ASSEMBLÉE NATIONALE

 

 

 

 

COMMISSION de la DÉFENSE NATIONALE et des FORCES ARMÉES

 

 

 

 

COMPTE RENDU N° 8

(Application de l'article 46 du Règlement)

 

 

 

 

Mardi 20 octobre 1998
(Séance de 17 heures)

 

 

 

 

 

Présidence de M. Paul Quilès, Président,
puis de M. Didier Boulaud, Vice-Président

 

 

 

 

SOMMAIRE

 

 

 

 

 

 

pages

Projet de loi de finances pour 1999 : Défense

Avis : Dissuasion nucléaire (M. René Galy-Dejean, rapporteur pour avis)

2

Gendarmerie (M. Georges Lemoine, rapporteur pour avis)

4

Services communs (M. Michel Meylan, rapporteur pour avis)

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La Commission a tout d’abord examiné les crédits de la Dissuasion nucléaire pour 1999, sur le rapport de M. René Galy-Dejean, rapporteur pour avis.

M. René Galy-Dejean a précisé que, si son précédent avis se voulait une contribution parlementaire à la réflexion sur le fonctionnement de la dissuasion dans une situation constitutionnelle particulière et un contexte budgétaire contraint, il avait plus particulièrement choisi cette année, suite aux essais nucléaires indiens et pakistanais, d’étudier l’action diplomatique internationale en matière de désarmement nucléaire et de lutte contre la prolifération.

Abordant la nécessaire mais désespérante quête diplomatique du désarmement nucléaire, il a constaté que les mesures prises dans un cadre international n’atteignaient pas leurs objectifs. Ainsi, le Traité START I, s’il diminue bien le nombre des armements russes et américains, a toutefois pour effet pervers d’améliorer les performances des arsenaux par un accroissement quasi-généralisé du nombre de têtes par rapport aux vecteurs. S’agissant du Traité START II, les échéances de franchissement de seuil à la baisse ont été repoussées lors du sommet russo-américain d’Helsinki en mars 1997 et la Douma russe refuse la ratification du Traité pour tenter de contrer l’élargissement à l’est de l’OTAN.

Le Traité ABM conclu en 1972 avait logiquement pour objectif de rompre la dynamique de la lutte de l’épée et du bouclier par la suppression du bouclier que constituaient les défenses antimissiles dans la perspective d’une limitation de la course aux armes offensives. En fait, les deux puissances, notamment les Etats-Unis, ont poursuivi des recherches portant sur les lasers de neutralisation et les missiles antimissiles de haute vélocité, d’où un troc russo-américain dérisoire dans lequel les Etats-Unis renonçaient à tester leurs missiles de haute vélocité avant avril 1999 avec, pour contrepartie, la faculté de poursuivre un programme antimissile, dans le but de se doter à court terme d’un système antimissile de théâtre.

Le Traité de non-prolifération nucléaire (TNP) prétendait limiter à cinq le nombre des membres du club nucléaire. De fait, dès son entrée en application, d’autres pays, notamment Israël, se sont dotés ou ont cherché à se doter d’armements nucléaires. Récemment, les essais indiens et pakistanais ont rompu les digues que le TNP s’était efforcé d’ériger.

Le Traité d’interdiction complète des essais nucléaires présente ce paradoxe de devoir son élaboration à une initiative de l’Inde. Or, peu de temps après l’issue des négociations, le parti extrémiste indien BJP accédait au pouvoir, et préparait puis exécutait une série d’essais nucléaires.

La prolifération se présente essentiellement sous deux formes : la dissémination des technologies et des cerveaux à partir de pays possédant un savoir-faire nucléaire militaire et la contrebande de matières fissiles, l’acquisition éventuelle d’armes tactiques à des fins terroristes. Le quotidien Al Hayat rapportait le 12 octobre dernier des déclarations selon lesquelles M. Oussama Ben Laden, milliardaire saoudien, soutenant les Talibans afghans, se serait procuré des armes nucléaires en provenance d’anciennes républiques soviétiques.

