi initial n’est pas d’imposer aux régions la gestion quotidienne des quelque 5 000 points de desserte aujourd’hui existants sur le territoire.

Il aménage en effet de très larges facultés de délégation, qui pourront de toute évidence permettre aux régions de s’appuyer sur l’expertise forgée par les départements.

Le but poursuivi est, à l’inverse, d’apporter une vision d’ensemble, élargie d’ailleurs à tous les autres transports routiers non urbains et aux transports ferroviaires régionaux, pour mieux coordonner l’action des différents acteurs, exploiter les éventuelles économies d’échelle et garantir aux usagers un service plus homogène.

À cet égard, il n’est pas inutile de rappeler que les transports scolaires sont souvent assurés, au moyen de compensations tarifaires, par des opérateurs exploitant des lignes régulières qui entrent naturellement dans le champ de la planification des transports confiée aux régions.

La fréquence et la qualité des dessertes et les tarifs appliqués aux familles sont aujourd’hui très disparates dans les territoires. Il est même paradoxal de constater que les départements confrontés à des appels d’offres infructueux et à des coûts de fonctionnement élevés sont essentiellement les départements ruraux, dans lesquels les défis d’organisation induits par la dispersion des habitations sont les plus redoutables.

Le rapporteur pour avis estime ainsi que la région est le niveau le plus pertinent pour garantir un service homogène et de qualité en assumant l’éventuelle redistribution au profit des territoires les moins bien dotés.

L’incidence sur les tarifs devrait dans ce contexte être d’autant plus limitée que cette rationalisation recèle d’évidentes opportunités d’économies d’échelle.

— En second lieu, la région, administration de mission, dispose dès à présent des capacités d’expertise, en particulier juridique, pour s’imposer comme l’autorité organisatrice des transports. En contrepartie, l’allégement des charges des départements, dégagés des lourdes contraintes qu’impliquent les négociations et le suivi des délégations de compétences, serait considérable.

L’interdiction de la subdélégation ne constitue pas une contrainte dirimante. Il serait en effet aisé aux régions qui le désirent de reprendre à leur compte le maillage fin des délégations directes aux communes et aux établissements publics tissé par les départements, en y apportant cohérence et lisibilité.

Il entre même dans la vocation de la conférence territoriale de l’action publique (CTAP) (cf. encadré dans l’exposé général) de débattre et de coordonner les interventions dans une compétence partagée dans les faits aujourd’hui, sinon dans le droit, entre de multiples acteurs.

C’est pourquoi la Commission a adopté un amendement du rapporteur pour avis rétablissant les dispositions relatives aux transports scolaires dans leur rédaction initiale, tout en prévoyant par ailleurs, comme l’avait proposé le Gouvernement dans un amendement rejeté par le Sénat au cours de sa première lecture, que les régions puissent continuer de participer au financement des frais de transport individuel des élèves vers les établissements scolaires dont elles ont la charge (article L. 3111-10 du code des transports).

*

L’amendement AC3 de M. Hervé Féron est retiré.

La Commission examine, en discussion commune, les amendements AC21 du rapporteur pour avis et AC20 de M. Hervé Féron.

M. le rapporteur pour avis. Cet amendement vise à rétablir le transfert des transports scolaires aux régions, dans les conditions prévues par le projet de loi initial.

Ce transfert recèle d’importantes potentialités de mise en cohérence de l’ensemble des transports non urbains. N’oublions pas que près du tiers des transports scolaires se fait par des lignes régulières de transport, au moyen de compensations spécifiques. Bien souvent, les marchés publics sont passés en même temps. Dans un même esprit, il serait absurde de ne pas tenir compte des lignes ferroviaires régionales, qui peuvent aussi jouer un rôle important pour certaines dessertes. Un besoin d’harmonisation s’impose et l’amendement y concourt.

La région aura la faculté de déléguer cette compétence à tout échelon de collectivité, notamment aux départements. À cet égard, l’interdiction de la subdélégation ne constitue pas un argument pertinent, dans la mesure où il sera aisé aux régions qui le désirent de reprendre à leur compte, en y apportant de l’ordre si nécessaire, le maillage des délégations tissé par les départements.

La région est l’échelon pertinent de la solidarité. Elle pourra notamment jouer un rôle précieux de péréquation vis-à-vis des départements ruraux qui peinent à conclure leurs appels d’offres et qui supportent les coûts les plus lourds tout en étant les départements les moins riches.

Mon amendement diffère un peu de celui de M. Féron sur un point technique important. J’ai repris, au huitième alinéa, une disposition proposée au Sénat par le Gouvernement, qui permet aux régions de participer au financement des frais de transport individuel des élèves, comme peuvent le faire aujourd’hui les départements. En supprimant, comme le proposait le projet de loi initial, l’article L. 3111-10 du code des transports, l’amendement AC20 de M. Féron interdit ces subventions, qui sont pourtant très précieuses pour les familles.

Malheureusement, l’article 40 de la Constitution m’empêchant d’aller plus loin, la rédaction proposée se limite au financement par la région des frais de transport des élèves des établissements dont elle a la charge. Je demanderai au Gouvernement d’élargir cette possibilité aux élèves des collèges, rien ne justifiant une différence de traitement à leur égard.

M. Hervé Féron. La nuance proposée par le rapporteur pour avis me convenant, je retire l’amendement AC20.

L’amendement AC20 est retiré.

M. Frédéric Reiss. Nous avons compris que le rapporteur va dans le sens d’une intermodalité, en prenant en compte tous les moyens existant dans une région donnée. À cet égard, je note son souci de maintenir les lignes ferroviaires en difficulté. L’idée de convention est tout à fait satisfaisante. Pour autant, compte tenu des mesures qui vont être adoptées concernant les collèges, nous voterons contre cet amendement. Nous estimons que les transports scolaires doivent rester de la compétence des départements.

Mme Annie Genevard. Il y a certes une cohérence dans le fait que l’autorité organisatrice de transports soit régionale. En théorie, cela n’est pas absurde. Cependant, la proximité n’est pas totalement garantie au niveau régional. Serait-il possible, monsieur le rapporteur pour avis, d’imaginer que les départements conservent la compétence et aient pouvoir de délégation aux régions ?

Mme Isabelle Attard. Cet amendement est extrêmement important, surtout pour ceux qui habitent en limite de département ou dans des zones mal desservies d’un département. Les différences sont parfois énormes à l’intérieur d’un même département. Une vision régionale des déplacements est bien plus cohérente, quitte, ensuite, à déléguer aux départements.

Avec le réseau des TER et les transports scolaires et autres, un nombre colossal de transporteurs intervient, notamment en zone rurale. Il convient de garder cette vision régionale, qui simplifiera l’organisation du transport de tous, et pas seulement des scolaires.

M. Michel Ménard. Le transfert de la compétence transports scolaires à la région avait une logique dès lors qu’était envisagée la suppression des départements. Puisqu’il est désormais acté que les collèges resteront de compétence départementale, ce dont je me félicite car cela fonctionne bien ainsi, il apparaît tout aussi logique de laisser les transports scolaires au niveau départemental. Du reste, je ne crois pas beaucoup au transfert aux régions, qui délégueraient ensuite leur compétence.

Sachant que le ramassage des collégiens s’effectue souvent jusque dans les cours de ferme, il est préférable de laisser l’organisation des transports scolaires aux départements plutôt qu’aux grandes régions qui ont été créées, qui peuvent compter quatorze départements. Il me semble compliqué d’organiser à Lyon le ramassage scolaire en Auvergne. Voilà pourquoi je ne suis pas favorable à cet amendement.

Mme Annie Genevard. Je partage l’analyse de Michel Ménard. Il faut rester à l’échelon départemental.

Mme Colette Langlade. La région a déjà compétence en matière de transports ferroviaires et maritimes ; elle l’aura désormais pour les transports scolaires. L’important est qu’une convention soit signée avec le département, pour de multiples raisons, liées en particulier à la complexité de la gestion quotidienne des transports scolaires sur le terrain. Je voterai l’amendement dans cet esprit.

M. le rapporteur pour avis. Rien n’interdira demain à la région de déléguer l’organisation du transport au plus fin sur le territoire, en conventionnant avec un syndicat de transports, un département ou une communauté de communes. Qui plus est, en s’appuyant sur son schéma régional des transports, elle donnera de la cohérence et de la visibilité, et sera enfin à même de mettre en œuvre l’intermodalité et la multimodalité. Je ne vois pas où est la difficulté à gérer de l’amont vers l’aval, du réseau ferroviaire interrégional au transport dans un hameau ou dans un village, dès lors qu’une convention est passée avec les collectivités demandeuses.

Je ne vois pas non plus l’intérêt d’inverser les choses, comme l’a proposé Mme Genevard. Le rôle de la région n’est pas d’assurer la gestion de la multitude d’arrêts de bus, c’est d’avoir une vision globale des infrastructures. La possibilité de déléguer à d’autres échelons de collectivité doit permettre de conserver cette proximité qui est demandée par l’ensemble des utilisateurs et des usagers.

La Commission adopte l’amendement AC21.

Puis elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 8 modifié.

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* *

Article 12
(art. L. 212-9, art. L. 213-1 et suivants, art. L. 214-5 et suivants, art. L. 214-8-1 et L. 214-8-2 [nouveaux], art. L. 216-4 et suivants et L. 442-9 du code de l’éducation, art. L. 3321-1, L. 3411-2, L. 3542-1, L. 3641-2 et L. 4221-1-1 du code général des collectivités territoriales et article 1er de la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 relative à l’accueil et à l’habitat des gens du voyage)

Transfert des collèges et des autres compétences scolaires
du département vers la région

L’article 12 du projet de loi initial visait à transférer du département à la région la compétence relative à la construction, la reconstruction, l’équipement, l’entretien et le fonctionnement, l’accueil, la restauration, l’hébergement et l’entretien général et technique, ainsi que la propriété des biens immobiliers et la responsabilité du recrutement et de la gestion des agents techniques territoriaux des établissements d’enseignement (ATTEE) et des anciens agents techniciens, ouvriers et de service (TOS) des collèges.

Le Sénat, peu convaincu par les économies d’échelle avancées par le Gouvernement et soucieux de maintenir une gestion de proximité des collèges, a supprimé l’ensemble de cet article.

1.  Le projet de loi initial

Comme il a été vu dans l’exposé général, l’idée de tenir compte de l’identité des métiers d’investissement et de gestion matérielle dans les collèges et les lycées en unifiant cette compétence sous l’autorité d’un seul échelon local est ancienne et abondamment commentée.

Dès 2006, dans son rapport d’information n° 2881 sur l’équilibre territorial des pouvoirs, le député M. Michel Piron déplorait que la délimitation des frontières dans l’éducation soit « peu linéaire », avant qu’en 2008, dans son rapport n° 1153, la mission d’information sur la clarification des compétences des collectivités territoriales présidée par M. Jean-Luc Warsmann estime indispensable de clarifier la situation en confiant à la région, « compte tenu de l’expérience acquise à cet échelon en matière d’enseignement supérieur et d’orientation professionnelle », la gestion des collèges et des lycées.

Dans un même esprit, la Cour des comptes, dans son rapport public thématique d’octobre 2009 sur la conduite par l’État de la décentralisation, avait regretté que les interventions parallèles des régions et des départements, renforcées par la dévolution des locaux et des agents techniques, aient eu « pour effet à la fois de disperser la gestion de ce personnel entre plusieurs collectivités d’un même ressort géographique (lycées et collèges d’une région et de plusieurs départements de cette région) et de pérenniser la répartition des équipements immobiliers de l’enseignement secondaire entre régions et départements ». De surcroit, elle a relevé que « la logique de transfert des personnels TOS a eu pour inconvénient d’accentuer l’éclatement institutionnel de l’immobilier de l’enseignement du second degré, qui aurait pu être unifié au sein de l’un ou l’autre échelon de collectivités attributaires, de façon à simplifier alors la répartition des compétences en ce domaine avec seulement trois intervenants correspondants aux trois niveaux d’enseignement : primaire, secondaire et supérieur ».

Il importe toutefois de rappeler que ces propositions ont échoué à recueillir un large consensus.

Le rapport (n° 264) de juin 2009 de la mission d’information sénatoriale sur l’évolution et l’organisation des collectivités territoriales présidée par M. Claude Bellot a par exemple relevé que « chaque niveau assumant ses missions de manière satisfaisante […] une remise en question pourrait soulever plus de difficultés qu’elle n’en réglerait ». Dans un même esprit, le rapport au Président de la République du Comité pour la réforme des collectivités locales présidé par M. Édouard Balladur indiquait en mars 2009 « qu’aucune solution alternative ne s’imposait avec la force de l’évidence. »

Formulée dans la perspective de la disparition du département, la régionalisation des collèges constituait la principale disposition du projet de loi en matière éducative, motivée par le souci de lisibilité de l’architecture locale, par la volonté de simplifier la co-gouvernance émergeante entre l’État et les collectivités dans l’éducation grâce à l’identification d’un seul interlocuteur local pour les établissements secondaires et par l’ambition de générer d’importantes économies d’échelle au travers de la mutualisation des moyens.

