N° 1863

——

      ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

ONZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 14 octobre 1999.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES (1)

SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2000 (n° 1805),

TOME I

AFFAIRES EUROPÉENNES

(ARTICLE 35 : ÉVALUATION DU PRÉLÈVEMENT OPÉRÉ SUR LES RECETTES DE L'ÉTAT AU TITRE DE LA PARTICIPATION DE LA FRANCE AU BUDGET DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES)

PAR Mme MARIE-HÉLÈNE AUBERT,

Députée

——

(1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page.

                      Voir le numéro 1861 (annexe n° 2)

                      Lois de finances

      La Commission des Affaires étrangères est composée de : M. Jack Lang, président ; MM. Georges Hage, Jean-Bernard Raimond, Roger-Gérard Schwartzenberg, vice-présidents ; M. Roland Blum, Mme Monique Collange, François Loncle, secrétaires ; Mmes Michèle Alliot-Marie, Nicole Ameline, M. René André, Mmes Marie-Hélène Aubert, Martine Aurillac, MM. Edouard Balladur, Raymond Barre, Dominique Baudis, François Bayrou, Henri Bertholet, Jean-Louis Bianco, André Billardon, André Borel, Bernard Bosson, Pierre Brana, Jean-Christophe Cambadélis, Hervé de Charette, Yves Dauge, Patrick Delnatte, Jean-Marie Demange, Xavier Deniau, Paul Dhaille, Mme Laurence Dumont, MM. Jean-Paul Dupré, Charles Ehrmann, Laurent Fabius, Jean-Michel Ferrand, Georges Frêche, Jean-Yves Gateaud, Jean Gaubert, Valéry Giscard d'Estaing, Jacques Godfrain, Pierre Goldberg, François Guillaume, Robert Hue, Mme Bernadette Isaac-Sibille, MM. Didier Julia, Alain Juppé, André Labarrère, Gilbert Le Bris, Jean-Claude Lefort, François Léotard, Pierre Lequiller, Bernard Madrelle, René Mangin, Jean-Paul Mariot, Gilbert Maurer, Charles Millon, Mme Louise Moreau, M. Jacques Myard, Mme Françoise de Panafieu, MM. Etienne Pinte, Marc Reymann, Mme Chantal Robin-Rodrigo, M. Gilbert Roseau, Mme Yvette Roudy, MM. René Rouquet, Georges Sarre, Henri Sicre, Mme Christiane Taubira-Delannon, M. Michel Terrot, Mme Odette Trupin, MM. Joseph Tyrode, Michel Vauzelle, Philippe de Villiers

SOMMAIRE

___

INTRODUCTION 5

I - UN PROJET DE BUDGET INSCRIT DANS LE NOUVEAU CADRE
FINANCIER COMMUNAUTAIRE POUR LA PÉRIODE 2000-2006
7

      A - L'ENCADREMENT DES DÉPENSES COMMUNAUTAIRES
      POUR LA PÉRIODE 2000-2006
      7

      B - LE PROJET DE BUDGET COMMUNAUTAIRE POUR L'EXERCICE 2000 9

        1) La stabilisation des dépenses communautaires 9

        2) L’évolution des différentes rubriques du budget 11

        3) L'évolution des recettes 11

      C – COMMENT AMÉLIORER L'EFFICACITÉ DE LA
      DÉPENSE COMMUNAUTAIRE ?
      12

        1) L'évaluation des politiques européennes 12

        2) Les dysfonctionnements administratifs de la Commission 12

        3) La création de l'Office de lutte anti-fraude 13

II - LA POSITION DE LA FRANCE DANS LE PROJET DE BUDGET 15

      A – LA CONTRIBUTION FRANÇAISE AU BUDGET DES COMMUNAUTÉS 15

      B - L'ÉVOLUTION DES CONTRIBUTIONS DES ETATS MEMBRES 16

      C – L’ÉVOLUTION DES RETOURS EN FAVEUR DE LA FRANCE 17

III - QUELLES POLITIQUES D'AVENIR POUR L'UNION EUROPÉENNE ? 19

      A – L’ACTION EXTÉRIEURE : PRÉSERVER LA CONTINUITÉ
      ET MOBILISER DE NOUVEAUX MOYENS
      19

        1) Des moyens accrus en faveur de la stratégie de pré-adhésion 19

        2) La reconstruction dans les Balkans, une pomme de discorde

        entre les institutions européennes 20

        3) Les autres engagements extérieurs de l’Union 23

        a) La renégociation de la Convention de Lomé 23

        b) La politique méditerranéenne 24

        c) La coopération avec les nouveaux Etats indépendants 24

        d) La coopération avec l’Afrique du Sud 25

      B - L’ÉMERGENCE DE L’IDENTITÉ EXTÉRIEURE DE L’UNION 25

      C – UNE PRIORITÉ À L’INNOVATION ET AUX INVESTISSEMENTS 26

CONCLUSION 28

EXAMEN EN COMMISSION 29

      Mesdames, Messieurs

      L'élaboration du projet de budget communautaire pour l'exercice 2000 s'inscrit tout d'abord dans une période de refondation de l'Union européenne. En effet, l'année 1999 a été celle de la négociation de "l'Agenda 2000", document multiple qui réorganise le fonctionnement et l'action de l'Union pour les prochaines années en engageant les réformes de la politique agricole commune et de la politique régionale, la préparation de l'élargissement à de nouveaux Etats membres et, enfin, la définition d'un nouveau cadre financier pour la période allant de 2000 à 2006.

      Aux difficultés inhérentes à chacune de ces négociations, qui pour trois d'entre elles comportent des enjeux financiers très importants pour les Etats membres (et notamment pour notre pays), s'est ajoutée la menace d'une crise soulevée par quatre Etats membres figurant parmi les plus importants contributeurs nets au budget communautaire, qui jugent leur contribution excessive.

      En même temps, l'Union a ouvert des négociations en vue de l'adhésion avec six pays d'Europe centrale et orientale, ce qui entraîne l'inscription de dépenses de préadhésion au budget communautaire : cette aide à la transition économique et juridique des pays candidats apparaît à la fois comme un devoir à caractère historique et comme une chance pour la stabilité et la prospérité du continent européen ; or, l’hypothèse d’une progression du budget communautaire a été repoussée par la majorité des Etats membres.

      Enfin, le dénouement de la crise au Kosovo a légué à l'Union européenne un rôle majeur dans la reconstruction de la province ; elle y joue déjà un rôle de premier plan, par son implication politique et son aide financière. Mais la réponse donnée par le projet de budget 2000 se limite à un "redéploiement" de crédits ou à la réduction linéaire des crédits pour certaines dépenses.

      L'on peut se demander si concilier l’objectif implicite du nouveau budget, qui englobe la poursuite des politiques communes tout en amorçant les nouvelles politiques prévues par le traité d’Amsterdam, qui implique de répondre à l'urgence née de la crise kosovare, de préparer l'Union élargie de demain, avec un budget aux termes quasiment inchangés, ne relève pas d'un certain irréalisme, ou bien d'un immobilisme bien dissimulé ?

      C'est dans ce contexte que sera prise en considération la contribution française inscrite à l’article 35 du projet de loi de finances et évaluée à 98,5 milliards de francs, soit en augmentation de 3,68 % par rapport à 1999.

      Le projet de budget communautaire adopté en première lecture par le Conseil le 16 juillet s'établit à 87,9 milliards d'euros en crédits de paiement, en augmentation de 2,8% par rapport à 1999. Il comporte encore des points de désaccord avec le Parlement européen, notamment quant au financement de la reconstruction au Kosovo et de l’action dans les Balkans plus généralement.

      L’assemblée européenne estime que le provisionnement de l’aide au Kosovo justifie la révision des perspectives financières établies par le Conseil européen de Berlin les 24 et 25 mars 1999. Elle refuse plus généralement l’étroitesse de ces perspectives financières, auxquelles tient au contraire le Conseil. Elle devra arrêter sa position lors de sa session de la fin octobre, confirmant ou non sa volonté de provoquer une crise entre les institutions. Si un compromis est trouvé, le budget sera adopté définitivement à Strasbourg lors de la session du mois de décembre.

