N° 1862

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

    ONZIÈME LÉGISLATURE

    Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 14 octobre 1999.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES, FAMILIALES ET SOCIALES (1) SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2000 (n° 1805)

TOME VII

ÉDUCATION NATIONALE, RECHERCHE ET TECHNOLOGIE

RECHERCHE

PAR M. Jean-Michel DUBERNARD,

Député.

___

(1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page.

                      Voir le numéro : 1861 (annexe n° 19).

Lois de finances

La commission des affaires culturelles, familiales et sociales est composée de : M. Jean Le Garrec, président ; MM. Jean-Michel Dubernard, Jean-Paul Durieux, Jean-Pierre Foucher, Maxime Gremetz, vice-présidents ; Mme Odette Grzegrzulka, MM. Denis Jacquat, Noël Mamère, Patrice Martin-Lalande, secrétaires ; MM.  Bernard Accoyer, Mme Sylvie Andrieux, MM. André Aschieri, Gautier Audinot, Mme Roselyne Bachelot-Narquin, MM. Jean-Paul Bacquet, Jean-Pierre Baeumler, Pierre-Christophe Baguet, Jean Bardet, Jean-Claude Bateux, Jean-Claude Beauchaud, Mmes Huguette Bello, Yvette Benayoun-Nakache, MM. Serge Blisko, Patrick Bloche, Mme Marie-Thérèse Boisseau, MM. Jean-Claude Boulard, Bruno Bourg-Broc, Mme Christine Boutin, MM. Jean-Paul Bret, Victor Brial,  Yves Bur, Alain Calmat, Pierre Carassus, Pierre Cardo, Roland Carraz, Mmes Véronique Carrion-Bastok, Odette Casanova, MM. Laurent Cathala, Jean-Charles Cavaillé, Bernard Charles, Jean-Marc Chavanne, Jean-François Chossy, Mme Marie-Françoise Clergeau, MM. Georges Colombier, François Cornut-Gentille, Mme Martine David, MM. Bernard Davoine, Bernard Deflesselles, Lucien Degauchy, Marcel Dehoux, Jean Delobel, Jean-Jacques Denis, Dominique Dord, Mme Brigitte Douay, MM. Julien Dray, Guy Drut, Nicolas Dupont-Aignan, Yves Durand, René Dutin, Christian Estrosi, Claude Evin, Jean Falala, Jean-Louis Fousseret, Michel Françaix, Mme Jacqueline Fraysse, MM. Germain Gengenwin, Mme Catherine Génisson, MM. Jean-Pierre Giran, Michel Giraud, Gaëtan Gorce, François Goulard, Jean-Claude Guibal, Jean-Jacques Guillet, Mme Paulette Guinchard-Kunstler, M.  Francis Hammel, Mme Cécile Helle, MM. Pierre Hellier, Michel Herbillon, Guy Hermier, Mmes Françoise Imbert, Muguette Jacquaint, MM. Jacky Jaulneau, Serge Janquin, Armand Jung, Bertrand Kern, Christian Kert, Jacques Kossowski, Mme Conchita Lacuey, MM. Jacques Lafleur, Robert Lamy, Edouard Landrain, Pierre Lasbordes, Mme Jacqueline Lazard, MM. Michel Lefait, Maurice Leroy, Patrick Leroy, Gérard Lindeperg, Patrick Malavieille, Mmes Gilberte Marin-Moskovitz, Jacqueline Mathieu-Obadia, MM. Didier Mathus, Jean-François Mattei, Mme Hélène Mignon, MM. Jean-Claude Mignon, Pierre Morange, Hervé Morin, Renaud Muselier, Philippe Nauche, Henri Nayrou, Alain Néri, Yves Nicolin, Bernard Outin, Dominique Paillé, Michel Pajon, Jean-Pierre Pernot, Mme Geneviève Perrin-Gaillard, MM. Bernard Perrut, Pierre Petit, Mme Catherine Picard, MM. Jean Pontier, Jean-Luc Préel, Alfred Recours, Gilles de Robien, Mme Chantal Robin-Rodrigo, MM. François Rochebloine, Marcel Rogemont, Yves Rome, Jean Rouger, Rudy Salles, Mme Odile Saugues, MM. André Schneider, Bernard Schreiner, Patrick Sève, Pascal Terrasse, Gérard Terrier, André Thien Ah Koon, Mme Marisol Touraine, MM. Anicet Turinay, Jean Ueberschlag, Jean Valleix, Alain Veyret, Philippe Vuilque, Jean-Jacques Weber, Mme Marie-Jo Zimmermann.

SOMMAIRE

Pages

INTRODUCTION 5

I.- LES CRÉDITS DE LA RECHERCHE POUR 2000 : UN BUDGET DE STAGNATION 7

A. LE BUDGET MINISTÉRIEL : UNE PROGRESSION LIMITÉE 7

1. Le renforcement de la capacité d’intervention du ministère 8

2. Les moyens des organismes de recherche 8

    a) Les EPST 9

    b) Les EPIC 9

    c) Les fondations 10

B. LE BCRD : UN RATTRAPAGE INSUFFISANT 10

II.- PISTES DE RÉFLEXION SUR L’ORGANISATION DE LA RECHERCHE EN FRANCE 15

A. L’ORGANISATION MINISTÉRIELLE 15

1. La place de la recherche dans la structure gouvernementale 16

2. L’organisation interne du ministère 17

B. LES ORGANISMES DE RECHERCHE ET LES RELATIONS ENTRE L’UNIVERSITÉ ET LA RECHERCHE 20

1. Les organismes de recherche 20

2. Université et recherche : vers un statut d’enseignant-chercheur 22

C. DANS LES RÉGIONS ET VERS L’EUROPE ET LE MONDE 23

1. Recherche et décentralisation 23

2. Recherche, Europe et coopération internationale 24

LISTE DES PERSONNALITÉS RENCONTRÉES PAR LE RAPPORTEUR 29

TRAVAUX DE LA COMMISSION 31

INTRODUCTION

La présentation, par la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, d’un avis budgétaire sur les crédits de la recherche a paru, ces dernières années, relever d’un rituel bien réglé. Quels que soient les gouvernements, quelles que soient les majorités, le rapporteur dresse toujours le même constat, souligne constamment la même contradiction.

