ASSEMBLÉE NATIONALE
COMMISSION de la DÉFENSE NATIONALE et des FORCES
ARMÉES
COMPTE RENDU N° 14
(Application de l'article 46 du Règlement)
Mardi 24 novembre 1998
(Séance de 11 heures)
Présidence de M. Paul Quilès, Président
SOMMAIRE
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Projet de loi
de finances rectificative pour 1998 (n° 1210) |
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- Audition de M. Alain Richard, Ministre de la DéfenseEspace, Communication et
Renseignement (M. Bernard Grasset, rapporteur)
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- Information relative à la Commission
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La Commission a entendu M. Alain Richard, Ministre de la
Défense, sur le projet de loi de finances rectificative pour 1998 (n° 1210).
Rappelant que le montant des crédits de paiement annulés sur les
dépenses en capital du ministère de la Défense dans le cadre des décrets davance
et du projet de loi de finances rectificative sélevaient à près de
7,4 milliards de francs, le Président Paul Quilès a ajouté que les
ouvertures de crédits demandées en contrepartie, qui sétablissaient globalement
à 4,5 milliards de francs (dont 3,8 milliards de francs accordés par le
décret davance du 21 août dernier et 0,7 milliard de francs prévu par le
projet de loi de finances rectificative) permettraient, selon ses informations, de
pourvoir à des besoins de financement liés à une insuffisance de dotations initiales ou
à la nécessité dapurer la contribution de la France aux organismes de
lOTAN. Il a demandé au Ministre de la Défense de préciser ces éléments, en
apportant à la Commission toute autre information quil jugerait utile.
Souhaitant dresser un tableau densemble, M. Alain Richard
a indiqué quà louverture, au titre III, de 700 millions de francs
dans le projet de loi de finances rectificative sajouteraient 175 millions de
francs prévus au titre dun décret de virement complémentaire à paraître.
Lobjectif de ces abondements au profit, essentiellement, de lArmée de terre
et de la Gendarmerie est de réduire les reports de charges sur le titre III.
Le Ministre de la Défense a rappelé que le décret davance du
21 août 1998 avait déjà permis dapurer les reports de charges constatés sur
les rémunérations. Lensemble des mesures dinscription de nouveaux crédits
permettra ainsi de commencer le prochain exercice avec un minimum de reports de charges.
Le retard de contribution de la France à lAlliance atlantique qui sélève à
215 millions de francs et représente presque léquivalent dune année de
versement sera, en particulier, soldé. Laccroissement récent de cette contribution
sexplique par les charges nouvelles liées au partenariat pour la paix, à
lélargissement de lOTAN et à la modernisation de ses infrastructures.
Abordant les annulations de crédits déquipement qui
sélèveront, en crédits de paiement, comme le Président Paul Quilès la
rappelé, à près de 7,4 milliards de francs sur lensemble de lexercice
(dont 3,86 milliards de francs en août et 3,2 milliards de francs dans le cadre
du projet de loi de finances rectificative), M. Alain Richard a estimé quen
données nettes, leur total était ramené à moins de 3,6 milliards de francs en
raison de la reprise de 3,8 milliards de francs sur les reports de crédits de 1997
à 1998. Il a fait observer que ce montant net se situait en retrait par rapport aux
annulations opérées au cours des exercices précédents sur les crédits
déquipement (11,9 milliards de francs en 1995, près de 8,5 milliards de
francs en 1996 et 5 milliards de francs en 1997). Il a expliqué que la réforme de
la comptabilité des investissements avait abouti, pendant les quatre premiers mois de
lannée, à un faible niveau dengagement des crédits déquipement et a
annoncé que, malgré limportant effort de consommation réalisé depuis, un montant
appréciable de dotations serait reporté sur lexercice 1999.
Il a conclu en soulignant que la contribution du ministère de la
Défense au rétablissement des comptes de lEtat sopérait sans nuire à la
gestion du ministère.
M. François Lamy a demandé des précisions sur les reports de
charges attendus sur lexercice 1999. Il a également estimé que la présentation
des annulations sur les titres V et VI de la Défense était ambiguë dans la mesure
où elles apparaissaient, en partie, comme le gage des ouvertures demandées au budget des
charges communes au titre de la recapitalisation de GIAT-Industries.