I - UN PROJET DE BUDGET INSCRIT DANS LE NOUVEAU CADRE FINANCIER COMMUNAUTAIRE
POUR LA PÉRIODE 2000-2006

      L’exercice 1999 était le dernier de la programmation pluriannuelle décidée au Conseil européen d’Edimbourg de décembre 1992 ; on rappellera que cet exercice était caractérisé par un ressaut de la dépense communautaire : les accords d’Edimbourg avaient en effet déterminé les plafonds de dépenses de chacune des rubriques du budget, mais en attribuant un caractère privilégié à la dépense structurelle, le plafond des crédits devenant un objectif de dépense, principe à présent remis en cause. L’exercice 2000 s’inscrit dans un cadre financier réformé, adopté par les Quinze au Sommet de Berlin des 24 et 25 mars dernier, comme une partie de l’Agenda 2000. On rappellera que celui-ci définit les nouvelles règles de la politique agricole commune, réforme la politique régionale et, enfin, fixe le cadre budgétaire de l’Union pour les sept prochaines années.

A - L'encadrement des dépenses communautaires pour la période 2000-2006

      En rupture avec les périodes antérieures – celles des « paquets Delors » I et II – les choix effectués pour la nouvelle période pluriannuelle consistent à encadrer rigoureusement la dépense tout en poursuivant les politiques existantes et en conduisant la préparation à l’élargissement.

      Les différents stades de l’établissement des perspectives financières ne seront que brièvement évoqués. La Commission européenne a tout d’abord proposé la progression des dépenses communautaires, tout en restant dans le cadre du plafonnement des ressources propres de la Communauté fixé en 1994 à 1,27 % du PNB des Etats membres. Le Conseil de l’Union, engagé dans une problématique de contribution excessive soulevée par certains Etats (sur laquelle nous reviendrons), s’est au contraire prononcé en faveur d’une stabilisation des dépenses dans le cadre des politiques existantes. Les conclusions adoptées par le Conseil européen de Berlin confirment cette orientation, décidant d’appliquer « la même rigueur budgétaire au niveau de l’Union qu’au niveau national ». Le Parlement européen reprenait cet engagement dans une résolution adoptée le 6 mai 1999.

      Le tableau ci-après, présentant les perspectives financières annexées à l’accord inter-institutionnel adopté le même jour, montre la dégressivité de la dépense agricole, la réduction des plafonds dans la rubrique des actions structurelles, une progression faible des politiques internes et des actions extérieures. Seul le plafond de la dépense consacrée à la préadhésion a échappé à la rigueur.

      Perspectives financières pour l'Union européenne à quinze

      (en millions d'euros – prix 1999)

    CREDITS POUR ENGAGEMENTS

    2000

    2001

    2002

    2003

    2004

    2005

    2006

    1. AGRICULTURE

    Dépenses PAC (à l’exclusion du développement rural)

    Développement rural et les mesures d’accompagnement

    40 920

    36 620

    4 300

    42 800

    38 480

    4 320

    43 900

    39 570

    4 330

    43 770

    39 430

    4 340

    42 760

    38 410

    4 350

    41 930

    37 570

    4 360

    41 660

    37 290

    4 370

    2. ACTIONS STRUCTURELLES

    Fonds structurels

    Fonds de cohésion

    32 045

    29 430

    2 615

    31 455

    28 840

    2 615

    30 865

    28 250

    2 615

    30 285

    27 670

    2 615

    29 595

    27 080

    2 515

    29 595

    27 080

    2 515

    29 170

    26 660

    2 510

    3. POLITIQUES INTERNES (1)

    5 930

    6 040

    6 150

    6 260

    6 370

    6 480

    6 600

    4. ACTIONS EXTERIEURES

    4 550

    4 560

    4 570

    4 580

    4 590

    4 600

    4 610

    5. ADMINISTRATION (2)

    4 560

    4 600

    4 700

    4 800

    4 900

    5 000

    5 100

    6. RESERVES

    Réserve monétaire

    Réserve pour aides d’urgence

    Réserve pour garantie de prêts

    900

    500

    200

    200

    900

    500

    200

    200

    650

    250

    200

    200

    400

    0

    200

    200

    400

    0

    200

    200

    400

    0

    200

    200

    400

    0

    200

    200

    7. AIDES DE PRE-ADHESION

    Agriculture

    Instruments structurels de pré-adhésion

    PHARE (pays candidats)

    3 120

    520

    1 040

    1 560

    3 120

    520

    1 040

    1 560

    3 120

    520

    1 040

    1 560

    3 120

    520

    1 040

    1 560

    3 120

    520

    1 040

    1 560

    3 120

    520

    1 040

    1 560

    3 120

    520

    1 040

    1 560

    TOTAL DES CREDITS POUR ENGAGEMENTS

    92 025

    93 475

    93 955

    93 215

    91 735

    91 125

    90 660

    TOTAL DES CREDITS POUR PAIEMENTS

    Crédits pour paiements en % du P.N.B.

    89 600

    1,13 %

    91 110

    1,12 %

    94 220

    1,13  %

    94 880

    1,11 %

    91 910

    1,05 %

    90 160

    1,00 %

    89 620

    0,97 %

    DISPONIBLE POUR ADHESION (crédits pour paiements)

    Agriculture

    Autres dépenses

       

    4 140

    1 600

    2 540

    6 710

    2 030

    4 680

    8 890

    2 450

    6 440

    11 440

    2 930

    8 510

    14 220

    3 400

    10 820

    PLAFOND DE CREDITS POUR PAIEMENTS

    89 600

    91 110

    98 360

    101 590

    100 800

    101 600

    103 840

    Plafonds des crédits pour paiements en % du P.N.B.

    Marge pour imprévus

    Plafond des ressources propres

    1,13 %

    0,14 %

    1,27 %

    1,12 %

    0,15 %

    1,27 %

    1,18 %

    0,09 %

    1,27 %

    1,19 %

    0,08 %

    1,27 %

    1,15 %

    0,12 %

    1,27 %

    1,13 %

    0,14 %

    1,27 %

    1,13 %

    0,14 %

    1,27 %

(1) Conformément à l’article 2 de la décision n° 182/1999/CE du Parlement européen et du Conseil et à l’article 2 de la décision 1999/64 Euratom du Conseil (JO L 26 du 1er février 1999, p. 1 et p. 34), le montant des dépenses disponibles au cours de la période 2000-2002 pour la recherche s’élève à 11 510 millions d’euros à prix courants.

(2) S’agissant des dépenses de pensions, les montants pris en compte sous le plafond de cette rubrique sont calculés nets de contributions du personnel au régime correspondant, dans la limite de 1 100 millions d’euros aux prix de 1999 pour la période 2000-2006.

Source : Accord inter-institutionnel du 6 mai 1999.

      Le total des crédits pour paiements disponibles pour cette période de sept années s’élève à 641,5 milliards d’euros pour l’Union à quinze Etats membres, les aides de pré-adhésion étant incluses dans ce montant. Le plafond des crédits de paiement a été stabilisé à 1,13 % du PNB entre 2000 et 2006, avec un gonflement pour les années intermédiaires correspondant à l’accroissement de la dépense agricole pour ces années, (avant d’amorcer sa diminution progressive), auquel s'ajoute la prise en compte d'éventuelles dépenses d'adhésion. Les Etats ont voulu maintenir le total des crédits de paiement à 1,13 % du PNB des Quinze, mais, en fait, il est ramené à 0,97% du PNB en 2006 si l'on ne compte pas l'adhésion. Ainsi le financement des futures adhésions proviendra de la réduction des montants consacrés aux deux principales politiques communautaires plutôt que du renforcement du budget communautaire. Presque tous les postes de dépense ont été revus à la baisse par rapport aux propositions de la Commission.

      L’un des éléments essentiels de ces perspectives pluriannuelles est le projet de cadre financier pour une Europe à 21 membres.

