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le 16 novembre 1999

N° 1861

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

    ONZIÈME LÉGISLATURE

    Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 14 octobre 1999.

RAPPORT

FAIT

    AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN (1) SUR
    LE PROJET DE
    loi de finances pour 2000 (n° 1805),

PAR M. DIDIER MIGAUD,

Rapporteur Général,

Député.

——

ANNEXE N° 42


PRESTATIONS SOCIALES AGRICOLES


Rapporteur spécial : M. Charles de COURSON

Député

____

(1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page.

                      Lois de finances.

La commission des finances, de l’économie générale et du plan est composée de :

M. Augustin Bonrepaux, président ; M. Didier Migaud, rapporteur général ; MM. Michel Bouvard, Jean-Pierre Brard, Yves Tavernier, vice-présidents, MM. Pierre Bourguignon, Jean-Jacques Jégou, Michel Suchod, secrétaires ; MM. Maurice Adevah-Poeuf, Philippe Auberger, François d'Aubert, Dominique Baert, Jean-Pierre Balligand, Gérard Bapt, François Baroin, Alain Barrau, Jacques Barrot, Christian Bergelin, Eric Besson, Alain Bocquet, Jean-Michel Boucheron, Mme Nicole Bricq, MM. Christian Cabal, Jérôme Cahuzac, Thierry Carcenac, Gilles Carrez, Henry Chabert, Didier Chouat, Alain Claeys, Charles de Courson, Christian Cuvilliez, Arthur Dehaine, Jean-Pierre Delalande, Francis Delattre, Yves Deniaud, Michel Destot, Patrick Devedjian, Laurent Dominati, Raymond Douyère, Tony Dreyfus, Jean-Louis Dumont, Daniel Feurtet, Pierre Forgues, Gérard Fuchs, Gilbert Gantier, Jean de Gaulle, Hervé Gaymard, Jacques Guyard, Pierre Hériaud, Edmond Hervé, Jacques Heuclin, Jean-Louis Idiart, Mme Anne-Marie Idrac, MM. Michel Inchauspé, Jean-Pierre Kucheida, Marc Laffineur, Jean-Marie Le Guen, Guy Lengagne, Maurice Ligot, François Loos, Alain Madelin, Mme Béatrice Marre, MM. Pierre Méhaignerie, Louis Mexandeau, Gilbert Mitterrand, Jean Rigal, Alain Rodet, Nicolas Sarkozy, Gérard Saumade, Philippe Séguin, Georges Tron, Philippe Vasseur, Jean Vila.

INTRODUCTION 5

I.– LE BAPSA POUR L’AN 2000 7

A.– LES RECETTES : UNE STABILITÉ GLOBALE 7

1.– Les cotisations sociales sont surévaluées 8

    a) Les décisions dont l’incidence n’est pas prise en compte 10

    b) Le problème des cotisations minimales 11

2.– Les cotisations de « solidarité » devraient être réduites ou supprimées 12

    a) Une base juridique fragile 13

    b) Des coûts de gestion élevés 14

    c) Des prélèvements en forte croissance sur de petits revenus 14

    d) Les cotisations de « solidarité » font double emploi avec la CSG 15

3.– L’effort contributif des agriculteurs est en augmentation 16

4.– Les ressources fiscales pourraient être mieux évaluées 17

    a) Le prélèvement sur le produit de la TVA : une prévision toujours optimiste 18

    b) Les attributions de CSG maladie 18

    c) La contribution sociale de solidarité des sociétés : toujours du provisoire 19

5.– Les transferts en provenance d’organismes sociaux 21

6.– Les subventions de l’État se réduisent 23

B.– LES DÉPENSES 23

1.– Les charges d’intérêts : une augmentation prévisible, mais résistible 24

2.– L’étalement des cotisations des agriculteurs en difficulté 24

3.– Les prestations maladie ne tirent pas toutes les conséquences de la « couverture maladie universelle » 25

4.– L’allocation de remplacement 27

5.– Les prestations familiales sont sous–évaluées 27

6.– Les retraites agricoles sont également sous–évaluées 28

    a) La justification des crédits inscrits au « bleu » 29

    b) Les mesures de revalorisation annoncées pour 2000 30

C.– LE BAPSA, UN EXERCICE INUTILE ? 32

1.– Le BAPSA ne tient pas compte de toutes les mesures décidées 33

2.– Le BAPSA est de moins en moins exhaustif 35

3.– Les documents destinés à l’information du Parlement sont imprécis 37

II.– LA PROTECTION SOCIALE DES AGRICULTEURS : FORCES ET FAIBLESSES DE LA MUTUALITÉ SOCIALE AGRICOLE 39

A.– LE DÉVELOPPEMENT DES ACTIVITÉS CONCURRENTIELLES DE LA MUTUALITÉ SOCIALE AGRICOLE 39

B.– LA NÉCÉSSITÉ DE CLARIFIER LE STATUT DES ACTIVITÉS CONCURRENTIELLES DE LA MSA 41

1.– Quelles activités concurrentielles peuvent développer les caisses de MSA ? 41

2.– Quel statut fiscal pour les activités concurrentielles de la MSA ? 42

C.– LES INCIDENCES DU VOLET COMPLÉMENTAIRE DE LA « COUVERTURE MALADIE UNIVERSELLE » 43

D.– LA PERSPECTIVE D’UN RÉGIME COMPLÉMENTAIRE OBLIGATOIRE DE RETRAITE 45

E.– LES ACCIDENTS DU TRAVAIL DES EXPLOITANTS AGRICOLES 46

1.– Les différents assureurs 46

2.– Les faiblesses du régime en vigueur 47

3.– Les possibilités de réforme 50

F.– LA PERSISTANCE DES OBSTACLES AU REGROUPEMENT  DES CAISSES 51

G.– LE CONTRÔLE : LES PROBLÈMES SPÉCIFIQUES AU RÉGIME  AGRICOLE 53

1.– L’affiliation 55

2.– Le contrôle de l’assiette « revenus professionnels » 58

3.– Le recouvrement des cotisations 60

4.– La fréquence inégale de certaines prestations 62

5.– La caisse de Corse : les prémices du redressement 63

CONCLUSION 65

EXAMEN EN COMMISSION 67

AMENDEMENTS NON ADOPTÉS PAR LA COMMISSION 69

INTRODUCTION

L’examen du budget annexe des Prestations sociales agricoles dépasse l’exercice budgétaire classique d’analyse des chiffres de recettes et de dépenses. Il permet une vue d’ensemble du régime de protection sociale des agriculteurs, dont le BAPSA ne couvre qu’une partie ; ce régime étant confronté aux mêmes évolutions que l’ensemble des régimes de sécurité sociale, l’analyse du BAPSA conduit même à évoquer l’ensemble des questions qui se posent aujourd’hui à ces régimes : par exemple, comment appliquer la loi sur la « couverture maladie universelle » ; comment améliorer le contrôle de l’assiette des cotisations ; quelle doit être la limite entre le domaine du service public et le domaine concurrentiel, etc ?

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I.– LE BAPSA POUR L’AN 2000

Le budget annexe des Prestations sociales agricoles (BAPSA) qui est proposé pour 2000 se caractérise, tant dans son montant global que dans la structure de ses recettes et de ses dépenses, par une grande stabilité. Cela peut s’expliquer par la démographie : l’augmentation des dépenses par assuré, due aux revalorisations des prestations et à la non maîtrise des dépenses de santé, est plus que compensée par le déclin des effectifs du régime agricole. Mais, au-delà, votre Rapporteur ne peut que relever le caractère de plus en plus formel de l’exercice demandé au Parlement sur le BAPSA : est-il encore utile de débattre en loi de finances de ce compte reflet, qui apparaît de moins en moins sincère – dans la mesure où les incidences de diverses mesures gouvernementales prises dans d’autres cadres législatifs, voire dans celui de la loi de finances, n’y sont que partiellement retracées – et de moins en moins exhaustif de la protection sociale des agriculteurs ?

    A.– LES RECETTES : UNE STABILITÉ GLOBALE

Le BAPSA présenté pour 2000 dans le fascicule « bleu » annexé, net des restitutions de TVA, s’élève à 87,981 milliards de francs, en recul de 1,3 % sur le BAPSA voté pour 1999. Le tableau ci-après présente l’évolution des différentes catégories de recettes dans le budget annexe pour 2000.

Il n’est pas tenu compte, dans ce tableau, de l’amendement (n° 535) sur le financement de la revalorisation des retraites agricoles proposé par le Gouvernement et adopté par votre Assemblée, lors du débat sur la première partie de la loi de finances le 22 octobre dernier. Votre Rapporteur s’en tient à la présentation des documents budgétaires. Il est regrettable que l’on introduise systématiquement les mesures de relèvement des retraites agricoles par voie d’amendement, quand bien même elles sont arbitrées depuis plusieurs semaines au moins, au prétexte, en l’espèce, que l’annonce officielle n’en a été effectuée que le 21 octobre à la « table ronde sur l’agriculture ». A quoi sert le fascicule annexé consacré au BAPSA, quand il est d’entrée de jeu faux d’un milliard de franc ?

LES RECETTES DU BAPSA 2000

(en millions de francs)

 

Loi de finances initiale
1999

Projet de loi de finances
2000

Évolution

(en  %)

Cotisations créatrices de droit

12.263

12.251

– 0,1

Cotisations de « solidarité »

264

236

– 10,6

TVA nette

25.614

26.530

3,6

CSG maladie

4.428

4.239

– 4,3

Contribution sociale de solidarité des sociétés

1.000

Taxes diverses

2.022

2.069

2,3

Sous-total : taxes

33.064

32.838

– 0,7

Compensation démographique

34.001

35.303

3,8

Contribution de la CNAF

1.400

1.318

– 5,9

Versement du fonds de solidarité vieillesse

2.704

1.981

– 26,7

Sous-total : transferts des organismes sociaux

38.105

38.602

1,3

Remboursement de l’AAH

456

422

– 7,5

Versement du fonds spécial d’invalidité

107

96

– 10,3

Subvention d’équilibre

4.903

3.536

– 27,9

Sous-total : État

5.466

4.054

– 25,8

Total

89.162

87.981

– 1,3

Une grande stabilité caractériserait en 2000, par rapport à 1999, les trois grands agrégats de recettes du BAPSA que sont les cotisations sociales des agriculteurs, les impôts et taxes, et les transferts des autres régimes sociaux. La diminution globale des charges du budget annexe
(– 1.181 millions de francs) se traduirait donc par une diminution voisine de la subvention d’équilibre du budget général de l’État (– 1.367 millions de francs).

      1.– Les cotisations sociales sont surévaluées

Le tableau ci-après présente l’évolution des différentes lignes de cotisations sociales créatrices de droits retracées dans le BAPSA. Il ne s’agit, comme on le sait, que de la part « technique » des cotisations, destinée au financement des prestations sociales définies par la loi, la part « complémentaire », destinée au financement de la gestion et de l’action sanitaire et sociale du régime agricole, n’étant pas prise en compte dans le budget annexe.

ÉVOLUTION DES COTISATIONS SOCIALES TECHNIQUES

(en millions de francs)

 

Loi de finances initiale 1999

Prévisions révisées 1999

Écart
1999 révisé
/1999 initial

(en  %)

Projet de loi de finances 2000

Évolution 2000/1999 révisé
(en  %)

Cotisations

12.263

11.740

– 4,3

12.251

4,4

– d’allocations familiales (PFA)

2.071

2.025

– 2,2

2.060

1,7

– de retraite forfaitaire (AVI)

1.666

1.625

– 2,5

1.627

0,1

– de retraite proportionnelle (AVA)

4.283

3.971

– 7,3

4.361

9,8

– de maladie (AMEXA)

4.182

4.058

– 3

4.140

2

– d’assurance veuvage

47

47

49

4,3

– d’assurance personnelle

1

1

1

– des DOM

13

13

13

On peut observer que les prévisions révisées pour l’année en cours sont en net retrait (de plus de 500 millions de francs, soit 4,3 %) par rapport aux évaluations du BAPSA voté l’an dernier. Cette révision à la baisse est d’abord la résultante d’un « effet base », car les réalisations de cotisations ont été en 1998 en retrait de 148 millions de francs sur les prévisions initiales, du fait, selon le ministère de l’Agriculture :

– des incidences de la multiplication des sociétés agricoles, qui conduirait à une certaine évaporation de l’assiette sociale agricole ;

– de la majoration de la déduction pour investissement opérée par la loi de finances pour 1997 ;

– d’anticipations de baisses de revenu par des agriculteurs ayant opté pour l’assiette annuelle « n ».

La révision à la baisse des prévisions de recettes de cotisations pour 1999 est aussi la conséquence du caractère « volontariste » du BAPSA initial pour 1999, au moins sur un point : les cotisations sociales, et plus particulièrement la ligne « cotisations de retraite proportionnelle » (AVA), étaient majorées de 200 millions de francs qui représentaient les cotisations que devaient s’empresser de verser les 105.000 conjoints d’exploitants susceptibles d’opter pour le nouveau statut de conjoint collaborateur prévu par la loi n° 99–574 d’orientation agricole du 9 juillet 1999, ce statut leur ouvrant un droit à retraite proportionnelle en contrepartie, naturellement, des cotisations afférentes. La promulgation tardive de la loi d’orientation ne permettra malheureusement pas d’appeler lesdites cotisations en 1999…

En 2000, l’assiette des cotisations, et donc leur rendement à taux prévus constants, varierait de 0 à 2 %, selon les branches. La stagnation attendue (+ 0,1 %) des cotisations de retraite forfaitaire est un phénomène habituel, qui rend compte de la diminution rapide des effectifs d’aides familiaux et de conjoints non exploitants, assujettis en tant que tels à ces cotisations. Dans l’autre sens, l’évolution très dynamique indiquée pour les cotisations de retraite proportionnelle (+ 9,8 % par rapport aux prévisions révisées pour 1999) tient à l’incorporation à la prévision pour 2000 de deux années des nouvelles cotisations de retraite proportionnelle des conjoints collaborateurs (1999 appelée en retard et 2000)…En revanche, le produit, qui serait de l’ordre de 20 à 30 millions de francs, des rachats de points (également prévus par la loi d’orientation) au titre des annuités antérieures à 1999 pour les nouveaux conjoints collaborateurs n’est pas intégré au BAPSA.

      a) Les décisions dont l’incidence n’est pas prise en compte

Les conséquences de plusieurs autres mesures annoncées ou déjà prises ne sont pas traduites dans les prévisions de cotisations du BAPSA.

Celles-ci ne retiennent ainsi aucune incidence de la « modulation » des aides européennes sur l’assiette sociale agricole, et ce pour une raison apparemment justifiée : la « modulation », consistant à prélever arbitrairement un milliard de francs sur les aides versées à certaines exploitations importantes et à les reverser sous forme de « contrats territoriaux d’exploitation » (CTE), est en principe neutre pour le revenu agricole global.

Ce raisonnement est pourtant simpliste : de fait, la modulation sera prélevée intégralement, ou presque, sur des exploitants imposés au réel, dont elle réduira donc en tout le « revenu professionnel » cotisable d’un milliard de francs ; dans l’autre sens, les CTE bénéficieront à des exploitants imposés au forfait comme au réel. Or, il n’est pas évident que le montant moyen des forfaits agricoles soit relevé en conséquence : outre l’« inertie » du forfait, on doit observer qu’il ne saurait tenir compte d’une aide non générale mais conditionnelle comme le CTE. Si l’on émet l’hypothèse que la moitié de la masse des CTE sera attribuée à des forfaitaires (ils représentent aujourd’hui la moitié des affiliés du régime agricole), soit 500 millions de francs sur la part des CTE financée par la « modulation », on voit que la perte d’assiette sociale pourrait atteindre 500 millions de francs, soit à terme 150 millions de francs de perte de cotisations. Compte tenu de l’existence de l’option pour cotiser sur les revenus prévisionnels de l’année en cours (année « n »), cette incidence pourrait se manifester dès 2000, d’autant que la montée en puissance progressive des CTE (50.000 seulement seraient signés en 2000 selon le Gouvernement ; combien seront effectivement payés en 2000 ?), alors que le prélèvement de « modulation » sera intégral dès cet exercice, créera un décalage temporel certain entre la perte d’assiette due à ce prélèvement et l’intégration à l’assiette des CTE payés.

La taxe sur les produits phytosanitaires prévue dans le cadre de l’élargissement de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) que propose le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 n’est pas non plus considérée comme ayant une incidence sur l’assiette sociale agricole dans le présent BAPSA. Son produit de 300 millions de francs sera pourtant prélevé de fait, au moins partiellement, sur le revenu des agriculteurs.

Il convient enfin de noter que l’Assemblée nationale a adopté, durant le débat en première lecture de la loi de financement de la sécurité sociale, un amendement de votre commission des Finances tendant à élargir l’exonération partielle de cotisations dont bénéficient les jeunes agriculteurs : actuellement, celle–ci est de 50 % la première année après l’installation, 40 % la deuxième et 20 % la troisième ; il a été décidé de porter respectivement ces taux à 65 %, 55 % et 35 % ; en outre, l’âge minimal des bénéficiaires a été abaissé de 21 à 18 ans et leur âge maximal relevé de 35 à 40 ans (à l’affiliation), afin de s’aligner sur la réglementation communautaire. Le coût de cette mesure, évalué dans la loi de financement, serait de l’ordre de 100 millions de francs, dont 75 millions de francs en cotisations « techniques » (à déduire en conséquence des recettes du présent BAPSA). Il est vrai qu’une partie de cette mesure ne fait que compenser l’effet défavorable qu’avait eu pour les jeunes agriculteurs le basculement des cotisations maladie vers la CSG.

      b) Le problème des cotisations minimales

La loi n° 99–641 du 27 juillet 1999 créant la « couverture maladie universelle » a institutionnalisé le principe d’une couverture maladie de base gratuite pour les personnes à très faible revenu vivant de transferts sociaux.

Cependant, de nombreux exploitants agricoles (et travailleurs indépendants, la question se posant dans les mêmes termes pour eux) ont également des revenus très modestes : c’est ainsi que 45 % des actifs affiliés au régime agricole ont un revenu fiscal inférieur au seuil de 3.500 francs par mois. Or, les intéressés resteront affiliés à ce régime sur le critère d’activité professionnelle, régime dans le cadre duquel ils sont redevables de lourdes cotisations maladie forfaitaires minimales : 3.500 francs par an, soit 290 francs par mois, au minimum. On voit que cela peut représenter un prélèvement supérieur à 20 % pour des personnes à très faible revenu. L’équité voudrait que les non salariés à très faible revenu soient, sinon totalement exonérés de cotisations maladie, du moins assujettis strictement proportionnellement à leur revenu.

      2.– Les cotisations de « solidarité » devraient être réduites ou supprimées

Le projet de loi de finances évalue à 236 millions de francs le rendement des cotisations dites de « solidarité » en 2000. Ce montant est égal à la prévision révisée pour 1999, alors que la prévision initiale pour cet exercice s’élevait à 264 millions de francs. Cette évolution négative s’explique par l’abaissement du taux de la principale de ces cotisations, celle qui pèse sur les exploitations inférieures au seuil d’affiliation au régime agricole : ce taux est passé de 19 % en 1998 à 17 % en 1999.