À cette fin, il était proposé au I de l’article d’abroger l’ensemble du chapitre III du titre premier du livre II de la première partie du code de l’éducation précité relatif aux compétences des départements en matière d’éducation et d’étendre aux collèges la compétence des régions pour l’élaboration du programme d’investissement (article L. 214-5), pour la gestion matérielle (article L. 214-6) et pour le recrutement et la gestion des personnels (article L. 214-6-1), tirant les conséquences de ces transferts pour l’utilisation des locaux et des matériels des établissements en dehors des heures de cours (article L. 214-6-2).

La compétence originale dont disposent les départements en matière de carte scolaire, décrite dans l’exposé général, aurait été assumée à l’identique par les régions, pour les seuls collèges, le projet prévoyant que « le conseil régional arrête leur secteur de recrutement en tenant compte des critères d’équilibre démographique, économique et social », en conservant la faculté de partager un même secteur de recrutement entre plusieurs collèges « lorsque cela favorise la mixité sociale. »

En cohérence, l’article 12 introduisait un nouvel alinéa dans l’article L. 214-7 fixant, comme l’avait fait la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et aux responsabilités locales, le principe d’un transfert à la région des collèges en pleine propriété à titre gratuit, sans versement d’aucun droit, taxe ou contribution. Il était prévu que les biens meubles et immeubles seraient, à la date du transfert, mis à la disposition de la région à titre gratuit, celle-ci se substituant aux départements pour assumer l’ensemble des obligations du propriétaire et exercer les pouvoirs de gestion afférents.

Le II de l’article proposait de tirer les conséquences de ce transfert dans le code général des collectivités territoriales, s’agissant notamment des dépenses obligatoires des deux collectivités (article L. 3321-1). Il mentionnait la compétence du département de Paris et de la métropole de Lyon en matière de gestion des collèges (article L. 3311-2 et L. 3641-2). Il actualisait la possibilité de transfert des collèges et des lycées de la région à un conseil de métropole.

Le III et le IV se bornaient à proposer de coordonner les dispositions de la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 relative à l’accueil et à l’habitat des gens du voyage et à aménager la transition relative aux départements affiliés à un centre de gestion pour les personnels ouvriers et de service des collèges.

Le V fixait enfin l’entrée en vigueur du transfert au 1er septembre 2017.

2.  Les modifications apportées par le Sénat

La commission des Lois du Sénat, sur proposition de ses rapporteurs et conformément à l’avis exprimé par la commission de la Culture, de l’éducation et de la communication, a supprimé cet article, au triple motif :

– d’une part de l’incertitude affectant les économies d’échelle attendues, le transfert des personnels départementaux travaillant dans les collèges pouvant à l’inverse se révéler coûteux pour les régions qui font aujourd’hui bénéficier leurs ATTEE d’un régime indemnitaire plus favorable que celui des agents équivalents des départements ;

– d’autre part de la contradiction entre cette proposition et les orientations retenues par la loi n° 2013-595 du 8 juillet 2013 d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République, qui vise à un rapprochement entre l’école primaire et le collège et à une meilleure transition entre les lycées et l’enseignement supérieur ;

– et enfin de la lourdeur de la gestion de 5 274 collèges qui risquerait de fragiliser la vocation opérationnelle des régions dont le projet de loi renforce dans le même temps la mission stratégique pour le développement économique, l’emploi et l’innovation.

Cette suppression a été confirmée dans le texte adopté par le Sénat le 27 janvier, le Gouvernement renonçant à soumettre au vote l’amendement de rétablissement qu’il avait déposé. À cette occasion, le secrétaire d’État à la réforme territoriale M. André Vallini a concédé que « les collèges n’ont pas vraiment à voir avec la compétitivité des territoires », indiquant que l’essentiel était de générer sur ce plan « des économies d’échelle ». Cet objectif lui apparaissant « sur le point en passe d’être atteint par différentes collectivités » dans leurs efforts de mutualisation, il a conclu en estimant que « l’attente du Gouvernement peut être considérée comme satisfaite ».

3.  La position de la Commission

Le rapporteur s’est efforcé d’apprécier l’opportunité du transfert des collèges aux régions au regard des trois ambitions décisives que sont à ses yeux :

– la cohérence avec les grandes priorités fixées à l’Éducation nationale ;

– la modernisation de notre architecture territoriale grâce à l’affirmation de grandes régions stratèges du développement économique au sens large et l’ancrage des départements, en l’absence de consensus pour leur disparition, dans leurs missions décisives de solidarité et de proximité ;

– la nécessité de rationaliser les dépenses publiques en recentrant chacun sur ce qu’il peut efficacement apporter à nos concitoyens au niveau le plus pertinent.

Or, comme cela a été résumé dans l’exposé général, la confrontation de l’article 12 du projet de loi initial à ces trois exigences ne permet pas de conclure à la nécessité d’un tel transfert.

Les nouvelles continuités de l’Éducation, centrée à l’école et au collège sur l’acquisition du socle commun et, aux lycées et dans le supérieur, sur une orientation réussie et épanouissante pour chacun, vont à l’encontre de la reformation, même limitée aux charges matérielles, d’un bloc du secondaire.

Le risque est réel que l’ampleur des tâches de gestion courante induite par le transfert des collèges et de leurs ATTEE détourne l’administration régionale de sa vocation opérationnelle et stratégique et distende, par la réduction du nombre et l’éloignement géographique des élus concernés, les liens entre les acteurs de l’éducation et les collectivités, alors même que leur étroite association est l’un des conditions essentielles pour réussir la refondation de l’école.

Il demeure néanmoins que des progrès peuvent être faits dans la mutualisation, par les collectivités concernées, des moyens qu’elles mobilisent pour des tâches dont la nature ne diffère pas selon qu’elles sont exercées dans les collèges ou les lycées.

En outre, une mobilisation commune des forces de chacun pourrait utilement renforcer les possibilités de mobilité, de formation et de diversification des missions des agents concernés et permettre aux gestionnaires d’échanger et de promouvoir les meilleures pratiques à l’égard de personnels dont les problématiques spécifiques appellent des réponses homogènes.

Or, en dépit d’un lent développement des expériences de mutualisation sur le terrain, en particulier s’agissant de la restauration, le rapporteur pour avis déplore que les collectivités n’aient pas pleinement exploré les possibilités que leur accorde leur liberté de conclure des conventions sur la mobilisation commune de tout ou partie de leurs moyens financiers et humains.

Quelques grandes expériences réussies militent pourtant pour un renforcement de leur coopération.

À titre d’exemple, les conseils généraux de Seine-Maritime et de l’Eure et le conseil régional de Haute-Normandie ont très tôt mis en place un instrument de gestion commune des ATTEE, dénommé 276, qui a d’abord pris la forme d’un portail informatique. Chaque collectivité s’est engagée sur un aspect de la gestion des personnels. La Seine-Maritime s’est ainsi chargée de constituer un vivier commun de recrutement et de mobilité, sa cellule « recrutement/mobilité » assurant la publicité des appels à candidature et conduisant toutes les procédures de pré-recrutement. La région s’est pour sa part concentrée sur les opérations de formation des agents et sur la constitution d’équipes mobiles susceptibles d’effectuer tous les travaux d’urgence dans les lycées et les collèges. Le département de l’Eure s’est quant à lui concentré sur l’action sociale et sur la mutualisation des visites médicales.

Sans aller aussi loin, des conventions comparables ont été conclues dans de nombreux territoires, notamment entre les collectivités d’Alsace pour mettre en place une gestion informatisée commune des opérations de mobilité, ou entre celles du Nord afin que tous les agents de l’académie de Lille soient informés des postes à pourvoir dans les collèges et les lycées.

Dans ce contexte prometteur mais perfectible, le rapporteur pour avis juge utile de donner une forte impulsion à la mutualisation.

Pour avancer, il estime nécessaire d’identifier un responsable, chargé de préparer, de proposer et d’animer les actions communes. L’esprit du projet de loi plaide pour que cet acteur soit la région, l’échelon de la stratégie et de la planification.

Dans cet esprit, la commission a adopté un amendement du rapporteur pour avis qui propose de confier aux régions la charge de préparer, en qualité de chef de file, des actions communes de mutualisation en introduisant dans la liste des compétences mentionnées à ce titre au II de l’article L. 1111-9 du code général des collectivités territoriales « l’enseignement secondaire ».

Une telle mention signifierait que le législateur considère que l’exercice des compétences aujourd’hui reconnues aux régions dans les lycées et aux départements dans les collèges « nécessite le concours de plusieurs collectivités ».

Cela ne serait pourtant pas une innovation totale. Dans les faits, comme cela a été expliqué dans l’exposé général, l’article L. 214-1 du code de l’éducation prévoit dès à présent que les régions élaborent, après consultation des départements, les schémas prévisionnels des formations des collèges et de l’ensemble des lycées qui recouvrent les investissements ensuite assumés dans le secondaire par les deux niveaux de collectivités.

Surtout, un élan décisif serait ainsi donné à l’exercice en commun de métiers similaires.

En conséquence, conformément à l’article L. 1111-9-1 du code général des collectivités territoriales :

– la région serait chargée d’élaborer un projet de convention territoriale d’exercice concerté des compétences en matière d’enseignement secondaire, fixant les objectifs de rationalisation et les modalités de l’action commune ; ce projet pourrait comporter des délégations de compétence entre les collectivités, prévoir la création de services unifiés ou plus modestement détailler des modalités concrètes de mutualisation des moyens passant par exemple par la constitution d’équipes mobiles communes d’entretien ;

– ce projet serait débattu dans la CTAP précitée ;

– conformément au principe de libre administration des collectivités, ces conventions ne seraient bien sûr opposables qu’aux régions et départements dont les organes délibérant décideraient de les approuver.

*

La Commission examine, en discussion commune, les amendements AC22 du rapporteur pour avis et AC4 de M. Hervé Féron.

M. le rapporteur pour avis. Je ne reviens pas sur les raisons qui m’ont conduit à renoncer au transfert des collèges aux régions. L’amendement que je vous propose dégage toutefois une voie alternative pour tirer parti des opportunités considérables que recèle l’exercice, pour les départements et les régions, de métiers comparables dans les collèges et les lycées. J’ai décrit dans mon rapport plusieurs expériences concrètes qui ont donné sur le terrain des résultats remarquables. Il m’apparaît utile de donner une nouvelle impulsion à ces mutualisations.

Pour avancer, je crois nécessaire d’identifier une force de proposition qui pourrait être opportunément la région, en raison de ses missions stratégiques. Je propose que la loi mentionne la possibilité de conduire par convention des actions communes et de mutualisation de services entre les collectivités pour l’enseignement secondaire. À cette fin, cet amendement confie à la région, consacrée chef de file sur ces enjeux, la responsabilité d’élaborer un projet de convention d’exercice partagé de compétence, qui serait ensuite débattu par la CTAP et librement ratifié par les conseils régionaux et généraux.

L’amendement AC4 de M. Hervé Féron est retiré.

M. Benoist Apparu. Je partage totalement l’avis de notre rapporteur dans le cadre de son rapport, mais un peu moins au regard de son amendement, qui essaie de trouver une voie médiane entre différentes préconisations.

Il y a quelques mois, nous avons voté la loi relative à la refondation de l’école créant un continuum du primaire au collège. En ce moment même, est en cours une mission d’information dont l’objectif est de créer un continuum bac moins trois à bac plus trois, soit un rapprochement entre le lycée et l’enseignement supérieur. Des blocs sont en train de se dessiner, et le sens de l’histoire est de rapprocher le primaire du collège et le lycée du début de l’enseignement supérieur. Nous sommes nombreux, toutes tendances confondues, à approuver cette tendance.

Or on ne tire pas ici les conséquences de ces choix. Le risque est d’avoir des rattachements de collectivités locales différents de ce que nous souhaiterions sur le plan pédagogique, ce que M. Travert indique d’ailleurs dans son rapport. Mais son amendement ne va pas au bout de la logique. Il donne le chef de filat sur le collège à la région, alors qu’il semblerait judicieux, notamment en présence de métropoles, de communautés urbaines ou de communautés d’agglomération relativement conséquentes, de rattacher le collège à une collectivité infra-départementale pour rapprocher la gestion du collège de celle des écoles primaires.

On va me répondre à juste titre que les lycées et les collèges sont sous statut d’établissement public local d’enseignement (EPLE), ce qui n’est pas le cas du primaire. Dès lors, peut-être conviendrait-il d’envisager de transformer les écoles primaires en EPLE du premier degré, voire d’autoriser l’expérimentation de créer des écoles du socle commun, à savoir des EPLE rassemblant école primaire et collège.