      Le Conseil européen de Berlin a pris en compte la perspective d’un prochain élargissement de l’Union en se basant sur l’hypothèse formulée alors par la Commission d’un premier élargissement en 2002. Le tableau ci-dessus fait apparaître des crédits disponibles pour paiement à partir de cette année, augmentant progressivement jusque en 2006. La réserve disponible s’élève ainsi à 45,4 milliards d’euros. Les crédits d’engagement figurant dans la rubrique spéciale 8 s’élèvent à plus de 58 milliards d’euros. Cette réserve est, selon le Gouvernement, largement suffisante pour faire face aux dépenses communautaires qu’entraînerait l’adhésion des pays les plus avancés dans la négociation. Cependant , les difficultés rencontrées pour la reprise de l’acquis par les pays mêmes dont la transition économique et juridique a été exemplairement rapide et volontaire conduit la Commission à estimer à présent que les premiers élargissements n’auraient lieu qu’en 2004.

      Enfin, on ajoutera que l’accord inter-institutionnel du 6 mai 1999 prévoit les modalités de révision éventuelle des perspectives financières, pour « faire face à des situations non prévues à l’origine, dans le respect du plafond des ressources propres ». L’adaptation des perspectives est possible si des élargissements interviennent pendant la période considérée, mais celle-ci est doit respecter le cadre financier indicatif établi. Toutefois, l’accord établit « l’étanchéité » des dotations pour l’élargissement : en cas de retard dans le processus d’élargissement, celles-ci ne pourront pas abonder les crédits destinés aux Quinze ni les dépenses de pré-adhésion.

B - Le projet de budget communautaire pour l'exercice 2000

      1) La stabilisation des dépenses communautaires

      Le projet de budget arrêté par le Conseil de l’Union le 16 juillet 1999 prévoit une augmentation des dépenses de 2,8 % en crédits de paiement, mais une diminution des crédits d’engagement de 4,7 %. La faible augmentation des premières permet de se rapprocher de l’objectif de la stabilisation en euros constants, considérant que l’inflation communautaire devrait s’établir à 2 %. Les crédits d’engagement sont en retrait par rapport au budget de l’an dernier, mais, comme il a déjà été mentionné, ils s’établissaient en 1999 à un niveau exceptionnellement élevé, s’agissant de la dernière année de l’ambitieuse programmation du « paquet Delors II ».

      Dépenses prévues pour l'exercice 2000 (en millions d'euros)


    Rubriques


    CE


    CP

    Evolution 99/2000 CE

    Evolution 99/2000 CP

    Agriculture

    40.526

    40.526

    + 0,2 %

    + 0,2 %

    Actions structurelles

    32.678

    30.977

    - 16,3 %

    + 1,8 %

    Politiques internes

    5.808

    5.410

    - 0,9 %

    + 7,2 %

    Actions extérieures

    4.611

    3.436

    + 1,5 %

    + 7,5 %

    Dépenses administratives

    4.664

    4.664

    + 3,6 %

    + 3,6 %

    Réserves

    906

    906

    - 24 %

    - 24 %

    Aide à la pré-adhésion

    3.166

    2.025

    + 130,8 %

    + 167 %

    TOTAL

    92.360

    87.945

    - 4,7 %

    + 2,8 %

      La Commission européenne, dans son avant-projet de budget, proposait d’augmenter de 4,7 % les crédits pour paiements, considérant la nécessité de résorber des « restes à liquider » très importants de la précédente programmation financière : la Commission estime à près de 70 milliards d’euros au 31 décembre l’écart entre les engagements contractés et les paiements correspondants. La question complexe des « restes à liquider », qui révèle un dysfonctionnement dans la mise en œuvre de certaines actions, ne sera pas développée ici ; votre Rapporteur précise qu’il s’agit de retards d’exécution constatés dans les actions structurelles, dans les programmes de recherche, ainsi que dans les programmes de coopération extérieure Phare, Tacis et Méda.

      L’avant-projet de la Commission comportait une augmentation des crédits supérieure à celle des finances publiques des Etats membres et ne se pliait donc pas à la volonté de rigueur qui est celle du Conseil ; cette augmentation aurait porté à 103,5 milliards de francs la contribution française.

      2) L’évolution des différentes rubriques du budget

      Les « économies » réalisées par rapport à la proposition initiale de la Commission l’ont été dans deux domaines essentiellement : les dépenses de la politique agricole commune (PAC), réduites forfaitairement de 375 millions d’euros (en CE et CP), et les dépenses au titre des fonds structurels, réduites de 1 milliard d’euros (en CP).

      Les dépenses agricoles connaissent une progression très modérée de 0,2 % par rapport à 1999. Le plafond fixé par les perspectives financières pour l’exercice 2000 s’élève à 41 738 ME, le sous-plafond concernant les mesures de marché à 37 352 ME et celui pour le développement rural à 4 386 ME ; ces plafonds sont respectés par le projet de budget, qui dégage même une marge totale de ME. Il se situe, en outre, en deçà de la moyenne annuelle de 40 500 ME (hors les mesures de développement rural) établie comme objectif d’économie par le Conseil européen à l’intention de la Commission et du Conseil.

      Les crédits d’engagement des fonds structurels (32,6 milliards d’euros) s’approchent quant à eux des plafonds fixés à Berlin, restant des dépenses privilégiées. Les crédits d’engagement connaissent une baisse de 10,4 %, normale pour la première année d’une nouvelle période de programmation, pour laquelle les besoins de ces crédits sont encore modérés. (La baisse de 16,3 % portée au tableau s’explique par le transfert des dépenses de développement rural sous la ligne directrice agricole). Les crédits de paiement reflètent une progression de 1,8 %, mais ils serviront pour près de la moitié, comme on l’a vu, à payer les engagements des années passées n’ayant pas encore donné lieu à paiement.

      Votre Rapporteur a décrit jusqu’à présent l’évolution des deux rubriques les plus consommatrices du budget communautaire : l’agriculture et les actions structurelles, qui semblent demeurer notre priorité pour sept années encore, malgré les nouveaux domaines d’intervention ouverts par le traité d’Amsterdam et les nouveaux enjeux auxquels doit faire face l’Union dans le contexte international. La description de l’évolution des autres rubriques sera faite au dernier chapitre du présent rapport, qui tentera d’analyser quelle est la place faite aux politiques d’avenir de l’Union par le budget 2 000.

      3) L'évolution des recettes

      Les recettes communautaires, en augmentation de 2,8 % dans le projet de budget 2000 évoluent de la façon suivante :

    Origine de la recette

    Budget pour 1999

    Projet de budget pour 2000

    Evolution

    Prélèvements agricoles

    949.050.000

    991.980.000

    + 2 %

    Cotisation sucre

    972.000.000

    1.046.430.000

    + 7,6 %

    Droits de douane

    11.893.860.000

    11.070.000.000

    + 6,9 %

    Ressource TVA

    30.374.249.501

    32.554.614.472

    + 7,1 %

    Ressource PNB

    38.068.005.031

    41.615.970.043

    + 9,3 %

    Excédents disponibles

    1.400.000.000

    0

    - 100 %

    Recettes diverses

    630.574.171

    665.674.204

    + 5,5 %

    Total

    85.557.738.703

    87.944.668.719

    + 2,8 %

C – Comment améliorer l'efficacité de la dépense communautaire ?

      1) L'évaluation des politiques européennes

      Sous la pression des experts des questions européennes, mais aussi des Parlements nationaux, l'évaluation a commencé à prendre sa place comme une des données de la gestion des crédits communautaires.

      La Commission européenne a pris deux initiatives à partir de 1995 : le programme SEM 2000, qui a conduit à créer une fonction "ressources" au sein de chaque direction générale opérationnelle, et la modification du règlement financier applicable au budget communautaire afin d'imposer une réflexion systématique de type coûts/avantages de l'action communautaire. (Cette analyse, qui figure en effet à la fin de chaque proposition de la Commission ayant un aspect financier, revêt en général un caractère plutôt automatique). Les dépenses consacrées à l'évaluation sont très faibles, se situant à environ 0,1 % des crédits de fonctionnement ; 25 millions d'euros ont été dépensés à cette fin pour la période 1994-1998.

      La Commission a également mené une réflexion interne sur cette question, concluant à l'intérêt de renforcer systématiquement les contrôles a posteriori.

      2) Les dysfonctionnements administratifs de la Commission

      On rappellera qu'un comité d'experts indépendants a été désigné au printemps 1999 sur la base d'un accord entre le Parlement européen et la Commission, pour accomplir une double mission.

