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le 2 novembre 2001
N° 3320
______
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
ONZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 11 octobre 2001.
RAPPORT
FAIT
AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN (1) SUR
LE PROJET DE loi de finances pour 2002 (n° 3262),
PAR M. DIDIER MIGAUD,
Rapporteur Général,
Député.
--
ANNEXE N° 42
PRESTATIONS SOCIALES AGRICOLES
Rapporteur spécial : M. Charles de COURSON
Député
____
(1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page.
Lois de finances.
La commission des finances, de l'économie générale et du plan est composée de M. Henri Emmanuelli, président ; M. Michel Bouvard, M. Jean-Pierre Brard, M. Yves Tavernier, vice-présidents ; M. Pierre Bourguignon, M. Jean-Jacques Jégou, M. Michel Suchod, secrétaires ; M. Didier Migaud, Rapporteur Général ; M. Maurice Adevah-Poeuf, M. Philippe Auberger, M. François d'Aubert, M. Dominique Baert, M. Jean-Pierre Balligand, M. Gérard Bapt, M. François Baroin, M. Alain Barrau, M. Jacques Barrot, M. Christian Bergelin, M. Éric Besson, M. Alain Bocquet, M. Augustin Bonrepaux, M. Jean-Michel Boucheron, Mme Nicole Bricq, M. Christian Cabal, M. Jérôme Cahuzac, M. Thierry Carcenac, M. Gilles Carrez, M. Henry Chabert, M. Jean-Pierre Chevènement, M. Didier Chouat, M. Alain Claeys, M. Charles de Courson, M. Christian Cuvilliez, M. Arthur Dehaine, M. Yves Deniaud, M. Michel Destot, M. Patrick Devedjian, M. Laurent Dominati, M. Julien Dray, M. Tony Dreyfus, M. Jean-Louis Dumont, M. Daniel Feurtet, M. Pierre Forgues, M. Gérard Fuchs, M. Gilbert Gantier, M. Jean de Gaulle, M. Hervé Gaymard, M. Jacques Guyard, M. Pierre Hériaud, M. Edmond Hervé, M. Jean-Louis Idiart, Mme Anne-Marie Idrac, M. Michel Inchauspé, M. Jean-Pierre Kucheida, M. Marc Laffineur, M. Jean-Marie Le Guen, M. Guy Lengagne, M. Maurice Ligot, M. François Loos, M. Alain Madelin, Mme Béatrice Marre, M. Pierre Méhaignerie, M. Louis Mexandeau, M. Gilbert Mitterrand, M. Gilles de Robien, M. Alain Rodet, M. José Rossi, M. Nicolas Sarkozy, M. Gérard Saumade, M. Philippe Séguin, M. Georges Tron, M. Jean Vila.
INTRODUCTION 7
I.- L'EXÉCUTION DU BUDGET 2001 ABOUTIT A UN DÉFICIT 9
A.- UN RECOURS CONTESTABLE À UN SUBTERFUGE BUDGÉTAIRE AU PROFIT DES EXPLOITANTS CORSES 9
B.- DES RECETTES INFÉRIEURES AUX PRÉVISIONS 10
C.- DES DÉPENSES SUPÉRIEURES AUX PREVISIONS 11
D.- UN BESOIN DE FINANCEMENT NÉCESSAIRE DE 200 MILLIONS D'EUROS 12
II.- LE PROJET DE BUDGET 2002 : UNE FORTE CROISSANCE DES RECETTES, UNE CROISSANCE MOINDRE DES DÉPENSES POUR UN DÉFICIT ENCORE SOUS-ESTIMÉ 15
A.- UNE CROISSANCE SURESTIMÉE DES RECETTES 15
1.- Des recettes globalement en augmentation marquée 15
2.- Une forte hausse des ressources fiscales affectées 17
a) La TVA : un mécanisme de calcul peu fiable, pour une croissance des recettes nettes surestimée 17
b) La CSG : un relèvement marqué des reversements 18
c) La C3S : une forte croissance du prélèvement, redevenu pérenne, au profit du BAPSA 20
d) Les micro-taxes affectées : un niveau légèrement croissant, mais des recettes toujours accessoires 21
3.- Une aisance retrouvée sur les recettes liées aux transferts entre les régimes sociaux 22
a) La compensation démographique : une embellie conséquente, pour partie sollicitée 22
b) La contribution de la CNAF 23
c) Un étiage proche pour les remboursements du FSV 24
4.- Les cotisations : des prévisions de nouveau optimistes, pour une assiette perfectible 24
a) L'assiette des cotisations techniques : la réforme de 2001 ne règle pas les problèmes 24
b) Les hypothèses de calcul des cotisations techniques pour 2001 sont contestables 30
B.- UNE CROISSANCE DES DÉPENSES SOUS-ESTIMÉE 31
1.- Les dépenses de maladie : un dérapage dissimulé derrière des prévisions « normées » 32
2.- Les dépenses de vieillesse : la fin du plan de revalorisation des retraites minimales de base 34
a) La dernière étape du relèvement de la retraite minimale contributive au niveau du minimum vieillesse 34
b) Des dépenses au titre du FSV proches de l'étiage 36
c) Des dépenses sous-estimées 36
3.- Les dépenses de la branche famille : la poursuite de la diminution tendancielle 37
4.- Les crédits de reports de cotisation : le retour au plancher 37
5.- Les frais financiers : une légère croissance qui sera néanmoins insuffisante 38
C.- UNE SUBVENTION BUDGÉTAIRE SOUS-ESTIMÉE 39
III.- LE BAPSA EST VOUÉ À DISPARAÎTRE 43
A.- LE BAPSA N'EST PAS INDISPENSABLE 43
B.- LE BAPSA VA DISPARAÎTRE À MOYEN TERME 43
C.- LE PROJET DE BUDGET ANNEXÉ PRÉSENTÉ EST INCOMPLET 45
IV.- LE RÉGIME SOCIAL DES EXPLOITANTS AGRICOLES APPELLE DES RÉFORMES NÉCÉSSAIRES 47
A.- L'HYPOTHÈSE DE LA CENTRALISATION DE LA GESTION DE LA TRÉSORERIE ENFIN MISE À L'ÉTUDE 47
B.- DES RÉFORMES INSTITUTIONNELLES QUI VONT DANS LE BON SENS MAIS DOIVENT ÊTRE APPROFONDIES 49
1.- L'abandon d'une proposition destructrice pour la composition des conseils d'administration des caisses 49
2.- Un premier effort encore trop limité en faveur du rapprochement inéluctable des caisses 49
C.- UNE RÉFORME INADAPTÉE DE L'AAEXA 51
1.- une réforme nécessaire 51
2.- Une proposition de réforme... 53
3.- ...qui présente des défauts majeurs 54
D.- LA CHARGE DE LA RÉDUCTION DE LA DURÉE DU TRAVAIL POUR LE RÉGIME SOCIAL AGRICOLE 56
E.- LES RETRAITES : DEUX RÉFORMES IMPORTANTES DEMEURENT EN ATTENTE 57
1.- Des régimes complémentaires insuffisants 57
a) Le régime de retraite complémentaire est pour l'instant renvoyé après 2002 57
b) La solution rationnelle consisterait pour les caisses à relancer une activité de retraite par capitalisation 58
2.- Le refus de la mensualisation des retraites des exploitants agricoles 59
V.- LES OBSERVATIONS RÉSULTANT DES CONTRÔLES SUR LE TERRAIN 61
A.- DES MISSIONS FONDAMENTALES PARFOIS PERDUES DE VUE 61
1.- Des insuffisances persistantes du contrôle de l'affiliation 61
2.- Une assiette de mauvaise qualité, et un recouvrement qui laisse à désirer 62
a) Le contrôle des données de surface communiquées aux DDAF : les premiers résultats démontrent de réelles incohérences 63
b) Le recouvrement laisse à désirer 65
B.- UN TRANSFERT IMPORTANT DES DÉPENSES D'AAEXA VERS L'AMEXA 68
C.- LA COUVERTURE MALADIE UNIVERSELLE : POURQUOI LES OBJECTIFS N'ONT PAS ETE ATTEINTS 71
D.- LA CORSE : UN DÉBUT DE REDRESSEMENT DE LA CAISSE INTERROMPU PAR L'ACTION DES POUVOIRS PUBLICS 73
1.- Une situation structurellement déséquilibrée 73
2.- De réels efforts de rigueur en matière de prestations 74
3.- Un contrôle du stock des exploitants, en partie réalisé, maintenant interrompu 74
4.- L'arrêt de l'amélioration du recouvrement 75
5.- Des tentatives critiquables de règlement du problème de l'endettement social par la tutelle 76
a) La mise en place d'une procédure illégale d'examen des dossiers de dette sociale 76
b) Des dispositifs juridiques successifs très critiquables 77
c) L'attitude particulièrement ambiguë de la tutelle 79
EXAMEN EN COMMISSION 81
L'examen du projet de budget annexe des prestations sociales agricoles (BAPSA) constitue un exercice particulier, dans le cadre de la discussion budgétaire. En effet, il ne s'agit pas, en l'espèce, d'analyser les prévisions de dépenses ou de recettes de l'État, mais celles d'un régime social spécifique : le régime social des exploitants agricoles, géré par la Mutualité sociale agricole, deuxième organisme de protection sociale par le nombre des personnes dont il assure la couverture. Le BAPSA ne retrace toutefois qu'une partie de ce régime social, puisqu'il exclut les salariés, rattachés au régime général. De surcroît, il ne concerne pas non plus le risque accidents du travail, que ce soit dans son régime actuel ou dans celui en cours de discussion au Parlement pour l'avenir.
Cet exercice annuel comprend trois dimensions, complémentaires en ce qu'elles s'éclairent l'une l'autre.
La première consiste en une analyse de la vraisemblance des prévisions de dépenses et de recettes du projet de budget, compte tenu que de celles-ci découle le montant de la subvention budgétaire que l'État consacre au régime des exploitants agricoles.
Cet exercice conduit également à poser les questions essentielles concernant l'avenir du régime et les réformes récentes ou attendues.
Enfin, sa troisième dimension est celle du contrôle, à savoir l'analyse des conditions particulières de la mise en _uvre du régime par les 79 caisses de MSA. Le projet de budget annexe des prestations sociales agricoles pour 2002 constitue le dernier de l'actuelle législature, au cours de laquelle votre Rapporteur spécial aura contrôlé, sur pièces et sur place, treize caisses départementales ou pluri-départementales, réparties équitablement sur l'ensemble du territoire :
- en 1998 : Corse
- en 1999, Alpes-Maritimes, Morbihan, Moselle, Puy-de-Dôme,
- en 2000 : Bouches-du-Rhône, Cher, Finistère, Hautes-Pyrénées,
- en 2001 : Allier, Ariège, Eure-et-Loir, Tarn-Aveyron.
La Corse a également fait l'objet de trois visites annuelles supplémentaires après la première mission d'information de 1998, de façon à apprécier les conditions réelles de la normalisation de sa situation particulièrement dégradée.
Chacun de ces seize déplacements, d'une durée d'un journée complète, a été précédé de l'envoi d'un questionnaire précis, transmis suffisamment à l'avance pour que les caisses soient en mesure d'y répondre de manière précise avant la venue de votre Rapporteur spécial.
Ce contrôle parlementaire, auquel, les responsables des caisses de sont prêtés sans la moindre réticence, et pour la bonne fin duquel ils ont mobilisé leurs services sans réserve, aura ainsi porté sur 16% de l'ensemble du réseau de la MSA, ce qui, compte tenu des moyens à la disposition de votre Rapporteur, est loin d'être négligeable.
Le bilan qu'en tire votre Rapporteur est très positif, dans le sens où ce type de contrôle présente des avantages multiples, notamment une analyse approfondie des difficultés que connaît le régime social comme de ses perspectives d'évolution, et l'apport d'une information beaucoup plus concrète de votre commission et, plus généralement, de l'Assemblée nationale.
I.- L'EXÉCUTION DU BUDGET 2001 ABOUTIT A UN DÉFICIT
L'analyse rapide de l'exécution du budget pour 2001, telle qu'elle était connue à la mi-septembre, permet de constater, d'une part, le recours à un subterfuge budgétaire pour financer une remise de dette des agriculteurs corses, d'autre part, le réalisme des critiques formulées l'an passé, à la même période, à l'égard de la sous-estimation du déficit d'exécution de 2001.
Une seule modification du BAPSA est intervenue jusqu'à présent en 2001, avec l'arrêté du 23 janvier 2001 portant ouverture de crédits. Toutefois, cette modification n'a pas concerné la gestion 2001, mais celle de l'exercice précédent, au titre de la période complémentaire, et en application de l'article 21 de l'ordonnance n°59-2 du 2 janvier 1959 relative aux lois de finances ().
Il n'est pas sans intérêt d'en décrire le mécanisme, relativement inhabituel -il n'a jamais été utilisé pour le BAPSA depuis 1991- , et constitutif d'un artifice comptable critiquable pour son manque de transparence. Ce mécanisme a fort heureusement été supprimé dans la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances.
Cette procédure a ainsi consisté à :
1) constater des excédents de produits de la taxe sur le tabac affectée au BAPSA. Cet excédent correspond à un rendement supérieur aux prévisions(), consécutif à une grève intervenue dans les services fiscaux à la fin de l'exercice 1999. Mais le rapport de la Cour des comptes sur l'exécution des lois de finances pour 2000 () souligne que le supplément de recettes, loin d'être constaté à la fin de l'exercice 2000, était en réalité connu dès le début de cet exercice. Le Gouvernement a donc volontairement tardé, autant qu'il lui était possible, et en particulier après la discussion parlementaire du collectif budgétaire, pour procéder à l'opération ici décrite ;
2) ouvrir, en contrepartie, des crédits à due concurrence sur les crédits du chapitre 46-05.- Etalement et prise en charge des cotisations sociales des agriculteurs en difficultés, ce qui a conduit à plus que doubler leur dotation initiale de 90 millions de francs;
3) enregistrer, en dernière étape, le montant de ces mêmes crédits en recettes diverses du BAPSA, au titre des remontées de rentrées de la caisse de Corse, à laquelle les crédits précités ont été imputés.
Cette opération, critiquable sur le fond, apparaît cependant comptablement neutre pour le BAPSA, dans la mesure où les crédits ouverts ont été immédiatement délégués à la caisse de Corse, laquelle a fait remonter ce produit au compte central du BAPSA. In fine, le BAPSA a bien bénéficié d'un supplément de recettes, mais par l'intermédiaire totalement artificiel d'une prise en charge de la dette sociale des exploitants corses. Encore votre Rapporteur s'interroge-t-il sur le fait que cette somme ait été imputée en recettes sur la gestion 2000, alors que, jusqu'à aujourd'hui, aucun apurement de dette n'a été juridiquement accordé en Corse et que le montant correspondant se trouve, en tout état de cause, très supérieur aux dettes aujourd'hui susceptibles d'être effectivement annulées ().
Par rapport aux prévisions de la loi de finances initiale pour 2001, les réalisations de recettes nettes de restitutions de TVA devraient atteindre 90,8 milliards de francs (13,84 milliards d'euros), et s'avérer supérieures d'environ 144 millions de francs (22 millions d'euros) au montant initialement prévu (soit 0,2%).
Cette différence relativement limitée eu égard aux sommes en jeu résulte toutefois d'écarts, sensiblement plus importants sur les différentes composantes des recettes mais qui tendent à se compenser:
- les cotisations devraient être inférieures de 511 millions de francs (78 millions d'euros) aux prévisions (soit 4,3%) ;
- les recettes de TVA nettes de restitutions devraient être supérieures aux prévisions d'un montant analogue 510 millions de francs (77,5 millions d'euros), soit un supplément de 1,8%.
Ces erreurs de prévision corroborent, en les amplifiant, les analyses développées par votre Rapporteur dans son précédent rapport spécial sur le BAPSA. Celles-ci avaient conclu à une surestimation, délibérée, des cotisations professionnelles de 420 millions de francs (64 millions d'euros) et la sous-estimation de 270 millions de francs (41 millions d'euros) des recettes de TVA. Encore ces conclusions se sont-elles avérées trop timides par rapport à la réalité.
LES RECETTES DU BAPSA 2001 (en millions d'euros) | |||||
Loi de finances initiale 2001 |
Prévisions de réalisations au 10/9/2001 |
Ecart |
Ecart (en %) | ||
Cotisations (1) |
1.827,2 |
1.749,3 |
- 77,9 |
- 4,3 | |
CSG maladie |
705,4 |
710,3 |
4,9 |
+ 0 ,7 | |
TVA nette des restitutions |
4.205,3 |
4283,1 |
77,5 |
+ 1,8 | |
Contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S) |
278,9 |
278,9 |
0 |
- | |
Taxes diverses |
251,7 |
261,4 |
9,7 |
+ 3,8 | |
Sous-total : taxes (2) |
5.441,3 |
5.533,7 |
92,4 |
+ 1,7 | |
Cotisations et CSG - DOM (3) |
1,982 |
1,982 |
0 |
- | |
Compensation démographique |
5.184,2 |
5.196,6 |
12,2 |
+ 0,2 | |
Contribution de la CNAF |
230,7 |
230,2 |
- 0,5 |
- 0,2 | |
Versement du fonds de solidarité vieillesse |
221,8 |
225,1 |
3,3 |
+ 1,5 | |
Sous-total : transferts des organismes sociaux (4) |
5.636,7 |
5.644,7 |
8,0 |
+ 0,1 | |
Remboursement de l'AAH |
884,7 |
884,7 |
0 |
- | |
Versement du fonds spécial d'invalidité |
14,6 |
13,7 |
- 0,9 |
- 6,2 | |
Sous-total : État (6) |
899,3 |
898,4 |
- 0,9 |
- 0,1 | |
Recettes diverses (7) |
11,4 |
11,4 |
0 |
- | |
Total des recettes nettes des restitutions de TVA (7) = (1) + (2) + (3) + (4) + (6) |
13.817,9 |
13.846,8 |
28,8 |
+ 0,2 |
Source : Ministère de l'Agriculture et de la Pêche
N.B. Par souci de comparabilité avec les tableaux pour 2002, les données présentées en euros et non en francs
Les prévisions de dépenses révisées confirment également les conclusions de votre Rapporteur spécial, présentées dans le cadre de son précédent rapport écrit. Celles-ci soulignaient que les prévisions de dépenses pour 2001 avaient été élaborées sur la base de projections volontaristes, et en négligeant l'incidence de certaines mesures prévues par la loi de financement de la sécurité sociale pour le même exercice. Les dépenses apparaissaient alors sous-estimées de 120 millions d'euros (800 millions de francs), dont la moitié (60 millions d'euros, soit 390 millions de francs) pour l'assurance-maladie, 42 millions d'euros (275 millions de francs) pour les dépenses de retraite, et 18 millions d'euros (120 millions de francs) pour les charges financières.
Les dernières prévisions révisées font apparaître :
- un écart en réalité encore plus fort en ce qui concerne les dépenses de maladie(178 millions d'euros, soit 1,2 milliard de francs). Celles-ci auraient en effet augmenté, en réalisation, de 3,3% globalement, et de 6% pour les seuls soins de ville (dépenses hors dotation globale hospitalière, dont l'excédent des dépenses s'élève à 916 millions de francs). Ce dépassement considérable, de près de 180 millions d'euros, porte pour 80% sur les soins de ville et pour 20% sur la participation du régime au financement des dépenses médico-sociales pour les personnes âgées. Il se
décompose pour les 2/3 par le « rebasement » de l'année 2000 ()et pour 1/3 par un dépassement modéré de l'objectif 2001. L'écart prévu pour 2001 porte en majeure partie sur les prescriptions, qui, à elles seules, ont été revues à la hausse de 7,1%, dont 4,6% imputables au « rebasement » de l'année 2000 ;
- un écart élevé, mais néanmoins un peu plus faible que prévu, sur les charges d'intérêts (18 millions d'euros, soit 118 millions de francs) et les dépenses de vieillesse (21 millions d'euros, soit 138 millions de francs).
ÉVOLUTION DES DÉPENSES PRÉVISIONNELLES EN 2001
(en millions d'euros)
Loi de finances initiale 2001 |
Prévisions 2001 révisées au 28/8/2001 |
Ecart |
Écart (en %) | |
Charges d'intérêts |
35,1 |
53,4 |
18,3 |
52,2 |
Prestations maladie, maternité, soins aux invalides |
5.198,5 |
5.376,4 |
177,9 |
3,4 |
Prestations invalidité |
64,8 |
64,9 |
0,1 |
0,1 |
Allocations de remplacement versées aux conjoints |
15,2 |
12,2 |
- 3,0 |
- 20,0 |
Prestations d'assurance veuvage |
1,8 |
1,8 |
0 |
- |
Étalement et prise en charge des cotisations des agriculteurs en difficulté |
25,9 |
25,9 |
0 |
- |
Contribution à la modernisation de l'assurance maladie |
7,6 |
7,6 |
0 |
- |
Prestations familiales |
595,8 |
601,7 |
5,9 |
+1,0 |
Prestations vieillesse |
7.758,9 |
7.780,3 |
21,4 |
+0,3 |
Contribution aux assurances sociales des études et des praticiens -et auxiliaires médicaux |
114,3 |
115,1 |
0,8 |
+0,7 |
Total |
13.817,9 |
14.039,4 |
221,4 |
+1,6 |
Source : Ministère de l'Agriculture et de la Pêche.
En conséquence de ces surcroîts de dépenses (221 millions d'euros, soit 1,45 milliard de francs), compensés seulement pour une part faible par les plus-values sur les recettes (29 millions d'euros, soit 190 millions de francs), le déficit du BAPSA devrait excéder en 2001 de 192 millions d'euros (1,260 milliard de francs) les prévisions de la loi de finances initiale.
Ce déficit ne peut plus être financé, comme par le passé, par prélèvement sur le fonds de roulement, celui-ci ayant été réduit à un étiage très faible dès la fin de l'exercice 2000 (). Il sera donc nécessaire de le financer dans le cadre de la loi de finances rectificative de fin d'année, soit sous la forme d'un supplément de subvention d'équilibre, - qui s'élève pourtant déjà à 825 millions d'euros (5,4 milliards de francs) - , soit sous la forme d'un complément d'affectation du produit de la C3S (contribution sociale de solidarité sur les sociétés), comme à la fin de l'exercice 2000, - cette affectation ayant cependant déjà été portée à 280 millions d'euros (1,83 milliard de francs) en nouvelle lecture du projet de loi de finances pour 2001- .
Par ailleurs, la jurisprudence constitutionnelle () impose que, lorsque l'importance du montant en jeu modifie les conditions générales de l'équilibre financier décrit par la loi de financement pour la sécurité sociale, une modification des recettes doive être prévue par une loi de financement de la sécurité sociale rectificative ou par une autre loi de financement, préalablement à la loi de finances prévoyant elle-même cette modification. Il ne sera donc a priori possible de financer le déficit d'exécution du BAPSA par une mesure inscrite en collectif budgétaire de fin d'année que si cette même mesure a d'abord été prévue par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2002, dès lors que le Conseil constitutionnel en jugerait le montant suffisamment important pour modifier l'équilibre des comptes sociaux. Or celui-ci a été amené, à l'occasion de la deuxième loi de finances rectificative pour 2000, à préciser qu'un montant supplémentaire de 350 millions de francs de C3S affecté au BAPSA ne modifiait pas cet équilibre, mais que, en revanche, l'affectation du reliquat des droits sur les tabacs, d'un montant de 3 milliards de francs, le modifiait. Compte tenu que le déficit prévisible du BAPSA devrait être intermédiaire entre ces deux montants, il serait prudent que la loi de financement pour 2002 contienne une disposition en ce sens.
Votre Rapporteur ne peut cependant que déplorer que la sous-estimation du déficit d'exécution du BAPSA ne tende, depuis deux ans, à constituer une pratique habituelle, dont ses analyses présentées dans ses deux précédents rapports montrent qu'il ne s'agit pas d'une fatalité liée à un aléa impossible à prévoir, mais bien d'une volonté délibérée de minimiser le déficit d'exécution, avec des conséquences sur la sincérité à la fois de la loi de finances et de la loi de financement de la sécurité sociale.
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II.- LE PROJET DE BUDGET 2002 : UNE FORTE CROISSANCE
DES RECETTES, UNE CROISSANCE MOINDRE DES DÉPENSES
POUR UN DÉFICIT ENCORE SOUS-ESTIMÉ
Les prévisions de recettes connaissent une hausse très marquée, dont la vraisemblance apparaît toutefois contestable.
Les prévisions de recettes du BAPSA (avant restitutions au titre de la TVA) augmentent de 680 millions d'euros (4,46 milliards de francs) en 2002 par rapport à la loi de finances initiale pour 2001, soit + 4,8%, pour s'établir à 15,4 milliards d'euros (101,2 milliards de francs).
Hors subvention d'équilibre, et nette des restitutions de TVA, cette augmentation serait moins sensible, mais demeurerait marquée, à hauteur de 441 millions d'euros (2,9 milliards de francs), soit une croissance de 3,2% par rapport à la loi de finances initiale pour 2001. Les recettes nettes hors subvention s'établiraient ainsi à 13,988 milliards d'euros (91,7 milliards de francs).
Cette hausse très marquée des ressources s'explique par la hausse très sensible des principales ressources du BAPSA, que la diminution des autres ne réduit que d'une manière limitée.
Quatre ressources importantes, soit par leur volume, soit par leur rôle spécifique dans l'équilibre du budget annexe, augmentent en effet de manière marquée :
- en valeur nette, la croissance du prélèvement sur le produit de la TVA s'établirait à 249 millions d'euros (1,6 milliard de francs), soit une croissance de 5,9% par rapport à la loi de finances initiale ;
- les recettes résultant de la compensation démographique augmenteraient également de manière considérable, de 552 millions d'euros (3,6 milliards de francs), soit +10,6%;
- dans le même sens, le produit de la C3S fait, pour la quatrième année consécutive, l'objet d'un prélèvement pour contribuer au financement du déficit du régime vieillesse des exploitants agricoles. En 2002, ce prélèvement atteindrait 520 millions d'euros (3,4 milliards de francs), soit 240 millions d'euros (1,57 milliard de francs) de plus qu'en 2001 ;
- enfin, mais pour un montant moins important, les ressources issues des reversements de la CSG (Contribution sociale généralisée) croîtraient de 102 millions d'euros (660 millions de francs), soit 14,5% de plus que le montant prévu en loi de finances initiale pour 2001.
