N° 3323
--
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
ONZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 11 octobre 2001.
AVIS
PRÉSENTÉ
AU NOM DE LA COMMISSION DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DES FORCES ARMÉES(1),
SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2002 (n° 3262)
TOME VII
DÉFENSE
TITRE III ET PERSONNELS DE LA DÉFENSE
PAR M. Aloyse WARHOUVER,
Député.
--
(1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page.
Voir le numéro : 3320 (annexe no 40).
Lois de finances.
La Commission de la Défense nationale et des Forces armées est composée de :
M. Paul Quilès, président ; M. Robert Gaïa, M. Jean-Claude Sandrier, M. Michel Voisin, vice-présidents ; M. Pierre Lellouche, Mme Martine Lignières-Cassou, M. Jean-Claude Viollet, secrétaires ; M. Jean-Marc Ayrault, M. Jacques Baumel, M. Jean-Louis Bernard, M. André Berthol, M. Jean-Yves Besselat, M. Bernard Birsinger, M. Loïc Bouvard, M. Jean-Pierre Braine, M. Jean Briane, M. Marcel Cabiddu, M. Antoine Carré, M. Bernard Cazeneuve, M. Guy-Michel Chauveau, M. Alain Clary, M. François Cornut-Gentille, M. Charles Cova, M. Michel Dasseux, M. Jean-Louis Debré, M. François Deluga, M. Philippe Douste-Blazy, M. Jean-Pierre Dupont, M. François Fillon, M. Christian Franqueville, M. Yves Fromion, M. Yann Galut, M. René Galy-Dejean, M. Roland Garrigues, M. Henri de Gastines, M. Bernard Grasset, M. Jacques Heuclin, M. François Hollande, M. Jean-Noël Kerdraon, M. François Lamy, M. Claude Lanfranca, M. Jean-Yves Le Drian, M. Georges Lemoine, M. François Liberti, M. Jean-Pierre Marché, M. Franck Marlin, M. Jean Marsaudon, M. Christian Martin, M. Guy Menut, M. Gilbert Meyer, M. Michel Meylan, M. Jean Michel, M. Jean-Claude Mignon, M. Charles Miossec, M. Alain Moyne-Bressand, M. Arthur Paecht, M. Jean-Claude Perez, M. Robert Poujade, M. Jean-Pierre Pujol, Mme Michèle Rivasi, M. Michel Sainte-Marie, M. Bernard Seux, M. Guy Teissier, M. André Vauchez, M. Émile Vernaudon, M. Aloyse Warhouver, M. Pierre-André Wiltzer.
INTRODUCTION 7
I. - L'ÉVOLUTION GÉNÉRALE DU TITRE III EST MAÎTRISÉE ET SATISFAISANTE 9
A. L'ÉVOLUTION DES GRANDES CATÉGORIES DE COÛT 9
B. L'ÉVOLUTION GLOBALE DES EFFECTIFS 10
C. LES EFFECTIFS, ARMÉE PAR ARMÉE 12
II. - LES MESURES PRISES EN FAVEURS DES PERSONNELS 17
A. LES MESURES EN FAVEUR DU PERSONNEL MILITAIRE 17
1. Des mesures sans équivalent dans un passé récent 17
2. Les sous-officiers principaux bénéficiaires 19
3. La poursuite de la valorisation de la condition des médecins militaires 20
B. LES MESURES EN FAVEUR DU PERSONNEL CIVIL 20
1. Les mesures catégorielles en faveur des civils 20
2. L'aménagement et la réduction du temps de travail (RTT) 21
3. La RTT aura des retombées pour les militaires 22
C. L'ÉVOLUTION PRÉOCCUPANTE DES EFFECTIFS CIVILS 23
III. - MAINTENIR LE LIEN ENTRE LA NATION ET SON ARMÉE APRÈS LA CONSCRIPTION 27
A. L'AMÉLIORATION DE LA CONCERTATION 27
B. L'ÉVOLUTION DU PARCOURS CITOYEN 28
1. L'enseignement de défense 29
2. Le recensement 29
3. L'évolution des journées d'appel et de préparation à la Défense 30
C. QUELS DEVENIR POUR LES PRÉPARATIONS MILITAIRES ? 31
1. Améliorer l'attractivité des préparations militaires 31
2. Une chute des effectifs explicable mais inquiétante 32
D. LE TROP LENT DÉMARRAGE DES RÉSERVES 32
IV. - LES DÉPENSES DE FONCTIONNEMENT HORS RÉMUNÉRATIONS 35
A. LA NÉCESSITÉ D'AMÉLIORER L'ACTIVITÉ DES FORCES 35
1. Les objectifs ambitieux des forces terrestres 35
2. La situation préoccupante de l'ALAT 37
3. Une meilleure prise en compte de l'activité de la Marine 38
4. Une activité satisfaisante pour l'armée de l'Air 39
5. Une amélioration sensible des moyens de fonctionnement de la Gendarmerie 39
B. LA QUESTION DES MUNITIONS D'INSTRUCTION 40
V. - LES RETRAITÉS DU MINISTÈRE DE LA DÉFENSE ET LES ANCIENS COMBATTANTS 41
A. LES RETRAITÉS DU MINISTÈRE DE LA DÉFENSE 41
1. L'évolution des pensions du ministère de la Défense 41
2. Les principales demandes des retraités militaires 43
a) La pension militaire des lieutenants retraités 43
b) La situation des veuves allocataires 43
c) L'harmonisation des pensions militaires d'invalidité au taux du grade de tous les sous-officiers sur les taux des officiers mariniers 44
d) La prise en compte dans une pension de vieillesse du régime général des bénéfices de campagne des militaires ayant effectué une carrière courte 44
e) L'attribution de la pension militaire d'invalidité (PMI) au taux du grade pour les titulaires d'une PMI rayés des cadres avant le 3 août 1962 45
B. UNE LÉGÈRE BAISSE DU BUDGET DES ANCIENS COMBATTANTS 45
CONCLUSION 51
TRAVAUX EN COMMISSION 53
I. - AUDITION DE M. ALAIN RICHARD, MINISTRE DE LA DÉFENSE 53
II. - AUDITION DE M. JEAN-FRANÇOIS HEBERT, SECRÉTAIRE GÉNÉRAL POUR L'ADMINISTRATION DU MINISTÈRE DE LA DÉFENSE 64
III. - AUDITION DES REPRÉSENTANTS DES SYNDICATS DES PERSONNELS CIVILS DE LA DÉFENSE 71
IV. - AUDITION DES REPRÉSENTANTS DES ASSOCIATIONS DE RETRAITÉS MILITAIRES 84
V. - EXAMEN DE L'AVIS 92
Mesdames, Messieurs,
L'exercice budgétaire 2002 constituera la sixième et dernière annuité de la loi de programmation militaire pour les années 1997-2002 qui consacrait la professionnalisation des Armées. Le prochain exercice constituera donc une phase essentielle pendant laquelle devront être atteints ou approchés au maximum, les objectifs qui permettront à la professionnalisation d'être achevée dans les délais, fin 2002.
Sans vouloir verser dans une béatitude déplacée, nous pouvons constater que le niveau des crédits du titre III présente un certain nombre de motifs de satisfaction, de l'aveu même des plus hautes autorités militaires, même si évidemment certains points peuvent toujours être améliorés. C'est ainsi que le Chef d'état-major des Armées, le Général Jean-Pierre Kelche, a considéré que le titre III pour 2002 était « satisfaisant ». De son côté, le Général Yves Crène, Chef d'état-major de l'armée de Terre, a indiqué devant notre Commission que le projet de budget, pour ce qui concerne les rémunérations et charges sociales, « permettrait à l'armée de Terre d'achever son processus de professionnalisation dans des conditions relativement satisfaisantes ».
Après des années 1999, 2000 et 2001 controversées et qualifiées par beaucoup de « difficiles », voire « d'austères », nous ne pouvons que nous féliciter de cette heureuse évolution qui devrait permettre de poursuivre la réalisation des effectifs professionnels, d'améliorer l'entraînement des forces et d'affirmer, par des mesures catégorielles sans précédent au cours de ces dernières années, la reconnaissance que la nation doit à ses forces.
Le budget de fonctionnement d'une armée professionnelle est primordial. C'est en effet lui qui permet de recruter et de conserver les personnels, dans un contexte global de baisse du taux de chômage et de marché de l'emploi de plus en plus concurrentiel.
C'est aussi le budget de fonctionnement qui permet aux militaires de se préparer à leurs missions par leurs exercices et leur entraînement. Même si nous ne négligeons évidemment pas l'importance du budget d'équipement, le budget de fonctionnement est celui qui fera que la professionnalisation réussira pleinement ou partiellement.
Une armée peut disposer d'équipements modernes sans être pour autant pleinement opérationnelle et efficace. Sans la détermination et la préparation de ses personnels, sans des soldats aguerris, motivés, parfaitement entraînés et prêts à donner le meilleur d'eux-mêmes, l'armée professionnelle française ne constituerait pas le formidable outil de projection que le législateur a voulu forger en 1996.
L'étude détaillée du projet de budget du titre III pour 2002 s'avère donc un exercice particulièrement utile, d'autant plus que le présent budget doit être évalué dans la double perspective de l'achèvement de la programmation militaire 1997/2002 et de l'élaboration de la loi de programmation militaire 2003-2008.
*
Après une présentation générale du titre III qui permettra d'apprécier l'évolution globale des crédits affectés au fonctionnement des Armées par le présent projet de budget et leur adéquation à la loi de programmation militaire, nous étudierons la situation des effectifs du ministère de la Défense, armée par armée. Nous examinerons ensuite les diverses mesures prises en faveur des personnels militaires et civils, ainsi que les difficultés qu'éprouve le ministère de la Défense à réaliser pleinement ses effectifs civils.
L'année 2001 marquant la suspension anticipée du service national, nous examinerons brièvement le fonctionnement du dispositif destiné à maintenir les liens entre la nation et ses armées. Puis, nous présenterons les dépenses de fonctionnement hors rémunérations et charges sociales avant d'achever par le traditionnel examen de la situation des anciens combattants et retraités du ministère de la Défense.
I. - L'ÉVOLUTION GÉNÉRALE DU TITRE III EST MAÎTRISÉE ET SATISFAISANTE
De l'avis général, le montant global des crédits du titre III pour 2002 est jugée satisfaisant. Les crédits de fonctionnement apparaissent convenables et la part des crédits de rémunérations et charges sociales semble stabilisée.
La première partie de ce rapport sera consacrée à l'évolution des grandes catégories de coût, puis à la progression globale des effectifs et à leur variation, armée par armée.
Le montant des crédits inscrits au titre III du ministère de la Défense, hors pensions, s'élèvera en 2002 à 16 457,10 millions d'euros (107 951,5 millions de francs), soit une augmentation de 2,3 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2001. Cette évolution est due en grande partie à la mise en _uvre de la professionnalisation ainsi qu'à l'impact d'un certain nombre de mesures prises en faveur du personnel et dont le détail sera fourni dans la deuxième partie de ce rapport.
TITRE III : DOTATIONS PAR GRANDES CATÉGORIES DE COÛTS
(en millions de euros) | |||
Catégories de coûts |
2000 |
2001 |
Evolution 2000-2001 |
Rémunérations et charges sociales |
12 906,62 |
13 199,99 |
+ 2,27 % |
Alimentation |
286,72 |
277,04 |
- 3,38 % |
Produits pétroliers |
452,79 |
468,04 |
+ 3,37 % |
Entretien programmé des matériels |
124,22 |
56,79 |
- 54,28 % |
SNCF |
145,95 |
150,61 |
+ 3,19 % |
Fonctionnement et activité |
2 169,29 |
2 304,71 |
+ 6,24 % |
Titre III hors RCS |
3 178,97 |
3 257,19 |
+ 2,46 % |
Total titre III (après transferts) |
16 085,59 |
16 457,18 |
+ 2,31 % |
(Source : ministère de la Défense) |
La croissance des rémunérations et charges sociales (RCS) en 2002 s'élèvera à 2,3 %, soit + 293 millions d'euros, ce qui correspond à une évolution proche de la moyenne observée au cours de la période 1997-2002. Cette croissance survient après deux années de hausses modérées : + 1,5 % en 2000 et + 0,7 % en 2001.
La part des crédits de rémunérations et charges sociales semble désormais stabilisée aux alentours de 80,2 %. Cette stabilisation des crédits de rémunérations bénéficie cependant d'une conjoncture favorable, le coût des mesures de revalorisation de la fonction publique appliquées à la défense (mesures dites « Sapin ») qui s'élève à 1,3 milliard de francs ayant été plus que compensé par trois facteurs d'économie : un besoin en pécules inférieur de 300 millions de francs à celui de 2001, la linéarisation des recrutements sur l'année, qui a réduit la dépense de 600 millions de francs et, enfin, de nombreuses vacances de postes, essentiellement civils, qui diminuent de 700 millions de francs les charges de personnel.
Les crédits hors RCS augmenteront de 2,5 % en 2002. Une économie de 76 millions d'euros, résultant de la sixième annuité de réduction programmée des effectifs (- 37 millions d'euros), de la rationalisation des moyens matériels
(- 28 millions d'euros) ainsi que des effets de la quatrième tranche de la revue des programmes (- 11 millions d'euros).
Par ailleurs, le projet de loi de finances prévoit l'actualisation de dotations pour tenir compte de l'évolution des prix (67 millions d'euros) et de l'augmentation de postes déficitaires (123 millions d'euros) comme l'indemnité compensatrice versée à la SNCF et les loyers de la Gendarmerie, par exemple.
En outre, des besoins nouveaux sont pris en compte à hauteur de 51 millions d'euros : ils correspondent à la volonté de renforcer l'activité des forces, de doter les Armées et services de moyens suffisants pour le développement de l'informatique et des télécommunications et d'assurer la mise aux normes sanitaires des activités hospitalières et de transfusion sanguine du Service de santé des Armées.
Enfin, des mesures d'ajustement négatives sont prévues sur des dotations d'entretien programmé des matériels à hauteur de 41 millions d'euros (269 millions d'euros), suite au transfert progressif de charges financières vers des chapitres de maintien en condition opérationnelle du titre V et le prélèvement sur la trésorerie du compte spécial des subsistances militaires est reconduit cette année à hauteur de 23 millions d'euros.
Les effectifs budgétaires du ministère de la Défense (hors comptes de commerce) s'établissent pour 2002 à 436 221, en baisse de 9 922 personnes sur un ans, soit - 2,2 %. Si on fait abstraction de la disparition des 22 818 derniers postes d'appelés, le ministère de la Défense est donc créateur net de 12 896 emplois.
Au total, 18 484 emplois nouveaux sont créés, dont 8 141 militaires du rang, 6 538 postes de volontaires, 913 emplois d'officiers et de sous-officiers de Gendarmerie et 2 692 postes civils.
CRÉATIONS ET SUPPRESSIONS DE POSTES AU PLF 2002
Militaires |
Air |
Terre |
Marine |
Gendar-merie |
DGA |
Services communs |
Total hors CC |
DGA |
Total | |
Officiers |
- 187 |
- 453 |
- 149 |
+ 213 |
- 562 |
+ 493 |
- 645 |
- 12 |
- 657 | |
Sous-officiers |
- 1 246 |
- 1 393 |
- 945 |
+ 44 |
+ 695 |
+ 687 |
- 2 158 |
0 |
- 2 158 | |
MDR |
+ 2 191 |
+ 5 884 |
+ 37 |
0 |
0 |
+ 29 |
+ 8 141 |
0 |
+ 8 141 | |
Appelés |
- 1 059 |
- 17 111 |
- 625 |
- 3 502 |
0 |
- 521 |
- 22 818 |
- 22 |
- 22 840 | |
Volontaires |
+ 999 |
+ 667 |
+ 571 |
+ 4 178 |
+ 44 |
+ 79 |
+ 6538 |
0 |
+ 6 538 | |
Sous-total |
+ 698 |
- 12 406 |
- 1 111 |
+ 933 |
+ 177 |
+ 767 |
- 10 942 |
- 34 |
- 10 976 | |
Civils |
Titulaires |
+ 154 |
+ 256 |
+ 141 |
+ 16 |
- 192 |
+ 700 |
+ 1 075 |
-346 |
+ 729 |
Contractuels |
+ 557 |
+ 498 |
+ 372 |
+ 215 |
- 181 |
+ 156 |
+ 1 617 |
+ 236 |
+ 1 853 | |
Ouvriers |
- 384 |
- 434 |
- 258 |
- 132 |
- 258 |
- 206 |
- 1 672 |
- 165 |
- 1 837 | |
Sous-total |
+ 327 |
+ 320 |
+ 255 |
+ 99 |
- 631 |
+ 650 |
+ 1 020 |
- 275 |
+ 745 | |
TOTAL |
+ 1 025 |
- 12 086 |
- 856 |
+ 1 032 |
- 454 |
+ 1 417 |
- 9 922 |
- 309 |
- 10 231 | |
CC = comptes de commerce |
En six années, les effectifs budgétaires professionnels de la défense auront globalement augmenté de 17,4 % et les effectifs des militaires du rang engagés auront plus que doublé.
ÉVOLUTION ANNUELLE DES EFFECTIFS PAR CATÉGORIE
(article 3 de la loi de programmation militaire)
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
LFI 2002 |
2002 | ||
nombre |
écart | ||||||||
Officiers |
38 456 |
38 523 |
38 527 |
38 475 |
38 403 |
38 306 |
37 738 |
- 451 |
38 189 |
Sous-officiers |
214 828 |
213 369 |
211 532 |
208 842 |
205 234 |
202 353 |
200 516 |
+ 1 220 |
199 296 |
Militaires du rang |
44 552 |
52 216 |
60 054 |
68 643 |
76 606 |
84 239 |
92 184 |
- 343 |
92 527 |
Total des militaires de carrière ou sous contrat |
297 836 |
304 108 |
310 113 |
315 960 |
320 243 |
324 898 |
330 438 |
+ 426 |
330 012 |
Civils |
73 747 |
74 875 |
76 241 |
77 929 |
79 964 |
81 796 |
80 995 |
- 2 028 |
83 023 |
Appelés ou volontaires(1) |
201 498 |
169 525 |
137 672 |
103 496 |
74 577 |
47 107 |
24 788 |
- 2 303 |
27 171 |
Total général |
573 081 |
548 508 |
524 026 |
497 385 |
474 784 |
453 801 |
436 221 |
- 5 937 |
440 206 |
(1) Pour 2002, il ne s'agira que de volontaires. La loi de programmation ne faisait pas de distinction entre les deux catégories. |
Le tableau ci-dessus, qui présente l'évolution des effectifs budgétaires par rapport à la loi de programmation militaire souligne à quel point cette dernière a été respectée. Quelques écarts, relativement faibles, apparaissent néanmoins en raison de modifications de périmètre qui sont intervenues depuis 1996. Aux écarts précédemment signalés sur la période 1997-2001 s'ajoutent, cette année encore, quelques mesures d'ajustement inscrites dans le PLF 2002.
Ainsi, des créations de poste ont été décidées : 200 postes de gendarmes d'autoroute, 700 postes de gendarmes (mobiles et départementaux), 200 postes de militaires infirmiers techniciens des hôpitaux des Armées (MITHA) assimilés à des sous-officiers. Le transfert de postes permanents à l'étranger sur des chapitres interarmées spécifiques (8 postes), le transfert d'emplois aux écoles de la DGA
(- 15 postes), la création de la quatrième année de l'école polytechnique (+ 300 postes), des transferts liés au soutien de la flotte (+ 4 postes) et sept autres transferts divers constituent des modifications intervenues hors loi de programmation.
Par ailleurs, les mesures d'adaptation à l'évolution des structures représentent une diminution de 2 250 postes, dont, pour 2002, 400 suppressions de postes liés à l'abandon du « rendez-vous citoyen » et 19 autres suppressions au titre de la revue des programmes de la Marine et de la DGA pour 2002.
De tailles et de structures différenciées, les Armées ont longtemps rencontré des situations très variées selon qu'elles incorporaient beaucoup (Terre) ou peu (Marine, Air) d'appelés, selon que leurs effectifs devaient croître (Gendarmerie) ou se réduire. Mais désormais, à un an de la fin de la loi de programmation, les structures convergent : partout, les effectifs en officiers et sous-officiers ont pratiquement atteint les objectifs assignés ; les derniers militaires du rang sont en cours de recrutement ; la catégorie des civils continue à être cruellement déficitaire.
L'armée de Terre aura perdu plus du tiers de ses effectifs entre 1996 et 2002. L'adéquation entre les effectifs réels et les effectifs prévus par le projet de loi de finances pour 2002 est particulièrement bonne pour les officiers et sous-officiers, à quelques dizaines ou centaines de personnes près. Les forces terrestres devront continuer à recruter de nombreux militaires du rang (engagés volontaires de l'armée de Terre ou EVAT), comme c'est le cas depuis 1996, afin d'atteindre l'objectif de 65 470, prévu par le projet de budget.
La diminution du taux de chômage n'a visiblement pas eu d'incidence négative et les embauches se sont poursuivies comme prévu. 12 800 engagés volontaires devront être recrutés en 2002. Par la suite, lorsqu'il ne s'agira plus que d'assurer le remplacement des EVAT ayant achevé leur engagement, un flux d'environ 8 000 embauches par an sera suffisant.
Terre |
Effectifs réels |
Effectifs théoriques | |||
1996 |
1er juillet 2000 |
1er juillet 2001 |
PLF 2002 |
LPM 2002 | |
Officiers |
17 461 |
15 678 |
15 810 |
15 792 |
16 080 |
Sous-officiers |
56 644 |
51 662 |
49 686 |
49 777 |
50 365 |
Militaires du rang |
30 202 |
54 289 |
60 660 |
65 470 |
66 681 |
Appelés et volontaires |
132 319 |
40 398 |
12 236 |
5 544 |
5 500 |
Civils |
31 946 |
26 318 |
26 234 |
31 543 |
34 000 |
Total |
268 572 |
188 345 |
164 626 |
168 126 |
172 626 |
PLF : projet de loi de finances LPM : loi de programmation militaire |
La catégorie qui regroupe les appelés et volontaires peut sembler encore éloignée de l'objectif : 12 236 au 1er juillet 2001 contre 5 544 seulement prévus en 2002. En fait, avec le départ des derniers appelés à l'automne 2001, cette catégorie va considérablement se réduire et le déficit en volontaires de l'armée de l'armée de Terre (VDAT) va apparaître crûment. On estime qu'environ 2000 VDAT manqueront à l'appel, soit près de 40 % des effectifs prévus. Le statut de VDAT est de création récente puisqu'il n'existe que depuis 1999. Moins bien rémunérés que les EVAT, les VDAT ne s'engagent que pour une période plus courte d'un an renouvelable. Le caractère récent du statut, conjugué à la moindre rémunération, expliquent probablement cette relative désaffection.
Le point le plus épineux des effectifs de l'armée de Terre concerne les civils. Alors que la loi de programmation affichait son objectif de faire davantage appel aux civils afin de laisser les militaires se concentrer sur le c_ur de leur métier, nous constatons année après année une diminution ou une stagnation du nombre de civils employés dans les forces terrestres.
De 34 000 civils prévus dans la loi de programmation militaires, le projet de loi de finances réduit l'objectif à 31 543. Mais même ce chiffre n'a pratiquement pas de chance d'être atteint, les effectifs réels stagnant autour de 26 300 depuis plusieurs années. Plusieurs raisons à cela : principalement l'interdiction d'embaucher des ouvriers d'Etat opposée au ministère de la Défense qui doit attendre que les sureffectifs de Giat-Industries et de DCN aient été redéployés. Mais comme le statut des personnels en question ne permet pas de mutation d'office, les déséquilibres subsistent ; autre raison : la difficile localisation géographique de certains régiments qui rebute un certain nombre de candidats reçus aux concours organisés par le ministère.
Les services du ministère poursuivent de louables efforts pour décentraliser les concours et tenter d'obtenir des dérogations à l'embauche de la part du ministère des finances, auquel il est subordonné de fait. Il en a encore obtenu 700 pour l'exercice 2002. Mais ce ne sont pas ces demi-mesures qui réduiront de manière substantielle un déficit qui s'élève en 2001 à plus de 4 800 personnes et qui atteindra environ 5 300 postes en 2002 si aucune mesure énergique n'est prise.
Les commentaires exprimés pour l'armée de Terre valent en grande partie pour la Marine : les effectifs en officiers et officiers mariniers (sous-officiers) sont très proches de ceux prévus à la fois par la loi de programmation et par le projet de loi de finances pour 2002. Ils sont légèrement en déficit pour ce qui concerne les militaires du rang (- 1 300) et très proches pour les appelés et volontaires dans la mesure où la Marine n'incorporait depuis déjà plusieurs années qu'un nombre très faible d'appelés.
Marine |
Effectifs réels |
Effectifs théoriques | |||
1996 |
1er juillet 2000 |
1er juillet 2001 |
PLF 2002 |
LPM 2002 | |
Officiers |
4 844 |
4 753 |
4 654 |
4 817 |
4 961 |
Sous-officiers |
32 530 |
31 159 |
30 216 |
29 390 |
30 136 |
Militaires du rang |
8 103 |
7 118 |
7 123 |
8 456 |
7 998 |
Appelés et volontaires |
17 906 |
4 073 |
1 435 |
1 613 |
1 775 |
Civils |
6 495 |
8 064 |
7 854 |
10 157 |
11 594 |
TOTAL |
69 878 |
55 167 |
51 282 |
54 433 |
56 464 |
Pour ce qui concerne les civils, le constat est également le même : un déficit d'environ 2 300 personnels, près du quart, sur un projet de loi de finances qui revoit pourtant à la baisse de 1 400 postes les effectifs civils prévus par la loi de programmation.
Le constat général se retrouve aussi pour les personnels de l'armée de l'Air : les effectifs d'officiers ont déjà atteint l'objectif fixé par la loi de finances pour 2002 ; ceux des sous-officiers poursuivent leur décroissance et atteindront sans trop de difficulté le chiffre requis. Les militaires du rang, par contre, connaissent un retard de 3 400 personnes dans leur montée en puissance et ce manque sera difficilement comblé en un seul exercice budgétaire. Pour les mêmes raisons que la Marine, le nombre d'appelés et de volontaires est proche de sa cible.
Air |
Effectifs réels |
Effectifs théoriques | |||
1996 |
1er juillet 2000 |
1er juillet 2001 |
PLF 2002 |
LPM 2002 | |
Officiers |
7 277 |
6 833 |
6 832 |
6 838 |
6 974 |
Sous-officiers |
42 813 |
40 084 |
38 896 |
37 716 |
38 392 |
Militaires du rang |
5 882 |
12 098 |
13 616 |
17 168 |
16 758 |
Appelés et volontaires |
32 674 |
5 460 |
1 525 |
1 942 |
2 225 |
Civils |
4 906 |
4 992 |
4 885 |
6 003 |
6 731 |
TOTAL |
93 669 |
69 467 |
65 754 |
69 667 |
71 080 |
De leur côté, les effectifs civils connaissent un déficit de 1 100 personnes
(- 18,6 %) qu'il sera difficile de combler, pour les mêmes raisons que dans les autres armées. D'ailleurs, les effectifs civils sont restés très stables depuis 1996.
La Gendarmerie présente un profil atypique par rapport aux autres forces armées : la loi de programmation militaire avait prévu dès 1996 que cette arme serait la seule à voir ses effectifs augmenter, puisqu'ils devaient passer de 93 669 à 97 884. Malgré la perte des appelés et les différentes mesures de périmètre, l'objectif de la loi de programmation a encore été revu à la hausse par le Ministre de la Défense, dans le souci de renforcer et de rendre plus efficace cette force de sécurité et d'améliorer la lutte contre la délinquance.
Air |
Effectifs réels |
Effectifs théoriques | |||
1996 |
1er juillet 2000 |
1er juillet 2001 |
PLF 2002 |
LPM 2002 | |
Officiers |
2 666 |
3 306 |
3 569 |
4 019 |
4 055 |
Sous-officiers |
77 728 |
76 449 |
79 122 |
76 893 |
75 337 |
Appelés et volontaires |
12 017 |
13 115 |
12 278 |
15 203 |
16 232 |
Civils |
1 258 |
1 506 |
1 556 |
2 019 |
2 260 |
TOTAL |
93 669 |
94 376 |
96 525 |
98 134 |
97 884 |
Malgré une augmentation continue depuis 1996, les effectifs d'officiers de Gendarmerie n'ont pas encore atteint les effectifs de 4 019 personnes prévus par le projet de budget, mais devraient s'en approcher : il en manque encore 450. Les sous-officiers, de leur côté, connaissent encore un léger sureffectif (+ 2 200) qui devrait être résorbé d'ici l'année prochaine.
L'effort principal du recrutement devra porter sur la catégorie des « appelés et volontaires » dont les effectifs nets devront être accrus de 3 000 personnes d'ici l'année prochaine. Comme la Gendarmerie incorporait en 2001 encore 2 000 appelés en cours de disparition, ce sont donc environ 5 000 gendarmes volontaires qu'il faudra recruter en quelques mois, ce qui paraît pour le moins difficile.
Enfin, le besoin en civil ne porte pas, dans l'absolu, sur un grand nombre de personnels (- 463 par rapport à l'objectif 2002) mais représente néanmoins 23 % des effectifs théoriques.
II. - LES MESURES PRISES EN FAVEURS DES PERSONNELS
Une des caractéristiques du projet de budget de la défense pour 2002 est l'importance des mesures prises en faveur des personnels qu'il s'agisse des civils ou des militaires, et cela en dehors même de la traduction en année pleine des revalorisations salariales et des mesures prises en faveur des bas salaires décidées cette année dans le cadre du plan dit « Sapin ».
Pour les militaires, les mesures catégorielles atteignent 38,12 millions d'euros, soit 250 millions de francs, et présentent plusieurs caractéristiques : elles n'ont pas d'équivalent dans un passé récent, elles bénéficient surtout aux sous-officiers et elles poursuivent la valorisation de la condition de médecin militaire.