Il existe en effet trois types de cotisations de solidarité :

– La cotisation de solidarité prévue à l’article 1003-7-1-VI du code rural concerne toute personne qui met en valeur une exploitation agricole dont l’importance est comprise entre 2 ou 3 hectares selon les départements et la moitié de la surface minimum d’installation (seuil d’affiliation au régime agricole), ou dès lors que le revenu cadastral de cette exploitation est supérieur à un certain montant.

– La cotisation de solidarité visée à l’article L. 622-1 du code de la sécurité sociale concerne les chefs d’exploitation pluriactifs qui, à titre secondaire, mettent en valeur une exploitation supérieure à la moitié de la surface minimum d’installation. Cette cotisation est affectée exclusivement à l’assurance vieillesse des personnes non salariées agricoles et est calculée dans les mêmes conditions que les cotisations d’assurance vieillesse dues par les exploitants à titre principal.

– La cotisation de solidarité instituée par le VII de l’article 1003-7-1 du code rural concerne les associés de sociétés de personnes non affiliés au régime agricole (minoritaires ne participant pas aux travaux). Cette cotisation est calculée en pourcentage des revenus professionnels perçus. Elle a pour objectif de dissuader des éclatements fictifs d’une exploitation engendrant l’évasion d’une partie des revenus professionnels de l’assiette des cotisations.

Le point commun de ces trois cotisations est qu’elles sont prélevées sans contrepartie : elles n’ouvrent pas de droits aux prestations du régime agricole.

Le tableau ci-après fournit quelques éléments relatifs à ces cotisations.

LES COTISATIONS DE « SOLIDARITÉ »

 

Taux
1998

(en  %)

Taux
1999

(en  %)

Effectifs assujettis 1998

Rendement (1)
1998

(en millions de francs)

Cotisations de « solidarité » :

   

237.500

261

– Exploitations inférieures à la demie SMI

19

17

213.500

245

– Pluriactifs agriculteurs à titre secondaire

12,51

12,51

4.000

9

– Associés apporteurs de capitaux

3,4

3,4

20.000

7

(1) Il s’agit du rendement « technique » après qu’ont été opérés des prélèvements de gestion ou hors cotisation complémentaire.

L’existence et le montant des cotisations de « solidarité » présentent plusieurs problèmes.

      a) Une base juridique fragile

La notion même de « cotisation » de « solidarité » paraît peu conforme au droit constitutionnel. En effet, selon la jurisprudence du Conseil constitutionnel, les cotisations sociales se définissent (et se distinguent des impositions) par le fait qu’elles ouvrent vocation à des droits aux prestations sociales servies par les régimes auxquels elles sont versées (décision n° 93-325 DC du 13 août 1993). Or, les termes « cotisation » et « solidarité », rendant bien compte de la nature du prélèvement, entrent en contradiction avec cette définition : les cotisations en question ne sont effectivement pas des impositions, car leurs taux sont fixés par voie réglementaire, alors que la fixation des taux des impositions est une compétence constitutionnelle du législateur (article 34 de la Constitution), qui peut à la limite se borner à les encadrer, mais pas renoncer à les fixer (décision n° 87-239 DC du 30 décembre 1987) ; cependant, ces cotisations ne sont pas créatrices de droits.

D’autres fragilités juridiques, moins fondamentales, sont à relever :

– le mode de fixation de la cotisation de gestion « complémentaire » des cotisants solidaires en application du paragraphe VII de l’article 1003-7-1 du code rural a dû être modifié suite à un arrêt du Conseil d’État en date du 14 janvier 1998 ; on est passé d’une cotisation fixe à un prélèvement proportionnel sur le rendement de la cotisation ;

– il semblerait que, faute de calcul par les services fiscaux des revenus des très petites exploitations concernées par la cotisation visée au VI du même article, celle-ci soit très souvent assise sur une base forfaitaire, alors que le code rural vise les « revenus professionnels » et ne renvoie à une assiette forfaitaire que pour les nouveaux installés et associés de sociétés imposées à l’impôt sur les sociétés.

      b) Des coûts de gestion élevés

Le rendement des cotisations de « solidarité » est en moyenne de l’ordre de 1.000 francs par assujetti, soit vingt-cinq fois moins que le produit moyen de cotisations des affiliés au régime agricole. Il n’est pas étonnant, dans ces conditions, que la gestion des cotisations de solidarité entraîne des coûts élevés par rapport à leur rendement. Les prélèvements de gestion opérés sur les cotisations s’élèvent à 17,7 % du montant pour la cotisation des exploitants sous le seuil d’affiliation et 26,5 % pour celle des associés apporteurs de capitaux, ce qui constitue l’un des records de coût de perception.

      c) Des prélèvements en forte croissance sur de petits revenus

En termes de nombre d’assujettis et de rendement, la plus importante des trois cotisations de « solidarité » est celle qui pèse sur les revenus provenant d’exploitations inférieures au seuil d’affiliation au régime agricole, par définition, donc, de toutes petites exploitations. Les exploitants concernés peuvent être pluriactifs ; ce sont souvent, toutefois, des retraités agricoles : plus de 80.000 assujettis à la cotisation en question sont retraités. On connaît le niveau moyen des retraites agricoles… les cotisants de « solidarité » sont souvent titulaires de revenus très modestes.

Or, les prélèvements sociaux opérés sur eux se sont considérablement accrus en 1999 : l’article 7 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 (n° 98-1194) a assujetti en principe à la CSG, à la CRDS et au prélèvement supplémentaire de 2 % sur les revenus patrimoniaux, les revenus agricoles assujettis aux cotisations de « solidarité », qui y échappaient auparavant.

Cet assujettissement est normal, la situation antérieure d’exonération résultant d’une malfaçon de la loi : la CSG a vocation à toucher tous les revenus. Pour autant que l’assujettissement soit effectif, cela n’en a pas moins majoré de 150 millions de francs les prélèvements sociaux opérés sur les revenus agricoles, puisque les cotisations de « solidarité » n’ont pas été substantiellement allégées en contrepartie. Pour un exploitant sous le seuil d’affiliation au régime agricole, le taux global de prélèvement social, non créateur de droits, est passé de 1998 à 1999 de 19 % à 27 %, ce qui a entraîné une baisse supérieure à 7 % de son revenu agricole net de prélèvements.

Les revenus des cotisants de « solidarité » sont donc les seuls revenus d’activité dont l’assujettissement à la CSG n’a pas eu pour contrepartie un allégement équivalent, voire supérieur, des cotisations sociales.

      d) Les cotisations de « solidarité » font double emploi avec la CSG

A partir du moment où les revenus agricoles non assujettis aux cotisations créatrices de droit sont intégrés à l’assiette de la CSG, on voit mal quel est l’objet des cotisations de « solidarité » créées antérieurement (par la loi d’orientation n° 80–502 du 4 juillet 1980) : la CSG est en effet le prélèvement social qui a été créé afin d’asseoir une partie des recettes de la sécurité sociale sur la totalité des revenus, et sans que l’assujettissement ouvre des droits à prestations, bref avec le même objet que les cotisations de « solidarité » instituées précédemment dans un cadre beaucoup plus restreint.

Il est vrai que la sécurité sociale a évolué : en matière de prestations familiales, tout lien a été rompu entre l’assujettissement aux cotisations et le droit aux prestations ; en matière d’assurance maladie, la loi sur la couverture maladie universelle parachève une évolution identique ; il n’y a de toute façon, dans cette branche, que peu de rapport entre le revenu cotisable et les droits à prestations (seules les indemnités journalières, pour les salariés, sont calculées par rapport au salaire). On pourrait donc soutenir, à la limite, qu’il est normal que l’ensemble des revenus d’activité soient soumis à des contributions sociales destinées à ces branches, et n’ouvrant pas, le cas échéant, de droits à prestations : cela permet notamment d’avoir les mêmes prélèvements, à revenu égal, sur un « pluriactif » et un « monoactif ».

Le même raisonnement ne saurait en revanche être étendu à l’assurance vieillesse, puisque le montant des droits à pension acquis reste, dans l’ensemble des régimes, plus ou moins corrélé au revenu cotisable. Il est donc injustifiable de lever des cotisations non créatrices de droits représentatives de cotisations vieillesse. Or, c’est l’objet même de la cotisation prévue à l’article L.622–1 du code de la sécurité sociale pour les pluriactifs agriculteurs à titre secondaire (qui n’existe pas, d’ailleurs, dans le cas symétrique d’agriculteurs à titre principal exerçant à titre secondaire une activité non salariée non agricole). Quant aux cotisations des exploitants sous le seuil d’affiliation (définies au VI de l’article L.1003–7–1 du code rural), leur taux, soit 17 %, est supérieur au cumul des taux des cotisations des branches « non contributives » (maladie, famille, veuvage) pour les exploitants affiliés au régime agricole : ce cumul s’élève à 16,34 % si l’on prend en compte les taux « techniques » et « complémentaires », et à 12,59 % en ne retenant que les taux « techniques » (les taux « complémentaires » servant à financer la gestion du régime agricole, on ne voit pas pourquoi les cotisants de « solidarité » contribueraient au financement de la gestion d’un régime auquel ils ne sont pas affiliés).

*

* *

Votre Rapporteur considère qu’il serait équitable de réduire à due concurrence des 10 points de CSG et de prélèvement sur les revenus du patrimoine le taux de la cotisation assise sur les exploitants qui sont sous le seuil d’affiliation : ce taux étant de 19 % en 1998 (avant l’assujettissement à CSG), le taux de cette cotisation pourrait être fixé à 9 %, ce qui ramènerait le prélèvement social global effectué sur cette catégorie à un niveau très voisin de celui de 1998 (légèrement supérieur, toutefois, à cause de la non déductibilité fiscale d’une partie de la CSG, ainsi que de la CRDS et du prélèvement sur les revenus du patrimoine, qui entraîne une petite majoration de l’assiette – revenu fiscal des cotisations et de la CSG) ; en outre, ce taux serait fixé par la loi, puisque cette cotisation sans contrepartie constitue en fait une imposition. Par ailleurs, on pourrait supprimer la cotisation due par les associés minoritaires apporteurs de capitaux, compte tenu de son coût de gestion très élevé et de l’assujettissement des revenus en question à la CSG et au prélèvement sur les revenus du patrimoine.

      3.– L’effort contributif des agriculteurs est en augmentation

Le BAPSA, comme on l’a dit, ne retrace que partiellement les prélèvements sociaux effectués sur le revenu des agriculteurs : n’y sont prises en compte ni les cotisations « complémentaires » finançant la gestion de la Mutualité sociale agricole, ni les CSG-CRDS assises sur les revenus agricoles (le budget annexe rend seulement compte, en la matière, des attributions au régime agricole sur le produit d’une fraction de la CSG, celle qui est affectée aux régimes d’assurance maladie en général).

Il convient donc de reconstituer une sorte de tableau global du régime agricole pour apprécier l’évolution de l’effort contributif des agriculteurs.

ÉVOLUTION DE L’EFFORT CONTRIBUTIF DES AGRICULTEURS

(en millions de francs)

 

1997

1998

1999

2000

 

(réalisations)

(réalisations)

(prévisions révisées)

(prévisions)

Prélèvements sur le revenu des actifs

19.163

19.196

19.536

20.298

– Cotisations techniques

14.044

11.533

11.678

12.188

– Cotisations complémentaires

2.923

2.890

2.958

3.108

– CSG-CRDS

2.196

4.773

4.900

5.002

Prélèvements sur les retraités agricoles

1.497

1.070

1.224

1.222

(CSG-CRDS et cotisations maladie en 1997)

       

Cotisations de solidarité et d’assurance personnelle

307

313

288

288

Total (A)

20.968

20.579

21.048

21.808

Charges du régime agricole

90.983

91.771

92.396

91.873

(BAPSA + gestion de la MSA + majorations des pensions pour enfants) (B)

       

Effort contributif (en %) (A/B)

23

22,4

22,8

23,8

On peut constater que l’effort contributif du monde agricole pour le financement de son régime social reste faible, compte tenu de la démographie et de la modestie des revenus agricoles, mais tend à s’accroître, car les dépenses sont désormais en baisse et les prélèvements, corrélés à l’assiette cotisable, continuent à augmenter. Encore l’effet lié à l’assujettissement à la CSG des revenus agricoles des cotisants de « solidarité » n’est-il pas pris en compte dans ce tableau.

      4.– Les ressources fiscales pourraient être mieux évaluées

En 2000, les ressources d’origine fiscale du budget annexe seraient, selon le fascicule « bleu », assez stables par rapport au BAPSA initial pour 1999, puisqu’elles reculeraient de 0,7 % à 32,8 milliards de francs. Rappelons que ces ressources sont constituées :

– d’un prélèvement sur le produit de la TVA, égal à 0,7 % de l’assiette de celle-ci ;

– depuis 1997, de l’attribution d’une fraction de la CSG et des droits sur les alcools à due concurrence des pertes de cotisations résultant des baisses de taux qui ont accompagné le relèvement de la CSG (au titre de la branche maladie) en 1997 et 1998 ;

– jusqu’en 1999, voire 2000 compte tenu de l’amendement voté par l’Assemblée nationale le 22 octobre dernier, d’une partie du produit de la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S) ;

– de diverses taxes affectées intégralement (taxes sur les farines et les huiles alimentaires) ou partiellement au BAPSA (taxes sur les tabacs, les alcools, les polices d’assurance automobile, les grossistes répartiteurs de produits pharmaceutiques).

      a) Le prélèvement sur le produit de la TVA : une prévision toujours optimiste

Dans son rapport de l’an dernier, votre Rapporteur avait relevé le caractère « volontariste » de la prévision initiale de rendement de la fraction de TVA affectée au BAPSA, qui devait s’élever à 25.614 millions de francs en 1999. Les prévisions révisées de rendement font aujourd’hui état d’une réévaluation à la baisse de 600 millions de francs de ce produit.

Pour 2000, le produit net de TVA inscrit dans le budget annexe atteint 26.530 millions de francs. L’application d’un raisonnement identique à celui tenu l’an passé conduit à considérer comme un peu optimiste cette prévision : si l’on s’en tient aux données du rapport général de M. Didier Migaud sur la loi de finances pour 2000, la progression des bases taxables de la TVA serait de l’ordre de 7,7 % en 2000 par rapport à 1998 (3,4 % en 1999 et 4,2 % en 2000) ; en appliquant ce taux au produit de TVA perçu par le budget annexe en 1998, soit 24.409 millions de francs, on trouverait plutôt 26.300 millions de francs.

      b) Les attributions de CSG maladie

Les baisses des taux des cotisations maladie en 1997 et 1998, corollaires du relèvement de la CSG, sont compensées pour les régimes spéciaux par l’attribution d’une fraction de la nouvelle CSG maladie (complétée par une fraction des droits sur les alcools).

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 prévoit, en son article 5, une réforme du dispositif en vigueur : plutôt que de recalculer chaque année, pour chaque régime spécial, les pertes de cotisations théoriques consécutives aux baisses de taux de 1997 et 1998, on se contenterait d'appliquer une indexation forfaitaire au montant perçu par chacun en 1998. L’indexation se ferait sur l’évolution de l’assiette de la CSG sur les revenus d’activité et de remplacement de l’ensemble des ménages durant les deux derniers exercices clos.

Le mode de calcul en vigueur est complexe et donne lieu à d’importants mouvements de régularisations ultérieures. Il est clair que recalculer, année après année, les pertes de cotisations liées à une baisse de taux de plus en plus lointaine deviendrait de plus en plus théorique. Le projet de loi de financement présente a contrario le mérite de proposer une solution simple, qui, en outre, devrait être plutôt favorable au régime agricole, puisque l’assiette des cotisations agricoles, base actuelle du calcul, a une évolution beaucoup plus irrégulière et probablement à moyen terme moins favorable que l’assiette globale de la CSG sur les revenus d’activité et de remplacement.

Il est à noter que le montant inscrit dans le projet de loi de finances pour 2000 au titre de la compensation de CSG, soit 4.239 millions de francs, ne tient pas compte du projet de loi de financement de la sécurité sociale. L’application du nouveau dispositif augmenterait de 60 à 90 millions de francs, semble-t-il, la ressource CSG du BAPSA pour 2000.

      c) La contribution sociale de solidarité des sociétés : toujours du provisoire

Votre Rapporteur pensait qu’après moultes péripéties, l’histoire commune du BAPSA et de la C3S s’était achevée avec les lois de finances et de financement de la sécurité sociale pour 1999 : après une ultime et forfaitaire attribution d’un milliard de francs sur le produit de la contribution en 1999, le budget annexe serait définitivement écarté de la répartition de la C3S.

Le fascicule « bleu » pour 2000, en conséquence, n’inscrit aucune ressource C3S pour le budget annexe de l’exercice prochain. Mais voilà qu’en adoptant le 22 octobre dernier l’amendement n° 535 du Gouvernement au projet de loi de finances, l’Assemblée nationale a décidé de reproduire en 2000 le scénario de 1999 : le BAPSA percevrait à nouveau un milliard de francs pour solde de tout compte sur la C3S …

Il faut donc revenir sur l’histoire cahotique de la répartition de cette contribution. On rappellera que la loi de finances pour 1992 comportait un tour de passe-passe budgétaire que l’opposition avait dénoncé : il avait été décidé de fusionner la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S) destinée à compléter le financement des régimes sociaux des non salariés non agricoles et la cotisation similaire existant au profit du BAPSA sur les sociétés « agricoles », le BAPSA devenant l’un des attributaires de la nouvelle contribution unique. Alors que la contribution sur les sociétés agricoles avait auparavant un rendement de seulement quelques millions de francs par an, cette opération a permis au BAPSA de ponctionner 11.584 millions de francs durant les exercices 1992 et 1993 ; le taux de la fraction de TVA prélevée au profit du budget annexe ayant été réduit à due concurrence, les recettes du budget général ont été majorées et le déficit budgétaire diminué d’autant.

Effectué au delà des disponibilités annuelles de C3S, ce prélèvement a en fait porté sur les réserves qui avaient été constituées grâce à l’excédent de cet impôt et qui devaient permettre aux régimes des indépendants, menacés par une évolution démographique très défavorable, de faire face à leurs échéances à moyen terme. Préférant la logique du court terme, le Gouvernement d’alors a épuisé en deux ans les réserves pour réduire la participation de l’État au financement du régime agricole.

Une fois vidées les réserves, le BAPSA, bien que restant de droit attributaire, a cessé de percevoir une fraction de la C3S : de 1994 à 1998, la ligne de recettes, maintenue pour ordre, n’a été dotée ni en loi de finances, ni en gestion. Il est vrai qu’entre temps des dispositions législatives nouvelles, allant au rebours de la loi de finances pour 1992, avaient tendu à écarter le BAPSA de la répartition de la C3S, sans l’en exclure définitivement, tout en rendant cette répartition de plus en plus complexe et obscure. Toujours attributaire de droit, et alors que s’accumulaient à nouveau des excédents sur le compte de gestion de la C3S (l’assiette de celle-ci ayant été élargie et son taux relevé en 1995), le budget annexe a systématiquement été écarté de cette ressource pendant la période.