LES RECETTES DU BAPSA 2002 (en millions d'euros) |
|||||||
Loi de finances 2001 |
LFI 2001 Révisées |
Projet de loi de finances |
Écart PLF 2002/ LFI 2001 |
Évolution PLF 2002/ LFI 2001 (en %) | |||
Cotisations créatrices de droit (1) |
1.797 |
1.731 |
1.699 |
- 98 |
- 5,5 | ||
Cotisations de « solidarité » (2) |
32 |
28 |
28 |
- 5 |
- 15,6 | ||
TVA nette des restitutions |
4.205 |
4.283 |
4.454 |
+ 249 |
+ 5,9 | ||
CSG maladie |
705 |
710 |
807 |
102 |
+ 14,5 | ||
Contribution sociale de solidarité des sociétés |
279 |
279 |
520 |
241 |
+ 86,4 | ||
Taxes diverses |
263 |
261 |
277 |
14 |
+ 5,3 | ||
Sous-total : taxes (3) |
5.452 |
5.533 |
6.058 |
606 |
+ 11,1 | ||
Compensation démographique |
5 184 |
5.197 |
5.736 |
552 |
+10,6 | ||
Contribution de la CNAF |
231 |
230 |
243 |
12 |
+ 5,2 | ||
Versement du fonds de solidarité vieillesse |
222 |
225 |
156 |
- 66 |
- 29,7 | ||
Sous-total : transferts des organismes sociaux (4) |
5.637 |
5.652 |
6.135 |
498 |
+ 8,8 | ||
Remboursement de l'AAH |
61 |
61 |
56 |
- 5 |
- 8,2 | ||
Versement du fonds spécial d'invalidité |
15 |
14 |
13 |
- 2 |
- 13,3 | ||
Subvention d'équilibre (5) |
824 |
824 |
271 |
- 553 |
- 67,1 | ||
Sous-total : État (6) |
899 |
899 |
340 |
- 560 |
- 62,2 | ||
Total des recettes nettes (7) = (1) + (2) + (3) + (4)+ (6) |
13.807 |
13.847 |
14.259 |
+ 441 |
+3,2 | ||
Restitutions (8) |
865 |
Nc |
1 108 |
+ 243 |
+ 28,1 | ||
Total des recettes inscrites au BAPSA (9) = (7) + (8) |
14.671 |
- |
15.368 |
+ 684 |
4,7 | ||
Total des recettes inscrites avant subvention d'équilibre (10) = (9) - (5) |
13.847 |
- |
15.096 |
+ 1.237 |
+8,9 |
Inversement, deux ressources connaîtraient une diminution, mais celle-ci est, par comparaison, d'une ampleur limitée:
- comme pour les exercices précédents, le relèvement des retraites les plus modestes permet, en contrepartie, de réduire les dépenses au titre du FSV (Fonds de solidarité vieillesse), et donc ses remboursements au BAPSA. Ceux-ci diminueraient de 67 millions d'euros (439 millions de francs), soit près de 30% du montant inscrit en loi de finances initiale pour 2001 ;
- les cotisations poursuivent leur décroissance tendancielle. Les estimations de rentrées de cotisations pour 2002 s'établissent ainsi à 1,7 milliard d'euros (11,1 milliards de francs) pour les cotisations créatrices de droits, soit une diminution prévisionnelle de 98 millions d'euros (643 millions de francs), soit - 5,5% par rapport à la loi de finances pour 2001. Sur la base des estimations révisées pour 2001, cette décroissance est cependant sensiblement moindre, puisqu'elle se limite à - 1,8%, soit 32 millions d'euros (210 millions de francs).
La croissance nette globale des recettes du budget, hors subvention d'équilibre, permet de réduire cette dernière à son montant le plus faible depuis de nombreuses années, puisqu'il n'atteindra que 271 millions d'euros (1,8 milliard de francs), contre 824 millions d'euros (5,4 milliards de francs) en 2001.
L'importance des évolutions précitées appelle des analyses plus approfondies, recette par recette.
La croissance des recettes brutes issues de la cotisation incluse dans la TVA (5,562 milliards d'euros, soit 36,48 milliards de francs) apparaît considérable en 2002, à hauteur de près de 10%, par rapport à la loi de finances initiale pour 2001.
Compte tenu de l'importance de cette ressource pour le financement du BAPSA, une telle augmentation conduit à alléger sensiblement, et opportunément, la contrainte budgétaire d'équilibre du budget annexe. Toutefois, les restitutions de TVA, qui correspondent en théorie à des remboursements de taxes payées sur des biens en fait exonérés, notamment les exportations ou les biens d'équipement, augmentant encore plus rapidement que les recettes brutes (de 28% !, ce qui les porte à 1,11 milliard d'euros, soit 7,27 milliards de francs), la croissance de la recette nette de la cotisation incluse dans la TVA apparaît sensiblement moindre. Elle demeure néanmoins encore élevée, avec une croissance de 249 millions d'euros (1,63 milliard de francs, soit +5,9%).
La croissance attendue de la cotisation nette assise sur la TVA est également sensiblement moins élevée, si on la compare aux prévisions révisées de réalisation pour 2001 (4,283 milliards d'euros, soit 28,1 milliards de francs). Dans ce cas, le taux de croissance ne serait plus en effet que de 4%, ce qui paraît cohérent avec les prévisions d'ensemble qui sous-tendent le projet de budget pour 2002, telles que le prévoit le fascicule I de l'annexe des Voies et moyens pour 2002. L'importance du taux de croissance attendu en 2002 par rapport à la loi de finances initiale pour 2001 résulterait, en conséquence, de la sous-estimation initiale des recettes de TVA pour ledit exercice. L'an passé, l'évolution prévue s'avérait, en effet, sensiblement inférieure aux prévisions de croissance des recettes globales de TVA mentionnées dans le tome I de l'annexe des voies et moyens au projet de loi de finances pour 2001. Les révisions des prévisions à la mi septembre 2001, confirment cette sous-évaluation sensible du projet de budget pour 2001. Le projet de budget pour 2002 correspondrait donc à un « recalage » par rapport aux réalisations de 2001, conduisant à des montants plus vraisemblables, du moins s'agissant des recettes nettes.
Année après année, les écarts forts, alternativement positifs et négatifs, entre les prévisions de recettes de TVA affectée au BAPSA et l'ensemble des recettes de TVA du budget général, montrent qu'il existe un évident problème de choix de la base de référence utilisée pour les prévisions des ressources de TVA affectées au BAPSA. Ainsi, après les deux années passées, où votre Rapporteur avait pu démontrer que les prévisions étaient successivement surestimées puis sous-estimées, on ne peut que s'interroger sur la confiance qui peut être accordée aux prévisions pour 2002, dont l'analyse diffère totalement suivant la base de référence. En tout état de cause, seules les recettes nettes peuvent se voir créditées d'une certaine signification, les recettes brutes, comme, a fortiori, les dépenses de restitutions, n'apparaissant guère fiables, mais semblant plutôt recalculées a posteriori, à partir des prévisions de recettes nettes, et non l'inverse. Dans ces conditions, il serait préférable de ne faire apparaître dans le BAPSA que les recettes nettes, ou de présenter les restitutions sous forme d'un prélèvement sur les recettes, en reprenant la présentation retenue pour l'article d'équilibre général du budget de l'État, plutôt que de présenter, artificiellement, ces restitutions comme des dépenses du budget annexe au profit du budget général.
COMPARAISON DES TAUX D'EVOLUTION DES RECETTES DE TVA
DU BUDGET GÉNÉRAL ET DU BAPSA
(en %)
PLF 2002/ LFI 2001 |
PLF 2002/ LFI révisée 2001 | |
Taux de croissance des ressources brutes de TVA pour le BAPSA |
9,7 |
nc |
Taux de croissance des restitutions |
28 |
nc |
Taux de croissance des ressources nettes de TVA pour le BAPSA |
5,9 |
4,0 |
A comparer au : |
||
Taux de croissance des emplois taxables de TVA globale (*) |
nc |
3,2 |
Taux de croissance des recettes brutes de TVA globale (*) |
+ 4,4 |
4,7 |
Taux de croissance des restitutions de TVA globale (*) |
+ 13 |
+ 3,2 |
Taux de croissance des recettes nettes de TVA globale (*) |
+ 2,1 |
5 |
Source : (*) Annexes Voies et moyens des projets de loi de finances pour 2001 et 2002.
L'effort de clarification que le Gouvernement devrait s'imposer est d'autant plus nécessaire que :
- d'une part, toute erreur se répercute directement sur l'évaluation du déficit, et donc de la subvention budgétaire ou du montant de C3S qui doit être prévue pour équilibrer le budget annexe, alors que la subvention inscrite au budget constitue un plafond de dépenses, et que la fraction de C3S affectée au BAPSA ne peut être modifiée, comme la subvention elle-même, que par une loi de finances, en application de l'ordonnance organique du 2 janvier 1959.
- d'autre part, l'hypothèse de croissance de l'économie de 2,5%, qui conduit au taux de croissance global des recettes nettes de TVA du budget général de 5%, est considérée aujourd'hui par tous, sauf par le Gouvernement, comme surestimé d'au moins 1%. Or une erreur de 1% sur le taux de croissance des recettes nettes de TVA pour le BAPSA correspond à un besoin supplémentaire de financement du budget annexe de 45 millions d'euros (295 millions de francs).
L'article 9 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 a réformé les mécanismes de compensation aux régimes obligatoires d'assurance maladie de leurs pertes de cotisations suite aux transferts de cotisations maladie vers la CSG de 1997 et 1998. La compensation aux régimes s'effectue dorénavant de la manière suivante :
- affectation de la CSG aux régimes d'assurance maladie autres que la CNAMTS (dont le BAPSA) sur la base de leurs pertes de cotisations constatée en 1998, corrigée de l'impact sur 12 mois de la revalorisation du taux de la CSG intervenue au 1er janvier 1998 (), cette base étant revalorisée annuellement en fonction de l'évolution, entre les deux derniers exercices clos, de l'assiette de la CSG sur les revenus d'activité et de remplacement ;
- affectation du solde de la CSG à la CNAMTS.
Un arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget fixe, en fin d'année, pour l'année à venir, le montant revalorisé et définitif des versements de CSG maladie aux différents régimes.
Les reversements de CSG au profit du BAPSA bénéficient, depuis deux ans, d'une remarquable dynamique. Pour l'exercice 2001, les recettes en provenance de l'ACOSS, destinées à compenser les transferts vers la CSG opérés en 1997 et 1998, étaient ainsi estimées à 4,627 milliards de francs, soit une croissance, élevée, de 9,1%. En 2002, les recettes de reversement de CSG par l'ACOSS connaîtraient une augmentation encore plus sensible, passant de 705 (4,6 milliards de francs) à 807 millions d'euros (5,3 milliards de francs). Ces ressources croîtraient donc de 102 millions d'euros (660 millions de francs), soit +14,5% par rapport à la loi de finances initiale pour 2001.
Cette croissance serait cependant un peu moindre, par comparaison avec les reversements effectivement prévus par l'arrêté du 21 décembre 2000 (763 millions d'euros, soit 5 milliards de francs) puisqu'elle se réduirait alors à 5,8%. Le montant initialement prévu pour 2001 a en effet été sous-estimé, compte tenu notamment du supplément de ressources résultant de la hausse de 0,15% du taux de la CSG (Contribution sociale généralisée) affectée aux régimes d'assurance maladie par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001.
En tout état de cause, les prévisions de reversement de CSG au BAPSA sont strictement conformes aux prévisions présentées par la commission des comptes de la sécurité sociale lors de sa réunion de septembre dernier.
Par ailleurs, votre Rapporteur spécial relèvera deux difficultés propres à la CSG :
- la période de référence pour le calcul de son assiette a été alignée par la loi de financement pour 2001 sur celle des cotisations sociales. En revanche, et contrairement à ces dernières, son assiette ne prend pas en compte les déficits d'exploitation pour leur valeur réelle, mais pour une valeur nulle. Il conviendrait donc de poursuivre le mouvement d'harmonisation et de simplification entamé l'an passé. Le coût de la prise en compte des déficits pour leur valeur réelle ne s'élèverait qu'à 13 millions d'euros (88 millions de francs);
- sur un plan plus technique, le reversement de CSG couvre à la fois les pertes de cotisations techniques et complémentaires de la MSA au titre de l'AMEXA dues au transfert en 1997 des cotisations maladie vers cette imposition. Mais le partage du reversement de l'ACOSS a jusqu'à présent été opéré par l'agent comptable du BAPSA sans qu'un texte l'y autorise expressément, même si ce partage correspond bien à la logique du régime, et résulte de ce que celui-ci est l'un des seuls pour lequel cotisations techniques et cotisations de gestion, dites « complémentaires», sont distinctes. Il semble cependant que le ministère du Budget souhaite obtenir un remboursement, pour la période 1998-2001, de ce qu'il considère comme un trop-perçu par la MSA pour le financement de ses dépenses de gestion et d'action sanitaire et social, représentant un montant de 54 millions d'euros (370 millions de francs). En tout état de cause, il conviendrait de régulariser cette situation juridiquement insatisfaisante, quitte à lier, pour l'avenir, l'évolution du reversement à la MSA, au titre du financement de ses dépenses autres que techniques, non plus à celle de l'assiette de la CSG, mais à celle des dépenses de gestion elles-mêmes de la MSA. Cette solution constituerait un moyen terme qui paraît effectivement raisonnable.
L'article 38 de la loi de finances pour 2001 a prévu, ainsi que votre Rapporteur l'estimait nécessaire depuis plusieurs années, la pérennisation de l'affectation au BAPSA d'une partie des recettes de la C3S. Mais la modification introduite par le Gouvernement lors de la discussion parlementaire, n'est que partiellement satisfaisante, et répond à de mauvaises raisons.
D'une part, cette affectation permanente n'a en réalité été acceptée par le Gouvernement que pour une raison très détournée, tenant à ce qu'il n'a pas souhaité, en effet, que la charge du financement des 350 millions de francs d'exonérations supplémentaires de CRDS (Contribution pour le remboursement de la dette sociale) décidées par l'Assemblée nationale dans le cadre de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 pèse sur le budget de l'État. Il est d'ailleurs éclairant, à cet égard, de rappeler la complexité du dispositif mis en place : la baisse de ressources de CRDS pour la CADES (Caisse d'amortissement de la dette sociale), résultant des amendements parlementaires précités est compensée par une diminution du versement de la CADES à l'État à due concurrence. Cette diminution est elle-même compensée pour l'État par une baisse de la subvention d'équilibre du BAPSA, laquelle est, en dernière étape, financée par un prélèvement supplémentaire sur le produit de la C3S. Il s'agissait donc, sous couvert d'une mesure de rationalisation et de transparence, de permettre la perpétuation de « bricolages » budgétaires qui caractérisent les lois de financement de la sécurité sociale depuis leur origine.
D'autre part, seul le principe de l'affectation a été fixé dans la loi, sans que soit déterminé un mode de calcul pérenne du montant affecté. Le montant devra donc continuer à être fixé chaque année par la loi de finances, et, éventuellement, la loi de finances rectificative, en fonction de la situation prévisionnelle ou révisée d'exécution du BAPSA. De plus, l'article 7 de la loi portant diverses dispositions d'ordre social, éducatif et culturel a même supprimé le dispositif introduit au sein de l'article L.651-2-1 du code de la sécurité sociale par l'article 38 de la loi de finances pour 2001 pour préciser que le versement au BAPSA est opéré après versement des subventions d'équilibre à la CANAM, à la CANCAVA et à l'ORGANIC, et avant versement au FSV (Fonds de solidarité vieillesse) et éventuellement au Fonds de réserve pour les retraites, anciennement géré par le FSV. De la sorte, aucun texte ne permet de fixer de manière univoque l'ordre de calcul des différents prélèvements. Il aurait été incontestablement préférable de fixer un mode de calcul du prélèvement sur la C3S destiné au BAPSA à la fois permanent, ordonné et fondé sur des données objectives.
Pour l'exercice à venir, l'article 18 du projet de loi de finances pour 2002 précise le montant du prélèvement proposé par le Gouvernement sur le produit de la C3S, à hauteur de 520 millions d'euros (3,4 milliards de francs).
Du point de vue du respect des textes, ledit montant devrait être affecté au régime d'assurance-vieillesse des exploitants agricoles comme le prévoit explicitement le nouvel article L.651-1 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction issu de l'article 38 de la loi de finances pour 2001. Mais l'exposé des motifs de l'article 18 ne fait lui-même plus aucun lien entre le montant choisi pour le prélèvement (520 millions d'euros), et le financement des mesures nouvelles en faveur des retraites, dont la charge totale l'an prochain, prévue notamment par l'article 57 du projet de loi de finances pour 2002, n'atteindra que 300 millions d'euros (1,97 milliard de francs). Le prélèvement sur la C3S bénéficiera donc, en réalité, de manière indistincte à l'ensemble des branches du BAPSA.
Malgré la suppression progressive des micro-taxes affectées au BAPSA (), celui-ci demeure financé par quatre prélèvements fiscaux de faible rendement, très hétéroclites, dont le lien avec le régime social paraît aujourd'hui assez distendu, et dont la disparition simplifierait la fiscalité, notamment agricole :
- la taxe sur les farines (article 1618 septies du code général des impôts) ;
- la taxe sur les huiles végétales (article 1609 vicies du code général des impôts) ;
- le prélèvement sur le droit de consommation sur les alcools (article 1615 bis du code général des impôts) ;
- la taxe sur les tabacs fabriqués (article 1609 unvicies du code général des impôts).
Leur total ne représenterait, en 2002, que 265 millions d'euros (1,74 milliard de francs), en croissance de 5% par rapport aux prévisions initiales pour 2001. Ce montant ne correspond qu'à 4,6% du total des taxes affectées, et à seulement 1,7% des recettes totales du BAPSA. Votre Rapporteur ne peut que réitérer son interrogation sur l'intérêt de maintenir le prélèvement sur le droit sur les alcools, compte tenu que son produit ne représente qu'un peu plus d'un millième des ressources, et des dépenses, du BAPSA.
Par ailleurs, votre Rapporteur spécial s'interroge sur les évolutions sensibles, et divergentes, de deux des taxes concernées. Le produit prévisionnel de la taxe sur les tabacs augmenterait en effet de 38%, alors que celui de la taxe sur les farines diminuerait de 28%, de projet de loi de finances à projet de loi de finances. Compte tenu de la nature de l'assiette de ces deux prélèvements, de tels écarts paraissent de nature à ouvrir un doute réel sur la qualité des prévisions, soit pour 2001, soit pour 2002.
PRÉVISIONS DE PRODUIT DES TAXES AFFECTÉES
(en millions d'euros)
2001 |
2002 |
Ecart 2002/2001 (en %) | |
Prélèvement sur la taxe sur les alcools |
18,5 |
18,7 |
+1,6 |
Taxe sur les farines |
53,8 |
38,9 |
- 27,7 |
Taxe sur les tabacs |
75,6 |
104,4 |
+ 38 |
Taxe sur les huiles |
103,8 |
102,3 |
- 1,4 |
Total |
251,7 |
264,3 |
+ 5 |
Les transferts en provenance d'autres organismes sociaux sont de trois types. Par ordre d'importance décroissante, il s'agit de la compensation démographique inter-régime, des remboursement de la CNAF et de ceux du FSV.
La compensation démographique au titre des assurances maladie, et surtout vieillesse, constitue la première ressource du BAPSA, dont elle représente plus du tiers des dépenses, et près de 40% des recettes nettes hors subvention budgétaire.
Cette ressource primordiale pour le BAPSA avait subi, en 2001, une diminution marquée de 1,3 milliards de francs entre les projets de budget pour 2000 et pour 2001. Cette diminution massive constituait une rupture brutale avec le mouvement tendanciel de hausse des versements de compensation constatés depuis 1994, où ils n'étaient que de 28,9 milliards de francs, cette augmentation régulière traduisant le déséquilibre démographique croissant du régime. La diminution marquée de la compensation démographique prévue en 2001 résultait d'une régularisation massive au titre de l'exercice 1999, pour un montant à rembourser par le BAPSA de 1,025 milliard de francs, très supérieur aux régularisations des exercices passés, qui n'ont pas excédé 379 millions de francs, en 1999.
Cette importante régularisation résultait du fait que la prestation moyenne de vieillesse qui servait de base de référence pour le calcul était, jusqu'en 1997 et à l'exception des années 1993 et 1994, celle du BAPSA, puis celle, en 1998, de l'ORGANIC, et, enfin, en 1999, celle du régime des cultes (CAMIVAC). Mais compte tenu du caractère peu représentatif de ce dernier, le retour à la prestation moyenne de l'ORGANIC comme prestation de référence a été décidé rétroactivement, à compter de l'exercice 2000.
En 2002, les ressources de la solidarité démographique des régimes devraient évoluer très positivement pour le BAPSA, qu'il s'agisse de la compensation maladie, ou de la compensation vieillesse. Cette ressource primordiale pour le budget annexe passerait ainsi de 5,184 à 5,736 milliards d'euros, soit une croissance de 552 millions d'euros () (+10,6%).
Pour la compensation maladie, le surplus concerne à la fois les acomptes pour 2002 et la régularisation pour 2001, et résulte de la prise en compte tardive dans les calculs de l'augmentation du ticket modérateur de la CNAM, maintenant aligné sur celui du régime général. Cette réforme a en effet tendu à relever la prestation moyenne de maladie.
S'agissant de la compensation vieillesse, la croissance des montants bénéficiant en 2002 au BAPSA tient au retour, à compter de 2000, à la prestation moyenne de l'ORGANIC comme prestation de référence. Cette modification entraîne des effets positifs à la fois sur l'augmentation des acomptes pour 2002, et sur celle des régularisations pour 2000, mais également pour 2001, en raison d'une accélération sensible du calendrier des régularisations.
Il est clair, toutefois, que :
- les sommes supplémentaires dues à cette accélération des régularisations allègeront le financement du BAPSA, et le besoin en termes de subvention du budget général, mais pèseront sur la trésorerie des autres régimes ;
- le gain résultant de l'accélération des régularisations est transitoire, et ne vaut que pour la première année.
La contribution de la CNAF correspond au remboursement de la partie des prestations familiales versées par le régime des exploitants agricoles non couvertes par les cotisations familiales perçues par le régime. Cette contribution augmenterait en 2002 de manière limitée, de 12 millions d'euros (79 millions de francs), soit une croissance de 5%, pour s'établir à 243 millions d'euros (1,59 milliard de francs). Cette croissance résulte d'une baisse du produit des cotisations familiales plus prononcée que celle des prestations.
Les remboursements du FSV diminueront, en 2002, de 30%, pour s'établir à 156 millions d'euros (1,02 milliard de francs), ce qui correspond à une diminution totale de 82% par rapport à 1996. Cette diminution constitue la contrepartie de la baisse des dépenses effectuées au titre de l'allocation supplémentaire de l'article L.815-2 du code de la sécurité sociale, en conséquence des mesures successives d'amélioration des retraites contributives des anciens exploitants agricoles intervenues depuis 1994. L'ampleur de la diminution prévue pour 2002 s'explique par le fait que la dernière étape du programme pluriannuelle est également la plus importante en montant.
Les prévisions de cotisations techniques () posent deux problèmes : celui de leur assiette, celui de leur montant prévisionnel.
L'assiette des cotisations techniques appelle trois critiques principales : l'erreur de la suppression de l'option pour l'assujettissement du revenu de l'année en cours, le maintien injuste de l'assiette minimale en assurance maladie, la perpétuation de cotisations solidaires injustifiées.
La loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 a prévu une mesure de simplification de l'assiette des revenus professionnels soumis à cotisations. Celle-ci a permis, à compter de 2001, de ramener le nombre de périodes de référence différentes pour l'assiette des cotisations sociales des exploitants agricoles de quatre (N ou la moyenne triennale N- 1, N- 2, N- 3 pour les exploitants au régime fiscal réel ; N- 1 ou l'assiette triennale N- 2, N- 3, N- 4 pour les exploitants au forfait) à deux. N'est plus en effet proposée qu'une assiette triennale assise sur les revenus des années N- 3, N- 2 et N- 1, par défaut, avec la possibilité d'une option pour l'année N- 1. Seraient donc supprimées les possibilités de l'assiette triennale portant sur les années N- 4 à N- 2, et, surtout, de l'assiette annuelle portant sur les revenus de l'année en cours.
Si votre Rapporteur se félicite de la volonté de simplification manifestée par le Gouvernement, il considère cependant comme très contestable le choix de la période annuelle effectivement retenue. En effet, l'intérêt du choix pour une année donnée, plutôt que pour la moyenne triennale, a pour objet de permettre à l'agriculteur de ne pas avoir à supporter des cotisations sociales excessives par rapport à son revenu réel en cas de difficulté grave, individuelle ou collective dans le cadre de crises agricoles sectorielles, qui, comme chacun sait, sont récurrentes. Mais ce mécanisme n'est évidemment efficace qu'à la condition de viser l'année N et non l'année N-1. Au demeurant, les arguments invoqués pour justifier le choix opéré sont eux-mêmes très contestables car d'ordre purement administratif et technocratique. C'est en effet la difficulté que rencontraient les caisses de MSA à calculer, puis à régulariser le montant d'une cotisation assise sur le revenu de l'année en cours qui a été avancée par le Gouvernement pour écarter cette option, et ne conserver que l'année N-1.
RÉPARTITION DES ANNÉES DE RÉFÉRENCE
SUIVANT LE RÉGIME FISCAL
Nombre en 2000 |
En % |
|||
Total des exploitants au forfait |
283.979 |
100,0 % | ||
- moyenne triennale |
249.170 |
87,7 % | ||
- option N-1 |
34.809 |
12,3 % | ||
Total des exploitants au réel |
307.209 |
100,0 % | ||
- moyenne triennale |
252.806 |
82,3 % | ||
- option N |
54.403 |
17,7 % | ||
Total des exploitants |
591.188 |
100,0 % | ||
- moyenne triennale |
501.976 |
84,9 % | ||
- option annuelle |
89.212 |
15,1 % | ||
Source : Ministère de l'agriculture et de la pêche |
Le choix retenu de l'année N-1 a ainsi privé 54.000 exploitants, 18% des exploitants agricoles imposés au régime du réel (représentant 22% des revenus des exploitants au réel) ayant antérieurement opté pour l'année N, , de la possibilité de lier directement le niveau de leurs charges à celui de leur revenu, alors même que ceux-ci subissent les prélèvements obligatoires les plus lourds. Ce choix ne tendra évidemment pas à encourager au passage du bénéfice forfaitaire au bénéfice réel, lorsqu'il n'est pas obligatoire, ni de l'assiette triennale, spécifique au régime agricole, à l'assiette annuelle plus proche du droit commun.
Le choix du Gouvernement a également affecté les départements de manière très variable. La proportion des exploitants ayant choisi une assiette annuelle est en effet très variable selon les départements, mais pour un nombre significatif d'entre eux, la proportion des exploitants ayant opté pour l'assiette annuelle, et en particulier pour l'année N, était très significative puisque, dans sept départements (Aisne, Aube, Loiret, Eure-et-Loir, Marne, Pyrénées-orientales, Seine-et-Marne), de 30 à 56% des exploitants avaient choisi une assiette annuelle, et, principalement l'assiette N, et, dans trente et un autres (situés principalement dans les régions Bretagne, Aquitaine, Languedoc-Roussillon, Normandie), ce pourcentage se situait entre 15 et 30%, équiréparti entre année N et année N-1.
Les résultats, après la date de fin d'exercice de l'option (prévue par la loi pour le 30 avril et reportée par voie de circulaire au 31 mai 2001), ne sont pas encore connus ni de la CCMSA, ni de la tutelle Les contrôles sur place de votre Rapporteur ont cependant permis de mesurer ponctuellement les effets de cette réforme dans certains des départements visités, montrant d'ailleurs une situation contrastée suivant les départements.