      Il devait, en premier lieu, expertiser les problèmes de responsabilité individuelle des membres de la Commission concernant les allégations de fraude, de mauvaise gestion et de népotisme. C'est à ce titre qu'un premier rapport a été rendu en mars dernier, rapport qui a été l'un des éléments conduisant à la démission de la Commission Santer.

      En second lieu, il devait formuler des recommandations visant à améliorer les procédures d'octroi des contrats et des emplois externes à la Commission ainsi que la coordination des services chargés de la lutte contre la fraude : le comité "des sages" a formulé 90 recommandations dans son deuxième rapport rendu le 10 septembre dernier. Ce rapport apporte sa contribution à la réorganisation de la Commission, annoncée par son Président Romano Prodi dès sa nomination et présentée le 18 septembre par son vice-président Neil Kinnock.

      On se contentera d'évoquer ici le reproche d'immobilisme et de rigidité dans la gestion du personnel : malgré le fait que l'exécutif européen a été chargé de nouvelles tâches découlant des nouvelles compétences dévolues à l'Union, aucun recensement ou redéploiement des effectifs n'a été fait, et c'est la mise en œuvre de ces nouvelles tâches qui a conduit aux dysfonctionnements dénoncés. Ce n'est qu'à partir de 1997 qu'un redéploiement - de 1 % - a été décidé. La conséquence de ces lacunes dans la gestion des ressources a été le recours de plus en plus fréquent à du personnel externe selon des contrats variés, produisant une organisation complexe et désordonnée.

      La réorganisation annoncée, qui devrait prendre effet le 15 décembre, profite d'abord aux nouvelles priorités : l'élargissement et l'action dans le domaine de la justice et des affaires intérieures.

      Les "task forces" responsables de ces deux domaines d'action seront remplacées par des directions générales à part entière.

      La création de nouveaux postes semble exclue, sauf une quinzaine de postes destinés au nouvel Office européen de lutte anti-fraude (OLAF). Le schéma comporte en effet une réduction des effectifs des cabinets des commissaires, la réduction du nombre des directions générales et des services par fusion de certaines directions existantes, et enfin, la diminution des effectifs de certaines directions. Cette restructuration permettrait de redéployer quelques 365 postes, dont 64 iraient à la nouvelle direction "Elargissement", qui comprendrait 268 personnes, et 43 à la direction "Justice et Affaires intérieures, qui comprendrait 150 personnes. On soulignera que le redéploiement reste limité au regard des effectifs globaux de la Commission qui s'élèvent à 18 000 personnes dont 20 % sont, il est vrai, affectées aux tâches linguistiques.

      3) La création de l'Office de lutte anti-fraude

      La question complexe de la fraude au budget communautaire ne sera pas développée ici. Votre Rapporteur se contentera de préciser que la Cour des comptes des Communautés européennes estime que les erreurs sous-jacentes aux recettes et aux engagements, qui incluent les fraudes et les irrégularités, s'élèvent à 4 milliards d'euros en 1997, soit 5 % des paiements.

      L'OLAF, créé cette année par les institutions européennes, bénéficiera d'une indépendance fonctionnelle renforcée par rapport à l'ancienne UCLAF, et d'un champ de compétence accru. Ses moyens d'action seront renforcés et sa mission concernera toutes les institutions.

II - LA POSITION DE LA FRANCE DANS LE PROJET DE BUDGET

A – La contribution française au budget des Communautés

      L’augmentation de 2,8 % du budget communautaire en crédits de paiement (2,4 milliards d’euros) entraîne de façon automatique la progression de la contribution française. Celle-ci est estimée à 98,5 milliards de francs, contre 95 milliards pour l’exercice dernier. On soulignera cependant que l’exécution pourrait se limiter à 93,5 milliards, en raison d’un report de solde de l’exercice précédent plus important que prévu.

      Notre pays a consacré environ 6,2 % de ses recettes fiscales nettes au budget communautaire en 1999.

      La part relative de chaque Etat membre dans le financement du budget communautaire est présentée dans le tableau suivant.

     

    1996 (1)

    1997 (1)

    1998 (2)

    1999 (3)

    2000 (4)

    Belgique

    3,9

    3,9

    3,8

    3,9

    3,8

    Danemark

    1,9

    2

    2,1

    2

    2

    Allemagne

    29,2

    28,2

    25,1

    26,4

    25,9

    Grèce

    1,6

    1,6

    1,6

    1,5

    1,6

    Espagne

    6,4

    7,1

    7

    6,9

    7,2

    France

    17,5

    17,5

    16,5

    17,2

    17,1

    Irlande

    1

    0,9

    1,2

    1

    1,1

    Italie

    12,6

    11,5

    12,9

    13

    13

    Luxembourg

    0,2

    0,2

    0,3

    0,2

    0,2

    Pays-Bas

    6,2

    6,4

    6,2

    6

    6,1

    Autriche

    2,6

    2,8

    2,5

    2,6

    2,6

    Portugal

    1,3

    1,4

    1,3

    1,4

    1,4

    Finlande

    1,4

    1,4

    1,4

    1,4

    1,4

    Suède

    2,8

    3,1

    2,9

    2,9

    2,8

    Royaume-Uni

    11,6

    11,9

    15,2

    13,4

    13,6

(1) Rapport de la cour des comptes des communautés européennes

(2) Compte de gestion et bilan financier de la Commission pour 1998

(3) Budget initial 1999

(4) Projet de budget pour 2000

B - L'évolution des contributions des Etats membres

      L’apparition d’une revendication du Gouvernement allemand demandant la correction de soldes budgétaires jugés excessifs, revendication reprise par la suite par les Gouvernements néerlandais, autrichiens et suédois, a contraint les Quinze à envisager, à moyen terme, une refonte du système des ressources propres, et, à plus court terme, à prendre certaines mesures correctives.

      Ainsi, le Chancelier allemand, M. Gerhard Schröder, avait demandé, dans sa déclaration de politique générale du 10 décembre 1998, que soient corrigés les déséquilibres qui font du Luxembourg, du Danemark et de la Belgique des bénéficiaires nets, alors que leur niveau de richesse par habitant est supérieur à celui de l’Allemagne ».

      La Commission européenne a reconnu, dans un rapport effectué à la demande du Conseil et présenté le 7 octobre 1998, que ces pays subissent « des déséquilibres budgétaires importants ». Les contributions nettes de ces quatre pays au financement de la Communauté représentent entre 0,4 % et 0,7 % de leurs PNB nationaux, alors que les soldes budgétaires de la France et de l’Italie ne s’élèvent respectivement qu’à 0,01 % et 0,06 % de leurs PNB.

      Des solutions ont été recherchées pour remédier aux déséquilibres budgétaires excessifs : on citera par exemple la solution proposée par la Commission consistant en un cofinancement des aides directes agricoles, qui a été repoussée par la France ainsi que par d’autres pays, comme entraînant de fait une renationalisation de la PAC. Aucune solution « de fond » n’a pour l’instant prévalu, ce qui explique la priorité donnée, notamment par notre Gouvernement, à la stabilisation de la dépense communautaire.

      Si la révision générale du système des ressources propres n’est prévue que pour 2006, le Conseil européen de Berlin a cependant demandé la révision de la décision sur les ressources propres d’ici 2002. Les conclusions adoptées lors de ce conseil prévoient l’évolution de plusieurs éléments du système actuel : le taux d’appel maximal de la ressource TVA sera réduit progressivement à partir de 2002, la redevance de perception accordée aux Etats sur la perception des droits de douane et prélèvements agricoles sera augmentée (ce dont devraient profiter les Pays-Bas), le financement de la correction britannique sera réduit pour les quatre pays protestataires mentionnés plus haut.

      L’évolution des contributions sur la prochaine période pluriannuelle est difficile à évaluer : le Royaume-Uni a réussi à maintenir son avantage jusqu’en 2006, les Pays-Bas et l’Allemagne devraient voir s’alléger leur contribution nette. Au contraire, la France et l’Italie, mais aussi la Belgique et le Danemark, seront appelées à contribuer davantage du fait de la réduction progressive de la recette TVA et de l’augmentation corrélative de la recette assise sur le PNB. Le montant du prélèvement communautaire à la charge de la France à partir de 2002 est actuellement évalué à 120 milliards de francs.