D’une part, l’importance de la recherche apparaît unanimement admise et tous les gouvernements affirment faire du rayonnement scientifique et technique de la France l’une de leurs priorités.

D’autre part, les moyens dégagés en faveur de ce secteur sont tantôt en stagnation, tantôt en recul. La tendance générale depuis six ans est à un tassement sensible des crédits, venant après quinze années de croissance de l’effort national de recherche.

Pour 2000, ce constat, largement partagé au sein de notre Assemblée au-delà des clivages politiques, conserve hélas toute sa validité.

Toutefois, le rapporteur a souhaité ne pas s’en tenir à cette approche budgétaire et mettre à profit cet avis pour proposer à la commission et à la Représentation nationale d’engager une réflexion sur l’organisation française de la recherche.

I.- LES CRÉDITS DE LA RECHERCHE POUR 2000 : UN BUDGET DE STAGNATION

Les crédits inscrits au budget du ministère de l’éducation nationale, de la recherche et de la technologie concernant la recherche et la technologie s’élèvent, dans le projet de loi de finances pour 2000, à 39,861 milliards de francs en dépenses ordinaires et crédits de paiement et à 13,465 milliards de francs en autorisations de programme, ce qui, à structures constantes, correspond à des augmentations de respectivement 1,1 % et 3,6 %.

Le budget civil de recherche et développement (BCRD) qui regroupe l’ensemble des crédits de l’Etat affectés à la recherche civile se monte pour 2000 à 54,646 milliards de francs en dépenses obligatoires et crédits de paiement, soit une progression de 1,7 % par rapport à la loi de finances initiale pour 1999. Les autorisations de programme, dont le montant est de 22,844 milliards de francs, progressent, à structures constantes, de 2,2 %.

Ces évolutions nominales ne doivent pas faire illusion. La progression du budget de la recherche en crédits de paiement est à peine supérieure à l’augmentation moyenne des dépenses du budget général (+ 0,9 %), qui traduit en réalité une stabilité des moyens en volume par rapport aux dotations de la loi de finances initiale de 1999. En outre, cette stagnation se réalise par rapport à un niveau 1999 lui-même très bas. De la même manière, le BCRD tend à stagner si l’on examine ses dotations sur plusieurs années : depuis 1995, sa progression n’est que de 4,4 %. La part du BCRD se stabilise depuis quatre ans, que ce soit par rapport au PIB (autour de 0,63 %) ou par rapport au budget de l’Etat (environ 3,35 %). De la même manière, la dépense nationale de recherche et développement (DNRD) qui représente le financement par les entreprises ou administrations françaises des travaux de recherche est stable à 2,2 % du PIB depuis plusieurs années, un pourcentage inférieur à celui des principaux pays développés, notamment les Etats-Unis, le Japon et l’Allemagne.

Le décalage entre cette triste réalité et les ambitions politiques affichées est flagrant. La faible progression des crédits l’an prochain sera particulièrement préjudiciable à l’emploi. Au demeurant, il n’est pas certain que les priorités de ce budget soient de nature à garantir effectivement les moyens des organismes de recherche.

    A. LE BUDGET MINISTÉRIEL : UNE PROGRESSION LIMITÉE

Deux priorités sont affirmées par le Gouvernement : d’une part, le renforcement de la capacité d’intervention du ministère, à partir du Fonds national de la science (FNS) et du Fonds de la recherche et de la technologie (FRT) ; d’autre part, la restauration des moyens des laboratoires des organismes de recherche. Le premier de ces objectifs est discutable. Quant au second, il paraît, compte tenu de la réalité de ce budget, hors d’atteinte.

      1. Le renforcement de la capacité d’intervention du ministère

Les moyens du FNS, créé en 1999, sont renforcés, aussi bien en autorisations de programme (+ 40 %, de 500 à 700 millions de francs), qu’en crédits de paiement (+ 77 %, de 318 à 565 millions de francs). Cette augmentation est destinée à financer des actions d’incitation dans des secteurs considérés comme prioritaires : sciences du vivant ; sciences humaines et sociales ; sciences de la planète et de l’environnement.

Les crédits de soutien à la recherche et à la technologie (FRT et diffusion des technologies du secteur spatial) passent de 670 millions de francs d’autorisations de programme à 905 millions de francs, soit une progression de 35 %. Cette augmentation doit permettre d’accentuer l’effort de recherche dans les secteurs des nouvelles technologies de l’information et de la communication, des transports et de l’environnement, de poursuivre le concours de création d’entreprises technologiques innovantes et la mise en place d’incubateurs.

Ces augmentations importantes sont la traduction d’un choix politique quelque peu contestable et qui, en tout cas, n’a pas suffisamment fait l’objet de débats au Parlement et dans le pays.

Par le biais de ces deux fonds, pourvus de moyens significatifs, le ministère s’est en réalité doté d’instruments qui lui confèrent un rôle quasi-exclusif dans la coordination de la recherche, en lui permettant de financer certains programmes selon une perspective gouvernementale. Les organismes de recherche sont ainsi marginalisés : exclus a priori de la fonction de concertation qu’ils pourraient, dans certains secteurs, exercer, ils voient leurs budgets propres augmenter de manière beaucoup plus faible. Ainsi, dans le domaine des sciences du vivant, affiché comme une des priorités du FNS, le budget de l’INSERM n’augmente que de 1,8 %. A titre de comparaison, la progression de l’équivalent de l’INSERM aux Etats-Unis, la NIH, est de 15 % et le budget de son homologue britannique, le MRC, a crû de 8 % pendant cinq ans.

Il y a lieu de s’interroger sur la pertinence de cet arbitrage.

      2. Les moyens des organismes de recherche

L’affirmation selon laquelle ce budget favoriserait la restauration des moyens des organismes de recherche se doit d’être nuancée.