Ainsi, dans l'Allier, 924 exploitants sur 6.770 avaient opté au 28 mai 2001 pour l'année N-1 (soit 13,6%). Cette proportion s'avère supérieure de plus du double à celle des optants dans le régime antérieur (4,1% au réel N en année N, 1,6% pour les forfaitaires en année N-1, soit un total de 5,7%). Cette situation se comprend toutefois d'autant plus que, pour ce département d'élevage, où les conséquences de la crise bovine se manifestent de manière aigüe, le revenu agricole tend à diminuer depuis plusieurs années, incitant donc au choix de l'assiette de revenus la plus récente. Mais le choix de l'année N-1 ne constitue alors qu'un pis-aller.
En revanche, dans l'Eure-et-Loir, l'un des départements connaissant les plus fortes proportions d'agriculteurs imposés sur les bénéfices réels, et d'options pour l'année N, le taux de choix de la nouvelle option annuelle (N-1) ne s'élève plus qu'à 27,8%, contre 29,9% en 2000, soit une diminution d'environ 7%. Il y a donc régression de l'assiette annuelle, pourtant la plus significative et la plus comparable aux revenus courants, d'une part, et à l'assiette fiscale, d'autre part.
L'article 39 de la loi de finances pour 2001 a supprimé la majoration de l'assiette minimum des cotisations maladie des exploitants agricoles en fonction de la surface pour les exploitations d'une taille comprise entre 1,5 et 3,5 SMI, pour ne retenir que l'assiette minimale de 800 SMIC, pour toutes les exploitations. Ce dispositif, au demeurant particulièrement complexe, avait été créé en 1994 pour compenser la prise en compte des déficits pour leur valeur réelle, - et non pour une valeur nulle -, dans l'assiette des cotisations sociales, lorsque le revenu professionnel a été substitué au revenu cadastral.
Cette proposition justifiée a bénéficié en 2001 à 99.000 personnes, pour une perte de recettes de cotisations techniques du BAPSA de 120 millions de francs (160 millions de francs en incluant les cotisations complémentaires). Elle ne constitue cependant à l'évidence qu'une demi-mesure, puisqu'elle laisse subsister la cotisation minimale elle-même, qui pèse pourtant sur les exploitations les plus modestes. En effet, l'assiette minimale, qui est conservée, ne relève les cotisations de maladie que pour les exploitants dont le revenu professionnel est inférieur à 800 SMIC par an, soit ceux dont le revenu est le plus faible. Elle concerne néanmoins plus de 50.000 exploitants.
La mesure proposée par le Gouvernement à l'automne dernier ne bénéficiant qu'aux exploitations de taille moyenne ou grande, votre rapporteur avait proposé, durant la discussion du projet de budget pour 2001, et par souci d'équité, de prévoir par anticipation pour 2002 la suppression complète du dispositif de l'assiette minimale. La perte de cotisations techniques résultant pour le BAPSA de la suppression totale de l'assiette minimale ne s élèverait qu'à 33,5 millions d'euros (220 millions de francs), pour un coût total de la mesure de 44,8 millions d'euros (294 millions de francs). Elle n'aurait pas de coût supplémentaire sur le reversement de CSG en contrepartie de la diminution des taux de cotisation maladie intervenus en 1998.
Compte tenu de la réponse faite par le ministre lors de la séance publique le 8 novembre dernier, qui ne se prononçait pas défavorablement au fond, mais considérait que l'examen de cette proposition dans le cadre du projet de budget pour 2001 était prématuré, votre Rapporteur ne peut qu'estimer nécessaire de réitérer cette proposition de justice sociale.
Le produit prévisionnel des cotisations de solidarité poursuit en 2002 sa diminution, lente mais sure, de 5 millions d'euros (soit 15%), pour s'établir à 27 millions d'euros (178 millions de francs).
Il n'existe plus, depuis 2001, que deux types de cotisations de solidarité prélevées sur des personnes non affiliées en tant qu'exploitants ():
- la cotisation de solidarité prévue à l'article L.731-23 du code rural concerne toute personne qui, soit met en valeur une exploitation agricole dont l'importance est comprise entre 2 ou 3 hectares selon les départements et la moitié de la surface minimum d'installation (seuil d'affiliation au régime agricole), ou dès lors que le revenu cadastral de cette exploitation est supérieur à un certain montant, soit exerce une activité dite « connexe » dont l'importance ne peut être mesurée qu'en durée de travail ;
- la cotisation de solidarité instituée par l'article L.731-24 du code rural concerne les associés de sociétés de personnes non affiliés au régime agricole (minoritaires ne participant pas aux travaux). Cette cotisation est calculée en pourcentage des revenus professionnels perçus. Elle a pour objectif affiché de tenter de dissuader les éclatements fictifs d'une exploitation engendrant l'évasion d'une partie des revenus professionnels de l'assiette des cotisations.
La troisième cotisation de solidarité, anciennement visée à l'article L. 622-1 du code de la sécurité sociale, et concernant les chefs d'exploitation pluriactifs qui, à titre secondaire, mettent en valeur une exploitation supérieure à la moitié de la surface minimum d'installation, a été supprimée par la loi de finances pour 2001 à compter du 1er janvier 2001, pour un coût, mineur, estimé à 8 millions de francs, et bénéficiant à 3.700 personnes.
LES COTISATIONS DE « SOLIDARITÉ » |
||||||||
Taux |
Taux 2001 -cotisation de gestion prélevée sur la cotisation |
Effectifs assujettis 2000 |
Rendement (1) |
Rendement 2001 révisé (en millions d'euros) |
Rendement 2002 prévisionnel (en millions d'euros) | |||
Cotisations de « solidarité » : |
||||||||
- Exploitations inférieures à la demie SMI |
16 |
17,7% |
201.635 |
25,9 |
25,6 |
24,5 | ||
- Associés apporteurs de capitaux |
3,4 |
26,5% |
27.000 |
2,7 |
2,9 |
2,9 | ||
(1) Il s'agit du rendement « technique », après qu'ont été opérés les prélèvements de gestion, et hors cotisations complémentaires. |
Votre Rapporteur, qui ne peut que renvoyer à ses deux précédents rapports spéciaux pour souligner les multiples critiques qui doivent être faites à ces cotisations, considère que le Gouvernement n'ayant retenu l'an passé que la suppression de la plus mineure d'entre elles, en termes de rendement, devrait dépasser un geste aussi symbolique.
Ces critiques fondamentales sont au nombre de quatre :
-leur base juridique est fragile, car, au regard de la Constitution, des cotisations sans contrepartie sont en réalité des impositions de toute nature, dont la définition de la totalité des éléments (taux, assiette, modalités de recouvrement) incombe à la loi, et non au pouvoir réglementaire;
- compte tenu de l'absence de contrepartie en termes de droits, et de la détermination des redevables des cotisations de solidarité, celles-ci sont soit profondément inéquitables, soit insusceptibles d'atteindre leur objectif, celui-ci étant au demeurant lui-même contestable. En premier lieu, la cotisation de solidarité sur les petites exploitations, dites à juste titre de « subsistance », affecte en grande partie (40%) des retraités aux revenus très modestes. Néanmoins, ceux-ci sont également soumis à la CSG, dont le régime a même été rendu plus rigoureux par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 (). Pour les redevables modestes de cette cotisation de solidarité, le taux global de prélèvement social, non créateur de droits, est ainsi passé de 19 % en 1998 à 27% en 1999, et demeure depuis lors à ce niveau, ce qui a entraîné une baisse supérieure à 7 % du revenu agricole net de prélèvements. En ce qui concerne la cotisation perçue sur les associés apporteurs de capitaux, son objectif, d'autant plus contestable en lui-même que l'agriculture a précisément besoin de capitaux, ne peut être atteint par une cotisation qui ne produit que moins de 3 millions d'euros par an. Il ne s'agit donc que d'un prélèvement à portée purement symbolique;
- eu égard à leur faible montant, (vingt-cinq fois inférieur au rendement des cotisations des affiliés au régime agricole), les cotisations de solidarité entraînent un coût de gestion particulièrement élevé. Ainsi, les prélèvements de gestion opérés sur les cotisations s'élèvent à 17,7 % du montant pour la cotisation des exploitants sous le seuil d'affiliation et 26,5 % pour celle des associés apporteurs de capitaux, ce qui constitue l'un des records de coût de recouvrement ;
- les deux cotisations de solidarité qui demeurent en vigueur ne sont pas recouvrées comme elles le devraient. S'agissant de la cotisation de solidarité sur les petites exploitations, prélevée pour un tiers sur des retraités, pour deux-tiers sur des actifs, le mode de calcul de leur assiette conduit à minorer fortement le montant recouvré. En effet, faute d'un revenu calculé par les services fiscaux, qui n'y trouvent aucun intérêt puisque ces revenus ne seraient pas imposables, l'assiette est généralement calculée sur les revenus cadastraux, ou sous la forme de l'assiette forfaitaire, très faible (). L'évolution du recouvrement et du nombre des assujettis à cette cotisation traduit clairement les difficultés soulevées ci-dessus.
ÉVOLUTION DU NOMBRE D'ASSUJETTIS ET DU RENDEMENT DE LA COTISATION DE SOLIDARITÉ SUR LES EXPLOITATIONS DE SUBSISTANCE
1999 |
2000 |
2001 (prévisions) |
2002 (prévisions) | |
Effectifs totaux |
206.534 |
200.229 |
197.000 |
192.000 |
-dont retraités |
- 83.057 |
- 81.108 |
- 79.000 |
- 77.000 |
Rendement (en millions d'euros) |
31,6 |
25,9 |
25,6 |
24,5 |
Votre Rapporteur soulignera que, en ce qui concerne la cotisation sur les associés de société, celle-ci, d'un rendement totalement marginal, n'est même pas systématiquement mise en recouvrement par les caisses de MSA. L'hétérogénéité, entre départements, du nombre de cotisants acquittant effectivement ce prélèvement, démontre la difficulté de sa mise en _uvre, que votre Rapporteur avait déjà pu mettre en évidence l'an passé à l'occasion de contrôles sur place. Il y a ainsi lieu de s'interroger sur le fait que dans un tiers des départements (), le nombre de cotisants solidaires associés est inférieur à 110, alors que, dans le tiers supérieur, il dépasse trois fois ce nombre et peut aller jusqu'à 1.530, pour une moyenne de 260 environ. Cet écart ne reflète manifestement pas l'amplitude de l'échelle des redevables potentiels. Selon les données fournies par la CCMSA, certains départements n'appellent même qu'un nombre dérisoire de cotisations, comme le Calvados cotisation, voire aucune cotisation, à l'instar de la Loire-Atlantique et de la Charente-Maritime. A l'autre extrémité de l'échelle, la Gironde appelle 1.528 cotisations solidaires, et la Marne 1.486. Pourtant, l'absence d'appel de cette cotisation obligatoire par les dirigeants d'un organisme soumis au contrôle de la Cour des comptes serait sans doute passible d'un déféré en Cour de discipline budgétaire et financière (CDBF), en application de l'article L.313-4 du code des juridictions financières, dans la mesure où il pourrait être considéré que ces dirigeants, comme d'ailleurs sans doute leur autorité de tutelle, auraient enfreint les règles relatives à l'exécution des recettes de cet organisme.
Par ailleurs, ce n'est que depuis 2001 qu'a été supprimé le calcul de l'assiette de cette cotisation sur la base des revenus des années N-4 à N-1, la cotisation n'étant pas appelée faute de présentation de l'un de ces trois revenus annuels (). Ce n'est que depuis la loi de financement pour 2001 qu'a été retenue l'assiette N-1, et la création d'une assiette forfaitaire en cas d'absence de connaissance du revenu.
En conclusion, votre Rapporteur n'a rien à retrancher de son analyse de l'an passé : « lorsque ces deux dispositifs sont mis en _uvre, ils se caractérisent par l'inéquité supplémentaire consistant à ne taxer, puisqu'il s'agit bien de cela, que ceux qui déclarent leurs revenus et leur situation, sans guère se préoccuper des autres ». Il découle de cette situation que la notion même de solidarité est absente de ces cotisations, qui ne sont effectivement perçues que des plus modestes, ou de ceux qui veulent bien les payer.
En conséquence, et compte tenu de la minceur de la perte de recette, votre Rapporteur considère qu'il conviendrait de supprimer, à tout le moins et dans un premier temps, la cotisation de solidarité sur les associés, dont l'inéquité du régime et l'inadaptation aux objectifs recherchés sont les plus flagrantes.
Les prévisions de cotisations techniques, hors cotisations de solidarité, sont très sensiblement inférieures (de -5,5%) aux prévisions retenues en loi de finances initiale pour 2001, soit une diminution de 100 millions d'euros (660 millions de francs). Les prévisions de recettes de cotisations étaient toutefois surestimées de manière très nette l'an passé, comme votre Rapporteur l'avait prévu, et comme l'attestent les estimations révisées pour 2001, qui leur sont inférieures de 4,2% (). En conséquence, les prévisions de cotisations pour 2002 n'apparaissent en baisse que de 1,4% par rapport aux estimations révisées de 2001, soit l'épaisseur du trait (21,5 millions d'euros, soit 141 millions de francs).
Ces prévisions résultent des hypothèses, d'une part, d'une stabilité des revenus professionnels de 1999 à 2000, et, d'autre part, d'une baisse de 2% de 2000 à 2001. Compte tenu de la combinaison de la moyenne triennale N-3 à N-1, et de l'année N-1, ces hypothèses conduisent à la légère baisse précitée. Celle-ci ne paraît cependant pas refléter l'appréciation globale d'une baisse sensible de l'évolution du revenu agricole sur la période récente. Dans certains départements, notamment à forte proportion d'exploitants imposés au réel, la diminution perçue apparaît en effet nettement plus marquée. Ainsi, dans l'Eure-et-Loir, la perte de revenu agricole en 2000, donc d'assiette en 2001, est estimée à 21,3%, (soit une perte de 136 millions de francs), en raison notamment de la modulation des aides communautaires. Ce mécanisme, qui conduit à réduire les aides des exploitations grosses et moyennes, souvent au réel, tend à réduire l'assiette des revenus soumis à cotisations. Entre 2000 et 2001, les émissions de cotisations (CSG , CRDS et cotisations de gestion incluses), diminueraient de 30 millions de francs, soit 11%. En 2002, la caisse considère que la diminution de revenu devrait s'avérer encore plus forte, en raison de la récolte très moyenne de 2001.
Certes, l'Eure-et-Loir n'est pas représentatif de l'ensemble de la France. Mais, pour autant, compte tenu de son poids dans l'assiette nationale (), comme des raisons expliquant la perte d'assiette, qui ne sont pas purement spécifiques au département, les données précitées peuvent conduire à remettre en cause les prévisions optimistes qui sous-tendent le budget. Il est donc à nouveau vraisemblable, compte tenu de la diminution tendancielle de la population des exploitants et des perspectives économiques peu favorables pour 2001 pour certaines filières, que, même si le décalage prévisible entre cet objectif et les réalisations devrait être inférieur à celui constaté en 2001, l'estimation pour 2002 constitue néanmoins, cette fois encore, plus un objectif qu'une prévision. Cet objectif paraît, en l'espèce, vraisemblablement surestimé d'au moins 1%, soit 17 millions d'euros (111 millions de francs).
ÉVOLUTION DES PRÉVISIONS ET RÉALISATIONS DE RECETTES
DE COTISATIONS TECHNIQUES CRÉATRICES DE DROITS
(en millions d'euros)
Loi de finances pour 2001 |
Estimations pour 2001 révisées au 10/9/2001 |
Projet de budget pour 2002 |
Ecart par rapport à LF 2001 (en %) |
Ecart par rapport à LF 2001 revisée (en %) | |
Cotisations familiales |
303,9 |
299,7 |
291,3 |
- 4,1 |
- 2,8 |
Cotisations vieillesse AVI |
244,8 |
237,1 |
234,6 |
- 4,2 |
- 1,1 |
Cotisations vieillesse AVA |
632,5 |
593,9 |
585,9 |
- 7,4 |
- 1,3 |
Cotisations maladie AMEXA |
606,3 |
582,5 |
577,6 |
- 4,7 |
- 0,8 |
Total (incluant veuvage, DOM, assurance volontaire) |
1.797,0 |
1.720,5 |
1.698,9 |
- 5,5 |
- 1,3 |
Les dépenses prévisionnelles s'établissent à 15,4 milliards d'euros (101 milliards de francs). Elles progressent de 685 millions d'euros (4, 5 milliards de francs), soit + 4,7% par rapport à la loi de finances initiale pour 2001.
Hors restitutions de TVA, qui connaissent une accélération très marquée résultant de celle des ressources de TVA elles-mêmes, cette augmentation se réduit à 452 millions d'euros (2,97 milliards de francs), soit +3,3%. En conséquence, les dépenses hors restitutions, plus représentatives de la réalité des dépenses du régime social, s'élèveraient à 14,2 milliards d'euros (93,15 milliards de francs).
ÉVOLUTION DES DÉPENSES PRÉVISIONNELLES POUR 2002
(en millions d'euros)
LFI 2001 |
Estimations révisées au 17/9 |
PLF 2002 |
Évolution PLF 2002/ LFI 2001 |
Évolution PLF 2002/ LFI 2001 (en %) | |
Charges d'intérêts |
35 |
53 |
46 |
11 |
31,4 |
Reversements (de TVA) |
865 |
. |
1.108 |
243 |
28,1 |
Prestations maladie, maternité, invalidité |
5.199 |
5 376 |
5.463 |
264 |
5,1 |
Prestations invalidité |
65 |
65 |
64 |
-1 |
- 1,5 |
Allocations de remplacement |
15 |
12 |
15 |
0 |
0,0 |
Prestations d'assurance veuvage |
2 |
2 |
2 |
0 |
0,0 |
Étalement et prise en charge des cotisations des agriculteurs en difficulté |
26 |
26 |
12 |
-14 |
- 53,8 |
Contribution à la modernisation de l'assurance maladie |
8 |
8 |
8 |
0 |
0,0 |
Prestations familiales |
596 |
602 |
590 |
- 6 |
- 1,0 |
Prestations vieillesse |
7.759 |
7.780 |
7.945 |
186 |
2,4 |
Contribution aux assurances sociales des études et des praticiens -et auxiliaires médicaux |
114 |
115 |
114 |
0 |
0,0 |
Total |
14.683 |
ns |
15.368 |
685 |
4,7 |
Total hors restitutions de TVA |
13.807 |
14.039 |
14.259 |
452 |
3,3 |
Toutefois, votre Rapporteur soulignera que, comme pour les exercices précédents, les décalages de dates des principaux arbitrages financiers effectués dans le cadre du PLFSS et dans celui du projet de budget qui lui est antérieur conduisent à une présentation lacunaire de ce dernier. En effet, certaines des dispositions prévues par le PLFSS n'étaient pas arrêtées à la date de fin de préparation du projet de loi de finances (« coup de pouce » sur les pensions, relèvement finalement retenu pour la base mensuelle des allocations familiales).
Les dépenses prévisionnelles de maladie augmenteraient de 264 millions d'euros (1,73 milliard de francs) par rapport à celles de la loi de finances initiale pour 2001 (+5,1%), pour s'établir à 5,46 milliards d'euros (35,8 milliards de francs).
Toutefois, les réalisations révisées de dépenses pour 2001 sont elles-mêmes supérieures de 178 millions d'euros (1,16 milliard de francs), soit de +3,4%, aux prévisions. Dans ces conditions, les prévisions pour 2002 ne dépasseraient les dépenses réalisées en 2001 que de 86 millions d'euros (564 millions de francs), correspondant à une croissance fort modeste de 1,5%.
Ce niveau, une fois encore, s'avère extrêmement volontariste, puisqu'il ne dépasse même pas le taux d'inflation. Les dépenses de maladie devraient donc être stabilisées en francs (ou en euros) constants. Une telle évolution constituerait certes un motif de satisfaction pour le Gouvernement, mais ne paraît malheureusement que difficilement envisageable aujourd'hui. Il est donc plus que probable que les dépenses en 2002 dépasseront, une fois encore, sensiblement les prévisions.
Si l'on fait l'hypothèse que la croissance des dépenses réelles serait identique en 2002 et 2001, ce qui paraît plus que probable en l'absence de toute mise en place de mécanismes de régulation des soins de ville, et en retenant les estimations de dépenses révisées les plus récentes, les dépenses réelles en 2002 s'élèveraient à 5,545 milliards d'euros (), soit 85 millions d'euros (560 millions de francs) de plus que la prévision du projet de budget.
À elle seule, la reconduction du taux de croissance des dépenses de soins de ville en maladie et maternité, tel que constaté en 2001 sur la base des dépenses estimées à la mi-septembre (), conduirait à un niveau de dépenses de 2,6 milliards d'euros (17,1 milliards de francs), supérieur de 120 millions d'euros (787 millions de francs) aux prévisions utilisées pour l'élaboration du projet de budget.
Ces écarts, qui réduisent d'autant la sincérité de la présentation du projet de budget, ne peuvent être durablement acceptés. En effet, si la définition d'objectifs de croissance volontariste peut à la rigueur se comprendre dans le cadre d'un projet de loi de financement de la sécurité sociale qui détermine des objectifs de dépenses, il n'en va pas du tout de même s'agissant d'un budget annexe, dont l'ordonnance organique de 1959 prévoit l'équilibre en présentation et en exécution. En conséquence, les prévisions de dépenses devraient être comprises par le Gouvernement non pas comme des objectifs, mais bien comme des estimations réalistes.
Les raisons pour lesquelles les prévisions s'avèrent régulièrement inférieures, pour des montants significatifs, aux réalisations, tiennent aux mécanismes de calcul retenus. En effet, ceux-ci tendent systématiquement à prolonger, voire amplifier dans le temps les tendances à la baisse de certaines dépenses, alors qu'ils ne prennent en compte les hausses qu'au maximum pour le montant constaté.
L'analyse des prévisions concernant les dépenses de soins de ville est éclairante à cet égard. Ceux-ci, après une croissance initialement prévue de +2,3% en 2001, ne croîtraient, selon les hypothèses retenues, plus que de +0,8% en 2002. Les honoraires continueraient à diminuer, à un rythme de -1,7% en volume, avec une baisse plus marquée pour les consultations et visites de généralistes (- 2,9%), que pour les consultations de spécialistes et les actes techniques. Les honoraires dentaires seraient en recul de 3,1% dans le prolongement de la tendance constatée. Inversement, les dépenses de prescriptions ne croîtraient que de 1,7 %, contre + 3,2% en 2001. S'agissant des auxiliaires médicaux la prévision, très « prudente », retient une stabilisation des dépenses d'infirmières après la forte augmentation de niveau constatée en 2000. Pour les médicaments, la même « modération » de l'évolution traduirait l'effet des mesures de baisse de prix.
Pour les dépenses dans les établissements sanitaires hors budget global, pour l'essentiel les cliniques privées, la prévision retient une baisse de - 0,8% contre - 0,1% l'année précédente.
Seules les prévisions de dépenses en établissements médico-sociaux, tablent sur une augmentation significative, de 5%, des dépenses de médicalisation et soins à domicile pour les personnes âgées hors régularisations.
Au titre des dépenses supplémentaires non prévues, votre Rapporteur spécial ajoutera que le Gouvernement pourrait être amené à relever certaines prestations, notamment les rentes d'invalidité servies par le régime maladie, ainsi que l'absence d'indemnités journalières. En effet, la disparité résultant du triplement des rentes au titre des accidents du travail et de la mise en place d'indemnités journalières, prévues dans le cadre de la réforme en cours de l'AAEXA, pourraient donner lieu à des transferts de dépenses indues entre les deux régimes, et souligne la faiblesse actuelle de la prestation d'invalidité de l'AMEXA.
Les dépenses de vieillesse augmenteraient en 2002 de 186 millions d'euros (1,22 milliard de francs) par rapport à la loi de finances initiale pour 2001, soit une augmentation de 2,4%. Celle-ci est ramenée à 1,8 % par rapport aux nouvelles prévisions de dépenses pour 2001. Cette croissance, à l'instar des quatre exercices précédents est la résultante du relèvement marqué des retraites contributives, et d'une diminution sensible, mais d'un niveau évidemment moindre, des dépenses au titre du FSV.
Le montant de l'ensemble de ces dépenses se fixerait ainsi à 7,945 milliards d'euros (52,1 milliards de francs), ce poste, hors bonifications pour enfants versées directement par le FSV à la Mutualité Sociale Agricole, demeurant le plus important du BAPSA, dont il représente 51 %. Compte tenu, toutefois, de la forte croissance des dépenses de maladie, cette proportion tend chaque année à se réduire.
Bien qu'atténuée par la poursuite tendancielle de la baisse, hors extension en année pleine de la mesure nouvelle introduite en 2001 et hors mesure nouvelle 2002, du nombre des bénéficiaires de la retraite forfaitaire (- 3,2 %), qui se traduit par une diminution des prévisions de dépenses de 192 millions d'euros (1,26 milliard de francs), la hausse des retraites contributives s'explique par trois facteurs principaux :
- la revalorisation des pensions (calculée dans le projet sur la base d'un relèvement de 1,9 %) avec décalage de trois mois en début d'année, pour un coût de 89 millions d'euros (584 millions de francs) ;
- l'extension en année pleine de la mesure de revalorisation des retraites les plus faibles, prise en 2001, pour un coût supplémentaire de 54,7 millions d'euros (359 millions de francs). Chaque mesure nouvelle de revalorisation ne porte en effet que sur trois trimestres la première année, les majorations ne s'appliquant pas aux pensions versées, à terme échu, au premier trimestre. Cette mesure avait eu pour effet de porter le niveau minimum des pensions des retraités ayant cotisé 37,5 ans dans le régime à :
· 3 500 F ( de 2002) par mois pour les chefs d'exploitation,
· 3 245 F par mois pour les veufs et les veuves,
· 2 800 F par mois pour les conjoints et aides familiaux ;
- le franchissement de la dernière étape en 2002 dans la réalisation du plan pluriannuel de revalorisation des retraites agricoles. L'article 57 du projet de loi de finances pour 2002 prévoit la mise en _uvre de la cinquième et dernière étape du programme de revalorisation des retraites modestes, au niveau du minimum vieillesse.
Les pensions des chefs d'exploitation seront en conséquence relevées de 220 F par mois (contre 150 F en 2001), celles des veufs et veuves de 475 F par mois et celles des conjoints et des aides familiaux de 155 F par mois (contre, respectivement, 312 F et 11 F en 2001). Ainsi, les minima précités seront portés au niveau de ceux du minimum vieillesse, soit :
- 3 720 F par mois pour les chefs d'exploitation et les veufs et veuves,
- et 2 955 F par mois pour les conjoints et aides familiaux.
875 000 personnes devraient être concernées par cette nouvelle mesure en 2002. Le coût de cette mesure favorable et attendue s'élève à 245 millions d'euros (1,6 milliard de francs) pour le projet de budget 2002, et, à compter de 2003, à 327 millions d'euros (2,15 milliards de francs) en année pleine.