Les lois de finances et de financement de la sécurité sociale pour 1999 ont en revanche prévu l’affectation d’un milliard de francs prélevé sur le produit de la C3S au profit du BAPSA, tout en l’écartant définitivement, au delà, de la répartition de la contribution.

L’amendement proposé par le Gouvernement, juste avant l’article d’équilibre de la loi de finances, pour financer la revalorisation des retraites agricoles réédite en 2000 le mécanisme de 1999 : une attribution forfaitaire d’un milliard de francs au BAPSA.

La revalorisation des retraites entraîne des dépenses pérennes et sera pourtant financée par des opérations non reconductibles en 1999 comme en 2000. L’an dernier, votre Rapporteur s’interrogeait sur la manière dont on financerait au delà de l’exercice 1999 l’amélioration des retraites ; la réponse est donnée cette année : il suffira de prévoir, tous les ans, un prélèvement « exceptionnel » « non reconductible » sur tel ou tel produit fiscal. Par ailleurs, on peut relever que le Gouvernement n’a pas cru bon de tirer les conséquences de son amendement dans les rectifications qu’il a proposées une semaine plus tard, le 29 octobre, et également par voie d’amendement, aux prévisions de recettes et de dépenses de la loi de financement de la sécurité sociale.

Tout cela n’est pas très sérieux. Votre Rapporteur ne peut donc que plaider, comme l’an passé, pour une attribution durable de C3S au régime agricole : depuis l’élargissement en 1995 de l’assiette de cette imposition, qui a fait entrer dans son champ le monde coopératif et mutualiste, la C3S compte de nombreux redevables dont les salariés relèvent du régime agricole (coopératives agricoles, Crédit agricole ...) ; il serait donc légitime que le budget annexe perçoive une fraction de C3S pérenne et au moins équivalente à la C3S due par ces redevables, soit plus de 500 millions de francs.

On doit en outre relever que le montant de C3S attribué forfaitairement au budget annexe en 2000 ne couvre même pas la totalité de la mesure annoncée en matière de retraites, puisque le coût « net » (après défalcation des économies induites sur le minimum vieillesse) de celle-ci serait de 1.050 millions de francs et le coût « brut », de 1.200 millions de francs : il aurait donc fallu, logiquement, majorer de 1.050 millions de francs, et non de 1.000 millions de francs, les prévisions de recettes et plafonds de dépenses afférents au BAPSA dans l’article d’équilibre de la loi de finances, voté le 22 octobre. Par ailleurs, comme la mesure entraîne ipso facto une réduction de 150 millions de francs des sommes versées au titre du minimum vieillesse aux retraités agricoles et donc une minoration égale du versement du fonds de solidarité vieillesse (FSV) retracé dans les recettes du budget annexe, le financement complémentaire effectif à dégager s’élève à 1.200 millions de francs, dont seulement 1.000 millions de francs sont donc précisés par l’amendement gouvernemental.

      5.– Les transferts en provenance d’organismes sociaux

Les transferts en provenance des divers régimes d’assurances vieillesse et maladie au titre de la compensation démographique, de la Caisse nationale d’allocations familiales (CNAF) et du fonds de solidarité vieillesse (FSV) atteignent 38,6 milliards de francs dans le BAPSA 2000, en légère progression (1,3 %) sur les évaluations du BAPSA 1999. Les évolutions prévues s’inscrivent dans la continuité des années précédentes :

– les recettes tirées de la compensation démographique s’élèveraient en 2000 à 35.303 millions de francs, en progression de 2,5 % sur les nouvelles prévisions pour 1999, légèrement révisées à la hausse (34.442 millions de francs contre 34.001 millions de francs initialement inscrits). Cette évolution peut être comparée à la croissance moyenne des ressources de compensation pendant les cinq années précédentes (1994 à 1999 révisé):  + 3,6 % par an ;

– la contribution de la CNAF constitue, on le sait, un solde prévisionnel couvrant l’écart entre les cotisations des agriculteurs pour la branche famille et les dépenses de prestations familiales du régime agricole (hors bourses et allocations aux adultes handicapés) ; la poursuite de son recul (elle passerait de 1.400 millions de francs en 1999 à 1.318 millions de francs en 2000) s’explique par l’évolution des dépenses de prestations ;

– le versement du fonds de solidarité vieillesse retracé dans le BAPSA ne s’élèverait qu’à 1.981 millions de francs en 2000, contre 2.704 millions de francs dans la loi de finances pour 1999 (– 26,7 %). Ce versement correspond principalement au remboursement des prestations de « minimum vieillesse » versées aux ressortissants du régime agricole ; sa très forte baisse (il passerait ainsi de 4.212 millions de francs en 1996 à 1.981 millions de francs en 2000, soit – 53 % en quatre ans) est la conséquence immédiate des mesures de revalorisations successives de la part « contributive » des retraites agricoles mises en œuvre depuis 1994.

La très forte baisse prévue pour 2000 par rapport aux prévisions initiales pour 1999 rend compte, également, de la surestimation considérable des versements du FSV dans les lois de finances initiales pour 1998 et 1999, que montre le tableau ci-après.

VERSEMENTS DU FSV : PRÉVISIONS ET RÉALISATIONS

(en millions de francs)

Versements du FSV

Prévisions

Réalisations comptables

Écart
(en %)

1998

3.266

3.017

– 7,6

1999

2.704

2.491 (1)

– 7,9

(1) prévision de réalisation.

Ces écarts significatifs tiennent principalement à la prise en compte insuffisante, voire inexistante, dans les prévisions initiales des années considérées, de l’incidence des mesures de revalorisation décidées pour ces mêmes exercices : cela a été le cas en particulier en 1999, seul le coût « brut » de la mesure adoptée ayant été évoqué (soit 1,2 milliard de francs), alors qu’elle entraîne dès cette année 200 millions de francs d’économies pour le FSV, non répercutées dans la prévision du BAPSA.

Quant à l’évaluation du versement pour 2000, l’annonce de la mesure « retraites » de 2000 devrait conduire à la réduire automatiquement de 150 millions de francs, d’après les données communiquées sur la réduction des dépenses de minimum vieillesse dans le régime agricole qui en résulterait : cet ajustement sur une ligne de recettes de l'État A aurait dû être effectué à l’occasion du vote de l’article d’équilibre de la loi de finances auquel cet état est rattaché ; il n’en a pas été ainsi… La décision prise, lors du débat sur le financement de la sécurité sociale, de majorer finalement de 1% le minimum vieillesse devrait toutefois permettre d’affecter une partie de ce surplus : l’effet combiné des décisions improvisées est imprévisible.

      6.– Les subventions de l’État se réduisent

L’État – plus précisément le budget général – finance le BAPSA par deux biais : d’une part il rembourse à celui-ci des prestations gérées par le régime agricole, allocation aux adultes handicapés et minimum invalidité, le déclin de ces lignes suivant celui des effectifs concernés ; d’autre part, il verse une subvention d’équilibre.

Cette dernière est prévue en baisse de 27,9 % en 2000 ; elle passerait ainsi de 4.903 à 3.536 millions de francs.

Puisque ce montant assure l’équilibre ex ante du régime, il est naturel qu’il diminue quand les charges retracées diminuent et les autres ressources sont stables.

Pour autant, c’est aussi la conséquence de certains choix : notamment celui de ne pas inscrire la nouvelle revalorisation des retraites dans la version initiale du projet de loi de finances, mais de passer par le biais d’un amendement, et celui, complémentaire, de financer cette mesure hors budget, en ponctionnant la C3S…

    B.– LES DÉPENSES

Le BAPSA étant toujours présenté en équilibre, ses dépenses, comme ses recettes, ressortent en 2000 en diminution de 1,3 % par rapport au BAPSA initial pour 1999. Après majoration d’1,05 milliard de francs au titre de la mesure de revalorisation des retraites pour 2000, ce budget ressortirait à un niveau voisin de celui de 1999.

LES DÉPENSES DU BAPSA 2000
(principales rubriques)

(en millions de francs)

 

Loi de finances initiale 1999

Projet de loi de finances 2000

Évolution

(en %)

Intérêts

173

230

32,9

Étalement et prise en charge de cotisations

100

90

– 10

Prestations maladie

33.286

33.341

0,2

Prestations invalidité

453

418

– 7,8

Allocation de remplacement

55

100

81,8

Prestations familiales

3.948

3.801

– 3,7

Prestations vieillesse

50.285

49.091

– 2,4

Divers

862

910

5,6

Total

89.162

87.981

– 1,3

      1.– Les charges d’intérêts : une augmentation prévisible, mais résistible

Les frais financiers afférents au découvert de trésorerie du budget annexe sont évalués à 230 millions de francs dans le BAPSA 2000, contre 173 millions de francs dans le BAPSA 1999. En effet, les dépenses effectives pour 1999 ont été réévaluées à 220 millions de francs.

Cela n’est guère surprenant vu l’évolution du plafond du découvert autorisé au régime agricole par les lois de financement de la sécurité sociale : 8,5 milliards de francs en 1998, 10,5 milliards de francs en 1999, 12,5 milliards de francs en 2000 selon le projet de loi de financement. Le BAPSA étant toujours équilibré prévisionnellement et exécuté plus ou moins en équilibre, ce très important découvert autorisé rend compte de la grande irrégularité infra-annuelle des flux financiers ; son augmentation est la conséquence de la diminution de la subvention budgétaire, dont le versement en début d’exercice est un facteur important de l’équilibre de trésorerie.

Si votre Rapporteur se félicite de ce que la passation de la convention de découvert soit désormais consécutive à une mise en concurrence, il ne peut que réitérer des observations désormais habituelles sur :

– la violation de la règle de l’unité de caisse que constitue le recours à un découvert bancaire et non au Trésor pour gérer la trésorerie d’un budget annexe de l’État ;

– la coexistence de frais financiers liés à un découvert à l’échelon national et de produits financiers significatifs (290 millions de francs en 1998) dans l’ensemble consolidé de la Mutualité sociale agricole. S’il est légitime que, dans le cadre d’une gestion responsable, les caisses de MSA puissent disposer, le cas échéant, de réserves financières placées, on pourrait toutefois s’interroger sur l’opportunité d’une gestion centralisée de trésorerie du régime agricole, dans laquelle les frais d’intermédiation seraient évités, chaque caisse et le budget annexe se voyant naturellement attribuer ou imputer les intérêts créditeurs ou débiteurs qui lui sont afférents.

      2.– L’étalement des cotisations des agriculteurs en difficulté

Le présent projet propose une diminution de 10 % des crédits destinés à l’étalement et la prise en charge des cotisations sociales des agriculteurs en difficulté, crédits qui passeraient de 100 à 90 millions de francs. Il s’agit, comme on le sait, de la dotation générale, répartie entre les départements, qui n’a pas pour objet de financer les mesures spécifiques liées à des crises sectorielles, qu’il serait difficile de provisionner en loi de finances initiale.

La justification de cette évolution que donne le ministère de l’Agriculture est l’arrivée à échéance du dispositif de report des cotisations des éleveurs de bovins établi en 1996 suite à la crise de la « vache folle » : la moitié des cotisations dues pour 1996 par les intéressés avaient en effet été reportées à 1999, ce qui entraînait un coût de portage annuel de l’ordre de 20 millions de francs jusqu’en 1999 inclus.

Par ailleurs, il est décidé d’abandonner à l’avenir les mesures de prise en charge des cotisations : les crédits seront réservés aux mesures de rééchelonnement, plus justifiées dans leur principe.

      3.– Les prestations maladie ne tirent pas toutes les conséquences de la « couverture maladie universelle »

En 1999, les dépenses d’assurance maladie (en métropole) devraient atteindre 32.473 millions de francs, en léger retrait par rapport à la loi de finances initiale pour 1999, qui prévoyait 32.619 millions de francs. Cette révision recouvre des évolutions de sens contraire :

– une révision à la hausse des dépenses de soins de ville, imputable aux prescriptions et, notamment, aux prescriptions hors médicament (pansements, orthopédie …), pour 282 millions de francs (+ 1,96 %) ;

– une légère révision à la hausse du poste médico-social ;

– une révision à la baisse des dépenses relatives aux établissements hospitaliers, hors dotation globale hospitalière (– 272 millions de francs) ;

– enfin, une prévision de régularisation de dotation globale hospitalière plus forte au profit du BAPSA (+ 505 millions de francs), ce qui réduit donc la participation du budget annexe aux dépenses hospitalières.

En 2000, les dépenses globales de maladie et de maternité, en métropole, atteindraient 32.874 millions de francs, en progression de 1,2 % sur les prévisions révisées pour 1999. En neutralisant l’effet lié aux régularisations de dotation globale hospitalière au profit du budget annexe, qui viennent en minoration de ses dépenses, on arriverait à un total de dépenses de 33.507 millions de francs en 2000, en très légère baisse
(– 0,1 %) par rapport à 1999.

Cette évaluation apparaît compatible avec l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (ONDAM) proposé par le projet de loi de financement de la sécurité sociale, soit + 2,5 % par rapport aux dépenses de maladie effectives de 1999. En effet, l’écart moyen entre les taux d’évolution des dépenses de maladie du régime agricole et du régime général a été, de 1996 à 1998, de 2,6 points ; le recul démographique du monde agricole explique bien sûr que les charges de maladie de son régime soient mieux maîtrisées que dans le régime général, même si le vieillissement de la population agricole limite cet effet.

L’ensemble des crédits du chapitre 46-01 du BAPSA, consacré aux prestations maladie-maternité-invalidité du régime, s’élèverait en 2000 à 33.341 millions de francs, somme à peine supérieure (+ 0,2 %) aux crédits 1999. Ce montant comprend, outre les dépenses effectuées en métropole, celles des départements d’outre-mer ainsi que, jusqu’en 1999, la contribution du régime agricole au financement du déficit de l’assurance personnelle.

Cette contribution, fixée à 210 millions de francs en 1999, disparaît dans le BAPSA 2000, ce qui en modifie le périmètre. Ce changement est une conséquence de la loi instituant la couverture maladie universelle (CMU), qui a remplacé l’assurance personnelle par une assurance universelle sur critère de résidence gérée par la Caisse nationale d’assurance maladie ; en contrepartie, celle-ci se verra affecter, mais seulement en 2001, l’intégralité de la taxe sur les polices d’assurance automobile. Actuellement, cette dernière est partagée entre les différents régimes maladie : la ressource correspondante pour le BAPSA, qui disparaîtra en 2001, s’élèverait en 2000 à 379 millions de francs.

Il convient également de s’interroger sur les autres incidences de la loi du 27 juillet 1999 sur le budget annexe. Il est clair que cette loi concerne principalement la protection complémentaire, dont les flux financiers, en l’état actuel du droit, n’ont pas à être retracés dans le budget annexe, ce qui pourrait d’ailleurs être contesté, mais votre Rapporteur y reviendra. La loi « CMU » a toutefois aussi des incidences sur le périmètre des régimes de base, dont certains sont explicitement pris en compte dans le BAPSA qui nous est proposé, on l’a vu, mais pas tous.

S’agissant du champ d’affiliation du régime agricole, la loi n’a rien changé : les critères existants d’affiliation sur la base de l’activité professionnelle n’ont pas été modifiés ; en outre, la MSA pourra continuer à gérer dans les conditions actuelles son « stock » d’assurés volontaires. On ne peut que s’en féliciter. Plus discutable, on l’a dit, est la décision prise de ne pas réduire les cotisations dues par les exploitants agricoles les plus modestes, en particulier les cotisations minimales forfaitaires.

Sur un point au moins, le champ des dépenses maladie du régime agricole devrait être élargi, sans que cette incidence, il est vrai limitée, ait été prise en compte dans les prévisions de dépenses du présent budget annexe : la loi a prévu l’accès aux prestations maladie nonobstant le non paiement des cotisations, ce qui devrait notamment conduire le régime agricole à réintégrer les exploitants qui ont été déchus de leurs droits pour ce motif. Ceux-ci représentent environ 1 % de l’effectif. Les charges du budget annexe devraient donc en être augmentées de plusieurs dizaines de millions de francs. Surtout, l’ouverture parallèle des mêmes droits aux mauvais payeurs et à ceux qui s’acquittent de leurs obligations pourrait être mal vécue par certains, notamment des assujettis aux cotisations minimales, qui sont justement des agriculteurs soit très modestes, soit en difficulté. On peut craindre que la suppression du mécanisme de la déchéance de droits ne soit perçue comme une incitation au non paiement des cotisations ; on pourrait s’interroger sur l’opportunité de lier de manière générale le versement des aides économiques au paiement régulier de ces cotisations.

      4.– L’allocation de remplacement

La forte revalorisation des crédits destinés aux allocations de remplacement des agricultrices enceintes, qui passeraient de 55 millions de francs en 1999 à 100 millions de francs en 2000, est la traduction des mesures de la loi d’orientation agricole :

– l’article 33 de celle-ci a supprimé le « ticket modérateur » de 10 % qui restait à la charge des intéressées ;

– les textes d’application devraient en outre porter de 8 à 16 semaines la durée maximale de versement de la prestation.

Compte tenu de ces deux mesures, qui entraînent une augmentation des coûts de la prestation par bénéficiaire, l’augmentation du nombre de femmes enceintes demandant l’allocation de remplacement, rendue plus attractive, que présupposent les crédits proposés pour 2000, est de l’ordre de 20 %. Rappelons en effet qu’actuellement, un tiers seulement des agricultrices enceintes demandent cette prestation (qui n’est pas une indemnité liée à la maternité, mais couvre les frais effectifs de remplacement : elle n’est demandée que si ce remplacement est souhaité).

      5.– Les prestations familiales sont sous–évaluées

Les crédits de prestations familiales proposés pour 2000 s’élèvent à 3.801 millions de francs, en diminution de 3,7% sur les crédits initiaux pour 1999. Cette évolution rend compte du recul rapide des effectifs de bénéficiaires.

Conformément à l’habitude, le financement de la majoration de l’allocation de rentrée scolaire (soit 164 millions de francs en 1999) n’est pas prévu dans le projet de BAPSA. Les années précédentes, cette option discutable était au moins en cohérence avec la pratique également en vigueur dans les projets de loi de financement de la sécurité sociale. On notera cependant que, cette année, la situation a changé à cet égard : d’une part le Gouvernement a pris, suite à la Conférence de la famille, l’engagement de pérenniser la majoration de l’allocation en l’intégrant progressivement à l’allocation de base ; d’autre part, dès cette année, dans les comptes de la sécurité sociale et du projet de loi de financement, les crédits correspondant à cette intégration partielle en 2000 sont prévus à hauteur de 2,5 milliards de francs, la charge de ce financement étant transférée de l’État à la Caisse nationale d’allocations familiales. Par cohérence, le BAPSA pour 2000 aurait dû intégrer dans ses crédits initiaux la part « régime agricole » de ce financement transféré, soit environ 60 millions de francs.

