N° 1864

——

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

ONZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 14 octobre 1999.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DES FORCES ARMÉES (1) , SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2000 (n° 1805)

TOME III

DÉFENSE

ESPACE, COMMUNICATION ET RENSEIGNEMENT

PAR M. BERNARD GRASSET,

Député.

——

(1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page.

                      Voir les numéros : 1861 (annexe n° 40)

    Lois de finances.

La commission de la défense nationale et des forces armées est composée de :

M. Paul Quilès, président ; MM. Didier Boulaud, Arthur Paecht, Jean-Claude Sandrier,
vice-présidents
 ; MM. Robert Gaïa,
Pierre Lellouche, Mme Martine Lignières-Cassou, secrétaires ; MM. Jean-Marc Ayrault, Jacques Baumel, Jean-Louis Bernard, André Berthol, Jean-Yves Besselat, Bernard Birsinger, Jacques Blanc, Jean-Marie Bockel, Loïc Bouvard, Jean-Pierre Braine, Philippe Briand, Jean Briane, Antoine Carré, Bernard Cazeneuve, Gérard Charasse, Guy-Michel Chauveau, Alain Clary, Charles Cova, Michel Dasseux, Jean-Louis Debré, François Deluga, Claude Desbons, Philippe Douste-Blazy, Jean-Pierre Dupont, François Fillon, Christian Franqueville, Yves Fromion, Yann Galut, René Galy-Dejean, Roland Garrigues, Henri de Gastines, Bernard Grasset, Elie Hoarau, François Hollande, Jean-Noël Kerdraon, François Lamy, Claude Lanfranca, Jean-Yves Le Drian, Georges Lemoine, François Liberti, Jean-Pierre Marché, Franck Marlin, Jean Marsaudon, Christian Martin, Guy Menut, Gilbert Meyer, Michel Meylan, Jean Michel, Charles Miossec, Alain Moyne-Bressand, Jean-Claude Perez, Robert Poujade, Michel Sainte-Marie, Bernard Seux, Guy Teissier, André Vauchez, Emile Vernaudon, Jean-Claude Viollet, Michel Voisin, Aloyse Warhouver, Pierre-André Wiltzer, Kofi Yamgnane.

INTRODUCTION 7

PREMIÈRE PARTIE : LE CONTRASTE D’UN BUDGET CONTRAINT AVEC DES AMBITIONS SPATIALES NÉCESSAIRES 11

I. — UNE RÉDUCTION DU BUDGET SPATIAL MILITAIRE PLUS SUBIE QUE VOULUE 11

A. UN PROJET DE BUDGET REDIMENSIONNÉ 12

1. Une baisse des dotations budgétaires essentiellement mécanique 12

2. Une évolution acceptable malgré les apparences 14

3. Le problème de l’imputation des crédits duaux 15

B. UN INFLÉCHISSEMENT DÛ À UN CONTEXTE EUROPÉEN EN DÉCALAGE AVEC LES POLITIQUES DES PRINCIPALES PUISSANCES SPATIALES DANS LE MONDE 16

1. Les ambiguïtés de la coopération européenne 16

    a) Des évolutions budgétaires différenciées chez les partenaires de la France 17

    b) La persistance d’opportunités réelles pour des projets d’envergure 19

    c) Des programmes européens à vocation duale plutôt préservés 21

2. La réorientation des priorités spatiales américaines 22

    a) Une puissance spatiale incontestée 22

    b) Des ambitions fortes et soutenues sur le plan budgétaire 23

3. L’affirmation de la compétence des pays asiatiques 24

    a) Les réelles perspectives du programme chinois 24

    b) L’aboutissement de la politique spatiale indienne 25

    c) Un programme japonais cohérent et substantiel 26

II. — DES DIFFICULTÉS PERCEPTIBLES DANS LA CONDUITE ET LA RELANCE DES PROGRAMMES SPATIAUX ESSENTIELS 27

A. LA PERTINENCE DES GRANDES ORIENTATIONS NATIONALES DANS LE DOMAINE DE L’ESPACE MILITAIRE À L’AUNE DU CONFLIT DU KOSOVO 27

1. La réussite technique et opérationnelle des équipements militaires spatiaux engagés par la France 28

    a) L’utilité avérée d’Hélios I : un engagement à forte signification politique 28

    b) L’apport fondamental des supports satellitaires en matière de télécommunications 29

2. Des carences manifestes aux enseignements révélateurs 31

    a) La nécessité d’assurer la relève d’un programme d’observation optique encore limité 31

    b) L’intérêt d’un programme d’observation radar qui fait défaut 32

B. UNE RELATIVE INCERTITUDE SUR LE DÉROULEMENT DES PROGRAMMES ESSENTIELS 34

1. La consolidation des acquis pour la réalisation d’Hélios II 34

    a) Une conception engagée 34

    b) Des partenariats pas encore assurés 35

2. Vers une solution transitoire pour la relève de Syracuse II 36

C. LE CARACTÈRE INDISPENSABLE DES APPROCHES COMPLÉMENTAIRES 38

1. L’écoute électromagnétique 38

2. Les programmes de cohérence 39

DEUXIÈME PARTIE : LES MOYENS DE COMMUNICATION, DE RENSEIGNEMENT ET DE CONDUITE DES OPÉRATIONS 43

I. — LES PRINCIPAUX SYSTÈMES DE TRANSMISSION, DE LIAISON ET DE COMMANDEMENT : UN DOMAINE BUDGÉTAIREMENT PRIVILÉGIÉ 43

A. LES PROGRAMMES AU NIVEAU INTERARMÉES 44

B. LES PROGRAMMES D’INFORMATION ET DE COMMANDEMENT 45

1. Le SCCOA de l’armée de l’Air 46

2. Le SICF de l’armée de Terre 47

II. — LES SYSTÈMES DE RECUEIL DE RENSEIGNEMENT : UN ENJEU DE PLUS EN PLUS CRUCIAL MAIS PAS ENCORE PRIORITAIRE 48

A. LES PROGRAMMES STRATÉGIQUES D’ÉCOUTE 48

1. La composante aéroportée : Sarigue nouvelle génération 48

2. La composante navale : le MINREM 49

B. LES MOYENS À VOCATION TACTIQUE 49

1. L’aviation de patrouille maritime 49

2. La surveillance du champ de bataille 49

3. La mise en œuvre de drones 50

    a) Un concept d’emploi éprouvé 51

    b) Un bilan plutôt positif concernant les drones en service 52

    c) Des perspectives de développement importantes sur le plan opératif 54

CONCLUSION 57

TRAVAUX EN COMMISSION 59

I. — AUDITION DU GÉNÉRAL JEAN-PIERRE KELCHE, CHEF D’ÉTAT-MAJOR DES ARMÉES 59

II. — EXAMEN DE L’AVIS 68

MESDAMES, MESSIEURS,

L’utilisation de l’espace est devenue un élément essentiel de la politique militaire des grandes nations, tant sur le plan stratégique, y compris pour le contrôle des traités et la maîtrise des armements, qu’au niveau tactique le plus modeste, celui de la mise en œuvre des systèmes d’armes. En complément d’autres moyens, les applications spatiales permettent de donner aux plus hautes autorités civiles et militaires les informations nécessaires à la conduite d’une politique de sécurité et de défense. Elles présentent également un pouvoir multiplicateur de l’efficacité des moyens militaires qui peut constituer un différentiel de puissance décisif dans les engagements.

Cette conviction sous-tend, depuis plusieurs années déjà, l’effort entrepris par la France en matière d’utilisation militaire de l’espace. A cet égard, la participation budgétaire de notre pays dans le domaine spatial reste sans comparaison en Europe, les crédits réellement dépensés par le ministère de la Défense avoisinant les 3 milliards de francs au cours des derniers exercices. Certes, le décalage des dotations de l’État par rapport à l’annuité de la loi de programmation militaire pour la période 1997-2002 est incontestable. En effet, les crédits d’équipement de la Défense consacrés à l’espace ont régressé de façon sensible en 1998 et 1999. La tendance ne semble pas devoir s’inverser pour l’année à venir, puisque le montant des autorisations de programme devrait être inférieur à celui des crédits de paiements et dépasser à peine les deux milliards de francs courants. Cependant, cette évolution est davantage subie que voulue. En effet, le ralentissement qui affecte le secteur spatial résulte pour une large part des difficultés rencontrées dans les négociations avec nos partenaires européens sur les programmes en coopération, notamment à cause des réorientations de leurs priorités budgétaires. Par ailleurs, le lancement d’Hélios I-B prévu pour le dernier trimestre 1999 doit se traduire par une diminution des besoins budgétaires nécessaires à son maintien en condition opérationnelle, ce qui se répercute automatiquement sur le volume des crédits inscrits dans le projet de budget pour l’année 2000. D’une manière générale, les programmes français destinés à la prévention des crises restent prioritaires.

À cet égard, la crise du Kosovo a justifié la pertinence d’une politique spatiale volontariste. Plus que jamais, l’accès à l’espace, la maîtrise des communications et de l’information se sont révélés être des atouts indispensables à l’indépendance de la France. Sans la mise en œuvre du satellite d’observation optique Hélios, il semble probable que les responsables politiques et militaires français n’auraient pas pu peser de la même manière sur l’appréciation de la situation et la conduite des opérations de l’OTAN. Ainsi, en démontrant la maturité opérationnelle des moyens spatiaux nationaux, cette guerre a validé un certain nombre de choix réalisés dans les années quatre-vingts. D’ailleurs, si les synergies entre les projets civils et militaires ont sans conteste favorisé les résultats techniques obtenus, rien n’aurait cependant été acquis sans un soutien significatif de la puissance publique.

Néanmoins, les enjeux, les coûts et l’importance des moyens à mettre en œuvre pour pallier les carences qui subsistent dans le dispositif spatial national ne sont plus totalement à la mesure de notre pays. L’espace en général est donc appelé à devenir un domaine fédérateur et de coopération privilégiée en matière de défense, tout particulièrement entre les pays membres de l’Union européenne.

Il y va en effet de la prise de conscience d’une identité européenne de sécurité et de défense. Dans cette perspective, la France peut, une fois encore, jouer un rôle moteur du fait de l’expérience et des savoir-faire acquis par ses industriels en un temps très court. Les satellites de communication relevant du programme Télécom-Syracuse à usage dual, les satellites d’observation optique de la famille Hélios que devraient compléter plus tard l’observation radar puis l’écoute électromagnétique, sont autant d’étapes amorcées par notre pays pour jalonner progressivement l’émergence de l’espace militaire européen. Une telle entreprise s’inscrit dans une perspective de long terme, mais d’ores et déjà, certaines ambitions européennes se concrétisent dans le domaine des réseaux de télécommunications et de navigation par satellites, mettant ainsi en exergue la rapidité des évolutions possibles.

Dans un tel contexte, le projet de budget pour 2000 de l’espace militaire consolide les acquis dans l’attente du développement des coopérations européennes. À cette fin, il assure la continuité de la conception d’Hélios II ainsi que la définition d’un programme de télécommunications spatiales successeur de Syracuse II. Par ailleurs, il permet le renouvellement partiel des systèmes de communication des armées. Reste à savoir comment interpréter la diminution marquée des crédits de paiement (-15,26 %) et plus encore celle des autorisations de programme (-23,78 %) par rapport au projet de loi de finances initiale pour 1999. S’agit-il d’un ajustement ponctuel, de la conjonction d’effets mécaniques ou d’une véritable réorientation de nos priorités budgétaires en matière de Défense ? La question mérite d’être posée, eu égard à la vitalité des programmes initiés par certaines nations aspirant à la reconnaissance dans le domaine spatial, voire celle des projets conduits par des pays désireux de conserver les premiers rôles en la matière.

Dans le prolongement de cette interrogation, il est légitime de se demander si le niveau du budget reste en adéquation avec la cohérence du programme spatial militaire, laquelle a été bâtie sur un ensemble de moyens peu dissociables (imageries optique et radar, écoute électronique, surveillance de l’espace, alerte avancée…). Le déroulement des projets n’implique-t-il pas dans ces conditions une révision des modalités de la coopération européenne ? Certaines missions dévolues aux satellites ne peuvent-elles pas être remplies par des moyens qui, à l’image des drones, sont plus rudimentaires mais moins onéreux ? De même, l’alternative du recours aux moyens civils pour compenser les manques constatés en systèmes dédiés à la défense est-elle envisageable en dehors des transmissions non sécurisées, de l’imagerie optique à résolution métrique et de certains objectifs de surveillance de l’espace ?

*

Mais le présent avis a également vocation à s’intéresser aux différents systèmes de communication et de renseignement des Armées. Support de leur action au même titre que les équipements plus classiques, ces moyens sont tout autant indispensables. A ce titre, il convient de souligner que les systèmes de recueil de renseignement continuent de recevoir une attention particulière sur le plan budgétaire, même s’il faut bien convenir que le volume global des crédits qui y sont destinés reste relativement faible. Les systèmes de communication, quant à eux, font l’objet d’un traitement budgétaire plutôt privilégié. Ainsi, l’armée de Terre prolonge-t-elle la mise en œuvre du SCIF. L’armée de l’Air poursuit la mise en place du SCCOA. Toutes deux, avec la Marine, bénéficient également d’une modernisation de leurs moyens de transmission.

Néanmoins, au delà de cette évolution positive dans le projet de budget pour 2000, on ne peut s’empêcher de s’interroger sur l’étalement du renouvellement des systèmes de communication des forces. Par ailleurs, eu égard au fort potentiel que recèlent des moyens de renseignement tels que les drones, il semble que les crédits de recherche en la matière soient insuffisants. Par conséquent, il est légitime de se demander si les orientations poursuivies dans ces domaines répondent aux besoins exprimés sur les théâtres d’opérations.

*

Votre rapporteur tentera de répondre à ces différentes questions qui ne se limitent pas qu’au seul budget spatial et donnera un aperçu des programmes relatifs à l’espace, aux communications et à la conduite des opérations, qui lui semblent essentiels à l’activité de nos forces armées.

*

* *

PREMIÈRE PARTIE :

LE CONTRASTE D’UN BUDGET CONTRAINT AVEC DES AMBITIONS SPATIALES NÉCESSAIRES

La loi de programmation militaire 1997-2002 inscrivait initialement l’évolution pluriannuelle du budget de l’espace militaire dans la perspective d’une réalisation de trois programmes d’envergure, sur la base d’une coopération européenne. Cet équilibre est rompu depuis plusieurs années déjà. La revue des programmes de 1997 avait conduit au choix d’un report de la conception d’un satellite radar. Le projet de budget 2000, quant à lui, est marqué par une diminution sensible des crédits qui suscite à bon droit quelques inquiétudes même si elle ne remet pas directement en cause les deux programmes majeurs qui restent prioritaires.

I. — UNE RÉDUCTION DU BUDGET SPATIAL MILITAIRE PLUS SUBIE QUE VOULUE

Avec un niveau d’investissement global (civil et militaire) équivalent à celui de tous ses partenaires européens réunis, la France est le premier acteur européen dans le secteur spatial. Cependant, devant l’ampleur des besoins opérationnels et l’extrême sophistication des équipements spatiaux, elle peut difficilement rester seule en Europe à consacrer un effort significatif à l’espace militaire. Les coopérations européennes sont donc indispensables à la poursuite d’une politique spatiale nationale ambitieuse. Or, le contexte n’y semble pas favorable pour le moment, soit parce que nos partenaires stratégiques se sont engagés dans une politique d’assainissement budgétaire, soit parce qu’ils cherchent à valoriser avant tout leurs industries nationales par le financement de programmes qui ne répondent pas nécessairement à nos besoins immédiats.

Un tel environnement conduit automatiquement à revoir temporairement le format budgétaire pour l’espace militaire et à redéfinir nos priorités autour de la continuité des programmes majeurs et de la veille technologique dans le but de préserver les compétences nationales. Le projet de budget 2000 est donc la traduction de contraintes subies, et non une réorientation délibérée de la politique spatiale française. D’ailleurs, si ces difficultés en matière de coopération européenne ont un effet significatif sur le volume des crédits inscrits, cette incidence est amplifiée par la diminution mécanique de certains besoins budgétaires. L’appréciation du projet de budget doit en tenir compte.

    A. UN PROJET DE BUDGET REDIMENSIONNÉ

Compte tenu des annulations et des transferts de crédits en exécution des lois de finances initiales de ces dix dernières années, le niveau réel des dépenses exécutées n’a pas dépassé 2,5 milliards de francs au cours des quatre derniers exercices. Cependant, alors même que les crédits votés ont toujours atteint ce seuil jusqu’à présent, le projet de budget pour 2000 provoque une rupture puisqu’il prévoit une baisse de près de 15,3 % des crédits de paiement.

Cette diminution s’explique par l’impossibilité de réaliser les coopérations prévues, mais aussi par des effets mécaniques. Les études amont sont épargnées par cette réduction, préservant ainsi les compétences et le potentiel acquis.

CRÉDITS PAR CATÉGORIES DE COÛT
DANS LE PROJET DE BUDGET DE L’ESPACE POUR 2000

(en millions de francs)

 

Autorisations de programme

Crédits de paiement

Études amont

271

237

Développements / Réalisations (1)

368

382

Entretien programmé

223

220

Fabrications (2)

1 209

1 455

Total

2 071

2 294

Rapport études / crédits espace

13 %

10,2 %

1. Tous programmes spatiaux, y compris l’emploi opérationnel d’Hélios I
2. Equipements sol de télécommunications au profit des états- majors

      1. Une baisse des dotations budgétaires essentiellement mécanique

Par rapport à la loi de finances initiales pour 1999, le secteur de l’espace est particulièrement affecté par la réduction des crédits d’équipement de la Défense dans le projet de budget pour l’année 2000.

En effet, alors que les crédits de paiement des titres V et VI diminuent de 3,54 % par rapport aux dotations de la loi de finances initiale pour 1999, ceux du secteur de l’espace militaire subissent une contraction de 15,26 %. Le contraste est plus saisissant encore s’agissant des autorisations de programme, puisque celles de l’ensemble des titres V et VI augmentent de 1,7 % tandis que les autorisations de programme pour l’espace militaire régressent de 23,78 %.

En valeur absolue, le projet de loi de finances pour l’année 2000 situe le budget de l’espace militaire à un niveau à peine supérieur aux deux milliards de francs d’autorisations de programme (2 071 millions de francs très exactement), le volume des crédits de paiement étant un peu plus important (2 294 millions de francs).

