ASSEMBLÉE NATIONALE

 

 

 

 

COMMISSION des LOIS CONSTITUTIONNELLES,
de la LÉGISLATION et de
l’ADMINISTRATION GÉNÉRALE de la RÉPUBLIQUE

 

 

 

 

 

 

COMPTE RENDU N° 8

(Application de l'article 46 du Règlement)

 

 

 

 

Mercredi 28 octobre 1998
(Séance de 16 heures 30)

 

 

 

 

 

Présidence de Mme Christine Lazerges, vice-présidente

 

 

 

 

SOMMAIRE

 

 

 

 

 

pages

– Audition de M. Emile Zuccarelli, ministre de la Fonction publique, de la réforme de l’Etat et de la décentralisation, sur :


• les crédits de son ministère pour 1999 .........................................................................................

2

• le projet de loi relatif aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations (n° 900) ........................................................................................................................................


2

– Projet de loi de finances pour 1999 : Fonction publique

• Avis : Fonction publique ............................................................................................................

8

– Projet de loi de finances pour 1999 : Intérieur

• Avis : Collectivités locales..........................................................................................................

9

 

 

La Commission a procédé à l’audition de M. Émile Zuccarelli, ministre de la Fonction publique, de la réforme de l’Etat et de la décentralisation, sur les crédits de son ministère et sur le projet de loi relatif aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations (n° 900).

Avant de présenter le budget de son ministère, dont la modestie s’explique par l’importance de ses missions transversales, le Ministre a souhaité présenter les grandes orientations définies dans les domaines de la fonction publique, de la réforme de l’Etat et de la décentralisation.

S’agissant de la fonction publique, il a indiqué que la priorité avait été donnée au dialogue social et rappelé qu’un accord salarial avait été signé en février dernier avec cinq organisations syndicales représentant la majorité des fonctionnaires. Il a déclaré que cet accord, qui concerne 5 millions d’actifs et 4,2 millions de retraités, donnait la priorité aux bas salaires et préservait le pouvoir d’achat de l’ensemble des fonctionnaires grâce à une revalorisation des traitements de 1,3 % par an pour les années 1998 et 1999. Il a précisé qu’il permettait également d’améliorer l’action sociale interministérielle, notamment grâce à une augmentation des dotations destinées aux crèches, à l’aide ménagère, aux logements sociaux ou aux chèques vacances, de reconduire le congé de fin d’activité et de l’étendre aux fonctionnaires âgés de 56 ans ayant cotisé pendant 40 ans, 12.500 agents de l’Etat ayant bénéficié de cette disposition en 1997. Il a ajouté que cet accord prévoyait la constitution de plusieurs groupes de travail sur les pensions d’invalidité, les frais de déplacement et l’articulation du congé de fin d’activité avec la cessation progressive d’activité et évoquait la question de temps de travail, sur laquelle M. Jacques Roché, conseiller maître à la Cour des comptes, doit rendre prochainement un rapport, l’objectif dans ce domaine étant de resserrer les écarts avec le secteur privé.

S’agissant de la résorption de l’emploi précaire, le Ministre a indiqué que deux années après la loi du 16 décembre 1996, près de 16.000 agents sur les 43.000 prévus avaient été titularisés, des retards ayant cependant été constatés parmi les agents de catégorie C. Il a annoncé que des réflexions étaient engagées sur l’insertion des personnes handicapées, sur la mobilité des fonctionnaires, notamment entre les différentes fonctions publiques et sur la gestion des ressources humaines. Il a enfin évoqué le rapport demandé à Mme Colmou sur la parité entre les hommes et les femmes dans la fonction publique.

Evoquant la réforme de l’Etat, le Ministre a précisé que les orientations sur ce sujet avaient été définies lors du Conseil des ministres du 5 novembre 1997 et du comité interministériel du 26 février dernier.

Il a indiqué que les conclusions du groupe de deux cents hauts fonctionnaires chargés de réfléchir à la manière de rendre l’Etat plus proche des citoyens lui avaient été remises en juillet dernier, soulignant que l’un des thèmes principaux était l’amélioration de la coordination des services déconcentrés de l’Etat. Il a annoncé que les préfets auraient la possibilité de choisir les modalités de déconcentration les plus adaptées à leur département et fait état de la volonté du Gouvernement de poursuivre la déconcentration des décisions individuelles.