Si on fait abstraction des mesures salariales générales qui ont profité aux militaires ainsi qu'aux civils (« Durafour » entre 1991 et 1997, « Zucarelli » entre 1999 et 2000 et maintenant « Sapin » pour 24,5 millions d'euros, soit 161 millions de francs en 2002), les Armées n'ont bénéficié que de 6,2 millions de francs de mesures spécifiques et de 50,8 millions de francs en 2001. Les mesures présentées dans le projet de loi de finances pour 2000 représentent donc un quintuplement.
RAPPEL DES MESURES D'AMÉLIORATION
DE LA CONDITION MILITAIRE PRISES EN 2001
LFI 2001 |
Coût en Euros |
A. Revalorisations indemnitaires |
|
Mesures nouvelles |
658 580 |
Total |
658 580 |
B. Autres mesures en faveur des personnels |
|
Plan de revalorisation des carrières des médecins militaires |
2 408 694 |
Revalorisation des primes des ingénieurs de l'armement |
762 245 |
Primes de qualification pour la Gendarmerie |
3 704 511 |
Nouvelle bonification indiciaire « politique de la ville » Gendarmerie |
259 163 |
Plan de requalification Gendarmerie |
609 796 |
Total |
7 744 409 |
TOTAL GÉNÉRAL |
8 402 989 |
Comme l'a souligné le Ministre de la Défense dans un message aux armées, ces dernières années ont été pour elles synonymes d'une intense activité dans un environnement évolutif et contraignant qui a demandé beaucoup d'efforts. Et pendant qu'elles se sont professionnalisées, les Armées ont continué à assumer leurs missions, qu'il s'agisse d'opérations extérieures ou de projections intérieures. Le besoin de reconnaissance, que votre rapporteur ainsi que d'autres parlementaires ont pu constater lors de leurs visites dans différentes unités, qui s'est exprimé à travers les organes de concertation du ministère et que les états-majors ont relayé, trouvent donc une première réponse.
Les mesures mises en _uvre par le projet de loi de finances pour 2002 bénéficieront à l'ensemble des forces armées et non seulement, comme en 2001, à la Gendarmerie, au service de santé et, dans une moindre mesure, à la Délégation générale pour l'Armement. Enfin, elles concernent en priorité les sous-officiers.
LES MESURES D'AMÉLIORATION DE LA CONDITION
MILITAIRE PRÉVUES POUR 2002
Plan de revalorisation des médecins militaires (2ème annuité) et transformation de médecins en médecins principaux (1) |
2 408 695 € |
Revalorisation indiciaire des sergents (toutes armées) |
14 461 314 € |
Augmentation du contingent de primes de qualification des sous-officiers diplômés (+ 5 617 pour toutes les Armées dont 4 208 hommes pour la Gendarmerie) |
12 075 487 € |
Création d'échelles IV (armée de Terre) |
1 829 388 € |
Augmentation du contingent de primes des atomistes de surface (+ 56 primes pour la Marine) |
259 163 € |
Revalorisation de l'indemnité spéciale de sécurité aérienne (armée de l'Air et Marine) |
975 674 € |
Augmentation du contingent de primes de qualification d'officiers brevetés (+ 31 primes pour la Gendarmerie) |
152 449 € |
Amélioration indiciaire : transformation d'échelles II en échelles III et d'échelles III en échelles IV (Gendarmerie) |
385 696 € |
Plan de requalification (Gendarmerie) |
533 572 € |
Provision pour revalorisation de l'indemnité journalière d'absence temporaire (Gendarmerie) |
5 030 818 € |
TOTAL |
38 112 256 € |
(1) Hors crédits redéployés au sein du budget de la Défense au titre de cette mesure (0,229 million d'euros) |
Si la réussite initiale du processus de professionnalisation impliquait un effort important en faveur des engagés dont la rémunération mensuelle sera passée d'environ 640 euros (4 200 francs) en 1996 à plus de 1 020 euros (6 700 francs) en 2002, il devenait nécessaire de valoriser les qualifications et les responsabilités exercées par les sous-officiers qui se verront attribuer plus des deux tiers des mesures mises en _uvre l'année prochaine.
Les mesures prises ont d'abord pour objectif d'éviter que, par un effet de tassement, la solde de certains sous-officiers ne devienne trop proche de celle des militaires du rang, revalorisée à plusieurs reprises. Prenons l'exemple de l'armée de Terre : comme le niveau de formation et de responsabilité des sous-officiers est plus important que ceux des militaires du rang, il importait de conserver un écart de rémunération significatif entre le grade de caporal-chef et celui de sergent, d'autant plus que les militaires du rang sont logés et nourris gratuitement, ce qui n'est pas le cas des sous-officiers. Tombé à une quarantaine d'euros par mois (moins de 300 francs), l'écart de rémunération, à situation comparable, entre un militaire du rang et un sergent sera naturellement augmenté par les nouvelles mesures budgétaires. Cela incitera peut-être davantage de caporaux-chefs à préparer l'examen nécessaire pour devenir sous-officier.
14,5 millions d'euros (94,9 millions de francs) permettront ainsi d'améliorer la situation des jeunes sergents qui bénéficieront d'une revalorisation indiciaire avant et après trois mois de service (huit points pour les plus jeunes, deux pour les plus anciens). Conjuguée à l'attribution de points d'indice supplémentaires dans le cadre du plan « Sapin », cette mesure devrait se traduire par une augmentation de l'ordre de 50 euros (328 francs) de leur solde mensuelle.
Par ailleurs, dans une perspective de fidélisation, les sous-officiers plus anciens verront, de leur côté, leurs compétences mieux reconnues grâce à la création de près de 6 000 nouvelles primes de qualification de 10 % de la rémunération soumise à retenue pour pension. Cette mesure, d'un coût de 12 millions d'euros (78,7 millions de francs), permettra d'attribuer la prime, non seulement à tous les majors et adjudants-chefs éligibles, comme c'est le cas actuellement, mais à un plus grand nombre d'adjudants. Un contingent de 4 200 primes destinées en particulier à la Gendarmerie répond à la volonté de reconnaître les responsabilités particulières des adjudants dans les unités de la Gendarmerie départementale. Pour leurs bénéficiaires, l'impact de ces mesures nouvelles sera chaque mois de l'ordre de 150 euros ou encore de 984 francs.
D'autres mesures complètent ce dispositif : contingent supplémentaire de 600 échelles IV pour les sous-officiers de l'armée de Terre, contingent supplémentaire de 56 primes d'atomistes (à 20 % de la solde brute) pour la Marine, revalorisation (de 12,5 % à 17 %, soit 90 euros ou 590 francs) de l'indemnité spéciale de sécurité aérienne allouée aux maîtres contrôleurs de la circulation aérienne de l'armée de l'Air, augmentation (de 20 %, soit de 24,7 à 30 euros ou de 162 à 197 francs) de l'indemnité journalière d'absence temporaire de la Gendarmerie mobile.
Enfin, le plan de valorisation de la condition des médecins, lancé cette année, se poursuit avec une amélioration de l'indemnisation des gardes de nuit qui se traduit par le versement d'une indemnité forfaitaire de 762 euros (5 000 francs) aux médecins effectuant plus de trois gardes de plus de douze heures en un mois pour un coût de 3,45 millions d'euros (22,6 millions de francs) en année pleine. Une amélioration du déroulement de carrière des médecins est également proposée : elle se traduit par la création en surnombre de 120 médecins principaux.
Ce plan, qui devra être poursuivi dans la durée, est destiné à conserver au service de santé son niveau d'excellence qui fait honneur aux armées et leur est extrêmement utile. Par son attractivité, il doit concourir à susciter davantage de candidatures, et à éviter que ne se creuse le déficit en médecins militaires. Rappelons que le Service de santé des Armées a beaucoup souffert de la disparition des appelés et notamment des étudiants en médecine qu'il utilisait volontiers.
Comme chaque année, le projet de loi de finances comporte quelques mesures catégorielles qui bénéficient aux personnels civils. Mais cette année, le projet de budget du ministère de la Défense pour 2002 intègre surtout les conséquences financières de l'aménagement et de la réduction du temps de travail des personnels civils.
Les militaires, qui ne peuvent être entièrement laissés à l'écart du mouvement de réduction du temps de travail vont également bénéficier d'aménagement.
Les mesures catégorielles décidées en faveur du personnel civil s'élèvent à 12,8 millions d'euros (84 millions de francs) auxquels il convient d'ajouter 3,2 millions d'euros (21 millions de francs) destinés à financer l'attribution de points différenciés pour les bas salaires et 6 millions d'euros (42 millions de francs) à titre de provision pour la mise en _uvre d'une allocation de cessation anticipée d'activité destinée aux personnels de DCN exposés à l'amiante, le décret ouvrant ce droit aux ouvriers étant en cours d'examen par le Conseil d'Etat. Ce décret transpose pour les civils du ministère de la Défense ce qui a été décidé pour le secteur civil ; une loi sera probablement nécessaire pour les personnels militaires.
En application du décret du 25 août 2000 relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique de l'Etat, le passage aux 35 heures hebdomadaires doit avoir été effectué au plus tard le 1er janvier 2002. Le ministère de la Défense est la première administration à avoir conclu un accord-cadre avec ses représentations syndicales, ce qui lui a permis de passer aux 35 heures dès le 1er octobre 2001. Ainsi, même les accords locaux qui n'ont pas été signés à cette date en bénéficieront rétroactivement.
La durée hebdomadaire moyenne annuelle du travail passe donc de 39 à 35 heures, sans diminution ni gel des rémunérations, le décompte du temps de travail se faisant sur l'année, sans préjudice des heures supplémentaires susceptibles d'être effectuées. Les « jours RTT » représentent le nombre de journées non travaillées dont bénéficient les agents. L'accord prévoit ainsi la mise en place de 18 jours de RTT sur l'année, dont neufs jours à la disposition de l'agent. Ces journées s'ajoutent aux 25 jours de congés payés qui sont la règle dans la fonction publique.
Par ailleurs, un compte épargne temps est institué. Il pourra être alimenté à raison de 10 jours par des jours de congé ou de RTT et devront être consommés dans les deux années. Les cadres bénéficieront d'un dispositif plus souple leur permettant de cumuler 18 jours pendant cinq ans.
L'accord-cadre est accompagné d'un volet indemnitaire d'un montant de 7,5 millions d'euros (49 millions de francs) permettant de forfaitiser les heures supplémentaires, de financer l'extension du régime des astreintes aux fonctionnaires contractuels et de compenser la normalisation des congés annuels pour les personnels administratifs des services déconcentrés dont l'indice brut est supérieur à 380.
Les 450 négociations locales (dans les régiments, bases aériennes...) ont débuté à la mi-septembre, après formation des chefs d'établissement, et devraient être achevées au cours de l'automne. Elles prendront toutes effet à la date du 1er octobre.
Incontestablement, la mise en place de la réduction du temps de travail a bénéficié des expérimentations d'aménagement du temps de travail lancées il y a quelques années dans certains établissements de la DGA, ainsi qu'à DCN. Elle a aussi bénéficié de la volonté politique du Ministre de la Défense.
Les dispositions du statut général des militaires conduisent à parler de « temps d'activité et d'obligations professionnelles » plutôt que de « temps de travail » pour les militaires
L'article 12 de ce statut général précise que « les militaires peuvent être appelés à servir en tout temps et en tout lieu (...) » ce qui rend difficile la fixation d'une durée hebdomadaire du travail. En conséquence, l'application stricte de la loi sur l'aménagement et la réduction du temps de travail (35 heures hebdomadaires ou 1 600 heures annuelles) ne semble pas directement transposable.
Toutefois, la spécificité du métier militaire (disponibilité, mobilité, entraînement, risque...) est prise en compte par le versement, en vertu de l'article 19 du statut général, d'une indemnité pour charges militaires ainsi que , le cas échéant, par d'autres indemnités plus spécifiques. Ainsi, la participation à une opération extérieure est prise en compte par le versement d'une indemnité spéciale de séjour à l'étranger. Les contraintes de la condition militaire trouvent d'ailleurs une contrepartie dans d'autres avantages statutaires. Toutefois, ainsi que l'a déclaré le Secrétaire général pour l'Administration du ministère de la Défense, Jean-François Hebert, il est nécessaire de prendre « en considération les aspirations des personnels militaires à bénéficier de davantage de temps libre lorsque les nécessité opérationnelles ne s'y opposent pas, afin de minimiser le décalage entre leur régime de travail et celui de la société civile ».
Sans remettre en cause la disponibilité statutaire qui est perçue comme légitime, le débat sur la conciliation de l'engagement professionnel avec la vie personnelle se développe au sein des Armées. La mise en place des 35 heures pour les salariés du secteur privé et pour les fonctionnaires relance cette réflexion.
Ainsi que l'a reconnu devant notre Commission le Chef d'état-major de l'armée de Terre, le Général Yves Crène, « les militaires constatent l'évolution de la société civile et la réduction du temps de travail, y compris pour les civils du ministère de la Défense. Au nom de la disponibilité totale, l'armée de Terre a établi des contraintes qui n'étaient pas toujours indispensables. Des allégements des astreintes non justifiées par des nécessités opérationnelles sont nécessaires pour ne pas décourager les familles de militaires ».
Tout en rappelant que les militaires bénéficiaient statutairement de 45 jours annuels de permission (contre 25 jours de congés payés pour les fonctionnaires civils et les salariés du secteur privé), le Ministre de la Défense Alain Richard a estimé devant notre Commission que, puisque l'ensemble de la société française allait « bénéficier de la réduction du temps de travail, il serait anormal d'en priver les militaires qui sont soumis à des obligations lourdes de disponibilité ». C'est dans ce contexte que, dans le cadre des travaux du prochain Conseil supérieur de la fonction militaire qui va se tenir en novembre 2001, le Ministre de la Défense devrait annoncer des mesures d'accompagnement au profit des militaires.
La situation des civils au sein du ministère de la Défense est paradoxale et contrastée. Alors que le nombre budgétaire des civils et leur proportion au sein du ministère augmentent, il s'agit d'une catégorie qui, depuis le début de l'actuelle programmation, est en déficit chronique et important d'effectifs.
Il apparaît toutefois indispensable d'analyser séparément la situation des fonctionnaires et agents contractuels, pour lesquels le déficit semble résulter d'une forte augmentation du nombre de postes, et celle des ouvriers d'Etat dont le redéploiement a désormais atteindre ses limites.
La loi de programmation militaire prévoyait un accroissement des personnels civils, hors DCN, de 73 700 personnes en 1996 à 83 000 en 2002, soit une hausse de 9 300 personnes ou encore de 12,3 %. En proportion des effectifs globaux du ministère de la Défense, hors comptes de commerce, les civils devaient passer de 13 % à 19 % des effectifs.
Or, le ministère de la Défense éprouve, depuis le début de la programmation de grandes difficultés à pourvoir ces postes, qu'il s'agisse des fonctionnaires ou des ouvriers d'Etat : de - 2 600 à la fin de l'année 1996, ce déficit a fortement crû : - 6 000 fin 1997, puis - 8 200 fin 1998, - 9 300 fin 1999. Les efforts déployés par le ministère de la Défense ainsi que des modifications de périmètre ont permis de réduire ce déficit à - 5 400 emplois fin 2000, mais le déficit s'est à nouveau creusé par la suite : - 7 500 postes au 1er juillet 2001.
EFFECTIFS CIVILS DU MINISTÈRE DE LA DÉFENSE
(HORS COMPTES DE COMMERCE)
2000 |
2001 |
2002 | ||||||
Effectifs |
Loi de prog. militaire |
Effectifs budgétaires |
Effectifs réalisés |
Loi de prog. militaire |
Effectifs budgétaires |
Effectifs réalisés (1) |
Loi de prog. militaire |
Effectifs budgétaires |
79 964 |
80 249 |
74 849 |
81 796 |
79 975 |
72 457 |
83 023 |
80 995 | |
(1) Au 1er juillet 2001 |
La comparaison entre les effectifs civils prévus en loi de programmation militaire avec les effectifs inscrits dans le projet de budget pour 2002 font apparaître une diminution de 2 028 postes résultant de mesures hors programmation inscrites dans différentes lois de finances depuis 1997 et qui ont modifié le périmètre de la défense sans remettre fondamentalement en cause la réalisation de la programmation. Le solde de ces mesures masque d'importantes variations telles que l'intégration du secrétariat d'Etat aux Anciens combattants en 2000 (+ 1 980 postes) ou la mesure de budgétisation de la DCN étatique (+ 1 365 postes de personnels civils).
Le déficit de la catégorie des fonctionnaires et contractuels est sans doute dû en grande partie à la très forte augmentation d'effectifs enregistrée : 10 900 emplois ont été créés entre 1996 et 2001, soit une hausse + 27 %. Sur le plan budgétaire, la défense compte, en 2001, 44 887 fonctionnaires titulaires et 6 125 agents contractuels contre 40 100 en 1996. Les fonctionnaires et contractuels manquant à l'appel ne représentent donc qu'un peu plus du quart des emplois créés dans la période et qui n'ont pas encore pu être pourvus, dans un contexte de baisse du chômage entamée en 1997.
Rappelons qu'à l'instar de toutes les administrations, le ministère de la Défense est soumis à la « mise en réserve » d'une partie de son personnel. Depuis trois ans, celle-ci porte sur environ 1 100 postes et correspond à peu près au « volant de gestion », c'est-à-dire aux emplois qui ne peuvent être pourvus à un instant donné pour des raisons techniques (délai entre l'admission d'un candidat à un concours et son arrivée, par exemple).
ÉVOLUTION DES EFFECTIFS BUDGÉTAIRES
DES PERSONNELS CIVILS (1995-2001)
Catégorie |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
TITULAIRES |
|||||||
- Catégorie A(1) |
4 386 |
4 578 |
4 657 |
4 776 |
5 028 |
5 412 |
5 480 |
- Catégorie B |
9 187 |
9 480 |
9 979 |
10 422 |
10 858 |
12 304 |
13 343 |
- Catégorie C |
19 506 |
18 911 |
19 243 |
19 997 |
21 222 |
24 222 |
26 064 |
- Catégorie D |
|||||||
Total |
33 079 |
32 969 |
33 879 |
35 195 |
37 108 |
41 938 |
44 887 |
CONTRACTUELS |
|||||||
- Catégorie A |
2 977 |
2 963 |
2 956 |
3 227 |
3 237 |
3 240 |
3 336 |
- Catégorie B |
3 385 |
3 222 |
3 115 |
2 831 |
2 725 |
2 766 |
2 227 |
- Catégorie C |
919 |
944 |
900 |
893 |
861 |
635 |
562 |
- Catégorie D |
4 |
2 |
2 |
||||
Total |
7 285 |
7 131 |
6 973 |
6 951 |
6 823 |
6 641 |
6 125 |
TOTAL GÉNÉRAL |
40 364 |
40 100 |
40 852 |
42 146 |
43 931 |
48 579 |
51 012 |
(1) dont ministre et secrétaire d'Etat |
Les agents contractuels, pour leur part, ne sont guère concernés par les augmentations d'effectifs car leur recrutement est freiné par les travaux en cours sur la résorption de l'emploi précaire. Environ 250 d'entre eux ont été titularisés en 2001 et à peu près autant de postes de contractuels supprimés du fait des restructurations. Au total, leur nombre qui était de 7 131 en 1996 s'établit à 6 125 en 2001, soit une baisse d'un millier (- 14 %) en cinq ans.
Les services du ministère continuent à produire des efforts pour rattraper ce décalage, notamment sur le plan de l'organisation et du déroulement des concours. Ainsi, depuis 1999, les concours sont ouverts de plus en plus tôt de manière à anticiper les ouvertures de postes et à les pourvoir le plus vite possible. Cette modification du calendrier traditionnel des concours est accompagnée d'une publicité plus ciblée en direction des candidats potentiels, notamment dans certaines spécialités habituellement déficitaires comme les ingénieurs ou les techniciens supérieurs d'études et de fabrication.
Le déroulement des concours a également fait l'objet d'améliorations destinées à en améliorer le rendement : des épreuves ont été simplifiées, certaines supprimées. La composition des jurys, traditionnellement sévères, a été revue, l'information des candidats améliorée, le recours à la liste complémentaire étendu, les délais d'affectation des lauréats réduits...
L'administration fonde également des espoirs sur une mesure qui est entrée en vigueur en 2001 : la déconcentration de certains concours. L'organisation de concours régionaux, à l'échelle de six grandes régions, pour les personnels des catégories B et C permettra à la fois de mieux répondre aux attentes des agents et des employeurs du ministère. Assurés de rester dans leur région d'origine, les candidats devraient être plus nombreux et les déceptions liées à la localisation géographique de l'affectation devraient être moins nombreuses chez les lauréats.
Sur le plan budgétaire, le ministère de la Défense compte 47 851 emplois d'ouvriers d'Etat en 2001, contre 50 362 l'an dernier.
Les difficultés rencontrées par le ministère en ce qui concerne cette catégorie de personnel résultent de l'interdiction d'embauche imposée de fait par le ministère de l'Economie et des Finances. Cette interdiction a été décidée il y a déjà plusieurs années de manière à ce que le ministère redéploie de manière interne les personnels en sureffectifs à la DGA, DCN et chez Giat-Industries.
Si la DGA ne connaît désormais plus de sureffectifs, ce n'est pas le cas de DCN qui n'a pas encore atteint son objectif de 13 200 employés. Or, nous constations déjà l'an dernier que les flux de transferts, importants ces dernières années de DCN vers les Armées, commençaient à se tarir : au début de l'année 2000, on estimait que 265 ouvriers seulement étaient susceptibles de rejoindre les forces, mais au 1er septembre, il n'avaient été que 60 à passer à l'acte.
Pour cette année 2001, sans que nous disposions encore de statistiques fiables, les Armées indiquent que les reclassements du personnel en provenance des établissements restructurés de Giat-Industries ou de la DGA « constituent une source de réalisation du personnel de plus en plus marginale ». Les chiffres pourraient concerner dans le meilleur des cas environ 200 personnes. Nous devons donc considérer que le redéploiement des personnels a aujourd'hui atteint ses limites.
L'obtention auprès de la direction du budget de dérogations pour procéder à des embauches exceptionnelles constitue un autre moyen de résoudre le sous-effectif. Mais les volumes accordés restent très parcimonieux : 150 emplois en 1997, 500 en 1998, 250 en 1999 et autant en 2000. En 2001, 250 embauches ont également été autorisées, principalement au profit de l'armée de Terre dont le déficit en civils s'élève à environ 5 000 postes. Autant dire une goutte d'eau. 700 nouveaux emplois sont inscrits dans le projet de loi de finances pour 2002. Mais ce n'est pas avec des dérogations portant sur quelques centaines de postes que sera résolu un déficit qui concerne plusieurs milliers d'emplois.
La transformation d'emplois vacants d'ouvriers d'Etat en crédits de sous-traitance ne constitue pour l'instant qu'une solution marginale et théoriquement réversible dont le ministère ne veut pas se priver sans toutefois y recourir dans de trop grandes proportions. Au titre des exercices 2000 et 2001, le ministère y a d'ailleurs recouru. Le coût du passage des personnels aux 35 heures l'en empêchera en 2002.
On peut également attendre quelques résultats de la transformation d'emplois vacants d'ouvriers d'Etat en emplois d'ouvriers fonctionnaires. Les emplois correspondants sont en effet maintenus au budget du ministère de la Défense et peuvent être pourvus dans des délais relativement brefs. Mais là encore, il s'agit de quantités insuffisantes pour réduire de manière significative le déficit.
Au total, malgré les efforts réels consentis par le ministère de la Défense pour réduire l'important déficit en personnel civil, tout porte à croire que de nombreux emplois vont continuer à être vacants tant que le ministère de l'Economie et des Finances continuera à bloquer avec autant de rigueur les embauches rendues nécessaires.
Il s'agit d'une situation dont il faudra pourtant sortir si nous ne voulons pas continuer à faire peser sur les militaires les conséquences de ce déficit. En effet, dans nombre d'établissements ou de régiments, les chefs de corps sont obligés d'affecter des soldats sur des postes qui devraient théoriquement être tenus par des civils. D'une part, cette situation prive les Armées de combattants professionnels dont elle aurait besoin par ailleurs dans ses missions de projection intérieure ou extérieure ; d'autre part, elle démotive des militaires qui se sont engagés pour tenir un poste dans les forces et non pour pallier l'absence de personnels civils.
III. - MAINTENIR LE LIEN ENTRE LA NATION ET SON ARMÉE APRÈS LA CONSCRIPTION
Pour beaucoup de personnes, le service militaire était le meilleur garant du lien entre la nation et ses armées. Même si cette idée doit être nuancée en raison, notamment, des fortes inégalités induites au cours des derniers temps entre les conscrits, il faut bien reconnaître qu'un risque de décrochage peut exister entre l'institution et la société civile.
Pour l'éviter, le Ministre de la Défense continue à faire évoluer les différents systèmes de concertation au sein des Armées de manière à ce que les militaires restent en phase avec l'évolution du monde civil. De la même manière, une attention toute particulière est accordée au « parcours citoyen » instauré lors de la professionnalisation des Armées et qui doit, en sens opposé, faire mieux connaître aux jeunes civils l'institution militaire. Enfin, un effort plus important devra être consenti en faveur du développement des réserves, autre lien fondamental entre les mondes civil et militaire.
Un rapport parlementaire de la Commission de la Défense, rendu public en juin 2000 par MM. Bernard Grasset et Charles Cova, avait formulé un certain nombres de propositions destinées, dans le cadre général de la préservation des liens entre la nation et ses armées, à améliorer la concertation au sein de l'institution militaire. Si la proposition d'instaurer un médiateur militaire n'a pour l'instant pas été retenue, la Commission de la Défense est heureuse de constater que les propositions visant à faire élire les représentants de catégories et à améliorer le sort du rapport sur le moral ont connu une suite.
Dans chaque unité militaire, il existe des présidents dits de catégories (officiers, sous-officiers ou officiers mariniers et militaires du rang) dont le rôle est de faire connaître au chef de corps le point de vue et les interrogations de la catégorie de personnel concernée. Il existe également des commissions participatives dont la mission est de contribuer à la gestion de la vie quotidienne des unités, en liaison avec la hiérarchie. A l'exception de quelques unités ainsi que de la Gendarmerie où des élections avaient déjà été mises en place, les titulaires de ces fonctions étaient, jusqu'à présent, désignés par le commandement local, ce qui pouvait limiter la représentativité des personnes retenues.
Par un arrêté en date du 12 avril 2001, le Ministre de la Défense a décidé de modifier le mode de désignation des présidents de catégories et des membres des commissions participatives en posant le principe de l'élection au scrutin secret des membres des instances militaires locales de participation.
Au sein des différentes formations, les présidents de catégories et les membres des commissions participatives seront désormais élus par leurs pairs. Ainsi, lors du prochain renouvellement de ces instances, les candidats se feront connaître à leur commandement local, lequel devra organiser des élections à bulletin secret. Ces représentants seront élus pour deux années renouvelables une fois. Ils pourront être assistés d'un suppléant désigné par le commandement sur proposition des élus. Le chef de corps aura la possibilité de récuser un candidat, mais devra soumettre au préalable cette récusation à l'inspecteur général des Armées, autorité relevant directement du Ministre de la Défense.
Le rapport sur le moral est un document transmis par chaque unité de base à l'état-major, de manière à informer la haute hiérarchie et le Ministre de la Défense sur le « moral » au sens large des militaires. Mais le franchissement de tous les échelons hiérarchiques contribue à édulcorer un document qui a beaucoup perdu de sa crédibilité, surtout dans la mesure où il n'était jusqu'à présent pas apporté de véritable réponse.
Pour remédier à cette situation, les Armées ont conduit une réflexion d'ensemble sur le devenir du rapport sur le moral et engagé une rénovation du processus d'élaboration de ce document et du retour des résultats.
L'objectif vise tout d'abord à alléger le dispositif d'élaboration du document pour le rendre plus concret. Il vise également à redistribuer les responsabilités vers les échelons hiérarchiques intermédiaires qui devront mettre en _uvre les réponses et mesures relevant de leur niveau. Surtout, ainsi que le Général Crène nous l'a annoncé en réunion de commission, le Chef d'état-major de l'armée de Terre apportera désormais une réponse aux questions soulevées par le rapport sur le moral. L'absence de réponse était, en effet, un des principaux éléments qui faisait perdre de son crédit à ce document.
Le parcours de citoyenneté a été créé par la loi n° 97-1019 du 28 octobre 1997 portant réforme du service national. Ce parcours se déroule trois phases : un enseignement de défense, un recensement en mairie à l'âge de seize ans et la participation à une journée d'appel de préparation à la défense (JAPD).
L'enseignement de défense, qui incombe à l'éducation nationale, est dispensé dans le cadre de l'éducation civique, juridique et sociale, en particulier en classes de troisième et de première. Cet enseignement, qui est en général assuré par des professeurs d'histoire, doit présenter aux élèves les enjeux de la défense nationale d'aujourd'hui, les menaces et les réponses à y apporter.
Les enseignants sont formés à cet enseignement dans le cadre de trinômes regroupant l'éducation nationale, la défense et l'institut des hautes études de la défense nationale (IHEDN) et par des outils pédagogiques réalisés par le ministère de la Défense et mis à disposition des enseignants.
La direction de la mémoire, du patrimoine et des archives (DMPA) contribue au développement des projets pédagogiques liés à l'enseignement de la défense. Une récente circulaire, signée le 6 juillet 2001 prévoit la possibilité, pour cette direction, d'apporter un soutien financier aux projets présentés par les établissements scolaires liés à la citoyenneté et à l'enseignement de défense.
Le service national n'est pas supprimé, il n'est que suspendu. En maintenant la possibilité théorique de rétablir l'appel sous les drapeaux à tout moment, la loi du 28 octobre 1997 préserve, par le recensement, la possibilité de recourir au recrutement d'une armée mixte.
