N° 1862 ______ ASSEMBLÉE NATIONALE CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
AVIS PRÉSENTÉ AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES, FAMILIALES ET SOCIALES (1) SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2000 (n° 1805) TOME VII ÉDUCATION NATIONALE, RECHERCHE ET TECHNOLOGIE RECHERCHE PAR M. Jean-Michel DUBERNARD, Député. ___ (1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page. Voir le numéro : 1861 (annexe n° 19). Lois de finances La commission des affaires culturelles, familiales et sociales est composée de : M. Jean Le Garrec, président ; MM. Jean-Michel Dubernard, Jean-Paul Durieux, Jean-Pierre Foucher, Maxime Gremetz, vice-présidents ; Mme Odette Grzegrzulka, MM. Denis Jacquat, Noël Mamère, Patrice Martin-Lalande, secrétaires ; MM. Bernard Accoyer, Mme Sylvie Andrieux, MM. André Aschieri, Gautier Audinot, Mme Roselyne Bachelot-Narquin, MM. Jean-Paul Bacquet, Jean-Pierre Baeumler, Pierre-Christophe Baguet, Jean Bardet, Jean-Claude Bateux, Jean-Claude Beauchaud, Mmes Huguette Bello, Yvette Benayoun-Nakache, MM. Serge Blisko, Patrick Bloche, Mme Marie-Thérèse Boisseau, MM. Jean-Claude Boulard, Bruno Bourg-Broc, Mme Christine Boutin, MM. Jean-Paul Bret, Victor Brial, Yves Bur, Alain Calmat, Pierre Carassus, Pierre Cardo, Roland Carraz, Mmes Véronique Carrion-Bastok, Odette Casanova, MM. Laurent Cathala, Jean-Charles Cavaillé, Bernard Charles, Jean-Marc Chavanne, Jean-François Chossy, Mme Marie-Françoise Clergeau, MM. Georges Colombier, François Cornut-Gentille, Mme Martine David, MM. Bernard Davoine, Bernard Deflesselles, Lucien Degauchy, Marcel Dehoux, Jean Delobel, Jean-Jacques Denis, Dominique Dord, Mme Brigitte Douay, MM. Julien Dray, Guy Drut, Nicolas Dupont-Aignan, Yves Durand, René Dutin, Christian Estrosi, Claude Evin, Jean Falala, Jean-Louis Fousseret, Michel Françaix, Mme Jacqueline Fraysse, MM. Germain Gengenwin, Mme Catherine Génisson, MM. Jean-Pierre Giran, Michel Giraud, Gaëtan Gorce, François Goulard, Jean-Claude Guibal, Jean-Jacques Guillet, Mme Paulette Guinchard-Kunstler, M. Francis Hammel, Mme Cécile Helle, MM. Pierre Hellier, Michel Herbillon, Guy Hermier, Mmes Françoise Imbert, Muguette Jacquaint, MM. Jacky Jaulneau, Serge Janquin, Armand Jung, Bertrand Kern, Christian Kert, Jacques Kossowski, Mme Conchita Lacuey, MM. Jacques Lafleur, Robert Lamy, Edouard Landrain, Pierre Lasbordes, Mme Jacqueline Lazard, MM. Michel Lefait, Maurice Leroy, Patrick Leroy, Gérard Lindeperg, Patrick Malavieille, Mmes Gilberte Marin-Moskovitz, Jacqueline Mathieu-Obadia, MM. Didier Mathus, Jean-François Mattei, Mme Hélène Mignon, MM. Jean-Claude Mignon, Pierre Morange, Hervé Morin, Renaud Muselier, Philippe Nauche, Henri Nayrou, Alain Néri, Yves Nicolin, Bernard Outin, Dominique Paillé, Michel Pajon, Jean-Pierre Pernot, Mme Geneviève Perrin-Gaillard, MM. Bernard Perrut, Pierre Petit, Mme Catherine Picard, MM. Jean Pontier, Jean-Luc Préel, Alfred Recours, Gilles de Robien, Mme Chantal Robin-Rodrigo, MM. François Rochebloine, Marcel Rogemont, Yves Rome, Jean Rouger, Rudy Salles, Mme Odile Saugues, MM. André Schneider, Bernard Schreiner, Patrick Sève, Pascal Terrasse, Gérard Terrier, André Thien Ah Koon, Mme Marisol Touraine, MM. Anicet Turinay, Jean Ueberschlag, Jean Valleix, Alain Veyret, Philippe Vuilque, Jean-Jacques Weber, Mme Marie-Jo Zimmermann. SOMMAIRE Pages INTRODUCTION 5 I.- LES CRÉDITS DE LA RECHERCHE POUR 2000 : UN BUDGET DE STAGNATION 7
II.- PISTES DE RÉFLEXION SUR LORGANISATION DE LA RECHERCHE EN FRANCE 15
LISTE DES PERSONNALITÉS RENCONTRÉES PAR LE RAPPORTEUR 29 TRAVAUX DE LA COMMISSION 31 INTRODUCTION La présentation, par la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, dun avis budgétaire sur les crédits de la recherche a paru, ces dernières années, relever dun rituel bien réglé. Quels que soient les gouvernements, quelles que soient les majorités, le rapporteur dresse toujours le même constat, souligne constamment la même contradiction. Dune part, limportance de la recherche apparaît unanimement admise et tous les gouvernements affirment faire du rayonnement scientifique et technique de la France lune de leurs priorités. Dautre part, les moyens dégagés en faveur de ce secteur sont tantôt en stagnation, tantôt en recul. La tendance générale depuis six ans est à un tassement sensible des crédits, venant après quinze années de croissance de leffort national de recherche. Pour 2000, ce constat, largement partagé au sein de notre Assemblée au-delà des clivages politiques, conserve hélas toute sa validité. Toutefois, le rapporteur a souhaité ne pas sen tenir à cette approche budgétaire et mettre à profit cet avis pour proposer à la commission et à la Représentation nationale dengager une réflexion sur lorganisation française de la recherche. I.- LES CRÉDITS DE LA RECHERCHE POUR 2000 : UN BUDGET DE STAGNATION Les crédits inscrits au budget du ministère de léducation nationale, de la recherche et de la technologie concernant la recherche et la technologie sélèvent, dans le projet de loi de finances pour 2000, à 39,861 milliards de francs en dépenses ordinaires et crédits de paiement et à 13,465 milliards de francs en autorisations de programme, ce qui, à structures constantes, correspond à des augmentations de respectivement 1,1 % et 3,6 %. Le budget civil de recherche et développement (BCRD) qui regroupe lensemble des crédits de lEtat affectés à la recherche civile se monte pour 2000 à 54,646 milliards de francs en dépenses obligatoires et crédits de paiement, soit une progression de 1,7 % par rapport à la loi de finances initiale pour 1999. Les autorisations de programme, dont le montant est de 22,844 milliards de francs, progressent, à