Evoquant le projet de loi relatif aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, le Ministre a souligné qu’il contribuerait à rendre l’Etat plus accessible. Observant qu’il se situait dans le prolongement du projet de loi déposé lors de la précédente législature, il a indiqué que ce texte permettrait de réduire la complexité des normes, d’accélérer les décisions administratives, d’accroître les pouvoirs du Médiateur de la République et de renforcer l’assise juridique des maisons des services publics et précisé qu’il impliquait l’ensemble des administrations et pas seulement les services de l’Etat.

Abordant les politiques mises en œuvre pour améliorer l’efficacité de l’Etat, il a annoncé que chaque ministère devait remettre avant la fin de l’année un programme pluriannuel de modernisation qui rendrait possible une contractualisation sur plusieurs années des moyens de chaque ministère, ce qui permettrait de sortir du cadre trop étroit de l’annualité budgétaire. Il a fait état d’une relance des procédures d’évaluation, indiquant qu’un décret prévoyant la création d’un conseil national de l’évaluation composé de quatorze membres, parmi lesquels on comptera des élus locaux, sera prochainement publié. Il a précisé que ce conseil proposera un programme d’évaluation qui sera définitivement arrêté par le Premier ministre et déterminera les organismes habilités à procéder à de telles évaluations.

Evoquant l’intégration de l’Etat dans la société de l’information, il a reconnu que la fonction publique avait été très en retard face aux évolutions récentes, notamment dans le domaine informatique, et a annoncé que le paiement par carte bleue serait possible dès la fin 1999 dans les administrations.

Abordant la question de la décentralisation, le Ministre a indiqué qu’il n’y aurait pas de nouveau texte d’ensemble, mais simplement un approfondissement, à travers le projet de loi d’orientation pour le développement durable du territoire, le projet de loi relatif à l’intercommunalité, qui crée notamment une taxe professionnelle d’agglomération, et le projet de loi sur l’intervention économique des collectivités locales. S’agissant de ce dernier texte, il a précisé que son objet était de permettre aux collectivités locales de se mettre en conformité avec les règles européennes et les observations de la Cour des comptes en supprimant les distinctions entre les aides directes et indirectes, en assouplissant les possibilités d’intervention des collectivités locales, les aides départementales et communales n’étant plus subordonnées à l’intervention préalable de la région, tout en encadrant ces interventions par des règles prudentielles qui permettent d’éviter de mettre en danger les finances locales. Il a ajouté que le projet de loi contribuerait également à clarifier les relations entre les collectivités locales et les sociétés d’économie mixte. Il a enfin évoqué le rapport de M. Rémy Schwartz sur la fonction publique territoriale, soulignant qu’il était nécessaire d’en moderniser les règles de recrutement et de formation.

Présentant le budget de son ministère pour 1999, le Ministre a indiqué que les crédits de la fonction publique étaient restés stables avec un montant total de 1,464 milliard de francs. Il a souligné que les crédits d’action sociale demeuraient à un niveau élevé, avec 905 millions de francs en 1999 contre 636 millions de francs en 1997, ce qui permettrait de consacrer une dotation spécifique aux sections régionales interministérielles qui favorise la déconcentration de l’action sociale, d’augmenter les sommes destinées aux chèques vacances et de prévoir 15 millions de francs pour l’insertion des personnes handicapées. Il a annoncé que les opérations interministérielles de formation déconcentrées bénéficieraient de 34 millions de francs, les subventions de fonctionnement des établissements de formation progressant quant à elles légèrement afin de prendre en compte l’augmentation du nombre des élèves. Il a enfin précisé que le fonds pour la réforme de l’Etat connaîtrait une progression de 112,5 à 115,3 millions de francs en crédits de paiement afin d’améliorer les services rendus aux usagers et les outils de gestion.

En conclusion, le Ministre a rappelé que son ministère avait avant tout un rôle d’impulsion et de coordination et que la réforme de l’Etat était encore loin d’être achevée. Il a souligné la nécessité de restaurer la confiance de l’administration et de vaincre les rigidités traditionnelles pour adapter les besoins exprimés à l’évolution de la société. Il s’est, enfin, engagé à poursuivre les efforts en vue d’un emploi plus efficient des fonds publics.

 

Plusieurs commissaires sont ensuite intervenus.

M. Christian Paul, rapporteur des crédits de la fonction publique, a tout d’abord mis l’accent sur la reprise du dialogue social de la fonction publique, attestée par la signature de l’accord salarial intervenu en février 1998. Après avoir estimé que la progression du budget pour 1999 était satisfaisante, il a souhaité que soit accentuée la réforme de l’Etat et notamment que soit amélioré le maillage territorial des services de l’Etat, de sorte que les besoins des usagers soient mieux satisfaits.