ÉVOLUTION DES CRÉDITS BUDGÉTAIRES AFFECTÉS À L’ESPACE

 

Loi de finances initiale en millions de francs

Évolution en %

 

1997

1998

1999

2000
(projet)

98/97

99/98

99/2000

Autorisations de programme

3 407,0

2 790

2 717,8

2 071

- 18,10

- 10,6

- 23,78

Crédits de paiement

3 298,0

3 112

2 706,7

2 294

- 5,63

- 15,9

- 15,26

Une telle évolution, contradictoire par rapport aux orientations générales du projet de budget de la Défense pour l’année 2000, est la traduction d’un ralentissement tendanciel des investissements devant l’absence de perspectives en matière de coopération. L’infléchissement significatif du montant des autorisations de programme révèle le caractère mécanique de cette évolution qui, même si votre rapporteur ne peut que la regretter, n’a rien de délibéré.

Ainsi, la réduction des dépenses de maintien en condition opérationnelle (MCO) d’Hélios I due au lancement d’Hélios I-B en novembre 1999, les incidences budgétaires du report du lancement d’Hélios II en 1998, ainsi que le faible niveau des crédits destinés à la définition d’un satellite successeur de Syracuse II dû au retrait britannique du projet de coopération Trimilsatcom la même année, sont autant d’effets conjugués qui accentuent l’ampleur de la réduction du projet de budget pour 2000 de l’espace militaire.

Ce faisant, l’analyse des crédits consacrés aux programmes spatiaux militaires ne doit pas s’apprécier uniquement à travers des chiffres biaisés par le cumul ponctuel de difficultés ou de retards dans la réalisation des équipements spatiaux majeurs. Il est au contraire nécessaire de mettre le projet de budget pour l’année 2000 en perspective.

      2. Une évolution acceptable malgré les apparences

Plusieurs éléments invitent à nuancer l’appréciation des équilibres budgétaires de l’espace militaire dans le projet de loi de finances pour l’année 2000.

Tout d’abord, le niveau des crédits de paiement des études amont consacrées à ce secteur progresse de 8 %. Ainsi, alors même que les autorisations de programme se maintiennent à leur niveau de 1999, soit 271 millions de francs, les crédits de paiement atteignent 237 millions de francs. Cette donnée mérite d’être soulignée, dans la mesure où les études amont consacrées au domaine de l’espace couvrent l’ensemble des études préparatoires aux programmes futurs, notamment l’acquisition de nouvelles technologies ainsi que des études d’architecture de systèmes. Concernant de nombreux domaines essentiels, elles portent en priorité sur l’interception des télécommunications terrestres par satellite (démonstrateur d’un essaim de micro-satellites d’écoute Comint), l’observation du sol par mini-satellite radar, l’optique haute résolution et le traitement d’images provenant de capteurs multiples, la réduction du coût des futurs systèmes.

Par ailleurs, le taux de consommation des crédits votés pour le budget du ministère de la Défense progresse, conformément aux objectifs de la réforme initiée en 1997. Le secteur spatial ne fait pas exception en ce domaine, ce qui atténue l’effet de réduction des crédits sur le plan réel.

COMPARAISON DES CRÉDITS VOTÉS ET DES DÉPENSES RÉALISÉES

(en millions de francs)

 

1996

1997

1998

1999

97/96

98/97

99/98

Crédits votés

4 085

3 298

3 112

2 706,7

- 19,3 %

- 5,6 %

- 13 %

Crédits votés hors BCRD

2 965

3 298

3 112

2 618

- 11,2 %

- 5,6 %

- 15,9 %

Annulations et reports

- 322

- 182

- 298

Crédits disponibles

2 643

3 116

2 814

2 618

- 19,9 %

- 0,4 %

- 6,9 %

Dépenses réalisées

2 658

2 681

2 753

435 (1)

+ 0,5 %

+ 2,7 %

Ecart crédits votés/dépenses réalisées

1 427

617

359

- 56,7 %

- 41,8 %

(1) Au 30 juin 1999

Par conséquent, les perspectives d’avenir des programmes spatiaux futurs ne sont pas pénalisées par les contraintes qui ont conduit au redimensionnement budgétaire pour l’année 2000. Cependant, il faut souhaiter que la situation présente ne perdure pas car, dans l’hypothèse inverse, les ambitions de la France nécessiteraient d’être revues. Le projet de budget pour 2000 n’est acceptable que parce qu’il est supposé s’inscrire dans un contexte particulier, voire exceptionnel. Pérenniser la diminution des crédits dans un secteur de très haut niveau technologique et requérant des investissements importants, conduirait à redéfinir la politique spatiale française en matière de Défense.

      3. Le problème de l’imputation des crédits duaux

Si le niveau des transferts du ministère de la Défense au titre des crédits de recherche duale du BCRD a diminué de 1997 à 1998, une tendance inverse semble s’être instaurée depuis 1999, puisque le projet de loi de finances pour l’année 2000 prévoit un transfert de 1,5 milliards de francs (soit 600 millions de francs de plus que l’année dernière) en autorisations de programme et en crédits de paiement destinés essentiellement aux recherches civiles dans le domaine spatial et affectés au budget du CNES.

ÉVOLUTION DU MONTANT DES CRÉDITS DUAUX TRANSFÉRÉS AUX BUDGETS DES MINISTÈRES CIVILS

(Autorisations de programme et crédits de paiement globalisés(1), en millions de francs)

 

1995

1996

1996
au titre de 1997

1998

1999

2000

Aviation civile

650

680

680

0

0

0

CEA

368

200

200

0

0

0

CNES

882

1 120

1 120

500

900

1 500

Total

1 900

2 000

2 000

500

900

1 500

(1) De tels ordres de grandeurs sont partiellement significatifs mais votre rapporteur n’a pas disposé des précisions qu’il avait demandé

De tels transferts de crédits militaires vers les programmes civils ne sont pas contestables dans leur principe car ils sont supposés bénéficier aux études amont des programmes militaires. Mais en fait, ce n’est que partiellement le cas. En effet, si 75 des 900 millions de francs inscrits dans la loi de finances initiale pour 1999 ont permis de financer des études aux répercussions militaires indéniables en matière de haute résolution stéréo et d’optique embarquée sur SPOT V, le reste a essentiellement constitué un appoint au budget du CNES.

Or, l’ampleur de ces transferts suscite quelques interrogations, notamment quant à leur conformité avec l’esprit de la convention signée entre le Centre National des Études Spatiales (CNES) et la Délégation Générale pour l’Armement (DGA). En effet, la participation des crédits du ministère de la Défense aux dépenses spatiales civiles représente un simple abondement du budget du CNES. Les crédits transférés sont affectés par le ministère de l’Économie et des Finances au budget des organismes civils concernés et ne sont pas gérés par le ministère de la Défense.

Ainsi, non seulement les crédits présentés comme duaux sont comptabilisés deux fois puisqu’ils sont affichés dans la présentation des deux budgets, permettant de maintenir de manière quelque peu artificielle le niveau des crédits consacrés à l’espace militaire, mais il n’est pas établi, de surcroît, de comptabilité séparée de ces crédits dont il devient par conséquent impossible de connaître l’utilisation précise.

    B. UN INFLÉCHISSEMENT DÛ À UN CONTEXTE EUROPÉEN EN DÉCALAGE AVEC LES POLITIQUES DES PRINCIPALES PUISSANCES SPATIALES DANS LE MONDE

Si le niveau des dépenses budgétaires ainsi que la priorité accordée à certains programmes confirment la prépondérance de la politique spatiale américaine et témoignent de l’ambition de certains États asiatiques de devenir des acteurs majeurs, les principaux pays membres de l’Union européenne ne semblent pas consacrer un effort à la hauteur de leurs ambitions pour l’Europe spatiale de la Défense. A terme pourtant, des opportunités existent et la France, seul pays du continent à consacrer un effort significatif dans le domaine spatial, ne pourra pas en être tenue à l’écart.

L’EFFORT BUDGÉTAIRE GLOBAL (CIVIL ET MILITAIRE) DES PRINCIPALES PUISSANCES SPATIALES DU MONDE EN FAVEUR DE L’ESPACE EN 1998

COMPARAISONS INTERNATIONALES*

 

Etats-Unis

Japon

Chine

Inde

Allemagne

Italie

Grande Bretagne

France

En milliards de francs courants

168

14,5

1,2(1)

3,0

5,6

4,2

1,8

14,5

En milliards de dollars

28

2,4

0,2(1)

0,5

0,93

0,52

0,32

2,4

* Estimations sur la base de 1 $ = 6 F, 1 DM = 3,5 F,1 £ = 10 F et 1euro = 1 $

(1) Agrégat global à fiabilité contestable

      1. Les ambiguïtés de la coopération européenne

De manière générale, la coopération en matière d’équipement présente un triple intérêt. Tout d’abord, elle permet un partage des coûts de développement et d’industrialisation, l’effet sur les prix de série restant toutefois limité par le faible nombre de satellites produits. Elle présente également l’avantage de rapprocher les armées des pays coopérants en raison de l’élaboration d’un besoin opérationnel commun et du renforcement de l’interopérabilité des moyens. Enfin, elle a un effet structurant sur les pôles industriels d’excellence qui sont amenés à se regrouper, à l’image de Matra Marconi Space avec DASA (et bientôt Alenia Spazio) dans l’entité Astrium, afin d’exploiter leurs synergies.

Les difficultés ne doivent pas être négligées pour autant. Il est souvent nécessaire de préserver les intérêts industriels nationaux. Or, l’obligation du « juste retour » représente une contrainte, surtout si elle n’est pas appréciée globalement, c’est-à-dire sur l’ensemble des programmes en coopération. Mais le principal écueil résulte des aléas sur les ressources financières accordées par chaque participant au projet commun ainsi que de l’urgence et l’évolution des besoins opérationnels.

Les programmes spatiaux n’échappent pas à ces règles et les difficultés rencontrées sur le plan de la coopération européenne ont directement affecté l’économie générale du projet de budget pour l’année 2000.

      a) Des évolutions budgétaires différenciées chez les partenaires de la France

L’espace bénéficie en Europe d’un effort cinq fois inférieur à celui existant aux États-Unis pour les applications civiles et quatorze fois inférieur pour les programmes militaires (à peine plus d’un milliard de dollars pour les cinq principales puissances spatiales européennes contre 14 milliards de dollars aux États-Unis).

D’une manière générale, l’évolution différenciée des budgets des pays européens perturbe l’ensemble des coopérations dans le domaine spatial, les partenaires de la France n’ayant pas les mêmes priorités et ne pouvant s’engager en même temps sur plusieurs programmes, alors que la plupart des systèmes concernés sont soumis à des impératifs calendaires de continuité de service.

· La politique britannique est marquée par le souhait de limiter l’engagement financier public, limité à 181 millions de livres en 1998, et de confier les initiatives en matière spatiale au secteur privé. Elle se traduit par une faible implication dans les grands programmes civils européens, la Grande Bretagne ne contribuant qu’à hauteur de 8,1 % au financement des projets de l’Agence Spatiale Européenne (ASE), les grands programmes européens d’infrastructure orbitale tels Ariane V n’en bénéficiant même pas. L’essentiel des efforts budgétaires du Royaume-Uni concerne plus particulièrement l’observation de la Terre.

Le budget spatial militaire, quant à lui, est assez difficile à identifier. Il semble néanmoins rester stable, à en juger le maintien depuis douze ans des moyens affectés au système de télécommunications dédiées Skynet aux alentours de 80 millions de livres. En matière de programmes, les priorités du ministère de la Défense s’articulent autour du renouvellement de l’actuelle génération de Skynet (Skynet IV-E a été lancé par Ariane au début de 1999), de l’accès aux données météorologiques au travers du programme METOP, et de l’insertion des capacités spatiales d’imagerie et d’observation au cœur des systèmes d’information et de communication. Pour y parvenir, les coopérations internationales avec les nations alliées sont recherchées. Néanmoins, l’option européenne n’est pas toujours privilégiée, comme en témoigne le retrait en 1998 de la Grande Bretagne du projet de satellite de télécommunications pour les besoins de défense Trimilsatcom, programme reposant initialement sur une coopération avec la France et l’Allemagne. Le Royaume-Uni semble depuis préférer l’alternative d’une coopération avec les États-Unis.

· La participation de l’Allemagne à l’ensemble des grands projets spatiaux européens depuis vingt ans s’est appuyée sur un engagement financier qui a connu une croissance régulière jusqu’en 1993 et a permis à ce pays d’être le premier contributeur à l’ASE en s’engageant à hauteur de 22 % du financement d’Ariane V et en s’appropriant la maîtrise d’œuvre de l’élément Colombus de la station spatiale internationale. Stabilisé aux alentours de 1,4 milliards de deutschemark sur la période 1994-1998, le budget géré par la DARA, agence fédérale qui gère toutes les activités civiles, a connu une forte croissance en 1999, portant son niveau à 1,6 milliards de deutschemark.

Néanmoins, au delà de cette apparente dynamique, l’Allemagne a décidé de réorienter ses priorités spatiales autour des initiatives industrielles et de la recherche scientifique. Si le « concept spatial » élaboré au printemps 1997 a reconnu que les télécommunications et l’observation de la Terre prennent un rôle croissant dans la sécurité du pays, force est de constater que ce postulat ne s’est pas traduit par un développement des filières spatiales en coopération. Les événements du Kosovo pourraient néanmoins inciter les pouvoirs publics allemands à relancer cette problématique. Cette évolution semble compromise pour 2000 (le Ministre allemand des Finances ayant présenté des mesures d’économies de l’ordre de 3,2 milliards de deutschemark pour le budget de la Défense), mais une coopération engagée l’année suivante permettrait à des programmes comme Hélios II ou un satellite d’observation radar de se concrétiser.

· L’Italie cherche depuis quelques années déjà à affirmer sa présence sur la scène spatiale européenne. Une agence spatiale italienne, l’ASI, a été créée à cet effet en 1998. Un plan spatial national à cinq ans a été également défini. Des moyens budgétaires non négligeables ont été débloqués. Ainsi, l’ASI disposait d’un budget global de 520 millions d’euros en 1999. Ce dernier devrait connaître une progression significative de 23 % en 2000, conformément aux prévisions du plan spatial national. Certes, cette augmentation vise autant à apurer la dette de l’ASI qu’à permettre le développement de programmes spatiaux d’envergure. Il n’empêche que l’Italie n’a pas uniquement des ambitions spatiales aux applications civiles. Sa participation à Hélios I, sa maîtrise des télécommunications spatiales à vocations civile et militaire (le premier satellite du programme SICRAL, équivalent à Syracuse, devant être mis en orbite fin 1999), ses investissements dans le domaine de l’observation radar en font un acteur crédible. Elle cherche donc à s’impliquer dans le développement d’équipements militaires, ce qui peut constituer une opportunité en vue de coopérations européennes, même limitées.

      b) La persistance d’opportunités réelles pour des projets d’envergure

En apparence, les principaux projets d’envergure dans le domaine spatial militaire sont affectés à des titres divers par l’absence de coordination des efforts budgétaires entrepris par les partenaires européens de la France. En effet, l’Italie privilégie le développement du programme de satellite radar Cosmos-Skymed où elle disposerait d’une maîtrise d’œuvre, au détriment d’Hélios  II qui présente pour ses forces un intérêt opérationnel plus immédiat. La Grande Bretagne s’est, quant à elle, retirée du programme Trimilsatcom alors même que la convergence des besoins de renouvellement de Skynet IV et de Syracuse II était une conjoncture idéale pour une coopération européenne productive. Enfin, l’Allemagne affiche pour priorité son assainissement budgétaire, obérant par là sa participation au financement d’Hélios II.

Ceci étant, cette situation pourrait évoluer pour plusieurs raisons :

— tout d’abord, le conflit du Kosovo a démontré que la possession d’un satellite d’observation optique, quand bien même les conditions météorologiques de son emploi ne sont pas optimales, constitue un gage d’autonomie vis à vis des États-Unis dans l’appréciation du théâtre et l’évaluation des opérations. L’Allemagne semble avoir pris conscience de son intérêt à disposer d’un accès aux renseignements de la filière optique française, d’autant que les États-Unis ne lui ont pas donné toutes les informations qu’elle espérait ;

— ensuite, l’exemple américain montre que la redondance des moyens constitue une force. Cette duplication n’est supportable qu’à l’échelle européenne. Or les difficultés actuelles éprouvées par la France dans la conduite de certains de ses programmes sont ressenties de la même manière par ses partenaires. Ainsi, la Grande Bretagne envisage-t-elle un système exploité et financé par un opérateur privé pour assurer ses besoins militaires en matière de télécommunications. De même, l’Italie doit toujours trouver 35 % des financements nécessaires pour le programme Cosmos-Skymed. De ce fait, l’idée de coopérations pourrait à nouveau s’imposer.

Dans l’ensemble, si la France rencontre quelques réticences de la part de ses partenaires pour recueillir leur participation à ses programmes majeurs, le principe même des coopérations européennes n’est pas pour autant véritablement remis en cause.

· En ce qui concerne le satellite d’observation optique successeur d’Hélios I, l’Allemagne n’a pas formellement dénoncé les accords de Baden-Baden, et conformément à la demande de l’état-major des Armées français, la composante sol utilisateur (CSU) d’Hélios II reste susceptible d’accueillir l’Allemagne. Des discussions ont été également nouées avec la Belgique, l’Espagne et l’Italie. Il n’y a pas eu d’accord pour l’instant, mais l’Italie a tout de même décidé d’adopter la version améliorée de la CSU d’Hélios I, compatible avec les options Hélios II installées pour la France. Une solution identique serait envisagée par l’Espagne.

· Dans le domaine des autres filières d’observation, l’Italie apparaît comme le partenaire européen avec lequel la probabilité de coopération reste la plus forte. Un groupe de travail binational a été constitué pour examiner les schémas de coopération envisageables en matière d’observation spatiale à base de petits satellites. Il remettra son rapport à l’automne 1999. Les modalités de cette coopération pourraient reposer sur un engagement français minoritaire dans la poursuite du projet italien de satellites radar (donnant ainsi à la France un accès à faible coût à une filière radar complémentaire de ses moyens optiques) en contrepartie duquel les Italiens participeraient au financement d’Hélios II, confortant ainsi leur accès à l’observation optique.

· S’agissant des télécommunications spatiales militaires, les possibilités de poursuite de la coopération avec l’Allemagne sont toujours en discussion. Même si le satellite successeur de Syracuse II sera défini sur la base d’une maîtrise d’œuvre nationale dans un premier temps, la totalité de la constellation nécessaire pourrait être réalisée sur la base d’un programme binational.

      c) Des programmes européens à vocation duale plutôt préservés

Le conseil ministériel de l’Agence spatiale européenne des 11 et 12 mai 1999 a adopté le budget spatial de l’Europe pour les prochaines années. A cette occasion, les programmes majeurs de dimension duale ont été préservés puisqu’ont été affectés 462 millions d’euros aux améliorations d’Ariane V, 759 millions d’euros à l’observation de la Terre et 58,4 millions d’euros à la phase de développement d’un système européen de navigation par satellites, Galileosat.