C – L’évolution des retours en faveur de la France

      Votre Rapporteur rappellera que notre pays bénéficie de retours importants dans le cadre des deux politiques communautaires les plus consommatrices de crédits : la politique agricole et la politique régionale. Les dépenses agricoles représenteront encore 47 % des dépenses (en crédits d’engagement) de l’Union en 2000, et les dépenses consacrées aux actions structurelles s’élèveront à 35 % du total. On soulignera que les actions extérieures, qui seront décrites plus loin, ne constituent que 4 % des dépenses, et que l’aide à la pré-adhésion mobilise 2 % des dépenses.

      Les versements agricoles effectués au profit de la France en 1998 ont été en légère hausse par rapport à l’année précédente : 23,2 % contre 22,5 % du total des versements effectués par le Feoga-garantie. Ce taux de retour est largement supérieur au taux de contribution français au budget communautaire. La France reste le principal bénéficiaire des financements de ce fonds, loin devant l’Allemagne, l’Espagne, le Royaume-Uni et l’Italie.

      La réforme de la PAC adoptée par le Conseil européen de Berlin n’a que peu d’incidences sur l’exercice budgétaire 2000. Les principales réformes n’interviendront que plus tard : la réforme des O.C.M. grandes cultures, viande bovine et vin n’entreront en vigueur que pour la campagne 2000-2001, tandis que la réforme des produits laitiers interviendra à partir de la campagne 2005-2006. On sait toutefois que malgré la stabilisation du budget de la PAC pendant la prochaine période, celle-ci sera favorable aux agriculteurs français qui ont obtenu satisfaction, au cours de la négociation, en termes de prix, de compensation, de niveau d'intervention et de maintien des quotas laitiers. En outre, les dépenses de développement rural seront privilégiées.

      Notre pays a ensuite bénéficié d’une part relative importante dans les versements des fonds structurels. Malgré la concentration des actions en faveur des régions en retard de développement et des pays du Sud, la France a reçu des versements considérables dans le cadre des objectifs à caractère agricole (adaptation des structures agricoles et développement des zones rurales), à vocation de reconversion industrielle et de lutte contre le chômage. Ces versements ont représenté en moyenne 9,8 % des dépenses structurelles totales sur la période 1994-1999, hors fonds de cohésion auquel la France n’est pas éligible, et 8,9 % avec le fonds de cohésion.

      Dans le cadre de la réforme des fonds structurels également adoptée au Sommet de Berlin, les Quinze ont maintenu l’effort en faveur de la cohésion économique et sociale. Celui-ci s’appuiera sur une dotation globale de 213 milliards d’euros pour la période 2000-2006, dotation légèrement augmentée (6,5 %) par rapport à la période précédente, mais qui prendra effet sur sept années au lieu de six.

      Le nouvel effort de concentration de l’aide sur les régions les plus en difficulté entraînera une diminution de la part relative de la France : le retour pour la prochaine période pluriannuelle s’établit, hors fonds de cohésion, à 7,96 %. La France perdra une partie de son éligibilité à l’objectif 2 consacré à la reconversion économique de certaines régions (en recul industriel par exemple), la population couverte par cet objectif passant de 24 à 18 millions d’habitants. Mais l’on soulignera que, même dans ce contexte, notre pays recevra la part du lion sur l’objectif 2 avec 5,4 milliards d’euros soit 27,5 % de l’ensemble des crédits d’engagement.

      En conclusion, votre Rapporteur observera que la France se situait en 1997 au sixième rang des pays contributeurs nets au budget communautaire, avec un solde budgétaire négatif relativement limité de 985 millions d’euros. En comparaison, on rappellera que le solde négatif de l’Allemagne est de 11 milliards d’euros. En même temps, la France était le premier bénéficiaire de la dépense communautaire en raison de l’importance de la dépense agricole, recevant globalement 16 % de la dépense réalisée à l’intérieur de l’Union.

III - QUELLES POLITIQUES D'AVENIR POUR L'UNION EUROPÉENNE ?

A – L’action extérieure : préserver la continuité et mobiliser de nouveaux moyens

      En application des conclusions du Conseil européen de Berlin, les crédits pour les actions extérieures relèvent désormais de trois rubriques des perspectives financières : la rubrique 4 pour la plupart des opérations extérieures, la réserve pour aide d’urgence de la rubrique 6 et les programmes et instruments de pré-adhésion qui figurent à présent dans la rubrique 7.

      Dans le projet de budget pour 2000, les montants proposés pour la rubrique 4 s’élèvent à 4,611 milliards d’euros en crédits d’engagement et 3,437 milliards en crédits de paiement, soit une augmentation de 2,9% et 2% respectivement par rapport à 1999. Toutefois, la création d’une réserve de 500 millions d’euros pour le Kosovo et d’une autre réserve de 125 millions d’euros pour un éventuel renouvellement de l’accord de pêche avec le Maroc entraîne une réduction linéaire des crédits affectés à la plupart des autres actions. Aussi, les crédits d’action extérieure de l’Union n’augmentent-ils que peu à structure constante : 1,5 % en crédits d’engagement et 7,5 en crédits de paiement. Malgré cela, le projet de budget ménage une marge de 16 millions d’euros sous le plafond des perspectives financières.

      Votre Rapporteur examinera tout d’abord quels sont les moyens consentis par l’Union face aux besoins nés de l’actualité - aide au Kosovo, à la Turquie et prochainement au Timor - et face aux nouveaux défis qui s’imposent à elle : la préparation de l’adhésion de nouveaux Etats membres et la reconstruction et la stabilité dans les Balkans. Elle tentera d’appréhender ensuite les moyens restant aux autres programmes, de coopération au développement, par exemple.

      1) Des moyens accrus en faveur de la stratégie de pré-adhésion

      La stratégie de pré-adhésion définie par l’Union européenne pour dix pays d’Europe centrale et orientale reposait jusqu’à présent sur le programme de coopération Phare ; à partir de l’an 2000 entreront en action deux nouveaux instruments d’aide : l’instrument structurel de pré-adhésion Ispa, destiné à cofinancer des infrastructures de transport et de protection de l’environnement, et le « programme spécial d’aide à l’agriculture et au développement rural » dénommé Sapard.

      Le Conseil européen de Luxembourg avait souhaité dès décembre 1997 une augmentation substantielle de l’aide de pré-adhésion : le doublement de cette aide a été décidé à Berlin, le Conseil européen l’ayant portée à un peu plus de 3 milliards d’euros par an sur la période 2000-2006. Les perspectives financières adoptées le 6 mai dernier ont distingué cette aide des autres actions extérieures en introduisant une nouvelle et septième rubrique budgétaire. Le tableau suivant présente l’évolution de cette catégorie d’aides par rapport au dernier exercice.

      Le financement des aides pendant la période de pré-adhésion

(en millions d'euros)

     

    1999
    CE         CP

    2000
    CE (1)        CP (2)

    À partir de
    2001 (CE) (3)

    Phare pré-adhésion

    1317

    800

    1580

    1317

    1560

    ISPA

       

    1058

    300

    1040

    SAPARD

       

    529

    529

    520

    Total

    1317

    800

    3167

    2146

    3120

(1) décision du Conseil du 16 juillet

(2) APB de la commission

(3) perspectives financières

      2) La reconstruction dans les Balkans, une pomme de discorde entre les institutions européennes

      Plusieurs crises ou événements dramatiques auront pour conséquence l'intervention de l'Union européenne l'année prochaine : la crise du Kosovo, mais aussi les séismes en Turquie (pays pour lequel une aide de 50 millions d'euros est prévue) et la crise au Timor (pour lequel une aide devrait être prochainement décidée).

      L’architecture générale de l’intervention internationale dans les Balkans sous l’égide de la mission de l’Organisation des Nations Unies pour le Kosovo (la MINUK) confie à l’Union européenne le rôle de chef de file en ce qui concerne la reconstruction.

      A la demande des Chefs d’Etat et de Gouvernement réunis au Sommet de Cologne, le Conseil a créé le 19 juillet dernier une Agence européenne pour la reconstruction du Kosovo, chargée de coordonner l’aide et l’assistance humanitaire et financière internationale destinée à la province. L’agence, qui devrait être prochainement opérationnelle, aura son quartier général et administratif à Thessalonique, en Grèce, et son centre opérationnel à Pristina. On soulignera que la commission des Budgets du Parlement européen est très hostile à la localisation de l'agence à Thessalonique, la Commission européenne y étant également réticente pour des raisons tenant aux frais de fonctionnement.

