N° 3321
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
ONZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 11 octobre 2001.
AVIS
PRÉSENTÉ
AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES, FAMILIALES ET SOCIALES (1) SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2002 (n° 3262)
TOME IX
EMPLOI ET SOLIDARITÉ
FORMATION PROFESSIONNELLE
PAR M. Patrick Malavieille,
Député.
___
(1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page.
Voir le numéro : 3320 (annexe n° 20).
Lois de finances
La Commission des affaires culturelles, familiales et sociales est composée de : M. Jean Le Garrec, président ; M. Jean-Michel Dubernard, M. Jean-Paul Durieux, M. Maxime Gremetz, M. Édouard Landrain, vice-présidents ; Mme Odette Grzegrzulka, M. Denis Jacquat, M. Patrice Martin-Lalande, secrétaires ; M. Bernard Accoyer, Mme Sylvie Andrieux-Bacquet, M. Léo Andy, M. Didier Arnal, M. André Aschieri, M. Gautier Audinot, Mme Roselyne Bachelot-Narquin, M. Jean-Paul Bacquet, M. Jean-Pierre Baeumler, M. Pierre-Christophe Baguet, M. Jean Bardet, M. Jean-Claude Bateux, M. Jean-Claude Beauchaud, Mme Huguette Bello, Mme Yvette Benayoun-Nakache, M. Serge Blisko, M. Patrick Bloche, Mme Marie-Thérèse Boisseau, M. Jean-Claude Boulard, M. Bruno Bourg-Broc, Mme Christine Boutin, M. Jean-Paul Bret, M. Victor Brial, M. Yves Bur, M. Alain Calmat, M. Pierre Carassus, M. Pierre Cardo, Mme Odette Casanova, M. Laurent Cathala, M. Jean-Charles Cavaillé, M. Bernard Charles, M. Michel Charzat, M. Jean-Marc Chavanne, M. Jean-François Chossy, Mme Marie-Françoise Clergeau, M. Georges Colombier, M. René Couanau, Mme Martine David, M. Bernard Davoine, M. Bernard Deflesselles, M. Lucien Degauchy, M. Marcel Dehoux, M. Jean Delobel, M. Jean-Jacques Denis, M. Dominique Dord, Mme Brigitte Douay, M. Guy Drut, M. Jean Dufour, M. Nicolas Dupont-Aignan, M. Yves Durand, M. René Dutin, M. Christian Estrosi, M. Michel Etiévant, M. Claude Evin, M. Jean Falala, M. Jean-Pierre Foucher, M. Michel Françaix, Mme Jacqueline Fraysse, M. Germain Gengenwin, M. Jean-Marie Geveaux, M. Jean-Pierre Giran, M. Michel Giraud, M. Gaétan Gorce, M. François Goulard, M. Gérard Grignon, M. Jean-Claude Guibal, Mme Catherine Génisson, M. Francis Hammel, M. Pierre Hellier, M. Michel Herbillon, Mme Françoise Imbert, Mme Muguette Jacquaint, M. Serge Janquin, M. Jacky Jaulneau, M. Patrick Jeanne, M. Armand Jung, M. Bertrand Kern, M. Christian Kert, M. Jacques Kossowski, Mme Conchita Lacuey, M. Jacques Lafleur, M. Robert Lamy, M. Pierre Lasbordes, M. André Lebrun, M. Michel Lefait, M. Maurice Leroy, M. Patrick Leroy, M. Michel Liebgott, M. Gérard Lindeperg, M. Lionnel Luca, M. Patrick Malavieille, M. Alfred Marie-Jeanne, M. Marius Masse, Mme Jacqueline Mathieu-Obadia, M. Didier Mathus, M. Jean-François Mattei, M. Pierre Menjucq, Mme Hélène Mignon, M. Pierre Morange, M. Hervé Morin, M. Renaud Muselier, M. Philippe Nauche, M. Henri Nayrou, M. Yves Nicolin, M. Alain Néri, M. Bernard Outin, M. Dominique Paillé, M. Michel Pajon, M. Vincent Peillon, M. Bernard Perrut, M. Pierre Petit, M. Jean-Luc Préel, M. Jacques Rebillard, M. Alfred Recours, Mme Chantal Robin-Rodrigo, M. Marcel Rogemont, M. Yves Rome, M. Jean Rouger, M. Rudy Salles, M. André Schneider, M. Bernard Schreiner, M. Patrick Sève, M. Michel Tamaya, M. Pascal Terrasse, M. Gérard Terrier, Mme Marisol Touraine, M. Anicet Turinay, M. Jean Ueberschlag, M. Jean Valleix, M. Alain Veyret, M. Philippe de Villiers, M. Philippe Vuilque, Mme Marie-Jo Zimmermann.
INTRODUCTION 7
I.- LES PRIORITÉS DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE POUR 2002 9
A. DES CRÉDITS EN LÉGÈRE BAISSE 9
B. LES PRINCIPALES ÉVOLUTIONS 11
1. Une stabilisation à un niveau élevé des crédits destinés à la formation en alternance 11
2. La poursuite de la baisse des actions de formation à la charge de l'Etat 12
3. L'actualisation des dotations de décentralisation 13
4. La baisse des moyens consacrés aux dispositifs d'insertion des publics en difficulté au profit d'un recentrage des actions 13
II.- FORMATION PROFESSIONNELLE ET TRAVAIL : DES LIENS MENACÉS ? 15
A. FORMATION PROFESSIONNELLE ET RÉDUCTION DU TEMPS DE TRAVAIL 15
1. Les craintes 15
2. Des verrous jusqu'à présent efficaces 16
B. FORMATION PROFESSIONNELLE ET TRAVAIL AU C_UR DU DIALOGUE ENTRE PARTENAIRES SOCIAUX AU NIVEAU NATIONAL 19
1. L'appropriation du thème 19
2. La formation professionnelle en danger ? 21
TRAVAUX DE LA COMMISSION 21
La commission des affaires culturelles, familiales et sociales est appelée à se prononcer pour avis sur les crédits destinés à la formation professionnelle inscrits au budget du ministère de l'emploi.