structures constantes, de 2,2 %. Ces évolutions nominales ne doivent pas faire illusion. La progression du budget de la recherche en crédits de paiement est à peine supérieure à laugmentation moyenne des dépenses du budget général (+ 0,9 %), qui traduit en réalité une stabilité des moyens en volume par rapport aux dotations de la loi de finances initiale de 1999. En outre, cette stagnation se réalise par rapport à un niveau 1999 lui-même très bas. De la même manière, le BCRD tend à stagner si lon examine ses dotations sur plusieurs années : depuis 1995, sa progression nest que de 4,4 %. La part du BCRD se stabilise depuis quatre ans, que ce soit par rapport au PIB (autour de 0,63 %) ou par rapport au budget de lEtat (environ 3,35 %). De la même manière, la dépense nationale de recherche et développement (DNRD) qui représente le financement par les entreprises ou administrations françaises des travaux de recherche est stable à 2,2 % du PIB depuis plusieurs années, un pourcentage inférieur à celui des principaux pays développés, notamment les Etats-Unis, le Japon et lAllemagne. Le décalage entre cette triste réalité et les ambitions politiques affichées est flagrant. La faible progression des crédits lan prochain sera particulièrement préjudiciable à lemploi. Au demeurant, il nest pas certain que les priorités de ce budget soient de nature à garantir effectivement les moyens des organismes de recherche. A. LE BUDGET MINISTÉRIEL : UNE PROGRESSION LIMITÉE Deux priorités sont affirmées par le Gouvernement : dune part, le renforcement de la capacité dintervention du ministère, à partir du Fonds national de la science (FNS) et du Fonds de la recherche et de la technologie (FRT) ; dautre part, la restauration des moyens des laboratoires des organismes de recherche. Le premier de ces objectifs est discutable. Quant au second, il paraît, compte tenu de la réalité de ce budget, hors datteinte. 1. Le renforcement de la capacité dintervention du ministère Les moyens du FNS, créé en 1999, sont renforcés, aussi bien en autorisations de programme (+ 40 %, de 500 à 700 millions de francs), quen crédits de paiement (+ 77 %, de 318 à 565 millions de francs). Cette augmentation est destinée à financer des actions dincitation dans des secteurs considérés comme prioritaires : sciences du vivant ; sciences humaines et sociales ; sciences de la planète et de lenvironnement. Les crédits de soutien à la recherche et à la technologie (FRT et diffusion des technologies du secteur spatial) passent de 670 millions de francs dautorisations de programme à 905 millions de francs, soit une progression de 35 %. Cette augmentation doit permettre daccentuer leffort de recherche dans les secteurs des nouvelles technologies de linformation et de la communication, des transports et de lenvironnement, de poursuivre le concours de création dentreprises technologiques innovantes et la mise en place dincubateurs. Ces augmentations importantes sont la traduction dun choix politique quelque peu contestable et qui, en tout cas, na pas suffisamment fait lobjet de débats au Parlement et dans le pays. Par le biais de ces deux fonds, pourvus de moyens significatifs, le ministère sest en réalité doté dinstruments qui lui confèrent un rôle quasi-exclusif dans la coordination de la recherche, en lui permettant de financer certains programmes selon une perspective gouvernementale. Les organismes de recherche sont ainsi marginalisés : exclus a priori de la fonction de concertation quils pourraient, dans certains secteurs, exercer, ils voient leurs budgets propres augmenter de manière beaucoup plus faible. Ainsi, dans le domaine des sciences du vivant, affiché comme une des priorités du FNS, le budget de lINSERM naugmente que de 1,8 %. A titre de comparaison, la progression de léquivalent de lINSERM aux Etats-Unis, la NIH, est de 15 % et le budget de son homologue britannique, le MRC, a crû de 8 % pendant cinq ans. Il y a lieu de sinterroger sur la pertinence de cet arbitrage. 2. Les moyens des organismes de recherche Laffirmation selon laquelle ce budget favoriserait la restauration des moyens des organismes de recherche se doit dêtre nuancée. Certes, la dotation des établissements publics scientifiques et techniques (EPST) est globalement en augmentation de 1,4 % en dotations ordinaires et crédits de paiement et de 3 % en autorisations de programme, avec une priorité affirmée sur le soutien de base des unités de recherche, qui augmente de 3,5%. Toutefois, malgré cette augmentation, le projet de budget est mauvais en ce qui concerne les personnels. Quant aux dotations aux établissements publics industriels et commerciaux (EPIC), elles connaissent des variations contrastées. Enfin, certaines mesures nouvelles bénéficient aux fondations de recherche, notamment lInstitut Curie et les Instituts Pasteur. a) Les EPST Les autorisations de programme pour lensemble des EPST augmentent de 122,20 millions de francs par rapport à 1999, dont 77,81 millions de francs pour le CNRS. Au sein de cette enveloppe, les dotations de base des laboratoires représentent 98,8 millions de francs et les dotations déquipement 23,4 millions de francs. Les mesures en faveur des personnels sont très insuffisantes au regard des besoins et des ambitions. Si le projet de budget prévoit 356,4 millions de francs de moyens nouveaux, plus de la moitié de cette somme (183,2 millions de francs) est destinée à la mise en uvre en 2000 de laccord salarial de 1998. En réalité, seuls 39,5 millions de francs correspondent à des mesures demplois et, parallèlement, une économie de 115 millions de francs est opérée sur les trois plus importants EPST (CNRS, INRA et INSERM). Cette pénurie ne permettra pas de