M. Frédéric Reiss. L’analyse de Benoist Apparu est exacte. Dans la présentation du rapport, nous avons bien entendu que le bloc du premier degré, c’est-à-dire la liaison CM2-sixième, était plus large que ce que nous avions voté dans la loi de refondation. C’est l’occasion de s’interroger, sachant que sur le terrain, ce sont bien les collèges qui sont aujourd’hui de la compétence des départements. Nous sommes d’accord sur ce point.

M. le rapporteur pour avis. Nous n’imposons rien. Les collèges sont de la responsabilité des départements : cela figure dans le texte issu du Sénat et nous avons la volonté de continuer dans ce sens. Il ne s’agit pas de toucher aux aspects pédagogiques. Il s’agit de permettre aux régions de mutualiser, si elles le souhaitent, certains éléments logistiques ou matériels, comme la préparation des repas, l’achat de véhicules ou de matériel informatique et les travaux de petit entretien par des équipes mobiles. Nous ne sommes pas sur le plan pédagogique, ce qui pourrait effectivement remettre en cause l’école du socle que nous avons mise en place à travers la loi pour la refondation de l’école.

M. Benoist Apparu. La loi de refondation, malheureusement, n’a pas mis en place l’école du socle !

J’avais compris la nuance entre l’aspect pédagogique et les mutualisations. C’est précisément cette incohérence d’architecture des responsabilités des collectivités locales qui me pose question, avec, d’un côté, la mutualisation des collèges et lycées sur le plan du bâti, des sorties scolaires, de la restauration, et peut-être d’un certain nombre d’éléments « périphériques » à la pédagogie, et, d’un autre côté, tout ce qui concerne le pédagogique.

Je préférerais une cohérence globale. On pourrait, par exemple, articuler les mutualisations que vous préconisez entre départements et communauté urbaine, communauté d’agglomération ou métropole, pour avoir une cohérence d’architecture entre le « matériel » et le pédagogique.

La Commission adopte l’amendement AC22.

Elle exprime, ce faisant, un avis favorable au rétablissement de l’article 12 ainsi rédigé.

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Après l’article 12

L’amendement AC5 de M. Hervé Féron est retiré.

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Article 12 bis A
(art. L. 214-2 et L. 614-3 du code de l’éducation)

Rôle des régions dans la planification des formations d’enseignement supérieur et de la recherche

Le Sénat, à l’initiative de sa commission des Lois, a adopté un article additionnel dont l’objet est de renforcer l’implication des régions dans la planification des formations de l’enseignement supérieur.

1.  Le droit en vigueur

La loi n° 2013-660 du 22 juillet 2013 relative à l’enseignement supérieur et à la recherche (ESR) a procédé à une importante rationalisation des politiques publiques de l’enseignement supérieur et de la recherche.

En premier lieu, pour mettre en cohérence le développement des formations et doter le pays d’un réel agenda stratégique, elle a institué à l’article L. 123-1 du code de l’éducation une « stratégie nationale de l’enseignement supérieur » comportant une programmation pluriannuelle des moyens et définissant les principes de répartition de moyens entre les acteurs, élaborée et révisée tous les cinq ans sous la responsabilité du ministre chargé de l’enseignement supérieur.

Son adoption est précédée de la consultation des partenaires culturels, sociaux et économiques, de la communauté scientifique et d’enseignement supérieur, des ministères concernés et des collectivités territoriales. Elle est transmise aux commissions permanentes compétentes du Parlement.

Une même procédure a été mise en place pour l’élaboration parallèle d’une « stratégie nationale de la recherche ».

En second lieu, la loi précitée a reconnu le rôle particulier joué par les collectivités, en en leur sein en particulier la région, dans la programmation et le financement de l’enseignement supérieur et de la recherche.

Les collectivités assument en effet aujourd’hui 10,5 % du financement des dépenses d’éducation pour le supérieur (en incluant les crédits consacrés à l’apprentissage). En moyenne annuelle entre 2010 et 2013, sur le 1,2 milliard d’euros qu’elles ont consacrés à ces activités, dont 70 % assumés par les régions, 68 % ont bénéficié directement aux établissements de l’enseignement supérieur, parmi lesquels 34 % ont été affectés à des opérations immobilières, 14 % à des projets de recherche, 8 % au fonctionnement des laboratoires et 10 % aux aides au chercheur.

La loi ESR du 22 juillet 2013 a aussi veillé à mieux coordonner les initiatives des collectivités territoriales.

L’article 214-2 du code de l’éducation précise ainsi désormais que la région « définit [alors qu’elle n’en avait jusque-là que la faculté, par ailleurs peu sollicitée] un schéma régional de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation qui détermine les principes et les priorités de ses interventions ».

Conformément à sa responsabilité de « chef de file » sur ces questions, en application de l’article L. 1111-9 du code général des collectivités territoriales, dans sa version résultant de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, la région doit veiller à « associer » les collectivités territoriales et les EPCI accueillant des sites universitaires ou de recherche à l’élaboration de ce schéma.

Afin de donner aux régions l’ensemble des instruments nécessaires à une planification efficace, la loi leur a confié la coordination de toutes les « initiatives territoriales visant à développer et diffuser la culture scientifique, technique et industrielle, notamment auprès des jeunes publics », en transférant à partir du 1er janvier 2014 les crédits que l’État accordait à ces initiatives.

Ce nouvel équilibre repose sur une nécessaire cohérence entre les priorités définies par l’État et celles retenues par les régions.

À cet effet, l’article L. 214-2 du code de l’éducation précise que les schémas régionaux de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation sont définis « en cohérence avec les stratégies nationales de l’enseignement supérieur et de recherche ».

2.  Les modifications apportées par le Sénat

La commission des Lois du Sénat a souhaité conforter la portée des schémas régionaux.

Elle a d’abord proposé que ces schémas soient pris en compte dans l’accréditation des établissements supérieurs prévue par l’article L. 613-1 du code de l’éducation.

Cette disposition, qui entamait le principe d’autonomie des universités et mettait en cause les prérogatives de l’État dans l’organisation de l’enseignement supérieur, s’est heurtée à l’hostilité du Gouvernement. Elle a été retirée par le rapporteur de la commission des Lois, le Sénat se contentant de modifier la rédaction de l’article L. 214-2 en disposant que les schémas régionaux s’inscrivent « dans le respect » et non plus « en cohérence avec » les stratégies nationales.

En revanche, la Haute assemblée n’a pas renoncé à renforcer l’implication des régions dans la planification de l’offre générale d’enseignement supérieur. Le II du présent article additionnel propose ainsi de modifier l’article L. 614-3 du code de l’éducation afin que la carte nationale des formations supérieures et de recherche ne puisse désormais être arrêtée et révisée par le ministre chargé de l’enseignement supérieur qu’après l’approbation – et non la simple consultation aujourd’hui prévue – des régions pour ses aspects concernant leur territoire.

Cette carte est un instrument stratégique important, qui doit, aux termes de l’article L. 613-1, être « pris en compte » dans l’accréditation des établissements, au même titre que « le lien entre enseignement et recherche », « la qualité pédagogique », « les objectifs d’insertion professionnelle » et les « liens entre les équipes pédagogiques et les représentants des professions concernées par la formation ».

3.  La position de la Commission

Le rapporteur pour avis souscrit à l’objectif de garantir que les priorités définies par les régions pour l’enseignement supérieur et la recherche, à laquelle elles apportent un financement important, soient pleinement prises en compte par l’État lorsqu’il organise la répartition des formations.

Le nouveau rôle reconnu à cette collectivité en matière de formation professionnelle et d’orientation milite en effet pour qu’État, régions et établissements supérieurs d’enseignement et de recherche trouvent les voies d’une coordination étroite et efficace.

En revanche, il lui apparaît tout aussi essentiel de préserver les prérogatives de l’État, garant de l’enseignement supérieur, comme celles des universités autonomes.

Dans la mesure où l’article additionnel prévoit bien que les schémas régionaux respectent les stratégies d’enseignement supérieur et de recherche définies par le Gouvernement, le rapporteur pour avis estime que cette préséance est efficacement assurée.

En outre, dans ce souci de cohérence de l’action publique, la commission a adopté un amendement de M. Hervé Féron prévoyant que les interventions des autres collectivités territoriales en matière d’enseignement supérieur et de recherche « prennent en compte » les orientations des schémas régionaux de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation.

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La Commission examine, en discussion commune, les amendements AC6 de M. Hervé Féron et AC9 de Mme Isabelle Attard.

Mme Sandrine Doucet. Il s’agit de renforcer la cohérence du chef de filat des régions, prévu par la loi MAPTAM, en complétant la portée du schéma régional d’enseignement supérieur et de recherche élaboré avec les autres collectivités, afin que les principes et les priorités des interventions de toutes les collectivités compétentes soient présentés et respectent ces schémas.

Mme Isabelle Attard. Il semble en effet logique que les interventions des collectivités autres que la région soient faites en lien avec le schéma régional de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation. La portée de ce schéma, déjà élaboré avec l’ensemble des collectivités, n’en sera que confortée.

M. le rapporteur pour avis. Les deux amendements assurent la cohérence entre les initiatives des collectivités dans l’enseignement supérieur et le schéma régional. Les précisions suggérées ne sont pas inutiles et s’intègrent bien dans notre ambition de faire des régions des acteurs importants de l’enseignement supérieur. Avis favorable, étant entendu que l’amendement AC6 satisfait l’AC9.

La Commission adopte l’amendement AC6.

En conséquence, l’amendement AC9 tombe.

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 12 bis A modifié.

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Article 12 bis B
(art. L. 216-11 du code de l’éducation [nouveau])

Soutien des collectivités territoriales à l’enseignement supérieur

Cet article, introduit par le Sénat à l’initiative de sa commission des Lois, a pour objet de permettre aux collectivités territoriales de continuer à financer les sites, les établissements d’enseignement supérieur et de recherche et les œuvres universitaires et scolaires implantés sur leur territoire.

Cette précision est rendue nécessaire par la suppression de la clause de compétence générale qui prive de fondement légal les nombreuses subventions aujourd’hui accordées par les collectivités aux acteurs de l’enseignement supérieur.

Les dépenses des départements, des communes et EPCI consacrées à la recherche et aux technologies s’établissent à près de 275 millions d’euros, au profit essentiellement des établissements d’enseignement supérieur. Elles découlent souvent de très anciens partenariats, comparables à celui qui lie depuis les lois républicaines des années 1880 les départements aux écoles normales supérieures.

Le rapporteur pour avis souhaite toutefois que la cohérence de ces actions protéiformes soit assurée.

Cela paraît être le cas puisque le rôle de coordination et la vocation prioritaire des régions sont préservés et renforcés dans ce domaine :

– grâce à la planification des actions qu’elles conduisent via l’adoption des schémas régionaux de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation décrits supra ;

– au moyen de la mission de « chef de file » que le II de l’article 1111-9 du code général des collectivités territoriales attribue aux régions pour l’exercice des compétences communes relatives au soutien à l’enseignement supérieur.

Dans ce contexte rationnalisé, le rapporteur pour avis estime utile d’autoriser les collectivités à maintenir des financements qui jouent un rôle précieux dans les territoires.

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La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 12 bis B sans modification.

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Article 12 ter
(art. L. 114-1 à L. 114-17 [nouveaux] et L. 211-1 du code du sport, art. L. 4321-1 du code général des collectivités territoriales, art. 21 de la loi n° 90-1067 du 28 novembre 1990)

Régionalisation des centres de ressources, d’expertise et de performance sportive (CREPS)

Le présent article, introduit par le Sénat à l’initiative du Gouvernement, a pour objet de confier aux régions une partie des compétences de l’État en ce qui concerne l’organisation et le fonctionnement des centres de ressources, d’expertise et de performance sportive (CREPS).

1.  Le droit en vigueur

Les missions, l’organisation et le fonctionnement des dix-sept CREPS qui existent aujourd’hui sont définis aux articles D. 211-69 et suivants du code du sport.

Ces établissements publics de formation exercent deux missions principales : la formation et la préparation des sportifs de haut niveau, en lien avec les fédérations sportives ; l’organisation de formations professionnelles initiales et continues dans les domaines des activités physiques ou sportives – en particulier dans les activités à environnement spécifique, comme le kitesurf, la spéléologie ou la plongée sous-marine, ou d’activités rares – et de l’animation. Ils accueillent ainsi chaque année près de 3 000 sportifs et 22 300 stagiaires (5).

Ils peuvent en outre contribuer à l’animation territoriale dans leur champ de compétence, en lien avec les associations et les collectivités, mais également mener des actions dans le domaine de la recherche et de la coopération internationale. Ils assurent également le fonctionnement des trois pôles ressources nationaux (« Sport et handicaps », « Sports de nature » et « Sport - Éducation - Mixités et citoyenneté »). Enfin, ils contribuent à la formation des cadres des fédérations sportives agréées, des agents publics, des bénévoles et des salariés des associations.