Son rapporteur ne se livrera pas à une analyse détaillée des crédits budgétaires affectés à la formation professionnelle dans la mesure où cet exercice est amplement réalisé par l'annexe explicative - le « jaune » - au projet de loi de finances et par le rapport de la commission des finances, de l'économie générale et du plan saisie au fond.
Après un bref exposé de la structure des crédits proposés, il semble plus intéressant de faire porter l'analyse sur les liens entre formation professionnelle et travail effectif. En effet, les deux années écoulées ont été marquées par trois interrogations fortes sur ces liens :
- Quelles seraient les conséquences de la réduction du temps de travail sur la formation professionnelle ?
- La réduction du temps de travail constituerait-elle l'occasion de remettre en cause le lien entre temps de travail effectif et formation professionnelle ?
- Les partenaires sociaux en s'efforçant de négocier dans le champ de la formation professionnelle n'allaient-ils pas aboutir à un régime moins protecteur des salariés, à une dissolution du lien entre formation et travail ?
L'appréciation que le rapporteur peut porter sur le projet de loi de finances pour 2002 dépend bien évidemment aussi des réponses à ces questions et non des seuls niveau et structure des crédits, même si ceux-ci reflètent pour partie ces évolutions de fond.
I.- LES PRIORITÉS DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE POUR 2002
Le projet de loi de finances pour 2002 ne comporte pas, s'agissant de la formation professionnelle, d'évolution spectaculaire. Il s'inscrit dans la continuité des trois exercices antérieurs en privilégiant des dispositifs recentrés sur les publics les plus en difficulté. L'amélioration - bien qu'insuffisante - de la situation de l'emploi a continué à réduire le coût de certains dispositifs et la suppression de l'allocation formation-reclassement (AFR) a permis des économies substantielles. On peut y voir deux raisons majeures de la baisse des crédits de la formation professionnelle. On peut cependant s'interroger sur la pertinence du transfert de cette allocation à l'UNEDIC.
Les crédits consacrés à la formation professionnelle peuvent faire l'objet de deux présentations.
La première consiste à identifier tous les articles concourant à cet objectif inscrits dans le fascicule « emploi » du projet de loi de finances. On peut ainsi comptabiliser les moyens affectés aux chapitres :
· 43-06 relatif au financement de la formation professionnelle qui regroupe l'ensemble des dépenses de primes, de compensations d'exonération de cotisations sociales, de rémunérations et d'aides au fonctionnement des dispositifs ; figurent notamment dans ce chapitre les dotations décentralisées ;
· 43-70 relatif au financement de la formation professionnelle ;
· 43-71 relatif à la formation professionnelle des adultes essentiellement constitué de la subvention de fonctionnement à l'Association pour la formation professionnelle des adultes (AFPA) ;
· 44-70 relatif aux dispositifs d'insertion des publics en difficulté.
Ce dernier chapitre ne concerne que partiellement la formation professionnelle puisque ne concourent à celle-ci que les articles relatifs aux formations des chômeurs de longue durée et au financement du réseau d'accueil des jeunes. S'ajoutent enfin les dotations en capital inscrites aux chapitres 66-00 et 66-71.
Tableau 1 : budget de la formation professionnelle par chapitres budgétaires
(en millions d'euros)
Chapitres |
LFI 2000 |
LFI 2001 |
PLF 2002 |
43-06 |
1 214,1 |
1 255,9 |
1 307,2 |
43-70 |
2 771,1 |
2 828,1 |
2 622,9 |
43-71 |
667,5 |
697,1 |
712,4 |
44-70 |
519 |
466,4 |
565,8 |
Dotations en capital |
71,4 |
59,9 |
65,0 |
Total |
5 243,2 |
5 307,4 |
5 273,3 |
Une deuxième présentation consiste à distinguer les crédits concourant directement à la formation professionnelle, ceux des chapitres 43-06 et 43-70 qui forment l'agrégat dit formation professionnelle.
Tableau 2 : agrégat 02 - formation professionnelle (en millions d'euros)
LFI 2000 |
PLF 2001 |
Evolution en % | |
Formation professionnelle |
4 059,01 |
3 902,27 |
- 3,9 |
A - Formations en alternance |
2 083,56 |
2 069,09 |
- 0,7 |
Primes apprentissage Exonérations contrats d'apprentissage Primes de qualification-jeunes Exonérations contrats de qualification jeunes Primes qualification adultes Exonérations contrats de qualification adultes |
758,33 801,88 23,93 424,42 16,92 58,08 |
786,03 824,75 0 423,70 2,90 31,71 |
+ 3,7 + 2,9 NS - 0,2 - 82,9 - 45,4 |
B - Actions de formation à la charge de l'Etat |
719,50 |
527,40 |
- 26,7 |
a. Dépenses de fonctionnement de la formation professionnelle Politique contractuelle CPER Autres dispositifs b. Dépenses de rémunérations de la formation professionnelle Programme national de formation professionnelle Jeunes Etat Stagiaires AFPA AFR c. Dépenses d'investissement de la formation professionnelle d. Validation des acquis de l'expérience |
43,30 64,21 71,68 153,27 1,68 152,45 228,67 4,24 - |
. 41,92 53,51 73,78 155,44 1,68 146,92 38,11 12,40 3,64 |
- 3,2 - 16,7 + 2,9 + 1,4 0 - 3,6 - 83,3 + 192,5 NS |
C - Dotation globale de décentralisation |
1 255,95 |
1 305,78 |
+ 4 |
Dans les deux cas, le budget de la formation professionnelle fait apparaître une baisse : de l'ordre de 34 millions d'euros pour le premier, de plus de 156 millions d'euros pour le second. Cette différence résulte du dynamisme maintenu des crédits affectés à l'AFPA et aux dispositifs spécifiques, tandis que les moyens affectés à la formation professionnelle stricto sensu baissent nettement. On rappellera que l'essentiel de la baisse est imputable à la suppression de l'AFR.