Programme de lanceurs commerciaux, Ariane fonde l’indépendance spatiale des principaux pays européens. Alors qu’Ariane IV arrive en fin de vie et qu’Ariane V vient juste d’être homologuée, la famille de lanceurs européens doit faire l’objet d’ajustements techniques. Pour y parvenir, le conseil ministériel de l’ASE a fixé un certain nombre d’objectifs pour l’évolution d’Ariane V. Fin 2001-début 2002, la fusée (Ariane V « plus ») sera équipée d’un nouvel étage supérieur à propulsion cryotechnique de manière à lui permettre de lancer une charge utile de 9 tonnes contre 6 actuellement. Dans une seconde étape, c’est-à-dire à l’horizon 2004-2005, le moteur Vulcain II actuellement mis au point par la SNECMA devrait permettre à la fusée (Ariane V « évolution ») d’emporter 11 tonnes de charge utile en orbite géostationnaire. La raison de ces adaptations essentielles est que le volume des satellites commerciaux augmente (près de 4 tonnes aujourd’hui contre 2,5 il y a quelques années), et que la rentabilité du programme implique le lancement de deux satellites à chaque tir. A cet égard, l’objectif affiché par Arianespace est la diminution de 50 % du coût de lancement d’un satellite par Ariane V dans les quatre ans à venir. Eu égard à l’importance des enjeux économiques et stratégiques, la réussite de cette démarche paraît primordiale.

L’enveloppe affectée à l’observation de la Terre comprend un volet scientifique et des aspects commerciaux. Cependant, dans ce domaine, les applications sont le plus souvent duales, l’observation météorologique et topographique participant à l’information des forces sur leur environnement.

Le lancement de la phase de définition de Galileosat constitue une première étape dans la réalisation d’un système européen de navigation par satellite. Conformément aux recommandations du conseil « transport » du 17 juin 1999, la Commission européenne devra fournir l’ensemble des détails financiers de l’avancement des travaux au conseil des Ministres des transports de l’Union européenne fin 2000, afin que celui-ci prenne une décision sur la conception de cette constellation de 24 à 45 satellites en orbite moyenne couplés à des satellites en orbite géostationnaire. Entre 2000 et 2005, près de 460 millions d’euros supplémentaires devraient en effet être apportés par l’ASE. La Communauté européenne financera un montant équivalent, alors que les industriels participeront également. Au total, près de trois milliards d’euros devraient être investis dans le projet qui pourrait être opérationnel en 2008 et générer 90 milliards d’euros (585 milliards de francs) d’applications entre 2005 et 2025, pour 100 000 emplois créés. Les incidences militaires d’un tel projet sont également importantes puisqu’il permettra aux forces des pays européens de recourir à un système de navigation autonome par rapport au GPS et au Glonass, donc de s’abstraire du contrôle indirect des états-majors américains et russes.

      2. La réorientation des priorités spatiales américaines

Depuis 1994, les États-Unis ont réorienté leur politique de l’espace afin de conforter leur suprématie technique et d’affirmer leur présence dans toutes les applications spatiales. Pour ce faire, un effort tout particulier a été consenti sur le plan budgétaire, en contrepartie d’une rationalisation des structures et d’importantes réductions d’effectifs. D’ici 2005, ce poids pourrait devenir hégémonique dans tous les secteurs militaires et civils du domaine spatial.

      a) Une puissance spatiale incontestée

La suprématie américaine dans le domaine spatial, mise en exergue à l’occasion de nombreux succès commerciaux, scientifiques et militaires (en raison du conflit du Kosovo), devrait se maintenir dans les prochaines années. En 1999, les Etats-Unis devraient encore rester à la première place du nombre de satellites lancés avec le remplissage des constellations de télécommunications civiles Globalstar et Orbcomm ainsi que la mise en œuvre de Teledesic.

Les programmes d’imagerie satellitaire de haute résolution retardés par divers problèmes techniques voire financiers, devraient aboutir en 1999. L’échec de la société Earthwatch, survenu en 1997 lors de la mise en fonctionnement du satellite Early-Bird-I, a ralenti tous les programmes basés sur le principe de « faire simple, vite et pas cher ». Après les télécommunications civiles, les Américains semblent décidés à conquérir le marché de l’imagerie en imposant un marché d’images à haute résolution.

Le développement de nouveaux types de lanceurs, classiques ou récupérables, pour l’orbite géostationnaire et les lancements multiples de petits satellites, est indispensable pour combler une tranche de marché non dominée par les Américains. Les Etats-Unis, qui ne disposent pas encore de moyens suffisamment fiables et rentables, font appel aux lanceurs européens et russes pour l’orbite géostationnaire, et aux lanceurs chinois et russes pour les satellites à charges multiples. L’aboutissement des programmes Evolved Expendable Launch Vehicle (lanceurs consommables) et Small Expendable Launch Vehicle Services II, entre les années 2000 et 2006, renforcera la stratégie américaine. Dans l’intervalle, les coopérations internationales sur le plan industriel et commercial constituent, à l’image du consortium Sea Launch conduit par Boeing et utilisant le lanceur ukrainien Zenith, un support de la politique spatiale américaine pour consolider les programmes en cours et préserver une domination bien établie.

Globalement, cette stratégie développée depuis 1994 conforte la suprématie américaine et conduit les États-Unis vers une position hégémonique à brève échéance.

      b) Des ambitions fortes et soutenues sur le plan budgétaire

La stabilisation du budget de la NASA, malgré une légère baisse à 13,7 milliards de dollars pour l’exercice 1999, confirme les choix stratégiques qui ont été opérés entre les activités et les systèmes spatiaux : choix de moyens spatiaux “ plus légers et disponibles plus rapidement ”, part prépondérante de la station spatiale internationale et des vols habités qui absorbent 40 % du budget civil, intérêt des programmes d’exploration planétaire et de recherche sur les origines de la vie, comme Pathfinder ou Mars Global Surveyor, dont le succès profite à l’image de la NASA.

Le maintien du budget spatial militaire à un niveau équivalent de 14 milliards de dollars pour 1999 masque néanmoins la priorité accordée aux investissements non classifiés (+20 %), à la recherche (+19 %) et aux programmes d’alerte avancée (+15 %), tandis que les programmes de communication sont en forte diminution.

La politique en matière de lanceurs repose toujours sur un objectif de réduction du coût d’exploitation et sur la rationalisation des responsabilités. Le Département de la Défense reste chargé de l’amélioration des lanceurs lourds ou semi-lourds existants (Delta-IV de McDonnell Douglas, Atlas-IIA et Titan de Lockheed Martin Marietta). La NASA est responsable de la recherche et de la préparation de lanceurs futurs, en particulier le lanceur monoétage réutilisable Delta Clipper. A l’initiative privée revient la charge du développement des lanceurs de moyenne puissance (Taurus, Pegasus ou LLV de Lockheed). Malgré quelques difficultés de lancement, il apparaît d’ores et déjà que les États-Unis disposeront vers 2001-2002 d’une flotte de lanceurs modernisée et très concurrentielle par rapport à Ariane.

La réorientation de la défense antimissiles et anti-satellites est spectaculaire. Alors que près de 40 milliards de dollars ont déjà été dépensés depuis le lancement de l’IDS, les moyens financiers consacrés à la défense antimissiles ne cessent d’augmenter : 2,7 milliards de dollars en 1994, 2,9 milliards en 1996, environ 3,55 milliards en 1997 et une rallonge de 6,6 milliards de dollars décidée en 1999 portant à 11 milliards de dollars les crédits disponibles pour la période 2000-2005.

Le système de défense du territoire (NMD : National Missile Defense), réduit un moment à une veille technologique, a bénéficié d’un accord entre la majorité républicaine du Congrès et le Président des Etats-Unis. Une étape de « préparation au déploiement » a été menée. La phase de tests a été inaugurée avec succès le 3 octobre 1999 (un missile exoatmosphérique ayant décollé de l’atoll Kwajalein, dans les îles Marshall, pour détruire à 6 800 kilomètres un missile balistique simulant une attaque nucléaire contre les États-Unis). Une décision opérationnelle devrait être prise en juin 2000. D’importants efforts ont été concentrés sur la défense du théâtre dans le cadre du programme TMD (Theater Missile Defense) mais les récents échecs des essais du programme essentiel THAAD ont amené à une révision des financements. En ce qui concerne la défense anti-satellites, des essais de neutralisation de mini-satellites au laser (MICRAL) ont été réalisés avec succès.

      3. L’affirmation de la compétence des pays asiatiques

Trois pays d’Asie affichent depuis une dizaine d’années de sérieuses ambitions dans le domaine de l’espace. Longtemps relégués à un rang secondaire, ils ont démontré par leurs récents succès techniques qu’une politique volontariste s’appuyant sur des investissements soutenus peut rapidement déboucher sur une compétence réelle en matière spatiale.

      a) Les réelles perspectives du programme chinois

La politique spatiale de la Chine répond à trois objectifs classiques : le renforcement de son indépendance nationale, l’affirmation de son rôle régional et l’intégration des technologies spatiales dans son développement économique.

Après plusieurs échecs, la République populaire de Chine semble améliorer de façon significative la fiabilité de ses lanceurs. Les récents succès des fusées Longue Marche LM-IIIB qui ont placé sur orbite plusieurs satellites, dont certains de la constellation Iridium, ont renforcé la crédibilité du plus puissant des lanceurs chinois et ont relancé la crainte d’une offre à des prix de dumping.

Pour résoudre les difficultés techniques rencontrées, par exemple dans le développement d’un réseau propre de satellites de météorologie, ou pour satisfaire des besoins spécifiques, notamment en télécommunications, la Chine est décidée à poursuivre un effort d’envergure et à recourir plus largement à la coopération internationale. Toutefois, dans l’attente d’une autonomie technique complète qui n’est pas acquise à l’heure actuelle, la République populaire de Chine doit acheter plusieurs satellites sur étagère aux Américains (Chinasat VII, Chinastar) et aux Européens (Sinosat).

L’Allemagne, le Brésil (avec lequel la Chine a signé un programme de quatre satellites d’observation de la Terre CBERS) et la Russie constituent des partenaires privilégiés de la coopération chinoise. Les accords avec des sociétés américaines se heurtent quant à eux à la question des transferts de technologies sensibles.

      b) L’aboutissement de la politique spatiale indienne

Afin de soutenir une ambitieuse politique de présence sur la scène mondiale, l’Inde a quasiment triplé son budget spatial entre 1991 (1,1 milliards de francs) et 1999 (2,9 milliards de francs). Plus de la moitié de ce budget est destinée à renforcer l’indépendance du pays en matière de lanceurs, les générations en service (PSLV) ou en développement (GSLV) s’appuyant sur des coopérations avec la France ou la Russie. Quatre familles de satellites ont été développées depuis vingt ans dans les domaines de la science, des télécommunications et de l’observation optique.

Les progrès opérés laissent à penser que l’Inde sera capable d’offrir des services commerciaux de lanceurs, même si cet objectif n’est pas affiché. Des discussions ont commencé entre l’agence indienne ISRO et Arianespace pour le lancement de petits satellites. La commercialisation d’images produites par le satellite indien IRS depuis 1995 concurrence directement Spot-Images.

Par ailleurs, bien que le programme spatial soit orienté vers les applications civiles, il n’y a pas de doute que les connexions avec les applications militaires sont nombreuses, notamment en ce qui concerne les missiles balistiques et les satellites d’observation. D’ailleurs, le 29 décembre 1998, le chef d’état-major de l’armée de l’Air indienne a officiellement reconnu l’utilisation à des fins militaires, des satellites civils d’imagerie IRS-I B, IRS-I C, IRS-I D et IRS-P III.

      c) Un programme japonais cohérent et substantiel

L’augmentation régulière du budget spatial (12,8 milliards de francs en 1996, 14,5 milliards de francs en 1998 et 15 milliards de francs en 1999) correspond au souhait de développer une base industrielle et technologique avancée grâce à un programme complet d’applications spatiales.

Trois programmes de lanceurs coexistent :

— alors que la NASDA (National Space Development Agency) avait réussi en février 1994 le premier tir du lanceur lourd H-II, l’échec du 21 février 1998, dû à un arrêt prématuré du moteur du deuxième étage, semble mettre en doute les chances de la société Rocket Corporation de commercialiser une version améliorée HII-A à un coût moindre dès 2000, année de son premier tir. Mais la politique de réduction des coûts et d’accroissement des performances permettra une offre à tarifs compétitifs dans un délai inférieur à dix ans. La société Hughes Electronic Corporation a d’ores et déjà pris une option pour le lancement de 10 satellites ;

— le lancement avec succès en février 1996 d’un petit lanceur J-I place également le Japon dans la compétition pour les satellites de taille moyenne (environ une tonne) à placer sur orbite basse ;

— depuis février 1997, le premier vol du M-V, fusée à trois étages à poudre qui peut lancer en orbite basse une charge utile de 2 tonnes ou envoyer 400 kg dans l’espace plus éloigné, alimente les soupçons d’une application militaire en raison d’un double emploi évident avec le J-I et de sa possible transformation en un missile balistique d’une portée de 8 000 km.

Avec un budget spatial inférieur à celui de la France, la NASDA développe des satellites scientifiques ou d’application (dans les domaines des télécommunications, de la météorologie ou de la télédétection) et reste présente sur les programmes liés aux vols habités, portant notamment sur le module JEM qui devrait se raccorder en 2000 à la station orbitale internationale.

II. — DES DIFFICULTÉS PERCEPTIBLES DANS LA CONDUITE ET LA RELANCE DES PROGRAMMES SPATIAUX ESSENTIELS

Le récent conflit du Kosovo a révélé l’importance des moyens satellitaires de renseignement et de communication. A cette occasion, les États-Unis ont démontré leur supériorité incontestable en alignant près d’une quarantaine de satellites d’observation. L’Europe a pu néanmoins bénéficier d’une relative autonomie d’appréciation de la situation à travers les informations recueillies par le satellite d’observation optique Hélios I-A, et dans une moindre mesure, les satellites SPOT I, II et IV. Plusieurs pays du continent ont également mis à contribution leurs satellites de communication à vocation militaire. Dans l’ensemble, le conflit a souligné la grande fiabilité des équipements utilisés, et notamment celle d’Hélios I-A et de Syracuse II. Par conséquent, tant les choix passés des pouvoirs publics dans le domaine de l’espace militaire que les priorités retenues par le plan pluriannuel spatial se sont trouvés justifiés.

Mais le conflit du Kosovo a aussi confirmé les insuffisances des moyens satellitaires de la France. Les grandes lignes du projet de budget pour 2000 ne remettent pas fondamentalement en cause les améliorations prévues. Cependant, force est de constater qu’elles se conjuguent à un cumul de réductions des crédits de l’espace militaire, ce qui ne va pas sans créer certaines difficultés dans la conduite ou la relance des programmes spatiaux essentiels.

    A. LA PERTINENCE DES GRANDES ORIENTATIONS NATIONALES DANS LE DOMAINE DE L’ESPACE MILITAIRE À L’AUNE DU CONFLIT DU KOSOVO

Les décisions prises par les pouvoirs publics au cours des années quatre-vingts en faveur de la conception de charges utiles militaires intégrées à des satellites civils de télécommunication et d’un satellite d’observation optique ont montré toute leur pertinence lors de la participation française à l’opération « Force alliée » contre la République fédérale de Yougoslavie. Grâce à ces équipements, la France a pu disposer de l’autonomie technique suffisante pour peser réellement dans la conduite opérationnelle de l’intervention alliée.

Néanmoins, le conflit du Kosovo a également souligné l’importance des programmes destinés à succéder à ces équipements, (notamment dans le cadre de l’observation optique), ou à les compléter (plus particulièrement dans le domaine de l’observation radar).

      1. La réussite technique et opérationnelle des équipements militaires spatiaux engagés par la France

Avant même le déroulement des opérations alliées contre la République fédérale de Yougoslavie, la France a eu recours à Hélios I-A pour observer le comportement des belligérants kosovars et yougoslaves et accumuler des renseignements d’ordre tactique. Tout au long du conflit, elle en a fait un usage plus stratégique, ce à quoi le satellite s’est prêté de façon plutôt satisfaisante. Par ailleurs, il a été nécessaire d’activer les charges utiles de trois satellites Télécom II pour satisfaire le besoin croissant des armées en liaisons « moyens débits ».

Dans l’ensemble, les équipements impliqués se sont bien comportés. Leur utilité politique n’a pas été négligeable non plus.

      a) L’utilité avérée d’Hélios I : un engagement à forte signification politique

Le programme trinational Hélios I qui associe la France, l’Italie et l’Espagne porte sur la réalisation de deux satellites d’observation optique dont le contrôle s’effectue à partir d’un centre principal sur la base de Francazal Toulouse, et d’installations au sol qui comprennent, dans chaque pays partenaire, une station de réception (Colmar, Iles Canaries et Lecce) et un centre de traitement des images (Creil, Torrejõn et près de Rome).

Le satellite Hélios I-A a été mis en orbite le 7 juillet 1995 par une fusée Ariane 40 et le système est entré en phase opérationnelle depuis le 11 octobre 1995. Le deuxième satellite, Hélios IB, dont la réalisation a débuté en janvier 1994, a été mis en condition de stockage et sera placé en orbite à la fin de 1999 pour assurer le relais avec le satellite Hélios I-A dont la durée de vie a été fixée de manière contractuelle à cinq ans.

Lors du conflit du Kosovo, le programme Hélios I a confirmé son aptitude au renseignement documentaire et à l’information politique. Les images reçues sont d’une excellente qualité et, après traitement, donnent entière satisfaction aux différents services de renseignement. Il est à noter que les autorités politiques françaises ont pu influencer le choix des cibles de l’Alliance atlantique lors des soixante-dix-huit jours de frappes aériennes contre la République fédérale de Yougoslavie grâce à la capacité autonome d’observation de la France. Il s’agit là de la principale différence que l’on peut relever avec les opérations menées dans le Golfe en 1991.

Le partage entre les trois pays des temps d’utilisation en fonction des financements initiaux est globalement satisfaisant malgré sa complexité. Il est respecté de manière statistique sur le long terme depuis quatre ans. Il n’a pas posé de problème majeur lors de la crise du Kosovo.

Des protocoles ont permis d’étendre la coopération à la phase d’exploitation du programme et au maintien en condition opérationnelle. En avril 1993, un protocole de fourniture rémunérée des images Hélios I a été signé entre le Secrétaire général de l’UEO et les Ministres de la Défense des trois pays coopérant au programme. La première fourniture au centre satellitaire de Torrejòn en Espagne est intervenue en mai 1996. La mise en place du centre d’interprétation des images satellitaires à Torrejòn a été décidée par le Conseil de l’UEO en 1990 dans la perspective d’un système spatial de renseignement propre à l’organisation. Le centre dispose également d’images prises par les satellites SPOT, ERS et LANDSAT, ou de produits commerciaux disponibles. Un nouveau concept d’emploi, défini en mai 1997 par le Conseil des Ministres de l’UEO, confie au centre une mission de surveillance générale dans le domaine de la sécurité. Lors de l’opération « Force alliée », la France, l’Italie et l’Espagne ont permis la fourniture d’images en provenance d’Hélios I-A au centre de Torrejòn à titre gracieux.