      Une première estimation du coût de la reconstruction des infrastructures dans la province, réalisée par la Direction générale des relations extérieures de la Commission, s’est élevée à 1 voire 1,5 milliard d’euros par an, pendant trois ans dont l'Union prendrait en charge 500 millions. Il s’agit essentiellement de la reconstruction partielle des maisons, de la réparation des écoles et des centres de soins, de la remise en état du réseau électrique et du réseau d’eau potable. Ce montant n’intègre donc pas les aides macro-économiques au budget ni l’assistance humanitaire. D'autres estimations, reposant sur des expertises plus précises de la Banque mondiale notamment, sont attendues.

      Une première conférence des donateurs pour la reconstruction, réunissant une centaine de pays et organisations internationales, s’est tenue à Bruxelles le 28 juillet : les engagements des participants se sont élevés à un peu plus de 2 milliards d’euros, somme qui comprend en réalité des fonds déjà dépensés en 1999 et des engagements portant sur l’ensemble de la période de reconstruction.

      Le financement de l’aide au Kosovo n’était pas provisionné dans l’avant-projet de budget de la Commission. Le projet de budget du Conseil dégage un peu moins d’un milliard d’euros pour l’exercice 2000. A l’initiative du représentant français, le plan de financement retenu comporte deux volets :

      - une réserve de 500 millions d’euros : elle est constituée d’un redéploiement de 329 ME de la rubrique des actions extérieures réalisé par abattement de 10 % sur la plupart des lignes (il épargne cependant les crédits mobilisés pour l’intervention dans les Balkans et les lignes faisant l’objet de conventions financières), de 70 ME du programme Obnova consacré aux pays de l’ex-Yougoslavie et provient d’économies décidées sur les autres lignes de l’action extérieure, notamment celles correspondant à certains accords de pêche. S’y ajoutent 89 ME de crédits d’aide humanitaire.

      - une enveloppe d’environ 420 millions d’euros pourrait être consacrée à des interventions à caractère humanitaire ou alimentaire dans l’ensemble des pays de la zone : elle mobiliserait notamment une autre partie du programme Obnova, des fonds pris sur les lignes de l’aide humanitaire et alimentaire (lignes B7-20 et 21) et une partie de la réserve d’aide d’urgence.

      Le Conseil estime que l’enveloppe de 920 millions d’euros ainsi dégagée permet de répondre aux besoins d’aide de la région dans son ensemble, sans qu’il soit besoin de réviser les perspectives financières. Le Parlement européen opère quant à lui une distinction entre les besoins financiers de l’exercice en cours et ceux de l’exercice 2000. Pour les premiers, il est favorable à l’adoption d’un projet de budget rectificatif et supplémentaire répondant aux nécessités surgies de l’actualité. Pour les seconds, il estime que le Conseil devra « prouver sa bonne foi quant à sa disponibilité pour une révision des perspectives financières », selon les termes de M. Jean-Louis Bourlanges, rapporteur général du Budget.

      Le Parlement a en effet approuvé le 16 septembre le projet de 4ème budget rectificatif et supplémentaire 1999 de l’Union. Votre Rapporteur mentionne ce document car il répond aux problèmes d’actualité : y est proposée la création d’une ligne spécifique « aide à la reconstruction du Kosovo », tenant compte notamment du coût de fonctionnement de l’Agence. Le BRS permettra de dégager 92 millions d’euros en crédits d’engagement et très rapidement 50 millions en crédits de paiement pour des actions de déminage, de reconstruction des infrastructures publiques et des transports.

      Le BRS inclut également une aide macro-financière à l’ancienne République yougoslave de Macédoine (ARYM), considérant que celle-ci a subi au premier plan les conséquences du conflit et a consenti des efforts exceptionnels pour accueillir un grand nombre de réfugiés. Un prêt de 50 millions d’euros sur quinze ans lui est destiné ainsi qu’un don de 30 millions d’euros qui sera versé en deux tranches, pour moitié cette année et pour moitié en 2000. On soulignera que les dépenses prévues par le BRS seront financées par le redéploiement de crédits du Feoga-garantie, dont certains chapitres connaissent une sous-exécution importante.

      On constate que l’intervention dans les Balkans concentre une part très importante des crédits d'action extérieure de l'Union pour l'année 2000 : 920 ME sur 4 611 ME (en crédits de paiement). Cette priorité doit être approuvée, néanmoins l’on peut concevoir quelque inquiétude quant à la continuité des autres programmes extérieurs.

      La Commission des budgets du Parlement européen refuse l’amputation des crédits faite par le Conseil dans la rubrique 4. Elle estime que les besoins nés de la crise kosovare justifient pleinement la réouverture du dossier des perspectives financières, prévue par l’article 19 de l’accord inter-institutionnel. En fait, un compromis pourrait être trouvé de la façon suivante : l’aide au Kosovo serait diminuée à 300 millions d’euros (les experts commencent à considérer que la province ne pourra « absorber » le montant initialement prévu), le Parlement proposerait lui-même un redéploiement portant sur 100 millions d’euros, enfin la révision des perspectives dégagerait expressément 100 millions d’euros (sans doute au prix d’une baisse des dépenses agricoles) afin qu’il ne soit pas touché aux autres actions extérieures.

      Le Conseil estime qu'il serait préférable d'avoir des estimations plus précises sur les besoins de la province avant d'entreprendre toute révision, et que l'utilisation des marges prévues peut se révéler suffisante.

      Toutefois, l’on ne peut ignorer que le Parlement se saisit du dossier du Kosovo pour s’opposer à des perspectives financières trop étroites qu'il conteste, ainsi que le choix du Conseil de maintenir très bas l’appel aux ressources propres, et donc le plafond des crédits pour paiement en pourcentage du PNB, maintenu autour de 1,13 % du PNB des Etats membres.

      3) Les autres engagements extérieurs de l’Union

      Les autres engagements ne seraient, selon le Gouvernement, « pas sensiblement réduits ». La coopération au développement demeure la part essentielle de ce budget : elle mobilise 70,8 % de la rubrique 4 en crédits d’engagement, avec un montant de 3,266 milliards d’euros (63,4 % en crédits de paiement).

      a) La renégociation de la Convention de Lomé

      L’année 2000 devrait voir l’achèvement de la renégociation de la convention de Lomé. La négociation, engagée le 30 septembre 1998 à Bruxelles, s’est poursuivie cette année au cours de deux conférences ministérielles tenues en février et en juillet et devrait s’achever en novembre.

      Les représentants des pays ACP ainsi que les représentants des Quinze ont trouvé un accord sur les principaux objectifs du futur partenariat : lutter contre la pauvreté et promouvoir l’intégration des pays ACP dans l’économie mondiale. Le groupe ACP a accepté l’idée d’une association de la société civile au dialogue politique, à l’identification des priorités pour la coopération et à sa mise en œuvre. A également été reconnu le bien fondé d’une évolution de la coopération financière : les mécanismes d’allocation des ressources seront révisés pour tenir compte des performances et introduire une nouvelle programmation de l’aide en fonction de l’évolution de la situation dans chaque pays ou région.

      Cependant, des divergences importantes restent à surmonter. Tout d’abord, les pays ACP sont réticents à l’idée que la notion de bonne gouvernance soit élevée au rang d’élément essentiel de la future convention, dont la violation est susceptible d’entraîner la suspension de la coopération. L’évolution du volet commercial apparaît complexe : l’Union a pour objectif l’insertion des ACP dans le commerce mondial et le maintien d’un partenariat privilégié compatible avec les règle de l’OMC. Pour ce faire, elle propose de substituer aux préférences non réciproques actuelles des accords de partenariat économique régionalisés prévoyant l’instauration progressive de zones de libre échange entre elle et des sous-ensembles ACP. Or les pays partenaires demandent une phase de transition (pendant laquelle le régime actuel serait maintenu) très longue de dix ans et le report des discussions sur les futurs arrangements à partir de 2005. L’Union souhaite évidemment engager les évolutions nécessaires plus tôt, en présentant dès l’an 2000 une stratégie de mise en place d’un régime conforme.