M. Alain Richard a précisé que le montant des reports de
charges sur 1999 ne devrait pas excéder 200 à 300 millions de francs au titre des
rémunérations et charges sociales et quil serait significativement inférieur à 1
milliard de francs sur le titre III. Il a indiqué quen accord avec le ministère de
lEconomie et des Finances, le ministère de la Défense avait commencé à réduire
les fonds davances destinés au paiement régulier des rémunérations des
personnels et quil avait été décidé de les ramener, fin 1998, du niveau actuel
de 10,2 milliards de francs à 7,1 milliards de francs. Il a estimé que, sur
les 81 milliards de francs de crédits de paiement initialement votés au titre des
dépenses en capital, environ 77 milliards de francs auront été disponibles alors
que 70 milliards de francs seulement pourront être consommés. Le montant des
reports de crédits de paiement de 1998 à 1999 devrait, dans ces conditions, être de
lordre de 7 milliards de francs.
M. Alain Richard a alors contesté la présentation selon laquelle
la recapitalisation de GIAT-Industries qui atteindra un montant global de
5,7 milliards de francs au début de 1999 était gagée par une partie des
annulations opérées sur les crédits déquipement du ministère de la Défense. Il
a rappelé que les deux précédentes décisions de recapitalisation de ce groupe
industriel avaient été prises sans lien avec les annulations de crédits
déquipement militaire. Il a également précisé que le montant de
5,7 milliards de francs prévu pour la recapitalisation de GIAT-Industries serait
atteint grâce à deux opérations : un versement de 2,5 milliards de francs en
provenance du budget des charges communes sur lexercice 1998 et une dotation de
3,2 milliards de francs sur le compte daffectation spéciale, alimenté par les
produits de la cession des titres détenus par lEtat, sur lexercice 1999. Il a
alors souligné quà ses yeux, il ny avait pas déquivalence entre des
annulations qui avaient pour objet de reprendre des dotations qui ne sont pas susceptibles
dêtre consommées pendant lexercice budgétaire et une recapitalisation qui
consistait, pour lEtat actionnaire, à assumer ses responsabilités en abondant les
fonds propres des entreprises publiques qui en ont besoin.
M. René Galy-Dejean a toutefois fait observer quil
était difficile de ne pas établir de lien entre les annulations de crédits sur le
budget de la Défense et les apports en capital en faveur de Giat Industries et de ne pas
y voir un phénomène de vases communicants entre le budget des charges communes et les
crédits militaires.
Reprenant le constat quil avait formulé lors de la présentation
du projet de budget de la Défense pour 1999, il a regretté que le ministère de la
Défense ne bénéficie pas des rentrées fiscales supplémentaires et doive, au
contraire, subir une réduction nette de ses crédits. Sagissant des dotations non
consommées, il a redouté que le niveau de dépenses en capital de 70 milliards de
francs attendu par le Ministre de la Défense pour lexercice 1998 ne soit
interprété, à lavenir, comme létiage souhaitable pour le budget
déquipement des armées. Après avoir souligné la baisse continue des dépenses
effectives déquipement militaire, il sest inquiété de cet effet pervers de
la non-consommation des crédits disponibles.
M. Michel Voisin a souhaité connaître la nature des besoins de
financement qui motivaient linscription, dans le projet de loi de finances
rectificative, dune dotation de 225 millions de francs en faveur de la
Gendarmerie.
M. Alain Richard a apporté les éléments de réponse
suivants :
il est nécessaire que la perception de GIAT-Industries
évolue, y compris au Parlement : GIAT-Industries nest pas un service du
ministère de la Défense mais une entreprise. Cest en son sein que sont prises les
décisions concernant sa gestion ;
il est intéressant de constater que, dans le cadre des
mesures de restructuration de lindustrie darmement, le produit de la cession,
par lEtat, de titres des entreprises de ce secteur devrait, en 1999, venir abonder
les recettes du compte daffection spéciale destiné à retracer ce type
dopérations.