Toutefois, cette coopération est encore relativement limitée, le centre de Torrejòn n’ayant pas accès à la programmation des satellites par lesquels il obtient ses images. De plus, le budget de ce centre est assez faible puisqu’il s’élevait à 57 millions de francs seulement en 1999.

Sur le coût total incluant la réalisation du système, les améliorations, les charges additionnelles et le maintien en condition opérationnelle, la part du programme Hélios I à la charge de notre pays est estimée à 9,8 milliards de francs (1997). Le montant des dépenses réalisées de 1985 à 1997 atteint 8,8 milliards de francs. Afin d’assurer le maintien en condition opérationnelle des deux satellites Hélios I, des crédits de paiement à hauteur de 220 millions de francs courants sont inscrits en faveur du programme dans le projet de loi de finances pour 2000 (contre 459 millions de francs l’an passé). Les autorisations de programme destinées au maintien d’Hélios I en condition opérationnelle s’élèvent, quant à elles, à 223 millions de francs courants (contre 417 millions de francs pour 1999).

      b) L’apport fondamental des supports satellitaires en matière de télécommunications

Les communications spatiales militaires reposent depuis le milieu des années quatre vingts sur des charges utiles intégrées aux satellites civils Télécom et dédiées aux usages militaires.

La première génération Syracuse I a compris trois satellites : Télécom I-A lancé en août 1984, Télécom I-B en mai 1985 et Télécom I-C en mars 1988. La deuxième génération Télécom II-Syracuse II a assuré la continuité du service grâce à quatre satellites lancés successivement en décembre 1991 (Télécom II-A), en avril 1992 (Télécom II-B), en décembre 1995 (Télécom II-C) et le 8 août 1996 (Télécom II-D).

Les caractéristiques techniques actuelles assurent une liaison protégée contre l’écoute, l’intrusion et les brouillages. Elles permettent également d’étendre les capacités du système par la réalisation d’un ensemble complet de stations, terrestres ou navales : près de 77 nouvelles stations ont été installées (16 navales, 22 terrestres, 10 sous-marines et 29 sur véhicules légers) entre 1991 et 1997 pour les stations de série. Le parc final atteint ainsi une centaine de stations.

Ces satellites ont été mis à contribution lors de l’opération « Trident », volet français de l’opération « Force alliée », afin d’assurer les besoins opérationnels des forces françaises engagées au sein de la coalition alliée. Ainsi, trois charges utiles ont été activées afin d’assurer les liaisons « moyens débits ». Aucun problème particulier d’interopérabilité n’a été décelé. Les forces utilisatrices ont par ailleurs exprimé leur satisfaction vis-à-vis du système actuel dont le caractère dual ne semble pas avoir constitué un handicap. Au contraire, les choix techniques retenus pour l’architecture du système Syracuse ont permis des adaptations au coup par coup pour satisfaire les évolutions du besoin opérationnel.

Des compléments au programme initial et des améliorations visent à prolonger la durée de vie de la composante spatiale jusqu’en 2005 et à améliorer son interopérabilité avec les autres systèmes de télécommunications.

Sur un coût total du programme Syracuse II et de ses compléments estimé à 14,17 milliards de francs, près de 10 milliards de francs ont déjà été consommés. La loi de programmation militaire 1997-2002 y a affecté 2,254 milliards de francs de crédits de paiement.

Les crédits inscrits dans le projet de budget 2000 pour ce programme et ses compléments s’élèvent à 80 millions de francs courants en crédits de paiement et autant en autorisations de programme.

      2. Des carences manifestes aux enseignements révélateurs

L’étendue des limites techniques d’Hélios I était déjà connue. Néanmoins, la phase opérationnelle du conflit a rappelé que l’absence de capacités d’observation infrarouge rend le satellite inopérant par temps nuageux et de nuit, alors même qu’il s’agissait de paramètres essentiels dans le déroulement des bombardements alliés. De ce fait, la possession d’un satellite d’observation radar aurait permis d’éviter une trop grande dépendance des Alliés européens à l’égard des satellites radar américains de type Lacross. Sur ce dernier point, l’évolution technologique permet d’envisager désormais un programme bien moins coûteux qu’Horus, pour peu qu’il soit mené en coopération.

A propos de ces deux volets de l’observation, domaine essentiel sur les plans tactique et opératif, le conflit du Kosovo est source d’enseignements susceptibles d’orienter l’élaboration des prochains projets de budget pour l’espace militaire.

      a) La nécessité d’assurer la relève d’un programme d’observation optique encore limité

Dans sa définition actuelle, le satellite Hélios I emporte une caméra à très haute résolution et des enregistreurs magnétiques spécialisés EMS, destinés à conserver les informations entre deux passages successifs au-dessus des stations de réception. Il comprend aussi un système d’écoute électronique Euracom, réalisé uniquement dans le cadre national français. L’orbite polaire héliosynchrome et les capacités de manœuvre garantissent une possibilité d’observation d’un site donné tous les deux jours (à l’équateur). Les capacités sont limitées à l’observation de jour et par temps clair. Le satellite ne repasse exactement à la verticale d’un point donné que tous les vingt-six jours.

Certes, des améliorations ont déjà été incorporées au système Hélios I-B : l’emport d’une mémoire de masse à la place des MES va accroître les capacités et permettra une utilisation plus souple des images ; les modifications apportées aux composantes sol les rendra aptes à recevoir les images civiles (SPOT, ERS ou LANDSAT) ; la station de théâtre transportable sera mise au point à partir d’un démonstrateur d’une station de réception et de traitement des images. Enfin, il est prévu d’adjoindre une composante d’observation infrarouge de façon à permettre l’observation de nuit et la détection d’indices d’activité apportant une information complémentaire.

Toutefois, l’expérience acquise lors de la conduite des opérations au Kosovo souligne le besoin de disposer d’une capacité de surveillance « tous temps » aux niveaux stratégiques et tactiques et, si possible, d’une transmission des données en « temps réel » afin d’accroître la réactivité des forces en opération.

La nécessité de relever sur orbite le satellite Hélios I (dont l’espérance de vie ne peut dépasser 2002-2003) et d’améliorer les capacités techniques a conduit dès 1994 à définir une nouvelle génération, dite Hélios II, qui répond partiellement à ces exigences. Celle-ci doit valoriser les acquis du programme précédent en rentabilisant leurs investissements, en modernisant les installations à mi-vie et en bénéficiant de synergies avec les programmes civils. Elle doit également intégrer les améliorations technologiques dans les domaines de la capacité de prises de vues, de la réduction des délais d’accès aux informations recueillies et de la résolution des images.

Néanmoins, force est de constater que ces améliorations ne pallient pas l’absence de moyens satellitaires d’observation radar, dont Hélios I et II gagneraient à être complétés.

      b) L’intérêt d’un programme d’observation radar qui fait défaut

Les estimations prévisionnelles du coût d’un système radar comprenant trois satellites et une composante sol s’élevaient dans la loi de programmation militaire à 6,5 milliards de francs (valeur 1996), et ce, dans les hypothèses d’une participation allemande de près de 40 %, d’un investissement français équivalent au tiers du programme et d’une contribution italienne de l’ordre de 20 %.

Les difficultés budgétaires relatives à la participation allemande ont conduit le Gouvernement, dans le cadre de la revue des programmes, à arrêter le projet Horus sans pour autant renoncer à l’acquisition d’une capacité d’observation radar sur la période pluriannuelle spatiale.

Or si la volonté de la France d’acquérir un système radar demeure, les hypothèses technologiques initiales sont remises en cause. La précédente solution datait des années quatre-vingts et était orientée vers un projet de gros satellite. La maturité croissante du concept de petits satellites radars oriente le débat et oblige à un réexamen des projets de recherche et des capacités des systèmes.

En effet, l’abandon d’Horus ne fait pas disparaître le besoin opérationnel d’accéder à l’imagerie radar et ne ferme pas toute perspective d’acquisition d’un système d’observation de ce type. Les progrès technologiques permettent dès aujourd’hui d’envisager la réalisation de petits satellites d’une masse d’environ une tonne pour un coût d’environ 2,5 milliards de francs. Par ailleurs, il apparaît que le concept de constellation à base de petits satellites radars constitue dorénavant une solution crédible et attractive aux niveaux des performances, de son potentiel de croissance et d’ouverture permanente à la coopération avec des pays tiers comme l’Italie (projet Cosmos-Skymed) ou même l’Allemagne (suite à la fusion annoncée entre DASA et Aérospatiale-Matra), ainsi que sur le plan financier.

Pour préserver l’acquis des travaux réalisés au titre du programme Horus et en vue de préparer la relance d’un programme radar, de nombreuses études dans le domaine de l’imagerie se poursuivent à travers la réalisation du démonstrateur du satellite radar Graves et l’analyse dynamique du fonctionnement d’une antenne radar notamment.

Néanmoins, le manque d’expérience des armées européennes à l’égard des images radar pose le problème de la maîtrise de la chaîne image d’un satellite radar de haute résolution. Dans le cas de l’observation optique, l’expérience acquise à travers le programme SPOT s’est révélée déterminante dans l’exploitation du potentiel d’Hélios I par les forces. Dans le domaine de l’observation radar, les images ERS constituent une base d’expérimentation utile, mais leur résolution est trop grande par rapport à celle d’un satellite radar à vocation militaire.

C’est pourquoi, l’acquisition d’un démonstrateur radar peu onéreux et à vocation pré-opérationnelle semble un préalable bienvenu au lancement d’un véritable programme, fut-il moins coûteux que le projet Horus. Ceci, d’autant plus que la plus grande incertitude règne sur la satisfaction qu’un tel programme pourrait apporter aux militaires (ces derniers s’attendant à une résolution d’images que le produit fini ne leur permettra peut être pas d’avoir), et que le démonstrateur réalisé à peu de frais pourrait se révéler opérationnel moyennant quelques adaptations marginales (à l’image de l’hélicoptère Horizon utilisé avec succès au Kosovo).

De manière générale, un satellite d’observation radar constitue un instrument d’observation complémentaire du dispositif d’observation optique qui est d’autant plus utile qu’il permet un meilleur balayage de la zone à couvrir sans même basculer sur lui-même, ce qui évite les mécanismes de stabilisation.

    B. UNE RELATIVE INCERTITUDE SUR LE DÉROULEMENT DES PROGRAMMES ESSENTIELS

En attendant que les partenaires européens s’engagent sur des projets, la France assure le déroulement des programmes majeurs qu’elle a engagés seule et prépare leur renouvellement.

Il devient donc nécessaire de recourir aux moyens civils pour satisfaire des programmes de cohérence et éviter la réalisation de systèmes nationaux trop coûteux ou trop ambitieux.

      1. La consolidation des acquis pour la réalisation d’Hélios II

En 1998, la décision a été prise de décaler le lancement d’Hélios II, notamment en raison des difficultés rencontrées pour établir des partenariats européens. Néanmoins, la phase de réalisation du programme a été finalement initiée afin d’assurer la continuité du service d’observation optique au début du siècle prochain, même en cas d’imprévu sur le programme Hélios I. Aujourd’hui, la France conduit seule ce programme dont l’objectif est de rendre le premier exemplaire disponible au lancement en 2003.

      a) Une conception engagée

Malgré les incertitudes que fait peser l’absence de coopération européenne sur son déroulement, le programme Hélios II reste une des priorités essentielles du volet défense de la politique spatiale française. Pour preuve, si sa phase de définition a été prolongée jusqu’en mars 1997, sa fiche de caractéristique militaire a été approuvée le 21 avril de la même année et sa phase de développement a été lancée il y a deux ans.

Le coût total du programme Hélios II pour notre pays a été estimé à près de 11 milliards de francs (valeur 1996) pour deux satellites ainsi que pour l’adaptation nécessaire des installations au sol, et à 13,4 milliards de francs dans l’hypothèse où un troisième satellite serait lancé dans la continuité des deux premiers pour assurer une permanence de deux satellites en orbite. Plus de 4 milliards de francs ont déjà été dépensés. Le Ministre de la Défense a approuvé le dossier de lancement de la réalisation du programme, prévu par la loi de programmation militaire, le 7 juillet 1998.

La DGA s’est placée dans un contexte de maîtrise des coûts sans transiger sur les capacités opérationnelles. Le dialogue avec les industriels passe également par le CNES qui assure la maîtrise d’ouvrage.

Sur l’article 69 du chapitre 51-61, le projet de budget a inscrit 1 088 millions de francs d’autorisations de programme et 1 112 millions de francs de crédits de paiement pour ce programme qui représentera donc encore à lui seul près de la moitié des crédits consacrés à l’espace en 2000.

Parallèlement, les coopérations européennes sont activement recherchées. Mais aucun partenariat n’est acquis à ce jour.

      b) Des partenariats pas encore assurés

L’importance des flux financiers nécessaires a incité à rechercher un partenariat européen depuis le début de la phase de définition.

L’Italie aurait souhaité retarder la mise en orbite d’Hélios I B afin de prolonger le service de la première génération de satellites. Elle a demandé à s’associer au programme mais n’a toujours pas fait connaître sa décision. Des dispositions sont prises pour que ce pays puisse rejoindre le programme en cours de développement. Des discussions ont également eu lieu avec la Belgique qui a fait part de son intérêt et avec l’Espagne qui a envisagé une participation à un niveau de 3 %. Un accord technique et administratif franco-espagnol avait été signé à l’été 1998 mais, depuis la fin de cette même année, l’Espagne a engagé un réexamen de sa politique spatiale. Dans l’attente des conclusions de sa revue de programmes, elle ne s’est pas engagée dans le projet Hélios II. Les négociations avec la Belgique ont, quant à elles, achoppé sur le montant de l’engagement, le taux de 1 % dans le programme envisagé par les autorités belges ne permettant pas d’obtenir au moins une image par jour et le taux d’utilisation de 2,5 % souhaité par les partenaires franco-espagnols étant supérieur aux possibilités financières belges.

S’estimant satisfait de sa coopération avec les Etats-Unis, même au détriment de son indépendance de décision, le Royaume-Uni manifeste un intérêt moindre pour les satellites d’observation militaire. En effet, la Grande-Bretagne et les Etats-Unis ont constitué des structures intégrées de renseignement au niveau de l’OTAN qui excluent les autres partenaires de l’Alliance atlantique en raison de leurs liens avec la dissuasion.

Un raisonnement analogue a pour l’instant persuadé les chefs d’état-major des armées allemandes que la fourniture d’images satellitaires par les Etats-Unis était suffisante : elle est surtout moins coûteuse à l’heure où les budgets d’équipement militaire sont contraints. On peut croire que les Allemands trouveront un équilibre entre leur culture liée à l’OTAN et une frustration grandissante due à une trop grande dépendance, notamment dans le prolongement du conflit du Kosovo.

La participation allemande s’est heurtée à plusieurs difficultés, d’une part, la réduction importante des dotations budgétaires du ministère de la Défense, d’autre part, l’impossibilité de régler les questions opérationnelles, industrielles ou financières. Une participation à Hélios II supposait un apport financier de l’Allemagne d’au moins 10 % pour compenser les investissements déjà réalisés par les autres pays et un partage opérationnel dès la mise en œuvre du premier satellite.

Les décisions de Baden-Baden, le 7 décembre 1995, et de Dijon, en juin 1996, avaient pourtant confirmé la volonté politique commune et permis de négocier un accord intergouvernemental sur l’observation spatiale ainsi qu’un protocole particulier pour la phase de définition du programme Hélios II. Les sommets de Nuremberg, en décembre 1996, et de Poitiers, en juin 1997, ont réaffirmé l’engagement politique de la France et de l’Allemagne et aménagé la participation de chacun. À cette occasion, ont été liées les négociations sur le projet d’observation optique et celles sur un système radar.

La situation de ses finances publiques ayant incité l’Allemagne à différer son entrée dans ces programmes, la France a accepté un décalage de six mois du premier satellite Hélios II et, afin d’éviter une discontinuité dans le système Hélios, elle a dû augmenter son effort financier pour compenser le retrait partiel de son partenaire. Cette opération explique le niveau des dotations pour Hélios II en 1998 (1 700 millions de francs d’autorisations de programme et 1 420 millions de francs de crédits de paiement) et leur maintien dans le projet de budget pour 1999 (1 644 millions de francs d’autorisations de programme et 1 417 millions de francs de crédits de paiement).

Mais la décision allemande de ne plus participer au programme d’observation optique oblige la France à engager seule sa réalisation en ménageant les possibilités d’implication des autres partenaires européens lorsque la situation aura évolué.

      2. Vers une solution transitoire pour la relève de Syracuse II

Le système Syracuse II couvrira les besoins essentiels en matière de communications spatiales militaires jusqu’à la fin de la programmation. La durée de vie des satellites, fixée initialement à dix ans, limitait à 2001 la continuité du service, mais les actions de complément permettront de prolonger le système jusqu’en 2005. Cependant, il convient de préparer la nouvelle génération de satellites de télécommunications à partir de 2005 et de développer une meilleure interopérabilité avec les Alliés. Aussi, la loi de programmation militaire a-t-elle inscrit près de 4 milliards de francs de crédits de paiement pour le développement de cette troisième génération de satellites dont le premier exemplaire devrait être commandé avant 2002 et pourrait être lancé en 2005, en fonction de la solution retenue.

La recherche d’une coopération européenne se justifiait par la concordance des dates de remplacement des systèmes nationaux en service, britannique Skynet IV et français Syracuse II, et par la convergence des besoins opérationnels avec l’Allemagne.

Selon le schéma retenu, il pouvait être envisagé un projet binational (Bimilsatcom) ou trinational (Trimilsatcom). Une solution regroupant quatre autres pays est toujours apparue peu probable (Eumilsatcom) en raison de l’insuffisance des études préparatoires et de la complexité d’un tel système (absence de maîtrise des coûts, instauration d’un « juste retour » industriel...).

L’annonce, le 12 août 1998, par la Grande Bretagne qu’elle ne prendrait pas part à la phase de définition de la coopération montre qu’elle a privilégié une solution nationale en raison de différences d’approche sur le recours aux techniques EHF et de considérations industrielles. Aucun pays européen ne maîtrise encore cette technique et on peut supposer qu’une entente a eu lieu avec les Etats-Unis. Même si officiellement une compétition a été lancée entre Matra Marconi Space (MMS) et Lockheed Martin pour la définition du futur système de télécommunications, la Grande Bretagne a fait le pari de l’échec de la coopération européenne et de l’achat « sur étagère » des techniques EHF. De plus la solution nationale permet de retrouver le groupe industriel britannique MMS-UK soit en maître d’œuvre, s’il remporte le contrat, soit en maître d’ouvrage sous-traitant d’un consortium auquel participerait Lockheed Martin.