Les CREPS sont dirigés par un directeur nommé par le ministre en charge des sports et administrés par un conseil d’administration composé de vingt membres, parmi lesquels le directeur régional de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale de la région où se situe le siège du CREPS, le recteur de l’académie concernée, le président du comité régional olympique et sportif, le président du conseil régional, le président du conseil général et un représentant de l’échelon communal (6).

Les CREPS sont aujourd’hui financés pour partie par l’État, par le biais d’une subvention pour charges de service public, et pour partie par des ressources propres. Pour l’année 2014, le budget prévisionnel des CREPS doit ainsi bénéficier de 51,3 millions d’euros de subventions étatiques auxquelles s’ajoutent 42,7 millions d’euros de ressources propres et de 5 millions d’euros issus d’autres subventions, soit un total de 99 millions d’euros (7).

2.  Le contenu de l’article introduit par le Sénat

Le I du présent article prévoit d’introduire, au sein du chapitre IV du titre Ier du livre Ier du code du sport, dix-sept articles portant sur la répartition des compétences entre l’État et les régions en ce qui concerne les CREPS.

–– Une première section, comportant les articles L. 114-1 à L. 114-9, définit les missions des CREPS et opère une répartition des compétences entre l’État et les régions.

Les CREPS, désormais définis comme des « établissements publics locaux de formation du sport, de la jeunesse et de l’éducation populaire », sont créés ou fermés par un arrêté du ministre chargé des sports sur proposition de la région. Le Sénat a introduit une disposition prévoyant que chaque région métropolitaine a vocation à accueillir au moins l’un de ces établissements sur son territoire (8). En effet, compte tenu des fermetures récentes et de la réforme des régions, la répartition des CREPS sur le territoire est assez inégale, le Nord-Ouest du territoire étant moins bien doté que d’autres régions.

Si le rapporteur s’interroge sur la portée normative de la précision introduite par le Sénat, il ne peut qu’y être favorable sur le fond ; comme cela a été indiqué au cours des débats devant le Sénat, cette disposition tend à fixer un objectif d’égalité territoriale à moyen terme plus qu’à imposer la réouverture immédiate des CREPS de Basse-Normandie, de Bretagne et de Corse, qui existent aujourd’hui sous d’autres formes juridiques (cf. infra).

Ces nouveaux établissements publics exerceront certaines compétences, de façon obligatoire, au nom de l’État (9) : la formation et la préparation des sportifs de haut niveau ; la participation au réseau national du sport de haut niveau et le fonctionnement des pôles nationaux de ressources et d’expertise ; la formation initiale et continue des personnes qui gèrent, animent, encadrent et enseignent les activités physiques et sportives, ainsi que des personnes intervenant dans le domaine de la jeunesse et de l’éducation populaire ; la mise en œuvre de la formation initiale et continue des agents de l’État exerçant leurs missions dans les domaines du sport, de la jeunesse et de l’éducation populaire. Ainsi, les CREPS se trouvent confortés dans leurs missions nationales dans les domaines du sport de haut niveau et de la formation professionnelle, notamment en ce qui concerne les formations rares ou à environnement spécifique.

Les CREPS pourront également exercer, de façon facultative et au nom de la région (10), diverses missions tendant à assurer l’accompagnement des sportifs de niveau régional vers le sport de haut niveau, à promouvoir le sport pour tous et le sport comme facteur de santé, à développer des activités en faveur de la jeunesse et de l’éducation populaire, et à mettre en œuvre des offres de formation aux métiers du sport et de l’animation en rapport avec les besoins identifiés au niveau régional. Les CREPS, qui sont déjà les interlocuteurs naturels des régions en matière de formation professionnelle, pourront ainsi devenir de véritables outils au service de la politique sportive régionale, tant dans le domaine du sport de haut niveau que du sport pour tous et de l’éducation populaire.

Les nouveaux articles L. 114-4 à L. 114-6 créés par le texte du Sénat opèrent une répartition des compétences entre l’État et les régions qui disposeront d’un CREPS.

L’État aura la charge de la rémunération des agents de l’État notamment en charge de la gestion administrative, de la formation professionnelle et du sport de haut niveau, des dépenses de fonctionnement directement liées à la pédagogie, à la recherche et au « partage d’expériences et de pratiques » – seront par exemple à la charge de l’État les dépenses liées à l’organisation d’un séminaire de préparation mentale pour les sportifs, ou encore au développement d’un enseignement à distance –, et de l’acquisition et de la maintenance des matériels informatiques et des logiciels (11). Ainsi, la cohérence de la politique nationale en matière de sport de haut niveau et de formation professionnelle dans le domaine des activités physiques ou sportives devrait être assurée.

Les régions, quant à elles, devront nécessairement financer les dépenses en lien avec le cadre bâti – la construction, la reconstruction, l’extension, la maintenance, les grosses réparations, l’entretien, l’équipement et le fonctionnement des locaux – ainsi que l’accueil, la restauration et l’hébergement des sportifs et des stagiaires (12), à l’exception des missions d’encadrement et de surveillance. Dans cette optique, la propriété du patrimoine immobilier des CREPS (13), de même que la gestion des quelque 380 agents devant leur permettre d’accomplir leurs missions (14), leur seront transférées.

Ainsi, cette réforme n’est nullement synonyme d’un désengagement de l’État, celui-ci devant assumer la charge financière de près des deux tiers du personnel actuel des CREPS comme des dépenses de fonctionnement liées à l’exercice des missions nationales, soit environ 60 % du coût total des CREPS (15).

Au plan financier, le transfert de compétences de l’État vers les régions sera, en application de l’article 72-2 de la Constitution (16), obligatoirement compensé, selon des modalités fixées par l’article 37 du présent projet de loi (cf. encadré infra). Ainsi, ce sont environ 41,7 millions d’euros qui devraient être compensés aux régions, qui, d’après les informations fournies au rapporteur, seraient ventilés de la façon suivante : 19,6 millions d’euros correspondant à la moyenne triennale (2010-2012) des dépenses de fonctionnement et d’équipement des CREPS ; 12,6 millions de dépenses de personnels ; 9,4 millions représentant la moyenne décennale (2003-2012) des dépenses d’investissement réalisées par les CREPS. Ces évaluations sont prévisionnelles et ont vocation à être actualisées avec des données budgétaires plus récentes.

Les modalités de la compensation financière du transfert de compétences aux régions

L’article 37 du projet de loi, tel qu’il a été amendé par le Sénat à l’initiative du Gouvernement, fixe des modalités de compensation financière spécifiques concernant le transfert des compétences relatif aux CREPS.

Contrairement au principe fixé pour les autres transferts de compétences prévus par le présent texte, la compensation financière ne sera pas minorée, en ce qui concerne les CREPS, du montant de leurs ressources propres.

Par ailleurs, les dépenses d’investissement et de personnel seront compensées par l’attribution d’impositions de toute nature – d’après les informations fournies au rapporteur, il s’agira d’une part de la taxe intérieure sur la consommation des produits énergétiques (TICPE), directement versée au budget des conseils régionaux –, tandis que les dépenses d’équipement et de fonctionnement seront compensées aux régions par l’affectation d’une part des ressources propres des CREPS.

Ce schéma de compensation est cohérent avec le modèle économique actuel des CREPS, qui financent la majorité de leurs dépenses de fonctionnement et une partie de leurs dépenses de personnel par le biais de ressources propres.

Il est également à noter que le Gouvernement a indiqué, lors des débats au Sénat, que l’État accompagnera financièrement les opérations d’investissement des régions par le biais du Centre national pour le développement du sport (CNDS) après leur décentralisation. Compte tenu de la diminution de la capacité financière du CNDS en matière de subventions d’équipement, le rapporteur s’interroge sur la portée réelle de cette annonce qui, bien que bienvenue, mérite d’être précisée.

–– Une seconde section, réunissant les articles L. 114-10 à L. 114-17, régit l’organisation des CREPS.

La gouvernance des CREPS est notamment modifiée pour refléter la nouvelle répartition des compétences entre l’État et les régions (17). Alors que le président du conseil d’administration est aujourd’hui nommé par le ministre en charge des sports parmi les trois personnalités désignées par lui, il sera désormais nommé par le président du conseil régional, parmi les personnalités qualifiées qu’il aura choisies pour siéger au sein du conseil d’administration. De la même façon, le conseil d’administration, composé de vingt ou vingt-cinq membres en fonction de l’importance ou de la spécificité du CREPS, comptera en son sein six à sept représentants de la région et des autres collectivités, et deux à trois personnalités qualifiées désignées par le président du conseil régional. Par ailleurs, le président de la région concernée donnera son avis préalablement à la nomination du directeur du CREPS par le ministre chargé des sports. Même si cet avis n’est pas liant, il permettra de créer un dialogue, entre l’État et la région, sur la nomination du directeur du CREPS. Le poids des régions dans la gouvernance des CREPS est donc considérablement renforcé.

L’article L. 114-12 définit la nature des ressources dont peuvent disposer ces établissements publics pour l’exercice de leurs missions. Outre les ressources issues de leurs tutelles étatique et régionale, les CREPS pourront, comme aujourd’hui, disposer de ressources propres, celles-ci pouvant provenir de la vente de biens, de legs, de la rémunération de services, de droits d’inscription, de l’hébergement, de la restauration ou encore de subventions diverses.

Les nouveaux articles L. 114-13 et L. 114-14 ont pour objet de définir le régime des actes des CREPS, notamment en ce qui concerne leur contrôle budgétaire et juridique.

L’article L. 114-15 applique aux CREPS le régime retenu pour les établissements publics locaux d’enseignement en matière de biens mobiliers, tandis que l’article L. 114-16 comprend diverses dispositions relatives aux agents de l’État ou de la région affectés à un CREPS et placés sous l’autorité de son directeur, et aux objectifs de performance nationaux et régionaux fixés aux CREPS par leurs deux tutelles.

–– Les II, III et IV du présent article opèrent différentes modifications au sein du code du sport, du code général des collectivités territoriales et de la loi du 28 novembre 1990 relative à la fonction publique territoriale (18) afin de tenir compte de la création d’une nouvelle catégorie d’établissement public.

Enfin, le V du présent article fixe au 1er janvier 2016 la date d’entrée en vigueur de ces dispositions.

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Les amendements AC17 et AC18 de Mme Sylvie Tolmont sont retirés.

La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 12 ter sans modification.

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Article 12 quater
(art. L. 211-1 et L. 115-1 [nouveau] du code du sport)

Dispositions relatives aux anciens CREPS de Corse, de Basse-Normandie et de Bretagne et au recrutement d’assistants d’éducation
par les établissements publics de formation

Le présent article, également ajouté par le Sénat à l’initiative du Gouvernement, a deux objets distincts : clarifier la situation patrimoniale des anciens CREPS d’Ajaccio, d’Houlgate et de Dinard, et permettre aux nouveaux établissements publics locaux de formation de recruter des assistants d’éducation.

1.  La cession à titre gratuit du patrimoine immobilier des anciens CREPS à la collectivité territoriale de Corse, à la région Basse-Normandie et à la région Bretagne

Le I du présent article vise à clarifier la situation, au plan patrimonial, des anciens CREPS de Corse, de Basse-Normandie et de Bretagne. Leurs fermetures en 2009 et 2010 avaient donné lieu à différents protocoles d’accord entre l’État et les acteurs locaux concernés pour assurer la poursuite de leur activité sous d’autres formes.

Ainsi, en 2010, le Centre sportif de Normandie a vu le jour sous la forme d’une association à laquelle participent notamment la région Basse-Normandie, le département du Calvados et la commune d’Houlgate, tandis que le Centre de l’excellence sportive de Bretagne, un groupement d’intérêt public associant notamment l’État et la région Bretagne, a poursuivi l’activité du CREPS de Dinard. En Corse, la fermeture du CREPS d’Ajaccio a conduit à la création d’un syndicat mixte, le Centre du sport et de la jeunesse de Corse, réunissant la collectivité territoriale de Corse et le conseil général de la Corse du Sud.

Le I du présent article prévoit de transférer à titre gratuit les locaux jusqu’alors mis à disposition par l’État au profit de la collectivité territoriale de Corse et des régions de Basse-Normandie et de Bretagne, afin de leur permettre de mener les investissements nécessaires au maintien et au développement de leurs activités. Toutefois, le transfert ne pourra être opéré qu’à deux conditions : d’une part, que les biens en question demeurent affectés au service public du sport pendant au moins vingt ans et, d’autre part, que les collectivités bénéficiaires élaborent un projet d’établissement.

Si les biens transférés cessaient d’être affectés au service public du sport avant l’expiration du délai de vingt ans, et sauf à ce qu’une structure de dimension équivalente ait été créée exclusivement dans ce but, alors l’État pourrait convenir avec la collectivité bénéficiaire du retour du bien dans le patrimoine de l’État ou du paiement, par la collectivité bénéficiaire, de la valeur vénale du bien en question à l’État.