on ne peut considérer que les crédits effectivement
consommés en 1998 définissent un niveau détiage souhaitable pour le budget
déquipement de la Défense, dont le montant a été clairement fixé par le Premier
Ministre, avec lassentiment du Président de la République, à la suite de la revue
de programmes. Il est important toutefois que le ministère de la Défense confirme sa
capacité à consommer ses crédits dans le délai imparti, ce qui passe par une
amélioration du circuit de la dépense et par lévolution du lien entre les
armées, la Délégation générale pour larmement et les entreprises. Si elle est
difficile, la situation actuelle crée cependant un effet de levier favorable à une
amélioration de la gestion des crédits. Lors de lexécution de la loi de finances
initiale pour 1999, il conviendra de faire la preuve, par une consommation efficace des
crédits, de la pertinence du niveau fixé pour le budget déquipement militaire ;
il ne serait pas rationnel dafficher des crédits
déquipement en hausse quand on sait pertinemment quils ne seront pas tous
consommés. Au contraire, les ouvertures de crédits prévues par le collectif
correspondent à de réels besoins en matière de fonctionnement ;
le projet de loi de finances rectificative et le décret de
virement prévu dans les tous prochains jours viendront abonder le titre III de la
Gendarmerie dun montant global de 355 millions de francs, soit
200 millions de francs pour les loyers, 60 millions de francs pour le
fonctionnement courant et 95 millions de francs pour lalimentation.
M. Alain Richard a ensuite présenté les opérations extérieures
conduites par la France, tant dun point de vue budgétaire que dans leurs aspects
juridiques et opérationnels.
Il a fait observer que les surcoûts liés aux opérations extérieures
diminuaient de manière significative en 1998 par rapport à lexercice précédent,
puisquils devraient sétablir à 2,1 milliards de francs contre
3,45 milliards de francs en 1997. Il a rappelé que les quatre cinquièmes de ces
surcoûts étaient constitués de dépenses de rémunérations et de fonctionnement. Il a
estimé que 80 % de la baisse observée entre 1997 et 1998 sexpliquaient par la
modification du dispositif militaire extérieur et par la réforme du régime indemnitaire
des personnels qui y participent. Sagissant du dispositif militaire extérieur, il a
rappelé quétait supprimée la force prépositionnée en République Centrafricaine
et que napparaîtrait en conséquence dans les surcoûts, en 1998, quun
reliquat de dépenses liées à son démantèlement graduel et à la participation de la
France à la Mission de maintien de la paix des Nations Unies dans ce pays (MINURCA).
Sagissant de lévolution du régime indemnitaire des personnels servant en
opérations extérieures, il a relevé que son impact pouvait être évalué à
500 millions de francs à structure constante par rapport à 1997 et à
350 millions de francs en tenant compte du changement de périmètre en 1998. Il a
donné lexemple de la rémunération dun capitaine, père de deux
enfants : léconomie est, selon le pays daffectation, de 27 % pour
le Liban, de 16 % pour la République Centrafricaine et de 14 % pour la
Bosnie-Herzégovine. Le Ministre de la Défense a estimé nécessaire dadopter une
approche réaliste du niveau des surrémunérations, qui tienne compte du risque et de la
pénibilité des missions remplies par les personnels envoyés en opérations extérieures
sans représenter pour autant des primes injustifiées. Il a estimé que cette réforme
intervenait au moment le plus favorable, le nouveau contexte de la professionnalisation,
qui conduit à une augmentation du nombre des régiments susceptibles de participer à des
opérations extérieures, nécessitant lélaboration de nouvelles règles.