La France ne souhaite pas renoncer à la coopération mais, dans l’immédiat, une solution intermédiaire pour attendre la réalisation d’un système commun s’avère nécessaire. En fait, la démarche actuellement privilégiée pour la réalisation du système successeur de Syracuse II s’articule en deux étapes :

— la première, sous maîtrise d’œuvre nationale, devrait permettre à la France de mettre en orbite un satellite de nouvelle génération fin 2003 ;

— la seconde, reposant sur le principe d’une coopération franco-allemande, compléterait d’ici à 2006, fin de vie de Télécom II-D, la constellation de satellites nécessaires à la satisfaction du besoin opérationnel de la France et de l’Allemagne et conduirait à la conception de nouvelles stations ainsi qu’à la mise en œuvre d’un nouveau système de gestion de l’ensemble.

Sur cette base, 309 millions de francs d’autorisations de programme et 307 millions de francs de crédits de paiement ont été inscrits dans le projet de budget pour 2000 sur les articles 36 et 74 du chapitre 51-61, afin que se poursuivent les études de faisabilité.

    C. LE CARACTÈRE INDISPENSABLE DES APPROCHES COMPLÉMENTAIRES

Bien qu’ils ne fassent pas partie des quatre objectifs prioritaires poursuivis par la politique spatiale française, les programmes complémentaires de l’observation optique et radar précisent les informations recueillies par ce biais. En effet, les satellites d’écoute électromagnétique permettent de détecter et localiser les moyens adverses. Les programmes de cohérence, quant à eux, ont plus particulièrement vocation à affiner le cadre d’intervention des forces.

L’importance de ces approches complémentaires n’est pas mésestimée car elles bénéficient d’un effort d’application maintenu à travers la réalisation de démonstrateurs ou le recours à des moyens civils.

      1. L’écoute électromagnétique

L’écoute électromagnétique par des moyens spatiaux correspond à un besoin opérationnel complémentaire de l’observation optique, infrarouge et radar, car elle est nécessaire à la connaissance des activités militaires et des caractéristiques des matériels mis en œuvre chez l’adversaire. En effet, un système d’écoute permet de localiser les sources d’émission, de surveiller les déplacements et les variations significatives d’intensité.

A l’inverse des moyens aériens (DC 8 Sarigue) ou maritimes (composante MINREM embarquée sur un navire) qui seront présentés dans la seconde partie de cet avis, un satellite d’écoute a l’avantage de n’être ni visible, ni intrusif, et de constituer de manière continue des bases de référence.

Des études préparatoires avaient débuté dès juillet 1992. Mais la loi de programmation militaire (1995-2000) n’avait pas retenu le projet Zénon, et seule une veille technologique a été financée.

Dans une première étape, deux micro-satellites scientifiques d’environ 50 kilogrammes ont été développés à titre exploratoire et financés au titre des études amont spatiales :

— l’un, Cerise, a été lancé en même temps qu’Hélios IA le 7 juillet 1995. Il est chargé d’effectuer des mesures d’impulsion électromagnétique dans certaines gammes de fréquences. Il contribue ainsi à une meilleure connaissance de l’environnement radioélectrique et prépare l’insertion des futurs satellites d’observation dans un spectre de fréquences actuellement encombré. La collision dont il a été victime en juillet 1996 a endommagé le mât de stabilisation mais la charge utile fonctionne normalement. Il a été remis dans une attitude favorable pour poursuivre sa mission à l’été 1997. Le coût de sa réalisation et de son lancement s’est élevé à 82 millions de francs. Son maintien en condition opérationnelle représente une dépense d’environ 1 million de francs chaque année ;

— un projet analogue, Clémentine, porte sur des bandes de fréquences différentes et sera lancé avec Hélios I-B d’ici la fin de cette année. Le coût total de l’opération est estimé à 90 millions de francs.

La maîtrise d’œuvre de ces deux programmes est assurée par Alcatel Espace, Thomson-CSF et Surrey Satellite Technology Limited.

La réalisation d’un système complet ne semble pouvoir être envisagée que dans un cadre multinational. Les premières discussions avec l’Allemagne montrent à l’évidence que ses responsables privilégient le cadre de l’O.T.A.N. dans la mesure où des accords secrets de défense lient déjà la République fédérale aux Etats-Unis pour l’analyse des signaux électromagnétiques.

      2. Les programmes de cohérence

La météorologie est considérée comme un élément majeur de la planification des opérations militaires. Les besoins actuels s’appuient sur les données des satellites civils METEOSAT qui suffisent aux forces armées en terme d’infrastructures. Un meilleur accès aux informations est en cours d’étude afin de recevoir et de traiter les données sur site.

La mission de surveillance de l’espace constitue un facteur essentiel de sécurité car elle permet d’apprécier les menaces des systèmes adverses en service et de se prémunir contre elles.

A la suite de la revue de programmes, il a été décidé d’arrêter le programme de système de surveillance de l’espace (SSE) mais d’en conserver les acquis. C’est pourquoi le projet de démonstrateur radar Graves, proposé par l’ONERA mais financé sur crédits de la DGA, sera achevé. Les études, qui ont fait l’objet d’un moratoire d’un an, ont repris et permettront d’acquérir une capacité pré-opérationnelle à l’horizon 2002. Cette capacité donnera un certain niveau d’autonomie en matière de détection mais devra être ultérieurement complétée par un moyen d’identification pour constituer véritablement un premier ensemble opérationnel.

La revue de programmes a également mis fin au projet de télescope Solstice pour photographier les satellites et les identifier, et a conduit à dénoncer le contrat avec Spot-Images pour l’obtention d’images de satellites en orbite.

La navigation et le positionnement ne cessent de prendre de l’importance dans la conduite des opérations militaires. Le système américain de navigation par satellite GPS (Global Positioning System), dont l’accès est gratuit, est de plus en plus utilisé par les forces armées. Celles-ci ont également eu recours au système russe Glonass, dans de moindres proportions toutefois.

La réflexion portant sur l’utilisation des systèmes actuels et l’éventuelle constitution d’une constellation concurrente a finalement débouché sur la décision, prise concomitamment par le Conseil des Ministres de l’Agence spatiale européenne et par celui de l’Union européenne, de lancer la phase de définition de Galileosat, système de navigation par satellite indépendant du GPS.

En effet, la situation est ambiguë car un réel problème d’autonomie et de sécurité existe. Actuellement, les États-Unis peuvent refuser dans certains cas l’utilisation du service sans préavis et sans motivation. Par conséquent, Galileosat permettra aux armées européennes de disposer de moyens de navigation de haute qualité sans dépendre de l’accord d’une puissance étrangère pour les utiliser. Cette autonomie est d’autant plus importante que le système de navigation par satellites est primordial pour les futurs systèmes de missiles de croisière et de bombes guidées par satellites (et donc efficaces par tous temps).

Les ministères français de la Défense, des Affaires étrangères, des Transports, de l’Éducation et de la Recherche évaluent actuellement les modalités de mise en œuvre d’un tel système et réfléchissent surtout sur les spécificités à y apporter pour permettre un usage sécurisé par les forces armées. Les contraintes techniques ne posent pas de réel problème car les solutions reposent peu ou prou sur des mécanismes similaires à ceux en vigueur sur le GPS. Par contre, la gratuité du service doit être assurée, de manière à ne pas engendrer un effet dissuasif par d’éventuels surcoûts pour les forces utilisatrices.

La surveillance et le contrôle du départ des missiles balistiques paraissent hors de portée d’un seul pays. Les études préalables ont montré que, pour détecter un signal infrarouge et déterminer (par calcul) la trajectoire ainsi que le point d’impact d’un missile, le système devrait s’appuyer sur deux à trois satellites en orbite basse, observant en permanence une région donnée.

Le projet MEADS a été élaboré au sein de l’OTAN. Mais, dans le cadre de la programmation, la France a renoncé à poursuivre sa collaboration à ce programme en raison du coût prohibitif qui serait à sa charge. La phase de définition ne réunira donc que les Etats-Unis, l’Allemagne et l’Italie. Cela n’empêche pas que des réflexions relatives à la défense antimissiles et à la détection infrarouge des tirs aient lieu au niveau national.

DEUXIÈME PARTIE :

LES MOYENS DE COMMUNICATION, DE RENSEIGNEMENT ET DE CONDUITE DES OPÉRATIONS

La programmation militaire a été construite autour du concept de cohérence interarmées. En effet, l’analyse stratégique a montré que, dans les conflits auxquels la France devra participer ou auxquels elle sera associée, l’efficacité opérationnelle d’ensemble reposera sur la conjugaison des capacités propres à chaque armée et sur la maîtrise de toutes les fonctions interarmées. C’est pourquoi, une attention croissante a été portée aux moyens qui relèvent des fonctions de commandement, de communication, de conduite des opérations et de renseignement.

I. — LES PRINCIPAUX SYSTÈMES DE TRANSMISSION, DE LIAISON ET DE COMMANDEMENT : UN DOMAINE BUDGÉTAIREMENT PRIVILÉGIÉ

Les systèmes de communication en service dans les armées sont marqués par la période de guerre froide pendant laquelle ils ont été conçus. L’obsolescence de certains systèmes a imposé leur refonte complète. Celle-ci prend en compte l’évolution du concept stratégique et intègre les contraintes liées à la projection des forces et au caractère interarmées des opérations.

La refonte des systèmes fait appel à la complémentarité des moyens civils et militaires, même si elle préserve toujours un noyau militaire ; elle privilégie les réseaux et les services interarmées ; elle confère aux autorités organiques la responsabilité de leurs moyens ; elle cherche à renforcer la confidentialité, la sécurité et la fiabilité des systèmes au sein des forces mais aussi entre les forces et les différents échelons de commandement.

La mise en œuvre des nouveaux systèmes crée ainsi un noyau homogène et plus cohérent sur lequel se greffent les réseaux de desserte et les réseaux tactiques de chaque armée.

    A. LES PROGRAMMES AU NIVEAU INTERARMÉES

Hormis le système de radiocommunications par satellite Syracuse, les moyens de communication de niveau interarmées et du haut commandement incluent trois systèmes :

— RIMBAUD (Réseau interministériel de base uniformément durci) est un système interministériel au service des plus hautes autorités civiles et militaires, impliquées dans la défense nationale. Bien qu’ils s’appuient sur des concessions civiles de France Télécom, les matériels utilisés sont durcis aux impulsions électromagnétiques. Le Secrétariat général pour la défense nationale SGDN qui gère le système a lancé fin 1997 un programme de valorisation afin de l’ouvrir à de nouveaux services sécurisés (téléphones cellulaires GSM sécurisés, par exemple) ;

— RETIAIRE (Réseau interarmées d’infrastructure) est principalement orienté vers les unités nucléaires spécialisées. Il supporte aussi certaines applications de l’état-major des armées. Comme le réseau RIMBAUD, il est durci à l’impulsion électromagnétique et assure un niveau de confidentialité secret-défense. Mais ses fonctions seront progressivement transférées au système SOCRATE au fur et à mesure de sa montée en puissance ;

— compte tenu de l’obsolescence ou de l’insuffisance des réseaux de transit propres à chaque armée, essentiellement RITTER pour l’armée de Terre, RA 70 pour l’armée de l’Air et réseaux en concessions pour la Marine, un seul système interarmées SOCRATE devrait remplacer les services existants. Une partie, environ 25 % du réseau cible, est opérationnelle depuis le début de 1998 mais le déploiement complet ne sera achevé qu’en 2005, soit plus de deux ans après le délai prévu par la programmation militaire. Le nouveau réseau fournira des services modernes de téléphonie, de télégraphie et de transmission de données.

Par ailleurs, SOCRATE offrira des possibilités de transit aux réseaux de desserte locale des armées et pourra s’interconnecter aux principaux systèmes, nationaux ou alliés, en offrant un niveau de protection suffisant.

Alors que plus de 4,9 milliards de francs ont déjà été consommés depuis l’origine, le projet de budget prévoit 16 millions de francs d’autorisations de programme (contre 283 millions de francs inscrits dans la loi de finances initiale en 1999) et 341 millions de francs de crédits de paiement (contre 347 millions de francs de dotations en 1999) pour ce programme, sur l’article spécifique 63 du chapitre 51-61. Cette évolution budgétaire indique que la réalisation du réseau SOCRATE reste prioritaire, à l’instar du domaine des communications militaires. Cependant, la forte contraction des autorisations de programme dont le montant est divisé par quatre, suscite quelques interrogations dans la mesure où le programme n’est pas encore dans sa phase de finition. En tout état de cause, tout retard supplémentaire dans son déploiement serait préjudiciable.

    B. LES PROGRAMMES D’INFORMATION ET DE COMMANDEMENT

La maîtrise des moyens de commandement, de contrôle de l’information et de gestion des données a révélé toute son importance au cours des crises récentes à la gestion desquelles la France était partie prenante. Ces moyens connaissent donc un développement significatif.

A cet égard, les systèmes d’information, de télécommunication et de commandement font l’objet d’un traitement budgétaire favorable qui est bienvenu :

— l’équipement de l’armée de l’Air par le nouveau système de transmission MBTA se traduit par des autorisations de programme en très forte hausse (680 millions de francs inscrits dans le projet de budget 2000 contre 25 millions de francs seulement l’année passée) ainsi que par une croissance importante des crédits de paiement (passant de 290 millions de francs en 1999 à 423,5 millions de francs dans le projet de budget 2000) ;

— l’armée de Terre bénéficie également de cette priorité puisque 903,7 millions de francs d’autorisations de programme et 639 millions de francs de crédits de paiement sont affectés aux systèmes d’information, de télécommunication et de commandement ;

— la Marine nationale, quant à elle, profite d’une augmentation sensible des abondements destinés à ses équipements en matière de systèmes de télécommunication et d’espace, les autorisations de programme s’élevant dans le projet de budget 2000 à 284,5 millions de francs alors que les crédits de paiement progressent à 281,8 millions de francs.

PRINCIPALES COMMANDES ET LIVRAISONS
D’ÉQUIPEMENTS DE COMMUNICATIONS MILITAIRES EN 2000

Modules

Commandes

Livraisons

Espace – communication - renseignement

   

Poste de radio de 4ème génération PR4G

1 816

2 436

MTBA

21

8

RUBIS (Équipement groupements)

0

12

(Relais)

0

50

MTGT

0

20

Parallèlement, le système informatique de commandement des armées de première génération SICA doit doter les forces d’un outil moderne d’informatique de commandement et de gestion des situations, dont la sécurité sera renforcée et la vulnérabilité réduite. Il regroupe des aides à l’exploitation des données et des outils de gestion des informations. Il sera prolongé par les systèmes compatibles de chacune des armées, SICF/SIR pour l’armée de Terre, SCCOA pour l’armée de l’Air et SYCOM pour la Marine. L’objectif est de disposer d’architectures flexibles, modulaires et interopérables.

      1. Le SCCOA de l’armée de l’Air

Le SCCOA est un système d’information et de commandement destiné au recueil, à la gestion, au traitement et à la diffusion de l’information pour l’ensemble des missions opérationnelles conventionnelles de l’armée de l’Air. Il regroupe des études et fabrications relatives à des capteurs (radars principalement), à des centres d’opérations associés aux différents échelons de commandement et à des moyens de transmission. Le financement de certains capteurs devrait être assuré par l’OTAN dans le cadre de son programme interopérable ACCS (Air Control and Command System) dont le SCCOA est la partie française.

Le programme a été scindé en trois phases dont la première a été lancée en février 1993 et sera opérationnelle en 2001. Le coût total du programme est aujourd’hui estimé à environ 15,5 milliards de francs, celui de la première phase à 5,18 milliards de francs. Les crédits inscrits pour la période 1997-2002 dans la loi de programmation militaire dépassent 5,8 milliards de francs. Le projet de budget pour 2000 prévoit quant à lui 673,4 millions de francs de crédits de paiement et 566 millions de francs d’autorisations de programme, soit un léger infléchissement par rapport à la loi de finances initiale pour 1999 qui coïncide avec le bon déroulement du programme.

      2. Le SICF de l’armée de Terre

Le programme SICF a pour objectif de constituer le système global d’information et de commandement des PC de division et de fournir tous les éléments de stockage et de traitement de l’information. Il est destiné à améliorer la cohérence et le rendement de la chaîne de commandement par automatisation des manipulations, transferts et traitements réalisés avec les autres systèmes d’information de l’armée de Terre, des autres armées et des Alliés.

L’armée de Terre devrait être dotée au cours des prochaines années d’ensembles d’information et de commandement des forces (SICF) dont la mise en service opérationnel interviendra en septembre 2000 pour la première brigade.

· la première version comprend deux PC de niveau brigade, deux plates-formes d’entraînement et une plate-forme de référence. Son coût total de réalisation s’élève à 412 millions de francs (valeur 1999) ;

· la seconde version doit équiper douze PC de différents niveaux. Son coût total estimé est de 375 à 600 millions de francs (valeur 1999).

Parallèlement, pour assurer le commandement des régiments et unités élémentaires lors de leur engagement, des systèmes modulaires d’information sur véhicules (programme SIR) ont été commandés. Leur livraison pourrait intervenir elle aussi à partir de 2000. Une cible de 441 véhicules de série a été retenue pour un coût total de 826 millions de francs (1998).

Les autorisations de programmes du projet de budget 2000 concernant le SCIF s’élèvent à 182,81 millions de francs (dont 71,15 millions de francs pour la fabrication) et les crédits de paiement atteignent 110,35 millions de francs (dont 39,41 millions de francs pour la fabrication).

II. — LES SYSTÈMES DE RECUEIL DE RENSEIGNEMENT : UN ENJEU DE PLUS EN PLUS CRUCIAL MAIS PAS ENCORE PRIORITAIRE

La loi de programmation militaire comme la revue de programmes ont confirmé l’intérêt porté au renseignement stratégique qui assiste les autorités politiques dans leurs prises de décision. En dehors des programmes spatiaux, d’autres moyens, aériens ou maritimes, s’inscrivent dans le cadre national de recueil de ce renseignement.

Les moyens tactiques en soutien des unités engagées sur le terrain se développent peu à peu. Mis à contribution lors des opérations menées contre la République fédérale de Yougoslavie au printemps 1999, ils ont donné pleinement satisfaction aux forces qui les ont employés.

    A. LES PROGRAMMES STRATÉGIQUES D’ÉCOUTE

Le projet de satellite d’écoute a été abandonné par la précédente programmation militaire et seule une veille technologique a été organisée dans le cadre de programmes de micro-satellites expérimentaux. Par conséquent, les moyens d’écoute sont mis en œuvre par les forces elles-mêmes.