Le recensement des jeunes gens et jeunes filles, abaissé à l'âge de seize ans, est donc une formalité obligatoire qui permet de connaître l'état de l'éventuelle ressource et de convoquer tous les jeunes à l'appel de préparation à la défense. Enfin, les fichiers issus du recensement facilitent également l'inscription des jeunes majeurs sur les listes électorales. Une attestation de recensement est délivrée. Elle est indispensable pour s'inscrire à un concours ou examen soumis au contrôle de l'autorité publique (baccalauréat, permis de conduire...). Les jeunes gens non recensés dans les délais ont la possibilité de régulariser leur situation jusqu'à l'âge de 25 ans.
Un bilan établi par les organismes du service national fait apparaître que le taux des jeunes gens nés entre 1980 et 1983 inclus et n'ayant pas effectué de démarche de recensement dans les délais était important et dépassait les 30 %. L'annonce de la suspension de l'appel sous les drapeaux a certainement été comprise, dans un premier temps, comme la fin de toute obligation vis-à-vis du service national. La tendance à se soumettre à l'obligation du recensement s'améliore toutefois pour les jeunes gens nés en 1984 qui sont 79 % à avoir effectué cette démarche dans les délais.
Toutefois, au 1er août 2001, le taux de jeunes gens nés entre 1980 et 1982 et n'ayant toujours pas participé aux opérations de recensement trois ans après la fin de la période légale est en moyenne de 3,5 %, ce qui signifie que la plupart des retardataires finissent par accomplir la démarche. Ce même taux, pour les jeunes nés en 1984, six mois seulement après la fin de la période légale, est de 16,7 %.
BILAN DU RECENSEMENT DE 1997 À 2000
Garçons nés |
Garçons nés |
Garçons nés |
Garçons et filles nés en 1983 |
Garçons et filles nés en 1984 |
|||
Année de recensement |
1997 |
1998* |
1998* |
1999 |
2000 | ||
Recensés dans les délais |
287 376 |
303 474 |
266 657 |
450 888 |
457 273 | ||
Régularisés |
118 564 |
103 631 |
132 677 |
243 765 |
120 047 | ||
Non recensés au 01/08/2001 |
12 661 |
15 574 |
17 967 |
57 013 |
116 018 | ||
Total des recensés au |
405 940 |
407 105 |
399 334 |
694 653 |
577 320 | ||
* En 1998 ont été recensés les jeunes hommes nés en 1981 et 1982. |
La journée d'appel de préparation à la défense (JAPD) a été mise en place depuis le 3 octobre 1998 pour les jeunes gens et depuis le 1er juillet 2001 pour les jeunes filles. Elle a concerné près de 1,8 million de garçons et 350 000 filles. Toutes les sessions sont désormais mixtes.
Le taux de présence à la JAPD reste relativement stable, aux alentours de 89 %, ce qui signifie qu'un citoyen sur dix n'effectue pas cette démarche pourtant obligatoire.
TAUX DE PRÉSENCE À LA JOURNÉE D'APPEL
DE PRÉPARATION À LA DÉFENSE
Session |
1998/1999 |
1999/2000 |
2000/2001 |
Bilan général 1998/2001 |
Taux de présence |
89,73 % |
89,87 % |
88,94 % |
89,94 % |
Le taux de satisfaction globale des jeunes est particulièrement élevé puisqu'il oscille entre 77 % et 82,5 % selon les sessions. Entre 15 % et 24 % des jeunes manifestent leur intérêt pour les activités de défense et notamment pour les préparations militaires ou un éventuel engagement.
Ces journées présentent également un grand intérêt pour l'éducation nationale dans la mesure où elles permettent la détection de jeunes en grande difficulté de lecture (3,6 % à 3,9 % en moyenne) dont les coordonnées sont transmises aux acteurs sociaux et éducatifs. La loi du 15 juin 2001 a, en outre, prévu l'obligation, pour les personnes participant aux journées d'appel de préparation à la défense de « présenter un certificat délivré par un médecin attestant qu'ils ont bien subi un examen de santé dans les six mois précédents ». Ceux qui ne présenteront pas ce certificat seront convoqués ultérieurement pour bénéficier d'un examen de santé gratuit. Ainsi donc, les journées d'appel de préparation à la défense n'ont pas pour seule vocation de présenter aux jeunes Français un aperçu de la défense de leur pays, mais également de détecter et de combattre l'analphabétisme ainsi que les mauvaises conditions sanitaires.
Une deuxième rencontre est proposée aux jeunes gens ayant manifesté le souhait de recevoir une information plus approfondie sur les Armées à l'issue de leur journée d'appel de préparation à la défense. Depuis sa mise en _uvre en 1999, près de 9 600 jeunes se sont déclarés volontaires pour cette deuxième rencontre et 3 000 y ont effectivement participé, dont 2 000 en 2000. Cette deuxième rencontre, pour laquelle les frais de transport sont à la charge des intéressés, permet entre autre de présenter l'éventail des carrières militaires et d'informer sur les différents types d'engagements possibles.
Depuis l'été 1999, les préparations militaires font partie du parcours de citoyenneté mis en place par la loi du 28 octobre 1997. A l'occasion de cette réforme, elles ont été adaptées pour conserver leur intérêt auprès des jeunes.
Outre le fait qu'elles sont, depuis lors, ouvertes aussi bien aux filles qu'aux garçons, les préparations militaires ont connu les modifications suivantes :
- leur durée a été adaptée : la préparation s'étale désormais sur quinze (Terre, Air, Gendarmerie) à dix-sept séances (Marine) dont dix à douze d'une journée organisée en fin de semaine et une période de cinq journées consécutives pendant les vacances scolaires ;
- une plus grande souplesse a été introduite dans le choix du lieu de formation qui est fixé en fonction des possibilités locales et du département de résidence du candidat ;
- les programmes ont été modifiés dans le sens d'une plus grande attractivité. A l'issue d'une phase initiale de préparation de premier niveau, des séances d'information sur les activités et les métiers de l'armée alternent avec des visites d'installations militaires, des activités de terrain et une initiation à la géopolitique pour les élèves de la préparation militaire supérieure.
Les préparations militaires procurent à ceux qui en bénéficient certains avantages non négligeables : attestation de formation aux premiers secours, préparation à certains permis de conduire, obtention de points supplémentaires pour l'avancement, en cas d'engagement dans la réserve, octroi de jours de permission supplémentaires pour les volontaires, accession à certaines activités sportives et artistiques de la défense, etc.
Depuis la suspension du service militaire, les préparations militaires ont vu leurs effectifs fondre dans la mesure, notamment, où le fait de suivre ces préparations permettait d'obtenir plus facilement des sursis pour achever des études universitaires et permettait également d'effectuer son service dans de meilleures conditions.
Ainsi que l'indique prudemment le ministère de la Défense, la pérennité de ces formations, qui s'inscrivent désormais dans un contexte radicalement nouveau, est tributaire de plusieurs facteurs : une information la plus large possible du public, l'intérêt qu'elle auront suscité auprès des jeunes et de leur capacité à s'adapter aux besoins de la nation et aux attentes des jeunes.
EFFECTIFS DES PRÉPARATIONS MILITAIRES
ET PRÉPARATIONS MILITAIRES SUPÉRIEURES DEPUIS 1995
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
2000 | |||||||
PM(1) |
PMS(2) |
PM |
PMS |
PM |
PMS |
PM |
PMS |
PM |
PMS |
PM |
PMS | |
Air |
2 447 |
773 |
2 095 |
951 |
1 255 |
388 |
161 |
98 |
10 |
35 |
4 |
32 |
Mer |
2 767 |
128 |
2 922 |
126 |
2 322 |
99 |
1 146 |
76 |
993 |
35 |
762 |
40 |
Terre |
15 845 |
1 853 |
12 601 |
1 439 |
7 064 |
1 045 |
1 407 |
347 |
1 147 |
273 |
986 |
182 |
Gendarmerie(3) |
- |
- |
- |
- |
- |
- |
- |
- |
231 |
0 |
226 |
24 |
TOTAL |
21 059 |
2 754 |
17 618 |
2 516 |
10 641 |
1 532 |
2 714 |
521 |
2 381 |
343 |
1 978 |
278 |
(1) PM : préparation militaire. | ||||||||||||
(2) PMS : préparation militaire supérieure. | ||||||||||||
(3) Avant 1999, la Gendarmerie n'organisait pas de préparation militaire ou de préparation militaire supérieure. |
La baisse drastique des effectifs inscrits aux préparations militaires (- 90 % sur cinq ans) ne peut empêcher de s'interroger sur le devenir de ces préparations qui représentent pourtant un potentiel de recrutement non négligeable et constituent un lien appréciable entre une partie de la jeunesse et les Armées.
La loi n° 99-894 du 22 octobre 1999 portant organisation de la réserve militaire et du service de défense achève le dispositif législatif prévu pour créer une armée professionnelle en assurant la création d'une composante réserve.
La loi garantit les intérêts de toutes les parties prenantes, réservistes, employeurs civils et militaires. La loi conforte les réservistes dans leur rôle de lien essentiel entre la défense et la société civile. Elle leur assure un statut social et fonde des relations entre la défense et l'entreprise sur un partenariat de long terme.
Tandis que le service national disparaissait progressivement, la réserve s'est ouverte aux civils même ceux n'ayant jamais eu d'expérience dans le domaine militaire. Si le poids des habitudes fait que la quasi totalité des actuels réservistes sont d'anciens militaires, les forces peuvent avoir besoin de spécialistes (techniciens, linguistes...) pour lesquels l'absence d'expérience militaire n'est pas un handicap pour intégrer la réserve.
BUDGET ANNUEL ALLOUÉ AUX RÉSERVES DEPUIS 2000
Air |
Terre |
Marine |
Gendar |
Services communs |
TOTAL | |
LFI(1) 2000 |
6,8 |
18,9 |
4,5 |
5,6 |
2,4 |
38,2 |
Dépenses réelles |
5,6 |
19,8 |
3,1 |
8,5 |
1,6 |
38,6 |
LFI 2001 |
7 |
19,2 |
4,7 |
9,3 |
3,3 |
43,5 |
PLF(2) 2002 |
7,2 |
19,7 |
4,9 |
12,3 |
4 |
48,1 |
(1) LFI : loi de finances initiales. | ||||||
(2) PLF : projet de loi de finances. |
Conformément aux dispositions de la loi de programmation militaire pour les années 1997-2002, la loi du 22 octobre 1999 a prévu des effectifs de 100 000 réservistes : 50 000 pour la Gendarmerie, 28 000 pour l'armée de Terre, 6 500 pour la Marine, 8 000 pour l'armée de l'Air et 7 500 pour les services communs.
Même si les effectifs progressent d'année en année, les objectifs sont encore loin d'être atteints, notamment pour ce qui concerne les militaires du rang pour lesquels un effort particulier devra être consenti. L'armée de Terre, par exemple, ne compte que 1 200 militaires du rang réservistes. Au total, l'état-major des forces terrestres se fixe pour 2002 l'objectif de 12 000 réservistes sur les 28 000 prévus par la loi, avec l'espoir de réaliser 80 % des droits ouverts pour les officiers, 60 % pour les sous-officiers mais seulement 15 % pour les militaires du rang.
NOMBRE D'ENGAGEMENTS À SERVIR DANS LA RÉSERVE (ESR)
SOUSCRITS EN 2000
Officiers |
Sous-officiers |
Militaires du rang |
TOTAL | |||||
Nombre d'ESR |
% |
Nombre d'ESR |
% |
Nombre d'ESR |
% |
Nombre d'ESR |
% | |
Armée de Terre |
3 917 |
65,3 % |
3 437 |
40,7 % |
1 225 |
9,0 % |
8 579 |
30,6 % |
Marine nationale |
900 |
55,2 % |
894 |
43,2 % |
63 |
2,25 % |
1 857 |
28,6 % |
Armée de l'Air |
1 142 |
63,4 % |
1 612 |
53,7 % |
54 |
1,7 % |
2 808 |
35,1 % |
Gendarmerie |
1 585 |
69,8 % |
3 210 |
16,3 % |
4 034 |
14,4 % |
8 829 |
17,6 % |
Service de santé des Armées |
536 |
31,5 % |
82 |
3,0 % |
- |
- |
618 |
8,8 % |
Le principal frein au développement de la réserve réside dans les difficultés qu'éprouvent la plupart des réservistes vis-à-vis de leurs employeurs, notamment pour ceux qui occupent des emplois d'exécution. Alors que, dans le monde anglo-saxon, être réserviste est un titre de gloire valorisant l'individu, c'est en France un élément gênant que l'on cache lors d'un entretien d'embauche. Les enquêtes montrent que certains réservistes demandent à effectuer leurs périodes militaires pendant leurs congés afin de ne pas porter préjudice à leur carrière professionnelle.
L'important déficit constaté en ce qui concerne les réservistes est d'autant plus regrettable qu'il s'inscrit dans un contexte géopolitique qui nous montre tout l'intérêt de cette catégorie de militaires. Dans les jours qui ont suivi les attentats qui ont frappé les Etats-Unis, l'armée américaine a rappelé plusieurs dizaines de milliers de réservistes venus renforcer une armée rapidement mise sur pied de guerre.
La doctrine d'emploi de la réserve est, en France, différente de celle des Etats-Unis : alors que les Américains considèrent leurs réservistes à l'égal des militaires d'active et n'hésitent pas à leur confier les mêmes missions offensives, les Armées de notre pays considèrent les réservistes comme une force d'appoint destinée en priorité à permettre aux forces d'actives de se concentrer sur leurs missions essentielles. Lorsque des unités d'active sont projetées en opération extérieures, par exemple, les réservistes sont plus particulièrement chargés du soutien et de la surveillance du territoire national, même si des spécialistes issus de la réserve sont régulièrement envoyés en mission à l'étranger.
DURÉE ANNUELLE MOYENNE DES PÉRIODES D'ACTIVITÉ
DANS LA RÉSERVE EN 2000
Officiers |
Sous-officiers |
Militaires du rang | |
Terre |
20 jours |
15 jours |
12 jours |
Marine |
18 jours |
19 jours |
28 jours |
Air |
20 jours |
20 jours |
18 jours |
Gendarmerie |
11 jours |
12 jours |
8 jours |
Quoi qu'il en soit, en même temps qu'elle renforce le lien entre la nation et ses armées, la réserve est destinée à constituer un complément non indispensable en temps de paix mais très utile en période troublée, voire en cas de conflit armé. Espérons que la période de tension qui s'est ouverte après les attentats du 11 septembre contribuera à faire prendre conscience à nombre de nos concitoyens de l'intérêt de la réserve et à gonfler ses effectifs.
IV. - LES DÉPENSES DE FONCTIONNEMENT HORS RÉMUNÉRATIONS
80,2 des crédits du titre III sont affectés aux rémunérations et charges sociales (RCS) . Il reste donc 19,8 % des ces crédits pour assurer le fonctionnement courant des unités et notamment leur entraînement qui revêt, pour une armée désormais entièrement professionnelle, une importance primordiale.
Les restrictions budgétaires de ces dernières années, conjuguées à d'autres facteurs, avaient conduit les forces à réduire leur entraînement. Le projet de budget du titre III pour 2002 semble consacrer une amélioration de l'activité plus que jamais nécessaire. Espérons toutefois que l'absence de réponse officielle de la part du Ministre de la Défense à nos interrogations sur ce sujet n'augure rien de fâcheux. Elle n'a pas facilité, sur ce point, le contrôle parlementaire.
Les exercices et l'instruction sont indispensables à une armée professionnelle appelée à servir de manière durable en opérations extérieures. Tombés à un minimum de 68 en 1999, le nombre de jours d'exercice devait remonter à 73 en 2000 avec un objectif de 100 sur le long terme. Or, pour des raisons tenant à des problèmes de disponibilité de matériel, de hausse des prix des produits pétroliers et aux engagement extérieures ou intérieurs, cet objectif n'a pu être tenu et le nombre de jours d'exercice est resté stable, à l'étiage de 68 dont seulement 34 avec matériels.
En 2001, la hausse des crédits constatée dans la loi de finances permet aux forces terrestres d'afficher un objectif de 80 journées d'exercice par soldat dans l'année. Mais l'impact de la variation du taux de change du dollar et des cours du pétrole devrait se traduire, selon l'état-major de l'armée de Terre, par une insuffisance estimée à 13,7 millions d'euros pour les carburants et combustibles opérationnels par rapport aux prévisions. L'amélioration de l'entraînement des forces terrestres dès 2001, loin d'être acquise, semble même compromise si les crédits dévolus aux carburants ne sont pas abondés.
Pour ce qui concerne 2002, les crédits nouveaux obtenus aux titre des activités (+ 16 millions d'euros) devraient permettre de poursuivre l'effort engagé cette année et d'augmenter le taux d'activité des forces (hors opérations extérieures) en le portant à 89 jours dont 45 avec matériels organiques. Mais comme pour les années précédentes, cela suppose que les prévisions qui ont servi de base à la construction du budget ne soient pas trop éloignées de la réalité, que la disponibilité des matériels soit suffisante et que les forces ne soient pas distraites de leur entraînement par des missions de projection extérieures ou intérieures. Au vu de l'actualité récente et de la tension internationale qui en découle, il se pourrait fort que ces conditions aient du mal à être réunies.
Notons également, pour mieux comprendre la signification des chiffres, que lorsqu'une unité de blindés part en man_uvre pour une quinzaine de jours statistiquement répertoriés, le temps réellement passé à man_uvrer avec les chars est plus proche de trois à cinq jours, le reste du temps étant consacré au déplacement vers le champ de man_uvre et au retour ainsi qu'à l'entretien du matériel. Ainsi, 45 jours de man_uvre avec matériels organiques, cela ne signifie pas forcément 45 jours d'entraînement aux commandes d'un engin.
Pour autant, l'objectif à atteindre reste celui des 100 jours d'entraînement, dont 50 avec matériels organiques comme cela est prévu par l'actuelle loi de programmation militaire et devrait être reconduit dans la prochaine.
Votre rapporteur a souhaité établir des comparaisons internationales sur l'entraînement des militaires de quelques armées occidentales. S'agissant des pays étrangers, il convient de considérer les chiffres avec les précautions d'usage, compte tenu de l'impossibilité d'en vérifier la réalité.
Les chiffres de l'activité des forces terrestres nous placent assez loin derrière les Armées professionnalisées des Etats-Unis et du Royaume-Uni, mais devant celles non entièrement professionnelles de l'Allemagne et de l'Italie.
ACTIVITÉ DES FORCES POUR L'ANNÉE 2000
TYPE D'ACTIVITÉ |
FRANCE |
ÉTATS-UNIS |
ROYAUME-UNI |
ALLEMAGNE |
ITALIE |
Nombre de jours de sorties terrain avec matériels organiques |
34 |
130 à 136 |
70 |
30 + 6 pour les déplacements : armes de mêlée 20 à 30: soutiens |
35 en moyenne (estimation) |
Nombre de jours de sorties terrain sans matériels organiques |
34 |
non connu |
40 à 60 (estimation) |
20 en moyenne (estimation) |
20 à 40 (estimation) |
En ce qui concerne l'aviation légère de l'armée de Terre, les chiffres sont plus contrastés. Les hélicoptères de l'ALAT volent manifestement davantage que ceux des autres forces terrestres, ce qui n'est pas sans conséquence sur la disponibilité d'appareils qui sont souvent plus sollicités qu'il ne devraient l'être.
Mais si on examine non plus l'utilisation des machines mais le nombre d'heures de vol des équipages, on se rend compte alors que l'entraînement des pilotes de l'ALAT, demeure largement inférieur à celui annoncé par les Armées britannique et américaine.
ACTIVITÉ DES FORCES AÉRIENNES
DES ARMÉES DE TERRE POUR L'ANNÉE 2000
TYPE D'ACTIVITÉ |
FRANCE |
ÉTATS-UNIS |
ROYAUME-UNI |
ALLEMAGNE |
ITALIE |
Nombre d'heures de vol annuelles / hélicoptère léger |
290 h/an |
210 h à 216 h/an |
280 h/an |
160 h/an |
80 h/an |
Nombre d'heures de vol annuelles / hélicoptère antichar |
247 h/an |
180 h/an |
180 h/an (estimation) |
150 h/an |
40 h/an |
Nombre d'heures |
225 h/an |
312 h/an |
Inférieur à |
188 h/an |
117 h/an |
L'ALAT en général, et notamment les équipages d'hélicoptères de man_uvre, connaît une diminution du nombre d'heures de vol de ses personnels. Ce sous-entraînement, s'il perdure, pourrait constituer à terme une menace pour la sécurité du personnel : beaucoup trop de jeunes pilotes de l'ALAT ont totalisé en 2000 moins de 150 heures de vol, seuil considéré comme minimum par l'état-major pour assurer la sécurité des personnels. Les statistiques fournies par le ministère de la Défense indiquent des moyennes comprises entre 122 et 145 heures par équipage.
Si la situation semble rester satisfaisante sur les théâtres extérieurs et outre-mer en raison de la priorité accordée au soutien des matériels qui y sont déployés, la faible disponibilité des matériels utilisés en métropole influe en revanche directement et de façon négative sur l'entraînement du personnel et sur son moral.
Avec une dotation de 326 millions d'euros (2 139 millions de francs) contre 310 millions d'euros (2 032 millions de francs) l'an dernier, les crédits de fonctionnement courant augmentent de 5 %. Les tensions structurelles de cette catégorie de dépenses devraient continuer à se réduire et permettre à la Marine de poursuivre l'augmentation d'activité des bâtiments de la flotte de 94 jours actuellement à 97 jours, l'objectif à terme restant fixé à 100 jours de navigation par an.
L'évolution favorable des crédits de titre III du budget de la Marine tient principalement à deux mesures : un rebasage lié à l'augmentation de l'activité des forces et une actualisation. A elle deux, ces mesures représentent près de 12 millions d'euros (78,7 millions de francs).
En outre, plusieurs transfert interviennent en ce domaine dont les deux plus importantes s'élèvent respectivement à 2,5 millions d'euros (16,4 millions de francs) en provenance des crédits d'entretien programmé du matériel (EPM) de l'aéronautique navale pour permettre la formation de pilotes de chasse aux Etats-Unis et à 0,914 million d'euros (6 millions de francs) en provenance de l'« EPM-flotte » afin que le Commissariat de la Marine assure le fonctionnement des magasins de rechange et le soutien des unités à terre (activités reprise à DCN).
Cependant, hors RCS, les crédits du titre III connaîtront par rapport à la loi de finances initiale 2001, une diminution brute de - 2,9 %. S'agissant des crédits d'alimentation, une baisse de 1,88 % des crédits s'explique par une réduction liée aux effectifs et une économie technique (neutralisée en 2001 puis reprise en 2002) de 0,54 million d'euros (3,54 millions de francs). Cette mesure n'aura cependant pas d'incidence car elle donnera lieu à une récupération en gestion par un prélèvement sur le compte spécial des subsistances militaires.
L'Amiral Jean-Louis Battet, Chef d'état-major de la Marine, a cependant émis deux regrets : d'une part, il a relevé la réduction des moyens d'entretien du matériel, désormais financés pour l'essentiel par le titre V ; d'autre part, la Marine n'obtient aucun moyen supplémentaire au titre des opérations de sous-traitance « dont les besoins s'affirment au sein d'une armée devenue professionnelle ».
Ainsi que le montre le tableau suivant, l'activité globale de l'armée de l'Air française est proche de celle du Royaume-Uni et devance l'Allemagne qui fait appel à des écoles de pilotage civiles pour la formation de ses pilotes et ne compte que peu de forces hors de ses frontières. Le nombre d'heures de vol annuel des pilotes de chasse français, qui correspond aux prévisions budgétaires, reste conforme aux standards de l'OTAN. Les pilotes qui participent aux opérations extérieures peuvent dépasser les 200 heures.
ACTIVITÉ DES PRINCIPALES FORCES AÉRIENNES
DANS LE MONDE EN 2000
(en heures de vol) |
France |
États-Unis |
Allemagne |
Royaume-Uni |
Activité totale armée de l' Aair |
291 125 |
2 036 000 |
125 000 |
340 000 |
Activité des pilotes de combat |
180 |
206 |
140 |
200 |
Comme il l'a indiqué devant notre Commission, l'armée de l'Air poursuit comme objectif l'augmentation de la participation des équipages à des exercices internationaux. Ainsi fin 2001, 30 % des équipages en escadrons auront participé à un exercice majeur interallié, contre seulement 10 % fin 2000. Le but pour 2002 est d'atteindre 36 %, ce qui correspond à un effort sans précédent d'amélioration de la qualité de l'entraînement des forces.
Hors rémunérations et charges sociales, les crédits de fonctionnement de la Gendarmerie nationale s'élèvent à 687,97 millions d'euros (4,15 milliards de francs), soit une hausse confortable de 11,31 % par rapport à 2001 (+ 69,91 millions d'euros ou 459 millions de francs). Grâce à l'apurement relatif des reports en 2001 et à la dotation initiale prévue pour 2002, le budget de fonctionnement de la Gendarmerie pour 2002 peut être qualifié d'excellent, en ce qu'il reflète la réalité des charges à couvrir et donne réellement à cette arme les moyens de fonctionner.
Après avoir connu un étiage en 1999, le budget de fonctionnement hors RCS de la Gendarmerie connaît une amélioration depuis 2000 : le fonctionnement quotidien des unités sur le terrain n'était plus assuré correctement, sinon par des moyens de fortune souvent nés de l'imagination des personnels.
Ainsi, au cours de l'exercice 2000, 350 millions de francs étaient venus abonder les chapitres fonctionnement puis à nouveau 330 millions de francs dans le budget 2001, faute d'une construction sincère de la loi de finances initiale pour 2001.
Le projet de loi de finances pour 2002 rompt avec cette logique de sous-estimation particulièrement pernicieuse dans la mesure où les effets négatifs qu'elle suscitait chez les personnels n'étaient que partiellement compensés par les mesures annoncées en cours d'année. Le projet de loi de finances pour 2002, qui remet donc à niveau des dotations de fonctionnement, bénéficie en priorité aux unités pour l'exécution du service quotidien.
Ainsi, la dotation prévue pour le fonctionnement des formations est en hausse de 7,2 % (21,34 millions d'euros ou 140 millions de francs), en raison notamment du rebasage des moyens destinés à financer les mesures prises par le Conseil de sécurité intérieure. Les crédits réservés à l'alimentation font l'objet d'un ajustement de 2,32 millions d'euros (15 millions de francs). Quant aux crédits alloués aux dépenses informatiques, ils progressent de 1,52 million d'euros (10 millions de francs).
Enfin, la dotation consacrée aux loyers enregistre également une hausse importante de 38,15 millions d'euros (250 millions de francs), soit 18,6 % de plus qu'en 2001. Elle représente sans nul doute l'effort le plus notable en matière de fonctionnement.
La réduction du format des Armées s'est traduite ces dernières années par une diminution régulière des crédits en munitions d'instruction, ceux-ci étant considérés comme essentiellement liés aux effectifs.
Toutefois, la disparition complète des derniers appelés, déjà peu nombreux dans les unités combattantes au cours des années 2000 et 2001, est désormais compensée par l'arrivée en grand nombre d'engagés volontaires pour les remplacer, notamment dans l'armée de Terre. Les besoins en munitions d'instruction ne devraient donc plus décroître, surtout si le nombre de journées d'exercice est appelé à augmenter.
Or, les faibles dotations en crédits de munitions d'instruction de ces dernières années ont conduit à consommer, à des fin d'exercice, des munitions acquises au titre de la constitution de stocks de guerre. Cette situation ne peut évidemment perdurer dans la mesure où, d'une part, ces stocks s'épuisent rapidement et où, d'autre part, leur finalité est de garantir son caractère opérationnel à la Défense. On se souvient des difficultés dans lesquelles ont été plongées les forces aériennes et navales en raison du manque de munitions, lors du conflit du Kosovo. Dans l'actuelle situation de tension internationale, nos forces ne peuvent se permettre de dilapider leurs réserves de munitions de guerre à des fins d'entraînement et ainsi de se démunir. Si elle peut être admise pour les munitions les plus anciennes, la politique consistant à puiser dans les stocks de guerre ne peut s'appliquer aux munitions nouvelles tant que le niveau de leur stock n'est pas suffisant. Par ailleurs, le coût élevé de ces nouvelles munitions nécessitera d'engager une réflexion sur la politique de stockage et d'utilisation. Un équilibre devra, notamment, être trouvé entre le développement et l'utilisation de munitions d'instruction et l'utilisation d'outils de simulation.
V. - LES RETRAITÉS DU MINISTÈRE DE LA DÉFENSE ET LES ANCIENS COMBATTANTS
Le présent rapport ne serait pas complet sans un examen de la situation des retraités du ministère de la Défense. Le rattachement depuis l'année 2000 du secrétariat d'Etat aux anciens combattants au ministère de la Défense nous conduit à présenter également les crédits consacrés à la réparation, à la reconnaissance et à la mémoire.
L'étude des pensions civiles et militaires versées par le ministère de la Défense présente un peu plus d'intérêt chaque année dans la mesure où la professionnalisation des Armées se traduit par la disparition des appelés qui n'étaient pas concernés par les pensions militaires, mais qui sont remplacés par des engagés et des fonctionnaires civils dont la plupart auront vocation à percevoir une retraite du ministère de la Défense. Si, dans l'immédiat, le passage à une armée de métier présente un coût évident en terme de versement de soldes, de primes et de pécules, à terme, l'arrivée de dizaines de milliers de militaires professionnels aura d'évidentes répercussion sur les pensions versées.
Au 31 décembre 2000, le ministère de la Défense versait 503 873 pensions militaires de retraite à des ayants droit (347 012) ou à des ayants cause (156 861). Le nombre de pensions versées est en augmentation d'environ 4 000 par rapport au 31 décembre 1999, soit une hausse de 1,2 %. Les montants versés sont également à la hausse : + 138 millions d'euros en un an, soit + 1,9 %.