Il a alors indiqué que la France était actuellement engagée dans
huit opérations de maintien de la paix, cette expression qualifiant les opérations qui
ont été expressément décidées par une résolution du Conseil de Sécurité de
lONU et qui relèvent, pour leur conduite, du Département des Opérations de
Maintien de la Paix de cette organisation. Il en a ensuite donné le détail :
la FINUL (Force intérimaire des Nations Unies au Liban),
créée en application de la résolution n° 425 du 19 mars 1978, et déployée
pour confirmer le retrait des forces israéliennes du Liban sud et assister le
Gouvernement libanais dans la reprise effective du contrôle de cette région, dont le
mandat est régulièrement renouvelé et au sein de laquelle figurent 257 militaires
français ;
la MINURCA (Mission des Nations Unies en République
Centrafricaine), instituée par la résolution n° 1159 du 27 mars 1998, dans le but
de fournir des conseils et un appui technique aux pouvoirs publics centrafricains en vue
de lorganisation des élections législatives, dont le mandat a été reconduit
jusquen février 1999 et à laquelle participent 240 militaires
français ;
la MINUBH (Mission des Nations Unies en
Bosnie-Herzégovine) créée par la résolution n° 1035 du 15 décembre 1995 et
instituant un groupe international de police chargé de former et dassister les
forces de police locale, qui compte 119 gendarmes français ;
la MINURSO (Mission des Nations Unies pour le Référendum
au Sahara occidental), décidée en avril 1991 par la résolution n° 690, dont le
déploiement a commencé en septembre 1991 après lentrée en vigueur du
cessez-le-feu afin den contrôler la mise en uvre, et à laquelle la France
fournit 25 observateurs ;
la MIPONUH (Mission de Police civile des Nations Unies en
Haïti), chargée pour une période dune année, par la résolution n° 1141 du
28 novembre 1997, daider le Gouvernement haïtien à créer une force de
police, à laquelle participent 24 gendarmes français ;
la MONUA (Mission dObservation des Nations Unies en
Angola), déployée en application de la résolution n° 1118 du 30 juin 1997,
avec le mandat dobserver le cessez-le-feu et de consolider la paix et la
réconciliation nationale, qui comprend 13 observateurs français ;
la MONUIK (Mission dObservation des Nations Unies
pour lIrak et le Koweït), soumise à réexamen tous les six mois et dont le mandat,
défini par la résolution n° 687 du 3 avril 1991 et élargi par la résolution
n° 806 de février 1993, est dassurer le contrôle de la zone démilitarisée
entre lIrak et le Koweït. La France lui fournit un détachement de
11 militaires ;
la MONUG (Mission dObservation des Nations Unies en
Géorgie), créée par la résolution n° 858 daoût 1993 et chargée
dobserver laccord de cessez-le-feu conclu entre les Abkhazes, la Géorgie et
la Russie, à laquelle participent cinq observateurs français.
M. Alain Richard a précisé que les charges supportées à
loccasion de ces opérations faisaient lobjet de remboursements partiels de la
part de lONU, mais que ceux-ci intervenaient généralement avec un décalage de
deux années.
Il a ensuite indiqué que la France était également engagée dans
cinq opérations dont la conduite est déléguée à des commandements internationaux par
le Conseil de Sécurité des Nations Unies :
laction menée par la SFOR pour mettre en uvre
les aspects militaires de laccord de paix en Bosnie-Herzégovine et y favoriser un
retour à la normale des activités politiques et économiques. Cette mission fait
lobjet dun réexamen semestriel. Un détachement français de 3 714
hommes y participe ;
lopération Southern Watch visant à
interdire à lIrak lutilisation de ses moyens aériens et antiaériens au sud
du 32ème parallèle et à laquelle contribuent 174 militaires
français ;
la Mission dobservation de la Communauté européenne
et de lOSCE en ex-Yougoslavie, qui a un triple rôle dobservation, de
médiation et de compte rendu, et à laquelle participent 46 militaires
français ;
lElément multinational de Conseil en matière de
Police, qui a pour mission de participer à la restructuration et à la formation de la
police albanaise, et qui comprend 14 militaires français ;
la Force multinationale et dobservateurs au Sinaï,
chargée depuis avril 1982 de contrôler la bonne application du traité de paix de Camp
David entre Israël et lEgypte, et au sein de laquelle quatorze officiers et
sous-officiers français sont présents.