On dénombre quatre principales régions proliférantes : le Moyen-Orient avec l’Iran, la Syrie et l’Irak, le pourtour sud-ouest de la Méditerranée avec l’Algérie et la Libye, l’Asie avec la Corée du Nord et le sous-continent indien désormais nucléarisé. Les pays proliférants de ces régions, avec des complicités diverses, sont désormais devenus soit des pays du seuil nucléaire, soit des pays nucléaires de fait.

Face à ces menaces potentielles et à la prudence avec laquelle Russes, Américains et Chinois font semblant de désarmer, la question se pose de savoir si la France saura ou non, dans les temps qui viennent, tirer la leçon d’un tel état de choses pour ce qui concerne sa posture nucléaire des années à venir.

Abordant la situation budgétaire des programmes concourant à la dissuasion dans le projet de loi de finances pour 1999, M. René Galy-Dejean l’a estimée contrastée. Il a considéré que la chute des autorisations de programme était extrêmement préoccupante. La réduction de 18,9 % figurant au projet de budget par rapport au montant inscrit en loi de finances pour 1998 vient s’ajouter à la diminution de 17 % enregistrée l’année précédente, ce qui conduit à une chute globale des autorisations de programme du tiers en deux années. Cette diminution apparaît plus inquiétante encore si l’on se réfère au contexte international décrit précédemment.

En revanche, pour ce qui est des perspectives à court terme, deux éléments positifs doivent être relevés. Tout d’abord, les crédits de paiement présentent une augmentation parfois sensible. Il a rappelé qu’il avait, l’an dernier, alerté l’Assemblée nationale sur la situation plus que préoccupante du programme M51 dont l’avenir pouvait paraître compromis. Il s’est félicité de la décision intervenue à la suite des travaux du comité ad hoc constitué au sein de la DGA dans le cadre de la revue de programmes. Aujourd’hui, non seulement le projet est confirmé et les crédits souhaitables y sont consacrés, mais la mise en service du M51 est avancée de deux ans, assurant désormais l’avenir de la composante nucléaire maritime et, de surcroît, en améliorant les performances.

En conclusion, M. René Galy-Dejean a considéré que l’ensemble de ces évolutions ne lui permettait pas d’exprimer une satisfaction totale. Il a toutefois reconnu que le projet de budget, pour ce qui concerne la dissuasion nucléaire, était moins mauvais que le précédent et s’en est remis à la sagesse de la Commission pour l’avis qu’elle devait émettre sur l’adoption des crédits.

Evoquant la menace de prolifération nucléaire en Algérie mentionnée par le rapporteur pour avis et soulignant qu’il était impossible de rester insensible à une telle éventualité, le Président Paul Quilès lui a demandé s’il pouvait présenter les éléments objectifs qui l’avaient conduit à la prendre en considération.

 

M. René Galy-Dejean a répondu que l’Algérie disposait d’une centrale nucléaire en activité, installée dans des confins difficilement accessibles, ce qui rendait sans doute malaisé son contrôle par l’Agence internationale pour l’énergie atomique. Il a précisé qu’on était à peu près certain que cette centrale avait la capacité de fabriquer du plutonium et de l’uranium enrichi. Il a fait valoir que l’Algérie pouvait avoir bénéficié aussi de concours extérieurs, dans la mesure où elle entretenait des relations suivies avec des pays disposant de la capacité nucléaire, notamment la Chine. S’agissant des capacités balistiques, il a rappelé que, lors de son exposé sur le projet de loi de finances pour 1998, il s’était déclaré dubitatif sur l’efficacité de l’accord de non-prolifération que les Etats-Unis avaient passé avec la Corée du Nord et jugé que les événements ne lui avaient pas donné tort. Il a ajouté que rien n’empêchait que l’Algérie puisse recevoir une aide extérieure en matière balistique. Tout en soulignant qu’il formulait l’espoir que ses craintes ne soient pas fondées, il a expliqué aussi qu’il était nécessaire d’envisager le cas le plus dangereux, et, eu égard à des ambitions sinon manifestes, du moins connues, il a estimé que le risque était réel, en l’absence de pressions internationales adéquates, de voir l’Algérie accéder à la capacité nucléaire et jugé que ce danger devait être pris en compte.