LES MESURES DE REVALORISATION POUR 2002 Calculées sur la base d'une augmentation des pensions de 1,2% en 2002 | |||||||||||
(en francs) |
(en milliers) |
(en millions d'euros) | |||||||||
Pension initiale |
Pension finale |
Gain annuel |
Effectif bénéfi-ciaire |
Coût brut en année pleine |
Coût brut en 2002 (avec décalage) |
Économie sur le FSV |
Coût net en 2002 | ||||
2001 |
2002 |
2001 |
2002 |
2001 |
2002 | ||||||
Chefs d'exploitation |
41.248 |
41.988 |
43.854 |
44.463 |
2.606 |
2.655 |
314 |
96,7 |
72,3 |
8,2 |
64,0 |
Aides familiaux |
33.278 |
33.602 |
34.816 |
35.443 |
1.538 |
1.841(*) |
83 |
8,1 |
5,9 |
0,8 |
5,2 |
Conjoints |
33.278 |
33.602 |
34.816 |
35.443 |
1.538 |
1.841(*) |
284 |
58,4 |
43,6 |
3,8 |
39,8 |
Veuves |
38.506 |
38.944 |
43.854 |
44.643 |
5.348 |
5.699(*) |
194 |
164,3 |
123,3 |
16,6 |
106,7 |
Total |
875 |
321,7 |
240,9 |
29,4 |
215,7 |
(*) inclut l'indexation 2002/2001 des revalorisations forfaitaires attribuées entre 1994 et 2001
Au total, le coût brut, apparent, des mesures successives prises depuis 1994 s'élèvera, en 2002, à 1,75 milliards d'euros (11,5 milliards de francs). Mais, en réalité, les dépenses nettes mises à la charge du BAPSA sont sensiblement inférieures à ce montant, puisqu'elles ne représenteront que 1,44 milliards d'euros (9,46 milliards de francs), compte tenu de l'économie de 300 millions d'euros (2 milliards de francs) réalisées, dans le même temps, sur le FSV.
COÛT DES MESURES ANTÉRIEURES DE REVALORISATION |
||||||||||||
(en millions de francs) | ||||||||||||
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
2002 |
||||||||
Coût brut |
Coût net |
Coût brut |
Coût net |
Coût brut |
Coût net |
Coût brut |
Coût net |
Coût brut |
Coût net | |||
Mesure « petites retraites » de 1994 |
461 |
323 |
445 |
312 |
431 |
302 |
420 |
300 |
410 |
295 | ||
Mesure « veuves » de la loi de modernisation 1995 |
2.619 |
1.929 |
2.668 |
1.991 |
2.700 |
2.092 |
2.825 |
2.200 |
2.900 |
2.300 | ||
Loi de finances pour 1997 |
602 |
486 |
760 |
614 |
820 |
670 |
780 |
638 |
750 |
615 | ||
Loi de finances pour 1998 |
760 |
680 |
1.022 |
858 |
1.022 |
859 |
1.003 |
845 |
973 |
820 | ||
Loi de finances pour 1999 et loi d'orientation |
1.331 |
1.119 |
1.778 |
1.409 |
1.750 |
1.431 |
1.756 |
1.445 | ||||
Loi de finances pour 2000 |
1.200 |
1.050 |
1.550 |
1.270 |
1.500 |
1.233 | ||||||
Loi de finances pour 2001 |
1.241 |
1.106 |
1.600 |
1.337 | ||||||||
Loi de finances pour 2002 |
1.608 |
1.415 | ||||||||||
Total |
4.442 |
3.418 |
6.226 |
4.894 |
6.751 |
5.183 |
9.569 |
7.790 |
11.497 |
9.460 |
b) Des dépenses au titre du FSV proches de l'étiage
On observe corrélativement un recul prononcé des versements effectués au titre du FSV en raison de l'amélioration des retraites les plus faibles. De 2001 à 2002, le FSV recule ainsi en volume de près de 35% pour atteindre, en métropole, après déduction des économies de 28,8 millions d'euros relatives à la nouvelle mesure précitée (190 millions de francs), 140,4 millions d'euros (921 millions de francs) et 105,8 millions d'euros (694 millions de francs) après recours sur succession, soit une réduction en valeur de 82 % sur l'ensemble de la période 1996-2002.
On observera en conséquence que le coût net de la mesure de revalorisation des retraites, à l'instar de l'an passé, ne s'élève donc qu'à 215 millions d'euros (1,41 milliard de francs), et non 245 (1,61 milliard de francs). Par ailleurs, votre Rapporteur soulignera de nouveau que l'effort budgétaire apparent n'est pas aussi important que ces chiffres le laissent penser. En effet, cet effort est en grande partie financé par le « recyclage » des diminutions de dépenses vieillesse dégagées par la décroissance régulière des effectifs des exploitants agricoles retraités.
Le relèvement des pensions retenu pour le projet de budget était initialement de 1,8%, à comparer au taux d'inflation prévisionnelle pour 2002 de 1,5%. En réalité, l'article 17 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 le fixe à 2,2%. Les dépenses supplémentaires devraient s'élever à 21 millions d'euros (138 millions de francs), au titre des retraites contributives, et de 1 million d'euros (8 millions de francs) à celui du FSV.
3.- Les dépenses de la branche famille : la poursuite de la diminution tendancielle
Les dépenses de famille sont entièrement prises en charge par la CNAF, le régime Famille étant intégré. L'évolution des dépenses reflète un double mouvement :
- la diminution tendancielle du nombre d'enfants d'exploitants,
- la mise en _uvre de mesures nouvelles décidées dans le cadre de la conférence Famille de juin 2001. A cet égard, votre Rapporteur ne peut que souligner la minceur de l'incidence de ces mesures présentées comme de réelles avancées sociales, voire « sociétales ». Ainsi, le projet de BAPSA prévoit-il un supplément, pour les diverses mesures prévues par le Gouvernement en matière de logement, de 1,5 million d'euros (10 millions de francs), et pour le « congé paternité », de 2 millions d'euros (13 millions de francs). Ces mesures nouvelles représenteraient ainsi 0,6% des dépenses de famille. Encore votre Rapporteur estime-t-il ce montant calculé avec des hypothèses larges, notamment pour ce qui concerne le congé de paternité. Pour celui-ci, la cible a été définie par référence à celle des bénéficiaires de l'allocation de remplacement, soit 2.000 personnes.
Globalement, les prévisions de dépenses diminuent de 6 millions d'euros (40 millions de francs) par rapport à la loi de finance initiale pour 2001, soit -1%, et s'établissent à 590 millions d'euros (3,87 milliards de francs). Ces prévisions ne tiennent cependant compte que d'un relèvement de 2,1% de la BMAF (base mensuelle des allocations familiales), et non de 2,2%, comme il est prévu par le projet de loi de financement de la sécurité sociale d'ores et déjà adopté par l'Assemblée nationale en première lecture.
Les crédits de reports et de prise en charge des cotisations étaient initialement prévus pour faciliter la réforme de l'assiette des cotisations sociales, intervenue en 1994, avec le passage des revenus cadastraux aux revenus professionnels. Leur nécessité s'est, en réalité, avérée durable.
La discussion parlementaire a conduit, à l'automne 2000, à suspendre le mouvement tendanciel de réduction des crédits de reports et de prise en charge de cotisations pour les agriculteurs en difficulté, et, inversement, à accroître son montant de 80 millions de francs prévus par le projet de loi de finances pour 2001, à 170 millions de francs en loi de finances initiale pour 2001. Les 90 millions de francs supplémentaires (13,7 millions d'euros) ont été ouverts au profit spécifique des exploitants touchés par la crise bovine, spécialisés à plus de 30% sur ce secteur, pour lesquels les crédits permettront de reporter tout ou partie des cotisations dues jusqu'en 2004.
Le montant prévu au titre de 2002 revient au niveau initialement prévu par la loi de finances pour 2001, soit 12,2 millions d'euros (80 millions de francs). Votre Rapporteur soulignera que ce montant est inférieur à celui, de 100 millions de francs, qui, lors de la période complémentaire de la gestion 2000, et selon une procédure peu respectueuse de l'information du Parlement, a été ouvert par le Gouvernement pour effacer une partie de la dette sociale des exploitants corses au titre de leurs cotisations personnelles. Outre la disproportion des montants, il convient, à cet égard, de signaler la différence de principes : l'effacement de la dette se substitue en Corse au principe du simple report de cotisations, qui prévalait jusqu'à présent pour le reste de la France.
Par ailleurs, la MSA a décidé pour sa part, en juin 2001, de mobiliser une partie des réserves excédentaires des caisses pour financer la charge financière des reports de cotisations sociales, à hauteur d'environ 35 millions de francs.
Néanmoins, il est plus que vraisemblable que, compte tenu du caractère durable de la crise agricole actuelle, notamment pour les éleveurs bovins, la discussion parlementaire conduira à un nouveau relèvement des crédits, qui, en première hypothèse, pourrait être égal à celui de l'an passé (12 millions d'euros, soit 80 millions de francs).
Les charges d'intérêts sont inscrites sur un chapitre évaluatif (), et constituent le remboursement par l'État des charges d'intérêt supportées directement par la CCMSA. En effet, le régime supporte, notamment en début d'année, un décalage massif entre les prestations dont l'avance doit être faite aux caisses pour leur permettre de procéder au paiement (notamment les 13 milliards de francs de charge des pensions en janvier), et les encaissements de recettes de transfert ou de fiscalité affectée, dont les dates de recouvrement ne coïncident pas nécessairement avec celles de versement des prestations.
Le BAPSA finance donc le remboursement des frais financiers supportés par la CCMSA, autorisée à emprunter pour le compte du budget annexe. Ce mécanisme ne prévoyant pas de remboursement immédiat de ces frais à la CCMSA, il peut exister un décalage temporel entre le paiement des intérêts par la CCMSA, et le remboursement par le budget de l'État. Par ailleurs, s'agissant de crédits évaluatifs pour le BAPSA, la rigueur des prévisions est souvent adoucie dans les prévisions budgétaires, les dépassements étant simplement entérinés en loi de règlement.
Ainsi s'explique le fait que le montant inscrit en loi de finances est régulièrement sous-évalué. En 2000, les montants inscrits s'élevaient à 230 millions de francs, pour une réalisation de 397 millions de francs, soit près du double. Ce montant n'a pas été révisé en collectif budgétaire à l'automne 2000, alors que, ainsi que l'indiquait votre Rapporteur l'an passé dans son précédent rapport écrit, le dépassement était connu dès la fin du mois de septembre 2000.
Pour 2001, la loi de finances a reconduit le montant de 230 millions de francs (35,1 millions d'euros), qui devrait également se révéler sensiblement dépassé, pour s'établir, selon les estimations de fin août 2001, à 53,4 millions d'euros (350 millions de francs). Ce dépassement devrait, si le Gouvernement respectait l'orthodoxie budgétaire, donner lieu à inscription d'une dépense supplémentaire en collectif de fin d'année, et pas à une simple constatation du dépassement en loi de règlement.
Le projet de budget pour 2002 prévoit pour sa part un montant de 45,7 millions d'euros (300 millions de francs), dont tout laisse à penser qu'il est lui aussi sous-estimé, si on le compare aux dépenses révisées pour 2001, et , a fortiori, aux dépenses constatées en 2000. Ainsi, en 2001, l'encours moyen sur les neuf premiers mois de l'année (9,757 milliards de francs) est supérieur de 4,7% à l'encours moyen de 2000 (9,313 milliards de francs). Le taux d'intérêt de court terme constaté en moyenne en 2001 pour le financement de cet encours est lui-même supérieur de 10,8% à celui de 2000.
Dans ces conditions, et compte tenu, d'une part, de la réduction très marquée de la subvention budgétaire prévue en 2002, - seule ressource mobilisable avec une certaine latitude dans le temps dès le début de l'année pour réduire le besoin de financement du régime-, et de l'étiage atteint par le fonds de roulement (), il n'est pas imaginable que les frais d'intérêt diminuent en 2002 par rapport à 2001. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 entérine d'ailleurs la croissance du besoin de financement, en proposant de relever de 13,5 à 14,5 milliards de francs le plafond d'endettement autorisé, pour passer les échéances des deux premiers mois.
Aussi votre Rapporteur s'estime-t-il fondé à considérer que la prévision budgétaire est sous-estimée de 50 à 100 millions de francs, -soit environ 10 millions d'euros-, en retenant comme hypothèse le résultat des dernières prévisions révisées pour 2001, elles-mêmes sans doute encore sous-estimées.
Le budget général finance le BAPSA par deux voies :
- d'une part, il rembourse à celui-ci des prestations gérées par le régime agricole (allocation aux adultes handicapés et minimum invalidité), le déclin de 4 à 5% par an de ces lignes, dont le total s'élèvera en 2001 à 496 millions de francs (soit une baisse de 22 millions de francs), suivant celui des effectifs concernés ;
- d'autre part, il verse une subvention d'équilibre calculée ex ante, et parfois modifiée ex post, en fonction des réalisations de dépenses et de recettes. Le budget pour 2001 a rompu avec la précédente période de baisse sensible, engagée en 1998, avec une hausse des deux-tiers par rapport au projet de budget pour 2000, pour compenser la diminution des transferts attendus au titre de la compensation démographique.
ÉVOLUTION DE LA SUBVENTION D'ÉQUILIBRE EX ANTE ET EX POST DE L'ÉTAT
(en millions d'euros)
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
2002 |
Ecart 2002/2001 | |
Subvention d'équilibre votée en LFI |
1.110 |
1.190 |
1.205 |
539 |
824 |
271 |
-67% |
Subvention versée compte tenu de modifications en LFR |
1.015 |
1.064 |
681 |
869 |
nc |
ns |
ns |
Résultat d'exécution prélevé sur le fonds de roulement |
80 |
6 |
134 |
80 |
nc |
- |
- |
Source : Ministère de l'Agriculture et de la Pêche, compte général de l'Administration des Finances
Il faut par ailleurs signaler que la subvention de 2000, relativement faible (539 millions d'euros) dans la loi de finances initiale, a elle-même dû être complétée en loi de finances rectificative, pour atteindre 869 millions d'euros (5,7 milliards de francs). Il a néanmoins été nécessaire de prélever 80 millions d'euros (522 millions de francs) supplémentaires sur le fonds de roulement.
Pour 2002, le déficit prévisionnel du budget annexe a été arrêté à la somme de 271 millions d'euros (1,78 milliard de francs). Il faut cependant souligner que, compte tenu de l'étiage atteint par le fonds de roulement, auquel il peut difficilement être maintenant fait appel pour financer un déficit supplémentaire en exécution, tout dérapage dans l'exécution du budget nécessitera, en loi de finances rectificative au moins, une augmentation de la subvention budgétaire, ou un accroissement du produit d'une des taxes affectées.
Globalement, il ressort des observations précédentes que le déficit, avant subvention, est une nouvelle fois sous-estimé, même si l'écart est moindre que par le passé. Cet écart vraisemblable peut être estimé à 190 millions d'euros (1,25 milliard de francs), en raison d'une surestimation des recettes de TVA et de cotisations de l'ordre de 60 millions d'euros (400 millions de francs), et d'une sous-estimation des dépenses de maladie, de frais financiers, et de dépenses de vieillesse de l'ordre de 115 millions d'euros (soit environ 755 millions de francs), auxquels la discussion parlementaire pourrait encore rajouter 12 millions d'euros (80 millions de francs) au titre des crédits de reports de cotisations. Cet écart est du même ordre que celui de 1 milliard de francs au minimum retenu par les services de la CCMSA pour la présentation du projet de BAPSA à son Conseil d'administration du 25 octobre 2001.
Encore convient-il de souligner que les analyses développées par votre rapporteur sont fondées sur les prévisions de dépenses révisées de la mi-septembre. Mais l'exécution de l'exercice 2000 montre clairement que ces dépenses sont elles-mêmes sensiblement inférieures à celles constatées en loi de règlement. Ainsi, en 2000, le collectif budgétaire d'automne a-t-il proposé un relèvement des recettes, de subvention et de C3S, d'un total de 2,561 milliards de francs, alors que l'excédent de dépenses effectivement à couvrir en 2000 par rapport aux prévision de la loi de finances initiale se sont élevées à 3,09 milliards de francs. L'écart a été financé pour une petite partie par le supplément de recettes constaté sur la taxe sur les tabacs, et pour le solde (523 millions de francs), par un prélèvement sur le fonds de roulement. Cette méthode discrète n'est aujourd'hui plus possible, compte tenu du montant très faible de ce dernier.
Les calculs présentés ici constituent donc, a priori, le « dérapage » minimal prévisible de l'exécution du BAPSA.
CONSOLIDATION DES INSUFFISANCES DE PRÉVISIONS
(en millions d'euros)
Sous-estimation des dépenses |
Surestimation des recettes | |
Cotisations techniques (correction par une perte d'assiette supplémentaire de 1%) |
17 | |
TVA (correction tenant compte d'une croissance inférieure de 1% à celle prévue par le projet de budget) |
45 | |
Frais financiers |
10 |
|
Dépenses de maladie |
85 |
|
« Coup de pouce » aux retraites prévu en PLFSS |
21 |
|
Supplément de crédits de reports des cotisations |
12 |
|
Total |
128 |
62 |
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III.- LE BAPSA EST VOUÉ À DISPARAÎTRE
Votre Rapporteur plaide depuis plusieurs années pour la suppression du BAPSA, pour de multiples raisons :
- celui-ci n'a jamais répondu à la définition en vigueur pour les budgets annexes, puisque l'article 20 de l'ordonnance organique du 2 janvier 1959 encore en vigueur dispose que les budgets annexes doivent « produire des biens ou rendre des services donnant lieu à paiement de prix », ce qui n'est manifestement pas le cas du BAPSA, comme le relève régulièrement le rapport de la Cour des comptes sur l'exécution de la loi de finances ;
- le BAPSA ne décrit qu'une partie du régime social des agriculteurs, dont il donne une image partielle et tronquée. Il exclut naturellement en premier lieu les salariés agricoles. Il exclut également le régime des accidents du travail des exploitants, qu'il s'agisse du dispositif encore aujourd'hui en vigueur, ou de celui en cours de discussion au Parlement. Il exclut également les dépenses de gestion, et d'action sanitaire et sociale en faveur des exploitants. Il exclura enfin, dans l'hypothèse où ce dernier verrait le jour, le régime de retraite complémentaire obligatoire, pourtant destiné à être équilibré par l'État;
-le régime social agricole pourrait être examiné par le Parlement comme les autres régimes sociaux des non-salariés, dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale. La conclusion des arbitrages du PLFSS systématiquement ultérieure à celle des arbitrages relatifs au projet de budget de l'État conduit, chaque année, à des lacunes et des absences, en dépenses et/ou en recettes dans le cadre du BAPSA. Ce calendrier des décisions plaide pour une discussion parlementaire rationnelle, c'est-à-dire dans le cadre le plus complet, i.e. le projet de loi de financement de la sécurité sociale et lui seul ;
- enfin, sinon surtout, l'existence d'un budget annexe ne constitue pas le seul moyen de garantir l'équilibre du régime, dont les perspectives démographiques sont effectivement particulièrement défavorables. Les autres régimes sociaux de non-salariés sont équilibrés par l'affectation d'une partie du produit de la C3S à concurrence de leur déficit comptable. La réintroduction, par l'article 38 de la loi de finances pour 2001, du BAPSA parmi les bénéficiaires permanents de la C3S montre que cette modalité de financement pourrait également garantir l'équilibre du régime des exploitants agricoles après la suppression du BAPSA.
Pour l'avenir, la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances n'a pas supprimé la possibilité d'établir des budgets annexes par dérogation au principe d'unité et d'universalité du budget de l'État. Néanmoins, la rédaction de son article 18 rend plus restrictives que par le passé les possibilités de recourir à ce type de mécanisme, en les limitant aux « seules opérations des services de l'État non dotés de la personnalité morale résultant de leur activité de production de biens ou de prestations de services donnant lieu au paiement de redevances, lorsqu'elles sont effectuées à titre principal par lesdits services », rédaction qui, manifestement, exclut le cas du BAPSA. Par ailleurs, l'idée du maintien des budgets annexes existants a été abandonnée au cours de la navette parlementaire.
L'adoption de la loi organique conduira donc, au plus tard à l'horizon du projet de budget pour 2006, à reposer expressément la question de l'existence du BAPSA, et il paraît difficilement envisageable de prévoir de nouveau l'existence d'un budget annexe, en contradiction encore plus flagrante qu'aujourd'hui avec les règles budgétaires organiques. Le BAPSA est donc appelé à disparaître, au plus tard d'ici le premier exercice d'entrée en vigueur des dispositions budgétaires de la nouvelle loi organique, c'est-à-dire dès 2006.
Votre Rapporteur soulignera à cet égard que la suppression du BAPSA n'exige pas de modifications institutionnelles particulières. En effet, la Caisse centrale de MSA, dont la mission de gestion d'un service public ne fait aucun doute, peut parfaitement être affectataire directe de taxes et d'impositions de toute nature, contrairement à ce qui est parfois dit trop hâtivement, que ce soit sous l'empire de l'ordonnance organique de 1959 et de la jurisprudence constitutionnelle actuelle, ou de la loi organique du 1er août 2001.
La jurisprudence actuelle du Conseil constitutionnel (décision n°DC 98-405 du 28 décembre 1998) est à cet égard parfaitement claire : « aucun principe fondamental reconnu par les lois de la République n'interdit que le produit d'une imposition soit attribué à un établissement public ou à une personne privée chargée d'une mission de service public ».
Quant à la loi organique du 1er août 2001, son article 2, en vigueur à compter du 1er janvier 2005, prévoit que les «impositions de toute nature ne peuvent être directement affectées à un tiers qu'à raison des missions de service public confiées à lui et sous les réserves prévues par les articles 34,36 et 51 ». Celles-ci n'ont aucune pour effet d'exclure les personnes morales de droit privé, mais visent les règles qui s'appliquent spécifiquement aux lois de finances. Aucune disposition n'exclut les personnes morales de droit privé de l'affectation.
Il ne sera donc nul besoin, du moins pour ce seul motif juridique, de créer un établissement public national, que ce soit sur le modèle des actuels fonds de financement de la sécurité sociale (), ou sur celui des organes de tête du régime général ().
Dans la version du projet de loi de finances pour 2002 soumise à l'Assemblée nationale en première lecture, le BAPSA exclut le futur régime des accidents du travail des exploitants, dont la fin de la procédure de discussion parlementaire approche, et qui est destiné à entrer en vigueur dès le 1er avril 2002.
Or rien ne justifie une telle exclusion, puisqu'il s'agit d'un nouveau régime que le Gouvernement présente comme un régime classique de sécurité sociale, -au surplus construit de façon à ce que les cotisations équilibrent les dépenses-, et que la commission des affaires sociales se propose de l'intégrer aux agrégats de recettes et de dépenses du PLFSS pour 2002.
De surcroît, l'absence d'inscription au BAPSA des recettes et des dépenses correspondantes aura pour effet d'empêcher tout contrôle parlementaire sur ce nouveau régime obligatoire de base. En effet, le rapporteur spécial de la commission des finances n'a compétence, stricto sensu, que sur le BAPSA. Quant au rapporteur au fond de la commission des affaires sociales sur le PLFSS, il n'a pas de pouvoir de contrôle sur pièces et sur place sur la MSA, ni a fortiori sur les assureurs gérant le risque accidents du travail, car son champ de compétence, déterminé par l'article 2 de la loi de financement pour 1997, se limite aux administrations de l'État et aux caisses de sécurité sociale ayant le statut d'établissement public, ce qui n'est le cas ni de la Caisse centrale de MSA, ni d'aucune des caisses départementales ou pluri-départementales.
Dans l'attente de la disparition du budget annexe, il conviendrait donc, en tout état de cause, que celui-ci soit aussi complet et représentatif que possible, et que, en recettes comme en dépenses, il intègre les données prévisionnelles pour 2002 de ce nouveau régime.
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IV.- LE RÉGIME SOCIAL DES EXPLOITANTS AGRICOLES APPELLE DES RÉFORMES NÉCÉSSAIRES
Au-delà de l'appréciation du projet de budget au regard des dispositions en vigueur, votre Rapporteur souhaite souligner combien le régime social des exploitants agricoles se trouve aujourd'hui à un tournant de son histoire, et combien il appelle de réformes urgentes, qu'il serait préférable d'organiser que de subir inéluctablement.
Quelles difficultés résulteraient du choix de centraliser la trésorerie des caisses de MSA au sein de la Caisse centrale ? Quel serait le bilan coûts-avantages d'une centralisation de la trésorerie des caisses ? Telles sont les questions naturelles qu'appelle la situation actuelle, dans laquelle chaque caisse de MSA conserve la propriété et la gestion de ses réserves financières et de sa trésorerie, alors que le régime, par l'intermédiaire de la CCMSA, doit lui-même emprunter tout au long de l'année pour financer ses dépenses. Ainsi, en 2000, les caisses de MSA ont enregistré 313 millions de francs de produits financiers, alors que le BAPSA a supporté, dans le même temps, 397 millions de francs de frais financiers. Certaines caisses disposent en effet de réserves financières non négligeables, eu égard à leur taille.
Si les caisses conservent non seulement la propriété, mais même la gestion de leur trésorerie, elles bénéficient en revanche de la garantie de disposer mensuellement de la trésorerie qui leur est nécessaire pour assurer le paiement des prestations sociales légales, en fonction, d'une part, des prévisions de cotisations techniques à émettre et des prestations à payer, et, d'autre part, des réalisations d'émissions de cotisations et de paiement de prestations constatés le mois précédent.
Il s'agit là, de manière évidente, d'une organisation totalement opposée à celle qui prévaut habituellement en matière de gestion de trésorerie des groupes. Celle-ci est en effet fondée sur le principe simple selon lequel le taux prêteur est systématiquement inférieur au taux emprunteur, compte tenu de la marge d'intermédiation des prêteurs. Dans ces conditions, il est évidemment préférable d'utiliser les ressources de trésorerie disponibles dans les filiales excédentaires pour financer les besoins des filiales, ou de la holding déficitaire(s). Cette solution ne retire pas aux filiales excédentaires le bénéfice du produit du placement, au sein du groupe, de ses disponibilités.
Au-delà, on pourrait même penser qu'il n'est pas nécessairement rationnel, pour garantir la recherche des efforts nécessaires dans la rigueur de gestion, de laisser à chaque structure secondaire le bénéfice du produit des placements de ses réserves, en particulier si celles-ci sont importantes mais ne résultent pas véritablement d'efforts passés dont elles constitueraient la rémunération. Une caisse de MSA disposant de réserves élevées, en raison d'un riche passé lointain, mais connaissant un dépérissement marqué de son agriculture, pourrait ainsi être dissuadée de faire les économies de gestion qui s'imposent.
En réponse à ces questions, posées par votre Rapporteur spécial lors de l'examen à l'Assemblée nationale du projet de BAPSA pour 2001, le 8 novembre 2000 , le ministre de tutelle s'était engagé à procéder à une «expertise complémentaire et à une concertation approfondie sur ce sujet », en saisissant la Caisse centrale de cette proposition, et en lui demandant une expertise. Cette promesse a conduit le ministre de l'Agriculture et de la pêche, la ministre de l'Emploi et de la solidarité, ainsi que le ministre de l'Economie, des finances et de l'industrie, à diligenter une mission conjointe de l'Inspection générale de l'agriculture, de l'Inspection générale des affaires sociales et de l'Inspection générale des finances, le 13 juillet 2001 -soit près de 9 neuf mois après la discussion parlementaire, pour une remise des conclusions le 30 septembre 2001 au plus tard.