 

Mme Claudine Ledoux, rapporteuse du projet de loi relatif aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, a rappelé que dans le cadre de ses fonctions elle avait déjà procédé à un vaste travail de concertation. Elle a ensuite interrogé le ministre sur le titre du projet de loi, estimant que la référence aux seuls citoyens pouvait apparaître comme réductrice dans la mesure où l’ensemble des usagers et administrés sont concernés. Elle a ensuite souhaité connaître la raison pour laquelle le projet de loi fait de la procédure des décisions implicites de rejet la procédure de droit commun alors que le précédent projet de loi avait choisi de substituer à ce principe celui des décisions implicites d’acceptation. Elle s’est ensuite interrogée sur la portée de l’article 8 du projet de loi, qui donne prééminence aux dispositions de la loi du 17 juillet 1978 relative à la liberté d’accès aux documents administratifs, sur celle de la loi du 6 janvier 1978 relative à l’informatique et aux libertés. Constatant que le champ des documents exclusivement communicables aux intéressés est appelé à se réduire, elle a exprimé la crainte que certaines données protégées aujourd’hui soient susceptibles d’être demain communiquées à des tiers.

 

M. Robert Pandraud a tout d’abord souligné les limites du budget de la fonction publique, observant que les principales décisions sont de la compétence des administrations gestionnaires et surtout du ministère des finances. Tout en considérant que la France connaissait une suradministration dans des domaines d’activité en voie de régression, il s’est inquiété de la sous-administration effective observée dans les administrations en contact avec les usagers, évoquant en particulier les services préfectoraux. S’agissant de la réforme de l’Etat, M. Robert Pandraud a posé le problème de la superposition des échelons administratifs, considérant qu’il faudrait choisir à terme entre la région et le département. En ce qui concerne les réformes des horaires dans la fonction publique, il a estimé que celles-ci étaient faciles à mettre en œuvre dans les administrations centrales mais qu’elles posaient de redoutables problèmes d’application dans les services devant assurer des permanences, en particulier dans la police ou dans la fonction publique hospitalière. Après avoir interrogé le ministre sur le coût de l’ensemble des concours organisés dans la fonction publique, il s’est demandé si l’on ne pourrait envisager un système comparable aux juridictions prud’homales, ayant compétence à l’égard des fonctionnaires des catégories B et C, afin d’alléger la charge des tribunaux administratifs.

Précisant qu’il ne souhaitait pas la suppression de l’Ecole nationale d’administration, il a cependant indiqué qu’il était opposé au recrutement direct des membres des grands corps de l’Etat parmi ses élèves. Il a exprimé le souhait que ceux-ci soient recrutés directement dans les administrations, soulignant que, dans la situation actuelle, la plupart d’entre eux exerçaient leur activité à l’extérieur des corps auxquels ils s’étaient destinés.

 

M. René Dosière a souhaité connaître le point de vue du ministre sur la prise en charge croissante des recettes fiscales des collectivités territoriales par l’Etat, estimant que cette tendance pouvait conduire à remettre en cause les principes de la décentralisation posés en 1982. Il a ensuite évoqué la situation particulière de l’E.N.A., dont le site le plus récent semble être, selon la Cour des comptes, le moins utilisé et s’est demandé, en conséquence, s’il n’était pas temps d’appliquer effectivement la décision prise par Mme Edith Cresson de transférer cette école à Strasbourg.

Observant que le ministre de la fonction publique, de la réforme de l’Etat et de la décentralisation jouait un rôle d’impulsion et de coordination, M. Bernard Derosier l’a interrogé sur la politique qu’il souhaitait conduire en matière de réduction du temps de travail dans la fonction publique. Constatant que le financement des collectivités locales reposait de moins en moins sur les recettes de la fiscalité et de plus en plus sur le produit des dotations de l’Etat, il a souhaité savoir comment seraient financés les coûts engendrés par la diminution du temps de travail au sein des services des collectivités territoriales. Par ailleurs, tout en reconnaissant le bien fondé des revendications syndicales sur la défense des emplois statutaires, il a insisté sur la difficulté de pourvoir par concours certains emplois spécifiques et a souhaité que le contrôle de légalité des préfets soit moins rigoureux et permette de recourir davantage à des emplois contractuels. Abordant la question de la taxe professionnelle, il a considéré que les collectivités locales étaient satisfaites de la compensation par l’Etat du coût de la réforme. Il a cependant fait part de ses doutes sur l’évolution de la part des dotations de l’Etat dans le financement de ces collectivités, soulignant qu’elle remettait en cause le principe d’autonomie des collectivités locales.