Enfin, le Ministre de la Défense a indiqué que la France avait
conduit en 1998, jusquau mois daoût, seize opérations sous commandement
national, notamment en Afrique, en vue dassurer le maintien de la paix, la
sécurité des ressortissants français, le respect des accords de défense ou le
désengagement des forces françaises. Il les a ensuite énumérées :
la protection de lambassade de France en Algérie,
la sécurisation du Cameroun (opération Aramis),
le soutien logistique de la Mission interafricaine de
Surveillance des accords de Bangui (MISAB) ;
laccompagnement du désengagement des éléments
français dassistance opérationnelle en République Centrafricaine. Cette action a
fait lobjet de trois opérations successives ;
la protection de lambassade et du consulat de France
à Brazzaville,
lévacuation des ressortissants français au Congo,
lopération Malachite dévacuation des
ressortissants français du Zaïre depuis Brazzaville ;
une mission de présence maritime dans le Golfe de
Guinée ;
la mission Epervier au Tchad,
la mission Iskoutir dassistance humanitaire à
Djibouti,
deux missions de rapatriement du contingent béninois
présent au Libéria,
la sécurisation de lambassade de France en
République Centrafricaine,
la protection des ressortissants français et de
lambassade de France en Guinée-Bissau.
Après sêtre félicité de la " première "
intéressante que constituait la présentation globale devant la Commission de
lensemble des opérations extérieures dans lesquelles la France est engagée, le
Président Paul Quilès a souligné que, si elle pouvait apparaître un peu comme un
" inventaire à la Prévert ", cette présentation nen
permettait pas moins de mieux apprécier limportance de la charge financière qui en
résultait. Il a, à ce propos, souhaité savoir si les crédits demandés dans le cadre
du projet de loi de finances rectificative permettraient de couvrir la charge résultant
des nouvelles opérations au Kosovo.
M. Alain Richard a indiqué que les crédits destinés au
contingent dobservateurs français, constitué denviron 150 personnes,
devraient être imputés sur les budgets civils.
M. Michel Voisin a demandé quelle était la participation
actuelle de la France à la mission de vérification au Kosovo et sil était prévu
dy affecter des réservistes.
Le Ministre de la Défense a précisé que le nombre
dobservateurs français actuellement mis à la disposition de la mission de
vérification sélevait à quinze. Il a souligné cependant que cette mission
demandait des délais de mise en uvre importants pour des raisons logistiques, les
2 000 observateurs devant être répartis entre cinq centres principaux. Il a ajouté
que, dores et déjà, le ministère de la Défense et celui des Affaires
étrangères avaient prévu de recourir à un certain nombre de réservistes. Il a
indiqué que le coût de la participation française à cette mission pourrait
sélever, en année pleine, à 50 millions de francs pour 200 observateurs,
soit environ 10 millions de francs pour les 50 observateurs militaires actuellement
prévus. En revanche, le déploiement des 750 militaires qui participeront à la
force de sécurisation des observateurs de 1 700 hommes, sous encadrement
français, entraînera un surcoût annuel de lordre de 350 à 400 millions de
francs. Le Ministre de la Défense a cependant fait observer que, si la mission des
observateurs pouvait permettre un bon déroulement des négociations sans reprise des
violences, il était possible que le dispositif de sécurisation, qui doit être revu tous
les six mois, soit allégé après juin 1999.
Sintéressant au contrôle aérien exercé par la France
au-dessus du territoire irakien, dans le cadre de lopération multinationale Southern
Watch, M. René Galy-Dejean a souhaité savoir comment, au cas où les
Etats-Unis auraient lancé loffensive quils avaient préparée à
lencontre de lIrak, les forces françaises auraient pu ne pas sy trouver
mêlées.
M. François Lamy sest demandé sil
nétait pas contestable de continuer à présenter comme opération extérieure, à
la fois en termes de missions et en termes budgétaires, lopération Epervier
au Tchad. Il a souligné, à ce propos, la nécessité de distinguer de manière plus
rigoureuse entre forces prépositionnées, opérations extérieures normales et
opérations extérieures exceptionnelles.
Faisant ensuite remarquer que les sondages relatifs aux prochaines
élections gabonaises nétaient pas très favorables au Président Bongo, il a
demandé si lon pouvait craindre une évolution défavorable de la situation
politique au Gabon et si les forces françaises prépositionnées dans ce pays ne
risquaient pas de sy trouver impliquées du fait de la convention franco-gabonaise
sur le maintien de lordre.
Le Président Paul Quilès, précisant que lopération Epervier
avait été décidée en 1986 comme une opération de frappe aérienne limitée dans le
temps pour contrer les menées militaires libyennes au Tchad et quelle avait
notamment consisté, au départ, dans le bombardement de laérodrome de Ouadi-Doum,
a souligné que son maintien douze ans après, toujours sous le même statut, suscitait
des interrogations.