Reste à voir ce que recouvre réellement cette baisse et quelles sont les évolutions internes de ces dépenses.
La baisse des crédits ne doit pas occulter l'importance des choix opérés entre les divers postes de dépenses qui se traduisent par des évolutions différentes de celles-ci.
Les crédits destinés à la formation en alternance s'élèvent à 3 902 millions d'euros dans le présent projet de loi de finances contre 4 059,01 en loi de finances initiale 2000, soit une baisse de 0,7 %.
Il est prévu de financer la conclusion de 240 000 nouveaux contrats d'apprentissage en 2001 et 2002 d'où une hausse des crédits de 3,24 % par rapport à l'an dernier. On rappellera pour mémoire que le dispositif a été resserré en 1999 afin de limiter le bénéfice des primes d'apprentissage aux contrats concernant les jeunes les moins qualifiés (BEPC, CAP ou non-diplômés). En outre, cette prime n'est désormais plus versée aux entreprises de moins de vingt salariés.
On observe une baisse marquée des crédits destinés au financement des contrats de qualification jeunes. La prime à l'embauche versée lors de l'entrée dans le dispositif a en effet été supprimée pour les contrats conclus à partir du 1er janvier 2001. Le niveau des exonérations est lui à peu près stable. Il correspond au financement de 135 000 contrats en 2002 comme en 2001.
Le rapporteur souhaiterait à ce propos attirer l'attention de la commission sur les difficultés que rencontre actuellement l'AGEFAL, organisme notamment chargé de gérer les fonds destinés au financement des actions de formation liées à ces contrats. Longtemps excédentaire, ce fonds a fait l'objet de prélèvements successifs de l'Etat ; à présent, sa situation semble mettre en péril le financement de 15 000 contrats de qualification. Le rapporteur ne peut qu'inviter le Gouvernement à honorer l'engagement apparemment pris en son temps d'aider en cas de besoin l'AGEFAL, à tout le moins à hauteur de l'impasse actuelle.
Les contrats de qualification adultes, créés par la loi n° 98-657 du 29 juillet 1998 d'orientation relative à la lutte contre les exclusions à titre expérimental jusqu'au 31 décembre 2000, ont vu leur existence prorogée jusqu'au 30 juin 2002 par l'article 2 de la loi portant diverses dispositions d'ordre social, éducatif et culturel (DDOSEC) afin de permettre un bilan significatif de l'expérience menée et de permettre un accord entre partenaires sociaux.
Le rapporteur ne peut que regretter que le Parlement soit de nouveau appelé à statuer sur une prorogation du dispositif et tient à rappeler que le rapporteur de la commission sur la loi DDOSEC avait proposé une date plus lointaine pour éviter ces reconductions à répétition.
Toutefois, le rapporteur est favorable à la prorogation du système qui s'accompagne dans le présent projet de loi de finances d'un changement de nature. Même s'il s'agit toujours de donner aux employeurs des exonérations de cotisations sociales, au moins exige-t-on que l'employeur de salariés en contrats de qualification adultes soit passé à trente-cinq heures dans les conditions de la loi relative à la réduction négociée du temps de travail. En effet, l'article 70 du présent projet loi de finances prévoit la fusion de la prime et de l'exonération spécifiques à ces contrats dans l'allégement trente-cinq heures et les met donc à la charge du fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale (FOREC).
Ces évolutions expliquent la forte diminution des crédits qui n'implique nullement une baisse du nombre de contrats : de fait, des crédits sont prévus pour financer 14 000 nouveaux contrats en 2002 (contre 14 000 prévus initialement et 10 000 probables en 2001). A la différence de l'année dernière, la baisse des crédits consacrés à ce poste ne tient donc plus à la montée en charge du dispositif (8 000 contrats sur l'exercice 2000 contre 15 000 prévus en LFI). Il faut par ailleurs rappeler que la nouvelle convention UNEDIC a traduit l'intérêt porté par les partenaires sociaux à ce dispositif.
Au total, la diminution des crédits destinés à l'alternance tient moins à un désengagement de l'Etat ou à un moindre intérêt qu'à une refonte des dispositifs.
Après une baisse de 19 % en 2001 par rapport à 2000, le présent projet affiche une baisse de 25,8 % des crédits destinés aux actions de formation à la charge de l'Etat qui passent de 719,5 à 527,4 millions d'euros.
Ils comprennent d'une part, les dépenses de fonctionnement de la formation professionnelle, pour l'essentiel les sommes affectées au financement des contrats de plan Etat-régions qui baissent de 16,7 % et celles dévolues à la politique contractuelle en baisse de 3,2 % du fait du recentrage des actions.
On ne peut que regretter que ces crédits diminuent alors que les besoins demeurent les mêmes, voire augmentent. Ceci semble particulièrement paradoxal au regard de la décentralisation de nouvelles compétences en matière de formation professionnelle au profit des régions, paradoxal également alors que l'incapacité de l'Etat et de l'UNEDIC à conclure la convention tripartite avec les régions nécessaire à l'application du PARE montre bien les limites de la démarche contractuelle.
Ces crédits comprennent par ailleurs les dépenses de rémunération de la formation professionnelle dont l'évolution explique largement la baisse de 26,7 % précédemment évoquée.