Certes, la dotation des établissements publics scientifiques et techniques (EPST) est globalement en augmentation de 1,4 % en dotations ordinaires et crédits de paiement et de 3 % en autorisations de programme, avec une priorité affirmée sur le soutien de base des unités de recherche, qui augmente de 3,5%. Toutefois, malgré cette augmentation, le projet de budget est mauvais en ce qui concerne les personnels. Quant aux dotations aux établissements publics industriels et commerciaux (EPIC), elles connaissent des variations contrastées. Enfin, certaines mesures nouvelles bénéficient aux fondations de recherche, notamment l’Institut Curie et les Instituts Pasteur.

      a) Les EPST

Les autorisations de programme pour l’ensemble des EPST augmentent de 122,20 millions de francs par rapport à 1999, dont 77,81 millions de francs pour le CNRS. Au sein de cette enveloppe, les dotations de base des laboratoires représentent 98,8 millions de francs et les dotations d’équipement 23,4 millions de francs.

Les mesures en faveur des personnels sont très insuffisantes au regard des besoins et des ambitions. Si le projet de budget prévoit 356,4 millions de francs de moyens nouveaux, plus de la moitié de cette somme (183,2 millions de francs) est destinée à la mise en œuvre en 2000 de l’accord salarial de 1998. En réalité, seuls 39,5 millions de francs correspondent à des mesures d’emplois et, parallèlement, une économie de 115 millions de francs est opérée sur les trois plus importants EPST (CNRS, INRA et INSERM).

Cette pénurie ne permettra pas de créer plus de 18 emplois d’ingénieurs, cadres et administratifs (à l’INRIA, l’IRD et l’INRETS).

Par ailleurs, il est inquiétant de constater que ce budget ne prévoit aucune création d’emplois de chercheurs. L’argument, avancé par le ministère, selon lequel « les flux des départs naturels en 2000 autoriseront un taux de recrutement significatif de 3 % sans qu’il soit besoin de procéder à des créations d’emplois » n’est pas recevable. D’une part, la pertinence de ce taux de renouvellement de 3 % n’est pas démontrée. D’autre part, cette affirmation traduit une approche purement comptable de la recherche, qui méconnaît l’importance de ce secteur pour l’avenir du pays.

      b) Les EPIC

Si le projet de loi de finances prévoit pour l’IFREMER, le CIRAD, l’ADEME et le BRGM une progression des dotations de 1,3 % en dépenses ordinaires et de 1,6 % en autorisations de programme, les variations des crédits alloués aux moyens des laboratoires sont contrastées. La progression apparente de 9,7 millions de francs pour le CIRAD doit être réduite de 6,5 millions de francs liés à la budgétisation de la taxe parafiscale appliquée aux expéditions de fruits tropicaux. Les dotations de l’ADEME et du BRGM sont reconduites à leur niveau de 1999. Quant à l’IFREMER, la pause enregistrée dans ses crédits de paiement ne lui permettra pas de maintenir le niveau de sa flotte.

De même, si la subvention en dépenses ordinaires du CEA, d’un montant de 6,161 milliards de francs, connaît une progression sensible (+ 4,1 %), celle-ci tient pour une grande part à la compensation des surcoûts liés à l’évolution prochaine du statut de l’IPSN. En revanche, la subvention d’investissement demeure seulement stable, ce qui risque de nuire à la coopération de cet organisme avec l’université et l’industrie. Or, le CEA est un établissement de recherche à vocation essentiellement finalisée, qui joue un rôle déterminant au service des objectifs de l’Etat en matière de recherche nucléaire et de développement technologique. La recherche nucléaire civile a pour objectif stratégique à court et moyen terme d’apporter les éléments scientifiques et techniques permettant de maintenir l’option nucléaire ouverte à l’horizon 2010. Par ailleurs, le CEA est un partenaire actif de la stratégie nationale de diffusion technologique vers les petites et moyennes entreprises et participe de ce fait au réseau mis en place dans les régions en liaison avec l’ANVAR. Il s’implique également dans la transmission du savoir et la formation par la recherche dans ses domaines d’expertise, en renforçant son partenariat avec les établissements d’enseignement supérieur.

Enfin, l’enveloppe du CNES consacrée aux programmes nationaux progresse de 2,7 %, mais la subvention de fonctionnement de l’organisme est seulement reconduite au niveau de 1999. Or, le CNES joue un rôle primordial dans la conception et la mise en œuvre du programme spatial français, dans un contexte qui a profondément évolué depuis le début de la décennie, et il est considéré comme l’un des tout premiers centres d’excellence en matière de techniques et technologies des systèmes spatiaux. La dimension européenne de ses programmes et activités, à travers l’Agence spatiale européenne, est particulièrement développée.

      c) Les fondations

Le projet de loi de finances prévoit également un effort au profit des fondations de recherche, la subvention à l’institut Curie et aux instituts Pasteur augmentant de 8,3 millions de francs.

    B. LE BCRD : UN RATTRAPAGE INSUFFISANT

Les crédits inscrits au budget du ministère de l’éducation nationale, de la recherche et de la technologie s’élèvent, au sein du BCRD 2000, à 42,447 milliards de francs, en baisse de 0,2 % par rapport à 1999. A l’intérieur de cette enveloppe, la plus grande part est représentée par le budget de la recherche et de la technologie (39,8 milliards de francs).

Les actions des autres ministères au sein du BCRD se montent donc à 12,199 milliards de francs (voir tableau joint).

Elles ne connaissent pas d’évolution sensible par rapport à 1999.

Les variations les plus marquantes du BCRD 2000 sont les suivantes :

- ministère de l’éducation nationale, de la recherche et de la technologie (enseignement supérieur).

Les crédits de la recherche universitaire augmentent légèrement (3,1 %) : mesure nouvelle de 25 millions de francs pour les activités de recherche dans l’enseignement supérieur ; plan d’accueil de 160 post-doctorants étrangers ; création de 10 emplois de chercheurs à l’Ecole française d’Extrême-Orient.

- ministère de l’industrie

Les crédits de la recherche industrielle gérés par le ministère de l’industrie et ceux de l’ANVAR sont stables. Le budget d’intervention de l’ANVAR se stabilise à 1 400 millions de francs et les dépenses ordinaires n’augmentent, dans le projet de loi de finances pour 2000 que de 0,9 million de francs. Il est regrettable que cet organisme qui travaille de manière de plus en plus efficace soit depuis douze ans à effectif budgétaire constant.

- ministère des affaires étrangères

Un crédit de 3,7 millions de francs est attribué à ce ministère pour renforcer la mobilité des chercheurs et améliorer la recherche en sciences sociales.