Le ministère prévoit une continuité dans l'augmentation de la quantité de pensions versées puisque, selon ses prévisions, leur nombre devrait continuer à croître, quoi que plus modérément : + 0,5 % en 2001, + 0,7 % en 2002 avant de se stabiliser en 2003 (- 0,1 %). Les sommes versées continueront à augmenter : + 3 % en 2001, + 3,3 % en 2002 et + 0,7 % en 2002.
PRÉVISIONS DE RETRAITES POUR LES PERSONNELS MILITAIRES
2000 |
2001 |
2002 |
2003 | ||
Ayants droit |
Nombre |
347 012 |
349 626 |
353 010 |
352 305 |
Montant (M€) |
6 043 |
6 231 |
6 445 |
6 485 | |
Ayants cause |
Nombre |
156 861 |
156 884 |
157 190 |
157 347 |
Montant (M€) |
1 262 |
1 293 |
1 328 |
1 341 | |
TOTAL |
Nombre |
503 873 |
506 510 |
510 200 |
509 652 |
Montant (M€) |
7 305 |
7 524 |
7 773 |
7 826 |
Mais c'est surtout d'ici une quinzaine ou une vingtaine d'années que se feront sentir pleinement les effets financiers des départs en retraite, avec droits à pension immédiate pour beaucoup, des militaires qui sont actuellement engagés en grand nombre.
Sont exclues du tableau précédent les pensions dites « cristallisées », versées aux ressortissants des anciens territoires français d'outre-mer. D'un montant d'environ 30 millions d'euros, en forte diminution (- 10 %), ces pensions concernent environ 56 000 ayants droit ou ayants cause, contre 61 000 l'an dernier. Sont également exclues les pensions d'orphelins qui représentent 12 millions d'euros et concernent environ 9 300 personnes ainsi que les 1 400 allocations annuelles d'un faible montant. Ces restrictions sont également valables pour les tableaux suivants, pour des populations et des montants encore plus réduits.
PRÉVISIONS DE RETRAITE
POUR LES PERSONNELS FONCTIONNAIRES
2000 |
2001 |
2002 |
2003 | ||
Ayants droit |
Nombre |
20 395 |
20 470 |
20 545 |
20 603 |
Montant (M€) |
294 |
302 |
310 |
313 | |
Ayants cause |
Nombre |
6 273 |
6 172 |
6 113 |
6 054 |
Montant (M€) |
46 |
46 |
47 |
47 | |
TOTAL |
Nombre |
26 668 |
26 642 |
26 658 |
26 657 |
Montant (M€) |
340 |
348 |
357 |
360 |
Ainsi que le montre le tableau qui précède, le nombre de pensions servies à des fonctionnaires retraités du ministère de la Défense est relativement stable. Cette stabilité pourrait toutefois ne pas durer si le ministère parvient à recruter les nombreux civils dont il a besoin et que lui alloue la loi de finances.
PRÉVISIONS DE RETRAITE POUR LES PERSONNELS OUVRIERS
2000 |
2001 |
2002 |
2003 | ||
Ayants droit |
Nombre |
66 352 |
66 754 |
67 121 |
66 657 |
Montant (M€) |
1 076 |
1 111 |
1 148 |
1 152 | |
Ayants cause |
Nombre |
35 781 |
35 704 |
35 629 |
35 563 |
Montant (M€) |
264 |
271 |
278 |
282 | |
TOTAL |
Nombre |
102 133 |
102 458 |
102 750 |
102 220 |
Montant (M€) |
1 340 |
1 382 |
1 426 |
1 434 |
Pour ce qui concerne les personnels ouvriers par contre, la baisse des effectifs, entamée depuis déjà plusieurs années, laisse envisager une diminution progressive du nombre et du montant global des pensions versées.
Mais l'étude quantitative des pensions ne doit pas masquer la diversité des situations ni la variété des principales demandes exprimées par les retraités militaires du ministère de la Défense.
Régulièrement, les associations de retraités militaires expriment un certain nombre de demandes concernant des situations à leurs yeux injustes. Certaines de ces demandes aboutissent, comme celle concernant la revalorisation des retraites des sous-lieutenants admis à la retraite avant 1976 et de leurs veuves qu'un imbroglio juridique avait rendu inférieure à celles de certains de leurs subordonnés. La réparation de cette injustice, dans le cadre de la loi de finances pour 2000 et pour un coût de 1,6 million de francs intégralement supporté par le budget du ministère de la Défense, n'a pas fait disparaître les autres revendications.
L'augmentation de la pension des sous-lieutenants retraités ainsi que de celle de leurs veuves, a été inscrite dans la loi de finances pour 2000.
Les associations demandent également une réévaluation des pensions des lieutenants retraités avant le 1er janvier 1976, issus pour la plupart du corps des sous-officiers et qui n'ont pu, à l'époque, bénéficier du grade de major qui n'existait pas encore. Les associations souhaitent que soit reproduite, pour les lieutenants retraités avant le 1er janvier 1976, une solution identique à celle retenue par les sous-lieutenants. Le coût d'une telle mesure est estimé à 365 870 euros.
Mais l'administration du ministère de la Défense considère que cette mesure n'est pas transposable, en raison de la différence de nature entre les grades concernés et de l'évolution qu'ils ont connus.
Les veuves et orphelins de militaires décédés avant le 1er décembre 1964, reçoivent application des dispositions du code des pensions civiles et militaires de retraites issues de la loi du 20 septembre 1948. Afin d'atténuer les conséquences financières du passage d'une législation à une autre, la loi du 26 décembre 1964 avait prévu une allocation annuelle distincte de la pension de réversion. Cependant, pour certaines veuves, le mode de calcul de cette allocation, uniquement fondé sur le service actif et n'incluant pas les campagnes, a pu être défavorable. Le décret n° 98-414 du 22 mai 1998 a revalorisé, pour un montant global de 243 914 euros également à la charge intégrale du ministère, le taux des allocations annuelles de sorte que le montant de la prestation servie à ces veuves ne peut plus être inférieur à celui d'une pension de réversion attribuée dans le cadre de la loi de 1964.
Une différence subsiste encore cependant entre les veuves bénéficiaires d'une pension de réversion et les veuves allocataires lorsque la rente servie est inférieure au minimum garanti, fixé actuellement à environ 535 euros par mois. Alors que les premières bénéficient d'office d'un alignement sur le minimum garanti, les secondes doivent, pour atteindre ce même montant, solliciter auprès du Fonds de solidarité vieillesse le versement d'une allocation complémentaire qui peut donner lieu, sous certaines conditions, à une reprise sur succession.
Soucieuses de mettre un terme à cette différence de traitement, les associations d'anciens militaires proposent de soumettre les veuves allocataires aux dispositions du code des pensions civiles et militaires de retraites. Ils font valoir que ces personnes, dont le nombre est désormais très faible puisque leur mari est mort il y au moins trente-sept ans, perçoivent des pensions dont le montant est généralement peu élevé et que la mesure ne coûterait que quelques dizaines d'euros par allocataire et par mois.
Le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre pose comme principe que la pension d'invalidité est versée en fonction du grade détenu. Les indices pris en considération pour le calcul de la pension ont été fixés par le décret n° 56-913 du 5 septembre 1956. Les modifications de ce texte prises en 1981 et 1988 n'ont pas corrigé la différence existant entre les pensions des sous-officiers des armées de Terre et de l'Air et celle des officiers mariniers.
Le souhait exprimé est un alignement des pensions de tous les sous-officiers sur celle des sous-officiers de la Marine, plus avantageuses.
Une révision des pensions d'invalidité de l'ensemble des sous-officiers et caporaux-chefs sur la base des indices retenus pour l'armée de mer, y compris les veuves, entraînerait un surcoût d'environ 15 245 000 euros par an.
En application des dispositions du code des pensions civiles et militaires de retraite, les militaires peuvent prétendre à une pension s'ils ont effectué une durée minimum de quinze ans de services effectifs. Les militaires qui ont servi moins de quinze ans ne perdent pas pour autant le bénéfice de ces services pour leur pension. Ils peuvent prétendre à une affiliation rétroactive, c'est-à-dire que les services militaires qu'ils ont accomplis sont pris en compte, sous certaines conditions, par l'assurance vieillesse du régime général de sécurité sociale.
Les intéressés sont rétablis, pour les périodes durant lesquelles ils ont été soumis au code des pensions civiles et militaires de retraite, dans la situation qui aurait été la leur au régime d'assurance vieillesse, s'ils y avaient été soumis.
Ce transfert vers un autre régime a pour conséquence, pour ce personnel, l'application des règles propres à ce nouveau régime en ce qui concerne les modalités de décompte des services à inclure dans les périodes comptant pour la retraite qui effectivement ne tiennent pas compte de bonifications de campagne. La raison invoquée est que seuls les services contributifs peuvent être pris en compte.
Donner satisfaction aux associations de retraités militaires sur ce point coûterait environ 6,2 millions d'euros au budget de l'Etat.
Deux textes législatifs sont intervenus pour réglementer les modalités de calcul de la pension militaire d'invalidité. L'article L. 49 du code des pensions civiles et militaires de retraite de 1948 (aujourd'hui abrogé) prévoyait que les militaires pouvaient opter :
- soit pour une pension d'invalidité au taux du grade ;
- soit pour une pension rémunérant les services accomplis à laquelle s'ajoutait une pension d'invalidité au taux du soldat, cette option étant définitive et irrévocable.
La loi de finances rectificative pour 1962, entrée en vigueur le 3 août 1962, dispose que seuls les militaires retraités rayés des cadres après cette dernière date peuvent prétendre à une pension au taux du grade. Cette loi n'a pas prévu d'effet rétroactif.
Il découle de ces dispositions que les pensions militaires d'invalidité sont servies au personnel en activité, uniformément au taux du soldat, aux retraités rayés des cadres avant le 3 août 1962 et aux retraités rayés des cadres après cette date, au taux du grade.
La revendication actuelle consiste à demander la possibilité, non seulement pour tous les militaires rayés des cadres avant le 3 août 1962, mais aussi pour tous les ayants cause de ceux ayant opté pour le taux du soldat, d'obtenir leur pension au taux du grade.
Le coût d'une telle mesure s'élèverait à 2 744 000 euros pour les militaires pensionnés et à 11 738 000 euros pour les ayants cause. Comme pour les demandes qui précèdent, le contexte économique et budgétaire actuel ne permet pas de lui réserver une suite favorable.
L'administration des anciens combattants, rattachée depuis 2000 au ministère de la Défense, présente un budget autonome regroupant l'ensemble des moyens concernant le droit à réparation, le droit à reconnaissance, la solidarité, la mémoire et les établissements publics « Office national des anciens combattants et victimes de guerre » et « Institution nationale des Invalides ». Son budget pour 2002 s'élèvera à 3627,9 millions d'euros, en diminution, à périmètre comparable, de 1,99 % par rapport à 2001.
Votre Rapporteur souhaiterait formuler quelques observations sur ces crédits en raison de leur lien avec la politique de défense.
Comme en 2000 et 2001, les pensionnés de 2002 devraient être en diminution de 4 % du fait de leur disparition progressive et de la baisse régulière du nombre de nouvelles concessions de pensions. 442 389 en 1993, les ayants droit ne seront plus que 318 000 environ en 2002. De la même manière, les ayants cause seront passés de 209 962 en 1993 à 148 000 environ en 2002.
Les dotations budgétaires suivent naturellement cette tendance. Toutefois, le budget des anciens combattants compense cette baisse mécanique grâce à la revalorisation du point de pension et à quelques mesures nouvelles.
En effet, des dotations nouvelles viennent aplanir des situations considérées comme injustes. Ainsi, le projet de budget pour 2002 poursuit le déplafonnement des pensions des grands mutilés, engagé en 2000, en prévoyant un apport supplémentaire de 2,592 millions d'euros. Il est également prévu d'augmenter la majoration des pensions servies aux veuves des grands invalides.
Les crédits consacrés à la réparation de l'invalidité s'élèveront à 2 564 millions d'euros en 2002 contre 2 652 millions de francs en 2001, soit une baisse de l'ordre de 3,3 %. Sur ce montant, 1 492 millions d'euros (58,2 %) sont consacrés aux pensions et allocations d'invalidité, 958 millions d'euros (37,4 %) correspondent aux pensions et allocations versées aux ayants cause tandis que 114 millions d'euros (4,4 %) sont dévolus aux soins médicaux gratuits et aux appareillages.
1 224 millions d'euros iront aux anciens combattants de la deuxième guerre mondiale (63 %), 682 millions d'euros à ceux de l'Afrique du Nord et des autres conflits (35 %) et 34 millions d'euros (2 %) aux derniers survivants de la première guerre mondiale.
La Nation ne limite pas son action à la seule réparation du préjudice d'invalidité des anciens combattants et victimes de guerre mais s'efforce de leur manifester la reconnaissance et la solidarité qui leur sont dues pour les sacrifices qu'ils ont consentis à son profit.
Ainsi, depuis 1992, les crédits ont été en augmentation régulière grâce à l'adoption de mesures emblématiques, notamment la création du fonds de solidarité AFN en 1992 et le relèvement régulier depuis 1997 du plafond majorable de la rente mutualiste. En 2002, des crédits à hauteur de 16 millions d'euros viendront renforcer ce socle des mesures budgétaires.
Le projet de budget pour 2002 intègre l'arrivée massive à l'âge de 65 ans des anciens combattants d'Afrique du nord nés en 1937 avec une inscription de 53,44 millions d'euros supplémentaires sur la retraite du combattant. Il concrétise également l'abaissement à 60 ans de l'âge de la retraite du combattant pour les titulaires d'une pension militaire d'invalidité. 12,196 millions d'euros sont consacrés à cette mesure.
2,287 millions d'euros sont inscrits pour porter le plafond de la rente mutualiste de 110 à 115 points. La dotation d'action sociale de l'Office national des anciens combattants (ONAC) est renforcée de 1,525 million d'euros. Les crédits consacrés au fonds de solidarité connaissent une forte baisse (- 91,47 millions d'euros) en raison de l'arrivée massive à l'âge de la retraite de nombre de bénéficiaires, de la diminution des contingents constituant la population des bénéficiaires ainsi que de l'amélioration de la situation économique générale.
Les crédits relatifs à la reconnaissance et à la solidarité se répartissent de la manière suivante : 535 millions d'euros (52,6 %) pour retraite du combattant, 391 millions d'euros (38,5 %) pour la protection et les actions sociales et 91 millions d'euros (9 %) pour le fonds de solidarité.
Le budget consacré à la mémoire, en augmentation de 20 %, doit permettre de perpétuer le souvenir des sacrifices consentis pour la défense de la France et des valeurs républicaines. En 2002, les crédits consacrés à la mémoire s'élèveront à 11,74 millions d'euros auxquels il convient d'ajouter les annuités des contrats de plan Etat-région qui se traduisent, sur leur période, par un engagement financier de 6,86 millions d'euros ainsi que 9,15 millions d'euros pour les fondations de mémoire.
En 2002, les principales actions en faveur de la mémoire s'articuleront autour de plusieurs actions :
- une politique de mémoire dynamique, par le développement d'un maillage territorial autour du concept de « tourisme de mémoire ». Des chargés de mission ont été nommés afin d'explorer les ressources offertes par les régions pour valoriser à la fois leur histoire et leur patrimoine ;
- la poursuite des actions pédagogiques devant permettre de doubler le nombre de projets présentés par le ministère de l'éducation nationale ;
- le renforcement, en 2002, du rôle des grandes fondations de la mémoire de la déportation et de celle de la Résistance ;
- le soutien aux activités liées à l'information historique et aux cérémonies commémoratives ;
- le programme de réparation et de reconstruction des sépultures de guerre sera poursuivi ;
- le renforcement de la mise en valeur de hauts lieux de mémoire liés au second conflit mondial : la première phase des travaux consacrés au futur centre européen du résistant au Struthof sera entreprise ;
- la reconnaissance de la guerre d'Algérie sera prolongée par la construction d'un mémorial à Paris et par l'édification du conservatoire de la mémoire des conflits d'Afrique du nord à Montredon-Labessonie, dans le Tarn ;
- enfin, la valorisation du patrimoine archivistique de la défense et sa mise à disposition d'un public élargi seront poursuivies malgré la suspension anticipée du service militaire qui a conduit le service historique de l'armée de Terre a réduire fortement ses activités pendant quelques mois.
Au total, compte tenu des dotations figurant également au budget de la défense, plus de 11,74 millions d'euros seront consacrés en 2002 aux actions de mémoire auxquels il convient d'ajouter les annuités des contrats de plan Etat-région qui se traduisent, sur leur période, par un engagement financier de 6,86 millions d'euros ainsi que 9,15 millions d'euros pour les fondations de mémoire.
En France, l'administration des anciens combattants gère et entretient huit mémoriaux et hauts lieux, 263 nécropoles nationales (729 000 corps dont 224 000 en ossuaires) et 3 200 carrés militaires des cimetières communaux (115 000 corps). Elle a également la responsabilité de l'ensemble des sépultures belges, soviétiques, des tombes allemandes situées dans des carrés communaux ainsi que des cimetières polonais, roumains, russes et serbes. A l'étranger, elle gère 2 234 cimetières répartis dans 58 pays, soit 197 000 « morts pour la France » dont 90 000 en ossuaires.
Etablissement public administratif placé sous la tutelle administrative du ministère de la Défense, l'ONAC est chargé de veiller sur les intérêts matériels et moraux de ses ressortissants qui sont principalement les invalides pensionnés de guerre, anciens combattants, résistants, veuves pensionnées, pupilles de la Nation, déportés et internés, prisonniers de guerre, réfractaires, victimes civiles...
La subvention de fonctionnement versée par l'Etat passera de 37,5 millions d'euros en 2001 à 38,7 en 2002 (+ 3,2 %) tandis que la subvention d'action sociale s'établira à 10,6 millions d'euros en 2002 contre 11,4 en 2001 (- 7 %). Les versements à l'ONAC depuis le budget des anciens combattants passeront de 48,9 millions d'euros à 49,3, soit une hausse de 0,8 %.
Par ailleurs, une dotation d'investissement de 2,9 millions d'euros, prise sur le budget de la défense est également inscrite au budget 2002. Elle s'élevait à 1,6 million d'euros en 2001. L'ONAC a pris en charge en 2000 le paiement de l'indemnisation des biens juifs spoliés et des mesures de réparation au profit des orphelins juifs de la déportation. 203,1 millions d'euros ont été versés en 2001 et 33,5 millions d'euros sont inscrits pour 2002.
Fondée en 1674 par Louis XIV, l'Institution nationale des Invalides a, pour sa part, été érigée en établissement public à caractère administratif autonome placé sous la tutelle du ministère des anciens combattants en 1992, et donc de la défense depuis 2000.
Les missions de l'institution des Invalides sont de trois ordres :
- accueillir, à titre permanent ou temporaire, des invalides bénéficiaires des dispositions du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ;
- dispenser dans un centre médico-chirurgical des soins en hospitalisation ou en consultation aux malades et blessés en vue de leur réadaptation fonctionnelle, professionnelle et sociale ;
- participer aux études et à la recherche sur l'appareillage des handicapés.
Avec le projet de budget pour 2002, les Armées achèvent leur vaste réforme. La professionnalisation des personnels, qui est la clé de cette entreprise, est particulièrement réussie pour ce qui concerne la partie militaire : les effectifs d'officiers, sous-officiers et militaires du rang, à peu de choses près, correspondent aux besoins évalués il y a cinq ans. Les incitations au départ (pécules, mécanismes de reconversion...) ont donc connu une efficacité conforme aux prévisions.
La dernière année de transition devrait permettre aux effectifs réels de s'approcher encore davantage des effectifs budgétaires, eux-mêmes assez proches des prévisions de la loi de programmation. Malgré la situation de plus en plus concurrentielle du marché du travail, les Armées auront donc réussi à recruter en quelques années les dizaines de milliers d'engagés et de volontaires nécessaires pour remplacer les appelés et faire des armées de la République de véritables outils professionnels.
Mais la situation est moins brillante pour les personnels civils du ministère de la Défense, dont le déficit atteint des proportions inquiétantes malgré les efforts de redéploiement et la réorganisation des concours de fonctionnaires. L'interdiction, assortie de trop faibles dérogations, d'embaucher de nouveaux ouvriers ne permet pas d'espérer réduire significativement le déficit de cette catégorie de personnel. Sur ce plan, ni les dispositions de la loi de programmation, ni celles du projet de budget pour 2002 ne seront respectées. Une politique volontariste de la part du gouvernement sera nécessaire pour combler ce déficit, car l'expérience montre qu'il n'est pas sain d'affecter des militaires sur des postes prévus pour être occupés par des civils.
Mais cet aspect, pour l'instant partiellement inachevé de la professionnalisation, n'est qu'un des nombreux éléments de la vaste réforme entreprises par les Armées et ne doit pas dissimuler les réussites majeures qui poussent votre rapporteur à l'optimisme : l'augmentation des moyens devant permettre l'amélioration de l'activité professionnelle et de l'entraînement en est une, même si cette évolution demande à être poursuivie pour atteindre les objectifs de cent jours d'exercices pour l'armée de Terre et de cent jours à la mer pour la Marine nationale. Le nombre d'heures de vol des pilotes de l'ALAT, de l'armée de l'Air et de ceux de l'aéronavale mérite également une attention toute particulière.
Même s'il a qualifié de « contrasté » le bilan de la loi de programmation militaire 1997-2002, le Chef d'état-major des Armées, le Général Jean-Pierre Kelche a souligné devant notre Commission, et c'est le plus important, que le pari de la professionnalisation était gagné.
Comme il l'a laissé entendre, le projet de budget du titre III pour 2002 est globalement satisfaisant et équilibré. La baisse des dépenses de fonctionnement, fixée à - 20 % lors de l'élaboration de la loi de programmation pour les années 1997-2002 a finalement été limitée à - 18 %, ce qui est un compromis équilibré et apprécié par les militaires. Les personnels qui ont fait le choix de servir dans une armée professionnelle ont légitimement le droit d'être plus exigeants à l'égard du fonctionnement des forces. Et ce niveau d'exigence, en phase avec le reste de la société, ne manquera pas de monter à l'avenir.
*
Votre rapporteur considère donc que, même si la situation peut évidemment toujours être améliorée, pour ce qui concerne notamment la réalisation des effectifs civils ou l'entraînement des forces, le projet de titre III pour 2002 qui nous est soumis constitue un réel progrès qui prouve que les demandes exprimées, entre autres, par notre Commission au cours des années précédentes ont été entendues. Ce projet de budget permettra aux forces d'achever sereinement leur vaste réforme de professionnalisation et d'entrer avec confiance dans la prochaine loi de programmation militaire.
I. - AUDITION DE M. ALAIN RICHARD, MINISTRE DE LA DÉFENSE
La Commission de la Défense a entendu, le 18 septembre 2001, M. Alain Richard sur le projet de budget pour 2002.
Le Président Paul Quilès a remercié le Ministre d'être venu présenter le projet de budget de son ministère pour 2002 immédiatement après l'examen du projet de loi de finances par le Conseil des ministres. Il a alors remarqué que la Commission serait sans doute également conduite à évoquer les terribles événements qui ont endeuillé les Etats-Unis et à en examiner les conséquences.
Puis, abordant le projet de budget, il a relevé un accroissement sensible du titre III et indiqué que les crédits de rémunérations faisaient l'objet d'une revalorisation qu'il a jugée nécessaire pour maintenir l'attractivité du métier des armes et fidéliser les personnels. Notant que les besoins de remise à niveau des crédits de fonctionnement étaient également pris en compte, il s'est demandé si cet effort indispensable ne risquait pas de peser sur l'équilibre entre les titres III et V, au-delà de ce qui avait été prévu lorsque la décision de professionnalisation a été prise. Il a, par ailleurs, observé que la stabilisation globale des crédits d'équipement permettrait des commandes et livraisons significatives, puis demandé des précisions sur les ressources additionnelles dégagées par report de crédits.
M. Alain Richard, Ministre de la Défense, a souhaité replacer la présentation du budget 2002 dans un triple contexte :
- premièrement, l'année 2002 verra l'achèvement de la loi de programmation militaire 1997-2002, votée en 1996, qui a organisé la transformation de l'outil de défense en vue de constituer des forces professionnelles, adaptables et mobiles, dotées d'un équipement du meilleur niveau technologique ;
- deuxièmement, les engagements extérieurs des forces ont confirmé la pertinence des choix effectués dans la conception et la réalisation du modèle d'armée 2015, tout en mettant en lumière certaines lacunes capacitaires. Ils ont permis de démontrer la détermination et la valeur opérationnelle des unités déployées et donné tout leur sens aux efforts consentis pour les doter des moyens nécessaires ;
- troisièmement, ces engagements extérieurs ont rendu plus manifeste la nécessité de construire l'Europe de la Défense, souhaitée de longue date par notre pays. Durant sa présidence de l'Union européenne, la France a favorisé des progrès significatifs dans la mise en place de la politique commune de sécurité et de défense. Un travail de traduction en organisation militaire des objectifs définis à Helsinki a été mené à bien. Pour la première fois, des représentants des forces armées des quinze nations de l'Union effectuent ensemble et de manière exemplaire un travail de planification militaire.
Le Ministre a ensuite indiqué que le projet de loi de finances pour 2002 donnait à la Défense les moyens d'achever la mise en _uvre de la loi de programmation militaire. Le ministère disposera en 2002 de 29,3 milliards d'euros hors pensions (192,195 milliards de francs), soit une augmentation de 1,6 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2001.
Le Ministre de la Défense a assuré que ce budget permettrait d'accompagner l'achèvement de la professionnalisation des armées. La mutation engagée en 1997 a été menée à bien, les étapes prévues ayant été respectées, voire anticipées, comme la suspension du service national. Les restructurations nécessaires ont été conduites et leurs conséquences économiques, sociales et financières maîtrisées.
Conformément au niveau d'effectifs défini par la loi de programmation militaire 1997-2002, le budget de la Défense pour 2002 prévoit le recrutement net de près de 18 500 personnels pour aboutir à la réalisation du format fixé, compte tenu de la suspension de la conscription.
Le ministère de la Défense comptera fin 2002 436 221 personnels civils et militaires, soit 99 % des 440 000 emplois prévus par la loi de programmation militaire.
En 2002, l'effectif des militaires du rang atteindra 92 180 personnes, en augmentation de plus de 8 000. Le nombre des volontaires sera porté à près de 25 000, en augmentation de 6 500. Le service de Santé des Armées recevra 371 emplois supplémentaires.
En cohérence avec l'accord signé dès juillet 2001 sur l'aménagement et la réduction du temps de travail, 2 200 agents civils et ouvriers d'Etat seront recrutés.
Le Ministre de la Défense a par ailleurs indiqué qu'un effort financier très important, à hauteur de 281 millions d'euros, serait consenti en faveur de l'accompagnement social de la professionnalisation et des restructurations.
Des mesures indemnitaires pour l'ensemble des personnels civils et militaires du ministère sont en outre prévues pour un total de 79 millions d'euros. Des mesures particulières visant à développer l'attractivité des emplois, la valorisation des compétences acquises et la fidélisation des personnels en place ont également été inscrites au projet de budget. Ainsi, les sous-officiers dont le rôle est capital au sein d'une armée professionnalisée, mais qui ne sont pas concernés par les mesures générales prises en faveur des bas salaires, font l'objet de mesures spécifiques.
Enfin, les réserves, composantes essentielles du nouveau système de défense, bénéficieront de 6,1 millions d'euros de moyens supplémentaires.
Abordant la question de l'entraînement, capitale pour une armée professionnelle engagée dans des opérations extérieures internationales, le Ministre de la Défense a indiqué qu'un crédit de 30,5 millions d'euros serait consacré en 2002 à l'accentuation de l'effort engagé depuis 2000 pour relever les taux d'activité des armées. Ainsi, le taux d'activité de l'armée de Terre, qui est passé en 2001 de 73 à 80 jours d'entraînement par an, sera porté à 89 jours en 2002, tandis que celui de la Marine passera de 94 jours à la mer à 97 jours en 2002. L'armée de l'Air dont les taux atteignent les objectifs de l'Alliance atlantique sera en mesure de développer les exercices interalliés afin d'accroître l'interopérabilité de ses unités.
Le Ministre de la Défense a ensuite insisté sur l'attention portée aux questions de sécurité intérieure qui constituent une priorité du gouvernement.
Ces orientations se traduisent par un effort particulier en faveur de la Gendarmerie, dont la zone de responsabilité reçoit plus de 90 % de la croissance de la population du pays, avec l'alourdissement des engagements de sécurité publique qui en découle.
Les effectifs de ce corps seront sensiblement renforcés : il est prévu de créer dans l'arme 700 emplois supplémentaires de sous-officiers en supplément des prévisions de la programmation et 213 postes d'officiers. Enfin, les deux tiers des emplois nouveaux de volontaires seront affectés à la Gendarmerie, ce qui représente près de 4 200 personnels supplémentaires.
Hors rémunérations, les crédits nouveaux attribués à la Gendarmerie représentent un montant de plus de 70 millions d'euros, qui sera consacré au renforcement de la capacité opérationnelle des brigades.
Le Ministre de la Défense a ensuite souligné que la multiplication des types de menace auxquels la France pouvait être confrontée élargissait considérablement le champ de l'information utile à la prise de décision dans le domaine de la défense et de la sécurité intérieure. Les services chargés du renseignement au sein du ministère de la Défense, regroupant plus de 7 800 personnes, travaillent en totale coopération avec leurs collègues du ministère de l'Intérieur pour améliorer la qualité de l'information dont dispose le Gouvernement et prévenir toute agression à l'intérieur du territoire national.
Le Ministre de la Défense a ensuite indiqué que les moyens disponibles pour l'équipement des armées seraient augmentés et permettraient de financer l'annuité 2002 de la loi de programmation.