      1. La composante aéroportée : Sarigue nouvelle génération

Le système aéroporté Sarigue a pour mission essentielle le recueil d’informations électromagnétiques à vocation opérationnelle. Décidé en 1993 pour remplacer le système actuel mis en service en 1977, le programme de nouvelle génération, comprend un segment aéroporté et une composante sol devant entrer en fonction en l’an 2000. Les difficultés liées à la définition du porteur DC 8 remotorisé ont conduit à ce retard.

Sur un coût total estimé à 1,57 milliard de francs (valeur 1999), le projet de budget affecte à ce programme 4 millions de francs d’autorisations de programme et 127 millions de francs de crédits de paiement.

      2. La composante navale : le MINREM

Le MINREM constitue un ensemble d’équipements d’écoute pour l’interception et la goniométrie de signaux électromagnétiques. Ceux-ci sont financés au titre de l’état-major des armées et embarqués sur un bâtiment de 3 000 tonnes environ qui assure la présence de longue durée à la mer.

La programmation, qui a inscrit près de 333 millions de francs (valeur 1997) en faveur de ce programme, prévoit la rénovation du système dont la charge utile sera transférée en 2001 sur le Bougainville afin d’assurer la continuité du service jusqu’à la livraison du nouveau système qui pourrait intervenir fin 2004. Le projet de budget pour 2000 y consacre 147 millions de francs d’autorisations de programme.

    B. LES MOYENS À VOCATION TACTIQUE

Le conflit du Kosovo a illustré l’importance que revêt la possession des moyens de renseignement tactique pour la gestion de l’emploi des forces et de leurs équipements. Le recours aux hélicoptères Horizon ainsi que l’utilisation de drones ont été l’occasion de démontrer l’efficacité du dispositif français. Pour autant, dans ce domaine aussi les évolutions technologiques sont rapides. C’est pourquoi un effort budgétaire minimal doit être consenti.

      1. L’aviation de patrouille maritime

Les avions de patrouille maritime Atlantique II, qui ont remplacé les Atlantic I, ont deux missions prioritaires : la sûreté des SNLE pour la mise en œuvre de la FOST et le soutien des forces, notamment dans la lutte anti-sous-marine. La cible du programme, réduite par la loi de programmation militaire 1995-2000 de 42 à 28 appareils aujourd’hui commandés, a été maintenue. Les trois derniers appareils ont été livrés en 1998.

Cependant, le modèle comprenant seulement 22 appareils en parc, il a été prévu de maintenir “ sous cocon ” les 6 exemplaires excédentaires par rapport à la série de 28 afin de réduire les besoins d’entretien programmé.

      2. La surveillance du champ de bataille

· Le programme héliporté Horizon de surveillance du champ de bataille est adapté aux besoins interarmées dans le domaine du recueil et de la circulation du renseignement tactique. Chaque système comprend deux hélicoptères Super Puma équipés de radar Doppler (d’une portée de 150 km) et d’une station au sol. Le premier hélicoptère a été livré en juin 1996 et est opérationnel depuis deux ans. Les deux systèmes prévus ont été livrés, l’un en décembre 1996, l’autre en mars 1998. Quelque 833 millions de francs ont déjà été dépensés depuis le début du programme.

Au cours du conflit du Kosovo, la surveillance de théâtre a fait appel à ces deux systèmes d’hélicoptères Horizon. Capables d’assurer de jour comme de nuit la détection, la localisation et la reconnaissance des mobiles terrestres et des hélicoptères dans un rayon de 150 kilomètres, ils ont été utilisés en temps réel en liaison avec des systèmes américains JSTARS. A cette occasion, leur fiabilité opérationnelle a été démontrée puisqu’ils auraient permis de détecter des cibles non vues par les JSTARS. Néanmoins, quelques améliorations semblent nécessaires concernant leur capacité à distinguer entre différentes catégories de véhicules (camions, chars ou aéronefs).

· Concourt également à l’acquisition du renseignement sur le champ de bataille, le radar de contre batterie COBRA, installé sur un véhicule de dix tonnes, qui permet de localiser les moyens de tir adverses avec une grande précision. La France prévoit d’acquérir 10 systèmes pour un montant total de 2,44 milliards de francs. Développé depuis 1988, ce programme est entré en phase de production et les dix systèmes seront livrés de 2001 à 2005.

· Enfin, l’avion de reconnaissance Hawkeye permet, grâce à ses moyens de détection lointaine, de guider les aéronefs au cours de leurs missions d’assaut et de les informer des menaces aériennes. Il assure également la sûreté de la force navale en détectant et identifiant tout aéronef ou bâtiment de surface à une distance suffisante pour favoriser leur neutralisation éventuelle. Il contrôle aussi les avions d’interception. Deux appareils ont été livrés à la France à ce jour, de sorte que le système est devenu opérationnel en 1999. Sur un coût total estimé à 6,1 milliards de francs, plus de 2,5 milliards de francs de crédits ont déjà été consommés. Le projet de budget pour 2000 prévoit 882 millions de francs d’autorisations de programme et 175 millions de francs de crédits de paiement.

      3. La mise en œuvre de drones

Les armées françaises témoignent d’un intérêt croissant pour les drones en raison des avantages qu’ils présentent dans le nouveau contexte d’intervention des forces. Le bilan de l’utilisation des premiers systèmes en service lors du conflit du Kosovo incite à développer ce nouveau vecteur de recueil de renseignement pour en diversifier les aptitudes.

Par ailleurs, le degré de complémentarité de ces moyens peu onéreux avec les supports spatiaux présente de nombreux avantages. Dans un contexte de fortes contraintes budgétaires, il est en effet légitime de se demander dans quelle mesure les drones peuvent partiellement suppléer à des satellites dans le domaine de l’observation.

      a) Un concept d’emploi éprouvé

Les drones s’appuient sur un système regroupant des composants articulés (un vecteur, une charge utile, un système de liaison des données, un segment-sol d’exploitation et de conduite, un ou plusieurs opérateurs), afin de remplir une mission donnée. Il s’agit donc de systèmes réutilisables par principe, télépilotés ou programmés à partir du sol, d’une plate-forme aérienne ou navale.

La politique à l’égard des drones a suivi l’évolution du contexte dans lequel les armées sont amenées à intervenir et qui privilégie les missions de projection et d’intervention dans un cadre international. Le renseignement et l’information deviennent ainsi des facteurs essentiels dans la gestion et la conduite des crises et incitent à développer une capacité d’observation permanente et continue au-dessus du champ de bataille ou de la zone d’intervention.

Les intérêts des drones sont nombreux :

— d’une part, ils répondent aux nouvelles exigences pour le recueil de l’information car ils offrent une capacité continue d’observation et d’investigation dans la profondeur du dispositif, devenant indispensables à la manœuvre aéroterrestre ;

— d’autre part, ils présentent une souplesse d’emploi intéressante, en particulier lorsque les conditions d’exécution d’une mission font plus appel à la programmation qu’à l’intelligence humaine pour les tâches routinières (relais, surveillance, cartographie). Ils allient en effet une réactivité immédiate à une endurance certaine, ce qui en fait des moyens de renseignement utiles. Ils permettent également la préservation de personnels pour les missions d’évaluation des dommages après destruction d’un objectif ;

— enfin, par leur mobilité et leur faible coût unitaire, ils constituent un moyen complémentaire du renseignement tactique par voie aérienne ou spatiale. Leur emploi autorise un niveau de prise de risque plus élevé.

Certes, les drones présentent aussi des inconvénients qui limitent leur utilisation. L’absence d’intelligence à bord réduit leur cadre d’emploi et leurs capacités d’adaptation. Leur utilisation reste peu compatible avec la réglementation internationale de la navigation aérienne. Enfin, leurs caractéristiques de vitesse et d’altitude rendent les appareils sensibles à une agression dans une zone adverse.

Toutefois, le bilan de leur utilisation dans des conflits récents milite clairement en leur faveur.

      b) Un bilan plutôt positif concernant les drones en service

La place des drones est aujourd’hui limitée au niveau tactique, en soutien des unités sur le terrain. Plusieurs systèmes sont en service dans l’armée de Terre au 7ème régiment d’artillerie. Ils ont été utilisés lors du conflit du Kosovo.

· Destiné au renseignement dans la profondeur, le CL 289 est constitué :

— d’un missile préprogrammé, de portée moyenne (150 kilomètres) et évoluant à grande vitesse (720 km/h) et à faible altitude (de 125 à 1 000 mètres). Il emporte un appareil photographique et une caméra thermique dont les informations peuvent être recueillies en temps réel par une station d’exploitation. Une version « dégradée » de la charge utile peut être transportée dans une nacelle par hélicoptère ;

— d’un système au sol qui assure le lancement par rampe, la récupération du missile par parachute, la réception des informations et la maintenance.

Le système a été développé dans le cadre d’une coopération tripartite (Canadair, Dornier et SAT) et Aérospatiale a réalisé les travaux d’adaptation aux besoins opérationnels français. L’armée de Terre est équipée de six stations de lancement dotés de 48 missiles.

Le système CL 289 a été déployé au Kosovo dans le cadre de l’opération « Trident », d’avril à juin 1999. Il a été utilisé dans les opérations de reconnaissance de colonnes de réfugiés, d’identification de matériels ou d’installations serbes, d’évaluation des dommages après frappes alliées. À cette occasion, il s’est avéré particulièrement performant : il a permis une bonne identification des cibles dans la profondeur ; il s’est montré adapté au contexte européen (géographie, nébulosité) ; il a toujours suivi des trajectoires extrêmement précises. Seulement deux exemplaires français ont été perdus.

· Le Crécerelle s’apparente à un petit avion téléprogrammable qui évolue à faible vitesse (180 km/h) et à moyenne altitude (300 à 3 000 mètres). Les informations saisies par la caméra à très haute définition et par la caméra thermique peuvent également être transmises en temps réel à une station. La maîtrise d’œuvre est assurée par Sagem.

Deux systèmes à six drones ont été livrés en mai 1995 et en mai 1996. Chacune de ces deux sections opérationnelles mises en œuvre par l’armée de Terre est composée d’un centre de contrôle et d’exploitation, d’un dispositif de lancement et de tir, d’un dispositif de récupération et de reconditionnement. Une section a été déployée en Bosnie de novembre 1998 à mars 1999, puis en Macédoine d’avril à juillet 1999. A cette occasion, la vulnérabilité de ce drone lent a été mise en exergue, de même que sa sensibilité systématique au brouillage de la télécommande et ses limites dans le domaine de la transmission d’informations en temps réel. Trois exemplaires ont été perdus.

L’EFFICACITÉ TECHNIQUE DES DRONES FRANÇAIS EMPLOYÉS LORS DU CONFLIT DU KOSOVO

Vecteurs

Potentiel
vecteur

Période

Nombre de
missions
réalisées

Remarques

Taux de
réussite des
missions

CL 289

10

30 avril au 30 juin

29

1 non rentré

1 détruit à l’atterrissage

95 %

Crécerelle

7

18 avril au 12 juillet

40

2 non rentrés

1 détruit à l’atterrissage

95 %

Il est nécessaire de souligner que l’Alliance atlantique a perdu 21 drones au cours du conflit du Kosovo.

      c) Des perspectives de développement importantes sur le plan opératif

Compte tenu des évolutions des besoins des forces pour la maîtrise de l’information, du combat et du soutien aux opérations, les perspectives de développement des systèmes de drones revêtent une importance toute particulière sur le plan opératif. A cette fin, la France s’est lancée dans plusieurs programmes d’études et de développement concernant :

— le drone Brevel, tout d’abord, qui a été défini comme un petit avion télépiloté, relativement lent (120 à 180 km/h), évoluant à moyenne altitude (300 à 3 500 mètres) mais endurant (3h30 d’autonomie). Il a été développé en coopération avec l’Allemagne dans le cadre du GIE franco-allemand Eurodrone (Matra Bae Dynamics France et STN Atlas Electronik). Si le comité stratégique de 1996 a décidé d’interrompre le programme à la fin du développement, 47 millions de francs de crédits sont néanmoins prévus à cette fin pour l’an 2000, ce qui constitue la plus grosse dépense du ministère de la Défense en matière de drones. La loi de programmation militaire n’a pas prévu d’acquisition d’ici 2002 ;

— le drone Sperwer, petit avion lent (165 km/h) mais endurant (5 heures extensibles à 8) et évoluant à moyenne altitude (300 à 5 000 mètres), destiné à l’acquisition de jour comme de nuit des objectifs dans la zone de responsabilité d’une division. Développé par Sagem au profit de l’armée de Terre néerlandaise, il a également été acquis par la Suède et semble envisagé par l’armée de Terre française comme l’un des successeurs du Crecerelle en 2005 ;

— le drone Hunter, système polyvalent de surveillance et d’action (désignation optique et laser), fabriqué par Israël Aircraft Industries et TWR aux Etats-Unis. La France a fait l’acquisition, pour 200 millions de francs, d’une section de quatre drones israéliens Hunter dont l’évaluation opérationnelle sur la base de Mont-de-Marsan, commencée en janvier 1998, s’est achevée mi-1999. L’objectif est de préciser les spécifications des futurs systèmes de drones de moyenne altitude longue endurance, car le Hunter vole à plus haute altitude (jusqu’à 6000 mètres) et dispose d’une endurance plus longue (environ 10 heures) que ceux dont disposent les forces actuellement.

Ces perspectives de développement concernent donc aussi bien les drones tactiques dont la durée de vol est inférieure à 12 heures, que les drones endurants ou moyennement endurants dont les durées de vol sont respectivement supérieures à 24 et 12 heures, ces derniers relevant du niveau interarmées. L’objectif est de diversifier la vocation des drones, en leur attribuant des missions de désignation de cibles, voire de mise en œuvre d’armements. Dans le domaine du renseignement et de l’observation, les drones semblent également amenés à suppléer partiellement aux satellites en embarquant des capteurs optiques ou radars. Certes, ces équipements s’inscrivent avant tout dans un dispositif complet comprenant des satellites et des vecteurs pilotés. Néanmoins, ils peuvent pallier temporairement certains manques, notamment lorsque, comme c’est le cas actuellement, les équipements satellitaires d’observation opérationnels (c’est-à-dire la filière optique) ne peuvent être secondés par des équipements dont la réalisation est retardée pour des raisons budgétaires (en l’occurrence, la filière radar). A la différence des satellites, les drones présentent un coût supportable.

Or, les crédits qui ont permis le développement des drones dans les dernières années sont en régression. La DGA ne participe plus au financement des recherches mais seulement aux études amont à caractère technico-opérationnel. Les compétences existent chez les différents industriels (SAGEM, Aérospatiale-Matra, Dassault-Aviation et Thomson-CSF) mais elles sont dispersées. Le montant investi par l’État et les industriels dans la recherche en la matière ne représentent que 30 à 35 millions de francs annuels. Il existe donc un risque de repli préjudiciable à la préparation de l’avenir. Les États-Unis ont, pour leur part, fait le choix inverse et financent d’ambitieux programmes (drones à haute altitude et longue endurance Global Hawk et Darkstar) sur lesquels s’appuie notamment le succès du Predator qui est équipé de capteurs optroniques et d’un radar SAR transmettant leurs données en temps réel par satellite.

CONCLUSION

Si, à la différence des systèmes de communication des forces, les dotations prévisionnelles pour l’espace militaire prennent plus que leur part de la régression globale des moyens mis à disposition de nos armées, les aléas de la coopération européenne en sont la raison principale.

A cet égard, le projet de loi de finances initiale pour 2000 apparaît déterminé par des contraintes exogènes qui invitent à reconsidérer la réalité de l’engagement européen dans la prévention et la gestion des crises.

Certes, le conflit du Kosovo est source d’enseignements trop récents pour qu’ils reçoivent une traduction budgétaire immédiate. Cependant, les difficultés de la coopération européenne s’appuient davantage sur des conflits d’intérêts industriels que stratégiques. En cela, il est à craindre que l’effort budgétaire européen en faveur de l’espace militaire reste dispersé, donc non optimal.

Dans un tel contexte, notre pays se voit contraint d’assurer presque seul la mise en œuvre des systèmes de nouvelle génération afin de maintenir la continuité de service des équipements actuels. Or, compte tenu de la capacité de la France à continuer l’effort qu’elle a entrepris jusqu’à présent, certaines remises en cause de ses ambitions spatiales semblent inévitables.

Une telle évolution, si elle devait se confirmer, serait préjudiciable à l’indépendance d’appréciation des autorités politiques de notre pays. Elle serait surtout contraire aux objectifs essentiels de la programmation militaire.

La France ne peut donc pas faire l’économie de coopérations. C’est pourquoi le ministère de la Défense doit poursuivre ses efforts de manière à rallier nos partenaires à certains de nos projets et à participer à certains des leurs. C’est aussi de cette manière qu’une identité européenne de sécurité et de défense verra le jour.

TRAVAUX EN COMMISSION

I. — AUDITION DU GÉNÉRAL JEAN-PIERRE KELCHE, CHEF D’ÉTAT-MAJOR DES ARMÉES

La Commission de la Défense a entendu, le 20 octobre 1998, le Général Jean-Pierre Kelche, Chef d’état-major des Armées, sur le projet de loi de finances pour 2000.

Accueillant le Général Jean-Pierre Kelche, le Président Paul Quilès a rappelé les conditions délicates dans lesquelles il exerçait sa mission puisqu’il avait à veiller à la capacité opérationnelle de forces qui se trouvent elles-mêmes en profonde restructuration dans le cadre de la professionnalisation. Soulignant que l’équipement des armées était de haut niveau si l’on en juge par la contribution de la France au conflit du Kosovo, mais qu’il appelait un effort continu de modernisation et de développement des capacités, en particulier dans les domaines de la frappe de précision à distance de sécurité ainsi que du renseignement, il a indiqué que l’audition du Chef d’état-major pouvait être pour la Commission l’occasion de mieux évaluer l’incidence prévisible du projet de budget de la Défense pour 2000 sur l’état de préparation et les capacités opérationnelles des forces françaises.

Le Général Jean-Pierre Kelche a exposé que le projet de loi de finances pour 2000 formait la quatrième annuité de la loi de programmation militaire 1997-2002. Il l’a caractérisé, au titre III, par un respect des engagements de la professionnalisation, voire peut-être un arrêt de la dégradation du fonctionnement, mais, au titre V, par un niveau d’autorisations de programme contraint, non optimisé et susceptible d’avoir des conséquences sur les capacités de la future armée professionnelle et un niveau de crédits de paiement qui, pour être explicable, n’en est pas moins préoccupant.