      La France soutient l’approche de l’intégration régionale, seul moyen de sortir les pays ACP de leur marginalisation par rapport au commerce mondial, tout en admettant la flexibilité nécessaire dans la mise en œuvre de la stratégie.

      b) La politique méditerranéenne

      La politique méditerranéenne, dotée de 1,146 milliard d’euros en crédits d’engagement, demeure une priorité, représentant 25 % des crédits consacrés aux actions extérieures. L’instrument principal de cette politique, le programme Meda adopté en 1996, doit être renouvelé avant la fin de cette année. Le nouveau règlement devra préciser les mesures d’accompagnement financières et techniques de la réforme des structures économiques et sociales dans le cadre du partenariat euro-méditerranéen avec onze pays de la région et les territoires de Gaza et de Cisjordanie.

      c) La coopération avec les nouveaux Etats indépendants

      La coopération avec les nouveaux Etats indépendants dans le cadre du Programme Tacis repose sur un règlement qui arrive à échéance fin 1999. Pour l’exercice 2000, le Conseil a décidé de maintenir les engagements au niveau de la moyenne annuelle de la programmation précédente, soit 490 millions d’euros en crédits d’engagement (et 435 en CP).

      Votre Rapporteur soulignera que la mise en œuvre de ces actions connaît des difficultés, et que la Cour des comptes des Communautés européennes a en particulier établi deux rapports d’une rare sévérité sur les aides allouées de 1991 à 1996 à l’Ukraine. La Cour y dénonce de nombreux dysfonctionnements : la lenteur dans l’utilisation des crédits, avec une proportion d’un tiers des crédits engagés effectivement dépensés (37,5%), et d’un quart pour les programmes de sécurité nucléaire ; une insuffisance et une instabilité des effectifs dans les services concernés de la Commission, les déficiences administratives des organisations ukrainiennes associées au programmes, des divergences fréquentes entre la Commission et les bénéficiaires dans la définition des priorités ; enfin, une coordination déficiente et une grande confusion dans la répartition des responsabilités, particulièrement dans le domaine de la sûreté nucléaire.

      Votre Rapporteur ne développera pas davantage ces problèmes, mais, au moment où la Commission propose une réforme de l’assistance technique afin de centrer l’aide sur des besoins mieux identifiés, en lui consacrant un budget de 4 milliards d’euros dans le cadre d’un nouveau partenariat, elle insistera sur l’importance de faire évoluer les méthodes de la coopération. Ainsi, l'idée d'une plus forte incitation à accomplir les réformes indispensables au succès de la transition, en limitant la dotation du futur programme en début de période pour l’augmenter à la fin, en subordonnant l’attribution du surplus à l’évaluation à mi-parcours des efforts de réforme accomplis, paraît très intéressante.

      d) La coopération avec l’Afrique du Sud

      Cette coopération a fait l’objet d’une programmation pluriannuelle pour la période 1996-1999 de 500 millions d’euros. Dans l’attente de l’adoption d’un nouveau règlement pour la période 2000-2006, le Conseil a maintenu à 125 millions d’euros les engagements de ce programme pour l’exercice prochain.

B - L’émergence de l’identité extérieure de l’Union

      Le renforcement de la politique étrangère et de sécurité commune (PESC) voulu par le Traité d’Amsterdam n’a qu’une faible traduction budgétaire : il est vrai qu’il s’agit essentiellement d’actions à caractère diplomatique visant à définir des principes et des orientations ainsi qu’à adopter des actions ou positions communes. Les dépenses ont donc un caractère administratif, dans certains cas opérationnel pour les actions de prévention de conflits et de gestion des crises, de vérification et de soutien dans le cadre du processus de paix. Un montant de 47 millions d’euros est affecté par le Conseil à l'ensemble de cette politique, à la suite de l'intervention "à la hausse" du Parlement européen.

      Les implications des orientations décidées par le Conseil européen de Cologne pour la création d’une politique européenne de défense restent à déterminer.

      La mise en œuvre de ces orientations devrait d’abord se traduire par le développement des capacités militaires européennes pour agir, au moyen d’une modernisation et d’une plus grande interopérabilité des forces nationales et multinationales européennes. Une base technologique et industrielle d’armement autonome devrait être développée.

      En même temps, l’Union devra se doter des instruments nécessaires pour décider et conduire une opération militaire. A cette fin, devraient être mis en place un Comité politique et de sécurité – organe permanent chargé de l’ensemble des questions relatives à la PESC -, un Comité militaire chargé de formuler des recommandations et un état-major chargé d’évaluer le renseignement, d’analyser les situations, d’élaborer et de planifier des options stratégiques pour une opération. D’autres moyens militaires collectifs d’aide à la décision devront être disponibles (centre satellitaire, institut d’études de sécurité, notamment), mais leur mise en place est liée à la question de l’inclusion de certaines fonctions de l’UEO dans l’Union européenne : les Quinze souhaitent que les décisions nécessaires en ce domaine soient adoptées d’ici la fin de l’an 2000.

      Les déclarations adoptées par les Chefs d’Etat et de Gouvernement au Sommet de Cologne ont montré la détermination de ceux-ci à entrer dans une nouvelle étape de la construction européenne que les citoyens européens ne sauraient désavouer. Toutefois, votre Rapporteur s’interroge sur la traduction financière qui sera donnée à ces projets : en admettant que l’année prochaine soit une année de réflexion et de mûrissement, qu’en sera-t-il par la suite alors que les perspectives financières ne tiennent pas réellement compte de la nouvelle politique ?

      C – Une priorité à l’innovation et aux investissements

      La Commission a proposé une réorientation de la rubrique 3 consacrée aux politiques internes en faveur du développement de l’innovation et des investissements créateurs d’emplois, accompagnée d’un très fort accroissement des dotations budgétaires. Le Conseil a confirmé le caractère prioritaire de deux domaines : la recherche et les réseaux transeuropéens.

      Les dépenses consacrées à la recherche et au développement technologique seront prédominantes au sein de la rubrique, représentant 62,4 % du total avec 3,630 milliards d’euros inscrits en crédits d’engagement. Elles correspondent à la deuxième année du cinquième programme-cadre de recherche et de développement qui s’étend sur les années 1999 à 2002 et est doté de près de 15 milliards d’euros, soit plus de 98 milliards de francs. On se félicitera de ce que le Conseil a prévu une progression de 5,2 % des crédits par rapport à 1999.

      Surtout, les crédits alloués aux réseaux transeuropéens augmenteront de 12 % en crédits d’engagement, grâce à une nouvelle programmation volontariste définie par le règlement financier adopté cette année. Ce dernier double en effet l’enveloppe globale pour la période 2000-2006 par rapport à la période antérieure. Les Etats membres pourront recevoir jusqu’à 4,6 milliards d’euros sur la période, soit 30 milliards de francs. La France, par exemple, devrait bénéficier en 1999 de 320 MF en crédits d’engagement au titre des transports.

      La Commission européenne a regroupé sous l’intitulé « l’Europe de la connaissance » les différentes actions en faveur de l’éducation, de la formation et de la jeunesse, renouvelées pour les prochaines années : ces actions seront dotées de crédits en forte progression, de 30 à 40 % selon les programmes.

CONCLUSION

      Le projet de budget communautaire pour 2000 fait à votre Rapporteur l’effet d’une gageure : il couvre tout d’abord les dépenses de la PAC et les dépenses de développement régional, deux politiques préservées pour les sept prochaines années. Il s’efforce ensuite de ménager les politiques internes, et renforce deux actions essentielles pour l’avenir de la Communauté : les réseaux transeuropéens et la recherche, il consacre aussi quelques moyens supplémentaires aux programmes regroupés par la Commission européenne sous le beau titre d’« Europe de la connaissance ». Enfin, il dégage des crédits pour la reconstruction du Kosovo, et ménage, semble t-il, les autres actions extérieures de l’Union.

      C’est pourquoi votre Rapporteur sera favorable à l’adoption de l’article 35 du projet de loi de finances pour 2000.