Si le programme national de formation professionnelle (destiné à la rémunération des stagiaires suivant des formations financées par l'Etat) voit ses moyens progresser de 1,4 % et si ceux consacrés par l'AFPA à la rémunération des stagiaires bénéficiant du livre IX du code du travail ne sont en baisse « que » de 3,6 %, la dotation autrefois consacrée à la seule allocation formation-reclassement (AFR) diminue de plus de 190 millions d'euros. Cette baisse résulte de la suppression de l'AFR par les signataires de la convention du 1er janvier 2001 relative à l'aide au retour à l'emploi et à l'indemnisation du chômage. Ceux-ci lui ont substitué une indemnisation dans les conditions de droit commun, par l'aide au retour à l'emploi (ARE), y compris pour les chômeurs en formation (à la condition que celle-ci soit prescrite par l'ANPE). Les crédits restant sur la ligne budgétaire correspondent au versement de l'AFR pour les chômeurs entrés en formation avant le 1er juillet 2001 et à l'allocation fin de formation qui se substitue à l'ARE jusqu'à la fin de la formation entamée lorsque le demandeur d'emploi a épuisé ses droits à assurance.
Enfin, le budget intègre pour des sommes modestes les dépenses liées à la validation des acquis qui devrait être introduite par la loi de modernisation sociale : crédits d'experts et élaboration du répertoire national des certifications professionnelles.
Les dotations inscrites au chapitre 43-06 sont actualisées conformément au taux de la dotation globale de décentralisation, soit + 3,96768 % pour 2001.
Si les moyens consacrés aux actions spécifiques en faveur des jeunes sont globalement maintenus (- 3,6 % pour les emplois-jeunes et + 128,3 % pour le programme TRACE), la réduction du chômage, y compris parmi les chômeurs de longue durée, entraîne celle des entrées dans les dispositifs spécifiques correspondants, comme en atteste le tableau ci-après.
Tableau 3 : Flux d'entrées dans les dispositifs
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
LFI 2001 |
PLF 2002 | |
SIFE collectifs |
143 000 |
144 000 |
126 600 |
110 000 |
90 000 |
90 000 |
SIFE individuels |
36 000 |
31 000 |
32 000 |
25 000 |
25 000 |
25 000 |
SAE |
37 000 |
35 000 |
24 600 |
20 000 |
20 000 |
20 000 |
CIE (France métropolitaine) |
213 000 |
196 000 |
157 000 |
155 000 |
125 000 |
90 000 |
CES |
502 000 |
440 000 |
405 000 |
358 300 |
260 000 |
260 000 |
CEC (1) (France métropolitaine) |
34 000 |
32 000 |
45 600 |
52 272 |
50 000 |
45 000 |
FNE Cadres (2) |
7 000 |
7 000 |
5 000 |
3 000 |
0 |
0 |
Total |
972 000 |
885 000 |
795 800 |
728 572 |
570 000 |
530 000 |
Source DARES : France entière sauf indications
(1) Nouvelles conventions
(2) en 2001, le FNE cadres est intégré dans le SIFE (programme de chômeurs de longue durée)
Cette diminution s'accompagne cette année encore d'une réorientation des dispositifs vers les personnes les plus en difficulté.
Tableau 4 : le recentrage des dispositifs
1997 |
1998 |
1999 |
2000 | |
Part des demandeurs d'emploi de + de 2 ans dans les SIFE collectifs |
28,8 % |
35,1 % |
37,7 % |
38,2 % |
Part des bénéficiaires du RMI dans les SIFE collectifs |
28,5 % |
30,2 % |
30,7 % |
29,5 % |
Part des publics prioritaires dans les CES |
57,0 % |
70,2 % |
74,0 % |
84,0 % |
Part des publics prioritaires dans les CEC |
65,5 % |
65,0 % |
71,0 % | |
Part des publics prioritaires dans les CIE |
73,6 % |
84,0 % |
84,2 % |
A la lumière de cet examen rapide des crédits consacrés à la formation professionnelle, deux points apparaissent clairement :
· L'Etat a modifié la nature de son engagement en tendant à se concentrer sur les publics traditionnellement exclus de la formation professionnelle ;
· Il tend à confier davantage - trop ? - de responsabilités en matière de formation professionnelles aux partenaires sociaux (AFR, frais de formation des contrats de qualification adultes).
Encore faut-il s'assurer que chacun a bien la même vision des liens entre formation professionnelle et travail.
II.- FORMATION PROFESSIONNELLE ET TRAVAIL :
DES LIENS MENACÉS ?
L'adoption de la loi relative à la réduction négociée du temps de travail a suscité un débat sur les liens entre travail et formation professionnelle. Outre les interrogations soulevées quant à l'incidence directe de la mise en place des trente-cinq heures sur le niveau et les conditions d'exécution des actions de formation, la réduction du temps de travail a favorisé l'émergence d'une réflexion chez les partenaires sociaux dont les premiers effets se sont faits sentir dans les travaux de la « refondation sociale » lancée au début de l'an dernier et dans l'équilibre de la nouvelle convention UNEDIC. Ces négociations ont placé la formation professionnelle au c_ur du dialogue entre partenaires sociaux. On peut toutefois se demander si une telle démarche sert l'intérêt des salariés.
La réduction du temps de travail a tout d'abord été une source de craintes pour la formation professionnelle : crainte qu'elle ne soit l'oubliée de la RTT et que celle-ci conduise à une réduction des actions ; crainte également qu'elle ne soit pas oubliée par ceux qui cherchent à faire de la RTT l'occasion de remettre en cause les acquis des salariés. On peut aujourd'hui constater que ces craintes ne sont pas - pour le moment ? - vérifiées.