Votre Rapporteur spécial ne peut que regretter que les conclusions de cette mission ne soient malheureusement pas disponibles avant la discussion du projet de BAPSA pour 2002 au Parlement, compte tenu du retard mis par l'Inspection générale des finances à désigner un de ses membres dans les temps voulus. Il soulignera également que l'objet de la mission dépasse amplement le cadre de sa propre proposition, puisque celui-ci pourrait également s'étendre aux modalités plus générales de financement de la gestion des caisses.
Par ailleurs, votre Rapporteur soulignera que, à la suite d'une étude de la CCMSA menée au début 2001 par le groupe de travail « Trésorerie » de la Direction déléguée au financement, la MSA a décidé, en assemblée générale en juin dernier, la mise en commun d'une partie des réserves excédentaires des caisses, pour financer la charge financière des reports de cotisations des éleveurs bovins en difficulté. Cette orientation conforte, d'une certaine manière, la proposition de votre Rapporteur, tout en s'en éloignant quelque peu. Contrairement à cette proposition, limitée à la centralisation de la gestion des disponibilités des caisses, contre une rémunération équivalente à celle du marché, de façon à ne pas léser les caisses excédentaires, le dispositif adopté par la MSA tend en effet, pour sa part, à mobiliser les réserves excédentaires, contre une rémunération inférieure à celle du marché, pour financer une action collective par une mutualisation plus ou moins consentie des ressources au sein d'un Fonds de solidarité. Cette proposition, issue du constat, affirmé plus que prouvé, que la centralisation de la trésorerie constituerait un moyen inadapté au régime agricole, constitue l'alternative que la MSA a adopté avant le lancement de la mission d'inspection commune.
L'Assemblée nationale, avec la recommandation de sagesse de la ministre de l'Emploi et de la solidarité avait adopté en première lecture du projet de loi de modernisation sociale une réforme radicale de la composition des conseils d'administration des caisses de MSA, avec l'objectif d'une « parité » entre, d'une part, les représentants des premier et troisième collèges (exploitants indépendants et employeurs), et, d'autre part, ceux du deuxième collège (salariés).
Cette première décision, dont la précipitation témoignait d'un évident manque de réflexion de la part du Gouvernement, a ensuite été jugée suffisamment inadaptée aux particularités du régime social agricole, voire dangereuse pour sa pérennité par le risque d'éclatement du régime entre salariés et non-salariés qu'elle recelait, pour que l'Assemblée, en deuxième lecture, adopte la position beaucoup plus sage proposée par le Sénat. Compte tenu de cette position, les caisses devraient, à compter de la promulgation de la loi considérée, compter toutes, -départementales, pluri-départementales et centrale- le même nombre d'administrateurs des différents collèges, à raison de neuf pour le premier, douze pour le second, et six pour le troisième. Ainsi, la représentation des salariés serait-elle remise au niveau de l'évolution démographique de ce collège, sans aller au-delà et remettre en cause les fondements mêmes du régime social agricole.
Compte tenu de la décroissance tendancielle de 2 à 3% par an de la population couverte par la MSA, le rapprochement des caisses de MSA, dépassant le stade très limité de la simple mise en commun de moyens ou d'association sans contenu concret, s'imposera à un terme plus ou moins rapproché. Il conviendrait, si la profession souhaite éviter de se voir imposer ce type d'évolution, de le gérer et de le préparer dans le temps.
Mais aujourd'hui, ce processus, et cette prise de conscience, apparaissent encore trop lents. En six ans, depuis 1995, le nombre de caisses n'a été abaissé qu'à 78. Sur la période récente, ne peuvent être citées que les fusions des deux caisses d'Alsace, et des trois caisses des Alpes-du-Nord. Les autres rapprochements, plus nombreux mais parfois dilatoires, ne prennent la forme que de création de fédérations.
Le premier obstacle au rapprochement des caisses départementales, pourtant inéluctable au regard de l'évolution de l'effectif du régime social agricole, est celui des mentalités. Ce régime est le dernier dont les dirigeants soient effectivement élus à intervalle régulier, ce qui fait sa force. En contrepartie, il demeure un attachement souvent très marqué de ces mêmes élus à l'indépendance de la caisse qu'ils représentent, à leurs moyens, à leur proximité. Celui-ci explique que des départements dont les perspectives démographiques ne sont pas particulièrement favorables, comme l'Allier ou, a fortiori l'Ariège ou la Corse, puissent encore se montrer pour le moins réticents à toute perspective de rapprochement, pourtant inéluctables.
Inversement, certaines fusions réalisées montrent à la fois les économies qu'elles permettent, tout en soulignant qu'elles ne se traduisent pas nécessairement par une perte de service de proximité. L'exemple du Tarn-Aveyron est à cet égard éclairant. Ainsi, la fusion réalisée il y a six ans a permis, pour ces deux départements :
- d'une part, d'homogénéiser les traitements, de réduire le nombre de services administratifs exerçeant la même activité (comptabilité, informatique), de supprimer des postes (3) de direction budgétairement coûteux et devenus redondants ;
- d'autre part, de redéployer les effectifs ainsi libérés vers des missions jusqu'alors non correctement remplies, notamment le recouvrement dans le Tarn, et de créer ou développer cinq antennes dans les deux départements.
En revanche, la poursuite de ce processus apparaît difficile pour cette même caisse. En effet, une étape supplémentaire vers le rapprochement ne pourrait aujourd'hui guère viser que la Lozère, avec laquelle des discussions avaient originellement été entreprises. Mais l'article L.723-6 du code rural, issu de la loi d'orientation agricole du 9 juillet 1999, interdit tout processus de fusion qui dépasserait le cadre géographique des régions administratives, par le souci avancé de la cohérence avec le champs de compétence territorial des unions régionales des caisses d'assurance maladie et les agences régionales de l'hospitalisation.
Votre Rapporteur soulignera malheureusement à cet égard que la volonté politique n'a encore que trop peu soutenu ce type d'efforts, exigeant pourtant de la part des dirigeants une conviction bien arrêtée pour dépasser les innombrables obstacles qu'ils rencontrent. Aujourd'hui, les réformes réduisant la hauteur de la barrière à franchir pour réaliser une fusion demeurent à venir.
Certes, des efforts ont été fournis, depuis l'an passé. Ainsi, le plan stratégique de la MSA, adopté le 4 mai 2001, consacre, enfin, un volet à la question du niveau pertinent des regroupements de caisses et aux moyens adéquats pour les atteindre, mais selon une démarche qui ne peut être que qualifiée de prudente. C'est dans cette perspective qu'a été adopté le principe de la création d'une première aide financière pour la mise en _uvre de fusions ou de fédérations par l'assemblée générale centrale de la MSA. L'orientation du Gouvernement, consistant à réduire progressivement la marge de modulation des cotisations techniques, initialement destinée à permettre aux caisses les plus petites de ne pas être financièrement asphyxiées par leurs charges fixes, de 15% en 1999 à 10% en 2000, et 5% en 2001, va également dans le bon sens. De même, peut-on se féliciter des nouvelles conditions d'attribution des allocations d'adaptation pour les caisses en voie de redressement financier, plus contraignantes lorsque le regroupement de la caisse avec une ou plusieurs voisines constituerait une réponse aux difficultés de financement rencontrées.
Selon les informations transmises à votre Rapporteur, le Gouvernement envisagerait par ailleurs d'assouplir les conditions de quorum des assemblées générales nécessaires pour procéder aux fusions, de façon, -malheureusement bien tardive-, à éviter que ne se reproduise l'échec survenu in extremis dans le cadre de la fusion des caisses des Hautes-Pyrénées, des Pyrénées-Atlantiques et des Landes, en mars 1999. Dans ce cas, la simple abstention d'un syndicat de salariés d'un seul département avait suffi à annihiler deux ans et demi d'efforts de conviction des directions et des élus des caisses. La réforme de ces conditions n'exigeant qu'un décret, il y a lieu de s'interroger sur la raison pour laquelle il aura fallu plus de deux ans et demi au ministre pour réagir.
En tout état de cause, ces premiers efforts doivent être poursuivis et intensifiés, la tutelle devant manifester tant une volonté de pédagogie qu'une réelle fermeté dans les orientations et les mesures à prendre en ce sens.
Le rapport des inspections générales de l'agriculture et des affaires sociales, réalisé par M. Pierre-Gérard Cailly et Mme Monique Mousseau, en avril 1999, sur la couverture du risque accidents du travail des exploitants agricoles (AAEXA), comme le rapport parlementaire de Mme Béatrice Marre et de M. Jérôme Cahuzac du printemps 2000, concluaient à la nécessité de réformer le régime en vigueur, mis en place en 1966.
Outre l'insuffisance des prestations de l'assurance contre les accidents du travail de base, la principale critique formulée pour sa part par Votre rapporteur à l'égard du régime actuel est l'incapacité des pouvoirs publics à faire respecter l'obligation d'assurance.
Ce contrôle, dévolu par la loi aux ITEPSA, ne constitue manifestement la priorité d'aucun de ces services.
Ainsi, les observations formulées par votre Rapporteur les deux années passées, quant à l'importance du taux d'exploitants non couverts pour le risque accidents du travail et de la vie privée, sont corroborées par les contrôles effectués cette année dans d'autres départements, pour lesquels les anomalies paraissent encore plus criantes.
Certes, la situation est hétérogène. Ainsi, dans le Tarn et l'Aveyron, la proportion d'exploitants non couverts ne serait que de l'ordre de 2,5% (11.972 chefs d'exploitation ont souscrit un contrat, sur un total de 12.272 connus de la MSA, en excluant les cotisants solidaires).
Mais, dans l'Allier, le taux de non-couverture s'élève à 21% (), à raison de 5.355 assurés sur une population de 6.770 personnes soumises à l'obligation d'assurance. Encore faut-il souligner que le listing que doit normalement fournir Groupama à l'ITEPSA était en pratique envoyé à l'administration centrale de tutelle des assurances à Paris, laquelle n'en avait, selon toute vraisemblance, guère l'utilité.
Même certains des départements dont les caisses ont décidé de gérer le risque AAEXA sont dans la même situation, avec une couverture insatisfaisante. Tel est notamment le cas de l'Ariège. Dans ce département, bien que 39% des exploitants du département souscrivent leur assurance accidents du travail auprès de la MSA, le taux global de couverture des exploitants n'atteindrait que 70% pour les chefs d'exploitation en forme individuelle, et 60% pour ceux en forme sociétaire. Un tiers (33,3%) des exploitants , soit un total de 1.009 personnes, ne disposeraient d'aucune couverture AAEXA en Ariège.
Dans la région Centre, il ressort des données communiquées par les assureurs aux différentes ITEPSA que le taux de couverture AAEXA des exploitants, tel qu'il est connu de la tutelle est singulièrement faible, puisqu'il va de 0% à un maximum de 51%. Une telle constatation traduit deux états de fait aussi inacceptables l'un que l'autre. En effet, d'une part les assureurs ne respectent pas leurs obligations de communication compte tenu de l'absence de sanctions et de contrôle par les ITEPSA, comme le laisse penser le dénombrement du Cher, soit le taux de couverture des exploitants est particulièrement faible, les deux explications n'étant au demeurant pas exclusives l'une de l'autre. Le même dysfonctionnement a été constaté en Aveyron, où seul Groupama envoie un listing à l'ITEPSA, qui est donc dans l'incapacité d'indiquer le taux de couverture effectif des exploitants du département.
Département |
Nombre d'exploitants assurés |
Population d'exploitants |
Taux de (en %) |
Cher |
0 |
5.609 |
? |
Indre |
3.306 |
6.458 |
51,2 |
Indre-et-Loire |
1.141 |
6 806 |
16,8 |
Loir-et-Cher |
735 |
5.368 |
13,6 |
Loiret |
523 |
5.731 |
9,1 |
Sources : (1) SRITEPSA de la région Centre
(2) Données CCMSA 1999
La réforme du dispositif, bien que manifestement nécessaire, a subi de nombreuses vicissitudes, consécutives à une gestion approximative des procédures législatives et parlementaires par le Gouvernement.
Ainsi, l'avant-projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 prévoyait tout d'abord, par un dispositif long d'une dizaine de pages, la création d'un nouveau régime d'accident du travail des exploitants agricoles.
Mais cette réforme profonde du régime social agricole a été disjointe du projet, à la demande du Conseil d'État, en raison de son importance, et initialement renvoyée au projet de loi de modernisation sociale.
Puis le projet a été transformé en proposition de loi. Celle-ci, qui présentait de multiples dispositions coûteuses pour les finances publiques, donc irrecevables au regard de l'article 40 de la Constitution, a été modifiée par son auteur de façon à ne plus contenir que les dispositifs ne prêtant plus à cette critique. Examiné en première lecture à l'Assemblée nationale le avril dernier, le texte en a été adopté après que le Gouvernement eut réintroduit par voie d'amendements tout ce qui en avait initialement été retiré. Ainsi, l'Assemblée nationale est-elle quasiment revenue au texte initial du projet de loi, par une forme de détournement manifeste de l'initiative parlementaire.
Le Sénat a pour sa part de nouveau sensiblement modifié l'esprit du texte adopté par l'Assemblée, pour se rapprocher d'une simple amélioration du dispositif assurantiel en vigueur.
Le texte a été adopté par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture en octobre dernier, pour revenir à la version de première lecture de notre assemblée. Dans l'intervalle, et sur la base de ce texte initial, préjugeant ainsi de la discussion parlementaire, le ministère de tutelle a préparé l'ensemble des décrets et textes d'application, soumis au Conseil supérieur des prestations sociales agricoles le 18 septembre, de façon à ce que le dispositif puisse entrer en vigueur le 1er avril 2002.
Les grands traits, qui sont maintenant arrêtés, seraient les suivants :
- maintien d'un régime pluraliste incluant la MSA et les assureurs privés, mais dans un cadre beaucoup plus réglementé que le précédent, puisqu'à la fois les taux de cotisations et les montants des prestations seraient fixés de manière uniforme pendant trois ans, puis par catégories de risques;
- rôle central confié à la MSA, qu'elle ne jouait pas du tout jusqu'à présent, seules trois caisses ayant jusqu'ici décidé de gérer ce risque. Ce choix a été justifié par l'expérience acquise par la MSA en matière de prévention pour les salariés agricoles dont elle gère le régime accidents du travail;
- éclatement de la notion actuelle de risque de la vie professionnelle et de la vie privée, la première ressortissant au nouveau régime et la seconde à l'assurance maladie;
- définition de l'assiette des cotisations sous une forme forfaitaire, et non liée au revenu professionnel;
- création d'indemnités journalières;
- relèvement à 70.000 F par an du montant de la rente en cas d'invalidité totale résultant d'un accident du travail, mais attribution des rentes sur la base du calcul du taux d'invalidité selon le barème applicable aux salariés, et non de la capacité ou non à exercer la profession agricole. Ce relèvement conséquent du montant des rentes pourrait donner lieu à des transferts indus de dépenses, compte tenu du montant proportionnellement très réduit des rentes d'invalidité servies par le régime maladie;
- création d'un fonds de réserve national spécifique, géré uniquement par la MSA, destiné à provisionner les risques ;
- gestion de la prévention par la caisse centrale de MSA.
Cette réforme n'aurait pas d'incidence sur l'équilibre du BAPSA, dans la mesure où son mécanisme serait autofinancé par les cotisations, et où cette nouvelle branche n'aurait pas à être équilibrée par appel au budget de l'État.
Le dispositif proposé par le Gouvernement présente incontestablement des avantages. En particulier, il ne fait pas de doute que le relèvement de la rente, la création d'indemnités journalières, l'organisation d'un contrôle effectif et opérationnel de l'obligation d'assurance, ainsi que le développement d'actions de prévention représentent des avancées sociales dont chacun se félicitera.
Néanmoins, il présente également des inconvénients majeurs.
Ainsi, même si, à la demande de la MSA, il maintient une pluralité d'assureurs, il transforme le dispositif en un régime de sécurité sociale dans lequel la concurrence ne pourra jouer que sur des aspects secondaires, qui ne pourront être ni les prestations, ni les cotisations. Il était parfaitement possible de satisfaire les objectifs précités, en réformant simplement le régime en vigueur et en supprimant ses dysfonctionnements ou ses insuffisances. Les caisses de MSA pouvaient parfaitement, pour leur part, mettre en place la gestion de ce régime, si elles l'avaient individuellement estimé utile. Par ailleurs, le choix de confier à la MSA un rôle central, en supprimant les caractéristiques concurrentielles du régime en vigueur avait notamment pour objet de stigmatiser les bénéfices excessifs qui seraient réalisés par l'opérateur privé principal de ce secteur. Cette appréciation méconnaît deux données importantes : l'opérateur en question réalise surtout un bénéfice sur les assurances complémentaires et non sur l'assurance de base ; les caisses de MSA qui ont choisi de gérer le risque AAEXA peuvent elles aussi réaliser des bénéfices très significatifs sur celui-ci ().
Par ailleurs, il n'atteindra pas même l'ensemble des objectifs précités. En effet, compte tenu du refus du Gouvernement de participer au financement des actions de prévention, celles-ci seront limitées au montant financé par les seules cotisations. Mais compte tenu des charges de gestion d'une part, du provisionnement des rentes, et de la croissance générale des dépenses de maladie, les hypothèse de travail du ministère de tutelle pour la fixation des cotisations de la première année limitent la partie prévention des futures cotisations à 100 francs par exploitant, soit 56 millions de francs au total par an, quand les professionnels considéraient qu'un dispositif sérieux de prévention n'aurait pas d'efficacité en deçà de 130 millions de francs, soit plus du double. Par ailleurs, malgré le niveau réduit de la partie prévention des cotisations, celles-ci devraient néanmoins s'établir à un niveau proche de 2.000 francs par an et par exploitation (), soit, déjà, avant tout début de mise en _uvre, un relèvement significatif par rapport aux premières estimations du Gouvernement, qui ne s'élevaient qu'à 1.730 francs. Si l'on fait l'hypothèse que la modulation à compter de la troisième année atteindrait une amplitude proche de celle des salariés agricoles, soit 50%, cette cotisation de base, obligatoire, s'étalerait entre 1.000 et 3.000 F. De surcroît, la mise en _uvre d'un contrôle plus rigoureux de l' «étanchéité » des dépenses entre AAEXA et AMEXA pourrait tendre à terme à relever le montant de la nouvelle cotisation Accidents du travail, en raison de la sous-déclaration des accidents de la vie professionnelle en tant qu'accidents du travail.
Enfin, le dispositif prévu ne prévoit aucun allégement en faveur des jeunes agriculteurs, le Gouvernement et la majorité s'étant opposés aux propositions en ce sens de votre Rapporteur. Les jeunes agriculteurs, qui bénéficiaient de tarifs préférentiels de la part des assurances privées, devront donc, à compter de 2002, supporter un supplément de charges très significatif.
Il conviendra par ailleurs que la tutelle s'assure d'un réel contrôle du nouveau régime, notamment pour ce qui concerne les calculs de provisionnement qui devront être effectués par les caisses de MSA. L'exemple de l'Ariège, qui utilise pour ce faire une table de mortalité datant de 1979, et non celle prévue par l'arrêté du 18 mars 1996 fixant les règles de provisionnement des garanties d'invalidité et d'incapacité, et un taux de capitalisation de 5,75%, inchangé depuis des années, sensiblement supérieur au plafond de 4,5% fixé par ledit arrêté, sans avoir, semble-t-il, jamais ni remis en cause ces outils depuis vingt ans, ni fait l'objet d'un contrôle, démontre la nécessité d'un encadrement rigoureux d'une telle activité.
Selon les données transmises par l'ACOSS, le coût du déficit de financement du FOREC (Fonds pour la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale, qui finance les allègements et prises en charge de cotisations sociales partronales) pèse lourdement sur le régime social agricole.
En effet, pour l'exercice 2000 les recettes totales du FOREC se sont élevées à 59,1 milliards de francs, pour financer 72,4 milliards de francs de dépenses, soit un déficit de 13,3 milliards de francs. Ce déficit est réparti pour 12,3 milliards de francs sur le régime général, et pour 800 millions de francs sur la MSA. La MSA ne reçoit de l'ACOSS, en contrepartie de la diminution de cotisations qu'elle supporte, qu'un montant correspondant au prorata de ses dépenses dans les recettes effectives du FOREC. A ces 800 millions de francs de pertes de cotisations techniques, s'ajoutent, pour l'ensemble du régime social agricole, 110 millions de francs de pertes au titre du régime accidents du travail des salariés agricoles, et 163 millions de francs au titre des cotisations de gestion. Le projet de loi de financement pour 2002, récemment adopté en première lecture par l'Assemblée nationale, a prévu de laisser les régimes sociaux supporter cette charge pour 2000, en annulant la créance qu'ils détenaient sur le FOREC et sur l'État.
Sur le plan du droit, la pratique retenue en matière de reversement des recettes du FOREC est également critiquable. En effet, le FOREC n'avait pas d'existence, faute que le Gouvernement ait pris les textes réglementaires nécessaires pour ce faire. L'ACOSS n'était pour sa part pas autorisée à opérer en son nom des reversements aux régimes, général ou spéciaux. Néanmoins, les ministres de l'Economie, des finances et de l'industrie, de l'Emploi et de la solidarité, et de l'Agriculture et de la pêche ont autorisé, par un courrier dont la portée excède les pouvoir qui leur sont dévolus, le directeur de l'ACOSS à procéder au reversement à la MSA. Cette irrégularité est suffisamment manifeste pour que le Gouvernement ait dû juger nécessaire de la valider dans le cadre de l'article 5 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002.
Par ailleurs, du point de vue interne des charges de gestion générées par le passage aux 35 heures, la Mutualité sociale agricole, composée d'organismes de droit privé, a appliqué un accord national conclu le 15 décembre 1998, décliné localement. De ce fait, elle supporte un coût net pour les exercices 1999 et 2000 de 5 millions de francs, pour 816 créations d'emplois à temps plein. Mais cette charge est naturellement appelée à croître, lorsque les aides d'État auront disparu, et les créations d'emplois correspondent, dans un certain nombre de cas qu'a pu constater votre Rapporteur sur le terrain, à un pur effet d'anticipation de remplacements de salariés destinés à prendre prochainement leur retraite.
Les perspectives d'évolution du régime des retraites agricoles sont aujourd'hui liées à deux dispositifs favorables distincts : la mise en place d'un régime complémentaire obligatoire co-financé par l'État, et la mensualisation des retraites.
Il faut souligner que, année après année depuis quatre ans, les améliorations des retraites modestes, présentées comme des efforts financiers, ne correspondent, si l'on excepte la première année où elles sont mises en _uvre et où elles sont financées par une contribution exceptionnelle sur le produit de la C3S, qu'au simple recyclage des diminutions spontanées des dépenses de retraite découlant de la diminution rapide des effectifs des retraités.
Votre Rapporteur ne peut, en conséquence, qu'estimer pour sa part qu'un véritable effort d'équité sociale consisterait à ce que cette retraite minimale, en tenant compte naturellement de l'ensemble des avantages vieillesse dont bénéficient les exploitants pensionnés (et notamment les « poly-pensionnés » au titre de plusieurs régimes vieillesse), soit portée non pas au niveau du minimum vieillesse, mais à 75% du SMIC net, en poursuivant simplement l'effort de revalorisation déjà entrepris depuis cinq ans par une nouvelle mobilisation de C3S pour la première année de mise en _uvre du dispositif.
Le Gouvernement ne semble pas avoir choisi cette voie, mais privilégierait celle de la mise en place d'un régime de retraite complémentaire, obligatoire, par répartition et bénéficiant immédiatement aux retraités, sans aucune période d'accumulation, ainsi qu'aux futurs retraités pour les périodes n'ayant pas donné lieu à cotisation. Ce dispositif, qui exige une participation des exploitants, contrairement à la proposition de votre rapporteur, présenterait en outre la particularité, par rapport aux autres régimes analogues existants pour les salariés et les autres indépendants, d'un financement partiellement public. Cette orientation n'irait évidemment pas sans conduire à des demandes reconventionnelles des autres régimes complémentaires actuellement en vigueur.
Toutefois, en pratique, ce régime complémentaire obligatoire demeure totalement virtuel. Le Gouvernement s'est contenté, jusqu'à présent de ne rendre publiques que quelques idées très générales sur l'hypothèse de création de ce régime dans les deux pages de conclusion du rapport qu'il a déposé en janvier 2001, en application de l'article 3 de la loi d'orientation agricole du 9 juillet 1999. Ce rapport a été déposé avec un retard considérable par rapport à la date fixée par ladite loi, -trois mois à compter de la promulgation de ladite loi, soit au plus tard début octobre 1999-, ce qui ne peut naturellement que traduire l'embarras du Gouvernement. Celui-ci se contente d'indiquer, sans justification, que ce régime ne pourrait être que par répartition, et non par capitalisation ; que, à titre d'exemple, il pourrait avoir pour objectif de porter le minimum de droits totaux à retraite à 75% du SMIC net de 2000 ; qu'il fonctionnerait sur la base de points, dont une partie serait attribuée gratuitement, à l'origine, aux chefs d'exploitation déjà retraités ou encore en activité ; qu'il serait géré par la MSA, qui gère la retraite de base et dispose d'une première expérience en matière de retraite complémentaire. En revanche, ce rapport est totalement muet sur le financement de ce régime hypothétique, et notamment sur la part que l'État accepterait de prendre en charge, et sous quelle forme.
La majorité parlementaire a pour sa part élaboré une proposition de loi prévoyant l'ossature de ce régime (). Mais, d'une part, cette proposition ne peut qu'être muette sur la question du financement public du régime en question, en application de l'article 40 de la Constitution, et, d'autre part, il n'a pas été prévu, au moment où ce rapport est écrit, d'inscrire cette proposition à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale. Enfin, s'agissant d'un régime complémentaire, -fût-il obligatoire-, il ne peut être discuté dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale, dont le périmètre, contrôlé par le Conseil constitutionnel avec beaucoup de rigueur, ne comprend que les régimes obligatoires de base.
Selon les informations communiquées par l'administration à votre Rapporteur spécial, la participation des exploitants envisagée serait de l'ordre de 2,5% sur une assiette déplafonnée, avec une assiette minimale égale au SMIC. Les hypothèses actuellement retenues permettraient à 450.000 retraités de bénéficier de la mesure dès son entrée en vigueur, pour des flux financiers annuels au départ de 2,3 milliards de francs, mais susceptibles de se réduire progressivement à 1,8 milliard de francs.
Il ressort toutefois de ces différentes considérations que la création de ce régime de retraite complémentaire ne constitue pas une priorité absolue pour le Gouvernement. En tout état de cause, il ne pourra entrer en vigueur en 2002.