créer plus de 18 emplois dingénieurs, cadres et administratifs (à lINRIA, lIRD et lINRETS). Par ailleurs, il est inquiétant de constater que ce budget ne prévoit aucune création demplois de chercheurs. Largument, avancé par le ministère, selon lequel « les flux des départs naturels en 2000 autoriseront un taux de recrutement significatif de 3 % sans quil soit besoin de procéder à des créations demplois » nest pas recevable. Dune part, la pertinence de ce taux de renouvellement de 3 % nest pas démontrée. Dautre part, cette affirmation traduit une approche purement comptable de la recherche, qui méconnaît limportance de ce secteur pour lavenir du pays. b) Les EPIC Si le projet de loi de finances prévoit pour lIFREMER, le CIRAD, lADEME et le BRGM une progression des dotations de 1,3 % en dépenses ordinaires et de 1,6 % en autorisations de programme, les variations des crédits alloués aux moyens des laboratoires sont contrastées. La progression apparente de 9,7 millions de francs pour le CIRAD doit être réduite de 6,5 millions de francs liés à la budgétisation de la taxe parafiscale appliquée aux expéditions de fruits tropicaux. Les dotations de lADEME et du BRGM sont reconduites à leur niveau de 1999. Quant à lIFREMER, la pause enregistrée dans ses crédits de paiement ne lui permettra pas de maintenir le niveau de sa flotte. De même, si la subvention en dépenses ordinaires du CEA, dun montant de 6,161 milliards de francs, connaît une progression sensible (+ 4,1 %), celle-ci tient pour une grande part à la compensation des surcoûts liés à lévolution prochaine du statut de lIPSN. En revanche, la subvention dinvestissement demeure seulement stable, ce qui risque de nuire à la coopération de cet organisme avec luniversité et lindustrie. Or, le CEA est un établissement de recherche à vocation essentiellement finalisée, qui joue un rôle déterminant au service des objectifs de lEtat en matière de recherche nucléaire et de développement technologique. La recherche nucléaire civile a pour objectif stratégique à court et moyen terme dapporter les éléments scientifiques et techniques permettant de maintenir loption nucléaire ouverte à lhorizon 2010. Par ailleurs, le CEA est un partenaire actif de la stratégie nationale de diffusion technologique vers les petites et moyennes entreprises et participe de ce fait au réseau mis en place dans les régions en liaison avec lANVAR. Il simplique également dans la transmission du savoir et la formation par la recherche dans ses domaines dexpertise, en renforçant son partenariat avec les établissements denseignement supérieur. Enfin, lenveloppe du CNES consacrée aux programmes nationaux progresse de 2,7 %, mais la subvention de fonctionnement de lorganisme est seulement reconduite au niveau de 1999. Or, le CNES joue un rôle primordial dans la conception et la mise en uvre du programme spatial français, dans un contexte qui a profondément évolué depuis le début de la décennie, et il est considéré comme lun des tout premiers centres dexcellence en matière de techniques et technologies des systèmes spatiaux. La dimension européenne de ses programmes et activités, à travers lAgence spatiale européenne, est particulièrement développée. c) Les fondations Le projet de loi de finances prévoit également un effort au profit des fondations de recherche, la subvention à linstitut Curie et aux instituts Pasteur augmentant de 8,3 millions de francs. B. LE BCRD : UN RATTRAPAGE INSUFFISANT Les crédits inscrits au budget du ministère de léducation nationale, de la recherche et de la technologie sélèvent, au sein du BCRD 2000, à 42,447 milliards de francs, en baisse de 0,2 % par rapport à 1999. A lintérieur de cette enveloppe, la plus grande part est représentée par le budget de la recherche et de la technologie (39,8 milliards de francs). Les actions des autres ministères au sein du BCRD se montent donc à 12,199 milliards de francs (voir tableau joint). Elles ne connaissent pas dévolution sensible par rapport à 1999. Les variations les plus marquantes du BCRD 2000 sont les suivantes : - ministère de léducation nationale, de la recherche et de la technologie (enseignement supérieur). Les crédits de la recherche universitaire augmentent légèrement (3,1 %) : mesure nouvelle de 25 millions de francs pour les activités de recherche dans lenseignement supérieur ; plan daccueil de 160 post-doctorants étrangers ; création de 10 emplois de chercheurs à lEcole française dExtrême-Orient. - ministère de lindustrie Les crédits de la recherche industrielle gérés par le ministère de lindustrie et ceux de lANVAR sont stables. Le budget dintervention de lANVAR se stabilise à 1 400 millions de francs et les dépenses ordinaires naugmentent, dans le projet de loi de finances pour 2000 que de 0,9 million de francs. Il est regrettable que cet organisme qui travaille de manière de plus en plus efficace soit depuis douze ans à effectif budgétaire constant. - ministère des affaires étrangères Un crédit de 3,7 millions de francs est attribué à ce ministère pour renforcer la mobilité des chercheurs et améliorer la recherche en sciences sociales. La subvention au CERN naugmente que de 1,3 %, ce qui signifie une stagnation en termes réels. - ministère de léquipement Les principaux abondements touchent le programme de sécurité routière (+ 6 millions de francs dautorisations de programme), les crédits de Météo France (20 millions de francs supplémentaires en autorisations de programme et 10 millions en crédits de paiement) et les programmes aéronautiques civils. Part des ministères dans le BCRD 2000