Le Ministre de la Défense a apporté les éléments de réponse
suivants :
lopération Southern Watch, est une opération
de surveillance aérienne dont le déroulement ne donne lieu, en général, à aucune
friction. La définition des missions, qui sont en effet exercées conjointement avec
dautres pays, fait lobjet danalyses fines du ministère de la Défense.
Conformément à la politique de la France, les avions français ne vont jamais au-delà
du 32ème parallèle et, lorsque des opérations proprement militaires
sont envisagées, il est convenu que les Français ny participent pas. En tout état
de cause, si la France avait voulu sassocier à loffensive américaine, elle
aurait dû le faire avec dautres moyens que les appareils utilisés pour la
surveillance de lIrak. Ceux-ci sont en effet basés en Arabie Saoudite, pays qui a
refusé doffrir des points dappui pour une opération militaire contre
lIrak ;
sagissant du Tchad, la difficulté est que
lopération Epervier a eu pour objet de combler un vide en matière de
sécurité résultant de la faiblesse des structures politiques et administratives du
pays. Depuis des années cependant, et sous leffet notamment de laction de la
France, la situation du Tchad sest améliorée et sest rapprochée des
conditions qui prévalent dans un Etat organisé, même si éclatent encore ponctuellement
dans ce pays quelques conflits intérieurs dampleur limitée qui attestent de
malaises communautaires et politiques. On sapproche donc du moment où il faudra
constater que les forces françaises stationnées au Tchad ne participent pas à une
opération extérieure mais ont vocation à avoir le statut de forces prépositionnées
dans le cadre dun accord de défense. Le Président Idriss Déby a cependant sa
propre conception de la sécurité de son pays ainsi que du rôle des forces françaises,
à propos duquel on a pu observer parmi les Tchadiens quelques manifestations de
mécontentement. De plus, les autorités tchadiennes ont fait le choix de rompre
lisolement de la Libye, le Président Kadhafi ayant pu se rendre à NDjamena.
Cest pourquoi il ne serait sans doute pas raisonnable que la France se place en
position de demandeur, dautant quil semble ressortir des entretiens entre les
pouvoirs publics français et tchadiens que ceux-ci pourraient demander eux-mêmes la
négociation dun accord de défense ;
la France entretient des forces prépositionnées dans cinq
pays. Pour trois dentre eux, le Sénégal, la Côte dIvoire et le Gabon, il y
a convergence entre les stipulations de laccord et les actions menées. En revanche,
laccord conclu avec Djibouti prévoit que les forces françaises qui y sont basées
ne peuvent être utilisées pour mener des actions hors du pays. Celles qui ont été
conduites dans le passé ont dû faire lobjet à chaque fois dun accord
particulier. Il paraît difficile de demander aux Djiboutiens un élargissement de
laccord, au moment même où la France a décidé une réduction sensible de
leffectif des forces stationnées dans leur pays. Le Tchad est le second cas où une
meilleure mise en convergence de laccord de défense et des actions menées doit
être recherchée ;
il convient déviter quon puisse soupçonner la
moindre immixtion française dans les élections qui vont avoir lieu au Gabon. Les
appréciations recueillies auprès du ministère des Affaires étrangères ne semblent pas
corroborer les sondages évoqués par M. François Lamy et la France ne sattend
pas à une demande du Président gabonais de participation à la surveillance des
prochaines élections. Au contraire, il semble quil existe un projet denvoi
dobservateurs internationaux ;
de façon générale, le Gouvernement ne souhaite pas que
les forces françaises participent à la surveillance délections en Afrique. Il
na accepté quavec beaucoup de réticences la demande de la MINURCA, en
République Centrafricaine, de les déployer hors de Bangui dans ce but. Cinq points
dappui seulement ont été déterminés, assortis de conditions restrictives
demploi.
f
p f p
Information relative à la Commission
La Commission a désigné M. François Lamy, rapporteur
pour avis sur le projet de loi de finances rectificative pour 1998 (n° 1210).
© Assemblée nationale
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