Plutôt qu'un régime de retraite complémentaire par répartition, nécessairement équilibré par une subvention budgétaire, il serait préférable, et beaucoup plus rapide, de rehausser le niveau du « troisième étage » que constitue le régime de l'ex-COREVA (régime complémentaire facultatif d'assurance vieillesse, dont les textes réglementaires régissant le dispositif ont été annulés par un arrêt du Conseil d'État du 8 novembre 1996), géré depuis 1998 dans le cadre de contrats d'assurance de groupe, en dehors de la MSA.
La revitalisation de ces régimes ne supposerait que deux décisions : celle de la MSA de relancer cette activité, -qui ne lui paraît pas interdite dès lors qu'elle n'en aurait pas le monopole- et celle d'un ajustement du dispositif fiscal. En effet, si le dispositif de l'ex-COREVA présente l'avantage d'une déductibilité des cotisations non seulement fiscale mais également sociale (), -ce qui se traduit par un allègement de la charge de la cotisation de près de 40%-, contrairement à celui des autres non-salariés (), la différence des plafonds de déductibilité fiscale apparaît considérable. En effet, même si le premier plafond de 7% des revenus professionnels a été supprimé par la loi de finances pour 2001, -pour des raisons de simplification- en ne laissant subsister que celui de 21% (7% de trois fois) du plafond annuel moyen de sécurité sociale, le régime en faveur des exploitants agricoles demeure loin du dispositif en vigueur pour les autres non-salariés, qui prévoit un plafond de 1,52 fois (19% de huit fois) le plafond annuel de la sécurité sociale. Il est également moins favorable que le régime Préfon, qui permet aux fonctionnaires ou à leurs conjoints des versements exceptionnels considérables, jusqu'à hauteur du produit de la cotisation annuelle par le nombre d'années entre 16 ans et l'âge lors de l'adhésion.
Dans l'attente de l'hypothétique création du régime complémentaire, il conviendrait donc, à tout le moins, d'ouvrir aux exploitants la possibilité, s'ils le préfèrent, de bénéficier du même dispositif que les professions libérales, les artisans et les commerçants, ou de relever le plafond limité de déduction du revenu imposable qui leur est actuellement applicable.
Malgré la situation maintenant archaïque du régime de retraite des exploitants agricoles, qui est, avec celui des professions libérales, le seul à ne pas avoir su organiser le passage à la mensualisation, le Gouvernement n'a pas souhaité ni donner suite, ni, semble-t-il, analyser finement la proposition de la Caisse centrale de MSA consistant à financer le passage à la mensualisation par un emprunt à long terme. Ainsi, à la question posée par votre Rapporteur spécial sur ce sujet intéressant l'ensemble des retraités agricoles, le ministère de l'Agriculture et de la Pêche s'est contenté de répondre que « le financement par l'emprunt est plus coûteux puisqu'il faut ajouter à la charge de l'emprunt (9 milliards de francs) le coût cumulé des frais d'intérêt d'un montant de l'ordre de 250 millions de francs par an. Le financement par emprunt est donc à terme plus coûteux mais permet d'envisager un étalement du financement ».
Au-delà de cette évidence, votre Rapporteur indiquera qu'un calcul simple montre que, pour un taux d'intérêt égal à celui des emprunts d'État à long terme, soit environ 6%, l'annuité constante de remboursement des 1,4 milliard d'euros (9 milliards de francs) sur 10 ans s'élèverait à 200 millions d'euros (1,22 milliard de francs), et sur 15 ans à 142 millions d'euros (930 millions de francs). Dans cette dernière hypothèse, la charge totale des frais financiers sur la durée de l'emprunt se monterait à 700 millions d'euros (4,9 milliards de francs), soit une charge financière annuelle moyenne de 330 millions de francs (50 millions d'euros).
Une autre solution, certes plus coûteuse, pourrait consister à relever le niveau d'endettement permanent du régime (de 9,3 milliards de francs en moyenne en 2000), et à faire supporter au BAPSA la charge financière de cet endettement permanent supplémentaire, dont le remboursement ne serait prévu qu'à un terme éloigné. Cette méthode conduirait à inclure la charge de la mensualisation dans le financement de la trésorerie du régime, avec des taux d'intérêt à court terme, plus variables, mais en principe plus faibles.
Il ressort de ces estimations grossières que la mensualisation n'est en rien impossible. Sa charge serait au demeurant sensiblement allégée si un seuil raisonnable était fixé pour le montant trimestriel minimum ouvrant droit à paiement mensuel. Une démarche progressive permettrait également d'éviter d'avoir à financer une charge trop importante au départ du dispositif, d'autant que la structure démographique du régime de retraite des exploitants agricoles tendra inexorablement à diminuer le poids des retraites qui resteront à mensualiser.
Votre Rapporteur observera enfin que cette mesure aurait au demeurant été rendue plus aisée si le Gouvernement n'avait pas choisi de financer systématiquement les déficits d'exécution du BAPSA de 1997 et 2000 par des prélèvements massifs sur le fonds de roulement du budget annexe, -aujourd'hui réduit à 30,5 millions d'euros (200 millions de francs)-, et dont le montant cumulé sur la période 1997-1999 se monte à 300 millions d'euros (1,965 milliard de francs).
V.- LES OBSERVATIONS RÉSULTANT DES CONTRÔLES
SUR LE TERRAIN
A l'instar des années précédentes, votre Rapporteur spécial a contrôlé sur place, en mai, juin et juillet dernier, cinq caisses départementales (ou pluri-départementales), choisies en fonction de critères spécifiques, sous la contrainte d'une répartition géographique suffisante sur l'ensemble du territoire :
-l'Eure-et-Loir, compte tenu, d'une part, de l'importance de la proportion d'exploitants ayant, antérieurement à 2001, choisi l'assiette de leur année courante (N) pour le calcul de leurs cotisations sociales, et contraints de passer en 2001 à l'année N-1, d'autre part de la qualité de son recouvrement ;
-l'Ariège, troisième département, avec le Puy-de-Dôme et les Hautes-Pyrénées, déjà contrôlés en 1999 et 2000, gérant une offre d'assurance AAEXA ;
- l'Allier, en raison de l'importance des reports de cotisations dues à la crise bovine ;
- le Tarn-Aveyron, caisse pilote pour la mise en oeuvre des possibilités de recoupements de données entre la MSA et les DDAF résultant d'une proposition de votre Rapporteur ;
- la Corse, pour constater concrètement la réalité de l'amélioration de la situation, trois ans après la visite initiale de votre Rapporteur spécial.
De ces contrôles, dont l'utilité s'avère évidente pour apprécier la réalité de la gestion du régime traduite dans le BAPSA, il ressort de multiples observations, tenant au recouvrement, au transfert de dépenses de l'AAEXA vers l'AMEXA, à la CMU (couverture médicale universelle),
Dans aucun département visité, à l'exception de la Corse, il n'est demandé, au moment de l'affiliation la preuve autre que déclarative du droit d'exploiter les terres revendiquées par le demandeur. En règle générale, les caisses de MSA se contentent de faire signer un relevé de mutation par l'ancien et par le nouvel exploitant, sans demander ni une copie du bail, ni l'autorisation écrite du propriétaire des terres. Les contrôles systématiques sur place de la réalité de l'exploitation et de la conformité des déclarations sont rares ().
Par ailleurs, on constate également certaines curiosités résultant de l'absence de tout lien entre l'autorisation d'exploiter, et l'affiliation en tant qu'exploitant agricole. Ainsi, il est peu vraisemblable que la CDOA autoriserait la seule exploitation de terres, confiées à titre provisoire -pour dix mois et demi- par la SAFER, comme l'a montré un cas rencontré dans l'Allier.
Le ministre de l'Agriculture et de la Pêche s'était « solennellement engagé », l'an passé, à réexaminer cette question, en réponse à un amendement de votre Rapporteur proposant que l'affiliation soit subordonnée à l'autorisation d'exploiter, pour les personnes ayant atteint l'âge permettant le bénéfice d'une retraite agricole. Cet engagement solennel n'a été suivi d'aucun effet, ni d'aucune proposition, malgré les aberrations administratives relevées par votre rapporteur spécial.
Dans tous les départements visités, les dossiers d'affiliation ne comprennent pas, sauf exception, les justificatifs réels des surfaces exploitées. En particulier, les baux et les décisions des conseils municipaux pour autoriser l'utilisation des terrains communaux, sont généralement absents, au profit, dans le meilleur des cas, uniquement d'une déclaration de mutation des parcelles, laquelle n'est pas toujours signée par le propriétaire des terres concernées.
Deux cas, que l'on retrouve dans plusieurs caisses visitées, appellent également des commentaires particuliers :
- les caisses n'hésitent pas à affilier comme exploitants des agents publics et des fonctionnaires, bien que leur statut () leur interdise une activité privée autre que l'enseignement, la production d'_uvres de l'esprit, ou le conseil lié à leur fonction.
- la disjonction du contrôle des structures, et notamment l'autorisation d'exploiter, de l'affiliation à la MSA conduit à des situations administrativement aberrantes. Votre Rapporteur avait déjà souligné ces difficultés l'an passé, le ministre de l'Agriculture s'étant engagé formellement, lors de la discussion du projet de BAPSA pour 2001 en séance publique en première lecture à l'Assemblée nationale à réexaminer cette question. Il n'en a rien été.
Votre Rapporteur a déjà été amené, les années passées, à relever les faiblesses du contrôle de l'assiette des cotisations et contributions sociales agricoles, comme de leur recouvrement. S'agissant du contrôle de l'assiette, il n'insistera, cette année, que sur la mise en _uvre d'un dispositif adopté à son initiative dans la loi de finances pour 2001 : le croisement des données sociales de la MSA, et relatives aux aides communautaires des DDAF.
Dans la plupart des départements visités, l'écart entre la surface agricoles totale connue de la MSA et la surface agricole utile connue de l'administration déconcentrée de l'agriculture, présentée notamment dans les comptes départements de l'agriculture, est important, avec des justifications parfois compréhensibles, parfois plus ambiguës.
En milliers d'hectares |
Tarn-Aveyron |
Ariège |
SAU (source agreste) |
844 dont 283 de surface toujours en herbe ; et 99 de terre agricole non cultivée (hors SAU) |
216 dont 156 de surface toujours en herbe ; et 22,5 de terre agricole non cultivée (hors SAU) |
Surface connue de la caisse de MSA |
680 |
129 |
Ecart en % de la SAU |
-20 |
-41 |
Plusieurs raisons peuvent justifier ces écarts :
-des terres sont exploitées sous une forme collective, et ne sont pas systématiquement déclarées à la MSA. Tel est le cas, en Aveyron, des terrains dits « sectionnaux », qui constituent des droits de pâturage gratuits et collectifs pour les habitants. Tel est également le cas des terrains communaux, dont une partie importante n'est pas affectée à leurs locataires ou à leurs utilisateurs ;
- certaines terres considérées en SAU par la DDA ne sont pas exploitables, ou ne sont pas prises en compte par la MSA dans l'assiette sociale, alors qu'elles sont valorisables du point de vue des aides communautaires. Les estives, surfaces considérables de zones de montagne utilisées pour le pâturage, correspondent à ce cas de figure, déjà mentionné l'an passé par votre Rapporteur dans les Hautes-Pyrénées, se retrouve également, de la même manière, en Ariège ;
- certaines terres sont prises en compte par la DDA pour leur totalité, alors que, dans l'assiette de la MSA, elles sont affectées d'un coefficient inférieur à 1 (notamment les landes, les bois, ...) ;
- plus ponctuellement, il existe des baux verbaux, que les propriétaires ne souhaitent pas déclarer de manière officielle pour des raisons diverses.
Adopté à l'initiative de votre Rapporteur, l'article 98 de la loi de finances initiale pour 2001, modifiant l'article L.724-9 du code rural, a ouvert aux contrôleurs des caisses de MSA la possibilité d'accéder aux données de surface communiquées par les exploitants aux services déconcentrés du ministère de l'Agriculture et de la pêche chargés de la gestion des aides communautaires à la surface. Cette communication peut se faire soit sous la forme manuelle, soit sous une forme automatisée. Votre Rapporteur soulignera à cet égard que la rédaction de l'article ne prévoit pas, dans ce cas de figure, l'intervention préalable de la CNIL, dont les exigences ont souvent pour effet de diminuer l'opérabilité et l'efficacité des croisements de fichiers en vue de réaliser des contrôles.
Seule la caisse de MSA du Tarn-Aveyron avait effectivement recherché, lors de la venue de votre Rapporteur, les conditions de mise en _uvre d'un tel dispositif, à la demande de l'administration centrale. Celle-ci a choisi cette caisse comme site pilote pour analyser la faisabilité de rapprochements automatisés. L'étude menée, dont les conclusions ont été présentées sur le terrain à votre Rapporteur, a permis de dégager plusieurs conclusions non dénuées d'intérêt:
- menée sur trois communes complètes, géographiquement représentatives du département de l'Aveyron, et représentant 2.300 parcelles, cette étude a permis de constater des écarts d'environ 10% des surfaces déclarées à la MSA et à la DDAF, dans les deux sens, c'est-à-dire à la fois de sous-déclaration des surfaces à la MSA et de sous-déclaration des surfaces à la DDAF (pour des raisons qui n'ont pas pu être clairement identifiées, mais qui pourraient être liées aux conditions de nombre de têtes par surface nécessaires pour l'éligibilité à certaines aides communautaires). De tels écarts peuvent soit conduire des exploitants dont les surfaces déclarées à la MSA ne permettent de les assujettir qu'à la cotisation de solidarité, à être en réalité redevables de cotisations complètes, soit correspondre à des sous-assujettissements des exploitants affiliés comme tels;
- de manière générale, la structure des fichiers ne permet que malaisément un rapprochement efficace, compte tenu que, pour les cotisants solidaires, les fichiers des DDAF ne comprennent pas le numéro d'identification utilisé par la MSA, c'est-à-dire le numéro NIR, et pas toujours le numéro SIREN/SIRET pour les autres exploitations. L'étude précitée a donc dû être réalisée de manière « manuelle », et non entièrement automatisée, avec une lourde charge de travail, non généralisable dans ces conditions à l'ensemble d'un département. Etant donné l'importance des écarts constatés, à la fois globalement et parcelle par parcelle, il conviendrait donc à la fois de généraliser l'utilisation du n° SIREN dans les fichiers des services déconcentrés du ministère de l'Agriculture, de prévoir l'échange annuel systématique entre les services concernés en application d'un cahier des charges précis et commun, ainsi que le prévoit le ministère. En revanche, la rédaction de l'article 98 de la loi de finances initiale pour 2001, modifiant l'article L.724-9 du code rural, a volontairement prévu le recoupement des données sans mentionner qu'un avis de la CNIL soit préalablement nécessaire. Votre Rapporteur estime donc inutile de subordonner l'utilisation du fichier des aides agricoles géré par les DDAF (le fichier PACAGE) à un avis de cette autorité administrative indépendante, généralement très timide en matière de contrôle informatisé, donc efficace, des fraudes en matière d'aides ou de contributions publiques. Le rôle et les pouvoirs de la CNIL, fixés par la loi, peuvent en effet également être modifiés, ou écartés, par une autre loi.
Par ailleurs, en Ariège, à la demande expresse de votre Rapporteur, la caisse de MSA a effectué un recoupement de ses données de surface par rapport à celles connues de la DDAF, qui les lui a communiquées sous une forme magnétique. Les résultats obtenus ne sont pas sans soulever des interrogations, puisqu'il en ressort principalement que, sur les 2.730 exploitations ayant demandé le bénéfice d'aides communautaires, 1.080 exploitants ont déclaré à la DDAF une surface supérieure en moyenne de 28% à celle qu'ils ont par ailleurs déclaré à la caisse de MSA pour l'établissement de leurs cotisations. Une partie de ceux-ci correspond au cas extrême des estives, pâturages de montagne ouvrant droit à prime communautaire mais non prises en compte dans les surfaces agricoles soumises à cotisations sociales, pour lesquels l'écart de surface peut s'avérer considérable. En revanche, 831 ont une superficie déclarée « PAC » supérieure « seulement » de un à 200 hectares à leur superficie déclarée MSA, ce qui est susceptible de correspondre effectivement à une sous-estimation de surface cotisable.
En termes de perte d'assiette, le cas de l'Ariège doit cependant être considéré avec une certaine prudence. Compte tenu, en effet, de la proportion importante d'exploitants soumis à l'assiette minimale de 800 SMIC en Ariège, une analyse plus complète menée par la caisse de l'Ariège a permis d'estimer que la perte effective d'assiette de cotisations ne concernerait au maximum que 219 exploitants, pour un écart moyen de 7.800 F/an par rapport à l'assiette minimale, et 1,7 millions de francs de perte d'assiette cotisable totale.
Il demeure que les deux tests décrits ci-dessus montrent des écarts qui peuvent être significatifs entre les données de surface connues de la MSA et celles communiquées par les agriculteurs pour bénéficier des aides communautaires. Pour donner toute efficacité au dispositif prévu, il conviendrait toutefois de prévoir une sanction en cas de découverte de tels écarts par les services des caisses de MSA, ou d'appliquer le dispositif général défini par l'article L.99 du Livre des procédures fiscales, qui prévoit déjà un mécanisme général d'information réciproque des services fiscaux et des organismes de sécurité sociale.
L'efficacité du recouvrement des cotisations sociales par la MSA, seule institution de sécurité sociale représentant une gestion intégrée globale puisque chargée à la fois du versement des prestations et du recouvrement des recettes, apparaît singulièrement faible par rapport aux autres régimes, de salariés ou de non-salariés, si l'on retient comme indicateur le taux de restes à recouvrer, ce qui exige une certaine prudence. Le tableau suivant, extrait du rapport de la Cour des comptes de 2001 sur la sécurité sociale, le montre sans ambiguïté.
Salariés |
Non-salariés |
|||||||||||
MSA (*) |
URSSAF |
MSA(*) |
CANAM |
CANCAVA |
ORGANIC |
URSSAF | ||||||
Taux de restes à recouvrer (en %) |
3,6 |
1,0 |
12,5 |
3,2 |
3,7 |
8,5 |
8,3 |
Source : Cour des comptes
Cet état de fait résulte de deux phénomènes :
- une procédure de recouvrement sans doute moins rigoureuse que dans les autres régimes. A cet égard, la création de la CMU et la limitation des cas de déchéances de droit aux affiliés de mauvaise foi n'aura vraisemblablement pas pour effet d'améliorer les résultats de la MSA, d'autant que la portée de la notion même de « mauvaise foi » a été considérablement réduite, puisque la bonne foi est présumée par l'existence d'un versement, même unique et partiel. Ainsi, à titre d'exemple, dans le Tarn-Aveyron, le nombre de déchus de droits, qui s'élevait à 143 chefs d'exploitation avant la mise en _uvre de la CMU, s'est réduit à 4 aujourd'hui. Dans l'Allier, ce nombre est passé de 20 à 0. En Ariège, sur 56 déchus de droits constatés en 1999, 31 ont été rétablis dans leurs droits à prestations en 2000. Il n'existe plus aucune déchéance de droits en Eure-et-Loir;
- un contrôle trop faible de l'assiette des cotisations sociales agricoles, bien que, structurellement, les procédures d'appréhension de ces assiettes présentent quelques lacunes. Les assiettes fondées sur des bénéfices forfaitaires ne sont en effet guère contrôlées : les données physiques des unités d'_uvre ne font que peu l'objet de contrôles matériels par la MSA, et les services fiscaux s'en remettent à celle-ci pour établir l'assiette fiscale. En tout état de cause, les exploitants au forfait sont rarement imposables, compte tenu du faible niveau de ceux-ci. Les redressements n'ont donc guère d'intérêt pour l'administration fiscale. Mais les bénéfices réels ne sont guère contrôlés non plus. Les caisses de MSA ne s'estiment pas compétentes pour réaliser un contrôle dépassant une simple vérification de cohérence et de conformité des données qui lui sont fournies avec celles enregistrées sur les liasses fiscales. Elles considèrent également souvent que l'efficacité de ces contrôles est limitée, car les comptabilités des exploitants imposés au réel font déjà l'objet d'une supervision par les associations de gestion ou les cabinets d'experts-comptables. Pourtant, l'analyse des motifs des redressements effectués montre que cette supervision n'exclut pas pour autant tout risque de non-respect des règles en matière d'assiette sociale (). Quant aux services fiscaux, la rentabilité limitée de leurs contrôles comptables éventuels est réduite par le fait que l'augmentation des charges sociales découlant de la sous-déclaration des revenus réels a pour effet de réduire le résultat fiscalement imposable.
La Cour des comptes, dans le rapport précité, souligne ainsi la faiblesse du taux de cotisants contrôlés (inférieur à 7% pour les salariés comme pour les exploitants). Selon la Cour, « les redressements sont plus faibles encore : ils représentent 0,3% des exploitants individuels et 2,9% des salariés des exploitations contrôlées, et aboutissent à des redressements s'élevant à 0,5% et 0,2% des cotisations liquidées par chacune de ces deux catégories ». Ce constat est d'ailleurs confirmé par les visites sur place de votre rapporteur, ainsi que l'indique le tableau ci-après.
C'est pourquoi « la Cour estime qu'un effort très important reste à accomplir pour améliorer le contrôle d'assiette ». Elle ajoute que « le dispositif de suivi du contrôle d'assiette, qui devrait être mis à la disposition des caisses de base en 2001 devrait y contribuer », mais à condition qu'il s'accompagne d'une volonté clairement exprimée.
De manière générale, votre Rapporteur ne peut que confirmer, à l'échelle concrète des caisses, les observations générales précitées, qui portent sur les deux-tiers des caisses ayant répondu à l'enquête de la caisse centrale et mentionnées par la Cour.
Pour l'année 2000 |
Allier |
Ariège |
Eure-et-Loir |
Tarn-Aveyron |
Nombre de contrôles des revenus |
321 contrôles de revenu professionnel |
-781 recoupements de données fiscales -70 contrôles de revenus professionnels réels |
- 513 RP réels - 199 BAF | |
Objectif habituel de contrôle des exploitants au réel, correspondant à 10% des exploitants au réel |
370 |
82 |
340 |
630 |
Nombre de redressements |
18 |
nc |
72 |
- 78 RP - 120 BAF |
Régularisations nettes |
190.164 F de cotisations |
nc, mais négatives |
1,9 million de francs d'assiette 402.570 F de cotisations, |
3,4 millions de francs d'assiette en plus |
Assiette (en millions de francs) |
415 |
230 |
691 |
895 |
Les taux de restes à recouvrer des différents départements visités s'avèrent eux-mêmes sensiblement différents, témoignant d'un degré d'implication variable dans les efforts de recouvrement que doivent pourtant déployer toutes les caisses, qui, contrairement au régime général, sont à la fois chargées du versement des prestations et du recouvrement des cotisations qui les financent partiellement. La rigueur dans le recouvrement devrait pourtant être d'autant plus sévère, que les prestations sont, pour les deux-tiers, financées par appel à la solidarité nationale, au titre de la compensation démographique, et par le biais d'impositions affectées. Il demeure que, dans les quatre départements visités (), le taux précité varie d'un facteur de presque 10, de 2,5% pour l'Eure-et-Loir, à près de 20% pour l'Ariège.
Le niveau du revenu agricole contribue à expliquer ces différences. Néanmoins, il ne justifie pas tout. Ainsi, il est difficile de prôner la rigueur en matière de recouvrement, tant que l'un des membres du conseil d'administration de la caisse est en situation d'impayé, en particulier de manière durable. Ce cas n'est pas purement hypothétique, ainsi que votre Rapporteur a pu le constater en Ariège, où une entreprise, personne morale membre du conseil, se présente en quasi-permanence en situation débitrice, ce qui revient à faire financer une partie de son besoin en fonds de roulement par le régime social, pour un coût sensiblement inférieur à celui des réseaux bancaires. Plus généralement, le recouvrement doit être géré de manière impersonnelle, alors que, dans ce même département, les rapports successifs du COREC critiquent une gestion « trop personnalisée » des dossiers.
TAUX DES RESTES À RECOUVRER, CSG COMPRISE AU 31/3/2000
(en %)
National |
Allier |
Eure-et-Loir |
Ariège |
Tarn-Aveyron | |
Taux des restes à recouvrer |
9,23 |
10,46 |
2,46 |
19,15 |
7,89 |
Source : Caisse centrale de MSA
De manière plus générale, il y a lieu de souligner que les récentes réformes intervenues pour accroître les garanties des débiteurs vis-à-vis des créanciers ont conduit à alourdir les procédures de recouvrement forcé des caisses de MSA,
Enfin, l'entrée en vigueur de la CMU, qui s'accompagne de l'abandon, sauf « mauvaise foi » délibérée de l'assuré, des possibilités de déchéance des droits des exploitants réfractaires au paiement de leurs cotisations ne constitue évidemment pas un instrument d'incitation au règlement rapide des cotisations.
La question de la perméabilité entre l'AMEXA et l'AAEXA, dans le sens d'un financement indû par la première, a été soulevé l'an passé par une étude réalisée par la caisse centrale de MSA dans les départements de la région des pays de Loire, en matière de dépenses hospitalières.
Cette étude, réalisée par la Caisse centrale de MSA auprès des caisses des départements de la région des Pays de Loire, tend en effet à prouver la réalité de ce transfert de dépenses au dépends de l'AMEXA. L'analyse, opérée sur un trimestre d'hospitalisations d'exploitants agricoles de la région, a montré que, sur les 1.260 dossiers étudiés, 150 auraient dû être imputés à l'AAEXA (soit 12%), car ils concernaient des soins liés à des accidents ou à des maladies professionnelles. Si ces résultats de cette étude étaient extrapolés à l'ensemble de la France, le transfert de dépenses s'élèverait à 2 milliards de francs aux dépens de l'AMEXA, ce qui est considérable. Encore cette étude a-t-elle écarté les dépenses des hôpitaux locaux, des centres de rééducation fonctionnelle et des centres de convalescence, sans compter, naturellement, les soins et consultations de médecine ambulatoire, les dépenses d'hospitalisation ne représentant qu'environ la moitié des dépenses de soins...
En effet, le partage entre AMEXA et AAEXA est en pratique effectué par les structures d'accueil des hôpitaux et cliniques, qui ne semblent pas avoir une connaissance particulièrement précise de la différence entre ces deux régimes, si tant est même qu'elles connaissent l'existence de l'AAEXA, et, en tout état de cause, n'accordent vraisemblablement qu'une importance très accessoire à ce partage entre les régimes. En l'occurrence, il y a tout lieu de penser que la proposition de loi, dans sa version adoptée par l'Assemblée nationale en première lecture, ne simplifiera aucunement la situation, contrairement à ce qui est prétendu ici ou là. En effet, si les services d'accueil des hôpitaux sont incapables de faire le partage entre AMEXA-maladie et AAEXA-accidents du travail et de la vie privée, il semble encore plus irréaliste de penser qu'ils seront en mesure de distinguer AMEXA-maladie et accidents de la vie privée, et AAEXA-accidents du travail. Le transfert de la charge des accidents de la vie privée sur l'AMEXA aura certes pour effet de réduire la charge supportée par l'AMEXA en contradiction avec les textes. Mais, d'une part, il ne réduira pas les dépenses hospitalières globales imputées à l'AMEXA, et, d'autre part, il accentuera, selon toute vraisemblance, les contentieux susceptibles d'être initiés par les assureurs sur le partage entre vie professionnelle et activité professionnelle.