2.  Le recrutement d’assistants d’éducation par les établissements publics locaux de formation du sport, de la jeunesse et de l’éducation populaire

Le II du présent article modifie l’article L. 211-1 du code du sport par ailleurs modifié par l’article 12 ter, afin de permettre aux établissements publics de formation relevant de l’État – l’Institut national du sport, de l’expertise et de la performance (INSEP), l’Institut français du cheval et de l’équitation, l’École nationale de voile et des sports nautiques et l’École nationale des sports de montagne – et aux CREPS de recruter des assistants d’éducation dans les mêmes conditions que les collèges et lycées.

Ce dispositif, qui permet de recruter du personnel pour assurer des fonctions de surveillance et d’encadrement pour une durée maximale de trois ans renouvelable une fois, bénéficie en particulier aux étudiants boursiers. Les assistants d’éducation recrutés et rémunérés par les CREPS seront donc chargés d’une mission incombant à l’État (19).

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La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 12 quater sans modification.

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Article additionnel après l’article 12 quater
Définition des missions et pouvoirs d’investigation de l’inspection générale de la jeunesse et des sports

La commission a adopté, à l’initiative du rapporteur, un amendement visant à définir, dans la loi, les missions et les pouvoirs d’investigation de l’inspection générale de la jeunesse et des sports.

En effet, les missions de cette inspection ne sont aujourd’hui définies que par le biais d’un décret (20), qui plus est de façon incidente, puisque le décret en question a trait au statut des membres de l’inspection générale de la jeunesse et des sports (IGJS). La nature règlementaire comme le caractère extrêmement succinct de la définition des missions et pouvoirs de l’IGJS ne permet pas à ses membres de contrôler et d’évaluer dans des conditions satisfaisantes les politiques publiques dans les domaines de la jeunesse, du sport, de l’éducation populaire et de la vie associative.

En effet, contrairement à d’autres inspections générales, comme l’inspection générale des affaires sociales, l’IGJS n’est actuellement dotée d’aucun pouvoir d’investigation reconnu par la loi. Dès lors, en l’absence de base légale, il existe un risque juridique non négligeable que les contrôles diligentés par l’IGJS puissent être contestés.

C’est pourquoi le présent article vise à remédier à la situation en définissant, dans son I, les domaines d’intervention de l’IGJS que sont la jeunesse, le sport, l’éducation populaire et la vie associative. Le I du présent article énonce aussi les missions classiques de ce type de corps, à savoir le contrôle et l’inspection des personnels et des activités de services centraux et déconcentrés du ministère en charge de ces politiques, et des organismes relevant de sa tutelle.

Le II du présent article précise le droit existant en ce qui concerne les organismes soumis aux vérifications de l’IGJS, qu’il s’agisse de ceux recevant des concours de l’État ou de ses établissements publics, des collectivités publiques ou de l’Union européenne ou bien des organismes placés sous la tutelle du ministère en charge de la jeunesse, du sport, de l’éducation populaire et de la vie associative ou bénéficiant d’une délégation, d’une habilitation, d’une accréditation ou d’un agrément délivré par l’autorité administrative dans les domaines précités.

Le 5° du présent article étend également le contrôle de l’IGJS aux organismes qui reçoivent des concours des organismes soumis aux vérifications de l’IGJS au titre des alinéas précédents. Au total, le champ d’intervention de l’IGJS englobe la totalité des organismes participant effectivement à la mise en œuvre des politiques publiques dans les domaines précités. Dans le cas de ces vérifications, l’IGJS opère deux types de contrôle : l’un relatif au respect des lois et règlements, particulièrement nécessaire s’agissant d’organismes accueillant du public ; l’autre relatif à l’utilisation des fonds publics versés à ces organismes, dont la destination doit être conforme au but dans lequel ils ont été versés.

Le III du présent article permet à l’IGJS de contrôler, dans le domaine de la jeunesse, du sport, de l’éducation populaire et de la vie associative, le compte d’emploi des ressources collectées auprès du public des organismes faisant appel à la générosité du public en application de la loi du 7 août 1991 (21), à l’instar de la Cour des comptes et d’autres inspections générales dans leurs domaines respectifs. Il permet également à l’IGJS d’opérer des vérifications auprès d’organismes ayant reçu tout ou partie des fonds collectés dans le cadre de ces campagnes.

Le IV du présent article donne à l’IGJS un certain nombre de prérogatives pour accomplir ses missions – libre accès aux administrations et collectivités et aux organismes soumis à ses vérifications, droit de communication, levée du secret professionnel des commissaires aux comptes des organismes contrôlés – tandis que le V du présent article étend aux contrôles de l’IGJS la sanction posée par le III de l’article 43 de la loi n° 96-314 du 12 avril 1996 portant diverses dispositions d’ordre économique et financier en cas d’obstacle à un contrôle de l’inspection générale des finances (22).

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La Commission est saisie de l’amendement AC25 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. L’inspection générale de la jeunesse et des sports (IGJS) n’a pas d’existence législative et ses missions ne sont définies qu’indirectement par le biais d’un décret sur le statut de ses membres. Afin d’adapter ces missions aux politiques aujourd’hui conduites en faveur de la jeunesse, du sport, de l’éducation populaire et de la vie associative, mais aussi de sécuriser le cadre juridique dans lequel elle contrôle les organismes qui concourent à mettre en œuvre ces politiques publiques, l’amendement AC25 tend à définir dans la loi les missions de l’IGJS. Aux missions classiques d’inspection et de contrôle des services de l’État, s’ajoutera le contrôle du respect des lois et règlements et de l’utilisation des fonds publics par les autres organismes participant à la mise en œuvre des politiques publiques.

L’IGJS pourra aussi, comme la Cour des comptes et d’autres inspections générales dans leurs domaines respectifs, contrôler la façon dont les organismes font appel à la générosité du public et utilisent les fonds collectés.

L’amendement définit également les pouvoirs d’investigation de l’IGJS, avec qui doivent pleinement coopérer les administrations de l’État, les collectivités et tous les organismes soumis à son contrôle.

M. Benoist Apparu. Nous avons trop tendance à légiférer sur des questions qui sont de nature réglementaire. L’IGJS vit depuis des années sous statut réglementaire, et tout à fait bien semble-t-il. Si cela devait changer, j’appelle votre attention sur le fait que la moindre modification, ne serait-ce qu’une virgule, devrait, à l’avenir, passer par la loi. Je ne suis pas convaincu qu’en la matière, ce soit vraiment indispensable.

M. le rapporteur pour avis. Je ne vois pas pourquoi nous priverions l’IGJS des prérogatives dont jouit aujourd’hui l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS), par exemple. Celle-ci vit depuis une vingtaine d’années sous statut législatif, lequel n’a pas particulièrement évolué, et s’en porte plutôt bien.

C’est une demande forte de la part des acteurs de terrain que sont les inspecteurs généraux de la jeunesse et des sports, que nous côtoyons tous très régulièrement sur les territoires. Les mettre sur un pied d’égalité avec l’IGAS et assurer la sécurité juridique de leurs actes me semble être une mesure de bon sens.

M. Benoist Apparu. Les notaires ne sont semble-t-il pas les seuls à faire du lobbying Les inspections générales le font donc aussi ! J’entends bien que l’IGJS souhaite voir son statut rehaussé au niveau législatif, mais l’argument de la sécurité juridique ne tient pas la route. Si l’on commence à dire que tout ce qui ressortit du décret n’est pas sécurisant sur le plan juridique, on finira par remettre en cause toute l’organisation de notre droit !

M. le rapporteur pour avis. Nous défendons le cadre juridique dans lequel évoluent les inspecteurs, qui ont besoin de voir sécurisés les différents pouvoirs qui leur sont ici octroyés.

La Commission adopte l’amendement.

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Chapitre IV
Compétences partagées dans le domaine de la culture, du sport et du tourisme
et guichets uniques

Le rapporteur pour avis estime mal choisie l’expression « guichet unique », notion qui renvoie davantage à la distribution de prestations sociales qu’à ce qui intéresse effectivement l’article 29 du projet de loi, à savoir la centralisation par une collectivité de l’instruction des demandes de financements et de l’octroi des aides et subventions. Il a donc soumis à la Commission, qui l’a adopté, un amendement remplaçant cette notion par une terminologie plus adaptée, faisant référence à la « centralisation de l’instruction et de l’octroi d’aides ou de subventions ».

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La Commission est saisie de l’amendement AC23 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Il nous a été rapporté, lors d’auditions, que l’appellation « guichets uniques » était assez mal comprise sur le terrain. Cette notion renvoie davantage à la distribution de prestations sociales qu’à ce qui intéresse effectivement l’article 29 du projet de loi, à savoir la centralisation par une collectivité de l’instruction des demandes de financement et de l’octroi des aides ou des subventions. D’où la formule de substitution proposée par l’amendement.

La Commission adopte l’amendement.

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Article 28 A
Principe de garantie des droits culturels des citoyens sur chaque territoire

Cet article est issu de l’adoption en séance publique par le Sénat d’un amendement du groupe Écologiste. Cet amendement avait reçu un avis défavorable tant de la commission des Lois que du Gouvernement, en raison de son manque de portée normative.

1.  Le contenu de l’article introduit par le Sénat

Cet article vise à affirmer le principe selon lequel, « sur chaque territoire, les droits culturels des citoyens sont garantis par l’exercice conjoint de la compétence en matière de culture, par l’État et les collectivités territoriales ».

À l’appui de cet amendement, ses auteurs ont fait valoir qu’il permettrait, en premier lieu, d’affirmer le rôle de l’État dans les politiques culturelles afin de rassurer certains acteurs du monde de la culture, inquiets de son possible désengagement au profit des collectivités territoriales. En second lieu, cet amendement aurait le mérite de qualifier le partage des compétences entre les différents niveaux de collectivités, afin de ne pas le laisser évoluer au gré des circonstances locales.

2.  La position de la Commission

S’il comprend pleinement les inquiétudes relayées par les auteurs de l’amendement et l’objectif qui sous-tend leur initiative, le rapporteur pour avis ne peut que déplorer le manque de précision des termes « sur chaque territoire » – est-ce à dire que l’on créerait de nouvelles obligations pour les petites communes ? – ou « droits culturels », dont aucune définition n’est donnée : vise-t-on une obligation faite aux collectivités d’investir dans des équipements culturels ? un droit pour les citoyens à l’accès à toutes les formes de cultures ? un droit qui leur serait reconnu à la pratique culturelle ? voire une possible mise en cause de la responsabilité des collectivités qui ne garantiraient pas l’exercice effectif de ces droits par les citoyens ?

Au total, il apparaît qu’une grande part de cet article additionnel s’apparente à une pétition de principes qui sera dépourvue de portée et de toute sanction. Sans compter, comme l’ont fait remarquer certaines des personnes entendues, qu’elle pourrait contenir en germe une possible atteinte à la liberté des créateurs et des diffuseurs. Maintenir une telle disposition dans la loi n’apparaît donc pas possible.

Le rapporteur pour avis souscrit néanmoins à l’un des objectifs défendus par les auteurs de l’amendement, à savoir la réaffirmation de la mission de l’État en matière culturelle ; la politique culturelle relève bien de la coresponsabilité de tous les échelons de collectivités publiques et il est important de le rappeler dans ce projet de loi. Il a donc proposé par amendement de réécrire l’article 28 A afin d’affirmer expressément l’exercice conjoint de la compétence en matière de culture entre l’État et les différents niveaux de collectivités territoriales, exercice conjoint dont la traduction institutionnelle – la « CTAP culture » – est d’ores et déjà prévue dans le texte (cf. article 28, infra). La Commission a jugé préférable d’étendre cette affirmation de principe à l’ensemble des compétences partagées par les différents niveaux de collectivités territoriales en vertu de l’article 28 du projet de loi ; elle a donc adopté l’amendement du rapporteur, rectifié en ce sens.

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La Commission examine l’amendement AC24 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. La rédaction de l’article 28 A adoptée par le Sénat met en avant des objectifs louables mais pose de sérieuses questions juridiques du fait de son imprécision. Au total, cet article s’apparente à une déclaration de principe dépourvue de toute sanction.

Mon amendement propose une nouvelle rédaction qui préserve l’intention des sénateurs d’affirmer l’exercice conjoint de la compétence culturelle par l’État et les collectivités territoriales.

Mme Annie Genevard. Si l’on peut souscrire à l’article 28 A dans son principe, sa transcription dans la réalité pose question.

Le chapitre s’intitule « Compétences partagées dans le domaine de la culture, du sport et du tourisme et guichets uniques ». On comprend mal pourquoi le domaine culturel est pris isolément pour traduire l’idée que ces domaines sont traités conjointement par l’État et les collectivités territoriales. Qui plus est, la nouvelle rédaction que vous proposez est redondante avec l’alinéa 2 de l’article 28, qui concerne à la fois la culture et le partage de compétences, à ceci près que l’État n’y est pas mentionné. À mon sens, il faudrait réintroduire soit l’État à l’article 28, soit les compétences partagées à l’article 28 A.