(1) La dotation Défense correspond aux programmes de recherche du CNES à double finalité, civile et militaire. Elle est destinée à être transférée en gestion sur le budget de la Recherche. Compte tenu de cette dotation (portée de 900 MF en 1999 à 1500 MF en 2000) le budget de la Recherche progresse de 1,1 % en DO+CP. Le BCRD nest en réalité quun instrument de coordination théorique, qui retrace davantage des masses salariales que des actions et des politiques. * * * Un saupoudrage daugmentations ne tient pas lieu de stratégie budgétaire. Ce budget n'est pas satisfaisant, au regard de lobligation que constitue pour la France et pour lEurope le développement de la recherche. Toutefois, il ne suffit pas de renforcer les moyens, il faut aussi, pour affirmer une véritable politique de recherche, mieux les utiliser. Cette adaptation doit passer par une réorganisation du système français de recherche. II.- PISTES DE RÉFLEXION SUR LORGANISATION DE LA RECHERCHE EN FRANCE Il y a quelque chose de paradoxal dans la situation de la recherche en France. Le ministre en charge de la recherche, M. Claude Allègre, est un scientifique de renom qui, malgré létendue de ses attributions, porte un indéniable intérêt personnel à ces questions. Des mesures positives ont été prises, telles que la loi n° 99-587 du 12 juillet 1999 sur linnovation et la recherche, même si le report de son volet financier en atténue la portée. Des initiatives intéressantes ont été lancées, comme le rapport au Premier ministre de MM. Cohen et Le Déaut « Priorités à la recherche ». Dans le même temps, le débat sur les structures de la recherche est très peu développé. Or, à lévidence, lefficacité de la recherche française, dans des domaines où la compétition internationale est souvent très vive, dépend de lefficacité de ses structures. Le présent rapport ne prétend pas fournir des solutions, mais il souhaite ouvrir la réflexion, lancer des idées, des hypothèses et des propositions, autour de trois questions principales : - quelle structure gouvernementale pour traiter des questions de recherche et dinnovation ? - faut-il remodeler les organismes de recherche et quelles doivent être les relations recherche-université ? - quelle articulation entre lappareil de recherche, les collectivités décentralisées, les institutions européennes, la coopération internationale ? A. LORGANISATION MINISTÉRIELLE Le choix opéré en 1997, lors de la formation du gouvernement de M. Lionel Jospin, innove. Le ministère dont a la charge M. Claude Allègre couvre à la fois lensemble de léducation nationale, la recherche et la technologie, sans quun ministre délégué ou un secrétaire dEtat chargé des universités et/ou de la recherche lui soit rattaché. A lintérieur de ce vaste ensemble, le ministre a réformé les structures compétentes en matière de recherche, en scindant en deux lancienne direction de la recherche et de la technologie. Sur aucun de ces deux aspects, les solutions actuellement retenues ne paraissent optimales. 1. La place de la recherche dans la structure gouvernementale La place du secteur de la recherche dans la répartition des compétences ministérielles pose problème. Aux débuts de la Vème République, la recherche a été attribuée à un ministre autonome, ayant souvent le rang de ministre dEtat, parfois celui de ministre délégué auprès du Premier ministre, lintitulé du ministère faisant généralement référence aux priorités de lépoque, à savoir les questions atomiques et spatiales. Par la suite, de nombreuses autres formules ont été expérimentées, sans quaucune simpose durablement. En se limitant aux vingt dernières années on notera que la solution dun ministère autonome de la recherche a rarement été reprise. Ce fut le cas en 1981-1982, avec M. Jean-Pierre Chevènement, et de 1984 à 1986, puis de 1988 à 1993, avec M. Hubert Curien. Dans dautres gouvernements, le secteur de la recherche et de la technologie a été rattaché : - soit au ministère de lindustrie, selon une formule déjà expérimentée au début des années 70 avec le ministère « du développement industriel et scientifique » ; cette solution fut appliquée de 1982 à 1984, les ministres étant M. Jean-Pierre Chevènement, puis M. Laurent Fabius ; - soit, le plus souvent, au ministère de léducation nationale, avec diverses variantes : ministre délégué chargé de lenseignement supérieur et de la recherche (MM. Alain Devaquet et Jacques Valade entre 1986 et 1988) ; ministre autonome ayant le même secteur de compétences (M. François Fillon de 1993 à 1995) ; secrétaire dEtat à la recherche (Mme Elisabeth Dufourcq, puis M. François dAubert, de 1995 à 1997). Chacune de ces solutions encourt des critiques. Le rattachement à lindustrie correspond à une conception dépassée et réductrice de la recherche, vue seulement à travers ses applications industrielles. Le rattachement à lenseignement supérieur a une logique certaine, puisquil permet de mettre en évidence les liens entre luniversité et la recherche. Toutefois, lexpérience montre que le ministre a alors souvent tendance à gérer lenseignement supérieur en priorité, au détriment de la recherche. Au demeurant, cette formule ne permet pas de prendre en compte la dimension interministérielle de la politique de recherche, qui sexprime en particulier à travers le BCRD. En tout cas, le système actuel est, de lavis de la plupart des personnalités rencontrées par le rapporteur, le moins satisfaisant qui puisse se concevoir. Il paraît davantage adapté à la personnalité du ministre quà une réflexion sur les structures. La politique de recherche, noyée dans un immense ensemble, fait lobjet dimpulsions intermittentes et non dune action dans la durée. Les organismes de recherche nont, dans ces conditions, pas vraiment dinterlocuteur au sein du Gouvernement. Au vu de ces diverses expériences, les principes suivants