 

M. Guy-Michel Chauveau a d’abord fait savoir que le Groupe socialiste considérait que les moyens affectés à la dissuasion par le projet de loi de finances pour 1999 garantissaient sa crédibilité en application du concept de stricte suffisance. Il a ensuite demandé des précisions sur l’avancement du programme PALEN de simulation des essais nucléaires.

 

M. René Galy-Dejean a convenu qu’en effet, la question était bien celle de la crédibilité de la dissuasion. Estimant qu’actuellement et jusqu’en 2010, cette crédibilité était totale, il a cependant souligné que seule une analyse des facteurs de danger dans le monde d’ici 15 à 20 ans pouvait permettre de déterminer si la France consentait l’effort suffisant pour la préserver à long terme. Il a par ailleurs jugé que les crédits affectés au laser mégajoule, c’est-à-dire au système destiné à permettre à la France de tester ses capacités nucléaires à partir de 2006 et surtout de 2010, pouvaient être considérés comme satisfaisants.

 

Le Président Paul Quilès, rappelant que la Commission allait examiner à partir du début de l’année prochaine la question de la prolifération nucléaire, a souligné que le rapport pour avis que M. René Galy-Dejean venait de présenter constituait une contribution utile et pertinente à cette réflexion.

 

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La Commission a ensuite examiné les crédits de la Gendarmerie pour 1999, sur le rapport de M. Georges Lemoine, rapporteur pour avis.

M. Georges Lemoine a jugé que le projet de budget de la Gendarmerie pour 1999 permettait à celle-ci de faire face à la tâche prioritaire qui est la sienne, de participer aux missions de sécurité. Il a toutefois noté qu’il convenait de lire ce budget avec le souci de la nuance, certains agrégats budgétaires se présentant en demi-teinte, voire en camaïeu.

Il a tout d’abord évoqué le décret du 18 août 1998 relatif à la mobilité, soulignant que cette réforme, qui aurait pu être ressentie comme contraignante, était, d’après les vérifications qu’il avait pu opérer sur le terrain, bien vécue, notamment par les jeunes gendarmes. Il a fait observer que les modalités souples d’application prévues, notamment le fait que la mobilité pouvait s’effectuer dans le cadre du département et que la mesure entrerait en application très progressivement, avaient permis à cette nouvelle règle d’entrer rapidement dans les moeurs.

Evoquant le redéploiement des effectifs de police et de Gendarmerie, il a rappelé qu’un compromis avait été trouvé sur ce point entre le ministère de l’Intérieur et le ministère de la Défense, notamment grâce au soutien du Président Paul Quilès. Il a précisé que le rapport établi sur cette question par MM. Roland Carraz et Jean-Jacques Hyest, gardait toute son actualité mais restait un document de réflexion quelle qu’en soit l’utilité. Il a relevé que les discussions sur les modalités du redéploiement avaient repris dans chaque département où elles étaient animées par le préfet et rappelé que M. Guy Fougier avait entrepris la tournée des départements concernés par ce problème afin de mener une étude précise sur le terrain.

S’agissant du projet de budget de la Gendarmerie pour 1999, M. Georges Lemoine a rappelé que les effectifs y étaient fixés à 82 493 militaires d’active et personnels civils, conformément aux objectifs de la programmation militaire 1997-2002. Evoquant ensuite le remplacement progressif des appelés par des volontaires, il a indiqué qu’il conviendrait de gérer au mieux cette évolution en ciseaux, les volontaires gendarmes adjoints venant se substituer peu à peu aux gendarmes auxiliaires. S’agissant du premier contingent de volontaires, il a rappelé que 800 postes avaient été ouverts par anticipation dès 1998, afin de commencer dès cette année le recrutement des 3 000 gendarmes adjoints prévus par le projet de budget pour 1999. Il a relevé que la montée en puissance du volontariat conduirait d’un effectif de 3 000 en 1999 à 16 232 en 2002, et constituerait un test de la capacité de la Gendarmerie à recruter des jeunes en fonction des critères qu’elle a déterminés. Il a souligné la nécessité de fixer à un niveau suffisant la capacité d’accueil des centres d’instruction des gendarmes auxiliaires (CIGA), la durée de formation des volontaires étant supérieure à celle des gendarmes auxiliaires, dans la mesure où une formation militaire devait leur être dispensée en plus de la formation spécifique au métier de gendarme. Il s’est interrogé sur la capacité des écoles de Gendarmerie à assurer cette formation, au regard notamment de l’évolution du nombre des volontaires à former et du nombre d’écoles existantes.