La première crainte portait sur le niveau de l'effort de formation. L'un des moyens de détourner la réduction du temps de travail de ses objectifs et d'en atténuer les effets pour l'employeur était de sortir la formation du temps de travail effectif, de n'y conserver que les heures jugées productives dans une optique de rentabilité à court terme.
Les entreprises semblent de moins en moins s'impliquer dans la formation des salariés. On rappellera que depuis 1991, le taux de participation financière des entreprises à la formation professionnelle s'est infléchi ; d'abord stagnant, il est ensuite nettement orienté à la baisse puisqu'il se situait en 1999 à 3,22 % de la masse salariale contre 3,29 % en 1993 et qu'il a encore baissé en 2000 à 3,18 %. Par ailleurs, la baisse de la durée des stages va toujours croissant.
Cette dégradation de l'effort de formation des entreprises est essentiellement le fait des grands groupes puisque le taux de participation financière est passé de 5,06 % en 1994 pour les entreprises de plus de 2 000 salariés à 4,40 % en 2000, tandis qu'il augmentait de 1,61 % à 1,84 % pour celles de 11 à 20 salariés entre 1994 et 1999.
Il est également frappant de constater la part croissante des fonds versés aux organismes collecteurs au détriment des actions de formation propres à l'entreprise.
Dès lors, on pouvait craindre que la réduction du temps de travail ne serve d'alibi à une nouvelle réduction de l'effort d'autant qu'avaient été conclus après la première loi trente-cinq heures des accords illégaux qui remettaient en cause certains fondements de la formation professionnelle. La deuxième crainte venait donc de la tentation pour le patronat de faire des accords trente-cinq heures une occasion de saper le droit de la formation professionnelle.
Les accords conclus après la première « loi Aubry » heurtaient le droit positif sur trois points essentiels :
- la nature du temps de formation et sa distinction stricte avec le temps de travail ;
- le transfert au salarié de la responsabilité de sa propre « employabilité », en totale contradiction avec l'obligation d'adaptation qui incombe à l'entreprise ;
- le niveau de la négociation et les conditions de mise en _uvre du co-investissement.
Un certain nombre d'accords de branche avaient développé des clauses formation organisant un nouvel équilibre entre temps de travail et temps de formation en s'inspirant d'une démarche de co-investissement mais sans référence au dispositif issu de l'accord interprofessionnel de 1991 codifié à l'article L. 932-1 du code du travail. Ces clauses allaient de la simple affirmation selon laquelle une partie de la formation serait réalisée hors temps de travail par l'affectation d'un nombre défini de jours libérés par la réduction du temps de travail à la formation. Il est à noter que l'objet des actions éligibles à ce dispositif n'était pas déterminé mais qu'il excluait, dans la grande majorité des cas, les formations liées à l'adaptation au poste de travail. En revanche, pratiquement aucun accord de branche ne se référait à des formations débouchant sur des titres ou des diplômes.
Au niveau des accords d'entreprise, certains accords organisaient le co-investissement à partir d'une articulation entre le temps libéré par la réduction du temps de travail et le développement de la formation professionnelle. Ce lien était parfois structuré autour de la possibilité offerte d'utiliser une partie des jours de congé accumulés sur le compte épargne-temps à des actions de formation. Il pouvait également être organisé autour de la possibilité d'effectuer une partie des actions de formation sur le temps libéré par la réduction du temps de travail, l'entreprise prenant en charge les frais pédagogiques et l'ensemble des frais inhérents à la formation, en échange de quoi le salarié acceptait de se former en partie sur son temps libre.
En dépit de la volonté du législateur exprimée de façon claire par l'article 17 de la loi du 19 janvier 2000 relative à la réduction négociée du temps de travail, la décision du Conseil constitutionnel a validé ces accords illégaux. Il était donc à redouter qu'ils servent de modèle, qu'ils fassent école.
La crainte d'une réduction de l'effort de formation n'est pas jusqu'à présent corroborée par les chiffres, même s'il convient d'être vigilant sur l'effort de formation des petites entreprises dont le taux de participation serait, selon des données provisoires, passé de 1,84 % en 1999 à 1,68 % en 2000. Il serait évidemment paradoxal qu'elles diminuent leur effort au moment où la réorganisation du travail liée aux 35 heures impose au contraire une adaptation accrue des salariés.
Par ailleurs, les accords illégaux n'ont pas fait école grâce aux verrous posés par le législateur, notamment à l'article 17 de la loi du 19 janvier 2000 précitée qui pose notamment de façon très ferme le principe selon lequel « L'employeur a l'obligation d'assurer l'adaptation de ses salariés à l'évolution de leurs emplois » et que « toute action de formation suivie par le salarié dans le cadre de cette obligation constitue un temps de travail effectif ».
Il faut peut être voir dans la rigueur de cet encadrement l'une des raisons du relativement faible intérêt de la négociation, y compris celle relative à la réduction du temps de travail, pour le thème de la formation professionnelle.
L'année 1999 avait été marquée par un fort dynamisme de la négociation collective sur le thème de la formation professionnelle. On avait compté 124 accords dont un interprofessionnel et huit nouvelles conventions collectives comportent des dispositions relatives à la formation professionnelle.
Toutefois, le rapporteur avait souligné l'an dernier le caractère exceptionnel de l'année 1999. De fait, aucun texte interprofessionnel n'a été signé en 2000 et la négociation de branche est retombée à 113 accords. La négociation spécifique à la réduction du temps de travail, tout en intégrant assez fréquemment des dispositions relatives à la formation professionnelle, n'a pas placé celle-ci au c_ur de la réorganisation du travail.