Les autorisations de programme s'élèveront à 13,01 milliards d'euros, en progression de 0,7 %. Ces dotations devraient permettre notamment de poursuivre la politique de commandes pluriannuelles développée avec succès depuis quatre ans, le montant correspondant devant atteindre plus de 9 milliards d'euros à la fin de l'année 2001. La visibilité accrue ainsi offerte aux industriels permet d'obtenir une diminution du coût des programmes d'armement.
Le montant des crédits de paiements inscrits aux titres V et VI dans le projet de budget 2002 s'élève à 12,4 milliards d'euros auxquels s'ajoute la possibilité prévue en construction budgétaire de mobiliser des reports de crédits à hauteur de 411 millions d'euros.
Le Ministre de la Défense a insisté sur le fait que la loi de programmation militaire 1997-2002 sera la première depuis 1982 à avoir été appliquée de sa première à sa dernière année. Il a fait remarquer que le taux d'exécution de cette loi, votée en 1996 mais appliquée essentiellement par l'actuel gouvernement, dépasserait 94 %.
M. Alain Richard a observé que les progrès de l'Europe de la Défense et les enseignements tirés des engagements à l'extérieur conduisaient à adapter le modèle d'armée 2015, sur la base d'une analyse capacitaire par « systèmes de forces » regroupant les moyens qui, quelle que soit leur armée d'appartenance, concourent à un même type de résultats opérationnels. Il a fait ressortir à cet égard l'importance de la cohérence opérationnelle interarmées.
Soulignant que le projet de loi de finances pour 2002 permettrait de réaliser les paiements correspondant aux engagements de l'Etat et de passer les commandes nécessaires à la réalisation des objectifs fixés par la programmation, le Ministre de la Défense a alors successivement évoqué les mesures prévues pour chaque système de forces :
- la modernisation de la dissuasion sera poursuivie grâce au développement des SNLE de nouvelle génération, des missiles stratégiques M51, des missiles air-sol à moyenne portée améliorés (ASMP-A) et de la simulation ;
- le système de forces « commandement, communication, conduite, renseignement » (C3R), essentiel pour la prévention des crises, bénéficiera d'un effort marqué en vue d'acquérir les moyens nécessaires à l'exercice du rôle de nation-cadre que la France souhaite pouvoir assurer. La fabrication des satellites Hélios II et du premier satellite Syracuse III sera ainsi poursuivie et six nouvelles bases aériennes seront équipées du moyen de transmission de base aérienne (MTBA) ;
- s'agissant du système de forces « projection et mobilité », la construction de deux nouveaux transports de chalands de débarquement (NTCD) permettra de satisfaire le besoin capacitaire exprimé pour les opérations amphibies. De même, le programme d'avion de transport militaire apportera un début de réponse au besoin de transport aérien stratégique et tactique dans un cadre multinational, européen ou national. La signature, dans quelques semaines, de la commande de cet appareil, conformément aux engagements communs pris au salon du Bourget permettra la poursuite de son développement dans de bonnes conditions ;
- les principaux programmes concourant à la mise en place des capacités du système de forces « frappe dans la profondeur » seront poursuivis en vue d'atteindre les objectifs fixés pour 2015. La première flottille de Rafale au standard F1 sera opérationnelle en 2002 et la poursuite du développement du standard F2, version capable de missions air-sol, marquera une nouvelle étape du programme. Par ailleurs, les programmes de missiles de croisière Apache et SCALP-EG, éléments essentiels à l'appui de la stratégie de projection, feront l'objet de dotations s'élevant respectivement à 50,9 millions d'euros et 77,6 millions d'euros, en crédits de paiement ;
- les programmes relevant des systèmes « maîtrise du milieu aéroterrestre » et « maîtrise du milieu aéro-maritime » connaîtront une évolution conforme aux objectifs, qu'il s'agisse des hélicoptères Tigre et NH 90, ou du char Leclerc, dont les 406 exemplaires inscrits dans la loi de programmation en cours auront été commandés et 310 livrés. Par ailleurs, le renouvellement de la flotte de surface sera poursuivi avec la construction de deux frégates antiaériennes Horizon, réalisées en coopération franco-italienne ;
- au titre du système de forces « maîtrise du milieu aérospatial », le programme Meteor sera mené dans le cadre d'une coopération européenne. Par ailleurs l'OCCAR se verra notifier une importante commande portant sur les systèmes sol-air futurs (FSAF) qui contribuera à donner à la France une première capacité antimissile de théâtre ;
- enfin, le système de forces « préparation et maintien de la capacité opérationnelle » bénéficiera de la réforme des structures qui concourent à l'amélioration de la disponibilité des matériels, la Structure Intégrée du Maintien en condition opérationnelle des Matériels Aéronautiques de la Défense (SIMMAD) et le Service de Soutien de la Flotte (SSF), récemment créés, se voyant adjoindre en 2002 la Structure Intégrée de Maintenance du Matériel Terrestre (SIMMT).
M. Alain Richard a ensuite précisé que l'effort de recherche de défense serait accru en cohérence avec l'augmentation des ressources prévues à ce titre dans le projet de loi de programmation pour les années 2003-2008.
Il a alors souhaité attirer l'attention de la Commission sur la dimension européenne de plus en plus marquée de la politique d'équipement du ministère de la Défense, se déclarant convaincu que cette évolution permettra de doter durablement les armées des matériels nécessaires, au meilleur prix.
Le Ministre de la Défense a observé que, du côté de l'offre, les restructurations intervenues depuis quatre ans donnaient aujourd'hui à l'industrie d'armement les moyens de son développement. Se félicitant du rôle important joué par la France dans la constitution de grands groupes européens capables d'affronter la concurrence mondiale et de préparer l'avenir, il a insisté sur la nécessité de poursuivre les efforts accomplis pour faciliter le fonctionnement des entreprises européennes de l'armement désormais intégrées.
Il a ajouté que, du côté de la demande, le développement de la coopération entre les Etats européens créait une dynamique positive en matière de choix d'armement, contribuant à une plus grande homogénéité future des forces de l'Union européenne et à la réduction des coûts. Il s'est félicité du succès important que représentait le lancement de la fabrication de l'hélicoptère de combat Tigre en 1999, puis de l'hélicoptère de transport NH 90 en 2001. Après avoir évoqué la récente décision de la Finlande et de la Norvège d'acquérir l'hélicoptère NH 90, il a rappelé que l'A 400 M ferait l'objet du plus grand contrat militaire européen jamais conclu. Il s'est également référé à l'entente de cinq pays pour le développement du missile Meteor air-air de nouvelle génération, commun au Rafale et à l'Eurofighter, à la décision de la France et de l'Allemagne de fédérer leurs programmes d'observation spatiale ainsi qu'à la coopération franco-italienne dans ce même domaine, qualifiant ces décisions d'avancées majeures. Il a de même cité le programme franco-italien interarmées de systèmes sol-air futurs dit FSAF, destiné à l'autodéfense des bâtiments de la Marine et à la défense anti-aérienne des corps de bataille ou des bases aériennes. Il a, à ce propos, indiqué que le projet de budget prévoyait la commande dès 2002 de systèmes sol-air futurs SAMP/T pour les bases aériennes.
Evoquant la montée en puissance de l'OCCAR, M. Alain Richard a souligné que cette organisation était désormais dotée de la personnalité juridique et qu'elle opérait progressivement l'intégration des différents programmes en coopération. Il a vu dans sa mise en place l'émergence d'une véritable agence européenne de l'armement.
Le Ministre de la Défense a ensuite fait le point sur la modernisation de son ministère. Il a précisé qu'au cours des derniers mois, d'importantes réformes avaient été réalisées ou engagées pour en améliorer l'efficacité et réduire ses coûts de fonctionnement.
Il a notamment pris l'exemple de la mutation de DCN. Il a fait valoir que cette transformation ambitieuse, conduite dans un souci constant de concertation avec les personnels, avait pour objectif de permettre à DCN de fonctionner progressivement comme une entreprise, avec une compétitivité améliorée, dans des conditions comparables à celles de ses concurrents. Il a évoqué les négociations qui avaient permis de regrouper certaines activités commerciales de Thalès et de DCN, puis il a rappelé que le Gouvernement avait entrepris de transformer DCN en société détenue par l'Etat afin de valoriser ses atouts. Il s'est montré confiant dans les répercussions de cette réforme qui devrait permettre à DCN de nouer plus facilement les alliances industrielles nécessaires à son développement. Il a précisé que les dispositions législatives nécessaires étaient en cours de préparation, espérant qu'elles seraient soumises au Parlement avant la fin de l'année.
Le Ministre de la Défense a également évoqué la fusion des services du ministère des Anciens combattants avec ceux du ministère de la Défense. Il a considéré que cette évolution faisait bénéficier les services destinés aux anciens combattants du support administratif et logistique très diversifié du ministère de la Défense, tout en élargissant les perspectives professionnelles de leurs agents.
En conclusion, il a souligné que la construction d'une armée professionnelle, la fin de la conscription et le développement de la sécurité de proximité nécessitaient des rapports nouveaux entre les armées et la Nation. Il s'est réjoui des efforts accomplis en ce sens par la communauté militaire, y compris les réservistes, les associations et de nombreux citoyens.
Tout en convenant que les attentats meurtriers commis le 11 septembre dernier sur le sol des Etats-Unis pouvaient susciter à bon droit des interrogations sur les compléments à apporter à l'outil de défense national, il a estimé que la poursuite de l'effort méthodique et cohérent d'équipement des armées, tel que le Gouvernement l'avait engagé, témoignait de sa détermination, de la solidité de ses décisions et de son souci de stabilité et de préparation de l'avenir face aux menaces.
Le Président Paul Quilès a demandé si la décision d'anticiper la fin du service national n'avait pas eu pour conséquence de réduire temporairement la capacité opérationnelle de certaines unités de l'armée de Terre. Puis, s'interrogeant sur la nature et les répercussions des attentats commis sur le territoire des Etats-Unis, il a souhaité savoir si des indications pouvaient être données à ce stade sur la menace que constituent les réseaux extrémistes islamistes internationaux. Il s'est interrogé sur les moyens, notamment militaires, susceptibles d'être employés pour combattre ces réseaux, ainsi que sur les conséquences de cette menace pour la politique de défense, notamment en matière de renseignement.
M. Alain Richard a indiqué que 14 000 appelés se trouvaient sous les drapeaux au moment où a été prise la décision de mettre fin par anticipation au service national. Il a précisé que la fin de leur incorporation s'étalait entre la fin du mois de juillet et la fin du mois de novembre de l'année 2001. Il a ajouté qu'il en était résulté, dans quelques unités élémentaires de l'armée de Terre, un manque d'effectifs qui devrait encore se faire sentir entre le mois d'octobre et la fin du second trimestre de l'année 2002. Après avoir noté certaines difficultés dans les rotations d'effectifs de trente à quarante unités élémentaires au cours du second semestre 2001, il a évalué à soixante-six le nombre de formations opérationnelles concernées à la fin de l'année tout en indiquant que les recrutements de militaires professionnels ou de civils pallieraient progressivement ces manques pour les combler définitivement début 2002.
Abordant la question des menaces terroristes extérieures, le Ministre de la Défense a souligné que les moyens de lutte pour y faire face reposaient essentiellement sur les services de renseignement. Puis il a mis en exergue le travail méthodique que la Direction générale de la Sécurité extérieure (DGSE) conduisait, en coordination avec les principaux services concernés. Après avoir indiqué que les services français avaient une assez bonne connaissance des différents réseaux d'extrémistes islamistes et de leur interaction, il s'est prononcé en faveur d'une accentuation de l'effort pour assurer leur suivi. Il a également mis en avant la nécessité de coordonner l'action des différents services de renseignement français et étrangers qui détiennent le plus d'information en ce domaine et de développer leurs échanges au niveau bilatéral au-delà même de l'espace euro-atlantique.
Le Ministre de la Défense s'est gardé d'émettre des réserves sur l'utilité et l'efficacité du renseignement d'origine technique, observant que les services américains, fortement équipés en ce domaine, disposaient également de moyens de renseignement humain importants. Il a alors fait valoir que le renseignement humain et le renseignement technique étaient complémentaires.
Après avoir souligné que la sécurité du pays était une priorité essentielle, il a néanmoins estimé qu'il était difficile d'assurer un mécanisme de protection absolument étanche dans des sociétés occidentales ouvertes et respectueuses des libertés individuelles.
Après avoir remarqué que, du fait des circonstances, l'actuel Ministre de la Défense pourrait bien se trouver dans la situation inédite d'obtenir des crédits supplémentaires en cours d'exercice, M. René Galy-Dejean a présenté deux remarques, en soulignant qu'elles étaient empreintes d'une certaine nostalgie.
Il a d'abord estimé que la satisfaction généralement manifestée devant la réussite de la professionnalisation ne prenait en compte qu'une partie du processus : en effet, si l'on pouvait se féliciter de la réussite de la transformation d'une armée de conscription en armée professionnelle, il fallait aussi constater que cette armée professionnelle ne disposait pas de l'équipement qui devrait être normalement le sien. M. René Galy-Dejean a jugé cette situation grave pour l'institution militaire.
Il a ensuite considéré que l'équilibre traditionnel entre les capacités militaires de la France et de la Grande-Bretagne était à présent rompu, la situation française s'étant considérablement dégradée depuis 10 ans alors que les actuels mouvements des forces britanniques permettaient de constater qu'elles formaient un outil performant, bien équipé, et permettant d'anticiper les situations.
Exposant qu'à la suite des événements en cours, la France pourrait se trouver placée au pied du mur, du fait des décisions prises par l'un de ses grands alliés, il a alors demandé au Ministre si ses services étudiaient aujourd'hui les modifications à apporter éventuellement au budget de la Défense pour tenir compte des risques ou des nécessités d'action qui attendaient la France, le peuple français paraissant aujourd'hui prêt à de grands efforts.
M. Jean-Yves Le Drian a souhaité savoir si le niveau des crédits du Fonds pour les restructurations de la Défense (FRED) serait maintenu dans l'actuel projet de budget, et si le FRED avait vocation à perdurer au-delà de l'exercice budgétaire 2002.
Prenant acte avec satisfaction des décisions de juillet 2001 relatives à DCN, et du dépôt annoncé avant la fin de l'année d'un projet de loi tendant à sa transformation en société nationale, il s'est alors interrogé sur l'éventualité de doter l'entreprise de règles de fonctionnement intermédiaires entre janvier 2002 et janvier 2003, date prévisible d'entrée en vigueur de son nouveau statut, et sur la perpétuation de son alliance avec Thalès.
Après avoir salué la décision relative au statut de DCN, dont il a estimé qu'elle répondait aux attentes du personnel, M. Jean-Noël Kerdraon s'est interrogé sur les mesures de recrutement nécessaires pour assurer le succès de la réforme soulignant que le taux d'encadrement actuel de l'entreprise n'était que de 10 % au lieu de 30 % dans un secteur industriel tel que l'aéronautique.
Après avoir fait valoir que les progrès accomplis dans le maintien en condition opérationnelle des bâtiments allaient permettre de porter le nombre de jours à la mer de 94 à 97 par an, il a fait remarquer que la mission d'information sur l'entretien de la Flotte, présidée par M. Charles Cova et dont il était lui-même rapporteur, avait pris acte de nombre d'insatisfactions des personnels embarqués de la Marine. Il a alors estimé que ces insatisfactions, qui concernaient l'entretien des bâtiments, étaient dues notamment à un décalage entre la baisse des effectifs de DCN et la mise en place plus tardive du service de soutien de la Flotte. Faisant état de lourdeurs de gestion, il a demandé son sentiment au Ministre quant à la bonne utilisation des crédits dans ce domaine.
Enfin, observant que les transports de chalands de débarquement de nouvelle génération (NTCD) étaient en fait des bâtiments polyvalents de transport et de commandement, il s'est demandé s'il ne convenait pas de les désigner sous une appellation plus adéquate.
Après s'être félicité de la bonne réalisation de la loi de programmation militaire 1997-2002, M. André Vauchez a souligné l'effort notable consenti en faveur des effectifs de la Gendarmerie qui avaient progressé de 5 %, des volontaires spécifiquement formés remplaçant désormais les appelés. Il s'est alors interrogé sur les raisons de l'augmentation de 30 % des effectifs d'officiers de Gendarmerie. Puis il a demandé au Ministre de faire le point sur la situation des PSIG (Pelotons de Sécurité et d'Intervention de la Gendarmerie).
Evoquant ensuite le déplacement de la Commission à Toulon, à bord du Siroco le 6 juin 2001, il a mentionné les difficultés d'ordre mineur qui avaient été portées à sa connaissance à cette occasion, notamment en matière d'entretien courant et d'approvisionnement en rechanges de faible valeur, soulignant que la mise en _uvre d'un beau bâtiment pouvait être compliquée, non par une insuffisance de crédits mas par des lourdeurs administratives.
Après avoir souligné les efforts consentis en faveur des crédits de la Gendarmerie, M. Georges Lemoine s'est toutefois déclaré préoccupé par certains points concernant la formation des jeunes gendarmes. Il s'est plus spécialement demandé s'il ne devenait pas nécessaire d'adapter les programmes et les durées de formation des jeunes sous-officiers qui ne bénéficient plus de l'instruction militaire de départ que donnait le service national. Il a également observé que les élèves gendarmes ne disposaient pas chacun d'une arme qui leur était personnellement affectée pendant la durée de leur scolarité et il s'est interrogé sur la possibilité de réutiliser à cette fin certains moyens et notamment des fusils FAMAS provenant d'unités dissoutes dans le cadre de la réorganisation des armées. Il a par ailleurs estimé qu'à l'occasion de la nouvelle mise en _uvre du plan Vigipirate, il conviendrait sans doute de dresser un premier bilan de l'expérience de fidélisation de certains escadrons de la Gendarmerie mobile dans les quartiers en difficulté pour déterminer si elle devait être poursuivie, modifiée, voire temporairement suspendue. Enfin, il a insisté sur la nécessité de régler définitivement la question des retards de paiement de certains loyers dus par la Gendarmerie, cette situation la plaçant en difficulté vis-à-vis à de collectivités territoriales ou de bailleurs privés.
M. Yves Fromion s'est inquiété des conséquences de la réduction de la durée du travail dans la fonction publique civile sur l'état d'esprit des militaires et plus particulièrement des gendarmes dont il a souligné la lourdeur des obligations de disponibilité. Il a exprimé la crainte que s'accentue le décalage, déjà sensible aux yeux des gendarmes, entre les conditions de travail au sein de la société civile et leur propre situation professionnelle. M. Yves Fromion a également considéré que les mesures d'augmentation des effectifs de Gendarmerie ne sauraient avoir pour effet d'accroître en proportion les capacités opérationnelles de l'arme, dès lors qu'il apparaissait nécessaire de réduire le temps effectif de travail des personnels.
En réponse aux différents intervenants, M. Alain Richard a apporté les précisions suivantes :
- le FRED enregistre effectivement une légère décroissance des crédits qui lui sont dévolus en 2002 (28,5 millions d'euros soit 180 millions de francs), il s'agit toutefois d'un phénomène compréhensible dès lors que les opérations de restructuration les plus importantes ont concerné les exercices précédents ;
- il est souhaitable que le dispositif législatif concernant la transformation de DCN en société nationale soit soumis au Parlement avant la fin de l'année 2001 car il convient que DCN puisse être une société de plein exercice dès le 1er janvier 2003. Cet objectif nécessite toutefois des travaux préalables de réorganisation interne, notamment dans le domaine financier, de manière à permettre la passation entre l'Etat et DCN d'un contrat d'entreprise et l'élaboration en conséquence d'un plan d'investissement précis. S'agissant des personnels, le Ministre s'est déclaré en accord avec la nécessité de recrutements permettant le renouvellement des compétences ;
- non seulement l'accord commercial désormais conclu entre Thalès et DCN sera maintenu dans ses objectifs mais il pourra également être étendu dans la perspective d'une consolidation des structures de DCN, permise par la réforme, le moment venu ;
- dans ses interventions pour l'entretien et les grosses réparations des bâtiments de la Marine, DCN rencontre des difficultés pour assurer, dans certains cas, ses prestations dans des conditions pleinement satisfaisantes. Certaines des opérations d'entretien réalisées par DCN ont déjà fait l'objet de mises en compétition avec des concurrents privés et ces procédures seront renouvelées. Pour ce qui concerne le futur contrat d'entreprise entre l'Etat et DCN, les garanties susceptibles d'être accordées pour l'attribution des marchés de maintien en condition opérationnelle des bâtiments de la Marine représentent un enjeu majeur de la négociation, sachant qu'elles ne sauraient couvrir la totalité de l'entretien et des réparations à assurer ;
- le nombre des officiers en activité dans la Gendarmerie s'élève à un peu moins de 4 000 pour un effectif militaire global de près de 92 000, ce qui ne correspond pas à un taux d'encadrement des plus élevés. Les besoins en jeunes officiers subalternes sont d'ailleurs plus sensibles dans les unités que dans les services d'états-majors. Il convient par ailleurs de prendre en compte le développement des activités de coordination avec les services de police et de coopération internationale ;
- s'agissant des armes individuelles destinées aux élèves gendarmes, une appréciation de la situation reste à faire mais dans le cadre des écoles, la formation au maniement des armes paraît d'ores et déjà satisfaisante ;
- la politique de fidélisation des escadrons de gendarmerie mobile dans certaines zones donne satisfaction et répond à de réels besoins. Les relations avec la police nationale apparaissent également bonnes et cette situation est plutôt bien vécue par les personnels de la Gendarmerie qui y trouvent un cadre d'élargissement de leurs responsabilités, d'autant que certaines difficultés initialement rencontrées en termes de soutien sont en cours de règlement, notamment pour ce qui concerne les véhicules mis à disposition. Il reste toutefois acquis qu'il s'agit d'unités fidélisées et non fixées, donc susceptibles d'être appelées en renfort en cas d'urgence pour d'autres missions, conformément aux principes définis à la fin de l'année 1999. La politique de fidélisation a vocation à se poursuivre, étant donné qu'elle est rendue possible par des ressources en forces mobiles supérieures en moyenne annuelle aux besoins liés au maintien de l'ordre ;
- une sensible augmentation du montant des loyers de la Gendarmerie résulte de l'effort accompli pour l'affectation de gendarmes sur des postes non logés dans des zones périurbaines. Le Ministre de l'Economie et des Finances a souhaité qu'une étude soit conduite pour évaluer plus précisément le coût global des prises à bail réalisées à cette occasion ;
- puisque l'ensemble de la société française va bénéficier de la réduction du temps de travail, il serait anormal d'en priver les militaires qui sont soumis à des obligations lourdes de disponibilité, en partie compensées, notamment par 45 jours de droits annuels à permission. Des modalités d'allégement de la charge de travail sont donc à l'étude. La plus grande difficulté viendra probablement de la Gendarmerie qui a la charge de travail la plus élevée. Des solutions, éventuellement indemnitaires, devront être trouvées ;
- dire que nos armées, devenues professionnelles, sont mal équipées ne paraît pas conforme à la réalité, surtout en comparaison avec les autres pays européens. La France est en Europe le seul pays à disposer d'un satellite de renseignement et d'une dissuasion nucléaire dont toutes les composantes sont entièrement sous contrôle national. Par ailleurs, le mouvement de forces britanniques vers le sultanat d'Oman n'est pas une conséquence de l'actuelle tension internationale, mais le résultat d'un exercice programmé de longue date ;
- le financement d'éventuelles opérations extérieures n'est pas inclus dans le projet de loi de finances initiale mais fait normalement l'objet de dispositions des lois de finances rectificatives. Le projet de budget, quant à lui, garantit un niveau d'effectif, d'entraînement, d'entretien et de soutien qui permet aux forces de se déployer à tout instant.
II. - AUDITION DE M. JEAN-FRANÇOIS HEBERT, SECRÉTAIRE GÉNÉRAL POUR L'ADMINISTRATION DU MINISTÈRE DE LA DÉFENSE
La Commission de la Défense a entendu, le 9 octobre 2001, M. Jean-François Hebert, Secrétaire général pour l'Administration du ministère de la Défense, sur le projet de budget pour 2002.
Accueillant M. Jean-François Hebert, Secrétaire général pour l'Administration du ministère de la Défense, le Président Paul Quilès a souhaité que son audition soit l'occasion de faire le point sur l'application des mesures d'aménagement et de réduction du temps du travail aux personnels civils de la défense ainsi que sur la réflexion en cours concernant le temps d'activité et d'obligations professionnelles des militaires. Il a également souhaité que soit détaillé l'effort consenti dans le projet de budget en faveur des rémunérations des personnels civils et militaires. Enfin, il a estimé que l'audition du Secrétaire général pour l'Administration pourrait être l'occasion de réfléchir à l'application de la nouvelle loi organique relative aux lois de finances et aux possibilités qu'elle offre pour rendre la gestion du ministère de la Défense à la fois plus efficace et plus transparente.
Après avoir jugé que le projet de budget donnait à la Défense les moyens d'achever la professionnalisation, M. Jean-François Hebert a souligné que les directions placées sous son autorité en suivaient les progrès au jour le jour en étroite liaison avec les états-majors. Puis il a souhaité mettre l'accent sur trois thèmes qui recouvraient les questions évoquées par le Président Paul Quilès.
En premier lieu, il a estimé que l'une des caractéristiques majeures du projet de budget de la Défense pour 2002 était l'importance des mesures prises en faveur du personnel, qu'il s'agisse des civils ou des militaires, en dehors même des mesures relevant du plan Sapin, à savoir les revalorisations salariales et les mesures prises en faveur des bas salaires.
Dans le projet de budget pour 2002, les mesures nouvelles en faveur des civils s'élèvent à 12,8 millions d'euros (84 millions de francs), auxquels viennent s'ajouter 3,2 millions d'euros (21 millions de francs) pour financer l'attribution de points différenciés pour les bas salaires et 6 millions d'euros (42 millions de francs) à titre de provision pour la mise en _uvre d'une allocation de cessation anticipée d'activité destinée aux personnels de DCN exposés à l'amiante, le décret ouvrant ce droit aux ouvriers étant en cours d'examen au Conseil d'Etat. M. Jean-François Hebert a rappelé qu'il s'agissait là d'une transposition des mesures destinés aux personnels des chantiers civils.
Pour les militaires, les mesures catégorielles atteignent 38,12 millions d'euros (250 millions de francs), ce qui correspond à un quintuplement par rapport aux années précédentes, les forces armées n'ayant bénéficié que de 6,2 millions de francs de mesures spécifiques en 2000 et de 50,8 millions de francs en 2001. M. Jean-François Hebert a expliqué que cette augmentation répondait au souci du Ministre de la Défense de marquer la reconnaissance de la Nation à l'égard des armées, confrontées au cours de ces dernières années à une activité intense, dans un environnement difficile et contraignant, qui a demandé des efforts importants de la part de tous. Le besoin de reconnaissance, particulièrement perceptible au cours du premier semestre 2001, s'est exprimé à travers les organes de concertation du ministère et a été relayé par les états-majors. Il trouve aujourd'hui une première traduction, confirmant la pertinence de la mesure de création d'un fonds de consolidation de la professionnalisation, prévue par le projet de loi de programmation pour les années 2003-2008. Le Secrétaire général pour l'Administration a également souligné que les mesures catégorielles inscrites au projet de budget bénéficiaient à l'ensemble des forces armées, et non plus seulement, comme en 2001, à la Gendarmerie, au Service de santé et à la Délégation générale pour l'Armement. Il a enfin précisé qu'elles concernaient prioritairement les sous-officiers. Si la réussite initiale du processus de professionnalisation impliquait un effort important en faveur des engagés dont la rémunération mensuelle aura augmenté de plus de 60 % entre 1996 et 2002 (passant de 4 200 francs à plus de 6 700 francs), il devenait en effet nécessaire de valoriser les qualifications et les responsabilités exercées par les sous-officiers. Ceux-ci se verront donc attribuer plus des deux tiers des mesures mises en _uvre l'année prochaine.
Une première mesure répond à un souci d'attractivité. 14,5 millions d'euros (94,9 millions de francs) permettront ainsi d'améliorer la situation des jeunes sergents qui bénéficieront d'une revalorisation indiciaire avant et après trois ans de service (8 points pour les plus jeunes, 2 pour les plus anciens). Conjuguée à l'attribution de points d'indices supplémentaires dans le cadre du plan Sapin, cette mesure devrait se traduire par une augmentation de l'ordre de 50 euros (328 francs) de leur solde mensuelle. Par ailleurs, dans une perspective de fidélisation, les sous-officiers plus anciens verront, de leur côté, leurs compétences mieux reconnues grâce à la création de 6 000 nouvelles primes de qualification. Cette mesure, d'un coût de 12 millions d'euros (78,72 millions de francs), permettra d'attribuer la prime de qualification, non seulement à tous les majors et adjudants chefs éligibles comme c'est le cas actuellement, mais à un plus grand nombre d'adjudants. S'agissant de la Gendarmerie, le nouveau contingent qui lui sera accordé (4 200 primes) répond à la volonté de reconnaître les responsabilités particulières des adjudants dans les unités de la Gendarmerie départementale. Pour leurs bénéficiaires, l'impact de ces mesures nouvelles sera chaque mois de l'ordre de 150 euros (984 francs).
D'autres mesures complètent ce dispositif : contingent supplémentaire de 600 échelles 4 pour les sous-officiers de l'armée de Terre, contingent supplémentaire de 56 primes d'atomiciens pour la Marine, revalorisation de l'indemnité spéciale de sécurité aérienne allouée aux maîtres-contrôleurs de la circulation aérienne de l'armée de l'Air, augmentation de l'indemnité journalière d'absence temporaire de la Gendarmerie mobile. Enfin, le plan de valorisation de la condition des médecins, lancé cette année, se poursuit avec deux améliorations, l'une relative à la consolidation de l'indemnisation des gardes de nuit (versement d'une indemnité forfaitaire de 5 000 francs aux médecins effectuant plus de 3 gardes de plus de 12 heures en un mois) et l'autre au déroulement de carrière (surnombre de 120 médecins principaux). Le Secrétaire général pour l'Administration a estimé que ce plan devrait être poursuivi.