Estimant à 10.000 le nombre de bénéficiaires potentiels, M. Jacky Darne a jugé très positif l’abaissement de l’âge du congé de fin d’activité de 58 à 56 ans. Il s’est toutefois interrogé sur le calendrier d’application de cette réforme. Il a par ailleurs souhaité connaître l’état d’avancement des programmes pluriannuels de modernisation de l’administration et le sentiment des organisations syndicales sur ce sujet. Il a ensuite fait part de ses interrogations sur le rôle de coordination du préfet, évoquant le manque de concertation et de transversalité entre les différents services déconcentrés. Abordant la question de la fiscalité locale, il s’est interrogé sur l’articulation de la réforme de l’assiette de la taxe professionnelle et de la mise en place d’une taxe professionnelle unique d’agglomération, ainsi que sur la portée incitative de cette mesure en matière d’emploi. Considérant enfin que l’assouplissement des conditions de recours aux emplois contractuels n’était pas souhaitable, il a cependant admis que le concours n’était pas, dans certains cas spécifiques, le mode de recrutement le plus adapté. Il a donc souhaité que la possibilité d’effectuer un recrutement sur titres, pour certaines missions précises, soit ouverte.

 

M. Renaud Donnedieu de Vabres a jugé que le développement de la contractualisation entre l’Etat et les collectivités locales avait abouti à une confusion systématique des compétences, participant de la crise de la responsabilité et de la paralysie de l’action publique. Regrettant l’absence de réorganisation des administrations centrales depuis l’instauration des transferts de compétences résultant des lois de décentralisation, il a souhaité qu’un bilan précis des transferts d’activités et de personnels entre l’Etat, les services déconcentrés et les collectivités locales soit établi. Il a enfin déploré que les contrats de plan, privilégiant les questions financières, n’intègrent pas dans les programmes qu’ils définissent les moyens humains nécessaires à leur mise en œuvre.

 

M. Emile Blessig a remarqué que de nombreuses communes n’avaient pas les moyens suffisants pour financer des emplois correspondant néanmoins à leurs besoins réels. Il s’est interrogé sur la possibilité pour ces collectivités de s’associer afin de procéder aux recrutements qu’elles estiment nécessaires.

 

En réponse aux différents intervenants, le Ministre a apporté les éléments d’information suivants.

—  Le Gouvernement a réamorcé le dialogue social avec les fonctionnaires en leur rappelant leurs devoirs, notamment au regard de la nécessaire modernisation du service public, mais également en considérant qu’ils sont, par leur rôle, au cœur du pacte républicain.

—  La modernisation de l’Etat doit s’accélérer, notamment dans les administrations déconcentrées qui représentent 95 % des effectifs de la fonction publique étatique, 75 % des décisions prises par l’Etat et 2/3 des crédits budgétaires.

—  L’évolution du service public doit être conduite dans la concertation en portant une attention particulière aux lieux où le tissu social est le plus fragilisé, notamment en milieu rural.

—  Dans le titre du projet de loi relatif aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, le terme de citoyen peut apparaître plus restrictif que celui d’usager ou d’administré. Néanmoins, le mot " citoyen " sous-tend une attitude moins passive et une implication plus forte vis-à-vis du service public. Pour ce qui concerne le principe du rejet implicite, ce projet de loi prévoit que des décrets permettront de faire évoluer la liste des cas dans lesquels le silence de l’administration vaut approbation, comme c’est actuellement le cas pour l’octroi des permis de construire. Le projet de loi ne porte nulle atteinte aux droits des personnes concernées par des données nominatives présentes dans des documents administratifs ou des fichiers informatiques, mais vise simplement à harmoniser les dispositions contenues dans la loi sur la C.A.D.A. et celle relative à la C.N.I.L.

—  Si l’on entend parfois dire que la France est suradministrée et souffre d’une hypertrophie de sa fonction publique, parallèlement, nombreux sont ceux qui considèrent qu’il n’y a pas suffisamment de professeurs, d’infirmières ou de policiers. Les besoins en matière de service public sont par nature illimités. C’est pourquoi face à ces aspirations contradictoires, le Gouvernement a choisi de stabiliser les effectifs, ce qui n’interdit pas néanmoins un certain nombre de redéploiements pour faire face à des missions ou des besoins nouveaux. Dans ce cadre, le Gouvernement entend en particulier améliorer la présence des fonctionnaires dans les administrations dites de guichet, c’est-à-dire celles qui sont directement au contact du public.