Rappelant qu’une brigade avait, pour fonctionner, besoin de moyens adéquats, il a observé que le budget de fonctionnement des formations baisserait de 98 millions de francs et précisé que cette baisse était justifiée par la diminution du coût des carburants et, pour 60 millions de francs, par l’application de ratios conduisant au calcul d’une dotation individualisée par gendarme dont il n’avait pu obtenir les critères d’élaboration auprès du ministère de l’Economie et des Finances. Il a, à ce propos, indiqué qu’en 1997, la durée de travail quotidienne des gendarmes s’était établie en moyenne à 9 heures 8 minutes par jour. Il a relevé en outre que le nombre de jours de déplacement des escadrons de Gendarmerie mobile avait atteint un record en 1997, rappelant que le cadre général de fonctionnement de ces unités était encore constitué par le plan Vigipirate.

En dépit des observations qu’il avait formulées, le rapporteur pour avis a proposé à la Commission de la Défense de donner un avis favorable à l’adoption des crédits.

Regrettant les contraintes pesant sur les dotations de fonctionnement de la Gendarmerie hors rémunérations et charges sociales, le Président Paul Quilès a demandé si des charges indues avaient pu être identifiées dans le budget de l’arme.

Après avoir rappelé que le rapporteur pour avis avait exprimé de vives inquiétudes lors de l’audition du Directeur général de la Gendarmerie nationale, M. Robert Poujade s’est interrogé sur sa présentation en clair-obscur des crédits de la Gendarmerie. Il s’est demandé si, après avoir indiqué que ces crédits lui apparaissaient en demi-teinte, il pouvait les approuver sans nuance. Il a indiqué que le groupe RPR ne pourrait émettre qu’un avis réservé tant que le rapporteur pour avis du budget de la Gendarmerie ne paraîtrait pas rassuré.

 

M. Guy-Michel Chauveau a fait observer que les problèmes que la Gendarmerie rencontrait au quotidien étaient sans doute la contrepartie des créations de poste qui rendaient plus difficile la maîtrise des dépenses de fonctionnement hors rémunérations et charges sociales. Il a alors considéré qu’il convenait d’appeler l’attention davantage sur la qualité de la gestion des moyens financiers que sur leur niveau. Enfin, il a regretté la méthode utilisée dans l’application des redéploiements internes de la Gendarmerie.

 

M. Pierre-Claude Lanfranca a souhaité avoir des précisions sur le recrutement de 800 volontaires en 1998, le Ministre de la Défense l’ayant présenté comme une anticipation sur la programmation alors que le Directeur général de la Gendarmerie nationale avait précisé lors de son audition que cet effectif de 800 venait en déduction des 3 000 premiers postes de volontaires ouverts en 1999.

 

M. Georges Lemoine a apporté les éléments de réponse suivants :

— la Gendarmerie a apuré ses dettes, notamment à l’égard d’Air France ;

— le coût d’entretien des brigades territoriales a été estimé par le ministère du Budget par comparaison avec celui des unités de police. Il sera nécessaire à l’avenir d’examiner avec attention le mode de calcul et l’évolution des crédits de fonctionnement courant de ces brigades ;

— l’attention du Ministre de la Défense a été appelée sur la réduction des moyens de fonctionnement des unités et sur les conséquences des fermetures de brigades territoriales ;

— dans le cadre de la politique de sécurité, les crédits de maintien de l’ordre en faveur de la Gendarmerie seront augmentés de 70 millions de francs en 1999 ;

— l’autorisation de recruter en 1998 près de 800 volontaires est cohérente avec l’objectif de 16 200 volontaires dans la Gendarmerie fin 2002. L’embauche de volontaires en 1998 correspond à une anticipation par rapport aux effectifs budgétaires fixés pour 1999. Une des questions essentielles soulevées par le projet de budget a trait à la capacité des six centres d’instruction des gendarmes auxiliaires (CIGA) à accueillir des volontaires.