M. Jean-François Hebert a jugé que l'ensemble de mesures qu'il venait de présenter démontrait la capacité du ministère de la Défense à s'adapter à l'évolution des besoins de l'institution militaire. Après les mesures visant à encourager le départ volontaire des cadres, à favoriser le recrutement, puis à fidéliser les engagés et à gérer dans les meilleures conditions possibles la ressource que constituaient les appelés, l'accent désormais mis sur la condition du personnel traduit la volonté de consolider l'armée professionnelle sans attendre la mise en _uvre de la prochaine programmation. Il s'agit là d'une étape dans un plan d'ensemble qui doit nécessairement être pluriannuel.
Le Secrétaire général pour l'Administration a ensuite fait le point sur l'aménagement et la réduction du temps de travail (ARTT) au ministère de la Défense pour les personnels civils, dont le projet de budget pour 2002 intègre les conséquences financières.
Il a en premier lieu rappelé qu'en application du décret du 25 août 2000 relatif à l'ARTT dans la fonction publique de l'Etat, c'est la date du 1er janvier 2002 qui avait été retenue pour le passage aux 35 heures, avec cependant la possibilité d'anticiper cette échéance par arrêté interministériel. Il a également souligné que le ministère de la Défense était jusqu'à présent le seul à avoir passé un accord cadre avec l'ensemble de ses organisations syndicales. Cet accord devrait permettre aux personnels civils de passer aux 35 heures à compter du 1er octobre, même si tous les accords locaux ne sont pas signés à cette date, ce qui autorisera le personnel à bénéficier de 6 jours d'ARTT d'ici à la fin de l'année.
M. Jean-François Hebert a rappelé les 5 points clés de cet accord :
- la durée hebdomadaire moyenne du travail passe de 39 à 35 heures sans diminution, ni gel des rémunérations ;
- le décompte du temps de travail se fait dorénavant sur l'année, la durée annuelle étant fixée à 1 600 heures de travail effectif, sans préjudice des heures supplémentaires susceptibles d'être effectuées ;
- le temps de travail est organisé selon des cycles prédéterminés, qui peuvent être modifiés selon les nécessités du service. Le cycle de référence au ministère de la Défense est de 38 heures, soit, pour une semaine de 5 jours, une durée quotidienne de temps de travail effectif de 7 heures 36 minutes ;
- les personnels ont la possibilité de prendre 18 jours d'ARTT sur l'année, dont 9 à leur disposition, qui viennent à s'ajouter aux 25 jours de congés actuels ;
- un compte épargne temps sera par ailleurs institué dans un cadre qui doit encore être défini au niveau de l'ensemble de la fonction publique. Il pourra être alimenté, dans la limite de 10 jours, par des jours de congés ou de réduction du temps de travail qui n'ont pu être pris dans les délais compte tenu des contraintes de service. Il pourra l'être également pour faciliter la réalisation d'un projet personnel ou familial. Il sera valable pendant deux ans. Les cadres bénéficieront quant à eux d'un dispositif plus souple, avec 18 jours à reporter dans la limite de 5 ans.
Le Secrétaire général pour l'Administration a ensuite expliqué que des actions de formation avaient été organisées tout au long de l'été pour familiariser les chefs d'établissement avec les dispositions de l'accord cadre et les aider à conduire la négociation locale, 450 d'entre eux étant concernés. Parallèlement, des aides ont été apportées aux organisations syndicales pour qu'elles puissent former leur propres négociateurs. L'ensemble des négociations devrait être achevé à la fin du mois d'octobre, pour une entrée en vigueur de l'ARTT avec effet rétroactif à compter du 1er octobre.
M. Jean-François Hebert a exposé que plusieurs facteurs avaient facilité le bon déroulement des négociations sur l'ARTT au ministère de la Défense. En premier lieu, ont incontestablement compté les expériences antérieurement menées au sein du ministère, notamment les expérimentations d'aménagement du temps de travail lancées il y a 5 ans dans une soixantaine d'établissements de la DGA et des armées.
La négociation qui a précédé le passage de DCN aux 35 heures, effective depuis le 6 mars 2000, a également favorisé l'obtention de l'accord sur la réduction du temps de travail, de même que la vitalité du dialogue social au sein du ministère de la Défense marqué, de part et d'autre, par une attitude d'écoute et de responsabilité.
M. Jean-François Hebert, a alors indiqué que le Ministre de la Défense avait défini, dès octobre 2000, la méthode et le calendrier des négociations.
Il a fait remarquer que la conclusion de l'accord-cadre le 11 juillet avait permis d'en traduire les conséquences dans le projet de budget pour 2002 : les engagements pris et tenus portent sur 171 recrutements au Service de santé, correspondant à des créations budgétaires, 1 100 recrutements supplémentaires de fonctionnaires sur des postes précédemment gelés et 900 autorisations d'embauche d'ouvriers d'Etat.
Le volet indemnitaire d'accompagnement de l'accord-cadre représente 7,5 millions d'euros (49 millions de francs). Les heures supplémentaires seront forfaitisées à concurrence de 16 heures par la création au plan interministériel d'une indemnité nouvelle « d'administration générale et de technicité » (5,3 millions d'euros soit 35 millions de francs). Le régime des astreintes sera étendu aux fonctionnaires et aux contractuels (1,2 million d'euros soit 8 millions de francs) et les congés annuels seront normalisés pour les personnels administratifs des services déconcentrés (1 million d'euros soit 6,6 millions de francs).
L'ensemble des mesures liées à la mise en place de la réduction du temps de travail représente un total de 186 millions de francs.
M. Jean-François Hebert a enfin évoqué la modernisation des procédures financières du ministère de la Défense.
La réforme de la nomenclature budgétaire mise en _uvre en 1999, de même que le suivi de programmes d'armement au sein d'articles identifiés, offrent désormais un cadre de présentation plus transparent, plus homogène et plus lisible. Le projet de loi de finances pour 2002 poursuit dans cette voie puisque deux nouveaux articles sont créés afin de suivre le programme des frégates multimissions et celui des sous-marins d'attaque futurs Barracuda.
Après la mise en place en 1998 des opérations budgétaires d'investissement et l'établissement en 1999 d'un lien entre les autorisations de programme et les crédits de paiement, la normalisation progressive des règles de gestion des crédits d'équipement s'est traduite par la généralisation du contrôle financier déconcentré. Ces réformes permettent à l'ensemble des acteurs de la dépense publique de disposer d'un cadre de gestion partagé.
Le ministère de la Défense a par ailleurs fait du contrôle de gestion une de ses priorités. Chaque grande composante de la Défense est désormais dotée d'un plan d'action et d'une directive annuels s'appuyant sur des instruments de suivi. De plus, l'application du contrôle de gestion à des politiques transversales a débuté en 2000 avec des thèmes tels que la reconversion, le recrutement, l'infrastructure, la communication, les munitions, la solde et les postes à l'étranger. Un plan pluriannuel qui comprendra d'autres secteurs sera prochainement soumis à l'approbation du Ministre.
Enfin, l'approfondissement de la connaissance des coûts passe également par l'utilisation de la comptabilité analytique en complément de la traditionnelle comptabilité budgétaire. L'administration de la Défense a engagé une démarche d'ensemble qui a reçu le soutien de la Délégation interministérielle à la réforme de l'Etat.
Ces réformes devraient faciliter la mise en _uvre au sein du ministère de la Défense des dispositions de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances.
Le projet de budget pour 2002 marque une étape supplémentaire puisqu'il est l'occasion pour le ministère de présenter des objectifs détaillés et représentatifs de l'entraînement et du niveau d'équipement des armées. Ils correspondent à ceux retenus dans le projet de loi de programmation militaire pour les années 2003-2008.
Les armées seront par ailleurs aidées par le fait que beaucoup d'innovations apportées par la loi organique du 1er août 2001 rejoignent des pratiques ancrées dans leur tradition comme la pluriannualité, qui s'exprime à travers les lois de programmation, ou comme le budget de fonctionnement des unités qui autorise, sous réserve d'une restitution d'information rigoureuse, une fongibilité des crédits qui va devenir la règle.
M. Jean-François Hebert a conclu en faisant remarquer que tout en assumant leurs missions sur le territoire national et tout en étant présentes sur les théâtres extérieurs, les armées continuaient à se réformer. Elles achèvent et consolident leur professionnalisation et figurent dans le peloton de tête des ministères qui modernisent leur gestion.
Remerciant le Secrétaire général pour l'Administration pour la clarté de son exposé, le Président Paul Quilès lui a demandé s'il considérait, comme le Chef d'état-major des Armées, que l'équilibre du titre III reposait sur des paramètres fragiles et si la difficulté de son financement n'était pas due à un alourdissement des coûts de la professionnalisation bien supérieur aux prévisions initiales.
Se faisant aussi l'écho des préoccupations de M. Jean-Yves Le Drian, M. Robert Gaïa a souligné l'ampleur de l'incompréhension et de l'inquiétude des personnels de DCN au regard de l'indemnisation des atteintes causées par l'amiante, aucun plan n'étant prêt pour les personnels de l'Etat tandis qu'un dispositif a été élaboré pour ceux du secteur privé.
Il s'est ensuite inquiété de l'avenir des personnels détenteurs d'emplois relevant de la jurisprudence Berkani, ainsi que des modalités d'intégration dans la fonction publique de ceux d'entre eux qui étaient assimilés à la catégorie B, et qui, pour beaucoup, ne se verraient proposer que des emplois de catégorie C.
Après s'être interrogé sur les hypothèses que privilégiait, pour les militaires, le ministère de la Défense dans l'éventualité d'une réforme des régimes de retraite, M. Charles Cova s'est demandé si l'institution du contrôle déconcentré ne risquait pas de restreindre la capacité de réactivité d'un service comme le Service de soutien de la flotte, au moment où il a de lourds défis à relever.
M. René Galy-Dejean, remerciant lui aussi M. Jean-François Hebert pour la qualité de son exposé, s'est interrogé sur les modalités d'application de la réduction du temps de travail aux militaires.
Il a estimé que, partout où la réduction du temps de travail ne pouvait être compensée par des gains de productivité liés à l'emploi de machines plus performantes, son application avait pour conséquence une réduction du service offert. Constatant l'incompatibilité de cette situation avec la mission des armées, qui doit être assurée de façon continue et permanente, il s'est demandé si la transposition aux militaires des mesures de réduction du temps de travail ne devait pas plutôt prendre la forme d'une indemnisation financière de la différence d'horaires avec le secteur civil. Il a alors souligné que cette solution tiendrait compte de la disponibilité permanente qui faisait partie à la fois de la mission et de la culture des militaires.
Il a également relevé que le traitement différencié de la Défense et des autres administrations dans la question de l'indemnisation des effets de l'amiante suffisait à montrer à quel point, de l'extérieur, les secteurs civils et militaires faisaient l'objet d'une perception différente.
Enfin, saluant les efforts de réorganisation budgétaire du ministère de la Défense, il s'est demandé si l'achèvement des réformes en cours pourrait inciter les contrôleurs financiers à cesser de bloquer la dépense en refusant de viser les ordonnancements.
Le Secrétaire général pour l'Administration du ministère de la Défense a alors apporté les éléments de réponse suivants :
- le montant des crédits du titre III se situe incontestablement à un bon niveau dans le projet de loi de finances pour 2002. La communauté de défense en avait fait sa priorité afin de revaloriser les rémunérations des personnels civils et militaires, et d'améliorer les crédits de fonctionnement. Les dispositions du projet de loi de finances pour 2002 permettent de remplir ces objectifs mais il faudra consolider la tendance amorcée dans la durée ;
- globalement, le coût de la professionnalisation des armées avait été bien évalué dès l'origine. Cependant, les revalorisations de traitements négociées de manière globale par le ministère de la Fonction publique ont bouleversé les paramètres de l'équilibre initial. C'est la raison pour laquelle, en accord avec les états-majors, il a été convenu de ne pas inscrire de prévision d'évolution du titre III dans le projet de loi de programmation militaire pour les années 2003-2008 mais de s'en tenir à des niveaux d'effectifs ;
- l'indemnisation des personnels civils et militaires qui ont travaillé au contact de l'amiante, essentiellement au sein de DCN, constitue l'une des préoccupations majeures du ministère de la Défense. La question sera bientôt réglée pour les ouvriers d'Etat. Les personnels susceptibles d'en bénéficier ont été recensés. Il sera cependant nécessaire de procéder à un travail d'explication des dispositions prévues par le décret relatif à cette question, en cours de finalisation ;
- le décret qui régit le statut des personnels relevant de la jurisprudence Berkani a été publié en septembre, le ministère de la Défense étant ainsi le premier ministère à clarifier la situation des personnels concernés. Désormais ceux-ci pourront choisir entre leur statut d'agent public ou le retour à leur statut d'agent de droit privé. Les organisations syndicales ont engagé un important travail d'information à ce sujet en liaison étroite avec l'administration ;
- comme le Parlement, le Gouvernement accorde une grande attention au problème des retraites des personnels civils et militaires du ministère de la Défense. Suite à la création d'un Conseil d'orientation des retraites, le Secrétariat général pour l'administration a sensibilisé les membres de cette instance sur la spécificité de l'activité des personnels de la communauté de défense. Il ne devra pas y avoir, en tout état de cause, de différence de traitement entre les personnels militaires et civils ;
- le contrôle financier déconcentré peut effectivement, dans un premier temps, perturber le mode de fonctionnement des services. Ces difficultés devraient s'estomper. Les principes qui le sous-tendent doivent néanmoins être appliqués de manière uniforme sur l'ensemble du territoire ;
- la modernisation des procédures financières relatives aux dépenses d'équipement et leur adaptation sur le modèle des procédures en vigueur pour les ministères civils a conduit à une amélioration réelle de la gestion du ministère de la Défense. A cet égard, il n'a pas été constaté de refus durable des autorités du contrôle financier sur les grands programmes d'armement pour l'exercice budgétaire en cours ;
- la transposition aux personnels militaires des règles de réduction du temps de travail prévues pour les personnels civils n'est pas possible en raison de leurs contraintes de disponibilité, qui trouve d'ailleurs une contrepartie dans des avantages statutaires. Toutefois, le Ministre de la Défense prend en considération les aspirations des personnels militaires à bénéficier de davantage de temps libre lorsque les nécessités opérationnelles ne s'y opposent pas afin de minimiser le décalage entre leur régime de travail et celui de la société civile. Des orientations seront arrêtées en ce domaine en novembre prochain. Il semble que des mesures de réorganisation interne puissent permettre d'optimiser le temps de service des personnels afin d'accroître leur temps libre. A défaut d'accroissement du temps disponible pour les militaires, des compensations indemnitaires voire des créations d'emplois pourraient être envisagées.
III. - AUDITION DES REPRÉSENTANTS DES SYNDICATS DES PERSONNELS CIVILS DE LA DÉFENSE
La Commission de la Défense a entendu, le 17 octobre 2001, les représentants des syndicats des personnels civils de la défense sur le projet de budget pour 2002.
M. Robert Gaïa, Vice-Président, a d'abord remercié les six fédérations syndicales de personnels civils de la Défense d'avoir répondu à l'invitation de la Commission, lui donnant l'occasion de poursuivre une tradition de rencontre et de dialogue d'une grande utilité pour les débats budgétaires.
Il a ensuite exposé que les transformations de l'appareil de défense français demandaient aux personnels civils un grand effort d'adaptation, tandis qu'elles font apparaître un besoin important d'effectifs supplémentaires dans les forces. Estimant que toutes ces évolutions nécessitaient un accompagnement social fort, il a souligné que la réduction de la durée du travail en était un élément essentiel et rappelé à ce propos l'accord-cadre du 11 juillet dernier dont les modalités locales d'application sont en cours de négociation. Il a relevé par ailleurs que, dans le projet de budget, le fonds d'adaptation industrielle de DCN bénéficiait d'une enveloppe de 590 millions de francs et que, pour ce qui concerne les rémunérations, un effort significatif paraissait avoir été consenti en faveur des personnels civils de la Défense pour un montant global de 105 millions de francs.
Jugeant que, pour les prochains mois, le dialogue social semblait pouvoir se nourrir d'avancées concrètes, il a souligné que la Commission serait heureuse de connaître l'avis et d'entendre les analyses et les propositions des organisations syndicales.
M. Jacques Lépinard, secrétaire général de la Fédération CFDT des établissements et arsenaux de l'État (FEAE - CFDT), a d'abord présenté une intervention liminaire commune au nom de l'ensemble des organisations syndicales représentatives du ministère de la Défense, FO, CFDT, CGT, UNSA, CFTC, CGC. Il a motivé cette forme inhabituelle d'expression par l'urgence d'une prise de décision du Gouvernement sur le dossier DCN face à la gravité de la situation.
Il a rappelé que, le 6 juillet dernier, le Premier ministre et le Gouvernement avaient décidé d'engager DCN sur la voie d'un changement de statut conduisant vers un régime juridique de société d'Etat. Soulignant qu'ils avaient alors annoncé que cette évolution se réaliserait dans la concertation en préservant l'avenir de l'entreprise ainsi que les intérêts particuliers des personnels, il a estimé que ces déclarations d'intention étaient à ce jour restées sans concrétisation.
Ajoutant que, pour des raisons de calendrier parlementaire, la direction de DCN proposait de réaliser l'évolution statutaire par le biais d'une disposition de la prochaine loi de finances rectificative pour 2000, il a signifié l'opposition des organisations syndicales à cette procédure : la loi de finances n'est pas faite pour cela, la formule retenue n'apporte pas les garanties propres à chaque catégorie de personnel (les contractuels par exemple sont oubliés), l'unité de l'entreprise n'est pas préservée et le contrat d'entreprise qui doit assurer son avenir n'est même pas évoqué dans le premier avant-projet communiqué aux organisations syndicales. Indiquant que les organisations syndicales avaient le sentiment d'être confrontées à une tentative de passage « à la hussarde » de la part de la direction de l'entreprise, au lieu de la concertation attendue, il a souligné qu'elles refusaient unanimement de cautionner une telle situation. Il a précisé que leur position était confortée par l'avis négatif exprimé sur le fond et sur la forme par plusieurs experts qu'elles avaient consultés, certains d'entre eux n'hésitant pas à parler de « cavalier budgétaire » à propos du texte proposé. Il a ajouté que les organisations syndicales demandaient à la représentation parlementaire de bien vouloir intervenir auprès du Gouvernement pour qu'il suspende la procédure en cours et élabore un projet de loi préservant et améliorant les intérêts et droits statutaires des personnels dans le cadre du statut d'État de DCN, qui ne s'opposait nullement à la modernisation de son fonctionnement. Il a estimé que ce projet de loi devrait être débattu au Parlement au printemps 2002, l'avenir de DCN et de ses personnels justifiant une modification du calendrier parlementaire.
Il a enfin informé la Commission qu'afin d'accompagner leur démarche, les syndicats avaient invité les salariés de DCN à exprimer leur mécontentement par des actions de grève le vendredi 19 octobre, jour de la réunion du Comité de concertation sociale.
M. Alain Sparfel, Secrétaire général de la Fédération syndicaliste Force ouvrière de la Défense, des Industries de l'Armement et des Secteurs assimilés (FEDIASA-FO), a d'abord estimé qu'alors que la situation mondiale faisait ressortir la nécessité, pour tous les pays, de disposer de moyens appropriés pour assurer la sécurité de leur territoire et mener l'ensemble des actions militaires décidées par l'exécutif, la situation de la défense française apparaissait sur le plan industriel et social dans un état de dégradation dont les causes récurrentes étaient bien souvent d'origine économique, mais parfois aussi organisationnelles.
Concernant DCN, il s'est tenu à la déclaration commune des fédérations syndicales, rappelant toutefois que, sans réelles commandes de l'État, il n'y a pas d'avenir français ou européen pour cette entreprise.
Concernant Giat-Industries, il a indiqué que son organisation avait le sentiment profond que l'Etat négligeait son pôle industriel terrestre et ne manifestait pas de véritable volonté de maintenir l'ensemble des capacités et des compétences de cette entreprise qui n'avait déjà que trop souffert. Il a ajouté que le départ de son PDG, à un moment où elle est une nouvelle fois en difficulté, accroissait l'inquiétude des personnels.
Il a souligné que, malgré un état de santé meilleur que celui de Giat-Industries, la situation de la SNPE suscitait des inquiétudes relatives aux conséquences de son association avec SNECMA, dans le cadre de l'entité commune « Héraklès », pour les volumes d'emploi des deux sociétés. L'opération concernant le site d'Angoulême et sa dépollution n'a, par ailleurs, toujours pas fait l'objet d'orientations ou de décisions, notamment d'ordre financier, qui permettraient un traitement social approprié.
S'agissant des armées, M. Alain Sparfel a exposé que des restructurations en volume, moins importantes que par le passé, venaient encore troubler les consciences. Il a cité l'exemple de la dissolution annoncée par voie de presse du 58ème régiment d'artillerie de Douai et fait observer qu'elle posait un sérieux problème de choix économique et stratégique si l'on considérait les investissements lourds réalisés pour les besoins spécifiques de ce régiment, sachant que les nombreux personnels civils qui y travaillent ont déjà dû subir une restructuration et des déplacements géographiques.
D'une manière plus générale, M. Alain Sparfel a estimé que, dans les armées, la professionnalisation ne se mettait en _uvre que difficilement, la question de la place et du rôle des personnels civils n'ayant pas été traitée conformément aux orientations présidentielles et gouvernementales. Le budget n'octroie pas, malgré les mesures d'aménagement et de réduction du temps de travail, de moyens complémentaires en personnels à la hauteur des besoins naturellement liés à la professionnalisation et à la recherche d'améliorations sociales, dans le respect du statut de chacun.
Evoquant alors le rapport de la Commission sur l'entretien de la flotte, M. Alain Sparfel a souligné que la situation qui y était décrite pouvait être observée dans d'autres secteurs où des manques de matériels de rechange sont également constatés. Il a cité à ce propos l'exemple des établissements du matériel de l'armée de Terre dont les programmes de rénovation sont retardés par manque de rechanges. Il a estimé que la cause première de cette situation résidait dans l'insuffisance des crédits de la Défense qui restaient la variable d'ajustement du budget de la nation.
Il a jugé que la situation ainsi créée était inacceptable compte tenu des besoins considérables du pays (matériels vieillissants, parfois obsolètes, plate-forme aéronautique indisponible faute d'un second porte-avions, manque de véhicules de combat d'infanterie, maintenance très contrainte). De trop nombreux matériels ne peuvent être utilisés par déficience des stocks ou en raison de difficultés de réapprovisionnement dues soit à la disparition des entreprises productrices des rechanges, soit à un recours excessif à la sous-traitance pour les activités d'entretien.
Il a enfin critiqué la politique d'emploi du ministère de la Défense, soulignant la persistance d'un sous-effectif de plus de 5 000 postes et rappelant les différences de statut existant notamment entre les ouvriers d'État et les ouvriers professionnels. Il a, à ce propos, souligné que les ouvriers professionnels relevaient de nouveaux corps de fonctionnaires recevant des salaires en retrait par rapport aux statuts existants.
Il a considéré que l'organisation globale de la Défense nécessitait une attention soutenue du Parlement, conduisant l'exécutif à mettre en _uvre une politique qui satisfasse les besoins opérationnels, garantisse le maintien des compétences technologiques et industrielles et assure un climat social serein avec des décisions lisibles en matière d'emploi. Soulignant que la situation devenait tendue, il a considéré qu'elle nécessitait une réelle prise en considération de la part du Parlement et qu'elle appelait des actions pragmatiques et lisibles, notamment en matière de commandes d'État afin de permettre à DCN et à GIAT-Industries de demeurer des fleurons dans le domaine de l'industrie et de l'emploi.
Intervenant au nom de la Fédération CFDT des Etablissements et Arsenaux de l'Etat (FEAE-CFDT), M. Jacques Lépinard a d'abord exposé que le projet de budget, dans la mesure où il était le dernier de la programmation 1997-2002, permettait de jeter un regard critique sur la période vécue et d'en tirer si possible les nécessaires enseignements afin d'orienter les crédits budgétaires dans les directions les plus appropriées. Rappelant que dans le document de présentation du projet de budget les services du ministère de la Défense se félicitaient de la réalisation des grands objectifs de la programmation, il a jugé que ce résultat avait eu un prix en termes industriels et sociaux.
Il a d'abord souligné que la période écoulée aura été marquée par une réduction sans précédent des crédits de recherche et de développement. Faisant observer que les conséquences désastreuses de cette situation n'apparaîtront sans doute que dans quelques années, il a exprimé la crainte que dans certains domaines le point de non-retour n'ait été atteint. Notant avec satisfaction que les études et recherches amont s'intégraient dans les priorités du projet de budget, il s'est inquiété en revanche de la faiblesse des crédits qui leur étaient affectés au regard du retard pris depuis plusieurs années.
Après avoir rappelé que les personnels du ministère et des organismes relevant de sa tutelle venaient de vivre plus de dix ans de réformes, restructurations, adaptations diverses et variées et autres mesures de tous ordres, il a souligné qu'aucune autre administration n'avait connu à ce jour de tels bouleversements. Il a alors jugé qu'il était grand temps d'atteindre un point de stabilisation, à moins d'aller vers une situation de rupture dont on pouvait craindre qu'elle ne soit plus très éloignée devant certains signes, comme l'état du maintien en condition opérationnelle et plus particulièrement du service du soutien de la flotte. Notant avec satisfaction que, dans le projet de budget, les autorisations de programme affectées au maintien en condition opérationnelle augmentaient de façon significative (+ 28 %), il a cependant fait remarquer que la hausse n'était que de 10 % pour les crédits de paiement.
M. Jacques Lépinard a alors fait observer que si, pour retrouver un fonctionnement correct, il était nécessaire de disposer de crédits, il fallait aussi pouvoir compter sur des femmes et des hommes. Jugeant que la déflation d'effectifs imposée et le blocage des recrutements avaient fortement handicapé le fonctionnement des services, particulièrement dans les états-majors, il s'est réjoui que, pour la première fois depuis longtemps, le projet de budget permette une reprise des embauches aussi bien chez les fonctionnaires que chez les ouvriers, en conséquence naturelle de l'application des 35 heures. Il a souligné que la CFDT veillerait très attentivement à ce que les recrutements annoncés se réalisent rapidement afin de répondre du mieux possible au besoin des établissements en sous-effectif et demandé que cette reprise du recrutement se poursuive au cours des années à venir, afin de maintenir les effectifs à niveau.
Concernant les crédits d'équipement, dont l'importance est vitale pour les établissements industriels, M. Jacques Lépinard a estimé qu'ils faisaient les frais de la professionnalisation des armées. Il a rappelé que leur augmentation de 0,7 % se situait bien en dessous de l'inflation, et ce, à condition d'y inclure 0,4 milliard d'euros de crédits non consommés reportés de l'exercice précédent. M. Jacques Lépinard a souligné que certains industriels ainsi que les personnels qu'ils emploient subissaient directement les conséquences de la faiblesse des dotations d'équipement, comme en atteste le plan de charge de Giat-Industries. Repoussant l'idée qu'il faudrait accroître les crédits d'équipement dans le seul but de maintenir l'emploi, il a cependant considéré qu'il était temps que l'État définisse une politique à l'égard de ce qui subsiste de l'industrie d'armement terrestre. Il a alors souligné que l'étalement des programmes ou la diminution des cibles conduisaient inévitablement à des situations catastrophiques, comme celle dans laquelle Giat-Industries allait se trouver à l'été 2002. Il a également indiqué que la CFDT porterait une extrême attention à la façon dont sera conduite la réforme de la DCN.
Enfin, faisant observer que les récents événements survenus aux États-Unis et l'intervention en Afghanistan qui en découle laissaient craindre que, pour l'année à venir, le coût des opérations extérieures ne subisse une très forte augmentation, il a demandé à la Commission, dans cette éventualité, de bien vouloir prendre les initiatives nécessaires afin que les crédits d'équipement ne servent pas, une fois de plus, de réservoir financier pour ces opérations.
M. Jean-Louis Naudet, secrétaire général de la Fédération nationale des travailleurs de l'Etat de la CGT (FNTE-CGT), a souligné que le 16 octobre 2001, à l'appel de quatre Confédérations, dont la CGT, des dizaines de milliers de salariés avaient manifesté et fait grève pour les salaires, l'emploi, la protection sociale et l'avenir des régimes de retraite. Il a indiqué que de nombreux salariés du ministère de la Défense et des industries sous sa tutelle, avaient également participé à ces actions pour porter leurs exigences sociales et se faire entendre de la représentation nationale et du Gouvernement.
Abordant les préoccupations essentielles actuelles, au premier rang desquelles figure le devenir de DCN depuis l'annonce de sa transformation en société d'Etat par le Gouvernement, le 6 juillet dernier, il a souligné que les inquiétudes et les craintes des salariés étaient suffisamment fortes pour que leurs organisations syndicales le manifestent dans une déclaration commune. Il a confirmé l'attachement de la CGT au statut d'État dont il a estimé qu'il ne s'oppose nullement à la modernisation du fonctionnement de DCN, sous réserve que soit engagé un plan d'investissement industriel et d'embauche à statut.
Il a jugé que la modernisation du fonctionnement de DCN ne pouvait s'accommoder de la poursuite d'un plan d'entreprise qui continue de faire des ravages, de la stratégie de filialisation engagée, qui conduit à des pillages d'études, de recherches et de fabrications, et de la réduction des effectifs, qui aboutit à ce que nombre de professions hautement qualifiées soient déjà déficitaires au point de compromettre la bonne exécution des missions, y compris en matière d'entretien de la flotte. Il a ajouté que DCN a grand besoin d'une politique de reconquête nationale de ses missions d'études, d'essais, de fabrication, de réparation et d'entretien, mais aussi de plans de charge conséquents, fournis par l'attribution prioritaire des travaux de construction des bâtiments de la Marine nationale.