Mme Colette Langlade. Les acteurs de terrain s’inquiétaient d’un possible désengagement de l’État ou des collectivités territoriales. Grâce à cet amendement, ce couple continue de vivre.

Mme Barbara Pompili. On joue un peu sur les mots. Mais surtout, l’amendement supprime la notion de « droits culturels des citoyens », qui me paraissait être une avancée intéressante. Pourquoi supprimer cette notion ?

M. le président Patrick Bloche. Honnêtement, je ne vois pas à quoi correspond cette notion. On peut parler de droit ou d’accès à la culture pour tous, mais les droits culturels des citoyens ne sont, à mon avis, définis dans aucun texte en tant que tels. Il est donc difficile d’y faire référence.

M. le rapporteur pour avis. En effet, la notion de droits culturels n’existe pas aujourd’hui. À travers cet amendement, je propose de réaffirmer notre attachement à ce que l’État assume pleinement ses missions en matière d’accès à la culture pour tous sur l’ensemble du territoire.

Mme Annie Genevard. Je souscris à cette idée. Je suis, comme le président Bloche, attachée depuis fort longtemps à l’exercice de nos responsabilités en matière culturelle. Cela étant, cette formulation introduit subrepticement une forme de hiérarchie. Dans cet amendement, vous semblez considérer que l’exercice conjoint par l’État et les collectivités territoriales a davantage de sens pour la culture que pour le sport et le tourisme. Cela me pose un problème de cohérence avec l’intitulé du chapitre IV.

M. Christophe Premat. Pour la précision lexicale, il y a une ambiguïté dans la formulation « droits culturels », qui pourrait faire référence aux droits des minorités culturelles, notion qui est défendue au sein du Conseil de l’Europe. Pour aller dans le sens du rapporteur, il faut veiller à ne pas basculer dans un débat que nous ne maîtriserions pas.

M. Benoist Apparu. Toujours sur le plan de la terminologie juridique, si l’article 28 A ne cite que la culture en compétence partagée entre l’État et les collectivités territoriales et que l’article 28 prévoit que les collectivités territoriales ont une compétence partagée en matière de tourisme, de sport, de culture et autres sans mentionner l’État, cela signifie a contrario que l’État n’a pas de compétence en ces domaines.

M. le président Patrick Bloche. La culture et le sport nous concernent directement, et je comprends fort bien que nos collègues se demandent pourquoi ne parler que de l’une en oubliant l’autre, et le tourisme également.

Mme Isabelle Attard. Puisqu’il va falloir réécrire l’article 28 en précisant que les compétences sont partagées entre l’État et les collectivités territoriales, l’article 28 A n’aura alors plus d’objet.

M. le président Patrick Bloche. L’article 28 ne vise que le partage de compétences entre différents niveaux de collectivités territoriales, tandis que l’article 28 A vise l’exercice conjoint de compétences entre l’État et les collectivités territoriales. Par conséquent, je ne pense pas que l’on puisse faire un « mix » en introduisant dans l’article 28 des préoccupations portées par l’article 28 A.

M. Michel Ménard. Je m’étonne de ne pas voir ici un amendement que j’ai déposé et qui traite de ces questions. Je proposais que la vie associative, la jeunesse et l’éducation populaire soient également des compétences partagées. Les fédérations d’éducation populaire, autant que les fédérations sportives ou les associations culturelles, doivent être soutenues par les départements et les régions.

M. le président Patrick Bloche. Monsieur Ménard, nous n’avons pas reçu cet amendement. Peut-être fait-il partie des amendements déposés en commission des Lois, dont vous seriez cosignataire ?

Chers collègues, je vous propose de rectifier l’amendement AC24 du rapporteur pour avis dans la rédaction suivante : « Les compétences en matière de culture, de sport, de tourisme, d’action extérieure et de coopération internationale sont exercées conjointement par l’État et les collectivités territoriales ». Nous garantirions ainsi la cohérence de l’article 28 A modifié avec l’article 28.

Suivant l’avis favorable du rapporteur pour avis, la Commission adopte l’amendement AC24 rectifié.

Par ce vote, elle exprime un avis favorable à l’adoption de l’article 28 A ainsi rédigé.

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Article 28
(art. L. 1111-4 du code général des collectivités territoriales)

Compétences partagées dans les domaines de la culture et du sport
et création de conférences territoriales de l’action publique (CTAP) dédiées

Cet article vise à affirmer, dans les domaines de la culture, du sport et du tourisme (23), le principe du partage des compétences entre tous les niveaux de collectivités territoriales, par dérogation à la philosophie d’ensemble du projet de loi qui vise à remplacer la clause de compétence générale – qui permet aujourd’hui aux régions et aux départements d’intervenir en dehors de leurs missions principales – par des compétences précises, confiées par la loi à ces deux niveaux de collectivités (24).

1.  Le droit en vigueur

La clause de compétence générale, qui accorde aux collectivités une capacité d’intervention générale, sans qu’il soit nécessaire de procéder à une énumération de leurs attributions, en partie supprimée par la loi du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales, a été restaurée au profit des départements et des régions par la loi MAPTAM du 27 janvier 2014.

La clause de compétence générale des communes est aujourd’hui inscrite à l’article L. 2121-29 du code général des collectivités territoriales ; celle des départements figure à l’article L. 3211-1 et celle des régions à l’article L. 4221-1 du même code.

Pour autant, les compétences culture et sport ont très largement échappé à ces différents changements ; ainsi, la loi de 2010, tout en supprimant la clause de compétence générale des départements et des régions, avait néanmoins reconnu que ces compétences devaient pouvoir continuer d’être partagées. Le législateur de l’époque avait en effet considéré qu’il n’était pas opportun de rigidifier les règles d’intervention et les dispositifs de financement dans ces deux domaines. De fait, les compétences culture et sport, qui participent directement au dynamisme d’un territoire, font intervenir une multiplicité d’acteurs locaux, le partage de ces compétences entre les différents échelons territoriaux prenant souvent la forme de cofinancements pour la construction d’équipements ou le soutien à certaines politiques.

2.  Le projet de loi initial

Le choix de maintenir les domaines transversaux de la culture et du sport dans le champ des compétences partagées entre les différents niveaux de collectivités territoriales est ainsi justifié par l’exposé des motifs du projet de loi : « si la clarification des compétences commande de limiter les interventions des régions et des départements aux domaines de compétences qui leur sont expressément reconnus par la loi, il apparaît nécessaire, au vu de la diversité des situations et du caractère transversal de ces domaines, de maintenir une possibilité d’intervention de chaque niveau de collectivité territoriale en matière de culture, de sport et de tourisme » (25). L’étude d’impact annexée au projet de loi justifie en outre le choix de ces deux domaines par « la diversité des interventions existantes et (…) la fragilité des opérateurs » (26).

Dans la rédaction initiale du projet de loi, cet article se bornait à ajouter à l’article L. 1111-4 du code général des collectivités territoriales, qui fixe les principales règles de financement par les collectivités territoriales des projets relevant de leurs compétences, un alinéa reprenant une rédaction analogue à celle qui figurait dans la loi du 16 décembre 2010, précisant que les compétences en matière de culture, de sport et de tourisme sont partagées entre les communes, les départements et les régions.

3.  Les modifications apportées par le Sénat

Le Sénat, en commission des Lois, a adopté trois modifications à cet article :

– sur l’initiative des rapporteurs de la commission des Lois, les groupements de communes se sont vus octroyer les mêmes compétences partagées que les collectivités territoriales elles-mêmes ;

– sur l’initiative de MM. Gérard Collomb et Louis Nègre, la commission a rendu les dispositions de l’article également applicables aux collectivités territoriales à statut particulier, afin notamment de viser la métropole de Lyon, dont le régime spécifique est issu de la loi MAPTAM du 27 janvier 2014 ;

– sur l’initiative de M. Ronan Dantec, la commission a élargi le champ de l’article, prévoyant que la coopération internationale et l’action extérieure demeureraient également une compétence partagée, afin de permettre aux régions et aux départements de poursuivre leur action en matière d’aide au développement.

Par ailleurs, le Sénat a, par l’adoption de deux amendements identiques présentés par Mmes Catherine Morin-Desailly, rapporteure pour avis au nom de la commission de la Culture, et Valérie Létard, rapporteure pour avis au nom de la commission des Affaires économiques, complété le présent article par un alinéa dont l’objet est de prévoir la création de conférences territoriales de l’action publique (CTAP) dédiées respectivement à la culture, au sport et au tourisme, afin que ces questions fassent obligatoirement l’objet de débats et de réflexions entre les différents niveaux de collectivités territoriales et de leurs groupements (cf. encadré dans l’exposé général).

4.  La position de la Commission

Le rapporteur pour avis se félicite de la création de CTAP spécifiquement dédiées respectivement au sport et à la culture. Comme le note Mme Catherine Morin-Desailly dans son avis (27), l’amendement adopté par le Sénat établit en effet un lien direct entre compétence partagée et commission thématique de la CTAP, qui constituera un cadre propice au dialogue entre les différents niveaux de collectivités.

En tant que rapporteur pour avis au nom de la commission des Affaires culturelles et de l’éducation sur le projet de loi MAPTAM, il avait déjà défendu en 2013 une idée analogue, présentant un amendement tendant à instituer un « conseil territorial pour le développement culturel », dont la composition aurait été calquée sur celle de la CTAP, et qui aurait constitué le pendant, au niveau local, du conseil des collectivités territoriales pour le développement culturel (28). Cet amendement envisageait que ce conseil territorial se réunisse au moins une fois par an, en présence de représentants des différents niveaux de collectivités territoriales et du représentant de l’État. La disposition n’avait cependant pu prospérer pour des raisons liées à sa recevabilité financière.

Le rapporteur pour avis se réjouit donc de la création, dans le cadre du présent projet de loi, de ces instances de dialogue et de concertation dédiées spécifiquement respectivement à la culture et au sport, même si, en l’état actuel du droit, la constitution de commissions thématiques au sein des CTAP est déjà possible. La CTAP constitue à ses yeux le cadre adapté permettant à l’ensemble des acteurs publics de veiller à la continuité des politiques culturelles et sportives sur les territoires, sujet de préoccupation important en ces temps de restrictions de crédits budgétaires. L’instauration de ces CTAP thématiques doit permettre un dialogue plus équilibré entre les différentes parties prenantes et une amélioration de la coordination et de la lisibilité des interventions des unes et des autres.

La Commission a adopté deux amendements de Mme Barbara Pompili visant, compte tenu des difficultés que rencontre le monde associatif, à faire de la vie associative une nouvelle compétence partagée entre les différents niveaux de collectivités territoriales, au même titre que la culture et le sport, et, par conséquent, à prévoir la création d’une CTAP dédiée à cette compétence.

Le rapporteur pour avis a par ailleurs défendu un amendement portant article additionnel après l’article 29, adopté par la Commission (cf. infra), pérennisant, au plan national, le conseil des collectivités territoriales pour le développement culturel évoqué plus haut.

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La Commission examine l’amendement AC10 de Mme Barbara Pompili.

Mme Barbara Pompili. Cet amendement vise à faire de la vie associative une compétence partagée entre les différents échelons de collectivités territoriales. Si de nombreuses associations sportives ou culturelles pourront toujours bénéficier de l’intervention des communes ou de leurs groupements, des régions ou des départements, tel ne sera pas le cas pour celles qui ont pour objet la lutte contre le racisme, l’éducation civique, la prévention de la violence, la protection de l’environnement.

M. le rapporteur pour avis. Nous connaissons tous les difficultés du monde associatif et sa crainte que la suppression de la clause de compétence générale n’induise une réduction du montant des subventions allouées aux associations. La question avait été étudiée l’an dernier par la commission d’enquête sur les difficultés du monde associatif, présidée par notre collègue Alain Bocquet. Le rapport avait avancé certaines pistes pour faire de la vie associative une compétence partagée. C’est aujourd’hui davantage une modalité d’exercice d’une compétence qu’une compétence en tant que telle.

J’indique que le groupe SRC défendra en commission des Lois un amendement – peut-être celui dont parlait M. Ménard – tendant à faire de la vie associative, de la jeunesse et de l’éducation populaire des compétences partagées. Cet amendement étant plus complet, nous nous y rallierons. Dès lors, madame Pompili, peut-être pourriez-vous retirer le vôtre.

M. Michel Ménard. C’est bien l’amendement auquel je pensais.

Mme Barbara Pompili. L’amendement en question n’a pas été déposé ici. À quoi bon se saisir pour avis si c’est pour anticiper ce qui se fera en commission des Lois ?

L’amendement que nous proposons est effectivement moins complet, mais l’adopter montrerait que la commission des Affaires culturelles et de l’éducation est sur la même longueur d’ondes. Je ne vois pas en quoi adopter notre amendement empêcherait d’adopter cet autre amendement un peu plus tard.