La réduction du temps de travail s'est traduite notamment depuis 1999 par un regain de la négociation d'entreprise sur la formation professionnelle. En effet les négociateurs ont inclus le temps de formation dans les discussions, compte tenu des nouvelles possibilités offertes par les lois Aubry en matière de co-investissement et le compte épargne-temps.
Ainsi, entre 1998 et 1999, le nombre d'accords d'entreprise traitant de formation professionnelle a été multiplié par cinq (Cf. tableau 5), et quatre sur cinq relèvent d'une négociation sur la RTT.
Tableau n° 5 : La négociation d'entreprise sur la réduction de travail
et la formation professionnelle entre 1997 et 2000
THÈMES NÉGOCIÉS (*) |
1997 |
1998 |
1999 |
2000 (1) | ||||
Nb |
% |
Nb |
% |
Nb |
% |
Nb |
% | |
Ensemble des accords d'entreprise Dont ceux traitant de |
11 797 |
13 328 |
35 469 |
30 434 |
||||
- Réduction du temps de travail |
1 968 |
16,7 |
2 700 |
20,3 |
23 100 |
65,1 |
19 300 |
63,4 |
- Formation professionnelle |
257 |
2,2 |
288 |
2,2 |
1 458 |
4,1 |
960 |
3,2 |
Source : bilan de la négociation collective
* Il s'agit de la négociation collective
(1) Chiffres provisoires
Par rapport à l'ensemble des accords de RTT, ceux qui ont abordé la formation professionnelle relèvent d'unités de taille plus élevée (Cf. tableau 6). Ceci s'explique par le fait que traditionnellement, la part des dépenses de formation professionnelle continue comme celle des personnes bénéficiaires d'une formation augmente avec la taille des entreprises.
Tableau n° 6 - Répartition des accords d'entreprise selon la taille de celles-ci (en %)
1999 |
2000 | |||
Nombre de salariés |
Ensemble des accords de RTT |
Accords abordant la formation professionnelle |
Ensemble des accords de RTT |
Accords abordant la formation professionnelle |
Moins de 20 |
25,9 |
15,8 |
25,6 |
20,4 |
20 à 49 |
33,4 |
26,0 |
24,8 |
18,4 |
50 à 199 |
26,7 |
35,6 |
29,9 |
36,0 |
200 et plus |
11,2 |
20,6 |
15,9 |
23,0 |
Non enseignés |
2,7 |
2,0 |
3,8 |
2,2 |
Ensemble |
100,0 |
100,0 |
100,0 |
100,0 |
Source : MES/DARES
De même, les entreprises industrielles ont plus fréquemment associé la négociation sur la formation professionnelle à la RTT que celles relevant des services (cf. tableau 7)
Tableau n° 7 : Répartition des accords d'entreprise selon le secteur d'activité
1999 |
2000 | |||
Secteurs |
Ensemble des accords de RTT |
Accords abordant la formation professionnelle |
Ensemble des accords de RTT |
Accords abordant la formation professionnelle |
Agriculture |
0,5 |
0,2 |
0,2 |
0,2 |
Industries |
27,0 |
33,7 |
33,7 |
40,9 |
Construction |
6,6 |
7,6 |
5,3 |
6,1 |
Services |
63,4 |
57,2 |
56,5 |
50,3 |
Non renseignés |
2,5 |
1,3 |
4,3 |
2,5 |
Ensemble |
100,0 |
100,0 |
100,0 |
100,0 |
Source : MES/DARES
On relève une décroissance de l'intérêt des entreprises pour le thème de la formation professionnelle après le coup d'arrêt donné par la deuxième loi trente-cinq heures aux tentatives de sortir la formation du temps de travail effectif.
Le patronat, contraint par le cadre légal, semble avoir de ce fait perdu une grande partie de son enthousiasme pour cette question dans les branches et les entreprises et a alors tenté de déplacer le dialogue sur la formation professionnelle sur un autre terrain.
B. FORMATION PROFESSIONNELLE ET TRAVAIL AU C_UR DU DIALOGUE ENTRE PARTENAIRES SOCIAUX AU NIVEAU NATIONAL
Les partenaires sociaux ont fait du thème de la formation professionnelle l'un des huit chantiers de l'accord conclu le 3 février 2000, bref l'un des éléments de la prétendue « refondation sociale ».
Les discussions ont achoppé principalement sur la question du co-investissement.
L'état des lieux sur le terrain est le suivant.
Les dispositions de l'article 17 de la loi Aubry II, codifiées à l'article L. 932-2 du code du travail, laissent un large espace à la négociation collective.
● Au niveau de la branche
Le premier espace de négociation est celui des formations éligibles.
La possibilité de recours aux dispositifs est naturellement réservée aux formations relatives au développement des compétences des salariés.
Certains accords les définissent largement comme celles sans lien direct avec l'emploi occupé (fruits et légumes, commerce de détail ; mareyeurs expéditeurs) ou la qualification du salarié (agences générales d'assurances).
D'autres branches s'efforcent de cerner plus précisément les formations éligibles. Ce sont celles :
- visant à l'acquisition d'une qualification, d'une nouvelle qualification, ou au renforcement de « l'employabilité » (confiserie chocolaterie, commerce de gros) ;
- qualifiantes ou correspondant à des objectifs de gestion prévisionnelle des emplois (couture parisienne) ;
- visant en particulier à une promotion en dehors de l'entreprise, ou à l'acquisition d'un diplôme ou titre homologué (bâtiment entreprises artisanales) ;
- dans le cadre d'un parcours visant à une qualification (charcuteries industrielles).
La branche de la métallurgie prévoit, quant à elle, différents types d'actions, dont les formations qualifiantes ou visant à une promotion à un niveau ou à un échelon supérieur de la classification.
Le second espace de négociation est celui de l'ampleur de l'investissement du salarié.