La subvention au CERN n’augmente que de 1,3 %, ce qui signifie une stagnation en termes réels.

- ministère de l’équipement

Les principaux abondements touchent le programme de sécurité routière (+ 6 millions de francs d’autorisations de programme), les crédits de Météo France (20 millions de francs supplémentaires en autorisations de programme et 10 millions en crédits de paiement) et les programmes aéronautiques civils.

Part des ministères dans le BCRD 2000

MINISTÈRES

DO

AP

CP

DO+AP

DO+CP

 

PLF 2000

Part du BCRD en %

PLF 2000

Part du BCRD en %

PLF 2000

Part du BCRD en %

PLF 2000

Part du BCRD en %

PLF 2000

Part du BCRD en %

AFFAIRES ETRANGERES

905,22

2,8 %

0,00

0,0 %

0,00

0,0 %

905,22

1,6 %

905,22

1,7 %

AGRICULTURE, PÊCHE

73,74

0,2 %

62,00

0,3 %

69,24

0,3 %

135,74

0,2 %

142,99

0,3 %

CULTURE

422,42

1,3 %

307,10

1,3 %

306,10

1,4 %

729,52

1,3 %

728,52

1,3 %

ÉDUCATION NATIONALE, R & T

27 177,01

83,3 %

15 467,31

67,7 %

15 270,00

69,4 %

42 644,32

76,9 %

42 447,01

77,7 %

- Recherche et technologie (1)

26 592,80

81,5 %

13 465,25

58,9 %

13 267,94

60,3 %

40 058,05

72,2 %

39 860,74

72,9 %

- Enseignement supérieur

504,33

1,5 %

2 002,06

8,8 %

2 002,06

9,1 %

2 506,39

4,5 %

2 506,39

4,6 %

- Enseignement scolaire

79,88

0,2 %

 

0,0 %

 

0,0 %

79,88

0,1 %

79,88

0,1 %

DÉFENSE (1)

 

0,0 %

1 500,00

6,6 %

1 500,00

6,8 %

1 500,00

2,7 %

1 500,00

2,7 %

ENVIRONNEMENT

14,63

0,0 %

70,00

0,3 %

67,79

0,3 %

84,53

0,2 %

82,42

0,2 %

ÉQUIPEMENT ET TRANSPORTS

139,88

0,4 %

2 140,19

9,4 %

1 771,35

8,0 %

2 280,07

4,1 %

1 911,23

3,5 %

LOGEMENT

136,78

0,4 %

38,50

0,23 %

37,77

0,2 %

175,28

0,3 %

174,55

0,3 %

INDUSTRIE

3 633,56

11,1 %

3 247,00

14,2 %

2 971,50

13,5 %

6 880 56

12,4 %

6 605,06

12,1 %

INTÉRIEUR

 

0,0 %

2,50

0,0 %

3,50

0,0 %

2,50

0,0 %

3,50

0,0 %

JUSTICE

5,60

0,0 %

0,00

0,0 %

0,00

0,0 %

5,60

0,0 %

5,60

0,0 %

PLAN

53,76

0,2 %

3,00

0,0 %

4,60

0,0 %

56,76

0,1 %

58,36

0,1 %

EMPLOI

38,22

0,1 %

 

0,0 %

 

0,0 %

38,22

0,1 %

38,22

0,1 %

SANTÉ

38,71

0,1 %

6,00

0,0 %

4,95

0,0 %

44,71

0,1 %

43,66

0,1 %

TOTAL BCRD

32 639,53

100 %

22 843,60

100 %

22 006,80

100 %

55 483,13

100 %

54 546,33

100 %

TOTAL BCRD hors « recherche »

6 046,73

18,25 %

9 378,35

0,0 %

8 738,86

39,7 %

15 425,08

27,8 %

14 785,59

27,1 %

(1) La dotation Défense correspond aux programmes de recherche du CNES à double finalité, civile et militaire. Elle est destinée à être transférée en gestion sur le budget de la Recherche. Compte tenu de cette dotation (portée de 900 MF en 1999 à 1500 MF en 2000) le budget de la Recherche progresse de 1,1 % en DO+CP.

Le BCRD n’est en réalité qu’un instrument de coordination théorique, qui retrace davantage des masses salariales que des actions et des politiques.

*

* *

Un saupoudrage d’augmentations ne tient pas lieu de stratégie budgétaire. Ce budget n'est pas satisfaisant, au regard de l’obligation que constitue pour la France et pour l’Europe le développement de la recherche. Toutefois, il ne suffit pas de renforcer les moyens, il faut aussi, pour affirmer une véritable politique de recherche, mieux les utiliser. Cette adaptation doit passer par une réorganisation du système français de recherche.

II.- PISTES DE RÉFLEXION SUR L’ORGANISATION DE LA RECHERCHE EN FRANCE

Il y a quelque chose de paradoxal dans la situation de la recherche en France.

Le ministre en charge de la recherche, M. Claude Allègre, est un scientifique de renom qui, malgré l’étendue de ses attributions, porte un indéniable intérêt personnel à ces questions. Des mesures positives ont été prises, telles que la loi n° 99-587 du 12 juillet 1999 sur l’innovation et la recherche, même si le report de son volet financier en atténue la portée. Des initiatives intéressantes ont été lancées, comme le rapport au Premier ministre de MM. Cohen et Le Déaut « Priorités à la recherche ».

Dans le même temps, le débat sur les structures de la recherche est très peu développé. Or, à l’évidence, l’efficacité de la recherche française, dans des domaines où la compétition internationale est souvent très vive, dépend de l’efficacité de ses structures.

Le présent rapport ne prétend pas fournir des solutions, mais il souhaite ouvrir la réflexion, lancer des idées, des hypothèses et des propositions, autour de trois questions principales :

- quelle structure gouvernementale pour traiter des questions de recherche et d’innovation ?

- faut-il remodeler les organismes de recherche et quelles doivent être les relations recherche-université ?

- quelle articulation entre l’appareil de recherche, les collectivités décentralisées, les institutions européennes, la coopération internationale ?