Regrettant que la Commission n'ait pas jugé utile de recueillir le sentiment des organisations syndicales sur ce point capital avant leur traditionnelle audition dans le cadre du débat budgétaire, M. Jean-Louis Naudet a souhaité qu'elle en prenne l'initiative avant la discussion et le vote de la loi de programmation militaire pour les années 2003-2008, dont il a souligné qu'elle conditionnerait largement le devenir des industries de défense et de leurs emplois.
Il a ensuite jugé indispensable que le Gouvernement prenne d'autres mesures en matière de salaires, de traitements, de pensions et d'emploi que celles annoncées le 16 octobre par le Ministre de l'Économie. Il a estimé que la priorité devrait être de dynamiser les salaires, d'améliorer le pouvoir d'achat des ménages et notamment des plus modestes d'entre eux.
Abordant la question des personnels à statut ouvrier, il a déploré que le système des abattements de zone continue de sévir et que les engagements de l'État ne soient pas remplis depuis 1977, soulignant que le contentieux salarial persistait et s'alourdissait.
M. Jean-Louis Naudet a ensuite tenu à réaffirmer l'attachement de la CGT aux régimes spéciaux et particuliers de retraite donnant droit à une pension à taux plein après 37,5 annuités. Il a indiqué que la CGT repoussait avec fermeté les solutions préconisées par les auteurs d'une récente étude, réalisée avec l'Observatoire des Retraites de la Caisse des Dépôts et Consignations, qui prévoyait entre autres d'aligner les régimes spéciaux sur le régime général.
Il a également attiré l'attention de la Commission sur le fait que la proposition de ramener à 1 759 heures le forfait annuel servant au calcul de la pension de retraite ne permettrait pas d'assurer le taux statutaire de 75 % du salaire. Il a précisé que la CGT revendiquait en conséquence un forfait annuel de 1 828 heures.
S'inquiétant de la situation de l'emploi, il s'est réjoui que le projet de budget affiche des effectifs budgétaires en hausse de 745 postes mais il a regretté qu'il prévoie également une réduction de 1 887 emplois d'ouvriers d'État. Il a rappelé que 13 741 emplois d'ouvriers d'État auront été supprimés depuis 1997, et ce malgré l'intégration des agents de l'ex-Secrétariat d'Etat aux Anciens combattants. Il a estimé que cette situation était d'autant plus inacceptable que la non-réalisation des effectifs budgétisés persistait et s'aggravait, 8 092 emplois n'étant pas pourvus au 30 juin 2001, ce qui altérait gravement le fonctionnement des établissements ainsi que l'exécution de leurs missions et hypothéquait la crédibilité de la signature de l'accord-cadre sur les 35 heures et les 2 171 recrutements annoncés par le Ministre de la Défense.
M. Jean-Louis Naudet a souhaité aborder la question du devenir de Giat-Industries, qu'il a jugé des plus incertains. Il a observé que les travaux de retrofit seraient retardés pour des raisons budgétaires liées à la commande de 52 Leclerc neufs et que le programme de véhicule blindé de combat d'infanterie (VBCI) prenait du retard alors que rien ne garantissait qu'il sera réalisé par Giat-Industries. S'inquiétant que la direction de Giat-Industries n'écarte aucune hypothèse pour externaliser un maximum de travaux, il a fait valoir que cette entreprise ne pouvait pas devenir le simple pilote du programme de VBCI sans risquer de nouvelles et drastiques réductions d'effectifs. Il s'est alors interrogé sur les projets de filialisation et d'alliances envisagés par le Ministre de la Défense et M. Jacques Loppion. Il a également exprimé ses réserves à l'égard des politiques, marquées par la culture des départs, menées depuis 1987 et dénoncé leurs conséquences pour des salariés confrontés à quinze ans de plans anti-sociaux. Il a alors imputé au bilan de l'action du Ministre de la Défense la fermeture réalisée ou en cours de cinq sites et les réductions d'effectifs effectuées dans le cadre du Plan stratégique, économique et social (PSES).
Il a estimé qu'une autre politique industrielle et sociale devait être engagée de toute urgence pour éviter que le groupe public ne disparaisse, demandant que ce mandat soit assigné au futur PDG. Il a estimé que les difficultés de Giat-Industries, cumulées avec celles liées à l'évolution de DCN, n'étaient pas sans risques pour le Gouvernement et sa majorité, d'autant que s'y ajoutaient celles de la SNPE dont il a jugé qu'elle était l'objet de pressions inacceptables de la part de la SNECMA et de son PDG. Estimant que le projet « Héraklès » conduirait au démantèlement de la SNPE, il a émis la crainte qu'il aboutisse à une perte de maîtrise et de souveraineté sur les capacités de propulsion solide, indispensables à la dissuasion nucléaire. Il en a déduit que ce projet devait être purement et simplement abandonné.
Jugeant que certaines initiatives de responsables politiques utilisaient l'émotion suscitée par l'explosion de l'usine AZF, il s'est prononcé contre un transfert des établissements de la SNPE hors de Toulouse, eu égard à ses conséquences non négligeables sur l'emploi. Estimant que les trois usines de la SNPE à Toulouse avaient un avenir, il a demandé que l'Etat prenne ses responsabilités afin de créer toutes les conditions pour une mise en configuration technique dans la perspective d'un redémarrage, dans le cadre strict d'impératifs de sécurité renforcés sous la vigilance des représentants des personnels au sein des organismes compétents.
Il a alors souligné que l'objectif de travailler et vivre en sécurité n'était pas compatible avec la précarité, l'intérim, les salaires et la formation au rabais, les restrictions des droits des élus aux comités d'hygiène et de sécurité et les suppressions d'emplois qualifiés. Il a ajouté que, face à la récession qui menace, la CGT n'entendait pas courber le dos, ni se laisser impressionner.
M. Jean-Yves Placenti, représentant de l'Union nationale des Syndicats autonomes (UNSA-Défense), a souhaité alerter la représentation nationale sur les défauts et méprises d'un projet de budget hors du temps, suspendu à la fiction de l'achèvement d'une loi de programmation militaire qui devait refonder l'outil de défense et assurer la professionnalisation et la civilianisation. Il a souligné que le projet de budget, élaboré avant les tragiques événements du 11 septembre dernier, ne prévoyait aucun financement en faveur de l'équipement des forces à déployer éventuellement dans le cadre des engagements internationaux de la France. Il a ajouté qu'il ne répondait pas non plus aux impératifs d'une défense nationale dynamique, porteuse de projets d'avenir concrets au plan national et européen, ni aux attentes des personnels civils et militaires.
S'interrogeant sur la pertinence d'un budget de reconduction, toujours en diminution en euros constants, il a considéré que la liste des commandes permises par les disponibilités budgétaires ne saurait inverser les tendances à la dégradation des équipements décrites par M. Jean-Claude Sandrier dans ses avis budgétaires. Rappelant l'attachement viscéral de l'UNSA-Défense au maintien de compétences et de savoir-faire au sein de l'appareil d'État, il a exprimé le v_u qu'en dépit du chaos régnant à la DGA, l'histoire récente de Giat-Industries ne constitue pas le modèle d'évolution des établissements industriels de la défense.
Il a ensuite fait valoir qu'à la stagnation des crédits d'équipement, s'ajoutaient des menaces pour les personnels. Il a estimé à cet égard que le projet de budget ne s'inscrivait dans aucune dynamique d'emploi et de promotion de la place des agents civils au sein de l'appareil de défense. Il a ainsi déploré le non-renouvellement des générations d'ouvriers d'Etat, les suppressions d'emplois et les perspectives de précarisation.
Il a également regretté le recrutement d'agents contractuels au prix du marché en vue de maintenir artificiellement les effectifs civils, jugeant qu'il s'agissait d'une manière commode de gérer les compétences au détriment des titulaires. Il a alors déploré qu'il ne soit pas suffisamment tiré parti des formations initiales des titulaires et de leurs aspirations à occuper des emplois de spécialistes ou de responsabilité en raison des pesanteurs de la gestion des personnels civils des armées et des services.
M. Jean-Yves Placenti a estimé que de telles dérives étaient symptomatiques de la façon dont les autorités du ministère de la Défense considéraient les personnels civils, soulignant que, trop souvent, la négociation se résume à des diktats élaborés dans le seul souci de mettre les agents au pas. Il a considéré que l'esprit et la lettre de l'accord national signé en juillet dernier étaient régulièrement bafoués par les responsables locaux.
Il a ensuite dénoncé le corporatisme de certaines armées, et de la Gendarmerie en particulier, qui s'obstinent à développer des emplois militaires sans vocation opérationnelle pour tenir des emplois administratifs à un coût budgétaire très largement supérieur aux corps de fonctionnaires civils équivalents. Rappelant que l'UNSA-Défense avait déjà dénoncé ces mesures corporatives devant la Commission l'année dernière, il a fait valoir que les crédits cumulés qui leur sont affectés pourraient permettre de créer beaucoup plus d'emplois civils que d'emplois militaires non opérationnels. Il a ajouté que ces crédits pourraient également abonder les mesures spécifiques destinées aux agents civils, qui, pour positives qu'elles soient dans le projet de budget, restent encore très en deçà des attentes, notamment pour les personnels administratifs et techniques, voire pour les travailleurs sociaux.
M. Jean-Yves Placenti a enfin souhaité attirer l'attention de la Commission sur la nécessité de maintenir l'attractivité des carrières civiles, estimant que les personnels que représente l'UNSA-Défense, confrontés aux soubresauts de la professionnalisation et à son cortège de situations de concurrence, ne voyaient pas dans le projet de budget le reflet de leurs préoccupations.
Après avoir évoqué les possibles incidences budgétaires des événements internationaux et des échéances électorales à venir, il a émis le v_u que les aspirations des personnels civils soient prises en compte dans la future loi de programmation militaire qui devrait assurer la consolidation de la professionnalisation et l'émergence, au sein de l'outil de défense, d'une véritable composante civile, normalement intégrée et considérée.
M. Denis Lefèbvre, Président fédéral de la Fédération CFTC des personnels civils du ministère de la Défense, a souligné que le projet de budget ne tenait pas compte de la nouvelle donne internationale issue des événements du 11 septembre 2001. Faisant valoir qu'il avait été établi à une époque qui paraît déjà ancienne, où d'aucuns considéraient les dépenses de la Défense comme du gaspillage, il a jugé qu'il n'était pas satisfaisant, exprimant le v_u que la future loi de programmation militaire 2003-2008 tienne compte de ses insuffisances.
Regrettant la faiblesse des crédits d'équipement, il a rappelé qu'une mission d'information de la Commission avait établi un rapport très critique sur les conditions d'entretien des bâtiments de la flotte. Il a également estimé que l'absence de missiles de croisière dans les forces françaises n'était imputable ni à la DGA, ni à ses personnels mais aux restrictions budgétaires.
Il a ensuite souligné qu'un seul porte-avions était disponible de façon non permanente, que les Rafale n'étaient encore qu'une poignée et que, seuls parmi les grands équipements modernes, les Leclerc, qui ne suffisent pas pour lutter contre les réseaux terroristes, étant présents dans les forces.
Faisant valoir que la lutte contre le terrorisme nécessitait une Gendarmerie bien équipée en hommes et en matériels, il a jugé insuffisant l'effort fait en ce domaine dans le projet de budget. Il a considéré à ce propos que le malaise perdurait dans la Gendarmerie.
Abordant le titre III du projet de budget, il s'est réjoui de l'effort consenti en matière de régime indemnitaire des personnels de la Défense tout en souhaitant des mesures supplémentaires en faveur des personnels des services déconcentrés. Il a également demandé que les régimes indemnitaires du ministère de la Défense soient alignés sur ceux du ministère de l'Économie et des Finances.
Estimant que de trop nombreux fonctionnaires de qualité voyaient leur carrière bloquée pour de simples raisons comptables et jugeant que le découragement qui en résultait était plus coûteux pour la collectivité nationale que l'élargissement des règles d'avancement, il a souhaité l'ouverture de nouvelles négociations salariales statutaires à la fonction publique. Il également renouvelé la demande d'avancement linéaire pour tous les fonctionnaires défendue par son organisation.
Il a observé que, pour l'application à la Défense de l'accord sur l'aménagement et la réduction du temps de travail, qui soulève de nombreuses difficultés, le Gouvernement avait concédé 2 171 recrutements alors que le ministère de l'Environnement en a obtenu 3 000. Il a également douté que la levée du « gel » sur 1 100 postes de fonctionnaires suffise pour compenser 10 % de réduction du temps de travail. Après avoir demandé que les milliers d'emplois budgétaires votés par le Parlement mais non réalisés fassent l'objet de recrutements immédiats, il a estimé que les 900 autorisations de recrutement d'ouvriers d'État prévues par le projet de budget ne suffiraient pas à couvrir les besoins de l'armée de Terre. Il s'est par ailleurs étonné que les adjoints d'administration centrale ne bénéficient pas des mesures indemnitaires prévues en faveur des personnels du même corps des services déconcentrés.
Il a également demandé que les mesures de cessation anticipée d'activité prévues pour 2002 en faveur des victimes de l'amiante ne soient pas réservées au domaine naval mais soient étendues à l'ensemble des personnels. Observant que le cancer ne faisait pas de discrimination entre les victimes, il a estimé que cette inégalité de traitement exposait l'État au risque d'une condamnation.
Il a enfin interrogé le Président Paul Quilès sur l'état d'avancement des travaux de la Commission relatifs à l'externalisation, regrettant que le ministère de la Défense ait perdu de trop nombreuses compétences.
M. Jean-Yves Le Drian, soulignant la nécessité d'une réforme qui permette à DCN d'accéder au régime juridique de société d'État, a estimé que son évolution devait être fidèle à l'esprit de la déclaration du 6 juillet 2001, notamment pour ce qui concerne le statut du personnel. Il a également réaffirmé sa confiance dans les perspectives d'avenir de DCN et mis l'accent sur la nécessité de préserver son intégrité sans permettre sa dilution.
M. Yves Fromion a interrogé les syndicats sur les difficultés que les forces terrestres éprouvent lorsqu'elles souhaitent embaucher des ouvriers d'État et sur l'origine des blocages qu'elles rencontrent en ce domaine. Il a également estimé que le projet de loi de finances risquait d'être profondément modifié compte tenu de la situation internationale, des incertitudes économiques et des échéances électorales.
M. Alain Sparfel a jugé qu'en leur état actuel, les projets de réforme de DCN ne pouvaient satisfaire personne. Il a par ailleurs estimé que l'armée de Terre pouvait faire appel à des ouvriers d'État, dans la limite des 250 et 700 embauches respectivement autorisées pour 2001 et 2002. Il a également regretté que la politique d'emploi du ministère de la Défense soit faite par le ministère de l'Économie et des Finances qui bloquait les embauches dont l'armée de Terre a le plus grand besoin, notamment pour ses soutiens et l'entretien du matériel.
Le Président Paul Quilès a observé que les limites imposées pour l'embauche de nouveaux ouvriers d'État étaient probablement liées aux sureffectifs constatés dans cette catégorie à DCN comme à Giat-Industries.
M. Alain Sparfel a tenu à préciser que, si les ouvriers d'État des armées relevaient bien du même statut que ceux de DCN et de Giat-Industries, leurs qualifications et leur expérience professionnelle étaient, en revanche, distinctes. L'identité du statut n'implique pas l'identité du métier. La formation des personnels pour les adapter à un nouveau poste réclame en outre du temps.
M. Jacques Lépinard a dénoncé l'incohérence à laquelle conduisait notamment la position du ministère de l'Économie et des Finances qui, tout en bloquant les recrutements de nouveaux ouvriers d'Etat afin d'agir prioritairement sur les sureffectifs de Giat-Industries, se refusait néanmoins à proroger les mesures incitatives au départ du Plan stratégique, économique et social (PSES) de cette entreprise.
M Jean-Louis Naudet a tenu à rappeler la portée de la déclaration du 6 juillet en insistant sur le front uni de toutes les fédérations syndicales concernées par la réforme de DCN. Il a souhaité que la précipitation ne l'emporte pas sur la concertation, notamment à l'approche d'échéances électorales. En tout état de cause, il a rejeté la formule d'un article « fourre-tout » inséré dans la loi de finances rectificative qui répéterait les erreurs commises à l'époque de l'évolution statutaire de Giat-Industries. S'agissant des ouvriers d'État, M. Jean-Louis Naudet a dénoncé la tentation de leur substituer de façon quasi systématique des ouvriers professionnels disposant de moins de garanties sociales et moins bien rémunérés.
M. Jean-Claude Sandrier s'est interrogé sur l'application de la mesure de déblocage de 250 nouveaux postes d'ouvriers d'État prévue dans la loi de finances pour 2001. Il a indiqué qu'il poserait cette question au Gouvernement à l'occasion du prochain débat budgétaire. Il a, par ailleurs, déploré que le texte législatif en cours de préparation sur la réforme de DCN soit en retrait par rapport aux engagements pris par les pouvoirs publics au cours de la concertation avec les organisations syndicales. M. Jean-Claude Sandrier a souhaité une poursuite de la concertation sur ce point. Il a également rappelé qu'il avait demandé que s'engage une réflexion au sein de la Commission sur l'avenir des industries de l'armement terrestre confrontées à de graves difficultés sectorielles qui pouvaient déboucher sur une irrémédiable perte de compétences, en France comme en Europe.
M. Charles Sistach, Secrétaire général adjoint de la Fédération syndicaliste Force ouvrière de la Défense, des Industries de l'Armement et des Secteurs assimilés (FEDIASA-FO), regrettant l'image trop souvent caricaturale qui était donnée des ouvriers d'État, a souligné qu'après la mise en _uvre du plan « FORMOB », certains de ces personnels hautement qualifiés occupent des emplois sans rapport avec les compétences qu'ils ont pu acquérir. Il a indiqué que depuis 1997 l'effectif des ouvriers d'État avait régressé de près de 25%. Jugeant qu'il ne fallait pas repousser l'idée d'embaucher des ouvriers professionnels sur des emplois qui relèvent effectivement de leur catégorie, il a souligné que les pouvoirs publics devaient définir clairement leur politique à l'égard des ouvriers d'État, qui restent les seuls à même d'accomplir certaines tâches. Puis il a estimé que les difficultés que rencontraient les armées dans le domaine du maintien en condition opérationnelle des matériels résultaient, certes, de contraintes budgétaires mais aussi d'errements dans la gestion des personnels.
M. Jacques Lépinard a précisé que les quelque 250 postes d'ouvriers d'État ouverts pour 2001 avaient été essentiellement proposés à des salariés de Giat-Industries relevant du régime des conventions collectives. Il a alors indiqué que, parmi les organismes où des emplois ont été offerts à ces ouvriers qualifiés dans le domaine de la mécanique, figurait un établissement de Montauban qui réalise le pliage des parachutes, activité réclamant des compétences particulières aux industries textiles. Il a noté qu'il ne fallait pas, dans ces conditions, s'étonner du petit nombre d'ouvriers retenus après sélection.
Mme Claudine Kervella, représentante de la Fédération CFDT des Etablissements et Arsenaux de l'État (FEAE-CFDT) a souligné la compétence des ouvriers fonctionnaires, également appelés ouvriers professionnels. Elle a estimé qu'il était préférable de recruter des personnels de cette catégorie plutôt que de recourir à la sous-traitance ou à des personnels intérimaires ou sous contrat à durée déterminée. Elle a par ailleurs insisté sur la nécessité de les fidéliser, le faible niveau actuel de leurs salaires entraînant un turn over très important dû à des départs rapides, au bout d'un ou deux ans.
M. Jean-Claude Viollet a souligné que le dialogue social existait à DCN, la pratique des réunions de concertation en portant témoignage. Déclarant pour le reste partager l'avis de M. Jean-Yves Le Drian, il a ajouté que, dans la situation actuelle, il convenait de trouver un terrain d'entente dans les trois domaines de la nature de l'entreprise, du statut de son personnel et du contrat qui devra la lier à l'État, notamment pour lui assurer les commandes nécessaires pendant les premières années.
Evoquant alors la situation de la SNPE, il a demandé une décision claire sur l'avenir du site d'Angoulême, en déclin continu depuis longtemps. L'arrêt des activités industrielles sur ce site étant désormais prévu pour 2003, il a estimé que trois questions devaient faire l'objet d'une attention soutenue et continue. Il s'agit d'abord de la dépollution du site qui durera plusieurs années, jusqu'en 2010 et pour laquelle l'engagement financier de l'État devra être tenu. Il s'agit en deuxième lieu des conditions de reconversion des personnels qui ont vécu sept plans sociaux et qui doivent être respectés dans leur reclassement. Il s'agit enfin de la réindustrialisation future du site, à l'égard de laquelle la SNPE a des responsabilités particulières.
M. Jean-Jacques Le Gourrierec, représentant de la Fédération CFTC des personnels civils du ministère de la Défense, a ensuite déploré le manque de consistance de l'avant-projet de texte relatif à la transformation de DCN en société d'État. Après avoir regretté l'insuffisance des recrutements d'ouvriers d'État, il a exprimé ses inquiétudes devant la perspective d'un développement anarchique de l'externalisation.
M. Alain Sparfel a jugé que le développement des recrutements dans la catégorie des ouvriers professionnels s'expliquait par les interdictions d'embauche des ouvriers d'État. Il a alors plaidé en faveur d'un alignement du statut des ouvriers fonctionnaires sur celui des ouvriers d'État, afin de garantir le niveau de leurs retraites et de leurs salaires. Il a souligné par ailleurs que 3 000 postes d'ouvriers d'État budgétisés n'étaient pas pourvus. Il a enfin insisté sur le sentiment de lassitude qui animait de nombreux personnels civils du ministère de la Défense et qui menaçait la démocratie sociale.
Considérant que ce n'était pas simplement par sa longueur qu'un texte apportait des garanties, M. Robert Gaïa a estimé que chacun devait prendre ses responsabilités quant à la réforme de DCN pour éviter une situation de blocage préjudiciable à l'entreprise. Jugeant que l'avant-projet actuel n'était pas acceptable en l'état, il s'est prononcé pour un retour à l'esprit de la déclaration du 6 juillet. Après avoir exprimé sa confiance dans l'avenir de DCN, il a demandé que soient levées les ambiguïtés concernant son évolution.
M. Jean-Yves Placenti, estimant que les armées françaises ne pouvaient mener leurs opérations dans les meilleures conditions et que leur équipement présentait de nombreuses lacunes, s'est prononcé pour une augmentation du budget de la Défense.
Après avoir souligné l'importance de la rencontre que la Commission organise annuellement avec les représentants des syndicats des personnels civils de la Défense, le Président Paul Quilès a formulé les observations suivantes :
- il est inexact d'affirmer que les forces françaises ne sont pas en mesure de remplir leurs missions. Lorsqu'ils sont entendus par la Commission, les chefs d'état-major ne manquent pas de souligner leur efficacité et la considération dont elles jouissent, notamment dans le cadre de la vingtaine d'opérations extérieures actuellement en cours ;
- la France n'a pas d'intention agressive mais ses forces sont présentes partout où elle le juge nécessaire. Si elle n'intervient pas en Afghanistan aujourd'hui, c'est d'abord parce que les Etats-Unis n'ont pas besoin de leurs alliés. Si la question d'une intervention venait à se poser, elle se déterminerait en conservant son libre arbitre et sa liberté d'appréciation, ce qui n'empêche pas la solidarité ;
- s'agissant de la réforme de DCN, la Commission se prononcera en toute clarté lorsqu'un texte lui sera soumis, à l'issue du dialogue du Gouvernement avec les organisations syndicales.
Le Président Paul Quilès a ensuite rappelé que la Commission avait confié à M. Michel Dasseux un rapport d'information sur l'externalisation dans les armées qu'elle examinera prochainement. Il a par ailleurs proposé que M. Aloyse Warhouver consacre des développements particuliers à la situation des ouvriers d'État dans son prochain rapport pour avis sur le titre III du budget de la Défense.
IV. - AUDITION DES REPRÉSENTANTS DES ASSOCIATIONS DE RETRAITÉS MILITAIRES
La Commission de la Défense a entendu, le 17 octobre 2001, les représentants des associations de retraités militaires, sur le projet de budget pour 2002.
Accueillant les représentants des dix associations de retraités militaires présentes à l'audition, M. Robert Gaïa, Président, les a vivement remerciés d'avoir répondu à l'invitation de la Commission et de poursuivre ainsi une tradition de rencontre qui permet chaque année d'éclairer utilement les débats sur le budget de la Défense. M. Robert Gaïa a rappelé que le dialogue avec les associations de retraités militaires constituait, tout au long de l'année, un aspect important du travail parlementaire, dans le cadre de la Commission de la Défense mais aussi au niveau local. C'est donc avec une particulière attention que les membres de la Commission recueilleraient les observations et les propositions des associations de retraités militaires sur le projet de budget pour 2002.
M. Pierre Ingouf, Président de la Confédération nationale des retraités militaires et des veuves de militaires de carrière (CNRM), a tout d'abord indiqué qu'à deux exceptions près, les associations présentes à l'audition faisaient partie du Conseil permanent des retraités militaires (CPRM), organisme chargé de représenter les retraités et les anciens militaires auprès du ministère de la Défense. Il a ajouté que les 12 associations constitutives du CPRM étaient parvenues à se mettre d'accord sur un programme revendicatif minimum commun, établi à partir des conclusions des travaux des groupes de réflexion qu'elles avaient mis sur pied pour traiter des questions relatives aux domaines suivants : pouvoir d'achat des retraites, pensions militaires d'invalidité et maladies professionnelles, mesures à caractère social et mesures d'accompagnement de la professionnalisation. M. Pierre Ingouf a précisé que les mesures figurant dans ce programme revendicatif commun étaient réduites en nombre et en coût et qu'elles avaient été présentées en février 2001 au Ministre de la Défense qui avait reconnu qu'aucune d'entre elles n'était injustifiée ni par conséquent irrecevable. Il a souhaité que la Commission de la Défense les appuie lors des débats budgétaires, afin d'accélérer les procédures d'examen auxquelles elles sont soumises au sein du ministère de la Défense
Avec l'autorisation de M. Robert Gaïa, Président, M. Pierre Ingouf a ensuite invité les représentants d'association ayant animé les groupes de réflexion qu'il venait d'évoquer à exposer leurs conclusions.
M. André Arrouet, Président de l'Union nationale des sous-officiers en retraite (UNSOR), a alors présenté les conclusions du groupe de réflexion sur le pouvoir d'achat des retraites. Il a indiqué que le CPRM souhaitait, conformément aux conclusions de ce groupe, la prise en compte, dans le calcul de la retraite, d'une prime ou accessoire de solde. Cette mesure qui répond aux aspirations de tous les ressortissants du ministère de la Défense a été envisagée par le Premier ministre lors de sa déclaration sur les retraites, le 23 mars 2000. Sa réalisation semble donc tout à fait possible. Le groupe de réflexion propose la prise en compte de l'indemnité pour charges militaires. Cette demande étant constamment rejetée, le groupe est ouvert de manière générale à toutes les propositions de prise en compte d'autres primes ou accessoires de solde.
M. André Arrouet a par ailleurs évoqué la situation préoccupante de certaines veuves de militaires. S'il est vrai que le montant perçu par les plus anciennes ne peut être inférieur à la somme de l'allocation servie aux vieux travailleurs et de l'allocation du fonds de solidarité, il est regrettable que les personnes concernées soient obligées de solliciter annuellement une étude afin d'obtenir cette majoration. Le CPRM demande donc pour ces veuves une révision à la hausse du minimum vieillesse. S'agissant des veuves dites allocataires, qui ne sont pas bénéficiaires des dispositions de la loi de décembre 1964 portant réforme du Code des pensions civiles et militaires de retraite, le taux de l'allocation annuelle a été porté de 3,6 à 6 % du traitement brut afférent à l'indice 100 en 1998. Toutefois, faute de pouvoir obtenir l'intégration pure et simple de cette allocation dans le Code des pensions, le CPRM demande que la valeur du patrimoine récupérable sur succession soit portée de 300 000 à 500 000 francs.
M. Georges Gabrielli, Président de la Fédération nationale des officiers mariniers en retraite (FNOM), a alors présenté les conclusions du groupe de réflexion sur les pensions militaires d'invalidité et les maladies professionnelles. Il a souligné qu'existait depuis de nombreuses années une différence entre les pensions militaires d'invalidité des sous-officiers et des officiers mariniers à l'avantage de ces derniers. Dans une armée professionnalisée et qui développe les activités interarmées, ces différences, dont les causes sont anciennes et mal définies, sont de moins en moins acceptées. Sans qu'il soit question de remettre en cause l'avantage des officiers mariniers, il conviendrait que la situation des sous-officiers soit améliorée afin que soit supprimé l'écart actuel. Cette mesure coûterait 50 millions de francs pour les pensionnés et 35 millions de francs pour les veuves. M. Gabrielli a indiqué que le CPRM ne demandait en rien une mesure globale mais seulement l'établissement d'un calendrier pluriannuel permettant de mettre fin à cette disparité.
Evoquant ensuite les affections dues au contact avec l'amiante, M. Georges Gabrielli a souligné que la pension militaire d'invalidité pour maladie hors guerre était normalement accordée aux personnes présentant un taux minimum d'invalidité de 30 % et prouvant, en outre, l'imputabilité de la maladie au service. Il a alors indiqué que, grâce aux efforts conjugués des associations, des parlementaires et du ministère de la Défense, les victimes de l'amiante dont le taux d'invalidité est inférieur à 30 % étaient désormais autorisées à présenter une demande d'indemnisation. Par ailleurs, la loi sur le financement de la sécurité sociale pour 2001 a mis en place un fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante. Cependant, si la loi a prévu que les titulaires du Code des pensions civiles et militaires de retraite peuvent bénéficier de ce fonds, le décret d'application se fait toujours attendre. S'agissant enfin du départ anticipé en retraite des travailleurs de l'amiante, qui concerne notamment le personnel des chantiers de construction et de réparation navales, M. Georges Gabrielli a fait remarquer que les marins n'en étaient pas bénéficiaires à ce jour.