Compte tenu de l'importance de l'enjeu comme des contestations des résultats de l'enquête précitée de la CCMSA, votre Rapporteur a demandé aux médecins-conseils des caisses des différents départements dans lesquels il s'est rendu, d'effectuer un contrôle par échantillonnage sur les dossiers récents de traumatologie (), correspondant à des soins effectués dans les hôpitaux du département, et financés par l'AMEXA.
Toutes ont mis en _uvre ce contrôle dans un délai suffisamment rapide pour que leurs résultats soient publiés dans le cadre de ce rapport spécial. Ils confirment, pour trois d'entre elles, l'ordre de grandeur résultant de l'étude précitée.
En particulier, la caisse de l'Ariège a réalisé un contrôle portant sur 120 dossiers d'hospitalisation d'exploitants agricoles dans les trois établissements ariégeois (un hôpital, un centre hospitalier intercommunal, une clinique), en 2000 et au premier semestre 2001. Sur ces 120 dossiers, 65 ressortissaient à la couverture sociale des exploitants, et non des salariés. Parmi ces dossiers, 18 auraient dû être supportés par l'AAEXA, soit 28%. La moitié (9 dossiers) n'étaient pas décelables par le contrôle technique sur la base des seuls documents transmis par les hôpitaux, et l'autre moitié, l'auraient été, à condition que soit effectué un examen systématique par le contrôle médical des soins de suite (actes infirmiers ou de kinésithérapie quelques semaines après l'hospitalisation). Sur la base des prix de journée, les 18 dossiers indûment supportés par l'AMEXA représentent un total de 159.000 francs, et les 9 dossiers décelables sous réserve de la mise en _uvre d'un dispositif relativement lourd de contrôle des actes de suites une dépense de 70.000 francs.
De même, la caisse de l'Allier a réalisé cette enquête sur un site privé (53 dossiers), et deux hôpitaux publics (65 dossiers), soit un total de 118 dossiers d'hospitalisation d'exploitants agricoles en chirurgie (), dont 2 insuffisamment anciens pour avoir donné lieu à facturation, relevaient, après examen, d'une pathologie accidentelle certaine. Parmi ceux-ci :
- 3 ont été déclarés et traités en accident du travail,
- 1 seul avait initialement été pris en charge en maladie, puis, traité en accident du travail après détection par les services de la MSA ;
- 16 ont été réglés à tort par l'assurance-maladie, soit 80% des dossiers d'accidents. La proportion de dossiers supportés à tort par l'AMEXA sur l'ensemble des dossiers d'hospitalisations chirurgicales analysés s'élève, pour sa part, à 13,5%. Dans l'attente d'éléments plus complets, le montant correspondant à ces 16 dossiers supportés par l'AMEXA au lieu de l'AAEXA, a été grossièrement évalué par le médecin-conseil chef de la caisse, à environ 200.000 francs.
Votre Rapporteur ne peut également que faire siennes les remarques du médecin-conseil, qui concluait que le contingent le plus important d'anomalies était fourni par l'hôpital public, la clinique privée se montrant sensiblement plus précise dans son traitement. Il ne peut également que constater que les contrôles effectués par la caisse de MSA n'ont permis de filtrer qu'un dossier sur seize, soit une proportion, quasi anecdotique, de 6%.
L'étude très complète de la caisse d'Eure-et-Loir a pour sa part porté sur 338 dossiers d'hospitalisation autres que de chimiothérapie ou d'obstétrique, dont 144 dans des hôpitaux publics et 194 dans des structures privées, en chirurgie et aux urgences, pour des exploitants et conjoints d'exploitants âgés de 16 à 60 ans, et pour la période courant du 1er janvier 2000 au 30 juin 2001. Tous les hôpitaux, publics et privés, du département et hors département ont été pris en compte. Sur ces 338 dossiers, 35 ont été imputés financièrement à tort en assurance maladie, soit 10,5% du total. 10 proviennent des hôpitaux publics (soit 7%), et 25 des structures privées (soit 13%). Le coût indû pour l'AMEXA de ces 35 dossiers était de 218.000 francs, soit 5,6% des charges totales des dossiers contrôlés. Contrairement au cas précédent, en Eure-et-Loir, l'imputation erronée des dossiers est plus élevée dans le secteur privé, que dans les hôpitaux publics.
Une étude analogue menée par les médecins conseils de la caisse de l'Aveyron sur 156 dossiers d'hospitalisation d'exploitants, dans un centre hospitalier et une clinique du département, montre un taux de transfert moindre. Mais, sur les 156 dossiers considérés, seuls 8 étaient d'origine traumatique et susceptibles de relever d'un accident. Parmi ceux-ci, un seul relevait incontestablement d'une maladie professionnelle, 1 faisait l'objet d'une enquête et n'était pas encore réglé, et 3 concernaient des mineurs à charge.
Ces quatre enquêtes, qui à l'évidence ne peuvent être considérées comme scientifiques et statistiquement significatives, ont cependant l'intérêt de montrer que les résultats constatés dans les pays de Loire sont corroborés par ceux d'au moins deux départements éloignés de cette région. Il convient également de souligner que les taux constatés dans ces deux départements sont même supérieurs à ceux de la région Pays-de-loire, alors que, s'agissant de deux départements sans doute plus ruraux, l'existence et les spécificités de la MSA devraient a priori être mieux connues des établissements de soins. Inversement, le résultat constaté en Aveyron paraît moins catastrophique. Il ne porte toutefois que sur un échantillon particulièrement faible de traumatologie. En tout état de cause, il est nécessaire de procéder à une étude statistiquement représentative du phénomène ainsi mis en évidence, ainsi que cela a été récemment fait pour les accidents du travail et les maladies professionnelles des salariés, au titre de la sous-déclaration desquelles le régime général de maladie bénéficie d'un prélèvement forfaitaire sur la branche Accidents du travail. Malgré les recommandations faites par la caisse centrale de MSA aux directeurs de caisses à la fin mars 2001, les contrôles réalisés par les caisses en la matière demandent manifestement encore à être systématisés.
Dans tous les départements visités à l'occasion des contrôles sur place de votre Rapporteur, il apparaît que l'accès au bénéfice de la CMU (couverture maladie universelle) complémentaire est singulièrement faible, en particulier au regard des prévisions initiales formulées par les responsables de la Caisse centrale de mutualité sociale agricole. Ce diagnostic a d'ailleurs été posé, en ce qui concerne plus généralement les départements ruraux, par la communication du 30 mai 2001 de Mme Odette Grzegrzulka, Rapporteure de la commission des Affaires culturelles, familiales et sociales de l'Assemblée nationale sur l'évaluation de la loi ayant créé la CMU.
Le nombre de bénéficiaires est sans rapport avec les prévisions initiales de la Caisse centrale de MSA. Lors de l'audition de sa présidente, Mme Jeannette Gros, et de son directeur général, M. Daniel Lenoir, le 17 mars 1999, par la commission des Affaires culturelles, familiales et sociales, dans le cadre de l'examen du projet de loi visant à instaurer la CMU, ceux-ci avaient estimé que le nombre de bénéficiaires potentiels de la CMU complémentaire se situait situé entre 800.000 et un million de personnes, à comparer aux 4,9 millions de personnes couvertes par le régime social agricole (salariés et ayant-droits inclus). Cette forte proportion était alors considérée comme découlant de la modestie des revenus d'un grand nombre de ressortissants du régime. En réalité, il n'est actuellement (), près de deux ans après sa mise en place, que beaucoup plus faible, à hauteur de 33.950 pour les non-salariés, et de 116.887 pour les salariés, soit un total de 150.000 bénéficiaires, ce que confirment les constatations de terrain résumées dans le tableau ci-dessous.
Cette situation résulte de nombreuses raisons dont l'effet se cumule :
- l'effet de seuil, lié au montant de 3.500 francs de ressources mensuelles, relevé à 3.600 francs à compter de 2001. Ce plafond est évidemment rapidement dépassé, ainsi que l'a relevé la communication précitée de la commission des Affaires sociales de l'Assemblée nationale, notamment dès lors que les demandeurs sont propriétaires de leur logement, compte tenu du forfait ajouté, dans ce cas de figure, à leurs ressources effectives (). Les bénéficiaires de l'AAH et des principaux minima sociaux sont également demeurés écartés, car le relèvement du seuil s'est accompagné dans le même temps d'un relèvement de leur propre montant de 2,2%, qui a fait repasser cette allocation au-dessus du seuil de la CMU complémentaire. Par ailleurs, le dispositif a été élaboré sur la base d'informations incomplètes, les exploitants et retraités agricoles disposant souvent de ressources non connues de la MSA. Enfin, les subtilités de l'administration fiscale pour considérer que les différentes aides communautaires sont ou non prises en compte dans le bénéfice forfaitaire conduit à retenir dans le revenu à comparer au seuil certaines de ces primes communautaires, et notamment celles qui sont considérées comme compensant des pertes de revenus, et qui ne sont pas elles-mêmes imposables (notamment les ICHN ()). En tout état de cause, l'écart constaté en pratique entre prévisions et réalisations est en grande partie imputable à une mauvaise préparation du dispositif ;
- une partie importante de la population bénéficiait déjà d'une couverture maladie complémentaire. Soit par fierté, soit par crainte de ne plus pouvoir revenir dans ce type de régime complémentaire en cas d'exclusion du bénéfice de la CMU compte tenu, notamment, de l'augmentation des retraites modestes, soit par manque d'information, de nombreux agriculteurs ne demandent pas le bénéfice de la CMU complémentaire, pourtant gratuite.
Quant au coût annuel du panier de soins, les différentes estimations communiquées à votre Rapporteur ne laissent de susciter l'interrogation. Elles sont en effet très variables, mais, en règle générale, atteignent ou dépassent le montant forfaitaire de 1.500 francs, sans même qu'y soit intégré le coût des dépenses hospitalières. Les données collectées pour l'ensemble de la CMU conduisent à un panier de soins de 1.730 Francs par personne.
Au demeurant, en termes de coût par personne, il semble que le dispositif n'ait pas encore atteint son plein régime, notamment en matière de soins dentaires.
Corse |
Allier |
Eure-et-Loir |
Ariège (hors retraités) |
Tarn-Aveyron | |
Nombre de bénéficiaires exploitants |
569 |
535 |
66 |
332 |
1.193 |
Nombre d'exploitants, actifs et retraités et ayant-droits |
11.499 |
25.377 |
15.775 |
5.154 |
77.000 |
Taux de bénéficiaires exploitants (en %) |
4,9 |
2,1 |
0,4 |
6,4 |
1,5 |
Nombre de bénéficiaires salariés |
1.116 |
702 |
380 |
354 |
2.007 |
Nombre de salariés agricoles, actifs, retraités et ayants-droits |
10.739 |
17.703 |
16.304 |
6.811 |
68.000 |
Taux de salariés bénéficiaires (en %) |
10,4 |
3,9 |
2,3 (*) |
5,1 |
2,9 |
Coût annuel moyen du panier de soins (en francs/personne consommante) (en francs) |
1.103 1.570 de coût prévisionnel pour les salariés |
1.296 coût global moyen par personne du 1/4/2000 au 31/3/2001 |
nc |
1.124 F En projection sur 2001 sur la base du premier trimestre : 1.846 |
1.258 |
Source : Caisses de MSA
(*) A comparer au taux de bénéficiaires de la CMU complémentaires parmi les salariés gérés par le régime général, c'est-à-dire la CPAM d'Eure-et-Loir : 22.798 bénéficiaires sur 342. 814 personnes, au 31/12/2000, soit un taux de 7%.
Enfin, votre Rapporteur considère qu'il y a légitimement lieu de s'interroger sur les résultats de la substitution de la CMU aux dispositifs d'AMD (aide médicale départementale) préexistants. En effet, les départements qui avaient réalisé des efforts significatifs en ce sens () ont vu leur DGF réduite du montant de leur AMD à la fois obligatoire, mais également facultative. Dans le même temps, il ressort des contrôles des caisses que le taux de refus de reconduction des dossiers de CMU des anciens bénéficiaires de l'AMD admis automatiquement au départ dans le dispositif de la CMU, lors de l'examen des leurs ressources, conduise à réduire significativement le coût de la CMU pour l'État (au-delà du fait qu'il exclut les intéressés de la couverture sociale qui était censée devenir « universelle »). Selon la communication précitée de la commission des Affaires culturelles, familiales et sociales de l'Assemblée nationale, environ un million de personnes devraient sortir de la CMU complémentaire car leurs ressources dépassent le plafond spécifique de 4.000 francs par mois. Selon les données communiquées par la caisse de MSA de l'Ariège, un tiers des dossiers examinés à la mi-juillet donnait lieu à une telle exclusion de la CMU complémentaire.
Votre Rapporteur s'est une nouvelle fois rendu en Corse en juillet 2001. Depuis lors, le contexte dans lequel la direction de la Caisse s'efforce de redresser la situation de la mutualité sociale agricole dans les deux départements s'est encore dégradée, après le plasticage de la voiture du directeur le 3 octobre dernier.
La situation administrative de la caisse de Corse est structurellement déséquilibrée. En l'absence de toutes réserves, la caisse ne peut se financer que par ses cotisations techniques, et par l'allocation d'adaptation que lui consent, année après année, la caisse centrale de MSA, bien que ce dispositif soit, en principe, transitoire. Compte tenu du faible taux de recouvrement de la Caisse, ses recettes apparaissent donc fortement contraintes.
Inversement, ses dépenses sont grevées de charges de personnels spécifiques. Ainsi, les rémunérations y sont en moyenne plus élevées de 30% que sur le continent, alors que la compétence des agents y est sensiblement moindre. Le passage aux trente-cinq heures a été opéré par une diminution du temps travaillé à trente-et-une heures trente, soit 10% de moins. De surcroît, l'accord local ayant entériné cette pratique insulaire, agréé par la tutelle, prévoit également un jour de congé supplémentaire tous les 26 jours de travail, soit de cinq à dix jours de congé supplémentaires. Près de 10% des agents de la caisse (11 personnes sur 132) sont actuellement en congé pour maladie de longue durée, sans même prendre en compte les nombreux congés maladie de plus de trois mois. Enfin, le taux d'absentéisme pour les seules absences de maladie et d'enfants malades s'élève à 13%, soit un retour au niveau de 1998, témoignant sans doute d'une nouvelle démotivation des personnels.
D'un point de vue fonctionnel, l'équilibre de la caisse de Corse n'est pas envisageable de manière réaliste avant de longues années, et ne pourra être obtenu qu'au prix d'efforts que la caisse ne paraît pas actuellement en mesure de mettre en _uvre, et d'allocations d'adaptation lourdes et durables à la charge de la Mutualité sociale agricole. Celle-ci, pour éviter une cristallisation définitive de la situation de la caisse de Corse, poursuit son propre effort sous la forme d'un apport significatif en personnels détachés du continent.
Rompant avec une pratique souple qui avait conduit à des excès inacceptables, la caisse de Corse a réalisé d'incontestables efforts en matière d'attribution et de contrôle des prestations sociales.
Ainsi, sur les 114 () enquêtes menées sur des prestations familiales, 49 ont conduit soit à un rejet de la demande, soit à une suppression du bénéfice de la prestation. De même, sur les 78 enquêtes effectuées dans le cadre d'attributions d'allocations du FSV, 16 ont conduit à un rejet. Pour sa part, le nombre d'attribution de rentes d'accident du travail pour les salariés est passé, entre 1998 et 2000, de 103 à 28. Pour les exploitants, le nombre de RMI et de pensions d'invalidité attribués ont sensiblement diminué, respectivement de 30 et de 45% entre 1997 et 2000. De même, les suppressions et les refus de pension d'invalidité sont devenues habituelles, après avoir été inexistantes jusqu'en 1997. En revanche, il y a lieu de s'interroger sur la croissance renouvelée des attribution d'incapacité permanentes de moins de 10%, revenues à leur niveau de 1998.
Après un début relativement allant, relaté dans le rapport spécial de l'an passé, la procédure de contrôle de la régularité des conditions d'affiliation du stock des exploitants subit un ralentissement très marqué.
Pour les éleveurs de bovins, pour lesquels les difficultés étaient a priori les moins fortes puisqu'il est difficile d'élever des bovins sans un minimum de garanties sur la disposition de terres, sur les 390 qui n'avaient pas répondu aux demandes de justificatifs de la caisse, 73 ont pu être régularisés, 80 ont été radiés suite à cessation d'activité, 26 ont été radiés d'office, 3 étaient décédés, mais 185 demeuraient en instance de contrôle, - essentiellement pour absence de titre ou surface insuffisante-. La caisse demeurait en attente d'instructions, demandées notamment à la caisse centrale, pour décider de la suite à donner à ces dossiers. La direction de la caisse a décidé, dans ces conditions, de considérer comme en situation régulière jusqu'au 1er janvier 2002 les éleveurs dont le dossier restait à instruire.
Pour les éleveurs caprins, ovins et porcins, en revanche, le schéma directeur départemental des structures, duquel découle la détermination de la ½ SMI, condition d'affiliation, élaboré sous l'autorité du préfet, a assez rapidement conduit à des difficultés d'application. En effet, un grand nombre d'éleveurs caprins sont dans l'incapacité de produire les justificatifs des surfaces nécessaires pour leur affiliation. Dans ces conditions, la situation paraît aujourd'hui « bloquée ». Faute d'une révision du schéma, demandée a posteriori par les organismes professionnels pourtant associés à son élaboration, et que le conseil d'administration de la Caisse a tenté de force, mais naturellement avec une annulation de sa délibération par son autorité de tutelle puisque le conseil n'a aucun pouvoir en matière d'assujettissement, la situation paraît actuellement « bloquée ». De surcroît, certaines positions adoptées publiquement par les pouvoirs publics, et notamment le précédent préfet de la région de Corse (cf. infra), n'ont pas simplifié la gestion de ces difficultés par la caisse.
Ainsi, au 22 juin dernier, sur les 1 876 dossiers à régulariser ayant donné lieu à un courrier de demandes de pièces justificatives auprès des exploitants affiliés, 1 141 ont fait l'objet des retours attendus. En revanche, -et ces nombres constituent un bon indicateur de la qualité des dossiers jusqu'alors tenus par la caisse-, 274 sont restés sans aucune réponse, 36 lettres recommandés ont été refusées ou n'ont pas été demandées à la Poste, 169 ont donné lieu à radiation suite à décès ou cessation d'activité, 22 n'habitaient pas à l'adresse indiquée. La situation demeurait figée à ce stade de la procédure lors de la venue de votre Rapporteur en juillet dernier.
Le redressement du taux de recouvrement de l'encours constituait à l'évidence le premier objectif à atteindre pour la Caisse, comme l'a d'ailleurs fixé la convention d'objectifs et de gestion en vigueur. Cet objectif a pu être atteint par la caisse en 1999 et dépassé en 2000, en ce qui concerne les cotisations nouvellement émises. En revanche, les objectifs assignés sur les retards de cotisations n'ont pas pu être atteints.
Nouvelles cotisations |
Stock | ||||
Taux -cible |
Taux réalisé |
Taux réalisé hors factures sanctions |
Taux cible |
Taux réalisé | |
1999 |
65 |
76 |
57 |
20 |
7 |
2000 |
75 |
81 |
79 |
25 |
9 |
2001 |
85 |
25 |
Source : caisse de MSA de Corse
Mais, comme l'indiquait une réponse de la direction de la caisse au questionnaire écrit de votre Rapporteur, « pour l'exercice 2001, il convient d'être très prudent quant à la confirmation de cette évolution positive, compte tenu des attentes sensibles, souvent exprimées par un nombre important d'adhérents, qu'ils soient ou non débiteurs de cotisations, du fait des dispositifs d'effacement de la dette actuellement en gestation ». Une telle dégradation demeurait encore éventuelle au moment où votre Rapporteur s'est rendu en Corse, mais la faiblesse du taux de recouvrement (40%) du premier appel de 2001 semblait en confirmer la vraisemblance.
Dans le même sens, la demande formulée conjointement par le préfet de région et par le Trésorier payeur général aux créanciers membres de la commission régionale de concertation des créanciers (cf. infra) d'éviter d'intensifier les procédures de recouvrement sur les exploitants qui n'ont pas été retenus sur la liste des demandeurs d'audit, telle qu'elle figure au compte-rendu de la réunion d'installation de ladite commission, le 25 septembre 2000, n'a guère pu contribuer à soutenir le nécessaire effort de recouvrement de la caisse.
On ne saurait être plus clair quant aux risques de retour aux errements du passé.
Le ministre de l'Agriculture et de la pêche a indiqué à la presse et aux représentants du monde agricole, lors de sa visite à Bastia le 4 mai dernier, qu'il disposerait prochainement des « moyens juridiques et financiers de régler rapidement et définitivement le problème de l'endettement social agricole ». Une telle déclaration s'est effectivement avérée, comme le craignait déjà l'an dernier votre Rapporteur, être un signal avant-coureur de la volonté de mettre en _uvre un nouveau plan de règlement de la dette sociale agricole, dans le prolongement des douze précédents plans de désendettement en vingt ans, que le rapport () de la commission d'enquête de l'Assemblée nationale sur l'utilisation des fonds publics et la gestion des services publics en Corse, remis au Premier ministre par son président, -l'actuel ministre de l'Agriculture et de la Pêche-, avait dénoncé en des termes qui, eux, ne prêtaient pas à l'ambiguïté.
Le Gouvernement a cherché, en contradiction avec les conclusions de la commission d'enquête de l'Assemblée nationale, à mettre en place un plan de remise -pour l'instant partielle- de la dette sociale des exploitants, tant en leur nom propre qu'en tant qu'employeurs. L'administration considère que ce plan est vertueux, en ce qu'il n'organise pas un « désendettement » général, inconditionnel et immédiat, mais soumet les réductions de dette sociale à un examen personnalisé, et est subordonné au paiement régulier des cotisations courantes. Pour autant, il s'agit bien d'un nouvel effort destiné à permettre aux exploitants qui n'ont pas acquitté leurs cotisations sociales pendant des années de continuer leur exploitation comme si de rien n'était, effort dont les exploitants du continent sont totalement exclus.
L'an passé, votre Rapporteur avait déjà indiqué son étonnement devant la mise en place, sans texte, d'une commission régionale spécifique, la commission régionale de conciliation des créanciers, destinée à mettre en présence les principaux créanciers sociaux et bancaires des exploitants corses, chargée de rechercher des plans de remboursement compatibles avec la survie des exploitations très endettées, mais néanmoins économiquement viables.
Cette commission, devant laquelle 355 personnes () ont porté leur dossier, est évidemment concurrente des structures de la MSA, chargées de la même mission, mais, quant à elles, prévues par les textes. La coexistence de ces deux structures, dont celle dotée d'un réel pouvoir de décision n'intervient qu'en second, alors que, jusqu'en juin 2001, il a été prévu de l'exclure de la première à un niveau autre que technique, ne va évidemment pas sans poser des problèmes quasiment insurmontables de droit et de légitimité, d'autant que les conditions acceptées par la première sont sensiblement plus favorables que celles qui s'imposent réglementairement à la seconde. Ainsi, la Commission régionale de conciliation accepte un étalement de l'encours et du précompte ouvrier, alors que la commission de règlement amiable exige en principe leur règlement préalable. La durée d'étalement des plans peut atteindre, voire dépasser 15 ans, au lieu d'un maximum habituel de 5. Aucun versement initial substantiel n'est exigé, et les prises de garantie ne sont pas obligatoires.
Tout d'abord, une enveloppe de 100 millions de francs (15 millions d'euros) a été ouverte sur le budget 2000 en période complémentaire, par la voie réglementaire, par un arrêté du 23 janvier 2001. Surtout, les conditions dans lesquelles les dettes sociales de certains exploitants agricoles corses sont susceptibles d'être ainsi prises en charge par l'État demeurent peu transparentes. Au surplus, cette prise en charge d'arriérés de cotisations est en totale contradiction avec l'orientation retenue partout ailleurs sur le continent, où le report constitue la règle de principe, et l'annulation de créance l'exception.
Globalement, cette opération budgétaire devrait permettre de réduire de 15,2 millions d'euros (100 millions de francs) les dettes sociales, au titre de leurs cotisations personnelles, des 380 exploitants corses ayant déposé une demande d'audit auprès de la commission régionale de concertation, sans le moindre débat parlementaire sur l'opportunité d'affecter ces excédents de constatations de recettes à la dépense en cause, alors qu'une gestion saine aurait naturellement consisté à utiliser ces produits supplémentaires pour réduire le déficit d'exécution du budget annexe par rapport aux prévisions, et non à les utiliser pour « éponger » les dettes sociales des seuls exploitants corses. Compte tenu des difficultés à définir des critères acceptables pour définir les éventuels bénéficiaires de ces montants, l'enveloppe de 100 millions de francs semble cependant pour l'instant encore intacte, et il est particulièrement difficile, dans ces conditions, de comprendre la précipitation avec laquelle l'ouverture de ces crédits a été décidée. Il n'en demeure pas moins que les exploitants corses pourraient bénéficier d'un montant supérieur à celui prévu pour les exploitants agricoles en difficulté de l'ensemble de la France continentale!
S'agissant de la dette sociale au titre des cotisations patronales, le Gouvernement a cherché une voie encore plus critiquable, puisque cette fois contraire à la Constitution elle-même.
Par un premier amendement présenté le jour de l'examen en première lecture à l'Assemblée nationale du second projet de collectif budgétaire pour 2000, inséré à l'extrême fin du projet de texte, le Gouvernement a souhaité faire entériner par la représentation nationale un dispositif permettant la remise de dettes sociales des exploitants corses au titre des cotisations dues pour leurs salariés. Ce dispositif a été définitivement adopté par l'Assemblée nationale, après avoir été rejeté par le Sénat. Mais le Conseil constitutionnel l'a annulé par sa décision du 28 décembre 2000 (n°2000-441 DC) aux motifs suivants, que votre Rapporteur estime utile de rappeler ici in extenso.