devraient inspirer une approche plus rationnelle et durable de la question. - Limportance de la recherche et de la technologie dans la vie de la Nation justifie que ce secteur relève dun ministre ou ministre délégué siégeant au Conseil des ministres, et non dun secrétaire dEtat. - A moyen terme, la meilleure solution est celle dun ministère indépendant, rattaché le cas échéant au Premier ministre. Le ministre disposerait ainsi dune véritable capacité de coordination et darbitrage. Pour marquer aux yeux des Français lutilité fondamentale de ce ministère, qui est en réalité le « ministère de lavenir », il serait opportun de préciser dans son intitulé quil est le ministère de la recherche, de la technologie, mais aussi de la prospective. - Toutefois, cette solution se heurte dans limmédiat à des difficultés. Un tel ministère aurait du mal à trouver sa place dans lappareil de lEtat. La meilleure formule de transition est sans doute celle qui consiste à regrouper enseignement supérieur et recherche, dans une structure autonome ou, le cas échéant, un ministère délégué. A lintérieur de ce ministère, serait clairement identifiée une direction en charge de la recherche et de la technologie. 2. Lorganisation interne du ministère Le décret n° 97-1149 du 15 décembre 1997, qui a réorganisé ladministration centrale du ministère de léducation nationale, de la recherche et de la technologie, a scindé en deux lancienne direction de la recherche et de la technologie. · Aux termes de ce décret, la direction de la technologie : - élabore la politique de développement technologique et de linnovation et veille à sa mise en uvre ; - définit les moyens de développer la valorisation des résultats de la recherche publique et la coopération technologique avec les entreprises ; - assure la tutelle des organismes à dominante technologique relevant du ministère ; - participe à lélaboration des programmes de recherche et de développement technologique financés par la Communauté européenne et en suit lexécution ; - détermine, pour ce qui concerne le ministère, les procédures de financement de la recherche industrielle et de soutien à linnovation ; - gère le Fonds de la recherche et de la technologie et les crédits de diffusion des technologies spatiales ; - facilite lutilisation des technologies de linformation dans le système éducatif. La direction de la technologie est subdivisée en deux sous-directions et quatre départements thématiques : - la sous-direction des technologies éducatives et des technologies de linformation et de la communication ; - la sous-direction de linnovation et du développement technologique ; - quatre départements scientifiques : espace et aéronautique ; biotechnologies, médicaments, agro-alimentaire ; informatique et télécommunications ; énergie, transports, environnement et ressources naturelles. Par ailleurs, un directeur adjoint est chargé des affaires européennes et internationales. · La direction de la recherche : - élabore la politique en matière de recherche, de formation par la recherche et demploi scientifique et veille à sa mise en uvre ; - exerce la tutelle sur les organismes de recherche qui ne relèvent pas de la direction de la technologie ; - prépare le BCRD et en assure la coordination ; - prépare la répartition des moyens de la recherche entre les établissements denseignement supérieur, dans le cadre de la politique contractuelle menée avec ces établissements ; - assure la responsabilité de lorganisation et du financement des études doctorales ; - exerce la tutelle sur les écoles normales supérieures et les écoles françaises à létranger relevant de la loi du 26 janvier 1984 sur lenseignement supérieur ; - met en uvre les procédures et les moyens dévaluation et dexpertise nécessaires à ses missions ; - propose et met en uvre la politique de diffusion de la culture scientifique et technique et assure la tutelle des établissements et musées relevant de ce domaine. La direction de la recherche est subdivisée en trois sous-directions et sept départements scientifiques thématiques. En outre, un directeur adjoint est chargé de la recherche universitaire et des études doctorales. Les sous-directions sont respectivement compétentes pour : - les organismes de recherche et la coordination du BCRD ; - la recherche universitaire et les études doctorales ; - les musées et la culture scientifique et technique. Les sept départements sont chargés des secteurs suivants : mathématiques ; physique et sciences pour lingénieur ; sciences de la terre et de lunivers ; chimie ; biologie, médecine, santé ; sciences de lhomme et humanités ; sciences de la société. De lavis général, cette organisation nest pas réellement rationnelle et nest pas satisfaisante. Elle correspond à une approche assez abstraite de la recherche et de la technologie. Parmi les nombreuses personnalités rencontrées par le rapporteur, très peu ont soutenu la réforme de 1997, essentiellement en faisant valoir que lancienne direction générale constituait une structure trop lourde, que recherche et innovation obéissent à deux logiques différentes et que la nouvelle organisation valorise linnovation technologique. Le plus souvent, les points de vue sont critiques. Pour certains, le système nest pas très bon, mais fonctionne en pratique à peu près correctement grâce aux hommes qui le font vivre, qui ont gardé ou pris lhabitude de travailler en commun. Pour dautres, il sagit dune séparation artificielle, qui complique inutilement la tâche des organismes de recherche. De fait, lorganigramme de chacune des deux nouvelles directions est complexe, puisquil est construit « en matrice », en distinguant dune part selon les spécialités, dautre part selon