Des accords envisagent simplement le suivi d'actions pour partie hors temps de travail (confiserie chocolaterie, commerce de gros ; crédit immobilier ; promotion construction ; sucreries distilleries), ou pendant les jours de repos RTT (avocats salariés ; mareyeurs expéditeurs).
La négociation d'entreprise est sollicitée pour la mise en _uvre du co-investissement (navigation intérieure, transport de marchandises, personnel sédentaire) et, à ce titre, les accords pourront (immobilier) ou devront (charcuteries industrielles) fixer la part maximale des jours de repos RTT concernés.
Un encadrement plus strict est fixé au niveau de quelques branches. Le maximum est ainsi de 25 % (agences générales d'assurances) ou 50 (couture parisienne) des jours de repos RTT, 10 jours de repos RTT par an (fruits et légumes commerces de détail), 21 heures par an (bâtiment entreprises artisanales).
La branche de la métallurgie fixe une limite propre particulièrement haute, qui est de 90 % du temps de la formation. Est toutefois prévue, en contrepartie, la rémunération de la plupart des actions de formation concernées au-delà d'un seuil annuel fixé au suivi d'actions hors du temps de travail (100ème heure ou 20ème jour pour les salariés payés au forfait).
● Au niveau de l'entreprise
En 2000, sur 19 000 accords (ou avenants) de RTT, 8 % traitent de la possibilité de suivre une formation pour partie sur le temps dégagé par la RTT, dont quatre sur dix relèvent d'entreprise de moins de 50 salariés. Dans près de 9 cas sur 10, ils se bornent à prévoir le déroulement de formations sur le temps dégagé par la RTT.
Les principaux secteurs ayant négocié sur le sujet sont les biens d'équipements et de consommation, le commerce, les services aux entreprises et la construction.
Ces accords montrent que la pratique d'un co-investissement servant les intérêts des deux parties est possible. Il est d'ailleurs à noter que les délégations de syndicats de salariés avaient accepté dans le cadre de la « refondation sociale » d'étudier l'hypothèse de formations réalisées pour partie hors du temps de travail. Un compromis sur un partage de la formation (hors évidemment celle qui fait partie par nature du temps de travail effectif) à parité entre temps du salarié et temps de travail avec prise en charge des frais pédagogiques par l'entreprise aurait peut-être été possible. Il semblait envisageable sous les réserves précédemment évoquées et à condition que le dispositif s'accompagne d'une démarche active de validation des acquis de l'expérience.
Ce sont les divisions de la délégation patronale et la surenchère pratiquée par certaines branches du côté patronal qui ont conduit à l'échec de la négociation le 24 octobre dernier. Comme le soulignait M. Daniel Croquette, président de l'AFREF, association française pour la réflexion et l'échange sur la formation, l'idée du MEDEF était « de rendre le salarié responsable de sa formation ». Le jusqu'au-boutisme d'une partie de la délégation patronale semble avoir compromis pour longtemps toute chance d'accord.
Témoigne également de ce jusqu'au-boutisme la proposition patronale de ne pas comptabiliser comme temps de travail effectif les heures de RTT passées par le salarié en formation dans le cadre du plan de formation, c'est-à-dire notamment de ne pas les comptabiliser au titre des heures supplémentaires. Ceci revient naturellement à profiter des trente-cinq heures pour sortir la formation du temps de travail effectif.
On peut dès lors s'interroger sur le bien-fondé de certaines évolutions récentes qui confient des responsabilités accrues aux partenaires sociaux en matière de formation professionnelle.
Peut-on faire confiance pour préserver la formation professionnelle à ceux qui remettent en cause certains de ses piliers ? La convention du 1er janvier 2001 incite de ce point de vue à la méfiance.
On peut ainsi penser au sort fait à l'allocation formation-reclassement (AFR). Instituée en 1987 par les partenaires sociaux, elle avait vocation à assurer la rémunération des chômeurs bénéficiaires de l'allocation unique dégressive et entrant en formation. Elle leur offrait en outre une protection sociale particulièrement avantageuse par rapport à celles des autres stagiaires de la formation professionnelle. La convention précitée a mis fin à un dispositif qui avait fait ses preuves.
S'il est remplacé par l'ensemble ARE-AFF, on peut légitimement s'inquiéter cependant sur la qualité des actions de formation dispensées dans ce cadre lorsque l'on sait que la convention nécessaire à la mise en _uvre du volet formation du PARE entre Etat, régions et organismes gestionnaires de l'assurance chômage n'est toujours pas signée. Qu'en est-il par ailleurs de la différence de traitement éventuelle par l'ANPE dans les prescriptions de formation selon que l'on est chômeur indemnisé ou non ?
Le rapporteur a naturellement des inquiétudes comparables sur la capacité des partenaires sociaux à prendre en charge dans le cadre de l'UNEDIC les frais de formation afférents aux contrats de qualification adultes.
Est-il par ailleurs de bonne politique de « noyer » dans l'allégement de cotisations sociales patronales octroyé pour les trente-cinq heures les primes et exonérations spécifiques à certains contrats (contrats de qualification adultes, CIE) ? Leur isolement ne permettrait-il pas de mieux faire percevoir aux employeurs l'importance accordée par l'Etat à ces contrats ?
Bref, plus que jamais, l'affirmation du rôle de l'Etat est nécessaire au maintien d'une formation professionnelle efficace, cohérente et ouverte à tous. Le rapporteur aurait préféré un budget faisant davantage place à une action engagée de l'Etat. Il n'est toutefois pas désireux de le démunir davantage en refusant l'approbation des crédits. Il s'en remet donc à la sagesse de la commission.