Suivant l’avis favorable du rapporteur pour avis, la Commission adopte l’amendement AC10.

Puis elle examine l’amendement AC11 de Mme Barbara Pompili.

Mme Barbara Pompili. En lien avec l’amendement précédent, celui-ci tend à créer une commission en charge de la vie associative au sein des conférences territoriales de l’action publique.

Mme Annie Genevard. Je m’interroge sur l’opportunité de cet amendement. Si l’on commence à décliner toutes les dimensions de la vie dans les CTAP, pourquoi pas la vie des entreprises ? Le champ est infini. Il me semble que la vie associative peut être traitée dans une commission culture, par exemple, dans la proximité des territoires. Je me demande si la CTAP est le bon niveau pour traiter de ces questions.

Suivant l’avis favorable du rapporteur pour avis, la Commission adopte l’amendement.

Puis elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 28 modifié.

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Article 28 bis
(art. L. 1111-9-1 du code général des collectivités territoriales)

Fonctionnement de la CTAP dans les domaines de la culture et du sport – composition de la CTAP

Cet article a été introduit dans le projet de loi à la suite de l’adoption, par la commission des Lois du Sénat, de deux amendements respectivement présentés par Mme Catherine Morin-Desailly, rapporteure pour avis au nom de la commission de la Culture et Mme Valérie Létard, rapporteure pour avis au nom de la commission des Affaires économiques.

1.  Un article introduit sur l’initiative des commissions du Sénat

Le présent article modifie l’article L. 1111-9-1 du code général des collectivités territoriales, qui régit le régime des conférences territoriales de l’action publique (CTAP) instaurées par la loi MAPTAM (cf. encadré supra), afin, dans son , de préciser le fonctionnement des CTAP dans les domaines de la culture, du sport et du tourisme.

En l’état actuel du droit, cet article précise que la CTAP est chargée de « favoriser un exercice concerté des compétences des collectivités territoriales, de leurs groupements et de leurs établissements publics ».

Le présent article complète les missions de la CTAP en précisant que la conférence « veille à la continuité des politiques publiques en matière de culture, de sport et de tourisme et à leur mise en œuvre équilibrée dans l’ensemble des territoires ». 

Il prévoit ainsi que la CTAP devra d’une part veiller à la continuité des politiques publiques dans les trois matières énoncées, afin de prévenir le risque de voir des pans entiers de ces politiques publiques abandonnés dans certains territoires ; elle devra, d’autre part, veiller à leur mise en œuvre équilibrée sur l’ensemble du territoire régional, afin notamment de s’assurer que les territoires ruraux et péri-urbains ne soient pas négligés ou pénalisés.

2.  L’ajout adopté par le Sénat en séance publique

L’article 28 bis a été complété par le Sénat en séance publique (), sur l’initiative de M. Jacques Mézard, afin d’adjoindre à la liste des membres composant la CTAP, fixée au II de l’article L. 1111-9-1 du code général des collectivités territoriales (cf. encadré, supra), les sénateurs de chaque département.

À l’appui de l’amendement, qui a reçu un avis défavorable tant de la commission des Lois du Sénat que du Gouvernement, son auteur a fait valoir que le Sénat, en vertu de l’article 24 de la Constitution, assure la représentation des collectivités territoriales et qu’il serait par conséquent logique que les sénateurs soient associés aux travaux de concertation des CTAP dans les régions.

3.  La position de la Commission

S’agissant de compétences partagées entre l’État et plusieurs niveaux de collectivités territoriales, il est nécessaire d’assurer la bonne coordination des interventions des différents acteurs et leur cohérence territoriale. C’est à cet objectif que répond cet article qui conforte la mission particulière des CTAP en matière d’aménagement du territoire, notamment dans les domaines culturels et sportifs. Cette disposition a été très largement saluée par les personnes entendues par le rapporteur pour avis, M. Cyril Seassau, directeur du syndicat des entreprises artistiques et culturelles (Syndeac) faisant néanmoins valoir que les acteurs de la culture avaient tout autant besoin de continuité territoriale que de continuité temporelle dans les choix publics.

Le rapporteur pour avis partage le souci exprimé par les sénateurs que la CTAP veille à la cohérence territoriale des actions culturelles menées par les différentes collectivités et estime par conséquent souhaitable d’adopter cette disposition ; il note néanmoins que la mise en œuvre des politiques culturelles relève davantage de chaque acteur public que de la CTAP. La Commission a adopté l’amendement présenté par Mme Dominique Nachury supprimant cette mention pour ne laisser à la CTAP que la mission de veiller à la cohérence territoriale des actions culturelles menées par les différentes collectivités. Elle a par ailleurs, par cohérence avec l’adoption de deux amendements à l’article 28, adopté un amendement de Mme Barbara Pompili visant à étendre à la vie associative le périmètre d’intervention des CTAP.

La Commission, tout comme le rapporteur pour avis, a eu une position bien plus réservée s’agissant de la modification relative à la composition de la CTAP, comprenant mal ce qui justifierait que tous les sénateurs de chaque département siégeassent à la CTAP régionale. Ouvrir cette possibilité aux sénateurs interroge sur la présence, par parallélisme, des députés. Le rapporteur pour avis ne juge pas souhaitable que soient ouvertes aux élus nationaux des conférences réunissant des élus locaux pour traiter des questions intéressant un territoire. La fonction première des parlementaires est de voter la loi et de contrôler l’action du Gouvernement, fonctions pour lesquelles le temps leur manque souvent déjà. La Commission a adopté l’amendement du rapporteur pour avis portant suppression du 2° de cet article.

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La Commission est saisie de l’amendement AC12 de Mme Barbara Pompili.

Mme Barbara Pompili. En coordination avec les amendements précédents, cet amendement vise à clarifier le rôle et le périmètre d’intervention des CTAP, en y ajoutant la vie associative.

Suivant l’avis favorable du rapporteur pour avis, la Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement AC1 de Mme Dominique Nachury.

Mme Dominique Nachury. Si l’on peut admettre que la conférence territoriale de l’action publique garantit la continuité et la cohérence des politiques publiques partagées, il ne lui revient pas, en revanche, d’investir le champ de la mise en œuvre, qui relève de chaque acteur. J’ajoute que je ne comprends pas très bien ce que veut dire une « mise en œuvre équilibrée ».

M. le rapporteur pour avis. Je suis d’accord avec vous, madame Nachury. Il incombe à la CTAP de s’assurer de la continuité des politiques publiques menées par les différents échelons pour que des pans entiers du territoire n’en soient pas privés. En revanche, le contrôle de la mise en œuvre de ces politiques publiques revient à chaque acteur public. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Elle en vient à l’amendement AC26 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Cet amendement supprime une modification apportée par le Sénat en première lecture, tendant à compléter la composition des CTAP par les sénateurs du département. Pourquoi pas les députés ? Ce sont aussi des élus de la Nation. Dans un souci de cohérence et de défense de l’Assemblée nationale, je vous propose de supprimer les alinéas 4 et 5 de l’article 28 bis !

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 28 bis modifié.

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Article 29
(art. L. 1111-8, L. 1111-8-1 et L. 1111-8-2 [nouveau] du code général des collectivités territoriales)

Centralisation de l’instruction et de l’octroi des aides et subventions
dans les domaines de compétence partagée

Cet article met en place, dans les domaines de compétence partagée définis à l’article 28, un système de centralisation de l’instruction et de l’octroi des aides ou subventions accordées par les collectivités publiques.

Les objectifs qui sous-tendent cet article résident à la fois dans un souci de rationalisation des compétences respectives de l’État et des collectivités territoriales et donc de simplification de l’action publique, mais aussi dans une plus grande lisibilité pour les usagers. Un tel système devrait en effet avoir pour avantages, non seulement de simplifier les procédures engagées par tout porteur de projet, qui doit aujourd’hui démarcher les différents niveaux de collectivités pour obtenir une aide ou une subvention, mais aussi de diminuer les coûts administratifs liés aujourd’hui à la multiplication des procédures d’instruction de dossiers et, enfin, de renforcer la coordination entre les différents acteurs.

Cette centralisation sera juridiquement fondée sur des décisions de délégation de compétences soit d’une collectivité à une autre, soit d’une collectivité aux services déconcentrés de l’État, soit des services déconcentrés de l’État vers une collectivité. Dans tous les cas, la délégation, facultative, sera formalisée par convention.

Sur l’initiative de ses rapporteurs, la commission des Lois du Sénat a adopté un amendement de réécriture globale de cet article afin d’en clarifier la présentation et d’en préciser la rédaction.

1.  Le projet de loi initial

Dans sa rédaction initiale, l’article 29 du projet de loi introduisait un nouvel article L. 1111-8-2 au sein du code général des collectivités territoriales, dont le premier alinéa précisait que, dans les domaines de compétences partagées – c’est-à-dire ceux définis à l’article L. 1111-4 tel que modifié à l’article 28 du projet de loi – les différentes collectivités peuvent déléguer à l’une d’entre elles l’instruction et l’octroi d’aides ou de subventions.

La suite de l’article distinguait ensuite trois cas de figure :

– Lorsque le délégant comme le délégataire sont des collectivités territoriales, la délégation s’effectuerait dans le cadre du régime existant de délégation de compétences entre collectivités territoriales, défini à l’article L. 1111-8 du code général des collectivités territoriales ; cet article précise qu’une collectivité territoriale peut, par convention, déléguer à une collectivité territoriale relevant d’une autre catégorie ou à un EPCI à fiscalité propre une compétence dont elle est attributaire. Cette compétence est alors exercée par la collectivité délégataire au nom et pour le compte de la collectivité territoriale délégante. La convention de délégation fixe la durée de celle-ci et définit les modalités du contrôle exercé par le délégant sur le délégataire ;

– Dans le cas où le délégant serait l’État et le délégataire une collectivité territoriale ou un groupement, il serait renvoyé, de la même manière, aux dispositions en vigueur de l’article L. 1111-8-1 du même code. Cet article, issu de la loi MAPTAM, permet à l’État, en dehors des cas où des intérêts nationaux sont en cause, de déléguer par convention l’exercice de certaines de ses compétences à une collectivité territoriale ou à un EPCI à fiscalité propre qui en fait la demande. Les compétences ainsi déléguées sont exercées au nom et pour le compte de l’État. La collectivité territoriale ou l’EPCI à fiscalité propre qui souhaite exercer une compétence déléguée par l’État soumet sa demande pour avis (simple) à la CTAP, la décision revenant au(x) ministre(s) concerné(s) et étant formalisée dans un décret. Si la demande de délégation est acceptée, une convention est établie qui fixe la durée de la délégation, définit les objectifs à atteindre, précise les moyens mis en œuvre ainsi que les modalités de contrôle de l’État sur la collectivité territoriale ou l’EPCI à fiscalité propre délégataire ;

– Enfin, si le délégant est une collectivité territoriale ou un groupement et le délégataire l’État, le présent article définissait des modalités de délégation propres, très largement inspirées de celles fixées, dans le cas de figure inverse, à l’article L. 1111-8-1 : toute collectivité territoriale ou EPCI à fiscalité propre souhaitant déléguer à l’État sa compétence en matière d’octroi de subventions devrait préalablement recueillir l’avis de la CTAP. La demande initiale de la collectivité et l’avis de la CTAP seraient ensuite transmis aux ministres intéressés par le représentant de l’État dans la région. En cas d’acceptation de la demande de délégation, la collectivité territoriale ou l’EPCI à fiscalité propre transmettrait, dans un délai d’un an à compter de la transmission de sa demande, un projet de convention au représentant de l’État dans la région. La convention serait acceptée par décret et fixerait la durée de la délégation, les objectifs à atteindre et les modalités de contrôle de l’exécution de la délégation.

2.  La rédaction adoptée par le Sénat

Sur l’initiative de ses rapporteurs, la commission des Lois du Sénat a adopté un amendement de réécriture globale de cet article afin d’en clarifier la présentation et d’en préciser la rédaction.

Le de l’article traite du premier cas de figure – délégation entre collectivités territoriales ; il précise, au sein de l’article L. 1111-8 qui fonde déjà de telles délégations pour une compétence dont la collectivité délégante est attributaire, que la même procédure trouvera également à s’appliquer à l’instruction et l’octroi d’aides ou de subventions.

De la même manière, le complète l’article L. 1111-8-1 relatif à la procédure, déjà en vigueur, de délégation par l’État à une collectivité territoriale ou un groupement, afin, là encore, de rendre possible une telle délégation en matière d’instruction et d’octroi d’aides ou de subventions.