S’agissant d’abord de la professionnalisation, le Chef d’état-major des Armées a considéré qu’aux deux tiers du parcours, le constat était positif. D’ores et déjà, la Marine, l’armée de l’Air et la Gendarmerie sont très proches de leur format final, l’armée de l’Air n’en étant éloignée que de 1 % seulement. Dans l’armée de Terre, les départs des cadres et la création de postes d’engagés se déroulent favorablement.

Le Général Jean-Pierre Kelche s’est néanmoins déclaré en accord avec les préoccupations du Chef d’état-major de l’armée de Terre en ce qui concerne la décrue de la ressource en appelés, le sous-effectif devenant chronique, de l’ordre de 15 à 20 %, ce qui, combiné avec l’insuffisance de recrutements des personnels civils, créait une tension forte, l’armée de Terre étant encore très dépendante de la conscription.

Il a rappelé que l’an dernier, il estimait que la hausse des rémunérations et charges sociales comprimait de façon excessive, dans la loi de finances pour 1999, les crédits de fonctionnement et jugé que, dans le projet de budget, la situation était différente puisque la moindre progression des coûts de personnel aboutissait à diminuer la pression sur les dépenses de fonctionnement, qui ne sont réduites que de 1,8 % par rapport aux crédits votés de 1999.

Il a néanmoins ajouté que, depuis le début de la programmation, les crédits de fonctionnement avaient diminué de 21,5 % alors que la loi de programmation militaire avait prévu une réduction de 20 % seulement et ce, à l’horizon 2002. Il a ajouté que l’avance ainsi réalisée avait permis de prendre en 2000 des mesures palliatives pour restaurer un peu les conditions d’entraînement. Il a expliqué que, dans les conditions actuelles, seul le volume important d’opérations extérieures en cours permettait d’assurer un niveau d’activités acceptable, mais a souligné que l’action menée en Bosnie-Herzégovine et au Kosovo, quelle que soit sa qualité, ne pouvait se substituer à un entraînement au combat.

S’agissant des rémunérations et charges sociales, il a relevé que le projet de loi de finances prévoyait des évolutions limitées des crédits pour les indemnités, un glissement vieillesse-technicité négatif, sur lequel il s’est interrogé, et un développement de la sous-traitance en contrepartie de postes supprimés ou non honorés. Il a, à ce propos, observé que le transfert d’activités à la sous-traitance ne pourrait être immédiat, ce qui pourrait soulever le problème de l’exécution des crédits correspondants. Il a ajouté que pour la première fois certains chefs d’état-major avaient décidé de présenter des mesures de « dépyramidage », des postes de sous-officiers étant supprimés au profit de postes de militaires du rang.

Il a indiqué enfin que, si le titre III progressait d’un milliard de francs, cette évolution incluait l’intégration au sein du ministère de la Défense du secrétariat aux Anciens combattants, la progression à périmètre constant n’étant que de 300 millions de francs. Il a conclu que le titre III du projet de budget de la Défense était convenable, mais que son niveau devrait être relevé pour les exercices à venir de manière à éviter des pertes de compétence des forces (entraînement opérationnel).

S’agissant des crédits d’équipement, le Chef d’état-major des Armées s’est déclaré nettement moins optimiste. Il a souligné que les réductions cumulées causées essentiellement par la revue des programmes, les « encoches », les annulations, elles-mêmes dues en majeure partie à la nécessité de financer les opérations extérieures, le transfert progressif au titre V des crédits d’entretien programmé du matériel et l’inscription au budget de la défense de dépenses civiles de recherche et de développement (dépenses du BCRD) représentaient 59 milliards de francs, soit 11 % du montant des dotations d’équipement initialement prévu par la loi de programmation. Il a fait valoir que cette situation avait obligé les armées à opérer des choix difficiles, notamment en matière d’approvisionnement en munitions, de sorte qu’à l’occasion du conflit du Kosovo on avait été amené à constater que les stocks étaient à la limite de la rupture, ce qui avait obligé à les recompléter d’urgence.

Le Général Jean-Pierre Kelche a précisé que les crédits prévus par la loi de programmation militaire n’intégraient pas de contribution au BCRD dans le cadre des dépenses en faveur de l’espace, alors qu’avaient été inscrits à cet effet au titre V 500 millions de francs en 1998, 900 millions de francs en 1999, et 1,5 milliard de francs en 2000. Il a fait remarquer également que cette contribution au BCRD comportait peu de dépenses de nature réellement duale, leur montant pouvant être estimé à 75 millions de francs seulement pour 2000. Il s’est toutefois réjoui des efforts du Ministre de la Défense pour donner un véritable caractère de dualité aux dépenses du BCRD financées par les crédits militaires dans le domaine spatial.

Il a ajouté, que si le niveau des crédits de paiement paraissait compatible avec les engagements réalisés et prévus, on constatait en revanche dans le projet de budget une déconnexion entre les autorisations de programme et les crédits de paiement qui risquait de provoquer à terme des retards dans le déroulement des programmes. Il a ajouté que le niveau des autorisations de programme, tout en excédant de 4,5 milliards de francs celui des crédits de paiement, restait insuffisant pour lancer l’ensemble des commandes globales prévues, et qu’il avait fallu de ce fait reculer la passation de certaines d’entre elles après l’année 2000. Remarquant que si le décalage, effectué dans ces conditions, de la seconde commande globale d’avions Rafale n’avait pas eu de conséquences sur les conditions de livraison, tel ne serait pas le cas pour d’autres si cette politique était maintenue. Il a cependant fait observer que le ministère des Finances avait dû sans doute se persuader que le ministère de la Défense ne disposait plus guère d’un surplus d’autorisations de programme disponibles puisque le dernier arrêté d’annulation n’avait porté que sur les crédits de paiement. En tout état de cause, les montants prévus d’autorisations de programme ne permettent pas de couvrir les engagements prévus au titre des programmes M 51 et NH 90, pour ce qui concerne son industrialisation et sa fabrication. Les besoins éventuels d’autorisations de programme pour l’ATF ne sont pas prévus.

Malgré ces insuffisances, le projet de budget pour 2000 n’entraîne pas de rupture dans le domaine de la politique d’équipement qui conserve sa cohérence.

Plusieurs livraisons relevant des programmes majeurs seront au rendez-vous de 2000 : 4 Rafale, 12 Mirage D, 3 Mirage 2000-5, 3 Transall rénovés, 34 chars Leclerc, des missiles Eryx, Mistral, Mica…

Ainsi, aux deux tiers de la loi de programmation militaire, les armées disposeront de 227 Leclerc sur les 307 qui doivent être acquis d’ici 2002 et de 90 avions de combat de dernière génération sur les 300 prévus à l’horizon 2002. Par ailleurs, le Charles de Gaulle entrera en service au troisième trimestre 2000 et la Marine alignera quatre des cinq frégates furtives La Fayette inscrites en programmation.

Les 21 programmes menés en coopération européenne absorberont 8 % des crédits de paiement du titre V en 2000 alors qu’ils n’en représentaient que 5,4 % en 1997. En 2002, ils consommeront 11 % des ressources prévisibles.

Dans le domaine de l’espace, la coopération européenne connaît des difficultés. En matière de télécommunications spatiales, la France qui poursuit seule, après le retrait des Britanniques, la définition du programme qui succédera à Syracuse II négocie toujours la possibilité d’une coopération avec l’Allemagne. En matière d’observation, la revue de programmes de 1998 a conduit, après le retrait de l’Allemagne, à l’interruption du programme de satellite radar. Enfin, l’Espagne a renoncé à sa participation au programme de satellite Hélios II dont le lancement est prévu en 2003.

Depuis le début de la loi de programmation militaire, les armées ont consenti un important effort de clarification dans la gestion des crédits du titre V (nouvelle nomenclature, développement de l’informatisation, suivi de la consommation des crédits en temps réel…).

Abordant les activités des armées en 1999, le Général Jean-Pierre Kelche a indiqué que les opérations extérieures avaient coûté environ 4,5 milliards de francs, soit un peu moins que prévu il y a quelques mois, en raison notamment de la réduction de la participation française à la KFOR rendue possible par l’arrivée de troupes d’autres pays. Le conflit du Kosovo qui a coûté globalement 2,8 milliards de francs a donné lieu à des dépenses particulièrement lourdes au titre V (1,6 milliard de francs) en raison des consommations de munitions.

Le Général Jean-Pierre Kelche a conclu en soulignant que le projet de budget pour 2000 ne remettait pas en cause les objectifs de la loi de programmation militaire, alors que le conflit du Kosovo avait démontré que chacune des trois armées conservait une réelle capacité opérationnelle conformément à l’engagement pris pour la période de restructuration. Ainsi, malgré une légère érosion en nombre d’appelés et grâce au déroulement satisfaisant des processus de restructuration, le projet d’armée professionnelle conserve une bonne crédibilité au sein de l’institution militaire.

Le Général Jean-Pierre Kelche a néanmoins attiré l’attention de la Commission sur la nécessité d’être vigilant pour les budgets des années postérieures à 2000.

Interrogeant le Général Jean-Pierre Kelche sur les enseignements tirés du conflit du Kosovo, le Président Paul Quilès a demandé si des aménagements des priorités et du rythme d’exécution des programmes lui paraissaient nécessaires au vu de cette expérience. Il a souhaité savoir si, dans le domaine aérien, ce conflit pourrait donner lieu à une révision des doctrines d’emploi et en conséquence des spécifications des matériels. Il a également demandé quelle politique il jugeait souhaitable dans le domaine des munitions, eu égard aux insuffisances constatées.

Souhaitant que soit communiqué à la Commission l’état des personnels militaires présents dans les représentations diplomatiques françaises à l’étranger, M. Didier Boulaud a attiré l’attention du Général Jean-Pierre Kelche sur l’importance de leurs effectifs dans certains postes et s’est interrogé sur les critères d’affectation de ces personnels expatriés et donc coûteux.

M. Guy-Michel Chauveau a d’abord interrogé le Général Jean-Pierre Kelche sur une éventuelle évolution de la doctrine française vers un emploi civilo-militaire de nos forces, notamment à la lumière de l’expérience du Kosovo.

Puis, notant que les armées européennes appartenant à l’OTAN étaient numériquement bien plus nombreuses que celle des Etats-Unis, mais sensiblement plus pauvres en moyens budgétaires, il a demandé si un meilleur effort de complémentarité des dépenses militaires en Europe ne permettrait pas d’éviter des redondances et d’améliorer les capacités opérationnelles. Il s’est également interrogé sur le ratio entre les effectifs et les dépenses d’équipement dans les armées européennes et américaines.

Il a enfin interrogé le Général Jean-Pierre Kelche sur la coopération européenne en matière de recherche et de développement ainsi que sur le pouvoir d’impulsion et d’orientation des Etats dans ce domaine face aux groupes industriels de plus en plus puissants qui se constituent.

M. Pierre Lellouche a demandé au Général Jean-Pierre Kelche s’il n’était pas possible d’envisager un système de financement des opérations extérieures qui n’obère pas les crédits disponibles pour l’entraînement des forces et la modernisation de leurs équipements. Il s’est demandé si une dotation ne pouvait pas être créée pour financer la partie constante, d’une année sur l’autre, des dépenses d’opérations extérieures. De la même manière, il a demandé si le surcoût en munitions du conflit du Kosovo réduirait les ressources des programmes en cours.

Puis il a demandé au Général Jean-Pierre Kelche s’il était en mesure de chiffrer les corrections nécessaires pour les budgets des deux prochaines années. Enfin, constatant que les Etats-Unis avaient refusé de ratifier le Traité d’interdiction totale des essais nucléaires et avaient décidé d’engager des négociations pour modifier le Traité ABM de 1972, il a demandé quelles implications cette politique pourrait avoir à terme sur la dissuasion nucléaire française.

Remarquant que les armées et en particulier, l’armée de Terre, éprouvaient des difficultés dans le recrutement des appelés, M. Charles Cova a souligné que, sur une ressource annuelle de plus de 250 000 jeunes, nos forces n’en avaient besoin que de 90 000 en 2000 et 60 000 en 2001. Désireux de proposer de nouvelles mesures pour assouplir les règles du report du service militaire, il a demandé au Général Kelche si les déficits constatés ne concernaient que certaines spécialités ou l’ensemble des postes encore occupés par les appelés.

Le Général Jean-Pierre Kelche a apporté les éléments de réponse suivants :

— soulignant que les objectifs de l’intervention contre la République fédérale de Yougoslavie n’étaient pas d’infliger un maximum de dommages, ni de détruire un pays mais plutôt d’obtenir par une action progressive et mesurée un effet de découragement afin de faire céder le pouvoir yougoslave, il a estimé que l’utilisation de l’arme aérienne dans ce cadre ne constituait qu’un exemple parmi d’autres. Sa progressivité, son caractère prévisible pour l’adversaire, le souci de limiter dans toute la mesure du possible les dommages infligés aux populations civiles étaient contraires aux canons habituels de l’art de la guerre aérienne. Les contraintes spécifiquement militaires ne concernaient que la recherche de l’efficacité dans les tirs et la sécurité d’emploi qui conditionnait la durée de l’intervention. L’emploi des forces aériennes pourrait être différent dans le cadre d’un autre conflit où nos appareils auraient, par exemple, à appuyer des forces terrestres. Il serait donc hasardeux de revoir de manière radicale la doctrine d’emploi des forces aériennes sur la base d’un conflit qui peut être considéré, à certains égards, comme atypique. L’essentiel est de disposer d’un outil militaire aussi ouvert que possible dans ses capacités ;

— s’agissant des munitions, la France ne s’est pas trouvée en rupture de stock. Néanmoins, les stocks constitués pour certaines catégories d’armements se sont révélés très limités, au point que des commandes de recomplètement aux Etats-Unis ont été nécessaires. La certitude qu’il était possible de racheter certaines munitions, si nécessaire, expliquait ce faible niveau des stocks ;

— des informations peuvent être communiquées aux parlementaires sur les effectifs et la répartition des postes de personnels à l’étranger, question à laquelle le Chef d’état-major des Armées porte une attention soutenue. L’Etat-major des Armées est confronté en ce domaine à un problème de pénurie, notamment lorsqu’il s’agit de nommer des officiers dans les GFIM de l’OTAN ;

— l’armée de Terre adapte ses doctrines d’emploi à la nature des engagements dans lesquels elle est amenée à intervenir. Ainsi, les capacités de mobilité et de puissance de feu du char Leclerc, initialement conçu dans la perspective de l’affrontement des deux blocs, ont permis de faire la démonstration de la force de la présence militaire alliée à l’égard des populations locales. Conjointement avec l’artillerie, le Leclerc contribue aussi à un dispositif permettant de dissuader les Serbes de toute action armée éventuelle ;

— la comparaison du rapport entre effectifs et budget d’investissement en Europe et aux Etats-Unis doit être faite avec prudence. Ce type de raisonnement peut être fallacieux, comme l’exemple du Kosovo l’a montré : si l’Europe n’a assuré que 20 % des missions de frappe aérienne, c’est par choix et non du fait de capacités limitées. Le fait que son niveau de participation à la force terrestre déployée au Kosovo soit bien supérieur à celui des Etats-Unis résulte d’ailleurs tout autant d’un choix ;

— en matière de complémentarité des systèmes de défense européens, il existe actuellement une volonté commune des Européens de passer des décisions politiques symboliques, telles que la constitution de la brigade franco-allemande, de l’Eurocorps, de l’Euromarfor, etc. à la mise en œuvre de systèmes opérationnels, que la France propose d’ailleurs depuis longtemps déjà. Tel est le sens de l’évolution de l’Eurocorps vers une force de réaction rapide et de la décision de doter l’Euromarfor d’une structure permanente nécessaire à sa crédibilité. La prochaine loi de programmation militaire devra prendre en compte ces perspectives de complémentarité intereuropéenne accrue. Elle devra cependant tout autant tenir compte du fait que la complémentarité a ses limites : d’une part, les coalitions d’Etats ad hoc qui se forment peuvent différer selon la nature de la crise ; d’autre part, la persistance d’intérêts exclusivement nationaux nécessite le maintien de capacités d’action autonomes pour la France ;

— en matière de recherche et développement, la démarche adoptée est celle d’une sélection, au niveau national, des créneaux jugés prioritaires, qui sont ensuite présentés à nos alliés européens en vue de la constitution de partenariats de compétences croisées. Dans cette perspective, un pas important a été franchi avec la présentation au Royaume-Uni et à l’Allemagne du plan prospectif à trente ans, document de référence pour l’équipement à long terme de nos forces. L’étape du décloisonnement des planifications nationales, que la France a proposé à ces mêmes partenaires, n’a pas encore rencontré leur adhésion ;

— la question du provisionnement des crédits nécessaires au financement des opérations extérieures est depuis longtemps objet de débats. L’orthodoxie budgétaire commanderait d’évaluer le socle de dépenses reconduit d’année en année et de le provisionner en loi de finances initiale. Faute d’une telle démarche, et le titre III ne pouvant assumer cette dotation sous enveloppe constante, le ministère de la Défense en est réduit aux deux expédients que sont le provisionnement minimal de crédits dans un article en loi de finances initiale (160 millions de francs en rémunérations et charges sociales dans le projet de loi de finances pour 2000) et l’annulation, en cours d’année, de crédits sur le budget d’investissement qui retarde d’autant la modernisation des équipements militaires, afin de gager des ouvertures de crédits pour financer les surcoûts en dépenses ordinaires.

M. Pierre Lellouche a alors estimé nécessaire de créer un titre nouveau dans le budget de l’Etat, distinct des titres III, V et VI pour y inscrire les crédits destinés au financement des opérations extérieures. Des procédures seraient alors mises en place pour permettre la consommation des crédits de ce titre en fonction des besoins.

M. François Lamy a fait observer que le problème du financement des opérations extérieures était régulièrement discuté à l’occasion des débats sur la loi de finances rectificative. Il a ajouté qu’aux termes d’une décision du Conseil de défense de mars 1997 distinguant les opérations extérieures normales et exceptionnelles, les secondes devraient être financées sans prélèvement sur les ressources de la Défense.

M. Arthur Paecht s’est demandé s’il ne fallait pas faire appel au financement de l’organisation internationale sur le mandat de laquelle les opérations extérieures étaient exécutées.

M. Pierre Lellouche a objecté que la pénurie des ressources de l’ONU rendait ce système difficilement praticable et que l’OTAN disposait déjà de procédures particulières de financement.

Le Président Paul Quilès a rappelé que M. François Lamy préparait un rapport d’information sur la question du contrôle parlementaire des opérations extérieures, dans lequel il traiterait également des procédures permettant leur financement.

Il a souligné que la Commission de la Défense reprendrait ce débat à l’occasion de l’examen de ce rapport d’information et du prochain projet de loi de finances rectificative.

Le Général Jean-Pierre Kelche a alors indiqué que les majorations de crédits prévues pour les munitions dans le projet de loi de finances pour 2000 avaient réduit d’autant les dotations destinées à la modernisation de l’équipement des armées.