les projets. Cette structure crée inévitablement des doubles emplois, tout en laissant subsister des vides. A titre dexemple, est-il souhaitable de séparer la recherche en matière de médecine et de santé de la politique du médicament, qui relève de la direction de la technologie ? A linverse, certains besoins ne sont pas pris en compte dans cet organigramme. Le rapporteur en donnera deux exemples. Dune part, la dimension internationale et européenne relève de structures éclatées (un bureau des relations internationales à la direction de la recherche ; un bureau de la coordination européenne et des relations internationales au sein de la direction de la technologie). Le directeur adjoint pour les affaires européennes et internationales à la direction de la technologie nest donc pas en mesure de coordonner lensemble. Au demeurant, les deux aspects, international et européen, ne sont pas suffisamment distingués. Dautre part, la mission de prospective, dexpertise et de veille nest pas assez développée. Elle ne peut relever que dune structure ad hoc, compétente à la fois pour la recherche et linnovation, et ayant des liens étroits avec les organismes de recherche. Le rapporteur propose donc la reconstitution dune direction commune ou, à défaut, le renforcement de la coordination entre les deux directions, ainsi que la création de deux cellules communes, une pour les affaires européennes et internationales, dont on précisera lorganisation et les missions, et lautre chargée de la prospective et de la veille scientifique et technique. B. LES ORGANISMES DE RECHERCHE ET LES RELATIONS ENTRE LUNIVERSITÉ ET LA RECHERCHE La recherche française ne repose pas seulement sur une organisation ministérielle, mais sur deux éléments fondamentaux : les organismes de recherche dune part, luniversité dautre part. 1. Les organismes de recherche Lensemble constitué par les organismes français de recherche paraît à première vue déséquilibré entre un "éléphant", le CNRS, couvrant presque entièrement le champ de la connaissance scientifique, et une myriade détablissements spécialisés, présentant une grande diversité quant à leur finalité, à leurs dimensions, à leurs statuts et leurs structures. Lidée de restructurer cet ensemble est récurrente, car lorganisation actuelle ne favorise ni lémergence de nouvelles disciplines, ni la pluridisciplinarité. Sa formulation la plus radicale consisterait à "éclater" le CNRS, énorme machine jugée souvent ingérable, avec un effectif de plus de 26 000 personnes (chercheurs et ITA) sur un total de 48 000 pour lensemble des organismes, et un budget considérable, puisquil sélève, dans le projet de loi de finances pour 2000, à 11,525 milliards de francs en dépenses ordinaires et 2,489 milliards de francs dautorisations de programme. Lidée serait de remplacer le CNRS par autant dorganismes quil y a de spécialités scientifiques et de regrouper, le cas échéant, les entités ainsi créées avec des organismes de recherche existants. Une autre formule moins révolutionnaire pourrait être de transformer le CNRS en une agence de moyens, fédérant un ensemble de départements et dorganismes autonomes. Toutefois, il semble que ces propositions doivent être abordées avec prudence. Léclatement du CNRS nest pas une fin en soi. Toute tentative de remodelage ou de modification des périmètres des organismes pourrait nuire à leur efficacité et provoquerait inévitablement des inquiétudes de la part des personnels. Au demeurant, la plupart des organismes de recherche existants ont une identité forte, à laquelle ils sont légitimement attachés. Certains ont une dimension quils jugent eux-mêmes optimales. On peut ainsi citer le cas de lINRIA (recherche en informatique et automatique) qui emploie 2 000 personnes, dont 766 sur emplois budgétaires, ou celui de lInstitut Pasteur, qui dispose dun statut original, en dehors de la recherche publique, et qui emploie 2 700 personnes, dont 1100 chercheurs . Lobjectif nest pas, en réalité, de casser des outils existants, souvent performants. Il doit être plutôt dadapter la structure de chacun des organismes et de développer entre eux les coopérations et les coordinations nécessaires. Cela suppose de mieux distinguer, dans lactivité de certains organismes, comme le CEA ou lIFREMER, la part qui revient effectivement à la recherche de lactivité économique et industrielle. Cela implique aussi de réfléchir à la structure interne des organismes, aux pouvoirs de leurs présidents et à lautonomie de leurs départements. Il convient enfin de redéfinir les relations entre université et recherche. 2. Université et recherche : vers un statut denseignant-chercheur La volonté du gouvernement de donner davantage dimportance aux universités dans la recherche va dans le bon sens et doit être approuvée. Le rôle primordial de luniversité est admis par tous. Elle fournit le tissu des jeunes chercheurs qui feront la recherche de demain. Elle participe, pour une grande part, à la recherche fondamentale. Essentiel, ce rôle ne saurait toutefois être exclusif : la place des acteurs non universitaires de la recherche, notamment les partenaires industriels, doit être assurée. Le rapprochement entre université et recherche ne passe pas seulement par le développement, indispensable, de ce qui existe déjà, les laboratoires communs. Il suppose aussi une réflexion sur les statuts et les carrières des personnels qui pourrait aboutir, à terme, à la création dun corps unique denseignants-chercheurs. La portée de cette proposition se doit dêtre précisée. Il ne sagit pas dabsorber la recherche dans le système universitaire. Celui-ci na dailleurs pas entièrement vocation à se consacrer à la recherche, puisque les premiers