Par ailleurs, le BAPSA proposé ne tient pas compte non plus de l’incidence des améliorations de prestations inscrites dans le projet de loi de financement, notamment la revalorisation de 0,5%, et non 0,2%, de la base mensuelle des allocations familiales, qui pourraient représenter dans le régime agricole un coût de l’ordre de 20 millions de francs.

      6.– Les retraites agricoles sont également sous–évaluées

Il est difficile de commenter les crédits affectés dans le BAPSA 2000 aux prestations vieillesse du régime agricole. En effet, les crédits du chapitre 46-96, qui y est consacré, s’élèveront-ils à :

– 49.091 millions de francs, comme l’indique le fascicule « bleu » ?

– 50.141 millions de francs, après majoration de 1.200 millions de francs des dépenses de retraites contributives au titre de la mesure 2000 de revalorisation des petites retraites et diminution, en conséquence, de 150 millions de francs des dépenses de minimum vieillesse (d’où une augmentation globale de 1.050 millions de francs des prestations vieillesse) ?

– 50.091 millions de francs, soit + 1 milliard de francs, comme il résulte implicitement de la majoration identique du plafond des dépenses du budget annexe à l’article d’équilibre de la loi de finances ?

      a) La justification des crédits inscrits au « bleu »

Les crédits inscrits au « bleu », avant, donc, la mesure de revalorisation des retraites, s’élèvent à 49.091 millions de francs, en recul de 2,4 % sur les crédits initiaux pour 1999.

Cette prévision s’explique d’abord par un effet base : les évaluations pour 1999 ont été revues à la baisse d’environ 600 millions de francs ; cette révision, à son tour, tient à une réalisation 1998 inférieure de 221 millions de francs aux prévisions initiales ; elle rend compte, aussi, d’une révision à la baisse des dépenses de minimum vieillesse (incorporées aux dépenses du chapitre), supérieure à 200 millions de francs. Cette révision des dépenses relatives au minimum vieillesse est une conséquence directe de la mesure de revalorisation des retraites de 1999, qui a amélioré les retraites contributives : lors de la présentation de celle-ci, l’effet (pourtant certain) d’économie pour le FSV n’avait pas été mesuré, ce qui conduisait à surdimensionner les crédits…

Compte tenu de la révision à la baisse de l’évaluation des dépenses pour 1999 en prestations vieillesse, la prévision pour 2000 ressort seulement en baisse de 1,1 % par rapport à 1999.

Les facteurs de cette évolution seraient :

– une revalorisation indiciaire des pensions de 0,2 % en 2000, le « coup de pouce » supplémentaire de 0,3 % proposé par le projet de loi de financement n’étant pas pris en considération ;

– le surcoût lié à l’application en année pleine (sur quatre trimestres et non trois) de la mesure de revalorisation de 1999, soit 400 millions de francs ;

– la diminution rapide des effectifs de bénéficiaires de la retraite forfaitaire (– 3 %) ;

– le recul des dépenses de minimum vieillesse.

Le « coup de pouce » supplémentaire sur les retraites et, plus encore, sur le minimum vieillesse, qui devrait finalement être augmenté de 1%, entraînera des surcoûts non budgétés significatifs (supérieurs à 100 millions de francs).

      b) Les mesures de revalorisation annoncées pour 2000

Les mesures qui ont été arbitrées (et qui font l’objet d’amendements du Gouvernement) s’inscrivent dans le prolongement exact de celles de l’année dernière : les minima de pensions pour carrière pleine qui avaient été définis pour les différentes catégories sont relevés de 200 francs par mois. S’y ajoute, comme l’année passée et pour les mêmes raisons (l’extrême complexité des mesures superposées depuis six ans), une mesure d’« harmonisation » destinée à rattraper certaines injustices.

Il y a toutefois une innovation que salue votre Rapporteur : il est proposé d’étendre aux « unipensionnés » ayant cotisé 27,5 à 32 ans le bénéfice des mesures, jusque là réservées aux carrières longues (au moins 32,5 ans de cotisations). Cela permettra de réparer certaines injustices, notamment vis-à-vis de retraitées âgées, anciennement conjointes sans statut, qui n’avaient pas acquis le nombre d’annuités requis tout simplement du fait de l’assujettissement tardif des conjoints aux cotisations vieillesse.

Cela constitue, surtout, un premier pas vers la prise en compte, pour l’attribution des revalorisations des retraites, des autres avantages vieillesse : cette extension sera en effet réservée à ceux qui n’en ont pas, les « unipensionnés ». Votre Rapporteur approuve cette démarche, mais considère que l’on pourrait aller plus loin : plus de la moitié des retraités agricoles sont des « polypensionnés » bénéficiant de retraites de plusieurs régimes et dont les revenus moyens sont nettement supérieurs à ceux des unipensionnés de l’agriculture ; nombre de ces polypensionnés ont été des pluriactifs « simultanés » et non « successifs » et ont donc pu cotiser assez longtemps au régime agricole pour entrer dans le champ des mesures de revalorisation. Il serait donc légitime de n’accorder ces majorations qu’au regard du montant global des avantages de retraite (en droits propres) des bénéficiaires, afin, à enveloppe constante, de pouvoir aller plus vite et plus loin pour ceux qui en ont vraiment besoin. Votre Rapporteur considère que, pour les anciens chefs d’exploitation, l’objectif à atteindre reste les 75 % du SMIC net, soit 4.000 francs par mois ; cet objectif pourrait probablement être atteint, pour les actuels retraités, en deux années de plus, en affectant un bon milliard de francs annuel supplémentaire (correspondant à la baisse spontanée des charges du fait de l’évolution démographique) aux retraites agricoles. Pour les futurs retraités, le régime complémentaire obligatoire qui est envisagé prendrait le relais, en versant aux intéressés des prestations à due concurrence des droits qu’ils auraient acquis grâce à leurs cotisations.

Le coût global « brut » des mesures proposées par le Gouvernement est de 1,6 milliard de francs en année pleine, donc 1,2 milliard de francs en première année (puisque les majorations ne s’appliquent pas aux pensions versées au premier trimestre à terme échu). Le coût « net », après défalcation des économies sur le minimum vieillesse (150 millions de francs), est évalué à 1.050 millions de francs en 2000.

LES MESURES DE REVALORISATION POUR 2000

 

Pension initiale
annuelle

Pension finale
annuelle

Gain annuel

Effectif bénéficiaire
(en milliers)

Coût brut en année pleine

(en millions de francs)

Coût brut en 2000 (avec décalage)

(en millions de francs)

Économie sur le FSV

(en millions de francs)

Coût net en 2000

(en millions de francs)

 

En
francs 1999

En
francs 2000

En
francs 1999

En
francs 2000

En
francs 1999

En
francs 2000

         

Chefs d’exploitation

36.000

36.180

38.400

38.592

2.400

2.412

253

431

323

39

284

Aides familiaux

30.000

30.088

32.400

32.562

2.400

2.474

29

57

43

8

35

Conjoints

26.400

26.488

28.800

28.944

2.400

2.456

267

570

424

41

383

Veuves

33.600

33.719

36.000

36.180

2.400

2.461

191

415

311

50

261

Extension des mesures aux carrières de 27,5 à 32 ans

           

36

117

88

11

77

Harmonisation de carrières

           

5

11

8

1

7

Total

           

781

1.601

1.197

150

1.047

Cette mesure s’inscrit dans la continuité de celles adoptées depuis 1994, rappelées dans le tableau ci-dessous : on voit bien que l’effort annuel consenti par les gouvernements successifs depuis 1994 est voisin d’un milliard de francs.

COUT DES MESURES ANTÉRIEURES DE REVALORISATION

(en millions de francs)

 

1998

1999

2000

 

Coût brut

Coût net

Coût brut

Coût net

Coût brut

Coût net

Mesure « petites retraites » de 1994

461

323

445

312

431

302

Mesure « veuves » de la loi de modernisation 1995

2.619

1.929

2.668

1.991

2.700

2.020

Loi de finances pour 1997

602

486

760

614

820

645

Loi de finances pour 1998

760

680

1.022

858

1.022

858

Loi de finances pour 1999 et loi d’orientation

1.331

1.119

1.778

1.358

Total

4.442

3.418

6.226

4.894

6.751

5.183

Votre Rapporteur souhaite enfin évoquer un problème très concret où l’application de la réglementation conduit à des injustices évidentes : comme on le sait, le calcul des retraites prend en compte des trimestres validés gratuitement pour les femmes ayant eu des enfants ; lorsque ces femmes ont acquis des droits dans plusieurs régimes (pluriactives), cette validation de trimestres n’est opérée pour le calcul de la pension que dans un seul régime, et pas nécessairement dans le régime le plus avantageux. Il peut arriver qu’une agricultrice qui n’a pas acquis de droits significatifs au titre du régime général mais y a été affiliée quelques années pour un emploi salarié tout à fait secondaire, voie la somme de ses retraites réduite de manière très importante, parce que les règles actuelles imposent le calcul des trimestres validés dans le cadre de ses droits au régime général plutôt qu’au régime agricole. Ce problème de coordination entre régimes est très complexe. Il est nécessaire que le Gouvernement l’étudie.

    C.– LE BAPSA, UN EXERCICE INUTILE ?

Cela a-t-il encore un sens de débattre rituellement, dans le cadre de la loi de finances annuelle, du régime de protection sociale des agriculteurs tel qu’il est retracé dans le BAPSA ? Cette question, également rituelle depuis l’instauration en 1996 des lois de financement de la sécurité sociale, peut être posée à nouveau au regard du projet de BAPSA pour 2000.

Le BAPSA constitue en effet une curiosité, si l’on peut dire, au regard des dispositions de l’ordonnance organique du 2 janvier 1959 relative aux lois de finances, qui a créé la procédure des « budgets annexes » afin de pouvoir individualiser les produits et les charges afférents aux activités commerciales de l’État, pas de retracer un régime de sécurité sociale…

Votre Rapporteur ne peut, par ailleurs, que rappeler une réalité : l’existence ou non d’un budget annexe retraçant le régime de sécurité sociale des agriculteurs n’a rigoureusement aucune incidence, ni sur la spécificité de ce régime, géré par la MSA, ni sur les conditions de son équilibre.

En effet, doit-on rappeler le nombre des régimes spéciaux existants, parmi lesquels seul le régime agricole est retracé dans le cadre d’un budget annexe de l’État ? Le BAPSA n’est qu’un compte reflet, sans substance, dont l’existence n’est pas nécessaire à celle d’un régime spécifique géré par la MSA.

De même, il convient de rappeler qu’outre le régime agricole, de nombreux régimes spéciaux structurellement en difficulté (et non retracés par un budget annexe) bénéficient de ressources d’équilibre provenant de subventions budgétaires ou de produits fiscaux : il en est ainsi des régimes des cheminots, des mineurs, des marins, des ouvriers d’État (subventionnés par l’État), ainsi que des régimes des indépendants (dont la contribution sociale de solidarité des sociétés assure l’équilibre). Il va de soi qu’une démarche qui conduirait à la suppression du budget annexe devrait s’accompagner de garanties sur le financement pérenne du régime agricole.

L’individualisation du débat sur le régime de protection sociale de telle ou telle catégorie professionnelle n’aurait de justification que si les régimes de sécurité sociale disposaient d’une véritable autonomie grâce à des mécanismes de responsabilisation : il s’agirait, par exemple, d’autoriser des remises de cotisations aux régimes dans lesquels les dépenses de maladie seraient mieux maîtrisées. On peut le regretter, mais telle n’est pas l’évolution actuelle de la sécurité sociale : bien au contraire, la parité de cotisations, la parité de prestations, la rupture du lien entre cotisations et prestations, la multiplication des transferts financiers entre régimes et la ponction systématique des réserves que certains avaient pu constituer sont devenues la règle.

Par ailleurs, deux arguments traditionnellement évoqués pour justifier l’existence du BAPSA ont perdu de leur portée depuis quelques années. Le premier tenait à la nature des cotisations sociales agricoles jusqu’en 1990 : celles-ci constituaient une sorte d’impôt de répartition dont le montant global était de fait négocié annuellement entre l’État et la profession au regard, notamment, de l’évolution de l’effort contributif des agriculteurs tel que mesuré implicitement dans le BAPSA. Le passage progressif à des cotisations assises sur les revenus professionnels et déterminées par des taux de « parité » (avec le régime général) a mis fin à cette procédure.

Un autre argument traditionnel en faveur du BAPSA résidait dans la publicité et le contrôle démocratique que permettait l’organisation d’un débat parlementaire annuel sur les comptes d’au moins un régime de sécurité sociale, sinon sur l’ensemble de la sécurité sociale. La création des lois de financement de la sécurité sociale en 1996 a évidemment changé la donne, et le BAPSA paraît désormais faire double emploi avec la loi de financement, d’autant que la cohérence des deux exercices n’est toujours pas assurée…

Si encore le budget annuel donnait une vision sincère et exhaustive des régimes de sécurité sociale des exploitants agricoles, cela constituerait un bon motif de le conserver, mais c’est de moins en moins le cas...

      1.– Le BAPSA ne tient pas compte de toutes les mesures décidées

Si l’on regroupe toutes les mesures prises ou proposées dans différents cadres législatifs, évoquées supra, qui sont susceptibles d’avoir une incidence sur le BAPSA, et que l’on tente de mesurer leur prise en compte dans celui-ci, on arrive à des résultats inégaux :

– la loi d’orientation agricole et celle instituant la couverture maladie universelle (CMU) sont prises en compte pour leurs mesures chiffrables (par exemple l’institution de la retraite proportionnelle des conjoints collaborateurs, l’amélioration de l’allocation de remplacement, la suppression de la répartition du déficit de l’assurance personnelle), mais beaucoup de ces mesures n’ont pas réellement été « chiffrées », alors que leur incidence pourrait être considérable, en particulier dans le cas de la loi « CMU » ;

– un dispositif réglementaire tel que celui de la « modulation » des aides communautaires n’a pas été intégré dans l’évaluation de l’assiette des cotisations sociales des agriculteurs ;

– le BAPSA 2000 a été construit sans prendre en considération l’incidence, il est vrai modérée, des mesures de la loi de financement (la réforme de la répartition de la CSG maladie, qui apporterait 60 à 90 millions de francs supplémentaires au budget annexe ; le « coup de pouce » aux pensions et aux prestations familiales, qui accroîtrait les charges de plus de 100 millions de francs ; les diverses mesures relatives aux prestations familiales ; l’incidence de l’institution d’une taxe sur les pesticides sur le revenu agricole et donc l’assiette des cotisations…).

Il n’est pas besoin, enfin, de rappeler que le budget annexe présenté dans l’annexe « bleue » ne tient pas compte de la nouvelle revalorisation des retraites agricoles dont le financement a été partiellement prévu par voie d’amendement.

Recherche d’effets d’annonce, conduisant à retarder la présentation de certaines mesures, manque d’évaluation préalable, rendant impossible le « chiffrage » dans d’autres cas, et enfin gestion impossible du calendrier, pour ce qui est de la cohérence entre lois de finances et de financement de la sécurité sociale, expliquent le défaut de prise en compte de diverses mesures dans le BAPSA.

Le tableau ci-après constitue une tentative d’évaluation et de récapitulation de tous les « oublis » du projet de BAPSA présenté dans le « bleu » ; on voit que leur incidence globale négative sur le solde de celui-ci (on pourrait aussi dire « la sous-évaluation de la subvention d’équilibre du budget général ») pourrait représenter plus de 600 millions de francs ; encore n’y est-il pas tenu compte de la probable incidence du volet assurance complémentaire de la loi sur la couverture maladie universelle, qui n’a pas en principe de traduction dans le budget annexe, mais en aura dans les faits, votre Rapporteur en est convaincu (voir la seconde partie du présent rapport).

INCIDENCE DES MESURES NON PRISES EN COMPTE DANS LE PROJET DE BAPSA 2000

(en millions de francs)

Recettes

Dépenses

Cotisations :

 

Réintégration des déchus en assurance maladie (CMU)

+ 50

– modulation des aides PAC

– 30

Prestations familiales :

 

– taxation des phytosanitaires

    (loi de financement de la sécurité sociale)

– 15

– budgétisation partielle de la majoration de l’allocation de rentrée scolaire (loi de financement)

+ 60

– élargissement de l’exonération pour les jeunes agriculteurs

    (loi de financement)

– 75

– relèvement de 0,5 % de la BMAF et des limites d’âge de certaines prestations (loi de financement)

+ 20

Surévaluation de la ressource TVA par rapport aux prévisions générales sur la TVA

– 230

Prestations vieillesse :

 

Réforme de la répartition de la CSG maladie

(loi de financement)

+ 90

– relèvement général de 0,5 % des prestations (loi de financement)

+ 90

C3S (amendement à la loi de finances)

+ 1.000

– mesure de revalorisation des retraites en 2000 (coût brut)

+ 1.200

Remboursement du FSV :

     

– revalorisation 2000 des retraites

– 150

– économies du FSV (suite à la revalorisation des retraites)

– 150

– majoration de 1 % du minimum vieillesse (loi de financement)

+ 20

– majoration de 1 % du minimum vieillesse (loi de financement)

+ 20

Total

+ 610

Total

+ 1.290

Dégradation du solde :

– 680

   

      2.– Le BAPSA est de moins en moins exhaustif

Par ailleurs, le budget annexe rend compte d’une manière de plus en plus incomplète de la protection sociale des salariés agricoles.

Depuis toujours, le budget annexe ne retrace pas :

– les dépenses de gestion et d’action sanitaire et sociale du régime agricole, ainsi que leur financement par les cotisations « complémentaires » (évaluées à 3.159 millions de francs pour 2000) ;

– certaines dépenses de prestations pourtant gérées par la branche famille du régime, mais financées par l’État, par exemple celles afférentes au RMI versé à des non salariés agricoles, qui ont atteint 171 millions de francs en 1998, alors que d’autres prestations de même nature et également financées par l’État sont retracées (par exemple l’allocation aux adultes handicapés) ;

– les produits et charges de l’assurance contre les accidents du travail et de la vie privée des non salariés agricoles (AAEXA) créée en 1966, alors que cette assurance est à un certain degré comparable à l’assurance maladie du régime agricole : obligation d’assurance, mais choix de l’assureur. En 1997, globalement, les primes perçues se seraient élevées à 1.062 millions de francs et les prestations versées à 502 millions de francs.

Le BAPSA ne retrace pas non plus, ni dans ses recettes, ni dans ses dépenses, le montant des majorations de pensions pour enfants (évalué à 2.129 millions de francs en 2000), le Conseil constitutionnel ayant considéré qu’il était contraire au principe d’universalité budgétaire qu’un budget annexe retraçât une recette, en l’espèce un remboursement du FSV, par définition corrélée à une dépense (décision n° 94–351 DC du 29 décembre 1994 sur la loi de finances pour 1995) ; le budget annexe retrace toujours, en revanche, et donc au mépris du principe d’universalité, les dépenses de « minimum vieillesse » et le remboursement afférent du FSV, ou bien encore le versement de la CNAF, qui présente le même caractère, puisqu’il couvre précisément l’écart entre dépenses et cotisations de la branche famille. Cette application du principe d’universalité constitue une illustration supplémentaire de l’inadaptation du statut de budget annexe à la gestion d’un régime de sécurité sociale.