    A. L’ORGANISATION MINISTÉRIELLE

Le choix opéré en 1997, lors de la formation du gouvernement de M. Lionel Jospin, innove. Le ministère dont a la charge M. Claude Allègre couvre à la fois l’ensemble de l’éducation nationale, la recherche et la technologie, sans qu’un ministre délégué ou un secrétaire d’Etat chargé des universités et/ou de la recherche lui soit rattaché.

A l’intérieur de ce vaste ensemble, le ministre a réformé les structures compétentes en matière de recherche, en scindant en deux l’ancienne direction de la recherche et de la technologie.

Sur aucun de ces deux aspects, les solutions actuellement retenues ne paraissent optimales.

      1. La place de la recherche dans la structure gouvernementale

La place du secteur de la recherche dans la répartition des compétences ministérielles pose problème.

Aux débuts de la Vème République, la recherche a été attribuée à un ministre autonome, ayant souvent le rang de ministre d’Etat, parfois celui de ministre délégué auprès du Premier ministre, l’intitulé du ministère faisant généralement référence aux priorités de l’époque, à savoir les questions atomiques et spatiales.

Par la suite, de nombreuses autres formules ont été expérimentées, sans qu’aucune s’impose durablement. En se limitant aux vingt dernières années on notera que la solution d’un ministère autonome de la recherche a rarement été reprise. Ce fut le cas en 1981-1982, avec M. Jean-Pierre Chevènement, et de 1984 à 1986, puis de 1988 à 1993, avec M. Hubert Curien.

Dans d’autres gouvernements, le secteur de la recherche et de la technologie a été rattaché :

- soit au ministère de l’industrie, selon une formule déjà expérimentée au début des années 70 avec le ministère « du développement industriel et scientifique » ; cette solution fut appliquée de 1982 à 1984, les ministres étant M. Jean-Pierre Chevènement, puis M. Laurent Fabius ;

- soit, le plus souvent, au ministère de l’éducation nationale, avec diverses variantes : ministre délégué chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche (MM. Alain Devaquet et Jacques Valade entre 1986 et 1988) ; ministre autonome ayant le même secteur de compétences (M. François Fillon de 1993 à 1995) ; secrétaire d’Etat à la recherche (Mme Elisabeth Dufourcq, puis M. François d’Aubert, de 1995 à 1997).

Chacune de ces solutions encourt des critiques. Le rattachement à l’industrie correspond à une conception dépassée et réductrice de la recherche, vue seulement à travers ses applications industrielles. Le rattachement à l’enseignement supérieur a une logique certaine, puisqu’il permet de mettre en évidence les liens entre l’université et la recherche. Toutefois, l’expérience montre que le ministre a alors souvent tendance à gérer l’enseignement supérieur en priorité, au détriment de la recherche. Au demeurant, cette formule ne permet pas de prendre en compte la dimension interministérielle de la politique de recherche, qui s’exprime en particulier à travers le BCRD.

En tout cas, le système actuel est, de l’avis de la plupart des personnalités rencontrées par le rapporteur, le moins satisfaisant qui puisse se concevoir. Il paraît davantage adapté à la personnalité du ministre qu’à une réflexion sur les structures. La politique de recherche, noyée dans un immense ensemble, fait l’objet d’impulsions intermittentes et non d’une action dans la durée. Les organismes de recherche n’ont, dans ces conditions, pas vraiment d’interlocuteur au sein du Gouvernement.

Au vu de ces diverses expériences, les principes suivants devraient inspirer une approche plus rationnelle et durable de la question.

- L’importance de la recherche et de la technologie dans la vie de la Nation justifie que ce secteur relève d’un ministre ou ministre délégué siégeant au Conseil des ministres, et non d’un secrétaire d’Etat.

- A moyen terme, la meilleure solution est celle d’un ministère indépendant, rattaché le cas échéant au Premier ministre. Le ministre disposerait ainsi d’une véritable capacité de coordination et d’arbitrage. Pour marquer aux yeux des Français l’utilité fondamentale de ce ministère, qui est en réalité le « ministère de l’avenir », il serait opportun de préciser dans son intitulé qu’il est le ministère de la recherche, de la technologie, mais aussi de la prospective.

- Toutefois, cette solution se heurte dans l’immédiat à des difficultés. Un tel ministère aurait du mal à trouver sa place dans l’appareil de l’Etat. La meilleure formule de transition est sans doute celle qui consiste à regrouper enseignement supérieur et recherche, dans une structure autonome ou, le cas échéant, un ministère délégué. A l’intérieur de ce ministère, serait clairement identifiée une direction en charge de la recherche et de la technologie.

      2. L’organisation interne du ministère

Le décret n° 97-1149 du 15 décembre 1997, qui a réorganisé l’administration centrale du ministère de l’éducation nationale, de la recherche et de la technologie, a scindé en deux l’ancienne direction de la recherche et de la technologie.

      · Aux termes de ce décret, la direction de la technologie :

- élabore la politique de développement technologique et de l’innovation et veille à sa mise en œuvre ;

- définit les moyens de développer la valorisation des résultats de la recherche publique et la coopération technologique avec les entreprises ;

- assure la tutelle des organismes à dominante technologique relevant du ministère ;

- participe à l’élaboration des programmes de recherche et de développement technologique financés par la Communauté européenne et en suit l’exécution ;

- détermine, pour ce qui concerne le ministère, les procédures de financement de la recherche industrielle et de soutien à l’innovation ;

- gère le Fonds de la recherche et de la technologie et les crédits de diffusion des technologies spatiales ;

- facilite l’utilisation des technologies de l’information dans le système éducatif.

La direction de la technologie est subdivisée en deux sous-directions et quatre départements thématiques :

- la sous-direction des technologies éducatives et des technologies de l’information et de la communication ;

- la sous-direction de l’innovation et du développement technologique ;

- quatre départements scientifiques : espace et aéronautique ; biotechnologies, médicaments, agro-alimentaire ; informatique et télécommunications ; énergie, transports, environnement et ressources naturelles.

Par ailleurs, un directeur adjoint est chargé des affaires européennes et internationales.