cycles sont seulement destinés à lenseignement. Au demeurant, les organismes de recherche doivent, on la déjà souligné, conserver leur spécificité. En revanche, le maintien du cloisonnement actuel entre les deux statuts serait préjudiciable au développement de la recherche. Lobjectif du statut denseignant-chercheur peut se concevoir de différentes manières. La formule la plus radicale, pronée par certains, est celle du rapprochement immédiat et global (mêmes carrières, mêmes rémunérations). Il nest pas certain que cela soit réaliste à court terme. Sans doute, est-il plus opportun denvisager des modulations, des étapes. Deux propositions complémentaires peuvent être signalées. La première est celle du rapport précité de MM. Cohen et Le Déaut. Il sagit de prendre en compte, dans le déroulement des carrières, la totalité des missions liées à la recherche en créant des postes daccueil, où les enseignants puissent devenir chercheurs, et en instaurant des mesures incitatives à la mobilité pour les promotions. Cette "modulation" irait dans le sens dun rapprochement des statuts, mais avec prudence. Lautre idée serait de nappliquer le nouveau statut denseignant- chercheur quà partir dun certain niveau (directeur de recherche et professeur duniversité). Pour les maîtres de conférences et chargés de recherche, des passerelles pourraient être développées, permettant de passer facilement de lune à lautre fonction. En toute hypothèse, le rapprochement entre université et recherche supposera une plus grande coordination locale. C. DANS LES RÉGIONS ET VERS LEUROPE ET LE MONDE Lorganisation de la recherche française ne peut plus aujourdhui être examinée seulement au niveau de lEtat-nation. 1. Recherche et décentralisation Si le tableau des instances compétentes en matière de recherche et de technologie est complexe à léchelon national, il lest tout autant, voire plus, dans les collectivités décentralisées. Les intervenants sont multiples et variés, puisque coexistent : - les délégations régionales à la recherche et à la technologie (DRRT) ; - les directions régionales de lindustrie, de la recherche et de lenvironnement (DRIRE) ; -les représentations régionales du CNRS et souvent dautres organismes de recherche ; - les délégations régionales de lANVAR. Il convient dajouter à ces différents acteurs les universités elles-mêmes. Un tel foisonnement nest pas sans poser problème et la nécessité dune plus grande coordination, au sein dun espace péri-universitaire, est souvent exprimée. La principale difficulté tient aux relations entre les DRRT et les DRIRE. Les DRRT sont une structure légère, une administration de mission. Cest à elles quincombe en théorie la fonction de coordination. Mais elles pèsent dun faible poids par rapport aux puissantes DRIRE, souvent dirigées par un ingénieur, qui correspondent davantage à une conception autoritaire de lEtat. Il convient également davoir à lesprit que le niveau régional est plus ou moins pertinent. Certaines régions, comme le Limousin, nont quune activité limitée en matière de recherche, alors que dautres, comme Rhône-Alpes, regroupent sur leur territoire plusieurs pôles de recherche importants. La coordination est donc dune utilité et dune difficulté variables. Il faut aussi préciser de quelle manière cette coordination sexcerce, quelles fonctions peuvent être mises en commun. En première analyse, on peut citer les marchés publics, les systèmes informatiques et comptables, lhygiène et la sécurité. Il convient enfin de se demander quelle autorité doit assumer cette fonction de coordination. Plusieurs solutions ont été suggérées au rapporteur. Par exemple, confier la coordination au préfet de région ou encore à un universitaire ou un chercheur, qui assurerait cette fonction de manière tournante. Ces propositions ne sont dailleurs pas incompatibles, cet universitaire ou chercheur pouvant très bien être rattaché au préfet. 2. Recherche, Europe et coopération internationale Il nest pas nécessaire dinsister longuement sur limportance de la dimension européenne de la recherche. Ce nest quà travers des coopérations continentales que les centres européens de recherche peuvent renforcer leur compétitivité et battre en brèche la toute-puissance américaine et japonaise. LEurope de la recherche existe déjà. Elle est née en dehors de tout cadre institutionnel, avec le CERN, puis elle a connu un développement remarquable au sein de lUnion européenne, avec les programmes-cadres de recherche-développement (PCRD), ou à ses marges, avec le programme Eureka. Toutefois, larticulation entre la recherche française et ces projets et programmes européens pourrait saméliorer, faute de quoi nos taux de retour sur le PCRD vont continuer à baisser. Actuellement, la représentation des intérêts scientifiques français auprès de lUnion européenne est assurée à travers le CLORA (club des organismes de recherche associés), qui comprend un délégué par organisme de recherche, soit en tout une quinzaine de personnes. Une telle formule nest pas optimale, car elle laisse subsister un trop fort cloisonnement entre les organismes. Le rapporteur a déjà proposé linstauration, au soin du ministère en charge de la recherche et de la technologie, dune mission chargée des affaires internationales et européennes. A lintérieur de cette mission, deux fonctions devraient être clairement distinguées. Dune part, lEurope : une telle mission devrait assurer la représentation à Bruxelles de la communauté scientifique française et la liaison, dans les deux sens, entre les institutions européennes, le ministère et les organismes de recherche. La coopération européenne ne doit pas en effet faible oublier quil y a aussi, en Europe, une compétition