D’autres évolutions récentes ont continué à rendre le BAPSA de moins en moins représentatif des comptes réels du régime social des agriculteurs :

– il en est ainsi des transferts successifs de cotisations sociales sur la CSG, car le budget annexe ne retrace ni les CSG affectées à la branche famille et au FSV, ni réellement la CSG affectée à la branche maladie ; il retrace seulement la somme attribuée au régime agricole sur le produit de cette dernière, ce qui ne rend pas compte de la CSG maladie effectivement prélevée sur les revenus agricoles et les retraites agricoles ;

– la loi instituant la couverture maladie universelle tend enfin à brouiller la frontière traditionnelle, en assurance maladie, entre assurance de base obligatoire et assurance complémentaire facultative et concurrentielle, puisqu’elle établit pour les personnes démunies un régime complémentaire obligatoire que peuvent gérer soit les assureurs complémentaires habituels, soit les organismes gestionnaire des régimes de base, en l’espèce la MSA.

Assurément, selon la définition légale en vigueur des dépenses retracées dans le BAPSA, les prestations de couverture complémentaire « CMU » n’ont pas à être intégrées au budget annexe, non plus que leur financement. Mais on pourrait soutenir que la logique du BAPSA voudrait cette intégration : l’objet de celui-ci est bien de présenter, d’une part l’ensemble des prestations légales obligatoires bénéficiant aux non salariés agricoles, d’autre part, leur financement, qui repose largement sur la solidarité du contribuable et des autres régimes de sécurité sociale, vu la situation démographique du régime agricole. Or, la loi « CMU » a bien institué une nouvelle forme de prestations légales obligatoires, quand bien même il s’agit de prestations complémentaires, financées par la solidarité : en effet, le fonds de financement de la couverture complémentaire « CMU » est alimenté par l’État et une ressource fiscale assise sur les assureurs complémentaires.

      3.– Les documents destinés à l’information du Parlement sont imprécis

Votre Rapporteur souhaite enfin évoquer l’imprécision de certains documents destinés à l’information du Parlement et prévus, à cette fin, par les dispositions organiques relatives aux lois de finances et de financement de la sécurité sociale. On n’en prendra que deux exemples :

– l’annexe d au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000, qui retrace les ressources des régimes de sécurité sociale, inscrit « 0 » à la ligne C3S affectée au régime agricole, en 1999 comme en 2000 : le milliard de francs versé au régime en 1999 a apparemment fait l’objet d’une erreur d’imputation… quant au milliard de francs prévu en 2000, il résulte, comme on le sait, d’un amendement postérieur au dépôt du projet de loi de financement, d’ailleurs voté dans le cadre de la loi de finances et même pas transposé, en première lecture, dans les prévisions financières de la loi de sécurité sociale ;

– le fascicule annexé « bleu » relatif au BAPSA 2000, dans la présentation des mesures de crédits du titre IV (pages 20 et 21), ne décompose pas réellement les ajustements opérés sur le chapitre 46–96, le plus gros du budget annexe (49 milliards de francs) puisqu’il est consacré aux retraites agricoles : n’y sont pas identifiés, en particulier, l’incidence de la revalorisation indiciaire des retraites en 2000, ni le surcoût de l’application en année pleine de la revalorisation des petites retraites de 1999 (soit, quand même, 400 millions de francs). Sans oublier, bien sûr, la non inscription de la revalorisation décidée…

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II.– LA PROTECTION SOCIALE DES AGRICULTEURS : FORCES ET FAIBLESSES DE LA MUTUALITÉ SOCIALE AGRICOLE

Le champ étroit du BAPSA ne couvre, on l’a dit, ni les recettes et charges de gestion du régime agricole, ni l’assurance accidents du travail des exploitants agricoles, ni les garanties complémentaires offertes dans les différentes branches aux agriculteurs, qui, avec la loi sur la couverture maladie universelle, ont cessé, dans un cas au moins, d’être intégralement facultatives.

Souhaitant élargir son propos, votre Rapporteur spécial a procédé cette année au contrôle sur place, dans le cadre de ses prérogatives, de cinq caisses de Mutualité sociale agricole (MSA) : celles de Moselle, des Alpes maritimes, du Puy de Dôme, du Morbihan et enfin de Corse. Ces contrôles ont privilégié plusieurs thèmes : l’implication, très développée pour un organisme gérant par ailleurs un régime obligatoire de base de sécurité sociale, de la MSA dans des activités concurrentielles ; plus spécifiquement, la présence des caisses de MSA dans l’assurance complémentaire maladie et les conséquences de l’instauration de la couverture maladie universelle, ainsi que les perspectives d’évolution de l’assurance accidents du travail des exploitants agricoles ; les perspectives d’établissement d’un régime complémentaire obligatoire de retraite ; les obstacles au nécessaire regroupement des caisses ; la gestion et le contrôle par la MSA des immatriculations, de l’assiette et du recouvrement des cotisations, ainsi que des prestations.

    A.– LE DÉVELOPPEMENT DES ACTIVITÉS CONCURRENTIELLES DE LA MUTUALITÉ SOCIALE AGRICOLE

La Mutualité sociale agricole se trouve dans une situation assez particulière pour un organisme de sécurité sociale :

– à la différence des caisses du régime général, spécialisées par branche, mais aussi de la plupart des caisses des régimes spéciaux, elle gère ou peut gérer l’ensemble des risques de sécurité sociale (vieillesse, maladie, famille et accidents du travail) des salariés et non salariés agricoles ;

– à la différence, là aussi, de la plupart des caisses de sécurité sociale des autres catégories de travailleurs, elle n’a pas toujours le monopole légal de la gestion des risques, mais est en concurrence sur celle des risques maladie et accidents du travail des non salariés agricoles. S’agissant de l’assurance maladie, cette concurrence, assurée principalement par les assureurs privés regroupés dans le GAMEX, est résiduelle (le GAMEX ne gère plus que 8,5 % des effectifs et ce sont essentiellement des retraités) ; il s’agit de toute façon d’une branche où cotisations et prestations sont définies par la loi et le règlement ; cette « concurrence » n’a donc guère de portée. S’agissant en revanche des accidents du travail des non salariés agricoles, sur lesquels on reviendra, on est en présence d’un vrai régime concurrentiel, où les primes sont libres, dans lequel la MSA est un acteur minoritaire ;

– enfin, la MSA a développé des activités non négligeables dans le champ des garanties complémentaires facultatives et concurrentielles, ainsi que des prestations de service.

Dans les caisses visitées par votre Rapporteur, le produit des activités annexes représente entre moins de 4 % (en Corse) et près de 13 % (dans le Puy de Dôme) des recettes du budget propre de ces caisses (qui couvre leurs frais de gestion, de médecine conseil et d’action sanitaire et sociale ; comme on le sait, les prestations sociales légales et les cotisations « techniques » sont, certes, retracées dans les comptes des caisses, mais gérées à l’échelon central, qui couvre le différentiel, pour chaque caisse, entre les unes et les autres).

Ces recettes peuvent provenir, principalement, de trois sources :

– la rémunération du recouvrement de certains prélèvements pour le compte de tiers, notamment les cotisations de retraite complémentaire et d’assurance chômage des salariés agricoles ;

– l’offre de produits complémentaires en assurance maladie ou de l’assurance de base accidents du travail ;

– les prestations de services aux assureurs complémentaires en maladie, pour lesquels les caisses de MSA peuvent opérer directement le décompte ou auxquels elles peuvent vendre des images de décompte. Votre Rapporteur a constaté sur ce type de prestations une grande variété de situations entre les caisses, dans la nature des services offerts (décompte ou image), les modes de rémunération (en pourcentage des prestations maladie décomptées ou par dossier) et les tarifs, le nombre d’assureurs complémentaires concernés (à l’origine, seul Groupama l’était dans l’ensemble des caisses), même si le jeu de la concurrence et l’obligation pour les caisses de s’y prêter conduiront inévitablement à une large harmonisation.

Le statut juridique et fiscal des ressources et des activités concurrentielles comporte actuellement des zones d’ombre.

    B.– LA NÉCÉSSITÉ DE CLARIFIER LE STATUT DES ACTIVITÉS CONCURRENTIELLES DE LA MSA

On peut s’interroger tout autant sur le champ des activités concurrentielles, ouvertes à la MSA au regard du droit national et communautaire que sur leur statut fiscal.

      1.– Quelles activités concurrentielles peuvent développer les caisses de MSA ?

En règle générale, afin de limiter le mélange des genres, source de distorsions de concurrence, on doit choisir, pour la gestion de la protection sociale d’une catégorie de personnes, entre deux modèles : soit on confie à un (ou plusieurs) organismes le monopole légal de gérer les prestations obligatoires de sécurité sociale, en leur interdisant d’intervenir dans le champ concurrentiel des prestations facultatives complémentaires ; soit on organise une concurrence même pour la gestion des prestations obligatoires, la loi et le règlement les définissant naturellement, ainsi qu’éventuellement les cotisations.

La MSA a le monopole de la gestion de la plupart des branches des régimes obligatoires des salariés et des non salariés agricoles et peut en outre proposer à ses affiliés des garanties complémentaires, au moins en assurance maladie. C’est naturellement une situation avantageuse, car, pour un organisme qui gère déjà la couverture sociale de base d’une population donnée, la gestion de prestations complémentaires pour celle-ci représente seulement un coût marginal.

Du point de vue du droit national, le rattachement de la MSA aux dispositions du code de la mutualité (opéré à l’initiative, notamment, de votre Rapporteur, par l’article 49 de la loi d’orientation agricole) consolide certainement sa capacité à offrir des produits d’assurance complémentaire, en même temps qu’il donne un fondement incontestable aux cotisations obligatoires de base. La référence antérieure au code du travail, qui assimilait la Mutualité à un syndicat, justifiait évidemment peu, ni de la gestion d’un régime obligatoire de sécurité sociale, ni d’activités mutualistes facultatives…

Il reste le problème du droit de la concurrence, d’origine essentiellement communautaire. Son intervention a été illustrée par l’affaire « COREVA » : la condamnation par le Conseil d’État du régime complémentaire facultatif de retraite par capitalisation créé en 1988 (CE, 8 novembre 1996, FFSA c/CCMSA), que gérait la seule MSA, a conduit le législateur à ouvrir à la concurrence la possibilité d’offrir ce type de produit et à en écarter la MSA (loi n° 97-1051 du 18 novembre 1997 d’orientation sur la pêche maritime et les cultures marines).

On pourrait se demander si le rattachement explicite de la MSA au code de la mutualité opéré cette année en loi d’orientation n’a pas pour conséquence d’autoriser à nouveau celle-ci à offrir des produits de type COREVA, puisque la loi de 1997 mentionne les contrats de groupe prévus par le code de la mutualité.

La question fondamentale est cependant celle de l’interprétation de l’« arrêt COREVA ». Le monopole de gestion établi en 1988 au profit de la MSA a-t-il été cassé seulement parce que c’était un monopole fiscal (évidemment, les agriculteurs pouvaient contracter des assurances vie ; le privilège de COREVA, c’était que seules ses primes étaient déductibles de l’impôt), ou bien, plus généralement, à cause de la distorsion de concurrence que représentait l’intervention sur le marché complémentaire concurrentiel de l’organisme gérant le régime de base, avec tous les avantages liés à celui-ci : réseau de distribution déjà constitué et financé par les prélèvements obligatoires ; fichier de la population concernée ? D’une réponse claire à cette interrogation dépend l’avenir des activités d’assurance concurrentielle de la MSA, que ce soit en vieillesse, en maladie ou en accidents du travail.

      2.– Quel statut fiscal pour les activités concurrentielles de la MSA ?

A l’heure actuelle, les caisses de MSA ne sont assujetties aux « impôts commerciaux » (impôt sur les sociétés, taxe professionnelle et TVA) que sur leurs produits de placement (prélèvement libératoire).

Cependant, il est probable qu’elles doivent à terme se préparer à l’assujettissement à tout ou partie de ces impôts de leurs ressources tirées de prestations de services et de leurs activités exercées dans un cadre concurrentiel, ne serait-ce que par égalité de traitement avec les assureurs privés concurrents.

Dans le cadre du processus de remise en ordre de la fiscalité des associations, certaines caisses qui ont développé des associations de médecine du travail offrant des prestations au-delà du champ des ressortissants du régime agricole sont déjà confrontées à cette inévitable évolution fiscale. Demain, c’est en fait l’ensemble du monde mutualiste, y compris le MSA, qui le sera pour ses activités concurrentielles.

    C.– LES INCIDENCES DU VOLET COMPLÉMENTAIRE DE LA « COUVERTURE MALADIE UNIVERSELLE »

La loi du 27 juillet 1999 instituant la couverture maladie universelle (CMU) entrera en vigueur le 1er janvier 2000 pour l’essentiel de ses dispositions et les enjeux sont considérables pour les caisses de MSA.

Dans ses déplacements, votre Rapporteur a rencontré des responsables de caisses inquiets, mais surtout très peu informés, seules deux caisses ayant cherché à évaluer l’incidence de certaines dispositions du texte dans leur ressort. Votre Rapporteur concède bien volontiers que cette insuffisance d’évaluation ne peut être reprochée aux caisses de MSA, ni même à la Caisse centrale, compte tenu des contradictions du texte qui a été adopté et du retard pris dans la publication des textes d’application.

Les problèmes que pose le volet « couverture de base » du texte ont été indiqués supra : la non prise en compte dans le projet de BAPSA du coût de la réintégration des déchus de droits ; le sentiment d’injustice que pourraient ressentir les agriculteurs assujettis aux cotisations minimales forfaitaires.

Cependant, c’est sur le volet « couverture complémentaire » que les incertitudes et les inquiétudes sont les plus grandes, et pas seulement parce que sa nature obligatoire brouille la frontière traditionnelle entre assurance de base obligatoire et assurance complémentaire facultative.

Une première incertitude lourde concerne le nombre de bénéficiaires potentiels du dispositif parmi les ressortissants du régime agricole. On a pu parler, pour les exploitants et leurs ayants droit, comme pour les retraités, de 10 % à 30 % des effectifs, soit, pour 2,33 millions de bénéficiaires de l’assurance maladie agricole en 1999, 200.000 à 700.000 personnes. L’incertitude très grande qui règne non seulement sur la connaissance des revenus effectifs des ménages d’agriculteurs ou de retraités agricoles (problème des revenus des conjoints, des polypensionnés, etc), mais aussi sur les seuils de revenus qui seront finalement retenus, ne permet guère d’affiner ces chiffres. On rappellera donc seulement deux faits : d’une part, 781.000 retraités agricoles bénéficieront en 2000 de majorations de pensions qui ne les amèneront même pas au minimum vieillesse (et les intéressés ont eu des « carrières longues » : le nombre de « polypensionnés » parmi eux est relativement limité) ; d’autre part, 25 % des 605.000 cotisants de l’AMEXA en 1998, soit 151.000 exploitants, étaient des agriculteurs imposés au forfait (ceux imposés au réel n’accéderaient à la CMU que sur dérogation) sur une base inférieure à 800 fois le SMIC horaire (32.000 francs environ).

La seconde incertitude porte sur le coût moyen du « panier de soins » complémentaire couvert gratuitement dans le cadre de la CMU et comprenant la prise en charge du « ticket modérateur », du forfait hospitalier et de dépassements en dentisterie et en lunetterie. On sait que le « fonds de financement de la protection complémentaire de la couverture universelle du risque maladie », fonds ad hoc créé par la loi, financera à hauteur de 1.500 francs chaque bénéficiaire de la CMU qui s’adressera à un assureur privé ou mutualiste. Le contenu du panier n’étant pas encore défini réglementairement, il n’est pas possible de porter un jugement définitif sur ce montant ; toutefois, les assureurs apparaissent de plus en plus convaincus que le coût moyen du panier pourrait être de 2.000 à 2.200 francs, donc très supérieur aux 1.500 francs forfaitairement offerts.

La caisse du Morbihan a procédé à une simulation sur la base d’un produit complémentaire qu’elle offre, baptisé « Confort santé + », dont les garanties seraient très proches du « panier CMU », tel qu’il peut être envisagé. Sur l’échantillon étudié, le montant moyen de prestations dépasse 2.000 francs en 1998 et atteint 1.050 francs au premier semestre 1999 (sur six mois), et il faudrait y ajouter les frais de gestion pour parvenir au coût réel par adhérent ; dans une analyse par classe d’âge, la dépense moyenne annuelle ne serait inférieure à 1.500 francs que pour les moins de 50 ans.

Que se passera-t-il si le « panier CMU » apparaît effectivement nettement plus coûteux que le forfait de 1.500 francs ? Les assureurs privés et les mutualistes, qui n’y sont pas contraints, se refuseront à être prestataires de la protection complémentaire CMU. Leurs représentants rencontrés par votre Rapporteur ne cachent pas leur extrême prudence sur ce dossier. Les bénéficiaires de la CMU devront donc s’adresser à leur organisme assureur de base, notamment la MSA (ou le GAMEX), que la loi obligera à les prendre en charge.

La loi dispose également que le fonds de financement cité supra versera aux organismes assureurs de base gérant la protection complémentaire de certains de leurs affiliés « un montant égal aux dépenses résultant » de celle-ci. Les organismes de sécurité sociale sont donc mieux traités que les assureurs privés et mutualistes et la prise en charge complémentaire de leurs affiliés bénéficiant de la CMU ne devrait en principe entraîner que des surcoûts de gestion. Cependant, il convient de rappeler que le fonds CMU, alimenté par une contribution des assureurs complémentaires et une subvention budgétaire, a été « calibré » à 9 milliards de francs (1.500 francs multipliés par 6 millions de bénéficiaires) ; si le coût du « panier » explosait, il faudrait un complément de plusieurs milliards de francs en cours d’année. L’expérience des versements de l’État aux régimes de sécurité sociale peut donner quelques craintes à cet égard, si l’on pense, par exemple, à la majoration de l’allocation de rentrée scolaire : tous les ans, cette majoration, décidément bien prévisible, est versée par les caisses d’allocations familiales en septembre et son remboursement par l’État, inscrit dans un décret d’avance ou la loi de finances rectificative de fin d’année, n’est souvent effectué qu’en hiver (le 22 janvier 1999 pour la majoration de 1998). On peut donc craindre que les caisses d’assurance maladie, la MSA et le GAMEX, ou le BAPSA, ne supportent la charge du surcoût du « panier » ou au moins un décalage de trésorerie.

    D.– LA PERSPECTIVE D’UN RÉGIME COMPLÉMENTAIRE OBLIGATOIRE DE RETRAITE

L’article 3 de la loi d’orientation prévoit que le Gouvernement doit remettre au Parlement, dans les trois mois suivant la publication de cette loi, un rapport sur les retraites agricoles, qui abordera en particulier le thème de l’éventuelle instauration d’un régime complémentaire obligatoire. L’échéance du dix octobre n’a pas été respectée, ce qui tient sans doute à la grande complexité du dossier.