 

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La Commission a enfin examiné les crédits des Services communs pour 1999, sur le rapport de M. Michel Meylan, rapporteur pour avis.

Soulignant que les Services communs du ministère de la Défense poursuivaient la réforme qui leur permettrait, à l’issue de la loi de programmation militaire 1997-2002, d’inscrire leur action dans le nouveau système de défense, M. Michel Meylan a précisé que l’avis qu’il présentait, au nom de la Commission de la Défense, serait consacré à quatre de ces services, la Délégation générale pour l’armement, le Service de santé, le Service des essences et la nouvelle Délégation à l’information et à la communication.

S’agissant de la Délégation générale pour l’armement, le rapporteur pour avis a rappelé que, depuis le 19 janvier 1997, ce service était engagé dans un processus de réforme profond, qui touchait tant son organisation que ses méthodes de travail. Il a estimé qu’alors que la nouvelle DGA entrait dans sa troisième année de fonctionnement, il pouvait être intéressant de dresser un premier bilan des réformes déjà mises en oeuvre, tout en soulignant qu’elles étaient loin d’être achevées, l’ensemble des nouveaux modes de fonctionnement devant avoir été mis en application en 2002.

M. Michel Meylan a rappelé que l’année 1998 avait été consacrée à l’introduction des nouveaux modes de fonctionnement et à la définition de systèmes d’information communs à l’ensemble de la DGA, que ce soit en matière de gestion, dans le domaine comptable ou encore des ressources humaines. Jusqu’alors, la DGA fonctionnait selon un mode éclaté qui ne permettait pas d’avoir une vue d’ensemble sur les activités menées. La définition des nouveaux modes de fonctionnement devrait être achevée à la fin de l’année 1998, leur entrée en vigueur étant déjà effective dans la plupart des cas.

En matière de relations avec les industriels, M. Michel Meylan a relevé que le partenariat stratégique proposé par la DGA était également en cours d’instauration et que cinq commandes pluriannuelles avaient été notifiées, la sixième, qui concerne le Rafale, semblant en bonne voie.

Le rapporteur a indiqué que, pour 1999, l’objectif de la DGA était de poursuivre la mise en place des systèmes d’information sur les coûts des programmes ou l’évolution des ressources humaines, par exemple, ainsi que le redéploiement des personnels vers certaines spécialités jusqu’alors trop délaissées telles que l’achat ou le contrôle de qualité.

M. Michel Meylan a souligné que cette réforme ne s’était pas faite sans difficultés et qu’il avait notamment fallu, pour la mettre en oeuvre, revoir tous les outils comptables et de gestion des crédits d’équipement. Il a noté que la concomitance de ces nombreux changements avait entraîné des retards dans le démarrage de la gestion 1998 qui devrait se traduire par un taux de consommation médiocre. Il a insisté sur la nécessité de maîtriser les changements, relevant qu’il n’était pas concevable qu’une réforme administrative et comptable, même majeure, hypothèque les conditions d’équipement des armées.

Le rapporteur pour avis a alors examiné les résultats des premières mesures mises en application.

Il a estimé que l’évolution du coût de la DGA constituait un premier indicateur de suivi, la réforme ayant pour objectif avoué, outre la baisse du coût des programmes, la réduction du coût de la DGA elle-même. Il a relevé que le projet de loi de finances pour 1999 faisait apparaître une réduction des dotations budgétaires de la DGA, dont le titre III baisse de 3,5 %, passant de 6,7 milliards de francs à 6,47 milliards de francs. Quant aux crédits d’investissement dont la DGA assure le gouvernorat, c’est-à-dire sur lesquels elle dispose d’un pouvoir décisionnel, ils baissent également pour s’établir à 11,623 milliards de francs, du fait du transfert du gouvernorat des crédits des domaines du nucléaire et de l’espace vers l’état-major des armées