—  En matière de réduction du temps de travail, il est clair que l’on ne peut transposer le mécanisme de la " loi Aubry " à la fonction publique de manière totalement homothétique. Il est important de prendre en compte, au sein de la fonction publique, la diversité de situations et le principe d’équité doit présider à l’ensemble du mouvement de réduction du temps de travail dans le secteur public. Il est difficile, pour l’heure, de préciser la façon dont la réduction du temps de travail s’appliquera à l’administration et en particulier comment les collectivités locales pourront ou non bénéficier d’une aide de l’Etat pour financer cette réduction.

—  Le Gouvernement n’entend pas procéder à une " recentralisation rampante ", notamment par le biais d’une augmentation de la contribution de l’Etat aux ressources des collectivités territoriales. L’autonomie de ces collectivités tient plus à la liberté qu’elles ont d’utiliser les ressources dont elles disposent qu’à l’origine de celles-ci. Ainsi, aux Pays-Bas, où la décentralisation est particulièrement poussée, la majeure partie des ressources des collectivités locales provient de contributions de l’Etat.

—  Concernant la délocalisation de l’E.N.A., la situation a pu apparaître à certains moments confuse et affectée par un climat passionnel. Certes, il faut constater quelques surcoûts regrettables relevés à bon droit par la Cour des comptes, mais la double localisation à Strasbourg et à Paris ne constitue pas une situation irrégulière. Un certain nombre de rapports ont été commandés sur les conditions de préparation des concours ou la scolarité. En attendant le résultat de ces études, il est difficile d’apporter une réponse plus précise à la question du transfert complet de l’E.N.A. à Strasbourg.

—  Les concours pour les catégories B, C et D seront, de plus en plus, organisés à un niveau interministériel afin d’abaisser leur coût.

—  Pour ce qui est du recrutement de contractuels par les collectivités locales, il n’est évidemment pas envisageable d’appeler les préfets à la modération dans l’exercice du contrôle de légalité. Néanmoins, on observe que ce contrôle n’est pas à l’heure actuelle d’une rigueur excessive puis, que le nombre de contractuels employés par les collectivités territoriales représente encore un tiers de leurs effectifs. Il convient d’être prudent en tout état de cause avant de remettre en question le principe du concours qui est au centre du respect de l’équité républicaine.

—  Le financement de l’élargissement du congé de fin d’activité et de sa prorogation pour 1999 résultera d’amendements à la loi de finances pour 1999 et à la loi de financement de la sécurité sociale.

—  Pour la mise en œuvre des programmes pluriannuels de modernisation, il est envisagée de permettre aux ministères d’étaler les crédits sur cinq ans.

—  Les préfets verront leur rôle mieux défini pour assurer une meilleure coordination de l’action de l’administration à l’échelon local. Leur responsabilité sera importante pour faire émerger les projets locaux tant à l’échelon départemental que régional.

—  En ce qui concerne la réforme de la taxe professionnelle, il peut apparaître paradoxal qu’on diminue le produit de cette taxe alors que, parallèlement, on entend promouvoir l’intercommunalité par l’instauration de la taxe professionnelle unique d’agglomération. Néanmoins, il reste 100 milliards de francs de taxe professionnelle à percevoir, soit plus de 60 % de celle-ci.

*

* *

 

La Commission a ensuite procédé, sur le rapport de M. Christian Paul, à l’examen pour avis des crédits du ministère de la Fonction publique, de la réforme de l’Etat et de la décentralisation pour 1999.

M. Christian Paul, rapporteur pour avis, a tenu à saluer l’accord salarial du 10 février dernier qui, tout en débouchant sur une revalorisation des rémunérations des fonctionnaires en général et des traitements les moins élevés de la fonction publique en particulier, a permis de relancer le dialogue social avec les organisations syndicales. S’agissant du budget de la Direction générale de la fonction publique, le rapporteur a indiqué qu’il s’élevait à un peu de moins de 1,5 milliard de francs. Après avoir relevé que les dépenses d’équipement d’action sociale interministérielle étaient créditées de 255 millions de francs, il s’est réjoui de la prorogation du congé de fin d’activité, ouvert désormais dès 56 ans et a mis à l’actif du Gouvernement l’introduction d’un congé-formation mobilité et l’attribution de droits sociaux aux agents non titulaires.