Sur cette question votre Rapporteur tient à souligner trois faits :

– compte tenu de l’évolution démographique du monde agricole, un régime complémentaire qui distribuerait dès sa création des prestations supplémentaires à des retraités qui n’y auraient jamais cotisé ne serait pas viable en l’absence d’une importante subvention de l’État ;

– or, il n’est pas réaliste d’espérer une telle participation de l’État quand celui-ci ne subventionne pas, de manière générale, les régimes complémentaires existants ;

– enfin, la situation économique de l’agriculture ne permet pas d’imposer une nouvelle cotisation obligatoire d’un niveau élevé.

Au regard de ces réflexions, on peut estimer qu’un régime complémentaire obligatoire (dont la gestion serait logiquement confiée à la MSA), destiné à porter à l’avenir aux alentours de 4.000 francs la retraite minimale d’un chef d’exploitation à carrière longue, devrait reposer sur un mécanisme de « répartition provisionnée » (les cotisations versées les premières années sans dépenses significatives de prestations étant mises en réserve) et un taux de cotisation obligatoire de l’ordre de 2 %, quitte à prévoir la liberté pour les assujettis de tripler ou quadrupler ce taux. L’incitation financière serait assurée par la déductibilité fiscale et sociale des cotisations, qui représenterait indirectement la participation de l’État.

    E.– LES ACCIDENTS DU TRAVAIL DES EXPLOITANTS AGRICOLES

Depuis la loi (n° 66-950) du 22 décembre 1966, les non salariés agricoles sont obligés de s’assurer contre les accidents du travail et de la vie privée (auparavant, il n’existait de régime légal, en la matière, qu’en Alsace – Moselle : voir infra). Ils contractent cette assurance (dite AAEXA), dont la loi définit les prestations, mais non les primes, auprès de l’organisme de leur choix. Ce régime est aujourd’hui l’objet de critiques qui ont conduit le Gouvernement à demander aux inspections générales de l’Agriculture et des Affaires sociales de mener une enquête, confiée à Madame Monique Mousseau et Monsieur Pierre Gérard Cailly.

      1.– Les différents assureurs

Quels sont les différents intervenants sur le marché de l’assurance de base obligatoire des agriculteurs en accidents du travail ?

Il convient tout d’abord de signaler l’existence d’un régime particulier spécifique à l’Alsace – Moselle, qui a justifié le déplacement de votre Rapporteur en Moselle. Il y existe un régime spécifique obligatoire, issu des lois sociales de Bismarck et géré par des caisses spéciales, qui couvre à la fois les exploitants et les salariés agricoles (et plus généralement toute personne exécutant un travail sur une exploitation agricole). Ce régime assure aux exploitants des prestations alignées sur celles des salariés et donc beaucoup plus substantielles que celle de l’AAEXA appliquée sur le reste du territoire. Le financement de ce régime repose, pour sa part exploitants, sur une cotisation additionnelle à l’impôt foncier ; cette cotisation est une sorte d’impôt de répartition dont le produit attendu est réparti entre les communes, puis, dans chacune, entre les propriétaires selon le revenu cadastral et que ces propriétaires soient ou non affiliés au régime agricole pour les autres risques ; le taux de prélèvement moyen est assez élevé, puisqu’en Moselle il dépasse 60 francs par hectare. Il est clair qu’un tel système de financement, qui fait contribuer à un niveau élevé même des personnes peu susceptibles de bénéficier des prestations du régime, peut être accepté là où il est inscrit dans l’histoire, mais ne saurait servir de modèle ailleurs.

Dans le reste du pays, le paysage concurrentiel résultant de la loi de 1966 est dominé par Groupama, comme le montre le tableau ci-dessous. Trois caisses de MSA ont toutefois décidé d’offrir des contrats d’AAEXA : celles du Puy de Dôme, visitée par votre Rapporteur, de l’Ariège et des Hautes Pyrénées. Il y a enfin les assureurs privés.

STATISTIQUES DE L’AAEXA EN 1997

 

Groupama

Assureurs
affiliés
à la FFSA

MSA

Nombre d’exploitants affiliés

416.173

251.567

n.c.

Nombre d’assujettis (personnes couvertes)

920.900

527.484

35.940

Montant des primes perçues (en millions de francs)

627,2

416,9

18,3

Prime moyenne par assujetti (en francs)

681

790

542

Montant des prestations (en millions de francs)

428

61,1

13,3

Rapport prestations/primes (en  %)

68,2

14,8

73

(n.c. : non communiqué)

Commentant ce tableau, la mission d’inspection s’interroge sur la fiabilité de la statistique s’agissant des prestations versées par les assureurs privés, qui ont représenté en 1997 moins de 15 % des primes encaissées. Ce ratio est invraisemblable… La MSA, là où elle est présente, apparaît offrir le meilleur ratio prestations versées/primes encaissées, ce qui peut s’expliquer par sa vocation sociale, mais aussi le coût marginal que représente la gestion de l’AAEXA pour un organisme gérant déjà la branche maladie.

En tout état de cause, au regard des ratios prestations/primes, la gestion de l’AAEXA semble plutôt rentable pour les assureurs de divers statuts, sachant que la charge de la revalorisation des rentes est reportée sur le fonds commun des accidents du travail agricole (voir infra), ce qui les dispense de constituer des provisions à ce titre. On notera enfin qu’a été créé en 1972 un régime légal complémentaire, facultatif et également concurrentiel, sur lequel on reviendra.

      2.– Les faiblesses du régime en vigueur

Les critiques contre le dispositif légal actuel sont multiples :

      · La faiblesse des prestations

Les garanties offertes par le régime, définies par les textes, sont limitées au remboursement des frais médicaux et au versement de rentes forfaitaires, réservées aux seuls invalides graves (taux d’incapacité au moins égal à deux tiers) et d’un faible montant : 2.000 francs par mois pour une inaptitude totale. Il n’y a pas d’indemnités journalières, ni de rentes pour les incapacités faibles ou moyennes, non plus que de prestations décès.

· L’insuffisance de la prévention

Compte tenu de la diversité des assureurs, la prévention des accidents du travail des exploitants agricoles ne fait pas l’objet d’un plan d’ensemble ; les actions menées paraissent limitées ; celles menées par la MSA au profit des salariés agricoles (qui ont, eux, une branche accidents du travail) profitent de fait aux chefs d’exploitation qui sont employeurs…

      · L’absence de contrôle de l’obligation d’assurance

Même s’il n’existe pas de statistiques fiables sur ce point, il est patent qu’un certain nombre d’agriculteurs ne s’assurent pas contre les accidents du travail, que ce soit volontairement ou par ignorance de la législation. Le chiffre, souvent avancé, de 20% de non assurés est cependant excessif ; dans les départements où il s’est rendu, votre Rapporteur a procédé à des sondages en interrogeant ses interlocuteurs, en particulier les médecins – conseil, sur les accidents du travail de non assurés qui seraient mis subrepticement à la charge de l’assurance maladie : les cas seraient exceptionnels. Dans le Puy de Dôme, où la caisse connaît bien le risque accidents du travail, puisqu’elle le gère, ses responsables sont persuadés qu’au moins 97% des agriculteurs sont assurés (90% l’étant à la MSA). En tout état de cause, même si le non respect de l’obligation d’assurance n’est peut-être pas si répandu, il importe de se donner les moyens de vérifier l’application de la loi. Ils sont prévus : l’article 1234-14 du code rural prévoit une amende contraventionnelle de 400 à 1.000 francs, voire 2.000 francs en cas de récidive, pour les non assurés, montant qui paraît dissuasif au regard de celui des primes, en général de l’ordre de1.500 francs par an. Par ailleurs, le décret (n° 88 – 931) du 16 septembre 1988 établit une obligation, pour les assureurs, de transmettre annuellement une liste des affiliés à l’AAEXA ; cette liste est adressée à l’inspection du travail agricole (ITEPSA). Ce document, toutefois, ne permet pas de vérifier la couverture des membres de la famille des chefs d’exploitation souscripteurs des contrats. Surtout, il ne semble pas que les ITEPSA se préoccupent beaucoup d’appliquer la loi.

      ·  La confusion entre accidents du travail et de la vie privée

On ne peut que s’interroger sur la pertinence de conserver un dispositif obligatoire couvrant à la fois les accidents du travail et ceux de la vie privée. C’est une spécificité agricole qui pose un double problème :

– dans l’optique fiscale, ne sont en principe déductibles du revenu professionnel que les primes afférentes à des risques spécifiquement professionnels et, dans le cas de contrats qui ne garantissent pas exclusivement des risques présentant un caractère professionnel, la déduction de la fraction des primes destinée à couvrir des risques professionnels ne peut être admise que si cette fraction est nettement individualisée (réponse ministérielle n° 18510, à propos d’assurances contractées par des membres de professions libérales, JO Sénat du 1er novembre 1984 ; arrêt n° 90 – 252 de la cour administrative d’appel de Bordeaux, en date du 13 décembre 1992) ;

– dans la perspective d’une amélioration des prestations de l’AAEXA, on peut observer que, si la garantie d’une rente même pour des accidents de la vie privée ne pose aucun problème tant que cette rente est de toute façon inférieure aux minima sociaux, la garantie d’une rente revalorisée, qui dans le cas des accidents de la vie privée serait propre aux agriculteurs, pourrait être contestée dans ce cas, car elle impliquerait naturellement des primes plus importantes.

      ·  Le financement absurde du fonds commun des accidents du travail agricole

Le fonds commun des accidents du travail agricole (FCATA) a notamment pour mission de financer la revalorisation des rentes complémentaires d’accidents du travail des exploitants agricoles. Il est, compte tenu de la situation démographique du monde agricole, structurellement déséquilibré : sur des ressources évaluées à 849 millions de francs pour 2000, l’essentiel proviendrait de transferts de solidarité (régimes de sécurité sociale et contributions publiques), 120 millions de francs seulement devant représenter les contributions de la profession.

Ces contributions sont au nombre de deux : l’une est assise sur les primes versées dans le cadre de l’assurance obligatoire contre les accidents du travail et de la vie privée, avec un taux de 10 %. L’autre contribution est assise sur les primes encaissées par les assureurs au titre du régime complémentaire facultatif que la loi a défini. Les taux en sont déterminés par arrêté en fonction des recettes et des dépenses de l’année précédente ; donc, plus l’assiette diminue, plus ils augmentent ; ils atteignent maintenant 65 % ou 87 % selon la nature des contrats !

Cette taxe est une bonne illustration du principe selon lequel « trop d’impôt tue l’impôt ». Des contrats aussi lourdement taxés ne sont en effet guère attractifs. De 1985 à 1997, le nombre de chefs d’exploitation souscrivant à l’assurance complémentaire est passé de près de 200.000 à 32.000 ; les primes encaissées sont passées de plus de 180 millions de francs à moins de 50 millions de francs. La loi a été aisément (et légalement) contournée par les assureurs, car les prestations du régime complémentaire facultatif légal sont définies par le code rural ; il suffit donc d’offrir un produit sortant légèrement de ce cadre pour échapper à la taxation. Plus de la moitié des affiliés en AAEXA à GROUPAMA auraient ainsi souscrit une garantie complémentaire d’une nature ou d’une autre ; 8% seulement de ces affiliés, pourtant, adhéraient (encore) en 1997 au régime complémentaire légal.

3.– Les possibilités de réforme

Deux options sont ouvertes. Dans une première, on changerait complètement de système en sortant du régime de liberté choisi en 1966 : l’assurance accidents du travail des exploitants agricoles deviendrait une branche du régime de sécurité sociale de ceux-ci, avec des cotisations et des prestations définies ; la gestion en serait vraisemblablement confiée à un organisme unique, qui serait logiquement la MSA.

Une telle option suppose que l’on croie que la loi est plus apte que le marché à assurer aux agriculteurs les meilleures garanties au meilleur prix ; c’est un choix philosophique… De manière pratique, deux considérations invitent à la prudence :

– les régimes de sécurité sociale reposant généralement sur des cotisations proportionnelles au revenu, cette option nécessiterait de trancher entre des cotisations plus ou moins forfaitaires, plus ou moins liées au risque (variable selon les orientations de production) ou plus ou moins proportionnelles ;

– il existe une sorte d’équilibre accepté entre la MSA et Groupama, dans leurs champs d’activités ; le statu quo ne saurait être sacré ; il convient tout de même de réfléchir quand on le modifie profondément…

Votre rapporteur spécial considère donc que l’on pourrait, au moins dans un premier temps, répondre aux critiques par des solutions moins ambitieuses, quitte à reposer la question d’une « branche » gérée par la MSA d’ici deux ou trois ans :

– il est légitime d’aller vers une amélioration des prestations et un renforcement de la prévention ; la coordination de celle-ci pourrait être assurée dans le cadre d’un fonds alimenté par les différents assureurs ; s’agissant des prestations, l’établissement d’une distinction entre accidents du travail et accidents de la vie privée, qui reporterait ipso facto les frais médicaux afférents à ces derniers sur l’assurance maladie (ce qui serait parfaitement justifié au regard du principe de parité des prestations du régime agricole avec les autres régimes), dégagerait, à primes constantes, des moyens permettant d’engager la revalorisation des rentes d’accidents du travail et l’élargissement du champ de leurs bénéficiaires ;

– en matière de cotisations, il serait normal que celles d’un régime obligatoire de protection sociale soient définies par les pouvoirs publics ; votre Rapporteur considère qu’une tarification forfaitaire homogène par filière de production tendrait à responsabiliser les différentes filières ;

– la MSA détenant le fichier le plus exhaustif, en principe, des exploitants agricoles, on pourrait lui confier le contrôle de l’obligation d’assurance en accidents du travail, soit en prévoyant que les autres assureurs lui transmettant leurs fichiers pour effectuer des recoupements, soit en lui faisant exiger de chacun de ses affiliés une attestation d’assurance accidents, à défaut de laquelle une pénalité financière leur serait infligée (ou une affiliation automatique au risque accidents du travail géré par la MSA) ;

– il faut – c’est là une urgence – soit réformer le financement du FCATA, en l’asseyant sur une taxe à taux unique sur les primes des assurances de base et complémentaires, y compris les assurances complémentaires sortant du régime légal complémentaire, soit renoncer à ce dernier, soit enfin supprimer le FCATA (ses dépenses actuelles étant reportées sur le régime d’accidents du travail des salariés agricoles et sur le dispositif réformé applicable aux non salariés) ;

– en tout état de cause, l’assurance complémentaire doit être encouragée dans un cadre pleinement concurrentiel.

    F.– LA PERSISTANCE DES OBSTACLES AU REGROUPEMENT
     DES CAISSES

Votre Rapporteur a consacré l’un de ses déplacements à la caisse de MSA des Alpes maritimes, notamment parce que cette caisse avait engagé un processus de fusion avec la caisse voisine du Var et que ce processus a échoué, de même que celui lancé entre les Landes, les Pyrénées atlantiques et les Hautes Pyrénées.

Certes, d’autres fusions se sont révélées plus heureuses dans la période récente : une fusion est réalisée depuis le 1er janvier 1998 entre les deux caisses des Vosges et de Meurthe et Moselle ; au 1er janvier 2000, seront créées d’une part, la caisse d’Alsace par fusion des caisses du Bas Rhin et du Haut Rhin, d’autre part, une caisse regroupant les caisses d’Isère, de Savoie et de Haute Savoie.

Ces résultats restent pourtant hors de proportion de l’enjeu. Certaines caisses, confrontées à la démographie, n’ont plus que quelques milliers de ressortissants, toutes catégories confondues. Les regroupements sont inéluctables. La convention d’objectifs et de gestion conclue le 23 décembre 1998, entre l’État et la Caisse centrale de la MSA, pour la période de 1999 à 2001, prévoit que des études préalables au rapprochement des caisses ou à la mise en commun de moyens seront réalisées avec la Caisse centrale et que des bilans réguliers sur les gains obtenus seront effectués. A l’issue des élections de cet automne, il est convenu que le conseil central propose un plan en ce domaine pour son mandat de cinq ans. La démarche reste donc très prudente.

Votre Rapporteur considère qu’à défaut de s’engager dans un processus autoritaire national, il est nécessaire de faire sauter tous les verrous, dans la réglementation en vigueur, aux regroupements. A cet égard, il est à tout le moins regrettable que la loi d’orientation agricole en ait encore ajouté : son article 48 précise que, sauf dérogation accordée par le ministre de l’Agriculture, la circonscription des caisses fusionnées ou regroupées sous forme d’association ne peut excéder celle des régions administratives, au prétexte que ces fusions ou regroupements doivent s’effectuer dans un cadre cohérent avec les nouvelles instances de gestion du risque maladie (union régionale des caisses d’assurance maladie, agences régionales de l’hospitalisation).

Parmi les obstacles législatifs ou réglementaires évoqués notamment par les responsables de la caisse des Alpes maritimes et qu’a recensés votre Rapporteur, citons principalement :

– la lourdeur des règles de vote dans les conseils des caisses souhaitant fusionner (majorité des deux tiers, quorum par collège), qui devraient être allégées ;

– les conditions de représentation des caisses fusionnées dans les instances de la Caisse centrale, chaque caisse, qu’elle soit ou non pluridépartementale (et quel que soit le nombre de ses ressortissants), disposant actuellement du même nombre de délégués à l’Assemblée générale centrale de la MSA ;

– l’absence d’incitations financières au rapprochement comparables à celles qui ont été développées pour encourager les organes intercommunaux. Les caisses de MSA ont institué, dans leur dispositif de péréquation des charges de gestion, une dotation de base forfaitaire destinée à assurer un « train de vie » minimal aux plus petites d’entre elles. Elles pourraient également prévoir une majoration spéciale pour les caisses regroupées.

Il est clair, en effet, qu’il existe des coûts fixes liés à l’existence de la structure. Ce sont d’ailleurs les premiers à être réduits lors d’un processus de rapprochement de caisses : les deux caisses des Alpes maritimes et du Var, avant l’échec final de leur fusion, s’étaient ainsi dotées d’une équipe de direction commune, économisant dès lors trois postes de cadres dirigeants sur huit. L’analyse des performances de gestion des caisses, mesurées par le ratio de leurs dépenses de gestion par unité de charge, montre au demeurant une corrélation significative entre maîtrise des coûts et taille. D’après une statistique produite par la caisse des Alpes maritimes, le coût de gestion moyen des dix caisses les plus proches, en termes de taille (mesurée par le nombre d’unités de charge), de l’ensemble Alpes maritimes – Var, était, en 1995, inférieur de 15 % à celui des dix caisses les plus proches, en taille, des Alpes maritimes toutes seules.

Cette forme de corrélation entre petite taille et coûts élevés ne constitue évidemment pas un motif pour favoriser les petites caisses dans les mécanismes de péréquation, mais, au contraire, une incitation à utiliser les biais financiers pour pousser aux rapprochements.