      · La direction de la recherche :

- élabore la politique en matière de recherche, de formation par la recherche et d’emploi scientifique et veille à sa mise en œuvre ;

- exerce la tutelle sur les organismes de recherche qui ne relèvent pas de la direction de la technologie ;

- prépare le BCRD et en assure la coordination ;

- prépare la répartition des moyens de la recherche entre les établissements d’enseignement supérieur, dans le cadre de la politique contractuelle menée avec ces établissements ;

- assure la responsabilité de l’organisation et du financement des études doctorales ;

- exerce la tutelle sur les écoles normales supérieures et les écoles françaises à l’étranger relevant de la loi du 26 janvier 1984 sur l’enseignement supérieur ;

- met en œuvre les procédures et les moyens d’évaluation et d’expertise nécessaires à ses missions ;

- propose et met en œuvre la politique de diffusion de la culture scientifique et technique et assure la tutelle des établissements et musées relevant de ce domaine.

La direction de la recherche est subdivisée en trois sous-directions et sept départements scientifiques thématiques. En outre, un directeur adjoint est chargé de la recherche universitaire et des études doctorales.

Les sous-directions sont respectivement compétentes pour :

- les organismes de recherche et la coordination du BCRD ;

- la recherche universitaire et les études doctorales ;

- les musées et la culture scientifique et technique.

Les sept départements sont chargés des secteurs suivants : mathématiques ; physique et sciences pour l’ingénieur ; sciences de la terre et de l’univers ; chimie ; biologie, médecine, santé ; sciences de l’homme et humanités ; sciences de la société.

De l’avis général, cette organisation n’est pas réellement rationnelle et n’est pas satisfaisante. Elle correspond à une approche assez abstraite de la recherche et de la technologie. Parmi les nombreuses personnalités rencontrées par le rapporteur, très peu ont soutenu la réforme de 1997, essentiellement en faisant valoir que l’ancienne direction générale constituait une structure trop lourde, que recherche et innovation obéissent à deux logiques différentes et que la nouvelle organisation valorise l’innovation technologique.

Le plus souvent, les points de vue sont critiques. Pour certains, le système n’est pas très bon, mais fonctionne en pratique à peu près correctement grâce aux hommes qui le font vivre, qui ont gardé ou pris l’habitude de travailler en commun. Pour d’autres, il s’agit d’une séparation artificielle, qui complique inutilement la tâche des organismes de recherche.

De fait, l’organigramme de chacune des deux nouvelles directions est complexe, puisqu’il est construit « en matrice », en distinguant d’une part selon les spécialités, d’autre part selon les projets. Cette structure crée inévitablement des doubles emplois, tout en laissant subsister des vides.

A titre d’exemple, est-il souhaitable de séparer la recherche en matière de médecine et de santé de la politique du médicament, qui relève de la direction de la technologie ?

A l’inverse, certains besoins ne sont pas pris en compte dans cet organigramme. Le rapporteur en donnera deux exemples.

D’une part, la dimension internationale et européenne relève de structures éclatées (un bureau des relations internationales à la direction de la recherche ; un bureau de la coordination européenne et des relations internationales au sein de la direction de la technologie). Le directeur adjoint pour les affaires européennes et internationales à la direction de la technologie n’est donc pas en mesure de coordonner l’ensemble. Au demeurant, les deux aspects, international et européen, ne sont pas suffisamment distingués.

D’autre part, la mission de prospective, d’expertise et de veille n’est pas assez développée. Elle ne peut relever que d’une structure ad hoc, compétente à la fois pour la recherche et l’innovation, et ayant des liens étroits avec les organismes de recherche.

Le rapporteur propose donc la reconstitution d’une direction commune ou, à défaut, le renforcement de la coordination entre les deux directions, ainsi que la création de deux cellules communes, une pour les affaires européennes et internationales, dont on précisera l’organisation et les missions, et l’autre chargée de la prospective et de la veille scientifique et technique.

    B. LES ORGANISMES DE RECHERCHE ET LES RELATIONS ENTRE L’UNIVERSITÉ ET LA RECHERCHE

La recherche française ne repose pas seulement sur une organisation ministérielle, mais sur deux éléments fondamentaux : les organismes de recherche d’une part, l’université d’autre part.

      1. Les organismes de recherche

L’ensemble constitué par les organismes français de recherche paraît à première vue déséquilibré entre un "éléphant", le CNRS, couvrant presque entièrement le champ de la connaissance scientifique, et une myriade d’établissements spécialisés, présentant une grande diversité quant à leur finalité, à leurs dimensions, à leurs statuts et leurs structures.

L’idée de restructurer cet ensemble est récurrente, car l’organisation actuelle ne favorise ni l’émergence de nouvelles disciplines, ni la pluridisciplinarité.

Sa formulation la plus radicale consisterait à "éclater" le CNRS, énorme machine jugée souvent ingérable, avec un effectif de plus de 26 000 personnes (chercheurs et ITA) sur un total de 48 000 pour l’ensemble des organismes, et un budget considérable, puisqu’il s’élève, dans le projet de loi de finances pour 2000, à 11,525 milliards de francs en dépenses ordinaires et 2,489 milliards de francs d’autorisations de programme. L’idée serait de remplacer le CNRS par autant d’organismes qu’il y a de spécialités scientifiques et de regrouper, le cas échéant, les entités ainsi créées avec des organismes de recherche existants.

Une autre formule moins révolutionnaire pourrait être de transformer le CNRS en une agence de moyens, fédérant un ensemble de départements et d’organismes autonomes.

Toutefois, il semble que ces propositions doivent être abordées avec prudence. L’éclatement du CNRS n’est pas une fin en soi. Toute tentative de remodelage ou de modification des périmètres des organismes pourrait nuire à leur efficacité et provoquerait inévitablement des inquiétudes de la part des personnels.

Au demeurant, la plupart des organismes de recherche existants ont une identité forte, à laquelle ils sont légitimement attachés. Certains ont une dimension qu’ils jugent eux-mêmes optimales. On peut ainsi citer le cas de l’INRIA (recherche en informatique et automatique) qui emploie 2 000 personnes, dont 766 sur emplois budgétaires, ou celui de l’Institut Pasteur, qui dispose d’un statut original, en dehors de la recherche publique, et qui emploie 2 700 personnes, dont 1100 chercheurs .