      Néanmoins, l’analyse qui a été faite dans ce rapport montre à quel point il s’agit d’un budget tendu : l’équilibre est obtenu par le redéploiement de crédits, en prélevant d’une part sur des chapitres connaissant une sous-exécution, et d’autre part, en réduisant de manière linéaire la plupart des actions extérieures, au mépris, selon le Parlement européen, d’actions au long cours entreprises depuis plusieurs années. Le projet de budget ne permettrait absolument pas une intervention impromptue et urgente de l’Union si elle apparaissait nécessaire ; une révision des perspectives s’imposerait s’il fallait faire face à un nouveau problème d’actualité.

      En conclusion, votre Rapporteur indiquera qu’il s’agit d’un budget inscrit dans un « paquet » de transition : il ne traduit aucune vision d’avenir de la construction européenne, à l’inverse des précédents « paquets Delors » I et II . C’est ce défaut d’une nouvelle impulsion que déplore votre Rapporteur, alors que le traité d’Amsterdam, d’une part, et la situation internationale, d’autre part, appelaient l’Union à s’affirmer selon des principes plus clairs et plus ambitieux.

EXAMEN EN COMMISSION

      Au cours de sa réunion du mardi 12 octobre 1999, la Commission a examiné pour avis l'article 35 du projet de loi de finances pour 2000 (évaluation du prélèvement opéré sur les recettes de l'Etat au titre de la participation de la France au budget des Communautés européennes).

      Après l'exposé de Votre Rapporteur, le Président Jack Lang a observé que selon lui, les conditions dans lesquelles l’Agenda 2000 a été conclu n’ont pas été favorables à une réflexion attentive et prospective de l’évolution de l’Union européenne. A l’évidence, la présidence allemande a souhaité conclure vite et sans doute trop vite. Le projet de budget 2000 est un budget de faux-semblants et d’apparences qui consacre le passé sans préparer l’avenir, et qui pose plus de questions qu’il n’en résout. Les dépenses souffrent du handicap de devoir financer des programmes trop bureaucratiques alors qu'il faudrait les renouveler, notamment en augmentant les échanges destinés à la jeunesse pour un véritable "brassage européen". Le budget consacré à la culture est presque insignifiant. En outre, rien ne peut garantir que la préservation même des politiques traditionnelles comme l'agriculture ne conduira pas à l'explosion des plafonds. Le seul point rassurant pour le futur réside dans le fait que l’Union européenne dispose encore d’une marge par rapport aux plafonds de dépenses et que la faculté d’emprunter n’a encore jamais été utilisée. Les problèmes que l'on a préféré ignorer resurgiront inévitablement.

      Faisant référence au fait que ce budget intègre partiellement la réduction des fonds structurels et la suppression progressive des programmes d'initiative communautaire, M. François Guillaume a demandé si l’on avait essayé de déterminer comment le solde net français évoluerait par rapport aux années antérieures et par rapport aux autres pays contributeurs nets. S’agissant des diverses mesures envisagées pour réformer le système des ressources propres, telles que la réduction progressive de la ressource TVA, quelles en seront les conséquences pour la France ? Quel est l'avenir de la correction apportée à la contribution britannique ?

      M. Pierre Brana a émis la crainte que le financement de l'aide au Kosovo ne vienne en déduction des actions de coopération et de développement destinées en priorité aux pays du Sud, et plus particulièrement aux pays africains. Cette crainte est-elle motivée ? Considérant les cas de fraude intervenus ces dernières années et pour lesquels la responsabilité a été imputée à la Commission, il a demandé quelle était la teneur des 90 recommandations du comité des sages et quelles étaient les mesures prises par la Commission. Il s'est dit peu convaincu par le remplacement de l’UCLAF par l’OLAF, qui ne lui paraît pas constituer un progrès décisif : y a-t-il d’autres dispositions plus efficaces pour limiter la fraude ?

      M. Jacques Myard a fait remarquer que ce budget était semblable aux budgets précédents dans le sens où l'on retrouvait deux actions fortes, la PAC et l’action structurelle, et puis une série de saupoudrages. Cette absence de ligne de force vient de la multiplication des compétences de l’Union européenne et donc de leur dilution alors que l’Union européenne devrait accomplir des actions fortes et laisser les Etats faire le reste.

      M. François Loncle a considéré que le flou budgétaire était accentué dans le contexte de l’élargissement. La programmation annuelle ne suffit pas à y voir plus clair. Il a estimé qu'un état des lieux et un calendrier plus précis devraient être élaborés, ainsi qu'une traduction sur le plan budgétaire du processus de l'élargissement. Le Rapporteur peut-il apporter des éclaircissements à ce sujet ?

      M. Charles Ehrmann a considéré que tant l’approfondissement que l’élargissement de l'Union demeuraient des questions non résolues. Il a demandé quelle était la position de la France en termes de contribution nette. Il a fait remarquer que pour accroître la part française l’on parlait de recettes fiscales sans prendre en compte les emprunts.

      Votre Rapporteur a répondu aux intervenants.

      En ce qui concerne l'avenir des fonds structurels, ceux-ci demeurent des dépenses privilégiées dans la prochaine période pluriannuelle. Les actions structurelles bénéficieront d'une augmentation de 1,8% en crédits de paiement pour l'exercice 2000 par rapport à 1999. La réforme des fonds structurels décidée à Berlin concentre davantage l'aide sur les régions les plus en difficulté, ce qui entraînera une diminution de la part relative de la France : le retour pour la prochaine période 2000-2006 s'établira à 7,96%, alors qu'il était de 9,8% pour la précédente période (hors Fonds de cohésion, réservé à quatre pays de l'Union). Mais la France recevra encore la part la plus importante des aides destinées à la reconversion économique de certaines régions, en recul industriel par exemple.

      La réforme du système des ressources propres interviendra à partir de 2002. La réduction progressive de la recette "TVA" et l'augmentation corrélative de la recette assise sur le PNB aura pour effet l'alourdissement de la contribution française, qui serait alors portée à 120 milliards de francs. Notre pays figure actuellement en sixième position de contributeur net derrière l'Allemagne, les Pays-Bas, le Royaume-Uni, la Suède et la Belgique.

      Le financement de l'aide au Kosovo réduira effectivement les financements disponibles pour certaines actions extérieures. Le Parlement européen s'oppose d'ailleurs vivement à cette réduction, et demande au Conseil la révision des perspectives financières, qui est possible en cas de circonstances imprévues. Selon le Parlement, les événements intervenus au Kosovo justifient pleinement la révision, qui permettrait de maintenir le niveau des autres actions extérieures.

      Votre Rapporteur a indiqué que la Commission avait adopté plusieurs programmes pour développer et systématiser l'évaluation de la dépense communautaire. Elle a par ailleurs entrepris, sous l'impulsion de son nouveau Président Romano Prodi, une réforme de ses services s'inspirant du rapport du "Comité des sages".

      La perspective de l'élargissement est intégrée au sens strict par les perspectives pluriannuelles au moyen de la réserve de 45 milliards d'euros, utilisable pour faire face aux dépenses (agricoles, structurelles), qu'entraînerait un éventuel élargissement. Cependant, de façon plus générale, ni les perspectives pluriannuelles ni a fortiori le budget 2000 n'offrent un cadre approprié et encourageant pour la préparation de cet élargissement. Il est à craindre que la manière de procéder des Quinze, bureaucratique et dénuée de vision d'avenir, ne décourage les pays candidats qui accomplissent des efforts très importants en vue de l'adhésion. Le Rapporteur a souhaité que les Etats membres définissent rapidement une position plus claire et plus ambitieuse.

      Suivant les conclusions de Votre Rapporteur, la Commission a émis un avis favorable à l'adoption de l'article 35 du projet de loi de finances pour 2000.

N°1863-01. - Avis de Mme Marie-Hélène Aubert , au nom de la commission des Affaires étrangères, sur le projet de loi de finances pour 2000. - Affaires européennes.

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© Assemblée nationale

Votre Rapporteur se réfère au rapport d’information sur «La réforme de l’assistance de l’Union européenne en faveur des nouveaux Etats indépendants et de la Mongolie », présenté au nom de la Délégation de l’Assemblée nationale pour l’Union européenne par M. Alain Barrau, n°1615 du 20 mai 1999.