Le rapporteur pour avis a jugé qu’il était difficile de porter une appréciation sur la réforme à partir des seuls éléments budgétaires, qui ne sont pas représentatifs du véritable coût de structure généré par les activités propres de la DGA. Il a noté, par exemple, que les articles budgétaires supportent des dépenses qui ne sont pas liées à l’activité de la DGA, comme la rémunération de personnels gérés par la DGA, mais qui ne sont pas employés par elle. D’un autre côté, le coût budgétaire de la DGA ne prend pas en compte des dépenses pourtant directement liées à son activité, telles que la rémunération des personnels militaires d’active qu’elle emploie mais qui sont rémunérés par les armées. Il a indiqué que la DGA, jugeant que ce coût budgétaire ne pouvait dès lors servir de référence pour une politique volontariste et maîtrisée de réduction des coûts de structure, qui constitue l’un des objectifs majeurs de la réforme menée depuis 1997, avait défini un coût d’intervention représentatif des dépenses générées par son intervention dans le système de défense.

M. Michel Meylan a fait observer qu’il avait, dans son intervention de l’année dernière, noté le caractère peu compatible de la notion de coût d’intervention avec le contrôle budgétaire. Il a toutefois noté avec satisfaction l’effort de clarification et d’explication fait par la DGA sur cette notion et plaidé en faveur d’une transparence accrue de la part d’une institution qui a longtemps cultivé l’opacité. Il s’est, à cet égard, félicité que, pour la première fois en 1998, la DGA ait publié un rapport sur ses activités.

Il a indiqué que le coût d’intervention de la DGA avait diminué de 13,2 % en valeur courante entre 1995 et 1997, passant de 7,6 à 6,6 milliards de francs, que, pour 1998, il s’établissait à 6,6 milliards de francs et que les prévisions pour 1999 s’établissaient entre 6,2 et 6,3 milliards de francs. Pour l’essentiel, cette diminution a été obtenue sur les dépenses de fonctionnement et d’investissement technique, qui ont diminué de 24 % en valeur courante, les charges de personnel ayant été réduites de façon plus modérée (- 2,6 % en valeur courante depuis 1996).

M. Michel Meylan a ensuite examiné l’évolution des réductions de coûts obtenues sur les programmes d’armement qui constituent le deuxième indicateur de suivi de la réforme. Le nombre de programmes suivis en contrôle de gestion est passé de 45, au début de 1997, à 81, au 30 juin 1998. A cette date, les réductions de coûts acquises s’élevaient à 41 milliards de francs. Elles sont actuellement de 43,5 milliards de francs, l’objectif d’économies à réaliser d’ici à la fin de 1998 étant de 47,6 milliards de francs.

Le rapporteur pour avis a estimé qu’au total, les deux indicateurs de suivi de la réforme, que sont l’évolution du coût d’intervention de la DGA et les réductions de coût opérées sur les programmes, conduisaient à porter un jugement prudent. Il a jugé que l’évolution du coût d’intervention présentée par la DGA était plutôt satisfaisante, mais que, pour atteindre l’objectif fixé en 2002 d’une réduction de ce coût de 30 %, elle devra faire un réel effort sur le volume des rémunérations et charges sociales, qui en représente un peu plus de 50 %. Il a notamment fait observer qu’elle ne pourra pas échapper à la résorption des sureffectifs de personnels ouvriers, estimés entre 700 et 800 personnes pour la seule DGA étatique. S’agissant de l’impact de la réforme de la DGA sur la réduction du coût des programmes, il a noté qu’elle était plus délicate à estimer. Prenant l’exemple de la réduction opérée sur le coût du missile M51, il a relevé que si les réunions de travail menées avec les industriels dans la nouvelle approche intégrée avaient sans doute eu un impact, le facteur-clé d’économie était la réduction des délais de développement, élément extérieur à la réforme de la DGA.

Au total, il a jugé que la réforme engagée depuis janvier 1997 constituait bien l’amorce d’un changement radical, dont témoigne notamment le transfert du gouvernorat des crédits du nucléaire et de l’espace de la DGA vers l’état-major des armées, la DGA rompant ainsi symboliquement avec une tradition historique qui remontait à sa création en 1961.