L’objectif n’est pas, en réalité, de casser des outils existants, souvent performants. Il doit être plutôt d’adapter la structure de chacun des organismes et de développer entre eux les coopérations et les coordinations nécessaires. Cela suppose de mieux distinguer, dans l’activité de certains organismes, comme le CEA ou l’IFREMER, la part qui revient effectivement à la recherche de l’activité économique et industrielle. Cela implique aussi de réfléchir à la structure interne des organismes, aux pouvoirs de leurs présidents et à l’autonomie de leurs départements.

Il convient enfin de redéfinir les relations entre université et recherche.

      2. Université et recherche : vers un statut d’enseignant-chercheur

La volonté du gouvernement de donner davantage d’importance aux universités dans la recherche va dans le bon sens et doit être approuvée.

Le rôle primordial de l’université est admis par tous. Elle fournit le tissu des jeunes chercheurs qui feront la recherche de demain. Elle participe, pour une grande part, à la recherche fondamentale.

Essentiel, ce rôle ne saurait toutefois être exclusif : la place des acteurs non universitaires de la recherche, notamment les partenaires industriels, doit être assurée.

Le rapprochement entre université et recherche ne passe pas seulement par le développement, indispensable, de ce qui existe déjà, les laboratoires communs.

Il suppose aussi une réflexion sur les statuts et les carrières des personnels qui pourrait aboutir, à terme, à la création d’un corps unique d’enseignants-chercheurs.

La portée de cette proposition se doit d’être précisée.

Il ne s’agit pas d’absorber la recherche dans le système universitaire. Celui-ci n’a d’ailleurs pas entièrement vocation à se consacrer à la recherche, puisque les premiers cycles sont seulement destinés à l’enseignement. Au demeurant, les organismes de recherche doivent, on l’a déjà souligné, conserver leur spécificité.

En revanche, le maintien du cloisonnement actuel entre les deux statuts serait préjudiciable au développement de la recherche. L’objectif du statut d’enseignant-chercheur peut se concevoir de différentes manières.

La formule la plus radicale, pronée par certains, est celle du rapprochement immédiat et global (mêmes carrières, mêmes rémunérations). Il n’est pas certain que cela soit réaliste à court terme.

Sans doute, est-il plus opportun d’envisager des modulations, des étapes. Deux propositions complémentaires peuvent être signalées.

La première est celle du rapport précité de MM. Cohen et Le Déaut. Il s’agit de prendre en compte, dans le déroulement des carrières, la totalité des missions liées à la recherche en créant des postes d’accueil, où les enseignants puissent devenir chercheurs, et en instaurant des mesures incitatives à la mobilité pour les promotions. Cette "modulation" irait dans le sens d’un rapprochement des statuts, mais avec prudence.

L’autre idée serait de n’appliquer le nouveau statut d’enseignant- chercheur qu’à partir d’un certain niveau (directeur de recherche et professeur d’université). Pour les maîtres de conférences et chargés de recherche, des passerelles pourraient être développées, permettant de passer facilement de l’une à l’autre fonction.

En toute hypothèse, le rapprochement entre université et recherche supposera une plus grande coordination locale.

    C. DANS LES RÉGIONS ET VERS L’EUROPE ET LE MONDE

L’organisation de la recherche française ne peut plus aujourd’hui être examinée seulement au niveau de l’Etat-nation.

      1. Recherche et décentralisation

Si le tableau des instances compétentes en matière de recherche et de technologie est complexe à l’échelon national, il l’est tout autant, voire plus, dans les collectivités décentralisées. Les intervenants sont multiples et variés, puisque coexistent :

- les délégations régionales à la recherche et à la technologie (DRRT) ;

- les directions régionales de l’industrie, de la recherche et de l’environnement (DRIRE) ;

-les représentations régionales du CNRS et souvent d’autres organismes de recherche ;

      - les délégations régionales de l’ANVAR.

Il convient d’ajouter à ces différents acteurs les universités elles-mêmes.

Un tel foisonnement n’est pas sans poser problème et la nécessité d’une plus grande coordination, au sein d’un espace péri-universitaire, est souvent exprimée.

La principale difficulté tient aux relations entre les DRRT et les DRIRE. Les DRRT sont une structure légère, une administration de mission. C’est à elles qu’incombe en théorie la fonction de coordination. Mais elles pèsent d’un faible poids par rapport aux puissantes DRIRE, souvent dirigées par un ingénieur, qui correspondent davantage à une conception autoritaire de l’Etat.

Il convient également d’avoir à l’esprit que le niveau régional est plus ou moins pertinent. Certaines régions, comme le Limousin, n’ont qu’une activité limitée en matière de recherche, alors que d’autres, comme Rhône-Alpes, regroupent sur leur territoire plusieurs pôles de recherche importants. La coordination est donc d’une utilité et d’une difficulté variables.

Il faut aussi préciser de quelle manière cette coordination s’excerce, quelles fonctions peuvent être mises en commun. En première analyse, on peut citer les marchés publics, les systèmes informatiques et comptables, l’hygiène et la sécurité.

Il convient enfin de se demander quelle autorité doit assumer cette fonction de coordination. Plusieurs solutions ont été suggérées au rapporteur. Par exemple, confier la coordination au préfet de région ou encore à un universitaire ou un chercheur, qui assurerait cette fonction de manière tournante. Ces propositions ne sont d’ailleurs pas incompatibles, cet universitaire ou chercheur pouvant très bien être rattaché au préfet.

      2. Recherche, Europe et coopération internationale

Il n’est pas nécessaire d’insister longuement sur l’importance de la dimension européenne de la recherche. Ce n’est qu’à travers des coopérations continentales que les centres européens de recherche peuvent renforcer leur compétitivité et battre en brèche la toute-puissance américaine et japonaise.

L’Europe de la recherche existe déjà. Elle est née en dehors de tout cadre institutionnel, avec le CERN, puis elle a connu un développement remarquable au sein de l’Union européenne, avec les programmes-cadres de recherche-développement (PCRD), ou à ses marges, avec le programme Eureka.

Toutefois, l’articulation entre la recherche française et ces projets et programmes européens pourrait s’améliorer, faute de quoi nos taux de retour sur le PCRD vont continuer à baisser.

Actuellement, la représentation des intérêts scientifiques français auprès de l’Union européenne est assurée à travers le CLORA (club des organismes de recherche associés), qui comprend un délégué par organisme de recherche, soit en tout une quinzaine de personnes.