« Considérant qu'aux termes du premier paragraphe du I de l'article 64 : « Les exploitants agricoles installés en Corse et affiliés auprès de la caisse de mutualité sociale agricole de Corse au 1er janvier 2001, dont la viabilité économique de l'exploitation a été démontrée par un audit, qui sont à jour de leurs cotisations sociales se rapportant aux périodes d'activité postérieures au 31 décembre 1998 et qui ont renvoyé à la caisse de mutualité sociale agricole de Corse leur déclaration de revenus professionnels conformément aux dispositions en vigueur, peuvent demander, dans un délai de douze mois à compter de la publication de la présente loi, à la caisse de mutualité sociale agricole de Corse, à conclure un plan d'apurement de leurs dettes, antérieures au 1er janvier 1999, relatives aux cotisations patronales de sécurité sociale ainsi qu'aux pénalités et majorations de retard correspondantes. Cette demande entraîne de plein droit une suspension des poursuites engagées par la caisse afférentes auxdites dettes... » ; qu'il résulte du II du même article que le plan d'apurement peut comporter des mesures de report et de rééchelonnement des paiements des dettes de cotisations patronales de sécurité sociale, des mesures de remise de ces mêmes dettes, ainsi que des réductions ou suppressions des majorations et pénalités de retard afférentes aux cotisations, même si le principal n'a pas été réglé ;
Considérant que les sénateurs requérants font grief à ce dispositif de « créer une inégalité entre les exploitants agricoles installés en Corse et ceux du continent, ce qui est contraire au principe constitutionnel d'égalité des citoyens devant la loi » ; qu'ils font valoir que cette inégalité de traitement « ne peut être que difficilement justifiée par une différence fondamentale de situation » ;
Considérant que le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit ;
Considérant qu'il ne résulte ni des termes de la disposition contestée ni des travaux parlementaires qu'une situation particulière à la Corse justifierait que les exploitants agricoles qui y sont installés bénéficient, dans les conditions précisées ci-dessus, d'un plan d'apurement de leurs dettes sociales ; que la seule circonstance que les retards observés dans le paiement des cotisations sociales agricoles sont plus importants qu'ailleurs ne saurait justifier la différence de traitement entre les exploitants agricoles installés en Corse et ceux installés sur le continent qui seraient dans une situation analogue ; qu'en outre, ni la loi ni les travaux parlementaires n'évoquent un motif d'intérêt général de nature à fonder une telle différence de traitement ; que, dès lors, l'article 64 est contraire à la Constitution ; (...) »
Compte tenu de cette annulation, le Gouvernement a proposé sans désarmer un nouvel amendement, d'un esprit très proche du premier précité, dans le cadre de la première lecture du projet de loi relatif à la Corse. Cet amendement a été, à l'instar du précédent, déposé très peu de temps avant son examen le 17 mai dernier, et, de nouveau, inséré à la fin du dispositif (article 45 bis sur 50 articles), sans permettre la moindre intervention d'un parlementaire en séance, compte tenu du délai tardif de dépôt de l'amendement. L'amendement ainsi adopté prévoit un dispositif d'aide aux exploitants employeurs de main d'_uvre, en lieu et place d'une remise de dette, versée cependant directement par le Trésor public à la caisse de MSA. Par ailleurs, le Gouvernement a, cette fois, tenté de justifier le dispositif en invoquant « la situation spécifique de la Corse » qui, selon lui, serait caractérisée par un revenu annuel moyen réduit (en 1998, 24.000 F contre 80. 000 F sur le continent), entraînant un endettement supérieur à celui du continent. Il a également été souligné que la dette sociale découlait en partie de défaillances dans le recouvrement des cotisations qui ont donné lieu à accumulation d'une dette sociale considérable. Enfin, et en conclusion, cet amendement serait vital pour l'avenir de l'agriculture en Corse, pour les exploitations économiquement viables mais incapables de procéder au remboursement de leur dette.
Votre Rapporteur soulignera néanmoins que le revenu dont le Gouvernement a fait état est celui résultant des calculs des bénéfices agricoles forfaitaires, dont la représentativité de la réalité économique n'est pas dépourvue d'ambiguïté. La différence est en effet d'environ 1 à 3 avec le revenu économique. De surcroît, les bénéficiaires potentiels de ce dispositif sont des exploitants dont la dette sociale est importante, et qui n'appartiennent vraisemblablement pas à la catégorie des revenus les plus faibles. Enfin, le second mécanisme proposé, qui aurait un coût de 150 millions de francs, créé la même rupture d'égalité devant la loi que le premier, annulé par le Conseil constitutionnel. En conséquence, il y a tout lieu de penser qu'il subira le même sort, sauf à ce que le juge constitutionnel se déjuge lui-même à un an d'intervalle.
La gestion de la caisse de MSA de Corse présente la particularité que de multiples autorités interfèrent avec celle-ci, parfois pour garantir le respect des textes qui s'imposent, parfois en contradiction avec eux.
Ainsi, le Parquet apparaît plutôt légaliste, notamment sur la question de l'opportunité de poursuivre les rétentions de précompte ouvrier, délit pénalement répréhensible. Par un courrier du 18 avril 2001 au président de la caisse et par un communiqué de presse destiné à l'opinion publique, le Procureur de la République de Bastia a fait savoir, que la suspension des poursuites civiles dans le cadre du règlement de la dette sociale n'avait aucun effet en matière pénale. En conséquence, il a demandé à la caisse de signaler toutes les rétentions de précompte constatées, ce que celle-ci fait effectivement.
En revanche, la tutelle de la MSA tend à exercer sa mission d'une manière peu conforme aux textes, en exerçant une forme de pouvoir de substitution à la direction et au Conseil d'administration, étranger à la notion même de tutelle. Ainsi, le préfet de Région, par un courrier du 16 mars 2001, a affirmé qu'«aucun agriculteur dont le statut d'exploitant est avéré ne serait radié au seul prétexte de l'absence de titres », alors que le pouvoir de poser ce principe, au demeurant suffisamment vague pour pouvoir être interprété de multiples manières, ne lui appartient pas, fût-ce en qualité de représentant de la tutelle. En effet, comme l'indiquait d'ailleurs le courrier du 28 décembre 2000 de l'administration centrale, annulant une délibération du conseil d'administration demandant au directeur de la caisse de suspendre la campagne de contrôle des affiliations, c'est le directeur, et lui seul, qui, en application du décret n°63-279 du 6 avril 1963, est « responsable de l'ensemble des opérations préalables et constitutives du recouvrement des cotisations sociales ». Le pouvoir de tutelle ne permet ni substitution ni injonction au directeur pour ce faire. Le préfet ne semble avoir, en l'espèce, que la possibilité de demander à la direction régionale de l'agriculture de la forêt de revoir le schéma départemental des structures, sans doute trop complexe à gérer.
Un tel comportement pourrait être passible d'un déféré en CDBF, s'il devait donner lieu à des décisions de la caisse en contradiction avec les textes en vigueur, et si la saisine de cette Cour n'était pas aussi limitée. Encore, faute d'un pouvoir de substitution juridiquement fondé du préfet, la responsabilité de telles décisions pourrait-elle être reportée sur la direction de la caisse elle-même, ce qui serait sans doute particulièrement injuste, compte tenu des efforts que celle-ci a déployés depuis deux ans.
Encore le préfet de Corse n'a-t-il pas l'exclusive de ce type de comportement, peu respectueux des textes. Ainsi, le directeur de l'administration centrale compétente a-t-il jugé bon d'informer par écrit la caisse de MSA () que les procès-verbaux de la commission régionale de conciliation étaient opposables à la caisse de MSA, et permettraient au directeur de conclure les échéanciers proposés par celle-ci, une fois ces conditions acceptées par les débiteurs, alors même que seules les décisions de la CRA ont un réel support juridique.
En revanche, il y a lieu de se féliciter du déclenchement, certes bien tardif, d'une procédure de destitution du mandat d'administrateur du Centre d'économie rurale et de gestion de Corse du Sud, demandé par votre Rapporteur l'an dernier compte tenu de la dette sociale accumulée par cet organisme, au demeurant chargé de prodiguer des conseils de gestion aux agriculteurs...La tutelle a, en l'espèce, attendu que le texte réglementaire nécessaire pour appliquer la procédure prévue par l'article L.723-39 du code rural soit paru, avec le décret du 25 novembre 1999. Mais votre Rapporteur observera que cette parution est antérieure de deux ans au lancement de la procédure le 9 octobre 2001, ce qui témoigne d'une lenteur certaine... La nouvelle rédaction de l'article L.723-21 du code rural prévue par l'article 10 du projet de loi de modernisation sociale () en fin de navette parlementaire, devrait heureusement rendre systématique le déclenchement de la procédure de destitution des administrateurs non à jour de leurs cotisations.
Au cours de sa séance du mardi 23 octobre, la commission des Finances, de l'Économie générale et du Plan a examiné les crédits du Budget annexe des Prestations sociales agricoles.
Après l'exposé de votre Rapporteur spécial, M. Alain Rodet a demandé si celui-ci disposait de données sur les ratios de coûts de gestion du régime agricole, et si certaines dérives passées, au niveau de la caisse centrale de la MSA, avaient été corrigées.
Votre Rapporteur spécial a répondu qu'effectivement, il avait existé un réel problème à la direction générale de la caisse centrale, mais que celui-ci avait été réglé par la nomination d'un administrateur provisoire, issu de la Cour des comptes, puis l'élection d'une nouvelle présidente intègre et rigoureuse, Mme Jeannette Gros, et la nomination d'un nouveau directeur, M. Daniel Lenoir. Ces dérives passées témoignent malheureusement du manque réel de contrôle de la tutelle sur l'ensemble des caisses. S'agissant des ratios de gestion, les frais de fonctionnement du régime ne sont pas inscrits au BAPSA, mais le fascicule budgétaire fournit quelques données globales en la matière. Au niveau des caisses, les écarts de ratios de gestion peuvent être importants, et résultent en partie des différences de taille des caisses. En effet, malgré la diminution lente mais sure des effectifs des personnes protégées, les présidents et conseils d'administration des caisses ne sont pas souvent favorables à des rapprochements qu'ils perçoivent essentiellement comme une source de perte d'autonomie, notamment pour des caisses de petite taille, sans voir leurs avantages possibles, dont témoigne par exemple le cas de la caisse fusionnée du Tarn-Aveyron. En tout état de cause, la division par quatre des effectifs protégés par rapport à la période de création des caisses ne permettra pas de maintenir indéfiniment des structures départementales partout, et il paraît raisonnable d'envisager de réduire le nombre de caisses à environ 25 à terme, même si cela demande beaucoup de courage politique, -alors même qu'il n'existe aujourd'hui quasiment pas d'incitation financière à opérer ces rapprochements-. Les orientations stratégiques récemment retenues par l'assemblée générale pour inciter aux rapprochements doivent être soutenus par des efforts financiers significatifs.
M. Jean-Louis Dumont a demandé si les critiques portées contre le fonctionnement du régime, et notamment en ce qui concerne la situation en Corse, n'étaient pas excessives.
Votre Rapporteur spécial a indiqué que tel ne lui semblait pas être le cas. Chacun de ses déplacements à la caisse d'Ajaccio se faisait d'ailleurs sous escorte policière, et, en 1999, deux escadrons de CRS avaient dû être mobilisés pour lui permettre d'accéder aux locaux, par la porte de service. Le « plasticage » récent de la voiture du directeur de la caisse témoigne également du sérieux de la situation. Toutefois, naturellement, la Corse n'est pas, en l'espèce, représentative du reste de la France. S'agissant plus généralement du régime, celui-ci présente par ailleurs la spécificité très intéressante d'une unité à la fois des trois branches famille, maladie et vieillesse, et du recouvrement, ce qui permet, à la fois des gains de productivité par rapport à d'autres régimes plus « éclatés », et assure un meilleur service aux agriculteurs avec un guichet unique.
M. Jean-Louis Dumont a indiqué, en ce qui concerne les perspectives de rapprochement des caisses départementales, que les réticences étaient encore vives, et que des efforts importants devraient encore être consentis. L'accueil réservé au rapporteur spécial lors d'une récente assemblée générale d'une caisse de l'Est de la France, au cours de laquelle celui-ci avait présenté des idées jugées sans doute encore trop novatrices, témoigne de ces difficultés.
Votre Rapporteur spécial a confirmé cette analyse, tout en soulignant qu'il lui paraissait impossible de laisser croire que les structures actuelles pourraient être indéfiniment maintenues telles quelles.
M. Pierre Hériaud a souhaité savoir à combien pouvait être estimé le financement public du BAPSA qui serait effectivement nécessaire en 2002, compte tenu des corrections de prévision qu'avait indiquées votre Rapporteur, et de combien devrait vraisemblablement être relevée la subvention de 271 millions d'euros actuellement prévue.
Votre Rapporteur spécial a indiqué que le déficit d'exécution pour l'année à venir lui paraissait difficilement pouvoir être inférieur à 1,15 milliard de francs, soit 175 millions d'euros, ce qui porterait le déficit avant subvention à 450 millions d'euros (3 milliards de francs), qui devrait être financé soit par un complément de subvention budgétaire, soit par un supplément de prélèvement sur le produit de la C3S.
M. Michel Suchod a demandé des précisions concernant les procédures comptables d'annulation des dettes sociales, notamment des exploitants corses.
Votre Rapporteur spécial a répondu que, en Corse, le dispositif utilisé avait été caractérisé par son aspect dérogatoire. Ainsi, les admissions en non-valeur, procédure comptable normale, n'étaient plus pratiquées, alors que la caisse se voyait jusqu'à l'an passé créditée par la caisse centrale, pour ses cotisations complémentaires qui financent les frais de fonctionnement des caisses, d'un montant égal à celui qu'elle émettait, et non à celui qu'elle recouvrait, sensiblement inférieur. Cette procédure particulièrement avantageuse par rapport au traitement des autres caisses présentait cependant l'inconvénient d'une réelle déresponsabilisation vis-à-vis des créances de la caisse.
La commission a ensuite examiné trois amendements de votre Rapporteur spécial, proposant :
- de supprimer dans les services votés les restitutions de TVA dans les dépenses du budget annexe, de façon à faire apparaître uniquement les recettes nettes de TVA, représentant un tiers du financement des 100 milliards de francs de dépenses du budget annexe, et à améliorer la sincérité des prévisions et la transparence du budget ;
- d'intégrer aux mesures nouvelles les dépenses prévisionnelles du futur régime d'assurance accidents du travail, normalement destiné à entrer en vigueur au 1er avril 2002. Le montant retenu, de 100 millions d'euros (656 millions de francs), est celui annoncé par la commission des affaires sociales pour procéder à la même opération de correction des agrégats de dépenses dans le cadre de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002. Il correspond à neuf mois de fonctionnement du nouveau régime ;
- de relever de 21 millions d'euros (138 millions de francs) les mesures nouvelles de dépenses de vieillesse, pour tenir compte de l'intention du Gouvernement, clairement manifestée dans le cadre du projet de loi de financement, de relever les pensions de 2,2% en 2002, et non de 1,9% comme il est prévu dans le projet de BAPSA.
Après que M. Pierre Hériaud eut indiqué que ces amendements lui paraissaient avoir un objectif louable de contrôle, et qu'ils lui semblaient mériter d'être adoptés, la commission a adopté ces trois amendements.
La commission a ensuite adopté, sur proposition de votre Rapporteur spécial, les lignes du budget annexe des prestations sociales agricoles figurant à l'article 33, ainsi amendé, et au paragraphe II de l'article 34, ainsi amendé et vous demande d'émettre un vote favorable à leur adoption.
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Votre Rapporteur spécial a ensuite annoncé le dépôt de huit amendements, qui concernent le régime social des exploitants agricoles, mais ont été rattachés au budget de l'Agriculture.
Un amendement à l'article 57 vise à limiter le bénéfice des majorations de retraites à ceux qui en ont besoin, en plafonnant ces majorations en fonction des avantages vieillesse reçus par les « polypensionnés» au titre d'autres régimes, tels qu'ils seront connus dans le répertoire nationale des retraites.
Sept amendements après l'article 58 proposent de :
- prendre en compte les déficits pour leur valeur réelle, et non nulle, dans l'assiette de la CSG perçue sur les exploitants agricoles, comme cela est fait pour les cotisations sociales ;
- supprimer l'assiette minimum d'assurance maladie, qui pénalise les exploitants les plus modestes ;
- supprimer la cotisation solidaire, d'un produit très faible, et non recouvrée dans certaines caisses, perçue sur les associés ne participant pas aux travaux de l'exploitation agricole ;
- demander au Gouvernement de réaliser une étude exhaustive sur le transfert de charges entre les régimes d'assurance maladie et d'accidents du travail, sous la forme d'un rapport au Parlement ;
- subordonner l'affiliation au régime agricole à l'autorisation d'exploiter normalement délivrée par la commission des structures ;
- interdire clairement l'affiliation en tant qu'exploitant agricole de fonctionnaires à temps plein, qui ne peuvent à la fois remplir une fonction publique et exercer une activité professionnelle privée en tant qu'agriculteur ;
- relever le plafond de déduction du revenu professionnel imposable prévu pour le « troisième étage » des retraites agricoles, en l'alignant sur celui, beaucoup plus favorable, prévu pour les autres professions indépendantes.
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N° 3320-42 .- Rapport de M. de Courson rapporteur spécial de la commission des finances sur le projet de loi de finances pour 2002 - prestations sociales agricoles.
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(1) §3 : « Toutefois les crédits limitatifs se rapportant aux dépenses d'exploitation [...] peuvent être majorés [...] par arrêtés du ministre des finances s'il est établi que l'équilibre financier du budget annexe tel qu'il est prévu par la dernière loi budgétaire n'est pas modifié et qu'il n'en résulte aucune charge complémentaire pour les années suivantes »..Si cette procédure n'est pas contradictoire avec le droit, il y a en revanche lieu de s'interroger sur le fait que l'excédent constaté ne porte que sur une recette -ponctuelle- du BAPSA, dont l'exécution -globale-au titre de l'exercice 2000 s'est pour sa part avérée déficitaire de 523 millions de francs (79,8 millions d'euros) par rapport aux prévisions de la loi de finances initiale et aux compléments de recettes (350 millions de francs de C3S, 2.211 millions de francs de subvention budgétaire) apportées par la loi de finances rectificative.
(2) Les recettes supplémentaires effectivement constatées pour cette taxe ne s'élèvent qu'à 86,3 millions de francs selon le compte général de l'Administration des finances pour le BAPSA pour 2000 , soit 669,314 millions de francs, contre 583 millions de francs initialement prévus. Mais cet écart est de 186 millions de francs, si l'on considère les données présentées dans le « vert ». Cette différence se retrouve dans le rapport sur l'exécution du BAPSA présentée par le ministre chargé de l'agriculture, suivant que l'on vise le tableau des crédits ouverts, ou celui des recettes prévues en loi de finances initiale.
(4) Soit moins de 25 millions de francs.
(5) Les dépassements de dépenses maladie se reproduisent chaque année, et se répercutent sur les réalisations car les prévisions initiales sont établies sur la base de données ne tenant pas parfaitement compte des prévisions révisées. Ainsi, en 2000, les dépenses ont excédé de 1 118 MF (+3,4%) les montants inscrits en loi de finances initiale. Ce dépassement provenait déjà principalement des soins de ville (+970 millions de francs, dont 236 millions de francs dus au « rebasement» de l'année 1999).
(6) Passé de 252 millions d'euros à la fin de 1997 à 246 millions d'euros à la fin 1998, puis à 111 millions d'euros à la fin 1999, et 31 millions d'euros à la fin 2000.
(7) DC n°2000-441 du 28 décembre 2000 relative à la seconde loi de finances rectificative pour 2000.
(8) + 4,1 points sur les revenus d'activité et de placement, +2,8 points pour les revenus de remplacement.
(9) Taxe sur les céréales, taxe sur les graines oléagineuses, taxe sur les betteraves, taxe sur les produits forestiers, cotisation additionnelle sur le foncier non bâti
(10) De 34,0 à 37,6 milliards de francs, soit une hausse de 3,6 milliards de francs.
(11) Les cotisations inscrites au BAPSA ne comprennent pas les cotisations complémentaires, qui financent les dépenses de gestion et d'action sanitaire et sociale des caisses.
(12) Dont les caractéristiques des redevables ont été utilement et récemment analysées par la CCMSA (Observatoire économique et social, août 2001)
(13) La loi de financement pour 2001 a précisé le mode de recouvrement de la CSG sur les revenus du patrimoine, et, dans le cas des redevables de la cotisation de solidarité sur les apporteurs de capitaux, l'a confié à la MSA.
(14) Pour 140.000 cotisants sur 200.000, soit 70%. L'assiette forfaitaire moyenne s'élève à 5.600 F, contre 8.800 F pour les autres.
(15) Au nombre de trente, dont certains, comme la Loire-Atlantique, la Charente-maritime, le Calvados et la Mayenne, ne méconnaissent pas a priori le phénomène sociétaire.
(16) Soit pour 65% des cotisants de solidarité, pour lesquels aucune assiette n'a pu être définie en 2000.
(17) La différence ne provient pas de la suppression de la majoration de l'assiette minimale en assurance-maladie, celle-ci, intervenue en 2001, ayant en principe déjà due être prise en compte dans les prévisions initiales pour 2001.
(18) 1,5 % des cotisations de l'ensemble de la France.
(19) Certes supérieure à la diminution du revenu agricole, compte tenu qu'une partie importante des exploitations quittées par des exploitants qui prennent leur retraite sont reprises par d'autres exploitant, par agrandissement, généralement rentable.
(20) La croissance des dépenses réelles en 2001, estimée, sur la base des données communiquées par l'administration pour la même période d'estimation (mi-septembre) s'élèverait à 3,1% , soit 35,27 milliards de francs en estimations révisées en 2001, à comparer aux 34,218 milliards de francs en estimations révisées en 2000. Rapportée aux dépenses 2001 révisées, le montant des dépenses réalistes pour 2002 ne pourrait être inférieur à 36,36 milliards de francs.
(21) 15,098 milliards de francs en septembre 2000, 16,046milliards de francs en septembre 2001, soit une croissance de 6,3%. Extrapolé aux prévisions de dépenses de septembre 2001, le montant des dépenses en 2002 s'élèverait au moins à 17,06 milliards de francs.
(22) Le chapitre 11-91 du BAPSA est habituellement inscrit à l'état F du projet de loi de finances (et l'est en particulier pour 2002).
(23) Le fonds de roulement ne représente plus que 220 millions de francs, soit 2,2% du besoin permanent de financement.
(24) Voire après une inscription en loi de financement de la sécurité sociale pour 2003, si le montant de l'excédent de déficit d'exécution est important et financé par une recette fiscale affectée, en application de la jurisprudence du Conseil constitutionnel sur le collectif budgétaire pour 2000 de la fin de l'année dernière.
(25) Du type Fonds de solidarité vieillesse (FSV), Fonds de financement pour la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale (FOREC), ...
(26) Caisses nationales d'assurance maladie, d'assurance vieillesse, d'allocations familiales.
(27) Par exemple, la caisse de l'Ariège disposait, dans son bilan 2000, de 25 millions de francs d'immobilisations financières nettes, et de 55 millions de francs de valeurs mobilières de placement, pour des dépenses annuelles totales hors prestations de 48 millions de francs. Le placement de ces réserves contribue ainsi significativement au bénéfice de gestion de la caisse.
(28) Ainsi, les dirigeants de la caisse de l'Ariège ont indiqué par écrit à votre Rapporteur que le principal obstacle à un éventuel regroupement résidait dans le risque de « perte de maîtrise de la gestion (organisation, financement,, ...), au profit de la métropole régionale. ».
(29) L'Eure-et-Loir n'a pas été en mesure de fournir les données correspondantes à votre Rapporteur.
() Ainsi, en Ariège, en 2000, le risque accidents du travail des non-salariés a dégagé un bénéfice de 1,76 million de francs, pour des cotisations de 1,5 millions de francs, compte tenu des 1,3 millions de francs de produits financier. Les prestations versées n'ont représenté que 619.000 F, soit 41% seulement des cotisations versées. Les provisions représentent pour leur part 3,3 millions de francs, soit 5 fois le montant des prestations annuelles. Le prélèvement de gestion s'élève pour sa part à 100.000 F, soit 16% des prestations versées. Le bénéfice constaté est récurrent : il était déjà de 1,32 million de francs en 1999.
(31) 1.907 F selon les hypothèses de calcul présentées devant le CSPSA le 18 septembre 2001.
() Proposition de loi n°3190 du 26 juin 200 , tendant à la création d'un régime de retraite complémentaire obligatoire pour les non-salariés agricoles, déposée par M. Germinal Peiro et le groupe socialiste.
() En application de l'article 154-Bis O A du code général des impôt, qui prévoit une déduction des cotisations de revenu professionnel, selon un dispositif qui ne constitue pas une option, et qui ne donne donc pas lieu à réintégration dans l'assiette des cotisations sociales définie par l'article L.731-15 du code rural.
(34) En application de l'article 154 bis du code général des impôts, qui prévoit une déduction du bénéficie imposable, laquelle fait l'objet d'une réintégration dans l'assiette sociale en application du 1er alinéa de l'article L.131-6 du code de la sécurité sociale.
(35) Ils sont par exemple totalement absents dans l'Allier. Dans ce département, les seules visites de représentants de la caisse sur place, après l'immatriculation, sont celles des conseillères sociales, dont le but n'est naturellement pas le contrôle des surfaces.
(36) L'article 25 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires dispose que : « Les fonctionnaires consacrent l'intégralité de leur activité professionnelle aux tâches qui leur sont confiées. Il ne peuvent exercer à titre professionnel une activité privée lucrative de quelque nature que ce soit. Les conditions dans lesquelles il peut être exceptionnellement dérogé à cette interdiction sont fixées par décret en Conseil d'Etat ». Le décret considéré n'ayant jamais été pris, c'est celui du 29 octobre 1936 qui s'applique. Celui-ci ne prévoit de dérogation que pour les trois types d'activité précitées, et à condition d'obtenir l'accord de l'autorité hiérarchique compétente. En pratique, les caisses de MSA acceptent d'affilier comme chefs d'exploitation, à priori professionnels, des agents publics, dès lors que ceux-ci peuvent produire une attestation portant accord de leur autorité hiérarchique.
(37) Ainsi, à titre d'illustration, dans le Tarn-Aveyron, 40% des redressements correspondent à des amortissements réputés différés à tort et déduits irrégulièrement de l'assiette sociale, 15% résultent de déduction de charges personnelles, 10% d'une confusion dans les années déclarées, 5% de non-déclaration de la DJA ou de déduction, aujourd'hui interdite, de l'abattement fiscal jeune agriculteur.
(38) La caisse de Corse est « hors-norme ».
(39) Domaine de pathologie susceptible de correspondre à des accidents, soit professionnels, soit de la vie privée, en application du dispositif relatif aux accidents du travail pour les exploitants agricoles.
(40) En ignorant deux cliniques et un centre hospitalier du même département, ainsi que les hospitalisations hors départements.
(42) 306 francs pour une personne seule, 536 francs pour un couple, quelle que soit l'état, -vétuste ou moderne-, du logement.
(43) ICHN : indemnités compensatrices de handicap naturel
(44) Notamment, comme l'indique sans ambiguïté la communication de Mme Odette Grzegrzulka, au nom de la commission des affaires culturelles familiales et sociales de l'Assemblée nationale,en date du 30 mai 2001, sur l'application de la loi portant création de la CMU, la dizaine de départements qui proposaient une aide médicale aux personnes dont kes revenus dépassaient 3.600 francs.
(45) Représentant respectivement 12,5% des dossiers de RMI, 2% des dossiers d'allocations logement, et la quasi-totalité des 23 allocations de parent isolé.
(47) N°1077 du 3 septembre 1998.
(48) Dont une trentaine présentent un montant d'impayé supérieur à un million de francs.
(49) Par un courrier du 23 novembre 2000, au demeurant non signé.
(50) « Ne peuvent être élus comme membres du conseil d'administration d'un organisme de mutualité sociale agricole ou perdent le bénéfice de leur mandat :« 1° Les personnes appartenant aux premier et troisième collèges qui n'ont pas satisfait à leurs obligations en matière de déclarations et de paiements obligatoires à l'égard des organismes de mutualité sociale agricole dont elles relèvent (...) »