Au-delà des lourdes contraintes réglementaires et financières évoquées supra, d’autres éléments, plus sociologiques, doivent être rappelés. Les interlocuteurs de votre Rapporteur ont mis en avant l’opportunité, afin de faciliter les fusions, d’assouplir certaines dispositions pour respecter les spécificités locales ou les susceptibilités individuelles : il s’agirait d’organiser une transition progressive entre les anciens conseils d’administration fusionnés et le nouveau, de préserver la gestion départementale de certaines compétences (on pense à l’action sanitaire et sociale, aux commissions de recours amiable …). Votre Rapporteur n’hésite pas à affirmer que l’instauration de limites d’âge pour les administrateurs serait également opportune.

    G.– LE CONTRÔLE : LES PROBLÈMES SPÉCIFIQUES AU RÉGIME  AGRICOLE

L’organisation du contrôle des conditions d’affiliation, de l’assiette et du recouvrement des cotisations et du versement des prestations n’est sans doute pas le point fort de la Mutualité sociale agricole d’aujourd’hui.

Dans son rapport sur la sécurité sociale de septembre 1999, la Cour des comptes critique la MSA, d’une part sur la gestion d’une prestation spécifique au régime agricole, l’allocation de remplacement des agricultrices enceintes, d’autre part sur sa participation à une politique nationale prioritaire, la lute contre le travail dissimulé. Les observations de la Cour sur ces deux points constituent la synthèse de travaux réalisés par les comités départementaux d’examen des comptes des organismes de sécurité sociale (COD EC).

L’allocation de remplacement est un thème d’actualité, puisqu’elle a été substantiellement améliorée dans le cadre de la loi d’orientation agricole, ce dont on ne peut que se féliciter. Cependant, les conditions de sa gestion apparaissent imparfaites, d’après les éléments recueillis par la Cour des comptes :

– les prestations sont fournies, en principe, par des services de remplacement conventionnés par les caisses de MSA ; il apparaît toutefois que les avenants tarifaires annuels prévus par la réglementation ne sont pas toujours passés et sont généralement imprécis et, en outre, rarement transmis au GAMEX, qui peut intervenir aussi dans la gestion de la prestation ; les prix de journée et donc la part restant à la charge des agricultrices sont très variables ;

– le calcul de l’allocation est très complexe et donne souvent lieu à des erreurs de la part des agents qui en sont chargés.

La Cour recommande donc la mise en place d’un véritable pouvoir de contrôle des caisses sur les services de remplacement, une amélioration de la réglementation, ainsi que la mise en place d’un véritable contrôle interne. Ce triptyque – manque de suivi des relations avec les autres services associés, d’une manière ou d’une autre, à la gestion des recettes ou des prestations des caisses – inadaptation de la réglementation –  défaillance de la gestion interne des procédures – pourrait, considère votre Rapporteur, s’appliquer, dans de nombreux cas, aux différentes gestions assurées par les caisses de MSA.

La lutte contre le travail dissimulé est également un exemple intéressant, puisqu’elle donne à la Cour des comptes l’occasion de comparer, sur une politique prioritaire, les performances des organismes des régimes général (URSSAF et CGSS) et agricole. Le jugement comparatif n’est pas favorable aux caisses de MSA, auxquelles sont reprochés, de manière générale, une absence quasi-totale de documents méthodologiques, un recours trop limité à la verbalisation, la « pédagogie » étant parfois préférée à la répression, un manque général de coordination, etc. Autant d’observations qui pourraient souvent valoir, d’après l’expérience de votre Rapporteur, pour d’autres thèmes que le contrôle du travail dissimulé.

Au cours des contrôles sur place effectués par votre Rapporteur, quatre thèmes ont été particulièrement évoqués :

– les conditions d’affiliation au régime agricole ;

– le contrôle de l’assiette « revenus professionnels » ;

– les causes de la médiocrité générale des taux de recouvrement des cotisations personnelles des agriculteurs ;

– le niveau très inégal, selon les caisses, de l’incidence (rapport du nombre de bénéficiaires effectifs à la population potentiellement bénéficiaire) des prestations distribuées sous forme de rentes (pensions d’invalidité, allocations aux adultes handicapés, RMI, rentes d’accidents du travail pour les salariés …).

De manière générale, votre Rapporteur a relevé un certain manque de culture du contrôle (sauf, sans doute, en matière d’affiliation, où le souci d’assujettir le plus de terres possibles est présent), une faiblesse de la coordination nationale et une insuffisance des relations avec les autres services publics, voir de la perception des incidences des décisions prises par les caisses sur la situation des agriculteurs vis-à-vis d’autres droits ou obligations financières (aides communautaires, impôts, etc.).

      1.– L’affiliation

Votre Rapporteur avait été stupéfié, lors de son contrôle de juin 1998, de la « tenue » des dossiers d’affiliation par la caisse de MSA de Corse. Ce thème a donc été au centre des cinq contrôles de l’exercice 1999.

Ce qui frappe en premier lieu, c’est la diversité, selon les caisses, des justificatifs demandés et fournis pour établir la réalité et la consistance des exploitations. Le formulaire national en cours d’élaboration est jugé trop lourd par certaines caisses et chacune a son propre modèle (parfois, semble-t-il, il existe un modèle commun à plusieurs caisses voisines), qui, en outre, peut comporter une référence explicite aux pratiques locales en matière de faire valoir des terres. Les baux verbaux restent fréquents, par exemple dans le Puy de Dôme. Certaines situations apparaissent tout à fait anormales au regard du code rural, par exemple, dans les Alpes maritimes, des locations gratuites dans le cadre familial, voire la mise à disposition de terres par un organisme (un « éco-musée ») qui n’en est même pas propriétaire, mais emphytéote… Quant aux élevages sur parcours ou hors-sol, ils ne restent attestés, de manière générale, que par des déclarations sur l’honneur, des certificats vétérinaires ou des factures de matériel (casiers).

Le souci majeur des caisses paraît être d’affilier et donc de soumettre à cotisation le plus grand nombre possible d’exploitants. Soit ! Mais on peut avoir le sentiment que les caisses se prêtent parfois trop facilement à des montages qui visent à ouvrir le bénéfice d’aides publiques au mépris du réalisme économique ou de l’objet de ces aides.

On peut en prendre deux exemples : dans le premier, une commune de montagne s’arrange, en mettant gratuitement des prés à sa disposition, pour qu’un jeune agriculteur atteigne le seuil superficiaire d’affiliation ; l’intéressé, par ailleurs, bénéficie grâce à cette affiliation d’une dotation aux jeunes agriculteurs (DJA) « montagne », soit 171.000 francs, et d’un prêt bonifié, tout cela pour un investissement total à peine supérieur à 200.000 francs : on peut tout de même se demander si le maintien à tout prix d’une activité agricole a un sens quand la somme des subventions et avantages qui en permettent le démarrage est équivalente à l’investissement initial…

Un autre exemple est véritablement caricatural : une caisse a permis à un quasi-octogénaire, retraité agricole, de s’affilier à nouveau en tant qu’exploitant parce qu’il « reprenait » une partie de l’exploitation de son fils de cinquante-cinq ans, désireux de bénéficier de la préretraite (qui implique la cessation de l’activité agricole, ce à quoi les retraités dont la pension a été liquidée avant l’abaissement de l’âge de la retraite ne sont pas tenus). Bien sûr, une telle affiliation est « tout bénéfice » pour la caisse : elle encaissera des cotisations sans verser aucune prestation supplémentaire, puisque la retraite du « nouvel installé » est définitivement liquidée depuis longtemps et que son statut de retraité lui apportait déjà la couverture maladie du régime. Pour autant, il va de soi qu’un tel montage est contraire, sinon peut-être à la lettre de la réglementation, du moins à son esprit : la préretraite, mesure d’accompagnement de la réforme de la politique agricole commune en 1992, n’a pas été conçue comme une aide à objet social, mais économique, l’objectif étant d’accélérer la restructuration de l’agriculture et de faciliter l’installation ou l’agrandissement des jeunes agriculteurs…

Il est nécessaire de rappeler que, pour l’attribution de plusieurs aides économiques, comme les indemnités compensatoires de handicaps naturels (ICHN), les plans d’amélioration matérielle ou la prime à l’herbe, l’affiliation au régime agricole ou le bénéfice de ses prestations maladie (AMEXA) sont réputés satisfaire les conditions relatives à l’exercice d’une activité agricole, à titre principal ou secondaire selon les cas (qui sont, sinon, vérifiés par la part du temps de travail et du revenu qui est liée à l’exploitation agricole effective). Les caisses de MSA doivent être conscientes des incidences des affiliations qu’elles acceptent.

Le caractère fictif ou réel de l’exploitation agricole, la participation ou non aux travaux, le degré de mise en valeur d’un terrain permettant de le considérer comme utilisé à des fins agricoles, constituent autant d’éléments difficiles à vérifier et mal définis, ou non définis, par la loi et les règlements.

L’affiliation est liée à l’activité de chef d’exploitation et d’entreprise agricole, mais aussi au respect du critère superficiaire de « la demie SMI » (surface maximale d’installation). L’application de ce critère pose aussi plusieurs problèmes.

      · L’imperfection du cadastre

Dans chaque département sont fixés, en hectares, d’une part la SMI en « polyculture », d’autre part des SMI spéciales, plus faibles ou plus élevées, pour les cultures spécialisées et les formes d’élevage extensif. L’affectation des terres de l’exploitation à telle ou telle forme de mise en valeur est donc déterminante pour la vérification du critère de la demie SMI. Le problème est que l’affectation inscrite au cadastre, qui sert en première instance au calcul de l’équivalence superficiaire, est souvent fausse, faute de mise à jour régulière. Il est vraisemblable que cela conduit à un biais d’élargissement du champ d’affiliation : les demandeurs d’affiliation pour lesquels le calcul sur la base du cadastre donne la demie SMI ou plus semblent en général immatriculés sans plus de contrôle, alors qu’une vérification sur le terrain et un calcul sur la base des éléments réels permettent, le cas échéant, de « rattraper » les demandeurs dont le calcul sur la base imparfaite du cadastre n’autorisait pas l’immatriculation en première analyse.

    · Hors–sol et activités connexes

La vérification des critères d’affiliation pour les activités agricoles ne reposant pas sur le foncier est encore plus incertaine : comme on l’a dit, les élevages hors–sol seront attestés par des certificats vétérinaires ou des factures de casiers à poules ou lapins… Quant aux activités « connexes », leur assujettissement dépend du nombre d’heures de travail annuelles qui y sont consacrées, le seuil étant fixé à 1.200 heures. Un critère évidemment très difficile à soumettre à vérification…

Qu’il s’agisse d’ailleurs du contrôle des conditions d’affiliation, de celui de l’assiette des cotisations ou du recouvrement contentieux, le développement des activités connexes préoccupe clairement les caisses qui y sont confrontées, comme celle des Alpes maritimes, où se multiplient les jardiniers et paysagistes, ou celle du Morbihan, avec ses pêcheurs à pied…

      · Les sociétés

Enfin, la réglementation applicable aux sociétés agricoles pour ce qui est de l’affiliation de leurs membres conduit à des situations anormales. En effet, il est prévu d’affilier tous les membres participant aux travaux d’une société dès lors que l’équivalence superficiaire de celle-ci atteint la demie SMI multipliée par le nombre de ses associés actifs (ce seuil étant abaissé de 20 % pour les couples). Cela signifie, par exemple, que dans une société à deux associés détenant l’un, 90 % des parts (et donc percevant 90 % des revenus), et l’autre, 10 %, les deux associés sont immatriculés si la société atteint la SMI et aucun des deux ne l’est si elle reste légèrement en deçà ; dans les deux cas, pourtant, pris individuellement, le « gros » associé aurait été assujetti et pas le « petit ». Cette législation autorise donc des manipulations visant à affilier des personnes à l’activité agricole marginale, ou au contraire à exonérer partiellement (il reste les cotisations de « solidarité ») de cotisations des exploitations assez importantes, selon les intérêts des uns et des autres…

Plus largement, l’absence de définition juridique de l’exploitation agricole est à l’origine de beaucoup des problèmes rencontrés.

      2.– Le contrôle de l’assiette « revenus professionnels »

L’assiette assujettie par les caisses de MSA est constituée de deux éléments très distincts : pour ce qui est des salariés agricoles, il s’agit des salaires bruts, les problèmes de contrôle étant alors identiques à ceux rencontrés par les URSSAF (déjà évoqués à propos de la lutte contre le travail dissimulé) ; pour ce qui est des cotisations « personnelles » des exploitants, qui financent les prestations dont eux-mêmes et leur famille peuvent bénéficier, il s’agit du « revenu professionnel », c’est-à-dire, selon l’article 1003–12 du code rural, du revenu fiscal imposé dans la catégorie des bénéfices agricoles (éventuellement complété par le revenu fiscal connexe imposé dans d’autres catégories), modifié par la réintégration de divers avantages fiscaux dont la liste est donnée et assujetti selon des options d’assiette triennale ou annuelle propres au régime des cotisations. L’assiette des cotisations personnelles repose sur un concept fiscal.

L’établissement et le contrôle de cette assiette impliquent donc une collaboration entre MSA et services fiscaux. Cette collaboration apparaît pourtant inégalement assurée et reste insuffisante. Il convient de distinguer le cas des revenus imposés au forfait collectif du cas de ceux imposés au réel.

Comme on le sait, les premiers sont déterminés par un tarif, négocié entre le fisc et les représentants des agriculteurs, applicable par unité d’œuvre, l’hectare étant bien sûr l’unité d’œuvre utilisée pour la plupart des productions agricoles. Le système fonctionne en principe grâce à un double échange d’information entre MSA et services fiscaux : la première, possédant en principe un fichier à jour de la consistance des exploitations, le transmet aux seconds pour le calcul des forfaits : puis, la MSA dépend du retour de ce calcul pour établir les cotisations des « forfaitaires ». Ce retour est très fréquemment trop tardif et la non transmission des forfaits est l’un des principaux facteurs des difficultés d’assujettissement rencontrées par les caisses ; il est vrai que le fisc, compte tenu du caractère progressif de l’impôt sur le revenu, ne se préoccupe guère d’une catégorie de revenus dont le montant annuel moyen est à peine supérieur à 20.000 francs …

Les exploitants « au réel » font eux, parallèlement, des déclarations au fisc et à la MSA, qui établissent et contrôlent indépendamment les prélèvements dont ils ont la charge.

En principe, des échanges réciproques systématiques d’information sur les « faits susceptibles de constituer des infractions » découverts à l’occasion de contrôles sont prévus, entre le fisc et les organismes sociaux, par l’article L.99 du livre des procédures fiscales, qui a été durci par la loi de finances pour 1999. Par ailleurs, l’article L.152 du même livre, également modifié l’an dernier, prévoit notamment la communication par le fisc aux organismes sociaux des informations nominatives nécessaires à la définition de l’assiette des cotisations.

Cependant, les réponses aux questions de votre Rapporteur lors de ses visites tendent à montrer qu’il n’existe pas, aujourd’hui, de communication croisée systématique des redressements d’assiette opérés par le fisc et la MSA, alors que la similitude du concept (fiscal) des deux assiettes fait qu’un redressement opéré sur l’une a très souvent à être transposé à l’autre.

La situation présente apparaît quelque peu contradictoire : les services fiscaux, qui sont équipés juridiquement et techniquement pour les contrôles d’assiette, en pratiquent assez peu sur les agriculteurs au réel et n’ont, en tout état de cause, aucun « intérêt » propre à transmettre les résultats des redressements effectués aux caisses de MSA, car les cotisations supplémentaires qui seraient alors appelées viendraient en déduction de l’assiette fiscale. Quant aux caisses de MSA, elles doivent en principe (selon une instruction de la Caisse centrale) contrôler 10 % des exploitants au réel chaque année, ce qui est considérable, et, compte tenu du montant global des cotisations et de la CSG, peuvent espérer un meilleur rendement des redressements ; cependant, le développement des contrôles y suscite des réticences et des interrogations de méthode, qui sont d’ailleurs légitimes puisque la similitude conceptuelle (fiscale) des assiettes de l’impôt et des cotisations des agriculteurs (et des indépendants) n’empêche pas que les contentieux sociaux et fiscaux relèvent de deux ordres de juridiction différents, susceptibles d’adopter des jurisprudences différentes.

Il est donc nécessaire, d’une part, de systématiser le transfert réciproque d’informations, d’autre part, en allant plus loin, de clarifier les relations entre les services de contrôle du fisc et de la MSA : on pourrait imaginer des plans de formation des contrôleurs, afin de dégager des méthodes communes, et des plans de contrôle coordonnés.

Plus généralement, la réflexion sur le parallélisme des contrôles des assiettes sociale et fiscale ramène à la question de l’harmonisation de ces assiettes, objectif difficile mais qu’il est nécessaire de poursuivre.

Par ailleurs, il appartient aux caisses de MSA de renforcer leurs moyens de contrôle et de recoupement, par exemple en demandant aux affiliés une déclaration annuelle de consistance de l’exploitation et en consultant systématiquement les mutations enregistrées au service des hypothèques...

Actuellement, sur la base des chiffres 1998, dans les caisses « continentales » visitées par votre Rapporteur, le rapport annuel des redressements de l’assiette « revenus professionnels » à l’assiette globale s’échelonne de 0,1 à 0,7 %. C’est donc un enjeu non négligeable.

      3.– Le recouvrement des cotisations

Les taux de recouvrement des cotisations sociales personnelles des exploitants sur le revenu professionnel apparaissent médiocres, dans les statistiques du régime agricole, surtout si on les compare aux taux du régime général des salariés, voisins de 99 % pour les cotisations de l’exercice.

RÉGIME AGRICOLE : TAUX DE RECOUVREMENT DE L’ANNÉE (1)

(en %)

 

1995

1996

1997

1998

Taux de recouvrement

94,5

94,9

95,31

95,04

– dont salariés

97,4

97,6

97,7

96,48

– dont non salariés

89,4

90,4

91,3

92,37

(1) Rapport des cotisations encaissées au titre des émissions de l’exercice sur ces émissions.

TAUX DE RECOUVREMENT TOUS EXERCICES CONFONDUS (1)

(en %)

 

1995

1996

1997

1998

Taux de recouvrement

91,67

92,16

92,59

92,46

– dont salariés

95,22

95,5

95,73

95,84

– dont non salariés

86,01

86,95

87,69

86,81

(1) Rapport des encaissements d’une année aux créances actives, c’est-à-dire la somme des émissions de l’exercice et des impayés antérieurs.

Dans la convention d’objectifs et de gestion du 23 décembre 1998, la MSA s’est engagée à augmenter de deux points ses taux globaux d’encaissement par rapport à ceux constatés en 1997. L’évolution de 1995 à 1998, telle qu’elle ressort des tableaux ci-avant, ne révèle pas de tendance très nette à l’amélioration, bien que, pour les non salariés, on constate une légère augmentation.

Le jugement négatif que l’on peut porter sur le recouvrement des cotisations sur revenus professionnels, avec un taux de 92,37 % sur l’exercice 1998, doit toutefois être nuancé, car ce résultat décevant est aussi la conséquence des pratiques d’encaissement et de comptabilité de la MSA.