Evoquant la mise en place de structures européennes en matière d’offre industrielle d’armement, il a relevé que la DGA avait été un architecte important de la transformation de l’OCCAR (Organisation conjointe de coopération en matière d’armement), dotée depuis le 9 septembre de la personnalité juridique. Faisant observer qu’il restait à voir comment les principes fondateurs de l’OCCAR (règle de mise en concurrence, abandon du principe de juste retour industriel) allaient être mis en oeuvre, il a estimé qu’en tout état de cause, la montée en puissance de cette organisation remodèlerait nécessairement les modes d’intervention de la DGA dans le secteur industriel.

Après avoir souligné que les services de soutien s’étaient engagés sur la voie de la professionnalisation, M. Michel Meylan a évoqué le mouvement de déflation des personnels relevant du Service de santé, dont l’effectif global devrait descendre, selon les prévisions, à 13 400 personnes en 2002. Il a remarqué que cette baisse générale sera néanmoins nuancée selon les emplois. Après avoir précisé qu’un nouveau statut de fonctionnaire civil sera proposé, en 1999, aux personnels paramédicaux relevant des spécialités dites non " projetables ", il a constaté la stabilité de la participation du Service de santé aux opérations extérieures. Rappelant les préoccupations exprimées devant la Commission, par le Général Jean-Pierre Kelche, Chef d’état-major des armées, sur la situation des effectifs des personnels civils, M. Michel Meylan a relevé qu’un certain nombre de postes étaient vacants dans le Service de santé qui atteignait un niveau d’étiage inquiétant. Il a indiqué que le projet de budget de ce service pour 1999 s’élevait à 1,84 milliard de francs et était marqué par une diminution de 7 %, due principalement à la chute des dépenses de fonctionnement et d’alimentation.

M. Michel Meylan a également indiqué que le projet de budget du Service des essences pour 1999 s’élevait à 560,4 millions de francs et présentait une hausse globale de 6,5 %, qui s’expliquait par le recrutement d’une centaine de militaires du rang et le rééquilibrage des crédits d’équipement, justifié par des travaux de mise en conformité de l’ensemble des installations pétrolières classées.

M. Michel Meylan a enfin évoqué la récente création de la Délégation à l’information et à la communication de la Défense (DICOD) qui prend la relève du SIRPA. Après avoir précisé que cette délégation avait compétence pour conduire la politique générale de communication du ministère, il a présenté ses crédits de fonctionnement et d’équipement qui s’élèvent à 62,5 millions de francs en 1999, soit une augmentation de 3,3 % liée à une légère hausse des crédits d’infrastructure. Il a souligné que la Délégation devait s’engager rapidement sur la voie de la professionnalisation puisqu’elle est confrontée à l’extinction de sa ressource en spécialistes issus du contingent.

Relevant que le Chef d’état-major des armées avait, lors de la réforme des services de communication du ministère de la Défense, obtenu que l’information opérationnelle soit maintenue au sein de l’état-major des armées, M. René Galy-Dejean s’est demandé si des crédits spécifiques pour les besoins de cette information opérationnelle avaient été prévus ou s’ils seraient prélevés sur le budget du nouveau service d’information du ministère de la Défense.

 

M. Michel Voisin s’est déclaré inquiet quant à l’avenir du fonctionnement du Service de santé des armées, au regard de la perte de compétences que constitue la disparition progressive des médecins appelés. Il a demandé au rapporteur pour avis combien de médecins seraient engagés pour remplacer ces derniers. Il s’est notamment interrogé sur la manière dont fonctionnerait le nouveau Service de santé des armées dans le cadre des opérations extérieures, les anciens appelés constituant jusqu’alors une réserve susceptible d’être rappelée en cas de besoin.

 

M. Robert Gaïa s’est associé à la question posée par M. Michel Voisin sur le Service de santé des armées.

Après avoir indiqué qu’il ne disposait pas d’information sur le budget consacré au système d’information opérationnelle pour 1999, M. Michel Meylan a apporté les éléments de réponse suivants :

— 23 postes supplémentaires de médecin sont prévus dans le projet de loi de finances pour 1999, la cible pour 2002 étant au total de 109 postes de médecin ;

— la question de l’emploi des personnels réservistes du Service de santé sera traitée dans le futur projet de loi sur les réserves.



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