Evoquant la modernisation de l’administration, il a estimé que la suppression du Commissariat à la réforme de l’Etat au profit d’une délégation interministérielle à la réforme de l’Etat ne devait pas être perçue comme une régression, dans la mesure où l’élan de départ du Commissariat avait marqué ensuite le pas. Il s’est félicité du dépôt devant le Parlement du projet de loi renforçant les droits des citoyens dans leurs relations avec l’administration et des conclusions du rapport du contrôleur d’Etat Baquiast, qui, en plaidant pour l’introduction de nouvelles technologies d’information et de communication dans l’administration, constitue un nouvel angle d’approche de la modernisation de l’Etat.

Regrettant cependant que ce budget ne s’attache pas suffisamment à résorber la précarité dans la fonction publique et à réformer la formation de ses cadres, il a conclu en jugeant que la méthode et le rythme de la réforme de l’Etat n’étaient pas totalement satisfaisants, et en exprimant la crainte que l’on ne soit passé d’une approche interministérielle excessive à une conception ministérielle peut-être trop étroite, alors qu’un équilibre pouvait être trouvé entre ces deux démarches.

La Commission a ensuite été saisie d’un amendement du rapporteur et des commissaires du groupe socialiste, réduisant la subvention de fonctionnement à l’E.N.A. de 16 millions de francs. Faisant valoir que ce chiffre correspondait à l’évaluation du surcoût de la double localisation de l’école par la Cour des comptes en 1997, le rapporteur a jugé cette charge injustifiée pour la collectivité et indiqué que cette initiative permettrait de relancer un débat, amorcé au cours du débat budgétaire l’année dernière, sur la réforme attendue de cette institution, qui devrait acquérir une dimension européenne plus affirmée, être un vecteur de la formation continue des cadres de la fonction publique et le lieu d’échanges accrus avec les fonctionnaires territoriaux.

Mme Christine Lazerges, présidente, a estimé que si l’E.N.M. avait bien réussi sa délocalisation, il n’y avait pas de raison qu’il n’en aille pas de même pour l’E.N.A.

La Commission a adopté cet amendement et, suivant son rapporteur, a émis un avis favorable à l’adoption des crédits des services généraux du Premier ministre, fonction publique, pour 1999.

*

* *

 

La Commission a enfin procédé, sur le rapport de M. René Dosière, à l’examen pour avis des crédits du ministère de l’Intérieur pour 1999 : Collectivités locales.

M. René Dosière, rapporteur pour avis, a indiqué que le budget des collectivités locales pour 1999 était marqué par la sortie du pacte de stabilité et par l’entrée en vigueur du contrat de croissance et de solidarité. Il a expliqué que, dans ce cadre, les principaux concours de l’Etat aux collectivités locales évolueraient en fonction de la croissance et que la dotation de compensation de la taxe professionnelle jouerait, comme par le passé, le rôle de variable d’ajustement. A cet égard, il a fait remarquer que cet ajustement serait modulé afin de ne pas pénaliser les collectivités défavorisées bénéficiant de dotations de péréquation. Jugeant que ce budget était bon en termes quantitatifs, il a émis des réserves sur les conséquences de la réforme de la taxe professionnelle en matière de compensation. Il a ainsi considéré que la part croissante des financements de l’Etat dans les finances locales était peu compatible avec l’esprit de la décentralisation. Il a en outre estimé que la révision des valeurs locatives prises en compte dans le calcul de la taxe d’habitation devrait faire l’objet d’un texte soumis à la commission des Lois et a estimé que la présentation de cette réforme dans le cadre de la prochaine loi de finances rectificative ne permettrait pas, compte tenu des délais impartis, de procéder à son examen dans des conditions satisfaisantes.

 

M. Jacky Darne a considéré que le maintien, pour les communes éligibles à la dotation de solidarité urbaine, du niveau de la dotation de compensation de la taxe professionnelle, risquait de rendre moins attractif le régime de taxe professionnelle unique institué par le projet de loi relatif à l’intercommunalité. Il s’est par ailleurs interrogé sur les conséquences pour les contribuables de la réforme de la taxe d’habitation ainsi que sur l’année de référence fixée pour l’estimation des valeurs locatives.

 

Conformément aux conclusions du rapporteur pour avis, la Commission a émis un avis favorable à l’adoption des crédits du ministère de l’Intérieur pour 1999 : collectivités locales.



© Assemblée nationale