D’une part, en effet, le dernier appel de cotisations agricoles de l’année peut être fixé, au plus tard, au 30 novembre, date suffisamment proche de la fin de l’exercice pour qu’à cause de retards limités de paiement ou pour des raisons comptables, des montants significatifs d’encaissements ne puissent être pris en compte pour l’exercice. Les caisses de MSA ne sont pas obligées, actuellement, de tenir une statistique du recouvrement par génération d’émission ; certaines le font toutefois, dont celle du Puy de Dôme. Les éléments qui y ont été fournis à votre Rapporteur montrent qu’un tiers à la moitié des impayés en fin d’exercice sont honorés au cours du premier semestre de l’exercice suivant.

    TAUX DE RESTES À RECOUVRER PAR GÉNÉRATION D’ÉMISSIONS
    (Puy de Dôme, toutes cotisations et contributions sur revenus professionnels)

    (en %)

     

    Décembre de l’année

    Mai de « n + 1 »

    Émissions 1997

    7,61

    3,68

    Émissions 1998

    5,8

    3,69

D’autre part, l’analyse du recouvrement est perturbée par le mécanisme des « cotisations sanctions » pour défaut de déclaration : lorsqu’un exploitant ne renvoie pas sa déclaration de revenu pour le calcul des cotisations, celles-ci sont établies sur la base de 250 % des dernières cotisations connues, quitte, d’ailleurs, à effectuer une régularisation ultérieure (si les revenus sont déclarés avant la fin de l’année « n + 1 »). Ce dispositif entraîne, pour les non déclarants, petite minorité sauf en Corse, l’émission de montants colossaux de cotisations (on peut multiplier les 250 % d’année en année) sur lesquelles le recouvrement est par définition très faible, et d’autant plus faible que les montants exigés deviennent irréalistes et découragent toute velléité de retour dans le droit chemin ; or, à la différence des pénalités et majorations définitives pour retard de déclaration ou de paiement, les cotisations sanctions ne sont pas distinguées, dans les émissions des caisses, des cotisations « normales ». Leur existence dégrade donc le taux de recouvrement apparent. En outre, les régularisations ultérieures dont elles peuvent être l’objet perturbent la comptabilité des caisses.

Dans le cas, il est vrai caricatural, de la caisse de Corse, les émissions de cotisations sanctions auraient représenté, en 1998, 51 millions de francs, soit 57 % du total des émissions de cotisations des non salariés (90 millions de francs).

Enfin, la médiocrité générale du recouvrement recouvre des situations très contrastées selon les départements. Sans même évoquer le cas de la Corse, parmi les caisses visitées par votre Rapporteur, plusieurs se caractérisent par un recouvrement satisfaisant, tandis que la caisse des Alpes maritimes est dans une situation plus inquiétante : le taux de recouvrement tous exercices confondus s’y est élevé en 1998 à 93,7 % pour les cotisations sur salaires (95,8 % en moyenne nationale) et surtout à 67,6 % pour les cotisations des non salariés (86,8 % en moyenne nationale). Les responsables de la caisse imputent principalement cette situation au développement des entreprises de travaux agricoles, des jardiniers et paysagistes, qui seraient particulièrement fragiles et ont peu de « répondant » (pas de foncier…).

      4.– La fréquence inégale de certaines prestations

L’incidence (par rapport à la population susceptible d’en bénéficier) de différentes prestations sociales versées sous forme de rentes (rentes d’accidents du travail des salariés, pensions d’invalidité, allocations aux adultes handicapés, RMI …) est assez inégale selon les caisses de MSA, même si, heureusement, aucune de celle contrôlées par votre Rapporteur sur le continent ne présente les ratios constatés en Corse.

Plusieurs facteurs, difficiles à démêler, peuvent expliquer légitimement ces écarts : structure démographique de la population agricole (les exploitants proches de la retraite étant naturellement les plus nombreux à bénéficier de pensions d’invalidité), niveau moyen de ses revenus (pour les prestations sous condition de ressource), nature des productions (le risque d’accident du travail est plus élevé dans les activités liées au bois, et dans une moindre mesure l’élevage, que dans les cultures) …

Votre Rapporteur a cependant constaté que les responsables des caisses rencontrés, notamment les médecins – conseils, ne s’étaient en général jamais interrogés sur ce type d’écarts avant sa venue. L’existence d’écarts statistiques entre caisses, que ce soit d’ailleurs en termes de prestations ou de cotisations, est normale ; le réseau MSA et la Caisse centrale devraient pourtant systématiser l’analyse de ces phénomènes, qui peuvent correspondre à des situations objectives, mais aussi traduire des dérives.

      5.– La caisse de Corse : les prémices du redressement

Quinze mois après son premier contrôle, votre Rapporteur est retourné le 30 septembre en Corse, pour y prendre la mesure du « rétablissement de l’état de droit » à la caisse interdépartementale de MSA. Le redressement de la caisse en est à ses débuts. Après la suspension du conseil d’administration et le retrait de l’agrément du directeur d’alors à l’automne 1998, elle a été gérée par deux administrateurs provisoires successifs, en attendant le retour au droit commun, qui devrait s’opérer suite aux élections à la MSA du 27 octobre dernier.

La politique de redressement, telle que présentée par le ministère de l’Agriculture, s’articule autour des objectifs suivants :

– vérifier systématiquement l’affiliation au régime social agricole de l’ensemble des exploitants ;

– traiter la dette sociale, au cas par cas, en commençant par l’examen des près de 200 dossiers de plus d’un million de francs ;

– déterminer la liste des créances prescrites ;

– augmenter progressivement le taux de recouvrement sur l’encours afin de s’aligner sur la moyenne nationale en 2002.

Sur place, votre Rapporteur a effectivement pu constater une sérieuse amélioration des conditions d’affiliation : les immatriculations effectuées depuis le début de l’année 1999 (soit 46) le sont sur la base du dossier type élaboré par la Caisse centrale ; les dossiers vérifiés comportent effectivement le même type de pièces justificatives que dans les autres caisses ; les failles que l’on y rencontre encore tiennent à la mauvaise qualité d’autres services publics, notamment le cadastre. La révision des 3.800 affiliés d’avant 1999 n’a en revanche pas débuté, mais devrait être menée sur trois ans.

Pour ce qui est du traitement de la dette, sur 179 dossiers débiteurs de plus d’un million de francs au 20 septembre de cette année, 63 restaient alors à analyser ; sur les 116 autres, 34 devaient déboucher sur un plan de règlement, 14 sur un règlement ou une liquidation judiciaires, 19 étaient transmis au CODAIR (rapatriés). La caisse a donc engagé la remise en ordre de la dette sociale. Ses responsables déclarent, par ailleurs, que les plans de règlement acceptés se différencient des précédentes vagues de mesures relatives à la dette sur de nombreux points : prise systématique d’hypothèques ; exigence du paiement de l’encours des cotisations préalablement au plan ; transmission à la tutelle, etc. Il est évidemment trop tôt pour juger de cette politique. S’agissant plus généralement du contentieux habituel, le service responsable ne fonctionne réellement que depuis le milieu de l’année, selon les dires des mêmes responsables, et en est encore à « nettoyer » les comptes des créances prescrites ; la relance des procédures contentieuses de droit commun n’a pas vraiment débuté.

Il paraît également être un peu tôt pour porter un jugement sur l’évolution du recouvrement, d’autant que les émissions de cotisations restent lourdement perturbées, comme il a été indiqué plus haut, par le phénomène des « cotisations sanctions » pour non déclaration. D’après le ministère, le taux de recouvrement sur l’encours (émissions de l’année) serait toutefois passé, pour l’ensemble des cotisations, de 45 % à 56 % en 1998 et pourrait atteindre 65 % en 1999.

Il n’y a pas, pour le moment, d’amélioration significative en ce qui concerne les prestations, qui restent caractérisées par des fréquences très élevées des différentes formes de rentes possibles.

S’agissant enfin du fonctionnement de la caisse, si l’organigramme très complexe et pléthorique (en nombre de services et d’échelons hiérarchiques), critiqué l’an dernier par le rapport des inspections générales, a été un peu simplifié, la gestion du personnel n’en reste pas moins visiblement compliquée : négociation d’un accord « 35 heures » conduisant à un horaire effectif de 31 h 30 ; coûteux contentieux avec d’anciens agents en longue maladie, etc. Les nécessaires gains de productivité se font donc encore attendre.

Or, la situation financière de la caisse reste critique : le budget pour 1999 prévoit ainsi des recettes de fonctionnement de 60,5 millions de francs pour des dépenses de 85,7 millions de francs ; certes, ce budget est grevé par l’inscription de 20 millions de francs de remises de majorations de retard émises et pourrait être partiellement équilibré par une allocation d’adaptation non inscrite ; dans l’autre sens, on observe qu’il n’y est pas prévu de provision pour le non recouvrement partiel, très vraisemblable, d’une partie des cotisations de gestion, et que les frais financiers y sont sous-évalués (selon les responsables de la caisse), de même que certaines charges liées aux contentieux avec d’anciens agents. Le solde réel de la caisse est donc difficile à déterminer, mais reste vraisemblablement très loin de l’équilibre.

CONCLUSION

Derrière une apparente stabilité, le BAPSA rend donc de moins en moins compte de la réalité de la protection sociale des agriculteurs : non seulement il « oublie » de traduire l’incidence financière des dispositions du projet de loi de financement de la sécurité sociale – puisque c’est la quatrième fois consécutive, on peut parler de jeune « tradition » en la matière –, ainsi que des mesures 2000 de revalorisation des petites retraites, mais il ne tire pas non plus les conséquences d’autres dispositions, telles que la modulation des aides communautaires ou la « couverture maladie universelle », dont l’impact réel n’a certainement pas été objectivement évalué. En outre, le BAPSA ne couvre qu’une partie du champ de cette protection sociale des agriculteurs, puisqu’y échappent, par exemple, les dépenses de gestion courante du régime ou le dispositif d’assurance obligatoire en accidents du travail des exploitants.

Il convient donc de dépasser les chiffres du BAPSA pour avoir une vue plus générale du régime social des non salariés agricoles. La première question est alors : qui dépend de ce régime, qui peut se faire immatriculer à la MSA ? On constate là qu’en l’absence de définition législative suffisante de l’exploitation agricole, on peut observer des étrangetés, telles que la nouvelle affiliation d’octogénaires…

Second thème : les cotisations sociales. Il est intéressant de constater, sur ce point, les contradictions de l’organisation actuelle du contrôle de leur assiette, qui est plutôt assuré par les services de la MSA, alors que cette assiette repose sur un concept fiscal que le fisc est mieux à même de vérifier. Ainsi est reposée la question de l’harmonisation des trois assiettes de l’impôt, des cotisations et de la CSG.

Les cotisations de « solidarité » constituent un prélèvement d’un rendement assez faible, 236 millions de francs dans le BAPSA 2000, et donc généralement peu commenté. L’assujettissement à la CSG « patrimoine » des revenus de deux catégories de cotisants « solidaires », depuis l’année en cours, conduit toutefois à s’interroger sur le maintien de telles cotisations, non créatrices de droits, et donc redondantes avec la CSG, ou à demander au moins l’application du principe général selon lequel toute hausse de la CSG sur des revenus d’activité doit entraîner une baisse supérieure ou égale du taux des cotisations sociales.

La loi sur la couverture maladie universelle risque d’être particulièrement lourde de conséquences pour le régime agricole, car il regroupe une partie importante des bénéficiaires potentiels de la « CMU ». Le maintien de cotisations minimales forfaitaires élevées en assurance maladie agricole, quand la gratuité sera institutionnalisée pour d’autres, la non prise en compte dans les prévisions de dépenses du BAPSA, justement, du coût des prestations maladie des déchus de droits qu’il faudra réintégrer, et surtout le caractère explosif du volet complémentaire de la couverture gratuite, compte tenu de la sous-évaluation manifeste du « panier de soins » pris en charge, sont autant de questions graves, trop absentes de ce projet de BAPSA.

En matière de retraites, le Gouvernement propose de poursuivre l’effort régulier engagé depuis 1994, qui conduit à ajouter annuellement environ un milliard de francs pour la revalorisation des petites retraites ; qui y serait défavorable ? Votre Rapporteur réitère toutefois sa proposition de l’an dernier : prendre en compte, pour l’attribution des majorations, l’ensemble des droits propres de retraite acquis dans différents régimes, ce qui permettrait d’aller plus vite et plus loin pour les plus modestes, en écartant certains « polypensionnés » dont la retraite agricole ne constitue qu’une ressource secondaire. Un problème particulier mérite par ailleurs une étude attentive : les conditions actuelles de validation, pour les femmes « polypensionnées », de périodes pour enfants conduisent à de graves inéquités. S’agissant enfin du financement des mesures, il est vraiment dommage que le Gouvernement, cette année comme l’année dernière, finance une dépense supplémentaire pérenne de retraites par un prélèvement non reconductible sur la contribution sociale de solidarité des sociétés, dont le montant d’un milliard de francs ne couvrira d’ailleurs même pas le coût total (1,2 milliard de francs) des mesures prévues. Pour l’avenir, un régime complémentaire obligatoire peut constituer une solution s’il est établi sur une base viable : un taux de cotisation obligatoire minimale modéré et une mise en réserve des cotisations versées les premières années.

La réforme du régime issu de la loi de 1966 en matière d’accidents du travail des non salariés agricoles, la clarification du statut des activités « annexes » concurrentielles des caisses de MSA et le regroupement de celles-ci dans des caisses pluridépartementales sont enfin des évolutions qu’il s’agit d’envisager, car elles sont nécessaires, voire urgentes.

EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa séance du 2 novembre 1999, la commission des Finances, de l’Économie générale et du Plan a examiné les crédits du budget annexe des Prestations sociales agricoles.

Après l’exposé de votre Rapporteur spécial, qui a prôné l’abstention pour protester contre le financement non pérenne de la revalorisation des retraites agricoles, la Commission a adopté les crédits du budget annexe des Prestations sociales agricoles et vous demande d’émettre un vote favorable à leur adoption.

Votre Rapporteur spécial a ensuite présenté une proposition d’observation qui demandait au Gouvernement d’étudier le dispositif de coordination entre les régimes sociaux pour les validations de cotisations pour enfants des femmes ayant acquis des droits dans plusieurs régimes. Il a également présenté plusieurs amendements tendant respectivement à :

– supprimer les cotisations minimales forfaitaires des agriculteurs en assurance maladie, par équité avec la gratuité de la couverture de base offerte à d’autres catégories par la loi sur la couverture maladie universelle ;

– réduire à 9 % le taux de la cotisation de solidarité des exploitants sous le seuil d’affiliation au régime agricole, afin de neutraliser l’effet de leur assujettissement à la CSG ;

– supprimer la cotisation de solidarité des associés minoritaires apporteurs de capitaux, qui n’est plus justifiée dès lors que leurs revenus sont assujettis à la CSG et dont le coût de gestion est très élevé ; il a précisé que ce coût était de 26,5 % du produit de la cotisation, ce qui constitue sans nul doute un record ;

– instituer une attribution pérenne de C3S au BAPSA à due concurrence de la C3S perçue sur les organismes mutualistes et les coopératives relevant du régime agricole ; il a critiqué les évolutions législatives récentes, contradictoires dans ce domaine ;

– unifier le taux du prélèvement opéré sur les primes d’assurance de base et complémentaire accidents du travail au profit du fonds commun des accidents du travail agricole (FCATA), afin de rendre plus attractive l’assurance complémentaire, actuellement complètement découragée par une ponction confiscatoire.

Mme Béatrice Marre a observé que l’ensemble des suggestions du Rapporteur entrait dans le cadre de la mission qui lui a été confiée, ainsi qu’à M. Jérôme Cahuzac, par le Gouvernement, sur la fiscalité et les charges sociales agricoles. Cette mission devant se conclure en mars 2000, l’adoption des propositions du Rapporteur serait prématurée.

Le Président Augustin Bonrepaux a, en outre, indiqué qu’une affectation spécifique de la C3S au budget annexe n’était pas nécessaire puisque son équilibre était de toute façon assuré par la subvention de l’État, et que l’unification du taux des prélèvements affectés au FCATA entraînerait une augmentation du coût de l’assurance de base obligatoire pour les agriculteurs en accidents du travail, même si le problème posé par cet amendement est réel.

La Commission a rejeté l’observation et l’ensemble de ces amendements.

AMENDEMENTS NON ADOPTÉS PAR LA COMMISSION

Amendements présentés par M. Charles de Courson

Articles additionnels après l’article 64

Insérer l’article suivant :

I.– Le IV de l’article 1003-7-1 du code rural est ainsi modifié :

– dans la première phrase, les mots « , d’assurance vieillesse et d’assurance maladie » sont remplacés par les mots « et d’assurance vieillesse »;

– la seconde phrase est supprimée.

II.– L’article 1106-8 du même code est abrogé.

III.– La taxe visée à l’article 1609 unvicies du code général des impôts est majorée à due concurrence de la perte de recettes résultant du I.

IV.– Les dispositions du I, du II et du III s’appliquent à compter du 1er janvier 2001.

*

* *

Insérer l’article suivant :

I.– La dernière phrase du VI de l’article 1003-7-1 du code rural est ainsi rédigée :

« Le taux de cette cotisation est fixé à 9 %. »

II.– Le taux visé à l’article 1609 unvicies du code général des impôts est majoré à due concurrence.

III.– Les dispositions du I et du II s’appliquent à compter du 1er janvier 2001.

*

* *

Insérer l’article suivant :

I.– Le VII de l’article 1003-7-1 du code rural est abrogé à compter du 1er janvier 2001.

II.– Le taux visé à l’article 1609 unvicies du code général des impôts est majoré à due concurrence.

*

* *

Insérer l’article suivant :

I.– L’article 1624 du code général des impôts est ainsi rédigé :

« Art.1624.– Le taux de la taxe prévue à l’article 1622 est égal au taux de la taxe prévue à l’article 1624 bis. »

II.– Dans le deuxième alinéa de l’article 1624 bis du code général des impôts, le taux « 10 % » est remplacé par le taux « 12,5 % ».

*

* *

Insérer l’article suivant :

I.– Le début du 1er alinéa de l’article L.651-2-1 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :

« Au titre de chaque exercice, le montant de contribution sociale de solidarité versé au régime de sécurité sociale des non salariés agricoles est égal au produit de la contribution sociale de solidarité dû par les redevables dont plus de la moitié des salariés sont affiliés aux assurances sociales agricoles ou dont plus de la moitié des associés ou administrateurs non salariés sont affiliés au régime de sécurité sociale des non salariés agricoles ; puis, le reste du produit de la contribution, minoré des frais de recouvrement et abondé du solde éventuel de l’exercice précédent… » (le reste sans changement).

II.– Les pertes de recettes pour les organismes de sécurité sociale sont compensées par l’instauration à due concurrence de taxes additionnelles aux droits visés à l’article 575A du code général des impôts.

III.– Les dispositions du I et du II entrent en vigueur au 1er janvier 2001.

N°1861-42. - Rapport de M. Charles de Courson, au nom de la commission des finances, sur le projet de loi de finances pour 2000. - Prestations sociales agricoles

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