S’agissant du niveau des autorisations de programme demandées dans le projet de budget, il a constaté qu’il se traduirait par un report de certaines commandes globales, qui pèserait sur les dotations d’équipement de 2001. A cet égard, il a estimé nécessaire d’augmenter le montant des autorisations de programme dans le budget de 2001, afin de passer ces commandes globales. Il a indiqué que, pour les commandes globales prévues dès 2001 dans le cadre des trois programmes NH 90, M 51 et Rafale, environ 18 milliards de francs d’autorisations de programme seraient nécessaires.

Évoquant enfin le refus du Sénat américain d’approuver le traité d’interdiction complète des essais nucléaires, il a estimé qu’il aurait un impact considérable sur l’opinion mondiale et risquait de constituer un encouragement à la prolifération des armes nucléaires.

Le Général Jean-Pierre Kelche a toutefois indiqué que les orientations de la politique américaine n’étaient pas de nature à entraîner une modification de la doctrine de dissuasion française, en vertu de laquelle l’armement nucléaire de la France était dimensionné afin de faire face tant à une agression majeure qu’à celle d’un trublion de dimension régionale. On peut toutefois craindre que les trublions régionaux ne se multiplient après la décision du Sénat américain.

De même, il a jugé grave la décision américaine de remettre en cause le traité ABM, tout en notant que la position française, pourtant rationnelle, n’était pas reçue par des interlocuteurs américains, qui ne comprennent pas que puisse être contesté aux Etats-Unis le droit de défendre leur territoire et leur population contre des Etats voyous (rogue states). Il a estimé que l’argumentaire français devait mettre l’accent sur le caractère inacceptable de la démarche bilatérale actuellement suivie par les Etats-Unis. Il a ajouté que ces initiatives risquaient d’alimenter la course aux armements dans certaines régions, telles que le Golfe, le sous-continent indien ou le sud-est asiatique, qui constituaient autant de zones où pouvaient apparaître des menaces de nature balistique.

Rappelant que la doctrine classique française de dissuasion nucléaire conduisait à faire l’impasse sur les moyens de défense antibalistique, M. Pierre Lellouche s’est interrogé sur les conséquences stratégiques de l’évolution de la position américaine.

M. René Galy-Dejean a souligné que le coût d’un programme de défense antibalistique avoisinait les 300 milliards de francs.

Le Général Jean-Pierre Kelche a estimé que la dissuasion offrait une garantie de sécurité crédible contre les menaces de tirs balistiques nucléaires. Il a par ailleurs exprimé ses doutes sur la possibilité d’édifier un bouclier antibalistique parfaitement étanche à l’échelle de l’Europe, ajoutant que vouloir suivre la voie des États-Unis en ce domaine reviendrait à s’engouffrer dans un piège financier similaire à celui qui avait été fatal aux Soviétiques lorsqu’avait été lancée l’initiative de défense stratégique. Il s’est néanmoins prononcé en faveur d’une vigilance accrue en matière de lutte contre la prolifération. La priorité n’en restait pas moins de construire un outil capable de faire face aux crises survenant en Europe.

Revenant sur l’état des ressources en appelés, il a insisté sur la difficulté à prévoir le comportement des jeunes bénéficiant d’un report d’incorporation. Le déficit actuellement constaté porte sur de multiples emplois, pour lesquels des palliatifs partiels de sous-traitance sont étudiés.

A une question de M. Arthur Paecht sur les problèmes d’effectifs du service de santé des Armées liés à la diminution du nombre d’appelés, le Général Jean-Pierre Kelche a indiqué que la situation demeurait difficile aux niveaux de la sélection et du recrutement des personnels employés sur contrats civils.

II. — EXAMEN DE L’AVIS

La Commission de la Défense s’est réunie le 27 octobre 1998, sous la présidence de M. Paul Quilès, Président, pour examiner les crédits du ministère de la Défense pour 2000 consacrés à l’Espace, à la communication et au renseignement, sur le rapport de M. Bernard Grasset, rapporteur pour avis.

M. Bernard Grasset a estimé que le récent conflit du Kosovo avait illustré la pertinence d’une politique spatiale volontariste. Plus que jamais, l’accès à l’espace, la maîtrise des communications et de l’information s’étaient révélés être des atouts indispensables à l’indépendance de la France puisque, sans la mise en œuvre du satellite d’observation optique Hélios, les responsables politiques et militaires français n’auraient pas pesé de la même manière sur l’appréciation de la situation ainsi que sur la conduite des opérations de l’Alliance atlantique.

Le rapporteur pour avis a rappelé que, pour parvenir à cette maturité technique et opérationnelle, la France avait longtemps consenti un effort budgétaire sans équivalent en Europe. A l’appui de ce constat, il a indiqué que les dotations annuelles avaient dépassé le chiffre symbole de 4 milliards de francs courants dans les lois de finances initiales pour 1993, 1995 et 1996 et que la programmation militaire, qui reste une référence pour 1997-2002, avait prévu 20,7 milliards de francs (valeur 1995) pour assurer la réalisation des programmes spatiaux militaires.

M. Bernard Grasset a alors exprimé ses inquiétudes face à l’inversion de cette tendance depuis deux ans, le projet de budget pour 2000 accentuant les inflexions amorcées en 1998. Il a souligné à cet égard que les dotations demandées pour l’espace militaire prenaient plus que leur part de la diminution globale des ressources de la Défense dans le projet de budget. Les crédits de paiement affectés aux dépenses d’équipement dans le domaine de l’Espace connaissaient une baisse de 15,26 %, contre 3,54 % pour l’ensemble des titres V et VI de la Défense. Quant aux autorisations de programme leur réduction atteignait 23,78 %, par contraste avec leur augmentation globale de 1,7 % pour les titres V et VI du budget de la Défense. Il a attiré l’attention de la Commission sur le fait que cette tendance, si elle se poursuivait, conduirait à une rupture contraire aux ambitions françaises dans le domaine spatial.

Présentant plus en détail le projet de budget, le rapporteur pour avis a regretté une nouvelle imputation des dotations duales sur les crédits spatiaux demandés pour 2000. Indiquant que ce transfert, essentiellement destiné au CNES, s’élevait à 1,5 milliard de francs en autorisations de programme et crédits de paiement, il a rappelé qu’il entrait en contradiction avec les engagements de la loi de programmation militaire qui avait exclu toute contribution du ministère de la Défense au budget civil de recherche-développement (BCRD). Il a précisé à ce sujet que seulement 75 des 900 millions de francs inscrits au titre de la recherche duale dans la loi de finances initiale pour 1999 avaient financé des études d’intérêt militaire en matière de haute résolution stéréo et d’optique embarquée sur SPOT-V, le reste constituant principalement un appoint pur et simple au budget du CNES.

M. Bernard Grasset a cependant ajouté que plusieurs indicateurs budgétaires montraient que le cadre retenu par le projet de budget pour 2000 préservait l’avenir tout en consolidant les acquis dans le domaine de l’espace militaire. Il a ainsi souligné que le niveau des dotations du projet de budget pour 2000 restait proche des prévisions de la programmation militaire et que le montant des crédits de paiement consacrés à la recherche amont connaissait une hausse de 8 %. Il s’est également félicité de l’augmentation du taux de consommation des crédits de l’Espace.

M. Bernard Grasset a en outre observé que, même redimensionné, le projet de budget pour 2000 permettait d’assurer la continuité des programmes spatiaux majeurs. Il a relevé à cet égard que la France apparaissait comme le seul pays européen qui maintenait un niveau d’engagement financier conséquent en faveur de l’Espace. En effet, depuis qu’elle avait été confrontée aux défections allemande sur le programme Hélios II et britannique pour la réalisation du satellite successeur de Syracuse et Skynet (Trimilsatcom), la France était contrainte d’assumer seule la poursuite et le renouvellement des programmes majeurs définis par le plan pluriannuel spatial militaire. Il a souligné que l’enjeu était d’importance à un moment où les Etats-Unis affichaient leur ambition de dominer tous les créneaux du domaine spatial d’ici 2005, alors que, dans le même temps, plusieurs pays asiatiques confirmaient leur aptitude à concurrencer à terme les programmes européens.

Reconnaissant que les pays européens n’étaient pas totalement inactifs puisqu’ils avaient doté l’Agence Spatiale Européenne des moyens suffisants pour adapter Ariane V à la concurrence et pour engager une réflexion sur Galiléosat, système de navigation par satellites équivalent au GPS américain et au Glonass russe, le rapporteur pour avis a souligné que la coopération européenne dans le domaine de l’espace militaire restait insuffisante alors même que sa nécessité avait été mise en exergue par le conflit du Kosovo.

Considérant qu’un bref aperçu du déroulement des programmes spatiaux majeurs donnait la mesure de ce problème, il a tout d’abord remarqué qu’aucune participation des partenaires italien et espagnol n’était acquise à ce jour pour le financement d’Hélios II, alors même qu’Hélios I-A arrivait en fin de vie. Constatant que la politique de rigueur budgétaire en Allemagne obérait pour l’instant toute perspective de participation de ce pays au programme, il en a déduit que la France devait assumer un financement qui mobilisait près de la moitié du total des crédits de paiement destinés à l’Espace pour 2000, soit 1,112 milliard de francs.

M. Bernard Grasset a ensuite indiqué que le système de télécommunications militaires spatiales Syracuse II, reposant sur des charges utiles intégrées aux satellites civils Télécom II, devait lui aussi faire l’objet d’une relève dès 2002-2003. Rappelant que la Grande-Bretagne, privilégiant une solution nationale, s’était retirée du projet Trimilsatcom le 12 août 1998 en raison de considérations industrielles et de ses différences d’approche sur le recours aux techniques EHF, il s’est félicité que la France n’ait pas pour autant renoncé à une coopération avec l’Allemagne. Précisant que l’accord de cette dernière n’était pas encore acquis et que, par conséquent, notre pays devra vraisemblablement réaliser un satellite sous maîtrise d’œuvre nationale dans l’intervalle, il a indiqué que 307 millions de francs de crédits de paiement étaient inscrits dans le projet de budget pour 2000 afin que se poursuivent les études de faisabilité.

Relevant enfin que le système d’observation radar faisait à nouveau l’objet d’un intérêt croissant de la part de l’Allemagne et de l’Italie qui ont mené des études assez approfondies à ce sujet, il a estimé que la maturité croissante du concept de petit satellite radar rendait le coût d’acquisition d’un tel système bien plus abordable que les prévisions de la loi de programmation militaire ne le laissaient initialement envisager. Indiquant que le ministère de la Défense avait engagé la réalisation d’un démonstrateur d’ici 2002, il s’est prononcé en faveur d’une coopération sur la base de participations budgétaires croisées avec le programme Hélios II. Attirant l’attention de la Commission sur le fait que l’Italie était dès à présent susceptible de se rallier à un projet de cette nature, il n’a pas exclu que la fusion annoncée entre DASA et Aérospatiale-Matra puisse également inciter l’Allemagne à s’engager avec la France dans un programme auquel l’entreprise issue de cette fusion serait partie prenante.

Mais au-delà de ces grands programmes, le rapporteur pour avis a souhaité mentionner la poursuite des efforts de la France dans les programmes de cohérence ainsi que de l’écoute électromagnétique, le second micro-satellite scientifique Clémentine devant être lancé avec Hélios I-B d’ici à la fin de 1999. Il s’est félicité de l’attention accordée à cet aspect de la politique spatiale française qui, bien que moins visible, n’en est pas moins important.

Abordant ensuite les programmes relatifs au renseignement de théâtre, il a estimé qu’une fois encore le conflit du Kosovo avait été révélateur de l’efficacité des moyens mis en œuvre, notamment en ce qui concerne les systèmes de recueil à vocation tactique. Citant plus particulièrement le programme héliporté de surveillance du champ de bataille Horizon, il a insisté sur sa fiabilité opérationnelle, alors même que le prototype n’avait pas fini ses tests expérimentaux ainsi que sur sa complémentarité avec le système américain JSTARS. Il a ajouté que les drones avaient également fait la preuve de leurs qualités pour un coût très modéré. Si deux CL 289 et trois Crécerelle parmi les dix-sept drones français engagés au Kosovo avaient été perdus, deux d’entre eux avaient été détruits en raison de problèmes à l’atterrissage. Il s’est néanmoins étonné que le projet de budget pour 2000 ne prévoie pas le renouvellement des vecteurs perdus et s’est déclaré favorable à un accroissement de l’effort budgétaire de recherche-développement en faveur de ces systèmes, eu égard à leur potentiel.

S’agissant des communications militaires, il a souligné avec satisfaction le traitement budgétaire relativement privilégié de ce domaine essentiel, indiquant notamment que l’introduction du nouveau système de transmission MBTA dans l’armée de l’Air se traduisait par une forte augmentation de l’enveloppe des autorisations de programme qui s’élevaient pour 2000 à 680 millions de francs contre 25 millions de francs inscrits dans le budget voté de 1999, ainsi que par une croissance importante des crédits de paiement, qui passent de 290 millions de francs pour la loi de finances pour 1999 à 423,5 millions de francs dans le projet de budget pour 2000. Il s’est réjoui que l’armée de Terre bénéficie elle aussi de cette priorité puisque 903,7 millions de francs d’autorisations de programme et 639 millions de francs de crédits de paiement étaient affectés aux systèmes d’information, de télécommunications et de commandement. Il a également remarqué que la Marine bénéficiait d’un abondement sensible des dotations destinées à son équipement en matière de systèmes de télécommunications et d’espace, les autorisations de programme demandées à ce titre s’élevant dans le projet de budget pour 2000 à 284,5 millions de francs alors que les crédits de paiement progressaient à 281,8 millions de francs.

En conclusion, M. Bernard Grasset a qualifié le projet de budget pour 2000 de globalement redimensionné. Tout en estimant que les difficultés liées aux coopérations invitaient à réfléchir sur la volonté réelle de nos partenaires européens à acquérir une véritable autonomie d’appréciation dans la prévention et l’analyse des crises, il a considéré que le conflit du Kosovo était source d’enseignements trop récents pour recevoir une traduction budgétaire immédiate. Doutant que la France puisse faire l’économie de coopérations sans remettre en cause ses ambitions, il a invité le ministère de la Défense à poursuivre ses efforts de manière à rallier nos partenaires européens à certains de nos projets et à participer en retour à certains des leurs. Il a fait valoir que cette démarche participait à l’émergence d’une identité européenne de sécurité et de défense.

Le rapporteur a enfin souhaité indiquer à la Commission que le Directeur de la Direction du Renseignement militaire n’avait pas donné suite à ses demandes de rencontre qui n’avaient pour objet que de tirer les conclusions du conflit du Kosovo en matière de renseignement. Il s’est étonné de cette méconnaissance de la mission constitutionnelle d’information et de contrôle de l’action du pouvoir exécutif qui incombe au Parlement.

Le Président Paul Quilès a regretté que le projet de budget pour 2000 prévoie une diminution des autorisations de programme et des crédits de paiement en faveur de l’Espace après les opérations du conflit du Kosovo qui avaient au contraire souligné le rôle fondamental des moyens de renseignement spatial et l’écart de capacité entre l’Europe et les Etats-Unis en ce domaine. Il a également indiqué que les industriels avaient récemment expliqué devant la mission d’information sur le conflit du Kosovo l’intérêt spécifique des drones pour la conduite des opérations d’observation et de renseignement. D’autres auditions de la Commission avaient livré des informations concordantes. Il s’est alors demandé pourquoi il n’était pas prévu de remplacer les drones qui avaient été perdus lors du conflit du Kosovo.

M. Guy-Michel Chauveau s’est demandé dans quelle mesure le plan prospectif à trente ans de la DGA consacré à la recherche-développement allait être adapté en fonction des leçons tirées des opérations militaires récentes. Il a souhaité savoir si le programme Hélios II ne pouvait pas tirer parti de la création de la société ASTRIUM. Il s’est enfin interrogé sur les financements européens dont pourraient bénéficier les programmes spatiaux présentant un intérêt pour la Défense.

M. Robert Poujade, après avoir félicité le rapporteur pour avis de la qualité de son exposé, a considéré que l’analyse des crédits consacrés à l’Espace faisait non seulement apparaître les difficultés de la coopération mais également des manques graves dans les dotations budgétaires. Il a précisé que le groupe RPR, ne comprenant pas que les leçons du conflit du Kosovo n’aient pas été tirées sur le plan budgétaire, ne pourrait pas donner un avis favorable à l’adoption de ces crédits.

M. Bernard Grasset a considéré qu’il devenait de plus en plus difficile de justifier la baisse des crédits de l’Espace par les incertitudes de la coopération, notamment avec le Royaume-Uni ou l’Allemagne. Il a regretté que le succès des drones français n’ait pas été suffisamment pris en compte dans le projet de budget. Il a également rappelé qu’aucun pays européen ne pouvait mener seul un programme spatial alors que les Etats-Unis proposaient toutes sortes de satellites « sur étagère ». Enfin, après avoir souligné que, pour tirer des enseignements militaires pertinents du conflit du Kosovo, il fallait du temps, il a estimé qu’il ne pourrait y avoir de véritable Europe de la Défense tant qu’il n’y aurait pas de coopération européenne dans le domaine du renseignement et de l’espace militaire.

*

La Commission de la Défense a procédé le 3 novembre 1999, dans l’après-midi, au vote sur les crédits de la défense pour 2000 ().

La Commission a successivement donné un avis favorable à l’adoption des crédits consacrés à la dissuasion nucléaire, à l’espace, à l’armée de l’Air, à l’armée de Terre, à la Marine, à la Gendarmerie, les membres des groupes DL, RPR et UDF votant contre et ceux du groupe communiste s’abstenant. Elle a également donné un avis favorable à l’adoption des crédits consacrés aux Services communs, les membres des groupes DL, RPR et UDF votant contre et ceux du groupe communiste ainsi que M. Michel Meylan s’abstenant. Enfin, elle a donné un avis favorable à l’adoption de l’ensemble des crédits du titre III et des titres V et VI du ministère de la Défense ainsi que des articles 40 et 41 du projet de loi de finances pour 2000, les membres des groupes DL, RPR et UDF votant contre et ceux du groupe communiste s’abstenant.

N°1864-03. - Avis de M. Bernard Grasset, au nom de la commission de la Défense, sur le projet de loi de finances pour 2000. - Défense : Espace, communication et renseignement

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© Assemblée nationale

() Cette réunion a été précédée, le 3 novembre 1999 au matin, de l’audition de M. Alain Richard, Ministre
de la Défense,
sur les crédits de son ministère au cours d’une séance ouverte au public et à la presse. Le compte rendu de cette séance figure dans les avis n° 1864, tomes VII et VIII, de la Commission de la Défense relatifs respectivement aux dépenses ordinaires et aux dépenses en capital du projet de budget de la Défense pour 2000.