TRAVAUX DE LA COMMISSION
La commission a examiné pour avis, sur le rapport de M. Patrick Malavielle, suppléé par M. Maxime Gremetz, les crédits de la formation professionnelle pour 2002 au cours de sa séance du 30 octobre 2001.
Un débat a suivi l'exposé de M. Maxime Gremetz.
M. Jean Ueberschlag a considéré que le budget 2002 de la formation professionnelle était un mauvais budget qui, en cette fin de législature, signe la faillite d'une politique de la formation professionnelle inexistante. Après avoir affiché des ambitions irréalistes, le Gouvernement devrait avoir la modestie de reconnaître son échec.
Mme Hélène Mignon a formulé les observations suivantes :
- La validation des acquis professionnels consacrée par la loi de modernisation sociale constitue un grand progrès social qui ne doit pas être pris à la légère.
- Le budget de la formation professionnelle n'est pas le seul moyen pour l'Etat d'agir en matière de formation : il ne faut pas oublier qu'une part des crédits inscrits au budget de l'éducation nationale y contribue également. La formation initiale joue un rôle essentiel.
- Le rapporteur a évoqué le manque de crédits pour les contrats de qualification : il semble cependant inutile de prévoir des sommes considérables en la matière puisque, en raison du manque d'intérêt des chefs d'entreprises, les jeunes rencontrent des difficultés importantes dans leur recherche de stages. Il y a là une défaillance du monde professionnel.
- Le budget de la formation professionnelle pour 2002 est un budget ciblé sur les personnes en grandes difficultés ; les crédits destinés à soutenir l'application du programme TRACE seront notamment les bienvenus, de même que ceux destinés à lutter contre l'illettrisme.
- De façon plus générale, de l'avis des personnes travaillant sur le terrain, la formation professionnelle « traditionnelle » est aujourd'hui bien souvent démunie lorsqu'il s'agit de réinsérer des personnes en grande exclusion. Il convient plutôt de passer par des formules proches du parrainage ou du compagnonnage.
Le président Jean Le Garrec a déclaré ne pas partager l'analyse sévère du rapporteur. Le budget de la formation professionnelle pour 2002 a fait le choix de cibler son action sur les publics les plus en difficultés, mais il convient de rappeler qu'en la matière, la responsabilité première revient d'abord aux régions. Celles-ci ont fait de gros efforts pour réorganiser leurs aides afin de les adapter aux besoins. Ce choix de la décentralisation doit être soutenu, car le niveau régional est le plus efficace pour faire coïncider l'offre et la demande de formation et utiliser les moyens disponibles de façon pertinente.
On peut par ailleurs regretter que les problèmes de la formation professionnelle soient insuffisamment pris en compte par les partenaires sociaux, comme le montre la difficulté à mettre en _uvre les contrats de qualification. Enfin, il faut rappeler, pour s'en féliciter, l'inscription dans la loi du principe de validation des acquis professionnels qui constitue une vraie révolution tranquille.
M. Jean-Paul Durieux, président, a confirmé que les régions étaient désormais un partenaire incontournable en matière de formation professionnelle.
M. Pierre Hellier a signalé que si les stages de contrats de qualification étaient très difficiles à trouver, ce n'était pas en raison d'une carence des employeurs mais en raison de l'inadaptation du système.
M. André Schneider a également considéré que le budget de la formation professionnelle pour 2002 est un mauvais budget qui marque le désengagement de l'Etat par rapport à l'alternance. Aujourd'hui, 15 000 contrats de qualification sont laissés en suspens par manque de moyens : ce sont donc 15 000 jeunes qui se retrouvent face à de graves difficultés.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin a constaté que ce mauvais budget survient dans un contexte de ralentissement de l'emploi et de pénurie de main d'_uvre qualifiée, ce qui le rend particulièrement difficile à justifier par la majorité. L'effort de formation professionnelle devrait être accru et les chiffres sont là : tous les secteurs sont en baisse, ou au mieux, stables. L'action des conseils régionaux existe mais n'est pas nouvelle ; la loi sur la modernisation sociale existe aussi, mais sera inefficace sans mesures budgétaires. Il s'agit donc d'un mauvais budget et le groupe RPR votera contre.
En réponse aux intervenants, M. Maxime Gremetz, rapporteur pour avis suppléant, a apporté les réponses suivantes :
- La validation des acquis professionnels constitue un grand progrès qui s'appliquera dès l'adoption définitive de la loi sur la modernisation sociale, mais cela est sans conséquence sur le budget.
- Face aux problèmes rencontrés pour le financement des contrats de qualification, il serait souhaitable que la commission demande à l'Etat de respecter ses engagements et d'accorder les fonds nécessaires à l'AGEFAL afin qu'elle puisse répondre aux besoins des contrats en cours.
- On doit s'étonner que les crédits affectés au financement des contrats Etat-Régions soit en baisse de 16,7 % alors que les besoins sont en hausse. Cette réduction de crédits est d'autant plus paradoxale que l'on tend à étendre la décentralisation au profit des régions. Une telle évolution montre bien les limites et les dangers de la démarche contractuelle dont témoigne également le fait que la convention Etat-régions-UNEDIC sur la mise en _uvre du volet formation du PARE ne soit pas encore signée.
De façon plus générale, on doit déplorer que le lien entre travail et formation professionnelle se distende de plus en plus, l'Etat abandonnant la responsabilité de la formation professionnelle aux acteurs sociaux.
En conclusion, M. Maxime Gremetz, rapporteur pour avis suppléant, a indiqué qu'il s'abstiendrait sur les crédits de la formation professionnelle pour 2002.
La commission a ensuite donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la formation professionnelle pour 2002.
N° 3321-IX.- Avis de M. Patrick Malavieille (commission des affaires culturelles) sur le projet de loi de finances pour 2002 - Emploi et solidarité : Formation professionnelle
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