Enfin, le introduit au sein du code un nouvel article L. 1111-8-2 spécifiquement dédié à la nouvelle procédure introduite par le présent article, à savoir la délégation de compétence par une collectivité territoriale ou un EPCI à fiscalité propre vers l’État. En séance publique le Sénat a d’ailleurs adopté un amendement présenté par les rapporteurs de la commission des Lois précisant expressément que les dispositions du nouvel article L. 1111-8-2 du code général des collectivités territoriales s’appliquent aux délégations de l’instruction et de l’octroi d’aides ou de subventions entre, d’une part, une collectivité territoriale ou un groupement, en tant que délégant, et l’État, en tant que délégataire.

Dès lors, en application du nouvel article L. 1111-8-2, une collectivité territoriale ou un groupement pourra, dans le cadre de ses compétences, déléguer par convention à l’État l’instruction et l’octroi d’aides ou de subventions. Sa demande devra en premier lieu être soumise pour avis à la CTAP ; puis, la demande et l’avis sont transmis, par le représentant de l’État dans la région, au ministre chargé du budget et aux ministres concernés, la délégation étant décidée par décret. Lorsque la demande de délégation est acceptée, elle est notifiée, par le représentant de l’État dans la région, à la collectivité territoriale ou à l’établissement public qui lui transmet, dans le délai de six mois à compter de sa notification, un projet de convention fixant la durée de la délégation et précisant les objectifs souhaités, les moyens mis en œuvre ainsi que les modalités de contrôle de l’exécution de la délégation.

3.  La position de la Commission

Dans le temps très court qui lui était imparti, le rapporteur pour avis a procédé à quelques consultations, notamment sur cet article qui suscite davantage la controverse que l’article 28.

L’Assemblée des départements de France a, dans la contribution écrite qu’elle a adressée au rapporteur pour avis, jugé que, sous des aspects vertueux de rationalisation du traitement des demandes d’aides ou de subventions, ce dispositif risquait de contrevenir au principe selon lequel aucune collectivité ne peut exercer une tutelle sur une autre ; elle a fait valoir qu’en pratique, la gestion du dispositif risquait s’avérer complexe, impliquant une réattribution aux autres collectivités de la mise en œuvre des projets et du suivi de leur financement. Elle craint en outre que ce mécanisme ne porte en germe la spécialisation d’une collectivité dans l’exercice d’une compétence donnée.

La Fédération nationale des collectivités territoriales pour la culture (FNCC) a également exprimé ses réserves vis-à-vis de cet article, faisant valoir qu’à l’heure actuelle, la constitution des dossiers par les porteurs de projets n’était pas un exercice à ce point lourd qu’il justifie l’instauration de guichets uniques. Elle s’est, par la voix de deux de ses vice-présidents, M. Philippe Laurent et Mme Évelyne Rabardel entendus en audition, montrée très attachée à ce qu’en aucune mesure la centralisation de l’instruction et de l’octroi des aides ou de subventions ne devienne obligatoire. Il importe à leurs yeux qu’elle soit décidée en fonction des projets et que la collectivité centralisatrice ne s’arroge pas l’entière paternité de ceux-ci, qui resteront cofinancés par les différents niveaux de collectivités.

Le syndicat des entreprises artistiques et culturelles (Syndeac), par la voix de son directeur M. Cyril Seassau, a fait également part de ses inquiétudes lors de son audition par le rapporteur pour avis. Il a fait valoir que les critères d’attribution des aides variaient d’un niveau de collectivité à l’autre, les régions, départements et communes n’ayant pas les mêmes priorités en la matière, et qu’il serait important que la collectivité délégataire tienne compte de l’ensemble des critères définis par les cofinanceurs ; à l’inverse, une uniformisation des critères ne permettrait plus à certains projets d’être financés, alors qu’aujourd’hui, il n’est pas rare qu’un niveau de collectivité, notamment une commune qui est au plus proche du porteur de projet, accepte d’apporter un financement à un projet dans lequel les autres niveaux de collectivités ne croient pas. Des craintes analogues ont été exprimées par les représentants du syndicat national des arts vivants (Synavi) entendus par le rapporteur pour avis : MM. Éric Cenat et Pierre Roba ont fait valoir qu’il serait difficile pour un niveau de collectivité territoriale donné de concentrer l’ensemble des capacités d’analyse de projets par essence extrêmement divers et d’inégale importance.

Le rapporteur souligne pour sa part l’intérêt que présente le cofinancement des projets par d’autres collectivités que celle qui en assure la maîtrise d’ouvrage ; ouvrir la faculté pour les collectivités de décider d’une centralisation par l’une d’elles ou par l’État de l’instruction et de l’octroi des aides ou de subventions, par la voie de délégations de compétence, permettra de simplifier, le cas échéant, le montage des dossiers. Cette possibilité ouverte n’étant en aucune manière rendue obligatoire, il reviendra aux collectivités et à l’État d’apprécier son opportunité.

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La Commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 29 sans modification.

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Article additionnel après l’article 29
(art. L. 1231-1 à L. 1231-4 [nouveaux] du code général des collectivités territoriales)

Consécration législative de l’existence du Conseil national des collectivités territoriales pour le développement culturel

La Commission a adopté un amendement du rapporteur pour avis portant article additionnel après l’article 29 et institutionnalisant, dans le code général des collectivités territoriales, le Conseil national des collectivités territoriales pour le développement culturel.

Ce conseil a été créé, de manière informelle, en 1999 par Mme Catherine Trautmann, alors ministre de la culture. Après quelques années d’inactivité, il a été une première fois relancé en 2008 par Mme Christine Albanel, dans le cadre des « Entretiens de Valois », puis, à nouveau, par Mme Aurélie Filippetti en 2012. Afin de ne plus faire dépendre de la volonté des ministres de la culture successifs la réunion effective de ce conseil, qui a fait la preuve de sa grande utilité, l’article additionnel vise à l’institutionnaliser dans la loi.

Le rapporteur pour avis a fait valoir la cohérence de cette institutionnalisation avec la création des « CTAP culture » au niveau régional, dont ce conseil constitue le pendant naturel au plan national.

Le Conseil sera placé auprès du ministre en charge de la culture qui le présidera, comme cela en est déjà la pratique. Il sera composé pour moitié de représentants des collectivités territoriales (élus régionaux, départementaux et locaux) et pour moitié de représentants de diverses administrations (administration centrale et déconcentrée du ministère de la culture, direction générale des collectivités territoriales du ministère de l’intérieur, commissariat général à l’égalité des territoriales) et de personnalités qualifiées. La composition du conseil sera précisée par décret.

Le Conseil sera chargé d’émettre des avis et des propositions sur tout projet de texte législatif ou réglementaire ayant un impact sur les politiques culturelles menées par les collectivités territoriales. Il devra être saisi par les CTAP sur toute demande de délégation de compétences de l’État par les collectivités territoriales et rendra un avis motivé.

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La Commission est saisie de l’amendement AC27 du rapporteur pour avis.

M. le rapporteur pour avis. Cet amendement confère une base législative à l’existence du conseil des collectivités territoriales pour le développement culturel, transformé en instance nationale. Ce conseil a été créé de manière informelle en 1999 par Mme Catherine Trautmann, alors ministre de la culture, relancé en 2008 par Mme Christine Albanel, puis à nouveau par Mme Aurélie Filippetti en 2012. Son histoire montre que sa réunion effective dépend en grande partie de la volonté de chaque ministre, ce qui ne me semble pas une bonne chose. Le conseil des collectivités territoriales pour le développement culturel a fait la preuve de sa grande utilité, et il sera d’autant plus utile à l’avenir qu’il va constituer le pendant national des « CTAP culture » au plan régional, que le Parlement a souhaité mettre en place. Je vous propose donc de l’institutionnaliser dans la loi.

Mme Annie Genevard. Je suis membre de cette instance depuis plusieurs années et j’en constate l’utilité. Je souscris pleinement à cette proposition.

La Commission adopte l’amendement.

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En conséquence, et sous réserve des amendements qu’elle propose, la commission des Affaires culturelles et de l’éducation émet un avis favorable à l’adoption des articles 8, 12, 12 bis A, 12 bis B, 12 ter, 12 quater, 28 A, 28, 28 bis et 29 du projet de loi, adopté par le Sénat, portant nouvelle organisation territoriale de la République (n° 2529).

ANNEXES

ANNEXE N° 1 :
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR

(par ordre chronologique)

Ø Fédération nationale des collectivités territoriales pour la culture (FNCC) –M. Philippe Laurent, maire de Sceaux, et Mme Evelyne Rabardel, vice-présidente du Conseil Général du Val-de-Marne déléguée à la culture, tous deux vice-présidents de la FNCC

Ø Syndicat des entreprises artistiques et culturelles (Syndeac)M. Cyril Seassau, directeur, Mme Françoise Balais, directrice adjointe, et M. Fabien André, chargé de mission

Ø Syndicat national des arts vivants (Synavi) – M. Éric Cenat, délégué régional pour la région Centre, et M. Pierre Roba, délégué régional pour la région Pays de la Loire

Ø Audition commune :

– Centre sportif de Normandie Mme Sylvie Skaza, directrice

– Conseil régional de Basse-Normandie M. Olivier Aimé, directeur adjoint du service de la Jeunesse et des Sports

ANNEXE N° 2 :
LISTE DES CONTRIBUTIONS ÉCRITES REÇUES

Ø Assemblée des départements de France

Ø Association nationale des élus en charge du sport (ANDES)

Ø Le Mouvement associatif

Ø Syndicat des musiques actuelles (SMA)

Ø Syndicat des producteurs indépendants

Ø Regroupement des organisations du court (ROC)

© Assemblée nationale

1 () La liste des personnes entendues, ainsi que celle des contributions écrites reçues par le rapporteur pour avis, figurent respectivement en annexes 1 et 2.

2 () Pour un rappel historique des différentes étapes de la décentralisation culturelle par secteur, Cf. l’avis présenté par M. Stéphane Travert au nom de la commission des affaires culturelles et de l’éducation sur le projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, 26 juin 2013 (n° 1207).

3 () Cour des comptes, « Les collectivités territoriales et les clubs sportifs professionnels », rapport public thématique, 9 décembre 2009.

4 () « Les dépenses culturelles des collectivités territoriales en 2010 : 7,6 milliards d’euros pour la culture ». Département des études de la prospective et des statistiques et forum pour la gestion des villes et des collectivités territoriales (mars 2014).

5 () Projet annuel de performances de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » pour 2015.

6 () Le président de l’établissement public de coopération intercommunale doté d'une compétence en matière sportive, ou à défaut le maire de la commune d’implantation du siège du CREPS.

7 () Projet annuel de performances de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » pour 2015.

8 () Article L. 114-1 [nouveau] du code du sport.

9 () Article L. 114-2 [nouveau] du code du sport.

10 () Article L. 114-3 [nouveau] du code du sport.

11 () Article L. 114-4 [nouveau] du code du sport.

12 () Article L. 114-5 [nouveau] du code du sport et II du présent article.

13 () Article L. 114-7 [nouveau] du code du sport.

14 () Article L. 114-6 [nouveau] du code du sport.

15 () Une partie des dépenses de personnel et de fonctionnement incombant à l’État seront, comme aujourd’hui, financées par le biais des ressources propres des CREPS.

16 () Celui-ci dispose que « tout transfert de compétences entre l’État et les collectivités territoriales s’accompagne de l’attribution de ressources équivalentes à celles qui étaient consacrées à leur exercice ».

17 () Article L. 114-10 et L. 114-11 [nouveaux] du code du sport.

18 () Loi n° 90-1067 du 28 novembre 1990 relative à la fonction publique territoriale et portant modification de certains articles du code des communes.

19 () Cf. commentaire de l’article 12 ter.

20 () Décret n° 2002-53 du 10 janvier 2002 portant statut particulier du corps de l’inspection générale de la jeunesse.

21 () Loi n° 91-772 du 7 août 1991 relative au congé de représentation en faveur des associations et des mutuelles et au contrôle des comptes des organismes faisant appel à la générosité publique.

22 () Le fait de faire obstacle, de quelque manière que ce soit, à un contrôle de l’inspection générale des finances est passible d’une amende de 15 000 euros et entraîne la répétition des concours financiers dont l’utilisation n’a pas été justifiée.

23 () Compte tenu du champ des compétences de la commission, le rapporteur pour avis ne fera porter ses remarques que sur les domaines de la culture et du sport.

24 () L’article 1er du projet de loi supprime la clause de compétence générale des régions, tandis que son article 24 supprime celle des départements.

25 () Exposé des motifs du projet de loi, page 25.

26 () Étude d’impact annexée au projet de loi, page 104.

27 () Avis présenté au nom de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication par Mme Catherine Morin-Desailly, sur le projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, 3 décembre 2014, n° 150 (2014-2015), page 99.

28 () Instance de consultation et de concertation entre l’État et les collectivités territoriales sur les politiques culturelles, ce conseil a été créé de manière informelle en 1999 par Mme Catherine Trautmann, alors ministre de la culture, relancé en 2008 par Mme Christine Albanel dans le cadre des « Entretiens de Valois », puis, à nouveau, par Mme Aurélie Filippettien2012.