économique et donc des intérêts français à défendre et à promouvoir. Dautre part, la coopération internationale, qui existe déjà, doit se développer et se tourner en priorité vers les pays du sud. Il convient de mieux isoler leffort de recherche envers les pays en voie de développement, dencourager les partenariats. Le réseau international des Instituts Pasteur offre à cet égard une expérience remarquable. La coopération en matière de santé doit concerner en particulier des domaines tels que la santé de la famille en Afrique de louest. CONCLUSION Le débat sur lorganisation de la recherche ne fait que commencer. Il doit être aussi large que possible. La recherche nest pas une affaire de spécialistes. Même si les citoyens nen ont pas toujours une claire conscience, ce qui se passe dans les laboratoires engage lavenir du pays. Le Parlement a un rôle fondamental à jouer dans la perception de ce grand enjeu. A côté des organismes spécialisés, comme lOffice parlementaire dévaluation des choix scientifiques et technologiques, qui accomplit un travail remarquable, la commission des affaires culturelles, familiales et sociales doit être partie prenante à ce débat. Pour lheure, le rapporteur est tenu dexprimer un avis sur le budget de la recherche pour 2000. Il ne peut que constater une fois de plus le décalage entre des enjeux primordiaux, le volontarisme politique affiché et lindigence des moyens. Un budget aussi médiocre nest pas à la hauteur des ambitions proclamées, il nest pas en mesure de répondre aux attentes de la communauté scientifique française. Le Parlement doit aider le ministre à obtenir davantage, à mettre en accord son discours et la réalité. Le grand débat que le rapporteur appelle de ses vux ne pourra aboutir que si la recherche bénéficie de moyens correspondant à son importance pour lavenir de la Nation. Tant quil nen est pas ainsi, il ne peut conclure que par un avis défavorable au projet de budget de la recherche pour 2000. liste des personnalités rencontrées par le rapporteur · M. Hubert CURIEN, ancien ministre de la Recherche et de la Technologie · M. Jean-Yves LE DEAUT, député, premier vice-président de lOffice dévaluation des choix scientifiques et technologiques Prix Nobel · M. Georges CHARPAK · M. Pierre-Gilles de GENNES · M. Jean-Marie LEHN Universitaires · M. Didier RAOULT, président de lUniversité dAix-Marseille II · M. Gérard TOBELEM, professeur des universités à Paris VII Responsables dorganismes de recherche · Mme Catherine BRECHIGNAC (CNRS) · M. Alain BENSOUSSAN (CNES) · M. Pierre DAVID (IFREMER) · M. Yannick dESCATHA (CEA) · M. Claude GRISCELLI (INSERM) · M. Philippe JURGENSEN (ANVAR) · M. Bernard LARROUTUROU (INRIA) · M. Philippe LAZAR (IRD) · M. Maxime SCHWARTZ (Institut Pasteur) TRAVAUX DE LA COMMISSION La commission a examiné pour avis, sur le rapport de M. Jean-Michel Dubernard, les crédits de la recherche pour 2000 au cours de sa séance du mercredi 13 octobre 1999. Après lexposé du rapporteur, le président Jean Le Garrec a noté lintérêt des suggestions présentées par le rapporteur en souhaitant que soit approfondi le lien nécessaire devant exister entre luniversité, la recherche et les entreprises. M. Edouard Landrain a évoqué les problèmes de laccueil en France des chercheurs étrangers et du retour en France des chercheurs français ayant travaillé à létranger. Mme Geneviève Perrin-Gaillard a souhaité tempérer le jugement négatif porté sur le budget par le rapporteur, tout en partageant son souhait dune réflexion sur lorganisation de la recherche. Soulignant que le rapport au Premier ministre de MM. Le Déaut et Cohen et la loi sur linnovation et la recherche constituent des outils utiles, elle a demandé que la commission organise un large débat sur cette question. M. Germain Gengenwin a exprimé sa satisfaction de voir des amendements quil avait déposés dans le cadre de la loi sur linnovation et la recherche repris dans le projet de loi de finances. M. Patrick Leroy a dénoncé la mauvaise lisibilité dun budget éparpillé dans dix documents budgétaires et linsuffisance es crédits au regard des enjeux. Il a par ailleurs déploré labandon de très grands équipements tel le projet Soleil et indiqué que le taux actuel de renouvellement des chercheurs se situait à un niveau de 3 % alors quun taux de 5 % est nécessaire à la simple compensation des départs en retraite. M. Bernard Perrut, après avoir stigmatisé linsuffisance du budget, a regretté que le financement de la recherche en France soit plus le fait du privé que de lEtat. Il a demandé des précisions sur lapplication du crédit dimpôt-recherche Le président Jean Le Garrec a proposé lorganisation au début de lannée prochaine dune réunion de la commission, en présence du ministre et avec la participation de MM. Le Déaut et Cohen, sur les problèmes de la recherche. En réponse aux intervenants, le rapporteur pour avis a souligné la baisse du nombre de chercheurs étrangers accueillis en France et réaffirmé que lavenir du pays dépend de notre recherche. Il a précisé que plus de 7 000 entreprises ont souscrit une déclaration de crédit dimpôt en 1998. Contrairement aux conclusions du rapporteur pour avis, la commission a émis un avis favorable à ladoption des crédits de la recherche pour 2000. N°1862-07. - Avis de M. Jean-Michel Dubernard, au nom de la commission des Affaires culturelles, sur le projet de loi de finances pour 2000. - Education nationale, recherche et technologie : Recherche - Cliquer ici pour retourner au sommaire général - Cliquez ici pour retourner à la liste des rapports et avis budgétaires - Cliquez ici pour retourner à la liste des discussions budgétaires
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