M. Guy Ribeyrol, Trésorier général de l'Association nationale et fédérale d'anciens sous-officiers de carrière de l'armée française (ANFASOCAF), a présenté les propositions du groupe de réflexion sur les mesures à caractère social.
Il a regretté que les directives de la Direction de la fonction militaire et du personnel civil du ministère de la Défense du 14 mai 2000, concernant le soutien interarmées des retraités, et du 31 mai 2000, ayant pour objet la généralisation des pratiques et procédures interarmées pour le soutien social des retraités n'aient pas été mises en application.
Il a indiqué que le CPRM demandait impérativement que la carte des districts sociaux soit portée à la connaissance de ses membres. Puis, il a formulé des propositions destinées à améliorer l'accès des retraités militaires aux districts sociaux dont ils relèvent.
Il a souhaité que les retraités militaires soient représentés dans les comités sociaux des districts, au même titre que les autres catégories d'ayants droit. Il a en effet considéré que la situation actuelle avait pour conséquence pratique de les exclure du programme d'activité des assistants sociaux. Constatant que les intervenants sociaux, dont il a jugé le nombre trop faible, ne connaissaient pas les retraités militaires relevant de leur district et que les retraités militaires ne connaissaient pas leur district de rattachement, M. Guy Ribeyrol a demandé un effort d'information en ce domaine. Il a en particulier souhaité que chaque retraité puisse recevoir, lors de l'envoi de son bulletin de pension, une notice sociale lui indiquant ses droits et son district de rattachement.
Enfin, évoquant la maltraitance des personnes âgées, il a formulé le v_u qu'une formation soit dispensée aux assistants sociaux sur ce sujet délicat, qui nécessite beaucoup d'attention et d'écoute. Puis il a insisté sur l'importance du rôle du Délégué militaire départemental en matière de concertation et d'information.
M. Alain Clerc, Président adjoint de la Confédération nationale des retraités militaires et des veuves de militaires de carrière (CNRM), s'est alors exprimé au nom du groupe de réflexion du CPRM sur les mesures d'accompagnement de la professionnalisation.
Il a tout d'abord rappelé que les bénéfices de campagne accordés pour compenser des situations exceptionnelles consistaient en bonifications majorant la durée des services effectifs pour le calcul de la pension des fonctionnaires civils et militaires. Il a ensuite demandé que les bénéfices de campagne acquis par les militaires quittant le service actif sans droits à pension et n'intégrant pas la fonction publique puissent, par le biais du taux de liquidation, contribuer à l'amélioration de leur pension de vieillesse.
Il a alors souligné que, pour être admise par les partenaires sociaux, cette mesure, justifiée par la professionnalisation des armées et la multiplication des contrats de courte durée, devait se traduire par une contribution financière du ministère de la Défense au régime général de la sécurité sociale. Il a indiqué que cette demande, présentée dès 1997 au Ministre de la Défense, M. Alain Richard, avait été transmise par ses services en novembre de la même année au ministère de l'Emploi et de la Solidarité qui, à ce jour, n'y avait pas donné suite.
Il a demandé en conséquence l'intervention et l'appui de la Commission pour faire aboutir cette revendication.
M. Henri Lacaille, Président de l'Union nationale de coordination des associations militaires (UNCAM), a souligné que la convention de l'UNEDIC ne modifiait pas la situation assez favorable consentie depuis janvier 1997 aux anciens militaires ayant perdu leur emploi au cours de leur carrière civile. Il a néanmoins regretté que le bénéfice de cette situation ne soit pas étendu aux anciens militaires de plus de soixante ans qui, dans la pratique n'ont pu réunir, tous régimes confondus, le nombre de trimestres nécessaires pour bénéficier du calcul de leur retraite de sécurité sociale au taux maximal. La limite d'âge de soixante ans ayant aujourd'hui perdu son aspect inéluctable comme l'ont montré plusieurs jugements de la Cour de Cassation et les positions de certains partenaires sociaux, il conviendrait d'amender la législation pour permettre aux anciens militaires de réunir les conditions d'obtention de la retraite de sécurité sociale à taux plein, ce qui leur rendrait la plénitude de leurs droits.
M. Alain Bonavita, Président de l'Association nationale des officiers de carrière en retraite (ANOCR), a précisé que son association regroupait des officiers en retraite issus de toutes les armées et de toutes origines. Il a indiqué qu'elle était soucieuse de la pérennité et de la qualité de l'outil de défense, qu'elle s'efforçait d'entretenir le devoir de mémoire, qu'elle défendait la condition militaire et conduisait des actions de solidarité, plus particulièrement en direction des grands anciens qui sont les plus vulnérables.
M. Jean-Michel Bernard, représentant de l'ANOCR au Conseil supérieur de la fonction militaire et au CPRM, a évoqué en premier lieu la situation des lieutenants admis à la retraite avant 1976 qui se trouvent moins bien traités que s'ils avaient refusé leur avancement de fin de carrière. Il a indiqué que 378 retraités et 1 245 ayants cause étaient concernés et précisé que le coût de la mesure de revalorisation de leur pension, analogue à celle déjà prise pour les sous-lieutenants, s'élevait à 2,4 millions de francs.
M. Jean-Michel Bernard a abordé, en second lieu, la question de la couverture des risques d'accident des militaires permissionnaires sur les trajets directs aller et retour entre leur lieu d'activité et celui de leur permission. Il a demandé le rétablissement du droit à une pension militaire d'invalidité pour les militaires victimes d'accidents au cours de ces trajets. Il a également souhaité l'ouverture de ce droit au bénéfice des militaires en mission à l'étranger (marins en escale ou militaires en opérations extérieures notamment), lorsqu'ils ont subi un accident, en dehors des cas de permission ou de faute personnelle détachable de l'exécution du service.
M. Alain Clerc, Président adjoint de la Confédération nationale des retraités militaires et des veuves de militaires de carrière (CNRM), a souligné la dégradation des conditions de prise en charge des cures thermales pour les invalides et mutilés de guerre. D'une part, ceux-ci n'ont plus accès depuis 1996 aux centres de cure qui leur étaient jusqu'alors réservés et, d'autre part, ils ont subi un plafonnement autoritaire des remboursements correspondant à leurs séjours sur prescription médicale, le plafond de ces remboursements ayant été récemment ramené à 2 952 francs.
M. Alain Clerc a par ailleurs dénoncé la disparité de la protection sociale régissant les volontaires civils et les volontaires dans les armées : alors qu'une période de six mois de volontariat civil est désormais prise en compte par tous les régimes de protection sociale, le temps de volontariat dans les armées n'ouvre pas droit aux mêmes avantages, à l'exception du régime général ou des régimes spéciaux de la fonction publique.
Faisant référence au récent rapport d'information de la Commission sur l'entretien de la flotte, M. Georges Gabrielli, Président de la fédération nationale des officiers mariniers en retraite (FNOM), s'est inquiété de la faiblesse des dotations budgétaires dévolues à la Marine tant pour ses équipements que pour leur entretien. Il a également regretté l'absence de réponse budgétaire aux revendications des retraités militaires, en rappelant que depuis la revalorisation de pension accordée aux sous-lieutenants admis à la retraite avant 1976, aucune mesure nouvelle n'était intervenue.
M. André Arrouet, Président de l'Union nationale des sous-officiers en retraite (UNSOR), a appelé de ses v_ux l'instauration d'un système permettant à des personnels sous-officiers de quitter le service actif avec le grade supérieur, à l'instar des officiers, sous certaines conditions. Il a ensuite regretté que le mécanisme d'attribution de pécules incitatifs au départ ne soit pas prorogé au-delà de 2002.
Le docteur Bernard Lefèvre, Président du Syndicat professionnel des anciens médecins des armées (SAMA), a réaffirmé la solidarité de son organisation avec les autres associations d'anciens militaires. Il a insisté sur le lien entre la reconnaissance de la Nation à l'égard des retraités des armées et l'attention portée à la Défense par les pouvoirs publics et dans l'opinion.
Après s'être félicité des progrès accomplis dans la démocratisation des conditions de désignation des représentants des personnels au Conseil supérieur de la fonction militaire, il a soulevé la question de la réforme des dispositions du statut général des militaires interdisant l'adhésion à des groupements professionnels. Soulignant l'attention portée par le SAMA à la reconversion des anciens médecins militaires, il s'est réjoui que l'obstacle de la « contribution de solidarité » ait pu être contourné par une décision d'application. Constatant toutefois qu'aucune abrogation explicite n'était intervenue, il a indiqué que son organisation restait vigilante sur ce point. Le docteur Bernard Lefèvre s'est également déclaré satisfait des rapports désormais établis entre son syndicat et les services du ministère de la Défense. Il a souligné à ce propos que la reconversion dans de bonnes conditions des anciens médecins des armées était de nature à favoriser le recrutement des personnels du Service de Santé et leur renouvellement. Il a alors insisté sur la complémentarité des actions menées par le SAMA et les services de la Défense, indiquant qu'elle avait permis la publication d'un « Guide de la reconversion ». Enfin, il a évoqué le rôle des réservistes, particulièrement nécessaires au Service de Santé depuis la fin de la conscription. Il a, à ce propos, souligné la nécessité et l'urgence d'une réflexion approfondie sur la politique des réserves.
M. Elie Gambier, Président de la Confédération française des associations de retraités et pensionnés de la Gendarmerie (CFARPG), a remercié la Commission au nom de toutes les associations affiliées à sa Confédération pour les possibilités d'expression qu'elle leur offrait. Après avoir estimé que la faible prise en considération de leurs souhaits laissait à penser qu'ils ne sont pas prioritaires, M. Elie Gambier a néanmoins tenu à les énumérer.
Il a tout d'abord considéré que l'incertitude régnait toujours sur le devenir des moyens consacrés à la Défense. Depuis 1987, les lois de programmation ont eu des ambitions affichées, mais jamais concrétisées. Chaque année, elles subissent une et souvent deux amputations successives lors de l'élaboration de la loi de finances, puis en cours d'exécution du budget.
En quatre ans, la programmation 1997-2002 a ainsi été inférieure de 10 % aux engagements initiaux. La situation qui en résulte est choquante, même humiliante, puisque notre force d'intervention extérieure est de plus en plus réduite. Certains médias soulignent la faiblesse du rôle joué par la France. Y aura-t-il une substantielle amélioration du budget de la Défense pour 2002 ?
S'agissant de la Gendarmerie, le projet de loi de programmation militaire 2003-2008 prévoit que le niveau de ses effectifs sera fonction de l'évolution de ses missions de sécurité intérieure et de ses engagements extérieurs.
Or, dans la conjoncture actuelle tant sur le plan national que sur le plan international, ne serait-il pas judicieux de prévoir immédiatement la création de 5 000 postes supplémentaires de sous-officiers ? Ce renforcement permettrait :
- de donner une carrière statutaire aux gendarmes-adjoints déjà recrutés ;
- d'encourager le recrutement et de fidéliser les personnels ;
- de diminuer les contraintes journalières qui pèsent sur certains personnels de terrain alors que les dispositions de la loi sur la réduction du temps de travail doivent entrer en vigueur dans toutes les administrations dès le 1er janvier 2002 ;
- d'offrir aux personnels une solide formation militaire mais également une qualification juridique de haut niveau, eu égard aux nouvelles dispositions du code de procédure pénale ;
- de renforcer les actions de prévention et d'éviter dans la mesure des moyens mis en _uvre, des scènes d'émeutes devenues presque quotidiennes.
M. Elie Gambier a alors rappelé les demandes formulées lors des auditions antérieures :
- fixation d'un minimum décent pour les pensions de reversion allouées aux veuves des personnels militaires dont certaines reçoivent moins de 4 000 francs de revenus mensuels ;
- prise en compte de la prime de sujétions spéciales de police pour le calcul de la retraite, sans condition d'âge, par alignement sur les dispositions accordées aux personnels d'autres services d'Etat ;
- assouplissement des conditions d'admission ou d'élévation dans les ordres nationaux non seulement pour les personnels d'active mais également pour ceux qui, retraités, assument de grandes responsabilités dans des associations à caractère social et de solidarité corporative ;
- participation effective des associations, au même titre que les syndicats, dans tous les organismes consultatifs et de gestion intéressant les personnels retraités (organismes sociaux, comités paritaires, caisses de retraite, etc.).
M. André Polet, Président national de la Fédération nationale des retraités de la Gendarmerie (FNRG), s'exprimant au nom du Comité de liaison et de coordination des associations de la Gendarmerie a déclaré qu'en l'absence de réponse aux revendications de ces associations, il ne présenterait pas de demande.
M. Bernard Sorgus, Président de l'Association des officiers de Marine (AOM), a déclaré se faire aussi le porte-parole des militaires d'active qui ne disposent que de canaux d'expression réglementaires.
Il a exprimé sa vive préoccupation devant l'état de l'équipement des forces et l'insuffisance des crédits destinés au remplacement des matériels. En revanche, l'AOM est sensible aux mesures récemment prises en vue d'améliorer la condition militaire et souhaite leur développement.
M. Daniel Rouzeau, Président de la Fédération nationale des anciens militaires de carrière (FNAMC), s'est tout d'abord déclaré solidaire de l'ensemble des associations de retraités militaires.
Il a ensuite attiré l'attention de la Commission sur un jugement de la Cour d'appel de Paris du 30 mai 2001 ayant annulé l'article 30 des règlements annexés à la convention d'assurance-chômage du 1er janvier 1994 ainsi que l'avenant n° 2 à cette convention.
De ce fait, les retenues effectuées sur les allocations-chômage perçues par d'anciens militaires se trouvent privées de fondement juridique. Ces anciens militaires peuvent donc réclamer le rétablissement de leurs droits et le remboursement des sommes indûment retenues.
Un grand nombre d'entre eux sont intervenus sans succès dans ce but auprès des ASSEDIC. Les refus qui leur ont été opposés ont donné lieu à des procédures toujours en cours. Estimant que l'UNEDIC et les ASSEDIC bafouaient la justice et ses jugements en continuant de refuser systématiquement le remboursement des sommes qu'elles avaient indûment retenues, il a demandé que des mesures soient prises afin que les militaires concernés soient rétablis dans leurs droits.
M. Daniel Rouzeau a ensuite évoqué la baisse récente de l'indemnité forfaitaire d'hébergement pour cure thermale, accordée aux invalides et mutilés de guerre. Cette diminution de 40 % pénalise les invalides de guerre les moins aisés.
Enfin, M. Daniel Rouzeau a exprimé ses inquiétudes à l'égard du respect dû au drapeau et à l'hymne national. Il s'est déclaré indigné par des insultes récentes à ces symboles patriotiques. Il a demandé qu'une loi permette de punir ces agissements.
Remerciant les intervenants pour la qualité de leurs propos, le Président Paul Quilès a souligné qu'une période nouvelle commençait avec la professionnalisation des armées. Il a fait valoir que les profondes transformations qu'a connues la Défense au cours de ces dernières années ne pouvaient pas s'opérer sans quelques difficultés. Considérant qu'il était légitime que les représentants des anciens militaires expriment, outre leurs revendications propres, certaines demandes des personnels d'active et qu'ils insistent sur les difficultés rencontrées, il a rappelé que la Commission portait une très grande attention aux évolutions de la condition militaire comme en témoignent ses nombreux rapports d'information.
Il a également souligné que les travaux de la Commission avaient permis certains progrès comme la revalorisation des pensions des sous-lieutenants admis à la retraite avant 1976. Après avoir relevé que la question de la couverture des risques des marins en escale avait retenu l'attention de la Commission, il a fait part de son intention de soumettre au Ministre de la Défense certaines des revendications présentées au cours de l'audition en lui demandant d'en préciser l'incidence financière. Soulignant que les préoccupations exprimées par les associations de retraités militaires trouveraient un écho dans les avis budgétaires de la Commission, il a insisté sur le devoir de responsabilité de l'Assemblée nationale à l'égard à la fois de l'institution militaire et de ceux qui la servent mais aussi de l'équilibre des finances publiques.
Observant que le monde combattant avait constitué une fédération européenne, M. Aloyse Warhouver a demandé aux représentants des associations de retraités militaires s'ils rencontraient leurs homologues des divers pays d'Europe, s'ils réalisaient des études comparatives sur leurs situations et s'ils envisageaient des actions en faveur d'une harmonisation européenne des statuts.
M. Guy Rebeyrol a répondu que l'ANFASOCAF était la seule association française de retraités militaires adhérente à l'association européenne Euromil, dont le siège est à Bruxelles.
Le Docteur Bernard Lefèvre a souligné que l'harmonisation des situations des retraités découlerait nécessairement de celle des statuts des personnels d'active.
M. André Vauchez a exprimé sa surprise face à la description faite de la situation dans la Gendarmerie, faisant remarquer que l'effectif total de l'Arme était passé de 93 670 en 1996, dont 12 000 appelés, à 98 130 en 2002, tous professionnels même s'il fallait y inclure 15 200 gendarmes-adjoints. Quant aux crédits de fonctionnement de la Gendarmerie, ils augmentent de 11 % dans le projet de budget.
M. André Polet a observé que, même si un gendarme-adjoint était mieux formé qu'un appelé, il ne remplissait pas toutes les tâches d'un gendarme.
M. Robert Poujade a alors souligné que la Commission, comme le Ministre de la Défense étaient conscients de la gravité du malaise de la Gendarmerie.
La Commission de la Défense s'est réunie le 6 novembre 2001, sous la présidence de M. Robert Gaïa, Vice-Président, pour examiner les crédits du ministère de la Défense pour 2002 consacrés au titre III et aux personnels de la Défense, sur le rapport de M. Aloyse Warhouver, rapporteur pour avis.
Après avoir rappelé l'importance du budget de fonctionnement d'une armée professionnelle, M. Aloyse Warhouver a souligné que le niveau des crédits du titre III présentait un certain nombre de motifs de satisfaction.
Le montant des crédits inscrits au titre III du ministère de la Défense, hors pensions, s'élèvera en 2002 à 16 457,10 millions d'euros (107 951,5 millions de francs), soit une augmentation de 2,3 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2001. Cette évolution est due en grande partie à la poursuite de la mise en _uvre de la professionnalisation ainsi qu'à l'impact d'un certain nombre de mesures prises en faveur du personnel militaire, dont M. Aloyse Warhouver a énuméré les principales :
- revalorisation indiciaire des soldes de jeunes sergents (14,5 millions d'euros ou 95 millions de francs) ;
- augmentation du contingent de primes de qualification des sous-officiers diplômés (12 millions d'euros ou 78,7 millions de francs) ;
- revalorisation de l'indemnité journalière d'absence temporaire pour la Gendarmerie (5 millions d'euros ou 32,8 millions de francs) ;
- poursuite du plan de revalorisation des médecins militaires (2,4 millions d'euros ou 15,7 millions de francs) ;
- création d'échelles de solde n° 4 à l'armée de Terre (1,8 millions d'euros ou 11,8 millions de francs) ;
- revalorisation de l'indemnité spéciale de sécurité aérienne (1 million d'euros ou 6,6 millions de francs).
M. Aloyse Warhouver a également signalé que la réduction du temps de travail était entrée en application, pour les civils du ministère de la Défense, dès le 1er octobre et que cette avancée sociale qui n'est pas directement transposable en tant que telle aux militaires aurait néanmoins de prochaines répercussions positives sur les conditions de travail de ces derniers.
Après deux années de hausses modérées (+ 1,5 % en 2000 et + 0,7 % en 2001) le projet de budget prévoit une croissance des rémunérations et charges sociales de 2,3 %.
La part des crédits de rémunérations et charges sociales dans le titre III semble désormais stabilisée aux alentours de 80,2 %. Cette stabilisation bénéficie cependant d'une conjoncture favorable : le besoin en pécules s'est avéré inférieur de 300 millions de francs à celui de 2001 ; les recrutements ont été étalés sur l'année, ce qui a réduit la dépense de 600 millions de francs ; enfin, de nombreuses vacances de postes, essentiellement civils diminuent de 700 millions de francs les charges de personnel.
Les effectifs budgétaires du ministère de la Défense s'établissent pour 2002 à 436 221, en baisse de 9 922 personnes par rapport à 2001, soit - 2,2 %. Si on fait abstraction de la disparition des 22 818 derniers postes d'appelés, le ministère de la Défense est créateur net de 12 896 emplois.
M. Aloyse Warhouver a exprimé sa satisfaction à l'égard de l'évolution des effectifs militaires, soulignant que rarement une loi de programmation militaire aura autant été respectée. Les effectifs prévus par la loi de finances pour 2002 sont très proches de ceux définis dès 1996. Et les effectifs réels sont eux-mêmes très proches des effectifs budgétaires aussi bien pour les officiers que pour les sous-officiers. Pour ce qui concerne les militaires du rang, il reste une année pour recruter les derniers engagés et tout porte à croire que les effectifs prévus seront atteints pour l'armée de Terre et qu'ils ne seront pas très éloignés des objectifs fixés pour la Marine et l'armée de l'Air.
M. Aloyse Warhouver a toutefois jugé que la situation des effectifs civils, beaucoup moins brillante, constituait le seul véritable élément inachevé du titre III.
Un déficit chronique et élevé d'effectifs civils est constaté depuis le début de la programmation. De 2 600 postes à la fin de l'année 1996, ce déficit a fortement crû, jusqu'à 9 300 fin 1999. Les efforts déployés par le ministère de la Défense ainsi que des modifications de périmètre ont permis de le réduire à 5 400 emplois fin 2000, mais il s'est à nouveau creusé par la suite (7 500 postes au 1er juillet 2001).
Le déficit des postes de fonctionnaires et de contractuels est sans doute dû en grande partie à la très forte augmentation d'effectifs enregistrée : 10 900 emplois ont été créés entre 1996 et 2001, soit une hausse de 27 %.
Le rapporteur pour avis a indiqué que les services du ministère poursuivent leurs efforts, notamment sur le plan de l'organisation et du déroulement des concours pour rattraper ce décalage.
Puis, M. Aloyse Warhouver a abordé la question des ouvriers d'État. Il a précisé que le ministère de la Défense comptait 47 851 emplois de cette catégorie en 2001, contre 50 362 l'an dernier.
Les difficultés rencontrées par le ministère pour la gestion de ces personnels résultent de l'interdiction d'embauche imposée de fait par le ministère de l'Économie et des Finances. Cette interdiction a été décidée, il y a déjà plusieurs années, pour imposer au ministère de la Défense le redéploiement interne des personnels en sureffectifs à la DGA et chez DCN et Giat-Industries.
M. Aloyse Warhouver a indiqué que, pour l'année 2001, les reclassements du personnel en provenance des établissements restructurés de Giat-Industries ou de la DGA constituaient, selon les armées, une source de réalisation des effectifs de l'ordre de 200 personnes. M. Aloyse Warhouver a jugé que ce redéploiement avait aujourd'hui atteint ses limites.
L'obtention auprès de la Direction du budget du ministère de l'Economie et des Finances de dérogations pour procéder à des embauches exceptionnelles constitue un autre moyen de remédier au sous-effectif en ouvriers d'Etat. Mais les volumes accordés restent très parcimonieux : 150 emplois en 1997, 500 en 1998, 250 en 1999 et autant en 2000. En 2001, 250 embauches ont également été autorisées, principalement au profit de l'armée de Terre dont le déficit en civils s'élève à environ 5 000 postes. 700 nouveaux emplois sont prévus par le projet de budget. M. Aloyse Warhouver a toutefois souligné qu'un déficit de plusieurs milliers d'emplois ne pouvait pas être comblé avec des dérogations portant sur quelques centaines de postes.
Il a alors insisté sur la nécessité de sortir de cette situation afin de ne pas continuer à en faire peser les conséquences sur les militaires. Les tâches que les personnels civils ne peuvent accomplir doivent en effet être assumées par des combattants professionnels qui seraient nécessaires pour les missions de projection intérieure ou extérieure. En outre, le sous-effectif des personnels civils démotive des militaires qui se sont engagés pour tenir un poste dans les forces et non pour accomplir des tâches de soutien qui ne devraient pas être les leurs.
Abordant ensuite l'examen des crédits de fonctionnement hors rémunérations et charges sociales, M. Aloyse Warhouver a souligné qu'ils augmenteraient de 2,5 %, évolution à comparer avec les baisses enregistrées au cours des trois exercices précédents. Cette hausse qui bénéficie à toutes les armées va leur permettre d'améliorer leur activité. Ainsi, l'armée de Terre dont le nombre de jours d'exercice avait chuté à 68 en 1999 et 2000 devrait atteindre les 89 jours en 2002, avec toujours l'objectif de 100 à terme. La Marine augmentera également le nombre de jours à la mer de ses bâtiments, qui passeront de 94 actuellement à 97 en 2002, l'objectif à terme restant fixé à 100 par an. L'armée de l'Air, dont les pilotes respectent les normes de l'OTAN en volant 180 heures par an, devrait également améliorer l'entraînement de ses équipages en leur permettant de participer davantage à des exercices interalliés majeurs.
Il restera à fournir un effort pour les pilotes d'hélicoptères de l'aviation légère de l'armée de Terre (ALAT) qui, en moyenne, n'ont pas respecté pour la deuxième année consécutive le minimum de 150 heures de vol considéré comme nécessaire, même s'il s'agit là davantage d'une question de disponibilité de matériel que de crédits d'entraînement.
M. Aloyse Warhouver a également indiqué qu'au-delà de l'entraînement, le fonctionnement courant de toutes les armées serait également amélioré.
Rappelant que le Général Jean-Pierre Kelche, Chef d'état-major des Armées avait souligné devant la Commission que le pari de la professionnalisation était gagné, M. Aloyse Warhouver a considéré que le titre III du projet de budget était globalement satisfaisant et équilibré.
Il a estimé que, même si la situation pouvait évidemment toujours être améliorée, notamment en ce qui concerne la réalisation des effectifs civils, ces crédits constituaient un réel progrès prouvant que les demandes exprimées, entre autres, par la Commission au cours des années précédentes avaient été entendues. Il a jugé qu'ils permettraient aux forces d'achever sereinement leur profonde transformation et d'entrer avec confiance dans la prochaine loi de programmation militaire.
M. Yves Fromion a déclaré ne pas partager totalement l'enthousiasme du rapporteur pour avis quant à l'exécution de la loi de programmation 1997-2002, faisant valoir qu'une fois la décision de professionnalisation prise et les réformes engagées, le processus était devenu inéluctable. Il a alors estimé que la réussite de la professionnalisation devait être principalement attribuée aux militaires eux-mêmes, qui ont accompli cette réforme considérable tout en assurant leurs missions, que ce soit en France ou sur les théâtres extérieurs. Puis il a observé que le déficit en personnels civils avait pour conséquence immédiate d'alourdir la charge de travail des militaires et exprimé la crainte que cette situation s'aggrave avec l'introduction des 35 heures chez les civils. Il a en outre jugé que l'hébergement des sous-officiers et militaires du rang n'était pas satisfaisant, les besoins de ces personnels n'étant pas les mêmes que ceux des appelés.
Il a par ailleurs estimé que l'insuffisance des crédits alloués à l'équipement des forces dans le projet de loi de finances pour 2002 était préjudiciable au moral et à la motivation des militaires qui devaient être assurés de recevoir les moyens nécessaires à leurs missions. Enfin, tout en reconnaissant la difficulté d'évaluer à l'avance le coût exact des opérations extérieures, il a regretté qu'aucune dotation ne soit prévue pour les financer dans le projet de loi de finances initiale, estimant que cette lacune nuisait à la lisibilité du budget.
M. Michel Voisin s'est interrogé sur les conditions dans lesquelles des économies avaient pu être faites sur les pécules d'incitation au départ dont l'attribution est pourtant régie par la loi.
Il a également demandé au rapporteur s'il disposait d'un historique des transferts de crédits d'entretien programmé des matériels du titre III vers le titre V et s'il pouvait évaluer l'impact de ces transferts sur la gestion du titre III.
M. Guy-Michel Chauveau s'est interrogé sur les réductions de dépenses résultant de l'écart entre les prévisions et les réalisations en matière d'effectifs civils.
M. Aloyse Warhouver a apporté les éléments de réponse suivants :
- des mesures vont être prises en faveur des militaires pour tenir compte de l'application du régime des 35 heures aux personnels civils. Elles seront annoncées prochainement ;
- il ne faut pas exagérer les conséquences du déficit en personnel civil sur la nature des tâches confiées aux militaires ;
- le pécule n'est pas un droit, mais une mesure de gestion ; les objectifs en personnel peuvent, le cas échéant, être atteints sans que la totalité du volume de pécules prévu soit consommée.
M. Robert Gaïa, Président a alors souligné que, pour la première fois en quatre ans, l'ensemble des chefs d'état-major s'étaient félicités du montant du titre III.
M. Robert Poujade a fait observer que l'on pouvait aussi considérer que le niveau du titre III prévu pour 2002 correspondait à un rattrapage.
La Commission a alors émis un avis favorable à l'adoption des crédits du titre III et des personnels de la Défense, les membres des groupes RPR, UDF et DL s'abstenant.
*
Au cours de sa réunion du 6 novembre 2001, la Commission de la Défense a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la Défense pour 2002, les membres des groupes RPR, UDF et DL votant contre.
N° 3323-VII.- Avis de M. Aloyse Warhouver (commission de la défense) sur le projet de loi de finances pour 2002 - Défense : Titre III et personnels de la défense.
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« La professionnalisation des armées : espoirs et inquiétudes des personnels » par MM. Bernard Grasset et Charles Cova, Assemblée nationale, juin 2000.