Une telle formule n’est pas optimale, car elle laisse subsister un trop fort cloisonnement entre les organismes. Le rapporteur a déjà proposé l’instauration, au soin du ministère en charge de la recherche et de la technologie, d’une mission chargée des affaires internationales et européennes. A l’intérieur de cette mission, deux fonctions devraient être clairement distinguées.

D’une part, l’Europe : une telle mission devrait assurer la représentation à Bruxelles de la communauté scientifique française et la liaison, dans les deux sens, entre les institutions européennes, le ministère et les organismes de recherche. La coopération européenne ne doit pas en effet faible oublier qu’il y a aussi, en Europe, une compétition économique et donc des intérêts français à défendre et à promouvoir.

D’autre part, la coopération internationale, qui existe déjà, doit se développer et se tourner en priorité vers les pays du sud. Il convient de mieux isoler l’effort de recherche envers les pays en voie de développement, d’encourager les partenariats. Le réseau international des Instituts Pasteur offre à cet égard une expérience remarquable. La coopération en matière de santé doit concerner en particulier des domaines tels que la santé de la famille en Afrique de l’ouest.

CONCLUSION

Le débat sur l’organisation de la recherche ne fait que commencer.

Il doit être aussi large que possible. La recherche n’est pas une affaire de spécialistes. Même si les citoyens n’en ont pas toujours une claire conscience, ce qui se passe dans les laboratoires engage l’avenir du pays. Le Parlement a un rôle fondamental à jouer dans la perception de ce grand enjeu. A côté des organismes spécialisés, comme l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, qui accomplit un travail remarquable, la commission des affaires culturelles, familiales et sociales doit être partie prenante à ce débat.

Pour l’heure, le rapporteur est tenu d’exprimer un avis sur le budget de la recherche pour 2000. Il ne peut que constater une fois de plus le décalage entre des enjeux primordiaux, le volontarisme politique affiché et l’indigence des moyens. Un budget aussi médiocre n’est pas à la hauteur des ambitions proclamées, il n’est pas en mesure de répondre aux attentes de la communauté scientifique française.

Le Parlement doit aider le ministre à obtenir davantage, à mettre en accord son discours et la réalité.

Le grand débat que le rapporteur appelle de ses vœux ne pourra aboutir que si la recherche bénéficie de moyens correspondant à son importance pour l’avenir de la Nation. Tant qu’il n’en est pas ainsi, il ne peut conclure que par un avis défavorable au projet de budget de la recherche pour 2000.

liste des personnalités rencontrées par le rapporteur

· M. Hubert CURIEN, ancien ministre de la Recherche et de la Technologie

· M. Jean-Yves LE DEAUT, député, premier vice-président de l’Office d’évaluation des choix scientifiques et technologiques

Prix Nobel

· M. Georges CHARPAK

· M. Pierre-Gilles de GENNES

· M. Jean-Marie LEHN

Universitaires

· M. Didier RAOULT, président de l’Université d’Aix-Marseille II

· M. Gérard TOBELEM, professeur des universités à Paris VII

Responsables d’organismes de recherche

· Mme Catherine BRECHIGNAC (CNRS)

· M. Alain BENSOUSSAN (CNES)

· M. Pierre DAVID (IFREMER)

· M. Yannick d’ESCATHA (CEA)

· M. Claude GRISCELLI (INSERM)

· M. Philippe JURGENSEN (ANVAR)

· M. Bernard LARROUTUROU (INRIA)

· M. Philippe LAZAR (IRD)

· M. Maxime SCHWARTZ (Institut Pasteur)

TRAVAUX DE LA COMMISSION

La commission a examiné pour avis, sur le rapport de M. Jean-Michel Dubernard, les crédits de la recherche pour 2000 au cours de sa séance du mercredi 13 octobre 1999.

Après l’exposé du rapporteur, le président Jean Le Garrec a noté l’intérêt des suggestions présentées par le rapporteur en souhaitant que soit approfondi le lien nécessaire devant exister entre l’université, la recherche et les entreprises.

M. Edouard Landrain a évoqué les problèmes de l’accueil en France des chercheurs étrangers et du retour en France des chercheurs français ayant travaillé à l’étranger.

Mme Geneviève Perrin-Gaillard a souhaité tempérer le jugement négatif porté sur le budget par le rapporteur, tout en partageant son souhait d’une réflexion sur l’organisation de la recherche. Soulignant que le rapport au Premier ministre de MM. Le Déaut et Cohen et la loi sur l’innovation et la recherche constituent des outils utiles, elle a demandé que la commission organise un large débat sur cette question.

M. Germain Gengenwin a exprimé sa satisfaction de voir des amendements qu’il avait déposés dans le cadre de la loi sur l’innovation et la recherche repris dans le projet de loi de finances.

M. Patrick Leroy a dénoncé la mauvaise lisibilité d’un budget éparpillé dans dix documents budgétaires et l’insuffisance es crédits au regard des enjeux. Il a par ailleurs déploré l’abandon de très grands équipements tel le projet Soleil et indiqué que le taux actuel de renouvellement des chercheurs se situait à un niveau de 3 % alors qu’un taux de 5 % est nécessaire à la simple compensation des départs en retraite.

M. Bernard Perrut, après avoir stigmatisé l’insuffisance du budget, a regretté que le financement de la recherche en France soit plus le fait du privé que de l’Etat. Il a demandé des précisions sur l’application du crédit d’impôt-recherche

Le président Jean Le Garrec a proposé l’organisation au début de l’année prochaine d’une réunion de la commission, en présence du ministre et avec la participation de MM. Le Déaut et Cohen, sur les problèmes de la recherche.

En réponse aux intervenants, le rapporteur pour avis a souligné la baisse du nombre de chercheurs étrangers accueillis en France et réaffirmé que l’avenir du pays dépend de notre recherche. Il a précisé que plus de 7 000 entreprises ont souscrit une déclaration de crédit d’impôt en 1998.

Contrairement aux conclusions du rapporteur pour avis, la commission a émis un avis favorable à l’adoption des crédits de la recherche pour 2000.

N°1862-07. - Avis de M. Jean-Michel Dubernard, au nom de la commission des Affaires culturelles, sur le projet de loi de finances pour 2000. - Education nationale, recherche et technologie : Recherche

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